Sous la direction de Mme Sabina Loriga et de M. Gaetano Ciarcia
Howard S Becker, « Sociologie visuelle, photographie documentaire et
photojournalisme », In: Communications, 71, 2001. pp. 333- 351.
Valentina Grossi, « Produire l’actualité des images : le travail
d’assemblage dans les bureaux de l’Agence France-Presse », In : La Découverte, 6, 212, 2018, pp. 179 – 206.
Note critique 6e séance séminaire DIS
Dans Sociologie visuelle, photographie documentaire et
photojournalisme, le sociologue Howard Becker mène une réflexion importante sur le statut attribué à la photographie dans chacun des différents milieux académiques. En somme, il souligne comment le rôle de la photographie pour les sciences humaines est divers et multiple selon le sens que le photographe attribue à ses créations, mais aussi à l'environnement et aux pratiques qui les ont fait naître. En ce sens, le sociologue aborde les différences entre les pratiques des photographes documentaires, du photojournalisme et de la sociologie visuelle, montrant qu'au-delà de la volonté d'étiqueter une pratique pour la différencier et la caractériser, il est important de réfléchir au processus historique de construction de ces termes, à ce qu'ils limitent et à la manière dont ils se situent de manière particulière par rapport à d'autres pratiques photographiques. Afin d'éclairer ces questions, Becker analyse l'histoire de ces pratiques en mettant en évidence le contexte social qui a conduit à leur émergence et le champ d'action qui différencie le photojournalisme des photographes documentaires et de la sociologie visuelle, où la principale différence entre eux semble être le lieu de publication des images, le public auquel elles s'adressent et le sujet capturé par les appareils photographiques.
Outre la volonté de montrer d'autres réalités et des faits qui se déroulent
dans des lieux éloignés, la photographie a également été rapprochée de l'art et, en ce sens, rejetée par les sciences humaines qui voulaient devenir plus scientifiques, comme l'économie. Becker nous montre comment la sociologie a géré ce conflit, tantôt en s'éloignant du document photographique, tantôt en s'en rapprochant afin d'analyser et de montrer des faits qui n'auraient pas pu l'être autrement. Ce qui élève une photographie au rang de preuve documentaire, ce n'est pas seulement le document lui-même, mais aussi les autres informations et le contexte dans lequel le photographe place sa création, établissant ainsi un lien entre la photo et le texte qui vise à expliquer l'image.
Dans Produire l’actualité des images : le travail d’assemblage dans les
bureaux de l’Agence France-Presse, Valentina Grossi analyse la manière dont les « images d'actualité » sont construites au niveau rhétorique. Avec cet objectif en tête, la sociologue met en lumière certaines questions sur la construction de ces images qui ne sont pas communément débattues. En bref, ces questions tournent autour de la construction de ces photos : qu'est-ce qui leur confère une valeur informative ? Grossi va au-delà de l'idée que ces images sont le produit d'un seul photographe et considère le réseau complexe d'acteurs impliqués dans la création de photos d'actualité. Au-delà de cet objectif principal de réflexion sur le réseau de production des images d'actualité, Grossi explore la relation entre ces images intrinsèquement éphémères, nées pour rendre compte de l'actualité, et la temporalité. Ce faisant, le sociologue dénaturalise l'apparente spontanéité et naturalité de ce genre d'images pour montrer le réseau complexe de travail auquel ces images sont soumises, ce qui apparaît comme une contradiction avec le caractère d'urgence et de nouveauté auquel ces photos sont liées.
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