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La responsabilité de l’auteur

L'auteur Christine Angot «n’écrit pas sur la vie des autres, mais avec la vie des autres»
Les procès de Christine Angot ont marqué la presse, remettant en question la liberté de l’auteur.
Celle-ci a été attaquée en justice par des proches pour l’atteinte à la vie privée, concept que ne
connaît pas la littérature, mais qui est pourtant valide en droit. En effet son livre les petits
semble fortement inspiré, voir quasiment biographique de la vie d’une femme de son entourage.
D’où ma question: un auteur est-il responsable de son histoire, de la raconter, et d’y impliquer
ses proches ? Mais peut-on déjà parler de responsabilité ? La responsabilité, c'est assumer les
conséquences de ses actes. Mais en associant ce terme, qui rappelle des questions juridiques,
à un artiste, qui est par nature libre de toute contrainte, un paradoxe émane. l’opposition
liberté/responsabilité forme une contradiction qui nous amène à nous demander quelles limites
sont imposées à l'auteur. Le terme d’auteur tout d’abord est discutable,car il ne se limite pas
seulement à la littérature mais au cinéma ou à la musique par exemple.Il est par définition
initiateur,a l’origine de quelque chose de nouveau. Bien plus qu’un simple divertissement, on
pourrait considérer que la valeur de la littérature et de l'art en général réside dans sa capacité à
nous faire explorer les possibles, à déployer notre imaginaire pour penser le monde. Dès lors, la
responsabilité de l’auteur relèverait d’une sorte de conservation de cette puissance de
l’exploration. Or, si celui-ci est à l’origine de l'œuvre, alors il semble avoir un pouvoir sur nos
perceptions et représentations. Ainsi comment concilier ce pouvoir de façonner nos
consciences et l’autonomie du lecteur ?

Il s’agira dans un premier temps d’évaluer le rôle prépondérant de l’auteur,qui transmet du sens
selon une forme matérielle particulière au-delà de l'espace et du temps. Nous pourrons ensuite
nous demander si , à l'inverse , la compréhension du lecteur est déterminante. Enfin, il s’agira
de considérer tous les membres qui interagissent avec l'œuvre comme solidairement
responsables de l’acte.

Conclusion
En définitive , les responsabilités de l’auteur sont plurielles.L’auteur à la capacité d e
transformer le monde de la même manière que le monde le transforme. Ce qui se
répercute sur ses œuvres et inspirations. L’auteur offre à la lecture, lorsqu’il le consent,
sa vision du monde personnelle et tend à la rendre universelle. Mais la langue constitue
une barrière qui peut engendrer de multiples interprétations, que le lecteur fait
apparaître. L’engagement de l’auteur est cependant certain, et le refus de dire pourrait
s’apparenter à une sorte de soumission ou d’irresponsabilité. L’auteur trouve aussi son
inspiration dans le monde qui l’entoure , comme C.Angot dans son entourage. Son
procès continue de poser question car ".Les traits et les détails prêtés à l'héroïne des
Petits peuvent être ceux de milliers de femmes. C’est que Christine Angot, comme Zola,
décrit la réalité."disait l’avocat. Mais un anonyme peut-il attaquer un romancier pour
atteinte à la vie privée, sachant qu’il n’est par définition pas identifiable par le grand
public?
I) l’auteur est responsable
1. Premièrement, la responsabilité de l’auteur peut reposer sur le choix des mots
qu’il emploie et l’interprétation qui peut en être faite.
L’auteur est le créateur. Dès lors, il décide , par le choix de ses mots , de ses tournures,
de ce qu’il souhaite transmettre. On peut presque comparer cela à un calcul précis , quasi
scientifique. Il est dès lors conscient et s’engage dans ses propos.
Sartre dit : « chaque parole a des retentissements ». Autrement dit, un texte n’est jamais
neutre. En effet, un texte est une parole, la parole de l’écrivain, et ce dernier n’est jamais
une entité neutre, d’abord parce qu’il est inévitablement influencé par le monde dans
lequel il vit, ensuite parce qu’il agit sur ce monde par ses écrits.On ne peut donc pas nier
que leurs manifestes ont eu des effets sur le monde, d’où le caractère nécessairement
sociale de la responsabilité de l’écrivain selon Barthes. Il explique que le changement du
langage entraîne un changement de la représentation que l’on se fait du monde,d'où
l'importance du choix des mots. Il précise aussi que toute prise de parole projette bon gré
mal gré une image du locuteur.

2. De surcroit, l’auteur est initiateur et se place donc en guide et enseigne. Il se


doit donc de conserver une certaine véracité afin de rester convaincant

L’auteur laisse une trace souvent indélébile dans l’histoire et retrace, selon ses souhaits,
les mœurs d’une certaine société. La fonction éducatrice et culturelle apparaît des lors ,
car l’auteur cultive le lecteur et lui permet découverte et compréhension du monde. Il
permet en quelque sorte la création d’un esprit critique , en analysant différents styles de
vie, valeurs et croyances. Cela signifie que tout ce qu’écrit celui-ci affecte le monde avec
lequel il interagit .Par leur écriture, des écrivains nous révèlent certains faits historiques de
leur vie personnelle et de leur société. Ils semblent avoir alors conscience des situations
sociales de leur milieu. Laurent Binet , a travers son récit historique “HHHh”, retrace sa
réflexion quant à la véracité des faits qu’il énonce. Essayant de retracer un événement
majeur de l’histoire allemande, avec la tentative de putsch contre Heydrich par 2 résistants
en 1936, celui-ci explique sa difficulte a etre complètement véridique , en raison du
manque des preuves. Au cours de ses digressions, il explique alterner entre《 l'extrême
exactitude, soit l'extrême exemplarité.” Il n'est pas rare que les romans dits historiques
entrecroisent fiction romanesque et vérité historique.

II) LE LECTEUR EST RESPONSABLE

1. Mais cependant , si nous changeons de perspective, il s’agirait d’analyser le


rôle du lecteur , celui qui reçoit le récit. N’est il pas plus responsable ?

En effet, l’auteur n’a plus de lien avec la compréhension qu’en fait le lecteur.
Dans les Carnets du Vieil Ecrivain, Jean Guéhenno écrit : "un livre est un outil de
liberté"encore fait il savoir utiliser l’outil … est ce que tout le monde est egal face à
l’accès à la compréhension littéraire? Les textes sont quelquefois mal interprétés,
dans le sens où les lecteurs comprennent autre chose que ce que l’auteur souhaitait
qu’ils comprennent.Sartre écrit : « Tout écrit possède un sens, même si ce sens est
fort loin de celui que l’auteur avait rêvé d’y mettre »C’est pourquoi une prise de
distance est nécessaire en ce que l’écriture relève de choix: face à l’éclatement et à
la consistance du réel, l’auteur tente de véhiculer une représentation particulière.
cependant en se concentrant et en exploitant certains détails, il en exclut d’autres.
La littérature semble donc être un processus sélectif soumis au regard de l’auteur.
Par exemple , Flaubert a été jugé en justice pour son roman "Mme Bovary", car le
roman était considéré comme “de mauvaise influence”. Il lui a été reproché durant le
procès d'être une mauvaise lecture pour les jeunes femmes modestes , car la
protagoniste Emma Bovary était une incitation à s'élever au-dessus de sa condition,
ce qui l’a conduit à l'adultère et à la ruine de sa famille.

Par ailleurs,certains écrivains cherchent à se dégager de la responsabilité


qu’implique le fait que chacun de leurs écrits a nécessairement des
conséquences, arguant qu’ils ne désirent pas se mêler des controverses
actuelles et avançant qu’ils n’écrivent que pour le plaisir ou que leurs textes
ne sont que des fictions qu’il ne faut pas prendre au sérieux. de la meme
maniere, certains ouvrages sont publiés a titre posthume, mais donc sans
accord préalable de l’auteur. Il serait judicieux de citer Kafka. Emporté par la
maladie à l’âge de 40 ans, l’écrivain souhaitait que les œuvres non publiées
de son vivant soient détruites. À défaut d’honorer ses dernières volontés, son
meilleur ami Max Brod prit sur lui d’offrir ses plus fameux travaux à la
postérité littéraire. Mais est ce juriquement correct ? L’auteur n’est dès lors
plus responsable de ses publications puisque mort.

III) Ne pourrait on pas parler alors de responsabilité collective ?

Il est d’abord important de rappeler que l’influence première de l’auteur est la


société qui l’entoure. L’idée de responsabilité collective apparait : on pourrait
considérer tous les membres d’un groupe comme solidairement responsables
de l’acte commis par un des membres du groupe. Comme disait sartre dans
son roman “la responsabilité de l’auteur” , “le choix d’un homme engage toute
l’humanité » De plus, l’inspiration de l’auteur est en fait la sommation
d’influences externes, le résultat d’une assimilation et d’une interprétation
particulière du monde. Plus simplement, cela signifie que le monde dans
lequel évolue un écrivain va influer sur ce qu’il va écrire ou ne pas écrire. Par
exemple,Pierre Richelet a publié en 1680 le premier dictionnaire ; qui
répertorie les mots de la langue française et qui donne des définitions, des
informations sur eux.Les définitions reposent sur un aspect sociétal et évoluent avec les
époques.

Enfin,il serait important de rappeler que ne rien dire est aussi considéré
comme une responsabilité. on peut comparer cela à désertion militaire
“ Longtemps j’ai pris ma plume pour une épée » voltaire = Infraction commise
La volonté de ne pas prendre position est une prise de position Celui qui
accepte passivement le mal est tout autant responsable que celui qui le commet.
Celui qui voit le mal et ne proteste pas, celui-là aide à faire le mal. Martin Luther
King sorte de collabo
Ce n’est pas le moindre des problèmes: quand un écrivain s’inspire de la vie des autres, on lui
reproche de ne pas s’écarter de la réalité; quand il s’en écarte, on lui reproche de la trahir.

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