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Article Sur La Gestion Du Risque en Douane
Article Sur La Gestion Du Risque en Douane
En raison de l’accroissement des flux commerciaux et donc de leur charge de travail, les adminis-
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For several years, the most modern customs administrations rely on risk analysis structural
approaches for reducing intrusive inspections, satisfying private operators and securing their
operations. In developing countries, customs administrations have been slow to take this course
due to high reluctance from both customs officers refusing to change and authorities fearing reve-
nue losses. This paper presents five experiences in West African countries where customs adminis-
tration are developing in their modernization strategy, risk analysis and management systems
using statistical scoring methods. Initial lessons from these experiences are promising and logically
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68 Anne-Marie Geourjon, Bertrand Laporte
other countries should follow. Presently used only by customs administrations, these methods
could also be developed by tax administrations.
1 INTRODUCTION
les caractéristiques des biens importés (Dequiedt et al., 2009). Mais comme
dans la plupart des pays les douanes gardent la possibilité de contrôler physi-
quement les marchandises à l’arrivée, et de remettre en question l’informa-
tion fournie par ces sociétés privées, le risque moral reste fortement présent
(Dutz, 2000 ; Johnson, 2001). En conséquence, dans les pays en développe-
ment, ces contrôles s’avèrent dans la majorité des cas, inefficaces 2. D’où une
forte pression, dans le cadre des programmes de modernisation entrepris dans
la majorité des administrations douanières de ces pays, pour développer des
systèmes performants d’analyse et de gestion du risque afin de limiter les con-
trôles intrusifs grâce à un ciblage performant des opérations commerciales.
Cinq pays d’Afrique de l’ouest développent actuellement, avec l’appui de
l’AFRITAC de l’Ouest du FMI, un système « expert » d’analyse et de gestion des
risques qui repose sur une exploitation systématique de l’information statisti-
que. Ce sont le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Mali et le Sénégal.
L’idée est d’appliquer les méthodes d’analyse du risque utilisées dans de nom-
breux secteurs (banques, assurances, sécurité…) en les adaptant au contexte
douanier. En effet, si l’analyse du risque se retrouve dans tous les secteurs et
toutes les organisations, elle nécessite chaque fois une démarche spécifique
(Gates, 2006). Le système fonctionne au Bénin et au Mali depuis peu, il est en
phase de test en Côte d’Ivoire et au Sénégal. Le projet démarre au Burkina Faso.
L’objet de cet article est de tirer les premiers enseignements de ces projets
ambitieux et pour l’instant inachevés. La section suivante est consacrée aux
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recueillies sur les fraudes constatées (fraude avérée), et non sur d’éventuels
soupçons de fraude 3. L’exploitation de ces informations est faite en utilisant
des techniques rigoureuses d’analyse de données et d’économétrie.
Pour réussir à cibler avec précision les déclarations qui présentent un ris-
que élevé de fraude, il est nécessaire de réaliser au préalable un travail d’ana-
lyse de données qui portent sur l’ensemble des éléments de la déclaration. Ce
travail consiste à identifier les caractéristiques des déclarations qui ont fait
l’objet, au cours d’une période donnée (une année par exemple), d’une infrac-
tion constatée, et à dégager « des régularités statistiques » parmi ces caractéris-
tiques. Ces régularités statistiques vont permettre d’établir des profils de
risque par critère. Alors que l’information est essentiellement qualitative avec
l’utilisation des critères de sélectivité traditionnels, l’analyse statistique permet
ainsi d’établir une échelle de risques « quantitative » pour chacun des critères
potentiels renseignés sur la déclaration, notamment les circuits commerciaux,
les opérateurs économiques, la marchandise (par exemple le produit, l’origine,
la provenance, la monnaie de facturation, l’importateur, le transitaire, le
régime douanier de l’importation…). Chaque produit, chaque importateur,
chaque origine… aura ainsi un score « individuel » compris entre 0 et 1. Ce score
n’est autre que la fréquence d’infraction. Par exemple, le score « individuel » de
chaque importateur est calculé comme le nombre de ses déclarations ayant fait
l’objet d’une infraction constatée rapporté au nombre total de ses déclarations
au cours de la période d’analyse retenue.
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3 En dehors des critères de blocage imposés par les services de renseignement douanier
sur la base de fortes présomptions concernant de nouveaux courants de fraude.
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Des prérequis
Ces prérequis concernent l’informatique douanière, le cadre institution-
nel, la disponibilité des données et les ressources à mobiliser.
L’informatique douanière et la disponibilité des données
Quatre des cinq pays utilisent le système SYDONIA (Système Douanier
automatisé) de la CNUCED pour gérer les procédures de dédouanement. Le
Bénin, le Mali et le Burkina Faso utilisent SYDONIA++ alors que la Côte
d’Ivoire utilise la version la plus récente (SYDONIA world) sous le nom de
SYDAM world. La version++ est une version « fermée » qui ne permet pas
aux administrations douanières d’avoir accès aux programmes sources.
L’implication en matière d’analyse et de gestion des risques est que seuls l’uti-
lisation de critères de sélectivité et le ciblage aléatoire peuvent être utilisés
pour mettre en œuvre une stratégie d’orientation des déclarations dans diffé-
rents circuits de contrôle. SYDONIA world est un système ouvert et devrait
permettre aux administrations douanières de développer localement de nou-
velles fonctionnalités. Le Sénégal a développé son propre système de dédoua-
nement, GAINDÉ (Gestion automatisé des Informations douanières et des
Échanges) et peut donc plus facilement mettre en œuvre un système intégré
d’analyse et de gestion des risques.
Les cinq pays disposent donc tous d’une information statistique dense à tra-
vers leur système informatique douanier, qui repose essentiellement sur le mani-
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4 Le Burkina Faso est en phase de démarrage et s’est donné pour premier objectif d’infor-
matiser les opérations contentieuses.
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5 PVS-net est un système d’informatisation des contentieux douaniers développé par les
douanes ivoiriennes.
La gestion du risque en douane : premières leçons tirées de l’expérience... 77
5 CONCLUSION
Les expériences menées dans ces cinq pays d’Afrique de l’Ouest, qui ont choisi
de développer dans leurs administrations douanières des systèmes intégrés et
dynamiques d’analyse de risque, ont déjà permis d’obtenir des résultats posi-
tifs, alors même qu’elles n’en sont qu’à une phase transitoire. Cet intérêt pour
le développement d’approches structurées pour analyser le risque s’est mani-
festé dans ces pays en priorité dans les administrations douanières qui font
face, compte tenu des spécificités des procédures d’importation et des coûts de
transactions élevés, à une forte pression des opérateurs, comme des institu-
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