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Néanmoins, si la demande se développe et gagne en maturité, les opérateurs font face à une
concurrence rude. En effet, hormis les grandes marques nationales, les enseignes françaises
s’implantent progressivement dans les principales villes du pays. A leur côté évoluent une
multitude de boulangeries de taille petite et moyenne, dont une partie n’a pu survivre. De fait,
ouvrir et pérenniser une boulangerie-pâtisserie n’est pas un business facile. Il faut bien étudier les
besoins des clients, maîtriser la chaîne de production, sélectionner soigneusement les matières
premières et avoir un bon circuit de commercialisation. Cela sans parler des ressources humaines
qualifiées qui se font rares.
Bref, se lancer dans une boulangerie-pâtisserie est un business prenant, nécessitant un
investissement conséquent et un fonds de roulement important. Cela dit, l’affaire peut générer, dès
la première année, des bénéfices alléchants.
Tout d’abord, il faut signaler qu’il n’existe pas de cahier des charges qui régit la profession. Hormis
les normes élémentaires de sécurité et d’hygiène qu’il faut respecter, ouvrir une boulangerie-
pâtisserie n’est soumis à aucune autre obligation.
Une personne souhaitant se lancer dans le métier devrait entamer son investissement par le choix
d’un bon local, de 200 m2 idéalement, ayant pignon sur rue avec en moyenne 300 passages par
jour. La location est l’option la plus retenue car les locaux commerciaux restent chers à l’achat,
surtout dans les quartiers bien fréquentés et le coût d’investissement dans l’aménagement et
l’équipement du local est assez important.
Avant d’entamer l’aménagement et l’équipement, il faut penser à adapter son business à la classe
sociale de la clientèle du quartier. Ce qui peut faire varier les coûts d’investissement à la hausse
comme à la baisse, comme il peut orienter le choix des produits de pâtisserie et de boulangerie à
commercialiser.
Quoi qu’il en soit, l’aménagement d’un local de 200 m2 peut coûter la bagatelle de 600 000 DH.
Car il faut prévoir un atelier séparé pour chaque segment d’activité, le matériel de travail n’étant
pas le même, encore moins la température ambiante. La partie devant comporter les vitrines,
présentoirs et comptoir doit, elle, être aménagée de sorte à mettre en valeur les produits et
favoriser un accueil de qualité de la clientèle. Il faut allouer 20 m2 minimum pour cette partie de la
boulangerie, le reste est à répartir entre les trois ateliers de travail. Il faut par ailleurs prévoir des
gaines d’aération afin de dégager la fumée entraînée par la cuisson de la pâte.
L’équipement, lui, nécessite un budget qui peut dépasser 1 MDH. C’est d’ailleurs ce volet qui
renchérit le coût d’investissement avec plus de 50% du budget global. Précisons que chaque
atelier requiert un équipement différent. Ainsi, pour la partie boulangerie, il faut compter un four
rotatif dont le prix s’élève à environ 200000 DH. Il est des boulangeries qui optent pour un four à
sole où est cuit tout type de pain en plus de la viennoiserie. Toutefois, son prix est plus élevé (à
partir de 300 000 DH) et présente l’inconvénient d’occuper deux fois plus de place que le four
rotatif. En outre, il faut s’équiper d’un pétrin à 90 000 DH, d’une diviseuse servant à diviser la pâte
pétrie en parts égales à 50 000 DH, d’une façonneuse qui, au même prix, est utilisée pour donner
à la pâte sa forme finale en baguette, pain rond ou autre type de pains spéciaux et d’un
refroidisseur d’eau qui garantit la température de l’eau servant dans le processus de fabrication du
pain, à 20 000 DH. L’investisseur peut également acquérir un champ de pousse dont le prix atteint
100 000 DH. Il s’agit en fait d’un appareil où l’on introduit la pâte pour une fermentation rapide.
Cependant, du fait de son coût élevé, peu de boulangers acquièrent cet appareil, surtout en début
d’activité.
Quant à l’atelier viennoiserie, il ne nécessite pas un investissement colossal puisque le même
matériel de la boulangerie peut y être utilisé, en l’occurrence le pétrin et le four. Cela dit, il faut
absolument se doter d’un laminoir afin de façonner la pâte feuilletée, au prix de 50000 DH
minimum. Un congélateur de stockage est également indispensable afin de congeler la pâte avant
la cuisson. Il peut coûter environ 20 000 DH. Notons que les grandes boulangeries acquièrent des
armoires négatives de stockage qui sont plus efficaces et plus adaptées à la production en
quantités importantes. Elles sont nettement plus chères, à près de 90 000 DH.
Le dernier atelier, celui de la pâtisserie, nécessite un matériel plus particulier. Il faudra disposer de
deux tables tours au prix de 25000 DH chacune, d’un batteur mélangeur à 25 000 DH et d’un four
dédié exclusivement à cet atelier à 80 000 DH. Il ne faut pas oublier qu’il faut garder dans cet
atelier une température ambiante de 22°.
En outre, il faut compter d’autres matériels de travail à l’instar des moules, des plaques de cuisson,
de tamiseurs, d’abatteurs… pour un coût global de 200000 DH. Enfin, il va sans dire que des
équipements supplémentaires sont indispensables tels que la table de travail, le fouet, les
couteaux, un climatiseur, un ordinateur, un logiciel de comptabilité… Il faut ainsi prévoir près de 50
000 DH supplémentaires pour équiper de A à Z sa boulangerie.
Par ailleurs, l’investisseur doit disposer d’un fonds de roulement de 400 000 DH, nécessaire pour
couvrir les charges d’exploitation des deux à trois premiers mois d’activité.
En gros, il faut disposer d’au moins 2 MDH avant de «s’aventurer» dans ce domaine. Cela dit,
toutes les boulangeries-pâtisseries ne recourent pas au marché du neuf pour acquérir les biens
d’équipement. Nombre d’entre elles optent pour le matériel d’occasion, que ce soit au Maroc ou à
l’étranger. «Ceci peut réduire la facture de plus de la moitié, précise un boulanger-pâtissier à
Casablanca, mais ne pourrait assurer l’exploitation sur le long terme».
Une fois la boulangerie mise sur pied, l’investisseur aura dès le premier mois d’activité à faire face
à plusieurs charges d’exploitation dont le loyer, les salaires, les coûts de l’énergie et les achats de
matières premières. Un local de 200 m2 peut être loué à 10000 DH mensuellement, soit 120 000
DH par an. Il faut ensuite compter au moins 20 employés dont 2 vendeuses, 2 femmes de
ménage, une caissière et une gérante de magasin, en plus de 13 artisans pour les ateliers de
préparation avec deux shifts différents. La moitié assurant le travail pendant la journée et l’autre
moitié durant la nuit. Ces artisans sont un chef boulanger, un chef pâtissier et des aides
boulangers et pâtissiers. «Ces profils sont nécessaires pour assurer le fonctionnement de l’affaire,
or ils sont introuvables. Le marché manque cruellement de ressources compétentes dans le
domaine», déplore le propriétaire d’une boulangerie. «Même les lauréats des écoles d’hôtellerie et
de restauration sont sous-qualifiés par rapport aux exigences du consommateur», se désole-t-il.
Par conséquent, le recrutement concerne surtout les profils expérimentés. «On n’hésite pas à
débaucher du personnel auprès des concurrents en offrant une rémunération plus élevée», ajoute
notre pâtissier. En tout cas, dans notre exemple, une masse salariale de 88 000 DH par mois,
charges sociales comprises, est à prévoir, ce qui totalise un peu plus de 1MDH annuellement.
Viennent par la suite les frais relatifs à l’énergie. La consommation d’électricité peut générer une
facture de 240 000 DH par an. A y ajouter les charges relatives à l’utilisation des carburants (gaz
ou diesel) avec 60 000 DH chaque année.
Vient ensuite l’approvisionnement en matières premières, à savoir la farine, le beurre, le chocolat,
la poudre d’amande, le sucre, les œufs, la crème fraîche en plus des colorants, des glucoses…
Pour un début d’exploitation, il faut compter près de 2 500 DH par jour, ce qui augmente les
charges de 900000 DH par an. En y ajoutant un montant de 6 000 DH par mois au titre des frais
divers (outils de travail, tabliers, gants, serviettes, sachets et cartons d’emballage…) et
l’amortissement du matériel acquis, les charges d’exploitation s’élèvent à 2,6 MDH par an.
Ramadan et fin d’année sont par ailleurs des périodes propices pour consolider ses revenus. En
effet, pendant ces deux occasions, la consommation augmente sensiblement et les boulangers ne
lésinent pas sur les moyens pour produire davantage. Un boulanger rapporte qu’au moins 20% du
chiffre d’affaires annuel sont réalisés pendant ces périodes.
Dans notre exem-ple, cette activité ponctuelle peut générer un chiffre d’affaires de 250 000 DH
minimum. Ce qui porte les recettes totales de l’affaire à 3,8 MDH par an. Vu que les boulangeries-
pâtisseries bien structurées sont constituées en SARL, elles sont assujetties à l’impôt sur les
sociétés au taux de 30%. En déduisant cet impôt, l’entrepreneur peut dégager un bénéfice net de
près de 840 000 DH. Dans ce cas, la marge se situe aux alentours de 22%.
Il faut signaler que l’investisseur peut par la suite jouer sur la diversification en intégrant l’activité
de traiteur. Mais il faut au préalable développer sa notoriété sur le marché, du moins au niveau des
quartiers proches de la boulangerie. Une fois cette activité lancée, les revenus de la société
peuvent être augmentés de moitié à raison d’une moyenne de 5 000 DH par jour, soit environ 2
MDH supplémentaires par an. Par conséquent, la marge nette peut atteindre plus de 37%.