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RTD Civ.

RTD Civ. 2006 p. 111

Portée de la clause d'intégralité


e
(Paris, 15 juin 2005, 5 ch. A, SA Thomson Télévision Angers c/ SAS française de restauration
Sodexho, inédit)

Jacques Mestre, Professeur à l'Université Paul Cézanne (Aix-Marseille III);Doyen


honoraire
Bertrand Fages, Professeur à l'Université Paris-Val-de-Marne (Paris XII)

Très fréquente en pratique, au point que l'on peut se demander si elle n'est pas devenue une clause de
style, la clause d'intégralité est celle qui précise que le contrat renferme l'ensemble des engagements
convenus entre les parties (V. Lamy Droit du contrat, n° 105-28). Son but est d'éviter que les
documents échangés pendant la phase précontractuelle puissent être utilisés par un tribunal afin de
combler, voire simplement interpréter, le contenu du contrat. Néanmoins, sa portée demeure discutée
(V. E. Rawach, La portée des clauses tendant à exclure le rôle des documents précontractuels dans
l'interprétation du contrat, D. 2001.Chron.223 ). Dès 1994, l'article 2.1.17 des Principes d'Unidroit
relatifs aux contrats du commerce international, inchangé dans la version 2004, a admis qu'elle peut
empêcher que le contrat soit « contredit ou complété » par la preuve de déclarations ou d'accords
antérieurs, ceux-ci pouvant toujours « cependant servir à l'interprétation du contrat ». Plus récemment,
l'article 2:105 des Principes du droit européen du contrat a lié son efficacité à la question, en pratique
difficile à trancher, de savoir si elle a été ou non individuellement négociée (V. D. Velardocchio, in C.
Prieto (dir.), Regards croisés sur les Principes du droit européen du contrat, PUAM, 2003, p. 177). Si tel
n'est pas le cas, la clause d'intégralité fait seulement présumer que les parties entendaient écarter la
prise en compte des déclarations, engagements ou accords antérieurs ; libre au juge ou à l'arbitre,
ensuite, de s'en servir s'il estime nécessaire de le faire. S'il apparaît, en revanche, que la clause a fait
l'objet d'une négociation individuelle, elle se voit reconnaître un plein effet : elle fait obstacle à la fois au
comblement et à l'interprétation du contenu contractuel. A moins, ultime réserve, que par ses
déclarations ou son comportement postérieurs, sur lesquels l'autre s'est raisonnablement fondée, une
partie ait manifesté son intention de ne pas s'en prévaloir.

Qu'en est-il en droit français ? Les décisions sur le sujet sont rarissimes. Raison pour laquelle il y a lieu
de relever cet arrêt de la Cour d'appel de Paris qui, dans un litige opposant une entreprise à une société
prestataire de repas collectifs, au sujet d'une redevance que la seconde se serait engagée à verser à la
première pour les repas fournis à des salariés d'entreprises extérieures et les repas livrés, estime qu'une
telle redevance n'a pas été prévue au contrat. Les juges du fond motivent leur décision par le constat
que « les propositions en ce sens contenues dans l'offre du 6 mars 2000 et renouvelées dans un courrier
du 21 mars 2000 de la société Sodexho » n'ont pas été « reprises dans le contrat signé par les parties le
27 avril 2000, dont l'article 11.4 précise qu'il « annule et remplace tous accords écrits et verbaux
antérieurs à la signature » et ajoute qu'« aucune des parties ne pourra être tenue à autre chose que ce
qui a été expressément convenu par le présent contrat » ».

Voici donc, en attendant d'autres arrêts, l'indication de ce que les clauses d'intégralité peuvent se
révéler efficaces. Une efficacité qui va jusqu'à écarter la prise en compte, au titre du comblement du
contenu contractuel, d'une offre antérieure, deux fois formulée, et qu'il était dans l'intérêt de son
destinataire d'accepter.

Mots clés :
CONTRAT ET OBLIGATIONS * Formation du contrat * Clause d'intégralité * Portée * Efficacité
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1 sur 1 10/10/2014 15:24

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