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Master Sciences Juridiques M2 - Temps Aménagé

Les contrats commerciaux : L’arbitrage international

Le principe de l’autonomie de la
convention d’arbitrage

2023/2024

Réalisé par :
Kainza Bensedik
Saad Zeroual

Encadré par : Mme Ilham Hamdai


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Introduction

Le principe de l’autonomie de la convention d’arbitrage en matière d’arbitrage international,


a été consacré pour la première fois par la jurisprudence française dans l’arrêt Gosset en
estimant que « en matière d’arbitrage international, l’accord compromissoire, qu’il soit conclu
séparément ou inclus dans l’acte juridique auquel il a trait, présente toujours, sauf
circonstances exceptionnelles, une complète autonomie juridique excluant qu’il puisse être
affecté par une éventuelle invalidité de l’acte », ce qui écarte bien entendu toute tentative de
contestation du pouvoir pour l’arbitre de juger de sa compétence au motif que la convention
qui l’investit serait nulle, car stipulée dans un contrat lui-même nul. En effet, faire subir à la
clause d’arbitrage le sort qui affecterait la convention de fond risquerait à réduire amplement
l’étendue de la validité de ladite clause, eu égard principalement à «la diversité et à la
complexité des litiges du commerce international ». Or, la limitation de l’effet de la clause
compromissoire au champ des seuls litiges découlant ou résultant du contrat principal où elle
est insérée laisse conclure que « le recours à l’arbitrage pour une très large partie des litiges
du commerce international serait de ce fait entravé »

Au sens du phénomène d’extension des effets de la convention d’arbitrage, cette allégation


laisse poser une question épineuse et fortement controversée de savoir si l’autonomie
matérielle et l’étendue de la convention d’arbitrage sont deux mécanismes conciliables ou
bien foncièrement incompatibles ? Autrement dit, l’extension des effets de la convention
d’arbitrage n’est-elle pas contraire à son autonomie, par ailleurs proclamée ? Comment
soutenir, d’un côté que la clause compromissoire est autonome et, de l’autre, qu’elle est
transmise ou étendue dans bien nombre d’éventualités et de situations contractuelles,
techniques et jurisprudentielles.

C'est la question à laquelle nous tenterons de répondre dans cet exposé en identifiant d'abord
la substance de la règle d'autonomie matérielle de la convention d'arbitrage (Première partie),
puis nous étudierons l’étendue matérielle de la convention d’arbitrage dans le temps et dans
l’espace ainsi que ses limites et ses implications (Deuxième partie). La première hypothèse
sera examinée indépendamment de la seconde, bien que l'analyse de l'impact sur le
phénomène de l'extension de la convention d'arbitrage y soit étroitement scrutée.
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Plan

Introduction

I. L’indépendance de la convention d’arbitrage

A. La consécration de l’indépendance de la convention d’arbitrage par


rapport au contrat principal
B. Le mécanisme de l’indépendance de la clause compromissoire par rapport
au(x) contrat(s) de fond

II. Les conséquences de l’autonomie de la convention d’arbitrage et les


limites de ce principe

A. L’étendue des effets de la convention d’arbitrage dans le temps et dans


l’espace.
B. Les limites et les enjeux de l’autonomie matérielle de la clause
compromissoire

Conclusion

I. L’indépendance de la convention d’arbitrage


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Selon la notion l'autonomie matérielle de la clause compromissoire, le sort du contrat
principal demeure indifférent. Cette indifférence constitue «le premier et le plus important
des effets du principe d'autonomie de la convention d'arbitrage». Par conséquent, l'existence,
la validité ou la pérennité de la convention d'arbitrage ne sont pas conditionnées par le destin
du contrat principal auquel elle se réfère. Toute affirmation concernant la non-conclusion, la
nullité, la résolution, la résiliation du contrat principal, ou encore la novation des obligations
découlant de ce contrat principal, n'entache pas l'efficacité de la convention d'arbitrage.
Ainsi, pour saisir la nature autonome et immunisée de ce principe ainsi que son influence sur
l'expansion ou la restriction des effets de la convention d'arbitrage, il sera nécessaire d’étudier
la clause compromissoire face aux principaux aléas qui touchent le contrat principal (A).
Nous allons ensuite déduire les implications de ces situations sur la portée temporelle et
géographique de la convention d'arbitrage (B).

A. La consécration de l’indépendance de la convention d’arbitrage par


rapport au contrat principal

L'indépendance substantielle de la clause compromissoire vis-à-vis du contrat qui la renferme


est unanimement et universellement reconnue dans le domaine du droit de l'arbitrage à
l'échelle mondiale. Elle se traduit par le fait que la clause compromissoire, bien qu'intégrée
matériellement à un contrat, peut parfois s'en détacher pour répondre aux exigences de son
efficacité et aux besoins de sa mise en œuvre. Ce principe est clairement consacré tant dans
les conventions internationales que dans les ordres juridiques nationaux, ainsi que dans la
pratique arbitrale et jurisprudentielle.
Bien que la Convention de New York de 1958 ne mentionne pas expressément le principe
d'autonomie de la clause compromissoire par rapport au contrat principal, une nouvelle règle
de conflit alternative introduite par l'article (V §1.a) établit une méthode de rattachement
distincte pour la clause compromissoire par rapport au contrat principal.
Certaines opinions doctrinales doutent cependant de la capacité de cette convention à
conférer un statut autonome à la convention d'arbitrage, soulignant la soumission de cette
dernière à une loi différente de celle applicable au contrat principal. Les conventions de
Genève (article V. § 3) et de Washington (article 41§1) se réfèrent uniquement au principe de
compétence-compétence, laissant ainsi des incertitudes quant à la consécration de
l'autonomie de la clause compromissoire.
En revanche, la loi-type de la CNUDCI de 1985 consacre explicitement le principe d'autonomie
dans son article (16 alinéa 1), en considérant la clause compromissoire comme une convention
distincte des autres clauses du contrat. Cette disposition affirme que la constatation de la
nullité du contrat par le tribunal n'entraîne pas automatiquement la nullité de la clause
compromissoire.
Dans le monde, plusieurs ordres juridiques reconnaissent également ce principe. Par exemple,
la loi suisse évoque la «séparabilité » de la clause compromissoire, soulignant que la validité
de celle-ci ne peut être contestée au motif que le contrat principal ne serait pas valide. Le
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législateur italien adopte également le principe de la «séparabilité», déclarant que la validité
de la clause compromissoire s'apprécie indépendamment du contrat. Des dispositions
similaires existent dans le droit belge, anglais, néerlandais, espagnol, portugais, suédois et
canadien, confirmant toutes l'autonomie de la clause compromissoire par rapport au contrat
principal.
Dans les pays arabes, le principe est expressément consacré dans les lois modernes sur
l'arbitrage, comme en Tunisie, en Égypte, en Jordanie, et en Algérie. Au Maroc, le législateur
a explicitement affirmé le principe d'autonomie de la clause compromissoire par le biais de
l’article 8 de la loi 95-17, déclarant que la clause d'arbitrage est réputée être une convention
indépendante des autres clauses du contrat, et que la nullité, la résiliation ou la cessation du
contrat n'affecte pas la validité de la clause d'arbitrage.

Cette consécration du principe d'autonomie de la clause compromissoire par le législateur


marocain représente une avancée significative, témoignant de l'importance accordée à ce
principe dans la sécurisation juridique et judiciaire du commerce international. En
conséquence, le droit marocain, loin de souffrir d'un vide législatif en la matière, affirme
clairement et de manière éclairée la prééminence de ce principe, résultat d'un débat doctrinal
intense entre partisans et détracteurs de l'autonomie de la clause compromissoire.
La jurisprudence marocaine n'était pas à l'abri de l'impact d'un débat crucial sur l'autonomie
de la clause compromissoire et la nécessité de cette garantie. Avant l'entrée en vigueur de la
loi 95-17, la jurisprudence avait déjà consacré le principe d'autonomie. Un exemple de cette
reconnaissance remonte à un litige lié à un contrat franco-marocain de joint-venture. La Cour
d'appel de Casablanca, saisie d'un appel formulé par une partie française, a, par arrêt du 13
novembre 1984, renversé la décision du Tribunal de première instance de Casablanca qui avait
statué sur le litige. La Cour d'appel a estimé que, en raison de l'existence d'une clause
compromissoire, la Cour d'arbitrage de la Chambre de commerce internationale avait une
compétence exclusive pour traiter le litige. Cette référence aux arrêts Grosset et Hetch a été
interprétée par une partie de la doctrine comme une reconnaissance nette de l'autonomie de
la clause compromissoire, particulièrement en l'absence de cadre légal clair pour les contrats
de joint-venture au Maroc.
Cependant, cette conception n'était pas unanime au sein de la jurisprudence marocaine.
Certaines juridictions étaient parfois hostiles à tout aspect autonome de la clause du contrat
par rapport au contrat principal, la qualifiant de simple «accessoire» dépendant du sort du
contrat qui l'inclut. La Cour d'appel de commerce de Casablanca avait notamment décidé que
la clause compromissoire était considérée comme n'ayant jamais existé si le contrat qui la
renferme a été annulé.
La reconnaissance explicite de l'autonomie de la clause compromissoire n'a été établie que
récemment, à la fois par la haute juridiction marocaine et les juridictions de fond. La Cour
d'appel de Commerce de Marrakech a affirmé que la clause compromissoire reste valide et
produit tous ses effets, même si le contrat qui la renferme est nul ou annulable. Un arrêt de
la Cour d'appel de Casablanca en date du 22 avril 2014 a souligné que la clause
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compromissoire dans un contrat international bénéficie d'une autonomie et d'une efficacité
indépendantes, s'étendant à toutes les parties impliquées dans l'exécution du contrat et à
tous les litiges découlant du contrat, même si les parties ne l'ont pas expressément prévu.
Cette position de la Cour d'appel de Casablanca marque une avancée significative en faveur
de l'autonomie de la clause compromissoire par rapport au contrat principal. Elle consacre
sans ambiguïté l'efficacité et l'indépendance de cette clause, reconnaissant son extension à
toutes les parties impliquées dans les litiges résultant du ou des contrats concernés, y compris
celles qui ne sont pas matériellement signataires. Cette reconnaissance est essentielle pour
assurer le bon fonctionnement et la sécurité juridique de l'arbitrage.
C’est ainsi qu’au niveau mondial, un mouvement doctrinal significatif s'est formé en faveur de
cette règle, éclairant sa portée en soulignant que «la clause compromissoire n'est pas une
clause comme les autres et, peu importe si elle figure dans le contrat principal ou dans un
contrat séparé, elle sera considérée comme juridiquement autonome. Cette autonomie
signifie concrètement que le sort de la clause ne suit pas nécessairement celui du contrat». La
nécessité de trouver une solution spécifique à l'arbitrage a été soulignée, considérant la clause
compromissoire comme un second contrat, matériellement inclus dans un autre mais
fonctionnant pour régler les litiges relatifs à ce dernier. Par conséquent, l'indépendance doit
être privilégiée en cas de doute.
La pratique arbitrale en interne a également contribué de manière significative à la
reconnaissance et à la consécration de l'autonomie de la clause compromissoire. Les
sentences arbitrales et les règlements d'arbitrage ont renforcé le consensus international sur
l'efficacité et l'indépendance de la convention d'arbitrage par rapport au(x) contrat(s) sous-
jacent(s).
Par exemple, le règlement CCI (la Chambre de commerce internationale (CCI) en tant
qu'institution qui propose des services d'arbitrage international. L'arbitrage de la CCI est l'un
des mécanismes les plus utilisés pour résoudre les litiges commerciaux internationaux) a été
à l'avant-garde de l'arbitrage international en consacrant le principe d'autonomie et de
séparabilité de la clause compromissoire, même en l'absence du contrat principal. D'autres
règlements d'arbitrage, tels que ceux de la LCIA (Chambre de commerce internationale
d'arbitrage de Londres), de l'AAA (American Arbitration Association) et de la CCJA (Cour
Commune de Justice et d'Arbitrage. Il s'agit d'une institution judiciaire et arbitrale qui opère
dans le cadre de l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires
(OHADA). L'OHADA est une organisation panafricaine qui a pour objectif d'harmoniser le droit
des affaires en Afrique), ont également repris ce concept.

B. Le mécanisme de l’indépendance de la clause compromissoire par


rapport au(x) contrat(s) de fond
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La dépendance de la clause compromissoire à l'égard du sort du contrat principal pourrait
engendrer un cadre juridique propice à des manœuvres dilatoires néfastes de la part des
parties récalcitrantes à l'arbitrage. Cela risquerait de bloquer systématiquement l'application
de la clause compromissoire et de paralyser son effet. En adoptant la règle de l'autonomie de
la clause compromissoire par rapport au contrat principal, il n'est plus nécessaire de faire une
distinction en fonction de la cause d'inefficacité affectant le contrat principal. Cependant, la
pratique judiciaire et arbitrale montre que ce n'est pas toujours le cas.

Le droit de l'arbitrage s'éloigne de plus en plus de la maxime connue en droit des contrats, le
principe «accessorium sequitur principale» ou « l’accessoire suit le principal ». Le principe
d'autonomie matérielle de la clause compromissoire renvoie aux mécanismes
d'indépendance, de séparabilité et de validité de la clause compromissoire. La séparabilité
implique que le sort d'une clause compromissoire puisse être dissocié du reste du contrat
lorsque des raisons valables le justifient, bien que cela ne soit pas toujours le cas.

Le mécanisme d'autonomie matérielle implique une survie réciproque de la clause d'arbitrage


et du contrat principal.

• La survie de la clause compromissoire à l'inexistence a posteriori du contrat principal :


implique une «immunisation» de la clause d'arbitrage. En cas de nullité de la clause
compromissoire, cette nullité reste circonscrite à l'accord compromissoire sans
affecter le reste du contrat. De plus, la clause compromissoire survit à la résiliation du
contrat principal, n'ayant pas d'effet rétroactif, et elle peut être examinée par les
arbitres quant à ses conséquences.
• La survie de la clause à l'inexistence ab initio du contrat principal : signifie que la clause
compromissoire reste valable même en cas de nullité, expiration, résiliation,
résolution, ou caducité du contrat. Cette autonomie s'étend même à la nullité et à
l'inexistence du contrat principal, ce qui a été consacré par la jurisprudence française.
Une telle extension est justifiée pour éviter les manœuvres dilatoires visant à
prétendre l'inexistence du contrat afin d'échapper à un arbitrage consenti.
L'autonomie de la clause compromissoire s'applique également malgré une résolution
alléguée du contrat principal et la caducité de ce dernier.

Concernant la novation et l'inexistence du contrat principal, la jurisprudence française a établi


la survie de l'autonomie de la clause compromissoire, soulignant que ni la nullité ni
l'inexistence du contrat principal ne l'affectent.

En dépit de certains désaccords, notamment en ce qui concerne la non-formation du contrat


principal, l'autonomie de la clause compromissoire survit en raison du principe de
compétence-compétence de l'arbitre. Tant que la preuve d'une clause compromissoire
manifestement nulle ou inapplicable n'est pas fournie, l'arbitre a une priorité de compétence
pour statuer exclusivement sur sa propre compétence. La Cour de cassation française a précisé
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qu'une clause compromissoire insérée dans un «contrat qui ne s'est jamais formé»" n'est pas
manifestement nulle ou inapplicable.

Pour apporter une réponse à notre problématique, le principe d'autonomie de la clause


compromissoire par rapport au contrat principal revêt une importance et une utilité
indispensables. Parallèlement avec le principe de compétence-compétence de l'arbitre et la
force obligatoire de la convention d'arbitrage, l'autonomie vise principalement à éviter qu'une
partie puisse soumettre le contrôle de validité aux juridictions étatiques pour entraver le
processus arbitral et contrecarrer l'instance arbitrale. Sans cette autonomie, les parties
seraient contraintes d'attendre que les juridictions étatiques se prononcent sur la validité de
la clause compromissoire, ce qui perturberait le déroulement de l'instance arbitrale et
compliquerait, voire rendrait impossible, la capacité des tribunaux arbitraux à rendre une
sentence en temps voulu. Cela met en évidence l'indispensabilité et la constance d'application
de la règle d'autonomie en droit de l'arbitrage.

II. Les conséquences de l’autonomie de la convention d’arbitrage et les


limites de ce principe

A. L’étendue des effets de la convention d’arbitrage dans le temps et dans


l’espace.

On peut dire que la convention d’arbitrage ne se préoccupe du sort du contrat principal. En


vertu de cette règle, la nullité du contrat n'empêche pas l'arbitre d'examiner la validité de
l'allégation et, si nécessaire, de décider des conséquences de la nullité. Ainsi, la nullité du droit
substantiel n'affecte pas le droit d'action, car l'arbitre conserve le pouvoir de se prononcer sur
la validité et les effets de ladite nullité.
Le principe d'autonomie vise principalement, comme mentionné précédemment, à garantir la
pleine efficacité de la clause compromissoire, en conférant aux arbitres la compétence
nécessaire pour statuer.
Cette autonomie est renforcée de manière détaillée par le fait que cette convention échappe
aux catégories du droit interne, étant soumise à des règles matérielles de droit international
définies par l'arbitre et le juge chargé du contrôle des sentences en vertu du principe de
validité de la convention d'arbitrage (article 9 de la loi 95-17).

Dans le droit de l'arbitrage international, la convention entre les parties en arbitrage est
juridiquement autonome et a force de loi indépendamment de toute législation étatique.
Cette analyse engendre une autre règle matérielle, dérivée de l'autonomie, qui vise à garantir
une efficacité étendue de la clause compromissoire envers toutes les parties impliquées dans
un litige arbitral, même si elles n'ont pas signé la convention contenant ladite clause. Pour
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cela, il est nécessaire de se référer au consentement, envisagé sous la forme d'une
présomption de consentement implicite, car, bien que non exprimé formellement, l'arbitrage
ne peut avoir lieu que par le consentement des parties.

Le caractère fortement expansif de l'autonomie de la clause compromissoire par rapport aux


effets de la convention d'arbitrage est clairement compréhensible par une simple lecture de
la formulation des arrêts de la jurisprudence française, à savoir que : « la validité et l'efficacité
propres de la clause compromissoire commandent d'en étendre les effets aux parties
directement impliquées dans l'exécution du contrat, dès lors que leur situation et leurs
activités laissent présumer qu'elles avaient connaissance de l'existence et de la portée de
cette clause stipulée conformément aux usages du commerce international».

Dans un arrêt daté du 14 juillet 2014, la Cour d'appel de commerce de Casablanca a adopté
cette formulation en statuant que « Il est de doctrine et de jurisprudence constante en droit
comparé que la clause compromissoire figurant dans un contrat international bénéficie d'une
autonomie et d'une efficacité indépendantes permettant d'étendre ces effets à toutes les
parties concernées directement par l'exécution du contrat et plus précisément à tous les
litiges nés du contrat, même si les parties ne l'ont pas expressément prévu », cela, même si
ces parties n'ont pas été signataires du contrat qui la stipulait.

Selon cette règle désormais applicable aussi bien en droit de l'arbitrage français que marocain,
le juge du contrôle de la sentence peut admettre qu'une partie non-signataire du contrat
principal soit soumise à l'arbitrage, dans la mesure où les circonstances permettent de
présumer son consentement à l'arbitrage, conformément aux usages du négoce international
concerné.

L'abondance de la jurisprudence française en la matière justifie de citer à titre illustratif un


autre arrêt de la Cour de Paris (d'une autre formation : 15e Chambre A) du 15 mai 1990 (non
publié), qui a décidé que la clause compromissoire stipulée dans les « confirmations de vente
» adressées par le fournisseur turc à l'acheteur français était opposable au mandataire en
France du fabricant turc, en soulignant que ce mandataire avait, en cette qualité, connaissance
de la convention d'arbitrage et en ajoutant que : « l'efficacité commande que l'arbitre puisse
être saisi de tous les aspects économiques et juridiques du litige concernant les parties qui y
sont impliquées afin qu'il puisse appréhender les responsabilités de chacun dans le cadre de
leurs relations réciproques ». Certes, le concept est surprenant. Comment peut-on admettre
que les effets de la clause compromissoire soient étendus à des parties qui n'en seraient pas
a priori signataires, ni même signataires du contrat principal, même si cette clause est
autonome par rapport à celui-ci ?

• D'un point de vue du droit contractuel, le phénomène est facilement justifiable dans
la mesure où il est possible que la partie non-signataire ait, en fait, adhéré
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implicitement au contrat principal et, par conséquent, accessoirement, à la clause
compromissoire.
• D'un point de vue juridique en matière d'arbitrage, la question est technique et
nécessite que l'arbitre et, par extension, le juge se prononce sur la possibilité
d'inclure dans la procédure arbitrale ce que quelques juristes désignent comme les
« contractants médians». Ces acteurs ne sont pas signataires du contrat, mais ne sont
pas non plus de simples tiers, car ils sont étroitement impliqués dans le processus
contractuel.

Étant donné que le principe de la validité internationale de la convention d'arbitrage découle


de l'autonomie substantielle de la clause compromissoire, le juge évaluera la situation
conformément à la méthode des règles matérielles, sans recourir à des règles de conflit
interne.

En ce qui concerne le caractère mobilisateur de l'autonomie substantielle de la clause


compromissoire, nous attirons l'attention sur sa résilience face à la disparition du contrat
due à la novation, que cette dernière résulte d'un changement d'objet, de cause ou de
personne.

En dépit des principes d'efficacité de la convention d'arbitrage, en particulier de sa validité et


de son autonomie, la clause compromissoire peut survivre à la novation du contrat principal,
contournant ainsi son effet extinctif.

En France, La jurisprudence était initialement réticente à reconnaître une telle immunité face
à une novation. Un changement de position de la jurisprudence a été nécessaire pour conclure
que les clauses compromissoires présentes dans les contrats d'origine n'avaient aucune raison
de survivre aux obligations éteintes auxquelles elles étaient initialement liées. À cet égard, M.
Ancel estime que, bien que le principe de l'autonomie de la clause compromissoire puisse
expliquer la survie de la clause après l'extinction de l'obligation initiale, il ne justifie pas
nécessairement que cette clause s'applique à une nouvelle relation impliquant des personnes
différentes. Mais peut-on se demander si dans ce cas la volonté des nouvelles parties peut
dupliquer la nouvelle obligation sur l'ancienne ce qui trouve son fondement dans le principe
de l'effet relatif des contrats ?

En ce qui concerne la novation résultant d'un changement d'obligation entre les mêmes
parties, il est clair que nous sommes en présence de deux contrats distincts en termes de
modalités d'exécution.
Le premier constitue le contrat initial, tandis que le deuxième est un nouveau contrat qui n'a
aucune incidence sur le cadre du premier contrat. Deux situations peuvent se présenter :

• soit la transaction n'a pas pour effet de modifier le contrat initial, auquel cas la clause
compromissoire qui y est incluse n'est pas affectée,
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• soit elle entraîne une telle modification, soulevant alors la question de l'effet extinctif
de cette novation sur la clause compromissoire.
Dans le cas où la novation ne modifie pas le contrat initial, le principe de l'autonomie de la
clause compromissoire n'a pas d'impact, et la clause compromissoire continue de s'appliquer
aux litiges découlant du contrat initial avant la novation.
Cependant, si la novation entraîne une modification substantielle du contrat, la clause
compromissoire ne s'appliquera plus aux litiges du nouveau contrat. En effet, l'effet novatoire
de la modification du contrat crée de nouvelles obligations et de nouveaux droits d'action qui
n'ont pas été soumis à un accord d'arbitrage, à moins que les parties n'aient explicitement
prévu une nouvelle clause compromissoire. Malgré cela, la clause compromissoire demeure
applicable aux litiges du contrat initial avant sa novation.
Cette conclusion renforce l'idée qu'il est important de régir la convention d'arbitrage par une
loi différente de celle régissant la convention de fond.
L'effet de l'autonomie de la clause compromissoire lui confère la capacité de perdurer dans le
temps et de générer des obligations au-delà de la période contractuelle. Cette persistance
temporelle se manifeste particulièrement à la fin de la vie du contrat principal. Peu importe la
raison de l'extinction de ce dernier, le mécanisme d'autonomie permet à la clause
compromissoire de demeurer intacte.

Cette persistance matérielle et temporelle confère à la clause compromissoire une véritable


spécificité par rapport au droit des obligations. De plus, cette survivance a été renforcée par
l'argument selon lequel «la clause compromissoire est un véritable contrat dans le contrat ».

B. Les limites et les enjeux de l’autonomie matérielle de la clause


compromissoire

Au regard de la règle de l’autonomie matérielle de la clause compromissoire, notamment dans


son caractère indifférent vis-à-vis du sort du lien contractuel de fond, se pose la question
suivante : Est-ce que cette autonomie empêche la convention d’arbitrage de rayonner et/ou
de se transmettre au titre d’accessoire d’un contrat, ou bien au contraire, elle en facilite la
tache ?
La question soulevée dans votre déclaration est complexe et soulève des points importants
liés à l'autonomie matérielle de la clause compromissoire. Pour y répondre nous avons décidé
d’examiner cette question sous forme d’aspects qui résument notre problématique :

Autonomie Matérielle de la Clause Compromissoire :


1. Indépendance Contractuelle : L'autonomie matérielle permet à la clause
compromissoire de rester indépendante du contrat principal. Cela signifie que, en
principe, la validité et l'existence de la clause ne dépendent pas du sort du contrat
principal.
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2. Portée de l'Autonomie : Cette autonomie confère à la clause compromissoire une
certaine liberté d'exister même si le contrat principal est nul, résilié ou inexistant.

Extension de la Clause Compromissoire à d'Autres Contrats :


1. Rayonnement de la Clause : L'autonomie matérielle permet généralement à la clause
compromissoire de s’étendre, de rayonner et de s'appliquer même à des litiges
découlant d'autres contrats ou relations.
2. Transmissibilité : Il est généralement admis que la clause compromissoire peut se
transmettre et s'appliquer comme accessoire à un nouveau contrat. Cependant, cela
peut dépendre des lois nationales et des termes spécifiques de la clause.

Enjeux Potentiels :
1. Choix de la Loi Applicable : Il peut être crucial de déterminer la loi applicable à la clause
compromissoire, en particulier si elle est censée s'appliquer à des contrats distincts.
2. Coordination Procédurale : En cas de litiges multiples liés à différents contrats, la
coordination entre les procédures arbitrales peut être un défi.
3. Clarté Rédactionnelle : La rédaction de la clause compromissoire doit être claire et
précise pour éviter toute ambiguïté sur son champ d'application.

La question de savoir si l'autonomie matérielle de la clause compromissoire empêche ou


facilite son extension à d'autres contrats peut dépendre de la jurisprudence locale, des lois
applicables et de la rédaction spécifique de la clause.

Conclusion :

Nous résumons notre sujet en cinq points :


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1. Indépendance Juridique : La clause compromissoire est juridiquement indépendante
du reste du contrat. Cela signifie que même si le contrat principal est jugé nul, la
validité de la clause compromissoire peut être préservée.

2. Compétence de l'Arbitre : La clause compromissoire confère généralement le pouvoir


à un arbitre ou à un tribunal arbitral pour résoudre les différends découlant du contrat.
L'arbitre a compétence pour statuer sur sa propre compétence, y compris sur
l'existence et la validité de la clause compromissoire.

3. Effet séparé : La clause compromissoire peut survivre à la résiliation ou à l'expiration


du contrat principal. Même si le contrat prend fin, les litiges liés à ce contrat peuvent
toujours être résolus par arbitrage conformément à la clause compromissoire.

4. Application Large : L'autonomie de la clause compromissoire est généralement


reconnue à l'échelle internationale, facilitant la résolution des litiges transfrontaliers
par arbitrage.

5. Principe de Compétence-Compétence : En vertu du principe de compétence-


compétence, l'arbitre a le pouvoir initial de décider de sa propre compétence. Ainsi,
en cas de contestation de la validité de la clause compromissoire, c'est généralement
à l'arbitre d'en décider en premier lieu.

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