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LA LETTRE VERNIMMEN.

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• ACTUALITE : Les groupes télécoms sont-ils assez
N° 42
endettés ?
Octobre 2005
• GRAPHIQUES DU MOIS : Quelques statistiques sur le
marché de la dette
Par Pascal Quiry
• RECHERCHE : L’horizon de temps des investisseurs
et Yann Le Fur
• QUESTION ET REPONSE : Comment choisir le sens d’une
fusion ?
***
ACTUALITE : Les groupes télécoms sont-ils assez endettés ?
Notre lecteur sera peut être surpris de nous voir poser et traiter cette
question qui laisse supposer qu’il puisse y avoir un optimum d’endettement.
Nous ne croyons pas qu’il existe une structure financière optimale (1), c’est-
à-dire un partage du financement de l’actif économique entre les capitaux
propres et l’endettement qui minimise le coût du capital. Cela ne veut pas
pour autant dire qu’il faille sombrer dans le nihilisme !
Il est certes irresponsable de faire le choix d’une structure financière en
fonction seulement du coût des sources de financement car on en oublie
alors leurs risques différents. Il n’en existe pas moins d’autres paramètres
qui nous font penser que certains groupes de télécoms pourraient, sans
difficulté être plus endettés qu’ils ne le sont aujourd’hui. Certes certains se
sont mordus les doigts à l’éclatement de la bulle Internet d’être trop
endettés (France Télécom, KPN, …), mais c’était il y a 3 / 4 ans et depuis
beaucoup de choses ont changé.
***
Le risque du secteur s’est réduit comme en témoigne l’évolution de la
volatilité de la valeur de l’actif économique des plus grand groupes
européens du secteur :
Volatilité de la valeur de l’actif économique
60%

Deutsche Vodafone
50% Telekom

O2
40%

Au sommaire du France
BT
prochain numéro : 30% KPN
Télécom

- ACTUALITE : Les titres 20%

super-subordonnés Telefónica
Telecom
10%
Italia

- TABLEAU DU MOIS :
Les décotes
0%
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005
d’introduction en
bourse (1)Pour plus détails sur les problèmes de structure financière, voir le chapitre 37 du
Vernimmen 2005.

- RECHERCHE : Des
stocks options pour
tous ?

- QUESTION & REPONSE


Les seconds liens LA LETTRE VERNIMMEN.NET : ET DU SITE
LE COMPLEMENT DE L’OUVRAGE WWW.VERNIMMEN.NET
LA LETTRE VERNIMMEN.NET
Le secteur des télécoms n’en est pas pour autant devenu un sous
N° 42 compartiment de celui des utilities (eau, gaz, électricité), considérées
comme présentant un risque faible, car il est toujours potentiellement
Octobre 2005
soumis à des mutations technologiques.

De la même façon, le taux de croissance du secteur s’est fortement ralenti


Par Pascal Quiry
avec l’arrivée à maturité de la téléphonie mobile (taux d’équipement
et Yann Le Fur atteint élevé), et avec la poursuite du déclin lent des recettes tirées du
téléphone fixe que le sympathique développement de l’ADSL n’arrive pas,
à lui tout seul, à contrecarrer.

Conséquence logique de cette évolution, les flux de trésorerie disponibles,


dans l’absolu et en pourcentage du chiffre d’affaires, n’ont jamais été aussi
élevés :

F lux de tré s o re rie dis po nible a p rè s fra is fina nc ie rs


Md € % CA
50 18%
44
43 44
45 44 16%
40
40
14%
35 32 12%
30
10%
25
8%
19
20 17
6%
15
4%
10 8
5 2%
5
(0 ) 0%
-

(5 ) 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005e 2006e 2007e -2 %

Sou rce: E xan e BN P Paribas En Md€ En % du C A


L es opérateu rs télécom s in clu s dan s l'éch an tillon s on t: Britis h Telecom , Vodafon e, O2 , Deu ts ch e Telekom , Telecom Italia, Fran ce
Télécom , Telefon ica et KPN .

d’autant que des programmes vigoureux de restructuration qui avaient été


mis en place en 2002 / 2003 ont produits leurs fruits au niveau des
marges :

45% 45% Marge d'EBE en pourcentage du chiffre d'affaires


42%

40%
37% 37% 37% 37%
34%
34% 33%

30%

20%
1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005e 2006e
Source: Exane BNP Paribas
Les opérateurs télécoms inclus dans l'échantillon sont: British Telecom, Vodafone, O2, Deutsche Telekom, Telecom Italia, France Télécom,
Telefonica et KPN.

Dans ces conditions, la capacité de ces groupes à supporter un


endettement plus élevé nous parait économiquement incontestable,
d’autant que certains partent de bas, que cela soit en fonction de
l’excédent brut d’exploitation ou des flux de trésorerie disponibles après
frais financiers :
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N° 42
Octobre 2005

Par Pascal Quiry


et Yann Le Fur

A titre d’illustration, si Vodafone utilisait intégralement son flux en


trésorerie disponible après impôts (oubliant alors les dividendes), il
pourrait avoir totalement éliminé son endettement fin 2007.
***
Un endettement supplémentaire peut provenir de rachat de concurrents
(notamment à l’international), de rachat d’actionnaires minoritaires dans
des filiales, voire d’une politique de distribution / rachat d’actions au-delà
des flux de trésorerie disponibles conduisant à réduire les capitaux
propres.
En effet, à quoi servent les capitaux propres ? A financer naturellement,
mais surtout à réduire le risque pour le prêteur et donc à le convaincre de
prêter, puisque les capitaux propres, du fait de leur rôle de dernier rang,
absorbent les risques les plus élevés. Quand le risque de l’actif se réduit,
le besoin en capitaux propres est moins pressant ; de la même façon que
lorsque la hauteur des vagues se réduit, la hauteur des digues peut être
abaissée.
Les capitaux propres qui n’existent pas en quantité infinie peuvent alors
être alloués à d’autres secteurs d’activité en pleine croissance et / ou plus
risqués qui en ont besoin : recherche pharmaceutique, exploration
pétrolière, ...
A ce titre, il ne serait pas choquant que les groupes qui ont bénéficié il y a
quelques années d’injections de capitaux propres importants (France
Télécom, KPN, …) les « rendent » partiellement ou totalement maintenant
que leur situation est non seulement rétablie, mais aussi prospère.
C’est ce qu’ont bien compris les fonds de private equity qui, après avoir
fait un LBO sur les télécoms irlandais (Eire Telecom), sont en train d’en
monter un sur l’opérateur danois (TDC), sans parler de Wind où
l’opérateur industriel Orascom essaie non sans difficulté de financer une
grande part de son acquisition par endettement, mais on est alors loin des
ratios d’endettement actuellement observés dans le secteur (avec une
dette de 5,5 fois l’EBE).
Du fait de leur taille, les grands groupes télécoms sont probablement,
pour quelques années encore, à l’abri de ce type de montage extrême.
Faut-il pour autant s’en réjouir ? Non car la dette, dès lors qu’elle ne
sature pas complètement la capacité de remboursement d’une entreprise,
a une double vertu :

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• celle de mettre une pression sympathique sur le management afin de
N° 42 l’inciter à dégager les flux de trésorerie nécessaires pour faire face au
Octobre 2005 remboursement de la dette. D’où une ardente obligation d’être rigoureux
sur les coûts et attentif aux investissements dont tous ne sont pas
nécessairement indispensables, surtout ceux envisagés avec le retour de
Par Pascal Quiry flux de trésorerie disponibles largement positifs ;
• celle d’offrir une incitation positive aux dirigeants grâce à l’effet de levier
et Yann Le Fur sur la valeur.
Bref, on retrouve les enseignements de la théorie de l’agence (2) qui
indique, de façon imagée, que les nageurs battraient plus de records dans
les piscines olympiques s’ils avaient aux trousses des crocodiles ….. !
Cette mise sous pression n’est pas inutile à un moment où la concurrence
dans le secteur semble s’affaiblir compte tenu des opérations de
concentration observées et puisque la pression des actionnaires est
relativement faible compte tenu des tailles atteintes par ces groupes.
***
Pour conclure, soulignons deux idées :
• soit les dirigeants de ces groupes considèrent qu’une partie de leurs
activités s’assimilent à une rente de situation (le mobile en France par
exemple) et dans ce cas leurs actionnaires ne peuvent que souhaiter qu’ils
se réendetter pour mieux résister à l’inévitable pression des régulateurs
sur leurs tarifs (sur le thème « je ne peux pas baisser substantiellement
mes prix car sinon je ne peux plus rembourser mes dettes »),
• soit ils craignent avant tout une brutale mutation technologique qui
remette en cause l’existence même du métier (la voix sur IP ?), comme
celle qui a frappé Polaroïd et Kodak. Dans ce cas, un niveau de dette plus
élevé n’est pas indiqué même si elle constitue un aiguillon certain et
même si son coût actuel est très bon : le dernier crédit syndiqué de
France Télécom prévoit une marge actuarielle (3) de 14,5 points de base
(0,145 %). En effet, l’expérience (et le bon sens) montrent qu’en cas de
crise, dans un secteur où les structures financières sont hétérogènes, ceux
qui ont les meilleures chances de survie sont ceux qui ont peu de dettes
(4). N’oublions pas en effet que, même à coût bas, les dettes doivent être

remboursées.
(2) Pour plus de détails sur la théorie de l’agence, voir le chapitre 35 du Vernimmen 2005.
(3) Pour plus détails voir le chapitre 27 du Vernimmen 2005.
(4) Pour plus détails voir le chapitre 16 du Vernimmen 2005.

***
Au sommaire de la Vernimmen.com Newsletter
d’octobre

• NEWS: The changing loans market, or have the banks gone quite mad?
• THIS MONTH'S GRAPHS: Some interesting statistics about the debt
market
• RESEARCH: Shareholder investment horizon
• Q&A: How does one go about choosing between dividends, share
buybacks and capital reductions?

Pour la consulter cliquez ici


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N° 42 ***
Octobre 2005 Séminaire d’évaluation financière

Jean Pierre Colle, l’expert indépendant bien connu, organise avec l’EFE un
Par Pascal Quiry séminaire d’évaluation les 24 et 25 novembre à Paris dont la conclusion
et Yann Le Fur sera assurée par Pascal Quiry.

Pour découvrir le programme et vous inscrire cliquez ici.

L’édition 2005 du Vernimmen sera offerte par l’EFE aux participants.

***

GRAPHIQUES DU MOIS : Quelques statistiques sur le


marché de la dette

1. Part de la dette bancaire détenue par les investisseurs


institutionnels

Lorsque Eurotunnel entreprit la première restructuration de sa dette au


début des années 1990, ses interlocuteurs étaient les grands groupes
bancaires : Barclays, BNP, Crédit Agricole ou HSBC.

Aujourd’hui, sa situation est totalement différente puisque la plus grande


partie de sa dette est détenue par des investisseurs éventuellement hedge
funds. Cette évolution n’est pas limitée aux crédits difficiles comme l’illustre
le graphique suivant. Aux Etats-Unis, c’est même devenu la norme :

70

60
50

40 Europe
30 Etats-Unis

20
10

0
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 *

2. Multiple moyen dette / EBE pour les LBO supérieurs à 50 M$

A fin août 2005, le volume des LBO avait déjà surpassé, à 110 Md$, celui
enregistré pour toute l’année 2004 (93 Md$) et était plus du double de celui
de 2003 (47 Md$).

On connaît l’abondance de la liquidité pour les fonds de LBO (1) et les


banques (2). 2005 pourrait donc voir le ratio dette financière et bancaire /
EBE se rapprocher du record de 1997 : 5,9 :

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Multiple Dette / EBE *
N° 42
7,0 5,9 5,8
Octobre 2005 6,0 5,0 4,7 4,9 5,2
5,0 4,0 3,7 3,8
4,0
3,0
Par Pascal Quiry 2,0
1,0
et Yann Le Fur 0,0
1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005
à ce jour *

(*) Hors secteurs media, telecoms, energie et services publics. Standard and Poor’s.

En juillet dernier, Sungard est parti à 7 fois l’EBE et Neiman Marcus à 6,5
fois il y a 15 jours.
(1) Pour plus de détails, voir la Lettre Vernimmen.net n° 13 d’octobre 2002.
(2) Pour plus de détails, voir la Lettre Vernimmen.net n° 30 de juillet 2004.

***

RECHERCHE : L’horizon de temps des investisseurs

Il n’est pas rare de nos jours de voir les dirigeants d’entreprise américains
et européens montrer du doigt les marchés financiers, accusés d’exercer
une pression court-termiste les conduisant à favoriser des investissements
dont les retours sont à court terme au détriment de projets davantage
créateurs de valeur, mais nécessitant un horizon d’investissement plus
long.
Cette critique n’est pas nouvelle. Dans les années 1980, déjà, elle avait été
relayée par les chercheurs en finance. Aujourd’hui, on pense, en lien direct
avec l’actualité, aux hedge funds dont l’horizon d’investissement est assez
souvent limité.
Qu’en est-il, dans la pratique, de ce lien entre l’horizon d’investissement
des actionnaires d’une entreprise et la politique d’investissement de cette
même entreprise ? S’il est difficile de répondre à cette question de manière
générale, trois chercheurs étudient l’impact de l’horizon d’investissement
des actionnaires sur les opérations de fusion / acquisition des entreprises
américaines (1).
D’un point de vue théorique, l’horizon d’investissement des actionnaires
institutionnels devrait influencer les actions des dirigeants à travers deux
canaux distincts :
• Premièrement, les dirigeants d’entreprise vont être plus surveillés par des
actionnaires institutionnels ayant un horizon d’investissement long. Leurs
incitations à exercer un contrôle sur les choix des dirigeants se trouve
renforcé par les bénéfices qu’ils peuvent en tirer sur une plus longue
période de détention dans leur portefeuille. Le pouvoir discrétionnaire des
dirigeants devrait donc se trouver amoindri par un long horizon
d’investissement, et les traditionnels problèmes d’agence (2) devraient être
atténués. Les dirigeants d’entreprises devraient donc être moins enclins à
tenter de retirer des bénéfices privés de leur fonction, notamment à travers
la réalisation d’acquisitions destructrices de valeur qui leur permettent de
se construire un « empire » ;

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• Deuxièmement, les actionnaires ayant un horizon d’investissement long
N° 42 disposent d’un pouvoir de négociation plus élevé : ils peuvent donc
s’approprier une plus grande part de la valeur économique créée par
Octobre 2005
l’acquéreur au moment de la négociation de la valeur de vente . En effet, à
moins d’obtenir un paiement élevé, ces actionnaires n’ont pas intérêt à
apporter leurs actions à l’opération, dans la mesure où ils peuvent
Par Pascal Quiry
bénéficier, à long terme, en conservant leurs titres, des améliorations de la
et Yann Le Fur performance suite à l’acquisition.
L’équipe de chercheurs se base sur des données américaines couvrant la
période 1980-1999. La classification des actionnaires institutionnels en
fonction de leur horizon d’investissement est définie par le niveau de
rotation de leur portefeuille d’actifs. Si un investisseur institutionnel
renouvelle une grande proportion de son portefeuille dans le temps, il sera
classé comme ayant un horizon d’investissement à court terme. Dans le cas
contraire, il sera classé comme un actionnaire de long terme. Par la suite,
les chercheurs déterminent le comportement des entreprises face aux
opérations de fusion / acquisition en tant qu’acquéreur ou cible, et ce en
fonction du type d’actionnariat qui domine.
Leurs résultats confirment les hypothèses théoriques présentées plus haut :
• Les entreprises cibles d’une opération d’acquisition ayant un actionnariat
institutionnel de court terme bénéficient d’une prime d’acquisition plus
faible que les entreprises ayant des actionnaires de long terme. Cette
observation est cohérente avec les deux interprétations présentées plus
haut. Les actionnaires de court terme ont un pouvoir de négociation plus
faible avec l’acquéreur que des actionnaires de long terme. D’autre part, les
dirigeants des entreprises cibles sont contrôlés moins étroitement par leurs
actionnaires de court terme. Ils ont donc davantage de liberté dans la
négociation avec l’acquéreur de leur entreprise. Leur intérêt personnel ne
sera pas nécessairement de faire bénéficier leurs actionnaires d’une prime
d’acquisition importante, mais de s’assurer qu’eux-même bénéficient de
bénéfices privés importants (par ex. golden parachute conséquent, position
avantageuse dans la nouvelle entité créée ou chez l’acquéreur). D’où
l’observation de primes d’acquisition relativement plus faibles ;
• les entreprises acquéreuses à actionnariat de court terme ont une plus
forte rentabilité négative anormale que les acquéreurs ayant un
actionnariat de long terme. Elles semblent donc se lancer dans des
opérations de fusion / acquisition qui sont perçues par les marchés
financiers comme davantage destructrices de valeur. Cette observation est
cohérente avec l’hypothèse d’un contrôle moins important des choix des
dirigeants par leur actionnariat de court terme, d’où, encore une fois, une
plus grande marge de manœuvre managériale, et des choix
d’investissement contraires aux intérêts des actionnaires ;
• les actionnaires de court terme augmentent la probabilité de réalisation
d’une opération de fusion / acquisition. Les entreprises ayant un
actionnariat de court terme ont une plus forte chance d’être une cible et un
acquéreur ;
• les entreprises à actionnariat de court terme ayant effectué une
acquisition réalisent une sous-performance de long terme plus importante
que les entreprises à actionnariat de long terme. Encore une fois, cette
observation est cohérente avec l’hypothèse que les actionnaires de court
terme exercent un contrôle moins strict de leurs dirigeants, et qu’ils les
laissent prendre des décisions plus défavorables aux actionnaires que
lorsque des actionnaires de long terme exercent un meilleur contrôle sur
leurs dirigeants, pression qui bénéficie à l’ensemble des actionnaires.
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La structure actionnariale semble jouer un rôle important dans le cadre des
N° 42 opérations de fusion-acquisition. Un actionnariat de long-terme discipline
les dirigeants d’entreprises cibles dans la négociation de la cession, mais
Octobre 2005
aussi les dirigeants d’entreprises acquéreuses dans le choix de leur cibles.
Dans tous les cas, les actionnaires ayant un horizon d’investissement de
long terme semblent créer de la valeur actionnariale dans le cadre des
Par Pascal Quiry
opérations de fusion / acquisition.
et Yann Le Fur
Si l’on est prêt à accepter que ce qui est visible dans le cadre restrictif des
fusion / acquisition s’applique à un cadre plus large, on peut comprendre
l’importance accordé par les praticiens de la finance au choix de la structure
actionnariale d’une entreprise lors de son introduction en bourse (3).
Constituer un actionnariat de long terme permettrait d’augmenter la valeur
de l’entreprise en limitant les problèmes d’agence.

(1) José-Miguel Gaspar, Massimo Massa, Pedro Matos, Avril 2005, “Shareholder Investment
Horizons and Market for Corporate Control”, Journal of Financial Economics, page 135 à 165.
(2) Pour plus de détails voir le chapitre 32 du Vernimmen 2005.
(3) Pour plus de détails voir le chapitre 31 du Vernimmen 2005.

***

QUESTION ET REPONSE :
Comment choisir le sens d’une fusion ?
Plusieurs facteurs sont à prendre en compte :
• Jusqu’à peu, le paramètre fiscal était prédominant dans le choix du sens
d’une fusion. En effet, la société absorbée perdrait ses reports fiscaux
déficitaires alors que la société absorbante les gardaient.
Depuis quelques semestres, l’administration fiscale a assoupli sa position. Il
est dorénavant possible dans une fusion de garder le bénéfice des reports
fiscaux déficitaires de la société absorbée à condition que la fusion ne soit
pas justifiée uniquement par des raisons fiscales.
Dès lors, l’argument fiscal a perdu beaucoup de sa valeur pour expliquer le
sens des fusions.
• Il existe un argument lié à la cotation car dans une fusion avec une
société non cotée, c’est plutôt la société cotée qui sera l’absorbante afin de
simplifier le processus administratif et d’éviter un échange d’actions pour
les milliers ou les dizaines de milliers, voire les centaines de milliers
d’actionnaires de la société cotée. C’est ainsi que L’Oréal, groupe coté, a
absorbé en avril 2004 sa maison mère à 53 % Gesparal qui était non cotée,
et non l’inverse.
• Il y a aussi des raisons psychologiques car parfois, certains souhaitent
garder le nom ou la structure d’une entité qui existe depuis longtemps et à
laquelle ils sont sentimentalement attachés. C’est donc cette structure qui
est choisie pour être la société absorbante.
Par ailleurs, certains dirigeants ont le sentiment qu’ils seront mieux placés
dans le nouvel organigramme si leur société est l’absorbante plutôt que
l’absorbée. D’autres voudront symboliquement marquer où se trouve le
pouvoir.
• Il peut y avoir aussi des considérations comptables. En France, en
comptes sociaux, les comptes de la société absorbée sont réévalués quand
à l’issue de la fusion, ce ne sont pas ses actionnaires qui prennent le
contrôle de la nouvelle entité. Sinon l’opération est comptabilisée en valeur
comptable (1).
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N° 42 • Il y a naturellement des considérations juridiques quand certains contrats


passés par la société absorbante prévoient une clause de changement de
Octobre 2005 contrôle, par exemple dans le secteur des concessions ou pour des contrats
de prêts qui peuvent alors devenir immédiatement exigibles. C’est ainsi que
TF1 a pu prendre le contrôle intégral d’Eurosport après l’absorption de son
Par Pascal Quiry partenaire Canal + par Vivendi Universal.
et Yann Le Fur • Enfin, certains sont attachés au fétichisme du BPA et préfèrent que la
société absorbante soit celle avec le PER le plus élevé afin d’afficher après
l’opération une relution du BPA. Nos lecteurs fidèles savent toute la
circonspection avec laquelle nous traitons ce critère (2).
(1) Pour plus de détails, voir la Lettre Vernimment.net n°32 d’octobre 2004.
(2) Pour plus de détails, voir le chapitre 33 du Vernimmen 2005.

Au sommaire du
prochain numéro :

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