Vous êtes sur la page 1sur 15

1

Filière : SEG

Master : CCA

Semestre : 8

Matière : Droit de difficultés d’entreprise

Professeur : Karima KARROUMY


2
Chapitre 1 : la prévention des difficultés

L’entreprise est tenue de procéder par elle-même à


travers la prévention interne des difficultés, au redressement
permettant la continuité de l'exploitation. A défaut, le président
du tribunal intervient à travers la prévention externe soit par
son propre initiative ou soit sur requête du chef de l’entreprise.

Ainsi, les procédures de prévention comportent une double


variante, à savoir la prévention interne et la prévention externe.
3

Section 1 : la prévention interne

La principale caractéristique de la phase de prévention interne est


la confidentialité, du moins au niveau des premières étapes qui
précédent la convocation d’une assemblée générale des associés.

A ce propos, l’étude de cette prévention nécessite le traitement des


différentes procédures d’alerte (Paragraphe 1) et le déroulement de la
procédure de prévention (Paragraphe 2).
4 Paragraphe 1 : Les procédures d’alerte

Les premières procédures sont les procédures d’alerte qui ont été
conçues d’abord comme des procédures de détection précoce des
difficultés et ensuite comme des processus de déclenchement de
prises de décisions par les organes qualifiés de l’entreprise.

Ainsi, si le chef de l’entreprise ne procède pas personnellement à


la correction des difficultés qui peuvent compromettre la continuité
de son entreprise, le ou les commissaires aux comptes doit
obligatoirement intervenir pour lui alerter, le même droit est accordé
aux actionnaires ou associés.
5 A- Alerte interne déclenchée par le commissaire aux comptes :

Le commissaire aux comptes a l’obligation de déclencher


l’alerte lorsque, à l’occasion de l’exercice de sa mission ou de
l’examen de certains documents qui lui sont confiés, relève « des
faits de nature à compromettre la continuité de l’entreprise ».

A cet effet, le commissaire aux comptes doit, dans un délai de 8


jours de la découverte des faits de nature à compromettre la
continuité de l’exploitation de l’entreprise, informer par lettre
recommandée avec accusé de réception, le chef de l’entreprise des
difficultés survenues et l’inviter à redresser la situation. Le chef de
l’entreprise dispose d’un délai de 15 jours pour répondre au
commissaire aux comptes en précisant les mesures qu’il envisage à
prendre.
6 B - L’alerte interne déclenchée par l’associé :

En pratique, les associés sont les premiers concernés par la bonne


marche de leur entreprise et que cette dernière ne soit pas perturbée par
des difficultés susceptibles de mettre en péril son existence. Il n’est donc
pas étonnant que le législateur leur reconnait le droit d’intervenir dans la
prévention de ces difficultés.
Ainsi, tout associé peut, par lettre recommandée, appeler l’attention
du chef de l’entreprise sur tout fait de nature à compromettre la
continuité de l’exploitation.
Cependant, le rôle que le législateur attribue aux associés dans la
prévention reste nettement moins important que celui qu’il confère au
commissaire aux comptes. En effet, ce dernier peut saisir le tribunal en
cas de réponse insatisfaisante à sa demande d’information, alors que les
associés, n’ont pas cette possibilité.
7 Paragraphe 2 : Déroulement de la procédure de
prévention interne

L’alerte se déroule en trois phases à savoir : Information du chef de


l’entreprise (A) ; faire délibérer la prochaine assemblée générale (B)
et l’information du président du tribunal de commerce (C).

A - Information du chef de l’entreprise :


Le chef de l’entreprise doit, dans les quinze jours suivant le
déclenchement l’alerte qui lui est faite par le commissaire aux comptes ou par
un associé, prendre des mesures de redressement. (Si oui le processus s’arrête
à ce niveau).
Cependant s’il n’arrive pas à prendre ces mesures ou compte tenu de ses
pouvoirs ne peut décider des mesures à prendre, il est tenu de faire délibérer
les organes d’administration compétents (conseil d’administration, conseil de
surveillance…). A défaut de résultat positif, on passe à la seconde phase.
8 B - Faire délibérer la prochaine assemblée générale :
Cette deuxième phase, consiste à faire délibérer la prochaine assemblée
générale, sur rapport du commissaire aux comptes. Ce rapport doit contenir
une description détaillée des faits justifiant l’alerte et des risques pouvant être
engendrés par les faits constatés. Si l’assemblée générale a constaté que
malgré les décisions prises la continuité de l’exploitation demeure
compromise, ou à défaut d’une délibération de l’assemblée générale, le
président du tribunal en est informé par le commissaire aux comptes ou par le
chef de l’entreprise.
C - Information du président du tribunal de commerce :
Faute d’une délibération de l’assemblée générale concernant les mesures
à prendre pour permettre le redressement de l’entreprise, ou s’il a été constaté
que malgré les décisions prises par cette assemblée, la continuité de
l’exploitation demeure compromise, le président du tribunal en est informé
par le chef de l’entreprise ou par le commissaire aux comptes.
Section 2 : La prévention externe
9
La prévention externe diffère de la prévention interne au niveau de son
domaine d'application et de l'organe compétent. Au niveau de son domaine
d'application, la prévention externe a un champ d'application plus large en ce
sens qu'elle s'applique aussi bien aux sociétés commerciales aux entreprises
individuelles, commerciales ou artisanales connaissant des difficultés de
nature à compromettre la continuité de l'exploitation.
S'agissant de l'organe compétent pour la procédure de prévention externe,
c'est le président du tribunal de commerce. Il peut être saisi par le commissaire
aux comptes ou le chef d'entreprise lorsque la continuité de l'exploitation
demeure compromise malgré le déclenchement de la prévention interne.

A cet effet, la mission du président du tribunal consiste à envisager des


mesures propres à permettre le redressement de l'entreprise. Le président du
tribunal dispose à cet égard de pouvoirs très larges assortis d'un caractère
d'ordre public.
10
Paragraphe 1 : ouverture de la procédure
du règlement amiable

C’est une procédure facultative en vue de permettre le


sauvetage de l’entreprise en dehors d’une décision de justice.
Elle présente l’avantage de la simplicité et la discrétion.

Ainsi, l’analyse du règlement amiable nous amène à traiter


les conditions d’ouverture et la procédure édictée.
11
A- Conditions d’ouverture de la procédure :
Il doit s’agir de difficultés avérées et non seulement prévisibles. Par exemple
incapacité de l’entreprise à faire face à des frais ou dépenses exceptionnelles, flambée
du prix d’une matière première nécessaire à la fabrication du produit et condamnation
de l’entreprise au paiement d’une somme importante qui risque d’affecter sa trésorerie.
L’ouverture de la procédure de règlement amiable se fait par le président du tribunal
de commerce suite à la requête de chef de l’entreprise, qui expose les besoins de
financement ainsi que les moyens d’y faire face.
S’il l’estime utile, le président du tribunal peut charger un expert d’établir un
rapport sur la situation économique, sociale, et financière de l’entreprise. L’objectif de
cette expertise consiste à déterminer si un plan de redressement peut être envisagé et s’il
a des chances à aboutir.
Après avoir recueilli toutes les informations nécessaires sur la situation de
l’entreprise, et s’il apparait que les propositions du chef de l’entreprise sont de nature à
favoriser son redressement, le président du tribunal ouvre le règlement amiable, en
désignant un conciliateur. La loi n’exige aucune qualité professionnelle pour remplir les
fonctions de conciliateur.
B - procédure du règlement amiable et le rôle du conciliateur :
12
La loi accorde au conciliateur le droit de saisir le président du tribunal pour
lui demander la suspension provisoire des poursuites, s’il estime que cette
suspension serait de nature à faciliter la conclusion de l’accord. A noter que la
durée de sa mission est de trois mois prorogeable d’un mois à sa demande.
Le président du tribunal après avoir recueilli l’avis des principaux créanciers,
peut rendre une ordonnance fixant la suspension pour une durée n’excédant pas
le terme de la mission du conciliateur.
Cette suspension provisoire a pour effet de suspendre et interdire toute action
en justice et tendant à :
- La condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent,
- La résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent.
L’ordonnance arrête et interdit également, toute voie d’exécution de la part
des créanciers tant sur les meubles que sur les immeubles. Les délais fixés à
peine de déchéance ou de résolution des droits sont, en conséquence, suspendus.
13
Paragraphe 2 : Résultat de la procédure de
conciliation

Lorsque le conciliateur parvient à obtenir un accord


avec les créanciers ou certains d’entre eux, cet accord est
constaté par le président du tribunal, ce qui nous amène à
examiner d’abord la procédure de la conclusion de
l’accord de règlement amiable, ensuite la résolution de
l’accord de règlement.
14 A- Conclusion de l’accord de règlement amiable et ses effets :

Lorsqu’un accord est conclu entre le chef de l’entreprise et les créanciers, il


est constaté par écrit et signé par les parties et déposé au greffe du tribunal.
Cet accord suspend pendant la durée de son exécution toute action en
justice, toute poursuite individuelle tant sur les meubles que les immeubles du
débiteur et suspend également les délais impartis aux créanciers à peine de
déchéance ou de résolution des droits afférents à ces créanciers.

Il est également homologué par le président du tribunal et déposé au greffe.


Le président, peut également accorder à l’entreprise débitrice des délais de
paiement prévus par les textes en vigueur pour les créances non comprises dans
l’accord.
Cependant, il est important de souligner que les créanciers non signataires
conservent leur droit d’agir contre l’entreprise débitrice, et ils peuvent même
réaliser la sureté qu’ils détiennent à l’encontre de la dite entreprise.
B- Résolution de l’accord de règlement amiable :
15

Toute inexécution de l’accord homologué ne pourra entrainer que la


saisine du tribunal aux fins de la résolution de l’accord. La loi n’a pas précisé
à qui revient l’initiative de demander la résolution, mais on peut déduire que
cette initiative revient à tout intéressé.

De ce qui précédé, on peut constater que cette prévention externe revêt


plus ou moins un caractère confidentiel dans la mesure où le législateur dans
l’optique de préserver les chances de redressement de l’entreprise en
difficulté, a prévu d’abord qu’en dehors de l’autorité judiciaire à qui l’accord
et le rapport d’expertise peuvent être communiqués, l’accord ne peut être
communiqué qu’aux parties signataires et le rapport d’expertise qu’au chef
d’entreprise.

Vous aimerez peut-être aussi