Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
1
Pr. Corréa et Sawadogo 2018
Introduction générale
Dans une conception classique de l’Etat, les sources du droit sont internes. En passant
par la Constitution, les lois et les décrets, les organes législatifs et exécutifs internes sécrètent
les normes nécessaires à une vie harmonieuse en Cité. C’est ainsi que pendant longtemps, les
Etats ont vécu dans une forme d’autarcie juridique, se suffisant à eux-mêmes dans une forme
de célébration de la méfiance ou de la défiance des Etats voisins. Cet auto-centrage des Etats a
eu comme conséquence politique de nombreux conflits qui ont émaillé l’histoire de l’humanité1.
D’un Etat de guerre quasi-permanente, les relations internationales ont évolué vers une
pacification dictée par l’imbrication des frontières et des personnes. Si par la force, les Etats
ont été en mesure de dessiner les limites géographiques et politiques, ils n’ont cependant pas
pu limiter les populations dans leur élan migratoire dicté par la recherche du mieux-être et le
caractère artificiel des frontières politiques. A cela, il faut ajouter les nécessaires alliances
nouées entre puissances dominantes afin de mieux s’arroger les ressources disponibles et
maintenir leur domination. Où l’on voit ici poindre les deux grands vecteurs
d’internationalisation des relations humaines et partant de production du droit que sont la
nécessité étatique et la fatalité humaine. Le droit international est ainsi né par nécessité et par
atavisme. Le droit international public et le droit international privé sont venus s’ajouter aux
sources internes de création de normes plus haut citées.
Le droit international, public s’entend, peut être défini au premier abord comme
l’ensemble des règles juridiques régissant les relations entre les Etats et les autres sujets de la
société internationale. Concernant ses sources, la référence est l’article 38 du Statut de la Cour
Internationale de justice (CIJ) lequel prévoit que la Cour applique « a) les conventions
internationales, soit générales, soit spéciales, établissant des règles expressément reconnues par
les Etats en litige ; b) la coutume internationale comme preuve d’une pratique générale,
1 La guerre des Cent jours, les deux conflits majeurs de 1914 et 1939. 2
3
2
Voy. Combacau J. et Sur S., Droit international public, Montchrestien, 2e éd., 1995, p. 45. Selon ces
auteurs, l’article 38 du statut de la CIJ est une reprise du statut de la CPJI et donc remonte à 1920.
3
Ce point de vue rejoint celui de la Cour de Justice des Communautés Européennes qui dans sa célèbre
jurisprudence Van Gend & Loos (Aff. 26/62, Van Gend & Loos du 5 février 1963, Rec.1963, p.3)
affirmait : l’objectif du traité CEE qui est d’instituer un marché commun dont le fonctionnement
concerne directement les justiciables de la Communauté, implique que ce traité constitue plus qu’un
accord qui ne créerait que des obligations mutuelles entre Etats contractants […]. La Communauté
constitue un nouvel ordre juridique de droit international […] dont les sujet sont non seulement les Etats
membres mais également leurs ressortissants». 4
44
Il s’agit entre autres de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale (CEEAC), de la
Communauté Economique des Pays des Grands Lacs (CEPGL), de la Communauté des Etats Sahélo-
Saharien (CESS), du Marché Commun de l’Afrique de l’Est et du Sud (MCAES, en anglais COMESA),
de l’Union du Fleuve Mano (UFM en anglais, MRU), de l’Union du Maghreb Arabe (UMA), de la Zone
d’Echanges Préférentiels entre Etats de l’Afrique de l’Est et de l’Afrique Australe (ZEP), et de la
Conférence du Développement des Etats de l’Afrique Australe (CDEAA, en anglais SADC).
5
De ce point de vue, il est indéniable que l’évolution est rapide. Outre le Traité et les règlements
d’application, l’on relève huit actes uniformes adoptés entre 1997 et 2003. Ce sont :
- d’abord, trois actes adoptés à Cotonou le 17 avril 1997, à savoir l’Acte uniforme portant sur le droit
commercial général (AUDCG), l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du
groupement d’intérêt économique (AUDSC) et l’Acte uniforme portant organisation des sûretés (AUS) ;
- ensuite, deux actes adoptés à Libreville le 10 avril 1998, à savoir l’Acte uniforme portant organisation
des procédures simplifiées de recouvrement des créances et des voies d’exécution (AUPSRVE) et l’Acte
uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif (AUPC) ;
- puis, l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage (AUDA), adopté le 11 mars 1999 à Ouagadougou ;
- également, l’Acte uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises
sises dans les Etats parties au Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique (AUOHC),
adopté à Yaoundé le 24 mars 2000 ;
L’acte uniforme sur la société coopérative du 15 décembre 2010 et l’acte uniforme relatif à la
médiation du 23 novembre 2017.
- enfin, l’Acte uniforme relatif aux contrats de transport par route, adopté à Yaoundé le 22 mars 2003.
Au total, le processus OHADA d’intégration juridique, qui est profond, ambitieux et inédit, a permis
l’adoption de dix actes uniformes, constituant de ce fait un monument juridique de la première
importance.
8Décision du CC n° 3/C/93 du 16 décembre 1993, Affaire n° 12/93 du 16/12/93= saisine par le Président 6
de la République.
7
Pr. Corréa et Sawadogo 2018