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Introduction : Jean-Baptiste POQUELIN dit Molière est l’un des plus grands dramaturges français de comédies (« plaire » mais

aussi « instruire » le public) du


XVIIème siècle. Il est un auteur emblématique du classicisme, écrivant de nombreuses œuvres théâtrales, et en y exploitant des procédés typiques de la
commedia dell’arte. En 1673, pour divertir la cour, la troupe joue la dernière pièce écrite par Molière, Le Malade imaginaire au Théâtre du Palais Royal, c’est
une comédie-ballet en 3 actes séparés par des intermèdes. Ce nouveau genre, créé avec le musicien Lully offre un spectacle total qui mêle représentation
théâtrale, chant et danse. Molière y critique la médecine et en fait une satire, à travers ses personnages comiques. Argan, le personnage principal, est un
père de famille hypocondriaque et tyrannique qu’exploitent des médecins charlatans, et qui cherche à marier sa fille Angélique au fils d’un médecin par
intérêt personnel, ce qui soulève la colère et la résistance de sa famille.

Situation du passage : L’extrait tiré au sort, l’Acte III, scène 3 est marqué par la présence de Béralde, le frère d’Argan. Il est l’exact opposé de son frère :
Argan est totalement soumis aux médecins et à la médecine, et il prévoit pour sa fille Angélique tout d’abord de la marier à Thomas Diafoirus (refus
catégorique), puis de l’enfermer dans un couvent. Béralde, lui, ne fait aucune confiance aux médecins et suggère qu’Angélique épouse le jeune homme
qu’elle aime, Cléante. Béralde est donc l’exemple même de l’honnête homme, mesuré, sérieux, calme, patient, raisonné, réfléchi, logique. Dans cet extrait,
les 2 frères débattent sur l’amour et la médecine. Béralde entend raisonner son frère afin qu’il abandonne ce projet de mariage d’intérêt.
Problématique : Que révèle du personnage principal son obsession de la médecine ?
Mouvements du texte : structure de l’extrait en dialogue avec un échange d’arguments entre 2 personnages, 2 frères très opposés, Argan et Béralde
1er mouvement : «Sur quelle pensée, mon frère […] Pourquoi non ?» (lignes 1-11): Les raisons du mariage forcé
2ème mouvement : «Est-il possible que […]ont révérée ?» (lignes 12-27): La manie d’Argan pour les malades et la médecine

CITATIONS CHOIX D'ECRITURE COMMENTAIRES


Mouvement 1 : Les raisons du mariage forcé
BÉRALDE.[…] Sur quelle pensée, B questionne sans détour (franc et direct) le choix d'Argan de marier sa fille au fils d'un médecin
mon frère, la voulez-vous donner B se souci du sort de sa nièce, Angélique
en mariage au fils d’un médecin ? Apostrophe (tt du long) = distance du lien fraternel (et non proximité affective)
Antéposition du pronom = langage soutenu du XVIIème siècle
B remet implicitement en question le mariage prévu pour la fille d'Argan avec Diafoirus
B va discuter des motivations d'Argan
ARGAN.- Sur la pensée, mon frère, Réciprocité A reprend la même structure syntaxique que B : A est plutôt vif dans sa répartie, pr qqun de malade !
de me donner un gendre tel qu’il A justifie clairement (franc et direct) son choix pour ce mariage (= sincérité désolante)
me faut. A affirme qu'il souhaite que son futur gendre puisse s'occuper de lui, en tant que malade (imaginaire)
Nécessité absolue A révèle son égoïsme et son obsession obtus pour sa propre santé, au détriment des intérêts de sa fille
BÉRALDE.- Ce n’est point là, mon B souligne que le mariage en question ne prend pas en compte l’intérêt ni le bonheur de la fille d'Argan
frère, le fait de votre fille, et il se = violence du mariage forcé / arrangé
présente un parti plus sortable B suggère qu'il y a un meilleur prétendant pour elle que le fils d'un médecin : Cléante, son amoureux
pour elle.
ARGAN.- Oui, mais celui-ci, mon Affirmation A admet que le gendre qu'il a choisi convient plus à ses besoins personnels = comique
frère, est plus sortable pour moi. Comique A révèle encore son égoïsme bien ancré et son obsession pour sa propre santé
Réciprocité A reprend la même structure syntaxique que B : A est plutôt vif dans sa répartie, pr qqun de malade !
BÉRALDE.- Mais le mari qu’elle doit Question rhétorique B soulève une question fondamentale sur le choix du mari
prendre, doit-il être, mon frère, ou Anaphore B demande si le mari doit être choisi en fonction des intérêts de la fille d’Argan ou des désirs d’Argan
pour elle, ou pour vous ? lui-même : la réponse est évidente, le mari doit être pour la femme et non pour le beau-père !
B met en évidence l’absurdité d’Argan
B va essayer de le raisonner
ARGAN.- Il doit être, mon frère, et Réciprocité A reprend la même structure syntaxique que B : A est plutôt vif dans sa répartie, pr qqun de malade !
pour elle, et pour moi, et je veux Anaphore A insiste sur le fait que le futur mari doit convenir à la fois, à sa fille et à lui-même
mettre dans ma famille les gens Argument contradictoire MAIS A a des priorités clairement centrées sur lui-même
dont j’ai besoin. Nécessité absolue (désir) A désire entourer sa famille de personnes qui peuvent répondre à ses propres besoins médicaux
A impose à sa fille son autoritarisme (abus de pouvoir, péjoratif) ≠ autorité paternelle (pater familias, +)
A révèle, encore une fois, son égoïsme et son obsession obtus d’hypocondriaque pour sa propre santé
BÉRALDE.- Par cette raison-là, si B critique le raisonnement d'Argan qui traite injustement sa fille
votre petite était grande, vous lui Nécessité absolue B suggère que, en suivant la même logique, A marierait même sa fille cadette, Louison à un pharmacien
donneriez en mariage un Démonstration par B montre l’absurdité de la situation
apothicaire ? l’absurde
ARGAN.- Pourquoi non ? Question rhétorique à A répond affirmativement (= oui !) à la question de Béralde
valeur exclamative A est prêt à sacrifier les intérêts de sa propre famille pour sa propre santé (maladie imaginaire)
A renforce l’absurdité de la situation et montre jusqu'à quel point il est obsédé par la médecine
A fait preuve d’autorité MAIS en même temps il est crédule
Mouvement 2 : La manie d’Argan pour les malades et la médecine
BÉRALDE.- Est-il possible que vous Question rhétorique
serez toujours embéguiné de vos B perd patience avec son frère qui ne change pas d’avis (ds le déni) malgré les arguments mis en avant
apothicaires, et de vos médecins, Sens péjoratif B critique l’obsession irrationnelle d’Argan pour la médecine
et que vous vouliez être malade en Adjectif possessif = embéguiné + vos = attachement excessif et déraisonnable => obstination
dépit des gens, et de la nature ? Pronom personnel = gens de bonne société
B critique la volonté d'Argan de se considérer comme malade malgré son entourage et sa bonne santé
ARGAN.- Comment l’entendez- Vrai question A ne comprend pas la position de Béralde
vous, mon frère ? A demande des éclaircissements
A semble ENFIN déstabilisé par les arguments mis en avant par Béralde
BÉRALDE.- J’entends, mon frère, Longue explication B affirme que, contrairement à ce qu'Argan croit, il est en réalité en bonne santé
que je ne vois point d’homme, qui argumentée de la
soit moins malade que vous, et que pensée B affirme qu’il aimerait être en aussi bonne santé qu’Argan
je ne demanderais point une Pronom personnel « je » +
meilleure constitution que la vôtre. Pronom possessif « la vôtre »
Une grande marque que vous vous B fait ainsi l'éloge de la santé parfaite d'Argan : constitution solide et santé excellente
portez bien, et que vous avez un = preuve de la bonne santé d’Argan
corps parfaitement bien composé ;
c’est qu’avec tous les soins que B affirme que tous les soins médicaux qu'Argan a reçus n'ont PAS ENCORE réussi à endommager sa
vous avez pris, vous n’avez pu santé ni à le tuer
parvenir encore à gâter la bonté de
votre tempérament, et que vous
n’êtes point crevé de toutes les Hyperbole = plus fort que la mort (exagérer la réalité)
médecines qu’on vous a fait Antithèse = « crevé » ≠ « médecines » dans la même phrase
prendre. B dénonce l’hypocondrie d’Argan et la médecine dont il se méfie = satire de la médecine
ARGAN.- Mais savez-vous, mon Question rhétorique
frère, que c’est cela qui me A justifie sa dépendance à la médecine
conserve, et que Monsieur Purgon A est persuadé (persiste dans le déni) que ses soins médicaux constants le maintiennent en bonne santé
dit que je succomberais, s’il était et l’empêchent de mourir
seulement trois jours, sans prendre Argument d’autorité A cite l'avis de son médecin pour se justifier
soin de moi ? A est maintenu dans son besoin de médecine par son médecin
BÉRALDE.- Si vous n’y prenez B met en garde Argan contre le risque que les soins excessifs de M. Purgon finissent par le tuer
garde, il prendra tant de soin de Antiphrase = dire le contraire de ce que l’on pense = il vous tuera
vous, qu’il vous enverra en l’autre Adverbe d’intensité = « tant » = renforce l’antiphrase
monde. Euphémisme = atténuer la réalité pour la rendre moins choquante = la mort
ARGAN.- Mais raisonnons un peu, Impératif présent A tente d'engager une discussion rationnelle sur la médecine avec son frère, de le raisonner
mon frère. Vous ne croyez donc A croit fermement en la médecine, et s’oppose ainsi à la raison = comique de verbe
point à la médecine ? Question rhétorique A est choqué que Béralde puisse ne pas croire en la médecine
Paradoxe illogique Croyance = irrationnel = foi Comique de mots
(= 2 idées contradictoires) Médecine = rationnel = science
BÉRALDE.- Non, mon frère, et je ne B explique qu’il ne croit pas en la médecine
vois pas que pour son salut, il soit Contradiction (avec A) B considère que cette croyance n’est pas nécessaire pour avoir une bonne santé (avenir) puisque la
nécessaire d’y croire. médecine du XVIIème siècle est inefficace (médecins = charlatans)
B et A sont en désaccord fondamental sur la médecine
ARGAN.- Quoi vous ne tenez pas Question rhétorique
véritable une chose établie par Interjection Interpellation, stupeur
tout le monde, et que tous les A exprime son étonnement face à la remise en question de la vérité (= la médecine) par Béralde
siècles ont révérée ? A considère la médecine comme une institution démontrée et respectée par l’opinion générale depuis
des siècles => argument d’autorité, irrationnel, sans preuve scientifique
A est profondément attaché à la tradition médicale

Conclusion : Argan est prêt à vendre sa fille pour la médecine, cela révèle qu’il est complètement obtus. Le thème du mariage forcé laisse apparaître l’obsession
destructrice d’Argan qui ne recule devant rien pour parvenir à ses fins. Uniquement préoccupé de sa personne, il sacrifie tout sur l’autel (religion) de la médecine. Son
caractère entêté est véritablement ancré et montre un personnage obtus, inaccessible à l’esprit d’analyse et à la raison.

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