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Droit

commercial
Annalisa De Grandi
Chargée d’enseignement UT1 Capitole

Patrick Posocco
Chargé d’enseignement UT1 Capitole

Laurent Posocco
Maître de conférences en Droit privé UT1 Capitole

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ISBN 9782340063877
©Ellipses Édition Marketing S.A., 2022
8/10 rue la Quintinie 75015 Paris

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Sommaire

Préface 7

LIVRE I
Introduction

PR EMIÈR E PA RTIE

Introduction au Droit commercial

1
Titre – Notion de droit commercial 13
Chapitre 1 : Définition du droit commercial 13
Chapitre 2 : Caractères du droit commercial 16

2
Titre – Sources du Droit commercial 21
Chapitre 1 : Sources nationales 21
Chapitre 2 : Sources supranationales 26
Chapitre 3 : Sources arbitrales 31

DEU X IÈME PA RTIE

Introduction aux institutions commerciales

1
Titre – Institutions commerciales consulaires 35
Chapitre 1 : Tribunaux de commerce 35
Chapitre 2 : Chambres de commerce et d’industrie (CCI) 42

2
Titre – Institutions commerciales non consulaires 45
Chapitre 1 : Institutions non juridictionnelles 45
Chapitre 2 : Institutions juridictionnelles 50

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Sommaire

LIVRE II
Actes en matière commerciale

PR EMIÈR E PA RTIE

Qualification de l’acte

1
Titre – Actes de commerce par nature 57
Chapitre 1 : Actes de commerce en raison de l’objet 57
Chapitre 2 : Actes de commerce accomplis en entreprise 60

2
Titre – Actes de commerce par la forme 65
Chapitre 1 : Lettre de change 65
Chapitre 2 : Sociétés commerciales par la forme 66

3
Titre – Actes de commerce par accessoire 67
Chapitre 1 : Actes de commerce par accessoire subjectif 67
Chapitre 2 : Actes de commerce par accessoire objectif 68

Titre 4 – Actes mixtes 71

DEU X IÈME PA RTIE

Régime de l’acte

1
Titre – Régime des actes de commerce purs 75
Chapitre 1 : Formation des actes de commerce purs 75
Chapitre 2 : Exécution des actes de commerce purs 77

2
Titre – Régime des actes mixtes 83
Chapitre 1 : Principe : régime distributif 83
Chapitre 2 : Exception : régime commun 83

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Sommaire

LIV RE III
Acteurs du commerce

PR EMIÈR E PA RTIE

Professionnels du commerce

1
Titre – Définition du commerçant 89
Chapitre 1 : Définition positive du commerçant 89
Chapitre 2 : Définition négative du commerçant 92

2
Titre – Régime juridique applicable au commerçant 97
Chapitre 1 : Liberté du commerce et de l’industrie 97
Chapitre 2 : Obligations du commerçant 103

DEU X IÈME PA RTIE

Statut du commerçant et de son conjoint

1
Titre – Statut privé du commerçant 109
Chapitre 1 : Commerçant marié 109
Chapitre 2 : Commerçant partenaire d’un Pacte civil de solidarité 112
Chapitre 3 : Union libre 113

2
Titre – Statut professionnel du conjoint participant à l’activité 115
Chapitre 1 : Conjoint associé 115
Chapitre 2 : Conjoint collaborateur 116
Chapitre 3 : Conjoint salarié 117
Chapitre 4 : Absence de statut 118

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Sommaire

LIV RE IV
Fonds de commerce

PR EMIÈR E PA RTIE

Notion de fonds de commerce

1
Titre – Éléments constitutifs du fonds de commerce 123
Chapitre 1 : Clientèle 123
Chapitre 2 : Éléments d’attraction de la clientèle 127

2
Titre – Nature du fonds de commerce 135
Chapitre 1 : Qualification du fonds de commerce 135
Chapitre 2 : Conséquences de la qualification du fonds de commerce 137

DEU X IÈME PA RTIE

Opérations en lien avec le fonds de commerce

1
Titre – Location-gérance du fonds de commerce 141
Chapitre 1 : Conditions de la location-gérance 142
Chapitre 2 : Effets de la location-gérance 143

2
Titre – Bail commercial 147
Chapitre 1 : Domaine d’application du bail commercial 148
Chapitre 2 : Droits et obligations des parties 152
Chapitre 3 : Terme du bail 159

Bibliographie indicative 163

Table des matières 165

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Préface

La pratique du commerce n’est pas son simple exercice, c’est aussi une navigation quoti-
dienne dans un ensemble législatif et réglementaire qui, au gré des principes de précaution,
de prudence et de suivi de l’activité économique, ne cesse de s’étendre et de se complexifier.
Bien des commerçants peinent à trouver le chemin réglementaire dont ils ont besoin pour
éviter les mauvaises surprises. L’ouvrage répond à ce besoin.
Tout en évitant les pièges habituels de la simplification, notamment celui de ­l’éradication
de tout contexte doctrinal, l’essentiel est exposé quant aux cadres juridiques de l’exercice
commercial. Sans rien écarter : on trouve aussi bien la description de la place du droit
­commercial dans les disciplines juridiques de l’activité économique que le statut du ­conjoint
du commerçant, les compétences spécifiques de certains Tribunaux de Commerce que le
régime juridique applicable à l’artisan. Le tout écrit dans une langue simple et accessible à
tous, sans termes savants ou recherchés, permettant une lecture rapide et facile.
Le plan de l’ouvrage se veut aussi pratique : en un seul coup d’œil sur la table des
matières, on trouve très aisément la partie que l’on souhaite consulter et le chapitre ou
même le paragraphe recherché. C’est donc un outil simple et abordable pour la gestion d’un
commerce mais aussi un cadre clair et documenté pour l’étudiant qui souhaite approfondir
ses connaissances, l’ouvrage ne se bornant pas à énoncer les règles mais apportant tout
une bibliothèque de jurisprudences et de littérature juridique complètes, récentes et bien
­documentées. C’est un livre utile et précis.

Jacques RAIBAUT
Ancien Président du Tribunal de commerce de Toulouse
Ancien Président de la Conférence nationale des Tribunaux de commerce
Président d’honneur de la Chambre de médiation, de conciliation et d’arbitrage
d’Occitanie (CMCAO)

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Livre I

Introduction
Par Laurent Posocco

1. Le droit commercial est le reflet juridique de l’économie et de l’histoire françaises. Son


libéralisme, contrarié par un fort interventionniste étatique, n’a jamais permis l’édifica-
tion d’un corpus au contenu idéologique cohérent. Ses traits les plus saillants consacrent
des principes parfois contradictoires. Pour autant, de manière moins paradoxale qu’il n’y
paraît, le droit commercial est une discipline en phase avec les pratiques professionnelles
modernes (Partie 1). Ses institutions, de grande qualité, sont largement soutenues par les
principaux acteurs de l’économie (Partie 2).

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PREMIÈRE PARTIE

Introduction
au Droit commercial
2. Si les commerçants se sont soumis à un droit adapté, c’est d’abord parce que le droit civil
classique ne répondait pas aux exigences de la vie des affaires. Peu à peu, des règles sin-
gulières se sont détachées de ce dernier. Les opérations commerciales doivent en effet
pouvoir être réalisées sûrement et rapidement. La flexibilité requise par la vie économique
suggérait ce mouvement. La notion de droit commercial (Titre 1) et les sources du droit
commercial (Titre 2) ont contribué à l’avènement d’une discipline dérogatoire.

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Première Partie – Introduction au Droit commercial

TITRE 1 – Notion de droit commercial


3. Le droit commercial désigne l’ensemble des normes de droit privé qui encadrent spécifi-
quement les activités de production, de distribution et de service. Au centre du phénomène
économique, le moteur de la vie sociale de toute communauté développée est l’opération
qui crée de nouvelles richesses. L’œuvre commerciale est destinée à satisfaire un besoin
auquel la communauté attribue une valeur économique. Elle est génératrice de biens ou
services. La production est une manifestation de l’action humaine, socialement pertinente,
caractérisée par une complexité profonde, qui se déploie et se développe au fil du temps
et en l’espace. Définir le droit commercial (Chapitre 1) porte nécessairement l’analyse à
le caractériser (Chapitre 2).

CHAPITRE 1
Définition du droit commercial

4. Le droit commercial se définit comme une branche particulière du droit privé. Cette
classification est en elle-même instructive. Elle permet de situer la discipline au cœur de
l’une des deux grandes familles de normes – droit privé et droit public – (Section 1). Elle
doit toutefois être complétée par la différenciation, au sein du droit privé, entre le droit
commercial et d’autres matières proches (Section 2).

Section 1– Droit commercial : critère de classification

5. Le droit commercial est une subdivision du droit privé dont le domaine (§1) et les singu-
larités (§2) doivent être analysées.

§1. Domaine

6. Droit d’exception. Le droit commercial est un droit d’exception. Par dérogation au droit
civil, il se focalise sur certaines activités de production, de distribution et de services.

13

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Livre I • Introduction

Il s’applique à la fois aux commerçants, qu’ils exercent seuls ou en entreprise, et aux


activités commerciales.
7. Droit professionnel. Le droit commercial est également un droit professionnel, issu des
pratiques des marchands. Il s’inscrit dans le domaine des relations professionnelles, de
la même manière que le droit du travail. L’importance du droit commercial, au sein du
droit professionnel, a probablement eu tendance à décroître ces dernières années. Un
certain nombre d’activités professionnelles lui échappent en effet. Trois types d’activités
professionnelles dont l’objet est réputé civil sont soustraits à ce titre à son emprise. Il s’agit
de l’agriculture, de l’artisanat et des professions libérales.

§2. Philosophie

8. Droit d’exception. Théoriquement droit d’exception, le droit commercial connaît toutefois


un succès pratique dans sa mise en œuvre. Que ce soit devant les juridictions consulaires
dont la performance est largement saluée par les entreprises et les justiciables ou devant
les juridictions civiles, le droit commercial fournit en réalité les solutions de principe à la
résolution des litiges d’affaire.
9. Droit professionnel. Droit professionnel régissant la relation de travail, le droit commercial
est toutefois bien différent du droit du travail proprement dit. L’histoire et la philosophie
de ces deux disciplines divergent. Le droit commercial est de création ancienne. Le droit du
travail au contraire, si on le considère comme un ensemble de normes préservant le salarié,
est une discipline apparue au xixe siècle en France. Au sens contemporain du terme, le droit
du travail s’est formé après l’autorisation des syndicats par la loi Waldeck-Rousseau en
1884. L’époque a, en effet, vu l’avènement, avec la révolution industrielle, d’une nouvelle
classe sociale, les ouvriers issus de la paysannerie. La principale caractéristique du droit
commercial n’est toutefois pas liée à la date d’apparition de la matière. Elle résulte surtout
de l’esprit qui l’anime. Là où le droit du travail protège la partie faible, le droit commercial
est habité par une philosophie favorable à la spéculation, aux échanges, à la circulation
des biens et des services.

Section 2 – Droit commercial : critère de distinction

10. La classification du droit commercial comme un droit privé permet de le caractériser mais
pas de le différencier des autres matières appartenant à la même famille de normes. Elle
ne livre qu’une définition minimaliste qu’il convient de compléter. Le droit commercial
doit donc être clairement positionné par rapport au droit civil (§1). Il est également séparé
d’autres familles de normes en lien avec la vie des entreprises (§2).

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Première Partie – Introduction au Droit commercial

§1. Droit commercial et droit commun

11. Le droit civil est le droit commun qui régit les relations commerciales en l’absence de
dispositions spéciales. Ainsi, par exemple, les contrats commerciaux (ex. bail commercial,
location-gérance, cession d’un fonds de commerce, société) doivent respecter les exigences
posées par le droit commun des contrats s’agissant de la négociation1 ou encore de la for-
mation2. Notamment, chaque partie devra remplir les conditions de fond édictées par le
Code civil (ex. capacité juridique, consentement libre et éclairé, contenu licite et certain
de l’obligation). Lorsque des normes dédiées au commerce sont en vigueur, elles reçoivent
bien entendu application.

§2. Droit commercial et disciplines affairistes

A. Droit commercial : discipline mère

12. Régissant des situations diverses, le droit commercial a parfois dû se subdiviser en plusieurs
branches (droit des sociétés, droit des entreprises en difficultés, droit des Instruments de
paiement) dont certaines ont fini par devenir des disciplines à part entière.

B. Droit commercial : composante

13. Le droit commercial est considéré comme étant une composante de familles juridiques
dont le champ est plus vaste. Les matières, citées ci-avant, qui se sont détachées du droit
commercial, font partie de ces ensembles élargis. Par exemple, le droit des entreprises en
difficultés est un domaine du droit des affaires ou du droit de l’entreprise. Ledit droit des
affaires comprend, au-delà du droit commercial général, notamment le droit du crédit,
le droit fiscal, le droit pénal des affaires, le droit de la concurrence, le droit des contrats
commerciaux, etc. Le droit de l’entreprise quant à lui inclut en plus du droit des affaires
le droit de la consommation ou le droit du travail.

1. C. civil, art. 1112 et s.


2. C. civil, art. 1113 et s.

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Livre I • Introduction

CHAPITRE 2
Caractères du droit commercial

14. Le pragmatisme du droit commercial (Section 1), parfois critiqué, lui a permis de s’adapter
aux situations les plus diverses et ceci en dépit de ses origines fort lointaines (Section 2).

Section 1 – Caractère pragmatique

15. Le droit commercial est un droit pragmatique, opportuniste. Il adopte une ligne de conduite
adaptable en fonction des situations concrètes, des circonstances et des objectifs poursuivis.
Et souvent, les lois et décrets intervenus dans le domaine du droit commercial résultent
d’une pratique légalisée ou réformée mais elle est rarement une création ex nihilo. Une
absence de doctrine générale cohérente se dégage d’orientations a priori paradoxales.
Parfois, le droit commercial favorisera la circulation des biens et services ; il sera alors
épuré, déréglementé (§1). D’autres fois, les échanges seront sécurisés par une procédure
formalisée (§2).

§1. Caractère libéral

16. Modes de preuve. La rigueur du droit civil se combinait parfois mal avec la souplesse requise
dans les rapports d’affaires. L’orientation pragmatique prise par la discipline a par exemple
abouti à la libéralisation des règles de preuve, ceci afin de répondre à l’impérieuse nécessité
de rapidité des échanges commerciaux. En droit commercial par dérogation à la règle de
la preuve littérale des actes juridiques, les commerçants peuvent utiliser tous moyens afin
de prouver les actes commerciaux passés entre eux. La formule « tous moyens » ou « tout
moyen » n’inclut bien entendu que les moyens probatoires légaux. Ainsi par exemple, le
témoignage est admis, y compris pour les actes supérieurs à 1 500 euros. Également, sont
acceptés les documents d’affaires (devis accepté, facture, comptabilité du commerçant
régulièrement tenue). Par ailleurs, entre commerçants, c’est le juge qui décide seul de la
force probante des éléments qui lui sont soumis sans avoir à respecter une quelconque
hiérarchie entre les différents modes de preuve.

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Première Partie – Introduction au Droit commercial

§2. Caractère formaliste

17. Sécurisation. Le pragmatisme commercial n’est toutefois pas toujours et partout syno-
nyme d’allègement. Certains contrats tels que le bail commercial, la cession de fonds de
commerce ou sa mise en location gérance obéissent à une réglementation stricte destinée
à garantir la sécurité juridique des opérations. Ces contrats font l’objet d’un formalisme
particulier (ex. mentions obligatoires) et/ou d’une diffusion atypique (ex. publicités). Sans
que la liste ne soit exhaustive, citons quelques exemples :
– La lettre de change doit comporter ad validitatem des mentions particulières (article
L. 511-1 du Code de commerce) ;
– Les marques et brevets doivent être déposées à l’Institut National de la Propriété
Industrielle pour bénéficier d’une protection efficace ;
– Les sociétés doivent être enregistrées au registre du commerce et des sociétés, à défaut
de quoi elles n’auraient pas de personnalité juridique active (art. L. 210-6 du Code
de commerce).

Section 2 – Caractère ancien

18. Les échanges de marchandises se pratiquent depuis l’Antiquité. Toutefois, les règles
observées par les marchands d’alors ne constituaient pas un corpus structuré. Le droit
commercial s’est en effet construit lentement, par étapes. Une approche chronologique
permet ainsi de distinguer le droit commercial tel qu’il était appliqué avant la création
du Code de commerce (§1) et celui qui est en vigueur depuis le Code de commerce (§2).

§1. Droit commercial non codifié

19. La période antérieure au Code de commerce peut se découper schématiquement en deux


époques distinctes : une première phase qui s’étend de l’Antiquité jusqu’au Moyen Âge
(A) et deuxième phase qui va du Moyen Âge à la Révolution française (B).

A. Période : Antiquité – Moyen Âge

20. Antiquité. Le droit commercial, dans son contenu primitif, est apparu en même temps
que le concept de commerce. Or, les civilisations marchandes existent depuis l’Antiquité.
On trouve en effet dans l’Antiquité la trace de règles utiles au commerce :
– les Babyloniens connaissaient le prêt a intérêts, le dépôt ou encore la société ;

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Livre I • Introduction

– les Phéniciens, inventeurs de la monnaie et de l’alphabet, ont développé des techniques


juridiques adaptées au commerce maritime dont certaines furent reprises et perfec-
tionnées par les Grecs (loi du jet a la mer, prêt maritime) ;
– les Mésopotamiens développaient des relations commerciales avec les cités de l’Asie
Mineure, exportant de l’étain et des étoffes, et important de l’or et de l’argent.
21. Les tablettes de Warka (2000 ans av. J.-C.) et le Code d’Hammourabi (1700 av. J.-C.) sont
les plus anciens documents relatifs aux règles commerciales ; ils comportent des éléments
de droit bancaire – comme le prêt à intérêt ou le dépôt d’espèces –, ainsi qu’une préfigu-
ration du droit des sociétés.
Le droit romain, quant à lui, a beaucoup inspiré le droit commercial. La technique juridique
de la vente, ou encore les procédures collectives d’apurement du passif y puisent leurs
racines. Pourtant, les Romains, en dépit de la sophistication de leur droit, ne distinguaient
pas le droit commercial du droit civil.
22. Moyen Âge. La véritable apparition du Droit commercial date en réalité du Moyen Âge. À
cette époque, le commerce connaît un certain essor. À partir des xiie et xiiie siècles, il s’est
développé dans les Républiques du Nord de l’Italie (Gênes, Milan, Venise), en France, en
Flandres (Bruges, Anvers) et en Allemagne (Francfort, Brême, Lübeck). Apparaît alors un jus
mercatorum (droit des marchands) formant un corps autonome de règles. Les marchands
créent entre eux des usages qui dépassent les frontières et acquièrent au fil du temps force
obligatoire. De nouvelles techniques contractuelles (lettre de change, compte courant,
commandite…), procédures d’exécution (faillites), sanctions (banqueroute) ainsi que de
nouvelles institutions (banques, corporations, juridictions de foires) font leur apparition
à cette époque. Les règles appliquées sont souvent marquées par une absence de for-
malisme, due aux besoins de la vie des affaires, laquelle est essentiellement mue par la
recherche du profit, la spéculation, la circulation des richesses, la garantie de rapidité des
transactions, grâce notamment au crédit.

B. Période : Moyen Âge – Révolution française

23. Ancien Régime. Les marchands sont regroupés dans des corporations et des jurandes.
Au xvie siècle sont créées les juridictions consulaires. Au cours de la seconde moitié
du xviie siècle, naissent de nombreuses manufactures royales et de grandes compagnies
de commerce. L’Ordonnance sur le commerce de terre du 23 mars 1673, connue sous le
nom de « code Savary » (du nom du négociant auquel Colbert confia la rédaction du projet
d’ordonnance), constitue un corps de règles dédié aux commerçants et à leur activité. Le
commerce de mer fut quant à lui réglementé par une ordonnance publiée le 31 juillet 1681.
Un projet de révision de l’Ordonnance de 1673 a bien été entrepris sur l’ordre de Miromesnil
mais il n’aboutira jamais. Les croisades puis la découverte du Nouveau Monde sont de
nouvelles opportunités pour développer les échanges.

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Première Partie – Introduction au Droit commercial

24. Période révolutionnaire. Le xviiie siècle a été marqué par le bouillonnement des idées
économiques, les prémices de l’industrialisation, l’expansion du commerce colonial et
la première expérience de la monnaie papier. Le décret d’Allarde des 2 et 17 mars 1791
proclame la liberté du commerce et de l’industrie et la loi Le Chapelier des 14 et 15 juin
1791 abolit les corporations, maîtrises et jurandes. Mais les révolutionnaires ne réforment
pas les lois commerciales de droit privé. Ils suppriment les tribunaux de l’amirauté mais
conservent les tribunaux de commerce. Ils unifient le marché intérieur en réglementant
les poids et les mesures avec une définition du mètre et du gramme.

§2. Droit commercial partiellement codifié

25. En raison de la survenance de faillites et de regrettables spéculations, Napoléon prend


l’initiative en 1806 de préparer un Code de commerce. Celui-ci advient aux termes d’une loi
du 15 septembre 1807. Il comporte alors quatre livres (Livre I sur le commerce en général,
Livre II sur le commerce maritime, Livre III sur la faillite et la banqueroute, Livre IV sur la
juridiction commerciale) et cent quarante-huit articles. Il ne traite nullement des banques
et des sociétés. On distingue généralement deux périodes dans l’évolution moderne du
droit commercial : la première libérale (A), la seconde interventionniste (B). À travers
les diverses époques, l’œuvre n’a jamais vraiment réussi à réglementer l’ensemble de la
discipline commerciale.

A. Période libérale (xixe)

26. Le Code de 1807 révèle rapidement ses insuffisances. Le document, reprenant un « droit
du passé », n’a pas prévu la révolution industrielle qui arrivait. Pour cette raison, de sub­
stantielles modifications durent lui être apportées (lois du 28 mai 1838 et du 4 mars 1889
sur les faillites, loi du 5 juillet 1844 sur les brevets d’invention, loi du 24 juin 1865 sur les
chèques, législation de 1856, 1863, 1867 sur les sociétés). Par ailleurs, son contenu sommaire
appelait certainement des compléments. C’est en dehors du Code de commerce que s’est
construit le droit commercial moderne. Et plutôt que de s’attaquer à un travail salutaire
de recodification, le législateur a multiplié les normes éparses couvrant plusieurs secteurs
de l’économie.

B. Période interventionniste (xxe)

27. Le xxe siècle apporte lui aussi ses réformes. Des décrets sont pris pour réglementer les
faillites (Décrets du 8 août 1935, du 30 octobre 1935 et du 20 mai 1955) avant la grande loi
du 13 juillet 1967. Face à la dispersion des règles commerciales, la question d’une recodi-
fication s’est imposée. En 1947 avait été constituée une commission de réforme. Avant sa
recodification, seuls 33 des articles de 1807 subsistaient. Une ordonnance du 18 septembre

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Livre I • Introduction

2000 recodifie mais elle le fait à droit constant, animée par un conservatisme frileux.
Aucune modification au fond n’a été introduite à cette occasion. Les rares améliorations
ont consisté à consacrer des décisions de principe. L’occasion a probablement été manquée
de construire un nouveau droit commercial. La preuve en est que, depuis cette réforme,
le mouvement de création hors du code s’est amplifié, marginalisant le rôle de l’œuvre
napoléonienne.

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Première Partie – Introduction au Droit commercial

TITRE 2 – Sources du Droit commercial


28. Le Droit commercial comporte des sources nationales (Chapitre 1) et supranationales
(Chapitre 2).

CHAPITRE 1
Sources nationales

29. Les sources nationales du droit commercial comprennent la Constitution (Section 1), la loi
et les règlements (Section 2), la jurisprudence (Section 3) et les usages (Section 3).

Section 1 – Sources constitutionnelles

30. Contenu du bloc de constitutionnalité. Le bloc de constitutionnalité est situé au sommet


de la pyramide des normes. Il contient l’intégralité de la Constitution du 4 octobre 1958,
la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (DDHC) de 1789, le Préambule de la
Constitution de 1946 et la Charte de l’environnement de 2004. En particulier, la liberté du
commerce et de l’industrie intéresse le droit commercial. Depuis 2010, un phénomène de
constitutionalisation du droit commercial apparaît.
31. Principe de la liberté du commerce et de l’industrie. À la fin de l’Ancien Régime,
­l’encadrement des professions par les corporations, maîtrises, jurandes et autres corps
intermédiaires, entravait l’initiative économique et l’innovation. Le contrôleur général des
finances Turgot a œuvré pour libéraliser l’économie. Le principe de la liberté du commerce
et de l’industrie a ensuite été institué par l’article 7 de la loi des 2 et 17 mars 1791 dite « décret
d’Allarde ». Cette liberté a été par la suite confirmée par la loi des 14 et 17 juin 1791 dite « Le
Chapelier » supprimant les corporations. Dans son préambule, la Constitution du 4 octobre
1958 reprend les dispositions du Préambule de la Constitution de 1946 et la déclaration des
droits de l’homme concernant les libertés publiques au premier rang desquelles figure la
liberté du commerce et de l’industrie. La liberté du commerce et de l’industrie résulte de
l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen qui dispose que « la liberté

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Livre I • Introduction

consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui ». La jurisprudence administrative
a reconnu à la liberté du commerce et de l’industrie la qualification de liberté publique
fondamentale1 à valeur constitutionnelle2. La liberté du commerce et de l’industrie désigne
aujourd’hui les conditions d’exercice des activités économiques dans les États se réclamant
du libéralisme. Elle évoque un régime de droit des affaires caractérisé par la liberté d’accès
au marché et la concurrence entre ses acteurs, qui n’exclut pas pour autant l’intervention
régulatrice des autorités publiques.

Section 2 – Sources législatives et réglementaires

32. La première source, législative, permet un débat démocratique au parlement (A). La


seconde source, réglementaire, présente l’avantage de la rapidité (B).

A. Sources législatives

33. En vertu de la Constitution, tout ce qui ne relève pas de la loi relève du domaine du
règlement. Or, l’article 34 de la Constitution énumère de manière limitative les matières
relevant de la loi et donc du Parlement. Sont réservés à la loi, en matière commerciale,
les principes fondamentaux du régime de la propriété, des droits réels et des obligations
civiles et commerciales.
– Exemple : loi n° 2019-486 du 22 mai 2019, art. 169.
Code de commerce, art. L. 235-1 : « […] En ce qui concerne les sociétés à responsabilité limitée
et les sociétés par actions, la nullité de la société ne peut résulter ni d’un vice de consen-
tement ni de l’incapacité, à moins que celle-ci n’atteigne tous les associés fondateurs […] »

B. Sources réglementaires

34. Décret. Les sources réglementaires sont composées des décrets, des ordonnances et des
arrêtés. Selon l’article 34 de la Constitution, des décrets d’application des lois peuvent
intervenir pour préciser les modalités de mise en œuvre des dispositions légales. En dehors
des dispositions de l’article 34, des actes réglementaires dits autonomes, également
appelés décrets peuvent intervenir. Les Décrets d’application (art. 34 de la Constitution)
ne peuvent pas établir de règles contraires de celles de la loi qui les prévoit. En revanche,
les Décrets autonomes (art. 37 de la Constitution) doivent seulement être conformes à la
constitution, aux principes généraux du droit et aux conventions internationales.

1. CE 30 mai 1930, Chambre syndicale du commerce de détail de Nevers, Lebon 583.


2. Cons. const. 16 janv. 1982, n° 81-132 DC.

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Première Partie – Introduction au Droit commercial

– Exemple de décret d’application des dispositions légales : art. réglementaires (art. R.)
du Code de commerce.
– Exemple de décret autonome : titre III livre II du Code de procédure civile dans lequel
figurent les règles de procédure qui s’appliquent en matière commerciale devant les
juridictions consulaires.
35. Ordonnance. L’ordonnance est une source particulière du droit car elle est un acte
­réglementaire qui intervient dans le domaine réservé au législateur, lequel autorise le gou-
vernement à réglementer et ratifie a posteriori les décisions prises (art. 38 de la Constitution).
L’autorisation lui est donnée par le vote d’une loi d’habilitation. Les mesures sont ensuite
soumises à la ratification du Parlement pour acquérir valeur législative. L’ordonnance
de l’article 38 est un acte réglementaire jusqu’à la ratification par le parlement. Après la
ratification, l’ordonnance devient un acte législatif1.
– Exemple : Ordonnance n°2005-428 du 6 mai 2005 relative aux incapacités en matière
commerciale.
36. Arrêté. L’arrêté peut émaner des ministres, des préfets, des maires, des présidents de
conseil départemental ou de conseil régional, mais aussi du président de la République et
du Premier ministre pour organiser leurs services. Les arrêtés sont des actes administratifs
unilatéraux. Ils peuvent cependant avoir plusieurs auteurs. Ainsi, il existe des arrêtés signés
par différents ministres, lorsque ceux-ci interviennent dans le champ de compétence de
plusieurs départements ministériels. De même, il peut exister des arrêtés signés par plu-
sieurs préfets s’ils concernent différents départements. Ces textes administratifs ont une
portée générale et permanente. En général, ils sont précédés par la lettre A. Quelquefois,
un décret renvoie pour la détermination de certaines dispositions à des arrêtés ministériels
ou interministériels.
– Exemple : l’article A. 123-1 et s. du Code de commerce sur les formalités effectuées par
les entreprises.

Section 3 – Sources judiciaires

37. Rôle créateur. En matière commerciale moins qu’ailleurs le juge est la simple bouche
de la loi. Le rôle créateur de la jurisprudence judiciaire est relativement important. Les
tribunaux de commerce interprètent la norme, la complètent et le cas échéant l’adaptent
ou la fabriquent. Le compte-courant, la concurrence déloyale ou encore l’abus de majorité

1. L’ordonnance de l’article 38 de la Constitution du 4 octobre 1958 est un acte réglementaire jusqu’à la ratification par le
parlement. Les Tribunaux ordinaires (Tribunaux Administratifs et Tribunaux Judiciaires) sont compétents pour en examiner
la légalité avant la ratification. Après la ratification, l’ordonnance devient un acte législatif dont le contrôle relève de la
compétence du Conseil Constitutionnel. Les Tribunaux ordinaires restent compétents pour apprécier la conventionnalité
des lois et règlements.

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Livre I • Introduction

en droit des sociétés sont issus d’initiatives prétoriennes. Ces avancées répondent à la
nécessité d’une intervention rapide des juridictions dans la vie commerciale. Contrairement
aux juges civils, les juges consulaires sont habilités à se servir d’un usage dont ils ont une
connaissance personnelle1.

Section 4 – Sources pratiques

38. Les sources pratiques comprennent essentiellement les usages (§1) et les codes de bonne
conduite (§2).

§1. Pratiques non codifiées

39. La pratique a été à l’origine de figures spécifiques. De nombreuses clauses spéciales, de


nombreux contrats spéciaux ont été créés par des praticiens, avocats, hommes d’affaires,
qui ont imaginé des figures dépassant le cadre normatif. Ainsi, le contrat de leasing, de
négociation, les cartes bancaires, les conventions d’affacturage (contrat par lequel une
personne va payer à une autre le montant de ses factures, moyennant une commission,
et se retrouver subrogé dans les droits du créancier) ont résulté de l’ingéniosité des pra-
ticiens. Ces figures, très répandues, n’ont toutefois pas le caractère de norme. Seuls les
usages peuvent prétendre à une telle qualification.
40. Notion d’usage. L’usage exprime une règle générale, constante et ancienne. Il est une pra-
tique dont l’emploi constant fait une règle non écrite. L’intérêt des usages se trouve dans
leur adaptation constante à l’évolution des besoins dans la vie des affaires. Il ne faut pas
confondre le mot « usage » pris dans le sens de coutume, règle traditionnelle, avec le mot
« usage » pris dans le sens d’« utilisation » comme dans l’expression « Il est dû garantie au
preneur pour tous les vices ou défauts de la chose louée qui en empêchent l’usage, quand
même le bailleur ne les aurait pas connus lors du bail »2.
41. Usages de fait. Les usages de fait (ou usages conventionnels) sont des pratiques habi-
tuellement admises par les professionnels. Les cocontractants s’y soumettent souvent de
manière implicite. C’est par réitération que ces usages adviennent. La volonté des parties
de s’y soumettre est présumée. Les usages varient selon les professions et les lieux. Par
exemple, dans le commerce du bois, l’usage veut que l’acheteur supporte le risque de
défauts découverts au sciage pour des billes non découpées ; dans le secteur de la grande
distribution, l’usage veut que le preneur prenne en charge la taxe foncière. L’usage de fait
est prouvé par celui qui l’invoque. La preuve de l’usage est libre et peut être rapportée par

1. Cass. req. 22 déc. 1903 : DP1903, 1, p. 149.


2. C. civil, art. 1721.

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Première Partie – Introduction au Droit commercial

tout moyen. Le parère (attestation délivrée par les autorités, la CCI ou les organismes pro-
fessionnels tels que les syndicats professionnels) peut être utilisé. L’usage conventionnel
est opposable aux professionnels qui travaillent dans le même secteur d’activité et dans
la même localité ou région. Ces professionnels peuvent convenir de l’écarter. Les usages
conventionnels ont un caractère supplétif. En revanche, l’usage conventionnel qui n’a pas
été accepté expressément est inopposable aux professionnels relevant d’un autre secteur
d’activité ou d’une autre localité. Enfin, l’usage conventionnel n’est pas non plus opposable
aux non-commerçants qui ne peuvent pas en avoir pris connaissance. Il est important de
souligner qu’un usage conventionnel ne peut déroger à une loi même supplétive.
42. Usages de droit. Les usages de droit sont parfois qualifiés de coutumes. Ils naissent, de
la même manière que les usages conventionnels, d’une pratique répétée. La différence
par rapport aux usages conventionnels tient au fait que l’usage a ici été consacré par une
décision de justice. Ceci conduit à lui reconnaître la valeur d’une véritable règle de droit.
Règle de droit autonome, l’usage de droit est obligatoire indépendamment de la volonté
des sujets. L’exemple d’usage de droit le plus connu est sans doute celui selon lequel la
solidarité passive est présumée en matière commerciale. L’usage de droit peut être contraire
à la loi et édicter une pratique contraire à une disposition légale (usage contra legem).
La solidarité passive est en effet contraire à l’article 1310 du Code civil, qui prévoit que la
solidarité doit être expressément stipulée. Par ailleurs, l’usage de droit peut s’appliquer
en vertu d’un renvoi exprès de la loi (usage secundum legem). L’usage de droit peut enfin
s’appliquer dans le silence de la loi ou de la volonté des parties (usage praeter legem).
Ainsi, alors qu’il n’existe aucun texte, l’exigence d’usages loyaux du commerce permet de
sanctionner une pratique jugée déloyale par application du droit de la concurrence déloyale
fondé sur l’article 1240 du Code civil (Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui
un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer). Comme norme
juridique, l’usage de droit n’a pas à être prouvé par les litigants au cours d’un procès. Le juge
est censé les connaître de la même manière que la loi. Il peut toutefois inviter les parties
à lui fournir les explications de droit nécessaires (article 13 CPC). Les usages de droit ont
un caractère général et abstrait à l’image de la loi, et leur opposabilité est automatique.

§2. Pratiques codifiées

43. On relève une prolifération de codes dits « de bonne conduite » émanant d’organismes
professionnels ou d’organismes à vocation économique qui posent des règles d’éthique
professionnelle ; tel est le cas des normes de la Compagnie nationale des commissaires aux
comptes, de divers « codes », tels le « Guide contractuel des relations de sous-traitance »,
le « Code de déontologie de la Fédération française du franchising », le Code de bonne
conduite de l’Association française des entreprises d’investissement, le Code de conduite
des courtiers d’assurance, les Codes de bonne conduite de la Fédération bancaire française,

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Livre I • Introduction

etc. Ces différents « codes » ne doivent pas être confondus avec les codes de déontologie
officiels qui régissent les activités des membres des professions organisées en ordres et qui
sont des règlements. Un exemple est donné par le Code AFEP-MEDEF de bonne conduite
en matière de rémunération des dirigeants. Depuis juillet 1995, date de la publication
à l’initiative des entreprises du premier rapport sur le gouvernement d’entreprise des
sociétés cotées, l’Afep et le Medef ont élaboré un ensemble de recommandations qui
permet à des sociétés d’améliorer leur fonctionnement et leur gestion dans une grande
transparence et de répondre ainsi aux attentes des investisseurs et du public. Cet ensemble
de recommandations peut être désigné par les sociétés cotées comme étant leur code
de référence1. Le code, adopté par la quasi-totalité des sociétés du SBF 120, offre ainsi un
ensemble de préconisations exigeantes et précises sur le gouvernement d’entreprise et
particulièrement sur la rémunération des dirigeants.

CHAPITRE 2
Sources supranationales

44. Le droit commercial se prête plus que d’autres à une certaine forme de mondialisation.
Les affaires s’accommodent mal des frontières et autres entraves à la circulation des biens,
services et personnes. Il est ainsi concevable que les sources supranationales jouent un
rôle particulier. Parmi elles, il convient de distinguer les sources internationales (Section 1)
des sources européennes (Section 2).

Section 1 – Sources internationales

45. Les sources internationales, en matière commerciale, connaissent également les catégories
de sources écrites et sources non écrites. C’est ainsi qu’à côté des traités internationaux
(§1) coexistent les usages internationaux (§2).

1. C. de commerce, art. L. 225-37-4 et L. 225-68.

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Première Partie – Introduction au Droit commercial

§1. Traités internationaux

46. Les traités internationaux sont des accords conclus entre états souverains qui fixent des
règles obligatoires à appliquer aux situations qu’ils soumettent à leur compétence. L’objectif
des traités est en général d’uniformiser les règles juridiques applicables sur le territoire des
États signataires (exemple : la Convention de Vienne du 11 avril 1980 en matière de vente
internationale de marchandises). Les traités doivent être approuvés ou ratifiés et publiés
au Journal Officiel. Le Juge doit le cas échéant soulever d’office le défaut de publication.
47. Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une
autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son
application par l’autre partie (Constitution du 4 octobre 1958, art. 55). A priori, les traités
ne vont s’appliquer que si l’État partenaire en est lui-même respectueux. Certains traités
prévoient la création d’organismes internationaux qui édictent des normes commer-
ciales. Par exemple, sont dans ce cas la CNUDCI (Commission des Nations unies pour le
Développement du commerce international) ou l’Institut International pour l’Unification
du Droit privé (Unidroit). Ces organismes publient parfois des lois types susceptibles
d’inspirer les législateurs nationaux.

§2. Pratiques internationales

48. Usages. Les normes internationales sont souvent incomplètes, car les textes ne peuvent pas
traiter l’ensemble des aspects d’une question. Dans ce cas, les usages peuvent compléter
utilement des points non abordés par des traités (praeter legem). Ils peuvent aussi régir
des relations entre des États qui ne sont pas signataires de certains traités internationaux.
Enfin, les usages internationaux peuvent constituer des normes de référence utilisées pour
régler des litiges en droit international. Les usages internationaux se sont développés
notamment grâce à des regroupements internationaux de commerçants. Ainsi en est-il
en France de la Chambre de commerce internationale (CCI). Ces organismes sont actifs
dans le développement de normes privées qui sont susceptibles de devenir des usages
internationaux.
49. Incoterms. Les Incoterms (International Commercial Terms) sont sans doute les usages
internationaux les plus connus. Dès 1936, la Chambre de commerce internationale a élaboré
des documents sous la forme d’un dictionnaire. La référence à un terme composé de trois
lettres renvoie automatiquement à des obligations très précises incombant à l’acheteur et
au vendeur. Par exemple, dans le cas d’une vente FOB (free on board), le vendeur remplit
son obligation de livraison quand la marchandise arrive sur le navire du port d’embarque-
ment désigné. Les frais et risques de perte courus par la marchandise sont à la charge de
l’acheteur. La valeur normative des usages internationaux est très discutée en doctrine.
Pour certains auteurs, ces usages constituent la lex mercatoria, la loi des marchands, qui

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Livre I • Introduction

s’applique de manière autonome et automatique en cas de silence des traités internatio-


naux. Selon d’autres auteurs, ils ne constituent pas de véritables normes juridiques et ne
servent de référence qu’en cas de silence des parties.

Section 2 – Sources européennes

50. Pacification européenne par le commerce et le droit. Après la Deuxième Guerre mondiale,
le commerce a permis aux états européens de se rapprocher. La communauté des états a
fait sienne le principe de Montesquieu selon lequel : « l’effet naturel du commerce est de
porter la paix », car « deux nations qui négocient ensemble se rendent réciproquement
dépendantes : si l’une a intérêt à acheter, l’autre a intérêt à vendre ; et toutes les unions sont
fondées sur des besoins mutuels. ». Elle a aussi hérité de Léon Bourgeois les idées de « la
paix par le droit » cherchant à substituer « au règne de la force, l’empire du droit ». La paix
n’étant jamais acquise, il est intéressant de relever le rôle des juristes et en particulier des
commercialistes dans son avènement et sa préservation. Le droit de l’UE prend ainsi une
place toujours plus grande en droit commercial et il reste à souhaiter qu’un Code Européen
des Obligations soit un jour prochain adopté et qu’il permette une réelle avancée de la
discipline. Le droit commercial français est en effet influencé par le droit communautaire
et européen, que ce soit par différentes sources normatives (§1) ou par la jurisprudence
de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) (§2). Franchir l’étape de la codification
renforcerait inévitablement l’idée du marché unique, au-delà de l’union douanière.

§1. Sources normatives

51. Les sources normatives sont constituées des sources originaires (A) et des sources dérivées (B).

A. Sources originaires

52. Droit primaire. Le droit primaire, également dénommé sources primaires, est issu des
instruments de l’UE suivants : les traités fondateurs, les traités modificatifs, les traités
d’adhésion, les protocoles annexés auxdits traités, les accords complémentaires modifiant
des sections spécifiques des traités fondateurs, la charte des droits fondamentaux (depuis
le traité de Lisbonne), des principes généraux établis par la Cour de justice de l’Union
européenne (CJUE). La Cour a la faculté d’interpréter les traités. En revanche, elle n’est
pas autorisée à statuer sur leur validité.
– Les traités fondateurs sont le traité de Paris (1951) instituant la Communauté européenne
du charbon et de l’acier, les traités de Rome instituant la Communauté économique
européenne et l’Euratom (1957), et le traité de Maastricht sur l’Union européenne (1992).

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Première Partie – Introduction au Droit commercial

Les traités modificatifs sont l’Acte unique européen (1986), le traité d’Amsterdam (1997),
le traité de Nice (2001), et le traité de Lisbonne (2007).
– Les traités d’adhésion sont ceux du Danemark, de l’Irlande et du Royaume-Uni (1972),
de la Grèce (1979), de l’Espagne et du Portugal (1985), de l’Autriche, de la Finlande, et
de la Suède (1994), de la République tchèque, de Chypre, de l’Estonie, de la Hongrie,
de la Lettonie, de la Lituanie, de Malte, de la Pologne, de la Slovaquie et de la Slovénie
(2003), de la Roumanie, et de la Bulgarie (2005), et de la Croatie (2012).
– Les accords complémentaires sont le traité de fusion des exécutifs (« traité de fusion »)
(1965), le traité modifiant certaines dispositions budgétaires des traités communautaires
(1970), le traité de Bruxelles modifiant certaines dispositions financières des traités
communautaires et instituant une Cour des comptes (1975), et l’acte portant élection
des représentants du Parlement européen au suffrage universel direct (1976).
53. Pères fondateurs. Les « Pères de l’Europe » ont été les premiers promoteurs, avec les traités
de libre-échange créant la Communauté Économique du Charbon et de l’Acier (CECA) et la
Communauté Économique Européenne (CEE), de la construction européenne au xxe siècle
conduisant à l’actuelle Union européenne (UE). Il s’agit de l’Allemand Konrad Adenauer,
du Luxembourgeois Joseph Bech, du Néerlandais Johan Willem Beyen, de l’Italien Alcide
De Gasperi, des Français Jean Monnet et Robert Schuman et du Belge Paul-Henri Spaak.
Tous partagent une même expérience des guerres, des effets négatifs et pervers du pro-
tectionnisme et de la politique d’affaiblissement de l’Allemagne portée par le Traité de
Versailles de 1919. Tous partagent aussi une même vision du chemin à suivre pour que
l’Europe renoue avec la prospérité, et une orientation politique proche, chez chacun d’entre
eux, des idéaux universalistes de la démocratie chrétienne. Ces expériences communes
ont implanté chez ces hommes d’État la vision d’une Europe unifiée par l’économie vecteur
de paix, organisée par la coopération entre les États et les peuples et un jour achevée par
l’unité politique.
54. Les relations commerciales dans l’Union européenne ont été révolutionnées par l’éta-
blissement du marché intérieur, fondé sur les quatre libertés fondamentales de l’Union,
afin de réaliser le marché commun et de décloisonner les marchés nationaux : liberté de
circulation des marchandises, liberté de circulation des personnes, liberté de circulation
des services et liberté de circulation des capitaux. Ce système apporte une grande stabilité
dans les relations et une période de paix ininterrompue entre États membres inédite. Les
Pères de l’Europe partageaient une volonté de pacification non pas par l’équilibre des puis-
sances, comme après le Congrès de Vienne de 1815, mais par la réconciliation des nations
européennes. Les pays de l’Union européenne ont réussi entre eux à dépasser leurs rivalités
séculaires et à réaliser les espoirs les plus utopiques des penseurs de l’unité européenne.
55. L’appartenance à l’Union a apporté un mouvement de modernisation du droit sans pré-
cédent au bénéfice des populations et des entreprises. L’incidence considérable du droit
européen résulte essentiellement de deux éléments :

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Livre I • Introduction

– sa primauté en droit interne,


– l’application directe des dispositions de son « droit originaire ».

B. Sources dérivées

56. Les autorités européennes peuvent édicter une législation européenne applicable en droit
interne et qualifiée de droit dérivé. Le droit dérivé résulte des règlements et des directives.
57. Règlement. Le règlement est un texte de portée générale qui s’impose de façon automa-
tique et obligatoire dans les différents États membres, sans que ceux-ci n’aient besoin de
le transposer dans leur droit interne.
58. Directive. La directive est un acte qui fixe des objectifs à atteindre pour les États membres,
mais leur laisse le choix des moyens et de la forme pour les atteindre dans les délais fixés
par elle. Pour que la directive puisse s’appliquer sur leur territoire, les États doivent donc la
transposer dans leur droit national. La transposition consiste, pour le législateur, à rédiger
ou à modifier ses lois afin de permettre la réalisation de l’objectif fixé par la directive et
à abroger les textes qui pourraient être en contradiction avec cet objectif. Par exemple,
l’ordonnance du 15 juillet 2009 relative aux conditions régissant la fourniture de services
et de paiement a transposé dans notre système juridique la directive n° 2007/64/CE du
13 novembre 2007 concernant les services de paiement dans le marché intérieur (DSP 1).
59. Décision. La décision est un acte juridique pris par le Conseil de l’Union européenne ou
la Commission européenne à l’encontre de particuliers, de personnes morales ou d’États
membres. Elle est obligatoire dans toutes ses dispositions et applicable directement, sans
transposition, à l’égard de ses destinataires. Elle se distingue du règlement par la nature
de l’acte et par les effets qu’elle produit mais pas par les modalités de son adoption.
60. Avis et recommandations. Les avis et recommandations ne sont pas obligatoires. Ils font
connaître ce que le conseil ou la commission souhaitent. Ainsi, par exemple, la Banque
centrale européenne peut, dans les domaines relevant de sa compétence, soumettre des avis
aux institutions, organes ou organismes de l’Union appropriés ou aux autorités nationales.

§2. Sources jurisprudentielles

61. Souvent saisie de questions préjudicielles, la CJUE est chargée d’assurer l’interprétation
et l’application des textes européens. Les juridictions internes doivent l’interroger avant
de statuer sur la difficulté résultant de l’interprétation du droit de l’UE, dès lors que leurs
décisions ne sont pas susceptibles de recours, comme c’est le cas des arrêts de la Cour de
cassation et du Conseil d’État. L’interprétation donnée par le juge européen s’impose alors.
La CJUE examine également les recours formés contre les condamnations prononcées par
une autorité communautaire.

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Première Partie – Introduction au Droit commercial

CHAPITRE 3
Sources arbitrales

62. Les parties à un litige peuvent faire référence au corps des sentences arbitrales existantes
afin de dégager un principe juridique pour appuyer la décision des arbitres. Il peut être fait
référence aux sentences précédemment rendues en relation tant avec la procédure arbitrale
qu’avec le fond du litige. Les sentences arbitrales en particulier en matière internationale
ont tendance à être de mieux en mieux portées à la connaissance des litigants et de leurs
conseils1. Des revues spécialisées regroupant les meilleurs auteurs et praticiens apportent
des éclairages conséquents. Contrairement à certains jugements des systèmes de « common
law », la jurisprudence arbitrale n’est toutefois pas contraignante et est uniquement citée
pour appuyer des arguments. Son rôle créateur est ainsi très controversé2.

1. Ex. site jusmundi.com.


2. A. Pinna, Les spécificités de la jurisprudence arbitrale, Jusletter, 10-2005, p. 1 et s.

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DEUXIÈME PARTIE

Introduction aux
institutions commerciales
63. Les institutions commerciales représentent des organismes importants pour faciliter ou
pour contrôler le bon fonctionnement du monde commercial ; certaines sont le lieu d’ac-
complissement d’obligations pour le commerçant, d’autres lui permettent l’exercice de
prérogatives et offrent aux entrepreneurs et aux commerçants des mécanismes facilitant
ou sécurisant leurs activités.

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Deuxième Partie – Introduction aux institutions commerciales

TITRE 1 – Institutions commerciales consulaires


64. Les institutions commerciales consulaires sont les Tribunaux de commerce d’une part
(Chapitre 1), les Chambres de commerce d’autre part (Chapitre 2).

CHAPITRE 1
Tribunaux de commerce

65. Le tribunal de commerce est encore appelé juridiction consulaire. Il est un modèle juri-
dictionnel (Section 1) dont la composition (Section 2), les compétences (Section 3) et la
procédure (Section 4) sont atypiques. Son président (Section 5) et le greffe (Section 6)
participent à créer un paysage judiciaire différent de celui connu en droit commun.

Section 1 – Modèle juridictionnel

66. Histoire. Les Tribunaux de commerce trouvent leur origine en Italie. Après la chute de
l’Empire Romain, de nombreuses corporations se constituèrent dans les villes libres de la
péninsule. À la tête de ces corporations, des « consuls » élus par la collectivité des marchands,
prêtaient serment, faisaient connaître les règles applicables aux transactions et créaient
ainsi un droit plus simple, moins formaliste, que le droit romain. Ces institutions nouvelles
se propagèrent en France à l’occasion des grandes foires internationales qui réunissaient
périodiquement tous les marchands de l’Europe. Les tribunaux de commerce, tels qu’on
les connaît aujourd’hui, sont les héritiers d’une longue tradition. En effet lors des grandes
foires du Moyen Âge, les commerçants élisaient déjà ceux d’entre eux qui seraient insti-
tués juges afin de régler les litiges entre commerçants. Également depuis l’Antiquité, et
au Moyen Âge, les opérations commerciales importantes étaient effectuées dans le cadre
du commerce maritime. Des règles spécifiques en matière maritime ont ainsi vu le jour et
sont, pour partie, devenues une source du droit commercial. La création des tribunaux de
commerce date à Toulouse d’un édit d’Henri II, le 16 juillet 1549, peu avant l’institution du
tribunal de commerce de Paris, à l’instigation de Michel de l’Hospital, en 1563. Il s’agissait
de donner aux marchands un outil souple de règlement de leurs litiges.

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Livre I • Introduction

67. Les juridictions consulaires sont les agents principaux de la concrétisation judiciaire du
droit commercial. Son application relève d’un grand nombre de juridictions. Cependant, la
plus grande partie des attributions en matière de justice commerciale, si l’on tient compte
du volume des contentieux, appartient en première instance à une juridiction d’exception
appelée le Tribunal de commerce. Ce dernier présente de forts particularismes, jouit de
compétences propres. Juridiction spéciale, il est aussi, de manière paradoxale, la juridic-
tion de premier degré de principe du droit des affaires. Le monde économique est ainsi
extrêmement attaché à cette organisation judiciaire dédiée, performante et économe des
deniers publics. La grande maîtrise par les juges consulaires des questions économiques, le
maintien de la collégialité, la maturité des élus, la complémentarité des acteurs capables
d’appréhender la difficulté des affaires expliquent sans doute le succès de l’institution.
Signe de la qualité des jugements, le faible taux d’appel sur les jugements rendus au fond
pourrait être un élément de nature à nourrir une réflexion approfondie sur l’existence
d’un modèle à étendre (Pour l’année 2018, Tribunaux de commerce en 1er ressort 12,9 %).

Section 2 – Composition

68. La composition de ces tribunaux de commerce est atypique : Les personnes siégeant sont
élues par des commerçants. Les commerçants peuvent sous conditions être élus juges
consulaires. Ils sont en principe bénévoles et prêtent serment. L’élection d’un juge du tri-
bunal de commerce se passe au scrutin plurinominal majoritaire à deux tours. Les électeurs
sont les délégués consulaires élus (commerçants), les juges du tribunal déjà en poste et
les anciens membres du tribunal inscrits sur la liste électorale. Le président du Tribunal
de commerce est élu par les autres juges. Compte tenu de l’apparition d’un véritable droit
professionnel, on s’est parfois interrogé : ne serait-il pas opportun d’instaurer non pas de
juridictions professionnelles, mais de chambres spécialisées à l’intérieur des juridictions
de droit commun ? Le recours à l’échevinage (ou à la mixité) introduisant au sein des
juridictions commerciales des magistrats professionnels ne serait-il pas une solution ?
La question de la légitimité des juges consulaires est aussi ancienne que la juridiction
elle-même. Elle ne peut toutefois se réduire à celle du mode d’élection des juges qui la
composent car elle porte, de manière bien plus essentielle, sur le bien-fondé de tribunaux
spécialisés dans les affaires commerciales. La juridiction consulaire, au fil de l’histoire, a
été sans cesse menacée et a toujours triomphé de ses détracteurs. Certaines tentatives
de réformes, parfois motivées par une forme de suspicion et par des considérations idéo-
logiques aussi hostiles qu’éloignées de la vie des affaires, ont fort heureusement échoué.
69. Les juges consulaires se sont vus proposer des formations et, au gré des réformes, leur
statut a eu tendance à se rapprocher de celui des magistrats de carrière. Étonnamment,
la question a été posée au Conseil constitutionnel de la conformité des tribunaux de

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Deuxième Partie – Introduction aux institutions commerciales

commerce à la Constitution : les articles L. 722-6 à L. 722-16 et L. 724-1 à L. 724-6 du Code


de commerce sont-ils conformes à la constitution pris sous l’angle des principes d’in-
dépendance et de compétences professionnelles ? ». Par une décision éclairée du 4 mai
20121, le Conseil constitutionnel a – heureusement – considéré que ces tribunaux n’étaient
contraires à aucun droit et à aucune liberté que la Constitution garantit. Ce faisant, elle
valide l’existence et le statut des juges consulaires. Il reste surprenant que cette demande,
peu sérieuse, ait pu être transmise.
70. Un décret du 23 septembre 2005 a institué un Conseil national des tribunaux de commerce
présidé par le garde des Sceaux. Il est composé du directeur des services judiciaires, du
directeur des affaires civiles et du sceau et du directeur des affaires criminelles et des grâces
ainsi que les seize membres désignés par le garde des Sceaux, dont dix juges consulaires. Le
garde des Sceaux a la faculté de le consulter pour la formation et la déontologie des juges
des tribunaux de commerce, l’organisation, le fonctionnement et l’activité des Tribunaux
de commerce, leur compétence et leur implantation.

Section 3 – Compétence

71. Preuve éclatante de la qualité du travail fourni par les tribunaux de commerce : leur rôle
ne cesse de s’accroître. La compétence matérielle et la compétence territoriale devront
être envisagées successivement.

§1. Compétence matérielle

72. Juridiction d’exception. La compétence d’attribution des tribunaux de commerce est définie
par les articles L. 621-2, L. 721-1 à L. 721-6 et R. 721-6 C. com. Le tribunal de commerce a une
compétence particulière. Juridiction d’exception, il n’est compétent que si un texte le prévoit
explicitement, expressément. Notamment, il est ainsi compétent pour les contestations
relatives aux engagements entre commerçants mais aussi entre établissements de crédit
ou encore entre commerçants et établissements de crédit, pour les contestations relatives
aux sociétés commerciales, pour les contestations relatives aux actes de commerce, pour
les difficultés des entreprises commerciales. Au plus tard le 1er janvier 2022, il connaîtra
également des litiges entre artisans.
73. Petits litiges. Selon l’article L. 721-3-1 du Code de commerce, il connaît, dans les limites de
ses compétences d’attribution, des demandes formées en application du règlement du
Parlement européen et du Conseil CE du 11 juillet 2007 instituant une procédure européenne
de règlement des petits litiges. Pour toutes les demandes entrant dans sa compétence,

1. Cons. Const. 4 mai 2012, JCP E 2012, 1365, note Vallansan.

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Livre I • Introduction

il connaît en dernier ressort des demandes jusqu’à la valeur de 5 000 euros depuis le
1er janvier 2020 (C. com., art. R. 721-6). Le taux de ressort était auparavant de 4 000 euros.

§2. Compétence territoriale

74. Les règles de la procédure civile classique s’appliquent. Les articles 42 à 48 du Code de
procédure civile prévoient que le tribunal de commerce géographiquement compétent
sera celui du lieu du domicile du défendeur. Le Tribunal de commerce compétent sera
donc celui du lieu de domiciliation du commerçant ou du siège social de l’entreprise. En
vertu de la jurisprudence dite des gares principales, il pourra s’agir du siège social d’une
succursale. En matière contractuelle, le défendeur pourra aussi être assigné devant le
tribunal du lieu de livraison de la chose, du lieu d’exécution de la prestation de service
ou de situation de l’immeuble concerné par le litige. En matière délictuelle, compétence
pourra être donnée au tribunal du lieu de survenance du dommage ou celui du fait dom-
mageable. En matière de procédure collective, le Tribunal de commerce compétent sera
celui du domicile du débiteur (article R. 600-1 du Code de commerce).

§3. Tribunaux de commerce spécialisés

75. Pratiques restrictives de concurrence. Certains tribunaux de commerce spécialisés sont


destinataires exclusifs de contentieux particuliers en matière de droit de la concurrence
et de difficulté des entreprises. Afin de garantir une plus grande compétence technique
des juges appelés à statuer en matière de pratiques restrictives de concurrence (Code de
commerce, art. L. 442-1 à 3 et L. 442-7 et L. 442-8), les articles D. 442-3 et D. 442-4 du Code
de commerce désignent un nombre limité de juridictions spécialisées, dont ils fixent le
siège et le ressort. Huit tribunaux judiciaires et huit tribunaux de commerce sont compé-
tents, selon la qualité des parties, pour statuer sur ces litiges. Ils sont localisés à Marseille,
Bordeaux, Lille, Fort-de-France, Lyon, Nancy, Paris et Rennes. La Cour d’appel de Paris
est seule compétente pour connaître des appels contre les jugements de ces juridictions
spécialisées.

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Deuxième Partie – Introduction aux institutions commerciales

Juridictions commerciales compétentes en application


du III de l’article L.442-4 du code du commerce des procédures
qui sont applicables aux personnes, commerçants ou artisans

SIÈGE DES TRIBUNAUX


DE COMMERCE RESSORT
et des tribunaux mixtes de commerce
Le ressort des cours d’appel d’Aix-en-Provence,
Marseille
Bastia, Montpellier et Nîmes.
Le ressort des cours d’appel d’Agen, Bordeaux,
Bordeaux
Limoges, Pau et Toulouse.
Le ressort des cours d’appel d’Amiens, Douai, Reims
Lille
et Rouen.
Le ressort des cours d’appel de Basse-Terre,
Fort-de-France
de Cayenne et de Fort-de-France.
Le ressort des cours d’appel de Chambéry, Grenoble,
Lyon
Lyon et Riom.
Le ressort des cours d’appel de Besançon, Colmar,
Nancy
Dijon, Metz et Nancy.
Le ressort des cours d’appel de Bourges, Paris,
Paris
Orléans, Saint-Denis de La Réunion et Versailles.
Le ressort des cours d’appel d’Angers, Caen, Poitiers
Rennes
et Rennes.

76. Entreprises en difficultés. Des tribunaux de commerce spécialement désignés par décret
connaissent, lorsque le débiteur exerce une activité commerciale ou artisanale des procé-
dures de sauvegarde, de redressement judiciaire et de liquidation judiciaire notamment
lorsque le débiteur est :
– une entreprise dont le nombre de salariés est égal ou supérieur à 250 et dont le montant
net du chiffre d’affaires est d’au moins 20 millions d’euros,
– une entreprise dont le montant net du chiffre d’affaires est d’au moins 40 millions d’euros,
– une société qui détient ou contrôle une autre société dès lors que le nombre de salariés
de l’ensemble des sociétés concernées est égal ou supérieur à 250 et que le montant net
du chiffre d’affaires de l’ensemble de ces sociétés est d’au moins 20 millions d’euros,
– une société qui détient ou contrôle une autre société dès lors que le montant net du
chiffre d’affaires de l’ensemble de ces sociétés est d’au moins 40 millions d’euros.
L’importance des situations décrites a motivé le recours à des juridictions adaptées pour
accueillir ces types de contentieux.

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Livre I • Introduction

SIÈGE RESSORT
Bobigny Tribunaux de commerce de Bobigny, de Créteil, de Meaux
Tribunaux de commerce d’Angoulême, de Bayonne, de Bergerac, de Bordeaux,
Bordeaux
de Dax, de Libourne, de Mont-de-Marsan, de Pau, de Périgueux, de Tarbes
Tribunaux de commerce de Bar-le-Duc, de Belfort, de Besançon, de Briey, de Chalon-
Dijon sur-Saône, de Chaumont, de Dijon, d’Epinal, de Lons-le-Saunier, de Mâcon, de Nancy,
de Vesoul
Evry Tribunaux de commerce d’Auxerre, d’Evry, de Melun, de Sens
Tribunaux de commerce d’Annecy, de Chambéry, de Gap, de Grenoble, de Romans-
Grenoble
sur-Isère, de Thonon-les-Bains, de Vienne
Tribunaux de commerce d’Aurillac, de Bourg-en-Bresse, de Clermont-Ferrand,
Lyon de Cusset, de Lyon, de Montluçon, du Puy-en-Velay, de Roanne, de Saint-Etienne,
de Villefranche-sur-Saône
Tribunaux de commerce d’Aix-en-Provence, de Draguignan, de Fréjus, de Manosque,
Marseille
de Marseille, de Salon-de-Provence, de Tarascon, de Toulon
Tribunaux de commerce d’Aubenas, d’Avignon, de Béziers, de Carcassonne,
Montpellier
de Mende, de Montpellier, de Narbonne, de Nîmes, de Perpignan, de Rodez
Nanterre Tribunaux de commerce de Chartres, de Nanterre, de Pontoise, de Versailles
Nantes Tribunaux de commerce d’Angers, de Laval, du Mans, de Nantes, de Saint-Nazaire
Nice Tribunaux de commerce d’Ajaccio, d’Antibes, de Bastia, de Cannes, de Grasse, de Nice
Tribunaux de commerce de Blois, de Bourges, de Châteauroux, de Nevers, d’Orléans,
Orléans
de Tours
Tribunal de commerce de Châlons-en-Champagne, de Paris, de Reims, de Sedan,
Paris
de Troyes
Tribunaux de commerce de Brive-la-Gaillarde, de Guéret, de La Roche-sur-Yon,
Poitiers
de La Rochelle, de Limoges, de Niort, de Poitiers, de Saintes
Tribunaux de commerce de Brest, de Lorient, de Quimper, de Rennes, de Saint-
Rennes
Brieuc, de Saint-Malo, de Vannes
Tribunaux de commerce d’Alençon, de Bernay, de Caen, de Cherbourg-Octeville,
Rouen
de Coutances, de Dieppe, d’Evreux, du Havre, de Lisieux, de Rouen
Tribunaux de commerce d’Agen, d’Albi, d’Auch, de Cahors, de Castres, de Foix,
Toulouse
de Montauban, de Toulouse
Tribunaux de commerce d’Amiens, d’Arras, de Beauvais, de Boulogne-sur-Mer,
Tourcoing de Compiègne, de Douai, de Dunkerque, de Saint-Quentin, de Soissons, de Lille
Métropole, de Valenciennes

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Deuxième Partie – Introduction aux institutions commerciales

Section 4 – Procédure

77. La procédure est traditionnellement dominée par un souci de simplicité et de rapidité.


Elle est régie par les dispositions de droit commun applicables à ce type de procédure1. Il
existe néanmoins des spécificités. La demande en justice est formée par assignation ou par
la remise au greffe d’une requête conjointe. Le cas échéant, l’assignation doit comporter
certaines mentions énumérées par les articles 54, 56 et 855 du Code de procédure civile.
Les parties sont, sauf disposition contraire, tenues de constituer avocat devant le tribunal
de commerce. La constitution de l’avocat emporte élection de domicile. Les parties sont
dispensées de l’obligation de constituer avocat dans les cas prévus par la loi ou le règlement,
lorsque la demande porte sur un montant inférieur ou égal à 10 000 euros ou qu’elle a pour
origine l’exécution d’une obligation dont le montant n’excède pas 10 000 euros, dans le
cadre des procédures instituées pour les entreprises en difficultés ou pour les litiges rela-
tifs à la tenue du registre du commerce et des sociétés. Dans ces cas, elles ont la faculté
de se faire assister ou représenter par toute personne de leur choix. Le représentant, s’il
n’est avocat, doit justifier d’un pouvoir spécial. Les parties sont dispensées de constituer
avocat devant le Tribunal de commerce en matière de gage des stocks et de gage sans
dépossession (art. 874).
78. Le domaine de la représentation obligatoire a semblé s’accroître au terme de la dernière
réforme. Alors qu’auparavant la représentation commerciale était libre, elle fait désormais
majoritairement intervenir l’avocat. En réalité, la présence de l’avocat était fréquente
dans les procédures commerciales et si la loi 2020-1452 du 27 novembre 2020 réglemente
cette situation, elle le fait en tenant compte d’une réalité. L’innovation est donc moins
importante qu’il n’y paraît. On a parfois évoqué le terme de révolution pour exprimer cette
extension du monopole de l’avocat alors que, probablement, il s’agit d’une consécration
de son rôle central.

Section 5 – Président du Tribunal de commerce

79. Le président de cette juridiction a un champ de compétence comparable à celui du président


du tribunal judiciaire. Ces compétences ne présentent aucune spécificité puisqu’elles sont
régies par les dispositions applicables à toutes les juridictions. La juridiction présidentielle
est compétente en matière de référé commercial (C. pr. civ., art. 872 et 873). Le référé est une
procédure d’urgence. Le président peut également ordonner sur requête dans les limites
de la compétence du tribunal, toutes mesures urgentes lorsque les circonstances exigent
qu’elles ne soient pas prises contradictoirement (C. pr. civ., art. 874 et 875). La procédure

1. CPC, art. 446-1 à 446-4.

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Livre I • Introduction

sur requête est une procédure provisoirement non contradictoire. Enfin, le président
du tribunal de commerce est compétent en matière d’injonction de payer lorsque le litige
relève de la compétence d’attribution du tribunal de commerce, la procédure se déroulant
dans le cadre de la juridiction consulaire (C. pr. civ., art. 1406).

Section 6 – Greffier

80. Le greffier du Tribunal de commerce contribue à rendre la justice commerciale. En plus


de son rôle de greffier (préparer les dossiers pour l’audience), il est chargé de la tenue du
registre du commerce et des sociétés. Le registre du commerce rassemble des renseigne-
ments relatifs aux commerçants. Il permet aux tiers et en particulier à tout créancier de
savoir par exemple dans quelles conditions le fonds de commerce est exploité, de connaître
le régime matrimonial du commerçant (séparation des biens, mise en commun des biens…)
ce qui est très important dans le cadre d’une saisie. D’autre part, la tenue du registre du
commerce et des sociétés permet également de savoir si le commerçant a la qualité ou
non d’étranger, de savoir si un individu est ou non le gérant d’une société. Le registre du
commerce et des sociétés est une espèce « d’état civil du commerçant ».

CHAPITRE 2
Chambres de commerce et d’industrie (CCI)

81. En 1599 est créée, à Marseille, la première chambre de commerce de France. Simple bureau
de commerce, il est composé de quatre députés désignés par le conseil de ville et prend le
nom de chambre de commerce l’année suivante. De nombreuses places portuaires vont
emprunter le même chemin. Avant la Révolution, plusieurs chambres de commerce sont
ainsi créées dans des villes de province et le 25 février 1803 (6 Ventôse an XI), Bonaparte signe
le décret portant création de la Chambre de commerce de Paris. En 1898, la loi du 9 avril
donne aux chambres de commerce le statut d’établissement public. En 1899, sont créées
les chambres de commerce de Meaux, de Melun et de Versailles. En 1960, les chambres
de commerce prennent la dénomination de chambres de commerce et d’industrie (CCI).

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Deuxième Partie – Introduction aux institutions commerciales

82. Les CCI accompagnent, informent et conseillent les entreprises à toutes les étapes de
leur développement. Plus largement, elles contribuent au rayonnement économique
des territoires. Elles ont pour rôle de soutenir et de protéger les intérêts des entreprises au
sein de leur territoire face non seulement aux instances de l’État mais aussi aux autorités
internationales.
83. CCI France assure l’animation de l’ensemble du réseau des chambres de commerce et
d’industrie territoriales. Ses missions, vastes, sont déterminées par la loi (Code de com-
merce, art. L. 711-16).

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Deuxième Partie – Introduction aux institutions commerciales

TITRE 2 – Institutions commerciales non consulaires


84. Parmi les institutions commerciales non consulaires, certaines sont juridictionnelles
(Chapitre 2), d’autres sont dépourvues de caractère juridictionnel (Chapitre 1).

CHAPITRE 1
Institutions non juridictionnelles

85. Sans que la liste des institutions ne soit exhaustive, il convient de relever quelques entités
dont l’intervention permet ou facilite l’exercice commercial. Les finalités poursuivies sont
multiples. Elles demeurent toutes en lien étroit avec les métiers du commerce, diverse-
ment réglementés.
86. Conseil économique, sociale et Environnemental (CESE). Le Conseil économique, social
et environnemental (CESE) est une assemblée constitutionnelle française composée de
représentants sociaux (patronat, syndicats, associations). Il a une fonction consultative,
optionnelle ou obligatoire dans le cadre du processus législatif. Cette assemblée permet
la représentation au niveau national des organisations professionnelles et la commu-
nication entre les différents acteurs de l’économie. Son siège est situé au palais d’Iéna à
Paris. Cette représentation socio-professionnelle au niveau national est transposée au
niveau de chaque collectivité territoriale régionale qui dispose aussi d’une assemblée
consultative du même type, le Conseil économique, social et environnemental régional
(CESER). Il existe également un Comité économique et social européen (CESE) au niveau
de l’Union européenne.
87. Commission d’examen des pratiques commerciales (CEPC). La CEPC a été créée par la
loi du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques. Elle a pour mission de
donner des avis ou de formuler des recommandations sur les questions, les documents
commerciaux ou publicitaires et les pratiques concernant les relations commerciales
entre producteurs, fournisseurs, revendeurs, qui lui sont soumis. Elle peut également
décider d’adopter des recommandations sur les questions portant notamment sur le
développement des bonnes pratiques commerciales. Elle exerce un rôle d’observatoire
régulier de ces pratiques.

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Livre I • Introduction

88. Autorité de la Concurrence (AC). L’Autorité de la concurrence, anciennement Conseil de


la concurrence, est une autorité administrative indépendante française chargée de lutter
contre les pratiques anticoncurrentielles et d’étudier le fonctionnement des marchés.
Elle a pour but d’assurer le respect de l’ordre public économique, lié « à la défense d’une
concurrence suffisante sur les marchés ». Bien qu’elle ne soit pas considérée comme une
juridiction, elle prononce des injonctions, prend des décisions, et le cas échéant, inflige des
sanctions, susceptibles de recours devant la cour d’appel de Paris et la Cour de cassation.
Elle rend également des avis.
89. Institut national de statistique et des études économiques (INSEE). L’INSEE est chargé de
rassembler et d’interpréter les informations statistiques nécessaires à la prise de décisions
générales intéressant la vie ou l’expansion du pays, comme la collecte de données pour le
recensement de la population, les nombreuses enquêtes auprès des ménages, auprès des
entreprises et l’observation des prix. Par exemple, il élabore régulièrement des diagnostics
et des prévisions sur la situation économique de la France, largement repris par les médias.
Ces diagnostics et prévisions résultent d’une analyse approfondie de nombreuses données
statistiques quantitatives et de données d’enquêtes qualitatives, permettant d’extraire
les tendances sous-jacentes et les mécanismes à l’œuvre dans l’économie. Également, il
publie tous les trimestres une estimation du taux de chômage et du taux de croissance, et
tous les mois l’indice des prix à la consommation. L’Insee consacre des moyens importants
pour obtenir des estimations fiables et précises de ces indicateurs. Ils sont établis selon des
principes et des méthodes homogènes au niveau européen et international, ce qui permet
des comparaisons pertinentes entre pays. L’INSEE gère également le répertoire d’identifi-
cation des entreprises et des établissements appelé SIRENE (Système informatique pour le
répertoire des entreprises et de leurs établissements) (Code de commerce, art. R. 123-220
et s.). Un numéro d’identification est en effet attribué aux entreprises (numéro S.I.R.EN
ou Système informatique pour le répertoire des entreprises – 9 chiffres) et établissements
(numéro S.I.R.ET système d’identification du répertoire des établissements - numéro de
14 chiffres). Le numéro S.I.R.E.T comprend les 9 chiffres du numéro S.I.R.E.N et les 5 chiffres
correspondant à un numéro NIC (Numéro interne de classement). L’entreprise recevra
aussi un code A.P.E. (Activité principale exercée).
90. Centre de formalités des entreprises (CFE). Les CFE font le lien entre l’entreprise et divers
interlocuteurs. Le CFE est un organisme permettant aux entrepreneurs de centraliser l’en-
semble de leurs démarches. Le CFE centralise les demandes afin de les redistribuer aux
différents destinataires compétents pour que ceux-ci traitent les dossiers qui dépendent
de leur compétence. Par exemple, le CFE peut servir d’intermédiaire avec l’INSEE, le
Greffe du Tribunal de commerce, les services fiscaux, les organismes sociaux comme le
RSI, l’URSSAF ou encore la MSA.
91. Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC). Le Bulletin officiel des
annonces civiles et commerciales (BODACC) est édité par la Direction de l’information légale

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Deuxième Partie – Introduction aux institutions commerciales

et administrative (DILA) dans le cadre de sa mission de service public de la transparence


économique et financière. Le BODACC assure la publicité des actes enregistrés au registre
du commerce et des sociétés (les ventes et cessions, les immatriculations, les créations
d’établissements, les cessions relatives aux EIRL, les procédures collectives, les modifica-
tions, les radiations, les annonces de dépôt des comptes des sociétés). Le BODACC publie
certaines annonces civiles (les annonces de rétablissement personnel, les déclarations
d’acceptation de succession à concurrence de l’actif net). L’ancêtre du BODACC a été créé
en février 1907 sous le titre Bulletin officiel des ventes de fonds et faillites. L’appellation
Bulletin officiel des annonces commerciales (BODAC) entre officiellement en vigueur en
1968. L’article R.123-209 du Code de commerce dispose : « Il est institué un bulletin annexe
au Journal officiel de la République française sous le titre de Bulletin officiel des annonces
civiles et commerciales. Sont insérés dans ce bulletin les avis prévus par le présent code
et par tous autres textes législatifs ou réglementaires ».
92. Journaux d’annonces légales (JAL). Les JAL informent les tiers sur la vie d’une entreprise.
La recherche de transparence relativement aux informations susceptibles d’intéresser les
tiers impose que soient diffusées certaines informations. Celles-ci peuvent être utiles par
exemple a des concurrents (ex. création d’une société concurrente), à des salariés ou à des
créanciers (ex. annonce de liquidation indiquant le nom du liquidateur). Les JAL est en droit
français un périodique d’information habilité à collecter, recevoir et publier les annonces
légales des sociétés. C’est un titre classique de la presse écrite départementale ou régio-
nale qui a fait une demande d’habilitation auprès de la préfecture pour faire paraître les
annonces légales du département dont il couvre l’actualité. Les annonces sont centralisées.
93. Institutions syndicales. Les syndicats patronaux représentent les entrepreneurs français
auprès de l’État et des organisations syndicales. Les syndicats interprofessionnels côtoient
les syndicats de branche.
Exemples de syndicats interprofessionnels :
– Mouvement des Entreprises DE France (MEDEF) : Créé le 27 octobre 1998, le Medef
remplace le Conseil national du patronat français (CNPF).
– Confédération des Petites et Moyennes Entreprises (CPME) : La Confédération des
petites et moyennes entreprises (CPME) remplace l’ancienne Confédération générale
des Petites et Moyennes Entreprises (CGPME).
Exemples de syndicats de branches :
– L’Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM Grand Hainaut).
– Union des métiers et des Industries de l’hôtellerie (UMIH).
– Centre national des professionnels de l’automobile (CNPA).
94. Conseil national de la consommation (CNC). Créé par le décret n° 83-642 du 12 juillet 1983,
le Conseil national de la consommation (CNC) est un organisme paritaire consultatif placé

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Livre I • Introduction

auprès du ministre chargé de la consommation. Le Conseil national de la consommation


a pour objectif de permettre le débat et la concertation, pour tout ce qui a trait aux pro-
blèmes de consommation, entre les pouvoirs publics, les représentants des associations
de défense des consommateurs et des organisations professionnelles ainsi que des
entreprises assurant des missions de service public. Il favorise la négociation d’accords
entre organisations professionnelles ou prestataires de services publics et privés et asso-
ciations de défense des consommateurs ; la désignation, en tant qu’organe collégial, des
médiateurs de la consommation d’entreprise. Il est consulté par les pouvoirs publics sur
les grandes orientations de la politique de la consommation et sur sa mise en œuvre, à
l’occasion des discussions communautaires ayant une incidence sur le droit français de
la consommation. Il est saisi pour avis sur des projets ou des propositions de lois et de
règlements susceptibles d’avoir une incidence sur la consommation.
95. Institut national de la propriété industrielle (INPI). L’INPI est un établissement public
placé sous la tutelle du Ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie. Il délivre les
brevets, les marques, les dessins et les modèles et donne accès à toutes les informations
sur la propriété industrielle et les entreprises. Il participe activement à l’élaboration et à
la mise en œuvre des politiques publiques dans le domaine de la propriété industrielle
et de la lutte anti-contrefaçon pour combattre la concurrence déloyale. L’INPI accueille,
accompagne et informe les innovateurs, sensibilise et forme à la propriété industrielle,
délivre les titres de propriété industrielle nationaux (brevets, marques, dessins et modèles)
et contribue activement à la lutte contre la contrefaçon. Au niveau supranational, il agit
au sein d’instances européennes et mondiales et développe la coopération internationale
avec de nombreux pays.
96. Commission des Clauses abusives (CCA). Instituée par l’article L. 822-4 du Code de la
consommation, la Commission des clauses abusives est placée auprès du ministre chargé
de la consommation. Elle est composée de magistrats, de personnalités qualifiées en
droit ou technique des contrats, de représentants des consommateurs, de représentants
des professionnels. La commission examine les modèles de conventions habituellement
proposés par les professionnels et recommande la suppression ou la modification des
clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou
du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au
contrat. La commission peut être saisie par un juge à l’occasion d’une instance pour donner
son avis sur le caractère abusif d’une clause contractuelle. Chaque année la Commission
établit un rapport d’activité. Son rôle est essentiellement consultatif mais ses avis sont
publiés et en général ont une grande autorité.
97. Autorité des normes comptables (ANC). Certaines institutions spécialisées contribuent au
bon fonctionnement des marchés. On relève à ce titre notamment l’autorité des normes
comptables (ANC), créée par l’ordonnance n° 2009-79 du 22 janvier 2009. Elle établit
sous forme de règlements les prescriptions comptables générales et sectorielles que

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Deuxième Partie – Introduction aux institutions commerciales

doivent respecter les personnes physiques ou morales soumises à l’obligation légale de


tenir des documents comptables conformes aux normes de la comptabilité privée ; elle
donne un avis sur toute disposition législative ou réglementaire contenant des mesures
de nature comptable applicables ; elle émet, de sa propre initiative ou à la demande du
ministre chargé de l’économie, des avis et prises de position dans le cadre de la procédure
d’élaboration des normes comptables internationales ; elle veille à la coordination et à la
synthèse des travaux théoriques et méthodologiques conduits en matière comptable ;
elle propose enfin toute mesure dans ces domaines, notamment sous forme d’études et
de recommandations.
98. Autorité des marchés financiers (AMF). L’Autorité des marchés financiers (AMF) est une
institution financière et une autorité administrative indépendante française créée le 1er août
2003 par la loi de sécurité financière, dotée de la personnalité morale et disposant d’une
autonomie financière. On la qualifie de « Gendarme de la Bourse ». Elle a pour missions de
veiller à la protection de l’épargne investie dans les instruments financiers, à l’information
des investisseurs et au bon fonctionnement des marchés d’instruments financiers. Elle
apporte son concours à la régulation de ces marchés aux échelons européen et ­international.
Au niveau européen, elle participe au système européen de supervision financière au sein
de l’ESMA. Au niveau international, elle est membre de l’Organisation internationale des
commissions des valeurs mobilières [archive] et du Forum de stabilité financière. Elle
est membre du Conseil européen du risque systémique (European Systemic Risk Board).
99. Autorité de Contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). En France, le contrôle des
banques et des assurances est exercé par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolu-
tion (ACPR). L’ACPR est une autorité administrative dont le code monétaire et financier
établit ­l’indépendance pour l’exercice de ses missions et l’autonomie financière. Pour son
fonctionnement, l’ACPR est adossée à la Banque de France, qui lui procure ses moyens,
notamment humains et informatiques. L’ACPR assure, pour l’ensemble du secteur financier
(banque et assurance) le contrôle du respect des dispositifs de lutte contre le blanchiment
des capitaux et le financement du terrorisme, ainsi que la protection de la clientèle. Elle
contrôle l’application de la réglementation prudentielle du secteur financier pour assurer
la continuité des activités des banques et des assurances, préserver la stabilité financière,
résoudre les crises en limitant au maximum le recours au soutien financier public et repré-
senter la France en tant qu’autorité de contrôle aux niveaux international et européen.

49

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Livre I • Introduction

CHAPITRE 2
Institutions juridictionnelles

100. Les institutions juridictionnelles non consulaires sont soit judiciaires (Section 1) soit
­extra-judiciaires (Section 2). Elles sont destinées à mettre un terme aux différends.

Section 1 – Institutions commerciales judiciaires

§1. Tribunaux Judiciaires compétents en matière commerciale

101. Le TJ en tant que nouvelle juridiction de droit commun, dispose d’une compétence de
principe (COJ, art. L. 211-3) : il « connaît de toutes les affaires civiles ou commerciales pour
lesquelles compétence n’est pas attribuée expressément à une autre juridiction en raison
de la nature [à l’exclusion du montant] de la demande », à savoir des affaires civiles per-
sonnelles ou mobilières comme aujourd’hui, peu important leur valeur. En plus de cela,
des domaines lui sont spécifiquement attribués. Par exemple, les actions relatives aux
baux commerciaux à l’exception des contestations relatives à la fixation du prix du bail
révisé ou renouvelé, aux baux professionnels et aux conventions d’occupation précaire en
matière commerciale relèvent de sa compétence (COJ, art. L. 211-3-26 11°). Enfin, il existe
des disciplines dans lesquelles le TJ jouit d’un monopole matériel et territorial. Ainsi, Le
tribunal judiciaire ayant compétence exclusive pour connaître des actions en matière de
brevets d’invention, de certificats d’utilité, de certificats complémentaires de protection
et de topographies de produits semi-conducteurs, dans les cas et conditions prévus par le
code de la propriété intellectuelle, est celui de Paris (COJ, art. D. 211-6).

§2. Cours d’appel et de Cassation

102. La cour d’appel est une juridiction du second degré, c’est-à‑dire qu’elle connaît, de manière
générale, des appels dirigés contre les décisions des juridictions de premier degré situées
dans son ressort, notamment du Tribunal de commerce. Les cours d’appel sont divisées en
chambres. Les magistrats des cours d’appel sont appelés conseillers. À la tête de la cour
d’appel se trouvent un premier président et un procureur général. Chaque Cour d’appel
a une organisation propre. Les appels sur décision du Tribunal de commerce viennent

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Deuxième Partie – Introduction aux institutions commerciales

devant la Chambre commerciale qui peut être divisée en sections. On relève une singu-
larité à Paris : la création d’une chambre commerciale internationale à la cour d’appel de
Paris (CCIP-CA) qui constitue une innovation majeure dans le paysage judiciaire français.
Cette chambre est le fruit d’une mission initiée en 2017 par le ministère de la justice qui
a été confiée au Haut comité juridique de la place financière de Paris avec pour objet de
faire des propositions, au lendemain du vote britannique sur le brexit, « pour adapter le
système juridictionnel français aux enjeux économiques et juridiques internationaux
contemporains ». Enfin, la Chambre commerciale, financière et économique de la Cour
de cassation française est la formation de cette juridiction principalement compétente
en matière commerciale.

§3. Cour de Justice de l’Union européenne

103. En vertu de la procédure préjudicielle, le rôle de la Cour de Justice de l’UE (CJUE) est
d’interpréter le droit de l’Union ou de se prononcer sur sa validité. Il incombe ensuite à
la juridiction nationale d’appliquer ce droit, conformément à l’interprétation faite par la
CJUE, à la situation proprement dite à l’origine des procédures nationales au principal.
Or, le droit de l’UE intervient souvent en matière commerciale. Des pans entiers du droit
des assurances, du droit bancaire, ou encore du droit de la concurrence connaissent une
forte intervention normative européenne.

Section 2 – Institutions commerciales non judiciaires

104. À côté des juridictions d’état, se trouvent des juridictions arbitrales. En principe, la mission
de rendre la justice est une mission régalienne. L’État en est le dépositaire. Les parties
peuvent toutefois confier cette tâche à un juge privé. Il sera chargé de trancher le litige et
de rendre une sentence revêtue de l’autorité de la chose jugée. L’intérêt de cette pratique
est notamment la confidentialité, la rapidité et la spécialisation du tribunal. La possible
collégialité de la juridiction arbitrale et la complémentarité des arbitres sont également
des atouts. Pendant longtemps, cette procédure avait son domaine de prédilection en
droit commercial. Le litige commercial était celui qui était a priori arbitrable et susceptible
d’être saisi par la clause d’arbitrage. Depuis 2001 et la réforme NRE et les réformes qui ont
suivi, la discipline tend toutefois à être moins commercialiste et à s’élargir au domaine des
relations professionnelles indépendantes. Désormais, la clause compromissoire (clause
d’arbitrage) est opposable à la partie qui a contracté dans le cadre de son activité profes-
sionnelle1. La technique est très développée en matière internationale. En matière interne,
elle permet également de résoudre efficacement certains litiges. À côté des institutions

1. C. civil, art. 2061.

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Livre I • Introduction

parisiennes – ex. International Court of Arbitration (ICC), Centre de médiation et d’arbitrage


de Paris (CMAP), etc. –, on trouve également des chambres en province – ex. la Chambre
de conciliation, de médiation et d’arbitrage d’Occitanie (CMCAO) à Toulouse, la Chambre
régionale d’arbitrage (CRA) à Aix-en-Provence, la Cour européenne d’Arbitrage (CEA) à
Strasbourg, la Cour d’arbitrage de l’Europe du Nord (CAREN) à Lille, le Centre interpro-
fessionnel de médiation et d’arbitrage (CIMA) à Lyon, etc. En province, la CMCAO est la
plus ancienne des Chambres arbitrales françaises.

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Livre II

Actes en matière
commerciale
Par Laurent Posocco

105. Il est traditionnel de se demander si le droit commercial est le droit des commerçants
(approche subjective) ou le droit des actes de commerce (approche objective). L’approche
subjective limite l’application du droit commercial aux seuls commerçants. Cette ­conception
repose sur une tradition historique. En effet, le droit commercial résulte d’usages et de
réglementations qui intervenaient dans les corporations. La conception objective consi-
dère quant à elle l’acte passé, lequel justifie en lui-même la mise en œuvre des règles
­commercialistes. Elle permet l’application desdites normes à des non commerçants.
Pendant toute l’Antiquité et jusqu’à la Révolution française, le droit commercial est avant
tout le droit des marchands, comme le démontre l’intitulé de l’ordonnance de mars 1673
portant sur « le commerce des marchands de gros et de détail ». Le Code de commerce
de 1807 marque quant à lui une rupture : désormais, le commerçant est la personne qui
réalise des actes de commerce et en fait sa profession habituelle (actuel article L. 121-1
du Code de commerce). Ainsi, sous l’Ancien Droit, le droit commercial était défini par
rapport à la profession. Il s’agissait alors d’un droit professionnel regroupant les usages
du monde commercial et les règles des corporations des marchands. À partir de 1807, le
droit commercial a été prioritairement défini par rapports aux actes de commerce, faisant

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Livre II • Actes en matière commerciale

passer la qualité de l’auteur de ces actes au second plan. Aujourd’hui, ces deux approches
s’additionnent, se combinent. Analysons la commercialité résultant de l’activité en débu-
tant par la qualification de l’acte (Partie 1) et en terminant par le régime de l’acte (Partie 2).

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PREMIÈRE PARTIE

Qualification de l’acte
106. La qualification d’acte de commerce ne doit pas abuser : la notion ne recouvre pas celle
d’acte juridique et correspond souvent à une activité. Il est donc préférable de parler
« d’exercice » des actes de commerce, quoique le mot soit un peu général. La notion d’acte
de commerce n’est d’ailleurs pas définie par le législateur. Le Code de commerce énumère
une liste hétérogène et non exhaustive d’actes entrant dans cette catégorie (articles L. 110-1
et L. 110-2). Les actes de commerce peuvent être classés selon leur nature (Titre 1), selon
leur forme (Titre 2) et selon leur caractère accessoire (Titre 3). D’autres actes, sans pouvoir
être classés parmi les actes de commerce, doivent être analysés (Titre 4).

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Première Partie – Qualification de l’acte

TITRE 1 – Actes de commerce par nature


107. Une première catégorie d’actes a une nature commerciale indépendamment de la qualité
de l’auteur. La réalisation de l’acte peut se faire à titre isolé (Chapitre 1) ou en entreprise
(Chapitre 2).

CHAPITRE 1
Actes de commerce en raison de l’objet

108. L’article L. 110-1 du Code de commerce énumère successivement l’achat de biens dans le
but de les revendre (Section 1), les opérations d’intermédiaire (Section 2) et les opérations
financières (Section 3). Ces actes de commerce en raison de leur objet ne requièrent pas
d’être réalisés dans le cadre d’une organisation professionnelle. Ils sont commerciaux
même s’ils sont accomplis isolément.

Section 1 – Achat de biens dans le but de les revendre

109. L’achat de biens dans le but de les revendre est le premier acte de commerce cité par le
législateur. Le domaine de l’achat pour revendre est très vaste. Il est sans doute le plus
fréquent des actes de commerce.

§1. Acte d’achat

110. L’achat suppose une acquisition à titre onéreux. Par extension, on considère qu’est un achat
toute acquisition de la propriété à titre onéreux, c’est-à‑dire impliquant une contrepartie
même si celle-ci n’est pas un prix, par exemple un bien remis en échange. En revanche,
il n’y a pas acte de commerce à défaut d’achat préalable. Cette exigence exclut de la
commercialité notamment :
– les activités d’extraction des matières premières, sauf exception (ex. l’exploitation des
mines est commercial, v. art. L. 131-3 du Code minier),

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Livre II • Actes en matière commerciale

– les activités agricoles (L. 311-3 du Code rural et de la pêche maritime),


– les activités intellectuelles et les professions libérales,
– les activités d’enseignement
111. Meuble ou immeuble. Le bien acheté peut être un meuble corporel ou incorporel (créances
monétaires, droits sociaux, droits de propriété industrielle ou littéraire et artistique,
valeurs mobilières, etc.) ou un immeuble. Selon l’article L. 110-1, 2° du Code de commerce,
est commercial : « tout achat de biens immeubles aux fins de les revendre », sauf si l’ac-
quéreur a « agi en vue d’édifier un ou plusieurs bâtiments et de les vendre en bloc ou par
locaux ». L’achat d’un immeuble aux fins de revente ne constitue pas un acte de commerce
si la revente fait suite à l’édification de bâtiments. Par exemple, le promoteur immobilier
(acheteur-bâtisseur) qui achète un terrain pour y construire un ou plusieurs bâtiments
est écarté du domaine de la commercialité. Toutefois, l’achat ou la vente d’immeuble
accompli en dehors de l’achat pour revendre est un acte civil, même s’il est accompli entre
commerçants. La finalité lucrative exigée de l’opération exclut la vente de produits qui
n’ont pas été préalablement achetés.

§2. Intention de revendre

112. L’acte d’achat doit être réalisé avec l’intention de revendre. Cette intention doit répondre
aux trois conditions suivantes :
– Elle doit exister au moment de l’achat même si la revente ne se produit pas.
– Elle doit être inspirée par le désir de réaliser un bénéfice, quel que soit le résultat final,
positif ou négatif, de l’opération. Dès lors, un consommateur qui revend plusieurs jours
plus tard un bien acheté au préalable – devenu un bien d’occasion – ne réalise pas un
acte de commerce, mais un acte civil, contrairement à celui qui achète pour revendre,
à titre habituel, des biens meubles par l’intermédiaire d’un site Internet de vente aux
enchères.
– Elle doit porter sur l’objet acheté.

Section 2 – Opérations d’intermédiaire

113. Une opération d’intermédiaire vise les activités dont l’objet est de rapprocher des per-
sonnes. L’article L. 110-1 3° mentionne « toutes opérations d’intermédiaire pour l’achat, la
souscription ou la vente d’immeubles, de fonds de commerce, d’actions ou parts de socié-
tés immobilières ». L’interposition d’une personne dans les rapports entre deux autres au
moins est dans ce cas. La figure visée est essentiellement celle du courtage. Le courtage est
une activité qui consiste, pour une personne appelée le courtier, à mettre en relation, sans

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Première Partie – Qualification de l’acte

les représenter, des personnes afin qu’elles puissent conclure un contrat entre elles. À la
différence du mandataire et du commissionnaire, le courtier n’intervient nullement dans
la conclusion du contrat. On retrouve des courtiers en assurance, en matière de transport
ou dans le commerce des vins. La nature de l’acte de courtage est commerciale de droit,
quel que soit le secteur d’activité, y compris en matière de courtage matrimonial. Seront
également concernés les actes accomplis sur les immeubles et fonds de commerce par les
intermédiaires dans l’immobilier et par les courtiers. Ainsi, toutes opérations d’intermédiaire
pour l’achat, la souscription ou la vente d’immeubles, de fonds de commerce, d’actions
ou parts de sociétés immobilières est réputée commerciale. Notamment, les activités des
agences immobilières qui mettent en relations des acquéreurs et des vendeurs de biens
immobiliers sont commerciales. L’acte commercial d’entremise dans l’immobilier consiste
en effet, pour l’intermédiaire (agent immobilier), à mettre en relation des vendeurs et
des acheteurs de biens immobiliers. Par exception, une agence de location immobilière
réalise une activité civile et non commerciale.

Section 3 – Opérations financières

114. L’article L. 110-1 comprend les opérations de change, banque, courtage, activité d’émission
et de gestion de monnaie électronique et tout service de paiement, toutes les opérations
de banques publiques, ainsi que toutes obligations entre négociants, marchands et
banquiers. Une opération de banque est un acte de commerce par nature, quel que soit
son auteur, lequel peut être un établissement de crédit ou une mutuelle. Les opérations
de banque désignent l’ensemble des opérations dont l’exercice à titre habituel relève du
monopole bancaire. Elles sont définies à l’article L. 311-1 du Code monétaire et financier.
Sont visés la réception de fonds du public, les opérations de crédit, ainsi que les services
bancaires de paiement. Ces activités incluent les opérations de dépôt, les opérations de
crédit et l’ensemble des services bancaires de paiement que sont les opérations réalisées
par retrait ou versement d’espèces, cartes de paiement, virements ou prélèvements.
115. Opérations de bourse. Les opérations de bourses qui ne figurent pas dans cette liste sont
nécessairement commerciales pour les intermédiaires (banques, sociétés de gestion,
conseillers financiers, etc.) qui accomplissent des actes de commerce par nature, à titre
habituel et dans une intention lucrative. Pour la personne qui gère un portefeuille de
valeurs mobilières, c’est probablement le critère de la spéculation qui va déterminer la
qualification commerciale.
116. Opérations d’assurance. Une opération d’assurance consiste à fournir une prestation
financière ou de service lors de la survenance d’un risque au profit d’un assuré en échange
du paiement d’une prime périodique. L’assureur organise en une mutualité de nombreux
assurés, exposés à la réalisation de certains risques, et indemnise ceux d’entre eux qui

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Livre II • Actes en matière commerciale

subissent un sinistre grâce aux primes collectées. L’activité d’assurance, qui n’est pas visée
par l’article L. 110-1 du Code de commerce, n’est pas en soi – exception faite de l’assurance
maritime (Code de commerce, art. L. 110-2) – un acte de commerce1 ; mais les assurances
sont, en pratique, commerciales, parce qu’elles exercent sous forme de sociétés commer-
ciales, à l’exception des assurances mutualistes qui exercent sans intention spéculative.
Néanmoins, la mutuelle est commerciale lorsque son activité d’assurance est accessoire
par rapport aux activités commerciales constituant son objet social2.

CHAPITRE 2
Actes de commerce accomplis en entreprise

117. Accomplis en entreprise, les opérations de négoce (Section 1), d’intermédiation (Section 2),
et d’industrie (Section 3) sont commerciales.

Section 1 – Entreprise de négoce

118. Entreprise de location de biens meubles. Le Code de commerce, en son article L. 110-1, 4°
répute acte de commerce « toute entreprise de location de meubles ». Le louage de choses
est le contrat par lequel une personne, appelée « loueur » ou « bailleur », s’oblige à faire
jouir une autre, appelée « locataire » ou « preneur à bail », d’une chose pendant un certain
temps, et moyennant un certain prix. La location de meubles comprend notamment la
location de véhicules, de machines, de matériel, etc. Lorsqu’elle est isolée, elle échappe à
la qualification commerciale. Alors que l’entreprise de location de meubles est de nature
commerciale, l’activité de location d’immeubles, au contraire, est de nature civile, même
lorsque les locaux sont destinés à une activité commerciale. En revanche, l’activité hôte-
lière qui combine la location d’immeuble et la prestation de services est commerciale.
119. Entreprise de fourniture. L’entreprise de fournitures assure les livraisons de marchandises
ou de services auprès de ses clients, par une opération qui s’apparente à de l’achat pour
revendre. La fourniture de produits peut porter sur des biens achetés pour être revendus

1. CA Versailles 28-2-2002 n° 01.5039 : RJDA 1/03 n° 93.


2. Cass. com. 5-5-2009 n° 08-17.599 : D. 2009.1415.som.

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Première Partie – Qualification de l’acte

ou sur des biens fabriqués par le fournisseur lui-même. Tel est le cas en particulier de la
fourniture d’énergie (électricité, chauffage, air comprimé, gaz, etc.). La prestation de ser-
vices peut concerner des services matériels (ex. services des hôtels, chambres d’hôtes,
restaurants, pompes funèbres, agences de publicité) ou intellectuels (ex. services des
bureaux d’expertise). Les prestations des professions libérales demeurent toutefois civiles.
120. Entreprise de spectacles publics. Sont commerciales les entreprises qui ont pour objet
de distraire le public, moyennant une rétribution, par un spectacle ou un divertissement
quelconque. Était concernée à l’origine l’exploitation de théâtres, de music-hall, de
spectacles forains ; la catégorie s’étend aujourd’hui à l’exploitation de salles de cinéma,
de grottes aménagées dans un but touristique, aux concerts, casinos, cirques, mais aussi
plus généralement aux salles de spectacles et de conférences. Toutefois, une association
à but non lucratif n’accomplit pas des actes de commerce en organisant, de manière
occasionnelle, des manifestations publiques payantes1.

Section 2 – Entreprise d’intermédiaire

121. Entreprise de commission. L’article L. 110-1, 6° évoque l’entreprise de commission, l’agence


et les bureaux d’affaires. Ces activités consistent à gérer les affaires d’autrui et à faciliter
la conclusion de contrats. L’entreprise de commission est l’activité qui consiste, pour une
personne appelée le commissionnaire, à conclure un contrat en son nom mais pour le
compte d’une autre personne appelée le commettant. Le commissionnaire conclut donc
un contrat pour le compte de l’une des parties et s’engage en son nom propre, sans révéler
aux tiers l’identité du commettant. Il signe le contrat à titre personnel et non au nom de
son client. Le commissionnaire se distingue du mandataire, qui agit à la fois au nom et
pour le compte d’autrui. Il se distingue également du courtier, lequel rapproche les parties
sans participer à la conclusion du contrat. Par exemple, les entreprises qui reçoivent des
ordres d’achats et de ventes de valeurs mobilières et réalisent des opérations sans révéler
le nom de leur client utilisent ce type de contrat.
122. Agence et bureaux d’affaires. Les agences qui offrent leurs services pour faciliter ou gérer
les affaires d’autrui sont commerciales. En dehors du cas où la loi précise expressément,
comme c’est le cas de l’activité d’agent artistique dont il est indiqué qu’elle présente un
caractère commercial au sens des dispositions du Code de commerce2, les tribunaux consi-
dèrent comme un agent d’affaires « le mandataire professionnel libre qui, sans caractère
public, se charge habituellement de gérer les affaires d’autrui moyennant salaire »3. Ont

1. Cass. com., 13 mai 1970 - JurisData n°1970-097158 ; D. 1970, p. 644.


2. C. trav. art. L. 7121-11.
3. Cass. soc. 8-7-1942 : GP 1942.2.177.

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Livre II • Actes en matière commerciale

été jugées commerciales les activités des agences de voyages et tourisme1, des agences
immobilières2, des agences de recouvrement de créances3, des agences de renseigne-
ments4, des agences matrimoniales5, des agences théâtrales et artistiques6, des cabinets
de contentieux7, des généalogistes8, des mandataires spécialisés près des tribunaux de
commerce9 et même un bureau d’expertise fournissant tous services techniques relatifs
aux navires et à l’industrie maritime en général ainsi que des services d’inspection et de
consultation technique relatifs à des entreprises terrestres et maritimes10.
123. Entreprise de vente à l’encan. La vente volontaire de biens meubles aux enchères publiques
est commerciale. Sont concernées les ventes volontaires de biens meubles neufs ou
­d’occasion, par opposition aux ventes réalisées après saisies.

Section 3 – Entreprise industrielle

124. Entreprise de transport. L’entreprise de transport consiste à acheminer des personnes ou


des marchandises. Entre dans cette catégorie aussi bien de transport de personnes que de
biens. Les entreprises qui effectuent des transports de personnes ou de choses, par terre
ou par eau, sont commerciales11. Les entreprises de transport maritime sont commerciales
en application de l’article L 110-2 du Code de commerce ; celles de transport aérien ne sont
plus spécifiquement visées, l’article L 321-1 du Code de l’aviation civile et commerciale ayant
été supprimé par le Code des transports ; elles le sont lorsque la forme qu’elles revêtent
est commerciale ou lorsque, par application de la définition de droit commun de l’acti-
vité commerciale, le transport aérien est exercé dans un but spéculatif. Ainsi l’activité de
transport exercée à titre professionnel par une personne physique est civile12.
125. Par analogie, sont commerciales les entreprises fournissant un service lié au transport
(opérations de remorquage, de déménagement, de téléphériques, de télécabines, de
remonte-pentes en montagne, etc). La commercialité s’étend également à l’achat, la
construction, et la vente de navires, les expéditions maritimes, ou encore tous les contrats
concernant le commerce de mer. Ainsi, toute entreprise de construction, d’achats, ventes

1. Cass. com. 8-7-1969 : JCP G 1970. II. 16155 bis.


2. Cass. req. 8-11-1876 : DP 1877.1.184.
3. CA Paris 7-2-1977 : GP 1977.1.293.
4. CA Lyon 27-10-1971 : D. 1972.327.
5. Cass. com. 11-10-1982 : Bull. civ. IV p. 256.
6. C. trav. art. L. 762-4.
7. Cass. com. 2-4-1973 : Bull. civ. IV p. 125.
8. CE 16-2-1948 : JCP G 1948.II.4346.
9. CA Paris 18-10-1969 : JCP G 1970.II.16165.
10. Cass. com. 21-3-1995 : RJDA 8-9/95 n° 1060.
11. C. com. art. L. 110-1, 5°.
12. Par exemple v. Cass. com., 4 déc. 1968.- Bull. civ. IV, n° 345 pour un chauffeur de taxi dont l’exercice est limité à un véhicule
objet de propriété du chauffeur et agit à titre civil.

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Première Partie – Qualification de l’acte

et reventes de navires (bâtiments de mer) et de bateaux (bâtiments de rivière) est com-


merciale. Les entreprises de construction de navires sont celles qui construisent des navires
mais pas celles qui en assurent la réparation1. L’achat n’est commercial que s’il est fait
pour exploiter commercialement le bâtiment2. Quant à la vente de bateaux ou de navires,
elle n’est c­ ommerciale que si elle est faite dans une intention spéculative3. Toutefois,
jugé qu’est ­commerciale la vente d’une part de chalutier de pêche, même passée par un
­non-commerçant, l’article L 110-2 du Code de commerce visant « tous » achats, ventes et
reventes4.
126. Entreprise de manufacture. L’article L. 110-1, 5° énonce la commercialité de « toute entre-
prise de manufactures », laquelle fait référence à l’activité industrielle consistant à acheter
des matières premières pour les transformer et aboutir à un produit fini ou semi-fini (ex.
entreprise de confection de vêtements, industrie automobile, etc). La jurisprudence adopte
une conception extensive de l’entreprise de manufacture5 incluant toute entreprise de
transformation d’un produit, sans référence à l’achat préalable de matières premières,
telles l’activité de sidérurgie, la métallurgie, l’entreprise de travaux publics, etc.

1. CA Rouen 30-3-2006 : JCP G 2006.IV.2414.


2. Cass. req. 23-6-1888 : DP 1888.1.405 et CA Aix 8-7-1947 : D. 1947.2.456 : caractère non commercial de l’achat d’un yacht de
plaisance ; CA Rennes 27-6-1990 : DMF 1993.176 : caractère commercial de la commande d’un navire destiné à la pêche
commerciale.
3. CA Paris 7-4-1887 : DP 1888.2.119.
4. T. com. Seine 11-1-1951 : DMF 1951.196.
5. Cass. req., 20 oct. 1908. – DP 1909.1, p. 246.

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Première Partie – Qualification de l’acte

TITRE 2 – Actes de commerce par la forme


127. Le droit commercial conçoit des mécanismes destinés aux commerçants et il se trouve que
parfois ces derniers sont utilisés par des non-commerçants. Les actes de commerce par la
forme sont toujours de nature commerciale, quelle que soit la qualité de la personne qui
les accomplit, quel que soit l’objet sur lequel ils portent. Ils ne peuvent jamais revêtir un
caractère civil. Deux catégories d’actes de commerce par la forme doivent être analysées :
la lettre de change (Chapitre 1) et les sociétés commerciales par la forme (Chapitre 2).

CHAPITRE 1
Lettre de change

128. La lettre de change est une opération juridique conclue entre trois personnes : le tireur,
le tiré et le porteur. La lettre de change (ou « traite ») est un titre par lequel une personne,
appelée le tireur, donne mandat à une autre, appelée le tiré, qui est son débiteur, de payer
à un tiers, appelé le bénéficiaire ou le porteur, ou à son ordre, une somme d’argent définie,
à une date déterminée. La lettre de change est un effet de commerce, c’est-à‑dire un titre
négociable qui constate l’existence, au profit du porteur, d’une créance à court terme, et
qui sert à son paiement. La signature d’une lettre de change, par toute personne, constitue
un acte de commerce, quelle que soit la nature, civile ou commerciale, de la créance qu’il
s’agit de payer1. Cette qualification est d’importance car le signataire de la lettre de change
se soumet à la juridiction du Tribunal de commerce.
129. Les lettres de change souscrites par des mineurs sont nulles à leur égard. Si la lettre de
change porte des signatures de personnes incapables de s’obliger par lettre de change, des
signatures fausses ou des signatures de personnes imaginaires ou des signatures qui, pour
toute autre raison, ne sauraient obliger les personnes qui ont signé la lettre de change, ou
du nom desquelles elle a été signée, les obligations des autres signataires n’en sont pas
moins valables. Quiconque appose sa signature sur une lettre de change comme repré-
sentant d’une personne pour laquelle il n’avait pas le pouvoir d’agir, est obligé lui-même
en vertu de la lettre et, s’il a payé, a les mêmes droits qu’aurait eu le prétendu représenté.
Il en est de même du représentant qui a dépassé ses pouvoirs.
1. C. com. art. L. 110-1, 10°.

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Livre II • Actes en matière commerciale

130. En matière de crédit à la consommation, le fait de faire souscrire ou accepter ou avaliser


par l’emprunteur ou l’acheteur des lettres de change ou des billets à ordre est puni d’une
amende de 300 000 euros. Les lettres de change souscrites ou avalisées par les emprunteurs
même majeurs à l’occasion des opérations de crédit sont nulles.

CHAPITRE 2
Sociétés commerciales par la forme

131. Une société est un contrat par lequel deux ou plusieurs personnes, appelées les associés,
conviennent de mettre en commun des biens, une somme d’argent ou leur industrie,
affectés à l’activité d’une entreprise commune, dans le but d’en partager les résultats
d’exploitation. D’ordinaire, la qualification d’une société dépend de la nature de l’activité,
civile ou commerciale, qu’elle exerce. De son objet découle sa qualité commerciale. De
manière dérogatoire, certaines sociétés sont commerciales indépendamment de leur objet
social : ce sont les sociétés commerciales par la forme. Ainsi, l’article L. 210-1, al. 2 du Code
de commerce énonce : « sont commerciales à raison de leur forme et quel que soit leur
objet, les Sociétés en Nom Collectif (SNC), les Sociétés en Commandite Simple (SCS), les
Sociétés à Responsabilité Limitée ou Entreprise Unipersonnelle à Responsabilité Limitée
(SARL ou EURL) et les sociétés par actions (Sociétés Anonymes ou SA, Sociétés par Actions
Simplifiées ou SAS, Sociétés par actions simplifiées unipersonnelles ou SASU et Sociétés
en Commandite par Actions ou SCA) ». Ces personnes morales sont commerçantes quel
que soit leur objet social, même si ce dernier n’envisage aucun acte de commerce1. Les
actes qu’elles passent sont des actes de commerce. Par extension, les actes de formation
et de dissolution de la société sont commerciaux. L’acte qui serait accompli par la société
mais qui sortirait de son objet n’aurait pas, en revanche, de qualification commerciale. Les
statuts déterminent la forme sociale de la société. Certains types de sociétés requièrent
des associés et confèrent aux associés (SNC) ou à certains d’entre eux (les commandités
de la SCS et de la Société en Commandite par Actions) la qualité de commerçant, lesquels
répondent indéfiniment et solidairement des dettes sociales. D’autres formes sociétaires
ne requièrent des associés ni ne leur confèrent ladite qualité commerciale (SARL, EURL,
SAS, SA, SASU, commanditaires de la SCS ou de la SCA).

1. Cass. com., 29 sept. 2009, n° 08-17205.

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Première Partie – Qualification de l’acte

TITRE 3 – Actes de commerce par accessoire


132. L’adage selon lequel « l’accessoire suit le principal » invite à étendre la commercialité à un
acte civil. Les actes de commerce par accessoire sont des actes qui ne sont commerciaux ni
par nature ni par leur forme. Deux catégories d’actes de commerce par accessoire doivent
être distingués : les actes de commerce par accessoire subjectif (Chapitre 1) et les actes de
commerce par accessoire objectif (Chapitre 2).

CHAPITRE 1
Actes de commerce par accessoire subjectif

133. Un acte, civil par nature, devient commercial lorsqu’il est accompli par un commerçant pour
les besoins de son activité commerciale. Deux conditions cumulatives sont nécessaires à
la qualification d’acte de commerce par accessoire subjectif : la qualité de commerçant
(Section 1) et le rattachement de l’acte à l’exercice d’une activité commerciale (Section 2).

Section 1 – Qualité de commerçant de l’auteur de l’acte

134. La qualité de commerçant s’acquiert en accomplissant, à titre de profession habituelle,


des actes de commerce par nature. Sont en effet commerçants, selon l’article L. 121-1 du
Code de commerce, « ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession
habituelle ». L’accomplissement d’actes de commerce en nombre limité n’entraîne pas
la qualification de commerçant1. De plus, d’après l’article L. 123-7 du Code de commerce,
« l’immatriculation d’une personne physique au RCS emporte présomption de la qualité
de commerçant ». L’inscription au RCS permet à son titulaire d’invoquer sa qualité de
commerçant. Cependant, un commerçant non immatriculé qui est un commerçant de
fait peut se voir appliquer les règles commerciales à la demande d’un tiers.
135. Pour les personnes morales, la qualité de commerçant peut résulter notamment mais pas
seulement du choix de la forme commerciale de la société.

1. Com. 29 janv. 2020, n° 19-12.584.

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Livre II • Actes en matière commerciale

Section 2 – Finalité professionnelle de l’acte

136. Pour être commercial par accessoire, l’acte doit avoir été accompli par le commerçant pour
les besoins de son activité commerciale, et non pour son usage particulier. Échappent donc
à cette forme de commercialité notamment, de manière très logique et cohérente, tous
les actes qui, bien qu’accomplis par un commerçant, l’ont été pour ses besoins familiaux.

CHAPITRE 2
Actes de commerce par accessoire objectif

137. Finalité commerciale. Parfois appelés « actes de commerce par détermination de la


jurisprudence », ces actes sont devenus commerciaux au terme de décisions de justice.
Certains auteurs les ont également désignés comme « actes de commerce par leur fonc-
tion ». L’élément à retenir est que le dessein commercial poursuivi par l’auteur de l’acte
contamine certains contrats liés à l’activité commerciale. Ainsi, bien qu’il soit accompli
par un non-commerçant, l’acte a été réalisé pour une activité commerciale et il devient
commercial. Notamment deux cas de commercialité par accessoire objectif peuvent être
cités : la cession d’entreprise commerciale (Section 1) et le cautionnement (Section 2).

Section 1 – Cession d’une entreprise commerciale

138. La cession d’entreprise commerciale est un acte de commerce par accessoire objectif1. La
cession d’une entreprise commerciale regroupe deux types de cession : la cession d’un fonds
de commerce (§1) et la cession de la majorité des titres du capital social d’une société (§2).

§1. Cession d’un fonds de commerce

139. Le fonds de commerce est un bien meuble incorporel. Il peut être cédé par le commer-
çant ou par un non commerçant (ex. les héritiers du commerçant). Dans le premier cas,
la cession d’un fonds de commerce est un acte de commerce par accessoire objectif parce
1. Cass. Com. 15 nov. 2005, n° 97-20832.

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Première Partie – Qualification de l’acte

que l’acte est passé dans le but d’exercer un commerce, il permet l’exercice de celui-ci.
Tout acte qui permettra à cette opération de se réaliser sera commercial (ex. promesse
synallagmatique de vente du fonds, promesse d’achat, le contrat de location-gérance, le
nantissement du fonds de commerce, etc).

§2. Cession de blocs de contrôle d’une société

140. En principe, la cession de droits sociaux est civile, même si elle porte sur des titres de socié-
tés commerciales par la forme. La cession peut toutefois avoir une qualité commerciale
dans un cas particulier : lorsqu’elle confère à l’associé la qualité de commerçant (ex. SNC).
Également, la cession est commerciale dans deux autres cas : lorsqu’elle sert à prendre
le contrôle de la société et lorsqu’elle permet de maintenir le contrôle de la société. Par
exception, la jurisprudence qualifie la cession de contrôle d’acte de commerce1.

Section 2 – Cautionnement

141. Le cautionnement est le contrat par lequel une personne, la caution, s’engage envers une
autre personne, le créancier, à payer la dette du débiteur principal en cas de défaillance
de ce dernier. Cette sûreté personnelle a a priori un caractère civil mais elle devient com-
merciale par l’objectif qu’elle poursuit, à savoir permettre la réalisation d’une opération
commerciale2. Par exemple, le cautionnement consenti par le dirigeant social en garantie
d’un emprunt bancaire de la société dirigée est commercial par accessoire objectif sous
deux conditions cumulatives :
– La dette cautionnée doit être commerciale.
– Le cautionnement doit être conclu de manière intéressée.
Dans d’autres hypothèses, le cautionnement peut être commercial à un autre titre. Par
exemple, il peut devenir commercial par nature s’il est consenti par un établissement
bancaire au profit d’un client3.

1. Cass. com. 28 déc. 1978. – D. 1980, p. 316, note BOUSQUET. Cass. com., 28 nov. 2006, n° 05-14827.
2. Cass. com., 7juill. 1969.- D. 1970, p. 14.
3. C. de commerce, art. L. 110-1, 7°.

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Première Partie – Qualification de l’acte

TITRE 4 – Actes mixtes


142. D’autres actes, sans être totalement commerciaux, doivent être analysés car ils intéressent
la vie des affaires. L’acte qui est commercial pour une partie, et non commercial, donc
civil, pour l’autre est qualifié d’acte mixte. Généralement, ces actes sont passés entre une
personne, agissant en tant que commerçant dans le cadre de sa profession, et une per-
sonne, n’agissant pas en tant que commerçant (notamment contrats de consommation ou
les contrats conclus entre un commerçant, dans le cadre de son commerce). L’acte mixte
peut toutefois être passé entre deux commerçants dont l’un agirait à titre privé. Pour ce
dernier, l’acte serait bien civil.

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DEUXIÈME PARTIE

Régime de l’acte
143. Le régime des actes de commerce est un régime dérogatoire du droit civil. L’acte de com-
merce conclu entre commerçants est soumis à l’application de règles fondées sur une
recherche de pragmatisme, de rapidité et de confiance. Une difficulté surgit lorsque l’acte
est commercial à l’égard d’une partie et civil à l’égard de l’autre. Il s’agit alors d’un acte
mixte. Le régime juridique de l’acte mixte (Titre 2) diffère de celui de l’acte de commerce
pur (Titre 1).

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Deuxième Partie – Régime de l’acte

TITRE 1 – Régime des actes de commerce purs


144. La formation (Chapitre 1), l’exécution et l’extinction (Chapitre 2) des actes de commerce
répondent à des conditions précises. Certaines d’entre elles sont spécifiques à la matière
commerciale. À ce titre, elles méritent un examen attentif.

CHAPITRE 1
Formation des actes de commerce purs

145. La formation des actes de commerce obéit à des conditions de fond (Section 1) et de forme
(Section 2). L’activité commerciale doit, pour donner lieu à des obligations commerciales,
répondre auxdites conditions.

Section 1 – Conditions de fond

146. L’acte de commerce n’échappe pas aux conditions générales de validité imposées par
l’article 1128 du Code civil. C’est en matière de capacité (§1) et de consentement (§2) que
le droit commercial se singularise.

§1. Capacité commerciale

147. L’exercice du commerce suppose la capacité commerciale. L’incapacité interdit en principe


l’accès à la qualité de commerçant. La question de la capacité commerciale concerne tant
le mineur (A) que le majeur (B).

A. Minorité

148. Le mineur non émancipé ne peut accomplir d’actes de commerce ni devenir commerçant,
même en étant représenté. Toutefois, par exception, le mineur âgé de 16 ans révolus
peut être autorisé, par son ou ses administrateurs légaux, à accomplir seul les actes

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Livre II • Actes en matière commerciale

d’administration nécessaires à la création et à la gestion d’une entreprise individuelle à


responsabilité limitée ou d’une société unipersonnelle. Le mineur émancipé peut être
commerçant sur autorisation du juge des tutelles au moment de la décision d’émanci-
pation, ou du président du TJ s’il formule cette demande après avoir été émancipé1. Le
mineur émancipé, s’il y est autorisé, peut accomplir tous les actes nécessaires à l’exercice
d’une activité commerciale, dont l’exploitation d’un fonds de commerce.

B. Protection du majeur

149. Le majeur placé sous tutelle doit être représenté en permanence pour tous les actes juri-
diques qu’il est amené à conclure. Il ne peut acquérir la qualité de commerçant, même par
l’intermédiaire de son tuteur. Le majeur placé sous curatelle est assisté temporairement :
il peut accomplir seul les actes d’administration et de gestion courante mais il ne peut
effectuer aucun acte important sans l’assistance de son curateur, lequel doit intervenir pour
chaque acte de disposition. Il peut devenir commerçant sur décision du juge des tutelles
publiée au registre du commerce et des sociétés. Enfin, le majeur placé sous sauvegarde
de justice conserve l’exercice de ses droits, mais peut faire annuler, résoudre ou rescinder
des actes passés sous le coup d’un trouble mental. Le majeur placé sous cette protection
peut devenir commerçant, mais les actes qu’il conclut peuvent être remis en cause.

§2. Consentement

150. Le consentement des parties est requis pour la validité de l’acte. En droit civil, on considère
que le « le silence ne vaut pas acceptation »2. Toutefois, le Code civil prévoit des possibilités
de dérogations issues « de la loi, des usages, des relations d’affaires ou de circonstances
particulières ». La règle est donc la suivante : qui ne dit mot ne consent pas, sauf cas parti-
culier. Il en résulte que le silence peut valoir acceptation dans certaines situations. Ainsi,
dans un contexte ou des commerçants entretiennent des relations d’affaires suivies, leurs
pratiques habituelles sont prises en compte et elles prévalent sur le silence gardé par l’une
des parties. L’acceptation d’une partie peut ainsi être déduite de relations d’affaires et de
pratiques antérieures.

Section 2 – Conditions de forme

151. Le contrat commercial est en principe consensuel et, souvent, aucun écrit n’est exigé. La
réglementation de la forme irait la plupart du temps à l’encontre la rapidité des échanges

1. C. com., art. L. 121-2.


2. C. civil, art. 1120.

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Deuxième Partie – Régime de l’acte

commerciaux. Il ne faut toutefois pas déduire d’une telle flexibilité une absence de forme.
Le consentement peut être exprès, tacite ou implicite, il peut être oral ou écrit, il peut
résulter d’un comportement, mais il existe, il est extériorisé par son auteur, et les parties
peuvent s’opposer à la formation du contrat. L’absence de réglementation de la forme ne
signifie pas une absence pure et simple de forme. Dans certains cas, le droit commercial
va même s’avérer très formaliste. Par exemple, le contrat de location-gérance doit faire
l’objet d’une publication, la lettre de change comporte des mentions obligatoires, le
nantissement de fonds de commerce doit être constaté par acte authentique ou par acte
sous seing privé enregistré. Un tel encadrement, lorsqu’il est prévu, concourt à la sécurité
des actes et à leur connaissance par les tiers.

CHAPITRE 2
Exécution des actes de commerce purs

152. L’exécution des actes de commerce purs est soumise à des particularités relatives notam-
ment à la solidarité commerciale (Section 1), à la preuve des obligations commerciales
(Section 2), à l’anatocisme (Section 3), à la compétence juridictionnelle (Section 4) et à la
prescription extinctive de l’obligation commerciale (Section 5).

Section 1 – Solidarité commerciale

153. Dette civile présumée conjointe. L’obligation civile qui lie plusieurs créanciers ou débiteurs
se divise de plein droit entre eux1. L’obligation est dite conjointe. La solidarité est légale ou
conventionnelle ; elle ne se présume pas2. Le créancier va donc demander, sauf convention
ou loi contraire, le paiement à chaque débiteur pour le montant de sa fraction de dette.
154. Dette commerciale présumée solidaire. En matière commerciale au contraire, la dette est
présumée solidaire entre codébiteurs d’une même obligation. Cette règle favorise l’exé-
cution des obligations commerciales en augmentant le crédit des débiteurs. La solidarité
est qualifiée de passive en ce sens qu’elle permet à un créancier ayant plusieurs débiteurs

1. C. civil, art. 1309.


2. C. civil, art. 1310.

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Livre II • Actes en matière commerciale

de réclamer le paiement de la totalité de la dette à l’un seul d’entre eux, à charge pour
celui qui a payé (le solvens), de demander leurs contributions respectives aux coobligés. Le
créancier n’a pas à diviser ses poursuites et l’insolvabilité d’un ou de plusieurs codébiteurs
sera donc, le cas échéant, supportée dans un premier temps par le solvens. La présomption
de solidarité est une présomption simple.
155. Dette commerciale expressément solidaire. Dans certains cas, la solidarité est expressément
prévue par la norme. Ainsi, entre associés d’une Société en Nom Collectif, les dettes de la
société sont solidaires1. Les associés en nom collectif ont tous la qualité de commerçant et
répondent indéfiniment et solidairement des dettes sociales. Les créanciers de la société
ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé, qu’après avoir
vainement mis en demeure la société par acte extrajudiciaire.

Section 2 – Règles de preuve

156. Preuve civile. L’acte juridique portant sur une somme ou une valeur supérieure à 1 500 €
doit être en matière civile prouvé par écrit sous signature privée ou authentique2. L’acte
sous signature privée et l’acte authentique sont donc les deux principaux modes de preuve
des actes juridiques d’un montant supérieur à 1 500 €. Au-dessous de ce seuil, la preuve
peut être rapportée par tout moyen. D’autre part, en matière civile, la hiérarchie de la
preuve place l’écrit au-dessus des autres modes. Enfin, pour prouver un acte juridique,
nul ne peut se constituer de preuve à lui-même.
157. Preuve commerciale. À l’égard des commerçants, les actes de commerce peuvent se
prouver par tout moyen, à moins qu’il n’en soit disposé autrement par la loi3. Ces règles
répondent aux exigences de rapidité et de souplesse des opérations de commerce. Aucune
hiérarchie de la preuve n’est a priori établie. Dans une certaine mesure, le commerçant
peut se constituer une preuve à son propre profit. La comptabilité régulièrement tenue
peut-être admise en justice pour faire preuve entre commerçants pour faits de commerce4.
Les comptes annuels et les livres comptables peuvent être utilisés à cette fin.

Section 3 – Anatocisme

158. Anatocisme en droit civil. L’anatocisme consiste à capitaliser les intérêts d’une dette,
c’est-à-dire à faire produire des intérêts aux intérêts. En droit civil, l’anatocisme suppose
1. Code de commerce, art. L221-1.
2. C. civ., art. 1359 al. 1.
3. C. com., art. L. 110-3’.
4. C. com., art. L. 123-23.

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Deuxième Partie – Régime de l’acte

une convention expresse1. Les intérêts ne peuvent donner lieu à une capitalisation que
s’ils sont dus pour une année entière au moins. Prenons l’exemple d’un prêt civil de 1 000
comportant un intérêt de 10 % et remboursable en 10 fois. À chaque remboursement,
l’emprunteur doit payer 110 ; si l’emprunteur ne restitue que le capital sans rembourser
les intérêts, il rend 100 par échéance. Les 10 qu’il ne rembourse pas au titre des intérêts ne
peuvent pas porter intérêt, sauf éventuellement au bout d’un an. Donc, l’emprunteur peut
payer 9 fois 100, et le dernier mois, payer le dernier montant de capital (100), plus tous les
intérêts d’un coup (c’est-à‑dire 100), sans être sanctionné par le fait que ces intérêts ont
eux-mêmes produit des intérêts.
Somme totale remboursée = (9 × 100) + 100 + 100
Somme totale remboursée = 1 100
159. Anatocisme en droit commercial. En droit commercial, la capitalisation des intérêts est
parfois présumée (ex. dans le cadre du compte-courant) et peut courir à partir d’un terme
beaucoup plus bref (généralement un semestre, parfois un trimestre). Reprenons le même
exemple mais cette fois-ci en droit commercial. Si les intérêts non payés produisent eux-
mêmes des intérêts de 10 %, à la dernière échéance, il faut payer : 100 (le reste du capital)
+ 100 (les intérêts) + 100 × x % (les intérêts des intérêts à calculer selon un prorata).
Somme totale remboursée = (9 × 100) + 100 + 100 + (100 × x %)
Somme totale remboursée = 1 100 + (100 × x %)

Section 4 – Compétence juridictionnelle

160. Des règles relatives à la compétence territoriale (§2) ou d’attribution (§1) doivent être
relevées. Elles concernent essentiellement les clauses dérogatoires.

§1. Compétence d’attribution (rationae materiae)

161. Compétence matérielle. La juridiction consulaire tranche2 les litiges entre commerçants,
les litiges portant sur des actes de commerce ou lettres de change, les litiges relatifs aux
sociétés commerciales et les litiges relatifs aux difficultés financières des entreprises
commerciales et les litiges entre plusieurs entreprises ou établissements financiers ou
bancaires. Les litiges nés d’un pur acte de commerce, en première instance, relèvent de la
compétence des juridictions consulaires. Dans les localités où il n’existe pas de tribunal de
commerce, il appartient au Tribunal judiciaire de trancher les contestations commerciales.

1. C. civ., art. 1343-2.


2. C. com., art. L. 721-1 à L. 721-6.

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Livre II • Actes en matière commerciale

162. Clauses dérogatoires. Les clauses portant sur la compétence matérielle sont celles qui
tendent à soustraire un litige au tribunal matériellement compétent. On considère géné-
ralement que les clauses attributives de compétence matérielle sont valables lorsqu’elles
tendent à soumettre le litige commercial aux juridictions de droit commun (TJ). Il est en
revanche impossible de stipuler une clause tendant à attribuer au tribunal de commerce
un litige relevant de la compétence exclusive d’une autre juridiction d’exception. D’autre
part, il ne peut pas être dérogé à la compétence exclusive du Tribunal judiciaire au profit
du tribunal de commerce.

§2. Compétence territoriale (rationae loci)

163. Droit commun. S’agissant de la compétence territoriale, les règles sont fixées par les
articles 42 et s. du CPC. La juridiction territorialement compétente est, sauf disposition
contraire, celle du lieu où demeure le défendeur1. S’il y a plusieurs défendeurs, le deman-
deur saisit, à son choix, la juridiction du lieu où demeure l’un d’eux. Si le défendeur n’a ni
domicile ni résidence connus, le demandeur peut saisir la juridiction du lieu où il demeure
ou celle de son choix s’il demeure à l’étranger. Le demandeur peut saisir à son choix, outre
la juridiction du lieu où demeure le défendeur en matière contractuelle, la juridiction du
lieu de la livraison effective de la chose ou du lieu de l’exécution de la prestation de service ;
en matière délictuelle, la juridiction du lieu du fait dommageable ou celle dans le ressort
de laquelle le dommage a été subi2.
164. Droit commercial. Selon l’article 48 du Code de procédure civile, une clause attributive de
compétence juridictionnelle qui déroge aux règles de compétence territoriale est admise
lorsqu’elle est contenue dans un acte de commerce, à condition toutefois que cet acte
ait été conclu entre deux commerçants et qu’elle soit, en outre, spécifiée de façon très
apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée.

Tableau du petit pont sur les options de compétence en faveur du tribunal de commerce

Défendeur
Commerçant Non-commerçant
Commerçant Tribunal de commerce Tribunal civil
Option de
Demandeur compétence – Libre
Non-commerçant choix – Admission Tribunal civil
de la clause
dérogatoire

1. CPC, art. 42.


2. CPC, art. 46.

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Deuxième Partie – Régime de l’acte

Section 5 – Prescription extinctive de l’obligation commerciale

165. Principe. La prescription extinctive en matière civile et commerciale est de 5 ans1. Cette
durée s’applique dans les relations entre commerçants, ainsi qu’entre commerçants et
non-commerçants. Toutes les obligations du commerçant, légales, contractuelles ou
délictuelles, sont concernées dès lors que le commerçant a agi à l’occasion de son activité
commerciale.
166. Exception. En matière commerciale, la durée de la prescription comporte des singularités.
En présence d’une prescription spéciale plus courte, on va écarter la règle quinquennale. Par
exemple, en matière de transport, les actions en réparation des avaries, pertes ou retard,
se prescrivent par un an2 ; en matière de lettre de change, l’action contre le tiré accepteur
se prescrit par 3 ans3 ; en matière de baux commerciaux, l’action en requalification en bail
commercial se prescrit par un délai de 2 ans4.

1. C. com., art. L. 110-4, I.


2. C. com., art. L. 133-6.
3. C. com., art. L. 511- 78, al. l.
4. C. com., art. L. 145-60.

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Deuxième Partie – Régime de l’acte

TITRE 2 – Régime des actes mixtes


167. L’acte mixte a la particularité d’être à la fois commercial à l’égard d’une partie et civil à
l’égard d’une autre partie. En présence d’un acte mixte, le principe est l’application d’un
régime distributif (Chapitre 1), la règle d’exception étant l’application d’un régime commun
(Chapitre 2).

CHAPITRE 1
Principe : régime distributif

168. Distributivité. Le régime dualiste aboutit à une distributivité des règles civiles et com-
merciales : le cocontractant non-commerçant se voit appliquer les règles du droit civil
et le cocontractant commerçant les règles du droit commercial. La partie non-commer-
çante dispose cependant d’une option entre les règles civiles et commerciales. Ainsi, le
non-commerçant peut prouver à l’égard du commerçant par tout moyen. De son côté, le
commerçant doit respecter le formalisme de la preuve littérale vis-à‑vis du non-commer-
çant. Lorsqu’un litige concerne un acte mixte, la partie non-commerçante peut choisir de
saisir soit le Tribunal de commerce, soit le tribunal civil compétent.

CHAPITRE 2
Exception : régime commun

169. Droit commercial ou droit civil. Le régime unitaire aboutit à une application de règles
identiques, communes aux deux parties à l’acte mixte. Le législateur va faire prévaloir, pour
une situation donnée, soit les règles du droit civil, soit celles du droit commercial. Parce

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Livre II • Actes en matière commerciale

que son application est quelquefois inadéquate voire impossible, le principe distributif
est exclu au profit d’un régime commun. Autrement dit, dans ces cas-là, on appliquera à
toutes les parties à l’acte soit le droit civil, soit le droit commercial. Par exemple, la pres-
cription ne se divise pas suivant qu’elle est opposée à l’une ou l’autre des parties. Il serait
difficilement admissible que le droit d’action portant sur une même obligation s’éteigne
dans un délai différent suivant que la partie est ou non commerçante. La prescription
courte du droit commercial ne servirait plus ni la rapidité ni la sécurité du commerce. Pour
cette raison, le régime est unitaire.
170. Consommateur et professionnel. Lorsque les actes mixtes mettent en présence un pro-
fessionnel et un consommateur, le régime du Code de la consommation s’impose à tous.
À ce titre, par exemple, les clauses abusives seront réputées non écrites.

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Livre III

Acteurs du commerce
Par Patrick Posocco

171. La définition des acteurs du commerce pose une première difficulté car l’activité com-
merciale met en scène des protagonistes qui, sans être commerçants, participent à la vie
des affaires (Partie 1). Celle-ci résolue, le statut du commerçant proprement dit et de son
conjoint pourront être analysés (Partie 2).

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PREMIÈRE PARTIE

Professionnels
du commerce
172. Le droit commercial peut se définir comme la branche du droit privé relative aux opérations
juridiques accomplies par les commerçants, soit entre eux, soit avec leurs clients. Le régime
juridique applicable au commerçant ne peut se comprendre qu’après avoir identifié les
contours de la qualification de commerçant (Titre 1). Cet acteur du commerce doit être
distingué d’autres professionnels non-commerçants (Titre 2).

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Première Partie – Professionnels du commerce

TITRE 1 – Définition du commerçant


173. La définition du commerçant débute par sa définition positive indiquant ce qui le carac-
térise (Chapitre 1). Elle se poursuit par sa définition négative qui le singularise de figures
voisines (Chapitre 2).

CHAPITRE 1
Définition positive du commerçant

174. Le commerçant est un professionnel. Le professionnel se définit comme toute personne


physique ou morale, publique ou privée, qui agit à des fins entrant dans le cadre de son
activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, y compris lorsqu’elle agit
au nom ou pour le compte d’un autre professionnel. En effet la qualité de professionnel
commerçant résulte soit de la nature de l’activité (Section 1), soit de la forme de l’activité
(Section 2).

Section 1 – Qualité de commerçant résultant de la nature


de l’activité

175. Sont commerçants les professionnels qui exercent des actes de commerce et en font leur
profession habituelle1. La qualité de commerçant est conditionnée à la satisfaction de trois
critères cumulatifs : la réalisation d’actes de commerce (§1) à titre de profession habituelle
(§2) et à titre personnel et indépendant (§3).

1. C. com., art. L. 121-1.

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Livre III • Acteurs du commerce

§1. Exercice d’actes de commerce

176. L’acte de commerce par nature constitue la base du droit commercial puisque le commer-
çant est défini à partir de cette catégorie d’acte. Le Code de commerce fixe une liste d’acte
de commerce par nature1 sans donner, toutefois, de définition générale de cette notion.
Seuls l’accomplissement de ces actes de commerce par nature permet de qualifier un
professionnel de commerçant. Il existe une exception notable pour les associés en nom
et les associés commandités2 pour lesquels cette seule qualité leur confère le statut de
commerçant.
Ainsi, la réalisation d’acte de commerce par la forme ou par accessoire ne confère pas la
qualité de commerçant à son auteur.

§2. Exercice d’actes de commerce à titre de profession habituelle

177. Le commerçant doit accomplir des actes de commerce. S’il n’accomplit pas d’actes de
commerce, le professionnel ne peut pas être qualifié de commerçant. Si cette condition est
essentielle, elle n’est cependant pas suffisante. La jurisprudence apprécie cette exigence
de profession habituelle comme une « occupation sérieuse de nature à produire des bénéfices
et à subvenir aux besoins de l’existence »3. L’exigence de profession habituelle est appréciée
au regard du caractère lucratif de l’activité dont le lien avec la notion d’habitude n’est pas
forcément évident. La solution semble réserver le statut de commerçant aux personnes qui
exercent cette profession à titre principal ou du moins qui tirent la majeure partie de leur
revenu de cette activité. Dès lors, se pose la question de savoir si les autoentrepreneurs4
devenus micro entrepreneurs5 peuvent être qualifiés de commerçant ? Lors de la création
du statut d’autoentrepreneur, la volonté du législateur était de mettre en place des figures
juridiques permettant d’encadrer et de simplifier l’exercice d’activités accessoires ou
secondaires qui peuvent consister à l’accomplissement d’acte de commerce par l’objet.
178. L’esprit de lucre est sous-entendu par cette exigence de profession habituelle. Le but de
l’acte de commerce est de réaliser un bénéfice. La profession se définit comme l’activité
habituellement exercée par une personne pour se procurer les ressources nécessaires à son
existence. Il est nécessaire d’accomplir des actes de commerce par nature en poursuivant
un but spéculatif, non philanthropique.
179. Une autre hypothèse qui peut poser des difficultés d’interprétation est celle de la per-
sonne qui tirerait ses ressources ordinaires de la spéculation en bourse, en vendant et
en achetant habituellement des valeurs mobilières en bourse, pour en tirer un revenu
1. C. com. art. L. 110-1 et L. 110-2.
2. C. com. art. L. 221-1, al. 1.
3. Paris, 30 avr. 1906, DP 1907. 5. 9.
4. Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie.
5. Loi n° 2014-626 du 18 juin 2014.

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Première Partie – Professionnels du commerce

régulier. L’activité est usuellement réalisée dans un but spéculatif mais elle ne constitue
pas forcément l’activité principale.

§3. Exercice personnel d’actes de commerce

180. La réalisation d’une profession indépendante suppose que la personne dispose d’une
véritable autonomie juridique dans la réalisation des actes de commerce. Le commerçant
doit agir pour son propre compte, en exerçant son activité à ses risques et périls. Ce critère
exclut de la commercialité les personnes qui agissent pour le compte du commerçant
comme les salariés ou les mandataires (agents commerciaux, mandataires sociaux…).
181. L’indépendance s’apprécie uniquement sur le plan juridique et non économique. Cette
acception économique de la notion a permis d’intégrer dans la sphère de la commercialité
les revendeurs intégrés dans un réseau de distribution (franchise, concession).

Section 2 – Qualité de commerçant résultant de la forme


de l’activité

182. A été abordée la notion d’acte de commerce par la forme qui est réputé commercial quel
que soit son objet. Ont été évoquées deux catégories d’acte de commerce par la forme1 : la
lettre de change et les sociétés commerciales par la forme2. La présente section va s’attarder
sur les sociétés commerciales par la forme et plus particulièrement sur leur régime. Les
actes réalisés par ces groupements seront commerciaux quel que soit leur objet. Ainsi,
une société ayant une forme commerciale est assujettie au droit commercial même si son
objet social est exclusivement civil3.
183. Certains groupements confèrent la qualité de commerçant à leurs associés (ex. les associés
en nom des Sociétés en Nom Collectif) ou à certains d’entre eux (ex. les associés comman-
dités dans les Sociétés en Commandite simple (SCS)4 ou par actions (SCA)). Ainsi, dans
ces structures, la personne morale aura automatiquement la qualité de commerçant de
même que lesdits associés.

1. C. com. L. 210-1.
2. L’article L. 210-1 du Code de commerce déclare « commerciales, à raison de leur forme et quel que soit leur objet, les
sociétés en nom collectif, les sociétés en commandite simple, les sociétés à responsabilité limitée et les sociétés par
actions ». Les sociétés par actions sont les sociétés anonymes (SA), les sociétés par actions simplifiées (SAS) et les sociétés
en commandite par actions (SCA).
3. Pour le cas d’une profession libérale v. Cass. com., 29 sept. 2009, n° 08-17205.
4. Voir supra § 96.

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Livre III • Acteurs du commerce

CHAPITRE 2
Définition négative du commerçant

184. Certains professionnels ne réalisant pas a priori d’actes de commerce exercent des profes-
sions dont la nature de l’activité devra être considérée comme civile. À ce titre, on retrouve
l’artisan (Section 1), l’agriculteur (Section 2) et le professionnel libéral (Section 3). Ces
derniers participent à la vie des affaires.

Section 1 – Artisan

185. La qualité d’artisan s’acquiert en remplissant certains critères légaux (§1). Un régime
spécial lui est applicable (§2).

§1. Qualité d’artisan

186. Une première ébauche de la notion d’artisan est fournie par la Cour de cassation. Elle a
été complétée par une définition administrative.
187. Définition jurisprudentielle. La recherche du lucre est le critère historique de distinction
de l’activité artisanale de celle de commerçant. Dans une décision ancienne1, la Cour de
cassation indique que « l’artisan se distingue du commerçant en ce que ses revenus professionnels
proviennent essentiellement de son travail manuel et qu’il ne spécule ni sur les matières premières
ni sur le travail d’autrui ». Aux termes de cet arrêt, il peut être retenu que l’artisan est celui
qui réalise personnellement un travail manuel sans avoir recours à la spéculation. L’artisan
tire ses revenus de la valeur ajoutée procurée par son activité. À l’inverse, le commerçant
sera celui qui recherche le profit par le biais d’une spéculation, notamment sur les mar-
chandises, sur le travail d’autrui ou sur le travail des machines.
188. Définition administrative. Le législateur2 est intervenu pour fixer des critères de défi-
nition de l’activité d’artisan. Cette définition permet de déterminer les personnes qui
doivent s’immatriculer auprès du répertoire des métiers. Selon l’article 19, I de la loi du
5 juillet 1996, « doivent être immatriculées au répertoire des métiers […] les personnes physiques
et les ­personnes morales qui emploient moins de onze salariés3 et qui exercent à titre principal ou
1. Cass. req., 22 avr. 1909: DP1909, 1, 344 ; Com. 18 févr. 1980, n° 78-15.102.
2. Décret. n° 98-247 du 2 avr. 1998 et Décret. n° 83-316 du 15 avr. 1983.
3. Ce nombre ne comprend ni les membres de la famille du professionnel, ni les apprentis, ni les personnes handicapées.

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Première Partie – Professionnels du commerce

secondaire une activité professionnelle indépendante de production, de transformation, de répa-


ration ou de prestation de services figurant sur une liste établie par décret ». Annexé au décret
n°98-247, cette liste de professions susceptibles d’être qualifiées d’artisan est dressée. Ce
document classe ces activités en quatre catégories : artisanat de l’alimentation (boulange-
rie-pâtisserie, transformation, conservation et commerce de détail de viande, poissons et
crustacés, etc.), du bâtiment (désamiantage, construction, etc.), de fabrication (industrie
du cuir, travail du bois, métallurgie, etc.) et de services (déménagement, restauration
d’objets d’art, réparation d’ordinateurs, coiffure, etc.).
189. L’inscription au répertoire des métiers n’a qu’une valeur administrative et ne pose qu’une
présomption de qualification qui ne lie pas le juge1. L’artisan peut réaliser des actes de
commerce. Si cette dernière activité occupe une place prépondérante, l’artisan devra
demander son inscription au RCS. L’artisan qui tirerait la majeure partie de son résultat
de la spéculation pourrait se voir qualifié de commerçant2. Il serait alors considéré comme
un commerçant de fait. Il se verrait contraint par les obligations du commerçant sans
pouvoir profiter des droits attachés à cette qualité. Il est à noter que la possibilité d’une
double inscription RCS/Répertoire des métiers est offerte aux artisans qui souhaiteraient
se prémunir contre les risques d’une requalification.

§2. Régime juridique applicable à l’artisan

190. L’artisan est un professionnel civil auquel vont s’appliquer les règles du droit civil et qui
relève des juridictions civiles. Certaines dispositions propres au droit commercial lui sont
cependant applicables (statut des baux commerciaux,). Lorsqu’un artisan décide d’exercer
son activité sous une forme sociétaire, il pourra opter pour une société commerciale par
la forme et les actes que cette dernière accomplira seront alors soumis aux règles du droit
commercial.

Section 2 – Agriculteur

191. Traditionnellement, l’activité agricole est une activité civile : celui qui vend sa production
agricole n’est pas un commerçant, faute de l’avoir préalablement achetée. Il convient
dès lors d’examiner les critères de la qualité d’agriculteur (§1) avant d’étudier le régime
juridique applicable (§2).

1. Cass. com. 21 nov. 1983 : Bull. civ. IV. n°319.


2. Tel est le cas d’un fabricant de pâtes alimentaires qui n’emploie pas un nombre important de salariés mais qui utilise
beaucoup de machines (Cass. com., 2 mai 1972 : Bull. civ. IV, n° 128)

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Livre III • Acteurs du commerce

§1. Qualité d’agriculteur

192. Aux termes de l’article L. 311-1, alinéa 1 du Code rural et de la pêche maritime, « sont réputées
agricoles toutes les activités correspondant à la maîtrise et à l’exploitation d’un cycle biologique
de caractère végétal ou animal et constituant une ou plusieurs étapes nécessaires au déroulement
de ce cycle ainsi que les activités exercées par un exploitant agricole qui sont dans le prolongement
de l’acte de production ou qui ont pour support l’exploitation ». Les activités de cultures marines
sont réputées agricoles, nonobstant le statut social dont relèvent ceux qui les pratiquent. Il
en est de même des activités de préparation et d’entraînement des équidés domestiques
en vue de leur exploitation, à l’exclusion des activités de spectacle. Il en est de même de
la production et, le cas échéant, de la commercialisation, par un ou plusieurs exploitants
agricoles, de biogaz, d’électricité et de chaleur par la méthanisation, lorsque cette pro-
duction est issue pour au moins 50/100 de matières provenant d’exploitations agricoles.
Les revenus tirés de la commercialisation sont considérés comme des revenus agricoles,
au prorata de la participation de l’exploitant agricole dans la structure exploitant et com-
mercialisant l’énergie produite.
193. Doit donc être qualifié d’agriculteur, le professionnel qui se prête « à la maîtrise et à l’exploi-
tation d’un cycle biologique de caractère végétal ou animal et constituant une ou plusieurs étapes
nécessaires au déroulement de ce cycle » mais aussi lorsque son activité est exercée « dans le
prolongement de l’acte de production ou qui ont pour support l’exploitation ».

§2. Le régime juridique applicable à l’agriculteur

194. L’article L. 311-2 du Code rural et de la pêche maritime met en place un registre des actifs
agricoles. Le second alinéa de l’article L. 311-1, alinéa 2 du Code rural et de la pêche maritime
précise que les activités agricoles ont un caractère civil. L’activité agricole peut être exercée
en société dont l’objet sera civil (ex. EARL, GAEC). L’agriculteur qui tirerait la majeure partie
de ses résultats d’une activité spéculative peut se voir qualifié de commerçant. L’activité
agricole n’est pas exclusive de la qualité de commerçant. La mise en place de sociétés
commerciales par la forme est même parfois envisagée au stade de la transformation et
de la commercialisation des produits de l’exploitation.

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Première Partie – Professionnels du commerce

Section 3 – Professionnel libéral

§1. Qualité de professionnel libéral

195. La profession libérale est définie à l’article 29, I de la loi du 22 mars 2012 : « Les professions
libérales groupent les personnes exerçant à titre habituel, de manière indépendante et sous leur
responsabilité, une activité de nature généralement civile ayant pour objet d’assurer, dans l’intérêt
du client ou du public, des prestations principalement intellectuelles, techniques ou de soins mises
en œuvre au moyen de qualifications professionnelles appropriées et dans le respect de principes
éthiques ou d’une déontologie professionnelle, sans préjudice des dispositions législatives applicables
aux autres formes de travail indépendant ». Les professions libérales peuvent être réglemen-
tées ou non. L’activité libérale se caractérise par son objet, une prestation essentiellement
intellectuelle, accompli par un professionnel aux compétences particulières dans le respect
de règles parfois édictées par une instance professionnelle

§2. Régime juridique applicable au professionnel libéral

196. Le professionnel libéral est donc une personne civile qui, à ce titre, est soumise aux règles de
droit civil et qui relève de la compétence des juridictions civiles de droit commun. Les pro-
fessionnels libéraux peuvent décider de réaliser leur activité, sous la forme d’une société
d’exercice libéral (SEL), commerciale par la forme, mais dont l’objet est civil. Le professionnel
libéral exploitera un fonds libéral. Des incompatibilités professionnelles peuvent interdire
à certains professionnels libéraux de se prêter à l’exercice d’une activité commerciale.
Cependant, les professionnels qui tireraient la majeure partie de leurs résultats d’activités
spéculatives pourraient se voir qualifier de commerçants par un juge.

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Première Partie – Professionnels du commerce

TITRE 2 – Régime juridique


applicable au commerçant

197. Le principe de liberté du commerce permet à toute personne de créer son activité com-
merciale (Chapitre 1). Cependant, l’application du statut de commerçant implique nombre
d’obligations professionnelles pour le commerçant (Chapitre 2).

CHAPITRE 1
Liberté du commerce et de l’industrie

198. Sous l’Ancien Régime, les corporations restreignaient l’exercice du commerce. Ce n’est
qu’à la fin du xviiie siècle que le législateur a supprimé ces corporations et consacré un
principe de liberté du commerce.

Section 1 – Principe

199. La loi Le Chapelier des 14 et 17 juin 1791 a eu pour effet de mettre un terme à l’hégémonie
des corporations qui empêchaient sur certains territoires le développement normal de
l’économie libre. En effet, Les corporations restreignaient la libre concurrence des opéra-
teurs. Le décret d’Allarde des 2 et 17 mars 1791 a autorisé l’exercice libre d’une profession
pour toute personne. Il est surprenant de noter que cette liberté de commerce ne figure
pas dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen alors que ce principe est
manifestement en accord avec la philosophie de ses rédacteurs.
200. La liberté de commerce semble, aujourd’hui, être un principe à valeur constitutionnelle1
qui s’impose non seulement aux autorités administratives, mais aussi au législateur.
Ce dernier ne peut le restreindre que de façon mesurée et sans pouvoir remettre en cause
son existence. La liberté de commerce repose sur trois éléments :

1. Cons. Const. 30 octobre 1981, Monopole de la radiodiffusion, et 16 janvier 1982, Nationalisation.

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Livre III • Acteurs du commerce

– Le premier point de la liberté du commerce et de l’industrie est la liberté d’établissement


ou d’installation. La faculté de créer une entreprise se prolonge par le libre accès des
citoyens à toute activité professionnelle non interdite.
– Le deuxième aspect de la liberté de commerce est la liberté d’exploitation et de gestion,
appelée aussi liberté d’exercice. Elle recouvre la liberté dans le choix des méthodes
de gestion, des techniques de vente, des réseaux de distribution, des modalités de
commercialisation, etc.
– Le dernier pilier de la liberté de commerce est la liberté de la concurrence, c’est-à‑dire
la liberté de concurrencer.

Section 2 – Restrictions à l’exercice de l’activité commerciale

201. Les restrictions se divisent en deux catégories. Un premier type de protection est fondé sur
un critère subjectif qui vise à protéger les personnes (§1). La restriction peut aussi reposer
sur une approche objective dont le but est de protéger une activité (§2).

§1. Restrictions liées aux personnes

202. La capacité juridique (A), la nationalité (B) et les déchéances et interdictions profession-
nelles (C) seront envisagées.

A. Restrictions liées à la capacité juridique

203. Afin de pouvoir devenir commerçant, il faut avoir la capacité commerciale. Cette règle,
motivée par une volonté de protéger les personnes les plus fragiles, exclut de la sphère
commerciale les mineurs non émancipés (1) et les majeurs protégés (2).

1. Mineurs

204. Jusqu’à ces dernières années1, le Code de commerce édictait la règle selon laquelle le
mineur, même émancipé, ne pouvait être commerçant que ce soit directement ou par le
biais d’un mandataire. Il s’agissait d’une incapacité de jouissance. Depuis 2010, la règle
a évolué et le Code de commerce2 dispose que le « mineur émancipé peut être commerçant
sur autorisation du juge des tutelles au moment de la décision d’émancipation et du président du
Tribunal judiciaire s’il formule cette demande après avoir été émancipé ». Seul le mineur éman-
cipé peut être commerçant sous réserve de l’autorisation judiciaire. Il en découle que le

1. L’article 2 de la loi n o 2010-658 du 15 janvier 2010 relative à l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (EIRL).
2. Code de commerce, art. L121-2.

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Première Partie – Professionnels du commerce

mineur non émancipé ne peut pas être commerçant directement ou par l’intermédiaire
d’un représentant. Les actes accomplis en violation de cette règle sont susceptibles d’être
frappés de nullité relative dont l’exercice appartient au représentant du mineur ou au
mineur lorsqu’il aura atteint sa majorité.

2. Majeurs protégés

205. Le Code de commerce n’édicte aucune règle visant à protéger les majeurs incapables. Ce
sont des règles du droit civil que viennent les mesures de protection. La mise en place
d’une mesure de protection implique que la personne ne soit pas en mesure de pourvoir
seule à ses intérêts. Le régime de protections dont bénéficie le majeur ne va pas être sans
incidence sur la capacité à être commerçant. Il convient de présenter les incidences de
chaque régime de protection :
– En matière de tutelle, le principe est que la personne protégée ne peut agir que par
représentation. Dans cette hypothèse, l’incapable devrait obtenir le concours de son
tuteur pour réaliser les actes de commerce. Cependant, la loi interdit au tuteur d’exercer
le commerce au nom de la personne protégée1. L’incapable ne pourra donc pas reven-
diquer la qualité de commerçant, même avec la représentation de son tuteur.
– Pour ce qui concerne la curatelle, aucune disposition ne prive la personne sous curatelle
de la capacité commerciale2. La protection du majeur se manifeste sur trois points. Tout
d’abord, le majeur protégé devra obtenir l’assistance du majeur pour les engagements
les plus importants et notamment les actes de disposition. Ensuite, le juge a la possibilité
de restreindre l’autonomie de l’incapable et d’étendre la mission du curateur3. Enfin, si
le curateur constate que par sa gestion l’incapable nuit gravement à ses intérêts, il peut
demander au juge une mesure de tutelle pour l’incapable4.
– Sauf décision contraire du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire,
le majeur placé sous le régime de la sauvegarde de justice est réputé conserver l’exercice
de ses droits5. Cependant le majeur protégé peut se soustraire des engagements qui
se révéleraient préjudiciables parce qu’ils sont excessifs ou qu’ils sont lésionnaires.

1. C. civ. art. 509 : « Le tuteur ne peut, même avec une autorisation : […] 3° Exercer le commerce ou une profession libérale au
nom de la personne protégée ».
2. Civ. 1re, avis, 6 déc. 2018, n° 18-70.011.
3. C. civ. art. 471 : « À tout moment, le juge peut, par dérogation à l’article 467, énumérer certains actes que la personne en
curatelle a la capacité de faire seule ou, à l’inverse, ajouter d’autres actes à ceux pour lesquels l’assistance du curateur est
exigée ».
4. C. civ. art. 469, al. 2 : « Toutefois, le curateur peut, s’il constate que la personne en curatelle compromet gravement ses
intérêts, saisir le juge pour être autorisé à accomplir seul un acte déterminé ou provoquer l’ouverture de la tutelle ».
5. C. civ. art. 435, al. 1 : « La personne placée sous sauvegarde de justice conserve l’exercice de ses droits. Toutefois, elle ne
peut, à peine de nullité, faire un acte pour lequel un mandataire spécial a été désigné en application de l’article 437 ».

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Livre III • Acteurs du commerce

B. Restrictions liées à la nationalité

206. Un ressortissant d’un pays extérieur à l’Union européenne qui souhaiterait exercer sur le
territoire français une activité commerciale, industrielle ou artisanale et de manière plus
générale toute activité professionnelle non salariée pendant plus de 3 mois doit être titu-
laire d’une carte de séjour temporaire autorisant l’exercice d’une activité professionnelle.
Ce document remplace la carte d’identité de commerçant étranger. Les ressortissants des
pays de l’union européenne et assimilés (Suisse, Norvège, Islande, Liechtenstein) n’ont
pas à solliciter ce document pour exercer le commerce.
207. La personne commerçante étrangère en situation régulière est soumise au même régime
juridique qu’un commerçant français à quelques exceptions notables. Par exemple, l’exer-
cice de certaines professions lui est interdit (transporteur routier, pharmacien…). De plus,
elle n’est pas éligible aux tribunaux de commerce1.

C. Restrictions judiciaires d’activité professionnelle

208. La condamnation d’un commerçant peut être assortie d’une déchéance (A) ou d’une
interdiction (B).

1. Déchéances

209. L’accès à certaines professions commerciales est conditionné à des exigences de moralité
qui empêchent les personnes condamnées pour des crimes ou délits déterminés de pouvoir
habituellement se prêter à l’exercice de certaines activités. (Ex. : agent immobilier2,…). Ces
restrictions sont automatiques dès la condamnation sans qu’il soit nécessaire qu’un juge
prononce expressément la déchéance.

2. Interdictions judiciaires

210. Dans les hypothèses visées par la loi, un juge peut prononcer une interdiction d’exercer
une profession commerciale ou industrielle, de diriger ou d’administrer, de gérer ou de
contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte
ou le compte d’autrui une entreprise commerciale ou industrielle ou une société com-
merciale. Cette restriction peut être prononcée au titre de peine principale3 ou de peine
complémentaire4. La durée de cette interdiction est limitée à 15 ans s’il s’agit d’une peine

1. C. com. L. 723-4.
2. Loi n° 70-9, art. 9.
3. Ex. procédures de faillite personnelle ou d’interdiction de gérer engagées contre le chef d’entreprise prévues aux
articles L. 653-1 et suivants et R. 653-1 du Code de commerce.
4. Depuis la loi de modernisation de l’économie (LME) n°2008-776 du 04 août 2008, cette peine complémentaire peut être
prononcée par le juge dès lors que la personne en cause est reconnue coupable d’une des infractions (crime ou délit)
limitativement énumérées par la loi (ex. vol, abus de biens sociaux, fraude fiscale…).

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Première Partie – Professionnels du commerce

principale et à 5 ans pour une peine complémentaire1. L’objectif de ces restrictions pro-
fessionnelles est de protéger la société contre les agissements de personnes dont le passé
a révélé l’indélicatesse.

§2. Restrictions liées aux activités

211. La liberté d’exercer une activité peut être limitée par des considérations d’origines légales
(A) ou conventionnelles (B).

A. Restrictions d’origine légale

212. Les restrictions légales peuvent être classées en trois catégories : les interdictions (1), les
incompatibilités professionnelles (2), et les activités soumises à autorisation administra-
tive (3).

1. Activités illicites

213. La liberté du commerce n’est pas absolue. Ainsi, certaines activités ne sont pas autori-
sées telles que la vente d’organes ou le commerce de la drogue. D’autres activités sans
être interdites doivent être réalisées dans un cadre juridique déterminé. Par exemple, le
commerce de détails du tabac doit se dérouler sous la forme d’une entreprise individuelle
ou d’une société en nom collectif.

2. Incompatibilités professionnelles

214. La liberté d’entreprendre peut laisser penser qu’une personne peut exercer autant d’acti-
vités qu’elle le souhaite. Pourtant, cette poly-activités peut connaître des restrictions car
l’exercice de certains métiers est difficilement compatible avec le commerce. Plusieurs
motivations l’expliquent. Tout d’abord, certaines professions limitent la compatibilité
dans un souci de préservation de l’image. Ensuite, la question d’éventuels conflits d’inté-
rêts peut motiver la limitation d’activité. Enfin, l’intention spéculative propre à l’activité
commerciale n’est pas toujours compatible avec certaines professions. À titre illustratif,
les notaires ou les avocats ne peuvent pas exercer le commerce. Le défaut de respect de
ces règles est de nature à entraîner des sanctions disciplinaires telles que la radiation,
l’interdiction temporaire ou la révocation, ainsi que des sanctions pénales. Sur le plan
civil, la personne devra être considérée comme un commerçant de fait.

1. C. pénal, art. 131-27.

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Livre III • Acteurs du commerce

3. Activités soumises à autorisation administrative

215. Certaines activités donnent lieu à un encadrement plus spécifique. Ainsi, il peut être
nécessaire d’obtenir l’aval de l’autorité administrative préalablement au début de l’activité.
Par exemple, le restaurant qui s’installe devra obtenir une licence s’il souhaite proposer
des produits alcoolisés à sa clientèle ; l’agent immobilier devra obtenir sa carte profession-
nelle s’il souhaite exercer son activité ; ou le supermarché qui envisage de s’ouvrir devra
obtenir une autorisation préalable afin de réguler l’installation des grandes surfaces et
ainsi protéger les petits commerces de proximité.

B. Restrictions conventionnelles

216. Une clause de non-concurrence peut restreindre la liberté d’exercice. L’obligation stipulée
est un engagement de ne pas faire. Le débiteur de l’obligation s’engage à ne pas exercer
d’activité professionnelle susceptible de concurrencer celle du créancier. En matière com-
merciale, cette stipulation est généralement envisagée lorsqu’un commerçant cède son
fonds pour protéger les intérêts patrimoniaux du cessionnaire. Dans cette éventualité, la
créance de non-concurrence se transmettra avec le fonds de commerce. La violation de la
clause permettra au créancier de solliciter soit une réparation en nature ou par équivalent
soit l’exécution forcée. Cette stipulation ne peut pas être absolue et elle doit permettre au
débiteur d’exercer une activité. À cette fin, la jurisprudence a fixé ses conditions de validité.
Tout d’abord, elle ne doit pas aboutir à interdire au débiteur personne physique l’exercice de
son activité professionnelle. La relativité imposée à l’obligation de non-concurrence trouve
son expression dans l’encadrement tant de l’objet de l’activité exercée que du domaine
spatial et temporel de la limitation. Devrait être annulée la clause qui viserait toute activité
économique ou professionnelle en raison de l’excès de la restriction portée à la liberté de
son débiteur. L’exigence de proportion est nécessaire pour garantir les droits du débiteur
de l’obligation au regard de l’atteinte à la liberté d’entreprendre et à la liberté du travail.
217. Historiquement, la jurisprudence considérait qu’il suffisait que la clause soit limitée dans
le temps ou dans l’espace1. La position de la Cour de cassation a depuis évolué2 et le critère
n’est désormais plus alternatif mais cumulatif. L’objet de cette évolution n’est pas limité à
ce seul point puisque la finalité de ce mouvement est de permettre d’apprécier la préser-
vation de l’exercice normal de l’activité du débiteur de l’obligation. Les critères spatiaux
et temporels doivent être appréciés par les juges du fonds pour traiter de la validité de
la clause afin de déterminer la possibilité pour le débiteur de l’obligation de continuer à
exercer normalement son activité professionnelle.

1. Com. 18 déc. 1979, Bull. civ. IV, no 340. ; Com. 7 nov. 1984, Bull. civ. IV, no 302 ; D. 1985. IR 385, obs. Y. Serra.
2. Com. 9 juill. 2002, no 00-18.311.

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Première Partie – Professionnels du commerce

218. Ensuite, la licéité de l’obligation de non-concurrence est conditionnée à une exigence de


proportionnalité par rapport aux intérêts légitimes à protéger1. Ces derniers sont appréciés
en fonction de l’objet du contrat et de la finalité de l’opération dont elle constitue l’acces-
soire. Il convient de noter que l’exigence d’une contrepartie financière est une exigence
propre aux relations issues d’un contrat de travail. En matière commerciale, si la présence
d’une contrepartie financière n’est pas interdite, elle ne constitue pas, dans l’état du droit
actuel, une condition de validité de la stipulation.

CHAPITRE 2
Obligations du commerçant

219. Il est d’usage de regrouper les obligations du commerçant en trois catégories. Tout d’abord,
le commerçant a une obligation de s’immatriculer au registre du commerce et des sociétés
(Section 1). Ensuite, le commerçant a l’obligation de tenir une compatibilité commerciale
(Section 2). En dernier lieu, le commerçant devra se conformer à certaines obligations
légales de nature financière et fiscale (Section 3).

Section 1 – Mesures de publicité légale

220. Au début de l’activité, le commerçant doit demander rapidement son immatriculation au


registre du commerce et des sociétés. La personne physique doit procéder à son immatri-
culation dans le mois qui précède son activité et au plus tard quinze jours après le début
de son activité2. Les adjonctions et les modifications devront être publiées dans un délai
d’un mois3. Cette formalité a un caractère personnel qui a pour conséquence qu’il n’est pas
possible d’être immatriculé plusieurs fois dans un même registre. Lorsqu’une personne a
plusieurs établissements, l’inscription principale sera complétée par une i­ mmatriculation
secondaire4. Une fois immatriculé, le commerçant se voit attribuer par l’INSEE un numéro
SIREN (Système d’Identification du Répertoire des entreprises) qui lui permet de procéder

1. Com. 9 juill. 2002, no 00-18.311.


2. C. com., art. R. 123-32.
3. C. com., art. R 123-43 et s.
4. C. com., art. R. 123-31.

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Livre III • Acteurs du commerce

aux autres formalités administratives. Ce numéro SIREN doit obligatoirement être indi-
qué sur les factures, notes de commandes, tarifs et documents publicitaires émis par le
commerçant ainsi que sur toutes ses correspondances. L’immatriculation a des effets
juridiques différenciés selon qu’il s’agit d’une personne physique ou une personne
morale. En effet, l’immatriculation des personnes physiques emporte une présomption
irréfragable de commercialité1. Ce point permet à un commerçant de se prévaloir de son
statut à l’égard des tiers. L’intérêt pratique n’est pas négligeable notamment en matière
de baux commerciaux2. L’immatriculation a pour effet de conférer la personnalité morale
aux sociétés et aux GIE3. En pratique, cela permet à la personne morale créée d’avoir la
capacité juridique et un patrimoine distinct de celui des associés. La commercialité d’une
personne morale sera déterminée uniquement en fonction de leur forme ou en fonction
de leur objet. Par exemple, la création de sociétés civiles donne lieu à une immatriculation
alors que leur objet est civil.

Section 2 – Obligations comptables

221. Le commerçant est tenu de procéder à l’enregistrement comptable des mouvements ­affectant
le patrimoine de son entreprise4. La tenue de la comptabilité passe par l­ ’établissement de
divers documents comptables (§1) dans le but d’établir les comptes annuels (§2).

§1. Livres comptables obligatoires

222. Les mouvements affectant le patrimoine du commerçant sont enregistrés chronologi-


quement dans un document qui s’intitule le livre-journal5. De son côté, le grand-livre
regroupe l’ensemble des écritures du livre-journal ventilées selon le plan comptable6.
Une fois par exercice comptable, le commerçant est dans l’obligation de procéder par
voie d’inventaire au contrôle de l’existence et de la valeur des éléments actifs et passifs
du patrimoine de l’entreprise.

§2. Comptes annuels

223. Les comptes annuels sont constitués de trois documents (le bilan, le compte de résultat
et les annexes) qui doivent répondre à une exigence de qualité des comptes :

1. C. com., art. L. 123-7 – Com. 6 janv. 1987, Rev. sociétés 1987. 411, note Chaput.
2. Renvoi sur la partie relative aux baux.
3. C. com., art. R. 123-35.
4. C. com. L. 123-12.
5. C. com., art. R. 123-174.
6. C. com., art. R. 123-175.

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Première Partie – Professionnels du commerce

– Le bilan doit décrire de manière distincte, à la clôture de l’exercice, les éléments actifs
et passifs de l’entreprise, et fait apparaître, de façon séparée, les capitaux propres et
les éventuels autres fonds propres1.
– Le compte de résultat a pour objet de récapituler les produits et les charges de l’exercice,
sans qu’il soit tenu compte de leur date d’encaissement ou de paiement. Il fait apparaître,
par différence après déduction des amortissements, des dépréciations et des provisions,
le bénéfice ou la perte de l’exercice2.
– L’annexe complète et commente l’information donnée par le bilan et le compte de
résultat3.
224. Les documents comptables devront être conservés pendant une durée de dix ans. Les
comptes annuels doivent être réguliers, sincères, et présenter une image fidèle du patri-
moine, de la situation financière et du résultat de l’entreprise4. Le caractère régulier s'en-
tend comme une conformité « aux règles et procédures en vigueur »5. L’exigence de sincérité
traduit « la connaissance que les responsables de l’établissement des comptes ont de la réalité et de
l’importance relative des événements enregistrés »6. La fidélité des comptes doit être appréciée
comme la conformité des opérations comptables à la réalité économique de l’entreprise.
La comptabilité régulièrement tenue peut être admise en justice pour faire preuve entre
commerçants par son auteur à son profit. Les commerçants défaillants peuvent faire l’objet
d’une amende de 500 000 € et d’un emprisonnement de cinq ans lorsque l’irrégularité
a été commise dans un but de fraude fiscale7 et, en cas de cessation des paiements, des
peines de la banqueroute.

Section 3 – Obligations financières

225. Le commerçant doit, d’une part, établir des factures (§1) et, d’autre part, détenir un compte
bancaire (§2).

§1. Obligation d’établir des factures

226. La facture peut être définie comme étant l’écrit par lequel un commerçant rappelle à son
client l’opération qu’il vient de réaliser pour le compte de ce dernier. Ce document envoyé
au client détaille les prestations réalisées et/ou les biens livrés et le montant réclamé et

1. PCG, art. 112-2.


2. C. com., art. L. 123-13 al. 2.
3. C. com., art. L. 123-13 al. 4.
4. C. com., art. L. 123-14.
5. PCG, art. 121-3.
6. PCG, art. 121-3.
7. CGI, art. 1743.

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Livre III • Acteurs du commerce

lui en demande le règlement. La facture qui constitue un élément de comptabilité, peut


servir de preuve de réalisation des opérations visées.

§2. Obligation de détenir un compte bancaire

227. Le commerçant doit obligatoirement être titulaire d’un compte bancaire ouvert auprès d’un
établissement de crédit ou de la banque postale1. Le paiement en espèces d’un particulier à
un professionnel ou entre professionnels est autorisé jusqu’à 1 000 €2. Ces obligations ont
pour finalité de lutter contre la fraude et autres infractions qui sanctionnent le traitement
du produit d’infractions pénales.

1. C. com., art. L. 123-24.


2. C. mon. Fin., art. L. 112-6.

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DEUXIÈME PARTIE

Statut du commerçant
et de son conjoint
228. Un époux peut entreprendre une activité commerciale sans le consentement de son
conjoint1. Cette faculté peut pourtant avoir des effets sur la situation patrimoniale des
époux. Le chef d’entreprise devra donc étudier la forme de l’union qu’il établira avec son
ou sa partenaire (Titre 1) ainsi que le statut qu’adoptera le conjoint qui participe l’activité
(Titre 2).

1. C. civ., article 213 : « Chaque époux peut librement exercer une profession, percevoir ses gains et salaires et en disposer
après s’être acquitté des charges du mariage ».

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Deuxième Partie – Statut du commerçant et de son conjoint

TITRE 1 – Statut privé du commerçant


229. Nous envisagerons les hypothèses de vie commune pour exposer les règles juridiques rela-
tives à chaque situation : mariage (Chapitre 1), pacs (Chapitre 2) et union libre (Chapitre 3).

CHAPITRE 1
Commerçant marié

230. La question du choix régime matrimonial du commerçant détermine les règles appli-
cables aux biens des époux lorsque le commerçant rencontre des difficultés financières
dans son activité. Les créanciers professionnels pourront-ils alors agir contre les biens
du conjoint ? La réponse à cette question dépend du régime matrimonial adopté par les
époux. Il sera successivement envisagé le régime de communauté de biens réduite aux
acquêts (Section 1), le régime de la communauté universelle (Section 2) pour finir par le
régime de la séparation de biens (Section 3).

Section 1 – Communauté des biens réduite aux acquêts

231. Le régime de la communauté de biens réduite aux acquêts est celui qui s’applique lorsque
les époux n’ont pas manifesté devant notaire et préalablement au mariage civil leur
volonté d’opter pour un autre régime matrimonial. Son application de plein droit lui
vaut la qualification de régime de communauté légale. Dans ce régime, le patrimoine
des époux sont répartis en trois masses de biens. Il y a, tout d’abord, les biens propres de
chacun des époux qu’ils ont acquis soit avant le mariage soit par voie de succession ou
de donation pendant le mariage. De même, les instruments de travail nécessaires à la
profession de l’un des époux sont qualifiés de biens propres, à moins qu’ils ne soient l’ac-
cessoire d’un fonds de commerce ou d’une exploitation faisant partie de la communauté1.
Chaque époux dispose d’une masse composée de ses biens personnels qu’il administre,

1. C. civ. art. 1404, al. 2 : « Forment aussi des propres par leur nature, mais sauf récompense s’il y a lieu, les instruments de
travail nécessaires à la profession de l’un des époux, à moins qu’ils ne soient l’accessoire d’un fonds de commerce ou d’une
exploitation faisant partie de la communauté ».

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Livre III • Acteurs du commerce

oblige et aliène seul. Ensuite, une masse de biens communs composée des biens acquis
par les époux pendant le mariage, notamment les gains et salaires. Le législateur a posé
une présomption simple générale de communauté pour les biens détenus par les époux1.
Cette masse comprend donc les revenus professionnels des époux mais aussi les biens
acquis ou créés par les époux durant l’union. Sauf si le bien a été acquis avant le mariage
ou s’il a été financé aux moyens de fonds propres de l’un des époux ou si l’un des époux l’a
reçu par voie de libéralité ou de succession, le fonds de commerce créé ou acquis durant
le mariage par l’un des époux doit être qualifié de bien commun. Les résultats de cette
entreprise tomberont eux dans la communauté quelle que soit la qualification juridique
du fonds retenue. Pour le paiement des dettes du commerçant, le gage des créanciers
professionnels est composé des biens personnels du commerçant2 et des biens communs3.
Les créanciers du commerçant ne peuvent poursuivre le paiement de ses dettes sur les
biens propres et les revenus de son conjoint4. Ce régime peut se révéler périlleux pour le
conjoint du chef d’entreprise. Afin d’informer le conjoint, la loi impose à l’époux commun
en biens de déposer, lors de sa demande d’immatriculation, une attestation affirmant
qu’il a informé son conjoint des conséquences de dettes contractées dans l’exercice de sa
profession sur les biens communs5.

Section 2 – Communauté universelle

232. Les époux peuvent opter pour le régime matrimonial de la communauté universelle. Dans
le régime de la communauté universelle, tous les biens, présents et à venir, possédés par
les époux sont mis en commun, quelle que soit la date d’acquisition (avant ou après le
mariage), leur mode d’acquisition (achat, donation, etc.) ou les modalités du finance-
ment. Certains biens restent cependant propres à chacun des époux6. Dans ce régime,
les conjoints sont responsables de leurs dettes personnelles sur l’ensemble de ces biens

1. C. civ. art. 1402 al. 1er : « Tout bien, meuble ou immeuble, est réputé acquêt de communauté si l’on ne prouve qu’il est propre
à l’un des époux par application d’une disposition de la loi ».
2. C. civ. art. 1410 : « Les dettes dont les époux étaient tenus au jour de la célébration de leur mariage, ou dont se trouvent
grevées les successions et libéralités qui leur échoient durant le mariage, leur demeurent personnelles, tant en capitaux
qu’en arrérages ou intérêts ».
3. C. civ. art. 1413 : « le paiement des dettes dont chaque époux est tenu, pour quelque cause que ce soit, pendant la commu-
nauté, peut toujours être poursuivi sur les biens communs, à moins qu’il n’y ait eu fraude de l’époux débiteur et mauvaise
foi du créancier, sauf la récompense due à la communauté s’il y a lieu ».
4. C. civ. art. 1411, al. 1 : « Les créanciers de l’un ou de l’autre époux, […], ne peuvent poursuivre leur paiement que sur les biens
propres et les revenus de leur débiteur ».
5. C. com., art. L. 526-4 C. Com : « Lors de sa demande d’immatriculation à un registre de publicité légale à caractère profes-
sionnel, la personne physique mariée sous un régime de communauté légale ou conventionnelle doit justifier que son
conjoint a été informé des conséquences sur les biens communs des dettes contractées dans l’exercice de sa profession ».
6. C. civ. 1404 : « Forment des propres par leur nature, quand même ils auraient été acquis pendant le mariage, les vêtements
et linges à l’usage personnel de l’un des époux, les actions en réparation d’un dommage corporel ou moral, les créances et
pensions incessibles, et, plus généralement, tous les biens qui ont un caractère personnel et tous les droits exclusivement
attachés à la personne.

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Deuxième Partie – Statut du commerçant et de son conjoint

communs1, quelle que soit la date de naissance des dettes. Lors de la liquidation de la
communauté, les biens communs sont partagés à parts égales sauf disposition contraire
de la convention matrimoniale.

Section 3 – Séparation des biens

233. Le régime séparatiste peut être choisi par les époux soit au moment du mariage soit au
cours de l’union via la procédure de changement de régime matrimonial. À la différence
des régimes communautaires, le mécanisme séparatiste exclut toute masse commune.
Chaque époux conserve la pleine propriété de ses biens personnels (biens présents, biens
futurs, revenus des biens personnels ou gains et salaires). Lorsque les époux acquièrent
ensemble des biens au nom de l’un et l’autre, le régime applicable est celui de l’indivision.
Le fonds de commerce sera donc soit un bien propre de l’un des époux soit un bien indivis.
Les résultats de son exploitation prendront la même qualification juridique que celle de la
propriété du fonds. Les revenus d’un fonds détenu par un seul des époux seront qualifiés
de biens personnels de l’époux et les bénéfices tirés de l’exploitation d’un fonds apparte-
nant de manière indivise aux époux seront des propres de chacun des époux en fonction
de leur participation dans l’indivision. Ce régime exclut l’existence de dettes communes.
Chaque époux est seul responsable des dettes qu’il a contractées2, à l’exception des dettes
ménagères. Les créanciers d’un époux ne peuvent pas saisir le patrimoine indivis de leur
débiteur mais ils peuvent provoquer le partage3.

Forment aussi des propres par leur nature, mais sauf récompense s’il y a lieu, les instruments de travail nécessaires à la
profession de l’un des époux, à moins qu’ils ne soient l’accessoire d’un fonds de commerce ou d’une exploitation faisant
partie de la communauté ».
1. C. civ. 1526 al. 2 : « La communauté universelle supporte définitivement toutes les dettes des époux, présentes et futures ».
2. C. civ. art. 1536 al. 2 : « Chacun d’eux reste seul tenu des dettes nées en sa personne avant ou pendant le mariage, hors le
cas de l’article 220. »
3. C. civ. art. 815-17 in fine : « Les créanciers personnels d’un indivisaire ne peuvent saisir sa part dans les biens indivis, meubles
ou immeubles.
Ils ont toutefois la faculté de provoquer le partage au nom de leur débiteur ou d’intervenir dans le partage provoqué par
lui. Les coïndivisaires peuvent arrêter le cours de l’action en partage en acquittant l’obligation au nom et en l’acquit du
débiteur. Ceux qui exerceront cette faculté se rembourseront par prélèvement sur les biens indivis ».

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Livre III • Acteurs du commerce

CHAPITRE 2
Commerçant partenaire d’un Pacte civil
de solidarité

234. Le pacte civil de solidarité (PACS) est un contrat conclu entre deux personnes majeures dont
l’objet est d’organiser leur vie commune. À l’instar des époux, les partenaires d’un PACS
veulent organiser les aspects patrimoniaux de leur union. Des problématiques semblables
à celles des époux se posent. Quelles sont les incidences de la défaillance d’un débiteur sur
le patrimoine de son partenaire ? La présentation de la réponse à cette question doit être
distinguée selon que les partenaires sont soumis aux règles légales (Section 1) ou qu’ils
aient opté pour l’indivision (Section 2).

Section 1 – Séparation des patrimoines

235. Le régime légal de la séparation des patrimoines s’applique de plein droit en l’absence de
convention contraire des parties. Le régime patrimonial des partenaires pacsés est voisin
du régime séparatiste des époux. Chacun des partenaires liés par un PACS reste pleinement
propriétaire de ses biens personnels et chacun reste seul tenu des dettes personnelles nées
avant ou pendant le pacte1. Les prémices du régime patrimonial primaire sont fixés par la
loi et l’article 515-4 al. 2 du Code civil qui prévoit une solidarité entre les partenaires pour
les « besoins de la vie courante ». Les dettes professionnelles échappent donc à la solidarité
et le partenaire qui exploite seul un commerce recueille seul les résultats de son entreprise
et supporte seul les risques.

Section 2 – Indivision des biens

236. Les partenaires d’un PACS qui souhaitent organiser les aspects patrimoniaux de leur union
peuvent conclure une convention qui va prévoir les contours d’un régime patrimonial de
leur relation. Les partenaires peuvent, par voie conventionnelle, opter pour le régime de
l’indivision pour les biens meubles ou immeubles qu’ils acquièrent. La convention doit faire
1. C. civ. art. 515-5, al. 1 : « Les partenaires peuvent, dans la convention initiale ou dans une convention modificative, choisir de soumettre
au régime de l’indivision les biens qu’ils acquièrent, ensemble ou séparément, à compter de l’enregistrement de ces conventions. Ces
biens sont alors réputés indivis par moitié, sans recours de l’un des partenaires contre l’autre au titre d’une contribution inégale ».

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Deuxième Partie – Statut du commerçant et de son conjoint

l’objet d’un enregistrement qui aura pour effet de rendre la convention opposable aux tiers.
Les biens visés dans le contrat sont alors réputés indivis par moitié, sans recours de l’un des
partenaires contre l’autre au titre d’une contribution inégale1. Sauf convention contraire,
chaque partenaire est alors gérant de l’indivision et peut exercer certaines prérogatives2.
Le partenaire ne pourra cependant pas vendre seul le fonds indivis. Chaque indivisaire
tire les bénéfices en fonction de sa part dans l’indivision et il supportera les pertes dans
la même mesure.

CHAPITRE 3
Union libre

237. L’union libre est une union de fait qui ne suppose aucun formalisme et ne produit en principe
aucun effet juridique. Historiquement, l’union libre est motivée par une volonté d’absence
d’engagement des concubins ne souhaitant pas graver leurs « noms au bas d’un parchemin »3.
La loi ne prévoit donc pas de régime particulier pour ce type d’union. Cependant, le droit
commun leur est applicable et notamment le régime de l’indivision. Aucune disposition
légale ne réglant la contribution des concubins aux charges de la vie commune, chaque
concubin doit, en l’absence de volonté exprimée à cet égard, supporter personnellement
les dépenses qu’il a engagées. Chacun concubin est propriétaire de ses biens qu’il crée ou
qu’il acquiert durant la vie maritale. Le droit commun est applicable et notamment les
concubins qui acquièrent ensemble un bien sont soumis au statut de l’indivision.

1. C. civ. art. 515-5-1 : « Les partenaires peuvent, dans la convention initiale ou dans une convention modificative, choisir de
soumettre au régime de l’indivision les biens qu’ils acquièrent, ensemble ou séparément, à compter de l’enregistrement
de ces conventions. Ces biens sont alors réputés indivis par moitié, sans recours de l’un des partenaires contre l’autre au
titre d’une contribution inégale ».
2. C. civ. 1873-6 à 1873-8.
3. G. Brassens, La non-demande en mariage, Supplique pour être enterré à la plage de Sète, 1966.

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Deuxième Partie – Statut du commerçant et de son conjoint

TITRE 2 – Statut professionnel du conjoint


participant à l’activité

238. S’il participe régulièrement à l’activité professionnelle de son époux1 et qu’il n’est pas
coexploitant, le conjoint doit opter pour un des statuts fixés par la loi : conjoint associé
(Chapitre 1), conjoint collaborateur (Chapitre 2), conjoint salarié (Chapitre 3). Le conjoint
qui ne prête pas son concours régulièrement à l’activité est aussi appréhendé par le droit
(Chapitre 4). Les statuts exposés concernent tant les époux liés par le mariage que les
partenaires unis par un PACS.

CHAPITRE 1
Conjoint associé

239. Le statut de conjoint associé suppose que le fonds exploité soit détenu par une société. Cette
figure est à distinguer du fonds qui serait appréhendé dans le cadre d’une indivision pour
laquelle les parties seraient co-exploitantes du fonds. Le contrat de société exige l’existence
d’apports de la part des associés, la volonté de partager les bénéfices et les pertes éven-
tuelles et l’intention de se comporter comme des associés. Les conjoints sont associés ou
actionnaires d’une société qui détient le fonds qu’elle exploite. Ce statut implique l’apport
du fonds, sa création ou son acquisition par la société. Les conjoints deviennent associés
avec toutes les prérogatives pécuniaires et de décision attachées à cette qualité (vote aux
assemblées générales, droit aux dividendes…). Un des conjoints peut seul apporter des
biens communs à la société. Cette mise en société de biens communs ouvre droit pour
l’époux apportant à la qualité d’associé. Le conjoint peut revendiquer cette qualité pour
les parts correspondant à la moitié des apports du bien commun2. Sauf cas particuliers3,
les conjoints associés ne sont pas directement commerçants. La qualité de commerçants
1. C. com. art. L. 121-4, I : « I. Le conjoint du chef d’une entreprise artisanale, commerciale ou libérale qui y exerce de manière régulière
une activité professionnelle opte pour l’un des statuts suivants : 1° Conjoint collaborateur ; 2° Conjoint salarié ; 3° Conjoint associé ».
2. C. civ. art. 1832-2 al. 3 : « La qualité d’associé est également reconnue, pour la moitié des parts souscrites ou acquises, au conjoint qui
a notifié à la société son intention d’être personnellement associé. Lorsqu’il notifie son intention lors de l’apport ou de l’acquisition,
l’acceptation ou l’agrément des associés vaut pour les deux époux. Si cette notification est postérieure à l’apport ou à l’acquisition, les
clauses d’agrément prévues à cet effet par les statuts sont opposables au conjoint ; lors de la délibération sur l’agrément, l’époux associé
ne participe pas au vote et ses parts ne sont pas prises en compte pour le calcul du quorum et de la majorité ».
3. Notamment la SNC pour laquelle la qualité d’associé est indissociable de celle de commerçant.

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Livre III • Acteurs du commerce

est attribuée à la personne morale. Même si le conjoint n’est pas mandataire social, le
conjoint associé est personnellement affilié en tant que travailleur indépendant, même s’il
n’est pas rémunéré. Il bénéficiera d’un régime proche de celui de son époux chef d’entreprise
pour sa couverture sociale (indemnités journalières travailleurs indépendants, allocations
en cas de maternité et paternité, etc.). Le régime décrit est essentiellement lié à la qualité
d’associé des conjoints. Les concubins associés seront donc soumis à un régime largement
comparable.

CHAPITRE 2
Conjoint collaborateur

240. Le statut de conjoint collaborateur est réservé au « conjoint d’un chef d’une entreprise
commerciale, artisanale ou libérale, qui exerce une activité professionnelle régulière dans
l’entreprise sans percevoir de rémunération et sans avoir la qualité d’associé au sens de
l’article 1832 du code civil ». Ce statut est réservé, par principe, au conjoint de l’exploitant
individuel. Exceptionnellement, ce statut peut être revendiqué par une personne dont le
conjoint exerce son activité dans le cadre d’une structure sociétaire1. Si le conjoint remplit
les conditions énoncées, le chef d’entreprise doit faire connaître l’option en se rappro-
chant du centre de formalités des entreprises (CFE) pour que soit procédé à la mention du
conjoint dans les registres de publicité légale à caractère professionnel2. La loi3 pose une
présomption de mandat du chef d’entreprise au bénéfice du conjoint collaborateur. Le
conjoint peut accomplir les actes d’administration nécessaires aux besoins de l’entreprise
(achat et de la vente de marchandises, de la signature de factures, de devis, de la réception
des paiements, de l’acquisition de matériel, la gestion du personnel…). Chaque époux
peut mettre fin à cette présomption de mandat au moyen d’une déclaration notariée qui
a vocation à être mentionnée au RCS4. Le conjoint collaborateur peut figurer sur les listes

1. Il s’agit des hypothèses du conjoint du gérant associé unique d’une EURL ou du gérant associé majoritaire d’une SARL ou
d’une société d’exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) dont l’effectif n’excède pas vingt salariés. C. com. art.
R. 121-3.
2. C. com. art. L. 121-4 IV.
3. C. com. art. L. 121-6 al. 1er : « Le conjoint collaborateur, lorsqu’il est mentionné au registre du commerce et des sociétés, au
répertoire des métiers ou au registre des entreprises tenu par les chambres de métiers d’Alsace et de Moselle est réputé
avoir reçu du chef d’entreprise le mandat d’accomplir au nom de ce dernier les actes d’administration concernant les
besoins de l’entreprise ».
4. C. com. art. L. 121-6, al. 2.

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Deuxième Partie – Statut du commerçant et de son conjoint

électorales en vue des élections aux chambres de commerce et aux tribunaux de commerce.
Le conjoint collaborateur bénéficie aussi de l’assurance maladie. En cas de prédécès du
chef d’entreprise, son conjoint survivant, justifiant avoir travaillé pendant dix ans dans
l’entreprise sans recevoir de rémunération (salaire ou participation aux bénéfices ou aux
pertes) bénéficie d’une créance de salaire différé d’un montant égal à trois fois le Smic
annuel en vigueur au jour du décès, dans la limite de 25 % de l’actif successoral.

CHAPITRE 3
Conjoint salarié

241. Une personne qui collabore à l’entreprise de son conjoint dans le cadre d’un contrat de
travail doit remplir les conditions fixées par la loi1. Elle devra participer effectivement à
l’entreprise ou à l’activité de son époux, à titre professionnel et habituel. Il sera alors néces-
saire de conclure un contrat de travail et d’affilier le salarié auprès des divers organismes
sociaux. Le conjoint bénéfice des avantages liés à sa qualité de salarié (congés payés,
assurance-maladie, vieillesse et chômage, etc.). À l’inverse, il ne pourra s’immiscer dans
la gestion de l’entreprise.

1. C. sec. Soc., art. L. 311-6, al. 1er.

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Livre III • Acteurs du commerce

CHAPITRE 4
Absence de statut

242. En premier lieu, le conjoint ne peut avoir le statut de commerçant que s’il exerce une
activité commerciale séparée de celle de son époux et non s’il ne fait que collaborer à
l’entreprise de ce dernier1. Le chef d’entreprise dont le conjoint participe régulièrement à
son activité, doit déclarer le statut choisi. En l’absence de déclaration, le statut de conjoint
salarié sera appliqué par défaut. Les partenaires liés par un PACS ne sont pas concernés
par cette disposition. La participation occasionnelle à l’activité du conjoint reste possible
et relève de l’obligation d’entraide familiale. La participation du conjoint doit alors être
exceptionnelle au risque d’être qualifiée de travail dissimulé.

1. C. com., art. L. 121-3 : « Le conjoint d’un commerçant n’est réputé lui-même commerçant que s’il exerce une activité
commerciale séparée de celle de son époux ».

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Livre IV

Fonds de commerce
Par Annalisa De Grandi

243. Pour exploiter son entreprise, le commerçant a besoin de tous les biens qui sont affectés
à son exercice. Son patrimoine varie certes en fonction de l’activité, mais on y retrouve un
certain nombre de biens spécifiques, tels que les marchandises, le matériel, la marque,
le nom commercial, le droit au bail, ou encore la clientèle. Or, ces biens constituent ce
qu’on appelle le « fonds de commerce ». Traditionnellement, le fonds de commerce est
composé de l’ensemble des moyens utilisés pour attirer et retenir la clientèle. Cette notion
est connue depuis l’Ancien Régime. Elle a été consacrée d’abord par le droit fiscal, puis par
le législateur dans la loi Cordelet du 17 mars 1909. Ce texte a été codifié dans le Code de
commerce au titre IV du Livre Ier (C. Com., art. L. 141-1 à L. 146-4) et réglemente la vente
du fonds, son nantissement, ainsi que son apport en société. À l’origine de la consécration
de la notion de fonds de commerce, il y a la reconnaissance de la valeur économique des
éléments corporels et incorporels réunis par l’œuvre du commerçant. Ainsi son travail
crée un capital que l’entrepreneur peut monnayer ou utiliser comme instrument de
crédit. Pour autant, la doctrine a souvent contesté la notion même de fonds, lui préférant
une notion unitaire autour du concept d’entreprise. De son côté le Code de commerce
ne contient aucune définition du fonds. Cette tâche est donc revenue à la jurisprudence
et à la doctrine qui en ce domaine ont dû faire œuvre créatrice (Partie 1. Notion de fonds
de commerce). Une fois le fonds de commerce défini, il conviendra d’analyser quelques
opérations susceptibles d’être réalisées, en lien avec celui-ci (Partie 2. Opérations en lien
avec le fonds de commerce).

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PREMIÈRE PARTIE

Notion
de fonds de commerce
244. Le fonds de commerce se compose d’éléments mobiliers corporels (matériel, outillage,
marchandises) et incorporels (droit au bail, nom commercial, enseigne, droits de propriété
industrielle, etc.). Son régime juridique est cependant distinct de celui des éléments qui le
composent. Pour justifier l’existence de ce bien et les spécificités de son régime, il est tradi-
tionnellement qualifié d’universalité de fait. Il importe donc d’étudier la nature juridique
du fonds de commerce (Titre 2) après avoir identifié les éléments qui le composent (Titre 1).

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Première Partie – Notion de fonds de commerce

TITRE 1 – Éléments constitutifs


du fonds de commerce

245. Les éléments constitutifs du fonds de commerce sont listés par le Code de commerce
aux articles L. 141-5 al. 2 et 4 et L. 142-2 al. 1. Cette énumération n’est pas limitative et elle
permet au commerçant de faire varier sa composition. Ainsi elle ne sera pas la même
selon le secteur d’activité, elle pourra même changer au cours de la vie de l’entreprise. Ces
éléments peuvent être classés en trois catégories : la clientèle, qui traditionnellement est
considérée l’élément fondamental du fonds (Chapitre 1), les éléments d’attraction de la
clientèle (Chapitre 2) et les éléments d’exploitation (Chapitre 3).

CHAPITRE 1
Clientèle

246. Définition. La clientèle n’est pas définie par la loi. Elle se compose de l’ensemble des rela-
tions d’affaires habituelles ou occasionnelles qui existent et seront susceptibles d’exister
entre le public et un professionnel1. Ces liens constituent l’élément essentiel du fonds et,
généralement, trouvent leurs sources dans des facteurs personnels et matériels conjugués.
247. Différence avec l’achalandage. Dans le Code de commerce, on retrouve à côté du terme
de clientèle celui d’achalandage. L’achalandage est l’ensemble de personnes attirées par
la seule situation géographique du fonds. Les chalands sont des clients potentiels liés plus
à l’emplacement qu’à l’activité du commerçant. Il en est ainsi pour les commerces situés
dans un lieu touristique ou dans une artère notoirement commerçante. En pratique, la
distinction demeure purement théorique, car la jurisprudence utilise les deux termes
comme des synonymes.
248. La nature de la clientèle est objet de controverse. Selon certains auteurs elle serait l’élément
central du fonds de commerce. Pour d’autres, elle est plutôt le but de son exploitation.
Le fonds serait alors constitué de facteurs attractifs de clientèle que l’entrepreneur met
en œuvre pour attirer des clients. Indépendamment de la théorie retenue, qu’elle soit

1. Cornu G., Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, 10e éd., 2014, PUF, Quadrige, v° Clientèle.

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Livre IV • Fonds de commerce

l’élément constitutif ou le produit du fonds de commerce, la clientèle demeure essentielle


(Section 1). Par ailleurs elle doit aussi avoir des qualités particulières et être propre au
commerçant (Section 2).

Section 1 – Existence de la clientèle

249. Théorie classique. La clientèle n’est pas une composante du fonds comme les autres.
Dans un arrêt de la Cour de cassation du 15 février 1937, elle est définie comme l’élément
en l’absence duquel il ne peut y avoir de fonds de commerce1. Cette position fonde la théo-
rie traditionnelle, selon laquelle la clientèle est un élément constitutif à part entière du
fonds. Il en résulte que l’existence d’une clientèle suffit à identifier un fonds de commerce,
même dénué de ses autres éléments. Ainsi la Cour de cassation a conclu que l’apport d’une
clientèle à une SARL doit être analysé comme un apport de fonds de commerce2.
250. Critique de la théorie classique. Une partie de la doctrine conteste cette interprétation et
propose une lecture plus moderne des éléments du fonds. La clientèle n’est pas un bien
au sens juridique du terme, car le client n’appartient pas au commerçant et il reste libre
de s’approvisionner où il veut. Elle n’est pas un élément du fonds, mais plutôt une qualité
de ce dernier, une « résultante »3. Le but de l’exploitation du fonds de commerce est donc
la recherche et la conservation de cette clientèle, car sans elle le fonds n’existerait plus.
251. Conséquences de l’exploitation. En principe, pour que la clientèle soit réelle et existante
il est nécessaire que le fonds soit exploité. Ceci comporte des conséquences sur la création
du fonds, sur son exploitation, ainsi que sur la cession des contrats portants sur le fonds
et sur la cessation de l’exploitation, notamment :
– Un fonds de commerce existe à partir du moment où l’exploitation a véritablement
commencé. La clientèle, qui était jusqu’alors seulement potentielle, devient réelle
et constitue le fonds. Ce principe connaît cependant des exceptions, dont l’exemple
le plus célèbre est celui des stations-services nouvellement installées. Dans un
arrêt de 1973, la Cour de cassation affirme que la station-service, dès lors qu’elle est en
état de fonctionner, et même si elle n’a pas encore été ouverte au public, possède une
clientèle réelle et certaine qui appartient à la société pétrolière4. Selon cette lecture,
la clientèle préexiste et le fonds est constitué dès le premier jour de son ouverture.
– Une entreprise qui dessert des clientèles distinctes dans des lieux différents possède
plusieurs fonds de commerce.

1. Cass. req., 23 oct. 1934. – S. 1934. 1, 392 – Cass. req. 15 févr. 1937 : D.P. 1938. 1, 13, note Cordonnier.
2. Com. 29 mai 1953. D. 1953. 599 ; Civ. 3e, 18 mai 1978, Bull. civ. III, n°205, p. 159.
3. G. Ripert, RTD com. 1962.605.
4. Com. 27 févr. 1973, D. 1974. 283.

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Première Partie – Notion de fonds de commerce

– Un contrat portant sur le fonds de commerce ne peut être cédé sans les éléments qui
lui permettent d’attirer la clientèle. La vente du fonds, ou d’une branche d’activité,
entraîne donc nécessairement la cession de la clientèle.
– Le fonds de commerce ne saurait survivre à la disparition de la clientèle. Ainsi la
cessation d’exploitation fait progressivement disparaître la clientèle et, au bout d’un
certain temps, le fonds lui-même. De la même façon, la cession séparée des éléments
composants le fond, tels que les stocks ou le droit au bail, ne permet plus l’application
des dispositions relatives au fonds de commerce.

Section 2 – Clientèle personnelle au commerçant

252. L’existence de la clientèle n’est pas à elle seule suffisante, il faut aussi qu’elle puisse être
rattachée personnellement au titulaire du fonds. Le développement des commerces
enclavés, dans un premier temps, puis de la distribution intégrée, ont suscité un conten-
tieux très abondant autour du caractère personnel de la clientèle. Lorsque le commerce
est franchisé ou lorsque le magasin est exploité dans une galerie marchande, peut-on lui
reconnaître une clientèle autonome ? Ne devrait-on pas, plutôt, attribuer cette clientèle
au seul franchiseur ou à la grande surface ?
253. Commerces enclavés. La jurisprudence a d’abord analysé la situation des commerces
enclavés, c’est-à‑dire des commerces qui sont exercés dans l’enceinte d’une autre e­ ntreprise
ayant ses propres clients, tels que les stands de vente implantés dans les grandes surfaces,
ou les buffets et restaurants installés dans un aéroport, une gare ou un hippodrome. Selon
les premières décisions, l’existence d’un fonds de commerce était remise en cause par l’im-
possibilité d’attribuer une clientèle propre au seul commerce enclavé. Ainsi une buvette
située dans un champ de courses ne pouvait avoir une clientèle personnelle, car ses clients
étaient uniquement ceux du champ de courses1. Par la suite, les juges, pour reconnaître
une clientèle propre, se sont focalisés sur la recherche d’éléments témoignant d’une véri-
table autonomie de gestion2. Or, les commerces enclavés doivent la plupart du temps se
conformer à la discipline de l’entreprise principale, ainsi qu’à ses horaires d’ouverture. Le
seul fait de pouvoir vendre des crêpes aux passants de la rue, en plus de ceux du centre
commercial, n’est pas suffisant pour se voir reconnaître une clientèle propre lorsque les
instruments de cuisine, les ingrédients et même l’eau et l’électricité sont fournis par la
société gérant la grande surface3. L’autonomie de gestion est alors appréciée au cas par
cas, en fonction des caractéristiques propres à chaque espèce. L’absence d’un critère clair

1. Cass., ass. plén., 24 avr. 1970, D. 1970, note R. L. ; JCP 1970. 11. 16489, note B. Boccara.
2. Civ. 3, 9 juill. 1979, D. 1980. 64 ; RTD com. 1980. 13, obs. J. Derruppé ; ibid. 319, obs. M. P. ; 5 avr. 1995, Bull. civ. III, n° 93, p. 63 ;
D. 1997. Somm. 51, obs. L. Rozès ; 5 juill. 1995, Bull. civ. III, n° 166, p. 112 ; 5 févr. 2003, Bull. civ. III, n° 25, p. 25, D. Affaires 2003.
910, obs. Y. Rouquet ; RTD com. 2003. 275, obs. J. Monéger.
3. Civ. 3, 1er octobre 2003, LPA 19 nov. 2003, p. 16.

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Livre IV • Fonds de commerce

et univoque étant source d’incertitude, la jurisprudence a, par la suite, exigé que l’exploitant
apporte la preuve, non seulement du caractère personnel de la clientèle, mais aussi de sa
prédominance par rapport à celle de l’entreprise qui l’accueille1. Ce critère a toutefois été
abandonné et dans un arrêt du 19 mars 20032, la Cour de cassation rappelle que la cour
d’appel « n’était pas tenue de rechercher si cette clientèle personnelle, dont elle constatait l’exis-
tence, était prépondérante par rapport à celle de la régie ». Désormais, l’existence d’une clientèle
propre est le seul critère retenu par les juges. Ainsi, on revient à la solution antérieure à
2003 fondée sur une démarche casuistique, tenant compte de la réalité concrète.
254. Distribution intégrée. En cas de distribution intégrée ou de franchise, la situation est plus
complexe. Dans l’hypothèse du réseau de franchise, le franchiseur met à la disposition des
entreprises franchisées les produits, le nom commercial, l’enseigne, ainsi que sa marque
et son savoir-faire, contre paiement d’un droit d’entrée et de redevances. Le système de
la franchise repose donc sur la transmission des techniques commerciales, qui ont fait le
succès de la marque. Ceci rend moins évident l’attribution de la clientèle au commerçant
qui pourtant exploite personnellement l’activité et en assume les risques. Au départ, la
jurisprudence a nié la reconnaissance d’une clientèle personnelle au franchisé qui se
retrouvait ainsi privé de fonds de commerce3. Or, cette solution affectait la stabilité éco-
nomique des réseaux de distribution et remettait en cause l’intérêt même du système.
La situation a évolué suite à deux arrêts du 4 octobre 2000, dans lesquelles le franchisé
se voit enfin reconnaître l’existence d’une clientèle autonome4. Les Conseillers de la Cour
d’appel de Paris estiment qu’à partir du moment où le franchisé assume seul les risques
de l’exploitation, il possède un fonds de commerce. La décision marque un premier pas
vers la reconnaissance d’un nouveau concept de clientèle qui n’est plus nécessairement
unitaire. Il n’existe pas une seule clientèle : selon les circonstances, il est possible d’iden-
tifier plusieurs typologies de clientèles qui coexistent. L’arrêt de la Cour de cassation du
27 mars 20025, connu sous le nom d’arrêt Trévisan, revient sur cette distinction en affirmant
que « si une clientèle est au plan national attachée à la notoriété de la marque du franchiseur, la
clientèle locale n’existe que par le fait des moyens mis en œuvre par le franchisé ». Le franchiseur
garde donc sa clientèle nationale, alors que le franchisé se voit attribuer une clientèle
locale, certes moins importante, mais qui justifie l’existence du fonds de commerce. Cette
clientèle est partie intégrante de son fonds puisque « elle est créée par son activité, avec des

1. Civ. 3, 27 nov. 1991, Bull. civ. I1, n° 289, p. 170 ; Civ., 4 nov. 1992, Gaz. Pal. 1993. 2. 308, note L.-D. Barbier ; D. 1994. Somm. 51,
obs. L. Rozès.
2. Cass. 3e civ., 19 mars 2003, n° 01-17679.
3. Paris, 6 février 1996, Defrénois, art. 36371, obs. P. Le Cannu et J.-P. Sénéchal ; RTD com. 1996. 237, obs. J. Derruppé. Dans cet
arrêt la cour d’appel de Paris a jugé que le franchisé d’un réseau de location automobile n’avait pas de fonds de commerce
en propre, car il est dépourvu d’une clientèle liée à sa propre activité personnelle, indépendante de l’attrait de la marque.
4. Paris 4 octobre 2000, D. 2001, p. 380, obs. A-L Monéger-Dupuis et p. 1718 note H. Kenfack ; Cass. 27 mars 2002, D. 2002,
p. 2400, obs. H. Kenfack, RTD Com. 2003, p. 273, obs. J. Moneger ; Contrats, concurrence, consommation, 2002, com. 155,
L. Leveneur.
5. Cass. 3°civ., 27 mars 2002, n° 00-20732, Bul. civ. I1, n° 77, p. 66 ; D. 2002. 2400, note H. Kenfack ; JCP 2002. II. 10112, note F.
Auque.

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Première Partie – Notion de fonds de commerce

moyens que, contractant à titre personnel avec ses fournisseurs ou prêteurs de deniers, il met en
œuvre à ses risques et périls ».
255. Depuis l’arrêt Trévisan, la jurisprudence n’est plus revenue sur la reconnaissance d’une
clientèle personnelle liée au distributeur. Il est toutefois intéressant de remarquer que
ces exploitants sont réputés bénéficier d’une clientèle jusqu’à preuve du contraire. Ainsi,
ils jouissent d’emblée de cette clientèle, sauf à ce qu’il soit démontré que leur gestion est
totalement dépendante de l’organisateur du réseau. Ce même avantage n’est cependant
nullement reconnu aux exploitants de commerces enclavés qui, pour leur part, doivent
rapporter eux-mêmes la preuve de l’existence de la clientèle.

CHAPITRE 2
Éléments d’attraction de la clientèle

256. Pour constituer son fonds, le commerçant doit mettre en œuvre les éléments qui ont pour
vocation d’attirer une clientèle. On les regroupe en deux catégories : les signes distinctifs
qui ne font l’objet d’aucun droit de propriété intellectuelle (Section 1) et les droits de
propriété industrielle (Section 2).

Section 1 – Signes distinctifs qui ne font l’objet d’aucun droit


de propriété intellectuelle

257. Les signes distinctifs sont les éléments qui permettent d’identifier le commerçant et son
entreprise. Il s’agit du nom commercial (§1), de l’enseigne (§2) et du nom de domaine (§3).
Leur importance économique varie selon le secteur d’activité.

§1. Nom commercial

258. Identification du fonds. Le nom commercial permet d’identifier le fonds de commerce. Il


désigne l’entreprise en tant que bien et non en tant que personne morale. Il constitue la
dénomination sous laquelle l’entreprise exerce son activité. Il peut être composé du seul
nom patronymique de l’exploitant ou encore d’un pseudonyme ou d’un nom de fantaisie.

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Livre IV • Fonds de commerce

Il s’acquiert par un usage personnel, public et continu. Aucun système d’enregistrement ne


permet de s’approprier le nom commercial en tant que tel au titre du droit de propriété.
La publication du nom commercial au registre du commerce et des sociétés au moment
de l’immatriculation du commerçant demeure purement déclarative et elle ne confère
aucun droit privatif exclusif sur le signe choisi. Il est transmis avec le fonds sauf convention
contraire.
259. Différence avec la dénomination. Il ne faut pas confondre le nom commercial avec la
dénomination sociale, qui est un signe verbal désignant une personne morale. Le droit
sur la dénomination sociale s’acquiert par son insertion dans les statuts. Il ne constitue
pas un élément du fonds de commerce. La dénomination sociale est le nom attribué à une
société, tel qu’il figure dans les statuts, et qui permet d’identifier celle-ci.
260. Protection du nom commercial. Le principal moyen de protection du nom commercial est
le recours à l’action en concurrence déloyale. Le droit portant sur le nom commercial n’étant
pas un droit de propriété, la meilleure façon de le protéger est d’agir sur le fondement
de l’article 1240 du Code civil. Celui qui, même n’étant pas concurrent du commerçant
victime, fait usage d’un signe identique ou similaire créant un risque de confusion avec
le nom commercial antérieur, se verra condamner à cesser son utilisation et à indemniser
le préjudice causé.

§2. Enseigne

261. L’enseigne sert à désigner la boutique. L’article L. 581-3, 2° du Code de l’environnement


la définit comme « toute inscription, forme ou image apposée sur un immeuble et relative à
une activité qui s’y exerce ». L’enseigne est donc un signe physique et visuel, généralement
apposé à l’extérieur de l’établissement, au-dessus de la devanture, qui permet aux clients
d’identifier et de localiser l’établissement dans lequel est exploité le fonds de commerce.
Elle peut se confondre avec le nom commercial et, d’ailleurs, un même signe peut servir
à la fois pour les deux. L’enseigne suit le même régime d’acquisition et de protection que
le nom commercial. Tous les signes (signe de fantaisie, nom de famille du commerçant)
peuvent être adoptés comme nom commercial et enseigne, à condition qu’ils ne soient
contraires ni à l’ordre public ni aux bonnes mœurs, et qu’ils ne portent atteinte à aucun
droit antérieur (ex. marque déposée). En tant que moyen de ralliement de la clientèle,
l’enseigne est liée au fonds de commerce et est transmise en même temps que lui.

§3. Nom de domaine

262. Notion. Le nom de domaine désigne l’adresse du site internet. Il est défini comme une
dénomination unique à caractère universel qui permet de localiser et accéder à une ressource
sur internet. Il est rapidement devenu un signe de ralliement de la clientèle et comme tel,

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Première Partie – Notion de fonds de commerce

il doit être cédé avec le fonds. Le nom de domaine est attribué au demandeur éligible qui
le premier en a fait la demande. L’exploitant n’a pas un droit de propriété sur le nom de
domaine mais plutôt d’un droit d’usage exclusif. Aux termes de l’article L. 45-1, alinéa 1, du
Code des postes et des communications électroniques, les noms de domaine sont attribués
et gérés dans l’intérêt général, selon des règles non discriminatoires et transparentes,
garantissant le respect de la liberté de communication, de la liberté d’entreprendre et
des droits de la propriété intellectuelle. Le régime des noms de domaine est précisé par
les articles L. 45-1 à L. 45-6 du Code des postes et des communications électroniques et par
les articles R. 20-44-31 à R. 20-44-37 du Code des postes et communications électroniques.

Section 2 – Droits de propriété industrielle

263. Les droits de propriété industrielle sont des biens de nature incorporelle qui procurent à
leurs titulaires un monopole d’exploitation ou d’utilisation. L’expression désigne tradition-
nellement les brevets d’invention (§1), la marque (§2), ainsi que les dessins et modèles (§3).

§1. Brevet d’invention

264. Conditions. Le brevet d’invention est un titre de propriété industrielle délivré par l’Institut
National de la Propriété Industrielle (INPI), et qui confère à son titulaire un droit exclusif
d’exploitation d’une durée maximale de 20 ans sur une invention industrielle. Pour être
brevetable l’invention doit remplir quatre critères cumulatifs :
– L’invention doit être nouvelle, c’est-à‑dire qu’elle doit apporter une nouvelle solution à
un problème technique jusqu’alors non résolu. Elle peut prendre la forme d’un produit,
d’un procédé ou de l’application d’un procédé.
– Elle doit résulter d’une activité inventive. Ceci implique que la solution ne découle pas
de manière évidente pour l’homme du métier, normalement formé et compétent dans
le domaine technique concerné.
– Elle doit être susceptible d’application industrielle.
– Elle doit pouvoir être brevetable et donc ne pas être contraires à l’ordre public et aux
bonnes mœurs.
Toute demande de brevet français doit être introduite auprès de l’Institut national de la
propriété industrielle (INPI) et être accompagnée d’une description détaillée de l’invention,
des dessins et/ou de schémas explicatifs, ainsi que des revendications. Le brevet d’invention
est délivré par le directeur de l’INPI. Ensuite, pour être opposable, la délivrance devra
être publiée au Bulletin officiel de la propriété industrielle (BOPI) avec la description de
l’invention brevetée.

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Livre IV • Fonds de commerce

265. Protection juridique. Le brevet d’invention garantit un droit exclusif d’exploitation sur
son invention pendant une durée qui peut aller jusqu’à 20 ans au maximum à compter
du dépôt de la demande. Au terme de cette période, l’invention tombe dans le domaine
public et elle pourra être utilisée librement par toute personne intéressée. Ce droit exclu-
sif d’exploitation garantit à son titulaire le droit d’interdire tout acte d’exploitation et de
commercialisation de l’invention sans son autorisation. Le titulaire du brevet peut aussi
concéder des licences d’exploitation en contrepartie de redevances. La protection des
droits exclusifs du breveté est assurée par l’action en contrefaçon. Les articles L. 613-3 et
suivants du Code de la propriété intellectuelle sanctionnent comme délit de contrefaçon
notamment la fabrication, l’offre, la mise dans le commerce, l’utilisation, l’importation,
l’exportation, le transbordement ou la détention à de telles fins, de l’invention brevetée,
sans le consentement du titulaire. Le contrefacteur verra engagée sa responsabilité sur
les plans civil et pénal.

§2. Marque

266. Finalité de la marque. La marque de fabrique, de commerce ou de service est un signe


susceptible de représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d’une
personne physique ou morale (CPI, art. L. 711-1). Son rôle est multiple. Avec le temps, la
marque a pris de plus en plus d’importance et de valeur économique. Le succès des fran-
chises et des réseaux de distribution repose en grande partie sur la faculté offerte aux
franchisés de vendre des produits de marque. Le développement du commerce électro-
nique a contribué à amplifier son succès. Au départ, la marque était un moyen d’identifier
l’origine du produit. Elle a ensuite acquis des fonctions nouvelles, jusqu’à devenir l’image
de l’entreprise, son principal élément attractif de la clientèle, et un moyen de publicité. Son
rôle est devenu central tant dans l’acquisition, que dans la conservation et la fidélisation
des consommateurs et son régime est encadré par le Code de la Propriété Intellectuelle
(CPI, art. L. 711 et s.).
267. Conditions de l’enregistrement. La marque a pour fonction de réserver l’usage du signe
au titulaire, en lui conférant un monopole d’exploitation. Pour ce faire il est nécessaire
procéder à l’enregistrement de la marque. Quatre critères cumulatifs doivent être réunis
pour procéder à l’enregistrement :
– Le signe doit être distinctif. En sont dépourvus les signes qui, dans le langage courant
ou professionnel, constituent exclusivement la désignation nécessaire, générique ou
usuelle d’un produit ou service.
– Le signe ne doit pas être contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs, ni reproduire
des signes officiels tels que les emblèmes, armoiries, poinçons, etc.
– La marque ne doit pas être trompeuse sur l’origine ou la qualité ou les caractéristiques
essentielles du produit ou du service.

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Première Partie – Notion de fonds de commerce

– La marque ne doit porter atteinte à aucun droit antérieur (ex. marque déjà déposée).
Pour être protégée, la marque doit être enregistrée au registre des marques tenu par l’INPI.
La demande doit énumérer les produits et/ou les services pour lesquels la marque sera
exploitée. Elle est ensuite examinée par le directeur de l’INPI. Elle fait l’objet d’une première
publication au BOPI afin que les tiers puissent, dans un délai de 2 mois, se prévaloir d’un
droit antérieur pour faire opposition à l’enregistrement de la marque. Le titre de propriété
industrielle est délivré par le directeur de l’INPI. Ses décisions sont susceptibles de recours.
268. Limites de l’enregistrement. L’enregistrement confère au titulaire de la marque un droit
exclusif d’exploitation pendant une période de 10 ans. Au terme de la période il peut
être renouvelé indéfiniment. Toutefois le seul enregistrement n’est pas suffisant pour
garantir le monopole légal de la marque. Le titulaire doit, non seulement, payer une
redevance annuelle, mais en plus exploiter de manière effective la marque. L’absence
d’usage sérieux du signe enregistré pendant une période ininterrompue de 5 ans ouvre
droit à tout intéressé de demander au juge la déchéance des droits du titulaire. Comme
pour le brevet, la protection de la marque est garantie par le délit pénal de contrefaçon.
L’action se prescrit par cinq ans.

§3. Dessins et modèles

269. Différence entre un dessin et un modèle. Les dessins et modèles sont protégés par les
dispositions du Code de la propriété intellectuelle (CPI) aux articles L. 511-1 et s. Pour la
loi un dessin est un assemblage de lignes et/ou de couleurs sur une surface plane. Un
modèle, en revanche, est une forme plastique à trois dimensions. L’objet de la protection
porte sur l’apparence d’un produit d’origine industrielle ou artisanale, destiné, ou pas à
être assemblées en un produit complexe, à condition que le dessin ou modèle présente
un caractère propre1. Le caractère propre est défini par l’article L. 511-4 du CPI : le dessin
ou modèle doit susciter chez l’observateur averti une impression visuelle d’ensemble qui
diffère de celle produite par les dessins et modèles antérieurs. La protection est toutefois
exclue quand l’apparence est exclusivement imposée par la fonction technique du produit.
270. Protection juridique. La procédure d’enregistrement des dessins et modèles s’effectue
auprès de l’INPI. Elle doit comporter des reproductions graphiques et photographiques de
l’objet. Le titre de propriété industrielle est délivré par le directeur de l’INPI et il doit être
publié au Bulletin Officiel de la propriété industrielle (BOPI). L’enregistrement confère au
titulaire un droit exclusif d’exploitation sur le dessin ou le modèle pour une durée de 5 ans.
Le titulaire peut demander le renouvellement de l’enregistrement quatre fois pour une
même durée. Les dessins et modèles sont donc protégeables pour une durée maximale
de 25 ans. Le titre de propriété industrielle délivré par l’INPI est valable uniquement sur le

1. B. Humblot, « Nouveauté, caractère propre : un fauteuil pour deux. Regard critique sur les critères objectifs de protection
des dessins et modèles », JCP E 2003, 902.

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Livre IV • Fonds de commerce

territoire français. Mais un enregistrement auprès de l’EUIPO offre une protection pour l’en-
semble du territoire de l’Union européenne. Comme pour tout autre droit de propriété
industrielle, le titulaire d’un dessin ou d’un modèle a l’obligation de payer des redevances
et d’exploiter son dessin ou son modèle. La protection des dessins et modèles est garantie
par le délit de contrefaçon. Les modalités sont les mêmes que pour les marques. Le délit
est donc à la fois civil et pénal. Il consiste dans la fabrication, l’offre, la mise sur le marché,
l’importation, l’exportation ou la détention à ces fins.

Section 3 – Éléments d’exploitation du fonds de commerce

271. Les éléments d’exploitation du fonds de commerce sont les biens qui permettent à
­l’entrepreneur la réalisation de l’activité commerciale. On retrouve à ce titre le droit au bail
commercial (§1), les licences et les autorisations (§2) et le matériel et les marchandises (§3).

§1. Droit au bail commercial

272. Définition. Le bail commercial est un contrat de location d’un immeuble ou d’un local dans
lequel est exploité un fonds de commerce ou un fonds artisanal. Ce contrat se différencie
des autres contrats de location car il revêt un rôle primordial dans le maintien de la clientèle.
273. Intérêt du statut. La stabilité géographique du fonds est essentielle car elle évite la dis-
persion de la clientèle et, en particulier, de l’achalandage. La clientèle dite « de passage »
est liée à l’emplacement du local et ne survit, généralement, pas à son déménagement.
Or, le commerçant n’est que rarement propriétaire des locaux dans lesquels il exploite son
fonds de commerce. Ainsi, seul le droit au bail commercial permet de garantir la pérennité
de l’entreprise. Le principal droit conféré au preneur par le droit au bail commercial est
le droit au renouvellement dudit bail portant sur l’immeuble dans lequel est exploité un
fonds de commerce. Ainsi aux termes du contrat, ce dernier se verra bénéficier de ce que
l’on appelle la propriété commerciale, c’est-à‑dire le droit d’obtenir soit le renouvellement
du contrat, soit une indemnité d’éviction. Seul le bail fait partie du fonds. Les immeubles
ou locaux appartenant au commerçant en sont exclus. Si le commerçant est propriétaire
des murs, le droit au bail ne fera pas partie du fonds. Le propriétaire peut bien entendu
procéder à la vente des murs, y compris à l’acquéreur du fonds, mais la cession des murs
commerciaux sera une autre opération juridique.

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Première Partie – Notion de fonds de commerce

§2. Licences et autorisations

274. Certaines activités commerciales ne peuvent être exercées qu’après obtention d’une licence
ou d’une autorisation. Il convient de distinguer si la licence ou l’autorisation est attachée
à l’activité elle-même ou à la personne du commerçant :
– Si la licence ou l’autorisation est attachée à l’activité elle-même, elle fait partie intégrante
du fonds de commerce et peut donc être cédée ou données en location avec lui.
– Si la licence ou l’autorisation est, au contraire, attachée à la personne du commerçant,
comme c’est le cas d’une autorisation temporaire d’occupation du domaine public,
ou d’une licence d’agence de voyages ou de tourisme, elle ne suit pas le sort du fonds.
L’acquéreur doit alors en obtenir une nouvelle et en attendant il ne peut pas commencer
l’exploitation1.

§3. Matériel et les marchandises

275. Parmi les éléments d’exploitation du fonds de commerce on retrouve aussi certains biens
corporels, tels que les marchandises, le matériel et l’outillage :
– Le matériel et l’outillage. Le matériel est composé des objets meubles corporels
durablement affectés à l’exploitation du fonds. Il comprend les outils, les machines et
les équipements. Ils sont plus importants dans l’industrie que dans le commerce, dans
le commerce que dans les services. Si le propriétaire du fonds est aussi propriétaire
de l’immeuble et qu’en raison de l’aménagement spécial de celui-ci, ces machines
présentent le caractère d’immeubles par destination, alors elles se verront exclues de
la composition du fonds.
– Les marchandises. Les marchandises constituent le stock de matières premières ou
de produits à vendre. Elles composent l’actif circulant. Les marchandises font l’objet
d’un inventaire séparé en cas de vente du fonds de commerce. De la même façon, elles
sont exclues du nantissement du fonds au profit d’une autre sûreté spéciale régie par
le Code de commerce : le gage des stocks.

1. A. Levi, Lamy, Droit commercial 2011, n° 109 s.

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Première Partie – Notion de fonds de commerce

TITRE 2 – Nature du fonds de commerce


276. Traditionnellement le fonds de commerce est un tout, une entité autonome, distincte
de la somme des éléments qui la composent. Cette constatation est le fondement de la
notion même de fonds et influence l’appréhension de son régime juridique, différent de
celui applicable à chacun des éléments qui le compose. Initialement le rattachement à
une catégorie juridique connue n’a pas été aisé, même si, aujourd’hui, la jurisprudence et
la doctrine s’accordent sur les caractères juridiques qu’il y a lieu de reconnaître au fonds
de commerce (Chapitre 1) et sur les conséquences qui en résultent (Chapitre 2).

CHAPITRE 1
Qualification du fonds de commerce

277. Le fonds de commerce est une universalité (Section 1) qui doit être appréhendée comme
un bien meuble incorporel affecté à une activité commerciale (Section 2).

Section 1 – Qualification du fonds de commerce


comme universalité

278. Trois qualifications ont été proposées pour la nature juridique du fonds de commerce :
celles d’universalités de droit ou de fait et celle de propriété incorporelle.
279. Théorie de l’universalité de droit. Une première théorie analyse le fonds de commerce
comme un patrimoine d’affectation, c’est-à‑dire comme un patrimoine distinct, autonome,
englobant les créances et les dettes nées de l’exploitation commerciale. Or, elle se heurte au
principe selon lequel l’entrepreneur exerçant en son nom répond de son passif commercial
sur l’ensemble de son patrimoine. Au cours des dernières années toutefois, le législateur a
pris en compte progressivement le risque encouru par l’entrepreneur. Ainsi la loi Madelin
du 11 février 1994, puis la règle d’insaisissabilité de la résidence principale (Code de com-
merce, art. L. 526-1), et enfin la loi relative à l’EIRL du 15 juin 2010, assurément inspirée

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Livre IV • Fonds de commerce

par une doctrine visionnaire1, accordant à l’entrepreneur individuel le droit d’« affecter à
son activité professionnelle un patrimoine séparé de son patrimoine personnel, sans création d’une
personne morale » (C. com., art. L. 526-6), protègent le commerçant.
280. Théorie de la propriété incorporelle. La théorie de la propriété incorporelle voit dans le
fonds de commerce une propriété incorporelle, analogue à celle de l’inventeur sur son
brevet d’invention ou à celle de l’écrivain sur son œuvre. Ainsi, l’action en concurrence
déloyale pourrait protéger le commerçant de toute agression qui affecterait sa clientèle.
Or, le commerçant ne dispose de droits que sur les moyens qu’il met en œuvre pour réunir
sa clientèle et non sur les personnes qui la composent. En revanche, cette organisation
lui permet d’attirer et de retenir sa clientèle. Constituant une création intellectuelle,
elle mériterait selon cette thèse une protection juridique adéquate à travers l’action en
concurrence déloyale.
281. Théorie de l’universalité de fait. Traditionnellement le droit ne connaît que la notion
d’universalité de droit. L’universalité de fait désigne néanmoins une masse de biens
affectée à une exploitation commerciale. Elle constitue une unité économique, car par la
volonté du commerçant, ces éléments sont tous traités comme un bien unique. La prin-
cipale critique qui peut être soulevée à l’égard de cette théorie est qu’elle ne crée aucun
régime juridique propre. L’universalité de fait ne constitue, ni une personne juridique
autonome, ni un patrimoine distinct. Elle se limite à constater la réunion d’un ensemble
de biens, dont certains peuvent être modifiés ou ajoutés en fonction des décisions de
gestion du commerçant. Nonobstant la portée pratique réduite, cette théorie est celle
qui a été retenue par la jurisprudence depuis 1993 et constitue désormais le fondement
de la notion de fonds de commerce2.

Section 2 – Qualification du fonds de commerce comme bien

282. Le fonds de commerce peut également être qualifié de bien. Il possède des caractéristiques
qui vont au-delà de sa nature hétérogène et qui donnent des indications sur ledit bien.
Les trois premières sont d’origine jurisprudentielle3 :
– Le fonds de commerce est un bien unitaire. Il est conçu comme un objet de droit
indépendant de ses éléments. Il ne fait pas disparaître pour autant l’individualité de
ses éléments. Ainsi, au moment de la cession du fonds, l’entrepreneur devra parfois
accomplir des formalités de transmission propres à chacun4.
1. A.-L. Thomat-Raynaud, L’unité du patrimoine : essai critique, Defrénois 2007.
2. La Cour de cassation considère ainsi que le fonds de commerce constitue une universalité mobilière insusceptible de
cession partielle (Cass. com., 12 nov. 1992, n° 90-20845 ; Cass. com. 26 oct. 1993, n° 91-15877).
3. Com. 16 févr. 1993, Bull. civ. IV, n° 63, p. 42.
4. Com. 21 juin 1950, JCP 1950. II. 5898, note A. Cohen ; RTD com. 1951. 45, obs. A. Jauffret ; Reims, 8 mars 1976, RTD com. 1977.
487, obs. J. Derruppé.

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Première Partie – Notion de fonds de commerce

– Le fonds de commerce est un bien incorporel. Le fonds a une composition hétérogène


dans laquelle on retrouve tant des biens corporels que des biens incorporels. Cependant
la prééminence de ces derniers est incontestable, il suffit de penser au rôle de la clientèle
dans la constitution du fonds. De plus, il n’est pas susceptible de possession et la règle
« en fait de meubles, la possession vaut titre »1 ne lui est pas applicable2.
– Le fonds de commerce est un bien meuble. Il se compose uniquement de biens meubles
et jamais d’immeubles. Si l’entrepreneur est aussi propriétaire de l’immeuble, ce dernier
devra être cédé par un acte distinct. Les règles juridiques concernant les immeubles lui
sont, donc, inapplicables. Ceci implique, par exemple, qu’il n’est pas possible d’inscrire
une hypothèque sur le fonds. Son régime n’est pas pour autant calqué exclusivement
sur celui des biens meubles : en raison de la valeur économique qu’il représente et de
sa relative stabilité, garantie par le régime des baux commerciaux, il se voit appliquer
aussi de dispositions proches de celles prévues pour les opérations immobilières. Par
exemple, la procédure de cession du fonds de commerce est très formaliste.
– Le fonds de commerce est un bien commercial. Il naît de l’activité commerciale de
l’exploitant. Ainsi, les règles relatives au fonds de commerce ne s’appliquent pas aux
clientèles civiles des professions libérales, ni aux exploitations agricoles. Pour autant,
existent d’autres formes de fonds connues par la loi (fonds artisanal, fonds libéral et
fonds agricole). Directement ou indirectement, la structure du fonds de commerce leur
a probablement servi de source d’inspiration.

CHAPITRE 2
Conséquences de la qualification
du fonds de commerce

283. Le fonds de commerce est dépourvu de personnalité morale et ne constitue pas, à lui seul,
un patrimoine d’affectation. Par conséquent, les créances et les dettes demeurent person-
nelles à l’entrepreneur exploitant individuel (Section 1). Ce principe connaît cependant
des exceptions et des aménagements, afin de permettre la transmission du fonds avec
un certain nombre d’accessoires (Section 2).

1. C. civ. art. 2276.


2. Com., 7 mars 2006, pourvoi n° 04-13569.

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Livre IV • Fonds de commerce

Section 1 – Caractère personnel des créances et dettes

284. Le fonds de commerce est inclus dans le patrimoine de son propriétaire qui est seul titu-
laire des créances et des dettes se rapportant à l’exploitation du fonds. En cas de cession
du fonds, il ne peut pas y avoir de transmission automatique des créances, ni a fortiori des
dettes de l’entreprise. Or, cela empêcherait le transfert concomitant au fond d’un certain
nombre de contrats pourtant indispensables pour le commerçant. Les obligations qu’il
a personnellement contractées ne se transmettent donc pas avec le fonds et demeurent
personnelles au commerçant, sous réserve de certaines exceptions.

Section 2 – Exceptions à l’intransmissibilité de certains éléments

285. Le fonds de commerce ne comprend pas les créances et les dettes, sa cession ne permet
pas dès lors de transmettre de plein droit tous les contrats nécessaires à l’exploitation du
fonds. Toutefois, la loi prévoit des exceptions ainsi que des aménagements à ce principe
d’intransmissibilité de plein droit.
286. Les exceptions à la non-transmission des créances. Les exceptions portent sur les contrats
de travail, les contrats d’assurance et les obligations de non-concurrence :
– Les contrats de travail. L’article L. 1224-1 du Code du travail impose la continuation des
contrats de travail en cours par le nouvel employeur qui assume l’exploitation du fonds.
L’exploitation doit en effet être continuée indépendamment de l’identité de la personne
du commerçant. Il s’agit d’une protection des salariés offerte par le droit social en cas
de changement d’employeur. Cette obligation est imposée à l’acquéreur du fonds de
commerce et s’applique même en cas de location-gérance.
– Les contrats d’assurance. Les contrats d’assurance relatifs au fonds se transmettent
avec les objets assurés (art. L. 121-10, C. assur.). L’acquéreur, ainsi que l’assureur, gardent
néanmoins la faculté de résilier le contrat.
– Les obligations de non-concurrence. Les obligations de non-concurrence contractées
par le cédant sont également transmises à l’acquéreur tant que le délai de non-réta-
blissement n’est pas écoulé.

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DEUXIÈME PARTIE

Opérations en lien
avec le fonds de commerce
287. La composition du fonds étant analysée, il convient de se focaliser désormais sur deux
opérations importantes en lien avec le fonds de commerce : la location-gérance (Titre 1)
et le bail commercial (Titre 2).

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Deuxième Partie – Opérations en lien avec le fonds de commerce

TITRE 1 – Location-gérance du fonds de commerce


288. Séparation de la propriété et de l’exploitation. Un fonds de commerce n’est pas toujours
exploité par son propriétaire. Ce dernier peut également décider de le confier à un tiers,
afin qu’il l’exploite à sa place. Dans cette hypothèse, le propriétaire sépare l’exploitation
du commerce de la propriété de ses composantes. Ainsi, le fonds peut être mis en gérance,
faire l’objet d’un crédit-bail ou encore être donné en location-gérance. C’est cette dernière
hypothèse qui sera étudiée dans les paragraphes suivants.
289. Définition. La location-gérance, appelée aussi « gérance libre », est un contrat par lequel le
propriétaire d’un fonds de commerce (le bailleur) en concède totalement ou partiellement
la location a un gérant (dénommé locataire-gérant), qui l’exploite à ses risques et périls
(Code de commerce, art. L. 144-1). Le gérant devient alors un commerçant, tandis que le
propriétaire perd cette qualité pour devenir le loueur du fonds. Comme tout contrat de
location, le locataire doit un loyer ou une redevance à son bailleur.
290. Avantages et inconvénients. À la différence du bail commercial, le contrat de ­location-gérance
ne porte pas sur l’immeuble, mais sur une universalité de biens meubles constituant le fonds
de commerce. Il présente une utilité réelle car il permet à des personnes en difficulté de
conserver ou d’exploiter une activité. Il suffit de penser au propriétaire du fonds, incapable
ou mineur, qui ne pourrait pas gérer personnellement le fonds et qui pourrait le confier
au locataire-gérant ; ou encore au jeune sans fortune personnelle, qui manquerait de
financements pour l’acquérir et qui pourrait devenir locataire-gérant. Dans cette dernière
hypothèse, le locataire-gérant aurait la possibilité démontrer ses capacités à d’éventuels
créanciers, tout en se constituant un capital de départ en vue de l’achat prochain de son
propre fonds de commerce. Ce contrat présente aussi des limites. D’une part le gage des
créanciers est réduit aux seuls éléments transmis avec le fonds ; d’autre part l’activité
du fonds doit couvrir le loyer prélevé par le propriétaire, mais aussi les besoins de son
exploitant. Ce double prélèvement est susceptible d’engendrer une augmentation des
prix payés par les clients et donc provoquer une moindre compétitivité de l’entreprise.
291. Codification du régime. Pour toutes ces raisons, les pouvoirs publics ont choisi de régle-
menter de façon stricte son régime avec une loi du 20 mars 1956 aujourd’hui intégrée au
Code de commerce. Par la suite, deux textes sont intervenus pour encourager le recours
à la location-gérance : l’ordonnance du 25 mars 2004 et la loi Sapin du 9 décembre 2016.
La réglementation est d’ordre public et s’applique également aux fonds artisanaux. Tout
d’abord seront analysées les conditions applicables à ce régime (Chapitre 1), pour ensuite
étudier les effets la location-gérance (Chapitre 2).

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Livre IV • Fonds de commerce

CHAPITRE 1
Conditions de la location-gérance

292. La location-gérance est conditionnée tant par le fond (Section 1) que par la forme (Section 2).

Section 1 – Conditions de fond

293. La location-gérance doit obéir aux conditions de validité des conventions énoncées à l’ar-
ticle 1128 du Code civil (consentement libre et éclairé, capacité, contenu licite et certain).
Le locataire-gérant doit, tout d’abord, avoir la capacité commerciale. Ensuite, pour pouvoir
exploiter le fonds de commerce, il doit se faire immatriculer au Registre du Commerce
et des Sociétés (RCS). Par ailleurs, aucune cause d’incompatibilité, de déchéance ou d’in-
terdiction ne doit venir le priver de la possibilité d’exercer une activité commerciale. Le
contrat doit porter sur un fonds de commerce ou sur un fonds artisanal. Pour que le fonds
existe, il est nécessaire qu’une clientèle réelle et certaine lui soit rattachée. La nature du
fonds de commerce fait que la location-gérance est analysée par la doctrine comme un
bail de bien incorporel. Comme tout contrat de bail, il est nécessaire que soit prévue une
contrepartie à la mise à disposition du bien. Cette contrepartie est représentée par la
stipulation d’une redevance, ou tout au moins, par l’existence d’un intérêt économique
commun aux deux parties1.

Section 2 – Conditions de forme

294. Publication RCS. Aucun texte n’impose la forme écrite pour la validité du contrat de
location-gérance. La finalité de l’écrit est tout simplement probatoire et pour permettre
la publication. En pratique, sans l’écrit, la publication du contrat serait impossible. Le
locataire-gérant est commerçant et, à ce titre, il doit se faire immatriculer au Registre
du Commerce et des Sociétés. Les informations demandées sont nombreuses. Il devra
indiquer son identité (nom, nom d’usage, pseudonyme, prénoms), ses coordonnées,
ainsi que les dates du début et du terme du contrat avec, le cas échéant, le renouvelle-
ment du contrat par tacite reconduction. La mention de la mise en location-gérance doit
être insérée lors de l’immatriculation du locataire-­gérant, ainsi que dans l’avis publié au
1. Com. 23 mars 1999, Bull. civ. IV, n° 71, p. 58 ; D. Affaires 1999. 825, obs. A.-L. M.-D.

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Deuxième Partie – Opérations en lien avec le fonds de commerce

BODACC. À l’inverse, le propriétaire doit être radié, car il n’est plus commerçant. En cas
de reconduction tacite du contrat, en revanche, aucune nouvelle publicité n’est imposée,
dès lors qu’aucune modification n’est intervenue dans la nature de l’exploitation, ni dans
la personne de l’exploitant depuis la publication initiale.
295. Publicité dans un Journal d’annonces légales (JAL). Le contrat de location-gérance doit
être publié dans un journal d’annonces légales, dans les 15 jours de sa conclusion (C. com.,
art. R. 144-1). Jusqu’à la publication du contrat de location-gérance, le loueur du fonds est
solidairement responsable avec le locataire-gérant des dettes contractées par celui-ci à
l’occasion de l’exploitation du fonds (Code de commerce, art. L. 144-7 du Code de commerce).

CHAPITRE 2
Effets de la location-gérance

296. Certains effets de la location-gérance interviennent seulement entre les parties (Section 1),
d’autres intéressent les tiers (Section 2).

Section 1 – Obligations des parties

297. Les effets de la location-gérance concernant le bailleur de fonds (§1) se distinguent de


ceux qui se déploient à l’égard du locataire-gérant (§2).

§1. Obligations du bailleur

298. Le propriétaire a les obligations propres à tous les bailleurs. En particulier, il est chargé
d’assurer :
– L’obligation de délivrance qui lui impose de mettre le fonds à la disposition du locataire.
– La garantie d’une jouissance paisible du bien qui protège le locataire-gérant contre
des troubles éventuels. Entre autres, le bailleur doit s’abstenir de lui faire concurrence
en s’installant à proximité.
– La garantie des vices cachés qui pourraient affecter le fonds.

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Livre IV • Fonds de commerce

§2. Obligations du locataire-gérant

299. Pendant l’exécution du contrat. Les obligations du locataire-gérant sont plus nombreuses.
Pendant la durée du contrat, il est tenu :
– D’exploiter le fonds avec diligence, sans en modifier la destination, ni détourner la
clientèle à son profit ;
– De payer le loyer, qui, dans la plupart des cas, est indexé sur le chiffre d’affaire ;
– De ne pas sous-louer le fonds sans l’autorisation du propriétaire, le contrat de
location-gérance étant un contrat intuitu personae.
300. Expiration du contrat. Aux termes du contrat, en l’absence de renouvellement ou de recon-
duction tacite, le loueur est tenu de restituer le fonds en tous ses éléments. L’obligation de
restitution comporte aussi une responsabilité à l’égard de l’exploitant. Le locataire-gérant
devra répondre de la perte de valeur du fonds lorsque la faute lui est imputable. À l’inverse,
il ne pourra pas prétendre à une indemnité pour avoir accru la valeur du fonds. Cette
disparité de traitement se justifie si on considère que le loueur bénéficie directement du
développement de son activité et de sa clientèle.

Section 2 – Effets à l’égard des tiers

301. Situation du locataire-gérant à l’égard des créanciers du bailleur. Les mesures de publicité
sont destinées notamment à protéger les créanciers du bailleur. S’ils estiment que la mise
en location-gérance du fonds de commerce menace le recouvrement de leurs créances,
ils peuvent, dans les trois mois de l’insertion dans le journal d’annonces légales, faire
prononcer la déchéance du terme et faire déclarer l’exigibilité de leurs créances.
302. Situation du locataire-gérant à l’égard des créanciers du fonds. Par ailleurs, jusqu’à la
publication du contrat de location-gérance et pendant un délai de six mois à compter
de cette publication, le propriétaire-loueur est solidairement responsable avec le loca-
taire-gérant des dettes contractées par ce dernier à l’occasion de l’exploitation du fonds.
La solidarité ici visée est non seulement commerciale, mais aussi fiscale. Ainsi le loueur
pourra être appelé à supporter les impôts directs de l’exploitant (ex. Impôt sur le Revenu,
Impôt sur les Sociétés ou la Contribution économique territoriale).
303. Situation du locataire-gérant au terme du bail commercial. Dans les rapports avec le pro-
priétaire de l’immeuble, le bailleur du fonds de commerce conserve sa qualité de preneur
à bail pour l’immeuble. Le renouvellement du bail commercial doit donc être demandé
par le bailleur du fonds de commerce et non par le locataire-gérant. Ce dernier se trouve
dans une situation inconfortable car il n’a aucun droit à l’égard du bailleur de l’immeuble.

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Deuxième Partie – Opérations en lien avec le fonds de commerce

304. Situation du locataire-gérant en cas de cession du fonds de commerce ou de nantis-


sement. La situation de l’exploitant n’est guère meilleure en cas de cession du fonds de
commerce ou de nantissement. Ce dernier n’a, en effet, pas la possibilité de s’opposer aux
choix du propriétaire.

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Deuxième Partie – Opérations en lien avec le fonds de commerce

TITRE 2 – Bail commercial


305. Régime dérogatoire du droit civil. Le plus souvent, le commerçant n’est pas propriétaire
de l’immeuble dans lequel il exploite son fonds de commerce. Il loue alors les « murs » à un
tiers. Or, le contrat de louage, prévu par le Code civil, n’est pas suffisamment protecteur
des intérêts du commerçant preneur. Notamment, la libre décision des parties permet
en matière civile de mettre un terme à la convention. Or, le commerçant a besoin de
fidéliser sa clientèle par une localisation permanente et constante. Les coûts représentés
par un déménagement et un réaménagement, ainsi que la perte de l’achalandage et la
création d’une nouvelle clientèle, risquent d’entraîner des conséquences désastreuses
pour l’entreprise. À la suite de la première guerre mondiale, a été introduit le principe de
l’indemnité d’éviction, lorsque le refus de renouvellement n’était pas justifié par un motif
légitime. Cette mesure a été suivie en 1953 par la création d’un véritable statut protecteur
du commerçant : le bail commercial.
306. Propriété commerciale. Le statut octroie au commerçant un véritable droit au renouvel-
lement de son bail, élément à part entière du fonds de commerce et appelé, pour cette
raison, « propriété commerciale ». Le bail commercial est un contrat par lequel le propriétaire
d’un immeuble ou d’un local, appelé le bailleur, loue son bien à un commerçant, appelé le
preneur à bail ou preneur, afin que ce dernier y exploite un fonds de commerce. Le contrat
est particulièrement protecteur des intérêts du locataire car il lui garantit une durée
minimale de location, ainsi que le droit d’obtenir le renouvellement du bail ou, à défaut,
l’obtention d’une indemnité d’éviction. De plus, le statut des baux commerciaux encadre
les loyers, en prévoyant des plafonnements pour la révision, ou le renouvellement du bail.
307. Dispositions d’ordre public. Afin de garantir l’efficacité du statut, le législateur a voulu
empêcher que les parties puissent déroger aux principales dispositions protectrices. Ces
articles étant d’ordre public, toute clause contraire serait nulle et de nul effet. En revanche,
le bénéficiaire a toujours la faculté de renoncer au renouvellement du bail, une fois que
ce droit a été acquis. De plus, les parties peuvent choisir d’appliquer le statut, même si les
conditions légales ne sont pas réunies. Pour cela, il faut qu’elles aient manifesté une volonté
non équivoque de se soumettre au statut et que le statut soit appliqué dans son ensemble.
308. Le domaine d’application du bail commercial est rigoureusement délimité (Chapitre 1). Une
fois le bail commercial conclu, ses effets sont régis par le Code de commerce (Chapitre 2).
Les règles applicables à l’expiration du bail commercial sont également déterminées
(Chapitre 3).

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Livre IV • Fonds de commerce

CHAPITRE 1
Domaine d’application du bail commercial

309. Le statut des baux commerciaux ne s’applique que si certaines conditions sont réunies
(Section 1). Par ailleurs, la durée du bail commercial est strictement réglementée (Section 2).

Section 1 – Conditions d’application du statut


des baux commerciaux

310. Les conditions d’application du statut des baux commerciaux sont relatives aux parties
(§1), au bien loué (§2), ainsi qu’au fonds de commerce (§3).

§1. Conditions relatives aux parties

311. Le propriétaire de l’immeuble ou du local loué est appelé le bailleur (A), alors que le loca-
taire commerçant est le preneur à bail, ou preneur (B).

A. Conditions relatives au bailleur

312. Principes généraux tenant à sa situation personnelle ou familiale. Aucune condition


de capacité n’est imposée au bailleur, qui n’a pas à avoir la capacité commerciale. Seul le
preneur à bail doit remplir cette condition. Le bailleur doit simplement être le propriétaire
de l’immeuble donné à bail. Au titre d’exemple, trois situations vont être rappelées :
– Lorsque l’immeuble appartient à une communauté de biens entre époux. Lorsque
l’immeuble fait partie d’une communauté de biens entre époux, les époux ne peuvent,
l’un sans l’autre, conclure de bail commercial. À défaut de ce double consentement, le
conjoint qui n’a pas été partie à l’acte pourra demander la nullité du bail dans un délai
de deux ans à compter du jour où il a eu connaissance de l’acte, et jusqu’à deux ans
après la dissolution de la communauté.
– Lorsque le propriétaire est un incapable. S’il est mineur ou majeur protégé, le bail est
conclu par son représentant légal.
– Lorsque l’immeuble fait l’objet d’un usufruit. Si le local fait l’objet d’un usufruit,
l’usufruitier ne peut conclure de bail commercial sans l’accord du nu-propriétaire, à
peine de nullité relative de l’acte (Code civil, art. 595).

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Deuxième Partie – Opérations en lien avec le fonds de commerce

B. Conditions relatives au preneur à bail

313. Commerçant inscrit au RCS. Le principe est que le statut des baux commerciaux est
réservé au preneur à condition d’être un commerçant inscrit au registre du commerce et
des sociétés ou un artisan inscrit au répertoire des métiers. Cette condition est essentielle,
au point que le défaut d’inscription à la date de la demande de renouvellement du bail
fait perdre le bénéfice de la propriété commerciale au preneur. Elle s’apprécie au jour de
la délivrance du congé, ou au jour de la demande de renouvellement.
314. Élargissement du principe. La qualité de preneur à bail peut être reconnue aux personnes
morales (ex. sociétés commerciales, sociétés coopératives ayant une forme ou un objet
commercial, GIE, EPIC, entreprises publiques).

§2. Conditions relatives au fonds de commerce

315. Fonds de commerce exploité. Le bénéfice du statut des baux commerciaux est réservé
aux seuls propriétaires d’un fonds de commerce ou d’un fonds artisanal. Or, pour qu’il
y ait un fonds de commerce, il faut une clientèle réelle et propre au commerçant. Si la
clientèle n’appartient pas au preneur, ce dernier ne peut prétendre ni au statut des baux
commerciaux, ni au renouvellement de son bail. À ce titre, lorsque l’activité est exercée
dans un centre commercial, le preneur doit disposer d’une véritable autonomie de gestion
pour pouvoir se prévaloir d’une clientèle personnelle. En revanche, il n’est pas exigé que le
preneur exploite personnellement le fonds de commerce. Il suffit qu’il soit exploité, fût-ce
par un locataire-gérant.

§3. Conditions relatives au bien loué

316. Le statut des baux commerciaux s’applique aux seuls locaux commerciaux dans lesquels
un fonds est exploité. Cependant, l’existence du fonds à elle seule n’est pas suffisante.
Le local commercial doit, lui aussi, répondre à plusieurs critères (A) et connaît plusieurs
exclusions (B).

A. Conditions relatives au local commercial

317. Local stable et permanent. Le local donné à bail doit être un lieu clos et couvert, donc un
endroit stable et permanent. Il doit par conséquent s’agir d’une construction constituée
d’une surface horizontale et verticale présentant un caractère fixe et solide. De plus, le
local doit bénéficier d’une situation stable, ce qui explique que le statut ne s’applique ni
aux emplacements concédés sur les parkings de grande surface, ni aux comptoirs de vente,
ni aux vitrines d’exposition, ni aux murs d’affichage publicitaire1.
1. Cass. 3e civ. 10 mai 1989, n° 87-16595 ; Cass. 3e civ. 22 nov. 1991, n° 90-11678 ; Cass. 3e civ. 4 janv. 1995, n° 92-21585.

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Livre IV • Fonds de commerce

B. Exclusions

318. Terrains nus. Un terrain nu ne peut pas être loué sous le statut des baux commerciaux, sauf
si sur ce terrain ont été édifiées - soit avant, soit après le bail - des constructions à usage
commercial, industriel ou artisanal, et à la condition que ces constructions aient été éle-
vées ou exploitées avec le consentement exprès du propriétaire (C. com., art. L. 145-1, I, 2°).
319. Locaux non-accessoires. Le statut des baux commerciaux s’applique aux locaux ou
immeubles accessoires à l’exploitation d’un fonds de commerce quand leur privation est
de nature à compromettre l’exploitation du fonds. De plus, il faut aussi qu’ils appartiennent
au propriétaire du local ou de l’immeuble où est situé l’établissement principal1. Il résulte
de ces considérations qu’un local non-accessoire à celui loué en vertu du bail commercial
régissant le local principal ne bénéficierait pas du statut protecteur.

Section 2 – Durée du bail commercial

320. Le Code de commerce fixe la durée légale du bail commercial (§1). Ce régime exclut les
baux de courte durée (§2) ainsi que les baux de longue durée (§3).

§1. Durée légale du bail commercial

321. Durée de neuf ans. Le bail commercial a une durée minimale de 9 ans2. Cette durée peut
cependant être réduite à trois ans ou moins pour le premier bail lors de l’entrée dans les
lieux. Il s’agit alors d’un bail dérogatoire. Toutefois, si ce même bail est renouvelé ou pro-
rogé, il doit être considéré comme un bail classique stipulé pour une durée de neuf ans.
322. Interdiction du congé anticipé pour le bailleur. En principe, le bail d’une durée de neuf ans
ne peut pas être interrompu. Le locataire peut donner congé à l’expiration d’une période
triennale sans motivation, au moins six mois à l’avance, par lettre recommandée avec
demande d’avis de réception ou par acte extrajudiciaire. Il peut également interrompre
le bail à tout moment s’il entend bénéficier de ses droits à la retraite. Le bailleur de son
côté ne peut donner un congé anticipé que dans des cas limitativement énumérés, tels
que la reprise pour construire, reconstruire ou surélever l’immeuble.

1. C. com., art. L. 145-1, I, 1°.


2. C. com., art. L. 145-4.

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Deuxième Partie – Opérations en lien avec le fonds de commerce

§2. Exclusion des baux de courte durée

323. La durée du bail commercial étant impérative, toute stipulation contraire fait perdre le
bénéfice du statut. Trois hypothèses méritent un examen particulier : la convention d’oc-
cupation précaire, le bail de moins de deux ans et la location saisonnière.
– Convention d’occupation précaire. Par la convention d’occupation précaire, le proprié-
taire d’un local autorise l’occupant à bénéficier d’un droit de jouissance précaire des
lieux, quelle qu’en soit la durée, en raison de circonstances particulières indépendantes
de la seule volonté des parties. La loi Pinel du 18 juin 2014 exclut ce type de contrat du
statut des baux commerciaux. Le caractère précaire du bail motivé par des circonstances
exceptionnelles (menaces d’expropriation pour cause d’utilité publique, litige en cours
sur le titre de propriété, démolition de l’immeuble en raison de sa vétusté, etc), sera
indiqué expressément dans l’acte.
– Bail dérogatoire. La loi Pinel n° 2014-626 du 18 juin 2014 permet, par exception, de
réduire la durée du bail à condition que la durée totale du bail ou des baux successifs
ne soit pas supérieure à trois ans pour le premier bail lors de l’entrée du preneur dans
les lieux. Ce bail, dérogatoire, permet au locataire d’évaluer le local, de se faire une idée
avant de s’engager pour une durée plus longue. Le bailleur a la possibilité de rompre
facilement le contrat sans contrainte et notamment sans versement d’indemnité. Ce
bail échappe, en principe, au statut des baux commerciaux, à moins que, à l’expiration
des trois ans et au plus tard à l’issue d’un délai d’un mois à compter de l’échéance, le
preneur choisisse de rester en possession des lieux sans aucune opposition de la part du
bailleur. Dans cette hypothèse, un nouveau bail, assujetti automatiquement au statut
des baux commerciaux, est tacitement formé pour une durée de neuf années. Il en est
de même si les parties renouvellent expressément le contrat.
– Location saisonnière. La location saisonnière qualifie un contrat de bail dans lequel le
loyer n’est pas annuel et pour lequel les clés du local sont remises par le locataire au
bailleur à la fin de chaque saison. Ces locations conclues pour quelques mois échappent
également au statut des baux commerciaux, même si elles sont renouvelées tous les ans
au profit des mêmes locataires (ex. stations de sports d’hiver, stations balnéaires, etc).

§3. Exclusion des baux de longue durée

324. Bail à construction. Le bail à construction est un contrat par lequel le preneur s’engage,
à titre principal, à édifier des constructions sur le terrain du bailleur et à les conserver en
bon état d’entretien pendant toute la durée du bail. Comme dans le bail emphytéotique,
le bailleur profite des améliorations réalisées par le preneur au cours du bail. Le bail à
construction, conclu pour une durée comprise entre 18 ans et 99 ans, échappe au statut des
baux commerciaux. Ici encore, le preneur peut grever l’immeuble d’une hypothèque, céder

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Livre IV • Fonds de commerce

ses droits ou les apporter en société. Le bail à construction se distingue du bail emphytéo-
tique par l’obligation du preneur de construire un immeuble. Si la construction n’est pas
stipulée comme étant une obligation contractuelle, le bail est qualifié d’emphytéose et
non de bail à construction.
325. Bail emphytéotique. Le bail emphytéotique est un bail immobilier conclu pour une durée
comprise entre 18 ans et 99 ans et conférant au preneur, appelé « emphytéote », un droit
réel sur le bien loué, à charge pour lui de l’améliorer moyennant un loyer modique. Le bail
emphytéotique confère au preneur le droit d’hypothéquer l’immeuble. Dans le cas où des
améliorations interviennent, elles appartiennent au bailleur à l’expiration du bail, sans que
ce dernier n’ait à indemniser le bailleur. Ce type de bail est exclu du champ d’application
des baux commerciaux.

CHAPITRE 2
Droits et obligations des parties

326. Le bail commercial entraîne des obligations (Section 1) et des droits (Section 2) pour le
preneur.

Section 1 – Obligations du preneur commerçant

327. Le preneur commerçant doit essentiellement exploiter le fonds de commerce (§1) et payer
les loyers (§2). D’autres obligations pourraient être mises à sa charge notamment par le
contrat de bail.

§1. Obligation d’exploitation du fonds de commerce

328. Exploitation effective du fonds. Le preneur doit exploiter personnellement ou faire


exploiter le fonds de commerce de façon effective, c’est-à‑dire qu’il doit pouvoir démontrer
l’existence d’une clientèle personnelle. Le fonds peut le cas échéant être exploité par un
tiers (ex. un locataire-gérant dans le cadre d’un contrat de location-gérance).

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Deuxième Partie – Opérations en lien avec le fonds de commerce

329. Conséquences de la non-exploitation. Le défaut d’exploitation d’un fonds de commerce


dans les locaux loués peut être sanctionné par le non-renouvellement du bail ou sa rési-
liation anticipée. Le défaut d’exploitation d’un fonds donné en location-gérance peut
constituer une faute justifiant la demande du loueur de se faire restituer le prix du fonds1.
Le locataire-gérant devra respecter la destination du fonds, ce qui exclut le changement
de destination des lieux.

§2. Obligation de payer les loyers

330. Le preneur doit payer les loyers. Le loyer est librement fixé par les parties, à la différence
des modifications postérieures qui sont strictement encadrées par la loi.

A. Contenu de l’obligation

331. Loyer. Lors du bail initial, les parties fixent librement le loyer. Cela relève de la liberté
de négociation des contractants. L’obligation du locataire ne se limite cependant pas au
seul paiement de cette somme. À cette date, il est fréquent que le bailleur demande, en
outre, le versement d’un « pas-de-porte », c’est-à‑dire d’une somme d’argent issue de la
pratique et correspondant à un droit d’entrée dans les locaux. À celle-ci s’ajoute aussi le
paiement des charges.
332. Pas-de-porte. Le pas-de-porte, encore appelé « droit d’entrée », est une somme d’argent
que le propriétaire d’un local à usage industriel, commercial ou artisanal exige du preneur
à bail, pour l’entrée dans les lieux, en sus du prix annuel du loyer. Cette pratique a été
reconnue par la jurisprudence. Le pas-de-porte peut être assimilé soit à une indemnité
soit à un complément de loyer, selon l’appréciation souveraine des juges du fond. Or, si
la qualification de complément du loyer est retenue, le pas-de-porte intègre l’assiette de
révision du loyer et il sera taxé au titre de l’impôt sur le revenu. En revanche, l’imposition
sera évitée, si la qualification d’indemnité prévaut. Cette incertitude pousse parfois les
bailleurs à renoncer au pas-­de-­porte. Par ailleurs, les locataires rencontrent des difficultés
pour obtenir les financements nécessaires à le payer, car les banques sont, en principe,
assez réservées relativement à cette pratique. Pour ces raisons, le pas-­de-­porte tend à
disparaître au profit de meilleurs loyers.
333. Charges. Les charges sont les dépenses relatives à l’immeuble dans lequel le fonds est
exploité. Parmi ces charges figurent les frais afférents à l’exploitation du fonds (eau, gaz,
électricité) et à l’entretien des parties communes (ascenseur, ordures ménagères).

1. Cass. com., 6 mai 2002, n° 00-11.569, n° 928 FS – P.

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Livre IV • Fonds de commerce

B. Révision du loyer

334. Révision triennale ou révision conventionnelle. Une fois le loyer fixé, les révisions
ultérieures font l’objet d’un encadrement strict par la loi. Le législateur a ainsi cherché à
protéger le bailleur des effets de l’inflation qui réduiraient considérablement son pouvoir
d’achat, et le preneur des hausses inconsidérées de loyers qui affecteraient l’exercice de
son activité. Or, le régime de révision du loyer n’est pas intégralement d’ordre public et
les parties peuvent prévoir des clauses qui régissent les évolutions du loyer. En l’absence
de clauses particulières, c’est donc le régime légal qui s’applique et on parle de révision
triennale des loyers ordinaires. En revanche, en présence de telles clauses, ce sont les
dispositions particulières du contrat qui doivent s’appliquer.
335. Valeur locative. La révision du loyer peut intervenir soit dans le cadre d’une révision
triennale, soit de l’application d’une clause contractuelle. Dans les deux cas, le critère de
référence est celui de la valeur locative. À défaut d’accord entre les parties, cette valeur
est déterminée à partir d’éléments fixés par décret en Conseil d’État, tels que les carac-
téristiques du local considéré, la destination des lieux, les obligations respectives des
parties, les facteurs locaux de commercialité, ou encore les prix couramment pratiqués
dans le voisinage. Cette valeur constitue une garantie pour les parties car elle les protège
des hausses et des baisses de loyer trop importantes. Elle n’est toutefois pas le seul critère
qui intervient dans la détermination du loyer révisé.
336. Principe de la révision triennale. Le loyer initial peut être révisé à la demande de l’une des
parties. La demande ne peut être formulée que trois ans au moins après la date d’entrée
dans les lieux ou après le point de départ du bail renouvelé. La demande de révision doit
être notifiée par acte extrajudiciaire ou lettre recommandée avec demande d’avis de
réception qui doit, à peine de nullité, mentionner le montant du loyer souhaité. Cela fait
courir le délai de prescription biennal. À défaut d’accord des parties, il faudra engager une
procédure pour d’obtenir la fixation judiciaire du loyer révisé. De nouvelles demandes
peuvent être formulées tous les 3 ans.
337. Détermination du loyer révisé. Le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit
correspondre à la valeur locative. Cette valeur est déterminée par référence à plusieurs
éléments énumérés par l’article R. 145-33 du Code de commerce et plus précisément :
– Les caractéristiques du local considéré (surface des lieux, état d’entretien, équipements, etc.).
– La destination des lieux (activités autorisées par le bail, ou à la suite d’une demande
de déspécialisation).
– Les obligations respectives des parties (l’existence de charges exorbitantes doit être
prise en compte).
– Les facteurs locaux de commercialité (caractéristiques commerciales du secteur).
– Les loyers couramment pratiqués dans le voisinage.

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Deuxième Partie – Opérations en lien avec le fonds de commerce

338. Plafonnement du loyer révisé. Le Code de commerce se limite à énoncer ces éléments sans,
pour autant, préciser la manière dont il faudrait calculer la valeur locative. La détermina-
tion revient donc aux juges qui font souvent appel à des experts judiciaires. Néanmoins,
pour éviter une trop forte variation du loyer, le montant de la révision est plafonné par
la loi. Ainsi, l’article L. 145-38 du Code de commerce dispose : « à moins que ne soit rapportée
la preuve d’une modification matérielle des facteurs locaux de commercialité ayant entraîné par
elle-même une variation de plus de 10 % de la valeur locative, la majoration ou la diminution de
loyer consécutive à une révision triennale ne peut excéder la variation de l’indice trimestriel des
loyers commerciaux ou de l’indice trimestriel des loyers des activités tertiaires intervenus depuis la
dernière fixation amiable ou judiciaire du loyer ». La valeur locative doit donc être déterminée
en tenant compte de l’indice trimestriel des loyers de référence. Deux situations peuvent
se présenter :
– La valeur locative et l’indice trimestriel de référence augmentent (ou diminuent) tous
les deux. Il faudra alors opter pour le critère qui garantit la plus faible augmentation
(ou réduction).
– La valeur locative et l’indice trimestriel de référence n’évoluent pas dans le même sens.
Dans cette hypothèse la variation de loyer devra s’opérer dans le même sens que celui
de l’indice de référence.
339. Déplafonnement du loyer révisé. L’article L. 145-38 du Code de commerce précise aussi
qu’il est possible déplafonner le loyer révisé lorsqu’une modification matérielle des fac-
teurs locaux de commercialité a entraîné par elle-même une variation de plus de 10 %
de la valeur locative. L’ouverture d’une station de métro à proximité, ou la piétonisation
de la rue sont des exemples d’événements susceptibles de faire varier de plus de 10 % la
valeur du bien. La partie qui veut invoquer le déplafonnement doit rapporter la preuve
de la variation de plus de 10 %, ainsi que de la modification matérielle des facteurs locaux
de commercialité et du lien de causalité entre les deux. La jurisprudence exige aussi que
le déplafonnement résulte de circonstances favorables à l’activité du preneur. Enfin, la
loi Pinel encadre l’augmentation de loyer à 10 % au plus du loyer acquitté l’année précé-
dente. Cette limite ne s’applique qu’en cas d’augmentation et non pas en présence d’une
baisse de loyer.
340. Révision résultant d’une clause contractuelle. Au-delà de la révision légale, les parties
peuvent aussi choisir d’introduire des clauses contractuelles spécifiques. Il faut distinguer
entre deux types de clauses : les clauses d’échelle mobile et les clauses recettes.
– Clauses d’échelle mobile. Le bail peut contenir une clause d’indexation du loyer, appelée
aussi clause d’échelle mobile, à condition que l’indice choisi soit en relation directe
avec l’objet du contrat ou l’activité de l’une des parties. Actuellement deux indices sont
utilisés : l’indice des loyers commerciaux (ILC) et celui des loyers des activités tertiaires
(ILAT). La clause peut prévoir que l’augmentation interviendra soit à terme fixe (tous
les 3 mois, 6 mois, etc.) ou lorsque des seuils sont atteints.

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Livre IV • Fonds de commerce

– Clauses recettes. Une « clause recette » est parfois stipulée, fixant le loyer en fonction du
chiffre d’affaire réalisé par le preneur. Le plus souvent, le loyer est composé d’une partie
fixe et d’une partie variable, assise sur le chiffre d’affaire ou les bénéfices du preneur.
Le loyer est alors calculé sur la base du chiffre d’affaire, sans pouvoir être inférieur à un
minimum équivalant à la valeur locative des lieux loués. Son montant n’est donc pas fixé
à l’avance, mais il reste déterminable. Elle est opportune lorsque le loyer est important
et que le chiffre d’affaire du locataire est susceptible de vérification par le bailleur.

Section 2 – Droits du preneur commerçant

341. Le preneur commerçant dispose du droit de modifier l’affectation des lieux loués (§1), du
droit de céder son bail commercial (§2) et du droit de préemption (§3).

§1. Modification de l’affectation des lieux loués

342. En principe, le preneur ne peut, sans l’accord du bailleur, modifier la destination des lieux
loués telle qu’elle est fixée dans le contrat. La destination concerne la nature de l’activité
exercée. Si le preneur souhaite changer l’affectation des locaux, il doit procéder à une
déspécialisation du bail. Il existe deux types de déspécialisation : la déspécialisation simple
ou partielle (A) et la déspécialisation totale ou plénière (B).

A. Déspécialisation simple ou partielle

343. Dispositions d’ordre public. Selon l’article L. 145-47 du Code de commerce, la déspécia-
lisation partielle consiste à adjoindre à l’activité prévue au bail une activité connexe ou
complémentaire. La notion d’activité connexe ou complémentaire est une question de
fait soumise à l’appréciation souveraine des juges du fonds. Lorsqu’il souhaite opérer
une déspécialisation, le preneur doit faire connaître son intention au bailleur avant toute
extension effective de son activité, sous peine de se voir sanctionné par une résolution
judiciaire ou par le jeu d’une clause résolutoire. L’information doit prendre la forme d’un
acte extrajudiciaire ou d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception et
indiquer les activités connexes ou complémentaires envisagées. Si les conditions de la
déspécialisation partielle sont remplies, le bailleur ne peut s’y opposer. En cas de contes-
tation, le tribunal judiciaire peut être saisi.

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Deuxième Partie – Opérations en lien avec le fonds de commerce

B. Déspécialisation totale ou plénière

344. Changement d’activité. En vertu de l’article L. 145-48 du Code de commerce, la déspécia-


lisation totale consiste à changer complètement l’affectation de l’immeuble, c’est-à‑dire
l’activité prévue par le bail. Pour cela, le preneur doit adresser une demande au bailleur,
sous la forme d’un acte extrajudiciaire, ou d’une lettre recommandée avec demande d’avis
de réception. Le silence de ce dernier pendant une période de 3 mois vaut autorisation. En
cas de refus du bailleur, le preneur peut saisir le juge. La déspécialisation totale a des consé-
quences importantes pour les créanciers du fonds et le bailleur. Le changement d’activité
va faire disparaître le fonds et, par conséquent, va affecter les intérêts des créanciers. Pour
cette raison, la demande de déspécialisation doit également être dénoncée, en la même
forme, aux créanciers inscrits sur le fonds de commerce. Ces derniers peuvent exiger que
le changement d’activité soit subordonné à des conditions de nature à sauvegarder leurs
intérêts (C. com., art. L. 145-49, al 1). Le bailleur, lui aussi, peut subir un préjudice du fait
de la déspécialisation totale. Par exemple, en cas de dévalorisation de l’immeuble, celui-ci
peut prétendre à une indemnité de la part du preneur (C. com., art. L. 145-50, al. 1), ou
obtenir, avec effet immédiat, une augmentation du loyer au niveau de la valeur locative,
sans devoir respecter les conditions de révision du loyer (C. com., art. L. 145-50, al. 2). Toute
déspécialisation totale obtenue sans le respect de la procédure prévue par le Code de
commerce est considérée comme irrégulière et, non seulement, elle prive le locataire du
droit au renouvellement, mais elle justifie également une résiliation immédiate du bail.

§2. Sous-location et cession du bail commercial

345. Si la sous-location du bail commercial ne peut se faire sans le consentement du bailleur


(A), il en va différemment de la cession (B).

A. Sous-location du bail commercial

346. Interdiction de principe. En principe, le preneur est tenu d’exploiter personnellement le


fonds de commerce hébergé par le local objet du bail. Contrairement au droit commun,
l’article L. 145-31 du Code de commerce interdit expressément au locataire toute sous-lo-
cation de l’immeuble. Une éventuelle sous-location serait soumise à deux conditions
cumulatives pour échapper à l’interdiction :
– Autorisation du bailleur. L’autorisation du bailleur peut être donnée par avance, par
exemple par une clause insérée dans le bail, ou dans l’acte de sous-location, ou même
être tacite, lorsque l’agrément résulte d’un acte positif manifestant un accord non
équivoque, comme, par exemple, le renouvellement tacite du bail en ayant connais-
sance de la présence d’un sous-locataire. En revanche, le seul silence du bailleur ne
vaut pas autorisation.

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Livre IV • Fonds de commerce

– Concours du bailleur à l’acte de sous-location. Le bailleur peut concourir à l’acte de


sous-location. Pour cela, le preneur doit informer le bailleur de son projet de sous-location
par acte d’huissier ou par lettre recommandée avec demande d’accusé de réception.
Le bailleur dispose alors d’un délai de 15 jours pour faire connaître sa décision. Passé
ce délai, et en cas de silence du bailleur, le preneur ne peut sous-louer le local que si
la sous-location est autorisée par le contrat initial. Toute sous-location sans le consen-
tement exprès du bailleur est interdite sous peine de résiliation du bail.
347. Effets de la sous-location. La sous-location constitue un rapport à trois et les relations
entre les parties dépendent des liens unissant le bailleur au locataire, ainsi que le locataire
avec le sous-locataire et ce dernier avec le bailleur.
– Entre le sous-locataire et le locataire principal, la sous-location a le même effet qu’un
bail. Néanmoins les droits du locataire sont limités par le bail principal qui le lie au
bailleur. Ainsi, la disparition du bail principal emporte de plein droit l’extinction de la
sous-location sans indemnité à la charge du locataire principal.
– Entre le sous-locataire et le bailleur principal, l’article L. 145-32, alinéa 2 du Code de
commerce accorde au sous-locataire un droit direct au renouvellement de son bail
contre le bailleur principal qui a agréé la sous-location.
– Entre le locataire et le bailleur principal, l’article L. 145-31, alinéa 3 du Code de commerce
autorise le bailleur à augmenter son loyer afin qu’il soit équivalent à celui qui est perçu
du sous-locataire.

B. Cession du bail commercial

348. Cession avec ou sans fonds de commerce. La cession de bail commercial est la convention
par laquelle un tiers se substitue au preneur dans la position contractuelle qu’il occupe à
l’égard du propriétaire de l’immeuble. En pratique, elle intervient couramment, soit de
manière isolée, soit intégrée dans une cession de fonds de commerce. L’opération relève
du droit commun. Ainsi, la cession peut intervenir sans l’autorisation du bailleur (art. 1717
du Code civil). Le locataire se voit reconnaître un véritable droit qui ne peut être restreint
lorsque la cession comporte, en même temps transfert du fonds de commerce. En revanche,
le contrat de bail peut prévoir une clause interdisant la cession isolée du bail.

§3. Droit de préemption

349. Modalités d’exercice. Lorsque le propriétaire bailleur souhaite céder l’immeuble dans
lequel est exploité un fonds de commerce, il doit en informer le preneur par lettre recom-
mandée avec avis de réception ou remise en mains propres. Cette notification, à peine de
nullité, indique le prix et les conditions de la vente envisagée. Elle vaut offre de vente faite
au preneur. Celui-ci dispose alors d’un délai d’un mois pour lever l’option d’achat. L’offre
qui ne serait pas acceptée dans ce délai deviendrait caduque.

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Deuxième Partie – Opérations en lien avec le fonds de commerce

CHAPITRE 3
Terme du bail

350. Le statut des baux commerciaux offre au preneur le droit au renouvellement de son bail
commercial (Section 1). Le refus du bailleur est encadré par la loi (Section 2).

Section 1 – Droit au renouvellement du bail commercial

351. Pour que le preneur puisse bénéficier du droit au renouvellement de son bail commercial,
il doit remplir certaines conditions (§1) et respecter une procédure (§2).

§1. Conditions du renouvellement

352. Il faut distinguer deux typologies de conditions : celles qui regardent le fond et celles qui
s’intéressent à la forme de l’acte.
353. Conditions de fond. Le bénéfice du droit au renouvellement est en pratique appelé la
propriété commerciale. Toute clause ayant pour effet d’y faire échec est réputée non écrite.
Pour pouvoir exercer son droit au renouvellement, le preneur doit remplir deux conditions :
– Il doit être immatriculé au registre du commerce et des sociétés à la date d’expiration
du bail. Ce critère ne trouve pas application lorsque les parties ont choisi de se soumettre
volontairement au statut.
– Il doit exploiter un fonds de commerce au moment de l’expiration du contrat et justifier
l’existence d’une clientèle propre. Cette exploitation doit avoir perduré pendant les
3 années consécutives précédant la date d’expiration du bail ou de sa tacite prolongation
(C. com., art. L. 145-8), sauf motifs légitimes de non-exploitation (tels que des problèmes
de santé, des travaux nécessaires à l’exploitation, etc.).
354. Conditions de forme. La forme demandée pour le congé dépend de son auteur.
– Le bailleur doit signifier au preneur un congé avec offre de renouvellement, par acte
d’huissier, en respectant un préavis de six mois.
– Le locataire qui n’a pas reçu de congé de son bailleur peut demander le renouvel-
lement. La demande doit être envoyée six mois avant le terme par acte extrajudiciaire

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Livre IV • Fonds de commerce

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Deuxième Partie – Opérations en lien avec le fonds de commerce

ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception1. De son côté le bailleur
doit répondre, par acte extrajudiciaire, dans un délai de trois mois et indiquer s’il refuse
ou non la demande. À défaut de réponse dans ce délai, il est réputé accepter le principe2.
Tout refus doit être motivé dans un écrit qui rappelle, sous peine de nullité, le droit à
demander une indemnité d’éviction au juge dans un délai de deux ans à compter de la
date de signification du non-renouvellement.

§2. Procédure du renouvellement

355. Situation du sous-locataire. L’article L. 145-8 du Code de commerce précise que le droit au
renouvellement ne peut être invoqué que par le propriétaire du fonds qui est exploité dans
les lieux. Ainsi, en cas de location-gérance, le locataire-gérant, qui n’a d’ailleurs pas la qualité
de preneur à bail, ne peut demander le renouvellement à la place du propriétaire-loueur.
356. Variation du loyer. En principe, le bail est renouvelé dans des conditions identiques à
celles du précédent. Cependant, le bailleur propose généralement une augmentation du
montant du loyer. Toute variation est cependant encadrée et plafonnée à la valeur locative
de l’immeuble. Le preneur qui souhaite contester les conditions du nouveau loyer dispose
d’un délai de deux ans pour saisir un tribunal.

Section 2 – Refus du renouvellement du bail commercial

357. Si le preneur respecte les conditions du droit au renouvellement du bail commercial, le


bailleur ne peut lui refuser ce renouvellement, à moins de présenter des justifications
légales (§1). Le refus injustifié entraîne des conséquences légales (§2).

§1. Justifications légales du refus

358. Le refus de renouvellement du locataire est légitime dans trois cas :


– En présence d’un motif grave et légitime. Il s’agit d’une faute, ne justifiant pas la
résolution de ce dernier, mais suffisamment grave pour priver le locataire du droit au
renouvellement. Il peut s’agir d’une faute dans l’exécution du bail (par exemple le retard
persistant dans le paiement du loyer, la déspécialisation irrégulière, la sous-location
prohibée ou irrégulière…). Dans ce cas, le bailleur ne peut se prévaloir de la faute que
s’il a mis en demeure, par acte d’huissier, le locataire de cesser cette violation et si, dans
le mois suivant cette mise en demeure, la violation n’a pas cessé. Un autre exemple de

1. C. com., art. L. 145-10, al. 2.


2. C. com., art. L. 145-10, al. 4.

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faute est celui de la faute extracontractuelle. Dans cette hypothèse, en revanche, aucune
mise en demeure n’est nécessaire. Le refus de renouvellement doit toujours être notifié
et motivé. Ce sera au juge du fond d’apprécier si la faute du preneur est d’une gravité
suffisante pour justifier la perte du fonds sans indemnité.
– En présence d’un immeuble insalubre ou menaçant ruine. Le bailleur n’est tenu à
aucune indemnité si l’immeuble doit être totalement ou partiellement démoli en raison
de son état d’insalubrité ou s’il menace de s’effondrer.
– En présence d’une reprise pour habiter ou construire. Le bailleur a le droit de reprendre
le local pour son habitation personnelle ou celle de ses proches parents (ascendants,
descendants et leurs conjoints). En cas de reconstruction ou surélévation de l’immeuble,
le preneur garde un droit de priorité sur le local reconstruit ou surélevé.

§2. Conséquences du refus injustifié

359. Indemnité d’éviction. En dehors des cas précédemment listés, le bailleur peut toujours
refuser le renouvellement mais, il devra verser au locataire une indemnité d’éviction. Cette
indemnité est censée réparer le préjudice causé par le défaut de renouvellement du bail.
Le locataire qui reçoit congé a deux mois pour réagir à la proposition du bailleur et trouver
un accord sur le montant de l’indemnité. En pratique, il est rare qu’un accord soit trouvé
et les parties font appel au tribunal.
360. Évaluation de l’indemnité. L’évaluation du préjudice est encadrée par l’article L. 145-14 du
Code de commerce qui fixe des directives pour la détermination de l’indemnité. Le montant
est fixé de façon à réparer le préjudice causé par le réaménagement forcé du fonds dans
d’autres locaux. Selon la loi, ce préjudice est égal à la valeur des éléments incorporels du
fonds (clientèle, nom commercial, enseigne, etc.). On y ajoute la valeur du droit au bail
lui-même, augmentée des frais de déménagement et de réinstallation ainsi que des frais
et droits de mutation à payer pour l’achat d’un fond de même valeur. L’indemnité ainsi
calculée est équivalente à la valeur du fonds de commerce, puisque le départ du locataire
a pour conséquence de faire disparaître le fonds.
361. Droit de repentir. Une fois fixé le montant de l’indemnité, et à condition que le locataire
n’ait déjà déménagé ou ne se soit pas engagé contractuellement avec un autre proprié-
taire, le bailleur dispose d’un délai de quinze jours pour exercer son droit de repentir.
Cette disposition permet au bailleur d’éviter de payer une indemnité d’éviction dont le
montant se révèle être plus important que prévu. Après expiration du délai, l’indemnité
devient exigible. Le locataire a le droit de rester dans les lieux tant qu’elle n’est pas versée.
En contrepartie, il doit au bailleur une indemnité d’occupation déterminée en fonction de
la valeur locative du local et de la situation précaire à laquelle il est exposé.

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Bibliographie indicative

Barthélemy, Mercadal, Mémento droit commercial 2021, collection : Mémento pratique


Francis Lefebvre, Éditeur : Francis Lefebvre, 29e édition, 05/05/2021.
M. Menjucq, Droit commercial et des affaires, Gualino – Mémentos, 14e éd., 06/04/2021.
N. Blanc, A.-V. Le Fur, T. Le Gueut, A.-C. Martin, Droit des affaires – CRFPA – Examen national
Session 2021, LGDJ – CRFPA, 4e éd., 30/03/2021.
F.-X. Lucas, D. Poracchia, Manuel de droit commercial, Presses Universitaires de France, Droit
fondamental, 2e éd., 20/01/2021.
T. de Ravel d’Esclapon, N. Kilgus, R. Laher, Épreuves écrites du CRFPA - Spécialité droit des
affaires 2021, Dalloz - Spécial concours, 2e éd., 05/05/2021.
M.-H. Raynier, Droit des affaires : droit commercial général et droit de la concurrence, 3e éd.,
2020, Éditions Archétype 82.
A. Dadoun, Droit commercial général : actes de commerce, commerçants, fonds de commerce,
2020, Enrick B. Éditions, 2020.
F. Garnier, Histoires du droit commercial, 2020, Paris, Economica, 2020.
I. Sérandour, Lionel Andreu, Droit commercial : cours intégral et synthétique, outils pédagogiques,
Paris La Défense, Gualino, 2020.
I. Randrianirina, Cours de droit commercial, Gualino, 2020.
D. Legeais, Droit commercial et des affaires, 27e éd., Dalloz, 2020.
E. Cordelier, Droit commercial et droit des affaires, 4e éd., Bruylant, 2020.
Léobon (T.), Droit commercial, 2e édition, Bréal by Studyrama, 2020.
Bert (D.), Planckeel (F.), Cours de droit commercial et des affaires, 4e éd., Paris, Gualino, 2018-2019.
Blaise (J.-B.), Droit des affaires. Commerçants, concurrence, distribution, 10e éd., Paris, LGDJ, 2019.
Bert (D.), L’essentiel du droit commercial et des affaires, les carrés, 1re éd., Gualino, 2017.
Canin (P.), Droit commercial, Les fondamentaux, 7e éd., Paris, Hachette supérieur, 2017.
Decocq (G.), Ballot-Lena (A.), Droit commercial, Hypercours Dalloz, 9e éd., Paris, Dalloz, 2020.
Le Gall (J.-P.), Ruellan (C.), Droit commercial : notions générales, Mémentos Dalloz, 17e éd.,
Paris, Dalloz, 2017.
Legeais (D.), Droit commercial et des affaires, Sirey université, 25e éd., Paris, Sirey, 2020.
Piedelievre (S.), Droit commercial : actes de commerce, commerçants, fonds de commerce, concur-
rence, consommation, Cours Dalloz, 12e éd., Paris, Dalloz, 2019
Julien (J.), Mendoza-Caminade (A.), Droit commercial, collection cours, 3e éd., Paris, LGDJ, 2017.

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Table des matières

Sommaire 3

Préface 7

LIVRE I
Introduction

PR EMIÈR E PA RTIE

Introduction au Droit commercial

Titre 1 – Notion de droit commercial 13

Chapitre 1 : Définition du droit commercial 13


Section 1 – Droit commercial : critère de classification 13
§1. Domaine 13
§2. Philosophie 14
Section 2 – Droit commercial : critère de distinction 14
§1. Droit commercial et droit commun 15
§2. Droit commercial et disciplines affairistes 15
A. Droit commercial : discipline mère 15
B. Droit commercial : composante 15

Chapitre 2 : Caractères du droit commercial 16


Section 1 – Caractère pragmatique 16
§1. Caractère libéral 16
§2. Caractère formaliste 17
Section 2 – Caractère ancien 17
§1. Droit commercial non codifié 17
A. Période : Antiquité – Moyen Âge 17
B. Période : Moyen Âge – Révolution française 18
§2. Droit commercial partiellement codifié 19
A. Période libérale (xixe) 19
B. Période interventionniste (xxe) 19

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Table des matières

Titre 2 – Sources du Droit commercial 21

Chapitre 1 : Sources nationales 21


Section 1 – Sources constitutionnelles 21
Section 2 – Sources législatives et réglementaires 22
A. Sources législatives 22
B. Sources réglementaires 22
Section 3 – Sources judiciaires 23
Section 4 – Sources pratiques 24
§1. Pratiques non codifiées 24
§2. Pratiques codifiées 25

Chapitre 2 : Sources supranationales 26


Section 1 – Sources internationales 26
§1. Traités internationaux 27
§2. Pratiques internationales 27
Section 2 – Sources européennes 28
§1. Sources normatives 28
A. Sources originaires 28
B. Sources dérivées 30
§2. Sources jurisprudentielles 30

Chapitre 3 : Sources arbitrales 31

DEU X IÈME PA RTIE

Introduction aux institutions commerciales

Titre 1 – Institutions commerciales consulaires 35

Chapitre 1 : Tribunaux de commerce 35


Section 1 – Modèle juridictionnel 35
Section 2 – Composition 36
Section 3 – Compétence 37
§1. Compétence matérielle 37
§2. Compétence territoriale 38
§3. Tribunaux de commerce spécialisés 38
Section 4 – Procédure 41
Section 5 – Président du Tribunal de commerce 41
Section 6 – Greffier 42

Chapitre 2 : Chambres de commerce et d’industrie (CCI) 42

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Table des matières

Titre 2 – Institutions commerciales non consulaires 45

Chapitre 1 : Institutions non juridictionnelles 45

Chapitre 2 : Institutions juridictionnelles 50


Section 1 – Institutions commerciales judiciaires 50
§1. Tribunaux Judiciaires compétents en matière commerciale 50
§2. Cours d’appel et de Cassation 50
§3. Cour de Justice de l’Union européenne 51
Section 2 – Institutions commerciales non judiciaires 51

LIVRE II
Actes en matière commerciale

PR EMIÈR E PA RTIE

Qualification de l’acte

Titre 1 – Actes de commerce par nature 57

Chapitre 1 : Actes de commerce en raison de l’objet 57


Section 1 – Achat de biens dans le but de les revendre 57
§1. Acte d’achat 57
§2. Intention de revendre 58
Section 2 – Opérations d’intermédiaire 58
Section 3 – Opérations financières 59

Chapitre 2 : Actes de commerce accomplis en entreprise 60


Section 1 – Entreprise de négoce 60
Section 2 – Entreprise d’intermédiaire 61
Section 3 – Entreprise industrielle 62

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Table des matières

Titre 2 – Actes de commerce par la forme 65

Chapitre 1 : Lettre de change 65

Chapitre 2 : Sociétés commerciales par la forme 66

Titre 3 – Actes de commerce par accessoire 67

Chapitre 1 : Actes de commerce par accessoire subjectif 67


Section 1 – Qualité de commerçant de l’auteur de l’acte 67
Section 2 – Finalité professionnelle de l’acte 68

Chapitre 2 : Actes de commerce par accessoire objectif 68


Section 1 – Cession d’une entreprise commerciale 68
§1. Cession d’un fonds de commerce 68
§2. Cession de blocs de contrôle d’une société 69
Section 2 – Cautionnement 69

Titre 4 – Actes mixtes 71

DEU X IÈME PA RTIE

Régime de l’acte

Titre 1 – Régime des actes de commerce purs 75

Chapitre 1 : Formation des actes de commerce purs 75


Section 1 – Conditions de fond 75
§1. Capacité commerciale 75
A. Minorité 75
B. Protection du majeur 76
§2. Consentement 76
Section 2 – Conditions de forme 76

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Table des matières

Chapitre 2 : Exécution des actes de commerce purs 77


Section 1 – Solidarité commerciale 77
Section 2 – Règles de preuve 78
Section 3 – Anatocisme 78
Section 4 – Compétence juridictionnelle 79
§1. Compétence d’attribution (rationae materiae) 79
§2. Compétence territoriale (rationae loci) 80
Section 5 – Prescription extinctive de l’obligation commerciale 81

Titre 2 – Régime des actes mixtes 83

Chapitre 1 : Principe : régime distributif 83

Chapitre 2 : Exception : régime commun 83

LIVRE III
Acteurs du commerce

PR EMIÈR E PA RTIE

Professionnels du commerce

Titre 1 – Définition du commerçant 89

Chapitre 1 : Définition positive du commerçant 89


Section 1 – Qualité de commerçant résultant de la nature de l’activité 89
§1. Exercice d’actes de commerce 90
§2. Exercice d’actes de commerce à titre de profession habituelle 90
§3. Exercice personnel d’actes de commerce 91
Section 2 – Qualité de commerçant résultant de la forme de l’activité 91

Chapitre 2 : Définition négative du commerçant 92


Section 1 – Artisan 92
§1. Qualité d’artisan 92
§2. Régime juridique applicable à l’artisan 93
Section 2 – Agriculteur 93
§1. Qualité d’agriculteur 94
§2. Le régime juridique applicable à l’agriculteur 94

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Table des matières

Section 3 – Professionnel libéral 95


§1. Qualité de professionnel libéral 95
§2. Régime juridique applicable au professionnel libéral 95

Titre 2 – Régime juridique applicable au commerçant 97

Chapitre 1 : Liberté du commerce et de l’industrie 97


Section 1 – Principe 97
Section 2 – Restrictions à l’exercice de l’activité commerciale 98
§1. Restrictions liées aux personnes 98
A. Restrictions liées à la capacité juridique 98
B. Restrictions liées à la nationalité 100
C. Restrictions judiciaires d’activité professionnelle 100
§2. Restrictions liées aux activités 101
A. Restrictions d’origine légale 101
B. Restrictions conventionnelles 102

Chapitre 2 : Obligations du commerçant 103


Section 1 – Mesures de publicité légale 103
Section 2 – Obligations comptables 104
§1. Livres comptables obligatoires 104
§2. Comptes annuels 104
Section 3 – Obligations financières 105
§1. Obligation d’établir des factures 105
§2. Obligation de détenir un compte bancaire 106

DEU X IÈME PA RTIE

Statut du commerçant et de son conjoint

Titre 1 – Statut privé du commerçant 109

Chapitre 1 : Commerçant marié 109


Section 1 – Communauté des biens réduite aux acquêts 109
Section 2 – Communauté universelle 110
Section 3 – Séparation des biens 111

Chapitre 2 : Commerçant partenaire d’un Pacte civil de solidarité 112


Section 1 – Séparation des patrimoines 112
Section 2 – Indivision des biens 112

Chapitre 3 : Union libre 113

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Table des matières

Titre 2 – Statut professionnel du conjoint participant à l’activité 115

Chapitre 1 : Conjoint associé 115

Chapitre 2 : Conjoint collaborateur 116

Chapitre 3 : Conjoint salarié 117

Chapitre 4 : Absence de statut 118

LIV RE IV
Fonds de commerce

PR EMIÈR E PA RTIE

Notion de fonds de commerce

Titre 1 – Éléments constitutifs du fonds de commerce 123

Chapitre 1 : Clientèle 123


Section 1 – Existence de la clientèle 124
Section 2 – Clientèle personnelle au commerçant 125

Chapitre 2 : Éléments d’attraction de la clientèle 127


Section 1 – Signes distinctifs qui ne font l’objet d’aucun droit de propriété
intellectuelle 127
§1. Nom commercial 127
§2. Enseigne 128
§3. Nom de domaine 128
Section 2 – Droits de propriété industrielle 129
§1. Brevet d’invention 129
§2. Marque 130
§3. Dessins et modèles 131
Section 3 – Éléments d’exploitation du fonds de commerce 132
§1. Droit au bail commercial 132
§2. Licences et autorisations 133
§3. Matériel et les marchandises 133

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Table des matières

Titre 2 – Nature du fonds de commerce 135

Chapitre 1 : Qualification du fonds de commerce 135


Section 1 – Qualification du fonds de commerce comme universalité 135
Section 2 – Qualification du fonds de commerce comme bien 136

Chapitre 2 : Conséquences de la qualification du fonds de commerce 137


Section 1 – Caractère personnel des créances et dettes 138
Section 2 – Exceptions à l’intransmissibilité de certains éléments 138

DEU X IÈME PA RTIE

Opérations en lien avec le fonds de commerce

Titre 1 – Location-gérance du fonds de commerce 141

Chapitre 1 : Conditions de la location-gérance 142


Section 1 – Conditions de fond 142
Section 2 – Conditions de forme 142

Chapitre 2 : Effets de la location-gérance 143


Section 1 – Obligations des parties 143
§1. Obligations du bailleur 143
§2. Obligations du locataire-gérant 144
Section 2 – Effets à l’égard des tiers 144

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Table des matières

Titre 2 – Bail commercial 147

Chapitre 1 : Domaine d’application du bail commercial 148


Section 1 – Conditions d’application du statut des baux commerciaux 148
§1. Conditions relatives aux parties 148
A. Conditions relatives au bailleur 148
B. Conditions relatives au preneur à bail 149
§2. Conditions relatives au fonds de commerce 149
§3. Conditions relatives au bien loué 149
A. Conditions relatives au local commercial 149
B. Exclusions 150
Section 2 – Durée du bail commercial 150
§1. Durée légale du bail commercial 150
§2. Exclusion des baux de courte durée 151
§3. Exclusion des baux de longue durée 151

Chapitre 2 : Droits et obligations des parties 152


Section 1 – Obligations du preneur commerçant 152
§1. Obligation d’exploitation du fonds de commerce 152
§2. Obligation de payer les loyers 153
A. Contenu de l’obligation 153
B. Révision du loyer 154
Section 2 – Droits du preneur commerçant 156
§1. Modification de l’affectation des lieux loués 156
A. Déspécialisation simple ou partielle 156
B. Déspécialisation totale ou plénière 157
§2. Sous-location et cession du bail commercial 157
A. Sous-location du bail commercial 157
B. Cession du bail commercial 158
§3. Droit de préemption 158

Chapitre 3 : Terme du bail 159


Section 1 – Droit au renouvellement du bail commercial 159
§1. Conditions du renouvellement 159
§2. Procédure du renouvellement 161
Section 2 – Refus du renouvellement du bail commercial 161
§1. Justifications légales du refus 161
§2. Conséquences du refus injustifié 162
Bibliographie indicative 163

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