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Master : Droit Privé Comparé

Espace Afrique Francophone et Commonwealth

Module :
Moyens alternatifs des règlements des litiges en droit comparé
Semestre 3

Sous la direction du Professeur :


Pr. Bouchra Jdaini

Préparé par :

Soukaina BOUALIOUA
Sana BENALI
Boubaker El MOUSSAOUI

Année universitaire : 2023 – 2024


SOMMAIRE

INTRODUCTION ------------------------------------------------------------------------------ 1

PARTIE I : La spécificité de l’arbitrage dans l’Afrique subsaharienne ----------- 3

Chapitre 1 : Le fondement de l’arbitrage dans l’Afrique subsaharienne -------- 5

Chapitre 2 : Le coté procédural --------------------------------------------------------- 12

PARTIE II : la spécificité de la médiation dans l’Afrique subsaharienne --------- 15

Chapitre 1. La médiation dans l’Afrique subsaharienne --------------------------- 15

Chapitre 2 : la médiation dans l’Afrique subsaharienne (l’expérience de


l’OHADA ) ----------------------------------------------------------------------------------- 19

CONCLUSION --------------------------------------------------------------------------------- 24

BIBLIOGRAPHIE ---------------------------------------------------------------------------- 25

TABLE DES MATIERES ------------------------------------------------------------------- 27


INTRODUCTION

Partout dans le monde, les praticiens et usagers du droit s’interrogent sur le rôle
de la justice et la façon dont elle est rendue ; l’Afrique subsaharienne n’échappe pas à
un Constat largement répandu, déplorant la longueur des procédures, leur coût, l’aléa
judiciaire, outre les problèmes liés à l’intelligibilité de la justice et son efficacité, voire
parfois son éloignement des justiciables.

C’est la raison pour laquelle les législateurs font de plus en plus le choix de
développer le recours aux modes amiables de règlement des litiges , d’une part, pallier
les vicissitudes de l’institution judiciaire au sens large et, d’autre part, envisager le
conflit autrement en permettant aux parties de le résoudre elles-mêmes en étant les
artisanes d’une solution voulue et librement pensée (à l’inverse d’une décision
imposée par un tiers sous la forme d’un jugement).

L’arbitrage, mécanisme de justice privée par lequel les litiges sont tranchés par
un tiers, nommé arbitre, choisi par les parties, devient le mode par excellence de
règlement des différends relatifs aux transactions dans le commerce international. Son
développement s’explique essentiellement par la volonté des opérateurs économiques
internationaux de se soustraire aux contraintes de la justice de droit commun. La
volonté de recourir à l’arbitrage est un moyen pour les opérateurs économiques de se
rassurer par rapport aux risques qu’ils prennent dans leurs activités.

Nul pays n’échappe à ce phénomène, ce qu’illustre l’adoption, sous l’égide de


l’Organisation des Nations Unies, de la Convention dite de Singapour sur les accords
de règlement internationaux issus de la médiation, laquelle est entrée en vigueur le 12
septembre 2020 et compte quelques 55 Etats signataires à l’heure actuelle – parmi
lesquels 12 pays africains : le Bénin, l’Eswatini (Swaziland), le Gabon, le Ghana, la
Guinée-Bissau, le Nigéria, l’Ouganda, la République du Congo, la République
Démocratique du Congo, le Rwanda, la Sierra Leone et le Tchad.

Le règlement des litiges commerciaux internationaux est devenu un enjeu


capital de croissance. Depuis plusieurs décennies, certaines places financières

1
internationales comme Paris, Londres, Hongkong ou Washington se livrent une
concurrence rude pour devenir le lieu où les opérateurs du commerce international
viennent mettre un terme à leurs différends.

Dans ce contexte, le continent africain tente de s’affirmer pour devenir une


place d’arbitrage reconnue. À cet effet, l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique
du droit des affaires (OHADA) renforce son droit de l’arbitrage et la procédure
applicable à sa Cour commune de justice et d’arbitrage.

Depuis 1993, 17 pays d’Afrique subsaharienne et centrale s’y sont regroupés.


Pour rationaliser l’environnement juridique des entreprises, cette union économique
prévoit un corps de lois d’application directe, sous la forme d’actes uniformes, qu’elle
fait appliquer par sa cour d’arbitrage.

Les centres d’arbitrage plus anciens, comme la Chambre de commerce


internationale (ICC) créée à Paris dans les années 1920, sont pourtant déjà populaires
auprès des pays africains.

2
PARTIE I : La spécificité de l’arbitrage dans l’Afrique
subsaharienne

L’arbitrage a été apparu premièrement suite à l'insécurité juridique et l’absence


d’un cadre légal solide et unifié qu’existe durant l’antiquité et la moyenne Age ainsi la
reconnaissance de la personnalité juridique de l’individu, cela a contribué à la
construction d’un cadre légal qui va protéger les commerçants et les investisseurs
pour faciliter la résolution du leur litige.

Notamment le cas de l’Afrique subsaharien qui se caractérise aussi par


L’insécurité juridiques s’explique essentiellement par la vétusté des textes juridiques
en vigueur1. La plupart d’entre eux datent en effet de l’époque de la colonisation et ne
correspondent manifestement plus à la situation économique et aux réalités des
marchés internationaux actuels. Très peu de réformes ont été entreprises jusqu’alors,
chaque Etat légiférant sans tenir compte de la législation des Etats de ses sous-régions,
l’Afrique subsaharienne qui compte de 48 pays , chacun ayant sa culture, un héritage
Juridique, une histoire et des situations économiques différentes, alors l’Afrique
n’échappe pas à un constat largement répandu, déplorant la longueur des procédures,
leur coût, l’aléa judiciaire, outre les problèmes liés à l’intelligibilité de la justice et son
efficacité, voire parfois son éloignement des justiciables ,C’est la raison pour laquelle
les législateurs font de plus en plus le choix de développer le recours aux modes
amiables de règlement des litiges et d’encourager les investissements étrangers directs
et réaliser une ’intégration économique et juridique sur le plan continental, Ce contexte
d’insécurité juridique, judiciaire et économique a contraint les chefs d’Etat et de
gouvernement à se réunir à Ouagadougou et à Paris. La réunion de Paris confiait une
«mission de haut niveau» à Monsieur Kéba M’BAYE. L’objectif de cette mission
consistait à diagnostiquer la rareté des investissements dans la zone franc. Ainsi, les
résultats de cette mission faisaient ressortir que « l’origine du mal n’était rien d’autre
que l’insécurité juridique et judicaire qui régnait dans la zone et qui était due au
délabrement du tissu juridique et à son application imprévisible », puisque Les

1
M. KIRSCH, « Historique de l’Ohada », Revu. Penant n° spécial Ohada n° 827 mai - août 1998, p. 129.

3
solutions traditionnelles aux conflits en Afrique subsaharienne , depuis des siècles
avant la civilisation arabo-islamique et plus récemment malgré les apports de la
civilisation occidentale, ont toujours reposé sur les valeurs et règles endogènes de la
tradition et de la culture africaines.

L’arbitrage est un mode de règlement des litiges faisant intervenir un tiers


choisi par les parties, l’arbitre, qui tranche le conflit en amiable compositeur. Il statue
en équité. L’arbitre rend une décision juridictionnelle, qui s’impose par conséquent
aux parties. Le recours à l’arbitrage peut se faire de deux manières. Il peut être
organisé antérieurement à la naissance de tout litige2.

En effet, les parties cocontractantes peuvent insérer dans le contrat une clause
compromissoire par laquelle elles s’engagent à soumettre à l’arbitrage les litiges qui
pourraient naître relativement à ce contrat. Le recours à l’arbitrage peut également se
faire postérieurement à la naissance d’un litige par le biais d’un compromis. Le
compromis d’arbitrage quant à lui est la convention par laquelle les parties à un litige
né soumettent celui-ci à l’arbitrage plutôt qu’au tribunal.

2
Komi Tsakadi – MARC et harmonisation du droit OHADA des contrat, Rev. dr. unif. 2008,p512

4
Chapitre 1 : Le fondement de l’arbitrage dans l’Afrique subsaharienne

A. Les mobilités politiques

Avant la signature du Traite de Port Lou is d it Traite O HADA, le 17 octobre


1993, les opérateurs économiques étaient unanimes pour affirmer que l'insécurité
judiciaire résultant de la faillite des systèmes judiciaires des pays de l'espace O HADA
constituait l'une des causes du sous-développement des dits pays. II était donc
nécessaire de reformer ces systèmes judiciaires, afin de les rendre aptes à contribuer au
développement de l 'Afrique par la production des décisions sécurisantes pour les
investisseurs tant locaux qu’internationaux. Or, comme la reforme efficace des
systèmes judiciaires risquait de durer pendant un certain temps , les Etats africains en
général et les promoteurs du Traite OHADA en particulier ont vu dans l’arbitrage une
des garanties juridiques susceptibles de sécuriser les investissements et d'inciter, ce
faisant, les investisseurs à s'intéresser à l'espace OHADA, II apparait que l’arbitrage
OHADA a été conque , entre autre causes, pour servir d'alternative a la justice
étatique, qui est en panne dans les pays membres de l 'O HADA et dont la reforme
risque de durer pendant longtemps, Le législateur OHADA était animé par la double
volonté de délocaliser les arbitrages ( 1) et de promouvoir des modes complémentaires
de règlement des conflits (2)3.

1. La volonté de délocaliser les arbitrages

La plupart des pays de l’espace O HADA disposent d'un system e juridique de


la famille romano-germanique inspire du droit française. Suivant l'exemple de la
France, ou l’arbitrage a longtemps et considère avec méfiance, les pays de l'espace
OHADA, y compris les quelques-uns qui disposaient d'une législation sur l'arbitrage4,
ont également eu une attitude négative vis-à-vis de l'arbitrage, tout au moins en droit

3
Rene BOURDIN « L'OHADA: Information à ce jour », Document CCI n° 420/405 du 30 mars 2 000.
Magistrat fran9ais ayant servi au Cameroun et qui fut pendant plus de 2 0 ans le membre fran9ais de la
Cour Internationale d' Arbitrage de la CCI, Monsieur BOURDIN avait été étroitement associe à la
conception de l'OHADA.
4
II s'agit du Cameroun, du Congo, du G abon, du Senegal et du Tchad. Voir Roland AMOUSSOU G
UENOU «Le droit et la pratique de ]'arbitrage commercial international en Afrique francophone» thèse
Paris II 1995, p.47.

5
interne. En revanche, ces Etats se trouvaient obliges d’admettre des conventions
d'arbitrage en matière internationale, car l'acceptation desdites conventions était la
condition de la signature des contrats d'investissement, au sujet desquels on a affirmé
qu'ils étaient, en réalité, des contrats d'adhésion dont la signature était essentielle à la
survie de ces pays. Or, bien que l'ayant tolérée en matière internationale, les États
membres, De l'OHADA, comme beaucoup d'autres pays d'Afrique, continuaient de
percevoir l'arbitrage comme « une institution judiciaire étrangère qui leur est
«imposée», d'autant que cette justice est rendue à l'étranger, c'est-à-dire Hors
d'Afrique, et par des étrangers.

En effet, la plupart des procédures d'arbitrage impliquent des parties. Les


affaires africaines se déroulaient alors en Europe ou en Amérique et quasiment sans la
participation des juristes africains qui ne sont que très rarement, voire pas Du tout,
elles ne conviennent à ces arbitrages ni comme arbitres, ni comme conseils. Alors qu'il
a réunion d'arbitres venant d'horizons divers, de cultures et de systèmes juridiques
différents est d'ailleurs l'un des traits les plus marquants de l'arbitrage international et
contribue d'évidente manière à l'élaboration d'un droit véritablement international de
l’arbitrage.

2. La volonté de promouvoir des modes alternatifs de règlement des conflits

À côté de l'arbitrage, le législateur OHADA va encore innover en faisant de la


conciliation un autre mode alternatif de règlement des litiges À titre Par exemple, on
peut mentionner le préalable de conciliation obligatoire institué. Dans le cadre des
procédures simplifiées de recouvrement des créances par L'acte uniforme portant
organisation des procédures simplifiées de Recouvrement et des voies d'exécution

En effet, ledit texte prévoit que lorsque l'ordonnance d'injonction de payer est
signifiée au débiteur par le créancier, ce débiteur peut former opposition dans les
quinze jours de la signification. L'article 12 de l'acte uniforme susmentionné stipule
que « la juridiction Saisie sur opposition procède à une tentative de conciliation. Si

6
celle-ci À bout, le Président dresse un procès-verbal de conciliation signé par les
Parties, dont une expédition est revêtue de la formule « exécutoire » 5.

B. Les mobilités économiques

À cet égard, le traite de Port-Louis, dit traite OHADA, se proclame d'ans son
préambule la détermination des Etats parties « ... à établir un courant de confiance en
faveur des économies de leur pays en vue de créer un nouveau pôle de développement
en Afrique », par « la mise en place d'un Droit des affaires harmonisé, simple,
moderne… qui soit appliqué avec Diligence, dans les conditions propres à garantir la
sécurité juridique des activités économiques, afin de favoriser l'essor de celles-ci et
d'encourager l'investissement » et par « l'Encouragement au recours à l'arbitrage pour
le règlement des différends d'ordre contractuel » .I n'apparaît que l'OHADA, et par
voie de conséquence, l’arbitrage OHADA a été créée, entre autres, pour promouvoir le
développement économique à travers la sécurisation des investissements dans ses
États-parties.

C. Les mobilités juridiques

L'acte uniforme relatif au droit de l'arbitrage (L'AUA). Cet instrument


règlemente essentiellement l’arbitrage ad hoc, même à s'il fait référence l'arbitrage
institutionnel. En effet, traitant de l’arbitrage De droit commun dans l'espace OHADA,
par opposition l’arbitrage spécifique de la CCJA, l'AUA, ci-après l’AUA, est
largement calque sur le droit français de l’arbitrage et en adopte la philosophie libéral6.
II fixe les règles de l’arbitrage ad hoc consacrant la primauté de la volonté d e s parties
dans la constitution du tribunal arbitral et dans l'organisation de la procédure arbitrale.
La plupart de ses dispositions n'ont ainsi qu'un caractère supplétif.

5
Philippe LEBOULANG ER « L'arbitrage international Nord-Sud» , Etudes offertes a Pierre BELLET
Litec, 1991, n°2 l ; adde Eric TEYRIER et F AROUK YOLA «Un nouveau centre d'arbitrage en Afrique
SubSaharienne »Fiches Techniques, ACCOMEX - Janvier-février 2001, n°37.
6
Philippe LEBOULANGER « L'arbitrage et l'harmonisation du droit des affaires en Afrique » rev. arb.
1999, n° 3, p. 541 et s.

7
Le cadre juridique de ce MARC comprend :

 l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage Adopté à Ouagadougou


(BURKINA FASO) le 11/03/1999 et publié au Journal Officiel de l'Ohada n°
8 du 15/05/1999: l’élaboration et l’adoption de règles communes, simples,
modernes(…) et surtout de promouvoir, l’arbitrage comme un mode de
règlement des différends contractuels ». Il faut souligner que, parmi les actes
uniformes relatifs au droit des affaires, seul l’arbitrage est cité dans le
Préambule du Traité. Cette place de l’arbitrage, dans la hiérarchie des normes
communautaires montre fort bien son importance dans le règlement des
différends contractuels.

 le règlement d’arbitrage de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage 2 qui


interprète et applique le droit uniforme

 les Décision n° 004/99/CCJA du 3 février 1999 relative aux frais d’arbitrage et


Décision n° 004/99/CM du 12 mars 1999 portant approbation de la décision n°
004/99/CCJA relative aux frais d’arbitrage,

 le préambule du Traité du 17 octobre 1993 relatif à l’harmonisation des droits


en Afrique qui affirme dans son article 1er le désir des pays signataires de
promouvoir l’arbitrage comme instrument de règlement des différends
contractuels. Il faut aussi ajouter l’article 278 de l’Acte uniforme relatif au
droit commercial général.

La législation OHADA qui s’applique à 17 pays, s’est aussi inspirée d’un


certain nombre de principes de la CNUDCI et d’autres principes reconnus comme
modernes dans l’arbitrage international, pour règlementer l’arbitrage CCJA et
l’arbitrage de droit commun fondé sur l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage.
On retiendra que l’arbitrage OHADA ne fait pas de distinction entre l’arbitrage interne
et international et s’applique autant aux arbitrages civils, qu’aux arbitrages
commerciaux et administratifs. On déduit de ces observations que pas moins de 35
États africains ont une législation sur l’arbitrage, fondée ou inspirée de la loi-type
CNUDCI.

8
 L’Angola et le Mozambique ont aussi adopté une législation en matière
D’arbitrage qui est considérée comme moderne.7

 Je parlerai de la Convention de New-York de 1958 plus loin, mais on peut dire


que déjà 38 États africains sur 54 en sont signataires.
 En matière d’arbitrage d’investissement, une source d’harmonisation est la
Ratification de la Convention CIRDI qui est en vigueur dans 44 États africains.
La plupart D’entre eux l’ont ratifié au cours des années 1960-1970. En Afrique
du Nord par Exemple, l’Egypte, la Tunisie, le Maroc et l’Algérie sont
signataires de la Convention. Les Dernières ratifications sont celles du Soudan
du Sud en 2012 et de Sao Tomé et Principe
 En 2013. En revanche, l’Ethiopie, la Guinée-Bissau et la Namibie ont signé la
Convention Sans qu’elle n’ait été jusqu’à ce jour ratifiée

Les signataires du Traite OHADA ont, dès le préambule de celui-ci, proclame


leur désir de « promouvoir !'Arbitrage comme instrument de règlement des différends
contractuels). C'est ainsi que l 'Article 1 er du dit Traite énonce clairement, qu’il a pour
objet, entre autres, l’Encouragement au recours a !'Arbitrage pour le règlement des
différends contractuels » et que ! ' Article 2 du même Traite mentionne !'Arbitrage
parmi les disciplines juridiques qui entrent dans le domaine du droit des affaires.
Malgré l’importance qu’il accord e ainsi à l’arbitrage, le Traité OHADA ne précise pas
le sens de cette notion, que la doctrine définit tantôt comme le jugement d'une
contestation par des particuliers choisis par d'autres particuliers au moyen d'une
convention, tantôt comme me une convention par laquelle les parties soumettent leur
différends au jugement des particuliers qu’elles choisissent et tantôt encore comme
une institution par laquelle une Tiers règle le différend q u i oppose deux ou plusieurs
parties en exerçant la mission juridictionnelle qui lui a été confiée par celles-ci.

7
Cf. A. FENEON, « Présentation », in Penant, Revue trimestrielle de droit africain, janv.-mars 2016,
n°894, pp.7-9 ; PH. FOUCHARD, « Le double régime de l’arbitrage OHADA », in International Law
Forum, 2001, p.180.
2Préambule du Traité de L’Ohada, Journal officiel de l’OHADA, 1er novembre 1997, n°4, pp.1-3.
3L’acte uniforme sur l’arbitrage et le Règlement d’arbitrage ont été adoptés à Ouagadougou, capitale du
Burkina Faso.

9
L'expression « arbitrage O HADA » renvoie au système d'arbitrage émis en place par
le dispositif OHADA à travers le Traite OHADA et les instruments OHADA relatifs à
l'arbitrage. il doit être précise, a cet égard, que le Conseil des Ministres de l 'OHADA a
adopté à Ouagadougou (Burkina Faso), en date du 11 mars 1999, l'acte uniforme
relatif au droit de l'arbitrage (ci-après AUA) et le Règlement d'arbitrage de la Cour
Commune de Justice et d'Arbitrage (ci-après Règlement CCJA), qui fixe dans le détail
les règles de l’arbitrage CCJA dont les g rands traits sont traces par le titre IV du
Traite OHADA. L'arbitrage OHADA a donné un support dualiste, puisqu'il est régi à
la fois par l'AUA et par le Règlement de la CCJA. De toutes les réalisations de
l’Organisation pour l’Harmonisation en Afrique du Droit des affaires(OHADA), celles
qui portent sur l’arbitrage sont à coup sûr les plus originales et les plus audacieuses. »1
Cette phrase illustre, si besoin en est, l’importance de l’arbitrage dans la création de
l’Ohada. Le Préambule du Traité de Port Louis du 17 octobre 1993 constitutif de
l’organisation communautaire dispose « les Etats parties sont désireux de promouvoir
l’arbitrage comme instrument de règlement des différends contractuels». Cet objectif
annoncé par le Préambule a conduit à l’adoption le 11 mars 1999 à Ouagadougou,
d’un « Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage et d’un Règlement d’arbitrage de la
Cour commune de Justice et d’Arbitrage ». Il faut souligner qu’avant l’entrée en
vigueur des règles sur l’arbitrage, très peu d’Etats disposaient de lois qui régissaient
l’arbitrage. En l’occurrence, les Etats qui n’en étaient pas dotés étaient : le Bénin, le
Burkina Faso, le Cameroun, la République Centrafricaine, le Mali la Côte d’Ivoire.
Ainsi, confrontée à ce vide juridique, la Cour suprême de la Côte d’Ivoire avait précisé
qu’ « en l’absence de règlementation, les juridictions pouvaient recourir, soit aux
principes généraux du droit, soit aux dispositions du Livre III du Code de procédure
civile français à titre de raison écrite ». Un deuxième groupe d’Etats composé du
Congo, du Gabon, du Sénégal et du Togo disposait de lois désuètes, éparpillées et
incomplètes sur l’arbitrage. Cette situation a créé une insécurité juridique dans
l’environnement des affaires, des pays d’Afrique subsaharienne francophone. Ainsi,
les investisseurs étrangers remarquaient : « nous ne voulons pas investir dans cette
zone parce que nous ne connaissons pas le droit qui va régir notre patrimoine (…), le
même droit n’est pas applicable d’un pays à un autre, d’un tribunal à un autre, l’on ne

10
tient pas compte de la loi, de la jurisprudence ». Le 17 octobre 1993, à Port-Louis (Ile
Maurice), le Traité18 de l’OHADA a été adopté, par quatorze Etats africains, il fut
révisé le 17 octobre 2008 à Québec. A ce jour, l’organisation compte 17 Etats africains
majoritairement, francophones. L’OHADA s’est fixée comme objectifs, d’harmoniser,
le droit des affaires des pays membres, par plus de sièges en Afrique, plus d’arbitres et
de conseils africains.

Presque tous les pays d’Afrique ont une institution d’arbitrage, avec pour
certains d’entre eux, plusieurs centres. Selon une liste communiquée lors de la
conférence SOAS à Lagos en 2016, il n’y aurait pas moins de 71 centres d’arbitrage en
Afrique.. Des centres avec des ambitions régionales et internationales sont également
nés et fonctionnent avec pour certains, une réputation déjà établie et pour d’autres, une
réputation en construction, mais prometteuse. On citera8 :

 le RCICAL, régional centre for international commercial arbitration,


situé à Lagos, qui travaille en coopération avec la lcai (london court of
international arbitration).
 l’AFSA, arbitration foundation of southern africa qui a atteint un bon
niveau de réputation. Afsa participe à une initiative qui va impacter le
paysage de l’arbitrage dans le futur avec l’ouverture à johannesburg
d’une antenne du cajac, le china africa joint arbitration centre. Ce centre
est dédié aux litiges commerciaux entre la chine, premier partenaire
commercial de l’afrique, et les parties africaines.
 le KIAC, kigali international arbitration centre, qui connait un beau
succès depuis sa création tant pour le règlement des litiges internes que
des litiges régionaux ou internationaux.
 le NCIA, nairobi centre for international arbitration, établi en 2013 et qui
a aussi participé à l’installation d’un cajac à nairobi.
 le MIAC, mauritius arbitration centre établi en 2011, travaille en
coopération avec la cour permanente d’arbitrage qui a établi son premier
bureau en dehors de la haye à l’ile maurice. Le crcica, cairo regional

8
School Oriental Afrique Studies, à Lagos en 2016

11
centre for international arbitration, qui est une organisation internationale
indépendante. Il a une réputation établie dans le monde arabe et
intensifie son activité en Afrique. La CCJA, cour commune de justice et
d’arbitrage basée à Abidjan, dont le développement n’est pas à la hauteur
des espérances mais dont le nombre d’affaires est en augmentation selon
les déclarations de son secrétaire général.

Chapitre 2 : Le coté procédural

Mis en application depuis le 1er janvier 1998, après la signature du traité Ohada
par 16 pays, le droit des affaires en Afrique se veut à la fois unique et transnational. Il
est appréhendé comme un moyen d'accélérer le développement du secteur privé et des
investissements étrangers dans une transparence complète. En outre, à travers la Cour
commune de justice et d'arbitrage (CCJA) dont le siège est à Abidjan (Côte-d'Ivoire),
l'Ohada offre au justiciable deux types de procédure contentieuse.9

La première consiste en un recours ultime qui peut être introduit auprès de la


seule CCJA dans le prolongement d'un recours normal devant une juridiction
nationale. En effet, les Cours de cassation nationales ne peuvent plus connaître des
litiges relatifs au droit des affaires objet de l'Ohada. Ainsi, en cas de survenance d'un
litige, les parties peuvent saisir les juridictions nationales en première instance et en
appel, lesquelles juridictions statueront en appliquant les textes Ohada. Seule la CCJA
peut confirmer ou censurer l'arrêt d'appel. Dans cette dernière hypothèse, elle jugera en
même temps au fond.

Le second type de procédure instaurée par l'Ohada est l'arbitrage consacré par
un acte uniforme adopté par le législateur Ohada et entré en vigueur le 11 juin dernier.
Peuvent désormais être soumis à cette procédure les litiges contractuels opposant des
parties établies dans un Etat Ohada ou encore des litiges relatifs à un contrat exécuté
ou à exécuter sur tout ou partie du territoire de l'un des Etats signataire du traité.

9
DANY HOUNGBEDJI RAUCH, Publié le 8 sept. 1999 à 1:01

12
Il suffira à cet effet d'insérer dans les contrats, au moment de leur rédaction, une
clause compromissoire prévoyant que tous les litiges seront soumis à la procédure de
l'arbitrage. A défaut, lorsque le litige sera né, un compromis d'arbitrage pourra être
rédigé par les parties. Cela permet à des parties séduites par les attraits de la CCJA,
mais qui n'auraient pas introduit de clause compromissoire dans leur contrat, de la
saisir dès à présent. En tout état de cause, la convention d'arbitrage doit être établie par
écrit. Il convient de noter qu'aussi bien les personnes physiques ou morales de droit
privé que les personnes morales de droit public peuvent avoir recours à cette
procédure. L'Etat ainsi que les autres collectivités publiques peuvent donc être parties
à un arbitrage. Cette disposition est d'autant plus remarquable que, de nos jours, ces
personnes morales sont amenées à conclure de plus en plus souvent des contrats
commerciaux.

L'arbitre, qui ne peut être qu'une personne physique, est nommé par les parties.
L'acte uniforme prévoit que le tribunal arbitral doit être composé d'un nombre impair
d'arbitres. Ce qui permet de rendre une sentence à la majorité des voix. Ses
délibérations sont secrètes. La sentence qui marque la fin de l'instance arbitrale a
l'autorité de la chose jugée dès son prononcé et n'est susceptible ni d'opposition, ni
d'appel, ni de pourvoi en cassation. En revanche, elle peut être annulée ou faire l'objet
d'un recours en révision. Elle est en outre susceptible d'exécution forcée dans l'Etat où
elle doit être exécutée en vertu d'un jugement d'exequatur rendu par le juge compétent
de cet Etat. Autrement dit, une décision d'exequatur rendue par le juge nigérien ne
saurait conférer un caractère exécutoire à la sentence que sur le territoire du Niger.
Pour que la sentence soit exécutée, par exemple au Mali, la décision d'exequatur devra
être rendue par un juge malien, alors même que ces deux Etats sont membres de
l'Ohada.

Les honoraires de l'arbitre et les frais administratifs de la Cour sont fixés


conformément à un barème établi par la CCJA et publié au « Journal officiel » de
l'Ohada. A titre d'exemple, pour un litige dont le montant est compris entre 5 millions
de francs et 7,5 millions (762.245 euros et 1,143 million d'euros), les frais

13
administratifs s'élèvent à 0,4 % et les honoraires de l'arbitre sont inclus dans une
fourchette allant de 0,5 % à 2 %.

L'adoption puis l'entrée en vigueur de ce droit africain de l'arbitrage constitue


une étape supplémentaire dans l'objectif de sécurisation de l'investisseur qui dispose
désormais d'un système unifié, cohérent sur toute la région, et simple d'accès. Il suffit
en effet que le litige à régler ait un lien avec l'un des Etats membres (lieu d'exécution
du contrat ou domicile d'une des parties).

Maîtrise du litige La saisine directe de la CCJA a pour avantage de raccourcir


les délais de procédure, tout en permettant aux parties de garder la maîtrise de leur
litige. L'originalité de cette institution qu'est la CCJA tient au fait que les décisions
qu'elle sera amenée à rendre tiendront compte du contexte spécifiquement africain,
tout en restant dans le cadre de l'arbitrage international. La CCJA qui a déjà rendu un
avis à la demande du Gabon, connaît actuellement 4 litiges : 2 contentieux venant du
Tchad et de la Côte d'Ivoire, 1 arbitrage sur un conflit existant au Sénégal et 1 avis
demandé par le Mali. Ses décisions seront publiques et publiées dans un recueil.

La multiplication des clauses compromissoires en faveur de la CCJA, en


alimentant le rôle de la nouvelle juridiction, devrait permettre, à terme, d'établir une
véritable jurisprudence panafricaine.

14
PARTIE II : la spécificité de la médiation dans l’Afrique
subsaharienne

La médiation est un mode amiable de règlement extrajudiciaire des conflits.


Elle consiste à trouver un accord amiable entre les parties grâce à l’intervention d’un
tiers : le médiateur. À travers des entretiens confidentiels, la médiation permet de
restaurer la communication entre les personnes confrontées à un conflit, en établissant,
en toute transparence avec les parties, une relation de confiance. Le rôle du médiateur
est d’encadrer le processus de médiation et d’assurer le dialogue et l’écoute entre les
parties, laissant à ces dernières une certaine liberté pour former un accord. Il ne donne
pas son avis. Le médiateur doit respecter les principes de déontologie de la médiation :

 La neutralité : il est le tiers neutre d’opinion qui structure les échanges entre
les parties. Par ailleurs, il est libre et ne dépend d’aucune institution ;
 La confidentialité : le dialogue lors des séances de médiation doit être préservé
et confidentiel. Le médiateur ne peut témoigner en justice
 L’impartialité : il dirige la discussion, structure le dialogue et apaise la
communication sans imposer de solution. Il renoue les liens dans un climat de
respect mutuel.

Chapitre 1. La médiation dans l’Afrique subsaharienne

Section 1 : identification

La médiation constitue un mode de règlement amiable des litiges utilisé depuis


fort longtemps en Afrique subsaharienne, terre imprégnée de spiritualité et de
religiosité4. Il s’agissait alors de « l’arbre à palabre » ; arbre mythique au-dessous
duquel le chef de ca- ton ou du village, l’aîné, venait écouter les parties en conflit et
tentait de les rapprocher. Le succès et l’enracinement de ce processus traditionnel de
règlement des conflits reposait – et repose encore – sur le respect et la crainte des
traditions, les us et coutumes des litigants, ainsi que sur les pouvoirs ancestraux du
médiateur traditionnel.

15
La médiation permettait d’endiguer la violence et, partant, de préserver
l’harmonie du village, étant observé que la pratique de la médiation – hier comme
aujourd’hui – dépasse l’échelle du village ou de la communauté pour s’inviter dans le
règlement des crises poli- tiques et des conflits militaires, comme cela a pu être le cas,
par exemple :

Au Bénin, qui a mis en uvre, en 1990, une forme de médiation au niveau


national – initiative « asseyons-nous pour discuter » – ayant permis l’organisation,
sans incident, d’élections après une période de crise grave

- Au Rwanda, qui a eu recours à la méthode traditionnelle des « gacacas » pour


apaiser une société traumatisée par le génocide et gangrénée par les conflits, avec pour
impérieuse nécessité de réconcilier les gens et leur réapprendre à vivre ensemble.

Section 2 :L’historique de la médiation dans l’Afrique

En Afrique francophone, il existe plusieurs systèmes traditionnels de règlement


des litiges, les plus répandus étant la palabre qui est une sorte de médiation par les
groupes sociaux. Ces systèmes traditionnels bénéficient incontestablement d’atouts
dans la culture de paix que recherche la médiation, mais aussi des faiblesses qu’il ne
faudrait pas occulter.

A. La Palabre

C’est l’un des principaux modes de règlement de litige par son ancienneté et
son application. Elle apparaît comme une véritable institution sociale à laquelle
participe tout ou partie de la communauté d’un village.

Il existe cependant une hiérarchie et un protocole dans l’intervention des


principaux acteurs qui sont les vieillards regroupés dans le collège des sages, le chef,
le modérateur. Les vieillards jouent un rôle privilégié. C’est leur âge qui leur confère
la toute-puissance d’agir au nom des ancêtres. Il est considéré que ce grand âge,
symbole de sagesse, les préserve de toute position partisane et les incite au compromis
et à la pondération.

16
Concrètement la palabre fonctionne comme suit. En cas de conflit, la palabre se
tient lorsque l’un des protagonistes porte plainte auprès de la chefferie du village.
Après la plainte, le chef du village convoque à une date indiquée, par le biais d’un
messager, les parties au conflit et toute la communauté. Pendant le déroulement de la
palabre, le chef ne prend jamais la parole. Un modérateur est donc choisi par le chef. Il
s’agit généralement de l’un des membres de la notabilité, un Ancien suffisamment
imprégné des us et coutumes du village et qui dispose d’une maîtrise parfaite de la
parole, des proverbes et des contes. À tour de rôle, le modérateur donne la parole aux
protagonistes pour qu’ils exposent leur version des faits. Ensuite, s’il y a des témoins,
ceux-ci s’expriment à leur tour. Puis, le reste de l’assemblée convoquée se prononce
sur la situation. Les échanges peuvent s’étendre sur plusieurs heures, selon la
délicatesse du problème. Le chef, après avoir écouté l’avis du conseil des sages, prend
une décision qui va toujours dans le sens du consensus et qui doit être respectée. La
finalité de la palabre n’est pas d’établir les torts respectifs des parties en conflit.

B. La médiation par les groupes sociaux

Dans certaines communautés en plus de la palabre, un autre mécanisme de


règlement des différends existe : la médiation par les groupes sociaux eux-mêmes. En
effet, en fonction du type de conflit, les vieilles femmes ou les chefs coutumiers
interviennent en qualité de médiateurs :

 Les vieilles femmes : lorsqu’un conflit d’ordre social oppose deux individus ou
deux groupes d’individus, les parties exposent leur problème et les vieilles femmes
du village pourront intervenir, à un moment donné, en se mettant nues devant les
protagonistes quand elles le décident. Une fois qu’elles exposent leur nudité
devant les belligérants, le conflit doit cesser immédiatement : « La nudité c’est la
vie ! Il ne peut y avoir de vie sans nudité. La vie commence par la nudité. Quand
une femme s’est mise nue, c’est pour dire qu’elle est pleinement dans la vie. Cette
technique permet d’interrompre systématiquement un conflit en cours».
 Les forgerons : c’est une caste dotée de pouvoirs mystiques qui intervient comme
médiateur dans la résolution des conflits qui touchent leur communauté. Ils

17
accomplissent des rites sacrés pour apaiser les esprits et permettre la cohésion
sociale.
 Les griots : c’est une caste gardienne de l’histoire d’un peuple, d’une famille à
travers la tradition. Ils maîtrisent l’art de la parole et constituent des médiateurs
de choix pour résoudre des conflits sociaux au sein de la communauté. Ils sont à
même de faire sortir l’arbre généalogique d’une famille ou de rappeler les valeurs
de paix et de cohésion défendues par la communauté.
 Les chefs coutumiers : ils représentent les gardiens de la tradition et ont pour rôle
d’ uvrer à la stabilité et à la cohésion entre leurs sujets. A cet effet, les
différends leur sont soumis afin qu’ils tranchent en vertu des valeurs qui régissent
la communauté. Tout comme la palabre, les décisions du chef recherchent plus
l’harmonie et le raffermissement des liens entre les sujets que le blâme, la
séparation ou l’exclusion.

Les atouts de la médiation traditionnelle

 Sa force exécutoire : la peur des représailles divines pousse les protagonistes à


exécuter les décisions prises à l’issue de la palabre.
 L’aspect préventif : ces mécanismes prônent le dialogue à travers la fameuse
expression « asseyons-nous et discutons ». Cette stratégie permet aux belligérants
de se comprendre et de trouver des solutions, sans violence ni cassure, à leur
différend.
 Son coût financier : le fonctionnement des mécanismes traditionnels de gestion
des conflits n’exige pas ou presque pas d’argent. En effet, on ne rémunère pas le
tiers médiateur. On fournit juste le nécessaire pour l’accomplissement des rites
coutumiers.
 Sa célérité : le règlement des litiges est bien plus rapide que devant les
juridictions étatiques.

18
Les faiblesses de la médiation traditionnelle

Même si la médiation traditionnelle présente de nombreux avantages dans la


gestion des conflits, elle comporte aussi des faiblesses. Parmi ces points faibles, nous
pouvons citer :

 La neutralité des acteurs traditionnels qui peut être compromise en fonction de


leurs intérêts, ce qui occasionne des décisions partisanes ;
 Leur spécificité culturelle qui les cantonne presque automatiquement aux
communautés qui ont pour coutume de les appliquer, sans offrir de réelles
perspectives d’élargissement ou de systématisation. De nombreux mécanismes
sont signifiants uniquement aux yeux des communautés qui les mobilisent ;
 Son oralité qui fait que les règles associées à ces médiations sont souvent
imprécises et tacites, et qu’il n’existe pas de garanties procédurales pour les
parties ;
 Leur effet et leur efficacité se ressentent uniquement à l’échelle locale, voire
villageoise. Plus les enjeux et les intérêts dépassent le cadre de la communauté,
moins les protagonistes se sentent contraints au respect des accords tacitement «
imposés » par les mécanismes traditionnels de règlement des conflits.

Chapitre 2 : la médiation dans l’Afrique subsaharienne (l’expérience


de l’OHADA )

Section 1 : la médiation au sein de l’OHADA

L’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA)


est une organisation intergouvernementale d’intégration juridique. Instituée par le
traité du 17 octobre 1993 signé à Port-Louis (Ile Maurice), tel que révisé le 17 octobre
2008 à Québec (Canada), cette organisation regroupe à ce jour 17 pays africains (260
millions d’habitants) et reste ouverte à tout État membre de l’Union africaine, voire à
tout Etat non membre de l’Union africaine qui serait invité à y adhérer du commun
accord des Etats membres. L’OHADA a été créée dans un contexte de crise
économique aigüe et de chute drastique du niveau des investissements en Afrique,

19
l’insécurité juridique et judiciaire étant alors identifiée comme cause majeure de
défiance des investisseurs. Afin d’y remédier, l’OHADA a reçu pour mission de
rationaliser l’environnement juridique des entreprises afin de garantir la sécurité
juridique et judiciaire des activités économiques, dans la perspective de stimuler
l’investissement et de créer un nouveau pôle de développement en Afrique. Dans
l’optique de parvenir à ses objectifs l’OHADA a élaborer un droit des affaires
commun pour ses Etats membres qui est contenu dans des Actes uniformes tels que
l’Acte uniforme relatif à la méditation. Adopté le 23 novembre 2017, l’Acte uniforme
relatif à la médiation (AUM) constitue le dixième texte de droit uniforme adopté par
l’OHADA. Ce nouveau texte, entré en vigueur le 15 mars 2018, vient pallier le vide
législatif qui existait dans la plupart des Etats membres de l’OHADA sur la médiation,
mode amiable de règlement de différends.

Cette réforme d’importance pour le développement de la médiation en Afrique


a été adoptée le 23 novembre 2017, sous l’impulsion du Conseil des ministres de
Bissau de juin 2011 qui a demandé au Secrétariat permanent d’étudier la possibilité
d’élargir le champ matériel du droit des affaires à la médiation. L’AUM vient ainsi
enrichir le régime uniforme du règlement des différends dans l’espace OHADA,
jusqu’alors encadré par l’Acte uniforme sur l’arbitrage, etle Règlement d’arbitrage de
la CCJA, deux textes de 1999. Il confirme la vocation de l’espace OHADA
d’encourager les acteurs économiques à investir dans un environnement garantissant
une sécurité juridique, et ainsi une certaine paix économique. L’AUM répond ainsi à
l’objet du Traité OHADA d’« harmonisation du droit des affaires dans les États Parties
par l’élaboration et l’adoption de règles communes simples, modernes et adaptées à la
situation de leurs économies » et complète « l’encouragement au recours à l’arbitrage
pour le règlement des différends contractuels ». Composé de 18 articles, l’AUM assure
un équilibre entre encadrement et flexibilité, nécessaires au succès de la médiation. Ce
texte s’inspire dans une large mesure, mais pas seulement, de la Loi type de la
Commission des Nations Unies pour le droit commercial international sur la
conciliation commerciale de 2002. Il est par ailleurs conforme aux meilleures pratiques
internationales, et reprend notamment certaines dispositions des lois du Burkina Faso
et de Côte d’Ivoire et du décret du Sénégal relatifs à la médiation. L’AUM se distingue

20
toutefois par des dispositions innovantes et spécifiques à l’espace OHADA, en ce qui
concerne, en particulier, son champ d’application, le statut du médiateur, les principes
directeurs de la médiation et le régime de l’exécution des accords issus de la
médiation.

L’entrée en vigueur, le 15 mars 2018, de l’Acte uniforme relatif à la médiation


constitue une avancée indéniable au développement de ce mode amiable de résolution
des différends sur le continent africain.

Une définition de la médiation est inscrite comme « tout processus, quelle que
soit son appellation, dans lequel les parties demandent à un tiers de les aider à parvenir
à un règlement amiable d’un litige, d’un rapport conflictuel ou d’un désaccord (…).9

 le statut juridique du médiateur.

Le médiateur est choisi par les parties d’un commun accord mais il est
également possible que les parties demandent l’assistance d’une autorité de
désignation afin de lui recommander ou même, sur autorisation des parties, de désigner
le médiateur.

Le médiateur, avant tout, doit être une personne compétente et experte. Il est
rappelé une nouvelle fois que les qualités fondamentales demandées à un médiateur
sont d’être indépendant, impartial et disponible (déclaration écrite de la part du
médiateur pour le confirmer). Ces 3 qualités sont fondamentales dans le choix d’un
médiateur et plusieurs articles de l’AUM y font référence.

A cet effet, le médiateur doit lui-même signaler toutes les circonstances qui
pourraient remettre en cause son impartialité ou son indépendance avant la
médiation mais également au cours de la procédure.

En effet, toutes nouvelles circonstances susceptibles de remettre en cause les


qualités demandées au médiateur doivent être révélées aux parties qui pourront refuser
de poursuivre la médiation (Art. 6).

21
De plus, le médiateur doit être neutre et loyal, il a en effet pour rôle d’accomplir
sa mission avec diligence et doit accorder un traitement équitable aux deux parties. Il
n’impose pas de solution au différend mais fait seulement des propositions aux parties.
Les parties possèdent également une grande liberté dans la tenue de la procédure. Elles
peuvent convenir la façon dont la médiation doit être conduite. En outre, il est
explicitement affirmé que, sauf convention contraire des parties, le médiateur ne peut
être arbitre, expert ou conseil d’une partie dans un différend qui a fait l’objet de la
procédure de médiation ou dans un autre différend né du même rapport juridique ou lié
à celui-ci (Art.14).

Toutes ces mesures ont pour principal objectif d’éviter les conflits d’intérêts
potentiels dus à la personne du médiateur. Cependant, l’AUM n’impose pas de réelles
mesures coercitives au médiateur et il ne met pas en place des sanctions explicites au
non-respect des principes directeurs de la médiation. Il semble donc qu’il soit laissé
aux institutions et aux centres de médiation le soin de sanctionner les conflits d’intérêt.
Ce silence du texte met à mal l’ uvre d’uniformisation des règles et des principes
directeurs de la médiation.

Section 2 : la procédure de la médiation

La procédure débute lorsque la partie la plus diligente met en uvre toute


convention de médiation écrite ou non. Si la partie invitant l’autre partie à la médiation
ne reçoit pas d’acceptation dans les 15 jours de la date de réception, ou a l’expiration
de tout autre délai spécifié, l’absence de réponse est considérée comme un refus de
recours à la médiation (Art. 4 alinéas 1 et 2).

Il est également envisageable qu’une juridiction étatique ou arbitrale, avec


l’accord des parties, les renvoie à la médiation. C’est la juridiction qui fixera le délai
de suspension de la procédure (Art.4 alinéa 3). Le délai de prescription de l’action se
suspend avec la médiation sauf convention contraire des parties. Dans l’hypothèse où
aucun accord n’a été trouvé à l’issue de la procédure de médiation, le délai de
prescription recommence à courir pour un délai ne pouvait être inférieur à 6 mois le
jour où la médiation s’est achevée (Art.4 alinéa 4)

22
La médiation étant un moyen alternatif de régler des conflits, elle entretient des
liens très proches avec d’autres modes de résolution des conflits. C’est pourquoi il est
nécessaire de déterminer son champ d’application et, le cas échéant, de savoir
comment la médiation s’articule avec une autre procédure.

Dans un premier temps, il faut rappeler que la médiation régie par l’AUM ne
s’étend pas aux situations dans lesquelles un juge ou un arbitre durant une instance
judiciaire ou arbitrale invite les parties à se concilier. En effet, le médiateur n’est pas
un arbitre et son rôle est d’aider les parties à trouver une solution amiable à leur litige.
Or l’arbitre, comme le juge, peut inviter les parties à se concilier et prendre toutes les
mesures utiles en ce sens ce qui n’est pas le cas du médiateur (Art. 2).

Le choix des parties est fondamental dans la détermination du champ


d’application de la médiation. En effet, si les parties décident de recourir à une
institution de médiation elles adhèrent au Règlement de médiation de l’institution en
question (Art.3).

La distinction effectuée dans l’AUM entre médiation et arbitrage est importante


car elle évite toute confusion au regard des principes de confidentialité, d’impartialité
et de contradictoire.

D’une façon plus spécifique, l’article 11 traite de l’articulation avec des


procédures d’arbitrage ou judiciaire et énumère de façon assez large les éléments
(informations, déclarations, propositions, avis, preuves) invoqués lors de la médiation
qui ne sont pas recevables dans une autre procédure peu importe que le différend soit
le même ou non. Cette volonté affichée par l’AUM prouve l’importance accordée par
les rédacteurs à la liberté d’expression et à la confiance des parties pour assurer le
succès de la médiation.

23
CONCLUSION

Les changements introduits modifient et renforcent tout le droit applicable au


règlement des litiges internationaux au sein de l’espace Ohada. Cependant,
l’opportunité de fixer le siège de l’arbitrage dans cet espace doit s’apprécier État par
État.

À ce titre, plusieurs critères doivent être analysés pour choisir le siège de la


procédure d’arbitrage : le droit local, la compétence des pouvoirs judiciaires du pays et
leur indépendance, la formation des praticiens ou encore la force exécutoire des
sentences. Or, on ne peut que constater que, malgré les avancées récentes, tous ces
critères ne sont pas encore remplis dans tous les pays de l’Ohada. C’est naturellement
la culture juridique qui devra être transformée en Afrique. Le développement de cette
pratique passera forcément par une plus grande reconnaissance des professionnels du
droit de l’arbitrage.

La concurrence existe en Afrique où d’autres pays extérieurs à l’Ohada, comme


l’île Maurice, se positionnent sur ce marché. Avantage pour l’île Maurice, elle peut
prétendre que sa la loi sur l’arbitrage est conforme aux préconisations de l’ONU. Elle
dispose en outre d’un centre d’arbitrage moderne. La conclusion de contrats
importants entre parties originaires de pays différents fait souvent intervenir une
négociation sur le droit applicable et le tribunal compétent pour connaître d’un
éventuel futur litige.

Informées de ces nouvelles évolutions, les directions juridiques françaises


devront définir leurs priorités dans les négociations futures. Aujourd’hui entre le droit
français et un siège de l’arbitrage localisé dans un pays africain, on devra sans doute
préférer le droit matériel de l’Ohada avec une clause d’arbitrage prévoyant un tribunal
arbitral siégeant en France ou même un autre pays d’Europe.

24
BIBLIOGRAPHIE

Thèses et contributions :

 A. FENEON, « Présentation », in Penant, Revue trimestrielle de droit africain,


janv.-mars 2016, n°894, pp.7-9 ; PH. FOUCHARD, « Le double régime de
l’arbitrage OHADA », in International Law Forum, 2001, p.180.
 A. FENEON, « Présentation », in Penant, Revue trimestrielle de droit africain,
janv.-mars 2016, n°894, pp.7-9 ;
 G. KENFACK DOUAJNI, « Arbitrage et investissements dans l'espace
OHADA »in rev. Camerounaise arb. n° avril-mai-juin 2 007, p. 3 et s., adde
Axelle LEMAIRE , « Le nouveau visage entre E tat et investisseurs étranger: le
chapitre 11 de L' ALENA », rev . arb. 2 001, n° 1, p. 45.
 Komi Tsakadi – MARC et harmonisation du droit OHADA des contrat, Rev. dr.
unif. 2008, p512
 L’acte uniforme sur l’arbitrage et le Règlement d’arbitrage ont été adoptés à
Ouagadougou, capitale du Burkina Faso.

 M. KIRSCH, « Historique de l’Ohada », Revu. Penant n° spécial Ohada n° 827


mai - août 1998, p. 129.

 PH. FOUCHARD, « Le double régime de l’arbitrage OHADA », in


International Law Forum, 2001, p.180.
 Philippe LEBOULANG ER « L'arbitrag e international Nord-Sud» , Etudes
offertes à Pierre BELLET Litec, 1991, n°2 l ; adde Eric TEYRIER et F
AROUK YOLA «Un nouveau centre d'arbitrage en Afrique SubSaharienne »
Fiches Techniques, ACCOMEX - Janvier-fevrier 2001, n°37.
 Préambule du Traité de L’Ohada, Journal officiel de l’OHADA, 1er novembre
1997, n°4, pp.1-3.
 Préambule du Traité de L’Ohada, Journal officiel de l’OHADA, 1er novembre
1997, n°4, pp.1-3.

25
 Rene BOURDIN « L'OHADA: L’information à ce jour », Document CCI n°
420/405 du 30 mars 2000.Magistrat français ayant servi au Cameroun et qui fut
pendant plus de 20 ans le membre fran9ais de la Cour Internationale d'Arbitrage
de la CCI, Monsieur BOURDIN avait été étroitement associe à la conception de
l'OHADA.

26
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION ------------------------------------------------------------------------------ 1

PARTIE I : La spécificité de l’arbitrage dans l’Afrique subsaharienne ----------- 3

Chapitre 1 : Le fondement de l’arbitrage dans l’Afrique subsaharienne ----------- 5

A. Les mobilités politiques ----------------------------------------------------------------- 5

1. La volonté de délocaliser les arbitrages ---------------------------------------------- 5

2. La volonté de promouvoir des modes alternatifs de règlement des conflits ----- 6

B. Les mobilités économiques-------------------------------------------------------------- 7

C. Les mobilités juridiques ----------------------------------------------------------------- 7

Chapitre 2 : Le coté procédural ------------------------------------------------------------- 12

PARTIE II : la spécificité de la médiation dans l’Afrique subsaharienne --------- 15

Chapitre 1. La médiation dans l’Afrique subsaharienne ------------------------------ 15

Section 1 : identification ------------------------------------------------------------------- 15

Section 2 :L’historique de la médiation dans l’Afrique ----------------------------- 16

A. La Palabre ------------------------------------------------------------------------------- 16

B. La médiation par les groupes sociaux ----------------------------------------------- 17

Chapitre 2 : la médiation dans l’Afrique subsaharienne (l’expérience de


l’OHADA ) -------------------------------------------------------------------------------------- 19

Section 1 : la médiation au sein de l’OHADA ----------------------------------------- 19

Section 2 : la procédure de la médiation ----------------------------------------------- 22

CONCLUSION --------------------------------------------------------------------------------- 24

BIBLIOGRAPHIE ---------------------------------------------------------------------------- 25

TABLE DES MATIERES ------------------------------------------------------------------- 27

27

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