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Définitions
On peut aussi classer les stéréoisomères en deux catégories selon des critères de symétrie. On
distingue :
les énantiomères ;
les diastéréo-isomères.
Ethane
L'éthane est le deuxième terme de la série des alcanes. Sa molécule a pour formule brute
C2H6.
L'énergie potentielle de l'éthane a été étudiée d'un point de vue théorique par R. M. Pitzer et
W. N. Lipscomb [9]. On peut en donner une expression quantitative approchée :
avec k = 0,5 et V0 = 11,7 kJ.mol-1
Des calculs récents menés par Lionel Goodman et Vojislava Pophristic (Rutgers University)
montrent que la préférence pour la conformation décalée peut être interprétée par un effet
d'hyperconjugaison [2] et [25]. En termes d'orbitales moléculaires le résultat précédent peut
être retrouvé à partir de l'examen des orbitales frontières :
Dans la conformation antipériplanaire, l'interaction entre les orbitales frontières est plus
importante que dans la conformation synpériplanaire.
Butane
Le butane, dont la formule brute est C4H10 est le troisième terme de la série des alcanes.
La rotation autour de C2C3 n'est pas parfaitement libre. Les conformations suivantes
possèdent une géométrie remarquable :
ou en utilisant la projection de Newman :
les conformations sont désignées en utilisant les stéréodescripteurs introduits par Klyne et
Prelog :
la courbe donnant l'énergie potentielle de la molécule en fonction de l'angle dièdre entre les
liaisons CCH3 a l'allure suivante :
(deg) 0 60 120 180
Energie (kJ.mol1) 18,8 3,8 15,9 0
Pour une étude détaillée de l'analyse conformationnelle des alcanes linéaires, voir [20].
Systèmes conjugués
Diènes et polyènes
Les conformations dans lesquelles toutes les liaisons sont dans un même plan, sont
privilégiées. Elles permettent un recouvrement maximal des orbitales p perpendiculaires au
plan du système conjugué. Les stéréodescripteurs s-cis et s-trans se réfèrent à la position des
liaisons doubles par rapport à la liaison simple .
(deg) 0 180
Conformation I II
Stéréodescripteur s-cis s-trans
Les valeurs ci-dessous concernent le buta-1, 3-diène. La valeur 0 correspond à la
conformation s-trans.
(deg) 90 180
Energie (kJ.mol1) 20,5 10,9
Il faut noter que bien qu'étant la plus stable, la conformation s-trans n'est pas nécessairement
la plus réactive. Dans une réaction de Diels-Alder entre un diénophile tel que le dicyano-1,2-
éthène et le buta-1,3-diène le diène réagit dans la conformation s-cis. En vertu du principe de
Curtin-Hammett, l'équilibre rapide entre les deux conformations n'intervient pas dans la
cinétique de la réaction.
-énones
La conformation la plus stable est la s-trans.
Cyclohexane
La formule brute du cyclohexane est C6H12. La molécule qui appartient à la famille des
cyclanes possède une insaturation. La mesure de la chaleur de combustion indique que la
tension dans le cycle est très faible. Comme l'a prédit Sachse dès 1860, la molécule ne doit
pas avoir la forme d'un hexagone régulier sinon les angles entre deux liaisons adjacentes
seraient 120° et on observerait une contrainte dans le cycle.
Parmi l'infinité des conformations possibles, celles dont la géométrie est remarquable sont
classées ci-dessous par énergie croissante :
La conformation bateau (symétrie C2v.) possède une énergie supérieure d'environ 30 kJ.mol1
à la conformation chaise. La conformation bateau est flexible et les contraintes sont plus
faibles dans la conformation bateau croisé. La conformation enveloppe, dans laquelle cinq
atomes sont dans un même plan, est celle dont l'énergie est la plus haute.
a axiales ;
e équatoriales ;
b beaupré ;
m mât.
La constante de couplage 3JHH entre deux protons vicinaux dépend de la valeur de l'angle
dièdre entre les liaisons CH. Cette dépendance peut être exprimée quantitativement grâce à
la formule de Karplus.
Basculement conformationnel
Le passage d'une conformation chaise à une autre, inverse les positions axiales et équatoriales.
A 300 K le passage d'une forme à l'autre s'effectue environ 100 000 fois par seconde.
L'existence de deux catégories d'atomes d'hydrogène peut être mise en évidence par
spectroscopie RMN si la température est suffisamment basse.
à la température ordinaire, le
spectre de RMN du cyclohexane
donne un signal unique à = 1,36
ppm pour les 12 atomes
d'hydrogène car la vitesse
d'interconversion entre les
positions axiales et équatoriales est
très rapide, le spectrographe
n'enregistre qu'un signal moyen ;
lorsque la température diminue, le
signal s'élargit et commence à se
dédoubler à partir de la
température de coalescence TC =
66,7 °C, à cette température le
basculement conformationnel est
suffisamment ralenti pour que le
spectrographe distingue les deux
catégories d'atomes d'hydrogène ;
ces conformations possèdent des énergies différentes. La conformation pour laquelle X est
équatorial (II) est plus stable que celle dans laquelle X est axial (I). Cela est dû à deux facteurs
:
Dans (II), la liaison CX et les liaisons C2C3 et C5C6 forment un enchaînement de
type butane antipériplanaire. En revanche, dans (I), la liaison CX et les liaisons
C2C3 et C5C6 forment un enchaînement de type butane synclinal.
Il existe des répulsions entre le groupe X et les atomes d'hydrogène situés en position
axiale (interaction 1, 3 diaxiales) dans (I) qui n'existent pas dans (II). Leur intensité
dépend de l'encombrement stérique du groupe X.
Désignons respectivement par XA et XE, les fractions molaires de I et II. A une température
donnée, l'équilibre entre les conformations est caractérisé par une constante K :
l'opposé de l'enthalpie libre standard de l'équilibre de conformation est appelé préférence
équatoriale du groupe X. Cette grandeur est généralement notée A.
A = R.T ln K
avec évidemment :
d'où l'expresson de K :
Le tableau suivant donne les valeurs de A pour quelques groupes X carbonés. Plus la valeur de
A est grande, plus la préférence équatoriale du substituant est prononcée. Des tables plus
complètes existent dans la littérature.
Les dérivés substitués du tert-butylcyclohexane en position 4 ont souvent été utilisés comme
substrats modèles dans l'étude de l'influence de la conformation en stéréochimie dynamique.
Lorsque le cycle est disubstitué, on peut considérer en première approximation que les valeurs
de A relatives à chaque substituant sont additives. On peut ainsi déterminer par le calcul la
constante d'équilibre de l'interconversion entre les cycles disubstitués.
cela montre que les molécules qui adoptent la conformation II sont en plus grand nombre que
celles qui adoptent la conformation I.
Pour l'étude détaillée des cycles à six atomes de carbone, voir [22].
Décalines
Les décalines sont des hydrocarbures de formule brute C10H18. Ces molécules sont constituées
de deux cycles cyclohexaniques accolés. On peut donc les considérer comme des dérivés
disubstitués particuliers du cyclohexane.
A partir de l'un des cycles, les liaisons constituant l'amorce du deuxième cycle peuvent être de
stéréochimie trans (I) ou bien de stéréochimie cis (II). Le passage de (I) à (II) nécessite la
rupture et la reformation de liaisons. Ce sont des isomères de configuration et plus
précisément des diastéréo-isomères.
Le cas rappelle celui des diastéréo-isomères cis et trans du 1, 2-diméthylcyclohexane qu'il est
conseillé d'étudier avant d'aborder ce paragraphe.
Comme on peut s'y attendre, les décalines possèdent des propriétés physiques et chimiques
différentes.
La situation est différente dans la décaline cis ou la jonction des cycles permet aisément le
passage d'une chaise à l'autre. La molécule est flexible.
La décaline cis, considérée comme une structure figée est
chirale. Cependant, le basculement conformationnel fait
passer d'une conformation à son image dans un miroir.
L'énergie séparant les deux conformations énantiomères
est d'environ 25 kJ.mol1. A la température ordinaire le
passage d'une conformation à l'autre est très aisé et l'on
observe le mélange racémique des deux énantiomères.
Notons que la trans décaline est plus stable que la cis décaline. Une estimation qui néglige la
contribution entropique, de cette différence de stabilité, consiste à mesurer l'enthalpie
standard de la réaction d'isomérisation suivante :
L'une des causes principales de l'instabilité de la cis décaline par rapport à son isomère trans
vient du fait que les atomes d'hydrogène portés par la face concave sont à une distance de
0,217 nm qui est inférieure à la somme de leurs rayons de Van der Waals 0,240 nm.
Stéroïdes
Les stéroïdes sont des composés comportant un squelette carboné constitué d'un système de
type phénantrène (cycles A, B, C) avec un cycle cyclopentane accolé (cycle D).
On peut l'interpréter par l'interaction entre un doublet non liant n (O) porté par l'atome
d'oxygène négatif du cycle et l'orbitale antiliante * de la liaison CX du susbstituant. Au lieu
d'occuper l'orbitale n (O) les électrons occupent l'orbitale telle que :
= n (O) + .*(CX)
.
l'interaction entre les orbitales est maximale pour une disposition axiale de l'orbitale décrivant
le doublet non liant et de l'orbitale antiliante *(CX). Il s'agit d'un exemple
d'hyperconjugaison.
Chez les 2-alcoxy tétrahydropyrannes comme celui qui
est représenté à gauche, l'effet anomère se traduit par la
disposition axiale adoptée par le groupe alcoxy situé en
position 2. L'effet est très répandu dans la chimie des
sucres.
Pour un bilan détaillé sur le sujet à un niveau avancé, voir [37] et [38].
Cyclènes
axiaux a ;
pseudo-axiaux a' ;
équatoriaux e ;
pseudo-équaoriaux e'.
Si le cycle est suffisamment tendu pour que les conformations chirales ne s'interconvertissent
pas, il est possible de séparer deux énantiomères. C'est le cas pour le transcyclooctène.
Chez certains sytèmes conjugués comme les énamines, la conjugaison entre le doublet de
l'azote et la liaison éthylénique impose aux atomes dont les orbitales p se recouvrent d'être
dans un même plan. Cette condition ne peut pas être réalisée dans B du fait de la tension
allylique A1,3 qui se développerait entre le méthyle et une branche du cycle pyrrolidine.
Tension allylique
La tension allylique (en anglais : allylic strain) résulte d'une interaction au sein d'une
molécule entre substituants d'une double liaison. L'un de ces substituants étant en position
allylique. A l'origine le phénomène a été décrit chez les dérivés substitués du cyclohexène. On
distingue deux types appelés respectivement tension allylique A1,2 et tension A1,3 (selon les
notations de S. K. Malhotra et F Johnson [8].)
Exemple 2 : dans la molécule suivante, la tension A1,3 rend la conformation II plus stable que
la I.
Systèmes pontés
L'existence du pont permet d'isoler des molécules dans lesquelles un cycle à 6 chaînons
adopte les géométries variées rencontrées chez le cyclohexane.
molécule I II III IV
nom adamentane bicyclo [2, 2, 2]-octane twistane bicyclo [3, 1, 1]-
heptane
cycle chaise bateau twist chaise et bateau
Règle de Bredt
Cette règle d'origine expérimentale affirme l'impossibilité d'existence d'une double liaison en
tête de pont d'un composé bicyclique. On en retrouve la manifestation chez certaines cétones
bicycliques dont le taux d'énolisation est nul. Lorsque les cycles sont assez grands il est
possible de préparer des composés comportant une double liaison en tête de pont. Le premier
composé de ce type a été préparé grâce à la réaction d'aldolisation par Prelog en 1950.
Si vous disposez de Firefox ou I.E ver > 6.0 associés au plug-in Chime 2.6 SP4 (MDL) vous
pouvez compléter l'étude du cyclohexane et de ses dérivés en ouvrant la page suivante :
dérivés monosubstitués du cyclohexane.
Bibliographie
Ouvrages théoriques
J. March - Advanced organic chemistry, Wiley Interscience.
F. A. Carey, R.J. Sundberg - Advanced organic chemistry, 3d edition (Plenum Press, 1990).
H. Kagan - La stéréochimie organique (PUF, 1975).
J. L Pierre - Principes de stéréochimie organique statique (A. Colin, 1971).
Eliel, E. L., S. H. Wilen, et al. Stereochemistry of Organic Compounds. Wiley (1994).
D. H. R. Barton, Some recollections of gap jumping (American Chemical Society, 1991).
A. Kirmann, J. Cantacuzène, P. Duhamel - Chimie organique T 1 (A. Colin, 1971).
K. Mislow - Introduction to stereochemistry (W. A Benjamin, New York, 1966).
J. Jacques - La molécule et son double (Hachette, 1992).
V. Pellegrin - Les représentations graphiques bidimensionnelles des molécules en chimie organique (Bulletin de
l'Union des Physiciens, février 1999).
Articles
[1] The conformation of the steroid nucleus, by D.H.R. Barton, Cambridge, Mass.
[2] Pophristic, V., and L. Goodman. Hyperconjugation not steric repulsion leads to the staggered structure of
ethane. Nature 411 2001, May 31, 565. (voir aussi : [25])
[3] F. R. Jensen, C. H. Bushweller, J. Am. Chem. Soc.91, 3223 (1969).
[4] H. S. Gutowsky and C. H. Holm, J. Chem. Phys. 25. 1228. (1956).
[5] F. Weinhold, Angew. "A New Twist on Molecular Shape" Nature 2001, 411, 539-541.
[6] J. R. Wiseman, J. Am. Chem. Soc. 1967, 89, 5966 (exception Bredt.)
[7] J. A. Marshall, H. Faubl, J. Am. Chem. Soc. 1967, 89, 5965 (exception Bredt.)
[8] Francis Johnson, Sudarshan K. Malhotra J. Am. Chem. Soc., 1965, 87 (23), pp 5492–5493
[9] Pitzer R M and Lipscomb W N, "Calculation of the Barrier to Internal Rotation in Ethane", J. Chem. Phys.,
39, 1995-2004 (1963)
Sur la toile
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Gérard Dupuis - Lycée Faidherbe - LILLE
décembre 2012