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Introduction :

Le droit à un procès équitable est un principe universel reconnu par la quasi-totalité des
textes internationaux de protection des droits de l’homme. En effet, la Convention
européenne des droits de l’homme, consacre ce droit à travers son article 6 d’où ressort,
d’ailleurs, la notion d’impartialité : « Toute personne à droit à ce que sa cause soit entendue
équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et
impartial… ». L’impartialité du juge, en effet, doit être perceptible à tout un chacun au
premier coup d’œil. Le juge doit se présenter sans donner les raisons de douter de son
impartialité. « L’impartialité ne doit pas seulement être réelle, elle doit également apparaître
comme telle ».

L’article 5- 3, du même texte est habité par la même idée et souligne qu’en cas de détention
provisoire la durée de la privation de liberté doit être raisonnable. Incontestablement, ce
principe du délai raisonnable est une exigence fondamentale du procès dont doit bénéficier
toute personne qui fait l’objet d’une accusation en matière pénale. La Cour européenne des
droits de l’homme perçoit dans ce principe un moyen de veiller « à ce que la justice ne soit
pas rendue avec des retards propres à en compromettre l’efficacité et la crédibilité ».

Au Maroc la const de 2011 a mis l’accent sur l’équité du procès notamment dans son article
120 qui dispose « Toute personne a droit à un procès équitable et à un jugement rendu dans
un délai raisonnable. Les droits de la défense sont garantis devant toutes les juridictions. »

A cette fin, il convient à présent de s'interroger : Dans quelle mesure la législation


nationale a-t-elle réussi à satisfaire aux exigences d’un procès équitable ?

I. LE CADRE JURIDIQUE NATIONAL ET INTERNATIONAL DU DROIT A UN PROCES


EQUITABLE :
A- LA NOTION DU DROIT A UN PROCES EQUITABLE :

Le souci de garantir l’égalité devant la justice, par le respect de l’équilibre dans le


traitement des parties au procès a été et demeure une préoccupation fondamentale des
législateurs et des organismes de protection des droits de l’homme. C’est dans de sillage,
compte tenu du contexte actuel, marqué par la recrudescence des atteintes au droit de la
défense, qu’il faut placer la question du droit à un procès équitable.
Si nous approfondissons au concept le procès équitable nous référer a plusieurs
interprétations. Il faut au premier lieu analyser deux vocables : procès et équité. Si l'on s'en
tient aux définitions données par les dictionnaires comme le Robert, le mot « procès »
signifie jugement rendu par la justice. Quant à « l’équité »: c'est la vertu de rendre la justice,
de respecter les droits de chacun, d'être impartial, les deux vocables combinés en une
expression « procès équitable », donneraient littéralement le sens d'un «jugement rendu par
la justice conformément aux règles de lois »

Le Maroc a montré sa volonté d’adopter les normes relatives à un procés équitable à


travers son adhésion, sa signature et sa ratification de plusieurs instruments juridiques
internationaux. Cette volonté de la démocratisation est traduite par deux volets essentiels :
le volet institutionnel et le volet juridique.

Sur le plan institutionnel, le système pénal marocain a connu certainement au début


des années 90, une évolution considérable notamment avec la création du conseil consultatif
des droit de l’homme en 1990. Et la création en 2002 de diwan al madalim qui vise à régler le
différend entre l’autorité et le citoyen marocain. Ainsi, la création de l’instance d’équité et
réconciliation en 2004, qui constitue un pas décisif vers l’aboutissement du processus de
transition démocratique au Maroc.

Sur le plan juridiques, plusieurs réformes ont été initiées, tel est l’exemple d’un
nouveau code de procédure pénale qui tout comme le code pénal a subi une réforme
partielle pour renforcer la protection des droits de l’homme. Le gouvernement a aussi a
adopté en 2004 un projet de loi criminalisant la torture.

B- LES SOURCES INTERNATIONALES DU DROIT A UN PROCES EQUITABLE :

Un procès équitable occupe une place particulière dans les conventions


internationales des droits de l’homme, Les conventions internationales pertinentes peuvent
être divisées dans leur champ d’application en: conventions ou traités de nature universelle,
conventions ou traités de nature régionale, Nous nous concentrerons sur la Déclaration
universelle des droits de l’homme de 1948,et le Pacte international relatif aux droits civils et
politiques de 1966:
▪ La Déclaration universelle des droits de l’homme a été adoptée officiellement par
l’Assemblée générale le 10 septembre 1948.

▪ La Déclaration universelle des droits de l'homme contient 30 articles, contenant un


ensemble de principes juridiquement contraignants pour les États en tant que droit
international coutumier, principes de droit ou principes fondamentaux adoptés par
l’humanité.

▪ L’État condamne donc les droits de l’homme de tous les individus sous sa juridiction, et
dans certains cas aussi des groupes d’individus.

▪ L’un des articles de la Déclaration universelle des droits de l’homme concernant un procès
équitable est les articles 5, 7, 8, 9, 10, 11 et 12, En vertu de l’article 2 du Pacte international
relatif aux droits civils et politiques, Les Etats parties s’engagent à respecter et à garantir les
droits reconnus dans le Pacte à toutes les personnes sur leurs territoires qui relèvent de leur
juridiction sans discrimination de quelque nature que ce soit, telles que la race, la couleur, le
sexe, la langue, religion, opinion politique et origine sociale,

▪ Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques en tant que pacte de nature
législative contient une longue liste de droits et de libertés.

▪ Nous nous limitons uniquement à celles relatives au procès équitable visé aux articles 7, 9,
10, 11, 14, 15, 17 et 26

▪ les restrictions à l’exercice normal des droits de l’hommedoivent être fondées sur le droit
et être légitimes, nécessaires et proportionnées, comme la nécessité de maintenir la sécurité
et la santé publique

PARTIE II : LES DROIT GARANTIS DANS UN PROCES EQUITABLE :

A- LES DROITS GARANTIS AVANT LE PROCES

Toutes les étapes d'un procès équitable, que ce soit une enquête préliminaire de la police
judiciaire, un interrogatoire du ministère public ou une enquête préparatoire, impliquant des
garanties juridiques.

▪ L’article 66 du Code de procédure pénale prévoit que, conformément à l’article 23 de la


Constitution de 2011, les officiers de police doivent respecter ces garanties, y compris en
informant l’accusé de la manière dont ils les comprennent, des motifs de son arrestation et
des actes qui lui sont attribués, ainsi que de ses droits:

⮚ Le droit de contacter un proche;Les détenus doivent pouvoir, dans les limites


raisonnables, communiquer avec leurs familles et amis et recevoir des visites de
ceux-ci.
⮚ Le droit de garder le silence: Le droit d'une personne accusée de rester silencieuse
pendant la phase d'enquête (et pendant le procès) est inhérent à la présomption
d'innocence et constitue une garantie importante du droit de ne pas être contraint à
s'accuser.
⮚ Le droit de communiquer avec un avocat ou de demander sa nomination dans le
contexte de l’assistance juridique,
⮚ Le droit de contester la légalité de sa détention: Toute personne privée de liberté a le
droit d’introduire un recours devant un tribunal pour contester la légalité de sa
détention. Le tribunal doit statuer sans délai et, s’il juge que la détention est illégale,
ordonner la remise en liberté de la personne.
⮚ Le droit de consulter et de lire le procès-verbal avant de le signées, le droit d’utiliser
des témoins et de rechercher la maison d’une personne uniquement conformément à
la loi,
⮚ Le droit d’être traité de manière humaine et de ne pas être soumis à latorture lors
d’une interrogation préalable. Toute personne privée de liberté a le droit d’être
détenue dans des conditions qui respectent la dignité humaine.

Outre l'officier de police judiciaire et le ministère public chargé d'enquêter sur les crimes,
nous trouvons le juge d’instruction comme la troisième autorité chargée d’enquêter sur les
crimes. Cette étape est appelée enquête préparatoire, qui sert de médiateur entre l'enquête
préliminaire et la phase du procès. Les garanties comprennent sont: Le droit de l’accusé de
ne faire aucune déclaration lors de sa première comparution devant le juge d'instruction,
sauf en présence de son avocat, afin d’éviter d’obtenir des aveux de pression et de
coercition. Le droit de choisir un avocat pour soutenir ou choisir un avocat dans le cadre de
l’aide juridique, et de communiquer librement avec lui. Le droit de demander le retrait de
son cas au magistrat d’instruction qui lui est assigné et de le renvoyer à la chambre
d'accusation de la Cour d’appel, sous réserve que la détention provisoire soit considérée
comme une mesure exceptionnelle

B. LES DROITS GARANTIS PENDANT LE PROCES


L’égalité devant la loi et les tribunaux : Le droit à une égale protection de la loi
interdit la discrimination dans l’administration de la justice pénale ou civile, que ce soit dans
la loi ou la pratique. Cependant, cela ne rend pas discriminatoires toutes les différences de
traitement, mais uniquement celles qui ne se fondent pas sur des critères raisonnables et
objectifs. En droit Marocain l’article 19 de la constitution, déclare que toutes les personnes
sont égales devant la loi et ont droit sans discrimination à une égale protection de la loi. Ce
principe signifie que chacun a droit à l’égalité d’accès aux tribunaux et que les parties à une
procédure sont traitées sans discrimination (l’article 14 du Pacte International relatif aux
Droits Civils et Politiques).
Le droit d’être jugé par un tribunal impartial et indépendant : Selon l’article 6 de la
Convention européenne des droits de l’Homme ainsi l’article 14 du PIDCP, ce droit oblige les
États à instaurer et maintenir des tribunaux indépendants et impartiaux. En droit Marocain,
la constitution prévoit dans ses articles 108 et suivants l’inamovibilité, l’indépendance et
l’impartialité des magistrats. L’indépendance du pouvoir judiciaire repose sur deux principes
fondamentaux : l’indépendance individuelle du magistrat et l’indépendance institutionnelle
de la magistrature.
Le droit d’être entendu équitablement : L’article 10 de la Déclaration Universelle des
Droits de l’Homme. Ce droit d’être entendu équitablement est au cœur même du concept de
procès équitable. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement. Il
requiert que soit respecté le principe de l’« égalité des armes » entre la défense et
l’accusation dans le cadre d’une procédure accusatoire.
Le droit à un procès public : À l’exception de circonstances prévues et bien définies,
comme dans les affaires impliquant des enfants, les audiences et jugements en matière
pénale doivent être publics (L’article 14 du PIDCP). Cette publicité, qui vise à protéger les
droits de l’accusé, veut que la justice soit non seulement rendue, mais aussi qu’elle le soit de
façon visible. Dès lors, la Constitution Marocaine prévoit le principe de la publicité des
audiences, sauf lorsque la loi en dispose autrement. Selon les dispositions de l’article 300 du
code de la procédure pénale Marocaine, et en dehors des cas prévus aux articles 301 et 302,
l'instruction à l'audience et les débats sont publics à peine de nullité. Les exceptions prévues
par les articles 301 et 302 sont le cas de mineurs, et le cas de la publicité dangereuse pour
l'ordre ou les bonnes mœurs. Le code de la procédure civile Marocaine confirme ce principe
par les dispositions de l’article 43.
La présomption d’innocence : toute personne a le droit d’être présumée innocente,
et traitée comme telle, tant que sa culpabilité n’a pas été légalement (DUDH) et (l’article 14
du PIDCP). En droit Marocain, la présomption d’innocence est un droit protégé par la
constitution (l’article 23), ainsi selon le 1er article du code de la procédure pénale si une
personne est mise en accusation par l’appareil judiciaire, elle doit être traitée et considérée
comme innocente jusqu’au jugement définitif statuant sur sa culpabilité ou sur son
innocence. Quant à la charge de la preuve, Le deuxième alinéa du même article déclare que
le doute s’explique en faveur de l’accusé c’est-à-dire, la charge de la preuve incombe à
l’accusation.
Le droit d’être présent au procès et au jugement et d’interjeter appel : toute
personne accusée d’une infraction pénale a le droit d’assister à son procès et aux audiences
afin de pouvoir entendre les arguments de l’accusation, contester ces arguments et
présenter sa défense. (L’article14 du PIDCP). En droit Marocain les articles 309 et suivants
prévoit les modalités de notification de la date et lieu de de l’audience. Ainsi l’article 311
dispose que les prévenus comparaissent en personne, à moins qu’ils ne soient dispensés par
la juridiction conformément à l’alinéa 2 de l’article 314. Ainsi l’article 312 prévoit que tout
prévenu est tenu de comparaitre à l’audience. Le droit d’interjeter appel est un élément
essentiel d’équité en matière judiciaire (article 14 du PIDCP ). Dès lors, que ce soit en matière
pénale ou civile le législateur Marocain permet aux parties des voies de recours pour
réexaminer leur affaire une deuxième devant une juridiction supérieure (l’article 134 du cpc),
et les articles 396 et suivants du code de la procédure pénale. Cela garantit l’existence d’au
moins deux degrés de juridiction.
Le droit d’être jugé dans un délai raisonnable : Les poursuites pénales doivent
commencer et se terminer dans un délai raisonnable, La notion de « délai raisonnable » est
évaluée au cas par cas. Plusieurs facteurs entrent en ligne de compte : la complexité de
l’affaire, la conduite de l’accusé, la conduite des autorités, l’enjeu pour l’accusé, la gravité des
accusations et la peine potentielle etc.
CONCLUSION
L’évaluation de l’équité d’un procès est un processus complexe dans lequel entrent en
jeu de nombreux paramètres. Chaque cas est singulier et doit être examiné sur le fond et de
manière globale. En général, il s’agit de déterminer si la procédure judiciaire se déroule
conformément à la législation nationale, si cette législation respecte les garanties minimales
d’équité prévues par le droit international et si son application satisfait aux normes
internationales.

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