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Economie européenne

Introduction : Les principales étapes de la construction


européenne

I) Cadre théorique

On a un cadre théorique que l’on appelle la typologie de l’intégration régionale, qui a été proposée
dans les années 60 par Bela Balassa.

Il distingue différents degrés d’intégration économique :

 La zone de libre échange


 L’union douanière
 Le marché commun
 L’union économique
 L’union économique et monétaire

Zone de libre-échange
Il s’agit d’une zone à l’intérieur de laquelle les biens et services s’échangent librement, sans droit de
douane ni restrictions quantitatives. Cependant, concernant les échanges avec le reste du monde,
chaque pays reste maître de sa politique commerciale.

Union douanière
On a une zone de libre-échange ET une politique commerciale commune. Cette politique
commerciale commune est incarnée par le tarif extérieur commun : on a un seul droit de douane.

Marché commun
La différence des deux précédentes formes qui porte sur le marché des produits (des services mais
moins) est que quand on fait un marché commun on ouvre l’ensemble des marchés : produits,
capitaux, travail.

Autrement dit le marché commun repose sur la libre circulation des hommes et des capitaux.

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Union économique
C’est l’idée que l’approche de l’intégration régionale ne repose pas exclusivement sur la régulation
par le marché. Ici, on se préoccupe également du rôle régulateur des interventions étatiques. On a
donc un marché commun ET en plus on va chercher à harmoniser les politiques publiques nationales
pour abolir toute discrimination ou obstacles étatiques à la circulation.

En 1989 Jacques Delors va définir l’Union économique par 4 points :

 Le marché unique (commun chez Belassa), à l’intérieur duquel on a une libre circulation des
hommes, services, capitaux.
 Une politique de la concurrence au niveau supranational.
 Des politiques communes d’ajustement structurels qui visent à réduire les différences entre
pays.
 Une coordination des politiques macroéconomiques, en particulier les règles budgétaires.

Union économique et monétaire


On a non seulement la mise en place d’une politique commune mais aussi la création d’une monnaie
unique commune. En Europe elle est définie par le rapport Werner de 1969. Dans ce dernier Werner
dit que l’UEM se définit par :

 La convertibilité totale et réversible


 Libre circulation des capitaux et intégration complète des marchés bancaires et financiers
 L’élimination complète des marges de fluctuations des monnaies entre elles …

II) Déroulement historique


III) 1951-1957 : De la CECA au traité de Rome
A l’origine le but de la construction européenne est d’éviter le retour d’une guerre.

1948 : Congrès de La Haye dirigé par Churchill dans lequel on a une déclaration politique envers les
Etats-Unis d’Europe.

1949 : Création du Conseil de l’Europe. Il s’agit d’un organisme qui joue un rôle important dans les
droits de l’Homme, mais peu dans l’unification.

1951 : Signature du traité de Paris. Il institue la CECA (Communauté Economique du Charbon et de


l’Acier. A l’origine de ce traité on retrouve les pères de l’Europe : Robert Schuman qui explique que
pour éviter une guerre franco-allemande il faut unifier les productions d’acier et de charbon ainsi que
Jean Monnet et le chancelier Adenauer.

La CECA va plus loin et on opte pour une gestion supranationale, au-delà des simples coopérations.

1954 : La France rejette la Communauté Européenne de la Défense, on a donc des échecs.

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25 Mars 1957 : Signature du Traité de Rome qui institue la Communauté Economique Européenne :
France, Italie, Allemagne, BENELUX. Il institue une union douanière. Mais aussi une ambition de
marché commun.

On a une entrée en vigueur de l’Union douanière en 1968, les 6 n’ont plus de droit de douane et on
crée un tarif extérieur commun.

IV) 1957 – 70’ : Les premières avancées de la CEE


1960 : Création du premier fond social européen dans le but d’aller au-delà du marché grâce à une
dimension sociale.

1962 : Lancement de la Politique Agricole Commune (demande entre autres de la France) qui repose
sur 3 principes toujours d’actualité :

 Unicité des marchés


 Préférence communautaire
 Solidarité financière

On a une grande avancée mais au vu des conditions différentes des pays on a des divergences entre
pays qui vont déboucher sur la première crise européenne : la crise de la chaise vide.

1965 : L’UE voulait que les décisions de la PAC soient prises à la majorité qualifiée plutôt qu’à la
décision commune, car certains pays s’y opposaient car ils payaient trop. Charles de Gaulle s’y
oppose et on débouche sur le compromis du Luxembourg. Ce dernier permet à chaque pays de
s’opposer à une décision communautaire s’il estime que ses bénéfices sont mis en danger.

Fin des années 60 : On a des désordres monétaires dans le monde entier, le système de parité fixe de
Bretton Woods s’effondre, les monnaies européennes fluctuent beaucoup entre elles, ce qui gêne le
commerce. Les européens considèrent qu’on a un obstacle au commerce et vont imaginer un
système qui vise à réduire les marges de fluctuations des monnaies entre elles : le serpent monétaire
qui entre en vigueur. On borne les fluctuations des monnaies entre elles et on laisse fluctuer avec le
dollar.

1er Janvier 1973 : Le premier élargissement a lieu avec l’entrée du Royaume-Uni qui était d’abord
opposé à la communauté européenne. La France était d’abord hostile au début des années 70 à cet
élargissement.

V) Milieu des années 70 – Milieu des années 1980 : La période des crises
Au milieu des années 70 on a le premier choc pétrolier, puis le second en 1979, on a des débordes de
plus en plus importants et le monde entre dans une période de perturbation économique.

1974 : Sommet de Paris sous Valéry Giscard d’Estaing qui institue en marge du marché
communautaire le conseil européen. Le conseil européen dit que les dirigeants européens se

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rencontreront régulièrement pour réfléchir sur la politique économique. On décide aussi d’entamer
une réflexion plus importante sur l’intégration économique.

1975 : Convention de Lomé. La convention de Lomé assure le libre accès au marché communautaire
à la quasi-totalité des marchandises produites dans 46 pays d’Afrique, des Caraïbes, du Pacifique.
C’est la première fois que la communauté européenne pratique une politique de développement
commune.

1978 : Création du Système Monétaire Européen. C’est un système qui succède au serpent
monétaire qui ne fonctionnait pas. Le couple Franco-Allemand décide donc d’aller plus loin via cette
instauration du SME. On va définir une unité de compte commune : l’ECU (Européan Currency Unit
ET l’ancien écu). On a donc un taux de change écu/franc français, on fait cela pour chaque pays et on
va limiter les marges de fluctuation du taux de change entre l’écu et les autres monnaies. Si les
fluctuations sont excessives la banque centrale doit intervenir. Vu qu’on n’a pas de monnaie unique
les autorités nationales peuvent pratiquer les dévaluations, ce qui fragilisa le SME.

1979 : Première élection du parlement européen au suffrage universel direct. Il a donc une grande
légitimité, on a un parlement et un président du parlement.

1984 : Crise. On a un Conseil européen à Fontainebleau, on a 10 pays qui discutent des budgets
européens, Thatcher trouve que le Royaume-Uni paye trop et exige un retour d’argent « I want y
money back ». On a une crise sévère et les britanniques obtiennent le fameux « chèque britannique »
qui est un rabais de contribution à la PAC.

VI) 1985 – 1992 : La relance européenne


1985 : Accords de Schengen. Ils font que le marché commun européen ne va pas seulement
s’intéresser au contrôle des marchandises mais on va aussi faire disparaitre les contrôles douaniers
et policiers sur les hommes. Ensuite il sera intégré au traité communautaire.

On a aussi économiquement le livre blanc de Jacques Delors. Il s’agit d’un document politique qui
explique qu’il faut achever le marché unique pour aller vers une union économique. En effet on
considérait que subsistaient de nombreux obstacles administratifs qui empêchaient la libre
circulation. L’objectif est fixé au 31 décembre 1992.

1986 : Signature de l’Acte Unique Européen qui révise le Traité de Rome suit au Livre Blanc. On a
l’idée de supprimer les règles administratives et réglementaires, un renforcement du rôle du
parlement européen, et une généralisation du vote à majorité qualifiée (poids des pays pondéré par
la population).

1987 : Lancement du programme Erasmus.

On a donc une période positive pour les européens.

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VII) 1992 – 2009
Tout commence avec la disparition du bloc soviétique, chute des pays de l’Est du pacte de Varsovie
et réunification des deux Allemagnes. On a de nombreux élargissements : Autriche, Suède, Finlande,
puis nouvelles démocraties d’Europe centrale. Il faut réformer le fonctionnement de l’Europe

7 Février 1992 : Traité de Maastricht. On a l’Union économique et Monétaire avec donc la monnaie
unique : l’euro au 1er Janvier 2002. On a aussi l’idée d’instaurer une union plus étroite entre les
peuples de l’Europe, instaurer une citoyenneté européenne, instaurer une politique extérieure de
sécurité commune. On revient aux questions de défense qu’on avait plus touché depuis le rejet de
1954 par la France.

On a la ratification par voie parlementaire ou référendaire, en France le OUI remporte 51,04%.

Il entre en vigueur le 1er Novembre 1993.

1997 : Traité d’Amsterdam. Les Européens se retrouvent, on a des avancées sur les questions
d’immigration. La plupart des observateurs considèrent que c’est un échec.

2001 : Traité de Nice. C’est également un échec car 2 pays s’opposent, la France et l’Allemagne. Les
Français n’acceptent pas le renforcement du poids de l’Allemagne lié à la réunification.

2004 : Elargissement à 10 nouveaux membres. (Hongrie, Rep. Tchèque, …). On fonctionne mal mais
on continue à s’élargir.

2004 (Octobre) : On désigne Valéry Giscard d’Estaing. On a un nouveau traité qui établit une
constitution pour l’Europe, ce projet de constitution européenne est signé. On veut aller vers plus de
fédéralisme politique. On signe, mais il faut ratifier. Deux pays choisissent la voie référendaire : la
France et les Pays-Bas. Le traité est soumis à référendum et le NON l’emporte en France et aux Pays-
Bas. On a une crise institutionnelle majeure en Europe.

2007 : Traité de Lisbonne. C’est un traité modificatif et simplifié, on veut modifier les traités existants
sans les remplacer en reprenant grandement celui de 2004. On trouve des éléments sur l’élection
d’un président du conseil européen, l’extension des pouvoirs du parlement, …

A l’époque les chefs d’état et gouvernements décident pour l’essentiel de ratifier le traiter par la voie
parlementaire. Certains se plaignent qu’on retrouve le même document mais cette fois par voie
parlementaire.

Il entre en fonction en Décembre 2009

VIII) 2009 – Aujourd’hui


Les Européens espéraient, par le Traité de Lisbonne, obtenir un meilleur fonctionnement
constitutionnel, malheureusement on n’observe pas cela et on connaît une crise financière globale
qui a des effets de contagion sur les pays européens qui vont conduire à la crise de la dette. Cela
débouche sur des menaces très importantes sur l’intégrité de l’Union monétaire qui vont conduire à
prendre des décisions.

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On a des décisions de soins :

2012 : La BCE annonce un programme illimité de rachat des dettes pour éviter que des états
européens se retrouvent en faillite (Grèce, Espagne, Italie, Portugal, …).

On a aussi des décisions préventives comme le Pacte Budgétaire Européen qui obligeait les Etats
Européens à respecter les règles budgétaires, on parle de la règle d’or.

En Septembre on a le mécanisme européen de stabilité, en bref il s’agit du FMI de l’UE. Il s’agit d’un
mécanisme (de 700Mds d’euros) de solidarité financière qui vise à venir en aide à des états
européens en difficultés financières.

Brexit
Le 23/06/2016 les britanniques votent NON à la question « voulez-vous rester dans l’UE ? » On
engage la procédure de retrait (Article 50) et la sortie devient effective au 31 Janvier 2020.
Aujourd’hui on est dans une période de transition jusqu’au 1/01/2021. Cette période à 3
caractéristiques :

 Le Royaume-Uni continue de respecter l’intégralité de l’acquis de l’Union


 Le Royaume-Uni n’est plus associé au processus décisionnel (plus de député)
 Le Royaume-Uni a accès au marché intérieur.

Il n’y a donc aucun changement économique pour l’instant.

La période de transition avait été prévue pour négocier le statut définitif pour 2021. Le Royaume-Uni
négocie un accord, sinon les règles de l’OMC s’appliqueront, on traitera avec le RU comme l’Asie. Or
8% des exportations EU vont au RU et 40% des exportations britanniques vont en Europe.

On a d’autres obstacles :

 La pêche (0,8% du PIB) et l’accès aux eaux territoriales anglaises.


 La concurrence, le fair-play économique et commercial. Ils doivent respecter les normes de
l’UE.

On discute donc sur la condition commerciale.

Le problème pour le RU est qu’ils vont perdre un marché très proche, même s’ils avaient des accords
favorables avec les USA ou le Japon, ils auront une perte économique liée au coût de la distance.

Covid
Les premiers cas en Europe ont lieu en Janvier 2020, tout s’aggrave dans la première quinzaine de
mars. On a une mesure de fermeture des frontières extérieures, entre certains états européens, alors
qu’apparaissent des mesures de confinement.

Le 20 Mars on a la suspension de l’application des règles budgétaires qui suivent des mesures de
soutien financier annoncées par l’UE. Cela ne suffit pas et on observe des tensions sur les taux
d’intérêt. On a donc le 18 Mai un accord Franco-Allemand, et surtout le 21 Juillet les Européens

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adoptent un plan de relance Next Generation de 750 Mds d’euros, 390Mds étant des prêts aux états
et 360 Mds étant des subventions remboursées en commun. C’est la première fois qu’on a une
mutualisation de la dette.

Le plan de 100Mds de la France est financé à 40% par l’UE.

On a aussi eu des actions importantes de la BCE. Mi-Mars 2020 le gouverneur Christine Lagarde
annonce le programme Pandemic Emergency Purchase Program. Ce plan est une enveloppe de
750Mds portée à 1350Mds € qui offre la possibilité pour la BCE d’acheter des titres (obligations) sur
le marché secondaire de la dette, ce qui garantit que les Etats ne seront pas en faillite.

L’Italie a un gros déficit qui génère de la dette, le gouvernement émet beaucoup d’obligations, si on a
une crainte sur la soutenabilité on a eu une hausse des taux d’intérêt (cher de financer pour les
italiens) qui pourrait faire que le marché ne prête plus à l’Italie si on croit que l’Italie ne pourra pas
rembourser. La BCE va donc faire prêteur en dernier ressort des Etats (d’habitude des banques
uniquement).

La BCE rachète des titres de façon illimitée, on garantit donc que l’Italie ne tombera pas en faillite, on
a donc un relâchement des taux d’intérêt.

Cela va contre un principe : le No Bail Out, qui interdit à la BCE d’aider les Etats en difficulté.
Attention la BCE ne va pas sur le marché primaire de la dette, mais seulement sur le marché
secondaire, ce qui contourne le No Bail Out, d’un point de vue juridique c’est OK.

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Chapitre 1 : L’intégration réelle
Section 1 : L’Union douanière

I) Les gains statiques de l’intégration commerciale


régionale
Quand on parle de gains statiques on se place dans l’analyse traditionnelle du commerce
international : Ricardo, Heckscher-Ohlin-Samuelson.

On se base sur les avantages comparatifs dans un cadre purement concurrentiel.

Ces gains statiques ont été mis en évidence dès les années 50 par des auteurs comme Viner et
Meade. Ces gains apparaissent avec une analyse en termes de de surplus. On a 3 acteurs : les
entreprises (homogènes), consommateurs (homogènes) et l’Etat. On réagit bien sûr en équilibre
partiel. On a deux effets contradictoires :

 Création de trafic (+) : Elle provient du fait que l’abaissement d’un tarif douanier fait naître
un courant commercial qui auparavant n’existait pas. On se rapproche de l’optimum parétien

Ex : La France, le Portugal et la Tunisie hors UE. Le Portugal rejoint l’union douanière dont la France
fait partie, le droit de douane entre les deux disparait. On a un nouveau flux d’échange qui avant
n’existait pas, on arrête de produire un produit coûteux en France et on l’importe du Portugal.

On se rapproche de l’optimum Parétien du modèle : le libre-échange mondial.

On a plus d’échange, et moins cher : effet bénéfique

 Détournement de trafic (-) : Remplacement d’un flux par un autre moins compétitif. On
s’éloigne de l’optimum parétien.

Mais la libération commerciale est discriminatoire, on a la clause de la nation la plus favorisée dans
l’OMC : si on accorde un avantage à un pays on doit l’accorder aux autres. SAUF si on a une union
douanière, dans ce cas on peut supprimer un droit de douane à l’intérieur avec le Portugal et le
laisser avec la Tunisie. D’un point de vue économique on peut avoir des problèmes d’inefficacité, des
produits portugais vont remplacer des produis tunisiens pourtant plus compétitifs, on n’a pas de
trafic supplémentaire. On a juste un remplacement, un détournement.

On a remplacé des produits compétitifs (Tunisie) par des moins compétitifs (Portugal).

Ces deux effets caractérisent les zones d’intégration régionale, en effet dans le libre-échange on n’a
pas de détournement de trafic.

On dit que les zones d’intégration régionale sont des optimums de second rang, le détournement
peut l’emporter, alors qu’en théorie le libre-échange mondial est l’optimum de premier rang.

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3 situations sont possibles :

 Pur détournement de trafic


 Pure création de trafic
 Entre les deux

A) Les effets de détournement de trafic

'
PT ; P P
T

PT
D
Q

PT le prix tunisien sans droit de douane.


'
PT le prix augmenté du droit de douane = au prix du Portugal sans droit de douane.
La Tunisie est donc plus compétitive car son prix est plus bas que celui du Portugal.

Le prix P P serait au-dessus du prix d’autarcie donc ce n’est pas utile de le représenter, personne
n’achète.
’ ’
Si le Portugal entre dans l’union, avant on achetait en France au prix PT qui était en dessous de P P.
Mais maintenant on a un accord avec le Portugal, on achète au prix P P puisqu’on a plus de droit de
douane. Le volume d’offre et de demande ne change donc pas, on a le même volume M
d’importation.

On a un agent qui perd : l’Etat, qui perd le droit de douane qu’il avait chez les Tunisiens (hachuré).
L’entrée du Portugal a donc pour effet :

 Aucun changement pour le producteur (surplus)


 Aucun changement pour le consommateur
 Perte de l’Etat (Droit de douane * quantité importée)

9
 La perte de l’Etat est donc la perte de bien être total.

II) Les effets de création de trafic

'
PT
' 1 2
PP
PT

PP
4 3 5

D
Q
M

On considère les Portugais plus compétitifs. Le prix P P augmenté du droit de douane : P P correspond
'

au prix d’une situation d’autarcie.


'
Avant le PT était au-dessus donc pas intéressant. Le Portugal était égal au prix d’autarcie donc on
n’avait pas d’échange avec aucun des pays.

L’ouverture au Portugal fait qu’on va donc maintenant échanger à P P On a donc un nouvel échange,
on a plus de quantité importée.

 Le prix baisse donc les producteurs perdent un surplus 1234 ;


 Les consommateurs vont consommer plus, et moins cher, ils gagnent la surface 1254 ;
 Le gain en bien être est donc 253.

Le critère de Kaldor et Hicks est vérifié, on peut bien dédommager les perdants.

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Entre les deux

'
PP
!
'
PT
I III
PP II IV

V
PT
D
Q
MT

MP

Les Tunisiens sont plus compétitifs que les Portugais.



Avant l’entrée du Portugal on a un volume faible d’importation en provenance de Tunisie au prix PT ,
quantité M T .

Les Portugais étaient hors-jeu car trop chers. Après leur entrée le prix en vigueur va être P P à savoir
le prix portugais hors droit de douane. On a donc un plus grand flux d’importation, on importe M P .
On a un effet de création de traifc, on se rapproche de l’optimum Parétien.

On a un effet contradictoire, on achète maintenant des produits portugais moins compétitifs que les
produits tunisiens, on a détournement de trafic.

 Le consommateur gagne en SC les surfaces I+II+III+IV ;


 Le surplus des producteurs diminue de la surface I ;
 L’Etat perd les droits de douane, à savoir la surface III+V ;
 Au total on a donc 1I+II+III+IV – I – III – V. Le gain pour la nation est donc II + IV – V.

Ce gain en bien-être dépend donc des élasticités, si elles sont grandes on des grands triangles. Le
détournement de trafic peut donc l’emporter ! Dans l’UE on a plus de création.

Dans le cadre du Brexit, les britanniques renoncent à la proximité pour un marché lointain. Dans ce
cas on va avoir des effets de détournements beaucoup plus importants que la création de trafic. On

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ne peut pas remplacer les exportations vers les pays voisins européens par des exportations vers des
pays lointains.

 Du moment où on crée une union douanière on a une discrimination.

Dans les années 1960, Lipsey liste les éléments qui rendent plus avantageux une union douanière :

 Structure du commerce
 Taille de l’Union
 Concurrence VS Complémentarité des structures de production
 Coûts de transport
 Niveau initial des droits de douane

Structure du commerce
Si au moment de la création de l’union douanière, la part des biens produits nationalement est
élevée, on a plus de chance d’observer le fait que la création de trafic l’emporte sur le
détournement. En effet on remplace une création nationale coûteuse par une production étrangère
moins chère.

 Plus on a de biens (part) produits nationalement plus on a de création.

Taille (économique) de l’Union


Plus l’Union douanière est importante, plus on a de chances d’avoir de la création de trafic qui
l’emporte. Si une Union regroupait toute la planète alors il y aurait exclusivement des effets de
création. Plus l’Union est grande, plus on devrait donc observer de la création par rapport au
détournement.

On pourrait penser que plus les Union douanières sont grandes plus elles sont efficaces.

 Plus la taille de l’union est élevée plus on a de création qui l’emporte.

Concurrence VS Complémentarité des structures de production


Si au moment où on crée l’Union douanière les structures des pays qui vont rentrer dans l’UD sont
des structures concurrentes, alors on a des grandes chances d’avoir plus de création que de
détournement.

En effet si les pays fabriquent les mêmes produits, l’Union douanière va générer le remplacement
des productions peu efficaces par les productions les plus efficaces.

A l’inverse si les pays n’étaient pas concurrents mais complémentaires alors l’Union Douanière ne va
pas créer de flux puisqu’ils existaient déjà.

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On comprend donc qu’il faut que les pays soient concurrents, autrement dit que leurs structures de
production ne soient pas trop éloignées et donc que les niveaux de développement ne soient pas
trop éloignés.

 Si on a des structures de productions concurrentes on va observer plus de création.

Coûts de transport
Plus les coûts de transport entre les pays membres sont faibles, plus on a de chance de créer des flux.

Les coûts de transports dépendent de deux choses : les infrastructures de transport et la distance.

En Afrique on a échoué car les pays étaient éloignés et n’étaient reliés entre eux que par des
infrastructures de transport peu performantes.

 Plus les coûts de transports sont faibles, plus les unions douanières ont des chances de
fonctionner

Droits de douane
Si les pays ont des droits de douane élevés, alors l’union douanière est plus efficace.

 L’union douanière a d’autant plus de chance de réussir que les droits de douane initiaux sont
élevés.

 On rappelle que dans tous les cas les unions douanières sont des optimums de second rang, le
first best étant le libre-échange mondial.

Dans le cas européen, tous les économistes considèrent que la création de trafic l’a très largement
emporté sur le détournement de trafic au niveau global. Pour preuve, on observe depuis les années
1960 une très forte augmentation du commerce intracommunautaire qui est maintenant
prééminent. Pour autant le commerce avec le reste du monde a également augmenté. On a donc pas
pur détournement de trafic. Cependant le commerce avec le reste du monde augmente plus
doucement. On a donc bien majoritairement création de trafic.

Le commerce intra-européen est 1,5 fois plus important que le commerce extra-européen (65% du
commerce est intra-européen). L’Europe est le deuxième importateur mondial derrière les Etats-
Unis, et le deuxième exportateur mondial derrière la Chine. En cumulant cela on observe que
l’Europe est la première puissance commerciale du monde.

Le commerce entre l’Europe et le Reste Du Monde représente aujourd’hui 15% du commerce


mondial.

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III) Les gains dynamiques de l’intégration commerciale
régionale
A) Les limites de l’analyse traditionnelle et leurs dépassements par les
nouvelles théories du commerce international
Aujourd’hui les nouvelles théories du commerce international considèrent qu’à côté des gains
statiques il faut ajouter des gains dynamiques.

Il faut comprendre que les gains statiques sont mis en évidence dans des modèles de CPP ou dans
des modèles où les échanges sont inter-branches : la France importe des machines agricoles et
exporte des voitures. Or, aujourd’hui l’essentiel du commerce mondial (surtout OCDE et UE) est
intra-branches : la France exporte des voitures en Allemagne et en importe aussi. Autrement dit
aujourd’hui le commerce est basé sur la différenciation horizontale1 des produits (caractéristiques
des voitures différentes).

Dans les pays du Sud le commerce inter-branches est prédominent : différenciation horizontale ou
verticale.

Enfin une troisième limite est qu’on a des modèles statiques : on n’explique pas d’où viennent les
avantages comparatifs : les dotations des facteurs ou les différentes productivités du travail.

Dans les nouvelles théories du commerce international on explique d’où viennent les avantages
comparatifs : d’après Porter ils sont « construits » : ils résultent des stratégies.

 Dans la réalité on n’a pas de CPP, on a du commerce intra-branche et les avantages comparatifs
résultent de stratégies industrielles.

On a plusieurs gains dans ces modèles :

 Effet prix
 Intensification de la concurrence
 Réduction des coûts unitaires de production
 Augmentation de la variété des produits
 Baisse des coûts de transport

II) L’effet prix


L’idée est que quand on n’est pas en CPP et que l’Union douanière à une taille suffisante, alors
l’union douanière peut agir sur les prix.

1
Horizontale : même prix
Verticale : prix différent, gamme différente

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Que l’on ait détournement ou création de trafic, la demande des produits des partenaires de l’union
augmente tandis que la demande des produits des pays tiers diminuent. S’il y a création de trafic on
demande plus de produits portugais, s’il y a détournement on demande certes moins de produits
tunisiens mais quand même plus de produits portugais.

 L’effet-prix apparaît aussi bien en cas de création qu’en cas de détournement.

Puisqu’on a plus de demande de produits européens alors les prix (termes de l’échange : prix relatif :
prix des produits en Europe VS prix RDM) des produits européens augmentent pour les étrangers.
Cela est donc favorable en termes de bien-être pour les pays de l’union.

En effet on a une augmentation de pays européen dans tous les cas : donc le prix des produits
européens augmente relativement par rapport à ceux du reste du monde.

Plus l’union est grande plus l’effet prix positif va être important, plus on a un gain dynamique.

III) L’intensification de la concurrence


L’idée est qu’à partir du moment où on crée l’union douanière on augmente la taille du marché, donc
on augmente la concurrence. Cette intensification de la concurrence peut avoir des effets bénéfiques
sur l’économie.

D’abord on a des effets de structures : si on a plus de concurrence, vont subsister les


entreprises les plus efficaces, en principe favorable au consommateur.

On a aussi une réduction des inefficacités techniques2 : si une entreprise est en concurrence,
elle a une pression sur ses profits, elle va chercher à réduire ses inefficacités (en particulier
organisationnelle : le slack).

Attention il peut y avoir des problèmes si l’intensification de la concurrence débouche sur un


monopole, on a donc des effets négatifs pour les consommateurs. Dans les textes européens on a
toujours l’idée que la politique de la concurrence doit l’emporter sur la politique industrielle (si les
entreprises sont concurrentes elles seront habituées à concurrencer les chinois). La crise sanitaire a
montré que dans un certain nombre de domaines stratégiques il n’est pas raisonnable de s’en
remettre au marché et qu’il faut une politique industrielle.

IV) Réduction des coûts unitaires de production


Le commerce mondial favorise les produits à rendements d’échelle croissants : plus on produit plus
le coût unitaire de production diminue. Si le marché est plus important alors on a une échelle plus
importante et donc une réduction plus importante des coûts : favorable économiquement.

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Inefficacité technique : Quand les entreprises ne sont pas sur leur Frontière des Possibilités de Production
Inefficacité adaptative :

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Ces économies d’échelle peuvent être internes (aux entreprises) et externes (au niveau des
branches).

Si les économies d’échelles sont internes les grandes entreprises sont favorisées (pas de
concurrence), si elles sont externes alors elles ne sont pas incompatibles avec un monde de
concurrence.

Par exemple dans l’horlogerie suisse on a de petites entreprises mais le secteur est particulièrement
développé, il crée des économies d’échelle externes.

Economie d’échelle internes :

Krugman donne un exemple : imaginons deux biens : T et P. Pour produit ces biens il faut du travail,
on va représenter la fonction de production dans la matrice ci-dessous. On a deux types de
dotations : 1million d’heures de travail ou 2 millions d’heures de travail

Avec 1M d’heures de travail on peut produire 100 unités de T ou 100 unités de P. Par contre avec 2M
d’heures de travail on peut produire 300 de T ou 300 de P. On a des économies d’échelles : quand on
double le travail on fait plus que doubler la production.

T et P sont donc proches, on a un commerce intrabranche.

On se place dans l’UE. Supposons que dans chaque pays la dotation initiale soit de 2M d’heures de
travail.

Avant la création de l’union douanière, chaque pays a besoin des deux produits, avec ses 2M chacun
va produire 100 produits T et 100 produits P. La production européenne (supposons qu’il n’y a que 2
pays) était de 100+100 = 200T et 200P.

Si on créait une union douanière, le pays qui se spécialise en T va en produire 300 et l’autre produira
300P. La production globale passe donc à 600.

Le modèle n’explique pas comment on se spécialise, chez Ricardo on avait des fonctions de
productions différentes, mais ici on a la même fonction de production. On suppose que la
spécialisation a lieu en fonction de la stratégie industrielle par exemple, peu importe.

 L’union douanière permet d’exploiter les rendements d’échelle, ce qui génère un commerce
générateur de bien-être et d’efficacité.

T P
1 M heures 100 100
2 M heures 300 300

On a du commerce entre pays semblables, commerces intra-branches, et on a endogénéité des


économies d’échelle.

Economies d’échelle externes :

16
Ce qui est à l’origine de ces effets peuvent être les effets d’apprentissage. Si dans une ville Suisse on
a une production importante d’horlogerie alors on va avoir un pôle de main d’œuvre bien formée qui
au final est au service de la branche entière, ils peuvent quitter l’entreprise et aller travailler dans
une autre ville.

La formation du travailleur hautement qualifié génère une externalité positive.

On peut observer cela avec des infrastructures, si des entreprises se regroupent on va avoir des
externalités positives pour les autres de la zone : routes, …

Coût de production

O
DW

CM EUROPE
α

CM CHINE

Taille du marché
β

La courbe de coût moyen des Chinois est naturellement plus faible que celle des européens. Chaque
pays européen seul n’a aucune chance de concurrencer les chinois. Initialement on a un marché de
taille β , donc la Chine est plus efficace (son coût moyen est inférieur).

Si le marché s’ouvre avec l’union douanière, on a une augmentation de la taille du marché, on fait
maintenant face à la demande mondiale, les européens ont donc un coût moyen α , ils sont plus
efficaces que la Chine (qui a toujours un marché β ) maintenant puisque α < β Chine sur l’axe des
ordonnées.

 Si on a un désavantage en coût du travail, il peut être compensé par un marché de grande taille.

17
V) Augmentation de la variété des produits
L’union douanière va augmenter la variété des produits à disposition des consommateurs, ce qui
augmente le bien-être des consommateurs.

Regardons cela avec un graphique de concurrence monopolistique : chaque entreprise sur un


marché est capable de différencier son produit des produits concurrentiels. Cette différenciation
peut être objective (les entreprises ne fabriquent pas les mêmes produits) ou subjective (on arrive à
convaincre le consommateur par la publicité qu’on ne fabrique pas le même produit). Dans ce type
de modèle les produits restent des substituts : les consommateurs réagissent aux signaux de prix, ils
peuvent abandonner un produit pour un autre.

Hypothèses :

 Plus on a de firmes présentes, plus la variété est grande donc, or les consommateurs
valorisent la variété.
 Chaque entreprise considère le prix des entreprises rivales comme donnés : quand elles
prennent une décision elles ne tiennent pas compte de l’impact que peut avoir leur propre
prix sur le prix des concurrents

Chaque entreprise va se comporter comme un monopoleur, ce qui est paradoxal puisque les produits
sont substituts, bien qu’elles soient confrontées à une concurrence.

Les entreprises se comportent comme des monopoleurs car elles sont les seules à fabriquer un
produit particulier. A court terme elles peuvent dégager des profits anormaux (comme des
monopoleurs), à long terme les forces de la concurrence vont l’emporter, les consommateurs vont
substituer. A long terme les profits anormaux disparaissent, les prix vont se fixer au niveau des coûts
moyens donc les marges bénéficiaires deviennent nulles.

CM

¿ Ω
P
θ
¿∗¿¿
P ∆ N >0 ∆ N <0

18
Prix/ Demande
Nombre de firmes
N¿
On a deux courbes :

 En vert le coût moyen, fonction croissante du nombre d’entreprise. Pour un marché d’une
taille donnée, plus on a d’entreprises moins chaque entreprise produit, moins chacune a
d’économie d’échelle, plus le coût moyen augmente.
 En rouge la courbe de demande ou courbe de prix, fonction décroissante du nombre
d’entreprises. Plus le nombre d’entreprises est grand plus il y a de concurrence plus le prix a
tendance à être faible.

L’équilibre de long terme en concurrence monopolistique, on l’a vu, a lieu lorsque CM = PRIX, le point
Ω.
Si on a ouverture du marché, on a plus de taille du marché, donc la courbe de CM se déplace vers le
sud (en pointillés). Pour un nombre d’entreprise donné, le coût moyen diminue puisque le marché
est maintenant plus grand. Le point d’équilibre est maintenant ϑ .

On a donc deux effets : baisse du prix et augmentation du nombre d’entreprises sur le marché.

A gauche de l’équilibre on a des marges, donc on attire les entreprises : ∆ N > 0, à droite, on a des
pertes, le nombre d’entreprises diminue.
¿∗¿¿
On a un nouveau prix : P , cette baisse de prix est l’effet Lancaster.

On a un effet Lancaster : l’Union douanière diminue le prix, ce qui est bon pour le consommateur,
¿ ¿∗¿¿
passage de P à P .
¿ ¿∗¿¿
On a un effet Krugman : Plus de variété car plus d’entreprise, passage de N à N .

 Sur une concurrence monopolistique : on a un double gain de l’union douanière : prix et variété.
En supposant que le consommateur aime la variété et qu’on a des RE croissants.

VI) Baisse des coûts de transport


L’augmentation des échanges pourrait favoriser le secteur des transports, s’il a des économies
d’échelle alors plus on a d’échanges grâce à l’union douanière, plus on a d’économies d’échelles dans
le secteur du transport plus le coût du transport baisse.

Dans la réalité on nous dit qu’on a des économies d’échelles dans le secteur des transports mais
qu’elles sont modérées. Or, il y a des économies de densité : plus on augmente la taille d’un
véhicule, plus les coûts unitaires sont faibles, à ne pas confondre avec les économies d’échelle.

19
La question posée est maintenant la répartition des gains : si l’union dans sa globalité est gagnante,
on applique le critère de Kaldor Hicks. Si les gains sont supérieurs aux pertes alors les gagnants
peuvent dédommager les perdants tout en gardant quelques choses pour eux.

Or dans la réalité les compensations ne se font pas aisément puisque l’Europe n’est pas un Etat-
Nation, on n’a pas de mécanisme redistributif.

La question de la mise en place de mécanismes redistributifs est centrale en Europe.

Les modèles de concurrence internationale nous disent qu’il risque d’y avoir concentration des
activités dans le cœur de l’Europe : on aurait le cœur avec des grands bassins d’emplois et une
périphérie qui se désindustrialise. Ce qui pourrait accélérer cette structure cœur/périphérie serait la
diminution des coûts de transport.

VII) La dynamique de l’intégration commerciale régionale


On rappelle que l’intégration régionale est toujours un optimum de second rang.

On sait qu’on peut toujours faire mieux que les accords régionaux, alors pourquoi continuer d’en
faire ?

Sont-ils une étape du libre-échange mondial ou un obstacle ?

Comment se constituent les zones d’intégration régionale ?

A) Pourquoi des accords régionaux ?


Dans la littérature on trois types d’explications :

 Difficulté de parvenir à des accords multilatéraux


 Pouvoir de négociation
 Accès au marché

Difficulté de parvenir à des accords multilatéraux


Les rounds de l’OMC sont très longs et compliqués. Comment les discussions multilatérales n’en
finissent pas, il est plus simple de discuter entre pays proches et parvenir à des accords régionaux.

Pouvoir de négociation

20
Si on constitue des accords régionaux on va obtenir un pouvoir de négociation que l’on obtiendra en
aucun cas en restant seul à l’OMC. Un pays isolé pèse moins, l’Europe génère un pouvoir de
négociation.

Accès au marché
Dans un monde où les accords régionaux se développent on peut redouter la création de blocs
commerciaux qui risquent d’être en rivalité en mettant des obstacles aux importations venant
d’autres blocs.

Si on a 3 blocs : Américain, Européen, Asiatique. Si on est un pays extérieur on a le choix entre rester
seul ou rentrer dans un bloc : on a tout intérêt à rentrer dans un bloc puisqu’il nous garantit l’accès à
un marché.

II) La multiplication des accords régionaux est-elle bénéfique pour le


bien-être mondial ?
Il s’agit d’un vieux sujet d’économie internationale avec deux écoles :

 Certains considèrent que le régionalisme (accords régionaux) est une étape vers le
multilatéralisme, on s’inscrit dans la continuité d’un processus de mondialisation, sans
entrave.

C’est le point de vue de Bhagwati qui dit que régionalisme et multilatéralisme sont compléments, il
est plus simple de discuter en petit groupe avant. Les accords régionaux dopent le commerce intra-
zone, on va plus vite que l’OMC.

 D’autres auteurs comme Krugman expliquent que la préférence communautaire due au


régionalisme est une nouvelle forme de protectionnisme inter-bloc.

Pour Krugman le régionalisme est un substitut au multilatéralisme. On a des blocs de plus en plus
rivaux qui se livrent des guerres commerciales.

D’un point de vue historique ?


Si on observe le commerce international à long terme, on remarque que la meilleure période pour le
commerce international est celle qui succède à la WW2 après les accords de 1947 du GATT qui a
amené le multilatéralisme.

Les observateurs la comparent à l’entre-deux guerres, dans les années 30, en raison de la montée de
la rivalité entre puissances politiques et économiques on a un repli en blocs commerciaux rivaux. Ils
vont se livrer une guerre commerciale puis une réelle guerre.

On pourrait donc penser que le multilatéralisme est bien plus bénéfique que le régionalisme.

21
Mais si on regarde la seconde moitié du XIXème siècle, les grandes puissances (France, RU, All) vont
tenter de réduire leurs tarifs multilatéralement mais cela échoue. On a finalement l’accord
commercial Franco-Britannique bilatéral de 1860. On observe que cet accord commercial de 1860 a
un effet domino car les britanniques accordent la clause de la nation la plus favorisée, on a donc une
multiplication des accords bilatéraux : 46 pays pour le RU, 30 pays pour l’All, 20 pays pour la France

C’est donc le bilatéralisme qui a permis le développement du commerce international.

 Si on regarde le 20ème siècle on dit que le multilatéralisme a permis de développer le


commerce, avec le 19ème siècle c’est le bilatéralisme (donc le régionalisme).

On ne sait donc pas réellement aujourd’hui si le régionalisme amène ou non au multilatéralisme.

III) Comment se constituent les zones d’intégration régionales ?


Dans le cadre de l’UE on a eu des vagues d’élargissements (1973, …), les plus importantes étant celles
de l’Europe de l’Est (+10 en 2004).

D’un point de vue juridique, pour frapper à la porte de l’UE il faut valider les critères de
Copenhague :

 Critère politique (Etat de droit, démocratie, …)


 Critère économique (Economie de marché, capacité à faire face à la pression concurrentielle
de l’Europe)
 Critère de l’acquis communautaire (Le pays doit souscrire aux objectifs de l’UE et assurer
l’ensemble des obligations de l’UE, y compris la monnaie unique).

Dans ce dernier critère les Britanniques ont eu une exemption au sujet de la monnaie. Normalement
un pays qui entre dans l’UE doit accepter de passer un jour ou l’autre à l’euro.

Si on va sur le site de l’UE on a 5 candidats dits « officiels » à l’entrée de l’UE : Albanie, Macédoine du
Nord, Monténégro, Serbie, Turquie. On a aussi 2 candidats dont le dépôt de candidature n’a pas
encore été accepté : Kosovo, Bosnie-Herzégovine.

Qu’est-ce qui explique ces vagues d’élargissement successives  ?

Historiquement dans les années 60 on avait 2 structures concurrentes en Europe : la CEE et


L’Association Européenne de Libre-Echange qui est encore aujourd’hui une association de libre-
échange tournée vers les Britanniques.

La CEE l’a emporté et on observe un effet domino : lorsque des pays rentrent dans l’UE, l’UE devient
plus attractive pour les pays en dehors.

22
Explication économique :

On peut expliquer économiquement cela par un problème de compétitivité relative. Les firmes qui
appartiennent à des pays non-membres de l’UE sont désavantagées par rapport aux firmes des pays
de l’UE car elles sont soumises aux droits de douane et à des normes réglementaires parfois
pénalisantes. Ces firmes vont donc avoir des activités de lobbying envers les responsables politiques
pour rentrer dans l’union.

Le meilleur exemple est le Royaume-Uni : le pays était politiquement opposé à rentrer dans l’UE mais
le secteur économique britannique a fait une forte pression sur le gouvernement.

2ème explication : le modèle moyeu-rayon

Dans ce modèle, au centre du dispositif on a l’UE, qui passe des accords de partenariats privilégiés
avec un certain nombre de pays proches ou lointains : Europe centrale, … aujourd’hui avec les pays
d’Afrique du Nord (pacte de Barcelone). Ces accords peuvent souvent supprimer les droits de
douane.

Pourquoi ces pays avec des accords privilégiés ne s’en contentent pas  ?

Pays
1

UE
Pays
2

Si on est une firme et qu’on doit choisir notre localisation : on va préférer se localiser au centre
(moyeu : UE) que dans la périphérie (Pays 1 ou 2). En effet si une firme est localisée dans P1 elle aura
accès à l’UE mais pas à P2. Par contre un pays du centre a accès aux marchés P1 ET P2.

 La périphérie est désavantagée en termes de localisation des IDE

Ces accords moyeu-rayon sont toujours perçus comme un pis-aller pour les pays de la périphérie.

Il faudra tenir compte des avantages politiques : Gruber explique que les unions douanières sont des
biens de clubs : dans la communauté le même service est rendu à tout le monde mais on peut
exclure les pays qui n’ont pas payé leur droit d’entrée. Les services donnés par le club européen sont
le grand marché, les avantages de la monnaie unique, la stabilité politique et la qualité des
institutions, … L’UE produit un bien collectif : il a des effets d’exclusions et peut être désirable pour
les pays extérieurs : bien de club.

23
Cet effet domino a été remarqué en Europe mais pas que, il s’explique par :

 Compétitivité relative
 Accords moyeux-rayons

IV) L’économie politique de l’intégration régionale


commerciale
A) La demande et l’offre de protection commerciale : analyse théorique
On va se demander si le degré de protectionnisme de l’UE est plus élevé ou plus faible que le degré
de protection qui existerait au sein des états-nations : créer une union augmente-t-il le
protectionnisme ?

On se demande si le fait de passer d’une politique commerciale nationale à une politique de l’union
augmente ou diminue la protection ?

La protection commerciale résulte d’une interaction entre une demande de protection et une offre
de protection.

Demande de protection
La théorie économique nous conduit à penser que la demande de protection aurait tendance à être
plus faible que celle qui pourrait se manifester au niveau de chaque Etat. Pour cela il faut mettre ne
évidence 2 mécanismes :

 Dilution des préférences


 Passager clandestin

Dilution des préférences :

On sait que la demande de protectionnisme dépend de groupes de pressions : si les industriels de


l’acier veulent être protégés ils vont constituer des groupes de pression pour obtenir des mesures
commerciales favorables.

Au niveau des états nations la demande de protection va aussi se manifester par des groupes de
pression.

Dans l’UE on a ça aussi : il y a des activités de lobbying publiques, légales, on a des sociétés de
services qui vont voir les européens pour obtenir des mesures.

Le problème est que les industriels européens appartiennent à 27 états, ils peuvent voir des intérêts
divergents ce qui rend plus compliquée la constitution d’un groupe de pression.

 Au sein d’une union la coopération entre les industriels pour obtenir de la protection va être
difficile car leurs intérêts sont divergents.

24
Quand on a une divergence dans les intérêts on a une dilution des préférences qui peut rendre
moins actives (sans les supprimer) les activités des groupes de pressions au niveau communautaire.

Passager clandestin :

La théorie du passager clandestin dit que la protection est un bien public : si on a une mesure
protectionniste instaurée, elle va bénéficier à tous les industriels du secteur, y compris ceux qui n’ont
rien demandé et n’ont consacré aucune ressource. Ils ne vont rien faire car ils savent que si la mesure
est obtenue ils en bénéficieront forcément, gratuitement.

L’économiste Olson a appelé cela le coût de l’action collective : dans une collectivité si un individu
agit au nom de la communauté, il va en tirer des bénéfices mais aussi supporter des coûts, à côté des
passagers clandestins vont obtenir des bénéfices sans coût.

Or plus la communauté est grande, plus on a de passagers clandestins, plus la coopération est difficile
car tout le monde joue le passager clandestin.

Dans l’UE chaque groupe de pression national va avoir un comportement de passager clandestin, il
n’y aura pas de lobbying, pas de mise en place de protection.

Cependant il y a un troisième argument en sens inverse :

Si les activités de lobbying étaient caractérisées par des économies d’échelle, la taille de la
communauté pourrait accroître les activités de lobbying. Mais il n’est pas certains qu’elles soient
importantes en matière de lobbying.

 Les 2 premiers arguments l’emportent sur le troisième dans la théorie économique.

 La demande de protection est moins présente au niveau communautaire que national à cause
de la dilution des préférences et du passager clandestin.

Offre de protection
De ce côté les choses sont différentes et on peut penser que l’offre de protection serait plus élevée
au sein de l’union que dans les états, il y a 2 arguments :

 Effet de taille
 L’échange de soutiens

Effet de taille :

Quand on adopte une mesure protectionniste, les partenaires commerciaux ne vont pas rester sans
réagir. Si on est un petit pays l’adoption d’une mesure protectionniste va être coûteuse car on va

25
subir des représailles. Cependant si on est une union de grande taille ces représailles seront
modérées car les partenaires commerciaux auront peur de rentrer dans une guerre commerciale.

Il est plus facile d’appliquer des mesures protectionnistes au sein d’une communauté. Il y a quelques
années certains avaient peur aux USA qu’on ait une forteresse européenne très protectionniste.

Echange de soutien : Log Rolling

Cet argument a une portée plus générale et peut s’appliquer à de nombreuses situations.

La théorie économique nous dit que les mesures de protections commerciales sont coûteuses pour la
société : les coûts l’emportent sur les bénéfices au niveau de la société. Dans ce cas pourquoi sont-
elles parfois adoptées alors qu’elles vont à l’encontre du principe de Kaldor Hicks qui nous dit
qu’une mesure est adoptée si les gagnants sont capables de dédommager les perdants tout en
gardant quelques choses pour eux.

Les économistes ont donc essayé d’expliquer pourquoi les mesures protectionnistes ont pu être
adoptées alors qu’elles sont coûteuses pour la société.

Ce qui permet l’adoption de mesures protectionnistes c’est que les coûts de la mesure
protectionniste vont être répartis sur un grand nombre d’agents alors que les gains vont être
concentrés sur un nombre restreint d’agents.

Donc finalement les pertes subies par chaque agent sont faibles.

Reprenons l’exemple de l’acier : les perdants sont les consommateurs d’acier, extrêmement
nombreux, pour chacun la perte sera faible. les gains seront concentrés sur les quelques producteurs
d’acier. Cette asymétrie sur la concentration des pertes fait que les perdants vont laisser faire : à quoi
bon me battre pour contester une hausse de quelques centimes, les consommateurs considèrent que
le jeu n’en vaut pas la chandelle.

 L’asymétrie dans la répartition entre gains et pertes peut favoriser les mesures protectionnistes.

De même au sein de l’UE, si des Etats perdent peu, ils ne vont pas se mobiliser car le jeu n’en veut
pas la chandelle.

Imaginons une collectivité contenant 10 Etats, l’adoption de la mesure protectionniste engendre un


gain de 8. On suppose qu’en parallèle elle coûte 9 à cette communauté. Le critère de Kaldor Hicks dit
qu’on ne devrait pas l’adopter. Mais imaginons que dans cette communauté un Etat concentre
l’intégralité des gains. Pour tous les autres états le coût est de 1.

Etat 1 : +8

Etat 2 : -1

Etat 3 : -1

Etat 10 : - 1

26
Avec le critère de Kaldor Hicks fait qu’on refuserait, dans une communauté on ne veut pas bloquer
les discussions politiques, on va donc adopter une règle de décision majoritaire.

 Règle de décision à majorité simple : Adopté si 6 Etats acceptent la mesure.

C’est possible : l’Etat 1 doit convaincre 5 Etats de voter pour : il va leur donner 1 à chacun, il lui
restera 3. C’est l’échange de soutien.

On pourrait croire à un achat de voix (interdit), ici on a plutôt un échange de soutien : si tu votes pour
moi ici, alors la prochaine fois je soutiendra ta position. Il y a une logique dynamique.

On peut bloquer le log rolling avec la majorité qualifiée : on dit qu’il faut x voix. Plus le seuil est élevé
plus il est difficile de faire du log-rolling. Pour qu’il ne soit plus possible il faut un seuil élevé pour que
le pays 1 ne puisse pas négocier.

 Règle de majorité qualifiée

 La présence de log rolling est favorable au protectionnisme.

Le log rolling n’est pas nouveau, aux USA quand les Etats ont demandé au pays de l’argent pour
construire une autoroute, les Etats non concernés ont voté en faveur des autoroutes quand les
autres états ont promis une aide sur les autres autoroutes

Il faut donc une décision à la majorité, pas à l’unanimité.

 L’Union pourrait avoir une offre de protection plus importante que les Etats-nations.

 Dans la réalité, les arguments de baisse demande l’ont emporté sur la hausse l’offre, on
considère souvent que l’UE n’est pas assez protectrice.

Le protectionnisme en Europe n’a pas augmenté avec la création de l’UE.

II) La politique commerciale de l’UE


La politique commerciale est une « compétence exclusive de l’Union3 », c’est l’union (pas les Etats)
qui a le pouvoir de légiférer sur la politique commerciale avec deux législateurs :

 Le conseil européen
 Le parlement européen
3
VS partagées entre l’union et les pays

27
On considère que 36 M d’emplois européens dépendent des exportations.

L’UE est aussi le premier investisseur mondial (52% des IDE sortants, 38% des IDE entrants).

Dans l’UE la politique commerciale a 3 volets :

 Les accords commerciaux avec le reste du monde


 Règlementation commerciale
 Négociation au sein de l’OMC

Accords commerciaux avec le reste du monde


Ces accords sont classés en 3 catégories :

 Accords de partenariat économique avec les pays en développement

Ils lient l’Union avec les pays d’Afrique, des Caraïbes, du Pacifique (Pays ACP). Ils résultent de l’accord
de Cotonou signé en 2000.

C’est un élément fondamental de l’Union

Le Système de Préférences Généralisées

Il vise à réduire les droits de douane, voire à les supprimer sur les produits issus de pays en
développement pour leur favoriser l’entrée au marché de l’UE.

Ce système a connu plusieurs étapes, la 3 ème et dernière est l’initiative TSA : Tout Sauf les Armes. Elle
garantit à 48 pays les moins avancés de pouvoir exporter vers le marché de l’UE toutes leurs
marchandises sans droit de douane ni quota, à l’exception des armes.

Ce système est un dispositif asymétrique, ce n’est pas parce que l’UE accepte cela qu’elle demande la
même chose à ces pays, c’est un outil de développement international.

 Accords de libre-échange avec les pays développés :

Ce sont des accords plus compliqués à construire qui font souvent l’objet de polémiques, on se
préoccupe de plus en plus des impacts environnementaux.

On a par exemple l’accord commercial avec le Canada (CETA) rentré en vigueur provisoirement en
2017 et qui doit encore être ratifié par les Etats membres.

Il existe aussi des accords avec le MERCOSUR (Marché Commun d’Amérique Latine), mais les
préoccupations des européens sont relativement vives.

On a depuis 2013 des discussions autour d’un accord avec la Chine.

Il existe le Partenariat Transatlantique de Commerce et d’Investissement, un accord avec les USA


dont les négociations sont plus ou moins au point mort sur la qualité des biens et les questions
juridiques.

28
 Accords d’association à contenu politique important :

Le plus bel exemple est l’Union pour la Méditerranée, pour des raisons exogènes cette union est en
difficulté à cause de la politique.

Si on met de côté les accords avec les pays en développement, ces accords ont des difficultés.

Règlementation commerciale
Elle vise à protéger les producteurs européens contre la concurrence déloyale, notamment contre les
importations qualifiées injustement de bon marché. Par exemple une importation dont la production
viole les règles du travail, la protection l’environnement.

L’UE peut instaurer des droits anti-dumping. Mais l’UE est membre de l’OMC qui a pour but d’éviter
les conflits commerciaux. L’instauration de lois anti-dumping peut déboucher sur des conflits réglés
par l’OMC.

Depuis sa création en 1995, l’UE a été impliquée dans 180 cas de litiges commerciaux : 97 fois
comme plaignant, 83 comme accusé.

Négociation au sein de l’OMC


Au sein de l’OMC, c’est l’UE (à travers la Commission Européenne) qui négocie au nom des Etats
membres et qui participe au cycle de négociation (Rounds), aujourd’hui le cycle de Doha (2001) qui
est bloqué car on n’arrive pas à s’accorder sur des domaines, notamment les services et l’agriculture.

L’UE est un défenseur du multilatéralisme, face à ce blocage elle tente des accords bilatéraux mais là
aussi c’est compliqué.

III) Le Brexit
Le Brexit a une dimension politique importante. Depuis le référendum et le départ effectif des
Britanniques on a eu énormément de travaux économiques montrant que pour le Royaume-Uni le
coût du Brexit sera supérieur aux gains. On a un coût économique du Brexit.

Le principal argument est en termes de création et détournement de trafic. A partir du moment où


les Britanniques sortent de l’Union (surtout si Brexit sans accord), ils renoncent au marché unique.

29
Sans accord ils seraient donc soumis aux règles de l’OMC, la perte en détournement de trafic est
massive. Bien sûre elle pourrait être un peu compensée par la signature d’accords avec les pays en
dehors de l’UE (USA, Chine, …) avec de la création de trafic.

Mais même si les Britanniques réussissaient à signer ces accords, la création de trafic sera inférieure
au détournement de trafic à cause de la distance géographique. Aucun économiste ne peut
prétendre que la distance pourra être compensée.

Les Britanniques recherchent d’autres avantages au Brexit, ils vont pouvoir se libérer de la
règlementation européenne considérée comme excessive, mais cela est difficile à mesurer, on ne
peut que mesurer la perte qu’en termes de commerce.

De plus il va falloir mettre en place des contrôles douaniers qui ralentissent le commerce.

Certes l’UE perd aussi mais les Britanniques perdent encore plus, leurs exportations dépendent plus
de l’UE que l’inverse.

D’un point de vue économique on ne peut pas montrer des bénéfices au Brexit. Se rajoutent des
effets sectoriels comme les médicaments, les produits alimentaires dont les prix pourraient
augmenter.

Même si on avait des gains avec la baisse de règles on ne sait pas les mesurer pour l’instant. De plus
si le R-U voulait marchander avec l’UE, il faudrait se plier à ses règles, sans plus n’avoir son mot à
dire.

30
Section 2 : Le marché intérieur
I) L’analyse économique du principe de libre circulation
A) Les effets économiques de renforcement de l’intégration
Les avantages économiques de ce grand marché intérieur sont évoqués depuis les années 90 :

 Exploitation des économies d’échelles internes et externes


 Réduction des coûts de transaction
 Diversification des produits
 Intensification de la concurrence
 Argument de lissage des chocs propres (chocs idiosyncratiques)

Un choc propre affecte une région sans affecter les autres régions, à l’opposé de choc commun.

Sur un marché autarcique : Imaginons un choc qui génère une baisse brutale de la production, si les
marchés ne sont pas intégrés, reliés les uns aux autres, on va observer que si la production chute
dans une région on va avoir une flambée des prix extrêmement défavorable aux consommateurs.

Cela est extrêmement vraie sur l’alimentaire qui peut être due aux chocs environnementaux.

Sur des marchés intégrés : on va observer une manifestation de la loi du prix unique : le prix sur un
marché i est égal au prix du marché j , à différence du coût de transaction k .

Si on a un marché i et un marché j :

|pi− p j|≤ k ij
La loi du prix unique nous dit que :

pi= p j +k ij

Cette égalisation résulte de la condition d’arbitrage spatiale : les commerçants achètent à l’endroit
où les prix sont les moins chers pour vendre à un endroit où les prix sont les plus chers, cela fait que
les prix entre les deux régions ne peuvent pas différer plus que les coûts de transactions.

Si pi est le prix dans le marché importateur et que p j est le prix dans le marché exportateur. Cela
veut dire que pi > p j . A force on va avoir une égalisation des prix à l’exception du coût de transaction.

En finance les coûts de transaction sont faibles, les prix sont vraiment égaux.

Prenons un exemple : une sécheresse baisse la production de céréales dans une région, les prix
augmentent. En marché autarcique les ménages vont subir l’inflation ce qui va provoquer des

31
tensions. Si le marché est relié aux autres régions, on va importer des céréales d’une autre région
pour éviter cette inflation.

 L’intégration lisse les prix en lissant les chocs propres.

Donc plus le marché intérieur à l’union est large, moins les chocs propres auront des conséquences.

Dans l’UE ce qui a rendu le marché commun possible est l’élimination des barrières physiques à
l’échange avec l’abolition des contrôles aux frontières des Etats membres mais aussi l’harmonisation
des normes de production et de distribution.

Par exemple il existe 1150 directives qui gèrent le marché commun et 2953 règlements.

On pourrait dire que le marché unique européen est une réussite : entre le milieu des années 80 et le
milieu des années 2000 on a une augmentation du marché européen. Si on regarde la dispersion des
prix finaux à la consommation, en 1991 elle était de 20%, au milieu des années 2000 elle est de 13%.

 La dispersion des prix en Europe a diminué.

On voit aussi que les IDE qui restent en Europe ont augmenté sur cette même période.

Cela dit, beaucoup d’observateurs pensent que l’intégration à l’UE connaît des difficultés depuis la
crise de 2007-2008. Certaines études montrent :

 Qu’on a de nouveau une divergence des prix en Europe


 Si le marché unique des biens est achevé ou quasiment, il n’en est pas de même pour le
marché des services. Le marché des biens représente 75% du commerce intra-européen.
Mais il est achevé, les progrès apparaissent sur les services.
 En termes de PIB le commerce de biens manufacturés entre les Etats seraient deux fois
moins important que celui qui existe au sein des Etats américains. Cela parait paradoxal : la
zone géographique européenne est moins importante et plus concentrée.
 Les acheteurs européens (consommateurs, industriels) se fournissent 4 fois plus auprès de
vendeurs nationaux que de vendeurs étrangers à distance équivalent.
 Les écarts de prix pour des produits similaires restent plus important en Europe qu’aux Etats-
Unis. Au lendemain de la crise de 2007 on a observé une tendance à l’accroissement de cet
écart de prix.

Cela est dû à des barrières persistantes : langues, technique. Mais on pense aussi que cela s’explique
par le manque de déploiement européen des PME : elles n’opèrent pas assez souvent sur un
commerce transnational.

Un autre facteur d’intégration inachevée serait une productivité du travail plus faible qu’aux USA.
En 2015 la productivité du travail se situait à 70% de celle des USA.

Ce résultat est vu comme une conséquence de cette intégration inachevée. Les européens en sont
conscients et ont lancé au début des années 2000 la stratégie de Lisbonne pour achever
l’intégration. En 2010 elle fût remplacée par l’agenda 2020 où il est indiqué que la relance du marché

32
unique est un élément décisif pour générer des gains de compétitivité et rattraper le retard en
termes de productivité du travail sur les USA.

II) Les dysfonctionnements du marché intérieur : la question de la


transposition nationale imparfaite des règles du marché intérieur
On a une production de normes au niveau européens, on distingue 2 types de textes :

 Règlements
 Directives

La différence majeure est que le règlement substitut le droit européen au droit national, il a un
pouvoir normatif complet. Une fois qu’un règlement est édité (conseil ou parlement) il se substitut
directement.

La directive n’a pas un effet direct sur la règlementation nationale mais elle doit être transposée
dans les droits nationaux. Une fois qu’une directive est éditée les autorités nationales ont le choix de
la forme et des instruments à mettre en œuvre.

30% de l’acquis communautaire est sous forme de directive, il faut donc les transposer. Mais le
problème est qu’on a des retards dans la transposition des directives. Par exemple 10 ans après le
traité de Maastricht, plus de 27% des directives n’avaient pas été transposées dans les législations
des Etats-membres, ils peuvent être dus à des problèmes techniques mais surtout à de la mauvaise
volonté des Etats-Nations.

En plus des retards, même quand elles sont transposées on a parfois des mauvaises transpositions.

 Les retards et les mauvaises transpositions peuvent expliquer l’inachèvement du marché


intérieur.

III) Les défaillances du marché intérieur : biens, services, facteurs de


production
Le marché unique des biens
On a vu que le marché unique des biens est sans doute le plus achevé. Cependant on rencontre
encore des problèmes récurrents qui sont dû à la persistance de barrières linguistiques, techniques,
fiscales, juridiques.

Les barrières linguistiques sont évidentes.

Barrières techniques : Les consommateurs sont protégés par des normes techniques portant sur les
produits, ces contraintes ont essentiellement pour objectif la protection. Mais parfois elles sont
détournées sous forme de protectionnisme déguisé.

33
En Europe le principe fondateur est le principe de de la reconnaissance mutuelle : un produit
légalement commercialisé dans un état-membre doit pouvoir être commercialisé dans n’importe
quel autre état-membre même lorsque ce produit ne satisfait pas totalement aux règles techniques
de l’état-membre de destination.

Si un produit fabriqué en France aux normes françaises, il doit pouvoir être vendu en Allemagne
même s’il n’y satisfait pas les règles, on fait confiance aux pays.

Cependant ce principe ne règlemente pas l’ensemble des produits mis sur le marché : on a des
catégories de biens « qui touchent les exigences impératives d’intérêt général ». Il s’agit de biens
concernant la sécurité publique, la santé, la préservation de l’environnement, plus généralement la
protection des consommateurs nationaux. Ces produits particuliers sont appelés produits SHEC
(Safety, Health, Environnement, Consummer protection).

Pour ces produits on a deux situations possibles :

 Les normes sont (quasi)-équivalentes entre les Etats-membres : la reconnaissance mutuelle


s’applique
 Les normes sont non-équivalentes : on applique le principe de l’harmonisation. Si des Etats
sont plus sévères, les normes doivent être harmoniser à l’échelle européenne pour avoir des
standards européens. Mais si cette harmonisation n’est pas possible à cause de non-accord
alors on applique les standards nationaux.

30%
Reconnaissancee
Produits non SHEC
mutuelle

50%
Marché des biens Normes Reconnaissance
équivalents mutuelle

Produits SHEC
Standards 30%
Harmonisation
européens
Normes non-
équivalentes
Pas
Standars nationaux
d'harmonisation

On estime que 20% des biens tombent sous reconnaissance mutuelle et 50% sous harmonisation.
30% des biens répondent donc aux standards nationaux.

Ces produits ne débouchant pas à une harmonisation génèrent des obstacles au commerce, on a
donc pas totalement achevé l’intégration du marché des biens.

 L’intégration du marché des biens n’est pas totalement achevée.

34
Barrières fiscales :

Cela peut paraître surprenant puisque les droits de douane et quotas ont disparu dès 1968. Les
barrières fiscales proviennent de la TVA.

La TVA reste une prérogative souveraine des Etats-membres, elle représente une source
substantielle de revenu qui augmente. Or, en Europe les taux de TVA nationaux de sont pas
harmonisés. Cela génère une distorsion de concurrence sur le marché des biens : l’absence d’un
taux de TVA unique sur le marché européen maintient un biais sur les prix proposés pour des
produits similaires. On parle de concurrence fiscale. Pour certains cela est une bonne chose car on
pénalise les Etats qui gèrent mal leurs finances et prélèvent trop d’impôt. Mais sur les marchés la
question est de savoir si les consommateurs sélectionnent le produit le plus compétitif ou le produit
le moins taxé.

Si les produits étaient parfaitement identiques en termes de qualité et de coût on serait en situation
de pure concurrence fiscale : les entreprises opérant sur le marché avec la TVA la plus basse serait
celle qui générerait la marge bénéficiaire la plus importante possible. Mais si les produits ne sont pas
parfaitement identiques : l’entreprise sélectionnée est-elle la plus performante ou celle qui bénéficie
du système fiscal le plus favorable ?

 La TVA instaure une distorsion à la concurrence sur le marché des biens en cas de produits non-
identiques.

Les Européens ont cherché à assurer un minimum de coordination : ils se sont mis d’accord sur un
taux standard de 15% : en deçà de ce minimum, pour les produits dits classiques, on ne peut pas
instaurer de TVA. Les européens sont aussi tombés d’accord sur un taux réduit minimal de 5% pour
les produits de première nécessité.

Le problème est que cette coordination est réduite par la multitude de dérogations instaurées dans
l’UE : on peut mettre des taux super-réduits sur certains produits, des taux 0% dans certains
circonstances, …

 La distorsion, ajoutée à la complexité législative en matière de taux de TVA créé un fardeau


administratif sur les entreprises

Barrières juridiques :

Il s’agit de la fragmentation du cadre juridique qui entoure les opérations commerciales


transfrontalières.

Le droit des contrats est loin d’être harmonisé en Europe : si on a un litige entre un acheteur et un
vendeur de pays différents, la question est de savoir quel sera le tribunal compétent : celui de
l’acheteur ou du vendeur ? les contrats devraient le prévoir, mais pas tout le temps, on a une
incertitude. Cela génère un surcoût sur les échanges transfrontaliers.

Or, 37% des litiges en Europe sont transfrontaliers.

35
Bien sur les européens tentent d’harmoniser le droit des consommateurs mais cette harmonisation
est loin d’être achevée.

Les Européens ont aussi multiplié les plateformes européennes de médiation : en cas de conflit on
essaye d’aller vers des règlements à l’amiable. Cela n’est pas toujours très efficace, les barrières
juridiques continuent à générer des coûts.

Le marché des services


L’idée est de dire que l’offre et la demande de marchandises dépend de la prestation d’un certain
nombre de services, le cas le plus simple étant le transport.

Si ces marchés de services sont inefficacement intégrés on a un problème sur le marché des services
mais aussi dans la libre circulation des biens.

Par exemple si on n’a pas d’harmonisation des normes techniques des systèmes ferroviaires en
France, on a des surcoûts dans le transport transfrontalier, ce qui pénalise la libre-circulation.

Il est important de préciser ce qu’est un service : bien immatériel ou intangible. Les services peuvent
se définir par 3 caractéristiques :

 Degré d’échangeabilité : un service est dit échangeable s’il est exposé à la concurrence
internationale ;
 Services réglementés : on a une intervention de l’Etat, par exemple il peut réglementer
l’accès à la profession ;
 Services en réseau VS Services horizontaux : On a des services qui s’appuient sur des
industries de réseau : sans réseau, pas de prestation possible : communication,
télécommunication, distribution (eau, gaz, électricité), diffusion (télévision). Ces services de
réseaux désignent communément des services publics. A l’opposé on a les services
horizontaux, ils n’ont pas besoin de réseau pour fonctionner.

Le marché unique des services est un objectif très important de la construction européenne, mais le
marché des services est beaucoup moins bien intégré que le marché des biens.

20% des activités de service sont le résultat d’échanges européens.

36
1) Les industries de réseau

Le problème principal se pose pour les services de réseaux : dans l’acte unique l’industrie de réseau
n’était pas inscrite et la libre-circulation de services ne concernait que les services horizontaux.
Mais la commission européenne a vite compris que les industries de réseau faisaient partie
intégrante des coûts de production des entreprises et donc que l’intégration des services de réseaux
étaient une priorité. Si on intègre ces marchés de services en réseaux on espère faire baisser le coût
des entreprises, leur permettre d’exploiter des économies d’échelle et donc avoir des gains
d’efficacité.

Le problème est que ces industries de réseaux présentent de fortes barrières à l’entrée,
principalement liées au contrôle étatique au lendemain de la WW2. En effet, ces industries de
réseaux qui fournissaient un service public ont été dans la plupart des pays européens nationalisées
après la seconde guerre mondiale. Ces industries de réseaux étaient des monopoles naturels :
distribuer de l’énergie (transports collectifs, communication, …) nécessitait des infrastructures aux
coûts fixes très élevés. L’investisseur doit donc avoir accès à l’ensemble de la demande de marché
pour pouvoir répartir les coûts fixes entre le plus grand nombre de consommateurs. La réponse fût
donc la nationalisation et le fait d’imposer à ces entreprises des politiques de tarification qui leur
permettaient de satisfaire leur rôle de service public : tout le monde doit avoir accès à ces services,
quel que soit le revenu ou la localisation. Ces nationalisations avaient d’autres motifs, par exemple la
sécurité nationale.

 Traditionnellement les industries de réseaux sont dirigées par l’Etat.

L’UE remet en cause cela, tout d’abord on a une demande potentielle plus importante : on peut
mettre en concurrence plusieurs opérateurs sans que les coûts fixes soient trop importants. De plus
on a aussi des progrès technologiques qui vont réduire les coûts fixes. La troisième raison est que la
commission européenne mettait en avant des plaintes contre les opérateurs historiques en
considérant qu’ils ne modernisaient pas leur réseau, maximisaient la rente pour une mauvaise
qualité : « il fallait secouer le géant endormi ».

Pour agir sur ces services de réseaux on fait des efforts en termes de :

 Libéralisation et ouverture à la concurrence de services de réseaux


 Amélioration de l’inter opérabilité du réseau
 Développer les infrastructures transfrontalières

Libéralisation et ouverture à la concurrence de services de réseaux :

Avant on avait une intégration verticale : le fournisseur du service était aussi le propriétaire du
réseau et le gestionnaire du réseau. La commission européenne va promouvoir des « opérations de
dégroupement ». On va séparer production, gestion du réseau, fourniture du service.

Le dégroupage a pour but d’offrir l’accès au réseau à d’éventuels concurrents.

Si le réseau reste contrôlé par l’opérateur historique il est illogique pour lui de mettre à disposition
son réseau. On a voulu mettre fin à l’accès au réseau détenu par l’opérateur historique, pour cela il

37
fallait remettre la gestion du réseau à une autorité indépendante des producteurs et fournisseurs de
services.

La séparation peut être :

 Séparation comptable : l’opérateur historique n’est pas dépossédé du réseau mais la


comptabilité lui est retirée et confiée à un gérant autonome qui éditera les règles d’accès et
d’utilisation du réseau.
 Séparation patrimoniale : on a exproprié le réseau/on l’a acheté au propriétaire historique.

Une fois le lien coupé il faut introduire la concurrence en organisant l’accès au réseau pour les
candidats potentiels ; deux systèmes coexistent :

 Système de licence : on octroi des droits en fonction de la solidité des dossiers des candidats
 Système d’enchère : l’accès au réseau est octroyé au plus offrant

Enfin, on doit créer un régulateur indépendant qui va obliger les prestataires de services qui utilisent
le réseau à assurer une offre universelle à un prix abordable : on impose une mission de service
public. Il doit aussi vérifier le comportement du gestionnaire du réseau (qui est généralement
unique, mais au R-U on a démantelé le réseau lui-même) : on vérifie qu’il n’est pas discriminant et
applique la concurrence entre utilisateurs.

On a donc 3 étapes :

 Découpage
 Sélection des utilisateurs
 Création d’une autorité indépendante

Ce fût le cas avec le transport aérien dès la fin des années 80, on considère que cette libéralisation
est achevée à la fin des années 1990.

Ensuite au début des années 90 on fait de même avec les télécommunications.

Ensuite la distribution

Puis finalement le transport ferroviaire depuis les années 2000.

Interopérabilité des réseaux :

Capacité des différents réseaux à communiquer entre eux. On veut qu’un opérateur puisse passer
facilement d’un réseau à l’autre.

Cette question est compliquée au niveau des télécommunications à cause du problème d’itinérance
transfrontalière/Roaming : on est Français, on doit payer cher pour utiliser le réseau mobile
Allemand. Aujourd’hui ces surfacturations ne sont plus possibles.

38
Développement des infrastructures de réseau transfrontalières :

Les européens ont consacré beaucoup d’argent à la connexion des infrastructures électriques
« autoroute de l’électricité », par exemple on connecte les parcs solaires du sud de l’Espagne et les
éoliennes de la mer du nord au centre de l’Europe. On parle du réseau trans-européen.

2) Les services horizontaux


Ces services horizontaux peuvent être de deux natures :

 Prestation temporaire/provisoire : on détache un prestataire à titre provisoire dans le pays


concerné. Par exemple on est Français, on va construire un immeuble en Allemagne, on
détache provisoirement des travailleurs français.
 Prestation de long terme : en matière de services d’assurance

La question du détachement provisoire 4 prestataire a fait grand bruit avec l’affaire « du plombier
polonais ». la question fondamentale est de déterminer quel est le droit applicable pour le détaché
provisoire : celui du principe d’origine du prestataire de la société ? celui du pays de destination ?

En 2004 on a la fameuse directive Bolkestein (nom du commissaire européen) qui concerne


l’ensemble des travailleurs détachés : environ 2 Millions en Europe soit 1% de l’emploi total
européen. La proposition établissait la reconnaissance mutuelle des services sur le principe du pays
d’origine. Autrement dit le droit social et le droit du travail étaient celui du pays d’origine du
travailleur détaché. L’idée est de dire que les législations nationales sont trop hétérogènes et qu’il
serait trop compliquer de les harmoniser.

Cette proposition a été contestée, en particulier de la part des syndicats européens au nom du
dumping social : on aurait inscrit que des travailleurs réalisant le même travail au même endroit
pouvaient être soumis à des lois différentes. On estime que 35% des travailleurs détachés travaillent
dans la construction et que 40% à 50% proviennent des Etats d’Europe de l’Est qui ont des dispositifs
de droit social et du travail inférieurs aux pays d’Europe de l’Ouest.

La directive a finalement été modifiée, on a bien reconnaissance mutuelle mais pas automatique
mais on a aussi des concessions qui aboutissent à un mélange entre pays d’origine et de destination.

L’union européenne a aussi tenter de pallier les mauvaises reconnaissances des diplômes : on a le
processus de Bologne qui met en place un espace européen de l’enseignement supérieur. On a une
harmonisation des diplômes nationaux qui passe par le système des ECTS.

Libre circulation des individus

4
(En cas de détachement permanent la question est moins sensible, il faut simplement de clarifier les
conditions entourant les conditions d’un prestataire de service)

39
La libre circulation des personnes est régie par les accords de Schengen de 1995 remis en cause par
la crise pandémique.

On a une question sensible liée à la migration en provenance des pays extérieurs à l’Europe. En
matière migratoire le dispositif principal est la fameuse directive de Dublin de 2013 : pour les
migrants qui demandent le droit d’asile, l’examen de la demande est délégué au premier pays qui l’a
accueilli. Si on rentre par la Grèce, les Français doivent expulser vers la Grèce qui doit gérer le droit
d’Asile. Le problème est que cette directive fait peser le poids migratoire européen sur la Grèce,
Malte et l’Italie.

Aujourd’hui on cherche à remplacer cette directive mais leurs autres pays européens ne sont pas
forcément d’accord pour supporter le poids migratoire.

 On a donc un marché des biens relativement bien intégré, un marché des services peu intégré,
et concernant les hommes on se demande si la crise pandémique ne va pas définitivement
fragiliser Schengen, et on s’intéresse aux questions migratoires.

IV) La politique de la concurrence en Eruope


A) Les bénéfices et les limites de la concurrence
Bénéfices
On attend un effet-prix qui provient de 2 cas :

 Réduction des inefficacités allocatives : les entreprises doivent réduire leurs inefficacités en
rapprochant le prix du coût de production
Réduction des inefficacités techniques : on se rapproche des possibilités de production.
 Effet de structure : les entreprises les plus efficaces perdurent sur le marché

Limites
La concurrence peut avoir des effets contre-productifs si elle entraîne la disparition de concurrents,
elle peut paradoxalement conduire à un marché moins concurrentiel.

Si l’effet sur les prix est connu, on n’en sait peu sur l’effet de la concurrence sur les innovations, 2
courants s’opposent :

40
 Pour certains la concurrence est nécessaire pour stimuler l’innovation
 Pour d’autres, pour innover il faut avoir des moyens financiers qui proviennent de marges
bénéficiaires. Il serait plus facile d’innover si on a des profits. Une concurrence excessive
réduirait les innovations.

La réponse est de dire que si les entreprises ont un bon projet, elles peuvent se financier grâce aux
marchés financiers, sinon les projets ne sont pas bons. Mais les marchés financiers sont imparfaits :
des petites entreprises innovantes peuvent avoir des difficultés à accéder aux marchés financiers et
au financement bancaire à cause d’asymétrie d’information.

 Le message qui se dégage est que la concurrence est un outil qui favorise la consommation.

II) La politique de la concurrence est-elle compatible avec une politique


industrielle ?
La politique industrielle est composée d’interventions verticales des pouvoirs publics dans le
développement d’entreprises à des fins d’objectifs économiques ou sociaux.

La politique de la concurrence est horizontale, on fixe des règles du jeu qui s’imposent à tous de la
même manière.

Il peut donc y avoir une dichotomie/opposition entre ces deux politiques.

Dans la politique européenne bien que la politique de la concurrence l’emporte sur la politique
industrielle, la concurrence n’est pas une fin en soi mais un moyen pour amener à l’innovation. La
question qui se pose est : est-ce que la politique industrielle peut être plus efficace de que la
concurrence pour atteindre des objectifs économiques et sociaux ? En règle générale les européens
considèrent que si on veut des entreprises compétitives à l’échelle internationale il ne faut pas leur
accorder des choses, si on les durcit grâce à la concurrence on les pousse à faire des efforts qui
seront bénéfiques pour elles une fois sur le marché international.

 La concurrence est un moyen pour une meilleure efficacité à l’international.

A l’inverse certains pensent que pour faire émerger des champions européens sur les marchés
internationaux il faut les subventionner.

A chaque décision (fusion, …) la commission européenne procède à une analyse coûts/bénéfices. Du


côté des coûts on a les conséquences anti-concurrentielles ; de l’autre côté on a les bénéfices
éventuels de l’opération en termes de gains d’efficacité économique. Elle se demande si les coûts
porteront préjudice aux consommateurs et si une partie équitable des gains ira au consommateur. Ce
principe d’analyse coûts/bénéfices est la règle de raison, elle est de plus en plus utilisée depuis les
années 2000.

Certains détracteurs disent que cette règle de raison n’est pas toujours utilisée, la commission
européenne n’appliquerait pas cette raison (= analyse coûts/bénéfices) mais se contenterait parfois
d’une règle per sé, on a dans ce cas une liste d’opérations interdites, par opposition à la règle de

41
raison, si on a une pratique dans la liste qui porte atteinte à la concurrence, elle est interdite, même
si elle procure un gain d’efficacité.

La commission reconnaît aussi des exemptions par catégories : même si le degré de la concurrence
est limité, on accepte.

 La commission se défend en disant qu’elle utilise la règle de raison, certains disent que ce n’est
pas toujours le cas.

Cependant il faut avoir en tête que la mesure des gains reste compliquée, on a des gains statiques et
dynamiques, or ces derniers s’inscrivent dans le long terme, par exemple l’innovation, il est donc
difficile de les mesurer.

III) La définition d’un marché concurrentiel ; pouvoir de marché ; position


dominante ; marché pertinent
On a deux manières de définir un marché concurrentiel :

 Approche traditionnelle néo-classique : On observe le nombre d’offreurs sur un marché. En


CPP on a atomicité : offreurs infinis et demandeurs infinis.

 Théorie des marchés contestables : Cette théorie date des années 80 et a été développée
par Baumol, Panzar, Willig. Dans cette théorie le critère important pour définir un marché
concurrentiel n’est pas le nombre d’offreurs présents sur un marché mais le nombre
d’offreurs potentiels. Autrement dit un marché contestable (= concurrentiel dans cette
théorie) est un marché sans barrière à l’entrée ou à la sortie. Même si on a peu
d’entreprises, elles peuvent être en situation concurrentielle si elles sont sous la menace de
l’entrée de nouvelles entreprises.
Dans cette théorie, paradoxalement, les barrières à l’entrée les plus importantes sont les
barrières à la sortie, si on veut rentrer peut-on sortir ?5

Dans la théorie des marchés contestables on des barrières techniques, financières, règlementaires.
Par exemple le cas de la location d’avion est une barrière technique, le non-accord d’un prêt est
financier.

En principe l’UE s’appuie dans une très large mesure sur la théorie des marchés contestables, elle
utilise la notion de concurrence praticable. Elle ne se base pas que sur la structure atomistique
(nombre de concurrent), elle la considère, mais elle considère aussi d’autres facteurs tels que les
barrières à l’entrée et à la sortie.

Pouvoir de marché
On dit qu’une entreprise détient un pouvoir de marché lorsque cette entreprise a la capacité
d’élever son prix de vente, et de l’écarter de ses coûts de production.
5
Par exemple sur le marché aérien, quand on achète des avions ils se déprécient. Si on veut quitter le marché
on doit les revendre mais on subit une décote. On a donc une barrière à la sortie qui constitue une barrière à
l’entrée. C’était un problème il y a 20 ans. Pour éviter cela on a vu apparaître des systèmes de location d’avion.

42
Autrement dit l’entreprise est donneuse de prix, elle peut les influencer, elle n’est pas simplement
preneuse de prix.

Position dominante
On dit que l’entreprise a une position dominante lorsque sa puissance économique lui permet de
faire obstacle à l’existence d’une concurrence effective.

C’est l’abus de position dominante qui va être condamnable.

Par exemple si une entreprise détient 70% de parts de marché on va la soupçonner d’être en position
dominante, avec 40% c’est peu probable. Mais la position dominante ne dépend pas de la part de
marché, elle dépend des conditions d’entrée dans le secteur pour les concurrents potentiels. Cela
renvoie à la théorie des marchés contestables.

La commission européenne, lorsqu’elle travaille sur la notion de position dominante, définit le


concept de marché pertinent.

Par exemple l’UE s’intéresse à un producteur de bananes, si on s’intéresse qu’au marché de la


banane on ne va pas considérer les effets de substitution entre les fruits. Donc quand on s’intéresse à
la part de marché d’une entreprise on considère le marché pertinent : il comprend tous les produits
considérés comme relativement substituables par les consommateurs en raison de leurs
caractéristiques, de leurs prix, de leur usage.

Pour cela l’UE va calculer les élasticités prix croisées : si le prix de la banane augmente, quel est
l’effet sur la consommation d’orange ? Si ces élasticités prix croisées sont suffisamment élevées, on
considère que le marché pertinent est celui de la banane et des oranges, voire des fruits.

Cela est vrai pour les produits, mais aussi pour les zones géographiques, la commission européenne
se demande si les consommateurs peuvent trouver des produits dans une zone géographique
accessible pour le consommateur. Cette notion de substituabilité doit donc prendre également en
compte les zones de marché éventuellement accessibles pour les consommateurs.

Pouvoir juridique et champ d’application du droit européen de la concurrence


Le droit européen de la concurrence ne s’applique qu’aux accords, pratiques, susceptibles d’affecter
le commerce entre états membres. Donc si on a une entente illicite entre les boulangers de
Clermont-Ferrand cela sera du ressort des autorités nationales. C’est le principe du guichet unique.

43
Le droit européen de la concurrence a un pouvoir extraterritorial, il ne concerne pas que des
entreprises européennes mais aussi des entreprises non-européennes. Tout simplement car des
pratiques non-européennes peuvent avoir un effet sur le marché intérieur, par exemple une entente
entre japonais.

Enfin, la commission européenne prend des décisions, des interdictions, retours en arrières,
amendes, … Mais les décisions de la commission peuvent être contestées devant des juges : cour de
justice de l’UE.

Nous allons passer en revue les différentes catégories de la commission européenne en matière
concurrentielle. On a des règlementations contre les pratiques anti-concurrentielles des
entreprises :

 Ententes
 Abus de position dominante.

Nous verrons ensuite les règlementations non pas sur les pratiques mais sur les structures :

 Opérations de concentration

Puis sur les Etats :

 Aides publiques

IV) La règlementation sur les ententes


Cette règlementation se trouve dans les traités européens : « sont incompatibles avec le marché
commun et interdits tout accord entre entreprises, toute décision d’association entre entreprises et
toute pratique concertée qui sont susceptibles d’affecter le commerce entre Etats-membres et qui ont
pour objet ou pour effet d’empêcher, de restreindre, ou de forcer le jeu de la concurrence à l’intérieur
du marché commun ».

Cet article nous dit donc que peu importe la forme juridique des ententes : accords (contrats ou
informel), association, … Toutes les ententes sont dans le viseur.

Les ententes peuvent être horizontales : fixation de prix, partage du marché, quantités de produits
mis sur le marché, pas d’investissement, …

Les ententes peuvent aussi être verticales : contrats d’exclusivité d’achat ou de distribution,
producteur qui impose des prix de revente minimaux aux distributeurs, protection géographique (on
interdit aux revendeurs de vendre aux clients hors de x zone).

On a cependant un régime d’exemption, on peut avoir des exemptions en bloc / par catégorie. Par
exemple, les accords entre entreprises qui permettent d’améliorer le progrès technique peuvent être
licites à condition que les consommateurs en bénéficient.

On peut aussi avoir des exemptions cas par cas : une entreprise qui veut une exemption doit
démontrer que les bénéfices retirés de l’entente soient supérieurs aux coûts ET que les bénéfices

44
vont bénéficier aux consommateurs. Il ne faut pas non plus que la concurrence soit totalement
éliminée et (très difficile) il faut démontrer que la restriction à la concurrence est indispensable et
qu’il n’y a pas d’autre moyen d’atteindre l’efficacité.

Si ces exemptions ne sont pas accordées on a des amendes.

V) La règlementation européenne sur les abus de position dominante


On dit dans les traités que «  Est incompatible avec le marché commun et interdit, dans la mesure où
le commerce entre états-membres est susceptible d’en être affecté, le fait pour une ou plusieurs
entreprises d’exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché commun ou sur une
partie substantielle de celui-ci.  »

On a vu comment calculer une position dominante (part de marché et barrières). On raisonne en


termes de marché pertinent.

Les abus peuvent concerner les entreprises seules ou en groupe. On remarque ici que ce qui est
sanctionné ici n’est pas la position dominante mais bien l’abus de celle-ci. L’UE parle de pratiques
abusives :

 Pratiques tarifaires déloyales (prix imposés non justifiés)


 Prix prédateurs (vente à perte pour éliminer la concurrence)
 Discrimination par les prix (tarifs différents selon la nationalité = 3 ème degrés)
 Rabais de fidélité (dans certains cas)
 Pratiques commerciales déloyales (imposer des clauses qui n’ont rien à voir avec la
transaction principale)
 …

VI) La règlementation européenne sur les opérations de concentration


On a des formes variées : fusions, absorptions, …

Ici ce n’est pas dans les traités mais dans des règlements. Pendant très longtemps les européens
n’ont pas eu d’instruments sur les opérations de concentration car chacun des Etats-membres voulait
encourager ses champions nationaux.

L’UE pouvait donc s’intéresser aux pratiques mais pas aux structures (concentration = fusion).

Règlement (2004) «  Les opérations de concentration de dimension communautaire qui, créent ou


renforcent une position, ayant comme conséquences qu’une concurrence effective dans le marché
commun ou une partie substantielle de celui-ci est entravée de manière significative, doivent être
déclarées incompatibles avec le marché commun  ».

Ne sont visées que les organisations de taille européenne (critère de chiffre d’affaire), le reste allant
aux états-nations.

45
Les pouvoirs de la commission en matière de concentration sont très importants : une opération de
concentration de dimension communautaire ne peut avoir lieu avant la notification à la
commission : c’est un contrôle ex-ante, on doit notifier à la commission l’intention de faire une
opération de concentration. De là l’UE donne son feu vert ou une acceptation sous condition ou un
refus.

La concurrence effective est jugée sur une base multicritère : on va regarder la part de marché de la
nouvelle entité (cf néo-classique), si elle est inférieure à 25% on accepte. Si on dépasse 25% on va
examiner le niveau des barrières à l’entrée sur le marché, on va se demander si l’opération de
concentration affecte les barrières à l’entrée.

On va aussi regarder le pouvoir de marché des acheteurs (si on a que quelques entreprises
acheteuses elles sont capables de résister aux pratiques non-concurrentielles de la fusion).

On va aussi se demander si la nouvelle structure est viable : peut-elle réaliser des économies
d’échelles sur le marché de référence ? Donc le volume de demande est-il suffisant pour réaliser ces
économies d’échelle ? Si oui cela peut être un argument favorable.

 On ne se contente pas que des critères néo-classiques de la concurrence

VII) Règlementation européenne sur les aides publiques


On est à nouveau sur le traité (valeur juridique la plus élevée) : «  Dans la mesure où elles affectent le
commerce entre états-membres, les aides accordées par les Etats ou au moyen de ressources d’Etats,
sous quelque forme que ce soit, qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant
certaines entreprises ou certaines productions, sont déclarées illégales  ».

D’abord, les formes de ces aides peuvent être variées :

 Subventions
 Réductions fiscales,
 Garanties de prêts,
 Avantages économiques (vente de terrain peu cher par l’Etat)
 …
 Cela est encore plus probable quand l’Etat est actionnaire de l’entreprise, il peut vouloir
recapitaliser l’entreprise, ce qui peut être considéré comme problématique.
 Planification fiscale agressive (= Ruling fiscaux. On est une entreprise multinationale et on
cherche où installer notre siège, dans ce cas on va voir l’administration fiscale des pays et on
demande à l’avance comment la situation va être traitée fiscalement. Le problème est que
ces transactions fiscales ex-ante résultent d’une négociation, elles peuvent être faites de
manière sélective, on va fausser la concurrence puisqu’en secret on va accorder des
avantages pour avoir une entreprise qui génère des emplois, qu’on n’accordera pas à
d’autres.) Le problème n’est pas l’avantage mais bien la discrimination.

Bien sûr si les aides d’Etats sont interdites il existe de nombreuses exemptions par catégories, par
exemple lorsque les aides ont pour objectif de favoriser l’investissement et l’emploi des PME, les
aides pour protéger l’environnement, pour favoriser l’entreprenariat des femmes, aides à la

46
recherche, aides à la formation, aides aux travailleurs défavorisés ou handicapés, favorisation
d’infrastructures transfrontalières, régions en difficultés, …

Il y a aussi des exemptions individuelles : aides en cas de catastrophes naturelles, culture et


préservation du patrimoine, …

 On considère que les aides peuvent porter atteinte à la concurrence mais on a de nombreuses
exemptions.

Le but étant donc d’interdire les aides avantageant commercialement des entreprises nationales par
rapport aux entreprises étrangères.

Chapitre 2 : L’intégration monétaire

47
On va s’intéresser aux questions qui portent sur l’optimalité de l’Union monétaire puis à la BCE. On
verra ensuite le fonctionnement de l’Union monétaire.

Section 1 : L’Union monétaire


I) L’optimalité de la zone euro
A) Les avantages et les coûts de la monnaie unique
Les avantages
Gains directs :

La monnaie unique génère un gain direct lié à l’élimination des coûts de transaction.

Gains indirects :

L’adoption d’une monnaie unique réduit la possibilité de discrimination des prix sur les marchés
nationaux. On a dit que ces pratiques étaient illicites mais elles existent. Avant avec les monnaies
différentes cela était très facile de discriminer en matière de prix. Mais à partir du moment où les
prix sont dans la même unité, les discriminations restent existantes mais sont plus compliquées.

Aussi, la monnaie unique fait disparaitre les taux de change bilatéraux qui étaient instables. Même
dans les régimes de change fixe car on avait des dévaluations. On perd en partie l’incertitude sur les
taux de change qui générait des inefficacités économiques notamment en termes d’investissement
(incertitude = on n’investit pas).

On a aussi un gain de crédibilité, renforcé par l’existence de la BCE. Cette crédibilité est utile car elle
rassure les marchés financiers. Avec le Covid on a des programmes de relance financés par des dettes
nationales et mutualisées. Si la crise avait eu lieu avec l’euro, l’augmentation spectaculaire de la
dette publique aurait entraîné une méfiance très importante des marchés financiers qui se serait
payée par une hausse des taux d’intérêt, les spreads de taux (écarts) se seraient envolés.

Les gains sont parfois mesurables, dans les modèles de gravité on montre que le fait de partager une
monnaie unique booste le commerce, mais elle a aussi des coûts.

Les coûts

48
Ces coûts apparaissent quand les pays subissent des chocs propres / chocs idiosyncratiques. Par
exemple considérons 2 pays : la France et l’Allemagne.

P
P
OF C OA

A
B

C DF DA
Y Y
FRANCE ALLEMAGNE

On pourrait avoir un choc de préférences qui fait qu’on aime d’un coup plus les produits allemands
dans le monde que les produits français, le choc est propre, spécifique, la demande mondiale de
produits français baisse et la demande de produits allemands augmente.

Le prix baisse en France, qui va générer une baisse de l’offre de même ampleur. Cette baisse de
l’offre étant donc d’ampleur mondiale, face à une baisse minime de produits français EN France. On a
donc une offre inférieure à la demande, on importe plus, on a un déficit de la balance courante. Pour
la production, elle diminue le chômage va augmenter, la France a donc un déficit des comptes
courants et du chômage.

En Allemagne on a un excédent de compte courant, une surchauffe de la machine économique donc


des tendances inflationnistes.

Il existe 2 mécanismes pour pallier cela :

 Flexibilité des salaires


 Mobilité du travail

Flexibilité des salaires :

En France vu qu’il y a plus de chômeurs les revendications salariales vont être revues à la baisse,
donc les coûts pour les entreprises diminuent, la courbe d’offre se déplace vers le Sud-Est.

En Allemagne c’est l’inverse, les salaires vont augmenter, la courbe d’offre se déplace en sens
inverse.

Les balances des paiements perdent leurs déficits, le chômage diminue.

49
Mais le mécanisme est grippé, la flexibilité des salaires est en fait limitée. il est difficile de la faire
accepter aux travailleurs même si elle a augmenté depuis 20 ans.

Mobilité du travail :

Les salaires ne bougent pas mais les travailleurs français vont quitter la France pour l’Allemagne. On
réduit les déficits de la balance puisque les français partent, ils ne génèrent plus un excès de
demande.

Dans la réalité cela est peu probable car on a des barrières, notamment linguistique. Même si elle a
progressé en Europe.

Si ces deux mécanismes ne fonctionnent pas ou peu, que faire ?

Lorsque les Etats disposaient de leur monnaie nationale on procédait à des réajustements de taux de
change, quand la change subissait une perte de compétitivité on dévaluait le franc français par
rapport au Deutschemark. La dévaluation rend les exportations compétitives, les importations
coûteuses, on essayait de rééquilibrer la balance des paiements. Donc, en zone euro on a plus cette
possibilité.

 La monnaie unique supprime l’outil du taux de change et nous laisse avec des mécanismes peu
efficaces.

Une des principales causes de l’adoption de la monnaie unique est le triangle d’incompatibilité de
Mundell : on ne peut pas avoir une situation avec mobilité des capitaux, taux de change fixe et
politique monétaire indépendante.

Donc si on ne veut pas remettre en cause la mobilité des capitaux au sein de l’union (favorisant) et si
on veut garder le taux change fixe favorable au commerce, alors on doit renoncer à la politique
monétaire indépendante.

 Cette théorie coûts/avantages de la monnaie unique est la théorie des zones monétaires
optimales de Mundell.

Un autre problème peut apparaître avec les chocs communs et que les pays réagissent
différemment. Par exemple un choc peut frapper tous les pays de la même manière mais tous les
pays n’ont pas forcément les mêmes moyens d’absorber le choc. On a des différences d’organisation
de la négociation sur le marché du travail : les négociations salariales sont parfois concentrées,
parfois non, parfois moyennement.

Le même choc ne va donc pas avoir le même effet sur les salaires car l’organisation des négociations
salariales n’est pas la même : on va dans certains accepter ou non des baisses de salaires.

50
Aussi, un problème est que les taux de croissance des pays sont différents les uns des autres : en
Europe de l’Ouest (occidentale) on a des taux plutôt faibles tandis qu’en Europe
Centrale/Occidentale on a des taux de croissance élevés. Plus le niveau de développement est élevé
plus les taux de croissance sont faibles.

Cette différence de taux de croissance renvoie à l’effet Balassa-Samuelson : plus les taux de
croissance sont élevés, plus les taux d’inflation seront également élevés. Donc plus le niveau de
développement est bas plus le niveau des prix est élevé. En effet quand un pays bénéficie de forte
croissance alors on a des gains de productivité très importants. Ces gains concernent essentiellement
le secteur des biens échangeables6 (=secteur où les prix sont formés sur le marché international). On
a donc une hausse des salaires. Mais dans le secteur des biens non-échangeables (par exemple
service à la personne) on n’a pas de gains de productivité, or si les salaires augmentent sur le secteur
des biens échangeables, alors ils augmentent partout, y compris sur le secteur des biens non-
échangeables, donc ce dernier augmente les prix. Donc la croissance s’accompagne d’inflation.

Ici, qui dit monnaie unique dit politique monétaire unique, mais conduire la politique monétaire si les
taux sont différents entre les pays est très difficile. L’efficacité de l’Union Monétaire est donc rendue
plus compliquée.

Une troisième différence est l’efficacité des systèmes fiscaux qui sont plus efficaces au nord qu’au
Sud. Il faut comprendre que la participation à l’union monétaire entraîne des contraintes quant aux
modes de financement des déficits budgétaires. On peut financer le déficit soit par l’endettement
soit par le seigneuriage (utilisé avant surtout) c’est-à-dire le financement monétaire du déficit. L’Etat
s’endette auprès de la Banque Centrale, donc la Banque Centrale crée de la monnaie (achète des
bons du trésor). (Origine du nom : les seigneurs avaient le monopole de la création monétaire qui
permettait d’introduire une différence entre la valeur faciale des monnaies et leur teneur en métaux
précieux). Aujourd’hui le seigneuriage va naturellement créer de l’inflation (Cf Théorie quantitative
de la monnaie) et cette inflation va éroder la dette publique.

Donc le seigneuriage génère 2 gains pour l’Etat : les recettes des bons du trésor, et la taxe/impôt
d’inflation qui érode la valeur réelle de la dette.

Cependant l’excès d’inflation génère des coûts d’inflation, pour autant il n’est pas inefficace d’avoir
un peu de seigneuriage. Dans les années 60 Phelps créée la théorie du seigneuriage optimale : l’idée
est de dire que le gouvernement, face à des dépenses publiques doit assurer un financement optimal
de ces dépenses publiques. Le gouvernement a différents revenus face à cela : l’impôt, l’endettement
auprès des ménages, le financement monétaire. Cette théorie dit que pour maximiser, il doit égaliser
les coûts marginaux attachés à une hausse des moyens de financement des dépenses publiques :
c mfiscalité =c mendettement =c mseigneuriage . Le gouvernement doit donc avoir recours à plusieurs modes
de financement, dont un peu de seigneuriage, à l’équilibre.

Or, dans les pays d’Europe du Sud les systèmes fiscaux sont inefficaces, la théorie dit qu’il est légitime
d’avoir d’avantage recours aux recettes de seigneuriage. Or, avec l’UE les recettes de seigneuriage
disparaissent pour chaque nation, si elles existent elles sont accaparées par la BCE.

Dans l’UM les pays aux systèmes fiscaux les plus inefficaces perdent en efficacité.

 On a 3 différences : négociations salariales, croissance, systèmes fiscaux.

6
Biens non-échangeables : les prix résultent de la confrontation de l’offre et de la demande intérieures.

51
II) La zone euro est-elle une zone monétaire optimale ?

C
X +M
A ¿ Y
M+ X
Sur les abscisses on a le commerce des pays européens entre eux, en % du PIB :
PIB
En rouge on a la courbe de bénéfices liés à la monnaie unique. Elle est croissante : plus les pays
européens échangent entre eux, plus les coûts de transaction sont élevés, plus le fait de les éliminer
par la monnaie unique est source de bénéfice. De plus, plus les pays sont ouverts, plus ils sont
exposés aux fluctuations des taux de change ce qui crée des incertitudes sur le système de prix ce qui
est couteux pour l’économie car les entreprises sont réticentes à l’investissement. Donc plus les pays
sont ouverts plus l’élimination du taux de change par la monnaie unique est bénéfique.

En vert on a les couts liés à la monnaie unique qui décroissent avec le taux d’ouverture de l’union.
Là aussi on a deux raisons, d’abord, plus le degré d’ouverture d’une économie est élevé, plus son
degré d’intégration avec le reste de l’union est élevé. Donc la probabilité de chocs idiosyncratiques
est faible or, ce sont ces chocs qui rendent coûteux l’UM. L’autre explication est que plus une
économie est ouverte, plus les manipulations de taux de change entraînent une variation dans le
système de prix, si on considère que ces variations sont coûteuses 7, dans ce cas-là, plus une
économie est ouverte, moins il est coûteux de renoncer à l’instrument de taux de change.
¿
Il existe donc un niveau d’ouverture A au-delà duquel l’adoption de la monnaie unique est source
de bénéfice, en-deça, les coûts sont supérieurs aux bénéfices. L’idée est donc que plus l’économie
est ouverte plus les pays ont intérêt à adopter la monnaie unique.

Or, on sait que l’ouverture est liée à la taille du pays, les petits pays sont structurellement plus
ouverts que les grands pays. Les pays du Benelux, l’Irlande, ont des taux d’ouverture plus élevés que
la France, l’Allemagne, l’Italie, …

7
La théorie des coûts de catalogues (menu costs) nous dit que quand une entreprise change fréquemment ses
prix elle doit renégocier ses contrats avec ses fournisseurs et clients, ce qui est coûteux.

52
 Les pays de l’UE n’ont pas tous la même structure d’ouverture. Certains pays bénéficient donc
de la monnaie unique tandis que d’autres sont perdants.

Marché du travail
Il faut comprendre que ces coûts et bénéfices vont être liés au marché du travail. On a dit que les 2
éléments qui rendaient moins coûteux la monnaie unique sont la flexibilité du salaire et la mobilité
du travail entre Etats européens.

C
X +M
A
¿' A ¿ Y
Autrement dit, plus on a de la flexibilité des salaires ou de la main d’œuvre mobile, plus la courbe de
coûts se déplace vers l’Ouest, le taux d’ouverture à partir duquel la monnaie unique devient
bénéfique, a tendance à diminuer. La probabilité que la monnaie unique génère un bénéfice net a
tendance à augmenter.

 Les réformes de flexibilité sur le marché du travail observées en Europe depuis une vingtaine
d’années (début en Allemagne) font s’accroître les bénéfices nets de la monnaie unique dans l’UE
car les coûts diminuent.

Flexibilité du travail et divergence des économies

Degrès de divergence
Frontière
UM

53
USA

U M6

Flexibilité du travail

En abscisses on a un indicateur de la flexibilité du marché du travail, en ordonnées on a le degré de


divergence des économies. Dire que les économies divergent c’est dire qu’elles ont plus de chance
d’être affectées par des chocs propres.

L’idée est de dire que ce qui peut compenser la divergence entre les économies, c’est la flexibilité
du marché du travail. Donc il existe une relation croissante entre divergence et flexibilité qui est une
frontière. La frontière dit de combien doit augmenter la flexibilité lorsque la divergence s’accroît
pour rester dans une zone monétaire optimale.

Au sud (sous) de cette frontière on est dans une zone monétaire optimale. Lorsque la divergence
s’accroît, elle est plus que compensée par les effets de la flexibilité.

Au-dessus de cette frontière, l’accroissement de la flexibilité n’a pas suffi à compenser la divergence.

Aux USA les Etats sont divergents : agricoles pour certains, … Mais le marché est très flexible. Donc
on peut les placer sur le graphique. Les USA sont une zone monétaire optimale.

En Europe le degré de flexibilité est moindre qu’aux USA même s’il a progressé. Si on était resté avec
l’UE à 6 on aurait peu de divergence, on serait au point U M 6. Mais l’élargissement, bien qu’il
conduise à un peu de flexibilité génère surtout de grosses divergences, on aurait donc non-optimalité
au sens de Mundell.

Acteur budgétaire
En Europe on a l’ambition de créer une union budgétaire, ce concept renvoie au fédéralisme
budgétaire. Ce fédéralisme a plusieurs dimensions, mais on peut dire qu’il s’agit de l’existence de
transferts budgétaires entre les Etats qui pourraient compenser des chocs idiosyncratiques.

Lorsqu’un état connaît un choc idiosyncratique qui lui est propre, il va avoir recours à de
l’endettement : une politique budgétaire contracyclique (baisse T hausse G). Autrement dit l’Etat fait
de la stabilisation inter-temporelle, pour stabiliser la dépense il s’endette et s’engage à rembourser
plus tard l’endettement/intérêt, l’Etat se comporte comme un ménage qui pour lisser sa
consommation s’endetterait en cas de baisse temporaire des revenus. L’Etat pratique donc du lissage
inter-temporelle.

Or, dans une UM une autre manière de gérer ce choc serait d’avoir recours à des transferts
budgétaires des autres pays de l’UE, c’est ce qu’on appelle de la stabilisation intra-etatique, si la
France connaît un ralentissement, on peut imaginer une relance budgétaire en provenance de l’UE

54
ou d’autres Etats pour limiter les chutes de dépenses. C’est un peu un mécanisme de co-assurance.
Un pays connaît des difficultés économiques temporaires qui lui sont spécifiques, alors il a recours à
des transferts en provenance des autres états européens. Ces mécanismes existent au sein des états
nations : solidarité nationale. Les Alpes-Maritimes vont recevoir des revenus d’autres départements
suite aux inondations.

Certains économistes proposent donc le même dispositif entre Etats européens. Pour qu’il
fonctionne il faut que les chocs soient spécifiques à chaque Etats (pas crise sanitaire donc) et que les
chocs soient temporaires8.

L’idée est de dire qu’on peut compenser une flexibilité insuffisante sur le marché du travail en
augmentant le fédéralisme budgétaire. On remplace la flexibilité insuffisante sur le marché du
travail par plus de fédéralisme budgétaire.

Fédéralisme budgétaire

ZMO

Frontière

Flexibilité du travail

On a une relation décroissante entre flexibilité du travail et fédéralisme budgétaire.

Au nord de la frontière on a une zone monétaire optimale : l’insuffisance de flexibilité est compensée
par un supplément d’union budgétaire.

Quand on a créé l’UE, face au manque de flexibilité on aurait pu créer du fédéralisme budgétaire. Or,
les européens ont lancé une monnaie unique avec des instruments budgétaires pas assez
développés, en France on a presque 50% du PIB en dépenses budgétaires contre moins de 1% en UE.
Mais le problème est que dans l’UE on a des Etats souverains.

 Le manque de flexibilité du travail exige un fédéralisme budgétaire pour avoir une zone
monétaire optimale.

8
S’ils sont permanents la réponse est un changement structurel de l’économie

55
Attention il faut bien avoir à l’esprit que cela fonctionne avec les chocs temporaires, avec les chocs
¿
permanents on a une frontière verticale, il faut atteindre un degré de flexibilité F pour avoir une
ZMO, autrement dit on ne peut pas compenser le manque de flebxilité par l’union budgétaire. Dans
la réalité on a bien des chocs temporaires.

¿ budgétaire
Frontière

Flexibilité du travail
F¿

III) Le dépassement de la théorie des zones monétaires optimales


On l’a vu, il est peu probable que l’UE soit une zone monétaire optimale. On s’est basé sur l’efficacité
au sens de Mundell.

En effet on a contesté la théorie des zones optimales en s’appuyant sur des travaux qui considèrent
que les critères d’optimalité ne sont pas exogènes mais endogènes.

La thèse de l’UE était de dire que la probabilité des chocs propres aurait tendance à diminuer avec
l’intégration commerciale, qui corrélerait de plus en plus les cycles économiques des différents pays.

Autrement dit, sur l’axe des abscisses on met l’ouverture du commerce intra-européen et en
ordonnées la divergence.

Divergence

56
X +M
Y

Pour la commission européenne, avec l’augmentation de l’ouverture commerciale (résultat de la


monnaie unique), les Etats européens vont se rapprocher économiquement les uns des autres, ce qui
limite les chocs propres.

La monnaie unique fait développer le commerce entre états européens, les économies se
rapprochent, donc le degré de divergence diminue.

Un autre argument est que l’UE devrait augmenter la flexibilité du travail.

Réduction des chocs propres


Ce premier argument est un point clé de la commission européenne mais cela était contesté.

Pour Krugman l’augmentation de l’ouverture allait bien créer une augmentation de la divergence.
Son idée est de dire que l’ouverture des économies s’accompagne d’un mécanisme d’exploitation
des économies d’échelle. La dynamique des économies d’échelle va conduire à plus de concentration
des activités économiques. L’idée de Krugman était de dire que la réduction des entraves
commerciales (= monnaie unique) allait avoir tendance à concentrer les activités de production, donc
à exploiter les avantages des économies d’échelle.

Cette concentration allait générer une divergence accrue entre les pays européens.

Supposons une frontière entre 2 pays : France, Allemagne avec 2 activités économiques : activité
rouge, activité bleue.

Avant l’UE on avait une activité de chaque dans chaque pays.

FR ALL FR ALL

57
Avec l’ouverture, les activités bleues se concentrent en Allemagne et les rouges en France, cela
s’accentue avec la baisse des coûts de transports. Les économies allemandes et françaises vont donc
être de plus en plus différentes, on a divergence.

On augmente donc la probabilité de chocs spécifiques à chaque pays, ce qui augmente les coûts de la
monnaie unique.

La réponse a été de dire que la monnaie unique allait faire diminuer les frontières politiques, on
peut donc imaginer une concentration des activités rouges et bleues des deux côtés de la frontière.

C’est bien le cas en Europe avec une concentration industrielle des Pays-Bas au nord de l’Italie.

FR ALL

 Si la concentration ne respecte pas les frontières politiques on n’a pas cette divergence.

IV) La Banque Centrale Européenne


On verra l’objectif de stabilité des prix, puis les instruments de politique monétaire conventionnels
puis la supervision bancaire.

La conséquence logique de l’Union Economique et Monétaire est la création d’une institution


supranationale : la Banque Centrale Européenne. Plus précisément on parle de l’Eurosystème qui va
assumer la responsabilité de la définition et de la mise en œuvre de la politique monétaire unique.
Ce processus de prise de décision est centralisé au niveau des organes de décision de la BCE,
notamment au niveau du Directoire. On a un président de la BCE, dont le mandat est irrévocable et
non-renouvelable, indépendant des pouvoirs politiques. Il est composé du président et d’autres
membres constituant le directoire. On a un autre organe appelé conseil des gouverneurs qui réunit
les gouverneurs des banques centrales nationales qui n’ont pas disparue mais sont des succursales
de la BCE.

Le Conseil des Gouverneurs définitif les grandes orientations de la politique monétaire, qui sont
mises en œuvre par le directoire et le président de la BCE.

58
A) Les objectifs de stabilité des prix
Les traités ont souhaité consacrer 2 principes fondamentaux :

 L’objectif premier de la BCE est de maintenir la stabilité des prix.


 L’indépendance politique de la BCE.

L’indépendance politique est garantie par le mandat irrévocable et non-renouvelable du président


mais aussi par le fait que la BCE ne peut pas accepter ni même solliciter des instructions des Etats-
membres ou des institutions européennes.

A côté de ces 2 principes fondamentaux on a un autre principe important qui interdit à la BCE de
financer par n’importe quel moyen les institutions européennes ou les Etats-membres : Clause du
No-Bail Out9. Par exemple on ne peut pas acheter sur le marché primaire des bons du trésor émis par
les Etats.

On a dit que l’indépendance de la BCE est très élevée, certains la considère plus indépendante que la
FED, même encore plus que la Banque Centrale Allemande qui lui a servi de modèle.

Il y a un lien très étroit entre le degré d’indépendance de la BCE et la lutte contre l’inflation. Dans ls
années 90, des auteurs comme Alesina et Summers démontrent que l’inflation est négativement
corrélée avec le degré d’indépendance des banques centrales.

 Plus les banques centrales sont indépendantes, moins on a d’inflation.

La raison est qu’une des sources majeures de l’inflation est le financement monétaire des déficits
(seigneuriage). Dans les années 20 en France. Plus récemment les pays en développement ont
recours à la planche à billets (seigneuriage) : Zimbabwe, Vénézuela, Liban, …

Or si la banque centrale est indépendante et peut dire non au pouvoir politique elle va refuser le
seigneuriage, et donc limiter l’inflation.

Pour limiter l’inflation on a d’un part augmenté l’indépendance de la BCE et d’autre part interdit tout
financement des Etats membres par la BCE.

Mais pourquoi la stabilité des prix est-elle un objectif si important  ?

L’idée est de dire que l’inflation est un phénomène coûteux au-delà d’un certain point.

D’abord l’inflation génère un changement fréquent de prix, à l’origine des coûts de catalogue.

De plus si on a plus d’inflation que les partenaires commerciaux alors on perd en compétitivité (on
vend plus cher). On dit qu’on subit une appréciation du taux de change réel.

Aussi, plus l’inflation est forte plus elle devient volatile. On a une relation mécanique : plus on fait de
l’inflation plus elle est variable. Quand l’inflation s’accroît, les entreprises ont du mal à identifier dans
les changements de prix ce qui est la conséquence de l’inflation et ce qui est la conséquence de la
modification des prix relatifs ; Une entreprise rationnelle ne doit donc changer ses choix
d’investissements que si les prix relatifs se modifient. Or les signaux de prix sont perturbés, ce qui
conduit les entreprises à faire mauvais choix, notamment des erreurs d’investissement.
9
= Clause de non-financement

59
On a le coût d’usure des chaussures. Dans les pays d’Amérique Latine on a généralement de
l’inflation très forte, en quelques semaines la monnaie détenue perd de la valeur très rapidement.
Dans ce type d’environnement, les ménages n’ont donc pas intérêt à garder le salaire sous forme de
monnaie, on a donc intérêt à aller dans les magasins avant que les prix augmentent davantage. Dans
ces cas on va verser les salaires toutes les semaines voir tous les jours et on se précipite vers les
magasins, ce qui génère des coûts extrêmement importants.

Un autre problème est que l’inflation est une taxe qui avantage l’Etat (cf plus tôt). La taxe pénalise
les agents qui prêtent de l’argent puisque la valeur réelle des créances diminue. En période
d’inflation les créanciers sont perdants et les débiteurs sont gagnants, les créanciers sont donc plus
réticents à prêter de l’argent. Dans un cas extrême on va bloquer le système de crédit.

Enfin les agents pauvres sont souvent les plus pénalisés. En effet ils n’ont généralement pas accès à
des produits financiers pour les protéger de l’inflation, ils vont garder leur revenu sous forme liquide
et il va être rapidement érodé en période d’inflation.

 L’inflation ne génère pas de gain de bien-être

Cependant en courte période, l’inflation non-anticipée par les agents peut diminuer le coût réel du
travail, ce qui pourrait provoquer un surcroit d’activité. La relation qui relie l’inflation et le chômage
est la courbe de Phillips.

W
A salaire fixe, le salaire réel diminue, le coût du travail diminuant génère donc une baisse du
P
chômage. Plus on a de l’inflation moins on a de chômage.

Cependant cela ne fonctionne qu’avec de l’inflation surprise, si on annonce une inflation de 10%, les
salariés demandent une hausse de salaire de 10% pour maintenir le pouvoir d’achat, si on fait en
réalité 15% le coût réel du travail diminue, ce qui diminue le chômage.

Mais cela ne fonctionne pas à tous les coûts, avec des anticipations rationnelles les agents vont à
long terme percevoir les anticipations inflationnistes, ils réviseront à la hausse leurs salaires. A force
la courbe de Phillips devient verticale. Il n’est plus possible en longue période d’acheter du chômage
avec de l’inflation, on arrive à un taux de chômage naturel.

Inflation π

60
ut
u¿t
L’inflation reste négative à long terme.

Attention, pour autant l’inflation ne doit pas être nulle. Sinon on prend un risque de déflation.

Si on a de la déflation, on a une baisse des prix, les entreprises ont tendance à essayer de produire
davantage car les prix auxquels elles vont faire face vont descendre. Mais en mettant davantage de
produits il y aura baisse supplémentaire des prix. Renforcé par un report de la consommation. La BCE
cible une inflation de 2%.

Milton Friedman va essayer de définir un taux d’inflation optimal. Pour lui la monnaie est un bien
comme les autres, l’efficacité économique exige, comme pour n’importe quel bien, qu’on égalise un
coût marginal de production de la monnaie et le prix de la monnaie.

Dans les sociétés modernes le coût marginal de la monnaie est nul, le prix de la monnaie est le coût
d’opportunité de posséder de la monnaie plutôt que de la placer, donc c’est le taux d’intérêt
nominal.

Donc on dit égaliser le taux d’intérêt nominal à 0.

i=0
Or le taux d’intérêt nominal = taux d’intérêt réel + π

i=0
r + π=0
¿
π =−r
Le taux d’inflation optimal devrait donc être égal à – le taux d’intérêt réel, donc un taux négatif, ce
qui pose problème (car la déflation est mauvaise), il a oublié des éléments.

D’abord on a un problème de mesure de l’inflation : ce n’est pas facile de mesurer l’inflation, par
exemple les individus confondent inflation et pouvoir d’achat. L’inflation peut être faible et le
pouvoir d’achat diminuer si les salaires nominaux progressent peu. Les mesures conventionnelles de
l’inflation ont tendance à surestimer l’inflation réelle car elles ne prennent pas toujours parfaitement
en compte les améliorations qualitatives des produits. En effet une partie de l’augmentation des
prix n’est pas de l’inflation mais une captation de l’amélioration des produits.

 On surestime l’inflation de 1 à 2 points par an.

61
On a aussi des arguments théoriques. Il y a des chocs sectoriels microéconomiques qui exigent un
ajustement des salaires réels.

Avec un peu d’inflation il est plus facile d’éroder le salaire réel car la totalité de la baisse du salaire
réel ne va pas passer uniquement par les ajustements du salaire nominal.

 L’inflation facilite les effets sectoriels

Il y a des distorsions sur les systèmes fiscaux. Il est légitime de financer monétairement
(seigneuriage) une petite partie du déficit. Mais cela n’est pas possible si l’inflation est nulle. Le
manque d’inflation ne permet donc pas ce financement, qui est très utile dans les pays d’Europe du
Sud où les systèmes fiscaux sont peu efficients.

 L’inflation permet le financement monétaire du déficit.

Quel est le taux optimal ?

La BCE a choisi un objectif annuel de 2%. La plupart des économistes considèrent cela comme un peu
faible, le taux optimal devrait plutôt être de l’ordre de 3%, 4%.

II) Les instruments de politique monétaire conventionnelle


Pour atteindre sa cible, la BCE doit définir des objectifs intermédiaires (puisqu’elle ne fixe pas
directement le taux d’inflation), on appelle cela les piliers de la politique monétaire. La BCE a une
approche à 2 piliers :

 Repose sur l’analyse monétaire ;


 Repose sur une analyse économique.

Analyse monétaire
On va faire un ciblage de long terme sur la croissance d’un agrégat monétaire, en particulier
l’agrégat monétaire le plus large possible : M3.

La BCE considère que pour atteindre un taux d’inflation annuel de 2%, la croissance de M3 (taux de
croissance de l’offre de monnaie) ne doit pas dépasser 4,5%/an.

Cela provient de la théorie quantitative de la monnaie qui dit que si on cible la croissance


monétaire, on vise par la même occasion l’inflation :

62
P ×Y =M ×V
Ṁ V̇ ¿
+ =π + g
M V
Si on cible le taux d’inflation π=2 % , on fait des hypothèses sur la vitesse de circulation de la
monnaie ET la croissance économique, donc sur la demande de monnaie. En anticipant le taux de
croissance de demande de monnaie on anticipe alors le taux de croissance de l’offre de monnaie M3.

Cependant on a des problèmes qui vont se poser. D’abord il faut être capable de prévoir
correctement le taux de croissance de la demande de monnaie (= celui de la croissance économique
et de la vitesse de circulation de la monnaie). Or, il est compliqué de prévoir le taux de croissance
mais aussi la vitesse de circulation de la monnaie qui dépend du comportement des agents.

En effet la croissance de la circulation de la monnaie dépend des comportements de détentions de la


monnaie, dépendant eux-mêmes des taux d’intérêt qui sont volatiles. De plus les innovations
financières rendent la demande de monnaie instable ce qui rend difficile la prédiction de son taux de
croissance.

Donc en plus de ce pilier la banque centrale européenne en utilise un autre.

Analyse économique
La BCE va évaluer des perspectives d’évolution des prix fondées sur une très large gamme
d’indicateurs économiques et financiers. Autrement dit, elle va évaluer les facteurs qui déterminent
l’évolution des prix à court et moyen termes en mettant l’accent sur l’activité réel (conjoncture,
emploi) et sur les conditions financières dans l’économie.

 L’analyse monétaire est axée sur l’horizon de long terme tandis que l’analyse économique est
de courts et moyens termes et se basent sur une large gamme d’indicateurs au-delà de la
croissance de la demande de monnaie.

La BCE a souvent eu du mal à communiquer sur ces 2 piliers. On remarque que le premier pilier a
tendance à se dissoudre dans le second, on accorde plus d’importance au deuxième. La BCE devient
un cibleur d’inflation en la visant directement.

En termes d’instruments de politique monétaire, la BCE va agir essentiellement par la fixation des
taux d’intérêt directeurs (lorsqu’elle fournit des liquidités aux banques commerciales).

En pilotant ces taux d’intérêt directeurs la BCE pilote le marché monétaire : le marché interbancaire.

Lorsque les taux directeurs varient, la variation influence directement les banques et donc
indirectement les taux que les banques appliquent aux prêts et dépôts de leurs clients. Une hausse
des taux d’intérêt directeurs entraînent donc une hausse du coût du crédit/resserrement, qui
influence l’épargne, la consommation et l’investissement.

63
Les modifications des taux d’intérêt directeurs vont également influencer les taux de change et les
prix des actifs.

Les taux directeurs influencent l’économie non seulement quand ils sont modifiés mais aussi quand
on a anticipation de modification. Une annonce de la BCE entraîne déjà une modification des
comportements.

Pour agir sur les taux d’intérêts directeurs la BCE a 3 outils :

 Opérations d’open market


 Facilités permanentes
 Réserves obligatoires

Opérations d’open market

C’est l’outil le plus important. Elles sont constituées par des achats/ventes de titres ou par des prêts
à court terme de l’Eurosystème ou des banques. Ces prêts se font en échange de titres détenus par
les banques. Ces dernières donnent temporairement des titres à la BCE en guise de garantie en
échange d’un prêt. On parle de mises en pension.

Le taux fixé par ces opérations est le principal taux directeur.

On peut avoir soit des titres publics, soit des titres privés de bonne qualité. On a des opérations
chaque semaine.

Facilités permanentes

Les banques commerciales peuvent retirer ou de déposer de la liquidité bancaire au jour le jour.

Réserves obligatoires

Les établissements de crédit doivent constituer des réserves obligatoires auprès des banques
centrales nationales. Le volume de ces réserves étant essentiellement calculés en fonction des
dépôts effectués par les clients auprès de ces banques. Si on augmente les réserves structurelles
obligatoires les banques auront plus de difficultés à accorder du crédit ou elles le feront de manière
difficilement accessible.

III) La supervision bancaire : l’Union bancaire


Depuis la crise financière globale (2007), la BCE s’est vue confier la mission de supervision bancaire :
l’Union bancaire.

Depuis 2012 la BCE s’est vue donner le mécanisme de supervision des banques européennes. Cela
s’inscrit dans le processus de l’Union bancaire qui est composée de 4 éléments :

64
 Supervision bancaire : surveillance des banques de la zone euro, basée sur des règles
précises ;
 Accords entre européens sur les montants de fonds propres exigés aux banques ;
 « Cadre européen unique pour le redressement des banques et la résolution de leur
défaillance ». Une agence sera chargée du démantèlement des banques considérées par l’UE
comme en faillite ;
 Harmonisation des systèmes de garantie des dépôts pour les particuliers. On va éviter que
les déposants retirent massivement leurs dépôts (panique/ruée bancaire), ce à quoi la
banque ne peut pas faire face. Le gouvernement français a garantie publiquement les
dépôts.

Chaque pays surveille ses banques comme il le souhaite. En France l’Autorité de Contrôle Prudentiel
surveille les banques françaises. Ce système a montré ses limites en 2007, le niveau d’intégration est
devenu tellement important en Europe que des difficultés bancaires dans un pays peuvent affecter
tous les autres pays européens (externalités macroéconomiques négatives / spillover).

Le principe de subsidiarité doit alors s’appliquer, on doit déléguer ces questions à un échelon
supérieur, on met en place une supervision unique qui garantit à chaque pays que les autres sont
soumis aux mêmes règles que lui. (En 2012).

Les supervisions nationales ne disparaissent pas, on y ajoute une mission supranationale qui a été
donnée à la BCE. Bien sûr la BCE n’est pas capable de gérer toutes les banques de chaque pays, elle
va donc gérer les plus grandes banques de chaque pays. En Europe il y a plus de 6000 banques, mais
seules 150/200 sont supervisées directement par la BCE.

 Jusqu’en 2012 on avait seulement la mission de politique monétaire, maintenant on a aussi la


supervision bancaire. Les deux sont distinguées.

Section 2 : Le fonctionnement de l’Union monétaire


I) La crise bancaire et des dettes souveraines (2010-
2011)

65
A) Les origines de la crise
La crise financière est exogène à la zone euro et apparaît en 2007-2008 sur le marché américain.

La crise peut être séparée en 2 périodes

2007 – 2010
La crise apparait aux USA avec les subprimes.

Dans cette première partie les banques européennes apparaissent comme moins exposées à la crise
car elles n’avaient pris part que marginalement aux subprimes. Cependant, des effets de contagions
se sont rapidement fait sentir. Ils se sont soit manifestés par le canal financier, soit par le canal
commercial.

Les européens ont alors mis en place un assouplissement de la politique monétaire, des mesures de
soutien budgétaires au secteur bancaire, une baisse du taux d’intérêt directeur.

L’impact sur les finances publiques était faible. La BCE prévoyait que le soutien des Etats entraînerait
une hausse de la dette de 3 points de pourcentage du PIB. (27% Covid).

Jusqu’en 2010 la dette commence à se faire sentir en Europe de manière modérée.

Après 2010
De nouvelles tensions plus sévères apparaissent en Europe. Cela est caractérisé par les divergences
entre les fondamentaux économiques des pays membres.

Les pays dits « périphériques » vont connaître des difficultés importantes par rapport au cœur de la
zone Euro, principalement l’Allemagne.

En Grèce la révélation de la dette publique a entraîné une très forte hausse des taux d’intérêt. Les
comptes publics avaient été dissimulés, la situation des finances publiques grecques apparaît au
grand jour comme préoccupante (ils ont triché), on a donc une hausse des taux d’intérêts sur la dette
Grecque. En plus on a des craintes de sortie de la zone euro extrêmement fortes en Grèce, qui
génère une ruée bancaire des déposants grecs.

 En Grèce on a une crise des finances publiques cumulée à une crise bancaire.

En Irlande le secteur bancaire s’était imprudemment installé sur le secteur immobilier. L’explosion
des bulles a mis en difficulté les banques Irlandaises. Le gouvernement a dû intervenir avec des
grandes aides et la nationalisation de la plus grande banque. L’Etat a tellement aidé les banques qu’il
s’est lui-même mis en difficulté et a dû demander une aide à l’Europe.

66
En Espagne on a un effondrement du marché immobilier accompagné d’une récession économique
qui a conduit les banques à être en difficulté. Là aussi le gouvernement a dû intervenir, se mettant
lui-même en difficulté. C’est similaire à l’Irlande.

A Chypre on a aussi le même modèle. Bien que ce soit un petit pays son secteur bancaire est très
important, plus important que sa taille car les banques chypriotes sont très liées aux pays alentours.
Par son histoire les banques de Chypre sont liées à la Grèce, donc ont connu des problèmes, l’Etat
Chypriote n’a pas pu assumer et a dû appeler l’UE à l’aide.

En Italie on a le même problème qu’en Espagne et en Irlande, mais en moindre mesure.

 La crise des finances publiques est donc le résultat de la crise bancaire.

La crise qui concerne en particulier les pays périphériques (Grèce, Irlande, Espagne) a aussi touché le
cœur de l’Europe car les banques européennes sont très liées.

En effet, elles sont liées entre elles par les filiales/succursales qu’elles possèdent. Elles sont aussi
liées par l’exposition via les portefeuilles de créance : les banques françaises ont des titres de la
dette Grecque par exemple. Donc si la solvabilité grecque est menacée, ces créances deviennent
douteuses et on a un affaiblissement de la sérénité de la banque. Enfin, en période de crise les
banques ne se font plus confiance, une banque française ne veut pas prêter à une banque italienne
car elle peut détenir des titres grecs. La méfiance se généralise vite, donc cela peut bloquer le
système bancaire. Le seul recours pour avoir des liquidités est donc de s’adresser à la BCE puisque
personne ne veut prêter à personne.

 On a 3 canaux de transmissions entre banques : filiales, portefeuilles, méfiance.

Face à cette crise les européens ont utilisé 3 instruments :

 Instrument monétaire
 Instrument budgétaire : plan de relance
 Private sector involvement : Implication du secteur privé dans les plans d’aides financières
aux Etats.

Private Sector Involvement

On va demander aux créanciers privés de supporter une partie des coûts de la sortie de crise. On leur
demande donc de renoncer à une partie de leurs créances. Si l’emprunteur est l’Etat, cette solution
lui permet de diminuer son endettement sans pour autant empêcher l’emprunteur souverain de

67
revenir sur le marché financier plus tard. En effet on a une remise de dette négociée, pas un défaut
qui serait coûteux en termes de crédibilité future.

De plus si on demande de renoncer alors il y aura besoin de moins de fonds publics pour sortir de la
crise.

Aussi, les créanciers privés ont intérêt à accepter cela car s’ils refusent ils risquent de faire faillite et
perdre tous leurs avoirs. Des remises de dettes négociées peuvent sauver une partie de leurs
créances.

Mais il y a aussi 2 inconvénients principaux. D’abord on risque de creuser un trou pour en faire un
ailleurs. On va aider l’Etat mais on fait courir un risque aux banques.

De plus on a un aléa moral : à partir du moment où le secteur privé accepte une remise de dette, les
autres emprunteurs souverains vont se dire qu’eux aussi se feront remettre leur dette si besoin donc
ils relâchent leurs efforts budgétaires.

Lors de la crise le FMI recommandait cela car ils avaient l’habitude dans leurs projets. L’Allemagne y
était très opposée à cause de l’aléa moral. En Europe on a seulement retenu cette solution du FMI à
Chypre. On a fait soutenir en partie la restructuration aux banques chypriotes. En effet on a dit que la
plupart des gros dépôts de ces banques proviennent e la Russie, des pays de la méditerranée, ce ne
sont donc pas les ménages qui ont le plus supporté. Lorsque les dépôts dépassaient un certain niveau
les créanciers privés devaient supporter le coût, c’est la clause du bail in.

II) La trappe à liquidité et la politique monétaire non-conventionnelle


comme une réponse à la crise
Pour bien comprendre on va utiliser l’analyse théorique de Paul de Grauwe qui peut se résumer dans
un graphique.

En abscisse on a l’ampleur des chocs auxquels sont confrontés les Etats. Les Etats ont-ils intérêt à
faire défaut (coûteux en crédibilité) ? Dans le cas européen il n’y a pas eu de défaut, pourquoi ?

BE
BU

68

Ampleur des chocs pour les Etats


0 A B

En rouge on a le coût du défaut, il est indépendant de l’ampleur des chocs qui affectent les dépenses
publiques, il est constant. Ce coût est un coût de crédibilité.

En vert on a le bénéfice du défaut, il est d’autant plus élevé que le choc/crise est élevé. Mais Grauwe
distingue 2 bénéfices du défaut :

 Quand il est anticipé : BE


 Quand il n’est pas anticipé : BU

On remarque que le bénéfice des défauts est toujours plus élevé quand on anticipe que quand on
n’anticipe pas. Si les agences de notation dégradent la note de la Grèce (elle va faire défaut on
anticipe), les taux d’intérêt flambent (spread des taux). Donc faire défaut quand les taux d’intérêt
sont de 20% génère un bénéfice plus important que de faire défaut quand le taux d’intérêt est de 1%.

On va regarder ce qui se passe en regardant 3 types de chocs de solvabilité : petit, intermédiaire,


gros.

Petit choc :

Un petit choc de solvabilité est entre 0 et A.

Dans ce cas, que le défaut soit anticipé ou non, on a toujours des coûts du défaut supérieurs aux
bénéfices.

 Un petit choc n’entraîne pas de défaut

Gros choc :

Un gros choc est au-dessus de B

Les courbes vertes sont toujours supérieures à la courbe rouge. Que le défaut soit anticipé ou non, il
y aura défaut.

 Un gros choc entraîne un défaut

Choc intermédiaire :

Entre A et B.

69
On a deux cas, si le défaut est anticipé on a plus de bénéfices que de coûts, on fait défaut. Si le
défaut n’est pas anticipé alors les coûts sont trop importants, on ne fait pas défaut.

On a donc un modèle à deux équilibres.

 Quand il y a défaut on a anticipé, quand il n’y a pas défaut on n’a pas anticipé.

De Grauwe dit que c’est aux européens de choisir leur équilibre, s’ils anticipent, il y aura défaut,
sinon non.

Anticiper un défaut est possible grâce à la politique monétaire, plus précisément avec le rôle de
prêteur en dernier ressort. Cela signifie qu’on garantit aux Etats souverains les liquidités dont ils ont
besoin pour faire face à une situation de difficulté financière. Concrètement on fait cela en achetant
de manière illimitée les titres de la dette souveraine des états sur le marché secondaire des titres.
Cet engagement est donc un signal envoyé au marché « Nous achèterons sur le marché secondaire,
donc la faillite n’est pas possible ».

On a donc choisi un équilibre sans défaut, on n’a effectivement pas eu de défaut.

 Le rôle de prêteur en dernier ressort assure l’absence de défaut.

Prenons un exemple, au début de la crise financière les finances publiques Britanniques étaient aussi
dégradées que les finances publiques Espagnoles. On a observé qu’en Espagne les taux d’intérêt se
sont envolés, pas en Angleterre. En effet, étant hors de la zone Euro, la banque Anglaise a pu se dire
comme prêteur en dernier ressort. Tandis qu’en Espagne, avant 2012 la banque centrale n’était pas
encore prêteuse en dernier ressort. C’est au moment où la BCE est devenue prêteur en dernier
ressort qu’on a calmé tout cela, ce qui est considéré aujourd’hui comme un sauvetage de la zone
euro.

Dans les traités européens on a en principe la clause du No Bail Out qui interdit à la BCE de faire du
financement monétaire du déficit. Ce qui est interdit c’est que la banque centrale européenne ne
peut pas acheter des bons du trésor sur le marché primaire (nouvelles émissions). Ici on a acheté des
titres sur le marché secondaire.

Mesures non-conventionnelles de politique monétaire


La BCE a pris des mesures non-conventionnelles de politique monétaire ce qui était justifié par le
blocage des 2 canaux conventionnels :

 Canal du taux d’intérêt (modification (baisse) du taux d’intérêt directeur)


 Canal du crédit (Important en Europe car beaucoup de crédit des entreprises. Quand la BC
augmente le taux d’intérêt on a moins de crédit accordé).

Au moment de la crise financière les deux canaux se sont bloqués. Le taux d’intérêt s’est bloqué car
les taux d’intérêt ont atteint un niveau tellement bas qu’ils ne pouvaient plus baisser, on parle de
trappe à liquidité.

70
Le canal du crédit a aussi été bloqué, les banques n’ayant plus confiance entre elles ne se prêtent
plus d’argent, l’incertitude est tellement forte qu’elles ne prêtent plus non plus aux entreprises et
ménages. Le crédit disparait.

Pour débloquer cela on a lancé le programme LTRO (Long Terme Refinancement Operation). L’idée
est d’octroyer aux banques des liquidités en grande quantité à bas taux d’intérêt.

Un second programme qui a été lancé est l’OMT (Outride Monetary Transaction) afin de racheter de
façon illimitée des obligations publiques (sur le marché secondaire).

Les mesures non-conventionnelles sont :

 Assouplissement quantitatif / Quantitative easing : on augmente massivement la monnaie


en circulation ;
 Assouplissement des conditions de crédit / Credit easing : on débloque les marchés du
crédit en achetant directement des titres sur les marchés du crédit pour faire baisser les
primes de risques / taux d’intérêt ;
 La banque centrale essaye d’influencer les anticipations des agents dans un sens favorable en
annonçant pour l’avenir des baisses des taux d’intérêts futurs.

III) La crise du Covid19


La contraction (diminution brutale de l’activité !) attendue de l’économie mondiale en 2020 est de
5%, dans la zone euro elle est encore plus marquée et atteint 10%. Les pays sont évidemment
inégalement touchés, les plus touchés étant l’Italie, l’Espagne, la France.

La dette publique a été le premier instrument de la relance, entre 2019 et 2020 les experts du FMI
s’attendent à une augmentation de la dette publique de plus de 21 points du PIB dans la Zone Euro
(28 aux USA) (28 en France), en 2007/2008 on était bien en dessous de cela !

De plus les voies de la reprise en zone euro sont incertaines car elles dépendent du vaccin.

Inflation
L’incertitude porte sur la croissance économique mais pourrait aussi porter sur l’inflation (qui est
l’objectif principal de la BCE).

Là aussi on a de l’incertitude, on considère que le choc de demande négatif l’emporte sur le choc
d’offre négatif : la diminution de la demande est plus importante que la baisse de l’offre. Cela est du
évidemment à une épargne de précaution ou à une impossibilité de consommer (confinement). Si la
demande baisse plus alors il est peu probable d’avoir de l’inflation !

71
Fin 2021 l’inflation ne devrait qu’atteindre 1,4% de taux moyen annuel. On est en dessous des
objectifs de la BCE, le risque n’est donc pas inflationniste mais bien déflationniste. Pour avoir
inflation il faudrait que l’offre baisse plus que la demande.

Puisque l’inflation est faible, il y a convergence d’action entre la BCE et les gouvernements, le policy
mix est cohérent : inflation et relance. Cependant une trop forte relance avec de l’inflation poserait
des problèmes.

Avec la crise on observe que la BCE a beaucoup augmenté ses achats sur le marché secondaire : le
programme d’Achat D’Urgence face à la Pandémie (Pandemic Emergency Purchase Program de 1 350
Mds € lancé en mars). De plus la BCE a étendu les possibilités d’emprunts de liquidités aux banques
(Pandemic Emergency LTRO). Une troisième caractéristique est qu’on assouplit les garanties :
l’éventail des actifs éligibles à titre de garanties auprès de la BCE.

Tout cela a évité une hausse des taux d’intérêt dans la zone euro mais aussi les fragmentations car
sinon les taux auraient plus augmenté en Italie qu’en Allemagne. Par ailleurs, en favorisant l’emprunt
bancaire la BCE a préservé le canal du crédit (très important en zone euro car contrairement aux USA
les entreprises s’endettent plus auprès des banques que sur les marchés).

Les défis à relever restent considérables : la croissance est très faible et l’instrument monétaire ne
suffit pas en zone euro.

Chapitre 3 : La politique budgétaire


72
Section 1 : Les leçons de la crise des dettes souveraines
I) Les mécanismes de prévention des crises : le
renforcement du Pacte de Stabilité et de Croissance
Ici l’idée des européens, au lendemain de la crise des dettes souveraines, a été de renforcer les règles
budgétaires.

A) La typologie des règles budgétaires : règles numériques et règles


procédurales
On distingue 2 types de règles :

 Règles numériques
 Règles procédurales

Règles numériques
Ce sont les plus connues. Il s’agit de contraintes permanentes qui pèsent sur la politique budgétaire
et qui s’expriment sous la forme d’un indicateur synthétique de performance budgétaire.

Concrètement on fixe des indicateurs et on fixe des cibles. Par exemple on va interdire que le taux
d’endettement dépasse 60% du PIB. On peut aussi s’intéresser au déficit budgétaire et interdire que
le déficit dépasse 3% du PIB. On peut aussi fixer un plafond des dépenses publiques en % du PIB
(40%) et aussi des cibles planchers sur les recettes fiscales (20% du PIB).

 On a des cibles numériques (Taux d’endettement, déficit, dépenses publiques, recettes fiscales).

 Les plus utilisées, notamment en Europe portent sur le taux d’endettement et sur le déficit.

Ces règles sont apparues aux USA au 19ème siècle. En effet certains Etats américains ont fait faillite et
en voyant que l’Etat fédéral n’intervenait pas, se sont fixés eux-mêmes des règles.

En termes de pays les pionniers sont la Nouvelle-Zélande (1994) et certains pays d’Afrique de l’Ouest
(UEMOA ????) (1999). Dans les années 90 environ 10 pays avaient adopté ces règles numériques,
aujourd’hui c’est environ 80 pays.

Ces règles doivent respecter des critères :

73
 Être claires, bien définies, connues de tous
 Être transparentes, cohérentes, simples
 Être coercitives (=fonctionner, donc sanctions si pas respectées)
 Être flexibles (=s’adapter à la situation économique)

Règles procédurales
Ici les règles ne portent pas sur des objectifs numériques mais plus sur les règles du jeu pour
construire un budget.

On distingue 2 types de procédures budgétaires :

 Procédures collégiales : le budget est issu d’une négociation (entre ministres par exemple).
Elles aboutissent souvent à des dépenses publiques excessives car beaucoup de monde a des
idées.
 Procédures hiérarchiques : elles partent du haut vers la base. Un ministre (finance ou 1 er
ministre) a un rôle prépondérant, il décide pour les dépensiers. De plus le gouvernement
l’emporte sur le parlement (marge de manœuvre limitée pour le parlement). Enfin, une fois
le budget voté par le parlement, le gouvernement peut réduire (pas augmenter) les
dépenses.

En France, en 2006, il y a l’adoption de la Loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Cette loi
provoque une transformation radicale de la procédure budgétaire en France : on passe d’une
procédure collégiale à une procédure hiérarchique.

En effet, avant on faisait remonter les besoins des administrations (base vers le haut), mais les
besoins étant illimités, les dépenses publiques étaient illimitées (comme les besoins). Maintenant on
part du haut : le gouvernement a des prévisions macroéconomiques, il définit le montant des
dépenses publiques acceptables puis les ventile par ministère puis par administrations.

On a créé des comités budgétaires indépendants. En France, le Haut Conseil des Finances Publiques
est un organisme indépendant qui réalise des prévisions macroéconomiques en lien avec la politique
budgétaire. C’est donc bien un comité budgétaire indépendant qui réalise cela. Wiplosz ???? dit que
ces comités indépendants devraient être l’équivalent de la BCE. Le parlement devrait voter un niveau
de dette acceptable, puis le comité indépendant devrait définir chaque année un niveau de déficit
maximum qui s’imposerait aux pouvoirs publics.

 Pour un certain nombre d’économistes une partie du pouvoir du parlement devrait être délégué
à un organisme indépendant.

II) Coûts et avantages des règles budgétaires

74
Avantages
Lutte contre le biais de déficit et le caractère procyclique

Tout d’abord on a un biais de déficit (trop de déficit). En France, depuis le premier choc pétrolier
(1974), aucun budget en équilibre n’a été voté en France. On a une tragédie des communs des
finances publiques.

On a un effet de voracité : cet effet a été observé dans les pays émergents, en particulier ceux qui
sont fortement dépendants d’une ressource naturelle. L’idée est qu’on a une entrée de devise, elles
sont donc favorables pour les recettes publiques qui augmentent. Donc les déficits devraient
diminuer, comme l’endettement (effet contra-cyclique). L’effet de véracité est que quand l’argent
entre dans les caisses du gouvernement, les administrations dépensières ont tendance à augmenter
excessivement leurs demandes de dépenses publiques (elles veulent tous l’argent, elles sont rivales).
On a donc un effet contraire à ce qui est attendu, on a un déficit qui augmente, on a un biais de
déficit.

 Contrairement à ce qu’elle doit être, la politique budgétaire n’est pas contra-cyclique mais
procyclique (le déficit augmente quand la situation s’améliore). Cela ne s’explique que par
l’économie politique.

Réduire les taux d’intérêt

Si on impose des règles on va apporter de la crédibilité, la politique budgétaire apparaît comme


soutenable pour les pays étrangers, on attend donc une diminution des taux d’intérêt sur la dette
souveraine.

Baisse de pression sur les banques centrales

Ce qu’on espère c’est que la pression des gouvernements sur les BC va diminuer. On a vu qu’une
partie du déficit peut être financée monétairement (seigneuriage).

Sargent et Wallace vont développer le modèle suivant : l’arithmétique monétaire ou monétariste


déplaisante. Supposons qu’on a une BC dure qui ne s’intéresse qu’à la lutte contre l’inflation et ne
s’intéresse pas au seigneuriage. (Dominance monétaire). En face de cela on a un Etat qui en raison
des pressions politiques laisse filer les déficits. La BC doit finalement accepter le financement
monétaire pour sauver l’Etat qui est au bord de la faillite. La banque centrale servait forcée de passer
d’une dominance monétaire à une dominance budgétaire.

En théorie des jeux on a cela avec le modèle de la poule mouillée (Chicken Game), deux voitures
arrivent l’une en face de l’autre, si les deux ne dévient pas tout le monde perd, si une dévie on a un
équilibre mais un est une poule mouillée. Sargent et Wallace expliquent que face à ce risque la BC
peut dévier et accepter le financement monétaire pour éviter un désastre économique : passer à la
dominance budgétaire.

 Cela ne suffit pas d’avoir une BC indépendante car elle peut être forcée à changer de trajectoire
si le gouvernement lui impose ! Il faut absolument coupler cela à des règles budgétaires.

Existence d’externalités au niveau de l’UE dans son ensemble

75
Pour justifier l’existence de règles supranationales il faut parler des externalités macroéconomiques.
Si un pays dégrade sa situation financière cela va avoir des conséquences négatives aussi sur les
autres pays membres de la zone euro.

D’abord si le pays qui voit sa situation budgétaire se dégrader et qu’il s’agit d’un grand pays, les
prêteurs peuvent avoir peur de prêter à tous les pays de la zone. Si la France a des difficultés (pays
important pour l’UE), les tensions sur les taux d’intérêt ne concerneraient pas que la dette française
mais celle de toute la zone.

De plus un problème est la solidarité financière. En principe elle est interdite (No Bail out), les Etats
européens ne peuvent pas aider un autre Etat en difficulté. Mais on l’a vu en 2007/2008, on a
considéré comme impossible de laisser la Grèce faire faillite. Les problèmes budgétaires d’un Etat
deviennent problèmes de toute la zone !

 Il est légitime que les européens imposent des règles budgétaires à l’ensemble des pays de la
zone.

Inconvénients
Flexibilité

Si on recherche de la flexibilité avec des règles qui se changent en fonction de la situation, alors les
règles sont peu crédibles et donc inefficaces.

Il faut arbitrer entre flexibilité et crédibilité, ce qui n’est pas facile

Baisse des investissements productifs

Si on impose de baisser les dépenses publiques alors pour des raisons politiques, l’Etat risque de
baisser l’investissement. Il est plus facile de baisser l’investissement que de diminuer le nombre de
fonctionnaires.

Favorisation de la procyclicité

Paradoxalement les règles pourraient aussi favoriser la procyclicité, il est plus facile de respecter ces
règles qu’en période d’activité soutenue que ralentie. Quand l’activité est favorable, faire des
dépenses publiques est plus facile (les impôts rentrent mieux), mais en raison de la règle, quand on
est en période ou cela est nécessaire, il est difficile de faire de la dépense publique. Donc les
dépenses publiques augmentent en période d’activité économique soutenue, ce qui n’a pas de sens
puisque la théorie keynésienne dit qu’il faut dépenser en cas de ralentissement.

Face à ces inconvénients les économistes suggèrent des modifications des règles budgétaires :

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 Calculer un solde budgétaire pour une activité économique neutre (PIB = son niveau de long
terme indépendamment de la conjoncture) (économétrie). On ciblerait ce solde structurel.
Ainsi le solde n’est pas influencé par la conjoncture, par exemple, quel serait les dépenses de
chômage si on n’avait pas une crise du chômage en ce moment même. On cible une limite au
solde structurel plutôt que conventionnel.
 Protéger les investissements productifs (Règle d’or). Par exemple la règle d’or est qu’on cible
des déficits HORS investissements publics.

La règle d’or est pratiquée en France dans les collectivités, elle l’est aussi au Royaume-Uni, peu en
Europe.

III) Les réformes des règles budgétaires dans l’UE depuis le Traité de
Maastricht
En 1997 lors du Sommet d’Amsterdam on adopte le Pacte de Stabilité et de Croissance. On fait
rentrer dans les traités européens les critères de convergences du traité de Maastricht (déficit
inférieur à 3% du PIB et dette à 60%).

En 2003 on lance des procédures de déficits excessifs contre la France et l’Allemagne qui font trop de
déficits. Mais en raison de leurs poids les 2 pays arrivent à faire suspendre ces procédures. La France
et l’Allemagne détruisent alors toute crédibilité au Pacte de Stabilité et de Croissance.

En 2005 les européens vont donc chercher à réformer le Pacte pour le rendre crédible, par exemple
en travaillant sur le ciblage structure. Mais cela ne suffira pas et on aura la crise des dettes
souveraines, expliquée en partie par cela.

Face à la dette souveraine les européens ont donc cherché à éviter cela avec des mécanismes de
prévention.

Tout d’abord en 2011 on a le semestre européen : il faut des dialogues entre les Etats membres et la
commission européenne tout au long du processus d’élaboration budgétaire. Il faut donc se mettre
d’accord sur un calendrier.

Le semestre européen est donc un calendrier d’intégration des budgets européens dans le budget
européen. Pendant le dialogue la commission européenne examine les budgets et peut dire que ça
ne va pas.

On a aussi le Six Pack, c’est un paquet législatif adopté en 2012. Il accorde à la commission
européenne le droit de demander un aux Etats de faire un plan d’action correctif aux projets des
budgets des pays membres.

Le deuxième aspect de ce Six Pack est répressif. Si les Etats ne respectent pas, la commission peut
lancer une procédure d’application rigoureuse. Les Etats doivent verser une garantie sur un compte
(0,1% du PIB), s’il y a sanction ce dépôt n’est pas remboursé : c’est une amende. La nouveauté est
que le conseil européen doit suivre cette décision, sauf à lui opposer une majorité qualifiée inversée.

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En bref, pour arrêter les sanctions contre un Etat (2003) il faudrait avoir les 4/5 ème du vote pondéré.
La France est l’Allemagne ne l’obtiendraient pas à 2.

En 2013 on a le Two Pack. Les Etats européens sont obligés de se fonder sur des prévisions de
croissance indépendantes et doivent créer des comités budgétaires indépendants, en France le Haut
Conseil des Finances Publiques.

Enfin, on a le Pacte Budgétaire de 2013 qui est inclut sur le traité sur la Stabilité, la gouvernance et la
coopération. Dans ce pacte on dit que les Etats européens doivent disposer de budgets équilibrés. On
demande l’équilibre budgétaire, qui vise le déficit budgétaire structurel (nettoyé des effets de la
conjoncture) qui ne doit pas dépasser 0,5% du PIB. En cas de non-réponse de cette règle on a une
possibilité de sanction, là aussi à 0,1% du PIB, blocable par une majorité qualifiée inversée.

Cela aurait du être appliqué dès 2018.

En Mars 2020 avec le Covid les européens ont suspendu toutes ces règles européennes et ce sans
date précise pour les rendre de nouveaux activées. Aujourd’hui elles ne sont évidemment pas
respectées.

IV) Les mécanismes de résolution des crises


A) Du Fond Européen de Stabilité Financière au Mécanisme Européen de
Stabilité
En 2010 on a créé le Fond Européen de Stabilité Financière qui servait à octroyer des prêts
conditionnels à des Etats de la zone euro en difficulté. Ce fond pouvait donc accorder des prêts. Une
partie de ces prêts pouvaient être dédiés au renflouement du secteur bancaire. La conditionnalité
était assurée par le trio :

 Commission européenne
 BCE
 FMI

On versait aux Etats de l’argent, ils pouvaient l’utiliser en partie pour renflouer le secteur bancaire,
sous conditions, en particuliers de réformes, vérifiées par ces 3 organismes.

Ce Fond Européen avait une vocation provisoire.

En 2012 les européens ont renforcé ce fond européen par une structure permanente qui continue
d’exister : le Mécanisme Européen de Stabilité (MES). Il a pour vocation de recapitaliser directement
les banques selon une conditionnalité qui lui est propre. La différence est bien qu’on aide
directement les banques, alors qu’avant on passait par les Etats. De fait on ne prête pas aux Etats
donc on n’augmente pas la dette publique. Cependant on a bien sur des conditions puisque le MES
devient actionnaire et peut imposer des conditions de redressement.

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D’abord pour que le MES soit applicable il faut que le pays ait ratifié le Pacte. De plus le but est de
préserver la stabilité financière : si on a une crise bancaire. En théorie le mécanisme européen n’a
pas à intervenir si la crise bancaire est générée par une crise des dettes souveraines. Troisième
caractéristiques, les institutions bancaires qui bénéficient du MES doivent être suffisamment grandes
pour générer des problèmes systémiques en cas de faillites. Dernier élément, on ne va aider les
banques que si elles démontrent leur capacité de rembourser la dette, il ne s’agit pas de maintenir en
survie artificielles des banques inefficaces. On veut bien faire face à l’instabilité, pas à l’insolvabilité.

 Le MES intervient donc si le pays a ratifié le pacte, que les crises sont bancaires, que les banques
sont importantes, si les banques sont solvables.

Ce mécanisme n’était évidemment pas conçu pour ces crises comme la COVID.

II) Mutualisation des dettes publiques : avantages et limites


En Juillet 2020 on a eu le plan Next Generation (390 Mds de subventions non remboursées et 350
Mds de prêts remboursés). Ce plan repose sur un emprunt commun, on a accepté un phénomène
nouveau : la mutualisation de la dette publique. Les Européens empruntent ensemble et ventilent
entre les pays. 37% de ces 350 Mds iront à l’environnement. Celui qui rembourse n’est pas l’Etat qui
en bénéficie mais bien l’Europe.

En dehors de l’UE on estime que le plan de relance se monte à 11,8% du PIB, au Japon 11% du PIB,
pour l’UE 3,8% du PIB, en France 5,2% du PIB, en Italie 5% du PIB, en Allemagne 8,3% du PIB, au
Royaume-Uni 9,2% du PIB.

L’avantage est que les remboursements font se faire à des taux plus avantageux ! Personne ne veut
prêter à un taux bas à l’Italie ? Pour l’UE il y a peu de doute sur la stabilité financière.

Le désavantage (surtout mis en avant par l’Allemagne) est l’aléa moral : si on fait ça les Etats vont se
laisser aller. Cependant, le choc étant commun cet argument tombe, tout le monde est touché, d’où
le fait que l’Allemagne et les Pays-Bas n’aient pas mis leurs vétos.

Section 2 : La nécessité d’une nouvelle architecture européenne


I) Quelques mots sur le fédéralisme budgétaire
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Il s’agit de l’idée que les responsabilités budgétaires vont s’exercer à plusieurs niveaux. Oates parle
du fédéralisme budgétaire optimal.

Qu’est-ce qui doit être du domaine de l’Europe et de l’Etat Nation ?

L’Etat a 3 fonctions :

 Production de biens publics


 Redistribution
 Stabilité macroéconomique

Oates dit que pour que les biens publics fonctionnent, ils doivent répondre aux besoins des citoyens.
Pour cela ils doivent être produits au niveau le plus proche possible des citoyens, et donc dans l’Etat-
nation. Il vaut mieux laisser l’éducation nationale aux Etats-Nations.

Pour la redistribution on utilise la fiscalité. On pourrait donc penser qu’elle devrait être locale pour
des choix politiques. Mais si on utilise l’instrument fiscal comme redistribution, à cause de la
concurrence fiscale, on peut avoir une fuite des plus riches ou des entreprises. Il faut faire cela au
niveau européen

Pour la stabilisation on a la lutte contre les déficits, on peut faire ça de deux manières. Soit dans l’Etat
nation avec du keynésianisme (dépenses publiques en mauvaise conjoncture). Mais cette
stabilisation intertemporelle est difficile avec la hausse des dettes. Alors on peut utiliser la
stabilisation inter-étatique, au lieu de faire appel à la dette, on fait appel à d’autres Etats avec des
transferts budgétaires entre états en situation favorable et états en situation difficile. A l’avenir il
faudra que la stabilisation macroéconomique passe davantage par l’inter-étatique que par l’inter-
temporel.

On a subsidiarité : redistribution et surtout stabilisation seront plus efficace à un niveau centralisé,


tandis que la production de bien public doit être fait dans les Etats. Aujourd’hui le budget européen
ne représente qu’1% du PIB, il faut l’augmenter. On a fait l’erreur d’avoir une Union monétaire sans
Union budgétaire. Il faut associer les deux.

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