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Présentation de la matière

Droit des obligations = droit des contrats


Droit de la responsabilité 2e semestre.

Droit des obligations = cœur du droit privé car :


Matière centrale qui va influencer toutes les autres matières. Autres matières = déclinaisons
du droit des obligations.
Droit des obligations = droit extrêmement riche intellectuellement, doctrinalement,
beaucoup de discussions juridiques de théorie générale. Par ex. droit des contrats doit plutôt
suivre justice sociale ou sécurité des transactions ? Discussions également sur les techniques
juridiques qui peuvent poser problèmes : débat sur la cause dans le contrat.
Droit des contrats au service de grands intérêts généraux, ex. de la cause : jp s’interroge sur la
cause pour essayer de rééquilibrer les contrats.
Matière pratique : matière du quotidien. Contrats permettent d’organiser la vie
quotidienne.

Droit qui va du petit contrat au très gros contrat, ex : Fourniture d’une centrale nucléaire civile
à un pays étranger ≠ achat d’une baguette. Univers économique très divers : consommateur,
entreprise. Droit des contrats s’applique à tous les domaines de la vie économique et à tous les
niveaux économiques. Matière très transversalePoint qu’il faut bien comprendre car
plusieurs conséquences :
- On ne peut pas traiter de la même manière un consommateur qui va acheter un
ordinateur à la Fnac et une entreprise multinationale qui va conclure des contrats
importants avec poids économique beaucoup plus important. Consommateur en
situation de faiblesse, pas de négociation avec l’acheteur, situation d’infériorité. A
l’inverse le fabricant de l’ordinateur, société Apple, va conclure des contrats avec des
distributeurs de produits informatiques, dans le cadre de cette discussion :
négociations entre 2 opérateurs économiques importants. Poids important des 2 parties
donc négociation d’un contrat entre eux. Contrat qui nait d’une négociation entre 2
opérateurs économiques. Dans le 1er cas contrat pas négocié, dans 2e cas contrat = fruit
d’une négociation. Intuitivement il y a une différence majeure. Contrat imposé : plus
facile théoriquement d’en remettre en cause certaines clauses, clause pas juste, contrat
pas équilibré. Contrat peut être remis en cause car pas négocié justement, pas le fruit
d’une négociation qui aboutit à un certain équilibre. En revanche quand contrat
négocié par 2 parties, il est plus contestable de remettre en cause ensuite ce qui a été
négocié/accepté par les 2 parties en toute connaissance, contrat considéré comme
correctement équilibré à la base. Donc on ne traite pas de la même manière tous les
contrats quels qu’ils soient. Il y a le droit commun qui s’applique à tous les contrats
(CCiv) puis il y a des dispositions spéciales, ex. : dispositions du code de la
consommation, qui protègent le consommateur, ne s’appliquent pas dans les relations
professionnelles. Tronc commun + dispositions spéciales à tel ou tel domaine.
- Droit des obligations va être, à l’image de la société, en constante évolution.
Paradoxe : dispositions du droit des contrats dans le CCiv ont, en réalité, assez peu
changé au travers du droit.
Réforme du CCiv sur les contrats plusieurs fois envisagée mais pour le moment les
dispositions demeurent celles du CCiv, art.1101 et s. CCiv. Or le CCiv demeure, quant
à ces dispositions sur le droit des contrats, dans sa formulation d’origine, de 1804.
C’est la jp, pour l’essentiel, qui a très largement fait évoluer les textes en les
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interprétant afin de les adapter aux situations actuelles. Ex. le plus typique : art.1384,
al 1 (droit de la responsabilité) art à l’origine conçu comme un art de transition qui
annonce fin art. 1382-1383 (responsabilité du fait personnel) et passe aux art 1384 et s.
(responsabilité du fait des choses et du fait d’autrui). Art très général. Jp a utilisé cet
alinéa, au départ pas conçu comme une règle contraignante, pour créer aujourd’hui 2
régimes totalement autonomes de responsabilité : la responsabilité du fait des choses
(largement le plus important) et la responsabilité du fait d’autrui. La jp a fait évoluer
ces dispositions pour les adapter mais les dispositions, globalement, sont les textes
d’origine du CCiv, revus, réinterprétés par la jp.
A côté du CCiv se sont développées d’importantes règlementations du droit des
contrats. Ex : code de la réglementation. A partir de 1978, et notamment dans une loi
de 1995, le législateur est venu règlementer les relations entre consommateurs et
professionnels afin de protéger le consommateur contre le professionnel. Ex : délai de
rétractation pour le consommateur, prohiber un certain nb de clauses, les clauses
abusives, qui déséquilibrent la relation consommateur/professionnel. Loi de 2002 :
responsabilité du médecin, donc contrat médical. Dispositions spéciales prises qui
vont adapter le droit des contrats aux évolutions. Ex : acte médical aujourd’hui très
différent de celui qui existait au XVIIIe, le droit est venu régler un certain nb
d’éléments. Lois spéciales aujourd’hui viennent s’appliquer en plus dans les différents
contrats. CCiv = droit commun + règles spéciales. Droit des contrats en constante
évolution car continuellement réajustement de la jp ou du législateur.
Droit des contrats = droit fondamental, essentiel.

Comment travailler ?
1ère base = le cours, à assimiler avec un manuel + CCiv. + Recueil d’arrêts (98, à lire au fur et
à mesure).
Fiche de TD : extrêmement simple, uniquement exercice à faire pour le TD, cas pratique ou
commentaire d’arrêt.
Partiel : 2 sujets au choix, un commentaire d’arrêt et un cas pratique.

Bibliographie :
- manuel clair et complet : François Terré, Simler, Lequette, Droit civil des obligations,
précis Dalloz, 11e édition.
- Benabant, Droit civil des obligations, 12e édition, Montchrestien. Manuel plus
compact, moins détaillé mais suffisant pour notre niveau.
- Muriel Fabre Magnan, Les obligations, 2 tomes, Temis droit privé. 2e édition 2007.
Manuel le plus intelligent, particulier : 2 parties dans chaque développement.

- Malinvaud et Fenouillet, Droit des obligations, 11 e édition, Litec, 2010. Un peu rapide
sur beaucoup de points.
- Flour, Aubert, Savaux, plusieurs tomes : Tome 1 sur l’acte juridique pour nous. 14e
édition, 2010. Manuel trop doctrinal.
- Malaurie, Aynès, Stoffel-Munck, édition Defrenois, Des obligations.

- Bertrand Fages, Droit des obligations, GDJ

- Ghestin, Billiau, Traité de Droit Civil. Tome sur la formation du contrat + Tome sur les
conditions. Infos très précises.
- Jurisclasseur civil : jp surtout sur certains articles + répertoires Dalloz

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- Ouvrages anciens, de référence : Aubry Hérault, Jean Carbonnier

- Dictionnaire juridique, Capitan, édition PUF.

- Pour faire des commentaires d’arrêts : Grands arrêts de la jp civile, Terré & Lequette,
grands arrêts commentés.

- Revues : Recueil Dalloz et JCP (juris classeur périodique = semaine juridique), une
partie d’actualités, puis commentaires d’arrêts. Revue trimestrielle de Droit Civil :
articles puis chroniques.

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Introduction

Qu’est ce qu’un contrat ?

Point essentiel que de définir le contrat.


Introduction en 3 volets :
- La notion du contrat
L’évolution historique du droit des contrats
- Les fondements de droit des contrats.

La notion de contrat.
Contrat : art. 1101 CCiv, dispose que le contrat est une convention par laquelle une ou
plusieurs personnes s’obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire, ou à ne pas
faire quelque chose.
Traduit sous formule ramassée = le contrat est une convention génératrice d’obligations.

On va disséquer la définition donnée par le CCiv et l’art 1101 :

1. le contrat est une convention 


Le contrat est un acte juridique. Pas un fait juridique !
Fait juridique : faits qui produisent des effets de droit.
Contrat = acte juridique, càd que c’est la volonté qui va créer l’obligation et va produire les
effets de droit qui lui sont attachés. Le contrat est un accord de volonté, càd que les
cocontractants vont ensemble exprimer leur accord, leur consentement aux différentes
obligations qui découlent du contrat. En ce sens on va distinguer le contrat, accord de volonté,
donc minimum 2 personnes, et l’acte juridique unilatéral qui est une manifestation de volonté
d’une seule personne, ex : le testament. Dans le testament la volonté d’une personne exprimée
devra prévaloir en cas de mort de celui qui a fait le testament. Le contrat c’est un accord de
volontés. Acte qui nécessite une rencontre de consentement.

2. par laquelle une ou plusieurs personnes s’obligent envers une ou plusieurs autres
Cette partie de phrase apporte plusieurs précisions. Accord de volonté = nécessairement au
moins 2 parties. Il peut y en avoir plus que 2, mais au moins 2.
Ex : personnes propriétaires en indivision d’un immeuble, tous les co-indivisaires et
l’acheteur seront présents pour le contrat.
Cette convention à 2 ou plusieurs personnes se distinguent toutefois de certains actes
collectifs car dans un contrat les personnes s’obligent les unes à l’égard des autres, elles
se mettent d’accord ensemble pour accepter des obligations en échange d’autres obligations.
Alors que dans certains actes collectifs il n’y a pas d’échange d’obligations.
Ex  : une société commerciale se réunit en AG. Vote d’un changement de nom. Décision
sociale. Il n’y a pas d’obligation réciproque entre les uns et les autres. Acte né d’une
collectivité, ce n’est pas un contrat.
Dans un contrat, l’accord va faire naitre des obligations.
Autre enseignement de cette phrase : le contrat ne va obliger que ceux qui vont exprimer leur
volonté. Le contrat ne va pas obliger des tiers ! C’est l’effet relatif des contrats. On ne peut
pas créer d’obligations à la charge d’un tiers.

3. à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose

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Art 1101 précise obligations qui peuvent être générées par le contrat.
Tous les types d’obligations sont visés à travers cela. Pour qu’il y ait contrat il faut qu’il y ait
une véritable obligation, sinon ce n’est pas un contrat.
Ces contrats génèrent 3 types d’obligations qui sont susceptibles de discussion.
- Obligation de donner : obligation de transférer la propriété d’une chose. Obligation
à laquelle on pense dans le cadre du contrat de vente. Celle par laquelle le vendeur est
obligé de remettre la chose à l’acheteur. De même acheteur obligé de donner le prix en
contrepartie au vendeur. Débat sur cette obligation de donner : obligation qui vient
du droit romain. Dans notre droit contemporain des contrats, obligation de donner n’a
plus de réelle signification car aujourd’hui on considère que le contrat se conclue par
le simple échange de consentements (consensualisme) et dès qu’il y a un accord on
considère que le contrat est conclu.
Ex  : CCiv vendu à 40€ par qqn. Argent pas encore remis ni CCiv mais en droit le
contrat est déjà conclu car échange de consentement réalisé. Après échange de
consentement le CCiv n’est plus la propriété du vendeur même si c’est encore lui qui
l’a entre les mains. Obligation de remettre le CCiv alors.
C’est pourquoi les auteurs disent qu’il n’y a plus vraiment d’obligations de donner,
uniquement obligation de livrer la chose donc de faire qqch.
- Obligation de faire : toutes celles qui existent dans les contrats de services.
Ex  : peindre un mur, construire un bâtiment, se soigner…
- Obligation de ne pas faire : Ex  : obligation de non-concurrence, de confidentialité (ne
pas divulguer une information).

L’évolution historique du droit des contrats.


Grandes étapes du droit des contrats3 grandes périodes :

1. Avant le CCiv
On peut distinguer 3 sous époques :
- Le droit romain : très important en droit des obligations car notre droit des contrats
puise beaucoup de notions dans le droit romain. Droit romain = droit très formaliste,
pour exécuter un contrat il fallait beaucoup d’éléments, le contrat naissait de la remise
de la chose d’où obligation de donner. Il existe encore des traces de cela aujourd’hui :
les contrats réels. Contrats valables uniquement par l’exécution des contrats, par la
remise de la chose.
Ex  : contrats de prêt conclus entre professionnels (doc. 23, 28 mars 2000).
Contrat réel = le contrat de prêt n’est conclu que quand le prêteur remet les fonds à
l’emprunteur, avant cela : contrat pas conclu.
- L’ancien droit : essentiel en raison de l’influence de l’église et des canonistes.
Essentiel car le droit canon a introduit dans le droit des contrats des valeurs morales,
une approche morale. Il fallait exécuter le contrat car il faut respecter la parole
donnée. Prémices du consensualisme : la volonté va créer le contrat et non plus
l’exécution. En dehors de ce principe du respect de la parole donnée l’ancien droit et
les canonistes vont moraliser la relation contractuelle, nait l’idée que l’obligation doit
avoir une contrepartie. Contrat doit être équilibréidée qui va naitre de l’esprit
canoniste et des valeurs morales véhiculées alors par l’église. Autres principes : toute
faute qui cause un préjudice va faire naitre l’obligation de la réparer. A cette époque de
l’ancien droit, demeuraient de nombreuses contraintes interdisant un certain nb
d’obligations, de contrats.

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- Fin XVIIe, au XVIIIe : philosophie des Lumières, fin de l’ancien droit. Période
fondamentale car la philosophie des Lumières est une philosophie individualiste.
Accorde des droits à l’individu.
DDHC naissent de cette philosophie des Lumières, philosophie très éclairante qui va
mettre en avant un individu, une personne. Dans le cadre de cette philosophie, principe
fondamental : chaque personne est fondamentalement libre, liberté individuelle.
Liberté individuelle devient un maitre mot qui continue aujourd’hui d’être un maitre
mot. Philosophie des Lumières va avoir une conséquence fondamentale sur le
droit des contrats : explication qu’elle va donner du contrat. Obligation du contrat
possible car l’homme n’est obligé que parce qu’il l’a voulu. C’est sa volonté qui va
créer l’obligation. On ne peut pas imposer d’obligations à un individu si celui-ci ne l’a
pas voulu. Principe fondamental va être le principe de l’autonomie, consacré de
manière très forte par la philosophie de Kant : autonomie de la volonté. Volonté
autonome qui va permettre de se créer ses obligations. Principe à double tranchant :
d’un côté on ne peut nous obliger à rien, d’un autre côté si j’ai voulu un certain nb
d’obligations je suis tenu de les respecter. Volonté donne force obligatoire au
contrat. Philosophie qui ira loin puisque certains philosophes ont voulu tout
comprendre dans les rapports sociaux sous l’angle du contrat.
Ex  : Rousseau, le contrat social, XVIIIe, il analyse les relations entre les individus
dans un état comme un contrat social. C’est parce que j’ai accepté de vivre en
communauté plutôt que sauvagement que je vais accepter ces obligations qui me
contraignent. Tout vient de la volonté. Rousseau : les conventions sont la base de
toute autorité entre les hommes.

2. Le CCiv
Révolution française, abolition des privilèges… CCiv.
Le CCiv a été un texte de synthèse sur le droit des contrats. Synthèse de toutes ces évolutions
au travers du temps qui ont été reprises sans que véritablement il y ait de doctrine totalement
prédominante. CCiv a gardé une certaine influence du droit romain, notamment sur les
contrats spéciaux. Le CCiv s’est largement inspiré de l’ancien droit, notamment d’un auteur
qui avait conceptualisé l’ancien droit : Domat, qui directement influencera le CCiv,
notamment article sur la cause. Le CCiv est également très inspiré par la philosophie des
Lumières, puisque justement on se situe dans la lignée de cette philosophie en 1804. Avec un
exemple très fort, symptomatique de cette consécration du principe d’autonomie de la
volonté dans l’art 1134 al 1 : les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux
qui les ont faites. Les individus peuvent créer leur loi : la convention a la force d’une loi.
Article fondamental ! Qui se conjugue avec les autres influences : art 1134 al 3 dispose elles
doivent être exécutées de bonne foimorale canoniste qui revient.
Synthèse entre les différentes influences dans le CCiv.

3. Après le CCiv
Jusqu’à aujourd’hui les textes du CCiv sont les textes d’origine, réformes très minimes.
La jp a œuvré et le législateur aussi à côté du CCiv. Evolution postérieure au CCiv consiste à
tempérer le principe d’autonomie de la volonté, à modérer les effets de la toute puissance
de la volonté afin de faire prévaloir davantage les idées d’équilibre contractuel, de
protection de la partie faible (consommateur). Socialisation du contrat : idées qui ont
nécessitées de revenir sur la toute puissance de l’autonomie de la volonté.
Ex  : contrat de transport, lorsque le train est né, s’est posée la question de la sécurité des
voyageurs. Accident : q° de l’indemnisation des victimes. Si toute puissance de la volonté  :

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obligation ne peut naitre que de la volonté des parties, il fallait donc voir si les parties
avaient convenu qu’en cas d’accident les voyageurs seraient indemnisés ou pas.
Si on raisonne en terme d’autonomie de la volonté uniquement on regarde si l’obligation
pour le transporteur d’indemniser les voyageurs est posée dans contrat.
Jp a dit que nonle transporteur se devait d’assurer la sécurité des voyageurs, jp a créé une
obligation de sécurité pour le transporteur : quand il décide de transporter un voyageur il se
doit d’en assurer la sécurité et il ne peut pas dans son contrat exclure sa responsabilité là
dessus.
21 novembre 1911 : jp sur obligation de sécurité, à partir de l’art 1135 CCiv. Obligations
qui n’ont pas fait l’objet de volonté par les parties. Obligations imposées mais pas voulues :
atteinte au principe d’autonomie de la volonté, on n’est plus dans Rousseau, obligations
imposées par la jp au bénéfice d’une des parties. Technique de l’obligation imposée va
s’accroitre, connaître un essor et on va en avoir un certain nb.
De la même manière il arrivera au législateur de prévoir qu’à l’inverse certaines obligations
voulues par les parties seront écartées.
Ex  : clauses abusives conclues entre un consommateur et un professionnel. Contrat avec
clause déséquilibrée qui profite au professionnel sans contrepartie.
Le législateur est venu dire : cette clause, qui pourtant est dans le contrat, est annulée car
clause abusiveatteinte au principe d’autonomie de la volonté, volonté pas suffisante si trop
injuste. Cela ne vaut pas dans tous les contrats. Clauses abusives ne s’appliquent que dans les
rapports entre un consommateur et un professionnel.
Evolution postérieure au CCiv a largement tempéré le principe d’autonomie de la volonté
pour moraliser la relation contractuelle et pour l’équilibrer.

Les fondements du droit des contrats.


Grands principes qui gouvernent le droit des contrats ?

A – La liberté contractuelle
Possibilité pour toute personne de conclure ou de ne pas conclure un contrat. Cette
liberté en réalité va pouvoir se décliner de différentes manières.
- D’abord liberté de contracter = liberté elle-même de contracter ou de ne pas
contracter. Liberté source. Cette liberté connaît certains tempéraments (limites). En
effet il y a des hypothèses où une personne est obligée de contracter, contrat
obligatoire.
Ex : l’assurance automobile obligatoire. Dès lors que quelqu’un détient un véhicule
automobile, obligation de souscrire à une assurance.
En dehors de ces exceptions dues à des impératifs d’ordre public, contrat n’est jamais
obligatoire.
- Libre choix du cocontractant = une personne peut choisir son cocontractant, liberté
qui connaît des tempéraments : droit de préemption. Hypothèses où lorsqu’une
personne souhaite vendre un bien, elle se doit, avant de le vendre à un tiers, de le
proposer en priorité à une personne déterminée.
Ex : vente de terres agricoles, proposer le bien à un organisme agricole avant de pouvoir le
vendre à un tiers.
Droit de préemption peut être d’origine légale ou il peut être d’origine conventionnelle (droit
de préemption créé par un contrat). Tempérament limité car en principe les parties ont la
liberté de choisir leur cocontractant.
- Libre détermination du contenu du contrat = les parties ont la liberté de convenir
des obligations qui seront prévues au contrat. Il existe également des tempéraments à

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cette liberté : lorsque certaines obligations vont être imposées aux parties. On exigera
que ces parties respectent ces obligations.
Ex : obligation de sécurité, lorsque 2 parties concluent un contrat de transport, même si elles
n’ont rien prévu au contrat, la jp impose au transporteur une obligation de sécurité
particulièrement forte (aucun dommage corporel ne doit être subi par le voyageur). Que cette
obligation soit ou non contenue dans le contrat elle est imposée aux parties. Les parties ne
peuvent y déroger.
Obligations imposées beaucoup plus fréquemment dans des relations entre consommateurs et
professionnels que dans des relations entre professionnels eux mêmes. L’obligation imposée
permet d’équilibrer les relations contractuelles. Lorsqu’une personne est en position de force
il y a peu de chance pour que cette personne accepte de s’imposer des obligations au profit de
l’autre. La jp (ou la loi) en imposant des obligations va intervenir dans le contrat afin de
rééquilibrer les relations et de permettre au consommateur de bénéficier de certaines
prestations dont il n’aurait pas bénéficiées si on avait laissé les personnes totalement libres de
la détermination du contenu du contrat.
- Liberté quant à la forme de conclusion du contrat = principe en droit français est le
principe dit du consensualisme. Consensualisme signifie que le contrat est formé
par le simple échange de consentement. Aucune forme n’est nécessaire à la validité
du contrat, contrat va être conclu uniquement parce qu’il y aura eu une rencontre des
consentements. Principe très important à plusieurs titres. D’abord c’est un principe
qui démontre toute l’importance du consentement d’une personne. Consentement à lui
seul susceptible d’engendrer des obligations. Raison pour laquelle le droit des
obligations va être aussi pointilleux sur la préservation de l’intégrité et de la liberté du
consentement. Il faut être sur que celui qui a donné son consentement était libre de le
faire et il faut être sur que consentement n’a pas été donné sur le fondement d’une
erreur. Approche du droit des contrats est une approche dématérialisée, conceptuelle.
La question de la preuve peut se poser.
Ex : vente du CCiv. Je discute avec une personne et je lui vends le CCiv à 50€. La personne
accepte, à partir de là le contrat est conclu car il y a eu échange de consentement. Cette
personne dit finalement qu’elle n’a jamais accepté cette proposition. Quelle preuve puis-je
avoir ? Le contrat a bien existé mais je ne peux pas en rapporter la preuve.
On voit bien la différence entre un écrit (preuve) et le principe même de validité du contrat.
Si ce même contrat se fait ce même jour devant tout le monde, à ce moment-là le même
contrat est tout autant valable que le précédent mais en plus celui-ci je pourrai en rapporter la
preuve en demandant des témoignages.
Cette liberté connaît également des limites. Il y a des hypothèses où certaines formes sont
demandées ad validitatem. Exigences ad probationem pour la preuve, ne portent pas atteinte
au consensualisme mais exigences ad validitatem sont une atteinte au consensualisme.
Lorsque je vais écrire mon engagement, à ce moment là je vais davantage prendre conscience
de la portée de mon engagement. L’exigence d’une forme ad validitatem est faite pour éclairer
davantage le consentement de celui qui va s’engager.

B – La force obligatoire des contrats


2e pilier du droit des contrats, le pendant de la liberté.
Les personnes qui vont s’engager librement dans un contrat vont ensuite devoir strictement
respecter ce contrat. Principe né du principe d’autonomie de la volonté. Chaque personne
est autonome et souveraine quant à sa propre volonté et si elle prend un engagement, elle se
doit de le respecter. Force obligatoire a été particulièrement mise en avant dans l’article 1134
al 1 du CCiv. Dans cette disposition le contrat est assimilé à la loi, même force que la loi,

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simplement la loi va valoir pour tous les citoyens. Contrat ne vaut que entre cocontractant. Le
contrat tient lieu de loi entre les parties.
Force obligatoire répond à plusieurs avantages, objectifs.
D’abord elle répond à un objectif philosophique : philosophie des Lumières, puissance de la
volonté humaine, l’homme qui se façonne ses obligations.
Elle répond également à un objectif de prévision : lorsqu’une personne s’est engagée par
voie de contrat, l’autre peut s’attendre légitimement à ce que ce contrat soit exécuté. Donc le
contrat va répondre aux attentes légitimes des parties. En ce sens le contrat est un instrument
de prévision.
Ex : contrat de bail pour un appartement sur un an. Pour le locataire, prévision = pouvoir
disposer de l’appart pendant une année à un prix fixé, pour le propriétaire = son bien va être
loué et va donc lui rapporter le montant du loyer convenu au contrat. Les deux parties se sont
projetées dans l’avenir par ce contrat. La force obligatoire du contrat permet de satisfaire ces
prévisions. Force obligatoire du contrat est en ce sens un élément de sécurité juridique.
Force obligatoire du contrat va avoir elle même plusieurs conséquences :
- Les parties ne pourront pas renoncer unilatéralement au contrat ou les parties ne
pourront pas exiger la révision unilatérale du contrat. Soit les parties se mettent
d’accord ensemble pour modifier/mettre fin à un contrat en cours, soit elles respectent
ce qui a été prévu. Le jp judiciaire considère que même en cas de bouleversements
économiques, les parties se doivent de respecter le contrat, le changement du contenu
du contrat ne peut jamais être exigé. Entre les parties, conséquence = exécution du
contrat quoi qu’il arrive.
- Le contrat ne peut avoir de force obligatoire qu’entre les cocontractants, qu’entre
personnes qui ont exprimé leur consentement au contrat. Si tel n’est pas le cas, les tiers
au contrat ne peuvent jamais se voir imposer les obligations contractuelles. En effet,
toute la logique repose sur le fait que les parties ayant accepté, elles doivent respecter
le contrat, effet relatif des contrats, art 1165 CCiv.

A ces 2 fondements principaux, certains principes nouveaux semblent émerger au travers de la


jp et de la loi.
Principes regroupés sous l’angle de la bonne foi contractuelle.

C – La bonne foi contractuelle


Sens large, générique du terme. Les exceptions, tempéraments sont pour la plupart inspirés
par l’idée de la protection d’une partie faible. Mais au delà de ça, la jp va favoriser l’idée
selon laquelle les cocontractants vont devoir se comporter l’un à l’égard de l’autre en toute
loyauté, en toute bonne foi. Les cocontractants poursuivent par principe des intérêts
divergents. La jp considère de plus en plus que au delà de ces divergences, de ces intérêts
personnels, les parties doivent agir l’une à l’égard de l’autre de bonne foi. Elles doivent d’une
certaines manière coopérer afin que le contrat puisse satisfaire les 2 parties. Ce principe de
bonne foi est inscrit dans le CCiv à l’art 1134, « les conventions doivent être exécutées de
bonne foi », ce principe est immédiatement posé comme un principe général à l’ensemble des
dispositions du CCiv sur le droit des obligations.
Ce principe de bonne foi prend aujourd’hui de plus en plus d’importance. De telle sorte qu’il
vient se poser en 3e pilier du droit des contrats.

Division du cours en 2 parties chronologiques : la formation du contrat, essentielle car


conséquence = force obligatoire. Après cela, 2nde partie : les effets du contrat, comment un
contrat va s’exécuter, ses effets…

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Partie 1 : La formation du contrat
Le contrat va être conclu par une rencontre de consentements. C’est lorsque les
consentements se rencontrent que le contrat va être valablement formé. Avant même la
formation du contrat il se peut que les parties aient à discuter, négocier pour parvenir à un
accord. En effet les contrats les plus simples, les plus quotidiens sont des contrats par lesquels
il y a une rencontre des volontés immédiate. De la même manière, et à propos de contrats un
peu plus complexes, de nombreuses relations contractuelles aujourd’hui se nouent par le biais
de contrats d’adhésion. Contrats d’adhésion = contrats par lesquels une des parties a accepté
ou refusé le contrat qui lui est imposé sans qu’il puisse le négocier.
Ex : achat d’un ordi à la Fnac, pas de négociation des conditions du contrat, elles sont
préétabliescontrats d’adhésion. Pour l’ensemble de ces contrats, il n’y a pas de période
précontractuelle, antérieure aux contrats, l’échange des consentements se fait de manière
instantanée, sans discussion.
Il y a un certain nb de contrats qui vont être précédés de discussions entre les parties, ce sont
les contrats économiquement les plus importants, qui portent en réalité sur les objets les plus
importants économiquement.
Ex : compagnie aérienne achète 10 airbus, contrat précédé de négociations, sur le prix,
l’étalement des paiements, les qualités de l’avion, la maintenance, les garanties etc.

Titre 1. La période précontractuelle


Cette période n’existe pas pour tous les contrats, seulement pour les contrats importants
économiquement (achat d’un appartement). Cette négociation peut elle-même prendre 2
formes.
Il peut y avoir d’abord des négociations informelles, libres : des discussions.
Parfois les parties vont plus loin que cela, notamment lorsqu’on est en présence de contrats
économiquement importants, dans ce cas les parties vont tenter d’encadrer la négociation
contractuelle, elles vont d’ores et déjà s’imposer des obligations précontractuelles, et elles
vont dans conclure un avant-contrat, qui vient avant la formation du contrat dont elles
discutent.
Hypothèses où négociations informelles : pas d’avant contrat.

CHAPITRE 1 : Les négociations informelles


On parle généralement dans ces cas là de pourparlers. C’est une phase préliminaire où les
clauses du contrat seront étudiées et discutées. Il n’y a pas encore de contrat formé, les parties
vont voir si elles peuvent ou non se mettre d’accord, si leurs consentements peuvent ou non se
rencontrer. Cette phase de pourparlers est elle-même guidée par 2 principes : la liberté et la
prohibition (rupture abusive de pourparlers).

I] La liberté

Au moment où elles négocient, les parties ont le choix de poursuivre ou d’interrompre


leurs pourparlers. Si elles n’étaient pas libres de négocier à ce moment là elles n’entreraient
même pas en pourparlers. A ce moment, d’entrer en pourparlers, les parties ne savent pas si

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elles peuvent se mettre d’accord sur les différentes conditions contractuelles. A ce moment là
le principe est celui de la liberté : de poursuivre ou non les négociations, de conclure ou non
un contrat in fine. Toutefois cette liberté comporte des limites.

II] Les limites

Limites à la liberté de négocier. De manière générale, l’idée est que les parties doivent
conduire les négociations de bonne foi. Même si elles sont libres de poursuivre ou de rompre
leurs négociations elles doivent se comporter de bonne foi et donc s’abstenir de se
comporter de toute manière déloyale. Ce principe va conduire à dire que les parties ne
peuvent pas rompre de manière abusive les discussions, les pourparlers. La rupture abusive de
pourparlers sera sanctionnée1ère exception.
2nde exception : durant cette phase il y a des obligations très générales qui vont peser sur les
parties. Les parties acceptent d’assumer un certain nb d’obligations lorsqu’elles entrent en
pourparlers.

A) La rupture abusive de pourparlers


Une partie ne doit pas rompre brutalement une convention avec l’intention de nuire à son
cocontractant, et l’on considère justement qu’il ne faut pas abuser du droit de rompre les
pourparlers.
Rupture abusive de pourparlers = rupture qui intervient sans raison légitime, de manière
brutale, alors que les perspectives de conclusion du contrat étaient réelles. Et bien que la jp
n’énonce pas clairement ces 3 critères, on les retrouve au travers de la jp.
- Rupture sans raison légitime : s’il n’y a aucun motif, comportement peut être
considéré comme abusif. L’absence de motif légitime ne suffit pas car il se peut
qu’une partie change d’avis, ait pu penser que tel contrat pouvait lui convenir et
finalement revienne dessus, donc pas suffisant.
- De manière brutale : cela signifie que en réalité les parties ne s’attendaient pas à la
fin des négociations. Rien ne le laisser présager. Une partie cesse les négociations sans
avoir prévenu.
- La perspective de conclusion du contrat : très importante car ce que l’on veut
sanctionner c’est le fait pour une partie d’avoir laisser croire qu’on allait conclure un
contrat et de s’être retiré finalement. Pour que cela soit caractérisé il faut que les
parties aient été sur le point de conclure un contrat. Si les parties sont très éloignées, il
est normal qu’il y ait rupture des pourparlers.
Ex : les parties souhaitent acheter un immeuble, imaginons que l’acheteur ait dans
l’idée de payer cet immeuble 1 million d’€, que le vendeur veut le vendre 2 millions,
l’écart est tel que la perspective de conclusion du contrat n’existe pas et personne ne
peut se plaindre alors de la rupture des pourparlers.
Principe de la liberté de rompre. Lorsqu’il y a rupture abusive de pourparlers on ne va pas
pour autant forcer une partie à retourner négocier, ni à conclure le contrat. La liberté
contractuelle : on ne va pas forcer qqn à exprimer son consentement.
Conséquence d’une rupture abusive de pourparlers : à ce moment là l’auteur de cette
rupture abusive va engager sa responsabilité. Il va devoir indemniser l’éventuel
préjudice que son attitude aura causé.
Précisions :
- sur le fondement de cette responsabilité : par définition il n’y a pas de contrat donc la
responsabilité qui va être générée en cas de rupture abusive c’est une responsabilité
délictuelle, et non pas contractuelle. La responsabilité délictuelle c’est la

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responsabilité des tiers, art 1382 CCiv, tout fait quelconque de l’homme qui cause à
autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. Art 1383
vient préciser : chacun est responsable du dommage qu’il a causé, non seulement par
son …
La responsabilité sur le terrain de la rupture abusive de pourparlers est une
responsabilité de nature délictuelle.
- qu’est ce que l’on va réparer ? L’auteur de la rupture doit réparer le préjudice qu’il a
causé. Sur ce point là la jp a évolué car elle a rétréci le préjudice indemnisable, le
préjudice dont la victime peut demander réparation. Aujourd’hui la jp considère que la
victime de la rupture abusive de pourparlers ne peut demander que la réparation des
pertes qui ont été subies du fait de la négociation. En revanche, la jp considère
aujourd’hui que on ne peut pas indemniser le gain manqué, le gain espéré. En effet la
jp dit que on ne peut pas demander l’indemnisation des gains qui auraient été générés
si le contrat avait été conclu. La jp depuis le 26/11/2003, arrêt Ch Commerciale (doc
10) : dans cette affaire des négociations s’étaient nouées afin d’acheter les actions
d’une société. Des pourparlers pour acheter les actions de la société ont été entrepris,
on établit un projet d’accords, on se met d’accord sur les différentes conditions de ce
contrat, modifications demandées par une partie, acceptées par l’autre, puis finalement
presque au moment de conclure, la société Manoukian, acheteur potentiel, apprend
que son cocontractant à céder ses actions à une autre société. Du coup Manoukian se
retourne contre celui avec lequel elle négociait en disant rupture abusive de
pourparlers. Effectivement la Ccass dans cette affaire va dire oui il y a rupture abusive
de pourparlers. Dans cette affaire Manoukian demandait une indemnisation très
importante, la cour d’appel avait limité l’indemnisation. La Ccass dit les circonstances
constitutifs d’une faute (rupture abusive) ne sont pas la cause du préjudice consistant
dans la perte d’une chance de réaliser les gains que permettaient d’espérer la
conclusion du contrat. Elle dit en revanche que le préjudice subi ne doit inclure que les
frais engagés et non les gains qu’elle pouvait espérer tirer de l’exploitation du fond de
commerce. Cela car lorsqu’il y a rupture abusive, le préjudice ce n’est pas que le
contrat n’a pas été conclu, le préjudice c’est qu’on n’a pas poursuivi les
négociations loyalement. Les gains manqués ne peuvent être indemnisés que si le
contrat a été conclu. Si le contrat n’a pas été conclu car on est encore en négociation
on ne peut pas demander indemnisation du préjudice. La faute c’est le fait d’avoir
mené des négociations, d’avoir fait croire que ces négociations pouvaient aboutir alors
qu’on savait que nonaffaire Manoukian = revirement de jp.
La 3e Ch civile, arrêt 28 juin 2006, a confirmé cette position. Dans cette affaire là, la
cour d’appel avait accepté d’indemniser le gain manqué. La Ccass casse l’arrêt sous le
visa de l’art 1382, refus d’indemniser la perte de chance du gain que permettait
d’espérer la conclusion du contrat.

2) L’existence d’obligations
Les parties, lorsqu’elles rentrent en négociation, sans avant-contrat, sont totalement libres et
n’ont pas d’obligations les unes vis à vis des autres. Cela dit le fait même de rentrer en
négociations va engendrer un certain nb d’obligations qui devront être respectées.
1er exemple : l’obligation de bonne foi. Certes les parties ne sont pas liées par un contrat mais
pour autant les parties se doivent d’agir l’une à l’égard de l’autre de bonne foi.
2e exemple : les obligations d’information précontractuelles. Les parties en acceptant de
négocier, de discuter un contrat, s’engagent également à informer le cocontractant, à lui
donner les éléments nécessaires à la formation de son consentement. Si les négociations se

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font en toute opacité, sans transparence, sans information, elles risquent d’arriver à un
consentement erroné, donné par erreur. Donc il est important que dans cette période
précontractuelle les parties se donnent des informations. Elles ont des obligations
d’informations précontractuelles à cet égard. Là encore la responsabilité éventuelle est une
responsabilité délictuelle car il n’y a pas de contrat. Ces obligations d’information
précontractuelles existent dans de multiples domaines (notaire, banquier, médecin). Le
médecin avant toute intervention se doit d’informer parfaitement ses patients sur les risques et
périls qu’ils encourent, sur les conséquences de son intervention. Mais jusqu’à présent, la jp
considérait que l’obligation d’information du médecin faisait partie de son contrat médical. La
sanction se faisait éventuellement sur le terrain de la responsabilité contractuelle car ça fait
partie du contrat du médecin. Arrêt 8 avril 2010, 1ère Ch Civ (doc 8). Et puis la jp a opéré un
revirement de jp, par un arrêt de la 1ère Ch Civ du 3 juin 2010 (doc 9). Cet arrêt est intéressant
à plusieurs titres mais aussi à ce titre là : le visa pour sanctionner le défaut d’information du
médecin n’est plus l’art 1147 mais art 1382 CCiv, responsabilité délictuelle. Même s’il n’a pas
été correctement informé, il faut quand même indemniser le patient.

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CHAPITRE 2. Les formes contractuelles de pourparlers
Pour les contrats les plus complexes : construction d’une usine, d’un bâtiment compliqué, la
vente de biens qui sont très chers. L’avant-contrat est un contrat mais qui n’est là que pour
préparer le véritable contrat que l’on souhaite conclure. Dans ce cadre là, de négociations
complexes économiquement importantes, les parties vont conclure un contrat dont l’objet
serait uniquement d’encadrer les pourparlers, donc il y aura différents types d’obligations
qui pourront être conclues. Selon les cas, cette négociation va pouvoir être encadrée de
différents types de clauses, dans ce cas là on a l’existence d’un véritable contrat mais qui n’est
qu’une étape avant un éventuel contrat définitif.
Ces avant-contrats peuvent être variés. Mais il en existe certains qui posent particulièrement
problème et qui sont justement des contrats très fréquents.

I] Les différents types d’avant-contrats

1) Les avant-contrats sui generis


Les contrats généraux. Sui generis car dans le CCiv il y a certaines dispositions spéciales sur
différents types de contrats. Il y a des dispositions sur le contrat de louage, le contrat de
bailContrats nommés : contrats spéciaux, ils entrent dans un cadre particulier. Puis il y a des
contrats qui ne sont pas des contrats nommés, ce sont des contrats sui generis. On y retrouvera
des clauses de confidentialité, des clauses de non-concurrence, des clauses de coopération,
contrats spécialement créés pour l’occasion.
Ce n’est pas un contrat type.
Ce contrat là va avoir pour objet d’encadrer les négociations. Contrats à durée déterminée.
Contrat qui n’a pour objet que de règlementer les négociations. A côté de ces avant-contrats
sui generis il y a des avant-contrats spécifiques.

2) Les avant-contrats nommés

A) La PUV
Des avant contrats spécifiques, avant-contrats préparatoires, qu’on retrouve très fréquemment
en matière de vente immobilière.
Il y a d’abord la promesse unilatérale de vente : contrat par lequel une des parties (le
promettant) s’engage à vendre un bien à un prix déterminé alors que l’autre (le
bénéficiaire) se réserve la possibilité d’acheter ou de ne pas acheter dans un certain
délai. C’est ce qui est généralement conclu lorsqu’on va conclure une vente immobilière. On
appelle ce contrat une promesse unilatérale de vente car seul le promettant s’engage à vendre,
le bénéficiaire ne s’engage pas à acheter.
Mais le contrat qui est ainsi conclu peut être synallagmatique. On distingue les contrats
unilatéraux des contrats synallagmatiques.
Un contrat unilatéral est un contrat par lequel une seule partie a des obligations à l’égard
d’une autre, ex : la donation.
Un contrat synallagmatique est un contrat par lequel les parties ont des obligations
réciproques. Dans un contrat synallagmatique les 2 parties ont des obligations.
La promesse unilatérale de vente (PUV) peut être un contrat synallagmatique si le bénéficiaire
de la promesse a une obligation à exécuter au profit du promettant. Le promettant s’engage
vis à vis du bénéficiaire à vendre son bien à un prix déterminé pendant une période
déterminée, le bénéficiaire peut se décider à indemniser le promettant pour immobiliser son
bien : une indemnité d’immobilisation. Les 2 parties ont des obligations réciproques donc

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contrat synallagmatique pourtant on appelle ça une promesse unilatérale de vente ! Imaginons
que le bénéficiaire prenne l’engagement d’acheter, à ce moment la promesse n’est plus
unilatérale, la promesse devient synallagmatique : cela signifie que la promesse vaut vente
donc on considère que la vente est conclue. Promesse synallagmatique de vente = vente.
Imaginons qu’une indemnité d’immobilisation soit très élevée (20 - 30% du prix,
normalement c’est 7% du prix) à ce moment là, théoriquement on est dans une promesse
unilatérale de vente, contrat synallagmatique, et bien la jp va dire, l’indemnité
d’immobilisation est tellement élevée qu’en réalité le bénéficiaire n’a plus le choix, il ne peut
pas renoncer à son acquisition, c’est d’ores et déjà un engagement d’acheter, c’est une
promesse synallagmatique. Vente déjà conclue.
PUV avec contrepartie : contrat synallagmatique, promesse unilatérale.
PUV avec indemnité trop élevée : la jp requalifie la promesse unilatérale, en promesse
synallagmatique.

B) Le pacte de préférence
Pacte de préférence : avant-contrat par lequel le propriétaire d’un bien s’engage à le
proposer au bénéficiaire du pacte dans l’hypothèse où il souhaiterait procéder à une
vente.
Le bénéficiaire va être ainsi préféré à tout autre acquéreur.
Le pacte de préférence pose moins de difficultés que la PUV, mais il a suscité une difficulté
quant à son principe lui-même : est-ce que le pacte de préférence ne constitue pas une
atteinte trop forte au droit de propriété ?
En effet le propriétaire du bien aliène sa liberté de choisir son éventuel acquéreur et en ce sens
là, s’est posé la question de savoir si ça n’était pas une atteinte au droit de la propriété et du
coup est-ce que ce pacte est valable s’il porte atteinte au droit de propriété ?
La jp s’est récemment exprimé sur cette question, dans un arrêt : 3e Ch Civ Ccass, 23
septembre 2009, dans cette affaire un pacte de préférence portait sur la vente d’un terrain et il
était prévu que pendant 20 ans le propriétaire du terrain devait proposer son bien en priorité
au bénéficiaire du pacte mais surtout il était prévu qu’il doive le faire au prix initial
d’acquisition du terrain. 3 ans plus tard, le propriétaire du terrain souhaitait vendre ce terrain à
un prix supérieur à celui qui avait été le prix initial. Pour se débarrasser de son pacte de
préférence il a invoqué que celui-ci portait atteinte à son droit de propriété et en tant que tel
devait être annulé. Si le prix n’avait pas été fixé dans le pacte de préférence cela ne l’aurait
pas gêné, il l’aurait cédé sans difficulté au bénéficiaire du pacte, sauf que ce dernier
bénéficiait d’un prix beaucoup plus avantageux que ce qu’aurait payé un tiers. La Ccass dans
cette affaire a considéré que le pacte de préférence n’était pas, au regard de la nature et de
l’objet de l’opération, constitutif d’une atteinte au droit de propriété. Par ce biais, il a
validé le pacte de préférence.

II] Les sanctions en cas de non respect d’un avant-contrat

1) Le principe
L’avant-contrat est un contrat. Contrat préparatoire mais c’est tout de même un contrat,
de telle sorte que lorsque le contrat n’est pas respecté il engage la responsabilité contractuelle
de celui qui l’a violé. Pareillement toutes les fois que cela est possible, il pourra être ordonné
une exécution forcée du contrat.
Imaginons une clause de non concurrence (CNC) dans un avant-contrat, cette CNC n’est pas
respectée et celui qui devait s’y tenir fait concurrence à son cocontractant.

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2 sanctions sont encourues :
- la réparation pour la concurrence faite en violation de l’engagement, indemnisation.
- exécution forcée de la clause, càd qu’on va exiger du cocontractant qu’il respecte son
engagement, sanction juridique : une astreinte, càd une somme d’argent à laquelle il
sera condamné par jour de retard dans l’exécution de son obligation. En lui faisant
perdre tout intérêt à ne pas exécuter cette CNC.
Indemnisation + exécution forcée.

Ces principes posent un certain nb de difficultés dans le cadre des avant-contrats spécifiques.

2) Le cas du pacte de préférence


Lorsque le promettant du pacte de préférence va vendre son bien sans respecter le pacte de
préférence : que se passe-t-il ?
Il va voir sa responsabilité contractuelle engagée, càd qu’il va devoir indemniser le
bénéficiaire du pacte, lui verser des dommages et intérêts.
La difficulté est la suivante : est-ce que le bénéficiaire du pacte de préférence peut
demander la nullité du contrat qui a été conclu avec un tiers ?
Il peut très bien considérer que l’octroi de dommages et intérêts n’est pas satisfaisant pour lui,
car si le bien est vendu, il ne souhaite pas simplement être indemnisé il veut le bien.
Ex : une société importante, cotée sur les marchés boursiers. 2 actionnaires principaux se
partagent le pouvoir, ils détiennent chacun 25% des titres de cette société. A eux deux ils
contrôlent la société. Ces 2 actionnaires sont liés entre eux càd qu’ils ont un pacte par lequel
ils se mettent d’accord sur la manière dont ils vont exercer le contrôle de la société. Si l’un
des 2 associés cèdent ses 25% à un tiers on se retrouve face à une difficulté, car ce tiers ne
sera pas lié par ce pacte, il sera libre, du coup le contrôle de la société sera divisé et il n’est
plus certain que le 1er associé puisse continuer à exercer le contrôle comme auparavant. Ce
que l’on prévoit en général c’est un pacte de préférence réciproque sur la cession d’actions :
« Si je dois céder mes actions tu as une préférence je te les cède d’abord à toi et ça n’est que si
tu refuses cette acquisition que je pourrai les céder à un tiers ». Imaginons dans cette
hypothèse, que les associés A et B aient conclu ce pacte et l’un des 2 décident de céder ses
titres mais les proposent à un tiers : donc viole le pacte de préférence. A ce moment là,
l’associé bénéficiaire ne va pas se contenter de dommages et intérêts car ce qui était important
pour lui c’est de garder le contrôle de la société qu’il avait grâce au pacte entre associés. Si les
titres devaient être cédés à un tiers il préférerait les acquérir tout seul pour avoir le contrôle :
préjudice très fort donc il peut avoir intérêt à demander l’annulation du pacte de préférence.
Dans ce cadre là est-ce possible de demander la nullité du pacte ?
Question délicate car celui qui a acheté les titres est un tiers au pacte de préférence, il n’y est
pas lié. Si on annule son contrat il sera victime de cette annulation alors que lui a acheté en
toute bonne foi sans savoir qu’il y avait eu violation d’un pacte donc pourquoi lui subirait ce
préjudice ?
La jp assez tôt : arrêt 1ère Ch Civ, 2 février 1962, a considéré qu’il y avait une possibilité de
demander la nullité du contrat mais si et seulement si :
- le tiers (celui qui avait acquis le bien en violation du pacte) avait connaissance de
l’existence du pacte
- et de l’intention du bénéficiaire du pacte de le faire jouer.
Ces 2 conditions montrent la mauvaise foi du tiers. Donc si le tiers est en réalité de
mauvaise foi, nullité possible.
Tout n’est pas réglé pour autant. Lorsqu’il y a nullité de la cession d’actions : B va devoir
rendre le prix et le tiers va devoir rendre les actions.

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A, lui, souhaite davantage que la nullité : il souhaiterait être substitué au tiers. A ne veut pas
que les actions retournent chez B, il veut qu’elles retournent chez lui et que A paie le prix au
tiers, c’est la substitution.
Est-ce qu’il peut y avoir substitution du bénéficiaire du pacte pour que celui-ci puisse
récupérer les titres en échange du prix ?
La jp a pendant longtemps strictement refusé la substitution :
2 arrêts de principe, 30 avril 1997 et 24 mars 1999, qui avaient fermement posé le principe
selon lequel la substitution n’était pas possible. On ne pouvait pas imposer à une partie de
céder ses titres au bénéficiaire du pacte.
La Ch mixte de la Ccass a, le 26 mai 2006 (document 4), opéré un revirement de jp. Elle a
accepté la substitution à la condition que le tiers connaissait l’existence du pacte et l’intention
du bénéficiaire de s’en prévaloir. Toutes les fois que l’on peut demander la nullité du pacte
de préférence, on peut également solliciter la substitution.
Cette décision a été confirmée par un arrêt de la 3e Ch Civ Ccass, 14 février 2007 (document
5).

3) Le cas de la PUV
Promesse Unilatérale de Vente.
Le promettant s’engage à vendre un bien à un prix déterminé pendant une durée déterminée.
Le bénéficiaire de la promesse a alors la possibilité de lever l’option quand il le souhaite
durant ce délai.
Qu’advient-il lorsque le promettant souhaite revenir sur son engagement de vendre le
bien avant que le bénéficiaire ait levé l’option et bien évidemment avant l’expiration de
la durée de la promesse ?
Dans le cadre de la PUV, le promettant s’engage à vendre un bien au bénéficiaire pendant 3
mois à un prix déterminé. Si le bénéficiaire a déjà levé l’option, la vente est conclue donc la
question ne se pose pas.
Dans la 2e hypothèse, la jp a considéré par un arrêt de principe, 3e Ch Civ Ccass, 15 décembre
1993, (document 6) qui énonce le principe selon lequel tant que le bénéficiaire n’a pas
déclaré acquérir, l’obligation du promettant ne constitue qu’une obligation de faire et
que la levée de l’option postérieurement à la rétractation du promettant, excluait toute
rencontre des volontés réciproques de vendre et d’acquérir. Autrement dit, le
manquement du promettant à sa promesse de vente ne peut pas aboutir à la conclusion
forcée du contrat, on ne peut pas ordonner la vente, il peut simplement y avoir des
dommages et intérêts.
Cette solution a suscité énormément de critiques, la PUV perdait beaucoup de son intérêt si le
promettant, sous peine simplement de devoir indemniser le bénéficiaire, pouvait se rétracter
avant la levée de l’option. La position de la jp n’est pas aussi absurde qu’il n’y paraît. La
Ccass nous dit : la PUV n’est pas une vente donc en cas d’inexécution je ne peux pas
ordonner la vente car l’exécution forcée du contrat ça serait l’exécution forcée de la PUV, et
donc l’exécution forcée ne devrait pas selon la Ccass aboutir à la vente, ça devrait aboutir au
maintien de la promesse jusqu’à l’expiration de la vente. La Ccass dit je ne peux pas en
déduire qu’il y aura vente car le contrat n’est pas un contrat de vente, simplement une
obligation de maintenir la promesse.
Malgré ces fortes critiques, la jp a confirmé sa position, dans un arrêt de la 3e Ch Civ, 26 juin
1996, 28 octobre 2003, 25 mars 2009 (document 7) arrêt de cassation.
Le promettant se rétracte avant la levée de l’option : le bénéficiaire de la promesse lève quand
même l’option, la Ccass casse en disant que comme le retrait des promettants avait eu lieu

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avant la levée de l’option il ne pouvait pas y avoir vente donc ça ne peut se résoudre que par
le biais de dommages et intérêts.
Donc seule solution : octroi de dommages et intérêts.

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Titre 2. La rencontre des consentements
Comment s’opère la rencontre des consentements qui va former le contrat ?
La rencontre des consentements s’opère par le biais d’une rencontre entre une offre et une
acceptation.
Cette rencontre entre une offre et une acceptation peut être précédée par des pourparlers, ou
elle peut n’être précédée de rien du tout, rencontre immédiate.
Ex : achat d’un café, le cafetier fait une offre, café à 1€, en commandant un café, on accepte
son offre. Contrat formé.
Cette rencontre entre l’offre et l’acceptation peut se faire au terme d’un long processus de
négociation lorsqu’on discute de contrats très lourds.

CHAPITRE 1. L’offre
Qu’est-ce qu’une offre ?
Quelle est sa valeur juridique ?

I] La notion d’offre
L’offre est une proposition ferme de conclure à des conditions déterminées un contrat de
telle sorte que son acceptation suffit à la formation de celui-ci. C’est donc une proposition
de contrat suffisamment précise pour que la seule acceptation suffise à permettre conclusion
du contrat.
L’offre est encore appelée pollicitation.
Cette offre doit remplir un certain de conditions de fond pour pouvoir être qualifiée d’offre
avant que l’on s’interroge sur ses conditions de forme.

1) Les conditions de fond de l’offre


L’offre doit répondre à 2 conditions :
- l’offre doit être ferme
- l’offre doit être précise

A) La fermeté de l’offre
La fermeté de l’offre signifie que celui qui énonce une offre doit être lié en cas
d’acceptation. Il n’a pas la possibilité de renoncer à la conclusion du contrat. En d’autres
termes, l’offrant (le pollicitant) doit exprimer son engagement ferme et définitif de contracter.
Si l’offrant, d’une manière ou d’une autre, se laisse la possibilité de ne pas conclure le contrat
(par ex. en affirmant que son offre devra être soumise ensuite à l’agrément du destinataire),
dans ce cas là la proposition n’est pas une offre car l’acceptation du destinataire ne suffit pas à
entrainer la conclusion du contrat.
La jp dans ce cas là dit qu’il s’agit simplement d’ « invitations à entrer en pourparlers ». Ça
n’est pas une offre.
Pour que la proposition soit une offre il faut qu’elle soit ferme, ce qui signifie que la simple
acceptation suffit, ce qui exclue ce que l’on appelle des réserves. Il ne peut pas y en avoir.
Ex : je loue tel studio à 500€ par mois, ce n’est pas une offre car cette proposition suppose
l’agrément du locataire.

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Toutes les fois qu’il y aura des réserves : le contrat n’est pas conclu par la seule acceptation, le
contrat ne sera pas qualifiée d’offre.
Il y a des vraies et des fausses réserves.
Ex : « sous réserve des stocks disponibles », ce n’est pas une vraie réserve, c’est une limite de
l’offre.
L’offre n’est ferme que si l’acceptation permet de conclure le contrat, pas de condition à
ce que l’acceptation permette cela.
C’est ce que dit la jp, dans un arrêt de la Ch Commerciale, 6 mars 1990 (document 12). Dans
cette affaire, la Ccass a dit qu’une proposition de contracter ne constitue une offre que si
elle indique la volonté de son auteur d’être lié en cas d’acceptation.

B) La précision de l’offre
L’offre est précise lorsqu’elle comporte tous les éléments essentiels du contrat.
Pour que le contrat puisse valablement être conclu il faut que les parties se soient entendues
sur tous les éléments essentiels de ce contrat. Dans une vente il y a 2 éléments essentiels : la
chose vendue et le prix fixé.
Si le prix n’est pas fixé l’offre ne sera pas précise car le contrat ne pourra pas être conclu par
la simple acceptation.
L’offre doit donc indiquer les éléments essentiels du contrat à conclure.
En revanche l’offre n’a pas à définir les éléments accessoires du contrat. Si les parties se sont
mises d’accord sur les éléments principaux, cela suffit.
Par ex. dans le cadre d’une vente si les parties se sont mises d’accord sur la chose et sur le
prix, le contrat est formé même si les parties ne se sont pas mises d’accord sur la livraison de
la chose.

C) Les difficultés de mise en œuvre


Une question a beaucoup occupé la jp sur la notion d’offre : la question des loteries
publicitaires. A travers cette question beaucoup de questions ont été traitées.
De quoi s’agit-il ?
Une personne reçoit un document publicitaire lui certifiant qu’il est le grand gagnant d’un
prix déterminé. Il est très fréquent que le résultat ne soit pas exact, il y a plusieurs étapes
avant de décider le réel gagnant.
La jp s’est posé la question de savoir comment traiter pareilles situations.
Dans un premier temps, la jp a souhaité traiter cette question sous l’angle naturel de la
responsabilité délictuelle. En effet la jp a pu considérer qu’il était fautif de faire croire à qqn
qu’il avait gagné alors que tel n’était pas le cas. Tout cela à des fins publicitaires. Et dans ce
cas là celui qui va émettre le document publicitaire va voir sa responsabilité engagée. Quel est
le préjudice qui va être indemnisé ?
La déception : lorsque j’apprends après coup que je ne suis pas le grand gagnant.
Mais est-ce qu’il y a un préjudice autre que celui-ci ?
Or le droit français n’accepte pas ce que l’on appelle les peines privées, càd les dommages
primitifs selon lesquels on va, par le biais des dommages et intérêts, punir un comportement.
En droit français on ne punit pas un comportement autrement que par le droit pénal. Principe
du droit français : en droit civil on indemnise le préjudice, on ne punit pas le comportement,
contrairement au droit américain où le juge peut prononcer des sanctions financières au regard
du comportement de la personne. L’indemnisation faite sur le fondement de la responsabilité
délictuelle est extrêmement faible.
La jp a hésité entre cette voie de la responsabilité délictuelle et la voie de la
responsabilité contractuelle consistant à dire à l’organisateur de la loterie publicitaire : vous

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vous êtes engagé à payer tel prix, à donner tel lot, et bien vous devez respecter cet
engagement. Il y a donc contrat et à ce moment là la sanction est extrêmement dissuasive.
Pour cela la jp doit qualifier les documents publicitaires d’offre. Pour qu’il y ait contrat il faut
qu’il y ait une offre. Or cette offre qui était faite en réalité, lorsqu’on lit les conditions exactes,
ça n’est pas vraiment une offre car il y a des réserves.
En dépit de cela la jp a parfois dit finalement : c’est une offre apparente. La jp a hésité entre
ces 2 voies donc, en considérant qu’il s’agissait d’une offre apparente.
La Ccass dans un arrêt de la 1ère Ch Civ, 28 mars 1995 (doc 18) a considéré que le contrat était
conclu car c’était une offre, il s’agissait d’un cas où on doit gratter pour voir le numéro et si
numéro gagnant ou pas, les conditions de la loterie étaient beaucoup plus complexes que cela
et ça permettait de participer.
La Ccass a considéré que c’était une offre et donc contrat.
2e Ch Civ, 26 octobre 2000, (doc 19) numéro qui devait correspondre à un numéro gagnant, la
Ccass a considéré que c’était responsabilité délictuelle qui était engagée car la lecture hâtive
du document pouvait créer une équivoque, donc faute d’où indemnisation.
Ccass, 1ère Ch Civ, 12 juin 2001, a là encore retenu la responsabilité contractuelle de
l’organisateur du jeu, il y a une offre car il y avait une obscurité volontaire dans le libellé du
document publicitaire.
La Ccass a opéré un revirement par 2 arrêts :
- Ch mixte, 6 septembre 2002 (doc 21)
- 1ère Ch Civ, 13 juin 2006
La Ccass se place désormais sur le terrain de ce qu’on appelle les quasi-contrats. Art 1371
CCiv.
Un quasi-contrat est presque un contrat, auquel il manque un élément. Il y a des formes de
quasi-contrats habituellement retenus en jp.
Attendu de l’arrêt de 2006 intéressant : « l’organisateur d’une loterie qui annonce un gain à
une personne dénommée sans mettre en évidence l’existence d’un aléa s’oblige par ce fait
purement volontaire à le délivrer ». L’aléa doit être mis en évidence à première lecture dès
l’annonce du gain. On ne se situe plus sur le terrain de l’offre car il manque la fermeté, donc
la jp l’a mis sur le terrain du quasi-contrat.

2) Les conditions de forme de l’offre


Comment l’offre doit-elle se manifester ?

A) Le destinataire de l’offre
Il est indifférent. L’offre peut être adressée à une personne déterminée, ses effets se limiteront
à cette personne là. Mais l’offre peut aussi s’adresser au public (RATP, hypermarché). Cela
n’a pas d’incidence, il s’agit tout autant d’une offre.
La jp, arrêt 1ère Ch Civ 28 novembre 1968 : l’offre faite au public lie le pollicitant à l’égard du
premier acceptant dans les même conditions que l’offre faite à personne déterminée.

B) Le mode d’extériorisation de l’offre


L’offre de contracter ne requiert en principe aucune forme. Elle peut être faite sous
n’importe quelle forme, par écrit, par oral… affichage d’un prix en vitrine.
La forme n’est règlementée que dans 2 hypothèses :
- certains contrats sont règlementés par le législateur afin de protéger l’une des parties,
que celle-ci soit pleinement consciente de son engagement, cas des contrats
solennels.

21
Par ex. le prêt fait par un consommateur requiert un certain nb d’éléments, pour que
l’offre soit valable il faut qu’elle indique le montant emprunté, le taux d’intérêt, le
taux d’intérêt effectif global, le tableau de rbsmt, sinon l’offre ne sera pas valable.
- les contrats conclus sous forme électronique : loi de 2004, pour la confiance en
l’économie numérique, qui a exigé que les contrats conclus par le biais d’internet
soient des contrats qui revêtent une certaine forme, doivent être fournies des
informations relatives à l’identité du prestataire. Lorsque l’offrant est un professionnel
il doit mettre à disposition les conditions contractuelles applicables de manière qu’il
permette leur conservation et leur reproduction. Il doit fournir des informations
relatives à la prestation offerte.
Il doit indiquer les moyens techniques qui permettent à l’utilisateur avant la
conclusion du contrat d’identifier l’ensemble des données qui ont été saisies et
éventuellement de les corriger. Art 1373-1 et s CCivDans un but de protection du
destinataire de l’offre afin qu’il soit parfaitement éclairé sur le contrat qu’il est amené
à conclure.

II] La valeur juridique de l’offre

Lorsque l’offre est acceptée le contrat est conclu, mais que se passe-t-il tant que l’acceptation
n’est pas intervenue ?
A partir de là 2 questions se posent :
- est-ce que l’offrant peut se rétracter ?
Ex : je fais une offre, vente de mon ordi 200€, est-ce que, avant qu’il y ait acceptation,
je peux dire finalement je retire mon offre : je ne vends plus mon ordi…? Pareillement
il y a plusieurs hypothèses : soit j’avais émis un délai dans l’offre, soit pas de délai.
Dans ces cas-là est-ce que l’offrant peut se rétracter ? La rétractation intervient
nécessairement avant l’acceptation puisque acceptation a entrainé conclusion du
contrat.
- La question de la caducité de l’offre : quand est-ce que l’offre est caduque ?
Vous avez une semaine pour réfléchir, au delà de ce délai, l’offre est caduque.
Qu’advient-il s’il n’y a pas de délai ? Ou bien si l’offrant décède entre temps ?

1) La rétractation de l’offre
L’offre est une manifestation unilatérale de volonté : seule une personne a manifesté
unilatéralement sa volonté. A partir de là il semble naturel que l’on puisse retirer son offre à
tout moment car il n’y a pas encore d’accord vis-à-vis de qqn. Le principe normalement c’est
le principe de la libre révocation de l’offre.
Toutefois ce principe se concilie mal avec la sécurité juridique, et avec notamment la
sécurité du destinataire de l’offre. Celui qui reçoit une offre peut s’attendre à ce que cette offre
soit maintenue durant un certain délai.
Si l’offre a été faite avec stipulation d’un certain délai  : dans ce cas là la jp considère
que l’offrant se doit de respecter le délai qu’il a lui-même fixé. S’il ne le fait pas il engage
sa responsabilité délictuelle. En effet le contrat n’est pas formé à ce moment là. Il a commis
une faute : il aurait du respecter le délai qu’il avait fixé, il doit réparer le préjudice subi par le
destinataire de l’offre, solution ancienne admise par la jp, 1ère Ch Civ 17 décembre 1958,
reconfirmé par un arrêt de la 3e Ch Civ le 10 mai 1968. On ne peut pas imposer la conclusion
du contrat.
Que se passe-t-il si l’offre ne précise aucun délai ?

22
Lorsque l’offre est faite au public, personne indéterminée, on va considérer que la
révocation est libre car aucune personne n’a pu considérer que le pollicitant s’était engagé
vis-à-vis d’elle. Une réserve : la loi dit que pour les offres de contrats électroniques, l’offre
engage le pollicitant tant qu’elle est accessible par la loi électronique. En dehors de cela
l’offre faite au public peut être rétractée à tout moment.
En revanche lorsque l’offre est faite à une personne déterminée, à ce moment là, la jp
considère que l’offre doit être maintenue pendant un délai raisonnable, afin que le
destinataire puisse l’examiner. Arrêt Ch des requêtes, 28 février 1870, solution reprise, 3e Ch
Civ, 20 mai 1992. Il appartient aux juridictions saisies d’apprécier si le délai qui a été imparti
était un délai raisonnable ou non.
Par ex. une société A souhaitait embaucher un directeur juridique, et elle démarche le
directeur juridique d’une société B. Ils négocient l’ensemble du contrat en mars et finalement
ils arrivent à une offre très précise. L’été s’écoule et début septembre la société A prévient
cette personne que finalement elle ne souhaitait plus l’embaucher. Cette personne là avait
démissionné de la société B en se disant qu’elle allait accepter l’offre de la société A.
La jp se demandait si l’offre avait été faite dans un délai raisonnable.
La Ccass, 24 mars 2002, a considéré que la rétractation n’engageait pas la responsabilité de
son auteur car il avait laissé un délai suffisamment raisonnable au destinataire de l’offre pour
accepter, de telle sorte que la rétractation pouvait intervenir.
Il appartient donc à la jp au cas par cas de dire si le délai est raisonnable ou pas.
Pareillement 25 mai 2005, 3e Ch Civ, offre faite le 10 mai 1999, « réponse immédiate
souhaitée », à propos d’une vente d’un bien immobilier proposé à une société. Cette société
avait mis 5 semaines avant de pouvoir accepter. Il n’y avait pas eu ici de rétractation, l’offrant
disait « mon offre est caduque ». Le délai raisonnable est écoulé. La jp a dit non, car comme
c’est une société, le délai de 5 semaines est raisonnable.
C’est la jp qui va dire si délai est ou pas raisonnable.
Il faut respecter le délai et si aucun délai n’a été fixé il faut respecter un délai
raisonnable que les juridictions apprécieront.
La Ccass a jeté un trouble d’abord par l’arrêt de la 3e Ch Civ en date du 7 mai 2008
(document 14). Dans cette affaire, une personne fait une proposition d’achat d’un immeuble le
24 juin 2000 puis elle retire cette offre d’achat le 26 juin. Tandis que le 27 juin, un courrier de
l’agent immobilier l’informe que son offre d’achat a été acceptée.
La Ccass dans cette affaire dit que si une offre d’achat de vente peut en principe être rétractée
tant qu’elle n’a pas été acceptée, il en est autrement au cas où celui de qui elle émane s’est
engagé à ne pas la retirer avant une certaine époque. En l’occurrence, l’offre d’achat avait fixé
un délai au 27 juin et donc le pollicitant s’était engagé à maintenir l’offre jusqu’à cette date.
Le trouble ici vient du visa de l’arrêt, le texte qui fonde la cassation. Le visa normalement
devrait être l’art 1382 du CCiv car faute délictuelle. Dans cet arrêt de 2008 la Ccass casse
sous le visa de l’art 1134 CCiv. En l’occurrence il n’y a pas de contrat qui a été formé donc
la sanction c’était que l’offre devait être maintenue jusqu’au 27 et l’acceptation de l’offre
signifiait que contrat valablement formé, vente conclue.
2e arrêt : 3e Ch Civ, 20 mai 2009 (doc 15) : offre sur un bien immobilier. L’offre n’est pas
assortie de délai, l’acceptation intervient bien après puisque l’offre date de 1996, acceptation
en 2001. La Ccass dit dans cet arrêt qu’il fallait rechercher si l’acceptation était intervenue
dans le délai raisonnable nécessairement contenue dans toute offre non assortie d’un délai
précis. Ce qui sème le trouble c’est le visa : càd l’article 1101 sur les conditions de
formation du contrat.
2 arrêts sur le délai de l’offre qui se fondent sur 2 visas différents.
Lorsqu’une offre est faite à une personne déterminée avec stipulation d’un certain délai,
l’offrant se doit de maintenir son offre. Problème : la sanction de cela. On considère

23
traditionnellement qu’il n’y a pas de contrat et que la rétractation de l’offre est une faute civile
qui va engager la responsabilité de l’offrant sur la voie de la responsabilité délictuelle, art
1382. La nouveauté c’est cette référence dans l’arrêt du 7 mai 2008 à l’art 1134, sur la force
obligatoire du contrat. En réalité l’attendu de la Ccass est relativement classique, en principe
une offre peut être rétractée sauf si faite avec stipulation d’un certain délai. La Ccass est
toujours extrêmement avare en explications.

Que peut vouloir dire ce visa ?


3 choses différentes :
- 1ère explication : la plus extrême, qui manifesterait un véritable revirement de jp. Qui
consisterait à dire que la rétractation ne peut pas avoir lieu et qu’en conséquence si
l’acceptation est intervenue durant le délai de l’offre, le contrat est alors valablement
conclu.
Problème de cette explication est double : si la Ccass avait voulu dire cela, peut être
l’aurait elle dit plus explicitement, il s’agissait d’un tel revirement que sans doute
qu’elle l’aurait dit différemment. 2e remarque : la position de la jp exprimée au travers
de l’offre serait alors incompatible avec la jp que l’on a analysée sur les promesses
unilatérales de vente. On ne voit pas pourquoi une offre aurait une valeur juridique
plus forte qu’une PUV. La logique commande qu’un contrat a une force obligatoire
par nature bien plus importante qu’une simple offre qui n’est qu’une manifestation
unilatérale de volonté, pas un contrat.
- 2e explication : l’arrêt en visant l’art 1134 CCiv, a voulu signifier que l’offrant,
lorsqu’il fait une offre avec délai, s’était véritablement engagé et que pèse sur lui une
véritable obligation. Ce qui va dans le sens de l’attendu de la Ccass, car cet attendu
met l’accent sur le fait que l’offrant s’est engagé à maintenir son offre, véritable
engagement de sa part. La Ccass dans son attendu emploie 2 fois le terme
d’engagement ce qui montre que l’offrant a une véritable obligation qui pèse sur son
épaule, obligation de maintien de son offre. Dans ces cas là pourquoi avoir visé art
1134, car même si obligation pèse sur l’offrant, il n’y a en revanche point de contrat,
puisqu’il n’y a pas de rencontre des volontés. Le visa de l’art 1134 s’expliquerait
alors par le fait qu’il n’y a pas d’autre disposition du CCiv sur laquelle on peut
s’appuyer pour dire qu’il y a une obligation.
En effet, le droit français classiquement ne va créer d’obligations vis-à-vis d’une
personne que s’il y a rencontre de volontés. C’est la raison pour laquelle on considère
habituellement que le simple engagement unilatéral de volonté n’est pas reconnu en
droit français, car ce qu’une personne a fait toute seule, elle peut le défaire toute seule.
Force obligatoire définie par art 1134 CCiv. Ce qu’a voulu dire la Ccass c’est que
l’engagement unilatéral de volonté peut avoir force obligatoire, et qu’il peut générer
une obligation à la charge de celui qui s’est engagé tout seul. Cela ne veut pas dire que
la sanction sera la conclusion du contrat.
- 3e explication : explication purement factuelle. Dans cette affaire, l’offrant avait remis
au bénéficiaire un dépôt de garantie pour l’assurer de son offre. En se rétractant
l’offrant souhaitait récupérer son dépôt de garantie. Toute la question tournait autour
de la récupération de ce dépôt. En l’occurrence le bénéficiaire de l’offre ne souhaitait
pas engager la responsabilité délictuelle de l’offrant qui aurait justifié le visa
traditionnel de l’art 1382. Le bénéficiaire de l’offre souhaitait garder le dépôt de
garantie, c’est cela qu’a décidé la Ccass. L’explication du visa est là : pas de
demande de dommages et intérêts. Cette 3 e explication rejoint la 2e. Si le
bénéficiaire peut valablement garder le dépôt de garantie plutôt que de demander
simplement l’indemnisation de son préjudice qui est égal à 0, c’est bien que l’offrant

24
en faisant son offre avec stipulation de délai était lié par une véritable obligation, et
qu’en déposant ce dépôt de garantie il s’était engagé à l’abandonner au cas où il
retirerait son offre. On donne bien effet à cette obligation puisqu’il accepte de le
laisser alors même qu’il n’y a pas de contrat.
De toute façon cette explication consacre la force obligatoire de l’engagement
unilatéral de volonté. Lorsqu’il est précis, cet engagement va engager celui qui le
formule.
Finalement l’explication c’est que ce visa de l’art 1134 a voulu montrer que l’offre a une
véritable force obligatoire lorsqu’elle est faite à personne déterminée avec délais précis,
la sanction ça n’est pas la conclusion d’un contrat de vente mais il n’en demeure pas moins
qu’elle crée une véritable obligation à la charge de celui qui a énoncé l’offre.

2) La caducité de l’offre
L’offre est caduque lorsqu’elle cesse de produire ses effets sans que le pollicitant ait
besoin de manifester sa volonté. Elle cesse de produire ses effets par elle-même.
2 hypothèses de caducité :
- caducité par l’effet de l’écoulement du temps
- caducité en raison du décès du pollicitant
-

A) La caducité par écoulement du temps


Il faut distinguer que offre ait été faite avec ou sans stipulation d’un certain délai.
Si offre est faite avec un certain délai :
Il est évident que l’offre devient caduque à l’expiration du délai indiqué. Et toute acceptation
ultérieure va être considérée comme sans effet.
Si offre est faite sans stipulation de délai :
Certains auteurs avaient dit l’offre ne devient caduque que lorsque l’offrant a retiré son offre.
La jp elle n’est pas en ce sens. Elle considère que l’offre devient caduque après l’expiration
d’un délai raisonnable, qui va être apprécié par les juridictions souverainement. Si une
offre a été faite et que l’acceptation est intervenue longtemps après, à ce moment il appartient
à la jp de savoir si l’acceptation est intervenue dans un délai raisonnable. Si délai raisonnable
on va considérer que offre était toujours valable et donc contrat conclu. Sinon on considère
que offre était caduque et que acceptation ne crée aucun effet.
Arrêt 3e Ch Civ 20 mai 2009, fait sous le visa de l’art 1101, dans cette affaire une offre a été
faite, un certain délai s’est écoulé, l’acceptation est intervenue longtemps après. La Cour
d’appel a considéré que le contrat était formé par cette acceptation. La Ccass casse sous le
visa de l’art 1101 CCiv, elle dit qu’il n’y a pas de contrat car l’acceptation n’est pas
intervenue dans un délai raisonnable qui est nécessairement contenu dans tout offre.

B) La caducité en raison du décès du pollicitant


2 thèses s’affrontent :
Selon la première le décès du pollicitant rend l’offre caduque. En effet il ne s’agit que
d’une manifestation unilatérale de volonté qui est nécessairement liée au pollicitant et dès lors
que ce dernier décède, l’offre devient caduque, elle n’est pas transmise à ses héritiers.
2nde thèse : l’offre faite avec stipulation d’un délai crée une véritable obligation, dès lors
cette obligation de maintien de l’offre qui pèse sur le pollicitant va suivre le régime
juridique de toute obligation càd qu’en cas de décès du pollicitant cette obligation passe
dans le patrimoine de ses héritiers. Lorsqu’une personne a conclu un contrat et qu’elle

25
décède, ses obligations passent effectivement dans le patrimoine de ses héritiers, principe de
transmission universelle du patrimoine du défunt à ses héritiers.
Position de la jp : la jp a évolué et aujourd’hui on peut distinguer selon que l’offre soit
faite avec délai ou sans délai.
Lorsque l’offre est faite avec stipulation d’un certain délai, la jp considère que le décès du
pollicitant ne rend pas l’offre caduque, que l’offre est génératrice d’une véritable obligation
qui passe dans le patrimoine des héritiers jusqu’à l’expiration du délai qui avait été stipulé.
Cela a été affirmé par un arrêt de la 3e Ch Civ, Ccass, 10 décembre 1997 (doc 13). Dans cette
affaire la Ccass dit que le décès de l’offrant n’avait pu rendre cette offre caduque.
En revanche lorsque l’offre est faite sans stipulation de délai, la Ccass, 3e Ch Civ, 10 mai
1989, considère que le décès du pollicitant va entrainer la caducité de l’offre.

26
CHAPITRE 2 : L’acceptation
C’est beaucoup plus simple que l’offre. En effet l’acceptation c’est l’expression de la volonté
du destinataire de l’offre par laquelle ce dernier donne son consentement.
L’acceptation a donc pour effet de former le contrat aux conditions émises dans l’offre.

I] Les caractères de l’acceptation

On va distinguer l’acceptation dans les contrats ordinaires, acceptation classique, et


l’acceptation spécifique, dans les contrats électroniques.

1) Dans les contrats ordinaires

Il faut dans ces contrats, que l’acceptation soit pure et simple. C’est à dire qu’il faut que le
bénéficiaire de l’offre accepte l’offre qui lui est faite sans rien modifier, ni rien n’ajouter.
En effet si une offre est faite et que le bénéficiaire de cette offre l’accepte mais en modifiant
certains de ces termes ou en en ajoutant, à ce moment là on ne peut pas considérer qu’il a
simplement accepté l’offre. On va dire qu’il a fait une contre offre.
Tant que l’on n’est pas parfaitement d’accord il ne peut pas y avoir d’acceptation.
Acceptation est complète, càd qu’elle doit porter sur toutes les conditions figurant dans
l’offre. Il n’est pas possible de limiter son acceptation.

2) Dans les contrats électroniques

Art 1369-2 CCiv qui à la suite d’une ordonnance de 2005 sur les contrats sous forme
électronique est venu préciser ce que devait être une acceptation dans ce type de contrat. Cet
art impose la règle du double clic, afin d’assurer une sécurité à la transaction, ce qui est censé
bénéficier au consommateur.
Il est en effet prévu que pour que le contrat soit valablement conclu, le destinataire de l’offre
doit avoir eu la possibilité de vérifier le détail de sa commande et son prix total et de corriger
d’éventuels erreurs avant de confirmer celle-ci pour exprimer son acceptation. Art 1369-5
CCiv. En d’autre termes, pour l’internaute, l’acceptation se fait en 2 temps, le 1 er temps
c’est lorsqu’il passe sa commande. Et ensuite récapitulatif de la commande qui expose le
bien acheté, le prix et possibilité de correction des éventuels erreurs et alors
confirmation de la commande.
Par la suite de ce double clic l’auteur de l’offre, le professionnel, doit accuser réception par
voie électronique de la commande qui lui a été faite.
Le système ne vaut pas lorsque échanges entre professionnels qui s’effectuent par voie
électronique. On revient dans le système normal.

II] Les effets de l’acceptation

Lorsque l’acceptation remplit les conditions étudiées, l’acceptation entraine tout à la fois
l’irrévocabilité de l’offre et surtout la conclusion du contrat. A condition que l’acceptation
intervienne dans le cadre du délai stipulé, ou d’un délai raisonnable si pas de délai. Il ne sera
plus possible pour le pollicitant de changer d’avis et de revenir sur l’acceptation formulée.

27
A ce moment-là, l’acceptation va entrainer la formation du contrat, sur laquelle il ne sera plus
possible de revenir.
Reste alors une question qui se pose, souvent théorique.
Est-ce que le contrat est formé à partir du moment où l’acceptation est formulée, ou est-
ce que le contrat est formé à partir du moment où l’acceptation est parvenue à
destination du pollicitant ?
C’est le problème de la conclusion des contrats entre absents, ou contrat à distance, lorsque
l’offrant et l’acceptant ne se trouvent pas dans un même lieu.
Cela vaut pour les contrats par échange de fax, par internet, ou par échange de courrier.
Puisque l’acceptation rend l’offre irrévocable que se passe-t-il si l’offrant révoque son offre
avant d’avoir reçu l’acceptation mais après que celle-ci ait été envoyée ?

Débats quant au lieu de conclusion du contrat : en effet si l’on considère que le contrat est
formé lorsque l’on émet l’acceptation, à ce moment là l’offre est conclue au lieu du domicile,
ou au lieu où se trouve l’acceptant.
Si à l’inverse le contrat est conclu à la réception de l’acceptation, à ce moment là on va
considérer que le contrat est conclu au domicile de l’offrant.
Intérêt pratique de cela pour certains contrats car les juridictions compétentes dans le cadre du
contentieux seront celles du lieu de la conclusion du contrat de travail, et aussi un intérêt
quand les contractants sont dans des pays différents. Car pour savoir à quelle forme le contrat
doit répondre on va appliquer la règle du lieu de conclusion du contrat en ce qui concerne la
forme uniquement. Règle latine.
D’autres intérêts mineurs : point de départ de la prescription ?

Position de la jp là dessus ?
En réalité, classiquement, il y a 2 thèses : théorie de l’émission ou théorie de la réception.
Théorie de l’émission : contrat formé dès qu’il a été accepté.
Théorie de la réception : il faut que le contrat ait été reçu pour qu’il puisse être formé.
La Ch des requêtes de la Ccass a, par un arrêt du 21 mars 1932, retenu le système de
l’émission, en l’absence de volonté contraire. La Ccass dit que la formation de la
promesse et le contrat sont rendus parfaits par l’acceptation des propositions qui sont
faites, dès l’instant où cette acceptation a lieu. La Ccass l’a ensuite réitéré dans un arrêt de
la Ch commerciale du 7 janvier 1981.

28
Titre 3. Les conditions de formation du contrat
Les négociations ont eu lieu, si négociations il y a eu, éventuellement précédées d’avant-
contrat, puis formellement rencontre entre une offre et une acceptation. On considère alors
que contrat est conclu, mais il n’est pas pour autant nécessairement valable. Encore faut-il
qu’il réponde à un certain nb de conditions qui sont posées. Ces conditions posent les
conditions de validité du contrat.

1ère condition de validité du contrat, la plus évidente eu égard au principe d’autonomie de la


volonté, de consensualisme : l’intégrité du consentement.
C’est d’ailleurs la 1ère condition posée par l’art 1108 qui pose les conditions de validité des
conventions. Il pose 4 conditions :
- le consentement
- la capacité de contracter
- l’objet du contrat
- la cause du contrat
On met la capacité de côté car c’est un problème relatif au droit des personnes. Il reste dès
lors 3 conditions.

CHAPITRE 1 : L’intégrité du consentement


Le consentement c’est un élément essentiel. Tous les fondements du droit des contrats
reposent sur l’échange de consentements.
C’est le consentement qui va exprimer la volonté d’une partie, or on sait que c’est cette
volonté qui va permettre de lier une partie.
L’échange de consentements va former un contrat et on va considérer à partir de là que les
parties ont accepté pleinement et librement les obligations qu’elles se sont elles-mêmes
imposées. Sans consentement on ne peut pas parler de contrat, d’obligations. Mais revers
de la médaille : l’importance du consentement va produire des conséquences. Si le
consentement est aussi important c’est qu’il est l’expression libre, éclairée de la part d’une
personne. Personne n’a forcé quiconque à exprimer son consentement. La personne qui s’est
engagé l’a fait en toute connaissance de cause, en connaissant l’étendue de son obligation et le
contenu de celle-ci. Et la protection du consentement va devenir essentielle. Il ne pourra pas
y avoir de contrat si le consentement n’est pas libre, s’il a été forcé. De la même manière
si une personne a été trompée, qu’elle n’a pas exprimé un consentement réel, à ce moment le
consentement pareillement ne peut pas produire d’effets. Le CCiv, la jp vont s’attacher à
protéger ce consentement comme le « joyau » du droit des contrats car c’est ce consentement
qui va forger le contrat, qui va en être à la source.
Ce consentement va être protégé contre tous les vices du consentement.
Les vices du consentement, ce qui affecte la liberté, seront sanctionnés.
Il est aussi possible d’essayer d’avoir une action préventive sur les vices du consentement.
Plus j’informe mon cocontractant, plus j’éclaire son consentement, moins il y a de risques
qu’il ait donné son consentement par erreur, qu’il se soit trompé. En dehors de la sanction
classique des vices du consentement il y a un arsenal préventif qui va essayer en amont de
prévenir ces vices.

29
I] Les vices du consentement

Le contrat ne peut pas être formé si consentement vicié.


L’art 1109 CCiv dispose que « il n’y a point de consentement valable si le consentement n’a
été donné que par erreur, ou s’il a été extorqué par violence, ou surpris par dol ».
Il y a donc 3 vices du consentement.
En réalité ces consentements ne jouent pas sur la même chose. L’erreur et le dol jouent sur
le caractère éclairé du consentement. Ils protègent le consentement en ce qu’ils s’assurent
que consentement éclairé = celui qui s’est engagé sait parfaitement ce sur quoi il s’est engagé.
Il y a erreur lorsque je me suis trompé, il y a dol lorsque l’on m’a trompé.
La violence répond à une tout autre logique : on a forcé mon consentement. La violence
protège la liberté du consentement. Consentement pas libre car il a été extorqué par
violence, on m’a obligé à l’exprimer. Violence physique ou morale.

1) L’erreur

Qu’est-ce que l’erreur ?


C’est le fait de se tromper. Plus précisément c’est une croyance fausse qui porte sur un des
termes du contrat. Ce vice du consentement est celui le plus fréquemment invoqué car c’est
le plus facile à invoquer. En effet l’erreur existe en dehors de toute faute de son
cocontractant. Il n’est pas nécessaire de rapporter un mauvais comportement de la part du
cocontractant. Seul suffit de prouver que l’on s’est trompé pour dire que contrat pas
valablement conclu. C’est le vice du consentement où il y a le moins de chose à prouver, si ce
n’est le fait qu’on s’est trompé. A partir de là, jp extrêmement abondante sur l’erreur.
Art 1110 CCiv, al 1er, qui énonce conditions relatives à l’erreur. L’erreur n’est une cause de
nullité de la convention que lorsqu’elle tombe sur la substance même de la chose qui en
est l’objet. Al 2nd dispose que « elle n’est point une cause de nullité lorsqu’elle ne tombe que
sur la personne avec laquelle on a l’intention de contracter à moins que la considération de
cette personne ne soit la cause principale de la convention ».
La 1er problème que pose l’erreur c’est de savoir quelles sont les erreurs qui sont admissibles
au titre du vice du consentement, càd quelles erreurs engendrent un vice du consentement.
Toutes les erreurs ne sont pas considérées comme viciant le consentement. On le comprend
assez bien car l’erreur va remettre en cause un contrat, donc à partir de là, cela va produire
une conséquence évidente : on ne peut pas remettre en cause le contrat quelle que soit l’erreur
commise.

A) Les erreurs sanctionnées par les vices du consentement

L’art 1110 CCiv fait référence à 2 types d’erreurs :


- l’erreur sur la substance, al 1er
- l’erreur sur la personne, al 2nd
À côté de ces 2 erreurs, directement visées par l’art, on en a dénombré une 3 e dont on
considère en réalité qu’il s’agit d’une erreur encore plus grave, il s’agit d’une erreur qu’on
appelle « obstacle », ayant empêché même la rencontre des consentements.

1. L’erreur obstacle
Lorsqu’il n’y a pas eu de rencontre de consentements car les 2 parties n’ont pas voulu la
même chose. Erreur qui fait obstacle à cette rencontre. Ce n’est pas qu’une personne s’est
trompée. On s’est trompé à l’origine même sur ce qu’on voulait.

30
Erreur tellement grave qu’en réalité les consentements n’ont pas pu se rencontrer.
2 types d’erreurs obstacles :
- erreur obstacle lorsqu’il y a erreur sur la nature du contrat
- erreur obstacle lorsqu’il y a erreur sur l’objet du contrat.

a. L’erreur sur la nature du contrat


Correspond à un malentendu sur l’opération juridique projetée.
Ex. : Je pensais vendre lorsque l’autre pensait louer.
Hypothèse où qqn pense conclure un contrat de crédits différés, alors que l’autre pensait
conclure un contrat de prêt à long terme. Dans ce cas le consentement n’a pas pu se
rencontrer.

b. L’erreur sur l’objet du contrat


Erreur obstacle également celle qui a porté matériellement sur la désignation de l’objet.
Ex. : je pensais acheter un terrain entier, alors qu’en réalité on me vendait plusieurs parcelles
de terrain séparées. 3e Ch Civ, 1er février 1995.
De la même manière, il y a erreur obstacle sur l’objet du contrat lorsqu’on se trompe de
monnaie. Ex. : qqn pense conclure un contrat en franc, l’autre en euro.
Dans ces cas-là, l’erreur obstacle fait obstacle à la rencontre des volontés, contrat est nul et
anéanti.

2. L’erreur sur la substance

- La notion d’erreur sur la substance


C’est de très loin, l’erreur la plus importante, la plus fréquemment admise.
Sur ce point la jp est extrêmement abondante car la notion de substance est une notion
devenue extrêmement ambiguë et qui du même coup a entrainé de grandes interprétations
jurisprudentielles et débats doctrinaux.
Au départ il n’y avait pas de difficultés. La manière dont était conçu l’art 1110 CCiv ne
générait pas de difficultés. L’erreur sur la substance même de la chose : erreur qui porte
sur la matérialité de la chose. Ex. : on pense acheter un bijou en or, alors qu’il est en plaqué
or. Ex. connu de Potier : erreur de chandelier en argent ou argenté ?
Au départ erreur purement matérielle, seul problème : c’est que cette définition de
l’erreur est extrêmement restrictive et parfois totalement inadaptée car les erreurs qui
pèsent sur la substance même de la chose sont finalement très rares, inadaptée car pour
certains biens qu’est-ce que l’erreur sur la substance même de la chose ?
Ex. : sur un ordi.
Raison pour laquelle la jp a glissé d’un concept à un autre, de la substance la jp a retenu
les « qualités substantielles ». La substance est devenue les qualités substantielles.
Qualités substantielles se sont les qualités importantes, essentielles. On s’intéresse
davantage aujourd’hui à la propriété de la chose, sa fonction, plutôt qu’à sa substance même.
Ce glissement est intervenu très vite. Il était même au moment de la rédaction du CCiv
préconisé par certains auteurs.
Jp a opéré ce glissement dans un arrêt de la Ch Civ, 28 janvier 1913. Du coup des erreurs
illimitées. Tout peut être invoqué.
Le nb d’hypothèses d’erreurs devient extrêmement vaste. Cela a suscité un certain nb de
débats afin de savoir quelle est la notion d’erreur sur la substance qu’il fallait retenir. Quelles
conditions pour que cette erreur sur la substance soit retenue ?
Comment apprécier caractère essentiel ?

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2 façons différentes peuvent exister.

a) Les conceptions possibles


Théoriquement il y a 2 manières totalement différentes de voir les choses.
- conception in abstracto, abstraite, conception objective
Face à une chose, quelle qu’elle soit, toute personne normalement constituée agissant de
bonne foi va rechercher un certain nb de qualités attachées à cette chose. Qualités qui peuvent
être définies par avance, objectivement.
- conception in concreto, appréciation subjective
Ce n’est pas la personne normale qui nous intéresse, c’est la personne en l’espèce et non pas
l’homme raisonnable, que recherche cette personne face à cette chose ?
Quels sont les éléments déterminants que cette personne là recherchait ?

L’appréciation in concreto ou in abstracto peut avoir des conséquences directes.


Ex. : une personne achète un tableau d’Auguste Renoir, intitulé Simone portant chapeau à
plumes regardant sur la droite.
Appréciation in abstracto : on définit par avance les qualités attendues pour toute personne
raisonnable par acquisition de ce tableau : garantie de son authenticité, tableau sur toile,
époque.
A partir de là, soit j’invoque une erreur sur l’une de ces qualités, et auquel cas je pourrai
demander annulation de la vente pour vice du consentement.
Appréciation in concreto : achat du tableau non pas parce qu’il s’agit de Renoir, mais
parce que c’est le portrait d’une Simone. Là on n’est plus dans les qualités objectives,
abstraites. En général toute personne qui achète ce tableau se moque que ce soit le portrait
d’une « Simone ». Lorsque je m’aperçois que c’est en fait le portrait d’une « Charlotte »,
déception considérable. Est-ce que là je peux demander la nullité du contrat ?
Si l’on admet la conception objective, non pas possible de demander nullité du contrat car ce
n’est pas une erreur qui porte objectivement sur les qualités essentielles.
Intérêt de cette position : assurer une sécurité juridique.
Si l’on admet conception subjective, on va dire peu importe les qualités normalement
attendues, pour lui qualités importantes = portrait de « Simone », possibilité alors de
demander nullité, car erreur sur qualités concrètes, donc erreur pourra être invoquée.
Avantage : effectivement il y a bien eu erreur.
Inconvénient : insécurité juridique.

Comment va-t-on définir alors cette qualité substantielle ?


La jp retient le caractère subjectif ou in concreto de l’erreur. Donc dans mon hypothèse,
la nullité pourra être demandée, il y erreur.

b) La position de la jp
La jp retient la notion subjective de l’erreur.
Pourquoi ?
Lorsque l’on protège le consentement, l’objectif n’est pas de protéger le consentement d’une
personne abstraite, raisonnable, c’est de protéger le consentement de celui qui s’est engagé,
son consentement à lui doit être éclairé, pas celui de n’importe quelle personne. De telle sorte
que nécessairement si pour une personne l’époque à laquelle le tableau a été fait importe, la
personne X s’en moque, invoquer mon consentement sur quelque chose qui ne détermine en
rien mon consentement n’a pas de sens. En revanche si la qualité en question sur laquelle il y

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a erreur a déterminé mon consentement, elle doit être prise en compte. Ce qui est important
c’est le caractère déterminant de la qualité que j’invoque pour mon consentement. Ce
qu’il faut savoir c’est si celui qui s’est engagé se serait engagé ou non s’il avait connu la
vérité. En connaissance de cause, la personne se serait-elle engagée ?
Raisonnement sur le terrain de l’erreur.
Pour le savoir il faut bien regarder au cas par cas concrètement, pour chaque personne, car
chacun va poursuivre des qualités qui lui sont propres. Et la jp l’a affirmé dans un arrêt, 1ère Ch
Civ, 28 janvier 1872, l’affaire du Magnasco. Dans cette affaire, le vendeur vendait un tableau
attribué au peintre Magnasco. Vendu à un certain prix. Finalement il s’est trouvé que ce
tableau était un faux. La Cour d’appel avait dit en l’occurrence l’acheteur ne prouve pas que
pour lui l’authenticité était une qualité substantielle. La Ccass rejette le pourvoi en cassation,
confirme la Cour d’Appel et dit qu’il appartient à l’acheteur arguant de son erreur d’établir le
caractère pour lui substantiel des qualités qu’il n’a pas trouvées dans l’objet acheté. 
L’arrêt est critiquable en ce sens qu’il paraît évident que l’authenticité d’un tableau est une
des conditions que chacun espère.
Position de principe de la Ccass est celle d’une conception subjective.

- Les caractères que doit revêtir l’erreur sur la substance


Critères nécessaires pour retenir une erreur sur la substance.
On peut dénombrer 3 critères.
1er critère : l’erreur doit avoir été déterminante du consentement.
2e critère : l’erreur doit être entrée dans le champ contractuel.
3e critère : l’erreur doit être certaine.

c) L’erreur doit être déterminée


Ce qui importe c’est de savoir si le consentement des parties a été effectivement vicié. Si
l’erreur a déterminé le consentement. Une personne aurait-elle acheté la chose si elle avait
connu la réalité ? Si réponse positive, l’erreur n’est pas déterminante. Si réponse négative,
l’erreur aura donc été déterminante du consentement.
Cette erreur s’entend désormais de manière très large puisqu’elle peut porter sur les qualités
même de l’objet ou sur l’aptitude de l’objet à réaliser le but poursuivi sans que cela porte sur
l’objet même en cause.
De la même manière, l’erreur peut être une erreur de fait, ou de droit.
Erreur de fait : hypothèse la plus fréquente mais la jp admet la possibilité que l’erreur puisse
être une erreur de droit.
Erreur de droit : lorsqu’une personne s’est trompé sur l’existence, la nature ou l’étendu des
droits sur lesquels porte le contrat.
La jp a admis cette erreur des droits dans un arrêt de la Ch Civ du 17 novembre 1930.
Toutefois, erreur de droit ne signifie pas que la jp admette que puisse être invoquée une
mauvaise interprétation du droit, une mauvaise compréhension du droit ou de la jp.
La jp ne peut pas être source d’une erreur de droit. L’erreur de droit c’est lorsque les
parties pensaient avoir la charge d’une obligation ou avoir un droit alors qu’elle ne
l’avait pas.
Ex : 24 mai 2000, 3e Ch Civ, une personne pense qu’elle est débitrice d’un droit de
préemption (obligation de vendre en priorité son bien à une personne déterminée). Elle veut
vendre son bien et propose donc en priorité le bien au prétendu bénéficiaire de ce droit. En
réalité ce droit n’existe pas. Défaut sur l’existence même de ce droit. Dans cette affaire la
Ccass a considéré que l’erreur de droit pouvait entrainer la nullité du contrat.

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L’erreur de droit en réalité c’est aussi une représentation inexacte de la réalité. On pense
qu’on est propriétaire et on ne l’est pas… erreur admise au même titre que l’erreur de fait.
De la même manière, l’erreur déterminante va jouer au profit de n’importe lequel des
cocontractants. En effet s’est posé la question de savoir s’il pouvait y avoir une erreur sur sa
propre prestation. Ou est-ce que, pour qu’il y ait erreur, il fallait nécessairement que l’erreur
porte sur la prestation de l’autre partie ?
Ex : une personne vend un bien, un tableau. Elle pense que ce tableau est un tableau sans
grande notoriété, peintre inconnu. En réalité erreur : ce tableau est en fait l’œuvre d’un grand
maitre. Peut-elle dans ces conditions invoquer l’erreur ou non ?
Finalement l’erreur portait sur sa propre prestation, le bien que l’on vend soi-même, et on est
donc censé mieux connaître que quiconque le bien que l’on souhaite vendre.
Est-ce que la personne qui elle-même a vendu son propre bien peut invoquer une erreur
de connaissance sur celui-ci ?
La jp, le droit positif l’a admis, l’erreur sur sa propre prestation. Notamment dans une
affaire célèbre : l’affaire dite de Poussin, Ccass, 1ère Ch Civ, 22 février 1978, (doc 27), arrêt
1ère Ch Civ 13 décembre 1983 (doc 28).
Faits : des époux Saint-Arroman vendent un tableau qui est de l’école des Carrache. Les
musées nationaux exercent un droit de préemption sur le tableau. Ils rachètent donc ce tableau
pour un prix faible. Par la suite ce tableau va être présenté par les musées nationaux comme
un tableau authentique de Nicolas Poussin. Nicolas Poussin qui par ailleurs ne fait pas partie
du tout de l’école des Carrache.
Les époux Saint-Arroman ont fait une action en nullité du contrat pour erreur en invoquant
erreur sur l’authenticité du tableau, ils pensaient que c’était un tableau de l’école des Carrache
alors qu’en réalité c’était un tableau de Nicolas Poussin.
La Ccass dans cette affaire a considéré que la nullité pouvait être demandée car le
consentement des vendeurs avait été vicié par leur conviction erronée que le tableau ne
pouvait pas être une œuvre de Nicolas Poussin. Pour savoir s’il y a erreur il faut toujours
confronter réalité à ce qui a été cru au moment de la conclusion du contrat. La jp a tout à fait
admis dans cette affaire que l’erreur puisse porter sur sa propre prestation.
Les décisions ultérieures de la Ccass l’ont également confirmé : dans une affaire sur la vente
d’argenterienullité sur sa propre prestation, 24 janvier 1979, 1 ère Ch Civ. Arrêt 15 novembre
1990, bronze italien du XVIe siècle. « 2nde affaire Poussin » : à propos d’une toile appelée La
fuite en Égypte, 17 septembre 2003. La jp a admis qu’une personne qui vendait un terrain
qu’elle croyait inconstructible alors qu’il était constructible demande la nullité du contrat pour
erreur sur sa propre prestation, erreur du vendeur.
Peu importe qui commet l’erreur, dès lors que l’erreur est déterminante elle est admise
au titre des vices du consentement.
Cette position est tempérée par un 2e critère que doit revêtir l’erreur.

d) L’erreur doit être entrée dans le champ contractuel


La notion d’erreur admise par la jp est extrêmement large.
N’importe quelle qualité peut être retenue puisque la jp a consacré la notion subjective des
qualités substantielles.
Risque : après coup, une fois contrat conclu, qu’une personne vienne invoquer comme
substantielle une qualité qui en réalité est tout à fait accessoire, on parle de « qualité
accidentelle »Risque pour la sécurité juridique qu’il y a à admettre toutes les qualités
substantielles qui pourraient être invoquées. Afin de parer ce risque, la jp considère que la
qualité doit être entrée dans le champ contractuel.

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Cela signifie qu’il faut que la partie qui recherchait une qualité précise en ait fait part à
son cocontractant, qu’il y ait eu en quelque sorte un accord entre les 2 parties sur le fait que
la qualité en cause existait bien. Si je fais part à mon cocontractant du fait que le prénom de la
personne dessinée est essentiel à mes yeux, à ce moment là en concluant le contrat cette
personne saura que qualité essentielle et que son éventuel défaut pourrait entrainer nullité du
contrat. En revanche si je ne dis rien à mon cocontractant, s’il ne pouvait pas s’attendre à ce
que je puisse invoquer une pareille qualité, dans ce cas je ne peux invoquer cette erreur sur les
qualités substantielles car je ne pourrais pas prouver que cette qualité a été convenue entre les
parties. Ce que demande la jp c’est simplement que la qualité substantielle soit ancrée dans le
champ contractuel, qu’on en ait fait part.
Il y a des qualités qui sont évidentes qui rentrent donc nécessairement dans le champ
contractuel. Et puis il y en a qui sont moins évidentes, accessoires et qui vont devoir faire
l’objet d’une attention particulière de la part de la partie qui recherche cette qualité.
Ex : œuvre d’art. Il existe une réglementation assez précise relativement à la présentation de
l’œuvre d’art :
- Lorsque l’œuvre est identifiée on dit qu’ « elle est de tel peintre ».
- Lorsqu’il y a un doute sur l’authenticité on dit que « l’œuvre est attribuée à ».
- Lorsque l’on pense que l’œuvre n’est pas d’un peintre réputé on dit que « l’œuvre est
de l’école de ».
- Lorsque l’on pense que tableau ne peut pas être attribué à un peintre mais que la toile
en cause ressemble, se rapproche, on dit qu’ « elle est dans le style de ».
Classification connue aujourd’hui. Lorsqu’un tableau est vendu avec l’une de ces
appellations, c’est bien que l’authenticité de l’œuvre est entrée dans le champ contractuel.
Erreur sur les qualités substantielles qui est bien rentrée dans le champ contractuel si on dit
que tableau est de Rembrandt alors que non.
De même si je vends un terrain non construit en disant que ce terrain est constructible,
nécessairement j’ai bien énoncé que constructibilité du terrain était une qualité substantielle
du bien. Si finalement il s’avère que terrain n’est pas constructible à ce moment là la qualité
fera défaut or elle était bien une qualité substantielle puisqu’elle avait été énoncée.
Il y a aussi des qualités accessoires qui doivent faire l’objet de spécification au moment de la
conclusion du contrat. Lorsque ce n’est pas une qualité évidente il va falloir prouver que cette
qualité bien que non affichée était en réalité une qualité substantielle et qu’elle est entrée dans
ce champ contractuel.

e) L’erreur doit être certaine


Pour qu’il y ait erreur il faut que la vérité soit contraire à la croyance qui existait au
moment de la conclusion du contrat.
Soit il est clair que la vérité telle que découverte est contraire à ce qui était cru au moment
de la conclusion du contrat, auquel cas l’erreur peut être invoquée.
Soit il y a des doutes, soit sur la vérité, soit doute sur la croyance qui existait au moment de
la conclusion des contrats.
Ex : affaire du Verrou de Fragonard (œuvre d’art), arrêt 1ère Ch Civ 24 mars 1987, arrêt 1ère Ch
Civ 25 mai 1988.
Faits : Dans cette affaire une personne vend aux enchères un tableau intitulé le Verrou comme
étant un tableau « attribué à » Fragonard. Puis ce tableau se révèlera par la suite un tableau
dont l’authenticité est certaine. C’est un tableau « de Fragonard ». Le vendeur demande la
nullité du contrat pour erreur, « j’ai vendu un tableau attribué à Fragonard et puis finalement

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c’est un tableau dont l’authenticité est certaine, c’est un tableau de Fragonard et donc il y a
erreur ».
Réponse Ccass : ici, l’erreur ne peut pas être invoquée. Parce qu’en vendant un tableau
comme un tableau attribué à Fragonard, les parties au contrat ont accepté un aléa qui est que
le tableau puisse être effectivement à Fragonard ou qu’au contraire le tableau finalement
puisse ne pas être à Fragonard. La croyance de départ qu’il faut comparer avec la réalité c’est
bien que ce tableau pouvait être ou pas un authentique de Fragonard. Lorsque l’aléa est levé,
lorsqu’il « se réalise » et que finalement la réalité est établie, elle peut l’être dans un sens ou
dans l’autre. En l’occurrence elle l’a été dans le sens de l’authentification de l’œuvre à
Fragonard. Dans ce cas là il y avait bien au moment de la croyance la possibilité que ce
tableau soit de Fragonard, donc pas d’erreur.
En somme lorsque le contrat a été conclu avec un aléa, et que la réalité qui est établie par
la suite entre dans le champ de cet aléa, à ce moment là, il ne peut pas y avoir d’erreur.
Imaginons hypothèse inverse : le tableau est vendu comme un tableau « de Fragonard ». Par
la suite, des doutes existent sur l’authenticité de l’œuvre et ce tableau est en quelque sorte
déclassé, et on va dire que c’est un tableau « attribué à Fragonard ». À ce moment là, est-ce
que l’erreur pourrait être invoquée ? Oui l’erreur peut être invoquée car croyance au moment
de la conclusion du contrat c’est que le tableau est d’une authenticité certaine. En réalité, il est
d’une authenticité aléatoire, il y a donc bien une différence entre la croyance de départ et la
réalité et donc la nullité peut être invoquée.
3e hypothèse : le tableau est vendu comme un tableau « école de Carrache », aléa sur son
attribution. Finalement, ce tableau est un tableau « de Nicolas Poussin ». Il y a donc au départ
un aléa, à l’arrivée une certitude. Mais la différence avec l’histoire du tableau de Fragonard
c’est que Nicolas Poussin ne fait pas partie de l’école de Carrache, donc l’aléa qui existait au
départ ce n’était pas un aléa que le tableau puisse être attribué à Nicolas Poussin. Donc on
confronte croyance au moment de la conclusion du contrat à la réalité. La réalité ne rentre pas
dans ce qui a pu être cru donc la nullité du contrat peut être demandée pour erreur car
discordance entre réalité et croyance.
Donc pour qu’il y ait erreur il faut qu’il y ait une certitude sur l’existence de cette
erreur : on est certain que par rapport à la croyance de départ, la réalité est contraire.
En revanche lorsque au départ j’ai accepté un aléa et que la réalité rentre dans cet aléa qui a
été accepté à ce moment là je ne peux pas invoquer l’erreur sur les qualités substantielles.

B) Les erreurs qui ne sont pas admises

2 catégories d’erreurs pas admises :


- Erreur sur la personne, art 1110 al 2.
- Erreur qui porte sur la chose, erreurs indifférentes.

1. L’erreur sur la personne


L’art 1110 al 2 dispose que « l’erreur n’est point une cause de nullité lorsqu’elle ne tombe
que sur la personne avec laquelle on a l’intention de contracter » mais elle poursuit en disant
« à moins que la considération de cette personne ne soit la cause principale de cette
convention  ».
Solution énoncée par le texte lui même est donc : en principe erreur sur la personne, sur le
cocontractant, n’a aucune incidence. L’exception donc c’est pour les contrats qui ont été
conclus en considération de la personne, on appelle ces contrats conclus intuitu personae.
En effet certains contrats sont conclus en considération de la personne, ex : un contrat de
travail. Il sera important de savoir dans ce cas si la personne, au moins lorsque le travail en

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question est un travail qualifié, a les compétences qu’elle a énoncées et donc si erreur sur
« les compétences, l’expérience, la qualification du cocontractant mais aussi son
honorabilité », la jp admet dans ces cas là l’erreur sur la personne. Différents contrats peuvent
être conclus en considération de la personne : le contrat médical, un contrat de commande
d’œuvres d’art.
Ex : 1ère Ch Civ 15 novembre 2005, affaire Spoerri, œuvres réalisées par un artiste
contemporain, ce sont des installations. Il apparaît qu’une personne achète une œuvre de
Spoerri, et que finalement cette œuvre a été exécutée en brevet par un tiers à qui Spoerri avait
donné des instructions et qu’elle n’était donc pas exécutée de la main même de Spoerri. La jp
a considéré qu’il y avait erreur et a annulé le contrat.
L’erreur sur la personne peut exister dans tous les contrats intuitu personae où la
considération de la personne est importante.

2. Les erreurs indifférentes portant sur une chose


Erreurs qui ne peuvent pas donner lieu à l’annulation du contrat.
Il y en a 3 types :
- Erreur sur la valeur ne peut pas être considérée comme viciant le consentement.
- Erreur sur les simples motifs.
- Erreur inexcusable.

a) L’erreur sur la valeur


Lorsqu’une personne s’est trompée sur l’évaluation monétaire du bien ou de la
prestation en cause dans le contrat. Appréciation erronée de la valeur économique de la
chose ou de la prestation.
Il faut distinguer :
- 1ère hypothèse : en général une erreur sur les qualités substantielles va avoir une
conséquence sur la valeur du bien.
Ex : vente d’un tableau dont authenticité certaine et finalement authenticité non certaine, la
valeur de ce tableau sera revue à la baisse.
Je vends un terrain non bâti comme un terrain constructible alors qu’en réalité il est
inconstructible, la valeur de ce terrain sera également revue à la baisse.
Dans ce cas là l’erreur porte sur une qualité substantielle mais elle a une conséquence sur
l’évaluation économique du bien. Afin de pouvoir demander la nullité du contrat on va se
fonder sur les qualités substantielles et non sur ses conséquences financières.

- 2e hypothèse : lorsque toutes les qualités de la chose sont parfaitement connues.


Simplement ces qualités ont été mal évaluées.
Ex : Mary Cassatt, peintre du début du XXe. Ce tableau est un tableau de Mary Cassatt, il est
authentique, pas d’erreur, en revanche Cassatt est de faible notoriété donc ce tableau n’a pas
grande valeur. Je décide de le vendre à une personne qui s’en porte acquéreur et qui l’achète
10 000€. Puis quelques temps après, en consultant des catalogues de vente, je vois mon
tableau de Cassatt en vente aux enchères à 1 million d’€. Est-ce que je peux demander nullité
du contrat ? Réponse négative. Lorsque l’erreur ne porte que sur l’évaluation, l’erreur
n’est pas admissible au titre des vices du consentement. Justification donnée assez simple :
- d’ordre général : insécurité juridique très forte, valeur d’un bien fluctuante, subjective
et on ne peut pas demander à ce qu’un contrat puisse être annulé car je m’aperçois que
j’aurais pu mieux ou moins bien vendre mon tableau. Je ne peux pas demander nullité
sur ce fondement, ça serait accepter de tenir des valeurs budgétaires beaucoup trop
imprécises et subjectives.

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- d’ordre technique : en droit il existe une technique pour contrôler l’équilibre du contrat
entre le prix et la chose, c’est la lésion. Or l’art 1118 du CCiv affirme que la lésion ne
vicie les conventions que dans un certain contrat ou à l’égard de certaines personnes.
Principe : on ne va pas annuler un contrat en raison d’un déséquilibre financier.
Principe selon lequel la lésion n’est pas admise. Or reconnaître l’erreur sur la valeur ce
serait reconnaître l’erreur sur la lésion donc contraire au principe de l’art 1118.
Donc la jp refuse de reconnaître l’erreur sur la valeur comme une erreur qui pourrait
vicier le consentement.
Il y a différentes manifestations de cela :
Erreur consistant à mal évaluer un bien. Par ex. 3e Ch Civ Ccass 31 mars 2005, problème :
une personne avait conclu une opération sur un bail à construction. Càd en réalité bail sur
lequel on a le droit de construire. On peut exploiter la construction et à l’issue du bail le
terrain construit revient au propriétaire. Dans cette affaire le preneur à bail s’était trompé sur
la rentabilité économique de l’opération. Calculs entre ses coûts d’un côté (loyer et
construction) et ses revenus possibles (exploitation de l’immeuble construit) inexacts. La
Ccass a considéré que « l’appréciation erronée de la rentabilité économique de l’opération
n’était pas constitutive d’une erreur sur la substance de nature à vicier le consentement du
preneur à bail à qui il appartenait d’apprécier la valeur économique et les obligations qu’elle
souscrivait  ». Finalement en l’occurrence l’erreur ne porte pas sur les qualités substantielles,
erreur sur la valeur même de la chose et en tant que telle cette erreur ne peut pas être retenue.
La jp a ainsi toujours écarté l’erreur sur la valeur. Historiquement énoncée pour la première
fois dans un arrêt de la Ch des requêtes 17 mai 1832, vente d’une office d’huissier, le cédant
disait qu’il avait commis une erreur sur la valeur de son office. La Ch des requêtes avait
refusé l’annulation en disant que cette erreur ne portait que sur la valeur mais pas sur les
qualités substantielles donc pas d’annulation.
La question de l’exclusion de l’erreur sur la valeur porte plutôt aujourd’hui sur la cession des
titres de sociétés.

Lorsqu’une personne cède des titres de société et qu’elle s’est trompé sur la valeur de ces
titres, la jp affirme que la nullité ne peut pas être encourue dès lors que l’erreur porte
uniquement sur l’évaluation de la société en cause ou de ses parts sociales, décision 1 er
octobre 1991, Ch Commerciale.
Soit il y a eu une erreur sur une qualité substantielle qui a pu avoir une incidence sur la valeur,
soit l’erreur c’est uniquement l’évaluation des parts sociales et auxquels cas la jp refuse
catégoriquement et de manière constante que la nullité puisse être prise en compte.

b) L’erreur sur les simples motifs


Motifs : raisons, mobiles qui ont conduits une personne à conclure un contrat.
Ex : j’achète un véhicule automobile car je pense que je vais être muté dans mon travail et que
je vais donc devoir m’y rendre en voiture. Puis finalement pas muté. Est-ce que je peux
demander nullité du contrat en disant que je me suis trompé sur les motifs qui m’ont conduits
à conclure le contrat ?
La jp refuse la nullité du contrat pour erreur sur les motifs. Elle l’a affirmé très
fermement dans un arrêt de la 1ère Ch Civ du 13 février 2001.
Faits : une personne achète un lot d’immeubles en copropriété à rénover en pensant bénéficier
d’avantages fiscaux. Puis finalement elle ne peut pas bénéficier de ces avantages fiscaux. Elle
dit qu’elle a conclu le contrat seulement pour obtenir avantages fiscaux donc erreur
déterminante car sans cela elle n’aura pas conclu le contrat.

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Réponse Ccass : l’erreur sur un motif du contrat extérieur à l’objet de celui-ci n’est pas une
cause de nullité de la convention quand bien même ce motif aurait été déterminant. Peu
importe que ce motif fût connu de l’autre partie. Le seul moyen dont dispose une personne
pour pouvoir annuler éventuellement le contrat si le motif poursuivi ne peut pas se réaliser
c’est lorsque les parties ont expressément inséré une stipulation dans le contrat faisant
du motif une condition. A ce moment là la jp accepte d’en tenir compte. La Ccass l’a réitéré
à plusieurs reprises, 3e Ch Civ 24 avril 2003, puis Ch Commerciale 30 mai 2006. Dans cette
dernière affaire il s’agissait de la vente d’un camion friterie. La personne ne bénéficiait pas de
l’autorisation administrative de l’exploiter à l’endroit où il était vendu. La Ccass refuse la
nullité car pas d’erreur sur les qualités substantielles tenant à la chose.

c) L’erreur inexcusable
On s’accorde aujourd’hui à dire qu’il n’y a pas lieu d’annuler le contrat lorsque l’erreur est
inexcusable. La solution est extrêmement ancienne en doctrine puisque avant même le CCiv
des auteurs comme Pothier énonçait ce principe. Mais en jp la Ccass a mis du temps avant de
consacrer ce principe. La Ccass a énoncé ce principe que dans un arrêt de la Ch commerciale
du 18 juillet 1956. En l’espèce, le contrat était un contrat de crédits différés. Erreur sur la
nature du contrat. Jp a dit que l’erreur commise était inexcusable car il était très facile que la
personne puisse connaître la réalité. En somme l’erreur est inexcusable lorsqu’elle est la
conséquence d’une faute de celui qui demande l’annulation du contrat. L’erreur
inexcusable est une erreur qui aurait du être dissipée facilement par celui qui l’a commise. Si
l’erreur est inexcusable la jp considère que la nullité du contrat ne peut pas être encourue. La
jp l’a affirmé à titre de principe dans un arrêt de la Ch sociale du 3 juillet 1990, « l’erreur
n’est une cause de nullité que dans la mesure où elle est excusable ».
Possibilité pour celui qui a commis l’erreur de ne pas l’avoir fait ?
Il faut regarder concrètement si l’erreur est ou n’est pas inexcusable. In concreto.
Cela conduit à apprécier caractère excusable ou pas de l’erreur selon que l’on est en face
d’un professionnel ou pas. On va apprécier avec plus de sévérité le consentement d’un
professionnel que celui d’un non professionnel. Si une personne n’a pas de connaissance
particulière dans un domaine on va plus facilement admettre erreur excusable mais cela ne
signifie pas que dès lors qu’il y a un professionnel l’erreur est inexcusable.
Ex : affaire récente, un tableau est en vente, de C. Claudel, L’amie anglaise. Une personne qui
pense acquérir un tableau de Claudel. Acquisition faite par un acheteur professionnel,
restaurateur d’œuvres d’art, expert agréé. Finalement il s’avérera que le tableau n’est pas de
Camille Claudel mais de Charles-Antoine Claudel. Le vendeur qui s’oppose à la nullité dit
« l’erreur est inexcusable, c’est un professionnel averti, expert… ».
Réponse Ccass : arrêt 1ère Ch Civ 14 octobre 2004, Ccass a considéré que l’erreur n’était pas
inexcusable quand bien même la profession de l’acheteur et sa compétence dans le domaine
de l’art n’était pas contestée et que eu égard aux circonstances de l’espèce cet acheteur a pu
croire que ce tableau était un tableau de Camille Claudel et non de Charles-Antoine Claudel.

2) Le dol

Le dol est assez proche, et éloigné de l’erreur, proche en ce sens que le dol va provoquer une
erreur, mais éloigné en ce sens que dans le cadre du dol l’erreur est provoquée.
Le dol c’est une ruse, une machination, une manœuvre qui a pour but et pour résultat de
tromper le consentement de l’autre partie. Dans l’erreur c’est objectif, personne n’a voulu
tromper personne. L’erreur c’est neutre.
Le dol présente donc un double aspect :

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- vice du consentement.
- il y a eu une faute commise par l’une des personnes.
On va retrouver cette double nature sur la sanction du dol. Le dol peut être sanctionné de 2
manières :
- comme vice du consentement le contrat peut être annulé, nullité du contrat
- comme faute de la part de celui qui commet la manœuvre dolosive, la sanction c’est de
demander des dommages et intérêts à l’auteur de la faute qui est responsable de son
acte. Responsabilité délictuelle.
Ces 2 sanctions peuvent être demandées en même temps, ou bien je ne peux en demander
qu’une. Si je demande que des dommages intérêts on parle de « dol incident » la personne se
contente de cela pour réparer son préjudice.

A) Les éléments constitutifs du dol

Le dol se manifeste par des tromperies par lesquelles une des parties provoque chez
l’autre une erreur qui le détermine à contracter. Dès lors, 2 éléments caractéristiques du
dol :
- il faut qu’il y ait eu des manœuvres
- il faut que ces manœuvres aient provoqué une erreur déterminante

1. Les manœuvres dolosives


On distingue en matière de dol 2 éléments : d’abord l’élément matériel du dol, les actes qui
font le dol et puis l’élément intentionnel du dol, la volonté de tromper l’autre.

a) L’élément matériel
Art 1116 CCiv parle de manœuvre. La manœuvre suppose une machination, des artifices.
Arrêt Ch Civ 17 avril 1982 : une femme pour attendrir son amant simule une maternité et lui
demande une libéralité pour s’en aller éduquer seule cet enfant. Finalement point de
maternité. Ccass reconnaît la machination.
Ces mises en scène sont toutefois assez rares. La jp a étendu à partir d’un arrêt du 6 novembre
1970, la manœuvre du dol au mensonge, même lorsqu’il n’y a pas de mise en scène
matérielle. Le mensonge est assimilé à la manœuvre visée par l’art 1116. Dol car mensonge
constitutif du dol. Question s’est posé de savoir si on pouvait aller plus loin et si on pouvait
reconnaitre la réticence dolosive. La réticence dolosive c’est le fait de garder le silence sur
une information que l’on connaît et que l’on sait déterminante pour l’autre partie. Dans
la réticence dolosive il n’y a aucun acte positif. Il n’y a qu’une abstention, on ne dit pas les
choses.
Ex : je vends ma maison de campagne mais je ne dis pas que va s’installer à côté très
prochainement une porcherie. J’achète un terrain en sachant très bien qu’il a des qualités dans
son sous-sol mais je ne le dis pas à mon vendeur pour acheter ce terrain à un bien meilleur
prix. Réticence = silence circonstancié.
Au départ la jp était hostile à l’admission de la réticence dolosive. Dans un 1 er tps, la Ch des
requêtes, 17 février 1874, a refusé de reconnaître la réticence dolosive comme constitutif d’un
vice du consentement. Puis jp a commencé à évoluer en disant, ça dépend des contrats. Il y a
des contrats dans lesquels s’instaurent des rapports de confiance. Dans ces contrats là, la
réticence dolosive peut être prise en compte parce que dans ce cadre là on peut s’attendre à ce

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que l’autre partie nous dévoile des informations importantes. Puis la Ccass, 1ère Ch Civ, 15
janvier 1971, a pour la première fois énoncé que la réticence dolosive devait être assimilée
au dol et donc pouvait être source de nullité. Le dol peut être constitué par le silence d’une
partie dissimulant au cocontractant un fait qui s’il avait été connu l’aurait empêché de
contracter. Par la suite, la Ccass a confirmé cette position dans divers arrêts reconnaissant la
réticence dolosive.
Q° relative à la personne qui doit délivrer l’information : si la réticence dolosive est assimilée
au dol, est-ce que les 2 cocontractants doivent donner toutes les informations qu’ils possèdent
relativement à la chose ? Est-ce que l’acheteur doit donner les informations dont il a
connaissance et doit délivrer ces informations au vendeur ?
Q° s’est posé dans une affaire Baldus, 1ère Ch Civ, 3 mai 2000.
Faits : une femme avait vendu des photographies d’un photographe très connu, Baldus, au
prix de 1000F la photo. Dans un 1er temps elle les a vendues aux enchères puis l’acheteur lui
en rachète d’autres, toute sa collection au final toujours au même prix que celui fixé lors de la
1ère vente. Puis par la suite la personne qui avait vendu ces photographies apprend que Baldus
est un photographe de très grande notoriété et qu’elles ont été vendues à un prix dérisoire par
rapport au prix de marché, et que ces photographies valaient près de 20 fois plus que la valeur.
Donc la venderesse dit il y a une réticence dolosive car mon acheteur aurait du m’informer
que ces photographies valaient beaucoup plus et qu’elles étaient d’un photographe d’une
grande notoriété. Type même de l’erreur sur la valeur, simplement l’erreur sur la valeur est
admise dans le cadre du dol.
Dans cet arrêt la Ccass dit aucune obligation d’information ne pesait sur l’acheteur.
Autrement dit la réticence dolosive ne peut pas émaner de l’acheteur. Ce n’est pas à lui de
donner des informations sur la chose dont il va se porter acquéreur.
Cet arrêt vient être complété par un arrêt de la 3e Ch Civ du 15 novembre 2000, les carrières
de Brandefert.
Faits : une personne vend un terrain, terrain très riche en fer, la société des carrières le sait, le
vendeur non. Elle ne se porte pas acquéreur, elle prend un prête-nom utilisé pour acheter le
terrain, il va revendre le terrain à la société ensuite. La Ccass dit là il y a nullité du contrat, car
là ce n’est pas une réticence dolosive qui est reprochée, ce sont des manœuvres dolosives : le
fait d’avoir utilisé un prête-nom pour acheter. La réticence à elle seule n’est pas sanctionnée si
elle provient de l’acheteur. Donc si société avait acheté terrain elle-même = réticence
dolosive, contrat n’aurait pas été annulé.

Confirmation et affirmation de l’arrêt Baldus : La jp Baldus (arrêt de principe) qui dit


que l’acheteur n’a pas d’obligation d’information a été confirmée dans un arrêt de la 3e Ch
Civ du 17 janvier 2007 (doc 38). Dans cette affaire c’était un agent immobilier qui était
également marchand de biens qui allait acheter un bien immobilier à un agriculteur. Le prix
auquel ce marchand de biens va le revendre est un prix bien plus élevé que le prix
d’acquisition. Comme dans l’affaire Baldus, le vendeur initial va lui reprocher cela en disant
qu’il aurait du l’informer que le prix du bien immobilier était beaucoup plus élevé que celui
auquel l’acquéreur l’a acheté. La Ccass conformément à jp Baldus a considéré que
« l’acquéreur, même professionnel, n’est pas tenu d’une obligation d’informations au profit
du vendeur sur la valeur du bien acquis  ».
- Première chose sur cet arrêt : dans l’affaire Baldus, la Ccass n’avait pas précisé que cela
s’appliquait même aux professionnels, or en l’occurrence elle le fait.
- 2e chose : la jp précise que l’obligation d’informations qui n’est pas à la charge de
l’acquéreur concerne une obligation sur la valeur du bien acquis.

41
Cela laisse supposer que d’autres informations quant à elles devraient pouvoir être délivrées,
y compris par l’acquéreur, lorsque ce sont des informations qui ne portent pas que sur la
valeur.
Il pourrait y avoir donc une obligation d’informations qui pèserait sur l’acheteur.
La jp dans l’affaire de 2007 élargit le champ de l’affaire Baldus mais elle précise, en
restreignant cette fois-ci la portée de l’affaire Baldus, le domaine de ce défaut
d’informations : c’est l’information qui porte sur la valeur du bien.
Limite jp Baldus et jp 2007 : lorsque pèse sur l’acquéreur une obligation d’information
spécifique.
Ex : la Ccass considère qu’un dirigeant de société a une obligation de loyauté vis-à-vis des
actionnaires de la société. S’est posée la question de savoir, lorsque le dirigeant achète des
titres de la société à un associé, à des conditions avantageuses pour ensuite revendre ces titres
à un tiers à des conditions plus intéressantes pour lui, si on applique jp Baldus ? Si oui, on dit
l’acquéreur n’est pas tenu par une obligation d’infos sur la valeur du bien acquis à ce moment
le contrat de cession de parts de société ne peut pas être remis en cause. Là la jp n’accepte
pas, et dit le dirigeant de société a une obligation de loyauté et c’est à ce titre là précisément
que le dirigeant de société a une obligation d’infos sur la valeur du bien acquis vis à vis de ses
associés. Solution énoncée dans l’arrêt Vilgrain, Ch Commerciale, 27 février 1996.

Ccass a confirmé cette jp dans un arrêt de la 1 ère Ch Civ, 25 mars 2010. Dans cette affaire la
Ccass dit que lors de la cession des parts l’acquéreur n’avait pas informé de façon précise le
vendeur sur la valorisation des sociétés, et donc que le dirigeant avait « commis un
manquement à son obligation de loyauté en tant que dirigeant d’une société dont les titres
avaient été cédés ». Elle confirme arrêt de la Cour d’Appel qui avait retenu la réticence
dolosive et avait annulé le contrat pour dol.
On peut imaginer d’autres types d’obligations spécifiques. Lorsqu’il y en a, ces obligations
spécifiques peuvent prévoir une obligation d’information.

b) L’élément intentionnel
Pour qu’il y ait dol il faut également que l’auteur du dol ait eu l’intention d’induire l’autre
partie en erreur. C’est ce qui permet justement de distinguer le dol de l’erreur spontanée.
Dans l’erreur, personne n’est coupable.
Dans le cadre du dol, l’erreur a été provoquée par une partie.
Lorsqu’il y a eu des manœuvres dolosives ou lorsqu’il y a eu des mensonges, à ce moment-
là la preuve de l’élément intentionnel est facile à rapporter. La nature même du
comportement laisse en effet présumer la volonté malhonnête de celui qui a eu ce
comportement. Dans ces cas là élément intentionnel découle des actes matériels.
En revanche la preuve de l’élément intentionnel s’avère beaucoup plus délicate dans le
cas de la réticence dolosive. Dans la réticence dolosive il n’y a qu’une abstention
(d’informations) qui peut provenir de l’oubli, de la négligence. En tant que telle on ne peut
pas en déduire l’élément intentionnel, la volonté de tromper son cocontractant. Parfois la
Ccass impose de façon rigoureuse que celui qui se plaint d’un dol démontre que le silence qui
a été gardé a été volontairement gardé pour tromper son cocontractant (1 ère Ch Civ, 21 janvier
1981) ou que la dissimulation a été pratiquée intentionnellement pour tromper le
cocontractant et le déterminer à conclure (arrêt 1ère Ch Civ 1996).
Si la jp rappelle cela parfois, souvent la Ccass adopte une position plus laxiste que cela en
permettant de présumer le dol du seul fait de l’inobservation de l’obligation
d’informations. Elle a semblé le faire dans plusieurs arrêts, 10 mai 1989, 13 mai 2003, 15

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mai 2002, dans lesquels on a pensé qu’il y avait eu un véritable renversement de la charge de
la preuve. En principe bonne foi présumée donc c’est à celui qui invoque le dol de prouver
le défaut d’informations + élément intentionnel de ce défaut.
De ces différentes jp en a résulté un certain trouble. La Ccass a précisé les choses dans un
arrêt de la Ch Commerciale, 28 juin 2005, et dans cette affaire la Ccass a rappelé le principe
selon lequel il ne peut pas y avoir de dol sans élément intentionnel d’une part et d’autre
part il faut que celui qui invoque le dol rapporte la preuve du caractère intentionnel du
manquement à l’obligation d’information.
Dans cette affaire la Ccass rappelle le principe selon lequel il faut toujours démontrer le
caractère intentionnel. Comment ? Par tous moyens.
2 indices fondamentaux :
- Le fait que le cocontractant connaissait lui-même l’information non révélée, sans
quoi il ne peut y avoir de dol.
- Que le cocontractant connaissait l’importance de l’information non révélée. En
effet lorsqu’une personne sait que l’information qu’elle détient est déterminante du
consentement il est possible de présumer qu’elle ne l’a pas délivrée à dessein. En
revanche si elle ne pouvait pas le savoir la preuve de son élément intentionnel ne peut
pas être rapportée.
Donc élément décisif : est-ce que cocontractant qui détenait l’information savait que cette
information était déterminante du consentement de son cocontractant ?

2. L’erreur provoquée par le dol

Pour qu’il y ait dol il faut qu’il y ait des manœuvres et que tout cela soit intentionnel. Mais
cela ne suffit pas à caractériser un dol. Encore faut-il que ces manœuvres aient provoqué
une erreur. En effet si les manœuvres en tant que telles n’ont pas provoqué de tromperie,
elles sont condamnables sur le terrain de l’art 1382 CCiv, mais en tant que telles ça n’est pas
un vice du consentement. Ça l’est que si et seulement si le dol a provoqué une erreur. Il faut
que le dol ait déterminé la victime à contracter.
A ce moment là, quels types d’erreurs le dol a du provoquer pour que l’on puisse constater un
vice du consentement ?

a) L’erreur doit être déterminante


Cela vaut pour tous les vices du consentement.
Pour qu’il y ait un vice du consentement il faut effectivement que l’erreur qui a été provoquée
ait été déterminante du consentement, càd que sans ces manœuvres l’autre partie n’aurait pas
contracté.
Distinction entre ce qu’on appelle le « dol principal » et le « dol incident ».
Dans le dol principal, c’est le dol sans lequel il n’y aurait pas eu de contrat.
Dans le dol incident, le cocontractant se serait tout de même engagé mais à des conditions
différentes et ce dol incident n’ouvre droit qu’à des dommages et intérêts.

En réalité pour qu’il puisse y avoir annulation du contrat et donc que l’on reconnaisse un vice
du consentement, nécessairement l’erreur provoquée par le dol a du être déterminante du
consentement. Mais le fait de commettre des manœuvres, de mentir, de commettre une
réticence dolosive tout en sachant que l’information peut être importante pour son
cocontractant, ces faits sont générateurs d’une faute, c’est lorsque ces faits fautifs ont
engendré un vice du consentement, à ce moment-là on peut sanctionner 2 choses :
- le vice du consentement, le dol, sanction = annulation du contrat

43
- le comportement fautif, sanction = dommages et intérêts.
Mais si ce comportement fautif n’a pas engendré de dol, de vice du consentement il n’en
demeure pas moins que ce comportement est fautif et que la partie qui a commis la
réticence a manqué à son obligation de bonne foi. Donc la victime de ces manœuvres va
pouvoir demander le dédommagement de son préjudice et obtenir dommages et intérêts.
Fondement : art 1382 CCiv, responsabilité délictuelle.
Lorsque les manœuvres ont entrainé un dol, possibilité de demander annulation +
dommages et intérêts.
Lorsque les manœuvres n’ont pas entrainé vice du consentement, possibilité de
demander uniquement dommages et intérêts.

b) Le champ d’application de l’erreur déterminante


Tout type d’erreur déterminante peut être retenu afin de solliciter l’annulation du contrat.
En effet, une partie a commis des manœuvres, mensonges, réticences et s’est donc comporté
de mauvaise foi, il n’y a donc plus aucune raison de la protéger et de protéger la sécurité des
transactions.
Sur le terrain de l’erreur, l’erreur sur la valeur n’était pas une cause de nullité.
Sur le terrain du dol, il n’y a plus de raison d’exclure l’erreur sur la valeur . Pas de
raison d’en limiter le domaine.
Ex : doc 37, arrêt 3e Ch Civ, 22 juin 2005. Erreur sur la rentabilité de l’opération. Erreur sur
l’évaluation du bien, prix aurait du être inférieur. Pas admis au titre de l’erreur comme vice du
consentement. Sous le visa de l’art 1116, Ccass considère que contrat peut être annulé pour
cette raison, sur la rentabilité du bien. La jp sur le terrain du dol admet l’erreur sur la valeur.
C’est la raison pour laquelle dans l’affaire Baldus le vendeur s’était placé sur le terrain du dol.

Sur le terrain de l’erreur on n’admet pas l’erreur inexcusable. La Ccass considère que le dol
quel qu’il soit rend toujours excusable l’erreur provoquée. Le dol chasse le caractère
inexcusable de l’erreur car le comportement de la partie qui a provoqué le dol ne peut pas
être protégé.
Solution énoncée pour la 1ère fois dans un arrêt du 21 février 2001, 3e Ch Civ, et réaffirmé
dans un arrêt de la 3e Ch Civ du 13 février 2007 avec une vigueur particulière puisque dans
cette affaire la Ccass énonce ce principe dans le chapeau : « Attendu qu’une réticence
dolosive (degré le moins fort du dol) rend toujours excusable l’erreur provoquée », doc 39.

B) Les parties au dol

1. L’auteur du dol

Le dol n’est une cause de nullité que s’il émane du cocontractant. En effet le dol est une
sanction contre un cocontractant qui a voulu tromper l’autre, en conséquence de quoi cette
sanction ne peut être infligée qu’à la partie qui a commis les fautes, pas à la partie innocente.
Si des manœuvres ont été commises par un tiers au contrat, à ce moment là il ne peut
pas y avoir de dol, l’art 1116 CCiv limite la sanction du dol aux manœuvres de l’une des
parties.
Sont assimilées aux manœuvres de l’une des parties les manœuvres de personnes qui agissent
sur ordre ou pour l’une des parties, l’intention de tromper est toujours imputable au
cocontractant.

44
En revanche lorsque les manœuvres proviennent d’un tiers véritable il ne peut y avoir dol. Le
tiers qui a commis des manœuvres peut être sanctionné sur le fondement de l’art 1382
CCiv, responsabilité civile engagée afin d’être condamné à des dommages et intérêts et
indemniser la partie qui a subi ces manœuvres. Mais pas de nullité du contrat sur le fondement
du dol.
En revanche, si lorsqu’il y a eu des manœuvres d’un tiers on ne peut pas invoquer le dol, si
ces manœuvres ont entrainé une erreur on peut invoquer l’erreur car dans l’erreur il n’y a
aucune faute de la part de l’une des parties, il y a simplement la constatation objective d’un
vice du consentement.
Ex : Cela arrive lorsqu’un client emprunte à une banque et qu’un tiers se porte caution. Dans
ce cas il y a 2 contrats.
Contrat de prêt entre un client et une banque, A et B, et contrat de cautionnement entre C et B.
Si le client, A, a menti à la caution, voir a commis des manœuvres, et qu’il n’ait pas informé
la caution de sa situation réelle d’endettement.
Dans ce cas la caution n’est pas cocontractant de l’emprunteur. La caution ne peut pas
invoquer le dol car la banque est innocente, ce n’est pas elle qui a trompé. En revanche la
caution peut, s’il y a lieu, invoquer une erreur sur les qualités substantielles.

2. La victime du dol

Il importe peu que la victime du dol ait elle-même agit en croyant réaliser un profit
substantiel justifié ou pas. Ccass, 1ère Ch Civ, 22 juin 2004 (doc 36) dit peu importe, dès lors
qu’il y a eu dol, il y a sanction peu importe les intérêts de la victime.
Dans cette affaire une personne avait vendu des statuettes et pensait faire une bonne affaire.
En réalité il s’est fait avoir. Versement de 200 000F de caution par l’acquéreur pour l’achat
des statuettes. Celui qui lui avait vendu les statuettes (revendues à 2 millions 4) en rachète un
lot pour pouvoir le revendre. Celui qui devait pouvoir lui achetait le lot n’est finalement
jamais venu. Dans ce cas là, l’acquéreur intermédiaire du lot de statuettes disait qu’il était
victime d’un dol, erreur sur la valeur. L’auteur du dol répond qu’il ne peut pas y avoir dol car
lui aussi a voulu nous tromper, il n’a pas dit à l’acquéreur potentiel qu’il les achetait moins
cher que ce qu’il revendait. Ccass dit peu importe, sur le fondement de 1116 CCiv, nul ne peut
se prévaloir de sa propre turpitude, de telle sorte que celui a commis des manœuvres dolosives
va voir son comportement sanctionné sur le terrain du dol, sanctionné en tant que tel.

3) La violence

La violence répond à une toute autre logique que l’erreur ou le dol.


Dans l’erreur ou le dol, le consentement est vicié parce que une personne s’est trompé ou a été
trompé. Il y a donc eu dans les 2 cas une mauvaise connaissance de la réalité. C’est pour cela
que le consentement a été donné sur le fondement de fausse croyance. Dans le cadre de la
violence il n’y a aucune erreur commise, aucune fausse appréciation de la réalité. La
violence n’entraine aucune erreur, simplement ce n’est pas le caractère éclairé du
consentement qui pose problème c’est sa liberté. La violence entame ou supprime la
liberté du consentement. Elle est donc d’une toute autre nature que les précédents vices du
consentement. En revanche la victime de la violence est contrainte de conclure ce contrat.
C’est la crainte de cette victime qui va la forcer et du coup qui va vicier son consentement.
Elle apparaît donc d’une certaine manière encore plus grave que les autres vices du
consentement et plus grave que le dol, on va aliéner la liberté d’une personne. En tant que

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telle, la violence est rarement invoquée. Pourtant c’est le vice du consentement qui connaît le
plus de dispositions dans le CCiv puisque de l’art 1111 jusqu’à l’art 1115 compris en traitent.
Pour les 2 autres vices il n’y a qu’un article par vice.
Pourquoi ? Car violence d’une elle gravité que le CCiv s’y est particulièrement arrêté. La
violence est un vice du consentement qui va pouvoir être sanctionné sur le terrain civil par
le biais de la nullité du contrat et évidemment également de dommages et intérêts contre
celui qui a commis cette violence, mais la violence va aussi pouvoir avoir un volet pénal.
Comme pour le dol, sur le terrain civil la violence a 2 aspects.
- aspect vice du consentement : contrat annulé
- aspect faute : celui qui a commis les actes de violence va voir sa responsabilité
engagée pour les fautes qu’il a commises et la victime de la violence va pouvoir
bénéficier de dommages et intérêts.

A) Les éléments constitutifs de la violence


La violence doit avoir emporté le consentement. Ce qui signifie qu’il faut qu’il y ait eu
violence, que cette violence ait été à l’origine justement du consentement qui a été donné. Et
pour cela on dit qu’il faut qu’il y ait eu d’abord une menace sur une partie, et que ces menaces
aient été illégitimes.

1. L’existence de menaces

La violence peut être physique ou morale (pressions morales, chantages…).


A ce titre peu importent les moyens employés, ce qui est important selon la jp c’est que
la personne qui s’est engagé ait redouté un mal qui peut être physique, moral, ou
pécunierarrêt Ch Commerciale, 28 mai 1991. Dans cette affaire la violence était purement
morale puisque c’était les pressions qui étaient exercées par des notables sur une personne qui
était en faillite = violence morale.
De la même manière la Ccass admet que lorsque l’on fait signer à une employée une
transaction pour qu’elle quitte l’entreprise alors même qu’elle était harcelée sexuellement
dans l’entreprise il y a violence et donc que la transaction peut être annulée, 30 novembre
2004, Ch Soc.
Comment doit s’apprécier cette menace ?
Est-ce que l’on va tenir compte d’une menace in abstracto, qui pour toute personne
raisonnable aurait conduit à entacher la liberté de son consentement, ou bien est-ce qu’il va
falloir regarder in concreto, en fonction des personnes en cause, si les menaces ont pu avoir
une quelconque portée sur la liberté du consentement ?
Les personnes vont réagir différemment et vont être plus ou moins sensibles à des menaces
lorsque l’on parle de violence morale.
On s’est demandé si les menaces devaient être appréciées au cas par cas ou
abstraitement ?
Difficulté vient de la rédaction de l’art 1112 CCiv. En effet cet art comporte en lui-même
une contradiction.
Al 1er art 1112 dit qu’ « il y a violence lorsqu’elle est de nature à faire impression sur une
personne raisonnable et qu’elle peut lui inspirer la crainte d’exposer sa personne et sa
fortune à un mal considérable et présent  ». Cet art fait donc référence aux personnes
raisonnables et laisse donc penser que l’appréciation doit se faire in abstracto. On tiendra
compte des menaces que si elles sont de nature à faire impression sur une personne
raisonnable.

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Al contredit par art 1112 al 2 qui affirme que « on a égard en cette matière à l’âge, au sexe, et
à la condition des personnes. ». Il laisse donc supposer appréciation in concreto. Ce qu’il faut
savoir ce n’est pas si dans l’absolu une personne théorique aurait été ou non impressionnée
par ces menaces. Appréciation in concreto apparaît la seule adéquate. La jp est allée dans
ce sens, elle a favorisé l’art 1112 al 2nd à l’al 1er. Jp pose le principe d’une appréciation in
concreto dans arrêt 22 avril 1986, 1ère Ch Civ.
En l’espèce une personne était atteinte de troubles nerveux qui la rendaient plus vulnérable
aux pressions exercées par son père. Pressions pour cette personne ont été jugées suffisantes
afin d’aliéner sa liberté.
Pour qu’il y ait violence il faut également que la menace soit illégitime.

2. Le caractère illégitime de la menace

Il peut y avoir des pressions, des craintes d’une personne envers une autre mais que
finalement ces craintes soient justifiées, pas illégitimes = art 1114 CCiv. La seule crainte
révérencielle envers le père, la mère ou autres ascendants ne suffit point pour annuler le
contrat. La jp a également considéré que la crainte de son épouse n’est pas un acte de
violence, 3e Ch Civ, 3 juin 1959.
Aujourd’hui q° des menaces légitimes ou illégitimes connaît une application beaucoup plus
importante sur une autre question qui est celle de l’exercice judiciaire d’une voie de droit.
Cela signifie : est-ce que je peux menacer une personne d’une action judiciaire à son encontre
si elle ne conclut pas un contrat ? Est-ce constitutif d’une violence ?
La jp historiquement estime que la menace de l’emploi d’une voie de droit ne constitue pas
une violence, arrêt Ch Civ, 25 février 1879, arrêt réitéré par la Ch des requêtes, 17 novembre
1925.
Puis la jp a énoncé dans un arrêt du 17 janvier 1984, 3e Ch Civ, la limite à ce principe : « la
menace de l’emploi d’une voie de droit ne constitue une violence au sens des art 1111 et s. du
CCiv que s’il y a abus de cette voie de droit soit en la détournant de son but, soit en en usant
pour obtenir une promesse ou un avantage sans rapport ou hors de proportion avec
l’engagement primitif ».
Dans les 2 cas il peut y avoir violence.
Principe : on peut menacer d’une voie de droit, sauf si l’on abuse de ce droit.

B) L’origine de la violence

La violence doit émaner d’une personne humaine. Elle peut à cet égard provenir du
cocontractant ou provenir d’un tiers (à la différence du dol). C’est tout à fait
compréhensible car le consentement n’a pas été donné librement et peu importe que le défaut
de liberté provienne du cocontractant ou pas, le contrat ne peut pas être valable dès lors que le
consentement n’était pas libre, et donc la nullité est encourue même si la violence provient
d’un tiers.
Si la violence n’émane pas du cocontractant il ne pourra pas lui être demandé des dommages
et intérêts.
Quant aux personnes, l’origine de la violence n’a aucune importance. Reste à savoir
quelles doivent être les origines de la violence quant aux circonstances.

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La question s’est posée de savoir si la violence pouvait avoir pour origine une situation
économique. Est-ce que, lorsqu’une personne est en situation de dépendance économique vis-
à-vis d’une autre, cela peut caractériser une violence lorsque la personne va amener l’autre à
conclure tel ou tel contrat ?
La Ccass, Ch Commerciale, 20 mai 1980, dit la puissance économique d’une partie ne
suffit pas à elle seule à caractériser la violence.
Ampleur du problème : savoir si la situation économique peut engendrer un vice de violence.
Imaginons : un petit producteur de lait a un contrat avec une grosse société de produits
laitiers. Dans ce cadre là les 2 parties ne sont pas sur un pied d’égalité en terme de puissance
économique. Si l’on admet qu’il peut y avoir une violence économique, la grande société va
pouvoir imposer le prix du lait au petit producteur, est-ce qu’on peut dire que c’est de la
violence ? Non, ce n’est pas parce qu’une personne est en situation de puissance économique
que pour autant il y a violence.
Doute vient du doc 43, Ccass, 1ère Ch Civ, 30 mai 2000, dans cet arrêt un garagiste avait vu
son garage prendre feu. Il avait fait jouer son assurance qui lui avait imposé une transaction
pour l’indemnisation. Il signe un accord avec son assurance pour être indemnisé de tant. Une
fois indemnisé, le garagiste dit qu’il n’a accepté cette transaction que parce qu’il était dans
une situation économique compliquée et il dit il y a eu violence de la part de l’assurance à
avoir ainsi abusé de ma situation économique.
Ccass dit la transaction peut être attaquée dans tous les cas où il y a violence et la
contrainte économique se rattache à la violence.
La Ccass est venue ensuite préciser cette position dans un arrêt de la 1ère Ch Civ, 3 avril 2002
(doc 44). Dans cet arrêt, une personne participait à l’élaboration d’un dico auprès d’une
société d’édition, Larousse. Cette personne accepte dans le cadre de ce travail de renoncer à
ses droits d’auteur. Cette personne dit qu’elle a été contrainte de renoncer à ses droits
d’auteurs, pas de choix donc violence en raison de la situation de dépendance économique
vis-à-vis de l’employeur. Ccass dit « seule l’exploitation abusive d’une situation de
dépendance économique faite pour tirer profit de la crainte d’un mal menaçant directement
les intérêts légitimes de la personne peut vicier de violence son consentement. » En tant que
telle la seule existence d’une contrainte économique n’est pas violence, en revanche
l’exploitation abusive de la dépendance économique, que celui qui est en position de force
abuse de cette condition en imposant à son cocontractant des choses et en le menaçant de
rompre les relations, entraine la violence.

II] Les mesures préventives à un vice du consentement

Pour pouvoir prévenir un vice du consentement, il existe finalement deux méthodes. Ni l’une
ni l’autre ne sont des méthodes infaillibles. Cela signifie que si ces méthodes sont mises en
place cela ne veut pas pour autant dire qu’aucun vice du consentement ne pourra être établi.
Simplement ce sont deux méthodes qui ont pour objectif de tenter de limiter au
maximum la survenance d’un vice du consentement.
Ces deux méthodes ce sont d’abord l’information des parties préalablement à la formation du
contrat, puis deuxièmement la réflexion accordée aux parties avant que celles-ci ne s’engagent
contractuellement.

1) L’information des parties préalablement à la formation du contrat

L’information des parties va avoir pour objectif d’évacuer les risques d’erreur et de dol. En
effet, dans l’erreur ou dans le dol, le vice vient du fait que l’un des cocontractants dispose

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d’une mauvaise information. En informant le plus complètement possible les parties, on va
tenter de remédier à un éventuel vice du consentement.

A) La reconnaissance de l’obligation d’information

L’obligation d’information résulte d’un principe général de bonne foi et de loyauté entre les
parties dans la période précontractuelle. Cette obligation signifie que toute personne qui
détient une information pertinente se doit de la transmettre à la personne avec laquelle elle
discute (à son co-négociateur). A ce titre là, il n’y a pas de conditions relatives à la qualité
même des parties, quant à savoir si finalement ces parties sont professionnelles ou non
professionnelles. Quelles que soient les parties, l’obligation d’information est due.
Maintenant, au delà de cela, le législateur vient protéger spécifiquement des parties plus
faibles, ou qui sont moins à même de pouvoir connaître certaines informations (par exemple :
le Code de la consommation énonce énormément d’obligations d’infos au profit du
consommateur, comme sur le prix, la qualité du produit).
Il existe donc une obligation générale (obligation de droit commun), et à côté de cela il existe
des obligations spécifiques à la charge de professionnels, vis à vis de personnes plus faibles.
Ex du législateur qui est venu pour règlementer cette obligation : le vendeur professionnel
doit informer le consommateur sur les caractéristiques du produit (article L 111-1 du Code de
la consommation), sur le prix et les conditions de vente, de délais de livraison et sur la période
de disponibilité des pièces de recharge.

Un type d’obligation spécifique a donné lieu à une abondante jurisprudence. C’est l’obligation
d’information du médecin à l’égard de son patient. Le médecin est tenu à l’égard de son
patient d’une obligation d’information spéciale, qui dépasse les limites simples de l’obligation
d’information de droit commun. Le premier problème qui s’est posé a été celui de la
détermination de l’ampleur, de la portée de l’obligation d’information du médecin.
Quelle information le médecin doit délivrer à son patient?
La jurisprudence dans un premier temps avait considéré que le médecin était tenu d’informer
son patient de tous les risques graves qui pouvaient survenir de par l’intervention médicale,
ainsi que tous les risques habituels (même s’ils n’étaient pas graves). En revanche, la
jurisprudence de la Ccass considérait que le médecin n’était pas tenu d’informer son patient
des risques exceptionnels.
Puis finalement la jurisprudence avait opéré un revirement (arrêts du 7 octobre 1998, puis 15
juillet 1999). Le médecin était tenu d’informer son patient de tous les risques graves même si
ces risques sont exceptionnels.
Le législateur a repris cette position jurisprudentielle dans le cas de la loi du 4 mars 2002 à
l’article L 1111-2 du Code de la santé publique. Selon cette disposition, le médecin est tenu
d’informer son patient des risques fréquents ou graves normalement prévisibles que les actes
comportent.
Ces risques peuvent être exceptionnels dès lors qu’ils peuvent être prévisibles de par
l’intervention thérapeutique qui est prévue.

Le devoir d’information du médecin est également alourdi lorsqu’on est, non pas en présence
d’une intervention thérapeutique, mais en présence d’une intervention à visée esthétique.
Comme il n’y a pas de vision thérapeutique le médecin est tenu d’informer son patient de tous
les risques fréquents ou graves mais également des simples inconvénients qui peuvent résulter
de l’intervention chirurgicale.

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L’obligation d’information doit être délivrée par le médecin tant sur le terrain thérapeutique
que sur le terrain esthétique préalablement à toute investigation, traitement ou action de
prévention.
Le défaut d’information du médecin est alors sanctionné sans tenir compte de son
éventuelle faute ou pas. Peu importe que le médecin ait ou n’ait pas commis de faute dans
son intervention s’il n’a pas préalablement informé le patient comme il se devait de le faire sa
responsabilité est engagée. 1ère Ch Civ 8 avril 2010 (doc 8) illustre ce détachement complet
qu’il y a entre d’un côté l’obligation d’information et de l’autre côté l’éventuelle faute
du médecin.
Dans cette affaire un patient avait subi une intervention chirurgicale et avait subi une infection
nosocomiale à cette occasion. La cour d’appel avait exclu la responsabilité du médecin pour
défaut d’information en relevant que le médecin n’avait commis aucune faute dans son
intervention, la Ccass a dit peu importe, l’absence total de faute du praticien était sans
incidence sur la détermination de la teneur de son devoir d’information. Autrement dit le
médecin a 2 sources possibles de responsabilité : une première source de responsabilité
préalable à son intervention (obligation d’information) et une seconde source de
responsabilité lorsque le médecin commet une faute dans l’exercice de son acte médical.

B) La sanction du défaut d’information

Dans un certain nombre d’hypothèses légales le législateur a lui-même énoncé la sanction


pour des obligations d’information précises.
Ex : lorsque le banquier n’a pas correctement informé l’emprunteur des conditions du prêt la
sanction prévue légalement est celle de la déchéance du droit à intérêt. Le banquier perd son
droit à percevoir les intérêts, emprunteur n’a plus qu’à rembourser le capital. Dans d’autres
hypothèses les sanctions peuvent même être pénales à l’encontre du professionnel qui manque
à son obligation.
Mais sur les autres obligations d’information, pour lesquelles il n’existe pas de dispositions
précises, qu’elle est la sanction ?
Sanction peut être double.
- 1ère sanction possible : la responsabilité
Celui qui manque à son obligation d’information précontractuelle commet une faute en
conséquence de quoi il peut voir sa responsabilité engagée, comme toute personne qui
commet une faute. A ce moment là, en toute logique, fondement de la responsabilité =
responsabilité précontractuelle donc responsabilité délictuelle, 1382 CCiv.
Cependant en matière d’obligation du médecin, la jp a hésité sur le fondement. En effet, on
peut considérer que l’obligation d’information du médecin entre déjà dans le cadre du contrat
médical ou bien on peut considérer que l’obligation d’information est préalable au contrat
médical et donc qu’à ce titre là elle doit être traitée sur fondement de l’art 1382. La pratique
médicale laisse plutôt penser que l’obligation d’information du médecin entre déjà dans un
contrat médical. Pourquoi ? Car lorsqu’un patient se rend chez son médecin pour envisager
une éventuelle intervention il paie son médecin, si à l’issue de la consultation le patient dit
non finalement pour l’intervention, le patient paie tout de même la consultation donc il y a
bien un contrat médical, en réalité un « avant-contrat médical » qui a pour objet de préparer
une éventuelle intervention, mais c’est déjà un contrat et à ce titre si le médecin n’a pas
correctement exécuté son intervention, sa responsabilité devrait être engagée sur le fondement
de l’art 1147 CCiv, responsabilité contractuelle. C’était le sens de la jp.
Ex : arrêt 1ère Ch Civ 8 avril 2010, Ccass a visé art 1147 CCiv et art 111-2 code de la santé
publique pour montrer que la responsabilité du médecin était une responsabilité

50
contractuelle. La Ccass postérieurement à cet arrêt, dans un arrêt de la 3e Ch Civ, 3 juin 2010,
(doc 9) a opéré un revirement en visant expressément l’art 1382 CCiv. Ccass dans cette
affaire relève que la responsabilité est délictuelle car le médecin se doit d’informer le patient
préalablement au fait de recueillir son consentement. Cette analyse est critiquable car
l’information doit être délivrée avant que le consentement à l’opération ne soit donné.
Cette information peut très bien s’inscrire dans le cadre d’un avant-contrat médical qui
correspond à la pratique mais qui conduit nécessairement à retenir une responsabilité
contractuelle.

Qui dit responsabilité dit indemnisation du préjudice subi par le patient. Préjudice subi
du fait du défaut d’information. Indemnisation = perte de chance d’avoir refusé l’intervention
et de ne pas avoir subi le préjudice en question.
Il faut bien distinguer la responsabilité pour défaut d’information et la responsabilité
éventuelle pour faute du médecin.
Difficulté : qu’advient-il lorsque l’opération était nécessaire ? Lorsque le patient était obligé
de subir l’intervention ? Dans ce cas là, s’il n’y avait pas d’alternative, quel est le préjudice
indemnisable ? Peut-on encore dire que c’est le fait que le patient aurait été informé ? Non car
le patient n’avait pas le choix.
Est-ce que pour autant lorsque opération nécessaire ça dispense le médecin de son obligation
d’information ? Non.
La Ccass a longtemps hésité et puis finalement arrêt 3e Ch Civ 3 juin 2010 Ccass a énoncé
une position de principe. Elle considère que le non-respect du devoir d’information doit
toujours conduire à la réparation d’un préjudice, même si le patient ne disposait pas
réellement d’alternative. Peu importe il doit toujours y avoir quand même réparation.
En réalité cela peut se justifier car quand on dit qu’il n’y a pas d’alternative le patient aurait
pu se faire opérer dans d’autres conditions, par d’autres personnes.
Idée qu’il n’y a pas d’alternative compliquée à appliquer.

- 2e sanction possible : annulation du contrat


Si le défaut d’information a induit la personne en erreur, voir est constitutif d’un dol
(réticence dolosive) à ce moment là l’autre sanction possible c’est l’annulation du contrat
conclu du fait d’un vice du consentement. La mesure préventive n’a pas fonctionné et donc
il peut y avoir un vice du consentement, erreur ou dol.

2) La réflexion des parties

Autre méthode : permettre aux parties avant de conclure définitivement leur contrat de
réfléchir pleinement au contrat qui leur est proposé.
Pour cela il existe 2 techniques :
Soit accorder aux parties un délai de réflexion, dans ce cas là le cocontractant ne pourra
s’engager qu’après ce délai.
Ex : prêt en matière immobilière. Dans ce domaine et selon l’art L312-10 Code de la
consommation, l’établissement bancaire doit faire une offre de prêt valable au minimum 30
jours et l’emprunteur n’a pas le droit d’accepter l’offre de prêt avant l’expiration d’un délai de
10 jours à compter de la réception de l’offre. Idée : c’est que l’emprunteur puisse réfléchir
pendant 10 jours sur le contrat qui lui est proposé et ainsi si au bout des 10 jours il donne
effectivement son acceptation on pourra penser que son consentement a été parfaitement
éclairé.

51
Droit de repentir : possibilité pour un cocontractant de se rétracter
discrétionnairement alors qu’il avait déjà donné son consentement.
Ex : en matière de démarchage à domicile, de téléachat, de crédits à la consommation, dans
ces cas là le législateur a prévu un délai de rétraction du contrat après l’acceptation de l’offre.
Le consommateur peut 7 jours après avoir accepté le contrat finalement revenir sur son
consentement car on va considérer qu’il a pu réfléchir et que dès lors il pourra renoncer à son
obligation. Délai retrouvé en matière immobilière dans le cadre de l’acceptation à une
acquisition immobilière. Lorsqu’une personne accepte une acquisition immobilière, la loi
SRU permet à l’acquéreur de revenir sur son consentement pendant les 7 jours qui suivent son
acceptation. Là encore on voit que l’objectif c’est de prévenir un vice du consentement en
permettant aux parties de réfléchir au contrat qu’elles ont conclu.

52
CHAPITRE 2 : L’objet

Objet = contenu du contrat.


Art 1108 : un objet certain qui forme la matière de l’engagement, parmi les conditions de
validité du contrat.
L’objet c’est à quoi les parties se sont-elles engagé ? Contenu de l’engagement ? Contenu des
obligations ?
Problème de la cause : pourquoi on s’est engagé ?
Dans le CCiv objet = art 1126 1130. Ces dispositions connaissent une certaine imprécision
quant aux termes employés puisque parfois elles traitent de l’objet du contrat et parfois de
l’objet de l’obligation.
En réalité il est assez facile de distinguer ces 2 notions :
- objet de l’obligation relatif à une obligation spécifique.
- objet du contrat relatif au contrat en général, approche plus globale, mise en relation
des différentes obligations entre elles. Il peut y avoir des contrats plus complexes où il
peut y avoir plusieurs obligations entre les parties.

I] L’objet de l’obligation

Dans quelles conditions le contenu de l’obligation est-il valable ?


- D’abord il faut que l’objet existe.
- Ensuite il faut que l’objet soit déterminé.
- Enfin il faut que l’objet soit licite.

1) L’existence de l’objet de l’obligation

Pour que le contrat puisse se former il faut que l’objet existe au moment où les deux volontés
se rencontrent. L’objet c’est l’élément matériel du contrat. On ne peut pas envisager que 2
parties contractent dans le vide. De telle sorte que l’existence même de l’objet de l’obligation
apparaît évidente. Si par ex 2 parties concluent un contrat de vente il est bien évident qu’il
faut que l’objet de la vente existe. Si objet n’existe pas = contrat nul.
Question apparaît évidente toute les fois que les obligations sont des obligations en nature
(obligations qui ne sont pas une somme d’argent).
Quand obligation est une somme d’argent il n’y a pas de problème car l’argent existe toujours.
Si la règle apparaît évidente il y a toutefois un certain nombre de difficultés :
- Difficulté qui tient au contrat qui porte sur des choses futures.
- Difficulté qui tient à l’existence de contrats aléatoires.

A) Les choses futures

Règle art 1108 CCiv, reprise par l’art 1601 en matière de vente : il faut que l’objet existe.
Mais pour autant le droit français accepte qu’un contrat puisse porter sur une chose
future, une chose qui n’existe pas encore, même s’il n’est pas certain qu’elle existera un
jourart 1130 al 1er CCiv l’énonce, les choses futures peuvent être l’objet d’une obligation.
Ex : on peut vendre un immeuble à construire, art 1601-1 CCiv ; on peut vendre des meubles
à fabriquer ou à produire ; on peut vendre une récolte à venir.

53
Dans tous ces cas, il suffit que la chose soit de nature à exister un jour pour que le contrat soit
valablement conclu.
Soit la chose existe un jour et auquel cas le contrat va produire ses effets normalement, soit la
chose n’existe jamais et dans ce cas le contrat est considéré comme n’ayant jamais réellement
existé (caduc) puisqu’il n’aura jamais eu d’objet.
Il y a quelques limites à la possibilité de conclure un contrat sur une chose future.
Hypothèses où il peut y avoir un danger à conclure un contrat sur une chose future : un artiste
ne peut pas vendre toute ses œuvres futures, art L131-1 du code de la propriété intellectuelle ;
pas de contrat sur la succession future, art 1130 al 2 = Limites marginales en-dehors
desquelles la conclusion d’un contrat sur des choses futures est valable.

B) Le contrat aléatoire

Les parties acceptent l’existence d’un aléa relatif à l’objet de leur obligation. Il est
possible que leur objet soit important ou il est possible que objet soit finalement inexistant.
Ex : lorsqu’une personne achète par avance à des pêcheurs leur pêche, la vente demeure
valable même si les pêcheurs ne ramènent aucun poisson car chacun a alors accepté un aléa.
Celui qui achète par avance a accepté l’aléa que l’objet soit important ou inexistant, de même
pêcheur a accepté l’aléa de vendre pêche très florissante ou inexistante. Quand j’achète un
immeuble en l’état futur d’achèvement j’achète sans aucun aléa. En revanche il y a des
contrats pour lesquels il y a un aléa, dont le prix va tenir compte. Dans ce cas, la conclusion
d’un contrat sur les choses futures est valable mais dans ce cas, même si la chose future ne
vient pas à exister, le contrat reste valable car c’est l’aléa qui a été convenu.

I. La détermination de l’objet de l’obligation

Le principe apparaît logique, un contrat ne peut pas être exécuté si on ne sait pas
exactement à quoi les parties se sont engagées. Il faut que l’objet de l’obligation soit
déterminé pour savoir ce à quoi on s’est engagé. Cette exigence est formulée de manière un
peu complexe à l’art 1129 CCiv. Selon cet art « il faut que l’obligation ait pour objet une
chose au moins déterminée quant à son espèce. La quotité de la chose peut être incertaine,
pourvu qu’elle puisse être déterminée ».
En réalité il faut distinguer 2 types d’objet de l’obligation.
Question plus délicate lorsque l’on traite du cas particulier des obligations monétaires, ce ne
sont pas des choses.

A) Les choses en nature

Prestations de service ou chose matérielle : obligation ne peut être exécutée que lorsqu’on sait
exactement en quoi elle consiste.
Effectivement lorsque obligation porte sur une chose, elle doit être déterminée ou dit-on tout
au moins déterminable. La chose est déterminée lorsque au moment de la conclusion du
contrat elle est précisément connue par les parties.
Ex : je vends tel tableau de Velasquez.
La chose peut également être déterminable. Càd que si la chose n’est pas exactement
identifiée au moment de la conclusion du contrat elle est en revanche identifiable au
moment où l’on doit exécuter le contrat.

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Ex : je vends une tonne de blé à livrer le 1 er janvier 2011, cette tonne de blé n’est pas
identifiée au moment où le contrat est conclu, en revanche elle est déterminable.
Lorsque la chose est un « corps certain », càd une chose unique, elle est toujours clairement
identifiée et il n’est pas possible de l’interchanger.
Lorsque l’on est en présence d’une « chose de genre » (blé, essence, eau) s’il s’agit d’une
chose interchangeable, fongible, il suffit alors d’en déterminer l’espèce et la quotité. Lorsque
les choses sont des choses en nature, l’objet de la chose doit être déterminée ou
déterminable pour permettre exécution de l’obligation.
Situation plus complexe pour les sommes d’argent.

B) Les obligations monétaires

Est-ce que le prix dans un contrat doit être déterminé ? Ou est-ce qu’il peut ne pas être
déterminé sans pour autant entacher la validité du contrat ?
Enjeu : si le prix n’est pas déterminé au moment de la conclusion du contrat, on risque
de mettre une partie sous la dépendance de l’autre.
En effet, imaginons que une partie conclu un contrat de distribution avec une autre.
Ex : une personne a un magasin de distribution de produits Chanel. Contrat avec la société
Chanel, chargée de fournir les produits qui seront en vente dans son magasin. La marque
Chanel va percevoir un certain nombre de commissions sur les ventes réalisées. Imaginons
dans ce cadre là que les prix des produits que Chanel va vendre à son distributeur ne sont pas
fixés. Que se passe-t-il alors ? Le distributeur Chanel est complètement sous la dépendance de
Chanel car Chanel va pouvoir lui fixer les prix qu’elle souhaite, le distributeur ne pourra pas
refuser car s’il refuse il n’est pas livré par Chanel et ne peut dès lors plus utiliser son fond de
commerce. Donc les prix fixés vont l’être en situation de force économique par Chanel.
Dépendance vis-à-vis de Chanel.
Si le prix n’est pas fixé dès le départ le risque c’est évidemment de créer un déséquilibre entre
les parties et de faire en sorte que la partie qui va être en condition de force abuse de sa
position et impose le prix à son cocontractantenjeu général.
Quel est le droit positif ?

1. L’évolution jurisprudentielle
Quelles sont les dispositions légales qui existent ?
a) Les dispositions légales existantes
Il existe certaines règles spéciales pour certains contrats spéciaux, qui prévoient que le
prix doit être déterminé dès l’origine du contrat.
Ex le plus marquant : la vente, dans un tel contrat l’art 1591 dispose que le prix de la vente
doit être désigné et déterminé par les parties. Le prix doit être fixé dès l’origine.
Il ne faut pas que l’une des parties puisse influer sur la détermination du prix.
De la même manière l’art 1709 CCiv prévoit que le prix soit fixé dans le cadre d’un contrat
de bail. Autrement dit, il faut que le loyer soit également prévu.
Dans ces 2 cas (vente, bail) le prix doit donc être déterminé ou (Ccass, 16 janvier 1925)
objectivement déterminable (sans qu’une des parties puisse influer sur la détermination du
prix).
A part cela, il n’y a pas de dispositions générales du droit des obligations sur la
détermination du prix. Art 1129 est peu adapté à l’obligation monétaire.
Problème des contrats de distribution. Dans ceux-ci il y a un contrat cadre entre le
distributeur et le fabricant. Ce contrat cadre prévoit le principe de la distribution (ex : contrat
de franchise). En dehors de ce contrat cadre il va y avoir durant la période de ce contrat de

55
distribution, des contrats d’approvisionnement, contrats d’application qui viennent en
application du contrat cadre.
Au moment où on conclut le contrat de distribution le prix ne peut pas être fixé pour
toute la durée du contrat de distribution.
Ex : pompistes de marque, contrat de distribution d’une station service Total, Total ne sait pas
l’évolution du cours du pétrole sur les 6 prochains mois donc elle ne peut pas fixer un prix
pour les livraisons des 10 prochaines années, si flambée de cours du pétrole ou
baisserépercuté chez le pompiste. De la même manière Chanel ne sait pas à quel prix elle
sortira sa gamme de produit pour les prochaines collections.
Donc dans ces contrats toute la difficulté vient du fait qu’au moment où le contrat cadre
de la distribution est conclu, les prix pour les futurs approvisionnements ne peuvent pas
être déterminés. Le risque est alors que le distributeur soit à la merci du fabricant. Problème
de dépendance créée entre le distributeur et le fabricant.

b) La position de la jp
Dans un premier temps la jp a assimilé les contrats de distribution à des contrats de
vente, elle y a donc appliqué l’art 1591. 27 avril 1971, 5 novembre 1971 Ch Com, 12 février
1974, contrats de bièresjp a appliqué art 1591 : ces contrats sont nuls s’ils ne fixent pas le
prix dès l’origine, évidemment ces contrats ne pouvaient le faire donc ils ont été annulés.
Solution doublement critiquable car ces contrats ne sont pas des contrats de vente donc
application d’une disposition de la vente à des contrats qui ne sont des contrats de vente, et
critiquable sur le plan des principes car elle empêche la conclusion de ces contrats.
Revirement dans un arrêt de la Ch Com 11 octobre 1978 en considérant que la prohibition
tenait toujours mais ce n’était plus sur le fondement de l’art 1591 (vente) mais sur le
fondement de l’art 1129. Autrement dit la jp a raisonné par analogie, ce que l’art 1129
préconise pour les choses elle l’applique pour le prix et assimile ainsi obligations monétaires
aux obligations en nature en considérant que comme pour les choses, le prix doit être
déterminé. Donc c’est à partir de là que la jp s’est fondé pour exiger que le prix soit
déterminé ou objectivement déterminable dès la conclusion du contrat.
Jp critiquable car elle ne remplit pas sa fonction. Fonction de cette jp : protéger une partie
contre la fixation unilatérale du prix, mais en réalité elle ne la protège pas car le distributeur
n’a aucun intérêt à demander l’annulation de son contrat ou il ne peut le faire qu’en désespoir
de cause. Distributeur pas réellement protégé. 2nd problème : art 1129 = condition de validité
du contrat. Donc la sanction c’est la nullité du contrat, or nullité = anéantissement rétroactif
du contrat, on fait comme si le contrat n’avait jamais existé.
Dans ces contrats de distribution, il fallait tout remettre en cause, comme si le contrat n’avait
jamais existé. Situation alors très complexe.
A partir de 1978 peu à peu la jp a tenté d’assouplir sa position.
Un des arrêts importants de ces étapes = arrêt Ch Com 16 juillet 1991 qui prévoyait que pour
que le contrat soit valable il fallait que les prix soient librement débattus et acceptés, sans
savoir exactement dans quelle hypothèse on allait considérer cela.
Arrêts Alcatel, novembre 1994, jp franchit un nouveau pas : fixation unilatérale possible si
celui qui fixe le prix ne méconnait pas son obligation d’exécuter le contrat de bonne foi.
Finalement un important revirement est intervenu avec 4 arrêts de l’assemblée
plénière, 1er décembre 1995, qui décident 2 choses :
D’abord que l’art 1129 CCiv n’est pas applicable à la détermination du prix, applicable
à la détermination de la chose mais pas du prix.
La Ccass considère du coup que la question de la détermination du prix n’est plus une
condition de validité du contrat mais se situe dans le cadre de l’exécution d’un contrat

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valablement formé. Contrat valable sans prix déterminé ou déterminable et ensuite c’est
uniquement la mise en œuvre de ce contrat, exécution des obligations, qui va être jugée.
La Ccass dit que seul l’abus dans la fixation du prix peut être sanctionné et qu’elle donne
alors lieu soit à résiliation soit à indemnisation.

2. L’explication de la position jurisprudentielle actuelle


- Cette jp du 1er décembre 1995 ne remet pas en cause les dispositions du CCiv qui
existent (art 1591).
De telle sorte que dans les contrats pour lesquels il existe une obligation de prévoir dès
l’origine un prix déterminé ou objectivement déterminable cette obligation subsiste.
Ex : dans un contrat de vente, si pas de prix déterminé ou objectivement déterminable, le
contrat est nul.
- Lorsque aucune disposition légale n’existe, à ce moment là le contrat est valablement
formé même si le prix n’est pas déterminé.
Ce n’est plus une condition de validité du contrat. Cela signifie que si contrat valablement
formé, il doit être exécuté. Et c’est alors dans le cadre de l’exécution du contrat que la jp va
contrôler la fixation du prix. Elle va simplement contrôler l’abus dans la fixation du prix. Elle
ne va pas contrôler qu’un prix est trop élevé ou pas assez, pas être juge du prix. La seule
chose qu’elle va contrôler c’est si la possibilité pour une partie de fixer le prix ne va pas
dégénérer en abus. Pour qu’il y ait abus il faut que le prix soit réellement excessif, qu’une
personne ait abusé de sa position pour faire cela, arrêt Ch Com 15 janvier 2002, montre
comment la jp raisonne en matière d’abus dans la fixation du prix. En l’espèce la Ccass a
suivi la Cour d’appel qui a considéré qu’il y avait abus dans le droit de fixer unilatéralement
le prix. Arrêt finalement assez rare càd que la jp retient très rarement l’abus dans la fixation
du prix.
- La sanction : le contrat est valable, la nullité n’est plus jamais encourue sur ce
fondement.
La Ccass permet donc 2 sanctions possibles relatives à l’exécution même du contrat : soit la
résiliation, fin du contrat pour l’avenir en raison du fait qu’une partie n’a pas correctement
exécuté son obligation, ça ne remet rien en cause pour le passé ; soit l’indemnisation :
préjudice subi du fait de l’abus dans la fixation du prix.

II. La licéité de l’objet de l’obligation

Les parties ne peuvent pas tout faire, elles n’ont pas tous les droits, elles ne peuvent pas
conclure un contrat sur un objet illicite.
Ex : pas de vente de matières stupéfiantes, contrat nul.
Pour que le contrat soit valable encore faut-il qu’il porte sur un objet licite, art 1128 CCiv
traite de cela au travers des choses dans le commerce. Il dispose qu’ « il n’y a que les choses
qui sont dans le commerce qui peuvent être l’objet des conventions ». Cela signifie que
certaines choses sont hors du commerce, soit parce qu’elles sont illicites, soit parce qu’elles
sont sacrées et on ne peut pas dans ces cas-là conclure de contrat sur ces choses.
Les choses illicites, ce sont tous les biens qui ne peuvent pas faire l’objet d’une convention
car leur commerce habituel est interdit (stupéfiants, matériel de guerre).
Egalement interdictions qui tiennent davantage au caractère sacré de l’objet pour lequel on
veut conclure un contrat, ex : pas de contrat sur le corps humain, pas de contrat par lequel une
personne autorise qqn à lui couper un doigt.
Art 16-1 et s. CCiv prévoient cela. Interdiction des contrats de mères porteuses. Certains
contrats sur le corps humain sont autorisés mais encadrés strictement par la loi.

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Arrêt sur les mères porteuses, sur les clientèles civiles. Est-ce qu’un médecin peut vendre sa
clientèle ? Pendant longtemps non puis finalement oui ce ne sont pas les clients qu’on vend,
c’est une activité.

Section 2 - L’objet du contrat

Appréciation plus générale du contrat, lorsque l’on va mettre les clauses en relation les unes
avec les autres.
Cela va servir à vérifier, lorsque le législateur le prévoit, l’équilibre contractuel car pour
vérifier l’équilibre contractuel il est bien nécessaire de mettre en relation les obligations les
unes à l’égard des autres.
En principe l’équilibre contractuel n’est pas une condition de validité du contrat. Un contrat
peut être déséquilibré mais si les parties l’ont accepté il doit être exécuté.
Dans certaines hypothèses, le législateur a admis la recherche d’un équilibre contractuel.
2 hypothèses principales :
- les clauses abusives dans les relations spécifiques professionnel/consommateur
- la lésion

I. Les clauses abusives

Afin de tenir compte du déséquilibre qui existe entre un consommateur et un professionnel, le


législateur avait en 1978 prévu dans certains cas que le consommateur ne pouvait pas se voir
imposer des clauses imposées par les professionnels si ces clauses révélaient un abus du
professionnel, octroyaient au professionnel un avantage considérable.
Mais à l’origine, en 1978, il «était prévu que ce soit le législateur qui énonce les différentes
clauses abusives ». Le législateur a pris 2 décrets d’application à la suite de cette loi puis plus
rien. De telle sorte que le juge se trouvait dans une situation très complexe car le juge n’avait
pas le droit en principe d’annuler des clauses abusives.
Arrêt de principe, Ccass, 1ère Ch Civ 14 mai 1991 le juge s’est octroyé lui-même la
possibilité d’énoncer et de donc de sanctionner des clauses abusives, plus besoin de décret.
Pratique contra legem.
En 1993, directive communautaire sur les clauses abusives qui a donné lieu à une grande
réforme législative en France sur ce terrain là : la loi du 1er février 1995 qui a modifié la loi
de 1978, elle a introduit un article dans le code de la consommation sur la protection du
consommateur dans les clauses abusives.
Que prévoit cette réglementation ?
Elle prévoit que les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre
significatif entre les droits et obligations des parties au contrat sont abusives et la
sanction c’est que ces clauses sont réputées non écrites.
Qu’est ce que cela signifie ? Que lorsqu’une clause va octroyer au professionnel un avantage
qui va créer un déséquilibre significatif dans le contrat, la clause va être annulée, pas tout le
contrat, nullité partielle.
Il peut y avoir en vertu de cette nouvelle disposition des décrets pris, après l’avis d’une
commission sur les clauses abusives, qui énoncent un certain nombre de clauses par principe
abusives : les clauses noires (toujours considérées comme abusives), clauses grises
(présumées être abusives mais il faut voir s’il n’y a pas des contreparties qui sont offertes) et
des décrets peuvent énoncer des listes de clauses noires ou grises.
Mais nouveauté de cette disposition : le juge est tout à fait apte à déclarer lui-même en
dehors de tout décret si une clause est ou n’est pas abusive. A ce titre là il n’a pas besoin
de se référer à un décret pour pouvoir déclarer une clause abusive.

58
Sont considérées comme absolument abusives les clauses qui entrainent le fait de réserver au
professionnel de modifier unilatéralement les clauses du contrat relatives à la durée, aux
caractéristiques ou au prix du bien à livrer. De même les clauses qui réduisent ou suppriment
le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur.
En dehors de ces clauses listées, le juge a la possibilité de considérer telle ou telle clause
abusive.
Intérêt de cette disposition : dispositions majeures en droit des contrats puisqu’elles, alors
que le contrat a été accepté, que consentement mutuel, en dépit du principe de l’autonomie de
la volonté, permettent de remettre en cause le contenu d’une obligation en annulant une clause
parce qu’elle conduit à un déséquilibre significatif.
Disposition appliquée dans énormément de domaines (téléphonie mobile, crédit, fourniture
d’eau, d’électricité, de gaz…)
Les contrats entre consommateur/professionnel sont passés au peigne fin pour éradiquer des
clauses abusives, c’est complètement dérogatoire du droit commun des obligations.
Le problème vient de savoir qui peut invoquer une clause abusive.
Sur ce point là, la jp a évolué car le législateur n’est pas clair. Législateur dit que ceux qui
peuvent invoquer cette disposition ce sont les non professionnels ou consommateurs (art 432-
1).
Droit communautaire plus simple : uniquement les consommateurs personnes physiques qui
agissent pour des besoins de personne privée.
Terme de la loi beaucoup plus large, imprécis, de telle sorte que la jp l’a interprété pour
définir la portée de ces dispositions.
Aujourd’hui la jp retient le critère du rapport direct :
Soit le contrat a un rapport direct avec l’activité professionnelle de la personne et auquel cas il
n’est pas possible d’invoquer les dispositions sur les clauses abusives.
Soit le contrat n’a pas de rapport direct avec l’activité professionnelle et auquel cas il est
possible d’invoquer la protection des clauses abusives : 1ère Ch Civ 24 janvier 1995, réitéré 30
janvier 1996 puis multiples fois.
Ce qui signifie qu’en principe lorsqu’une personne conclu un contrat, ex : un médecin qui
achète un ordi, s’il l’achète pour son activité professionnelle = rapport direct entre son contrat
et son activité professionnelle et donc dans ce cas il ne pourra pas invoquer les clauses
abusives, même si le médecin l’achète dans les mêmes conditions que le consommateur. En
revanche si précisément ce médecin achète un ordi pour chez lui, il peut à ce moment là
bénéficier de la protection contre les clauses abusives.

II. La lésion

Définition : déséquilibre entre les prestations qui existent au moment de la formation du


contrat.
2 éléments essentiels :
Déséquilibre, les obligations réciproques que se doivent les parties ne sont pas équilibrées.
Lorsque obligations réciproques sont en nature, il est plus difficile de caractériser un
déséquilibre que lorsqu’il y a eu une obligation monétaire en contrepartie d’une autre
obligation. Car dans cette hypothèse les parties elles-mêmes ont procédé à l’évaluation de
cette obligation.
Au moment de la formation du contrat, il y a des hypothèses où le déséquilibre intervient
après la formation du contrat, en cours d’exécution du contrat.
Ex : les personnes prévoient le prix pour un contrat de transport de marchandises. Entre le
moment où contrat formé et moment où contrat doit s’exécuter, prix du pétrole a très
largement augmenté, de telle sorte que coût du transport a lui-même augmenté. Le prix fixé à

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l’origine ne tenait pas compte de cette augmentation, de telle sorte que le déséquilibre dans
cette hypothèse n’apparaît qu’après la formation du contrat. L’évolution économique a fait
qu’en réalité le coût du transport est devenu tellement élevé que pour le transporteur le contrat
devient déséquilibré. Opération désavantageuse. Il recevra pour son transport une somme
insuffisante Ce n’est PAS de la lésion, car le déséquilibre n’existait pas au moment de la
conclusion du contrat. Il apparaît après. C’est la raison pour laquelle, pour la lésion, le
problème se pose sur le terrain de la formation du contrat.
La question est donc de savoir si ce déséquilibre qui existe à l’origine doit être sanctionné ? Si
oui, comment ? Ou est-ce qu’il doit être accepté ?
Principe : exclusion du vice de lésion. Càd que l’on exclue le fait de sanctionner un éventuel
déséquilibre.
Principe connaît quelques exceptions.

A) Le principe

Question de la lésion est née dans le droit canon, sous la plume de St Thomas d’Aquin. Idée
selon laquelle il doit y avoir une justice contractuelle et que le déséquilibre contractuel recèle
une injustice. Mais tant pour des raisons théoriques que pratiques la lésion a été exclue
comme vice dans la formation du contrat. Lésion exclue par le CCiv, art 1118. Principe de
l’exclusion de la lésion repris pour certains contrats spéciaux (contrat d’échange, contrat
d’adhésion).
Lésion ainsi exclue s’explique par 2 raisons :
- raison théorique
Le principe de base du droit des contrats c’est le principe d’autonomie de la volonté.
Principe qui veut que chaque personne est foncièrement libre de sa propre volonté et
lorsqu’elle s’est engagée librement elle se doit de respecter ce à quoi elle s’est engagée.
Rajoutons à cela que lorsque la personne s’est engagée, c’est qu’elle s’est engagée de façon
libre et éclairée, elle a donc eu toutes les informations suffisantes lui permettant de connaître
l’étendu de son obligation et de celle du cocontractant.
A partir de ce moment, le principe d’autonomie de la volonté commande que lorsque le
contrat a été librement accepté, ce contrat ne puisse plus être remis en cause (force
obligatoire du contrat). Dès lorsqu’une personne a accepté, elle se doit d’exécuter ce sur quoi
elle a fait son consentement. Puisqu’elle l’a fait librement, cette personne est la seule à savoir
si oui ou non ce contrat a un intérêt pour elle, s’il était à ses yeux équilibré ou déséquilibré. Il
n’est donc pas possible a posteriori de revenir sur cet engagement en disant que l’on
regrette cet engagement sur le fondement d’un éventuel déséquilibre. « Qui dit
contractuel dit juste » = à partir du moment où une personne a accepté librement c’est qu’elle
considère que ce contrat est juste.
Ainsi il est difficile d’admettre le vice de lésion avec ce principe d’autonomie de la volonté
d’où rejet du vice.
- raison pratique
En pratique, il est extrêmement difficile de dire si un contrat est équilibré ou ne l’est pas.
Ex : est-ce équilibré d’acheter un tableau de Van Gogh à 40 millions ? Si l’acheteur a
considéré que c’était équilibré, à ce moment le contrat est pour ces parties-là équilibré. Il est
très difficile donc au cas par cas de dire si un contrat est ou non équilibré. Désordre
contractuel absolument considérable si l’on admet que chacun peut contester contrat pour
déséquilibre.
En effet le contrat est un instrument de prévision, dès lors que les parties ont conclu un contrat
elles doivent pouvoir se reposer sur celui-ci en pensant qu’il sera correctement exécuté. Il est
donc impossible d’en faire un élément totalement soumis à l’insécurité, de pouvoir le remettre

60
en cause sous l’angle du déséquilibre, cela entrainerait une pagaille contractuelle qui ne peut
pas être acceptée en la matière. Parce que le déséquilibre est pratiquement difficile à établir et
parce que cela entrainerait une insécurité considérable inadmissible en la matière, la lésion a
été rejetée.
Lésion rejetée sauf dans des exceptions, cas limités.

B) L’admission exceptionnelle de la lésion

Il y a des exceptions qui tiennent aux personnes, et des exceptions qui tiennent au contrat en
cause.

1. Les personnes
Il y a des personnes qui méritent d’être protégées car ce sont des personnes plus faibles,
en situation de faiblesse en raison soit de leur âge, soit de leur situation mentale.
Ainsi l’art 1305 CCiv admet la lésion pour les mineurs qui sont non émancipés (ils n’ont
pas atteint une maturité suffisante pour pouvoir eux-mêmes accomplir des actes, tel un
adulte). Ces mineurs peuvent invoquer la lésion pour tous les contrats qu’ils concluent, quels
qu’ils soient, c’est leur protection qui est en jeu.
De la même manière, la lésion est acceptée pour tous les majeurs incapables (majeurs placés
sous une mesure d’incapacité, tutelle, administration judiciaire). Puisqu’il y a incapacité, il y a
nécessité de protéger le majeur qui est dans une situation de faiblesse. On ne peut pas abuser
de cette faiblesse éventuelle du majeur.
Ex : personne placée sous sauvegarde de justice, art 435 al 2 prévoit que les actes qu’elle a
passés puissent être rescindés pour simple lésion ou réduits en cas d’excès.
Pour vérifier si il y a eu lésion ou pas, il est pris en compte l’utilité ou l’inutilité de
l’opération, l’importance du patrimoine protégé, la bonne ou mauvaise foi de celui qui a
contracté.
L’art 465 CCiv, premièrement, prévoit également l’acceptation de la lésion pour tous les
majeurs qui sont protégés et qui ont accompli seul l’acte qui pouvait être fait sans assistance.
L’art 488 CCiv idem prévoit acceptation de la lésion pour les personnes qui font l’objet d’un
mandat de protection futur.

Dans ce cas là, lorsque ces personnes invoquent la lésion, elles peuvent obtenir :
- soit la nullité du contrat
- soit le fait de rétablir l’équilibre du contrat
Ex : si prix payé est trop important, il peut y avoir réduction du prix, ou en cas de vente si prix
perçu trop faible, il est possible d’obtenir un complément de prix.

2. Les contrats
Le CCiv, quelques lois postérieures au CCiv, et la jp, ont admis dans certaines hypothèses la
lésion à l’égard de certains contrats. Cela signifie que ça vaut pour toutes les personnes mais
uniquement pour les contrats visés.
Hypothèse la plus importante de lésion admise dans le CCiv  : la vente d’immeuble, art
1674 CCiv. Si le vendeur a été lésé de plus de 7/12 e dans le prix d’un immeuble, il a le droit
de demander la rescision de la vente.
La lésion joue en matière de vente immobilière mais ne joue en l’occurrence qu’au profit
du vendeur. Autrement dit, elle ne joue que si le prix de l’immeuble vendu est trop faible.
Jamais s’il est trop important. Pourquoi ? On considère qu’une personne peut être dans
l’obligation économique de vendre un bien, en revanche une personne n’est jamais dans

61
l’obligation d’acheter un bien. Donc on protège le vendeur car on protège celui qui peut-être a
pu accepté la vente car il était dans l’obligation.
La lésion ne joue que dans une certaine proportion, elle ne joue pas dès lors que le prix
est plus faible que celui du marché. Il faut que le vendeur ait été lésé de plus des 7/12 e. Càd
que on va apprécier le prix de l’immeuble au moment de la vente, on va le comparer au prix
auquel il a été effectivement vendu et si le prix auquel il a effectivement été vendu est
inférieur de 7/12e au prix du marché, à ce moment là il pourra y avoir rescision.
S’il y a lésion, au détriment du vendeur, l’art 1680 CCiv dispose que l’acquéreur a alors le
choix soit de rendre la chose en se voyant restituer le prix (annulation de la vente), soit de
payer un complément de prix et de garder le bien. Dans ce cas là il ne paie pas le complément
de prix comme s’il fallait payer le prix du marché, on enlève 1/10 e au prix du marché et il doit
payer le complément de ce prix.
Le CCiv admet également la lésion dans un autre type de contrats : le partage. Il faut que la
lésion porte sur plus du quart.
Des lois postérieures ont admis la lésion dans d’autres situations très précises :
- vente d’engrais
- cession d’exploitation d’une œuvre
Exception plus large posée par la jp :
La jp admet le contrôle des honoraires dans le cadre des contrats de prestation de service. Ex :
avocats, notaires, etc. la jp admet ce contrôle.
A ce titre là elle considère que même si convention d’honoraires conclue entre avocat et
client, si ces prestations ne correspondent pas à ce qui avait été convenu au départ, ces
honoraires peuvent être baissés.

CHAPITRE 3. La cause

Définition : notion assez complexe.

Section Préliminaire - Introduction à la notion de cause

Dispositions du CCiv assez peu éclairantes sur la cause, art 1111, art 1108, nécessité d’une
cause licite, 2 articles importants : art 1131 CCiv, obligation sans cause ou sur fausse cause
ou sur une cause illicite ne peut avoir aucun effet  ; art 1133 CCiv cause illicite quand elle est
prohibée par la loi, contraire aux bonnes mœurs ou à l’ordre public.
Rien de tout cela ne permet de définir la cause et de comprendre réellement la notion.

Qu’est-ce que la cause ?


C’est la raison que l’on a eu de contracter.
L’objet du contrat = ce sur quoi l’on s’est engagé. La cause = pourquoi on s’est engagé.
À partir de cette interrogation (quelle est la raison de l’engagement), et pour comprendre la
cause il faut d’abord savoir pourquoi on se pose cette question.
Pourquoi je m’engage ? À quoi ça sert ? Utilité de cette question ?

Interrogation sur la cause du contrat peut servir à 2 choses :


La question du pourquoi sert à savoir si le contrat a une utilité ou pas.
Ex : je paie un prix, pourquoi est-ce que je paie ? Car j’achète un ordinateur. Je vérifie au
travers de ce pourquoi que mon obligation (paiement du prix) a bien une utilité, qu’elle
a bien une contrepartie car ce que j’attends lorsque j’exécute une obligation c’est une
contrepartie. Donc lorsqu’on s’interroge sur le pourquoi on va rechercher si cette obligation a
ou non une contrepartie. Dans ce cas pour savoir s’il y a une contrepartie, je m’interroge sur la

62
cause de chaque obligation. Cause de l’obligation de payer le prix ? Qu’on me livre la chose
en contrepartie. Inversement : pourquoi livrer la chose ? Car je perçois un prix. Pour chaque
obligation quelle qu’elle soit je peux m’interroger sur son pourquoi en me demandant qu’elle
est sa contrepartie.

Face à un contrat, pourquoi on a voulu acheter ce bien ? Pourquoi on a conclu le contrat ?


En ce qui concerne l’obligation : payer le prix pour en échange avoir un bien, ok. Dans le cas
du pourquoi acheter le bien ? On ne demande pas la raison de l’exécution de telle obligation,
on pose la question de savoir pourquoi le contrat dans son ensemble a été conclu ? Cette
question là va dépendre de chaque partie. Chaque personne va avoir une raison qui lui est
propre. L’étudiant achète un ordinateur pour ses études. L’infographiste achète un ordinateur
pour sa profession. Achat ordi pour internet. Etc. Donc lorsque je pose la question du
pourquoi contrat conclu ? Réponse différente selon chaque partie, réponse totalement
subjective en ce sens. Pourquoi droit intrusif comme ça ? Limite à cela : lorsque je demande
pourquoi le contrat a été conclu, cela va permettre de déceler certains cas d’illicéité.
Ex : location d’un bien. A loue un appartement à B. Il paie un loyer contre la mise à
disposition du bien immobilier.
Pourquoi A loue-t-il cet appart ? Pour y habiter, pour exercer sa profession, au bénéfice de ses
enfants/parents/tiers, pour y établir un lieu de prostitution. Qu’est-ce qui permet de savoir que
ce contrat de bail est illicite ? A paie un loyer à B, B met à disposition de A un bien
immobilier.
La seule chose qui permet de dire que ce contrat est illicite, c’est de s’interroger sur le
pourquoi. Je loue un appart pour y établir une maison close = le but est illicite. Donc
lorsqu’on pose la question de la cause relativement à l’obligation, rien ne peut dire si c’est
licite ou non. La question du pourquoi le contrat a-t-il été conclu permet de rechercher la
licéité ou l’illicéité du contrat.

Distinction de 2 grandes notions de causes :


- Dans le 1er cas : s’interroger sur la cause de chaque obligation, ce qui est recherché
c’est la contrepartie attendue. Et ce qui est vérifié c’est qu’il existe bien une
contrepartie.
Dans ce cas là pour tous les contrats de vente, quelles que soient les parties en cause, la
contrepartie sera toujours la même. Pour le vendeur, quel qu’il soit, la contrepartie à la
livraison de la chose ça sera le paiement du prix.
= cause de l’obligation = cause objective puisque identique dans tous les cas. Recherche de
la contrepartie qui est toujours la même.
- Dans le 2e cas : lorsque l’on recherche la cause du contrat dans son ensemble, cela
sert à savoir si le contrat est licite ou illicite.
Lorsque l’objet vendu lui-même est illicite, c’est sanctionné sur le terrain de l’objet. Lorsque
l’objet lui-même est licite mais que but illicite, c’est à ce moment là que la cause du contrat
permet d’appréhender l’illicéité. Si but illicite = cause du contrat illicite.
= cause du contrat = cause subjective, qui va dépendre de chaque partie. Si le but poursuivi
est illicite, la cause du contrat de manière générale sera illicite. Illicéité que l’on ne voit pas
sous l’angle de l’objet. Seule la cause permet de la déceler.

Ce sont là les 2 objectifs de la cause : rechercher l’existence d’une contrepartie d’abord, et


rechercher la licéité du contrat au travers de la licéité de la cause.

Section 1 – La cause de l’obligation

63
Recherche de la contrepartie attendue. Cause objective qui permet de vérifier que à chaque
obligation correspond une contrepartie.

I. L’exigence d’une contrepartie

La notion de cause n’est apparue qu’assez tard en droit des contrats. Notion inconnue en droit
romain. L’importance de la cause a été mise en relief essentiellement par les canonistes au
MÂ. Au départ la cause est étendue comme la cause du contrat, non pas celle de l’obligation.
Canonistes = cause = but contraire à la morale ou pas. C’est au XVIe s et surtout au XVIIe
que la notion de cause a été précisée et principalement par un auteur, fondateur du droit civil
des obligations, Domat. Dans l’ancien droit, avant le CCiv, Domat a écrit un ouvrage, Les
lois civiles dans leur ordre naturel, dans lequel il pose comme l’une des conditions le fait que
aucune convention n’oblige sans cause. C’est lui qui a théorisé la notion de cause de
l’obligation, la contrepartie attendue telle qu’on la connaît aujourd’hui.
A quoi sert cette notion de cause ? Est-elle utile ?
A) L’utilité de la cause de l’obligation

La cause de l’obligation c’est, dans les contrats synallagmatiques, la contrepartie attendue.


Cela signifie que pour toute obligation d’un tel contrat il doit y avoir une contrepartie et que
pour tout type de contrat, il y a une cause de l’obligation qui est identique.

a.i.1. L’existence d’une contrepartie


La cause de l’obligation permet de vérifier qu’il existe une contrepartie à chaque obligation.
Cette vérification permet en réalité 2 choses :
Vérifier que chaque partie va effectivement recevoir une contrepartie à sa propre
exécution, mais au delà de cela, la cause de l’obligation permet également de créer une
interdépendance entre les obligations.
Ex : contrat de vente entre le vendeur A et l’acheteur B. A a pour obligation de livrer la chose,
B a pour obligation de payer le prix. La recherche de la cause de l’obligation permet de
vérifier qu’à la livraison de la chose il y a une contrepartie.
Mais permet aussi de créer une interdépendance entre les 2 parties. Si livraison n’est plus
possible, le paiement du prix lui n’a plus non plus de contrepartie, et donc le sort d’une
obligation va être lié au sort de l’autre obligation. Imaginons que A ne peut pas livrer la chose.
Qu’est-ce qui empêche B de payer le prix ? B a une obligation, mais il ne paie pas le prix
parce que pas de contrepartie, l’obligation n’a plus de cause. Au travers de la cause, on a créé
une interdépendance entre les obligations. L’obligation de l’une des parties a pour cause
l’obligation de l’autre partie = cause de l’obligation. Disparition de l’obligation de l’une
des parties entraine la disparition de la cause de l’obligation de l’autre partie. La cause de
l’obligation sert à créer une interdépendance entre les obligations.

a.i.2. L’identité de cause pour tous les contrats de même nature


Quels que soient les buts personnels des parties, pour tout contrat, elles auront la même
cause de l’obligation. Dans un contrat de vente, quelles que soient les parties au contrat, la
cause de l’obligation de l’acheteur sera toujours la livraison de la chose, inversement la cause
de l’obligation du vendeur sera toujours le paiement du prix. Obligation de livrer la chose :
cause = paiement du prix ; obligation de paiement du prix : cause = livraison de la chose. Cela
est déclinable pour tous les contrats de telle sorte qu’on peut dire que la cause est
objective. Elle ne va pas exiger la recherche au cas par cas de l’existence d’une contrepartie.
De la même manière il ne va pas être recherché si le contrat est équilibré. Dès lors qu’il y a

64
obligation, il y a une cause. On ne recherche pas l’équilibre, on recherche l’existence même
d’une contrepartie.
Cette notion de cause de l’obligation vaut pour tous les contrats synallagmatiques (les
plus fréquents), dans les contrats unilatéraux, à ce moment là, il n’y a pas par définition de
contrepartie, contrat unilatéral.
Ex : donation, si donation faite, par définition, pas de recherche de contrepartie. On va
simplement vérifier que les conditions du contrat sont réunies. Si c’est un contrat unilatéral
qui a une intention libérale, on va vérifier que celle-ci existe. Si elle existe, pas de
contrepartie. L’existence d’une intention libérale va tuer la recherche de la cause de
l’obligation.

B) La mise en œuvre jurisprudentielle

La jp quand elle recherche la cause de l’obligation, recherche effectivement l’existence même


d’une contrepartie. Il y a absence de cause s’il n’y a pas de contrepartie du tout.
Ex : contrat de vente sur un bien détruit. Obligation de payer le prix n’a plus de cause.
De la même manière, pas de cause si contrepartie dérisoire. Ex : si prix pas réel et sérieux
(vente à vil prix) la nullité est encourue car il n’y a pas réellement de cause.
1ère Ch Civ 27 octobre 1973 : Ccass considère vente nulle faute de cause car prix inférieure au
dividende versé annuellement = prix trop dérisoire.
En revanche la jp se refuse à apprécier l’équivalence des prestations. Il n’y a pas de
contournement de la lésion.
Mais la jp a étendu à d’autres hypothèses la recherche de la cause de l’obligation. Elle l’a
étendue en vérifiant parfois qu’il existait une contrepartie réelle. Il ne s’agit pas de vérifier
l’équilibre entre les prestations. La jp a recherché s’il existait une véritable contrepartie à
l’obligation qui devait être exécutée. Expansion faite au travers principalement de 3 exemples.
- Au travers de la lutte contre les clauses de limitation de responsabilité.
- Au travers de l’économie du contrat.
- Dans le cadre des ensembles contractuels.

a.i.2.a.i.1.Les clauses limitatives de responsabilité


Ex le plus célèbre à cet égard : affaire Chronopost, Ch Commerciale, 22 Octobre 1996
(doc 52). Arrêt le plus célèbre.
Faits : des architectes avaient soumissionné à un appel d’offre et devaient envoyer leur
réponse à l’appel d’offre avant une date déterminée, avant le lendemain minuit. Pour envoyer
leur pli, ces architectes ont fait appel à Chronopost, qui s’engageait à délivrer leur colis avant
le lendemain midi. La société Chronopost n’a pas correctement exécuté son obligation
puisque le pli a eu 24h de retard : arrivée le surlendemain à midi. Donc dossier des architectes
n’a pas pu être retenu dans le cadre de l’appel d’offre. Donc les architectes ont demandé une
indemnisation à Chronopost sur le fondement de leur responsabilité contractuelle. La société
Chronopost s’est alors réfugié derrière une clause limitative de responsabilité du contrat qui
prévoyait que dans l’hypothèse où le pli n’était pas livré dans les temps, Chronopost
s’engageait à rembourser le montant du transport à l’expéditeur. La société d’architectes disait
préjudice beaucoup plus important que seulement le remboursement du montant du colis. La
Ccass dit que « en raison du manquement à son obligation essentielle, la clause limitative de
responsabilité du contrat qui contredisait la portée de l’engagement pris, devait être réputée
non écrite ». À ce titre-là la Cour d’appel qui avait appliqué la clause, a violé l’art 1131 CCiv
(la cause de l’obligation).

65
Logique ? Logique de la Ccass est de dire lorsque l’une des parties n’exécute pas son
obligation essentielle, elle ne peut pas limiter sa responsabilité contractuelle, parce que sinon
cela revient à faire en sorte que l’obligation de l’autre partie puisse être privée de cause, de
contrepartie réelle. Si pas de garantie que Chronopost a une obligation de livrer à temps = pas
véritablement d’obligation à sa charge, l’obligation de payer le prix n’a pas de contrepartie
réelle. Les clauses limitatives de responsabilité lorsqu’elles portent sur une obligation
essentielle doivent être annulées, annulation partielle sur le fondement de la cause. Sinon
la clause limitative vient entamer l’obligation.
La Ccass par la suite dans un arrêt Ch Commerciale, 4 mars 2008, sur un contrat d’assurance,
problème de clause limitative de responsabilité, a à nouveau sur le fondement de l’art 1131
considéré que cette clause pouvait porter atteinte à l’existence de contrepartie parce qu’elle
contredisait « la portée de l’obligation ».
La Ccass dans un arrêt Ch Commerciale, 29 juin 2010, Faurecia, a affirmé que seule est
réputée non écrite la clause limitative de responsabilité qui contredit la portée de l’obligation
essentielle souscrite par le débiteur. En l’occurrence la Ccass a considéré que la clause en
cause ne vidait pas de sa substance l’obligation essentielle. Au travers de cet arrêt la Ccass
invite à savoir si oui ou non la clause limitative de responsabilité prive de portée l’obligation
essentielle ou non. Si la clause limitative est telle qu’en réalité la contrepartie attendue n’est
plus une véritable obligation à la charge de l’autre partie, à ce moment là la clause doit être
réputée non écrite. Si en revanche la clause laisse subsister l’obligation essentielle, il existe
toujours une contrepartie donc clause maintenue. La Ccass recherche donc s’il existe une
véritable contrepartie ou si la clause va vider de sa substance l’obligation attendue en
contrepartie.

a.i.2.a.i.2.L’économie du contrat
Affaire du Point club vidéo, 1ère Ch Civ, 3 juillet 1996
Faits : un commerçant avait installé dans une petite bourgade un commerce de location de K7
vidéos. Il louait à une société des K7 vidéos : 200 K7 vidéos pour 40 000F. Il sous-louait
ensuite les K7 vidéos aux habitants du petit village rural. En réalité ce commerce s’est avéré
impossible à mener car la population concernée ne pouvait pas rendre le magasin rentable. La
Ccass a affirmé dans cet arrêt que « l’exécution du contrat selon l’économie voulue par les
parties était impossible de telle sorte que la Cour d’appel en a exactement déduit que le
contrat était dépourvu de cause ». Dans cette affaire, il existait bien une obligation et une
contrepartie. Pour le loueur obligation de payer 40 000F par mois. Pour le fournisseur des K7,
obligation de mettre à disposition 200 K7 vidéos/mois. De telle sorte que formellement
chaque obligation avait bien une contrepartie. Mais la Ccass a considéré qu’il fallait
rechercher au delà des obligations prévues au contrat, quelle était la volonté des parties.
Or l’économie du contrat voulue par les parties c’était de mettre en place un point club vidéo
qui pourrait être rentable. A ce moment là les parties avaient en tête que ce point club allait
pouvoir être exploité. Pas de contrepartie réelle car ces 200 K7 ne lui servent à rien
puisqu’il ne peut les revendre, il y a bien contrepartie formelle mais pas réelle, il ne va
pas bénéficier réellement de la contrepartie attendue. Là encore l’analyse de la jp est
extensive par rapport à la notion habituelle de cause de l’obligation. Dans cette notion
habituelle, la seule chose qui importe c’est de savoir objectivement si il y a contrepartie. Or en
l’espèce il y a contrepartie mais qui ne sert pas. Interprétation extensive car au delà de
l’existence de la contrepartie, on vérifie son utilité, le fait qu’elle serve effectivement les
objectifs voulus, donc on rentre nécessairement dans une appréciation subjective du
contrat, on ne reste pas sur appréciation objective.
Réserve : la Ccass relève bien que c’était l’économie du contrat voulue par LES parties.
Imaginons qu’une personne loue un appart pour exercer son activité. Puis cette personne

66
change de travail. Est-ce qu’elle peut dire que contrat n’a plus de contrepartie réelle dans la
mesure où appart ne lui est plus utile ? Réponse serait certainement négative. Ce qui a été
relevé dans l’arrêt Point club vidéo c’est le fait que les parties ont en commun mis en place un
contrat destiné à l’exploitation d’un point club vidéo.

Et l’impossibilité (Ccass) d’exécuter cette mission contractuelle a conduit la Ccass a


considéré qu’il n’y a avait pas réellement contrepartie, pas réellement de cause, donc on ne va
pas obliger le loueur à payer tous les mois 40 000F alors qu’il ne pouvait pas revendre les K7.

a.i.3. Les ensembles contractuels


Ex pour illustrer propos : arrêt de la Ch Commerciale, 15 février 2000, (doc 70).
Faits : un pharmacien va faire passer dans sa pharmacie des annonces publicitaires. Contrat
avec une société de publicité qui va payer le pharmacien pour diffuser ces informations
publicitaires. En même temps, pour que le pharmacien puisse conclure ce contrat, il doit
s’équiper en matériel permettant la diffusion des ces informations publicitaires. Donc le
pharmacien va conclure 2 contrats : un premier contrat avec la société de publicité (prix
contre diffusion des pubs), il est prévu dans ce contrat que le pharmacien aille s’équiper
auprès d’une société de location de matériels qui va lui louer le matériel contre le paiement
d’un loyer chaque mois pour le prix de ce matériel. Logique : loyer payé par le pharmacien
inférieur au prix qu’il perçoit pour la diffusion des publicités. La société de publicité fait
faillite, de telle sorte que le pharmacien n’a plus à diffuser d’informations et ne perçoit plus de
prix de la part de cette société. Que faut-il faire du contrat de location de matériel ? Cause de
l’obligation du pharmacien de payer un loyer : location du matériel. Mais pour le pharmacien
il n’y a plus aucun intérêt à la location du matériel, il loue donc un matériel qui lui devient
inutile. Là encore la jp a considéré que la location de matériel n’avait plus de
contrepartie réelle. Que ces 2 contrats étaient interdépendants, que l’on savait très bien que
la cause de la location de ce matériel c’était le contrat publicitaire, de telle sorte que la fin du
contrat publicitaire privait de cause le contrat de location de matériel. Dans cette affaire la
Ccass relève que les parties savaient parfaitement le système mis en place.
Il faut donc que les parties aient voulu inscrire leur engagement dans le cadre d’un
ensemble contractuel (plusieurs contrats) et dans ce cas-là, la jp admet que si l’un des
contrats disparaît, l’autre contrat disparaîtra aussi car il n’a plus de cause réelle. La
Ccass vérifie à chaque fois que les parties l’ont bien voulu. Si elles ne l’ont pas voulu, la
Ccass exclue cela, arrêt 13 juin 2006, 1ère Ch Civ, Ccass vérifie que les parties ont voulu créer
un ensemble indivisible. Effet inverse : un contrat d’exploitation d’œuvres de musique qui
était destiné à une illustration d’œuvres visuelles a été conclu. En réalité 2 contrats conclus :
un contrat de cession des bandes pour une somme symbolique d’1€ et puis un contrat
d’exploitation qui donnait lieu à rémunération. La Cour d’appel avait dit contrat de cession
dépourvu de cause. Ccass annule en disant qu’il fallait rechercher si contrat de cession ne
s’inscrivait pas dans le cadre d’une opération économique constituant un ensemble contractuel
indivisible. La cause peut être ailleurs que dans le contrat lui-même. Le fait qu’il n’y ait
pas de cause dans un contrat va permettre tout de même d’aller chercher la cause dans
un autre contrat = ensemble contractuel qui a pour objet de réaliser une opération
économique unique. Dans ces cas là la jp va considérer qu’il faut prendre en compte
l’opération économique dans son ensemble pour dire qu’il y a une cause (13 juin 2006) ou
qu’il n’y en a plus (15 février 2000).
La jp dans ces 3 cas est allée au delà de la simple recherche objective d’une contrepartie.

67
A priori donc, la jp semble, dans ces différentes affaires, prendre des largesses avec la notion
de cause de l’obligation, c’est-à-dire de contrepartie. En effet, on enseigne généralement que
la cause de l’obligation est une contrepartie objective, mais dans ces différentes affaires, ce
que montre la Ccass, c’est qu’elle subjectivise la notion de cause en intégrant à cette
notion de cause ce que les parties ont voulu, leur souhait. Autrement dit, la cause de
l’obligation c’est toujours la contrepartie attendue, mais c’est la contrepartie attendue telle que
les parties l’ont définie ou souhaitée. Reprenons les différentes hypothèses :
Hypothèse simple : contrat de vente classique. Dans ce cas-là, la contrepartie attendue par
l’acheteur est la livraison du bien ; inversement, celle attendue par le vendeur est le paiement
du prix. Si l’une des obligations disparaît, l’autre aussi.
Clauses limitatives de responsabilité : si l’on reprend le dernier état de la jp (arrêt Faurecia
de juin 2010), la Ccass dit que seule est réputée non-écrite la clause limitative de l’obligation
qui contredit la portée de l’obligation essentielle souscrite par le débiteur. La Ccass écarte les
clauses qui portent atteinte à ce que les parties ont voulu, aux obligations essentielles qu’elles
ont définies. On écarte ces clauses parce qu’elles contredisent les contreparties voulues par les
cocontractants eux-mêmes. Dans un contrat synallagmatique, chaque cocontractant est à la
fois créancier et débiteur.
Dans tout contrat le cocontractant quel qu’il soit lorsqu’il exécute son obligation attend en
contrepartie, et c’est la cause de son obligation, l’exécution de l’obligation par l’autre partie.
Donc une clause limitative de responsabilité qui viendrait porter atteinte à la portée de
l’obligation qui est attendue en contrepartie vient porter atteinte à la contrepartie attendue,
donc porter atteinte à la cause. Une clause limitative de responsabilité qui limite la portée de
l’obligation essentielle porte atteinte à la contrepartie.
3e ex : l’affaire Point Club Vidéo, l’économie du contrat. La Ccass dit que c’était
l’économie du contrat tel que les parties l’avaient voulue. Les parties ont voulu mettre
ensemble en place un point club vidéo dans le village en question et en relevant précisément
ce qu’elles ont voulu la Ccass relève que c’est cela qu’elles ont défini comme contrepartie.
Elles étaient d’accord pour dire qu’à la location de cassette par le loueur initial au
commerçant qui ouvrait son point club vidéo, devait correspondre comme contrepartie non
seulement le prix payé pour la location de K7 mais également le fait que ce commerce soit
viable, rentable. Ccass dit en l’occurrence le commerce ne l’est pas donc il n’y a pas de
contrepartie. Pas de contrepartie réelle.
4e hypothèse : les ensembles contractuels. Dans ce cadre là, la situation est encore plus
simple. Lorsque une personne va louer le matériel informatique elle ne le fait que pour
permettre d’exécuter le contrat de prestation d’images. A partir de ce moment là, la
contrepartie qui a été voulue par les parties elles-mêmes à la location du matériel
informatique, ce n’est pas seulement les loyers payés pour ce matériel c’est aussi que le
matériel permettait d’exécuter le contrat de prestation d’images, c’est ce que les parties ont
elles-mêmes décidé. S’il y avait eu un contrat de location tout à fait séparé, on n’aurait
pas pu invoquer la disparition du contrat de prestation d’images pour mettre fin au
contrat de location d’informatique. Ce n’est que parce que les parties ont elles-mêmes
conclu ces contrats dans le cadre d’un ensemble contractuel, dans le but d’une opération
économique unique.
Dans tous les cas la Ccass s’écarte de la notion classique de la cause de l’obligation pour
une raison : elle se réfère à la volonté des parties pour définir la contrepartie. Autrement
dit la contrepartie attendue c’est aussi la contrepartie telle qu’elle a été voulue par les parties.
C’est la cause de l’obligation = contrepartie attendue et voulue par les parties.

II. Le régime de l’absence de cause

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1ère question : Quel est le moment d’appréciation de l’absence de cause ?
En principe la cause est une condition de formation du contrat. Donc l’appréciation de
l’existence ou de l’absence de cause doit se faire au moment de la conclusion du contrat.
Certains auteurs, et notamment Henry Capitant, avait proposé que la cause soit considérée
comme un élément permanent qui doit perdurer tout au long du contrat et donc que l’on peut
apprécier même en cours d’exécution du contrat.
Si certaines décisions jurisprudentielles semblaient parfois consacrer cette position, la très
grande majorité de la jp rappelle au contraire le principe selon lequel c’est au moment de la
conclusion du contrat qu’il faut se placer pour apprécier l’existence de la cause. 2 arrêts
en ce sens : 17 juillet 1996, 3e Ch Civ, et Ch commerciale, 24 septembre 2008.
Si la cause disparaît après la formation du contrat, le contrat a été valable à l’origine donc on
ne peut pas le remettre en cause. Simplement ensuite des sanctions éventuelles peuvent
intervenir relativement aux effets du contrat.
Sur ce point toutefois, il existe une difficulté.
La difficulté tient aux contrats à exécution successive. Contrats dont précisément il y a des
périodes d’exécution qui se renouvellent.
Ex : contrat de bail, chaque mois le locataire va payer un loyer pour pouvoir jouir de
l’immeuble qui lui est loué. Dans les contrats à exécution successive, que se passe-t-il lorsque
en cours de contrat la contrepartie possible disparaît ? Si l’immeuble dans le cadre du contrat
de bail disparaît : est-ce que le locataire doit tout de même payer le loyer, alors même qu’il
n’y a plus de contrepartie ? Est-ce que je me place à l’origine en disant le contrat avait une
cause donc le contrat a définitivement une cause ou est-ce qu’il faut se replacer à chaque
échéance pour apprécier l’existence de la cause ?
La Ccass, 1ère Ch Civ, 30 octobre 2008, (doc 65) a considéré que lorsqu’en cours de contrat
dans un contrat à exécution successive il y avait disparition de la contrepartie attendue,
à ce moment-là le contrat devenait caduque (il disparaît pour l’avenir mais on ne remet
pas en cause ce qui a été exécuté dans le passé). Dans le passé, le contrat avait une cause.
Ex : contrat de location d’un an. Au bout de 6 mois le bien vient à périr. Contrat pas remis en
cause pour les 6 premiers mois, mais contrat nul à partir du moment où la cause a disparu, à
partir du moment où le bien péri.
Arrêt 30 octobre 2008 : question d’une pension alimentaire destinée à assurer l’entretien et
l’éducation d’un enfant. Père devait payer cette pension à la mère qui avait la garde de
l’enfant. Par la suite l’enfant est venu vivre chez son père de telle sorte que la charge de son
éducation et de son entretien était chez son père. Q° : savoir si l’accord conclu entre les
parents devait se poursuivre ou pas ? Ccass a dit non, à partir du moment où l’enfant est
revenu chez son père le contrat est devenu caduque, faute de cause. Donc dans les contrats à
exécution successive il faut qu’à chaque étape il y ait effectivement une contrepartie.

2e question : la charge de la preuve, qui doit prouver l’absence ou l’existence d’une


cause ?
L’art 1132 CCiv dispose que la convention n’en est pas moins valable quoi que la cause n’en
soit pas exprimée. Ce texte qui a fait l’objet de vives controverses doctrinales est en réalité
aujourd’hui interprété comme cela : ce texte ne règle qu’un problème de preuve. La cause est
présumée exister quand bien même elle ne sera pas exprimée formellement dans le contrat, ce
qui signifie que c’est à celui qui se prévaut de l’absence de cause d’en rapporter la
preuve. 16 avril 1848 pour la première fois puis réitéré.

3e question : la sanction ?

69
En cas d’absence de cause, la sanction c’est la nullité du contrat. Mais quelle nullité ?
Nullité absolue ou relative ? Intérêt : nullité absolue va pouvoir être invoquée par toute
personne liée au contrat, la nullité relative ne pourra être invoquée que par la victime de
l’absence de cause.
Ccass, 3e Ch Civ, 29 mars 2006 (doc 64), a affirmé que la nullité pour absence de cause
était une nullité relative car elle ne visait la protection des intérêts que d’une partie. En
effet l’indifférence majeure entre la nullité absolue et la nullité relative tient aux intérêts
protégés. Lorsque l’on protège l’intérêt général, l’ordre public, on va considérer la nullité est
une nullité absolue, du coup tout le monde peut s’en prévaloir. En revanche lorsque l’on
protège un intérêt particulier (ex : l’erreur) dans ce cas nullité relative. En matière d’absence
de cause la Ccass a affirmé que la nullité était une nullité relative.
Reste la question de savoir si l’absence de cause entraine nécessairement la nullité du
contrat ou si elle peut entrainer uniquement une nullité partielle du contrat lorsque en
annulant partiellement le contrat la cause peut être rétablie.
Plusieurs arrêts militent en faveur d’une annulation uniquement partielle lorsque cela est
possible :
D’abord toute la jp sur les clauses limitatives de responsabilité (arrêt Chronopost à
Faurecia : sanction = annulation de la clause limitative de responsabilité car la Ccass a
considéré que cela suffisait et que si celle-ci était écartée à ce moment là le contrat avait une
cause).
2e jp porte non sur l’absence de cause à proprement parler mais sur la fausseté de la cause.
Lorsque l’on s’est trompé sur la contrepartie qui était due.
Ex : Arrêt 1ère Ch Civ, 11 mars 2003, (doc 66).
Faits : une personne a repris le cabinet de géomètre expert d’une autre personne à la suite du
décès de cette personne. La veuve du géomètre expert (héritière) demande alors le paiement
d’une certaine somme pour le paiement des loyers mais, parallèlement à cela, la veuve avait
souscrit une reconnaissance de dettes au profit de celui qui avait repris le cabinet. Elle
demande pareillement l’annulation de cette reconnaissance de dette. La Ccass relève qu’il y
avait bien une dette due par la veuve, mais que cette dette à laquelle la veuve s’est engagée est
inférieure au montant qui avait été convenu. En réalité reconnaissance de dette = 800 000F, et
la Cour d’appel puis la Ccass dit en réalité reconnaissance de dette doit être inférieure. La
Ccass dit sous le visa de l’art 1131 CCiv, la fausseté partielle de la cause n’entraine pas
l’annulation de l’obligation mais sa réduction à la mesure de la fraction subsistante.
Art 1131 vise effectivement la fausse cause. Contrepartie pas réelle, pas vraie. On essaie
d’éviter l’annulation de la convention. Autrement dit, lorsqu’il est possible d’éviter
l’annulation du contrat et qu’une nullité partielle suffit à valider le contrat pour qu’il y ait une
cause réelle la Ccass préférera emprunter la voie de la nullité partielle.
Section 2 – La licéité de la cause

Lorsque l’on étudie la licéité de la cause, on ne se pose plus la question de savoir s’il existe ou
non une contrepartie. La licéité de la contrepartie rentre dans la licéité de l’objet. Ce serait
donc inutile.
Ex : une personne veut acheter une arme alors qu’elle n’en a pas le droit. La vente qui est
conclue va être annulée, mais pas en raison de la cause illicite. Elle va être annulée parce que
l’objet de l’obligation du vendeur est illicite. En tant que tel le contrat va être nul. L’obligation
elle-même du vendeur est illicite car objet de l’obligation illicite.
La cause du contrat pour savoir si elle est licite ne s’intéresse pas à la contrepartie
attendue. C’est un tout autre concept que celui utilisé pour l’existence de la cause.
Pour apprécier de la licéité de la cause ce n’est pas la cause de l’obligation qui est scrutée. Ce
qui permet de vérifier la licéité de la cause c’est de rechercher les motifs des

70
cocontractants, qui eux (motifs) ne sont contrôlés par aucune autre notion que la notion
de cause. Question de la cause du contrat : pourquoi j’achète telle chose ? Pourquoi je
conclue ce contrat ?
Ex : location d’un bien immobilier pour y établir une maison close. Je paie un loyer contre la
remise d’un bien immobilier je ne peux rien voir d’illicite si j’analyse mon contrat que en
terme d’obligation. Cause du contrat ? A quelle fin louer ce bien ?
Cause subjective, chaque opération aura sa propre cause, donc cause dépend de chaque
partie, chacune poursuit son propre objectif.

I. Les conditions d’illicéité de la cause

Art 1133 qui traite la question de la licéité de la cause. Il dispose que la cause est illicite
quand elle est prohibée par la loi, quand elle est contraire aux bonnes mœurs, ou à l’ordre
public.
Pour pouvoir apprécier si cette cause est contraire à la loi, aux bonnes mœurs ou à l’ordre
public il est nécessaire de rechercher quels sont les motifs, les mobiles, déterminants qui
ont conduit les parties à conclure un contrat.
De telle sorte que la cause qui est employée ici est une cause subjective = cause du contrat.
Pour qu’elle soit considérée comme illicite, il est nécessaire qu’elle réponde à certaines
caractéristiques.

A) La notion de cause du contrat

Pour rechercher si la cause, la raison, qui anime les cocontractants est licite ou illicite il faut
se plonger dans les motifs, les mobiles que les parties recherchent. L’analyse de la
contrepartie attendue ne permet pas de savoir si contrat est licite ou non. C’est la raison pour
laquelle on parle de cause du contrat et non pas de cause de l’obligation. C’est la raison
pour laquelle on parle de cause subjective car on va rechercher la cause déterminante pour les
parties et d’un contrat à l’autre cette cause va varier, chaque partie poursuivant son propre
objectif. Ainsi la Ccass a pu considérer que la vente ou la location d’une maison de tolérance
(maison close) est nulle pour illicéité de la cause, arrêt Ch sociale, 29 octobre 1957, de même
un prêt est nul s’il sert à financer une affaire illicite ou immorale, octobre 1996, de même des
ventes d’objets provenant d’un vol sont illicites.
La cause du contrat sert en réalité à aller au delà des simples stipulations contractuelles, à
aller au delà de la présentation formelle du contrat pour rechercher si l’objectif des parties
est licite ou non.
Cela vaut aussi bien dans les contrats à titre onéreux que dans les contrats à titre gratuit, de
même aussi bien dans les contrats synallagmatiques qu’unilatéraux.
Une donation qui aurait un objectif illicite pourrait être annulée.
Arrêt 1ère Ch Civ 12 juillet 1989, (doc 51).
Faits : une personne achète du matériel d’occultisme à une autre pour lui permettre d’exercer
le métier de devin. Finalement l’acheteur ne paie pas le prix. Le vendeur demande le paiement
en justice et l’acheteur dit « la cause n’existe pas et est illicite ». Q° : contrat valable ou pas au
regard de la cause ? Ccass dit dans cette affaire si la cause de l’obligation (existence de la
cause) de l’acheteur réside bien dans le transfert de propriété et la livraison de la chose
vendue en revanche la cause du contrat de vente (licéité) consiste dans le mobile déterminant,
càd celui en l’absence duquel l’acquéreur ne se serait pas engagé. A l’époque clause dans le
Code Pénal prohibant le métier de devin. Donc en l’occurrence Ccass dit cause est illicite car
mobile poursuivi par les parties à savoir le fait d’exercer un métier qui est prohibé c’est un
mobile illicite.

71
B) Les caractéristiques du mobile illicite

3 caractéristiques peuvent être relevées :


- l’illicéité va pouvoir varier dans le temps
- mobile illicite doit être déterminant
- il n’est pas nécessaire que ce mobile illicite soit connu des 2 parties

a.i.1.a.i.1. L’évolution temporelle de l’illicéité


L’appréciation de l’objectif va varier dans le temps en fonction de différents éléments. En
réalité il faudrait formellement distinguer la cause illicite en tant que telle, celle contraire à la
loi, qui contredit une prohibition de la loi ; et la cause qui serait immorale et donc contraire
aux bonnes mœurs, en général la Ccass place sous la même bannière la cause illicite et la
cause immorale. Mais les 2 sont susceptibles d’évolution.
Pourquoi ? Car la loi évolue ainsi certaines choses prohibées hier ne le sont plus aujourd’hui
et certaines choses non prohibées hier le sont aujourd’hui. (Ex : métier de devin).
De la même manière la notion de bonnes mœurs évolue. Sur ce point là, illustration la plus
forte = cadre des relations adultérines. Pendant longtemps la Ccass a considéré que une
donation qui est faite dans le cadre d’une relation adultérine était nulle si elle était effectuée
dans le but de l’établissement, du maintien ou de la reprise de la relation. Arrêt de principe :
Ch des requêtes, 8 juin 1926, seule était licite la donation faite dans la cadre d’une relation
adultérine qui avait pour objectif de dédommager la compagne, réparer son préjudice, à la
suite d’une rupture de la relation. En revanche toute donation faite en cours de relation était
considérée comme nulle car immorale.
La Ccass a opéré un revirement dans un arrêt de la 1ère Ch Civ, 3 février 1999 (doc 68), sous
les visas des art 1131 et 1133 CCiv, la Ccass affirme dans un attendu de principe que « n’est
pas contraire aux bonnes mœurs la cause de la libéralité dont l’auteur entend maintenir la
relation adultère qu’il entretien avec le bénéficiaire ». Dans cette affaire la Cour d’appel avait
annulé la donation car donation que pour poursuivre adultère.
A la suite de cet arrêt, la Ccass a du se réunir en Assemblée Plénière, afin de trancher cette
question.
Assemblée Plénière a rendu un arrêt le 29 octobre 2004 (doc 69) dans lequel, sous les visas
des art 900, 1131 et 1134 la Ccass a affirmé dans un attendu encore plus large que l’arrêt
précédent « n’est pas nulle comme ayant une cause contraire aux bonnes mœurs la libéralité
consentie à l’occasion d’une relation adultère ». Adultère n’est donc plus contraire aux
bonnes mœurs.
Mais ce que toutefois la Ccass oublie, c’est que certes les mœurs ont évolué, mais il n’en
demeure pas moins qu’il existe sur le terrain de la licéité une disposition dans le CCiv sur le
mariage, art 212 CCiv, qui prévoit que les époux se doivent mutuellement respect, fidélité,
secours, assistance. Obligation de fidélité, de telle sorte que si la relation adultère n’est pas
contraire aux bonnes mœurs, elle demeure tout de même contraire à la loi. Une relation
adultérine ne suffit plus à caractériser une faute dans le cadre d’un divorce pour faute.

a.i.2. Le caractère déterminant du mobile


illicite
Il ne faut pas reporter tous les motifs qui ont animé les parties. Seul un motif déterminant la
cause impulsive poursuivie par les parties est recherché. Et donc ce qui est uniquement
recherché c’est le fait de savoir si le motif sans lequel le contrat n’aurait pas été conclu est
licite ou non. Il se peut qu’une même opération poursuive différents avantages, différents
motifs.

72
Ex : l’opération financière peut avoir comme motif l’investissement, le placement de son
patrimoine et un motif de fraude fiscale. Il faut rechercher quel est le mobile principal, le
mobile déterminant et rechercher si il est licite. Si le placement est licite, à ce moment là le
fait que l’une des parties est également recherché un motif illicite ne suffit pas à permettre
l’annulation du contrat.

a.i.3. Le mobile illicite n’a pas à être connu


des 2 parties
La jp considérait que l’annulation d’un contrat pour cause illicite ou immorale ne pouvait être
prononcée que si la cause était commune aux deux parties. Il fallait au moins que les 2 parties
soient informées du mobile illicite.
Arrêt de principe de la 1ère Ch Civ du 4 décembre 1956.
Pourquoi la jp énonçait cette solution : pour protéger le cocontractant innocent.
Mais le problème était double :
La lutte contre la cause illicite est une lutte contre des contrats qui portent atteinte à l’intérêt
général, à l’ordre public (art 1133) donc il n’est pas acceptable que l’on fasse primer l’intérêt
du cocontractant de bonne foi sur l’intérêt du cocontractant de mauvaise foi qui commande
l’annulation du contrat. L’intérêt général doit primer, fut-ce au détriment du cocontractant de
bonne foi et qui ne connaissait pas de motif illicite.
2nde raison est d’ordre pratique : le cocontractant de bonne foi ne pouvait pas lui même
demander la nullité du contrat.
Ex : une personne loue un immeuble et son cocontractant y établit une maison close. Le
propriétaire de l’immeuble qui a loué ce bien, soit il disait qu’il ne connaissait pas le mobile
illicite et auquel cas le contrat ne peut pas être annulé, soit il disait qu’il connaissait le motif
illicite et auquel cas il était complice.
Revirement de jp : 1ère Ch Civ, 7 octobre 1998, abandon de l’exigence de la connaissance
du mobile illicite par les 2 parties, elle affirme dans cet arrêt que un contrat peut être
annulé pour cause illicite ou immorale même lorsque l’une des parties n’a pas eu
connaissance du caractère illicite ou immoral du mobile déterminant du cocontractant
(doc 67).

II. Le régime de l’illicéité de la cause

A) La preuve de l’illicéité

Principe : licéité présumée. Il appartient toujours à celui qui invoque une cause illicite de le
démontrer. La preuve peut se faire par tout moyen car c’est la preuve d’un fait juridique.

B) Le moment de l’appréciation

C’est important car il y a des évolutions jurisprudentielles et de société qui peuvent intervenir.
Il faut se placer au moment de la formation du contrat pour apprécier la licéité de la
cause.
Ex : profession de devin, ou astrologue. Étaient prohibés par l’ancien Code Pénal. Pour savoir
si contrat valable ou non, il faut se placer au moment de la conclusion du contrat. Cause
illicite si contrat conclu avant le nouveau code pénal.

C) La sanction

73
Inexistence de la cause = sanction relative avec tendance jurisprudentielle à accepter la nullité
partielle quand cela est possible.
Illicéité = atteinte à l’intérêt général donc sanction plus sévère = nullité absolue, peut être
invoquée par toute personne qui y a intérêt.

Partie 2. Les effets du contrat

Une fois que le contrat est valablement formé, le contrat va produire des effets entre les
parties.

Il faut d’abord arriver à déterminer quel est le contenu du contrat = obligations qui lient les
parties ?
Une fois qu’on a déterminé son contenu, on verra que le contrat a alors une force obligatoire,
force obligatoire entre les parties mais qui ne peut pas obliger en revanche les tiers.

Titre 1. Le contenu du contrat

Il est étonnant de se poser la question du contenu du contrat. Réponse simple : contenu du


contrat c’est ce que les parties ont convenu, les stipulations contractuelles.
Problème : le contenu du contrat ne se limite pas à ce que les parties ont voulu. Certaines
obligations peuvent être imposées aux parties alors même qu’elles ne résultent pas des
stipulations contractuelles.

CHAPITRE 1. Les obligations voulues par les parties

74
Le contenu du contrat au moins sur ce que les parties ont voulu est clair : ce sont les
stipulations contractuelles qui le définissent. Il y a toutefois certaines difficultés, y compris
pour les obligations qui ont été voulues par les parties.
1ère difficulté tient au fait que parfois l’obligation stipulée n’est pas claire, pas précise, il est
alors nécessaire de procéder à une interprétation du contrat.
2nde difficulté tient au fait que parfois les parties ont elles-mêmes volontairement créé une
convention apparente, officielle mais qu’en réalité leur volonté réelle est cachée, on dit alors
qu’il y a simulation, ce que l’on fait croire aux travers des stipulations contractuelles n’est
pas la réalité, quel est dans ce cas là l’effet de la simulation ?

Section 1 – L’interprétation du contrat

Interprétation du contrat : opération par laquelle on en précise le sens en cas de lacunes,


d’ambigüité, ou de contradictions.
1. Comment interpréter un contrat ?
2. Qui doit interpréter le contrat ?

I. Les directives d’interprétation du contrat

Art 1156 à 1164 CCiv énoncent les principes d’interprétation du contrat.


Ces principes constituent une indication sur la manière d’interpréter le contrat et ces
principes en réalité répondent à 2 grandes maximes :
D’abord il n’est pas nécessaire et il ne faut pas interpréter les clauses qui sont claires et
précises. Autrement dit, lorsque les parties ont clairement exprimé leur volonté, que ce n’est
pas susceptible d’ambigüité, il ne faut pas rechercher une interprétation. On doit s’en tenir à
ce que les parties ont exprimé.
Art 1156 CCiv pose : ce qui prime d’abord et avant tout c’est la commune intention des
parties. L’interprétation du contrat doit être totalement guidée par la recherche de la
volonté des parties et en ce sens là l’intention des parties doit être préférée au sens même
des termes du contrat. Il faut procéder à une interprétation subjective du contrat en
fonction de la volonté des parties. Le juge quand il aura à interpréter un contrat ne doit pas
s’arrêter à la lettre stricte du contrat, si il a de bonnes raisons de penser que celle-ci n’est pas
conforme à la volonté des parties. Et le juge ne doit pas imposer sa propre vision du contrat
mais doit s’en tenir à ce que les parties ont voulu.

Les autres articles qui viennent préciser tel ou tel cas s’inscrivent tous dans le cadre de
ce principe général.
Ex : art 1157 CCiv affirme que lorsqu’une clause est susceptible de 2 sens on doit l’interpréter
dans le sens de celui qui lui donne un effet plutôt que dans celui qui ne lui donne pas d’effet.
Si les parties ont rédigé une clause c’est qu’elles souhaitaient qu’elle leur donne un intérêt. Si
les 2 interprétations donnent un sens à la clause il faut retenir celui qui donne le plus d’effet à
la clause.
Il faut rapprocher les clauses les unes aux autres pour comprendre ce que les parties ont voulu,
pour essayer de comprendre l’ensemble du contrat, art 1161.
De plus, l’usage peut servir de complément pour l’interprétation du contrat car on peut penser
que les parties se sont conformées à l’usage, art 1159 et 1160.
Enfin en cas de doute qui subsiste art 1162 prévoit que l’acte s’interprète contre le créancier et
en faveur du débiteur, règle d’interprétation in favorem du débiteur qui se justifie car on va
considérer que en cas de doute on ne peut pas imposer plus à une partie que ce qu’elle aurait
accepté, on préfère imposer moins que plus.

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II. L’organe d’interprétation

Ce sont les juges qui interprètent le contrat. Si il y a une question d’interprétation c’est que
les parties ne sont pas d’accord.
Q° : l’interprétation des contrats relève-t-elle du fait ou du droit ?
Si elle relève du fait ce sont aux juges du fond de l’interpréter. Si elle relève du droit, le
contrôle peut être opéré par la Ccass. On est en présence d’une situation hybride.
Principe : l’interprétation relève du pouvoir souverain des juges du fond, mais la Ccass
garde un certain contrôle, mais très limité, qui est uniquement le contrôle de la
dénaturation du contrat.

1. Le pouvoir souverain des juges du fond dans l’interprétation du contrat


Ch réunies Ccass, 2 février 1808, arrêt Lubert, a posé clairement le principe : les juges du
fond ont un pouvoir souverain pour apprécier le contenu d’une contrat et pour rechercher la
commune intention des parties et déterminer ainsi le sens des clauses stipulées. Il y a donc une
différence majeure entre l’interprétation du contrat et l’interprétation de la loi. Interprétation
de la loi relève de la mission de la Ccass.
Toutefois la Ccass garde un certain contrôle.

2. Le rôle dévolu à la Ccass


Contrôle de dénaturation. Ccass exerce un certain contrôle à travers le grief de dénaturation
du contrat qui est un grief de création purement jurisprudentielle.
La dénaturation est une erreur d’interprétation grossière, manifeste, d’un acte juridique
par les juges du fond. En donnant un autre sens que celui résultant de toute évidence des
termes du contrat les juges du fond dénaturent le contrat et sont sanctionnés par la Ccass
sous le visa de l’art 1134 CCiv.
La dénaturation ne peut exister en réalité que lorsque la clause était claire et précise, càd ne
devait pas faire l’objet d’une interprétation et que les juges ont, en dépit de sa clarté, changé le
sens de cette clause.
Car en effet il ne peut y avoir d’erreur d’interprétation grossière et manifeste que si la clause
était claire. Si elle était obscure le grief de dénaturation ne peut pas prendre place.

Section 2 – La simulation

La simulation existe lorsque les parties ont en réalité souhaité établir 2 actes :
- un acte officiel destiné aux tiers, destiné à être connu par les tiers
- un acte secret destiné à n’être connu que des parties.
L’acte officiel ne correspond pas réellement à la volonté des parties, il correspond
uniquement à ce que les parties ont voulu montrer aux tiers.
L’acte secret correspond à la véritable volonté des parties, à la volonté réelle des
cocontractants.
Il y a donc un dédoublement des conventions : d’un côté, un acte qu’on appelle l’acte
ostensible, l’acte montré aux tiers, et d’un côté, il va y avoir un acte secret, la contrelettre,
qui lui va en réalité recéler la véritable volonté des parties.
En général la simulation est destinée à tromper les tiers, à leur mentir, à ne pas déclarer la
vérité.
Par exemple une personne souhaite donner un bien immobilier à une autre mais elle ne veut
pas que l’on sache qu’il s’agit d’une donation et veut faire croire à une vente. Donc les parties
vont faire croire à un contrat de vente. Acte ostensible = contrat de vente. Mais les parties

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vont convenir d’une contrelettre disant qu’en réalité il s’agit d’une donation et qu’il n’y aura
pas de paiement du prix.

L’objectif poursuivi peut être divers : ça peut être dans le cadre d’une relation adultérine.
La contrelettre peut modifier totalement ou partiellement l’acte ostensible. La contrelettre
peut par exemple baisser le prix d’une vente.
Ex : acte ostensible = prix d’1 million d’€. Contrelettre = prix = 600 000€. Imaginons que le
propriétaire du bien ait conclu un pacte de préférence avec un tiers, au prix auquel il entend le
vendre, il ne veut pas le vendre à ce bénéficiaire du pacte et dit qu’il va le vendre à 1 million.
Il ne fait pas jouer son droit de préférence. Fraude au bénéficiaire du pacte.
Quel est le régime de la simulation ?
Quel acte faut-il faire prévaloir ?
Obligations auxquelles les parties vont être tenues ?
Il faut pour cela distinguer les effets de la simulation entre les parties au contrat et les effets de
la simulation à l’égard des tiers.

I. Les effets de la simulation entre les parties

Principe : le droit est neutre vis-à-vis de la simulation. Cela veut dire que l’on ne va pas
condamner par principe la simulation.
Si l’opération poursuivie est illicite, à ce moment là l’opération sera annulée, comme tout
contrat illicite. Mais si l’opération est licite on donnera effet à la simulation.
Autrement dit on traite le contrat lorsqu’il y a simulation exactement comme on traite
n’importe quel autre contrat.
Cela signifie que ce qui va primer entre les parties c’est la contrelettre et non pas l’acte
ostensible. Ce que les parties ont voulu est exprimé dans la contrelettre. C’est la solution qui
est énoncée par l’art 1321 CCiv selon lequel les contrelettres ne peuvent avoir leur effet
qu’entre les parties contractantes. Elles n’ont point d’effet contre les tiers. Entre les parties
contractantes c’est la contrelettre qui prime. L’efficacité de la simulation reste subordonnée à
certaines conditions. La contrelettre doit obéir à toutes les conditions de validité des
conventions (consentement, capacité, objet, cause).
Ce qui signifie que pour que la contrelettre soit valable, encore faut-il que la cause soit licite.
Si un désaccord existe entre les parties, relativement à l’existence ou au contenu de la
contrelettre, à ce moment là les parties doivent engager une action en déclaration de
simulation. Elles doivent ainsi produire la contrelettre. Lorsque l’acte ostensible a été passé
par écrit, il faut que la contrelettre ait également été conclue par écrit. Pour prouver outre et
contre le contenu d’un écrit il est nécessaire d’avoir un autre écrit.

II. Les effets de la simulation à l’égard des tiers

Si les contrelettres produisent des effets entre les parties en revanche elles ne peuvent
pas être opposées aux tiers. Les tiers peuvent s’en prévaloir si ils y ont intérêt. Autrement
dit, les tiers disposent d’une option selon leur intérêt.
Si leur intérêt est de se prévaloir de l’acte apparent, ils peuvent l’invoquer. Si en revanche ils
ont intérêt à invoquer la contrelettre et qu’ils en ont connaissance à ce moment là le tiers peut
invoquer la contrelettre.

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Ex : si l’on prend l’exemple de la vente d’un bien immobilier qui est surévalué dans l’acte
apparent pour violer un droit de préférence, le bénéficiaire a intérêt à invoquer la contrelettre.
Si le tiers a intérêt à invoquer l’acte ostensible, il peut.
Selon leur intérêt les tiers invoqueront soit l’acte apparent soit la contrelettre.

CHAPITRE 2. Les obligations imposées aux parties

Les cocontractants (pas plus que le législateur) ne peuvent tout prévoir, et même dans les
contrats les plus détaillés, certaines situations n’ont pas pu être envisagées, de telle sorte que
face à une lacune du contrat, il sera nécessaire de combler cette lacune en amenant la solution
qui soit le plus conforme à la volonté des parties.
Cette possibilité de combler les lacunes du contrat est d’ailleurs expressément prévue par
l’article 1135 du Code civil qui dispose «les conventions obligent non seulement à ce qui est
exprimé mais encore à toutes les suites que l’équité, l’usage ou la loi donne à l’obligation
d’après sa nature».
Sur le fondement de cette disposition, la jp à partir du XXème siècle et principalement à partir
d’un arrêt de la chambre civile du 21 novembre 1911, n’hésite pas à ajouter à la convention
des obligations qui n’avaient été nullement envisagées par les parties.
Il ne s’agit plus alors simplement de combler des lacunes, des situations non prévues par les
parties, mais il s’agit d’énoncer de nouvelles obligations qui n’étaient pas souhaitées par les
parties mais qui leur sont imposées. On parle à cette occasion de forçage du contrat car on
va forcer le contrat afin d’y intégrer des obligations non convenues entre les parties. On
parle parfois d’obligation légale car elles ne résultent pas d’un accord de volonté, non pas
du législateur mais du juge qui l’impose aux parties légales (dans le sens où elles ne
peuvent y déroger) et ce n’est pas la volonté qui les crée. 
Ce phénomène connaît 3 grandes illustrations :
- obligation de sécurité
- obligation d’information
- obligation de bonne foi (elle est un tout petit peu différente des 2 précédentes car elle
est directement prévue par le CCiv à l’art 1134 al 3, elle est donc imposée par le CCiv
et n’a pas été découverte par la jp)

Section 1 – L’obligation de sécurité

C’est celle en vertu de laquelle le débiteur ne doit pas causer de dommage corporel à son
cocontractant par l’exécution du contrat.
= L’exécution d’un contrat ne doit pas donner lieu à une atteinte à l’intégrité physique d’un
cocontractant.
C’est en ce sens toujours une obligation accessoire qui se greffe sur une obligation principale.
Obligation qui vient accompagner l’obligation principale en prévoyant que dans le cadre de
l’exécution de l’obligation principale il ne pourra pas y avoir d’atteinte à l’intégrité
corporelle.
Obligation d’abord née dans les contrats de transports et elle a ensuite été étendue à d’autres
situations.
Obligation dans les transports fut reconnue pour la 1ère fois par les juges dans l’arrêt Ch
Civ 21 novembre 1911, affaire de la Cie Générale Transatlantique.
Dans cette affaire un passager avait prix un billet, sur un paquebot pour faire la traversée entre
Tunis et Bône. Ce billet autorisait les passagers à se tenir dans le sous pont à côté des
marchandises. En cours de route le passager fut grièvement blessé au pied par la chute d’un
tonneau mal arrimé. Cour d’appel avait recherché la responsabilité délictuelle du transporteur.

78
La Ccass a cassé l’arrêt sous le visa de l’art 1134 (matière contractuelle) et au motif que
l’exécution du contrat de transport comporte pour le transporteur l’obligation de conduire
les voyageurs sains et saufs à destination. Dès lors qu’un accident s’était produit en cours de
transport, le transporteur était responsable car son obligation contractuelle de sécurité n’avait
pas été correctement exécutée.
Par la suite cette obligation de sécurité a été réitérée dans l’ensemble des contrats de transport
et notamment dans les contrats de transport ferroviaire.
Puis cette obligation de sécurité va être également appliquée à d’autres contrats assimilés au
contrat de transport (ex : télésiège, toboggan aquatique).
Par la suite le domaine de cette obligation de sécurité s’est encore élargi pour couvrir des
domaines très diverses, par ex la jp a considéré que une obligation de sécurité existait à la
charge des professionnels dont la clientèle est blessée dans leurs locaux (dans une clinique, un
magasin).
La jp a également admis une obligation de sécurité à la charge du vendeur.
En réalité dans un premier temps, la jp a admis une obligation de sécurité à la charge du
vendeur qui est tenu d’assurer contractuellement la sécurité de l’acheteur et des tiers en
livrant des produits qui sont exempte de vice, arrêt de la 1ère Ch Civ, 11 juin 1991.
La jp a ensuite eu à préciser la portée de sa décision car entre temps à la suite d’une directive
européenne transposée en France par la loi du 19 mai 1998, des dispositions spécifiques
relatives à la responsabilité des produits défectueux ont été introduits dans le CCiv aux art
1386-1 et s. Ces dispositions ont introduit en droit français les dispositions de la directive de
1985 du coup ces dispositions remplacent l’obligation de sécurité du vendeur à l’égard des
produits qu’il met sur le marché.
Restait une question : ces dispositions ne concernent que les produits des professionnels qui
sont mis sur le marché, or la directive communautaire elle ne s’applique que pour les produits
destinés au consommateur, non pas ceux destinés au professionnel. La loi de 1998, art 1386-2
ne distingue pas entre les produits destinés au consommateur ou au professionnel mais donc
problème pour la période intermédiaire entre 1985 et 1998. Problème : la loi de 1998 ne
s’applique que pour les produits mis en circulation sur le marché après le 21 mai 1998.
Obligation de sécurité générale.
Mais pour les produits mis en circulation avant par des professionnels, la directive ne
s’appliquait pas.
Donc la Ccass, dans un arrêt du 26 mai 2010 a considéré que le vendeur professionnel était
tenu d’une obligation de sécurité à l’encontre de son acheteur, fut-il professionnel. C’est sur le
terrain de l’obligation de sécurité que la Ccass se place pour admettre cette obligation.
Faits : un groupe électrogène installé en 1995 dans un hôpital lyonnais avait pris feu à la suite
de l’échauffement de l’alternateur. Q° de la responsabilité du fabricant était posée. Sur le
fondement de l’obligation de sécurité, sa responsabilité a été retenue.
La jp, en dehors du contrat de vente, a également retenu une obligation de sécurité à la
charge de l’employeur dans les contrats de travail. Selon l’arrêt de principe de la Ch
Sociale, 28 février 2002, repris par la suite à de nombreuses reprises, l’employeur est tenu
envers son salarié d’une obligation de sécurité notamment en ce qui concerne les maladies
professionnelles contractées par ce salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés par
l’entreprise.
La jp a également considéré que les médecins, les centres hospitaliers, les établissements de
santé (pour les périodes pas couvertes par la loi de 2002) avaient à l’égard des patients une
obligation de sécurité en matière d’infections nosocomiales (contractées dans le milieu
médical). Arrêt 1er Ch Civ 18 février 2009.
En réalité, un arrêt de 3e Ch Civ du 1er avril 2009 l’illustre, tous les contrats dans lesquels
il peut y avoir une atteinte à l’intégrité physique des personnes comportent une

79
obligation de sécurité. A l’exception de l’obligation médicale à proprement parler. En effet
lorsque dans le cadre de l’exécution d’un contrat (vente, transport, travail, contrat de soins en
dehors de l’obligation de soins, contrat de maintenance) il peut y avoir un risque d’atteinte à
l’intégrité physique on va considérer sur le fondement de l’art 1135 CCiv que le cocontractant
est tenu d’une obligation de sécurité càd justement de ne pas porter atteinte à cette intégrité
physique.
Faits : une société était chargée de la maintenance et de l’entretien complet d’un ascenseur.
Une personne qui avait emprunté cet ascenseur a fait une chute car l’ascenseur ne s’était pas
arrêté au bon niveau au RDC mais quelques centimètres au dessus. Donc en sortant de
l’ascenseur la personne était tombée et avait subi du fait de cette chute un préjudice.
La Ccass dans cette affaire a considéré que « celui qui est chargé de la maintenance et de
l’entretien complet d’un ascenseur est tenu d’une obligation de résultats en ce qui concerne
la sécurité ». Au travers de cet arrêt on voit bien que dans tout contrat quel qu’il soit, si dans
l’obligation de l’exécution peut porter atteinte à l’intégrité d’une personne, ce contrat
comporte une obligation de sécurité.

Section 2 – Les obligations d’information

Obligation qui ne s’arrête pas aux portes du contrat. Une fois contrat conclu les parties
doivent poursuivre la transmission des informations qui permettent d’obtenir une pleine
satisfaction de l’exécution du contrat.
Par ex : le vendeur doit informer l’acheteur sur le mode d’emploi précis de la chose achetée
afin que celui-ci puisse se servir de manière satisfaisante de la chose.
Là encore, cette obligation d’information s’applique à divers contrats toutes les fois
qu’une information est utile dans l’exécution du contrat (contrat de l’avocat, du notaire,
de l’huissier de justice).
Une difficulté particulière existe en matière médicale. Le médecin est évidemment tenu
d’une obligation d’information vis-à-vis de son patient, obligation déjà énoncée par la jp,
obligation aujourd’hui codifiée, art 1115-2 Code de la santé publique. La Ccass, arrêt 1ère Ch
Civ, 8 avril 2010 (doc 8), avait énoncé sur le fondement de l’art 1147 que cette obligation
d’information était une obligation contractuelle du médecin qui se déroulait dans le cadre de
son contrat médical alors que la Ccass, 1ère Ch Civ, 3 juin 2010 (doc 9) visa de l’art 1382
CCiv pour condamner un médecin en raison de son défaut d’information. Effectivement
pour le médecin il est difficile de savoir si obligation d’information est précontractuelle
ou dans le contrat médical. La jp considère désormais qu’il s’agit d’une obligation
d’information précontractuelle. Solution posée par la Ccass est à ce titre critiquable.
Pourquoi ? Car lorsqu’un patient se rend chez un médecin et que celui-ci l’informe par ex des
besoins d’une opération et des risques liés, le patient va payer une consultation à son médecin
et est donc dans une relation contractuelle avec le médecin. Simplement ce contrat médical
conclu à ce moment là est un avant contrat du contrat médical qui donnera lieu à l’opération
elle-même. Il n’en demeure pas moins que c’est toujours dans une relation contractuelle que
les parties se placent donc il apparait logique que dans le cadre du contrat médical l’obligation
d’information est une obligation contractuelle même si elle est préalable au contrat de soins à
proprement parler.

Section 3 – L’obligation de bonne foi

Obligation expressément prévue par l’art 1134 al 3. Article fondateur du droit des contrats
énonce que les conventions doivent être exécutées de bonne foi. Principe assez simple mais

80
entendu plus ou moins largement par la jp. La jp a une vision plutôt extensive de cette
notion.
La jp va imposer de nombreuses règles aux parties fondées sur cette obligation de bonne foi.
S’est posée la q° de savoir ce qu’il advenait lorsqu’une partie avait agi de mauvaise foi, ou
lorsque le juge constatait un défaut de bonne foi. Jusqu’où pouvait aller le juge ?
La Ccass, dans 2 arrêts très importants :
3e Ch Civ, 10 juillet 2007 (doc 74)
3e Ch Civ, 9 décembre 2009 (doc 75)
La Ccass a estimé sur le fondement de l’art 1134 al 3 que si la règle selon laquelle les
conventions doivent être exécutées de bonne foi permet au juge de sanctionner l’usage
déloyal d’une prérogative contractuelle, elle ne l’autorise pas à porter atteinte à la
substance même des droits et obligations légalement convenus entre les parties.
Autrement dit, s’il est possible de sanctionner une partie que n’agit pas de bonne foi, il n’est
pas possible de modifier les stipulations contractuelles sur le fondement de cette obligation de
bonne foi. Le contrat et les droits et obligations qui lient les parties ne peuvent être changés,
ne peuvent être modifiés par le juge, seule la sanction de la mauvaise foi peut être
ordonnée. Cet ensemble contractuel qui mélange des obligations voulues par les parties et qui
forment l’essentiel du contrat et des obligations imposées aux parties, obligations qui vont
découler de la nature des obligations contractuelles et venir se greffer à ce contrat.

CHAPITRE 3. La nature des obligations contractuelles

Il est des hypothèses où les parties ont détaillé leur obligation contractuelle de manière très
précise. Elles ont pu dire quels étaient les contours de l’obligation de chacune des parties et
dans quels cas on pouvait considérer que l’obligation était correctement exécutée et dans
quels autres cas on devait considérer qu’elle n’était pas correctement exécutée. Mais il arrive
aussi fréquemment que les parties aient seulement énoncé une obligation à la charge de l’une
des parties sans pour autant en avoir exactement défini les contours.
Ex : une personne va confier sa voiture à un garagiste pour que celui-ci la répare, les parties
n’ont pas nécessairement défini les contours de l’intervention du garagiste et dans quels cas
elles vont considérer que le garagiste a ou n’a pas correctement exécuté son obligation. De
même lorsque des obligations sont imposées aux parties, par hypothèse, il n’y a pas de
définition du contour de cette obligation puisque les parties n’en sont pas à l’origine.
Dans ces différents cas (obligations voulues par les parties mais aux contours incertains,
obligations imposées aux parties) se pose la question de la qualification des obligations.
Comment interpréter ces obligations ? Comment les qualifier pour savoir exactement ce à
quoi elles engagent ?

Section 1 – La qualification des obligations contractuelles

Exemples pour comprendre le problème :


- 1er contrat : un contrat de prestation de service : un peintre en bâtiment qui doit peindre
une pièce.
- 2e contrat : un contrat médical entre un patient et son médecin.
Dans le 1er contrat (peintre/client) si le peintre a peint la pièce comme il s’y était engagé, et
s’il l’a correctement peinte, le peintre a correctement exécuté son obligation. Si en revanche il
n’a pas peint, il a manqué à son obligation. Si un défaut apparaît sur le mur, (ex : la peinture
gondole) on va considérer que cela relevait de sa prestation de service et qu’il lui appartient
de préparer le mur. Ça n’est que si le défaut sur le mur apparaissait en raison d’une autre
cause que le peintre ne sera pas responsable.

81
Dans le 2e contrat, lorsqu’une personne est malade et qu’elle va voir un médecin, est-ce qu’il
peut lui garantir la guérison ? Non, impossible. Il ne peut que lui garantir le fait de tout mettre
en œuvre pour essayer de parvenir à la vérité.
Il ne peut que lui garantir que en l’état des données de la science, en l’état des connaissances,
des médicaments existants il fera tout pour lui proposer le meilleur traitement possible qui
puisse parvenir à la guérison.
Dans un cas, peintre en bâtiment, soit pièce correctement peinte et il a tenu ses obligations,
dans le cas du médecin il s’est engagé à tout faire pour tenter d’obtenir un résultat, on
distingue 2 types différents d’obligations au travers de ces exemples : dans un cas on parle
d’une obligation de résultat (peintre), dans l’autre on parle d’une obligation de moyens
(médecin), résultat pas garanti. Cette différence entre obligation de résultats et de moyens
est fondamentale en matière contractuelle.

I. Le principe de la différence entre obligations de moyens et de résultats

C’est un auteur, René Demogue, qui au XXe siècle a théorisé la distinction entre les
obligations de moyens et de résultats. Il est pour cela parti de la différence qu’il y a entre
les art 1147 CCiv et 1137 CCiv.
Ces 2 art n’ont pas la même portée : l’art 1147 est un art général, art 1137 est un art
particulier.
L’art 1147 prévoit en effet que le débiteur est condamné soit à raison de l’inexécution de
l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que
l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait
aucune mauvaise foi de sa part.
En partant de l’analyse de cet art, on s’aperçoit que la condamnation du débiteur se fait
dès lors que l’on constate que l’exécution n’a pas été réalisée. Peu importe à ce titre de
savoir si cette inexécution est fautive ou non. Il n’y a pas de place pour l’appréciation
d’une faute du cocontractant. Le débiteur ne peut s’exonérer de sa responsabilité que s’il
prouve que l’inexécution provient d’une cause étrangère.
2nd art : art 1137 traite exclusivement de l’obligation de donner, et plus précisément de
l’obligation de veiller à la conservation de la chose. Cela soumet celui qui en est chargé à y
apporter tous les soins d’un bon père de famille. Il est tenu d’apporter tous les soins (mettre en
œuvre tous les moyens) afin de conserver la chose. Dans ce cas, comment constater si
obligation a été ou non correctement exécutée ? Elle l’a été si tous les soins ont été apportés,
et pas été si tous les soins pas apportés. Ce n’est pas la conservation de la chose, objectif de
cette obligation, qui permet de savoir si obligation a été ou non exécutée.
Au travers de ces 2 articles, on a donc opéré une distinction entre 2 obligations de
nature différente.
Dans certaines obligations, le débiteur s’engage à un résultat précis. Soit ce résultat est
atteint, soit il ne l’est pas.
Si le résultat est atteint, l’obligation a été correctement exécutée, s’il n’est pas atteint il y a
manquement à l’obligation contractuelle. Il n’y a pas de place pour savoir si le débiteur a
correctement agi/pas correctement agi. Il doit un résultat, il doit s’y tenir. Dans cette
hypothèse, on parlera d’obligation de résultat. Dans le cadre de cette obligation de résultat,
le débiteur de l’obligation ne va pas être jugé sur son comportement, il va être jugé sur son
résultat. Si résultat pas atteint, il est responsable. En dépit du comportement exemplaire, si un
patient a contracté une maladie nosocomiale dans son cabinet, médecin quand même
responsable Responsabilité sans faute. En effet lorsque l’on parle de faute, on juge un
comportement. Savoir si telle ou telle personne a commis une faute c’est savoir si elle s’est
bien comporté au regard des exigences qu’on peut avoir.

82
Dans l’obligation de résultat, on ne fait pas attention à la faute. Ainsi le débiteur de
l’obligation ne peut pas s’exonérer en prouvant son absence de faute, il ne peut s’exonérer
qu’en prouvant une cause étrangère. Le fait que résultat pas atteint suffit à engager sa
responsabilité, sauf si préjudice vient d’ailleurs.
L’obligation de moyens elle est de toute autre nature, illustrée par art 1137. Aucun résultat
n’est garanti dans cette obligation. Le débiteur de l’obligation s’engage simplement à
mettre tous les moyens en œuvre pour parvenir au résultat souhaité. Peut-être y arrivera-
t-il, peut-être pas. Pour savoir s’il a correctement exécuté son obligation ce n’est donc pas
seulement le résultat qu’il faut regarder. Si le résultat est atteint cela laisse supposer que
traitement était bon, moyens mis en œuvre bons. Mais lorsque le résultat n’est pas atteint, cela
ne suffit pas à engager la responsabilité du débiteur de l’obligation. Encore faut-il au surplus
démontrer que ce débiteur n’a pas mis tous les moyens en œuvre pour correctement exécuter
son obligation. On est alors dans le cadre d’une responsabilité pour faute. Pourquoi ? Car
dans ce cas là ce que l’on va juger c’est le comportement de la partie, qui dit juger un
comportement, dit juger en terme de faute de la part de cette personne.
Soit le débiteur de l’obligation a mis en œuvre tous les moyens pour parvenir au résultat,
auquel cas il n’a pas commis de faute, responsabilité ne peut pas être engagée.
Soit, le débiteur de l’obligation n’a pas mis tous les moyens en œuvre et auquel cas sa
responsabilité pourra être engagée parce qu’il aura commis une faute.
Obligation de moyens = responsabilité pour faute et on est dans la cas où le résultat en
réalité ne peut pas être garanti. Un médecin ne peut pas garantir le soin à son patient. Il ne
peut garantir que qu’il fera tout pour y parvenir. Dans ce cadre là on ne pourra pas juger de la
bonne ou de la mauvaise exécution du contrat en fonction du résultat obtenu ou de l’absence
de résultat.

La plupart du temps obligations = obligations de résultats.

II. Les critères de distinction entre obligations de moyens et de résultats

L’idée générale est la suivante : lorsque le résultat peut être garanti obligation doit être
obligation de résultat. Lorsqu’en revanche résultat aléatoire, obligation ne peut être
qu’une obligation de moyen pour parvenir à un résultat déterminé.
Ex : avocat, il ne peut pas garantir à son client qu’une affaire sera gagnée. Aléa judicaire : il
ne peut pas décider de ce que les tribunaux vont décider. Il ne peut garantir gain ou perte
d’une affaire, il peut simplement dire « je vais tout mettre en œuvre pour gagner »obligation
de moyens. Pour engager la responsabilité éventuelle de l’avocat on vérifiera effectivement
s’il a mis en œuvre tous les moyens possibles pour parvenir au résultat ou non.
On distingue les obligations de moyens/résultats par rapport à l’aléa du résultat.
Critère général de la distinction = l’aléa.
Lorsque résultat aléatoire = obligation de moyens
Lorsque résultat pas aléatoire = obligation de résultats

Cela dit il y a des obligations pour lesquelles la classification est simple. Dans une vente, il
n’est pas question de faire de l’obligation de l’acheteur ou du vendeur une opération au
résultat aléatoire. Acheteur doit payer le prix, vendeur doit livrer la chose.
Inversement pour le médecin, ou l’avocat, il est clair que le résultat ne peut pas être garanti,
de telle sorte que obligation = obligation de moyens.
Mais il y a d’autres obligations pour lesquelles une difficulté de qualification existe.
Solution moins simple à trouver.

83
Dans ce cas là, le premier critère de distinction c’est d’abord et avant tout la volonté des
parties. Est-ce qu’elles ont voulu faire de l’obligation une obligation de moyens ou de
résultats ?
Ex : garagiste, contrat entre un garagiste et son client dans lequel les parties ont clairement
prévu que le garagiste ne s’engage pas à réparer la panne mais qu’il va tout faire pour trouver
un moyen de réparer la panne, il ne fait alors pas de doute que les parties ont souhaité mettre
en œuvre une obligation de moyens.
Si en revanche le garagiste s’est engagé à réparer une panne, à ce moment là le garagiste sera
tenu d’une obligation de résultat. Tout dépendra alors d’abord et avant tout de la volonté des
parties.
Parfois l’examen de la volonté des parties ne suffit pas, soit parce que stipulations pas
suffisamment claires, il faut bien un critère alternatif à la volonté des parties dans ce cas
là. De même lorsqu’on est en présence d’obligations imposées, il n’est pas possible de savoir
si les parties ont voulu en faire une obligation de moyens ou de résultats. Dans ce cas là il faut
trouver un autre critère.
La jp met en avant le critère du rôle actif ou passif du créancier de l’obligation. En effet
soit le créancier de l’obligation a un rôle actif dans l’exécution de l’obligation et auquel
cas l’obligation est de moyens, parce qu’on ne peut pas garantir le résultat. Il ne peut pas
dans ce cas là garantir le résultat parce que le créancier de l’obligation ayant un rôle actif, le
résultat va notamment dépendre du comportement du créancier de l’obligation.
Ex : quand celui qui organise un parcours d’aventures (accrobranche) est tenu par une
obligation de sécurité en tant qu’organisateur du parc, l’organisateur de l’accrobranche peut-il
être tenu d’une obligation de sécurité de résultat ? Non parce que cette obligation va en partie
dépendre de l’obligation du créancier (celui qui pratique le parcours) s’il respecte les
consignes de sécurité il ne devrait pas lui arriver d’atteinte à son intégrité physique. Mais en
revanche si le participant au parc de loisirs prend des risques, ne se conforme pas aux
consignes de sécurité, à ce moment là l’organisateur du parc de loisirs ne peut pas être
responsable car ça ne dépend pas de lui. Donc lorsque le créancier de l’obligation de sécurité
joue un rôle actif, l’obligation ne peut être que de moyens.
Lorsqu’en revanche le créancier de l’obligation ne joue qu’un rôle passif, à ce moment
là l’obligation de sécurité sera une obligation de sécurité de résultat car il n’y a plus
d’aléa tenant au comportement de l’autre partie. Pour savoir si aléa ou non quant au résultat il
faut savoir quel est le rôle du cocontractant.

Critère général = l’aléa


1er critère pour savoir s’il y a aléa = volonté des parties
Lorsque volonté pas suffisante on prend en compte critère du rôle actif ou passif du
créancier. Rôle actif = obligation de moyens ; rôle passif = obligation de résultats.

Section 2 - La mise en œuvre de la distinction entre obligations de moyens et obligations


de résultats

La question va se poser de manière générale pour toute sorte d’obligations. Mais 2 obligations
font l’objet d’une attention particulière car difficulté : obligation de sécurité et obligation du
médecin.

I. L’obligation de sécurité

84
Elle pose un problème particulier car ce n’est pas les parties qui l’énonce c’est le juge ou la
législateur qui l’impose, de telle sorte que la volonté des parties est indifférente, n’est pas
prise en compte pour qualifier cette obligation de sécurité de moyens ou de résultats.
Or il est effectivement important pour cette obligation de savoir si elle est de moyens ou de
résultats.
En effet si obligation est de résultat il suffit de montrer que le créancier de l’obligation de
sécurité a subi un dommage corporel pour que la responsabilité soit engagée et pour qu’il y ait
réparation.
Si en revanche obligation de sécurité est de moyens, l’existence d’une atteinte à l’intégrité
corporelle ne suffit pas à engager la responsabilité. Il faudra prouver au delà de cette atteinte
que le débiteur de l’obligation de sécurité n’a pas mis tous les moyens en œuvre pour assurer
la sécurité de son cocontractant.
Obligation de sécurité d’abord née dans les contrats de transports.

A) L’évolution à propos du contrat de transports

Arrêt de 1911 : la Ccass avait qualifié l’obligation de sécurité, d’obligation de résultats.


Le transporteur devait conduire le voyageur sain et sauf à destination, si le voyageur était
blessé durant le transport, le transporteur est responsable.
Par la suite la question de l’obligation de sécurité dans les contrats de transports s’est
essentiellement posée en matière de transport ferroviaire. La jp a par un arrêt de la 1ère Ch
Civ 17 mai 1961 énoncé une obligation de sécurité de résultats à la charge du transporteur
(SNCF) ; obligation de sécurité de résultats qui commence depuis l’entrée de la gare
jusqu’à la sortie de la gare d’arrivée. Depuis l’entrée de la gare jusqu’à sa sortie la Ccass a
considéré que la SNCF était tenue à une obligation de sécurité de résultats. A partir de là on a
soulevé le fait que dans l’enceinte de la gare, voyageur parfaitement libre de ses mouvements
et qu’il existait de lourds aléas qui fait que l’atteinte à sa sécurité pouvait provenir de son
propre comportement, c’est pour ça que la Ccass a tempéré sa solution en affirmant que
l’obligation de sécurité est de résultats pendant le transport lui-même mais que
l’obligation est une obligation de moyens à partir du moment où le voyageur est
uniquement dans l’enceinte de la gare (arrêt 1ère Ch Civ 1er juillet 1969) et plus précisément
l’obligation de sécurité de résultats commence au moment où le voyageur commence à
monter dans le train et jusqu’au moment où il achève d’en descendre. Obligation sécurité est
alors de résultat. En dehors de ça obligation est de moyens. Position réitérée, 21 juillet 1970,
1ère Ch Civ.
Problème en dehors du transport lui même continuait à se poser car dans l’enceinte de
la gare il n’y a pas que des voyageurs. Il y a des tiers qui n’ont pas de billet, qui
accompagnent les voyageurs ou autre. Vis-à-vis de ces personnes, la responsabilité de la
SNCF ne peut être qu’une responsabilité délictuelle puisqu’ils ne sont pas liés par contrat à la
SNCF. Donc situation où on avait 2 régimes différents qui s’appliquaient dans l’enceinte de
la gare. Or la responsabilité délictuelle est plus avantageuse que l’obligation de moyens
car en matière de responsabilité délictuelle, toutes les fois que le dommage provient d’une
chose (plaque de verglas sur un quai) la responsabilité est une responsabilité sans faute,
automatique de la part du gardien de la chose, donc il était plus avantageux d’être tiers que
voyageur.
Q° s’est posé dans un arrêt de 1989 où 2 personnes, l’un voyageur, l’autre non, ont glissé
effectivement sur une plaque de verglas, un train passant par là leur a coupé les 2 jambes. La
Ccass a opéré un revirement dans cet arrêt Walverd, arrêt 1ère Ch Civ, 7 mars 1989, a
considéré que obligation de sécurité de résultat pendant l’exécution du contrat de
transport mais en dehors de cela, la responsabilité du transporteur à l’égard du

85
voyageur est soumise aux règles de la responsabilité délictuelle. On place tout le monde
sous le même régime, que l’on soit voyageur ou tiers, en dehors du transport lui-même.
Régime commun en dehors du transport lui-même.
Cela signifie que la SNCF, toutes les fois qu’il y a une atteinte à l’intégrité corporelle lors
de l’exécution du contrat, ne peut s’exonérer qu’en prouvant une cause étrangère (un cas
de force majeure) càd un évènement extérieur, imprévisible, irrésistible.
Ainsi si une personne dans un train se fait blesser par un autre passager qui lui vole ses bijoux,
la SNCF est responsable car il lui appartient de mettre des contrôleurs en nombre suffisant,
mesures de prévention pour veiller à la sécurité de ses passagers, 3 juillet 2002, 1ère Ch Civ,
doc 79. De même si une personne tente de monter dans le train alors que celui-ci a déjà
entamé sa marche, et que du coup cette personne glisse sous le train et y perd ses jambes, à ce
moment là on va considérer que la SNCF est aussi responsable sur le fondement de
l’obligation de résultats, pareillement il n’y a pas de cas de force majeure car il appartenait à
la SNCF de mettre un système que permettait au voyageur de ne pas monter dans le train en
marche, arrêt 1ère Ch Civ 18 mars 2008 (doc 80).

B) L’obligation de sécurité dans les autres contrats

Obligation de sécurité sera de moyens ou de résultats selon les critères du rôle actif ou
passif du créancier de cette obligation. Et c’est ainsi que à propos des remontées
mécaniques au ski, la Ccass a été amenée à faire des distinctions très subtiles par 2 arrêts :
- 1ère Ch Civ, 4 novembre 1992
- 1ère Ch Civ, 10 mars 1998
La Ccass a considéré dans ces affaires à propos de télésièges, que au moment des opérations
de départ et d’arrivée le skieur a un rôle actif, et donc son obligation de sécurité est à ce
moment là dans les phases d’embarquement de débarquement est une obligation de
sécurité de moyens. En revanche pendant le transport lui-même l’obligation de l’exploitant
du télésiège est une obligation de résultats car à ce moment là le skieur n’a plus qu’un rôle
passif, confirmé 11 juin 2002, 1ère Ch Civ.
Ensuite cela se fera au cas par cas.
Dans les domaines par ex de pratique sportive, en général, pour un stage d’alpinisme, 10 mars
1992 ; pour l’équitation ; pour des parcours d’aventures, 22 janvier 2009 ; pour des activités
de parachutisme, 22 juin 2004 ; pour un activité de parapente ; lorsque le client est seul, dans
tous ces cas là on va considérer que l’obligation est une obligation de sécurité de moyens,
puisque le créancier de l’obligation de sécurité a un rôle actif.
En revanche dans tous les cas où le créancier n’a qu’un rôle passif, obligation considérée
comme une obligation de résultats ainsi est tenu d’une obligation de sécurité de résultats celui
qui organise un baptême de plongée, 1ère Ch Civ, 1er juillet 1997 ; de même dans le cadre du
parapente lorsque vol d’initiation avec un moniteur, 21 octobre 1997 ; idem en matière de
bob-luge.
La jp va distinguer à chaque fois selon rôle actif ou passif du créancier.

II. L’obligation du médecin

Il s’agit d’une obligation très importante au regarde de cette distinction, car il s’agit de
l’exemple type de l’obligation de moyens. Elle est toutefois susceptible de tempéraments et le
principe de l’obligation de moyens connaît également un certain nombre d’exceptions.

A) Le principe

86
La responsabilité contractuelle du médecin est posée dans l’arrêt Mercier de la 1ère Chambre
civile du 20 mai 1936 (doc. 78).
La Ccass affirme dans cet arrêt que les relations entre un médecin et son client sont bien
contractuelles. Cela n’était pas évident en raison de l’objet même du contrat (soin du corps
humain), dont on aurait pu penser qu’il échappait au champ contractuel. Mais puisque le
médecin agit à titre thérapeutique, cela ne pose pas de difficultés.
Le second apport de cet arrêt est la précision de l’obligation même du médecin, qui a
l’engagement « sinon bien évidemment de guérir le malade, du moins de lui donner des soins
non pas quelconques, mais conformes aux données acquises de la science ». A partir de là, on
a pu qualifier à juste titre que la responsabilité du médecin était une responsabilité
uniquement pour faute fondée sur une obligation de moyens, qui est de mettre justement
tout en œuvre conformément aux données acquises par la science, mais que la guérison ne
peut jamais être garantie. Dès lors, afin d’engager la responsabilité du médecin, il est
nécessaire de prouver qu’il a commis une faute dans son comportement. Ce principe d’une
obligation de moyens a été par la suite très largement repris par la jurisprudence, et le
législateur lui-même, dans la loi du 4 mars 2002, a introduit un art. L. 1042-1 dans le Code
de la santé publique, qui reprend le principe de l’obligation de moyens. En effet, selon cette
disposition, « hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d’un défaut d’un
produit de santé, les professionnels de santé, pour tous les actes individuels de prévention, de
diagnostics, ou de soins, ne sont responsables des conséquences dommageables de ces actes
qu’en cas de faute  ». Le législateur a ainsi réitéré le principe de la responsabilité pour faute et
de l’obligation de moyens du médecin.

Une difficulté subsiste toutefois : l’obligation de moyens elle-même peut cependant être plus
ou moins exigeante. En effet, il est possible d’abord de retenir la faute avec plus ou moins de
rigueur ; ainsi, il est possible de dire qu’il faut qu’une faute soit véritablement grave, patente,
pour engager la responsabilité d’une personne, ou il est possible de considérer qu’une faute
légère, une maladresse, y suffit. L’obligation de moyens connaît donc des variations.
En ce qui concerne le médecin, l’évolution a été de tenir le médecin à une obligation de
moyens de plus en plus exigeante. La faute est toujours nécessaire, en revanche, toute faute,
même la faute la plus légère, va engager la responsabilité du médecin. La Ccass considère
même que toute maladresse du médecin engage sa responsabilité, une maladresse est une
faute.
Dans un arrêt de la 1ère Chambre civile du 30 septembre 1997, la Ccass avait considéré que
toute maladresse d’un praticien engage sa responsabilité et que cela ne relève pas du risque
inhérent à un acte médical. Elle va considérer que dès lors qu’un préjudice est anormal, une
maladresse du médecin est a minima révélée et que la responsabilité du médecin devra être
engagée.
Réitéré dans un arrêt de la 1ère Chambre civile de janvier 1997, puis dans un arrêt de la 1 ère
Chambre civile du 13 octobre 1999, puis dans un arrêt de la 1 ère Chambre civile du 9 avril
2002, ainsi que dans un arrêt du 18 septembre 2008.
En ce qui concerne les obligations de moyens, il y a une variation possible relativement à la
faute que l’on va retenir, mais dans d’autres domaines, il est possible d’aller au-delà, et de
présumer la faute lorsque le résultat n’est pas atteint. Dans une obligation de moyens, on ne
peut pas garantir un résultat.
Dans des hypothèses autres que celle du médecin, il est possible de prévoir que le débiteur de
l’obligation verra sa responsabilité engagée, toujours pour faute, mais que sa faute sera
présumée toutes les fois que le résultat n’a pas été atteint.

87
Le débiteur de l’obligation peut alors lui-même prouver son absence de faute. On parle dans
le cas d’une telle présomption, soit d’obligation de moyens renforcée, ou d’obligation de
résultat allégée.
Dans l’obligation de moyens renforcée, la responsabilité reste une responsabilité pour faute,
simplement la faute reste présumée en cas de résultat non-atteint.
Ex du garagiste : la jurisprudence dit fréquemment que la responsabilité du garagiste est
engagée en raison d’une présomption de faute et de lien de causalité, obligation de moyens
selon Boucobza car le garagiste doit prouver qu’il n’était pas fautif, arrêt de la 1ère Chambre
civile du 20 février 1994.
Pareillement, on considère que le teinturier est tenu d’une obligation de moyens renforcée car
on va présumer la faute du teinturier, arrêt de la 1ère Chambre civile du 20 décembre 1993.

B) Les exceptions à l’obligation de moyens

Le médecin est parfois tenu à une obligation de résultat parce qu’il n’y a plus d’aléa :
obligations périphériques à l’obligation de soins, et principalement aujourd’hui, le cas des
infections nosocomiales. L’obligation de soins n’est donc pas en cause.
Dans un premier temps, par trois arrêts du 29 juin 1999, la Ccass avait affirmé que dans ce
cas-là, l’obligation du médecin était de résultat.
Le législateur, à l’article 1141 alinéa 2 du Code de la santé publique, en matière d’infections
nosocomiales, les personnes responsables sont responsables sauf si elles rapportent la
preuve d’une cause étrangère. De la même manière, il y aura une responsabilité du médecin
ou du fournisseur de produits de santé lorsque le produit fourni présente un défaut, à ce
moment-là, on est dans une obligation de résultat.

Titre 2. La force obligatoire du contrat

Le principe est posé par l’article 1134 al. 1 du Code Civil : « les conventions légalement
formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites », contrat est assimilé à la loi. Cela
signifie que les parties sont tenues de respecter le contrat, qui a un caractère contraignant.
Mais si cette force obligatoire du contrat entre les parties ne fait pas de doutes, reste la
question plus complexe de l’effet du contrat à l’égard des tiers.

CHAPITRE 1. La force obligatoire du contrat entre les parties

L’article 1134 est particulièrement fort, l’assimilation du contrat n’est d’ailleurs pas
totalement juste. L’obligation qui naît du contrat va constituer une loi particulière entre les

88
parties, « pacta sunt servanda ». Cette force obligatoire du contrat est justifiée par plusieurs
raisons :
D’abord le fait que le contrat est un instrument de prévision, pour qu’il puisse jouer ce rôle,
il est nécessaire que les parties respectent ses prévisions.
Il faut également assurer la sécurité juridique.
De plus, les personnes doivent respecter la parole donnée (aspect moral).

La justification de cette force obligatoire conduit à rendre ce principe très puissant, mais il
connaît néanmoins un certain nombre d’exceptions.

Section 1 – Le principe

Le principe de la force obligatoire se décline de trois manières :

D’abord, l’inexécution contractuelle engage la responsabilité de celui qui en est à l’origine.


Quand y aura-t-il inexécution contractuelle ? En réalité, la règle va au-delà car elle consiste à
dire que tout doit être fait pour que les parties exécutent leur obligation, et que si elles ne
l’exécutent pas, elles doivent fournir l’équivalent de ce à quoi elles s’étaient engagées. Cela
signifie qu’en principe, lorsqu’une partie ne va pas exécuter son obligation, l’autre partie
pourra solliciter l’exécution forcée du contrat. C’est le fait de condamner une personne sous
astreinte à exécuter son obligation.
Dans un arrêt de la 3e Chambre civile du 11 juin 2005 (réitéré dans un arrêt de Chambre
civile du 16 janvier 2007) Ccass a affirmé que la partie envers laquelle l’obligation n’a pas été
exécutée, peut y forcer l’autre toutes les fois que cela est possible. Il y a en effet des
hypothèses où l’obligation forcée n’est pas possible.
L’art. 1142 du CCiv pose problème car toute obligation de faire ou de ne pas faire ne se
résout que par indemnisation du débiteur.
La Cour de Cassation a considéré que l’exécution forcée était possible car il ne n’agit pas
d’une contrainte par corps et a affirmé que toutes les fois où cela était possible, l’exécution
par corps pouvait être prononcée, doc. 84, arrêt du 16 janvier 2007. Ce n’est que lorsque que
l’exécution forcée n’a plus d’intérêt pour le créancier que la responsabilité est engagée. Le
créancier pourra alors obtenir une réparation par équivalent. On tente de replacer le créancier
dans la même situation que si le contrat avait été correctement exécuté.

I. L’irrévocabilité du contrat

D’après l’art. 1134 al. 2, les conventions ne peuvent être révoquées que du consentement
mutuel des deux parties ou pour les causes que la loi autorise. A contrario, la volonté
unilatérale d’un contrat ne peut remettre en cause le contrat. Il n’est ensuite pas exigé que le
consentement soit réitéré, le consentement des parties lors de la formation du contrat est
irrévocable.
Les parties peuvent toutefois délier les liens contractuels mutuellement, mutus dissensus.
De la même manière, dans le contrat lui-même, les parties peuvent s’être réservé à l’avance le
droit de mettre fin au contrat
Exemples : en matière commerciale, bail commercial, règle du 3-6-9.

De la même manière, l’art. 1134 al. 2 prévoit les hypothèses dans lesquelles les parties
peuvent mettre un terme au contrat. L’hypothèse la plus marquante est celle de la
prohibition des engagements perpétuels. Pour des raisons historiques, en raison du servage,

89
la jp a interdit les engagements perpétuels. On se retrouve face à deux hypothèses : soit le
CDD, soit le CDI.
Dans le cas du CDI, la jp a considéré dans un arrêt de la 1e Chambre civile du 11 juin 2006,
que dans tout CDI les parties disposent d’une faculté de résiliation unilatérale. Cette solution a
même été érigée en principe à valeur constitutionnelle par le CC dans une décision du 9
novembre 1999. Une partie peut donc mettre fin à la convention sans avoir à justifier ses
raisons, et ce, à tout moment du contrat. La résiliation s’impose alors à l’autre partie. La
limite à ce principe est uniquement l’abus du droit de résiliation. L’abus entraînera la
responsabilité de celui qui a abusé, mais pas la résiliation du contrat. Le législateur a pu lui-
même organiser la résiliation d’un contrat : ainsi, dans le cadre de la résiliation d’un CDI, le
législateur prévoit que le salarié peut résilier son contrat à tout moment sans se justifier mais
pas l’employeur. Pareillement, les agents commerciaux bénéficient d’une indemnité de fin de
contrat si leur contrat est résilié. De la même manière, les cocontractants peuvent également
prévoir des conditions de résiliation. Mais les parties ne peuvent pas prévoir que le droit de
résiliation est impossible car il est d’ordre public.

II. L’immutabilité du contrat

Le contrat peut évidemment être modifié en cours d’exécution, mais qu’en est-il lorsqu’un
changement de circonstances économiques ou autres est intervenu en cours d’exécution?
Faut-il modifier le contrat pour rétablir l’équilibre contractuel ?
Théorie de l’imprévision. Selon cette théorie, lorsque des évènements extérieurs au contrat
changent substantiellement l’économie du contrat, il serait permis alors de réviser le contrat.
Tout le problème est de savoir si la théorie de l’imprévision est admise au regard du droit
français.

A) Le principe

Le principe est que la théorie de l’imprévision est rejetée en droit civil. Lorsqu’il y a
imprévision, le contrat peut être exécuté, mais son obligation est beaucoup plus difficile, ou
onéreuse.
La jurisprudence de la Ccass considère par principe que dans ce cas-là, on ne peut pas réviser
judiciairement le contrat, les parties doivent s’en tenir à ce qu’elles avaient accepté au
moment de la formation du contrat.

Ce principe a été affirmé par la jp dans l’affaire célèbre du Canal de Crapone de la Chambre
civile du 6 mars 1876 (doc. 76).
Les faits : Au XVIe siècle, en 1560 et 1567, des conventions ont été conclues par un
dénommé Adam de Crapone qui s’était engagé à construire un canal destiné à arroser les
vergers, les vignes, les prés, et les autres habitants de la commune de Paisa dans la plaine
d’Arles. La convention prévoyait que pour assurer l’entretien du canal, les particuliers qui
bénéficiaient de l’irrigation, devaient verser une redevance de trois sols par cartéral, payables
à Adam de Crapone et à ses héritiers. Au cours du XIXe siècle, les héritiers revendiquaient
que la redevance soit augmentée car ils invoquaient la baisse de la monnaie et l’augmentation
du coût de la main d’œuvre.
Demande : Ils demandaient donc un relèvement de la redevance plus en rapport avec les frais
d’entretien.
Les juges : La CA d’Aix avait accepté de relever la redevance à 60 centimes et un pourvoi en
cassation est intervenu, arrêt du 6 mars 1876, et la Cour de Cassation casse fermement l’arrêt
de la CA sous le visa de l’art. 1134 du CCiv en affirmant que dans aucun cas il n’appartient

90
aux tribunaux quelque équitable que puissent leur paraître leurs décisions, de prendre en
considération le temps et les circonstances pour modifier les conventions des parties et
substituer des clauses nouvelles à celles qui ont été librement acceptées par les parties.

La solution admise par la Cour de Cassation dans cette affaire contraste avec celle admise
par le CE en matière administrative dans l’arrêt du 30 mars 1916, affaire du gaz de Bordeaux,
où le CE avait accordé à l’exploitant d’une concession une indemnité afin de rétablir
l’équilibre financier du contrat, lorsque celui-ci avait été bouleversé par des circonstances
imprévues.
C’est avec toute la force tirée de l’art. 1134 et du principe de la force obligatoire des contrats
que la Ccass, en matière civile, refuse de prendre en compte l’imprévision, sauf, bien
évidemment, si les parties avaient elles-mêmes inséré dans leur contrat une clause de révision,
clause de renégociation, clauses de « hardship ».

La solution a été reprise dans divers arrêts de la Ccass : dans un arrêt de la 1ère Chambre civile
du 6 juin 1921 (cheptel de bétail), arrêt de la 1ère Chambre civile du 1er mai 1933 (livraison de
charbon).

B) Les tempéraments

A un moment où le principe de bonne foi entre les parties est devenu aussi important, la jp a
du mal à maintenir avec fermeté sa position sur l’imprévision tout en imposant aux parties un
principe de bonne foi. En effet, la bonne foi milite sans doute dans le sens d’une révision :
si les cocontractants sont de bonne foi et sont loyaux, ils devraient accepter une révision en
cas de bouleversement imprévu pour ne pas que l’une des parties profite de ce
bouleversement, et que le déséquilibre s’installe entre les parties. Cette critique conduit à
considérer que les parties elles-mêmes devraient accepter la renégociation de leur contrat,
sans pour autant que l’on puisse admettre dans le même temps une révision judiciaire de ce
contrat.
Effectivement, la jp a emprunté la voie de la bonne foi entre cocontractants, afin de
sanctionner un cocontractant qui n’acceptait pas une révision du contrat, qui pourtant est
édictée par des circonstances extérieures au contrat.

Premier arrêt allant dans ce sens : arrêt Huard de la Chambre commerciale du 3 novembre
1992 (doc. 72).
Les faits : Dans cette affaire, un pompiste qui exploitait une station service, demandait la
révision du prix à la baisse de la fourniture de l’essence en raison de modification des
circonstances économiques car il y avait eu entre temps une libéralisation des prix de vente au
détail, et vu que certaines stations-service pratiquaient des prix bas et la station en question
n’était plus compétitive.
Les juges : La Ccass a considéré que la société pétrolière plaçait le distributeur dans une
situation très difficile en le privant de la possibilité d’exercer des prix compétitifs, et qu’à ce
titre-là, elle n’exécutait pas son contrat de bonne foi. Il ne s’agissait cependant que de la
sanction du contractant récalcitrant, le juge n’a pas révisé lui-même le contrat.

Deuxième arrêt : Danone c/ Chevassu-Marche, de la Chambre commerciale du 24 novembre


1998.
Les faits : Dans cette affaire, un agent commercial qui distribuait des produits Danone. Il
n’était plus compétitif car des centrales d’achat vendaient les mêmes produits à des prix

91
inférieurs sur les mêmes marchés. L’agent commercial demande donc à Danone de baisser ses
prix pour lui afin qu’il puisse être compétitif.
Les juges : La Ccass considère que le fabricant des produits, informé des difficultés de son
cocontractant, aurait dû prendre des mesures concrètes, afin de permettre à son mandataire de
pratiquer des prix compétitifs. Le principe est énoncé sous l’angle de l’obligation de loyauté.
La sanction est que la partie qui n’est pas loyale peut voir sa responsabilité engagée.

Un 3e arrêt a semé le trouble : arrêt de la 1e Chambre civile du 16 mars 2004.


Les faits : Dans cet arrêt se posait à nouveau un problème dans le cadre d’une concession du
montant de la redevance.
Les juges : la Ccass a rejeté la demande en confirmant l’arrêt de la CA et en affirmant dans un
attendu de principe que ce qui était en cause c’était le déséquilibre financier existant dès la
conclusion du contrat, et non pas la modification imprévue des circonstances économiques.
La Ccass a donc raison de rejeter un déséquilibre structurel, et non conjoncturel, mais certains
auteurs ont voulu interpréter cet arrêt a contrario, en disant qu’en cas de bouleversement
imprévu, la révision du contrat peut être sollicitée.
C’est toutefois aller trop loin, d’autant plus que la suite de l’attendu affirme que dans le cadre
d’une renégociation, c’est sur le fondement de l’obligation de bonne foi et de loyauté que l’on
aurait pu se fonder. On est donc toujours sur le principe des arrêts Huard et Danone.
L’obligation de bonne foi peut engendrer une obligation de renégociation du contrat en cas
de bouleversement économique.

Un arrêt plus récent a suscité des débats  : arrêt du 29 juin 2010 de la Chambre commerciale,
qui n’est pas un arrêt publié, ce qui laisse penser que la Ccass n’a pas voulu en faire un arrêt
de principe.
Les faits : Dans cet arrêt, deux sociétés, SEC et SOFIMAT, ont conclu en 1998, pour une
durée de 12 ans, un contrat de maintenance sur des moteurs d’une centrale de production de
cogénération. Il était prévu une redevance annuelle forfaitaire. La société chargée de la
maintenance invoque l’augmentation très sensible du prix des pièces de rechange, et dit que le
montant des redevances était devenu dérisoire au regard du coût réel des travaux de
maintenance qui lui incombent contractuellement.
Demande : La société SOFIMAT demande à ce moment-là la révision du contrat, et la société
SEC demande l’exécution du contrat conformément aux règles habituelles. En référé, la
société SEC demande à ce que les engagements contractuels souscrits par SOFIMAT soient
exécutés.
Les juges :
° Le juge des référés donne raison à la SEC. La CA confirme, puis pourvoi en cassation, arrêt
du 29 juin. 
° Ccass casse l’arrêt sous le visa de l’art. 1131. La Ccass dit qu’en statuant sans rechercher si
l’évolution des circonstances économiques, et notamment du cours des matières premières et
des métaux depuis 2006, et leur incidence sur le prix des pièces de rechange n’avaient pas eu
pour effet, compte tenu du montant de la redevance payée par la société SEC, de déséquilibrer
l’économie générale du contrat telle que voulue par les parties lors de sa signature en
décembre 1998 et de priver de toute contrepartie réelle l’engagement souscrit par la société
SOFIMAT.

Remarques :
- l’arrêt n’est pas publié, ce qui signifie que pour la Ccass, il n’a pas de portée particulière.
- on est en matière de référé, on n’analyse pas le fond de l’affaire, donc on n’entre pas dans un
véritable débat sur le fond du contrat.

92
- la Cour de Cassation se fonde sur l’art. 1131 (absence de cause) et on retrouve par ce biais là
une formulation assez proche de celle de l’affaire du Point club vidéo de 1996 sur l’absence
de contrepartie réelle, ce qui signifie ici aussi qu’on n’est pas en présence d’une révision
judiciaire du contrat. La Cour de cassation considère que le contrat devient dépourvu de
cause, que la contrepartie aurait disparu, et que du coup, la sanction est celle de la caducité du
contrat.

Par principe, la théorie de l’imprévision est rejetée, qu’en revanche, les parties doivent se
comporter de bonne foi, et que cette bonne foi peut les conduire à admettre une renégociation
du contrat lorsque des circonstances économiques imprévues sont venues le bouleverser.

Section 2 - Les exceptions à la force obligatoire du contrat

Il y a des hypothèses où la révision d’un contrat pourra être imposée aux parties, alors
même que ces parties ne l’avaient pas prévue.

A) Les exceptions légales

Certaines dispositions de l’art. 1189 du CCiv sur le prêt d’une chose, qui prévoient que le
juge peut obliger l’emprunteur à rendre la chose s’il survient au prêteur un besoin urgent et
imprévu de sa chose.

L’article 900-1 et 900-2 sur les libéralités.


La loi de 53 sur la modification des baux commerciaux.
L’art. 131-5 du Code de la propriété intellectuelle sur la révision des contrats de cession et
de l’exploitation de droits d’auteur.
Disposition la plus forte : article 1152 du CCiv, qui porte sur les clauses pénales dans les
contrats. Il s’agit d’une clause qui prévoit par avance le montant de l’indemnisation due en
cas d’inexécution ou de mauvaise exécution du contrat. Comme le principe est celui de la
prévision, on considère que la clause pénale est parfaitement valable, mais l’art. 1152 al. 2
prévoit que le juge peut même d’office modérer ou augmenter la peine qui a été convenue s’il
la considère comme manifestement excessive ou dérisoire. Principe de la révision judiciaire
des clauses pénales, art. 1152 prévoit que toute clause contraire est réputée non-écrite. C’est
évidemment une atteinte directe à la force obligatoire du contrat en permettant au juge de
s’immiscer dans celui-ci.

B) Les exceptions jurisprudentielles

Les tribunaux, la Cour de Cassation ont admis que le juge puisse réviser, et notamment
réduire, les honoraires des prestataires de service, et notamment les avocats, lorsque ces
honoraires apparaissent excessifs.
La solution a été posée de longue date par un arrêt de la Chambre civile du 28 juin 1867 et a
été réitérée de nombreuses fois, notamment dans un arrêt du 21 février 2006. C’est là encore
une atteinte radicale à la force obligatoire du contrat. C’est aussi une acceptation générale de
la lésion.

CHAPITRE 2. Le rayonnement du lien contractuel

Si entre les parties la force du contrat est réelle, en dépit des entailles faites à ce principe,
qu’en est-il en revanche à l’égard des tiers ?

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Le principe fondamental est celui de l’effet relatif des conventions, dont le principe est posé
par l’article 1165 du CCiv. Selon cette disposition, les conventions n’ont d’effet qu’entre les
parties contractantes, elles ne nuisent point à un tiers et ne lui profitent que dans le cas prévus
par l’art. 1121. Corollaire du principe d’autonomie de la volonté, le principe de l’effet
relatif est essentiel.

Section 1 - Le principe de l’effet relatif des conventions

Il est nécessaire de distinguer les parties des tiers.


Les parties sont celles ayant conclu le contrat, et on leur assimile les ayant-cause universels
(héritiers), qui vont reprendre tout le patrimoine, ou les ayant-cause à titre particulier, qui ne
vont reprendre qu’un contrat déterminé.
Quant aux tiers étrangers à la conclusion du contrat, les penitus extranei, ils ne peuvent être
tenus par ce contrat.

I. Le principe

Les tiers sont totalement étrangers à la force obligatoire du contrat, ils ne peuvent être ni
débiteur, ni créancier, s’ils n’ont pas exprimé leur consentement.
En revanche, si les tiers ne sont pas partie au contrat, cela ne signifie pas pour autant que le
contrat n’existe pas pour eux. Pour les tiers, le contrat est une réalité juridique et économique.
C’est un fait juridique. Cela signifie que le contrat va pouvoir être opposé aux tiers, on va
pouvoir non pas faire du tiers un débiteur ou un créancier, mais on va pouvoir lui demander de
respecter la situation qui est créée par le contrat.
Exemple : Si une personne est locataire d’un appartement, et que cet appartement est vendu :
A vend un appartement à B et C est le locataire. C devra payer ses loyers non plus à A, mais à
B. Le locataire n’est pas partie au contrat de vente, mais ce dernier lui est opposable.

Cette opposabilité du contrat au tiers fait qu’un tiers ne doit pas non plus aider un
cocontractant à violer ses obligations.
Si un tiers sait qu’une personne va violer ses obligations, elle ne doit pas l’aider, sinon elle va
engager sa responsabilité délictuelle tiers complice.
Arrêt de la 1ère Chambre civile du 17 octobre 2000 :
Les faits : un contrat d’édition avait été conclu entre l’auteur d’un livre sur la princesse Diana
et des sociétés d’édition, l’une anglaise, et l’autre française. Le magazine Voici, sans
l’autorisation de la société d’édition, a publié des extraits de ce livre dans ces colonnes. Or,
dans le contrat qui liait l’auteur aux maisons d’édition, il était prévu que l’auteur ne
divulguerait pas le contenu de l’ouvrage avant sa parution.
Les juges : Voici était tiers à ce contrat et la Cour de Cassation l’a sanctionné sur le fondement
de l’art. 1382 en tant que tiers complice.

Si le contrat n’a aucune force obligatoire à l’égard des tiers, en revanche, il est opposable aux
tiers, ils doivent le respecter comme une situation qui s’est créée en dehors d’eux et qu’ils
doivent respecter.

II. Les tempéraments

Art 1165 CCiv qui pose lui-même le principe de l’effet relatif des conventions énonce un
tempérament puisque il renvoie comme à titre d’exception à l’art 1121 CCiv.

94
Or art 1121 CCiv traite d’une figure juridique particulière : la stipulation pour autrui.
Ce titre apparaît donc comme une exception au principe de l’effet relatif.
En dehors de cette stipulation pour autrui il y a d’autres actions qui peuvent exercées par des
tiers : ce sont les actions obliques et les actions pauliennes.

A) La stipulation pour autrui

Expressément évoquée comme l’exception à l’effet relatif, la stipulation pour autrui est
définie par art 1121 CCiv.
Selon cette disposition la stipulation pour autrui est l’opération par laquelle l’une des
parties, le stipulant, obtient de son cocontractant, le promettant, qu’il s’engage à
exécuter une obligation au profit d’une troisième personne, le tiers bénéficiaire.
Autrement dit, l’une des parties au contrat, le promettant, va exécuter son obligation non pas
au profit de son cocontractant mais au profit d’un tiers.
Cette technique a connu un essor considérable notamment en raison du développement de
l’assurance, contrat d’assurance. En effet dans les contrats d’assurance décès, ou dans tout
autre type de contrat d’assurance, est mis en place un tel mécanisme (stipulation pour autrui).
Lorsqu’une personne contracte une assurance décès liée à un prêt, le bénéficiaire du contrat
d’assurance par hypothèse ne sera pas assuré (puisqu’il prévoit son décès) mais la personne
qu’il désignera dans le contrat d’assurance. On a bien une stipulation pour autrui : l’assuré est
le stipulant, l’assureur est le promettant et celui qui bénéficiera de l’assurance en cas de décès
est le tiers bénéficiaire.

Les effets d’une stipulation pour autrui :


Il faut distinguer les rapports entre le stipulant et le promettant, les rapports entre le
promettant et le tiers, et les rapports entre le stipulant et le tiers.

a.i.3.a.i.1. Rapports entre le stipulant et le


promettant
Entre eux il y a contrat, et c’est ce contrat qui règle leurs rapports. Seule particularité : le
promettant exécute sa prestation non pas au profit du stipulant mais au profit d’un tiers. De
telle sorte que le contrat est toujours un contrat synallagmatique (échanges d’obligations)
mais pour l’une des parties l’exécution de l’obligation ne se fait pas au profit de son
cocontractant mais au profit d’un tiers. Il y a donc une cause au contrat puisqu’il y a une
contrepartie mais elle ne bénéficie pas directement au cocontractant. Le stipulant a qualité
pour demander l’exécution du contrat puisque c’est lui qui est dans les liens contractuels. On
est donc ici dans des rapports contractuels classiques.

a.i.3.a.i.2. Rapports du promettant et du tiers


bénéficiaire
Atteinte au principe de l’effet relatif des conventions est la plus manifeste dans ce cas. En
effet le tiers est extérieur au contrat, il n’a pas donné son consentement à la convention mais
le tiers a un droit direct contre le promettant et peut donc agir contre lui afin de le forcer à
exécuter. La jp a reconnu ce droit du tiers dès un arrêt de la Ch Civ du 16 janvier 1888. Le
droit du tiers nait dès le jour du contrat entre le promettant et le stipulant, c’est au moment de
la formation de ce contrat que le tiers bénéficiaire acquiert son droit direct contre le
promettant. Si le tiers bénéficiaire peut agir contre le promettant afin de le forcer à exécuter,
inversement le promettant peut opposer au tiers toutes les clauses de son contrat. De telle
sorte que si dans le contrat il y a des exceptions à l’exécution qui peuvent être invoquées,
évidemment que le promettant pourra les invoquer.

95
Quelle est la raison de cette exception au principe de l’effet relatif des conventions ?
La raison tient au fait que la stipulation pour autrui va en réalité bénéficier au tiers
bénéficiaire. Càd que le tiers bénéficiaire va en tirer un avantage. Il est possible d’avoir
d’ailleurs des « stipulations pour autrui avec charge », càd qu’il est possible que le tiers se
doive d’exécuter une obligation et ne fasse pas que profiter de la stipulation, mais la charge
qui lui est imposée ne doit pas dans ce cas là dépasser l’avantage qui lui est conféré. Il est par
exemple possible de prévoir que le tiers bénéficiaire reçoive un bien à charge pour lui de
garder ce bien. Mais si la stipulation pour autrui prévoit une charge, càd qu’elle met à la
charge du tiers bénéficiaire une obligation quelle qu’elle soit, dans ce cas là il est
indispensable pour que le tiers soit effectivement tenu par cette charge qu’il ait accepté la
chargearrêt Civ 1ère, 8 décembre 1987. S’il n’a pas accepté cette charge, aucune obligation
ne peut lui être imposée.
De telle sorte que, dans la stipulation pour autrui, le tiers bénéficiaire acquiert un droit direct
car il est totalement bénéficiaire de l’obligation. En revanche si la stipulation pour autrui est
assortie d’obligations à la charge du tiers bénéficiaire, il est nécessaire à ce moment là qu’il
ait accepté cette stipulation pour autrui pour qu’il soit lié par la charge.
Donc dans l’hypothèse de l’acceptation on peut dire que le tiers bénéficiaire n’est plus
véritablement un tiers, il a exprimé son accord sinon il ne serait pas libre.
En revanche lorsque la stipulation pour autrui n’est que bénéfice pour le tiers il n’a pas besoin
de donner son accord mais à ce moment là parce que c’est que bénéfice pour le tiers on va
admettre l’exception au principe de l’effet relatif des conventions.

3. Rapports entre le tiers bénéficiaire et le stipulant 


Le tiers bénéficiaire n’a pas de droit direct contre le stipulant, il n’a de droit direct que contre
le promettant. Les relations entre le tiers bénéficiaire et le stipulant sont hors du contrat
prévoyant la stipulation pour autrui. Le stipulant doit avoir un intérêt (pécuniaire ou moral) à
prévoir une stipulation pour autrui. Le stipulant peut révoquer la stipulation tant que le tiers ne
l’a pas acceptée. L’acceptation n’est pas une condition de la stipulation pour autrui. Mais s’il
y a eu acceptation à ce moment là le stipulant ne peut plus révoquer la stipulation pour autrui.

B) Les actions exercées par les tiers

Alors que les tiers sont extérieurs à un contrat, le CCiv prévoit 2 actions qui peuvent être
exercées par les tiers, les tiers s’immisçant alors dans un contrat qui leur est extérieur.

1ère action : art 1166 CCiv, l’action oblique. Dans cette action, lorsque son propre
débiteur est négligeant et qu’il n’agit pas afin de recouvrer ses propres créances, son
créancier peut agir à sa place afin de pallier sa carence.
Hypothèse : A est le créancier de B, et B est le créancier de C.
A est extérieur au contrat qui lie B et C de telle sorte que en principe de l’effet relatif des
conventions A ne tire aucun droit et n’a aucune obligation de cette convention. Mais si B est
négligeant dans le recouvrement de sa créance et que cette négligence compromet les droits
de A, car si A est payé il n’a pas à se soucier de ce que fait son débiteur, mais si B n’est pas
payé parce B est insolvable, à ce moment là seulement A a la possibilité d’agir au nom de B.
Mais l’action qu’il exercera sera l’action qu’aurait pu exercer B lui même, son propre
débiteur. Les sommes recouvrés n’iront pas directement dans le patrimoine de A, d’abord dans
le patrimoine de B. A n’agit pas directement pour lui même, il agit au nom de son débiteur
afin de pallier la négligence.

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2e action : art 1167 CCiv, l’action paulienne. Action qui a une autre fondement que l’action
oblique (fondement = la négligence), action pauliennefondement = la fraude.
Un tiers peut agir contre un acte juridique qui a été conclu par son débiteur si cet acte a
été conclu en fraude de ses droits.
Hypothèse : si une personne dispose d’une hypothèque sur un immeuble et que son débiteur
va vendre cet immeuble à vil prix (faible) pour organiser son insolvabilité, faire en sorte
qu’on ne puisse pas saisir de ses biens, à ce moment là son créancier pourra attaquer l’acte sur
le fondement de l’art 1167 en invoquant la fraude à ses droits, fraude organisée entre son
débiteur et le tiers. La condition pour qu’il puisse y avoir une action paulienne c’est
l’insolvabilité de son débiteur.
Si débiteur est solvable, personne ne peut se mêler des actes qu’il va conclure. Ce n’est que si
et seulement si le débiteur est insolvable que l’on va pouvoir attaquer ses actes frauduleux qui
sont en général des actes qui tendent à organiser l’insolvabilité du débiteur, qui tendent à
diminuer le patrimoine du débiteur pour que son créancier ne puisse pas le saisir.

Section 2 – Les actions directes

Problème vient de la situation suivante : il existe de nombreux contrats liés entre eux, qui ont
des relations entre eux, qui font partie d’un ensemble contractuel.

Exemple simple : une personne est propriétaire d’un terrain et cette personne veut y faire bâtir
une maison individuelle. La personne propriétaire du terrain et qui fait bâtir un immeuble est
appelé en droit « le maitre de l’ouvrage » car il commande l’ouvrage. Ce maitre de l’ouvrage
va, pour bâtir sa villa individuelle, faire appel à un entrepreneur principal (société de
construction). Cet entrepreneur principal va avoir recours à des sous-traitants avec lesquels il
va passer lui-même des contrats pour qu’ils exécutent la partie de l’ouvrage qui leur sera
attribuée (plus ou moins spécialisés).
Hypothèse : imaginons que le maitre de l’ouvrage quand il le reçoit s’aperçoit d’un certain
nombre de défauts (carreaux fissurés, fuite dans la plomberie…). Dans ce cas là, la question
générale est : Le maitre de l’ouvrage va-t-il pouvoir agir directement contre le sous-
traitant ? Et si oui, sur quel fondement ?
En général, le maitre de l’ouvrage va préférer lui agir directement contre son entrepreneur
principal en vertu de son contrat, car entrepreneur principal = grande société établie, le maitre
de l’ouvrage aura plus de chance d’être dédommagé au plus vite. Mais imaginons que
entrepreneur principal n’est pas une grande société établie, et qu’il ait fait faillite. Est-ce que
le maitre de l’ouvrage peut alors agir contre le sous-traitant directement ?
A l’inverse, toujours dans ce même schéma, on peut se demander aussi si le sous-traitant qui
n’a pas été payé par l’entrepreneur principal (en difficultés financières) a une action en
paiement directement contre le maître de l’ouvrage en arguant du fait que le maitre de
l’ouvrage profitant de sa propre prestation c’est à lui de payer.
Dans un sens ou dans l’autre, la question est de savoir si des personnes qui ne sont pas
liées entre elles par un contrat ont des actions l’une à l’égard de l’autre (actions en
paiement/en responsabilité) et si oui sur quels fondements ces actions existent-elles ?

I. Les actions directes en paiement

Action directe en paiement présente un avantage économique : il permet d’éviter les faillites
en cascade. En effet imaginons (même schéma) que si l’entrepreneur principal faisait faillite,
aucun des sous-traitants ne pourraient être payés alors même qu’ils ont exécutés leur mission,
cela mettrait les sous-traitants eux-mêmes en difficultés financières, pour les plus fragiles cela

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pourrait entrainer leur faillite. En revanche l’action directe en paiement du sous-traitant à
l’égard du maitre de l’ouvrage permet de limiter les conséquences de la faillite de
l’entrepreneur principal. Limite à cela : que le maitre de l’ouvrage n’ait pas déjà tout payer à
l’entrepreneur principal, car il ne s’agit pas pour lui de payer 2 fois mais de payer ce qu’il n’a
pas encore payé.
L’intérêt économique de cette action directe a conduit le législateur à reconnaître ces actions
directes en paiement et à les organiser. Intérêt économique pour l’intérêt général.
Dans le CCiv, l’art 1753 pour la sous-location, l’art 1994 pour le mandat, permettent dans les
2 cas une action directe.
Quand il y a sous location le propriétaire peut se faire directement payer par le sous locataire.
L’art L 124-3 du Code des assurances permet à l’assureur de payer également directement un
tiers lorsqu’il n’a pas été directement désintéressé.
Mais, la loi la plus importante c’est celle du 31 décembre 1975 qui permet aux sous-traitants
sous certaines conditions de disposer d’une action directe en paiement contre le maitre de
l’ouvrage. Cette action directe en paiement a une limite : elle ne peut pas aboutir à ce que le
maitre de l’ouvrage paie 2 fois.
Plus complexe que les actions directes organisées par la loi sont les actions en responsabilité.

II. Les actions directes en responsabilité

Est-ce qu’un tiers à un contrat peut engager la responsabilité de l’un des contractants parce
que ce cocontractant n’a pas correctement exécuté son contrat et que cette inexécution lui a
causé un préjudice ?
Ex : Plombier sous-traitant a un contrat avec l’entrepreneur principal. Mais la mauvaise
exécution de son contrat a causé un préjudice au maitre de l’ouvrage.
La jp a connu sur ce point là une très longue et très complexe évolution.
La jp s’est, à partir des années 70 jusqu’à fin années 80, orienté vers la reconnaissance d’une
action en responsabilité de nature contractuelle, quoi qu’il advienne. Càd que dès lors qu’une
personne subissait l’inexécution du contrat dans un contrat auquel il était tiers il avait la
possibilité d’agit en responsabilité contractuelle. Jp jusqu’à un arrêt de 1988.
Puis ensuite la Ccass a changé de position dans un arrêt principalement de l’Assemblée
plénière du 7 février 1986 (2 arrêts), et a reconnu une action en responsabilité contractuelle
dans certaines hypothèses.
En revanche, et ça été le coup d’arrêt par un arrêt très connu de l’Assemblée plénière du 12
juillet 1991, arrêt Besse. La Ccass a très largement limité le domaine de la responsabilité
contractuelle.
Mais la Ccass a tout de même reconnu, Assemblée plénière 6 octobre 2006, une action en
responsabilité mais de nature délictuelle.
Ce sont ces 3 arrêts qui forment notre droit positif.

Quel est justement notre droit positif en vertu de ces arrêts ?


La Ccass considère que lorsqu’il y a transfert de propriété d’une chose il y a en même
temps transfert des accessoires liés à la chose et que les actions en responsabilité sont des
accessoires qui sont liés à la chose.
Lorsqu’une personne va transmettre la propriété d’une chose : hypothèse d’un fabriquant. Une
personne fabrique du carrelage. Ce fabriquant va vendre ce carrelage à l’entrepreneur
principal. Puis l’entrepreneur principal va lui-même poser ce carrelage. Et ensuite la propriété
de ce carrelage va être transmise au maitre de l’ouvrage. Propriété du carrelage passée du
fabricant au maitre de l’ouvrage via l’entrepreneur principal.

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La jp considère que lorsque l’on transmet le carrelage (entrepreneur principal transmet la
propriété du carrelage au maitre de l’ouvrage) il transmet non seulement la chose mais
également tous les accessoires de la chose. Notamment il transmet également les actions en
responsabilité que l’entrepreneur principal avait vis-à-vis du fabriquant. Car ces actions ne
sont utiles qu’au propriétaire de la chose. Imaginons que le carrelage ait un vice et qu’il se
fende, se fissure. A quoi sert que l’entrepreneur principal ait une action contre le sous-
traitant ? Lui une fois qu’il s’est défait de la propriété du carrelage il ne sait pas s’il se fissure
ou non. Donc transmission de la chose = transmission des actions liées à la chose à titre
d’accessoires.
Le résultat de cette théorie fondée sur l’accessoire va permettre dans notre schéma au maitre
de l’ouvrage d’exercer une action directe contre le fabriquant du carrelage, action directe de
nature contractuelle qui en réalité est exactement la même action qu’aurait eu l’entrepreneur
principal contre le fabriquant.
Le nouveau propriétaire peut exercer les mêmes actions que celles qu’avait celui qui lui a
transmis la propriété.
Théorie de l’accessoire : quelle est la condition pour qu’une telle transmission puisse se
faire ? La condition c’est qu’on soit en présence d’une « chaine de contrats translative de
propriété ». Chaine de contrats = car contrats qui s’enchainent qui portent sur un même bien.
Il faut que la chaine de contrat ait toujours été translative de propriété = càd que par ces
différents contrats il y ait eu transfert de propriété. Si il y a une vente puis un contrat de
construction, il y a bien là encore 2 contrats qui s’enchainent et qui aboutissent au transfert de
la propriété. De telle sorte qu’on dit que la chaine translative de contrats peut être
homogène, l’acheteur finale aura une action directe contre le constructeur, mais la chaine
peut également être hétérogène : les contrats qui se succèdent ne sont pas de même nature
(vente + contrat de construction) pourvu qu’il y ait eu transfert de propriété. Cette solution
fondée sur la théorie de l’accessoire découle des arrêts de l’Assemblée Plénière du 7 février
1986.
Les faits : succession d’un contrat de vente et d’un contrat de construction. On a considéré
que l’action du maitre de l’ouvrage contre le fournisseur de matériaux était une action
contractuelle, action transmise comme accessoire à la chose.
Action de nature contractuelle.

En revanche toutes les fois qu’il n’y a pas transfert de propriété, à ce moment là il ne eut pas y
avoir de transmission de l’action comme accessoire à la chose.
Hypothèse : entrepreneur principal pour les besoins de la construction conclut un contrat de
plomberie. Travaux de plomberie révèlent une défectuosité. Le maitre de l’ouvrage, victime
de ce défaut, veut engager la responsabilité du plombier pour ces défauts. Le plombier n’a pas
transféré de chose, il a fait une prestation de service.
Dans ce cas là, et après que la Ccass ait été dans le sens d’une action contractuelle,
l’Assemblée Plénière de la Ccass, arrêt Besse, 12 juillet 1991, a considéré que l’action du
maitre de l’ouvrage contre le sous-traitant ne pouvait pas être une action en
responsabilité contractuelle, faute de contrat entre le responsable et la victime.
L’Assemblée plénière a visé l’art 1165 CCiv (effet relatif de conventions) pour dire que le
sous-traitant n’est pas contractuellement lié au maitre de l’ouvrage. Et donc dans ce cas là il
ne peut pas y avoir d’action en responsabilité contractuelle.
Que se passe-t-il alors ?

3e pierre à l’édifice : arrêt Assemblée Plénière, 6 octobre 2006 (doc 85) dans cet arrêt la Ccass
parachève son évolution. Elle y affirme que « le tiers à un contrat peut invoquer sur le

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fondement de la responsabilité délictuelle un manquement contractuel dès lors que ce
manquement lui a causé un dommage  ». Formule reprise par la suite.
Autrement dit dans notre hypothèse le maitre de l’ouvrage peut exercer une action contre le
plombier mais action délictuelle.
Du coup, cette solution n’est pas désavantageuse pour le tiers victime de l’inexécution. En
effet lorsque l’action est délictuelle car il y a eu transmission de la chose celui qui va exercer
l’action va être lié par les termes du contrat d’origine. En effet c’est l’action d’origine qui a
été transmise, et par ex s’il existait des clauses limitées la responsabilité, pour autant qu’elles
soient valables, elles sont opposables à celui qui veut exercer l’action car lui-même n’a que
les droits qu’avait le cocontractant d’origine.
Si j’achète un véhicule automobile auprès d’un constructeur, que je le revends, le sous-
acquéreur, lorsqu’il va exercer son action directe contractuelle, va disposer uniquement de
l’action contractuelle qu’avait le 1er acheteur, si dans ce 1er contrat il y avait des limites, elles
sont opposables au sous-acquéreur.
En revanche lorsque l’on est en présence d’une action délictuelle, à ce moment là on est
débarrassé des éventuelles limites du contrat initial.
Arrêt de l’Assemblée plénière n’est pas défavorable aux tiers victimes de l’inexécution
contractuelle. La faute contractuelle va constituer une faute délictuelle vis-à-vis du tiers.

Après cet arrêt de l’Assemblée plénière, la 1 ère Ch Civ puis la 3e et la Ch commerciale l’ont
approuvé, puis à un moment la 3e Civ, 22 octobre 2008, a semblé opéré une résistance. Puis
finalement arrêt 13 juillet 2010, la 3e Ch Civ s’est aligné sur la position de l’Assemblée
Plénière et a repris l’attendu posé.

Titre 3. La disparition du contrat

La fin naturelle du contrat c’est son exécution, sa bonne exécution.


Hypothèse simple d’un contrat à exécution instantanée prend fin au moment où exécution
réalisée (résolution).
Hypothèse d’un contrat à exécution successive, le contrat prendra fin à exécution de son terme
(résiliation).
Si les parties n’ont pas prévu de terme, hypothèse d’un contrat à durée indéterminée, à ce
moment là, chaque partie pourra mettre fin unilatéralement au contrat quand elle le souhaitera
sauf dispositions légales particulières (contrats dans lesquels le législateur organise lui même
les possibilités de révocation, ex : contrat de travail). Si par exemple un contrat de location à
durée indéterminée, on va considérer que l’une comme l’autre des parties pourront mettre fin
unilatéralement à ce contrat car prohibition des engagements perpétuels.

Il se peut cependant qu’il y ait des accidents et que l’exécution ne se passe pas normalement,
que le contrat ne suive pas son cours normal.
2 hypothèses : soit le contrat va disparaître en raison d’un vice dans sa formation, c’est la
nullité ; soit le contrat va disparaître en cours d’exécution car il n’a pas été correctement
exécuté.

I. Remarques sur la nullité des contrats

La nullité vient sanctionner un vice dans la formation du contrat (vices de consentement,


absence de cause ou cause illicite, objet, capacité).

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La nullité est une sanction qui va détruire le lien contractuel en opérant rétroactivement. Càd
que la nullité va essayer d’effacer l’acte conclu, on va revenir au statut quo ante = situation
avant le contrat. L’acte nul est censé n’avoir jamais existé. Application de l’adage latin « quod
nullum est, nullum productum effectum » = ce qui est nul ne produit aucun effet.
Les parties vont devoir faire des restitutions : restitutions en nature lorsque c’est possible, ou
par équivalent lorsque restitution en nature n’est pas possible.
Il n’y a qu’une exception aux restitutions : lorsqu’il y a eu une nullité fondée sur l’immoralité
ou l’illicéité dans ce cas là, action en nullité également possible mais on n’opère pas les
restitutions qui auraient du être ordonnées. On se fonde alors sur 2 adages : « nemo auditur
propriam turpitudinem allegans » = celui qui va invoquer sa propre turpitude ne va pas
pouvoir demander la restitution ; à cet adage on associe, lorsque les 2 parties sont dans
l’immoralité, l’autre adage « in pari causa, turpitudinis cessat repetitio » = si les parties sont
égales dans la turpitude, il n’y a aucune restitution, mais on va opérer des restitutions en
tenant compte du degré respectif des turpitudes.

On distingue dans ces nullités les nullités relatives des nullités absolues.
Nullité relative : en principe nullité qui protège un intérêt particulier. Par ex : dans
l’hypothèse des vices du consentement on va protéger la partie dont le consentement a été
vicié.
Nullité absolue : va protéger en revanche l’intérêt général. Atteintes à l’ordre public.

Action en nullité relative se prescrit au terme de l’art 1304 al 1 er au bout de 5 ans. Le point
de départ à ce moment là c’est lorsque le contrat a été conclu, mais pour les vices du
consentement l’art 1304 al 2 prévoit que le délai de 5 ans ne commence à courir pour la
violence que du jour où elle a cessé, et pour de l’erreur et du dol, que du jour où ils ont été
découverts. Car avant évidemment la victime ne pouvait savoir qu’il y a avait erreur ou dol et
ne pouvait donc agir.

Action en nullité absolue : le législateur a modifié les règles par une loi du 17/6/2008. Jusque
là les actions se prescrivaient par 30 ans pour la nullité absolue. Désormais, art 2224 CCiv les
actions en nullité absolue se prescrivent comme les actions en nullité relative par 5 ans. Ce
délai court à compter du jour où le titulaire du droit a connu, ou aurait dû connaître les faits
lui permettant de l’exercer. Mais en vertu de l’art 2232, le délai de prescription ne peut pas
être supérieur à 20 ans. Délai butoir.

II. La résolution du contrat

Lorsque le contrat a été valablement formé mais que l’une des parties n’a pas exécuté, ou a
mal exécuté son obligation : le créancier de l’obligation dispose de plusieurs moyens.
- D’abord il peut demander l’exécution forcée du contrat. Cette exécution forcée, en
vertu de l’art 1184 al 2 pourra être ordonnée toutes les fois qu’elle est possible.

- Lorsque l’exécution forcée n’est pas possible, ou qu’elle ne présente plus d’intérêt, à
ce moment là le créancier de l’obligation peut obtenir des dommages et intérêts et
peut également mettre fin au contrat. Car il n’est pas question de demeurer dans des
liens contractuels dès lors que cocontractant a pas ou mal exécuté l’obligation.
Toutefois à l’origine, cette possibilité de mettre fin au contrat, prévue par l’art 1184 CCiv,
n’était permise que judiciairement. Car en effet l’art 1184 al 3 prévoit que la résolution doit
être demandée en justice. Autrement dit la partie qui voulait mettre fin au contrat devait
nécessairement le demander en justice. La jp a opéré sur ce point là un revirement en

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acceptant qu’il puisse y avoir une résolution unilatérale du contrat (rupture unilatérale),
arrêt de principe : Civ 1ère, 13 octobre 1998, toutes les fois que cette résiliation est fondée
sur un comportement grave de l’autre partie. Dans ce cas là, la victime du
comportement grave de l’autre partie va pouvoir mettre fin unilatéralement au contrat
sans passer par une demande judiciaire. Ccass dit que cela se fait à ses risques et périls, ce
qui signifie que s’il s’avère que la résiliation n’était pas justifiée, il sera condamné. Arrêt sur
ce point : Civ 1ère, 28 octobre 2003 (doc 96).

Examen : 2 sujets au choix, un cas pratique et un commentaire d’arrêt.

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