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S5 Droit de l'UE

Droit de l’Union européenne (Université de Caen-Normandie)

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INTRODUCTION

- En 1945, Winston CHURCHILL décrivait l’Europe comme un amas de décombres, un charnier, un terrain de
propagation de la peste et de la haine.

Depuis cette période, beaucoup de chemin a été parcouru même si dès le départ, les pères fondateurs se
sont montrés très prudents dans la construction européenne. Par exemple dans sa déclaration du 9 mai
1950, Robert SCHUMAN affirmait que « L'Europe ne se fera pas d'un coup, ni dans une construction
d'ensemble: elle se fera par des réalisations concrètes créant d'abord une solidarité de fait ». Depuis 1950,
l’Europe poursuit son intégration et son expansion.
C’est le droit de L’UE surtout qui a connu un prodigieux développement puisque ce droit est celui de
28 Etats aujourd'hui, et non plus seulement celui des 6 Etats fondateurs.
Il faut souligner l’intensité de la réglementation européenne. Et aussi et surtout, malheureusement, sa
complexité.

- Etapes de la construction :

§1 : La création des communautés

- Déclaration de Robert SCHUMAN (9 mai 1950) = texte fondateur de la construction européenne.


SCHUMAN ne souhaitait pas heurter la souveraineté des Etats (= l’indépendance des Etats). il estimait
qu’il fallait démarrer la construction européenne progressivement, secteur par secteur avant tout une
construction éco, avant d’ê politique. Pour lui, la construction politique devait se faire naturellement. Avec
l’intégration économique, des solidarités, des liens devraient se créer entre les Etats membres.
- Plan Schuman = ne plus avoir la guerre en Europe. Repose sur la mise en commun des ressources du
charbon et de l’acier entre France et Allemagne dans le cadre d’une organisation. Le 18 avril 1951 le traité
de Paris créé la CECA (Communauté économique du Charbon et de l’Acier).
Vont adhérer à ce traité de Paris : la France et l’Allemagne, la Belgique, l’Italie, le Luxembourg et les Pays-
Bas (succès immédiat). La Grande-Bretagne parlait de la « petite Europe ». Durée de vie du traité de 50 ans
donc fin en 2002.

Le traité de Paris  succès, ouvre la voie au fédéralisme. L’objectif de l’UE est de créer une fédération.
Création d’institutions autonomes très intégrées comme la Haute Autorité, instit° avec un véritable
pouvoir de décision. On allait vers la fédération car les Etats acceptaient de s’en remettre à la Haute Autorité.
C’est elle qui prenait les décisions en matière de charbon et d’acier à la place des Etats (≠ intergouvernemental).

- Par la suite, les autres traités iront moins loin dans l’intégration et reviendront plus vers cette notion
d’intergouvernementalité. (Lorsque les Etats ont beaucoup de poids et peuvent s’opposer à des décisions via
le veto).

Pour continuer l’intégration européenne, les 6 Etats membres vont décider de se lancer dans le domaine
économique. Le 25 mars 1957, les 6 Etats membres vont créer la CEE (Communauté Economique
Européenne) et la Communauté Européenne de l’Energie Atomique (CEEA). Ce sont les traités de Rome =
créer un marché commun au niveau européen, reposant sur le principe de libre-circulation (hommes,
marchandises et capitaux)  création d’une union douanière.

La CEE avait pour objectif de créer des politiques communes dans tous les domaines (Ex : la PAC mise
en place en 1972). On va créer aussi à partir de 1958 des institutions. Les institutions de la CECA existent
toujours :
 La Commission européenne,
 Le Conseil des Ministres (on parle « Conseil de L’UE » aujourd'hui),
 L’Assemblée parlementaire (on parle de « Parlement européen » aujourd'hui),
 La CJCE (Cour de justice des communautés européennes).
Succès car dès le 1er juillet 1968, l’Union douanière est une réalité. Les échanges entre la CEE et le
reste du monde vont être multiplié par 3, dynamise l’Europe.

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§2 : L’évolution des communautés


Rationnaliser les institutions avec le traité de Bruxelles du 8 avril 1965. Ce traité institue un Conseil des Ministres
unique, une Commission, un Parlement et une Cour de justice. Une institution pour les 3 traités.

- Aménagement du droit de vote des Etats. Au sein de L’UE, mécanisme de vote à la majorité qualifiée au
lieu de l’unanimité, permet de ne pas bloquer le processus décisionnel. On dote les 3 institutions de
ressources propres issues des recettes provenant du tarif douanier commun en 1970.

- Rendre + démocratique les institutions européennes par le suffrage universel direct au niveau du
Parlement européen (1976). Les 1ères élections européennes ont lieu le 12 juin 1979.

- Entre 1957 et 1986 stagnations de la construction européenne (choc pétrolier, les Etats se replient sur
eux).

- L’Acte unique européen (AUE) révise le traité de Rome, signé les 17 et 28 février 1986.
 créer un grand marché intérieur mis en place le 1er janvier 1993.
 intégrer de nouvelles politiques au niveau communautaire (politique sociale et l’environnement)
 mise en place d’une coopération politique européenne. Echec du fait de crise en ex-Yougoslavie.

- Restructurer l’Europe et de créer L’UE par le Traité de Maastricht entré en vigueur le 1er novembre
1993.L’intérêt de ce traité est qu’il va reposer sur 3 piliers.
① Le 1er pilier est le pilier dit communautaire. On trouve notamment les politiques communautaires et
un nouveau volet sera rajouté en 1992, le volet union économique et monétaire. Dans ce 1 er pilier on va
surtout voter à la majorité qualifiée.

② Le 2nd pilier est celui dit de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC). Il instaure la
coopération politique.
③ Le 3ème pilier va beaucoup mieux fonctionner. Il est relatif à la coopération dans les domaines de la
justice et des affaires intérieures (ex : terrorisme).
Les modalités de vote dans ces 2 derniers piliers demeurent l’unanimité car ce sont des domaines sensibles
(politique étrangère).

Maastricht présente aussi l’intérêt de créer la citoyenneté européenne. On crée surtout l’Union
économique et monétaire, passage progressif à l’euro à partir de 1999. Maastricht renforce aussi les
compétences de la CEE. Par exemple, l’éducation, la culture, la santé publique… rentrent au niveau de
l’Europe. Elles deviennent des politiques communautaires. Mais aussi l’énergie ou les télécommunications.
 Ce traité est donc globalement considéré comme un succès.

ELARGISSEMENTS :
 1er élargissement en 1973 : Grande-Bretagne, le Danemark et l’Irlande. Norvège refuse.
 2nd élargissement : Grèce en 1981, l’Espagne et Portugal en 1986.
 Finlande, l’Autriche et la Suède en 1995.

Grande vague d’adhésion le 1er mai 2004 avec 10 Etats d’Europe centrale et orientale (Estonie, Lettonie, Lituanie,
Malte, Chypre, Pologne, Hongrie, Slovénie, Slovaquie et République tchèque).
 Roumanie et Bulgarie en 2007, Croatie en 2013.

Le Conseil européen de Copenhague de 1993 a décidé de conditionner l’entrée de nouveaux Etats. On commence à
s’inquiéter du niveau de démocratisation de ces Etats, du traitement des minorités, ou encore de l’économie de marché
(fin de l’économie planifiée).
Ils vont établir 3 critères pour accepter de nouveaux Etats membres :
 disposer d’institutions stables garantissant la démocratie, la primauté du droit, les droits de
l’homme et le respect des minorités.
 une économie de marché viable.
 reprendre l’acquis communautaire et avoir mis en place une administration spécifique pour
l’intégrer.
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§3 : La refondation des communautés européennes

Traité d’Amsterdam signé le 2 octobre 1997 (EEV 1er mai 1999) aménage le traité de Maastricht.

 Approfondit la coopération intergouvernementale entre les Etats, on s’attache surtout au pilier justice et droit
d’asile. Ce traité crée un espace de liberté et de sécurité de la justice.
A l’époque, la convention de Schengen sera signée dans le cadre du traité d’Amsterdam entre 13 Etats. Il permet la libre-
circulation des personnes sans contrôle aux frontières. Ce traité organise aussi la coopération policière entre pays
adhérents.
 Fait entrer dans le domaine communautaire (1er pilier) les questions liées à la police, à la justice et
l’emploi.
 Approfondir la notion de coopération renforcée = permettre aux Etats qui le souhaitent d’aller + loin dans la
mise en œuvre d’actions communes dans le domaine de la PESC.
 Traité a minima
Ce traité n’a pas permis d’adapter les institutions européennes à l’élargissement. Institutions qui étaient
adaptées pour une Europe à 6 Etats. Il fallait rééquilibrer les institutions face à l’arrivée de nouveaux Etats.
- Traité de Nice le 26 février 2001 (EEV 1 er février 2003). Son objectif principal était de préparer
l’élargissement de 2004. Pondération des voix affectées à chaque Etat lors des votes à la majorité qualifiée,
nombre de Commissaires (un seul par Etat et non de 2), nombre limité de Parlementaires européens. Nice a
surtout réussi à réformer le système juridictionnel, notamment avec la possibilité de créer de
nouvelles juridictions.

- 2004, Révision du traité de Nice. Remanier profondément toute la structure des traités européens et de
doter L’UE d’une véritable Constitution. Projet de Constitution pour l’Europe pour mener L’UE vers la
fédération. On intégrait aussi la Charte des droits fondamentaux à la Constitution. Constitution très audacieuse
et qui pouvait heurter la souveraineté de certains Etats.
Ce texte n’a pas été ratifié par les 25 Etats. Ce traité constitutionnel n’est donc jamais entré en vigueur 
euroscepticisme.

- Traité de Lisbonne signé le 13 décembre 2007 (EEV 1er décembre 2009), critiqué. Ne fait que procéder
à une révision.
Modifie le schéma institutionnel de l’UE. On instaure un Président à la tête du Conseil européen (réunion des chefs
d’Etats et de Gouvernement de l’Europe). On donne une valeur juridique à la Charte des droits fondamentaux. Et enfin
l’UE acquiert la personnalité juridique.
Le traité renforce les politiques communautaires et abandonne le système des 3 piliers. Il va surtout renforcer la
Commission et essaye de donner plus de légitimité au Parlement européen.
Le traité de Lisbonne a déjà été révisé les 28 et 29 octobre 2010 dans le cadre de la crise de l’euro pour
donner la faculté d’aider financièrement un pays de la zone euro.

Aujourd'hui, on estime que l’UE est en crise depuis 2005-2008 :


 une crise économique de 2008. Puis la crise de la dette publique des Etats membres de la zone
euro à partir de 2010, qui a touché l’Italie, l’Espagne et surtout la Grèce.
 une crise politique (sortie de l’UE de la Grande-Bretagne en 2016). L’UE, même si elle reste la 1ère zone
de libre-échange au monde, a échoué à constituer un ensemble économique cohérent car
certains pays sont plus endettés que d’autres (différences de niveaux économiques).
La discipline imposée par l’euro, mais également le climat europhobe, la question des migrants,
nous éloignent aujourd'hui véritablement de l’idée d’une fédération.
 Une Europe en crise aussi au niveau institutionnel car instituions toujours peu transparentes.

PARTIE 1 : LE SYSTEME JURIDIQUE DE L’UNION EUROPENNE

On appelle ordre juridique un ensemble organisé et structuré de normes juridiques possédant ses propres sources, doté
d’organes et de procédures capables d’émettre ces sources, de les interpréter et de les sanctionner en cas de non-respect.

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CJCE dit que le droit communautaire constitue un ordre juridique propre, intégré au système juridique des
Etats membres (COSTA contre ENEL CJCE, 15 juillet 1964). La CJCE parle aussi d’un ordre juridique intégré au
système juridique des Etats membres. Dans ses rapports avec les droits nationaux, de nombreux ppes vont s’appliquer
permettant d’assurer la primauté du DUE sur les droits nationaux. Les traités constituent la Charte
constitutionnelle d’une communauté de droits. Il s’agit d’une communauté de droits dans laquelle les Etats ont
accepté librement de limiter leurs droits souverains.

Chapitre 1 : Les sources du droit de L’UE

Les sources du DUE sont dégagées par la doctrine, mais aussi des traités et de la pratique des institutions et
des Etats membres. Le DUE* est l’ensemble des règles de droit applicables dans l’ordre juridique de L’UE. Il y aura des
sources écrites et des sources non-écrites comme les PGD. Ce qui compte le plus quand il y a un conflit entre les normes,
ce sont les sources primaires, les traités.

Section 1 : Les sources primaires


§1 : La composition du droit primaire

A) Les traités originaires

Depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, le droit primaire comprend l’ensemble des traités constitutifs.

Il y a le traité de Lisbonne (2 volets) :


 Le Traité sur L’UE (TUE). Ce traité est à l’origine le traité de Maastricht.
 Et le Traité sur le fonctionnement de L’UE (TFUE), initialement le traité de Rome.
La 3ème grande source est le Traité instituant la communauté européenne de l’énergie atomique (adopté le 25
mars 1957).

Il n’y a pas que les traités. A ces sources primaires, à ces traités, s’ajoutent les annexes et les protocoles qui ont la
même valeur que les traités. En revanche, les déclarations bien qu’elles accompagnent les traités, n’ont pas la même
valeur juridique que les traités, elles n’ont pas d’effet contraignant. Ces déclarations ont une forme d’autorité politique.

Ces traités sont autonomes les uns par rapport aux autres. Donc cela vaut aussi pour le traité sur l’Euratom.
Chaque traité, notamment le TUE et le TFUE, précise son champ d’intervention.

B) Les traités et les actes complémentaires

Le droit primaire comprend aussi tous les traités qui sont intervenus ultérieurement, qui ont modifié ou
complété les traités originaires.
- Qu’est-ce qui constitue le droit primaire ?
 Les traités ultérieurs qui ont opéré une révision d’ensemble des traités originaires (AUE,
traité de Maastricht, le traité d’Amsterdam, le traité de Nice).
 Les traités ultérieurs qui ont opéré une révision partielle des traités originaires. (traité de
Bruxelles en 1965 qui est le traité de fusion des institutions).
 Les actes institutionnels ayant conduit à une adaptation ponctuelle des traités originaires. Ce
sont des actes généralement pris directement par le Conseil, mais ensuite approuvés par les Etats
membres selon leur procédure constitutionnelle respective. Ex : le cas des ressources propres. C’est une
décision du Conseil du 21 avril 1970 qui a la même valeur qu’un traité.
 Les traités d’adhésion et surtout ceux relatifs aux conditions d’adhésion à l’UE. Ils prévoient
aussi souvent des mesures transitoires.

§2 : Le contenu des traités


La structure de tous les traités communautaires est identique : 4 catégories de clauses.

A) Le Préambule

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Tous les Préambules des traités abordent les buts ultimes, éthiques et politiques qui animaient les Etats
fondateurs. Aussi les buts socio-économiques, mais qui sont malgré tout censés trouver leur traduction par
des actions concrètes de L’UE.

Ce Préambule est une sorte d’identité politique énumérant les principes sur lesquels est fondée L’UE.
Aujourd’hui, c’est l’Article 2 du TUE qui rappelle les valeurs fondatrices de l’Union. « L'Union est fondée sur les
valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d'égalité, de l'État de droit, ainsi que de respect des
droits de l'homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités. Ces valeurs sont communes aux
États membres dans une société caractérisée par le pluralisme, la non-discrimination, la tolérance, la justice, la
solidarité et l'égalité entre les femmes et les hommes ».
On ne saurait considérer cet Article 2 comme une simple déclaration d’intention puisque ces différents
principes sont appréciés au moment de l’adhésion et pourraient justifier une suspension, voire une
exclusion de L’UE.

La CJ n’exclut pas de se référer au Préambule. Elle utilise ces principes afin d’interpréter les autres Articles des traités.
Lorsqu’elle utilise le Préambule pour interpréter d’autres dispositions du traité on parle « d’interprétation finaliste ». La
CJ reconnait d’ailleurs à ces ppes un caractère fondamental.

B) Les clauses institutionnelles


- Liste les institutions (organisation, fonctionnement, pouvoirs, financement de l’UE, fonction publique, relations
extérieures).
Avec Lisbonne, ces clauses institutionnelles sont partagées entre le TUE et le TFUE. Par ex, l’Article 17 du TUE
précise les institutions et notamment le rôle de la Commission européenne qui veille à l’application des traités ainsi que
des mesures adoptées en vertu de ces traités. C’est faire de la Commission la garante des traités mais aussi de l’intérêt
général.

C) Les clauses matérielles

Clauses qui vont définir le régime économique et social instauré par le traité en cause. Objectifs à atteindre
et ensuite les institutions devront appliquer ces articles et les mettre en œuvre. Marge de manœuvre très
importante aux institutions.

Au sein de ces clauses matérielles, distinction entre clauses directement applicables (effet direct : les particuliers peuvent
s’en prévaloir devant un juge) et les clauses qui ne sont pas directement applicables mais qui devront être exécutées par
les institutions.

D) Les clauses finales

Les clauses finales, comme tous les traités internationaux, concernent les modalités d’engagement des
parties, ainsi que l’entrée en vigueur et la question de la révision du traité.
Ces traités sont ensuite soumis à la ratification par chacun des Etats membres de l’Union conformément à leurs règles
constitutionnelles (droit national). Ensuite, le traité entrera en vigueur seulement après que l’on ait déposé les
instruments de ratification notamment auprès de la Commission.
§3 : Le statut du droit primaire
A) Nature du droit primaire

Arrêt Les Verts du 23 avril 1986 : la CJ a présenté le traité de Rome comme étant la « Charte constitutionnelle d’une
communauté de droits ». Dans tous ses arrêts, la Cour de justice a une appréciation constitutionnelle des
traités.
Les traités doivent être considérés comme la « Constitution » de l’Union.

B) Autorité du droit primaire


1) Prééminence du droit primaire

Arrêt Les Verts de 1986 (CJ) : le droit primaire regroupe les normes suprêmes de l’ordre juridique de l’Union. Les traités
se situent au sommet de la hiérarchie de l’ordre juridique de l’Union.

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Les traités ne précisent pas eux-mêmes cette supériorité. Or cette supériorité des traités découle aussi de l’Article 263 du
TFUE qui donne compétence à la CJUE pour annuler tous les actes émanant des institutions pour violation des traités ou
de toute règle de droit relative à leur application.

Cette supériorité vaut pour les actes dérivés (ex : règlements ou directives), mais aussi pour le droit
conventionnel, càd que les traités communautaires vont l’emporter sur les autres traités conclus entre eux par les Etats
membres.

De même, les traités communautaires l’emportent aussi sur les traités internationaux conclus par les Etats
membres avec des Etats tiers en cas de divergence. On peut toujours librement conclure des traités internationaux.
Traité Euratom : contrôle préventif systématique de tous les projets d’accords qu’un Etat membre souhaiterait signer
avec un Etat tiers, avec une organisation internationale et entrant dans le champ d’application du traité Euratom. Càd
que si la France voulait conclure un accord avec la Chine pour développer des centrales nucléaires par exemple (ce qui
entre dans le champ du traité Euratom), la France devrait communiquer à la Commission, qui va apprécier la
compatibilité d’un accord tiers avec le traité Euratom.
A contrario, les Etats ne peuvent se prévaloir d’accords antérieurs, ou du DUE pour ne pas respecter leurs
engagements.

Donc on peut conclure ici à une véritable prééminence du droit primaire sur l’ensemble de l’ordre juridique de
L’UE.

2) Révision du droit primaire

La révision du droit primaire est une procédure assez complexe. Le traité de Lisbonne a procédé à une
récriture totale du processus de révision des traités, càd à une réécriture de l’Article 48 du TUE.

Il existe 2 types de révisions. On a une procédure dite ordinaire et des procédures dites simplifiées.

a) La procédure ordinaire de révision des traités

Cette procédure va faire intervenir d’abord les institutions, on fait aussi appel aux Etats membres dans le cadre d’une
conférence intergouvernemental (CIG).

Le Gouvernement de tout Etat membre, le Parlement européen ou la Commission peut prendre l’initiative de
soumettre au Conseil (tous les Ministres, à ne pas confondre avec le Conseil européen ou encore avec le Conseil de
l’Europe) des projets visant à réviser les traités.

Ces projets sont transmis par le Conseil au Conseil européen (on passe du niveau ministériel au niveau chefs
d’Etats et de gouvernements) et aussi notifiés aux Parlements nationaux (Article 48, §2 du TUE). Par la suite, on
rentre dans le cadre d’un processus décisionnel. Le Conseil européen après consultation du Parlement européen et de la
Commission peut adopter à la majorité simple une décision favorable à l’examen de la révision proposée.
 Si le Conseil européen adopte une décision favorable, le Président du Conseil européen va convoquer une
convention composée des représentants des Parlements nationaux, des chefs d’Etats ou de Gouvernements
des Etats membres, du Parlement européen et de la Commission.
 (Si le Conseil européen vote de manière négative, on abandonne la procédure de révision).
NB : On pourra associer à cette convention la BCE (Banque centrale européenne) si le projet de révision des
traités prévoit des modifications institutionnelles dans le domaine monétaire.

La convention va examiner le projet de révision et va adopter par consensus (= unanimité) une


recommandation à une conférence des représentants des gouvernements des Etats membres.
- Le Conseil européen peut décider, pour accélérer les choses, à la majorité simple, mais après approbation du
Parlement européen (après son accord), de ne pas convoquer la convention. C’est le cas notamment lorsque les
révisions proposées ne sont pas importantes. Dans ce cas, le Conseil européen lui-même va établir le mandat
pour une conférence des représentants des gouvernements des Etats membres (article 48, §3 du TUE).

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Dans un 2nd temps, se réunit donc la CIG qui est composée des représentants des gouvernements des Etats
membres. La CIG est convoquée en vue d’arrêter d’un commun accord les modifications à apporter au traité.
Une fois qu’on s’est mis d’accord sur le projet de révision, le traité qui contient les modifications entrera en
vigueur après avoir été ratifié par tous les Etats membres conformément à leurs règles constitutionnelles
(Article 48, §4 du TUE).

Parfois, les Etats ne souhaitent pas nécessairement ratifier le traité modificatif.


Si à l’issue d’un délai de 2 années à compter de la signature d’un traité modifiant un traité existant les 4/5
des Etats ont ratifié ce nouveau traité et que le reste des Etats rencontre des difficultés pour ratifier
(changement de politique, 3ème référendum négatif, …), le Conseil européen se saisit de la question (Article 48, §5 du
TUE) et soumet ce processus de révision à un arbitrage. Il peut notamment réunir une nouvelle CIG, ou il se réunira
et des arbitrages seront pris au sein de ce Conseil européen pour lever les derniers obstacles à une ratification.

b) Les procédures simplifiées

Elle est simplifiée parce qu’elle implique seulement les institutions de l’Union et ne requiert pas la
convocation d’une convention ou d’une CIG. Parfois même, les procédures de révision simplifiées ne requièrent par
l’approbation, l’accord, des Etats membres.

La révision simplifiée des traités avec l’approbation des Etats membres (Article 48, §6 du TUE) :

Le Gouvernement de tout Etat membre, le Parlement européen ou la Commission peut soumettre au Conseil
européen des projets mais visant la révision de tout ou partie des dispositions de la 3 ème partie du TFUE. Cette
3ème partie est relative aux politiques et actions internes de l’Union.
Ensuite, le Conseil européen va adopter (ou non  fin du processus) une décision modifiant tout ou partie des
dispositions de cette 3ème partie du TFUE. Ici, le Conseil européen statue à l’unanimité après consultation du
Parlement européen et de la Commission. (La BCE est consultée si on va réviser des éléments portant sur le domaine
monétaire). Puis, cette révision entre en vigueur qu’après son approbation par les Etats membres.

Cependant cette révision ne peut accroître les compétences attribuées à l’Union dans les traités.

 La révision simplifiée des traités sans l’approbation des Etats membres (Article 48, §7) :

Révisions concernant la politique étrangère de sécurité commune. Dans ce domaine, le Conseil européen peut
décider à l’unanimité et dans certaines circonstances, le Conseil sera autorisé à statuer à la majorité qualifiée.
Dans le domaine de la PESC c’est généralement l’unanimité qui s’applique. Il est possible de réviser ce mode
de vote (à la majorité qualifiée). Le traité de Lisbonne prévoit le processus de révision des modalités de vote
dans le domaine de la PESC.

En revanche, cette procédure de révision ne s’applique qu’au domaine de la PESC et non au


domaine de la défense.

Section 2 : Les sources dérivées du droit communautaire

Les sources dérivées : l’ensemble des actes unilatéraux adoptés par les institutions communautaires.
L’Article 288 du TFUE définit cette fameuse nomenclature officielle des actes dérivés : « Pour exercer les compétences de
l’Union, les institutions adoptent des règlements, des directives, des décisions, des recommandations et des avis ».

§1 : La nomenclature des sources du droit dérivé


A) Le règlement

Source la + importante du droit dérivé. C’est à travers le règlement, que va s’exprimer le pouvoir législatif de l’Union.
Efficacité comparable à celle de la loi au niveau national.

Le règlement a 3 caractéristiques essentielles :

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① Le RÈGLEMENT A UNE PORTÉE GÉNÉRALE : prescriptions générales et impersonnelles. La Cour de justice


évoque clairement la fonction législative du règlement.
Selon le traité de Lisbonne, il n’existe qu’une seule catégorie de règlement. En pratique, on distingue 2
règlements :
o Le règlement de base : celui adopté sur proposition de la Commission puis adopté par le Conseil ou co-
décidé par le Conseil et le Parlement européen. Ces règlements de base fixent des ppes généraux.
o Le règlement de base peut être assorti d’un règlement d’exécution : règlement qui va appliquer le
règlement de base, sera adopté par la Commission. Le règlement d’exécution va respecter le
règlement de base, il ne fait que préciser des points.

Du fait de cette portée générale, le règlement s’applique à tous. Ce sont les Etats qui sont les principaux
destinataires, càd des catégories indéterminées globales. Le règlement se distingue de la décision qui généralement
vise un destinataire particulier.

② Le RÈGLEMENT EST OBLIGATOIRE DANS TOUS SES ÉLÉMENTS. Le règlement s’impose à tous, aux Etats mais
aussi aux institutions, voire ressortissants.

Conséquences :
o Les dispositions d’un règlement ne peuvent être appliquées de manière incomplète ou sélective.
o De même, un Etat membre doit s’abstenir de tout acte susceptible de remettre en cause l’autorité du
règlement puisque le règlement « va déployer tous ses effets de droit aussi longtemps que son illégalité
n’est pas établie par le juge communautaire ».
o Un Etat ne peut se dispenser unilatéralement de l’observation des obligations découlant d’un règlement.
o Un Etat ne peut pas non plus invoquer sa propre législation ou sa pratique administrative pour justifier
le non-respect de ses obligations découlant d’un règlement.
Le règlement s’oppose à la directive. La directive n’est obligatoire que quant au résultat à atteindre.

Il peut arriver qu’un règlement soit incomplet. Dans cette hypothèse, il reviendra aux autorités nationales ou
communautaires le soin de prendre des mesures de mise en œuvre.

③ Le RÈGLEMENT EST DIRECTEMENT APPLICABLE DANS TOUT ETAT MEMBRE (seule catégorie d’acte pour
laquelle le traité le prévoit expressément). Il produit par lui-même et automatiquement, sans aucune
intervention des Etats, les effets juridiques dans l’ordre interne des Etats membres et doit recevoir
application sur leur territoire. On dit que le règlement est d’ « applicabilité directe ».
Cela entraine 2 conséquences :
 le règlement s’insère directement en tant que tel dans le bloc de légalité, càd dans
l’ensemble des règles de droit d’un Etat, dès son entrée en vigueur sans aucune intervention
des Etats. La Cour de justice est très claire puisque les Etats membres ont l’obligation de ne pas
entraver l’effet direct propre au règlement. Il s’agit d’un devoir qui incombe aux Etats. Ce devoir est
« une condition indispensable à l’application simultanée et uniforme des règlements communautaires
dans l’ensemble de la communauté » (arrêt de la Cour de justice du 10 octobre 1973, VARIOLA).
La Cour de justice va préciser qu’exceptionnellement, certaines dispositions des règlements
pouvaient prévoir l’adoption de mesures d’application soit par les Etats, soit par le
législateur communautaire lui-même. On peut avoir des mesures d’exécution d’un règlement, mais
ces mesures d’exécution ne peuvent se justifier que dans la mesure nécessaire à la stricte exécution du
règlement. Sinon, ça risque de mettre en péril l’application uniforme des règlements sur l’ensemble du
territoire de l’Union.

 Le règlement constitue donc une source directe de droit. La Cour de justice a précisé que
règlement produit des effets immédiats càd que le règlement produit des effets aptes à
conférer aux particuliers des droits que les juridictions nationales ont l’obligation de
protéger. « Un particulier peut directement invoquer à l’appui d’un recours devant le juge national un
règlement communautaire » (Cour de justice, 14 décembre 1971, arrêt POLITI). Le juge national
aura l’obligation de protéger les droits que le particulier tire du règlement.

B) La directive
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La directive une méthode de législation assez originale, qu’on appelle « à 2 étages » car elle s’apparente à la
technique de la loi cadre complétée par les décrets d’application. Adaptée à la complémentarité entre les niveaux
étatiques et les niveaux de l’Union dans le système européen intégré. Effectivement, la norme européenne va fixer
des objectifs à atteindre que les Etats membres devront mettre en œuvre.

La création de la directive se justifie parfaitement puisque la directive offre à côté du règlement (outil
d’uniformisation juridique), une formule fondée sur un partage des tâches et une collaboration entre les Etats
et l’Europe. Instrument plus respectueux des particularités nationales.
L’Article 288, alinéa 3 du TFUE définit « La directive* lie tout Etat membre destinataire quant au résultat à atteindre,
tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens ».
La directive semble fondée sur la coopération avec les Etats.

On a aussi l’impression que la directive laisse un espace aux Etats où ils pourraient défendre leurs intérêts particuliers.
Ce n’est pas le cas. La directive reste un instrument juridique qu’il faut respecter. La liberté laissée aux Etats est
simplement une liberté d’adaptation, càd que les Etats sont seulement libres de choisir les moyens et les formes les plus
appropriés, les plus adaptés au contexte national pour mettre en œuvre une directive.

Avant l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, la pratique distinguait entre les directives de base adoptées directement
par les institutions sur le fondement d’une disposition du traité et les directives d’exécution permettant d’assurer
l’application des directives de base. La Cour de justice avait validé cette pratique avec toujours le bémol que la directive
d’exécution soit conforme à la directive de base.

Le traité de Lisbonne a mis fin à cette distinction. Désormais, le TFUE repose sur la différenciation entre les actes
législatifs, les actes non-législatifs (« directive déléguée ») et les actes d’exécution (« directive d’exécution »).
Donc normalement, l’ensemble des Etats membres est concerné par un acte législatif adopté sous la forme d’une
directive. Mais lorsqu’une directive est adoptée sous la forme non législative, elle ne peut viser qu’une partie des Etats
membres. Dans ce cas, on utilisera plutôt la notification.
S’agissant des caractères de la directive :
La directive apparait bien comme un acte obligatoire original car il procède à une intervention successive
des institutions de l’Union puis des autorités nationales.
① Tout d’abord, les institutions de l’Union définissent à travers la directive un ou plusieurs
objectifs à atteindre.
② Il revient ensuite aux Etats membres d’en déterminer librement les modalités
d’application pratiques.
La directive présente une obligation absolue de résultat à la charge des Etats membres. En
revanche, les moyens sont libres. Tout en laissant en principe le choix des formes et des moyens pour
atteindre l’objectif assigné.

Donc cet acte de droit dérivé, selon la Cour de justice, est un mode de législation ou de règlementation indirect
auquel les institutions vont recourir lorsqu’elles souhaitent harmoniser, rapprocher, les législations
nationales. Liberté laissée aux Etats membres doit s’entendre comme une liberté de choisir les formes et les moyens les
plus appropriés càd les plus efficaces, pour assurer l’ « effet utile » des directives.

Les directives communautaires sont des actes de plus en plus précis, détaillés et dont les objectifs sont à ce point précis
que la marge d’appréciation laissée aux Etats est de plus en plus réduite, voire parfois inexistante.
Cette attitude des institutions est contestable puisque on s’éloigne de la définition de la directive donnée à l’Article
288, alinéa 3 du TFUE. Pourtant, cette pratique a été validée par la Cour de justice qui considère que la
compétence laissée aux Etats est fonction du résultat que le Conseil et la Commission entendent voir atteindre. La Cour
de justice se retranche donc derrière les institutions. Egalement, la directive peut préciser plus ou moins la teneur des
résultats escomptés.

La Cour de justice rappelle toujours que les directives doivent être appliquées et adaptées par les autorités nationales à
toutes les nouvelles circonstances qui se présentent. Ça signifie que ce n’est pas parce qu’on a transposé une directive,
que cette dernière a épuisé ses effets. Donc les droits nationaux doivent s’adapter et évoluer si le texte d’une
directive est appelé lui-même à évoluer.

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La directive est-elle un acte de portée générale comme un règlement ?


Dans la mesure où une directive communautaire ne lie, ne s’impose, qu’à un ou plusieurs Etats membres, on a pensé de
prime abord, qu’elle n’était pas, à la différence du règlement, un acte de portée générale.
En réalité, et en pratique, les directives s’appliquent généralement à tous les Etats membres. Et donc les directives ont
vocation à produire des effets juridiques sur l’ensemble du territoire de l’Union. C’est pourquoi, la Cour de justice a
estimé que finalement les directives avaient comme le règlement la qualité d’acte à portée générale.

Contrairement au règlement, la directive n’est pas directement applicable. On dit que la directive ne déploie
qu’indirectement des effets juridiques à l’égard des particuliers et par le seul intermédiaire des mesures de transposition.
Les justiciables ne sont donc touchés qu’à l’expiration du délai de transposition s’il n’y a pas eu de mesures de
transposition.

Une fois le délai de transposition passé, si l’Etat n’a pas adopté une loi ou un règlement de transposition, que se passe-t-
il ? Dans certaines circonstances, cette directive pourra conférer malgré tout des droits aux particuliers dont ils pourront
se prévaloir devant les juridictions nationales (Cour de justice, 19 novembre 1991, FRANCOVICH et BONIFACI).

Sous l’obligation de transposition : Dès lors qu’on est destinataire d’une directive, les Etats ont l’obligation d’en assurer
la transposition intégrale dans le délai fixé au cas par cas par chaque directive. On peut aller de 2 à 5 ans en termes de
délai. Ce délai est impératif. Si un Etat ne transpose pas, ou de manière incomplète, ou mal, il pourra être condamné par
la Cour de justice pour manquement à ses obligations.
Cette obligation de transposition découle de l’Article 4, §3 du TUE. Cet Article pose un principe assez original qui n’existe
pas dans les droits nationaux. C’est un principe qui est censé maintenir la cohésion entre les Etats. Il s’agit du PRINCIPE DE
LA COOPÉRATION LOYALE DES ETATS À L’ÉGARD DE L’UE. Càd que les Etats vont tout mettre en œuvre pour appliquer
correctement le DUE.
Les juridictions françaises ont suivi le raisonnement de la Cour de justice. Cette obligation de transposition posée
avant tout par le DUE, a désormais en droit français son équivalent, que le Conseil constitutionnel et le Conseil
d'Etat ont déduit de l’Article 88-1 de la Constitution.
 Le Conseil constitutionnel a jugé que la transposition d’une directive en droit interne résulte
d’une exigence constitutionnelle à laquelle on ne peut faire obstacle qu’en raison d’une
disposition expresse contraire à la Constitution (décision 10 juin 2004 : loi pour la confiance dans
l’économie numérique).
 Le Conseil d'Etat est allé dans le même sens en jugeant que l’Article 88-1 de la Constitution imposait
également une obligation constitutionnelle de transposition des directives (8 février 2007, arrêt société
ARCELOR Atlantique et Lorraine).
Il s’agit là d’une obligation constitutionnelle qui s’ajoute aux obligations du DUE.

La Cour de justice admet que les Etats membres ne sauraient se voir reprocher de ne pas avoir transposé une directive,
tant que le délai de transposition n’est pas expiré. Mais pendant cette période ces derniers doivent s’abstenir de prendre
des dispositions de nature à compromettre sérieusement le résultat prescrit par la directive.

A l’issue de ce délai, le droit interne doit être en conformité avec les prescriptions de la directive . La
transposition à un caractère impératif. Un Etat ne peut invoquer les difficultés internes pour ne pas ou mal
transposer. Il ne peut pas non plus invoquer certaines dispositions de son ordre juridique national comme par
exemple une directive ou des lois déjà existantes, ou encore des contraintes administratives.

L’acte de transposition doit être suffisamment contraignant, doit imposer une règle de droit impérative.
 Par ex, la Cour de justice a estimé qu’une circulaire transposant une directive n’avait pas une valeur
juridique suffisamment contraignante. Condamnation de la Belgique (1986). En France, la circulaire* est
un acte qui va préciser aux administrations comment interpréter le droit, donc un acte indicatif.
 De même, une simple pratique administrative ne saurait non plus être considérée comme un acte de
transposition. Une pratique administrative* est une méthode de travail d’une administration, se modifie
facilement. Seuls les actes juridiques obligatoires peuvent constituer des mesures nationales de
transposition.

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Parfois, la Cour de justice estime que s’il existe déjà dans les Etats des principes généraux du droit constitutionnels ou
administratifs suffisamment contraignants, il ne sera pas nécessaire de le retransposer par le biais d’une disposition
législative ou réglementaire.

Les actes contraignants de transposition doivent être suffisamment précis et clairs afin que soit satisfait le principe de
sécurité juridique. Il faut que « les justiciables soient en mesure de connaitre la plénitude de leurs droits ». Pour la Cour,
seule une transposition correcte de la directive mettra fin à l’état d’incertitude.

Parfois, on a des directives complexes qui poursuivent plusieurs objectifs. Pour la Cour de justice, les
mesures de transposition doivent respecter l’équilibre entre les différents objectifs poursuivis dans le
respect du principe de proportionnalité. Parfois les Etats vont prendre plusieurs textes quand il y a plusieurs
objectifs.

Quand un Etat ne transpose pas, il ne peut pas demander à ses citoyens de respecter les objectifs assignés par les
directives. Un Etat qui n’a pas transposé dans les temps, outre le fait qu’il peut se faire condamner par la Cour
de justice, peut aussi voir ses justiciables faire un éventuel recours contre lui pour défaut de transposition.

Une fois que la transposition a eu lieu, les Etats membres ont l’obligation de notifier à la Commission (en sa
qualité de gardienne des traités) toutes les mesures nationales de transposition des directives qu’ils adoptent.

Si à l’expiration du délai prescrit pour la transposition, la Commission estime que la transposition est
inexistante, incorrecte ou tardive, c’est elle qui va introduire un recours en constatation de manquement
devant la Cour de justice. Ce recours est visé aux Articles 258 à 260 du TFUE.

Le traité de Lisbonne a introduit une nouveauté dans la surveillance des Etats. On peut également faire un recours
en manquement contre l'Etat qui a manqué à son obligation de communication des mesures nationales.
Depuis Lisbonne, lorsqu’un Etat a mal transposé, en fonction de l’Etat (récidiviste ou non), la Commission peut proposer
à la Cour de justice d’infliger à l'Etat le paiement d’une somme forfaitaire qu’il estime adaptée aux circonstances.
C) La décision

C’est le seul acte dont le traité de Lisbonne ait modifié les caractéristiques. Auparavant, les traités ne connaissaient
que la décision à caractère individuel = décision désignait nominativement son destinataire.
Aujourd'hui, l’Article 288 alinéa 4 du TFUE, dispose que « La décision est obligatoire dans tous ses éléments. Lorsqu'elle
désigne des destinataires, elle n'est obligatoire que pour ceux-ci ».

La décision est avant tout un acte obligatoire.


Avec Lisbonne désormais, on constate qu’il existe 2 sortes de décisions :
 Les décisions de portée individuelle
 Les décisions à portée générale.

LA DECISION DE PORTEE INDIVIDUELLE :


Ici, la décision va s’opposer au règlement. La décision de portée individuelle* produit ses effets à l’égard des
destinataires désignés et identifiés. Ça peut être un ou plusieurs Etats membres, ou une ou plusieurs personnes
physiques ou morales. Ex : La Commission peut adresser à des entreprises qui auraient formé une entente illicite, les
condamnant au paiement d’une amende.
Cependant ces décisions ne sont obligatoires que pour leurs seuls destinataires. Elles se présentent donc comme
des actes individuels d’exécution du DUE. Et donc actes auxquels les institutions peuvent recourir à chaque fois
qu’elles entendent appliquer les dispositions du TFUE à des cas particuliers.

La question s’est posée de savoir si on est face à un règlement ou une décision (parfois, personne n’est nommé).
Dans ce cas, la Cour de justice va rechercher si l’acte en question concerne individuellement des sujets déterminés, càd
des sujets identifiables. Un des rôles de la Cour de justice est de faire de l’interprétation du droit.

LA DECISION A PORTEE GENERALE (Article 288, alinéa 4 du TFUE) :


Désormais, les institutions de l’Union peuvent adopter des décisions de portée générale. Lisbonne n’a fait
que conforter une pratique et l’écrire dans le traité.

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Avant Lisbonne, ces décisions à portée générale entraient dans la catégorie des actes dits « atypiques ». Le Conseil avait
pris l’habitude d’adopter en dehors de tout cadre juridique des actes de portée générale. Mais qui n’avaient pas de
destinataires spécifiques. Ce n’est pas des règlements car le Conseil appelait ça des « décisions ». Donc les institutions ont
une certaine liberté pour dénommer certains actes. Il fallait donc réintégrer ces décisions à portée générales dans la
nomenclature officielle.

Pourquoi on adopte de telles décisions ? Le traité prévoit aujourd'hui dans quelles circonstances peuvent être
adoptées des décisions à portée générale.
Exemples :
 L’Article 203 du TFUE qui prévoit que le Conseil, par le biais d’une décision à portée générale, peut
établir le régime d’association applicables aux pays et territoires d’outre-mer.
 Le Conseil aussi, selon l’Article 346 §2 du TFUE, peut modifier la liste des produits relevant du matériel
de guerre. L’intérêt est de déterminer sur quoi on peut faire l’embargo.
Il y a une dizaine de domaines dans lesquels le Conseil peut adopter des décisions à portée générale. Notamment il
adopte ces décisions de portée générale à l’unanimité. Donc chaque Etat peut peser.

Il n’en demeure pas moins que ces décisions constituent bien des actes obligatoires dans tous ses éléments. A
ce titre, la décision se distingue de la directive qui n’est obligatoire seulement que quant aux résultats à
atteindre.
D) Les recommandations et les avis

On a tendance à les désigner comme des « actes non-décisoires », càd qu’ils n’ont pas de force contraignante. Ils ne
constituent pas des sources de droit au sens complet du terme.
Les avis et les recommandations sont expressément visés à l’Article 288 alinéa 5 du TFUE. Cet Article se contente de dire
que « les recommandations et les avis ne lient pas ».
Les avis et les recommandations ont toujours constitués d’utiles instruments d’orientation des
comportements des législations. Ils sont adoptés par les institutions communautaires. Ils sont à destination
des Etats membres, des personnes physiques ou morales.

Par le biais des avis, une institution va exprimer une opinion, notamment sur une ligne de conduite à
respecter. Par exemple, lorsqu’un Etat rencontre des difficultés pour harmoniser sa législation avec le droit
communautaire.

S’agissant des recommandations, elles sont une forme d’explication non contraignante. Donc c’est une
explication sur la portée du droit donnée à un Etat. C’est une sorte de directive non-obligatoire.

Ces avis et recommandations constituent une source indirecte relativement importante du rapprochement
des législations nationales. Les Etats acceptent bien ces conseils.

La difficulté c’est que la Cour de justice s’est penchée sur la valeur juridique de ces actes. La Cour de justice a estimé que
certains avis ou certaines recommandations n’étaient pas dépourvus de tout effet juridique et que les juges nationaux
sont tenus de les prendre en considération lorsque ces avis ou recommandations éclairent l’interprétation des
dispositions nationales. On considérera que ces avis et recommandations ont une portée juridique obligatoire
lorsqu’ils viennent compléter une disposition du droit communautaire, disposition ayant elle-même un
caractère contraignant. La Cour de justice l’a affirmé dans un arrêt du 13 décembre 1989, arrêt Grimaldi.

Le traité de Lisbonne a ajouté un Article nouveau concernant les recommandations à l’Article 292 du TFUE. Cet Article
lorsqu’on l’interprète réduit le nombre des institutions susceptibles d’adopter des recommandations. Désormais, la
recommandation ne peut être adoptée que par 3 institutions : le Conseil, la Commission et la BCE.

§2 : Le régime d'édiction du droit dérivé


A) La compétence et le choix de l’acte

 Le principe de la compétence d’attribution

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L’Article 288 du TFUE ne détermine pas les hypothèses d’utilisation des différents actes obligatoires qu’il
énumère, on ne sait pas quand il faut adopter un règlement ou une directive. On se contente de lister les actes
existants.

Donc qui peut intervenir ? Pendant longtemps, l’utilisation de ces instruments juridiques était réservée qu’à
certaines institutions. Par exemple, dans le traité CECA, seule la Haute Autorité pouvaient adopter des actes.
Puis avec Maastricht (1992), en plus de la Commission et du Conseil, le Parlement européen va être admis à
adopter les règlements, les directives et les décisions conjointement avec le Conseil. S’ajoute aussi la BCE.

Peut-on tout le temps adopter ces actes ?


Il est clair que cette faculté d’adopter des actes ne leur est ouverte que dans les conditions prévues par les traités.
On est face ici à l’application du principe de la compétence d’attribution qui domine l’ensemble du système
institutionnel de l’Union. Donc les institutions n’ont pas un pouvoir normatif général. On ne peut pas adopter
comme on le souhaite un règlement ou une directive. C’est le traité de Lisbonne aujourd'hui qui va préciser dans
quelles circonstances les actes peuvent être adoptés.

 Le principe de légalité
Chaque institution agit dans les limites des attributions qui lui sont conférées dans les traités. Un Article d’un
traité peut prévoir l’acte juridique auquel les institutions peuvent recourir. C’est donc le traité qui donne une base
légale à l’intervention des institutions. Dans une telle hypothèse, les institutions n’ont pas le choix des actes à
adopter. Par ailleurs, souvent, elles n’ont pas non plus le choix de la procédure à suivre pour adopter l’acte.
La procédure est assez complexe car une institution doit prendre en considération et respecter toutes les prescriptions
figurant au traité. Ex : Le Conseil peut intervenir en matière de PAC. Le Conseil peut intervenir en vertu de l’Article 43 du
TFUE. Il doit ensuite respecter les objectifs assignés à la PAC. Ces objectifs sont visés à l’Article 39 du TFUE. Et tout cela
en excluant toute discrimination entre producteurs et consommateurs dans la communauté (Article 40 du TFUE).

Par ailleurs, ce droit dérivé, donc issu des traités, doit respecter l’ensemble du bloc de la légalité de l’Union. Càd
toute la législation antérieure, y compris les engagements internationaux.

 Le principe de non-interversion des instruments normatifs


Parfois le traité ne précise pas la catégorie d’actes à prendre par le Conseil ou la Commission, ou laisse le choix entre
plusieurs actes. La Cour de justice a élaboré des règles d’intervention des institutions. Dans ce cas-là, la Cour de justice a
précisé que lorsque le traité n’indique pas l’acte à prendre, s’applique d’abord le principe de liberté, càd que l’institution
communautaire a le choix de l’acte à adopter.

Cependant, la Cour de justice a voulu mettre un garde-fou vis-à-vis de ces institutions. Cela a d’abord été posé dans la
jurisprudence puis dans l’Article 296 du TFUE avec Lisbonne.
« Lorsque les traités ne prévoient pas le type d'acte à adopter, les institutions le choisissent au cas par cas, dans
le respect des procédures applicables et du principe de proportionnalité ».
On fait aussi appel au bon sens des institutions, càd que l’institution va recourir à l’acte qui lui semble le plus approprié
compte-tenu de la nature et du contenu des mesures envisagées.

La Cour de justice a précisé également à ce titre que lorsqu’il existe un doute sur la base juridique d’intervention, le choix
de cette base juridique doit se fonder sur des éléments objectifs susceptibles de contrôle juridictionnel parmi lesquels
figure le but et le contenu de l’acte concerné.

B) Les formes de l’acte dérivé

Généralement, les actes de droit dérivé se présentent de manière identique :

 Dans un 1er temps, sont identifiés, indiquées, les dispositions en vertu desquels ils sont adoptés.
Donc il n’y a pas de terme particulier pour citer cette partie de l’acte. Mais les textes sont précédés de la mention
« Vu ».

 On retrouve dans ces actes de droit dérivé, en second lieu, le visa. Le visa concerne les propositions, les
avis et les consultations recueillis.

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Effectivement, c’est généralement la Commission qui fait les propositions de texte. De même, on est dans un
domaine où il y a beaucoup d’intérêts croisés, donc les institutions communautaires ont pris l’habitude de
consulter pour avis de très nombreux organismes. Certains avis sont obligatoires, on doit absolument les
recueillir. Il est donc important de rappeler quels avis ont été recueillis.

Cependant, les traités imposent parfois de recueillir certains avis. La Cour de justice va donc, lorsqu’elle est
saisie du contrôle de légalité d’un acte de droit dérivé, vérifier si ces consultations obligatoires ont bien eu lieu.
Tout dépend de l’importance de l’acte, mais il peut arriver que la Cour de justice annule un acte de droit dérivé
pour défaut de consultation.

 Ensuite, 3ème élément avant le texte lui-même, on a la motivation de l’acte. La motivation de l’acte
commence toujours par le terme « Considérant ».

 Ensuite, figurera le texte à proprement parler de la directive, du règlement ou de la décision.

 Puis on a l’authentification de l’acte symbolisée par la signature du Président de l’institution qui l’a
adopté. Là encore, il s’agit d’une formalité substantielle, càd importante d’un point de vue juridique, elle est
obligatoire. Donc à défaut de signature, ou d’incompétence de l’auteur de la signature, la Cour de
justice peut prononcer l’annulation de l’acte.
La Cour de justice estime qu’elle peut soulever d’office, càd qu’elle va le faire d’elle-même. Elle va parler de
« violation de l’authentification de l’acte ». Cette signature participe de la sécurité juridique.

- Concernant la motivation :
Pour la Cour de justice, cette obligation de motivation relève de la sécurité juridique. Si on veut contester un
acte, il faut savoir pourquoi il a été écrit. Effectivement, l’Article 296 alinéa 2 du TFUE pose désormais l’obligation
générale de motiver les actes juridiques. La motivation de l’acte doit être adaptée à sa nature et faire apparaitre
de façon claire et non-équivoque les raisons sur lesquelles l’acte est fondé (Cour de justice, 9 juillet 1969, Italie
contre Commission). Ici, l’acte adopté par la Commission ne permettait pas au gouvernement italien de comprendre les
justifications de la mesure prise à son égard. C’est donc à la Cour de justice d’apprécier si la motivation est suffisante.

La Cour de justice fait du cas par cas. Effectivement, elle va apprécier les circonstances de l’espèce. Par
exemple, lorsqu’on impose une amende à une entreprise, la Cour de justice exige que la décision soit très motivée, car
souvent les amendes peuvent remettre en cause l’équilibre économique d’une société.
En fonction de l’acte, mais aussi en fonction du contexte. Plus le contexte est compliqué (ex : période de crise
agricole, période de sécheresse) plus la motivation est longue.

La motivation dépend aussi de l’ensemble des normes juridiques régissant la matière. C’est pourquoi dans certaines
circonstances, la Cour de justice peut accepter une motivation sommaire, notamment lorsque l’institution dispose d’une
large marge d’appréciation.

Il est clair que tout défaut de motivation de la part d’une institution, risque d’entraîner l’annulation de l’acte
par la Cour de justice pour défaut de motivation.

C) L’entrée en vigueur des actes de droit dérivé

L’entrée en vigueur est plutôt déterminée par les règles nationales.

Il y a d’abord une règle fondamentale. Pour qu’un acte pris par une institution s’impose aux justiciables (au
sens large), il faut que ces derniers puissent en prendre connaissance. Les actes communautaires doivent
donc être soit publiés, soit notifiés.
 L’Article 297 du TFUE dispose que les actes législatifs, ici entendus comme le règlement, la directive ou la
décision à portée générale, doivent être publiés au JOUE (Journal Officiel de L’UE).
Les directives qui ont un destinataire précis, de même que les décisions, sont simplement notifiées et
entrent en vigueur du fait de cette notification.

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La NOTIFICATION a lieu soit par envoi postal recommandé avec accusé de réception, soit par remise contre reçu à une
personne ayant qualité pour les recevoir. En pratique, la notification se fait aux représentants permanents des Etats à
Bruxelles. La notification doit être faite dans la langue de l'Etat, de l’entreprise ou de la personne physique.

La notification est opposable pendant 2 mois à compter du jour de sa réception.

La PUBLICATION se fait simplement par inscription au JOUE qui parait dans toutes les langues officielles (24 langues).

A partir de quand le JOUE est-il opposable à ses destinataires ? Le jour de la publication est le jour où le JOUE est
disponible au siège de l’Office des publications officielles à Luxembourg (disponible par internet). Pour des raisons
pratiques, les institutions prévoient une entrée en vigueur retardée, càd une entrée en vigueur postérieure.
Généralement c’est 20 jours.

Rappel : Pour la directive, il ne faut pas confondre la date d’entrée en vigueur et la date de transposition.
Effectivement, c’est uniquement à la date de transposition que peut commencer à courir la possibilité
d’introduire un recours en manquement contre l’Etat. Et donc une directive produira des effets juridiques à l’égard
d’un Etat dès sa notification.

D) L'application dans le temps du droit dérivé

Principe de l’effet immédiat des réglementations nouvelles. Càd qu’une disposition, dès qu’elle est adoptée,
dès son entrée en vigueur, s’applique immédiatement et va gérer toutes les situations futures. Un acte ne vaut
que pour l’avenir.

Autre principe : les actes de droit dérivé bénéficient d’une présomption de validité. Les actes sont considérés
valides, càd qu’ils déploient leurs effets juridiques tant que leur illégalité n’a pas été établie par le juge, ou qu’ils n’ont
pas été retirés régulièrement, par les institutions dont ils émanent.

De là découle un autre principe : Les intéressés n’ont donc aucun droit acquis au maintien d’une
réglementation.
En revanche, on a un principe original qui a été développé dans L’UE, principe issu du droit allemand : c’est la théorie
de la protection de la confiance légitime de la réglementation existante. Cela signifie que les intéressés peuvent
de bon droit, de bonne foi, penser qu’une législation est toujours appliquée, et que par exemple, ils disposent toujours de
certains droits. Cette théorie peut être invoquée lorsqu’on est poursuivie devant une juridiction au motif qu’il aurait agi
illégalement. Dans ce cas, non seulement la personne qui l’invoque ne sera pas condamnée (si elle arrive à le prouver),
mais elle peut même obtenir des dommages-intérêts de la part de l’Union.

Comment justifier cela ? Dans certains domaines, les institutions communautaires doivent prendre soin de ne
pas supprimer ou modifier une réglementation, sans avertissement, et en l’absence de mesures transitoires.
Et ce à chaque fois qu’elles ne peuvent invoquer un intérêt public péremptoire, càd impératif, pour justifier cette
modification ou suppression de la législation. Elle ne peut le faire que dans des domaines complexes (industriels ou
agricoles). Et il ne faut pas qu’un opérateur économique puisse prévoir cette évolution.
Cette protection de la confiance légitime constitue une règle supérieure du droit protégeant les particuliers,
càd qu’on ne peut pas changer le droit sans prévenir. Ainsi, L’UE a pu être condamnée pour avoir modifié sans
informer les quotas laitiers.

Se pose aussi la question de la rétroactivité. Il y a un principe général selon lequel la législation ne vaut que pour
l’avenir. Ici, la Cour de justice se montre plus souple que le droit national, notamment le droit français, et a
prévu des règles d’application rétroactives des règlements européens, ainsi que la question de leur retrait .
C’est surtout le règlement qui est concerné ici.

 S’agissant de l’application rétroactive, la Cour de justice estime qu’un acte ne vise pas normalement des
situations antérieures à son entrée en vigueur. Cependant elle estime que parfois ce principe de non-
rétroactivité peut être remis en cause dès lors que le but à atteindre l’exige et lorsque la confiance
légitime des intéressés est dument respectée (Cour de justice, 25 janvier 1979, arrêt Racke).
Il y a un domaine où on n’aura jamais de règlement rétroactif. C’est le domaine pénal.

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 Retrait du règlement possible. La Cour de justice a consacré le principe de la révocabilité des actes
illégaux, càd leur retrait de l’ordre juridique par l’autorité compétente.

 Le retrait des actes créateurs de droit illégaux est possible, mais doit l’être dans un délai
raisonnable. Un délai raisonnable est entre 2 ou 3 mois en France. La Cour de justice laisse aux
institutions de 6 mois.

 Le délai de retrait pour les actes non créateurs de droit illégaux doit encore être raisonnable
pour la Cour de justice. Il est évalué par la Cour entre 2 et 3 ans.

 L’irrégularité de l’acte ne suffit pas pour qu’il soit retiré. Pour la Cour de justice, l’auteur de
l’acte devra justifier la nécessité de retirer l’acte. Ce qui signifie que la Cour de justice demande à
l’institution qui a adopté l’acte de « réaliser » une balance des intérêts, càd que l’institution doit
confronter l’intérêt public avec les intérêts privés en cause.

§3 : Les sources du droit dérivé « hors nomenclature » (hors Article 288)

Effectivement, la nomenclature, la liste des actes figurant à l’Article 288 du TFUE n’est pas limitative, càd qu’elle
n’interdit pas l’existence d’autres formes d’actes juridiques adoptés par les institutions. Il en existe 2
catégories.
A) Les actes atypiques
1) Règlements intérieurs

Les règlements intérieurs* sont les règlements dont les institutions ont été invitées par le traité à se doter pour leur
fonctionnement. Chaque institution dispose obligatoirement d’un règlement intérieur.

Ils n’ont qu’une portée générale. Ils traitent par exemple de qui doit adopter l’ordre du jour, les sessions de réunion, le
lieu où se trouve le Parlement, … Ces règlements intérieurs n’obligent que les institutions concernées.
Normalement, la Cour de justice ne devrait pas avoir du contentieux sur les règlements intérieurs.
Cependant, la CJ a déjà été amenée à contrôler la légalité d’une décision prise par la Commission par rapport
à son règlement intérieur.

2) Directives, recommandations et avis à effet interne

NE PAS CONFONDRE ces directives avec celles vues précédemment.

Ces actes atypiques sont en réalité adressés par une institution à une autre dans le cadre du mécanisme
décisionnel de l’Union. Ce sont des actes liés au fonctionnement normal des institutions.

Ces actes non plus n’ont pas d’effet juridique dès lors qu’ils s’inscrivent bien dans le cadre de ces relations
interinstitutionnelles. C’est le cas par exemple des avis rendus par le Parlement ou encore le Comité économique et
social dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions. Ou des directives que le Conseil adresse à la Commission pour
orienter les négociations qu’elle mène avec un pays tiers, notamment s’agissant des adhésions.
La Commission peut aussi adresser des recommandations au Conseil afin d’être autorisée à ouvrir les négociations.

Il n’y a pas de subordination d’une institution l’une sur l’autre. Mais on s’informe.

B) Les actes des institutions non prévus par les traités

Les institutions elles-mêmes ont pris la liberté de créer des actes, contrairement aux actes atypiques qui sont
prévus par le traité. Dès la création des communautés, les institutions ont pris l’habitude d’adopter des actes sous
diverses dénominations. On intitule ces actes par exemple des « résolutions », des « délibérations », des
« conclusions », des « déclarations », des « communications », …

NON PRÉVU PAR LES TRAITÉS : Se pose la question de leur valeur juridique. Le Parlement européen s’est
inquiété le premier du « faussement du mécanisme institutionnel ».
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La CJ reconnait parfois valeur juridique à ces actes. Mais pas de jurisprudence stable (au cas par cas).
L’adoption de ces actes a été analysée comme répondant à un double besoin.
 Les institutions avaient besoin de se doter d’instruments de régulation internes à l’UE.
 La nécessité de se doter d’une forme de doctrine administrative, càd une sorte de ligne de
conduite dans tel ou tel domaine.

Deux exemples d’institutions :

① Les actes du Conseil. Il adopte beaucoup de résolutions et déclarations qui généralement peuvent
s’apparenter à des programmes d’action.
Le Conseil réunit les Ministres qui programment des actions. Il adopte des déclarations qui s’apparentent à des
programmes d’action visant à établir les principes fondamentaux sur lesquels l’action communautaire devra être basée
à l’avenir et visant à fixer des délais dans lesquels cette action devra se réaliser.

On a aussi eu des résolutions qui ont pu aussi marquer certaines étapes dans la construction
communautaire.
 C’était le cas par exemple de la résolution du 11 mai 1966 concernant le financement de la politique agricole.
 C’est aussi le cas de la résolution du 22 mars 1971 (Conseil + représentants des Etats) pour le lancement de l’Union
économique et monétaire.

Pour la Cour de justice, s’agissant de leur valeur juridique, ce sont avant tout des déclarations d’intention exprimant
essentiellement la volonté politique du Conseil. Ce sont aussi de simples documents préparatoires à de futurs actes
obligatoires. Ces actes ne produisent pas d’effet de droit dont les justiciables pourraient se prévaloir en justice. La Cour
de justice l’a dit à plusieurs reprises (Cour de justice, 13 novembre 1964, Luxembourg et Belgique).

A contrario, la Cour de justice peut parfois estimer que malgré la dénomination de certains des actes adoptés par le
Conseil, ce dernier a pu adopter un acte juridique à portée obligatoire. Par exemple, il y a des déclarations ou des
résolutions qui ont pu être considérées comme des actes obligatoires et donc être annulées par la Cour de justice. Ex :
Une résolution adoptée par le Conseil le 3 novembre 1976, et portant sur la protection des ressources dans les zones de
pêche. La Cour de justice a estimé que cette résolution imposait de véritables obligations aux Etats et qu’ainsi, sur cette
base, un Etat pourrait être condamné pour non-respect de cette résolution. Ici condamnation pour manquement.

② La Commission a pris l’habitude d’adopter des actes non prévus au traité, comme par exemple des
communications, ou encore des délibérations, des déclarations, …
Les communications en réalité vont préciser la doctrine qu’elle entend suivre dans l’exercice de son pouvoir
discrétionnaire. (La Commission représente l’intérêt général, l’intérêt de L’UE. A ce titre, elle a un large pouvoir
d’initiative, un large pouvoir d’intervention (= pouvoir discrétionnaire)). Elle présente ces communications comme
de simples avis à caractère général, donc sans portée juridique, càd qu’on ne peut pas invoquer une
communication devant un juge.
La Cour de justice va apprécier au cas par cas leur réelle portée juridique. Elle a pu juger qu’une communication
portant sur le contrôle des aides d’Etat (encadrées pour éviter la concurrence déloyale) liait les Etats et les institutions.
Finalement, cette communication de la part de la Commission était susceptible d’un recours devant la Cour de justice.

Section 3 : Le droit issu des engagements extérieurs de l'Union

L’UE adopte de très nombreux accords du fait notamment de sa participation croissante aux relations
internationales. L’UE a signé plus de 700 accords bilatéraux et près de 200 accords multilatéraux. Ces
accords constituent bien une source de droit dans l’ordre juridique de l’Union.

§1 : Les accords de l’Union


A) Le droit de traiter avec des Etats tiers et des organisations internationales

Avant l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, seules les communautés européennes étaient dotées d’une
personnalité juridique. Mais avec le Traité d’Amsterdam, L’UE a eu la compétence pour conclure des accords
internationaux avec des pays tiers (hors Etats membres de l’Union) et/ou des organisations internationales,
notamment dans le domaine de la PESC et dans le domaine de la coopération policière et judicaire.

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 Le Traité de Lisbonne met fin à cette situation ambiguë, puisque désormais l’Union dispose
de la personnalité juridique pleine et entière (Article 47 du TUE).

Selon l’Article 216 §1 du TFUE, l’UE peut conclure un accord avec un ou plusieurs pays tiers ou organisations
internationales lorsque le traité le prévoit. L’Union peut aussi conclure un accord lorsqu’il est nécessaire de réaliser
l’un des objectifs visés par le traité. Elle peut aussi conclure un accord lorsque cet accord est prévu dans un acte juridique
contraignant de l’Union.
 On dit aujourd'hui que L’UE dispose désormais en sa qualité de « légataire universel » de la
Communauté européenne d’une compétence externe très étendue.
 L’UE peut en 1er lieu conclure accords internationaux dans tous les domaines où elle s’est vue
expressément conférer une compétence externe par les traités.

Exemples : Article 37 du TUE : l’Union peut ainsi conclure des accords dans le domaine de la PESC.
De même, elle peut aussi conclure des accords au titre d’une compétence externe dans le domaine monétaire,
dans le domaine du change.
On peut aussi avoir des accords internationaux au titre d’une compétence externe dans le domaine commercial.
Il y a aussi l’environnement comme domaine externe. Ou encore la coopération de développement.

 En dehors de ces hypothèses prévues par les traités, L’UE peut aussi conclure des accords dans les
domaines pour lesquels elle dispose seulement d’une compétence interne dès lors que la conclusion de tels
accords est notamment prévue dans un acte juridique contraignant de l’Union.
Ou encore, elle peut adopter un tel accord qui est nécessaire pour réaliser un objectif poursuivi par les
traités.

Cette extension des compétences était réalisée par la Cour de justice, avant d’être validée par le Traité de
Lisbonne. A chaque fois, la Cour de justice invente des théories pour justifier. La Cour de justice a un rôle fédérateur.
Pour étendre la compétence externe de l’UE, la Cour de justice a élaboré la théorie des compétences
implicites.
La Cour de justice a estimé sur cette base que la CEE était compétente, même en l’absence d’une attribution expresse par
les traités, pour conclure des accords externes dans tous les domaines où elle dispose d’une compétence interne en vue de
réaliser un objectif déterminé par le traité et où l’adoption d’un engagement international apparait nécessaire à la
réalisation de cet objectif.
Ex : Dans le domaine de la propriété intellectuelle et des brevets. C’est une matière qui normalement ne relèverait que
des 28 Etats. On peut aussi conclure des accords internationaux dans ce domaine, même si le traité ne le prévoit pas.
 Compétence très large
L’Union dispose donc d’une compétence externe implicite pour conclure des accords internationaux. Sous
réserve cependant que 1) les institutions de l’Union aient déjà adopté des mesures internes, que 2) la
participation de l’Union à l’accord soit nécessaire à la réalisation de l’un des objectifs de l’Union, et que 3)
l’accord lui-même vise à régir des situations internes à l’Union.
La Cour de justice s’est prononcée sur cette théorie de compétences implicites : Cour de justice, 26 avril 1977, avis n° 1-
67, Projet d’accord du fonds européen d’immobilisation de la navigation intérieure.

Dans le 1er cas, lorsque l’objet de l’accord concerne un domaine de compétence où L’UE s’est vue conférer une compétence
externe et expresse par les traités. Dans ce cas, l’UE conclut seule l’accord, au nom des 28.
En revanche, si l’objet de l’accord va au-delà des seules compétences de l’Union, et qu’on se situe dans un domaine de
compétences partagées, les Etats membres sont associés à L’UE pour conclure l’accord. Il s’agit dans ce cas d’un « accord
mixte ». Quand l’UE signe un accord dans les compétences implicites, elle signe seule.

Dès leur entrée en vigueur, les accords et les traités internationaux font partie de l’ordre juridique de L’UE. Et
donc ces accords vont lier les institutions de l’Union ainsi que les Etats membres. En revanche, un traité ne sera
opposable aux justiciables que lorsqu’il aura été publié. Généralement, le traité est précédé d’une présentation, d’une
décision du Conseil de portée générale et présentant ce traité. Le traité vient ensuite en annexe.

La Cour de justice a eu à se prononcer sur la valeur juridique de cette décision du Conseil. Elle a estimé que la décision
du Conseil précédant le traité ne s’apparentait pas à une procédure d’introduction, de réception du traité
dans l’ordre juridique de l’Union.

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B) Les actes unilatéraux pris par les organes créés par les accords externes de l’Union

Un certain nombre de traités conclus par l’UE peuvent instituer des organes de gestion qui vont se voir
confier le pouvoir d’adopter des actes obligatoires unilatéraux. Ce qui signifie qu’ils n’ont pas besoin d’une
ratification, d’une approbation, pour lier les parties au traité.

L’UE adopte de nombreux accords d’association et de coopération avec des Etats tiers.
Par exemple avec les pays de la Méditerranée. Cet accord a créé un Conseil. Et ce Conseil a adopté des actes.
Autre exemple : la Convention de Lomé a créé également un Conseil des Ministres. Ce Conseil des Ministres prend des
actes au nom des Etats dans certains domaines.

La Cour de justice a elle-même validé le fait que ces institutions créées par les traités pouvaient réellement être à
l’origine d’actes normatifs, nouvelle source de droit dans l’ordre juridique communautaire. Il est possible de s’y référer y
compris pour les justiciables. Visibilité : doivent être publiés au JOUE.

C) La place des accords externes dans la hiérarchie des normes de l’Union

1) La subordination des accords externes au droit primaire

Les accords externes de l’Union, quels qu’ils soient, sont d’un rang inférieur au droit primaire. Les accords
internationaux doivent donc être systématiquement conclus en application des traités.

La Cour de justice n’a pas la capacité d’annuler un accord externe (partie tiers). Cependant, elle peut annuler la
décision portant conclusion de l’accord externe, et notamment lorsque la Cour constate son incompatibilité avec le traité
ou avec un principe général du droit (PGD).
Difficulté : L’annulation de la décision portant conclusion de l’accord international aura pour conséquence de priver
d’effet juridique l’accord externe dans l’ordre juridique de l’Union.

La Cour de justice a également le pouvoir de contrôler la compatibilité d’un accord avec les traités avant
même la conclusion définitive de l’accord externe (Article 218 §11 du TFUE). En cas d’incompatibilité entre un
traité communautaire et un accord externe, il faut modifier l’accord externe ou réviser le traité communautaire. Quelle
que soit la solution, les accords internationaux (accords externes) sont inférieurs au traité communautaire.

2) L’autorité des accords externes sou le droit dérivé

Les accords externes sont supérieurs au droit dérivé dans la mesure où ces accords lient les institutions
(Article 216, §2 du TFUE). Donc l’incompatibilité d’un acte émanant des institutions avec un accord externe est
susceptible d’entrainer l’annulation de cet acte par la Cour de justice. De même, le droit dérivé va être interprété à la
lumière des accords internationaux et en conformité avec ceux-ci (Cour de justice, 10 septembre 1996, Commission
contre Allemagne).

§2 : Les accords conclus par les Etats membres


A) Les accords conclus entre les Etats membres

1) Les accords entre Etats membres en application des traités constitutifs

Avant l’entrée en vigueur de Lisbonne, les traités prévoyaient parfois la possibilité pour les Etats membres
de conclure entre eux des accords afin d’assurer l’exécution du droit de L’UE.
Les Etats avaient pour habitude de conclure de telles conventions dans le domaine de la protection des personnes, ou
encore des accords relatifs à l’élimination de la double imposition à l’intérieur de la communauté. On avait aussi des
accords entre Etats portant sur la reconnaissance mutuelle des sociétés.

Ces conventions, une fois adoptées par la moitié au moins des Etats membres entraient en vigueur dans les Etats
membres qui les avaient adoptés.

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Le traité de Lisbonne va mettre un terme à la pratique de ces conventions, mais sans remettre en cause celles
antérieurement signées. Aujourd'hui, ces actes conventionnels présentent un caractère exceptionnel.
Une difficulté pour la Cour de justice, c’est qu’ils échappent à tout contrôle de légalité de la part de la Cour de justice.
Pourquoi ? La Cour de justice estime que ces conventions ont étaient adoptées par les représentants des Etats membres,
mais qui n’agissaient pas en qualité des membres du Conseil, mais en qualité de représentants de leur gouvernement. De
même, la Cour de justice n’est pas compétente pour les interpréter, notamment dans le cadre d’un renvoi préjudiciel.

2) Les accords entre Etats membres en dehors des traités constitutifs

Avant l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, on avait constaté que les Etats membres pouvaient conclure,
dans le cadre de leur compétence internationale, des conventions qui intervenaient dans des domaines
autres que ceux traités par L’UE, mais qui concouraient à réaliser les objectifs des traités communautaires.
Domaines concernés ? Par exemple, le domaine des brevets. Ca concernait aussi les accords de Schengen de 1985.

Ces accords échappaient à la Cour de justice (car ils relevaient de la compétence internationale). Lisbonne a surtout
apporté des précisions. Lisbonne n’interdit pas de tels accords, sous réserve cependant que leurs dispositions
ne remettent pas en cause l’application d’une disposition des traités ou du droit dérivé. Surtout, il ne faut pas
que ces accords nuisent au bon fonctionnement des institutions de l’Union. C’est une jurisprudence régulière
depuis 1986 (Cour de justice, 15 janvier 1986, arrêt Hurd).

Là aussi il existe aujourd'hui en pratique peu d’accords qui sont adoptés dans ce cadre. Pourquoi ? Car L’UE
intervient aujourd'hui dans de nombreux domaines.

B) Les accords conclus par les Etats membres avec des Etats tiers ou des organisations
internationales

Distinct° selon que l’accord a été conclu avant ou après l’entrée en vigueur des traités constitutifs, ou l’adhésion à l’UE.

1) Les accords antérieurs à l’entrée en vigueur des traités ou à l’adhésion à l’Union

Les Etats ont pu adopter de tels traités avant l’entrée en vigueur des traités CEE ou avant leur adhésion.
Cette situation est aujourd'hui réglée par l’Article 351 alinéa 1er du TFUE. Cet Article dispose que « Les droits et
obligations résultant de conventions conclues antérieurement au 1 er janvier 1958 ou, pour les États adhérents,
antérieurement à la date de leur adhésion, entre un ou plusieurs États membres, d'une part, et un ou plusieurs États
tiers, d'autre part, ne sont pas affectés par les dispositions des traités ».
Donc les traités de l’Union n’ont pas à affecter les conventions conclues auparavant par les Etats. L’article 351
va imposer aux Etats membres de respecter leurs obligations résultant de conventions antérieures. Mais, les Etats ne
peuvent invoquer ces conventions internationales pour ne pas respecter ou pour se soustraire aux obligations que le DUE
leur impose.

De même, la question s’est posée de savoir si L’UE elle-même allait être liée par tous ces traités. L’Article 351 n’a pas non
plus pour objet d’opérer un transfert automatique à l’Union des engagements contractés par les Etats membres.
La Cour de justice cependant a considéré que l’Union pouvait, dans des domaines où elle dispose d’une
compétence exclusive, être liée par des accords internationaux conclus par les seuls Etats membres avant
leur adhésion. Ici, les droits et obligations de ces traités sont transférés à l’Union.
Il y a cependant une difficulté à cela. A chaque fois il faut recueillir l’accord des Etats tiers. Ça a été le cas
notamment par exemple dans le transport aérien (convention de Varsovie). Dans les années 70, a été intégré au DUE les
dispositions de l’affaire du GATT de 1949 alors que la CEE n’était pas membre.

On s’est posé la question de la compatibilité de ces accords avec les traités de L’UE. Si l’accord adopté avant l’adhésion
n’est pas compatible avec le traité de Lisbonne, l’Article 351 impose aux Etats de recourir à tous les moyens
appropriés afin d’éliminer les incompatibilités entre ces accords internationaux et les traités de l’UE.
Le 1er moyen est de recourir à la voie diplomatique, càd recourir à la négociation de la partie du traité
international qui ne serait pas compatible avec le DUE. En cas d’échec, si c’est impossible, l'Etat membre a
l’obligation de dénoncer unilatéralement son engagement international, càd le résilier).

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2) Les accords postérieurs à l’entrée en vigueur des traités, ou postérieurs à l’adhésion à


l’Union

Une fois qu’ils sont intégrés dans l’Union, les Etats ont l’interdiction de conclure des accords internationaux
susceptibles de porter atteinte aux obligations que leur impose le DUE.

Si tel est le cas, la Cour de justice pourra enclencher contre ces Etats une procédure de constatation en
manquement. L’Etat condamné devra prendre toutes les mesures pour mettre fin à l’infraction.
Cour de justice, 24 avril 2007, Commission contre Pays-Bas : Les Pays-Bas avaient maintenu en vigueur un
accord conclu sur le transport aérien avec les Etats-Unis alors que le transport aérien était devenu une
compétence exclusive de l’Union. Cet accord se révélait incompatible avec le DUE.

Lorsqu’il apparait qu’un accord est incompatible avec le droit de l’UE, l’Etat fait l’objet d’une procédure en manquement.
On va conseiller à l'Etat d’emprunter la voie diplomatique, càd celle de la renégociation de l’accord. Afin que cet accord
international devienne compatible avec le DUE. Il pourrait être envisageable que l’Etat membre suspende les effets du
traité international. Donc un Etat ne suspendra pas un traité sur son territoire, il va préférer le dénoncer, càd la résilier
unilatéralement.

Section 4 : Les sources non-écrites du droit de L’UE

La coutume est quasi inexistante en tant que source non-écrite du DUE. En revanche, il y a 2 autres sources
très importantes que sont la jurisprudence et les principes généraux du droit.

§1 : La jurisprudence de la Cour de justice

La Cour de justice s’est vu reconnaitre une fonction normative par les traités. Effectivement, les traités confient la
mission à la CJUE d’assurer le respect du droit dans l’interprétation et l’application des traités, notamment
l’Article 19 §1 du TUE.

L’Article 267 du TFUE confie à la Cour de justice le droit d’interpréter le droit primaire et le droit dérivé par
l’intermédiaire des questions préjudicielles qui lui sont posées par les juridictions nationales. A ce titre, la
Cour de justice dispose d’un très grand pouvoir d’interprétation. On parle même d’interprétation « authentique de
l’Union ». Ces interprétations sont obligatoires.

Or l’interprétation du DUE conduit souvent le juge communautaire à préciser le sens des dispositions, mais
aussi parfois à combler les lacunes du DUE. La Cour de justice ne se contente pas à seulement interpréter, expliciter
le droit. On dit que la Cour de justice joue un rôle créateur de droit, et apparait à ce titre comme un « législateur
d’appoint ».
C’est même un législateur précurseur car souvent, par le biais de ses décisions, la Cour de justice va anticiper
sur une législation à venir. C’est à ce titre que la jurisprudence de la Cour de justice, la jurisprudence entendue
comme l’ensemble de ses arrêts ET DE SES INTERPRÉTATIONS (ex : avis), constitue l’une des sources les plus
importante du DUE.

L’intervention la plus originale de la Cour de justice se fait au niveau de l’interprétation du DUE. Effectivement, la Cour
de justice a mis en place des méthodes d’interprétation très dynamiques qui lui permettent de dégager les
règles du DUE des principes que les 28 Etats devront ensuite respecter.

Il y a notamment 2 méthodes d’interprétation utilisée par la Cour de justice :


 1ère méthode : la MÉTHODE D’INTERPRÉTATION SYSTÉMATIQUE* : C’est l’interprétation des
normes dans le cadre de leur rapport systématique avec d’autres normes et avec l’ensemble de la
règlementation en tenant compte de leur place et de leur fonction dans un ensemble organisé.
Lorsqu’on interroge la Cour sur le sens à donner d’un Article d’un traité, la Cour va replacer cet article
dans son contexte et va le mettre en relation avec les autres § du même article ou du même chapitre du
traité, et globalement elle remet la disposition du traité dans le système général du traité.
C’est la méthode la plus simple.

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 2ème méthode : la Cour de justice utilise la MÉTHODE D’INTERPRÉTATION TÉLÉOLOGIQUE. Cette


méthode d’interprétation permet d’appréhender la règlementation en cause en la comparant, en
l’appréciant par rapport aux buts poursuivis par l’UE, càd qu’on va apprécier cette disposition par
rapport aux finalités de l’UE. On vérifie si la disposition est conforme ou non à l’esprit du traité.
Par exemple, on a posé la question pour savoir ce qu’il en était du principe d’égalité de rémunération
entre les hommes et les femmes. La Cour de justice a répondu qu’il s’agissait bien d’un principe auquel
concourrait L’UE. Les Etats devaient donc tout faire pour mettre en œuvre cette finalité.
Ces 2 méthodes d’interprétation du droit sont souvent utilisées conjointement par la Cour de justice.

Du fait de ces interprétations, rendues par la Cour de justice lorsqu’elle répond aux questions préjudicielles,
il est dit que le DUE est un « droit prétorien ».
C’est bien la Cour de justice qui a créée des ppes qui constituent le fondement du DUE, tel que le ppe de primauté du DUE,
le principe de l’effet direct du DUE ou encore le principe de parallélisme des compétences (càd que c’est une institution
qui prend un acte, c’est la même qui va le retirer).

§2 : Les principes généraux du droit

Les PGD constituent une sorte de « super-légalité de l’Union » dont la Cour impose le respect aux institutions mais aussi
aux Etats membres. La Cour de justice en fait un grand usage et ce d’autant plus qu’elle est compétente pour aller les
découvrir dans les systèmes juridiques des Etats et ensuite les intégrer dans l’ordre juridique de l’Union en qualité de
PGD. Les PGD sont aussi l’expression du travail d’analyse et d’interprétation de la Cour de justice.

A) Nature et origine des principes généraux du droit

Certains PGD sont issus directement du DUE. D’autres sont communs aux Etats. D’autres encore sont issus du droit
international public (très rare). D’autres PGD sont érigés par le juge de l’Union en droits fondamentaux.

1) Les PGD inhérents à L’UE

PGD inhérents à L’UE* : Il s’agit ici de l’ensemble des règles et des principes consacrés par les traités constitutifs et qui
sont à la base du système institutionnel de l’Union.

Par exemple, le principe de solidarité entre les Etats membres. La Cour de justice l’a dégagé dans les années 70. Elle
estime qu’on est 28 Etats solidaires.
Le principe de préférence de l’Union dans le domaine agricole, càd qu’il vaut mieux traiter entre Etats.
Le principe de libre circulation applicable aux personnes, aux marchandises, aux services et aux capitaux. Ce principe est
visé à l’Article 45 du TFUE.
L’interdiction des discriminations fondées sur la nationalité ou sur le sexe.
Le principe de coopération loyale. Surtout utilisé pour la mise en place des aides qui peuvent fausser le commerce.

2) Les PGD communs aux droits et système juridiques des Etats membres

La Cour de justice, de sa propre initiative, pour interpréter le droit ou pour assurer son respect, a transposé
dans l’ordre juridique de l’Union, parfois en les adaptant, les principes communs aux droits et systèmes
juridiques des Etats membres. (Cour de justice, 12 juillet 1957, arrêt Algera).

Par exemple le ppe de proportionnalité, le ppe de confiance légitime (droit allemand), le ppe de sécurité juridique, le ppe
de la bonne administration (droit français) le ppe de bonne foi ou le ppe d’égalité devant la réglementation éco.

Dans la plupart des cas, la Cour de justice se contente d’affirmer un principe, sans rechercher s’il est véritablement
commun à tous les Etats membres. Son objectif en dégageant des PGD, est de dégager à partir de l’esprit de
l’évolution des droits nationaux les règles et les principes les plus appropriés aux finalités des traités.

3) Les PGD international public (PGDI)

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Le droit international est un droit qui laisse beaucoup de libertés aux Etats. Donc le recours des PGDI est
limité parce que ces derniers se révèlent souvent incompatibles avec la spécificité de l’ordre juridique de
l’Union.
Il y a des principes qu’on ne peut pas appliquer au niveau du DUE.
Par exemple c’est le ppe de réciprocité, càd de respecter un accord international si l’autre partie cocontractante respecte
cet accord, n’existe pas en DUE : respect du DUE en qualité de membre de l’UE (obl°). Egalement, le droit pour les Etats
membres de se faire justice eux-mêmes car Cour de justice. On y est soumis dès lors qu’on a adhéré à L’UE.
De même, la faculté d’émettre des réserves. En droit international on peut émettre des réserves à un traité. On prévoit
que telle disposition ne s’applique pas à nous. Certes dans l’Union cette faculté existe, mais c’est transitoire, alors qu’en
droit international ce sont des réserves définitives.
Ces principes ne peuvent pas s’appliquer dans L’UE car avec l’Union a été établi un ordre juridique nouveau
qui crée des obligations réciproques entre Etats. On crée aussi un système complet de voies de recours, on a
créé un système intégré.

Malgré tout, la Cour de justice a identifié certains PGDI qui sont conciliables avec les exigences de l’ordre
juridique de l’Union. On a par exemple le principe pacta sunt servanda. Les traités s’appliquent, les traités sont la loi.
Egalement s’applique le principe de bonne foi régissant l’exécution des traités.
Ou encore le principe de territorialité. Par exemple s’agissant de l’application du droit de la concurrence de l’Union à des
entreprises extérieures à l’Union. Ou encore le principe qui s’oppose à ce qu’un Etat refuse à ses propres ressortissants le
droit d’accès à son territoire et d’y séjourner (Cour de justice, 4 décembre 1974, Van Duyn).

De même, la Cour de justice rappelle également que les compétences de l’Union s’exercent dans le respect du
droit international. Et notamment, la Cour de justice a admis que L’UE en tant que personne du droit international est
soumise aux règles du droit international de la mer.

4) Les droits fondamentaux


a) La protection des droits fondamentaux par la Cour de justice

Dès l’origine les traités constitutifs comportaient plusieurs dispositions qui touchaient les droits et garanties concernant
la sauvegarde des droits et la protection des personnes. Cependant aucun des traités ne contenait véritablement de
dispositions générales relatives à la protection des droits fondamentaux.

Initialement, la Cour de justice va même refuser de prendre en considération les droits fondamentaux tels qu’ils
figuraient dans le droit constitutionnel allemand, dans l’examen d’une requête dirigée contre une décision émanant de la
Haute Autorité de la CECA (Cour de justice, 4 février 1969, arrêt Stork).
Elle va très vite changer d’avis. Effectivement, dès novembre 1969 (arrêt du 12 novembre 1969, arrêt Stauder)
elle va reconnaitre que le respect des droits fondamentaux fait partie intégrante des PGD dont la Cour de
justice assure le respect.

La Cour de justice va ensuite indiquer que les instruments internationaux concernant la protection des
droits de l’Homme auquel les Etats membres ont adhéré, peuvent fournir des indications dont il convient de
tenir compte dans le cadre du droit communautaire. Elle affirme cela dans Cour de justice, 14 mai 1974, Nold.
Pourquoi la Cour de justice en quelques mois a-t-elle changé d’opinion ? Parce que certaines juridictions nationale, et
surtout la Cour constitutionnelle allemande (en 1967), avaient envisagé de contrôler elles-mêmes la validité des actes de
droit dérivé dès lors qu’ils étaient susceptibles de porter atteinte aux droits fondamentaux reconnus par la Constitution
allemande (appelée « Loi fondamentale allemande »). La Cour constitutionnel allemande est allée plus loin. Elle a refusé
dans une décision du 29 mai 1974 de faire primer le droit communautaire sur la Loi fondamentale (Constitution
allemande) en raison du fait que la CEE ne disposait pas d’un système de protection des Droits de l’Homme comparable à
celui qui existait en Allemagne.

La Cour de justice n’avait pas le pouvoir de modifier les traités. Elle va donc pour élaborer un catalogue de droits
fondamentaux spécifique à la CEE utiliser la technique des PGD afin de protéger les droits fondamentaux. Pour ce faire,
la Cour de justice va rechercher, dégager et consacrer ces PGD soit à partir des traditions constitutionnelles communes
des Etats membres, soit à partir des conventions internationales auxquelles les Etats ont adhéré ou coopéré, et
notamment la C°EDH du 4 novembre 1950 adoptée par le Conseil de l’Europe.

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 Désormais, les PGD consacrant ces droits fondamentaux s’imposent avant toute chose aux
institutions de l’Union, mais également aux Etats membres.
Aujourd'hui, les traités consacrent la reconnaissance de ces droits fondamentaux. C’est l’Article 6 §3 du TUE qui
consacre expressément les droits fondamentaux en qualité de PGD de l’Union. « Les droits fondamentaux, tels qu'ils sont
garantis par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et tels qu'ils
résultent des traditions constitutionnelles communes aux États membres, font partie du DUE en tant que principes
généraux ».

Quelques exemples de droits fondamentaux dégagés par la Cour de justice : la liberté d’expression, la liberté syndicale, la
liberté religieuse, la liberté d’association, la liberté d’exercer une activité économique, le droit de propriété, le droit à la
protection de la vie privée, ppe du respect des droits de la défense, ppe du contradictoire, ppe de sécurité juridique..

En revanche, il existe des principes que le juge communautaire a refusé de considérer comme des PGD. C’est
le cas du ppe de cohésion économique, sociale et territoriale car pas de définition de la notion de cohésion.

L’Acte unique européen (AUE) comportait déjà une référence explicite aux droits fondamentaux, mais c’est surtout le
traité de Maastricht, qui consacre la jp de la Cour de justice en matière de droits fondamentaux.

Dans ce contexte, l’adhésion de la CEE à la convention EDH a été proposée par la Commission européenne des Droits de
l’Homme (organe du Conseil de l’Europe). La Cour de justice va être sollicitée pour rendre un avis négatif sur cette
adhésion le 28 mars 1996. Elle estime qu’une telle adhésion n’est pas possible car la Communauté européenne n’a pas
compétence pour adhérer à la convention EDH. = 1er échec.

Malgré cet échec, le Traité d’Amsterdam va également apporter sa contribution à la protection des droits fondamentaux
en insérant dans le traité sur L’UE une procédure de sanction à l’encontre des Etats membres qui commettraient une
violation grave et persistante aux principes démocratiques sur lesquels l’Union est fondée (Article 7 du Traité
d’Amsterdam). De même, avec le Traité d’Amsterdam, le respect des principes démocratiques est une condition pour
adhérer à L’UE (Article 49).

En marge de la réunion des chefs d’Etats à Nice que sera proclamé pour la 1 ère fois la Charte des droits
fondamentaux de L’UE. L’intérêt de cette Charte c’est qu’elle établit pour la 1 ère fois un catalogue des droits
fondamentaux, largement inspiré de la convention EDH. Elle est aussi inspirée des traditions constitutionnelles des
Etats membres, de la Charte sociale européenne, et de la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des
travailleurs. L’intérêt = document unique qui intègre des droits civiques et politiques classiques, mais
également des droits économiques et sociaux. Cette Charte s’adresse aux institutions ainsi qu’aux Etats membres
lorsqu’ils mettent en œuvre le DUE. Lorsqu’elle a été proclamée, on ne lui a pas donné d’effet juridique. Cette
Charte avait surtout une portée politique.

Le projet de Constitution pour l’Europe présentait l’intérêt de donner à cette Charte une valeur contraignante. 2005 :
cette Constitution ne sera pas adoptée et donc il y avait un réel risque que cette Charte en tant que telle ne soit
« oubliée ». Donc les Etats se sont rappelés en 2007 de cette Charte et ils vont la proclamer le 12 décembre
2007.

Le traité de Lisbonne ne reprend pas non plus le texte intégral de la Charte. Cependant, à l’Article 6 §1 du
TUE, le traité dispose que « L'Union reconnaît les droits, les libertés et les principes énoncés dans la Charte des
droits fondamentaux de L’UE du 7 décembre 2000, telle qu'adaptée le 12 décembre 2007 à Strasbourg, laquelle
a la même valeur juridique que les traités ». Donc avec Lisbonne, la Charte des droits fondamentaux de l’Union se
voit reconnaître une valeur juridique identique à celle des traités. Et donc la Charte est aujourd'hui un acte juridique
contraignant. Aujourd'hui, on dit que la Charte constitue un « texte de base » pour la Cour de justice. Toutes
les juridictions communautaires n’hésite pas à y faire référence, notamment le Tribunal a rappelé que le droit des
justiciables à une protection juridique effective constitue un PGD de l’Union consacré par les Articles 6 et 13 de la
convention EDH, mais également par l’Article 47 de la Charte des droits fondamentaux.

A partir de 2006, la Cour de justice va contrôler certains actes de droit dérivé comme les directives par
rapport à la Charte des droits fondamentaux. La Charte des droits fondamentaux de L’UE a pu également
inspirer la Cour EDH qui n’hésite pas parfois à se référer expressément à la Charte pour faire évoluer sa

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propre jurisprudence. Pour la 1ère fois, en 2002, la CEDH a reconnu le droit des transsexuels à se marier. Elle a reconnu
ce droit en se basant sur l’Article 9 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union. On est revenu à la charge
puisque la question est revenue à l’ordre du jour de savoir si L’UE pouvait ou non adhérer à la convention
EDH.
A partir de 1996, on va tout faire pour aplanir le terrain, notamment l’Article 6 §2 du TUE a clairement planifier
l’adhésion de l’Union à la CEDH : « L'Union adhère à la Convention EDH ».
La Cour de justice va être saisie pour avis par la Commission européenne. Le 18 décembre 2014, elle rend un avis négatif.
Elle juge que le projet d’adhésion était susceptible de porter atteinte non seulement à la structure institutionnelle de
l’Union, mais aussi à ses caractéristiques. Elle a identifié 7 incompatibilités entre le contenu du projet d’adhésion et le
droit primaire communautaire.
 Notamment, elle a constaté que l’adhésion porte atteinte à l’autonomie du DUE parce qu’instaurant un
éventuel contrôle par la Cour EDH du DUE.
 Aussi, il y aurait une remise en cause du principe de confiance mutuelle entre les Etats membres car L’UE
ne serait plus qu’une partie comme une autre à la convention EDH.
 On porterait aussi atteinte à l’obligation de coopération loyale, càd que les Etats auraient pu saisir la
CEDH en plus de la Cour de justice, …
Cet avis a été particulièrement inattendu. On estime que c’est un coup d’arrêt à l’adhésion. Il y a plusieurs
raisons à ce que L’UE adhère à la Cour EDH :
 Tout d’abord ça permettrait de rapprocher l’Union d’une Cour européenne des droits de
l’homme dont l’influence ne cesse de croître sur le continent européen.
 Cela aurait montré l’attachement de L’UE à la protection des Droits de l’Homme.
 Cela mettrait en cohérence l’attitude de L’UE avec son exigence vis-à-vis des nouveaux Etats
adhérents. Il est exigé de leur part une adhésion à la convention EDH.
 Cela aurait permis aux citoyens de L’UE d’avoir des droits fondamentaux pleinement
respectés.

B) L’autorité juridique des principes généraux du droit

Ces PGD se situent au sommet de la hiérarchie de l’ordre juridique de l’Union au même titre que le droit
primaire. Ils ont donc la même valeur juridique que les traités constitutifs.

Le respect de ces PGD s’impose en premier lieu aux institutions communautaires. Elles sont tenues de les respecter
lorsqu’elles adoptent des actes de droit dérivé ou lorsqu’elles concluent des accords externes sous peine d’illégalité.
Par exemple, la Cour de justice a ainsi annulé une directive du Parlement européen et du Conseil pour violation du
principe de proportionnalité (Cour de justice, 6 décembre 2005, arrêt Abna). Autre exemple : La Cour de justice a annulé
un règlement du Conseil pour violation du principe de non-discrimination.

Egalement les Etats se voient imposer le respecter de ces PGD lorsqu’ils agissent dans le champ d’application
du DUE. Sinon, ces Etats peuvent se voir sanctionnés par la Cour de justice. D’ailleurs, les juges nationaux des
Etats membres ont consacré cette valeur juridique des PGD. Par exemple, le Conseil d'Etat français dans un arrêt du 11
juillet 2001, arrêt Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles.

Chapitre 2 : Les caractères du droit de L’UE

Le DUE est considéré comme l’instrument de l’intérêt commun des peuples et des Etats de l’Union. Il ne constitue donc
pas un droit étranger, ni même un droit extérieur aux Etats membres. Il est donc le droit propre de chaque Etat membre,
applicable sur son territoire, tout autant que son droit national, avec une caractéristique supplémentaire : ce DUE
couronne la hiérarchie des textes normatifs. 4 caractéristiques :
 Le DUE acquiert automatiquement statut de droit positif dans l’ordre interne des Etats. C’est
le principe de l’applicabilité ou de l’intégration immédiate.
 Le DUE est susceptible de créer au sein des Etats des droits et des obligations pour les
particuliers. C’est le principe de l’applicabilité directe ou l’effet direct.
 Le DUE prend place au sein des droits nationaux avec un rang de priorité sur toutes les
normes nationales. C’est le principe de primauté.
 Le principe d’autonomie du DUE.
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Section 1 : L'autonomie de l'ordre juridique de l'Union

Ce principe d’autonomie a été consacré par 2 arrêts :


 L’arrêt Cour de justice, 15 juillet 1964, Arrêt Costa contre ENEL
 L’arrêt Cour de justice, 5 février 1963, Arrêt Van Gend et Loos.

L’autonomie signifie que l’ordre juridique de l’Union est un ordre propre distinct de celui des Etats membres.
Ce droit est issu d’une source autonome. Il est indépendant des Etats membres.

La Cour de justice a rappelé que dès lors que le droit de L’UE est reconnu comme constituant un véritable ordre juridique,
il ne peut exister en tant que tel qu’en vertu d’une autonomie vis-à-vis de l’ordre juridique des Etats membres. Cette
autonomie sera revendiquée par la Cour de justice à chaque fois qu’est remis en cause le DUE.
Cette autonomie peut être comprise comme une protection de l’intégrité du DUE. L’autonomie n’est pas la manifestation
d’une quelconque séparation des ordres juridiques de l’Union et des Etats membres. Cela signifie aussi qu’il s’agit d’un
droit dont L’UE doit assurer le respect et l’uniformisation, notamment par le biais du renvoi préjudiciel.

Section 2 : L'intégration immédiate du DUE dans l'ordre juridique des États membres

§1 : Le principe de l'intégration immédiate

Les principes du droit international, et notamment posés par la convention de Vienne (Article 26), obligent les
Etats à respecter les traités qui les lient. Et notamment à faire appliquer ces traités par leurs organes législatifs,
exécutifs et judicaires. Ce sont notamment les ppes de bonne foi et notamment le ppe « pacta sunt servanda ».

Si ces Etats ne respectent pas ces traités internationaux, ils peuvent voir leur responsabilité engagée devant
une juridiction internationale (notamment la CIJ : Cour internationale de Justice).

Mais le droit international ne règle pas lui-même les conditions dans lesquelles les normes contenues dans les traités
doivent être intégrés dans l’ordre juridique des Etats pour y être appliquées. Le droit international abandonne à
chaque Etat membre la question de l’intégration de ce droit international dans son ordre interne en fonction
de sa conception du droit international.

Il existe 2 conceptions doctrinales inscrites dans les Constitutions des Etats qui va régler l’intégration du
droit international dans les Etats (2 catégories d’Etats) :

 La conception dualiste : conception italienne. Cette conception dualiste a longtemps prévalu au


niveau international car elle est un outil de protection des ordres juridiques internes. Elle considère
que l’ordre juridique international et les ordres juridiques nationaux sont des systèmes
indépendants et séparés. On dit qu’ils coexistent parallèlement. Dès lors, un traité
international, pour s’appliquer dans l’ordre interne d’un Etat dualiste, doit être repris
intégralement par une norme nationale, souvent c’est la loi, qui va l’introduire dans l’ordre
national par une formule juridique qui va en opérer la réception. Il y a dans ce cas « nationalisation du
traité international », càd que la norme internationale a subi une transformation de nature et ne
pourra s’appliquer qu’en qualité de règle de droit interne, et non plus en tant que règle de droit
international.

 La conception moniste : Elle est fondée sur une unité de l’ordonnancement juridique. Ce qui signifie
que la norme internationale s’applique immédiatement dès lors que le traité est
régulièrement ratifié par l'Etat. Il s’appliquera sans réception, ni transformation dans
l’ordre interne des Etats parties au traité. Ce qui signifie que ce traité va s’intégrer de plein droit
dans le système des règles que doivent appliquer les Tribunaux nationaux. Les éléments du traité sont
applicables dans cet Etat en leur qualité originaire de règle internationale.

La question s’est posée s’agissant de la réception du droit communautaire. La conception dualiste s’oppose à
la construction de L’UE qui prône le monisme. Le monisme découle de la nature même de l’Union, càd de

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l’ensemble du système des traités. Dans l’arrêt du COSTA contre ENEL, la Cour a affirmé que « le système
communautaire, dans la mesure où il comporte des attributions de pouvoir normatif aux institutions, ne peut
s’accommoder que du monisme, seul compatible avec un système d’intégration ».
« A la différence des traités internationaux ordinaires, le traité de L’UE a institué un ordre juridique propre intégré au
système juridique des Etats membres lors de l’entrée en vigueur du traité et qui s’impose à leur juridiction ». (Arrêt
COSTA contre ENEL).

Donc si les Etats membres sont libres de conserver leur conception dualiste au regard du droit international, en
revanche le dualisme est bannit des relations entre L’UE et ses Etats membres. Désormais, le DUE, qu’il soit originaire ou
dérivé, est immédiatement applicable dans l’ordre juridique interne des Etats. Donc la Cour de justice interdit tout acte
de réception du droit de L’UE. Ici, le droit de L’UE fait partie intégrante de l’ordre juridique applicable sur le
territoire de chacun des Etats membres (Cour de justice, 9 mars 1978, Arrêt Simmenthal).

De ce principe d’intégration immédiate découle 3 conséquences :


 Le DUE est intégré de plein droit dans l’ordre interne des Etats sans nécessiter aucune
formule spéciale d’introduction.
 Les normes de l’Union prennent leur place dans l’ordre juridique interne en tant que DUE.
 Les juges nationaux ont l’obligation d’appliquer le DUE.
Il s’agit là du principe d’intégration ou d’applicabilité immédiate.

§2 : L'intégration immédiate des différentes sources du DUE


A) Le droit primaire

S’agissant du droit primaire, le principe d’intégration immédiate interdit aux juges d’un pays dualiste d’invoquer le non-
accomplissement des procédures de réception des traités internationaux prévue par sa Constitution pour se dispenser
d’appliquer un traité communautaire. On a 2 cas de figure :

 1er cas : Le cas des Etats fondateurs :


S’agissant des traités institutifs des communautés, ils ont été régulièrement ratifiés mais de plus chacun des
Etats fondateurs (6) les a introduits dans son ordre juridique conformément aux prescriptions nationales
concernant les traités internationaux.

Les Etats monistes comme la France les ont intégrés immédiatement. En France, sur la base de l’Article 26 de la
Constitution de 1946, Constitution qui répudie expressément le dualisme, ces traités diplomatiques régulièrement
ratifiés et publiés ont force de loi sans qu’il n’y ait besoin, pour en assurer l’application, d’autres dispositions législatives
que celles qui auraient été nécessaires pour assurer leur ratification. Par exemple, le traité CEE a été incorporé dans
l’ordre interne par le seul effet de la ratification autorisée par la loi du 2 août 1957. C’est une loi de ratification
autorisant la signature du traité, ce n’est pas une loi de réception.

En revanche, ces mêmes traités ont fait l’objet d’une réception formelle dans l’ordre interne des Etats
dualistes. C’était le cas par exemple de la Belgique, de l’Allemagne et de l’Italie.
Personne n’a sanctionné cette réception en 1957. Mais la Cour de justice qui a mis en avant ce principe
d’intégration immédiate a régit face à ces mesures de réception des traités institutifs des communautés.
Notamment la Cour de justice a neutralisé les effets de telles pratiques dualistes. La Cour de justice a considéré que la
réception des traités institutifs n’a pas eu pour effet de transformer les traités et que ces derniers doivent
être appliqués par le juge interne en tant que droit communautaire et non en tant que droit national. Elle l’a
dit par le biais d’une ordonnance de la Cour de justice du 22 juin 1965, « ordonnance San Michele ».
C’est l’Italie qui a posé le plus difficulté et qui a pendant longtemps freiné le monisme au niveau de L’UE. Ce n’est qu’à
partir des années 70 que la Cour constitutionnelle italienne va admettre que la bonne application du DUE exige qu’elle
soit pleinement et immédiatement appliquée sans que des lois de réception et d’adaptation soient nécessaires.

 2ème cas : Les Etats adhérents


Lors de l’élargissement des Communautés à 3 Etats dualistes en 1972 (Grande-Bretagne, Danemark et Irlande),
le caractère directement applicable du droit communautaire a été pris en considération.

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Par exemple, la Grande-Bretagne a volontairement écarté le caractère dualiste de son fonctionnement


interne. Elle a adopté un acte des communautés européennes du 17 octobre 1972 qui va introduire l’ensemble des actes
d’adhésion dans l’ordre interne britannique en écartant expressément la transformation en ordre interne.
Il en a été de même du Danemark et de l’Irlande.

Lors des élargissements ultérieurs, la spécificité du DUE était suffisamment affirmée pour que les adhésions
s’accompagnent de dispositifs destinés à intégrer cette vision moniste. Cependant, de nombreux Etats ont dû modifier
leur Constitution. C’est le cas notamment de la Grèce, du Portugal, de la République tchèque ou encore de la Slovaquie.
 Donc les traités sont bien d’intégration immédiate.

B) Le droit dérivé et le droit issu des relations externes de l'Union

Le droit issu de l’activité normative des institutions s’impose dans l’ordre juridique national des Etats sans
transformation, sans ordre d’exécution, ni même publication au niveau national.

1) Le règlement

Leur réception dans l’ordre interne est superflue et même interdite. L’Article 288 du TFUE énonce bien que le
règlement est directement applicable dans tout Etat membre. La Cour de justice a été amenée à sanctionner
plusieurs fois l’Italie qui avait pris l’habitude d’introduire les règlements dans son ordre juridique interne par le biais de
lois. La Cour de justice a eu également à condamner des Etats qui non seulement réceptionnaient en droit interne les
règlements, mais qui ont pu par exemple différer son entrée en vigueur. Arrêt Cour de justice, 10 octobre 1973, arrêt
Variola. En France, la question de l’intégration immédiate n’a pas pos problème.

Le Conseil constitutionnel par exemple a estimé que la force obligatoire qui s’attache au règlement n’est pas
subordonnée à une intervention des autorités des Etats membres (décision du 30 décembre 1977). Décision qui était
relative à une loi des finances rectificative pour 1977. Rapidement, même le Conseil d'Etat français a reconnu
l’intégration immédiate des règlements communautaires. Pour lui, le règlement communautaire s’intègre dès sa
publication au JOUE dans le droit des Etats membres (CE 22 décembre 1978, Syndicat des Hautes Graves de Bordeaux).

2) Les décisions et les directives

Adressées notamment aux Etats membres, elles peuvent appeler parfois des mesures nationales d’application. La Cour de
justice a dû préciser ce qu’on entendait par mesure de transposition et mesure de réception. Elle a rappelé que la
compétence laissée aux Etats, notamment s’agissant des directives, est une compétence d’exécution. Ce n’est pas une
compétence de réception.

Les décisions et directives bénéficient bien, comme l’ensemble du DUE, de l’applicabilité immédiate. Elles sont
donc intégrées à l’ordre juridique des Etats par leur seul effet de leur procédure d’entrée en vigueur au niveau de l’UE.

Le Conseil d'Etat français reconnait qu’il revient aux juges nationaux de contrôler la compatibilité des mesures
nationales au regard des directives et qu’à ce titre qu’ils font bien partie de la légalité dont cet Etat est chargé d’assurer
le respect. Les directives communautaires contiennent donc des règles de droit intégrées dans l’ordre
juridique national. (Arrêt du Conseil d'Etat, 22 décembre 1978, arrêt Cohn-Bendit).

3) Les accords externes

L’intégration immédiate du droit issu des accords externes conclus par l’Union ne fait aucun doute. Le Conseil
d'Etat français admet que les accords internationaux conclus par l’Union et publiés au JOUE sont de ce seul fait introduit
dans l’ordre juridique national, sans avoir besoin ni de ratification, ni de publication nationale. (Conseil d'Etat, 12
octobre 1979, arrêt Syndicat des importateurs de vêtements et produits artisanaux).

Section 3 : L'applicabilité directe du DUE

Non seulement le DUE s’insère automatiquement dans l’ordre interne des Etats membres, et devient donc une source de
droit, mais il possède également l’aptitude à compléter directement le patrimoine juridique des particuliers de droits

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subjectifs ou d’obligations tant dans le rapport avec d’autres particuliers que dans leurs relations avec l'Etat dont ils
relèvent.
 Ici le principe d’applicabilité direct vise plutôt les citoyens.

L’applicabilité directe (ou l’effet direct)* signifie qu’une norme de l’Union peut créer dans certaines circonstances et
par elle-même des droits et obligations dans le chef des particuliers (sphère des particuliers, patrimoine juridique des
particuliers) et dont ils peuvent directement se prévaloir dans les litiges qu’ils soumettent aux juridictions nationales qui
ont l’obligation d’en assurer la sauvegarde et le respect. 3 dimensions à ce principe d’effet direct :
 La capacité à créer directement des droits et des obligations dans le chef des particuliers
 Ce ppe crée la possibilité pour ces particuliers d’invoquer ces droits devant le juge national.
 L’effet direct entraine l’obligation pour le juge de les garantir.

§1 : Le principe de l'effet direct du DUE


A) Le principe

Traditionnellement, le droit international, et notamment les traités internationaux, ne créent d’effet


juridique qu’à l’égard des seuls Etats membres partie au traité. Donc ces traités internationaux ne sont pas
directement applicables aux ressortissants des Etats parties au traité.

S’agissant du droit de L’UE, le traité CEE ne conférait initialement l’effet direct qu’aux seuls règlements
adoptés par les institutions (ancien Article 189 du traité CEE, aujourd'hui Article 288). C’est la Cour de justice qui
va se prononcer pour l’applicabilité directe de principe du droit communautaire (Arrêt Van Gend Loos). Même
aujourd'hui, ce n’est pas un principe dégagé par les traités. Ça reste un principe de construction jurisprudentielle.

La Cour de justice a profité dans cet arrêt (1963) d’une question préjudicielle posée par le juge administratif néerlandais
pour dégager ce principe et pour affirmer que le droit communautaire, de même qu’il crée des charges à l’encontre des
particuliers, est aussi destiné à engendrer des droits qui entrent dans leur patrimoine juridique. La Cour de justice
considère que le traité de L’UE constitue plus qu’un accord qui ne créerait que des obligations mutuelles
entre les Etats contractants. Ces traités concernent également directement les ressortissants des Etats
membres qui sont donc de ce fait des sujets à part entière de l’ordre juridique communautaire.

Ici, la Cour de justice a élaboré ce principe en dehors des traités. Pour être suivie par les Etats, elle va
élaborer un raisonnement en plusieurs étapes qui selon elle découle de l’esprit de l’économie et des termes
du traité.

 En 1er lieu la Cour de justice estime que l’objectif du traité est d’instituer un marché commun dont le
fonctionnement concernait directement les justiciables, et ce traité a créé des organes de compétences
dont l’exercice affecte aussi bien les Etats membres que leurs citoyens.

 Elle considère également que le Préambule du traité vise au-delà du Gouvernement, les peuples
européens qui sont directement associés au fonctionnement de la Communauté et à l’élaboration du
droit communautaire au travers du Parlement européen et du Conseil économique et social.

 Enfin, la Cour de justice termine sa démonstration juridique en rappelant que le renvoi préjudiciel
(Article 267 du TFUE) n’a de raison d’être dans l’économie du traité, qu’en raison du fait que le droit
communautaire est susceptible d’être invoqué par les particuliers devant le juge national (« juge de
droit commun de L’UE »).

La Cour de justice, en se fondant sur ces 3 éléments de réflexion, conclut en disant que la Communauté constitue un
nouvel ordre juridique de droit international au profit duquel les Etats ont limité leurs droits souverains, et
dont les sujets sont non seulement les Etats membres, mais également leurs ressortissants. Dès lors, le droit
communautaire, de même qu’il crée des charges, des obligations, à l’égard des particuliers, peut également engendrer
des droits qui entrent dans leur patrimoine juridique. Les particuliers sont en droit d’invoquer l’applicabilité
directe du droit communautaire devant le juge national lorsqu’ils n’en sont pas explicitement les
destinataires.

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Quelles sont les conséquences du principe de l’applicabilité directe ? Les conséquences sont également précisées
par l’arrêt Simmenthal (9 mars 1978).
 1ère conséquence : Les normes communautaires doivent déployer la plénitude de leurs effets
(la norme créée des droits) d’une manière uniforme dans tous les Etats membres à partir de
leur entrée en vigueur et pendant toute la durée de leur validité. Donc ici, c’est pour éviter que
certains Etats viennent limiter cet effet direct.

 2ème conséquence : Les normes communautaires constituent une source de droits et


d’obligations pour tous ceux qu’elle concerne qu’il s’agisse des Etats membres ou des
particuliers qui sont partie à des rapports juridiques relevant du droit communautaire.

 3ème conséquence : Tout juge national saisi dans le cadre de sa compétence a en tant qu’organe
d’un Etat membre pour mission de protéger les droits conférés aux particuliers par le droit
communautaire. Donc un juge national ne peut pas refuser.

 4ème conséquence : Les dispositions des traités et du droit dérivé directement applicables ont
pour effet non seulement de rendre inapplicable toute disposition contraire de la législation
nationale existante, mais également, ils font partie intégrante avec rang de priorité de
l’ordre juridique de chacun des Etats membres.
La jurisprudence Simmenthal a été confirmée par la suite.

B) Les conditions de l’applicabilité directe

Selon la CJ, une norme de l’Union (en dehors des règlements qui sont directement applicables) est par définition
directement applicable dès lors qu’elle réunit 3 conditions. La norme doit être claire, précise et
inconditionnelle.

Pour la Cour de justice cela signifie qu’il suffit que les dispositions apparaissent du point de vue de leur contenu
inconditionnel et suffisamment précis (Arrêt Cour de justice, 26 février 1986, arrêt Marshall). La Cour de justice a encore
précisé qu’une disposition de DUE satisfait à la condition de précision lorsqu’elle énonce une obligation en des termes
non-équivoques. Et une norme répond à la condition d’inconditionnalité lorsqu’elle énonce une obligation qui n’est
assortie d’aucune condition, ni subordonnée dans son exécution ou dans ses effets à l’intervention d’aucun acte soit des
institutions de l’Union, soit des Etats membres.

 Ce principe d’applicabilité directe n’est donc ni général, ni automatique. Souvent la Cour de


justice va faire du cas par cas pour affirmer que telle ou telle règle est d’applicabilité directe.
En effet, il faut à chaque fois se référer au contenu de la norme en cause.

Initialement, ces 3 conditions étaient entendues de manière très stricte. La Cour de justice a assoupli ces
conditions permettant d’estimer qu’une norme est d’effet direct, notamment au niveau de la précision.
 S’agissant du critère de la précision, la Cour de justice a estimé que l’absence de précision d’une norme de
l’Union ne fait pas obstacle à son effet direct dès lors que cette norme est susceptible de faire l’objet d’une
clarification par la voie d’une interprétation juridictionnelle (qui vient du juge), que ce juge soit le juge
communautaire ou le juge national.

 De même, s’agissant de la question de l’inconditionnalité, la Cour de justice l’a aussi assouplie, en admettant
l’intervention complémentaire des autorités nationales ou européennes. A la seule condition c’est que ni
l’autorité communautaire, ni l’autorité nationale ne dispose, lorsqu’elle vient compléter cette norme communautaire,
d’un large pouvoir discrétionnaire, ou même d’aucun pouvoir discrétionnaire.

C) L‘intensité de l’applicabilité directe

L’applicabilité directe est variable dans son intensité dans la mesure où un particulier ne peut pas invoquer
de manière large et globale toutes les normes à l’appui d’un recours devant le juge national. Càd que
l’invocabilité d’une norme de l’Union d’effet directe est variable. Il existe 2 types d’effets directs :
1) L’effet direct vertical ou limité

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Une norme de l’Union est d’effet direct limité dès lorsqu’elle peut seulement être invoquée devant le juge
national par un particulier dans un litige qui l’oppose à un Etat membre. (Ici on ne revient pas sur l’effet direct,
la norme est suffisamment claire, précise et inconditionnel). = C’est un litige vertical (contre l'Etat).
Une telle hypothèse se présente notamment quand un particulier revendique devant son juge national le bénéfice du
DUE à l’encontre d’un Etat membre qui n’aurait pas respecté une obligation qui lui était imposée par L’UE.

On dit que la norme de l’Union bénéfice d’une opposabilité ascendante, càd que seul le particulier peut
revendiquer cette norme contre l’Etat. S’agissant de ce type de norme, l’Etat au contraire ne peut se prévaloir de la
norme en cause à l’encontre d’un particulier.

Le principe d’effet direct n’a pas d’effet absolu. Donc non seulement il doit répondre aux 3 conditions de clarté, de
précision et d’inconditionnalité, mais par ailleurs son invocabilité est variable en fonction de son contenu.

2) L’effet direct horizontal ou complet

Dans certains cas, une norme de l’Union est d’effet direct complet dès lorsqu’elle peut être invoquée devant
le juge national par un particulier non seulement à l’encontre d’un Etat membre, mais également dans un
litige qui l’oppose à un autre particulier (on parle d’un litige horizontal). Dans ce cas, la norme ne se contente pas
de créer des droits au profit des particuliers, mais elle génère aussi des obligations à l’égard des particuliers.

Ex : L’Article 157 du TFUE interdit les discriminations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins en matière de
rémunération pour un même travail. Cette disposition crée un droit au profit de tous les travailleurs. Mais il s’agit aussi
d’une obligation à l’égard des employeurs.
Donc si un travailleur féminin s’estime victime d’une telle discrimination dans son entreprise ou dans son
administration, il pourra saisir son juge national compétent et ce sera donc un litige horizontal en cas de discrimination
dans une entreprise, car le travailleur féminin va attaquer une autre « personne » en cas de litige privé, et ce sera un
litige vertical en cas de litige avec l’administration (fonctionnaire contre l'Etat).
Le travailleur féminin pourra bénéficier directement de l’applicabilité de l’Article 157.

§2 : L'applicabilité directe des différentes catégories de sources du DUE


A) Le droit primaire

La Cour de justice a opéré une distinction entre les dispositions des traités à effet direct complet, de celles à effet direct
limité, et enfin de celles dépourvues d’effet direct.

1) Les dispositions du TFUE à effet direct complet

Il s’agit des dispositions du traité (TFUE) qui peuvent être invoquées tant dans un litige vertical (un particulier
contre un Etat) que dans un litige horizontal (litige opposants 2 particuliers).

Par exemple, l’Article 45 du TFUE relative à la libre-circulation des travailleurs. Ce principe implique l’abolition de toute
discrimination fondée sur la nationalité entre les travailleurs des Etats membres (Arrêt Cour de justice, 4 décembre
1974, arrêt Van Duyn).

Autres Articles d’effet direct complet :


L’Article 49 du TFUE relatif à la liberté d’établissement.
Les Articles 56 et 57 du TFUE concernant la liberté de prestation de service.
Les Articles 101 et 102 du TFUE qui interdisent les ententes et les abus de position de dominante.
L’Article 157 du TFUE qui interdit les discriminations entre travailleurs masculins et travailleurs féminins en matière de
rémunération.
Il n’y a pas beaucoup de dispositions d’effet direct.

2) Les dispositions du TFUE à effet direct limité


On ne peut invoquer cette règle que dans les litiges verticaux (contre l'Etat).
Exemples :

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 Article du 30 du TFUE qui interdit entre les Etats membres les droits de douane à l’importation et à
l’exportation ainsi que toute taxe d’effet équivalent.
Article 34 du TFUE qui interdit entre les Etats membres les restrictions quantitatives à l’importation ainsi que
toute mesure d’effet équivalent.
Article 110 du TFUE interdisant toute discrimination fiscale à l’égard des produits des autres Etats membres.
Article 63 du TFUE qui interdit toute restriction aux mouvements de capitaux entre les Etats membres, et
entre les Etats membres et les Etats tiers.
3) Les dispositions du TUE et TFUE dépourvues d’effet direct

Ce sont des dispositions trop floues. Généralement elles fixent des objectifs.
Exemples :
Article 3 du TUE fixant les objectifs de l’Union est dépourvu d’effet direct. Objectifs trop flous qu’on ne peut
invoquer à aucun titre.
Article 4, §3 qui est relatif à l’obligation de coopération loyale des Etats membres.
Article 106, §2 relatif à la soumission aux règles de concurrence des entreprises chargées de la gestion de
services inter-économiques général (SIEG).
Articles 151 et 153 du TFUE relatifs à la politique sociale.

B) Le droit dérivé

1) L’applicabilité directe des règlements

Le règlement est le seul acte de droit dérivé auquel le TFUE (Article 288) reconnait une applicabilité directe
dans tout Etat membre. La Cour de justice a précisé cette applicabilité directe. Elle a précisé que le règlement, en
raison de sa nature même et de sa fonction dans le système des sources du droit communautaire produit des effets
immédiats et est comme tel apte à conférer aux particuliers des droits que les juridictions nationales ont l’obligation de
protéger (Arrêt Cour de justice, 14 décembre 1971, arrêt Politi).

L’intérêt du règlement est que la portée générale du règlement lui confère une applicabilité directe complète.
Il est donc invocable par une personne physique ou morale à l’encontre d’un Etat membre, mais également à
l’encontre d’une autre personne physique ou morale qui agirait en violation de ces dispositions.

Il arrive parfois que certains règlements soient subordonnés à l’intervention normative complémentaire de
la Commission. Dans ce cas, on est en présence d’un règlement incomplet.

La Cour de justice a estimé dans ce cas que si la Commission n’intervenait pas pour compléter ce règlement,
un particulier ne pouvait pas s‘en prévaloir directement devant le juge national (Cour de justice, 11 janvier
2001, arrêt Monte Arcosu). Cette position de la Cour de justice a beaucoup surpris. Pour la doctrine, il semblerait que
le juge communautaire remette en cause discrètement l’automaticité de l’effet direct des règlements. Dans ce
cas, des mesures complémentaires conditionnent l’applicabilité du règlement.

2) L’applicabilité directe des directives

Pendant longtemps, c’est la doctrine qui a considéré que les directives ne pouvaient pas produire d’effet direct. On
estimait que la création de droits et d’obligations au bénéfice des justiciables ne découlait pas de la directive elle-même,
mais des mesures nationales de transposition. La CJ va rapidement refuser cette approche doctrinale et va admettre que
sous certaines conditions les dispositions d’une directive peuvent être directement applicables.

a) Le fondement de l’invocabilité des directives

La Cour de justice va reconnaître dans certaines circonstances l’effet direct aux directives pour 2 raisons :
 L’effet contraignant des directives reconnu par l’art 288 TFUE s’opposerait à ce que les obligations
qu’elles contiennent ne puissent être invoquées que par les institutions de l’UE elle-même.
 L’effet utile d’une directive serait affaibli si les justiciables étaient empêchés de s’en prévaloir en justice
et les juridictions nationales dans l’impossibilité de les prendre en considération en tant qu’élément de
droit (Cour de justice, 5 février 1963, Van Gend El Loos).

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Dans l’hypothèse où une directive est correctement mise en œuvre, on dit que ses effets atteignent les
particuliers par l’intermédiaire des seules mesures d’application prises par l’Etat concerné. Donc quand un
Etat dans les délais impartis transpose une directive, l’effet direct provient uniquement des mesures de transposition.
Lorsqu’un Etat membre n’a pas transposé ou a mal transposé, les particuliers sont fondés à en invoquer le
bénéfice à l’appui d’un recours devant leurs juridictions nationales contre leur Etat membre, et sous réserve
que le contenu des directives soit inconditionnel et suffisamment précis. Toutes les directives ne sont pas
automatiquement d’applicabilité directe, ni même la totalité d’une directive peut ne pas être d’effet direct. Donc l’effet
direct ici n’est pas une qualité attachée normalement à la directive. On attend des dispositions nationales.
L’effet direct est une garantie minimale pour les justiciables qui permet d’agir contre un Etat défaillant.

La Cour de justice a précisé que même si on reconnaît un effet direct à la directive, cela ne dispense pas pour
autant l'Etat défaillant d’en assurer la transposition. Dans cet effet direct doit être temporaire.

b) La portée de l’invocabilité des directives

Reconnaître l’effet direct à une directive c’est avant tout pour sanctionner l’Etat qui ne l’a pas transposé. Et donc les
dispositions directement applicables d’une directive ne sauraient être invoquées qu’à l’encontre de l'Etat défaillant. La
Cour de justice à ce titre se refuse de reconnaitre aux directives un effet direct complet.

 La reconnaissance de l’effet direct verticale des directives :


La Cour de justice reconnait que les particuliers peuvent opposer à l'Etat défaillant les droits qu’ils tirent des
dispositions inconditionnelles et suffisamment précises d’une directive non-transposée ou incorrectement
transposée. La Cour de justice a élargi cette notion d’effet direct vertical. Effectivement, on peut faire un recours non
seulement contre l'Etat, mais également contre une autorité locale, contre une entreprise publique, et ce quelle que soit
la qualité en laquelle il se présente (soit autorité publique, soit employeur public).

Donc la reconnaissance de l’effet directe d’une directive entraine 2 conséquences pour le justiciable :

 Si à l’expiration du délai de transposition une norme de droit national n’est pas conforme
aux dispositions d’une directive, le justiciable est en droit de demander à son juge national
qu’il écarte le droit national contraire à la directive et qu’il y substitue la disposition de la
directive en question. On parle ici d’invocabilité d’exclusion. On demande au juge d’exclure le
droit national contraire à une directive. Le juge n’a pas d’autre choix que d’obtempérer.

 Si à l’expiration du délai de transposition aucune mesure de transposition n’a été prise ou


s’il n’a pas correctement transposé, le justiciable peut aussi invoquer directement devant le
juge les dispositions de la directive et faire valoir devant ce juge les droits qu’il en tire. On
parle d’invocabilité de substitution.

On peut aussi avoir un Etat qui a correctement transposé, mais a mal appliqué (« application illégale ») l’acte
national de transposition. La Cour de justice rappelle que l’adoption de mesures nationales transposant correctement
une directive n’a pas pour conséquence d’épuiser les effets de cette directive. Un Etat membre demeure en effet tenu
d’assurer la pleine application de la directive, même après l’adoption des mesures de transposition.

Les particuliers sont alors fondés à invoquer devant le juge national à l’encontre de l'Etat les dispositions
d’une directive (qui apparaissant claires, précises et inconditionnelles du point de vue de son contenu) dès lors que la
pleine application de la directive n’est pas effectivement assurée.

Un Etat membre qui n’a pas pris dans les délais les mesures d’exécution imposées par la directive, ne peut
opposer aux particuliers le non-accomplissement par lui-même des obligations qu’elle comporte (Cour de
justice, 5 avril 1979, Ratti). Un Etat défaillant ne peut donc invoquer une directive à l’encontre des particuliers. (C’est
l’absence d’effet direct limité inversé). La Cour de justice souhaite avant tout qu’un Etat défaillant ne puisse tirer
avantage de sa méconnaissance du DUE.

 L’absence d’effet direct horizontal des directives :

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Les directives ne bénéficient pas pour autant d’un effet direct complet. Cour de justice, 1986, Marshall : « Le
caractère contraignant d’une directive n’existe bien qu’à l’égard de tout Etat membre destinataire ».
Il s’ensuit qu’une directive ne peut pas créer d’obligation dans le patrimoine d’un particulier, qui ne peut donc
l’invoquer contre un autre particulier.
Il existe une nuance à cette absence d’effet direct horizontale posée par la Cour de justice. La Cour a admis
l’invocabilité d’une directive dans l’hypothèse de situations triangulaires (un Etat et 2 particuliers). Il s’agit de
l’hypothèse où Etat membre à l’obligation, à la demande d’un particulier, d’appliquer une directive qui va avoir pour
conséquence de priver un autre particulier de ses droits. La CJ estime qu’effectivement de simples répercussions
négatives sur les droits de tiers ne justifient pas de refuser à un particulier d’invoquer les dispositions d’une directive à
l’encontre de l’Etat membre défaillant (Cour de justice, 7 janvier 2004, Wells). On parle d’effet collatéral.

***
Le Conseil d'Etat pendant longtemps a fait preuve de réticence à reconnaitre l’invocabilité directe des
directives. L’effet direct des règlements n’a jamais posé de difficulté devant les juridictions administratives françaises.

En revanche, s’agissant des directives le Conseil d'Etat s’est opposé à leur applicabilité directe, au motif
qu’aucune disposition des traités ne prévoyait une telle possibilité (Cour de justice, 22 décembre 1978,
Ministre de l’Intérieur vs Cohn-Bendit). Le Conseil d'Etat cependant, assurait dans une certaine mesure leur plein
effet aux directives sous certaines conditions.
 Par exemple, le Conseil d'Etat a admis qu’un particulier est en droit d’invoquer les objectifs d’une directive
pour demander l’annulation de mesures nationales de transposition.
 De même, le Conseil d'Etat admet qu’un justiciable puisse lui demander l’annulation de tout acte
règlementaire incompatible avec les objectifs d’une directive.
 Le Conseil d'Etat reconnait le droit pour les particuliers d’exiger de l’administration l’annulation de tout acte
antérieur contraire aux objectifs d’une directive (Conseil d'Etat, 3 février 1989, Cie Alitalia).

Cette jurisprudence qui s’applique pour les règlements nationaux prévaut également lorsque des lois sont en cause
puisque le Conseil d'Etat a déjà jugé qu’une loi de transposition doit être écartée dès lors qu’elle est incompatible avec
une directive (Conseil d'Etat, 28 février 1992, SA Rothman International France et SA Philippe Morris France).

De même, le Conseil d'Etat a estimé que les mesures nationales de transposition d’une directive devaient être
interprétées à la lumière des objectifs de cette directive (Conseil d'Etat, 22 décembre 1989, Cercle militaire mixte de la
caserne Mortier).

Le Conseil d'Etat a admis aussi qu’un particulier qui demandait réparation des préjudices subis en raison de la non-
transposition, ou de la transposition incorrecte d’une directive ait engagé la responsabilité de l'Etat (Conseil d'Etat, 28
février 1992, Société Arizona Tobacco Coduts).

Cependant, le Conseil d'Etat restait campé sur sa jurisprudence Cohn-Bendit et refusait encore récemment la possibilité
pour un particulier d’invoquer une directive à l’appui d’un REP dirigé contre une décision individuelle.
Finalement, ce sera le 30 octobre 2009, sous la pression de la Cour de justice (Conseil d'Etat, 30 octobre 2009, Madame
Terreux) que le Conseil d'Etat va admettre que « tout justiciable peut se prévaloir à l’appui d’un recours dirigé
contre un acte administratif non réglementaire des dispositions précises et inconditionnelles d’une
directive lorsque l'Etat n’a pas pris dans les délais impartis par celle-ci les mesures nationales de transposition
nécessaires ». Donc remise en cause de l’arrêt Cohn-Bendit.

3) L’applicabilité directe des décisions

Avec Lisbonne on a des décisions de portée individuelle et des décisions de portée générale. S’agissant des décisions de
portée individuelle, il faut distinguer celles adressées aux particuliers de celles adressées aux Etats membres.
 Les décisions adressées à des personnes physiques ou morales créent directement des
droits et/ou des obligations au bénéfice ou à la charge de leur destinataire. Donc ces décisions
de portée individuelle ont un effet direct complet (même effet qu’un règlement).
 S’agissant des décisions de portée individuelle adressées aux Etats membres, elles sont
soumises au même régime que les directives en matière d’applicabilité directe. Plus précisément, sous

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réserve qu’elles satisfassent aux critères d’inconditionnalité et de précision, de telles


décisions peuvent être invoquées directement par un particulier contre un Etat membre.

S’agissant des décisions de portée générale, pour la Cour de justice il faudra chercher au cas par cas si elles sont de
nature ou non à créer des droits dans le patrimoine des particuliers.
Si tel est le cas, la jurisprudence de la Cour de justice relative aux directives devrait être alors applicable. Dès lors ces
décisions de portée générale pourraient donc être directement invoquées par un particulier à l’encontre
d’un Etat défaillant, mais à la condition que les dispositions des décisions soient précises et
inconditionnelles.

En revanche, les décisions de portée générale adressées aux seules institutions de l’Union sont dépourvues
d’un quelconque effet direct.

4) L’applicabilité directe du droit conventionnel

La Cour de justice a également jugé que les dispositions des accords externes conclus par l’Union peuvent être
également d’effet direct, sous réserve qu’elles répondent aux conditions de précision et d’inconditionnalité.
La Cour de justice va donc chercher à travers l’esprit, l’économie du traité et les termes d’un accord externe l’éventuel
effet direct de ces dispositions. Une personne physique ou morale peut donc invoquer devant son juge national
les droits qu’il tire des accord externes, d’un accord conclu entre L’UE et un Etat tiers ou une organisation
internationale, y compris dans le cadre de litige entre personnes privées. La Cour fait du cas par cas.

Par exemple, elle a admis cet effet direct s’agissant d’un accord de libre-échange ou d’association. De même, elle a eu le
même raisonnement s’agissant des décisions adoptées par les organes institués par ces accords internationaux.

En revanche, la Cour de justice a refusé de reconnaître, à plusieurs reprises, un effet direct aux règles du
GATT (accord de commerce signé en 1947, ancêtre de l’OMC). Pourquoi ? Parce que les règles de l’accord du GATT sont
beaucoup trop souples pour la Cour, càd qu’elles sont sujettes à plusieurs interprétations. Elle a considéré ici que cet
accord du GATT avait mis en place un système de règlement des litiges entre Etats membres. Pour la Cour de justice ce
système de règlement des litiges était incomplet. Donc aucune disposition du GATT ne pouvait être invoquée par un
justiciable. Le GATT a disparu en avril 1994. La Cour de justice a retenu la même solution s’agissant de l’OMC. Un
justiciable ne peut invoquer à l’appui d’un recours devant son juge national les dispositions des décisions de l’organe de
règlement de différends de l’OMC.
Section 4 : La primauté du DUE

On dit que le DUE est directement, immédiatement, applicable dans l’ordre interne. Il est important
également de s’assurer qu’il va primer sur les règles nationales. Effectivement, le principe de primauté* signifie
qu’une norme de L’UE prend place dans l’ordre juridique interne des Etats membres avec un rang de priorité sur
l’ensemble des normes nationales. Conséquence, en cas de conflit, entre une norme de l’Union et une norme nationale, la
norme de droit nationale doit être écartée au profit du DUE.

§1 : Le principe de la primauté du DUE


A) La consécration de la primauté

Ce principe de primauté n’existe dans aucun traité. Là encore c’est la Cour de justice qui a élaboré de toute
pièce ce principe de primauté (arrêt COSTA contre ENEL du 15 juillet 1964).
La Cour de justice va élaborer un raisonnement spécifique :

 La Cour de justice va d’abord préciser que l’ordre juridique communautaire est intégré au
système juridique des Etats membres et s’impose à leurs juridictions.

 Les Etats membres ont doté L’UE de pouvoirs réels issus d’une limitation de compétence,
et créant par là même un corps de droits applicables à leurs ressortissants et à eux-mêmes.

 Les termes et l’esprit du traité ont pour corolaire l’impossibilité pour les Etats de faire
prévaloir, sur une base de réciprocité, des normes nationales contraires.

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 Et donc la Cour de justice rappelle que ce sont en définitive les caractéristiques propres de
l’ordre juridique communautaire qui ordonnent de consacrer la primauté du droit
communautaire sur les droits nationaux.
Ces caractéristiques du DUE sont le principe de l’applicabilité directe, le transfert d’attribution des
Etats membres, et l’unité de l’ordre juridique communautaire.
La Cour de justice parachève sa démonstration en rappelant que étant une source autonome de droit, le DUE
ne saurait se faire opposer un texte interne qui lui serait contraire.

B) La portée du principe de primauté

Toute la jurisprudence de la Cour de justice va confirmer et conforter ce principe de primauté, et surtout lui
donné une portée absolue. L’ensemble des normes obligatoires de l’Union disposent de ce principe de
primauté.  La primauté s’applique donc aux traités.
 Il s’applique également au droit dérivé comme les règlements (arrêt Politi du 14 décembre 1971), les
directives, les décisions, le droit conventionnel.
 Les actes hors nomenclature bénéficient également du principe de primauté, mais à condition qu’ils
entraînent des effets juridiques obligatoires.
 Egalement, les PGD communautaire bénéficient aussi de ce principe de primauté.

A contrario, le principe de primauté ne bénéficiera pas aux normes dépourvues d’effet contraignant (pas
d’effet juridique obligatoire) comme les recommandations ou les avis. Selon la Cour de justice cependant les
juridictions nationales sont tenues de prendre en considération les avis et les recommandations dès lors
qu’ils sont susceptibles d’éclairer l’interprétation de dispositions obligatoires.

Ces actes priment-ils sur tous les actes nationaux ? Il faut se placer du côté des Etats.
Pour la Cour, le DUE prime sur toutes les normes nationales quelles qu’elles soient (Arrêt COSTA conter ENEL).
Par ailleurs, le droit prime aussi sur le droit national, quel que soit son auteur (autorité centrale de l’Etat ou
une collectivité territoriale). Plus globalement, la Cour de justice considère que toutes les normes nationales sont
assujettis au principe de primauté, que ce soit un acte administratif (par exemple un acte règlementaire, même sur les
conventions collectives), ou encore sur les normes constitutionnelles.

 En définitive, toutes les normes nationales sont assujetties au principe de primauté.

C) Les conséquences de la primauté

Ces conséquences ont été précisées par la Cour de justice dans l’arrêt Simmenthal du 9 mars 1978. La Cour de justice
rappelle simplement dans cet arrêt que les dispositions du traité et les actes des institutions directement
applicables font partie intégrante, avec rang de priorité, de l’ordre juridique applicable sur le territoire de
chacun des Etats membres. Puis dans cet arrêt, elle va tirer les conséquences de ce principe de primauté.
La Cour de justice a d’abord rappelé les conséquences de la primauté pour les autorités nationales :

La Cour de justice va distinguer 2 hypothèses :


 Lorsqu’une norme nationale contraire au droit communautaire et antérieure à la norme de
l’Union : le principe de primauté a pour effet de rendre inapplicable de plein droit toute
disposition contraire de la législation nationale existante (CJ, 19 juin 1990, Factortame).
 Lorsque les normes nationales contraires sont postérieures à la norme de l’Union : la Cour de
justice dispose ici que le principe de primauté a pour effet d’empêcher la formation valable de
nouveaux actes législatifs nationaux dans la mesure où ils seraient incompatibles avec des
normes communautaires. (Le juge national a pour rôle d’écarter la norme national contraire par
rapport au DUE).

La Cour de justice rappelle que ces obligations s’imposent aux autorités nationales en vertu du principe de
coopération loyale, qui imposent pour la Cour de justice d’abroger toutes les normes nationales contraires
au droit communautaire.

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Qu’en est-il des juges ? Les conséquences de la primauté pour le juge national :
Pour la Cour de justice, c’est le même raisonnement qui s’applique que pour les autorités nationales.
Le juge national lorsqu’il est face, dans un procès, à une norme nationale contraire à une norme
communautaire, devra écarter toute disposition nationales, même d’ordre constitutionnelle qui serait
contraire au DUE. Donc le juge national est un garant. Il doit assurer, à travers sa fonction juridictionnelle,
l’application pleine et entière du DUE, si nécessaire en écartant la norme nationale.
 La Cour de justice a confirmé ce principe de primauté.

§2 : La primauté du DUE en France


Rappel : La France est un Etat moniste. Donc normalement, elle n’aurait pas dû poser problème.
A) Le DUE et la loi
1) La position du Conseil constitutionnel

On a quelques dispositions dans la Constitution qui organisent les rapports du droit international avec le droit national,
notamment l’Article 55 de la Constitution qui pose expressément le principe de primauté du droit
international sur la loi française. Et donc par extension, il a été ensuite admis que cet Article 55 de la
Constitution devait poser le principe de primauté de DUE sur la loi française.
Article 55 : « Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité
supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie ».

Le Conseil constitutionnel apprécie la conformité de la loi à la Constitution. Or le Conseil constitutionnel se refuse à


examiner la conformité d’une loi aux dispositions d’un traité ou d’un accord international depuis sa décision
du 15 janvier 1975, décision IVG.
Pourquoi ? Il estime qu’il ne lui appartient pas de prononcer, au titre de l’Article 61 de la Constitution (contrôle
de constitutionnalité), l’inconstitutionnalité d’une loi contraire à un traité.

Dans cette décision, le juge constitutionnel a rappelé que malgré le principe de primauté des traités sur les lois (Article
55 de la Constitution), il n’est pas compétent pour examiner la conformité des lois avec les engagements internationaux
de la France. (En 1975, il s’est prononcé vis-à-vis de la convention EDH, pas du droit communautaire à proprement
parlé). Effectivement, il estime que cet Article 61 de la Constitution ne lui donnait pas compétence à ce titre, mais ne lui
donne compétence que pour se prononcer sur la conformité à la Constitution des lois conférées à son examen. Dans ce
cas, implicitement, le juge constitutionnel, reconnait que ce contrôle de conventionnalité revenait aux
juridictions ordinaires qui se doivent d’assurer l’effet utile de l’Article 55. Les juridictions ordinaires doivent
assurer le contrôle de conformité des lois par rapport aux traités et plus largement d’assurer le principe de primauté du
DUE.
 Pour lui, il revient à la Cour de cas et au Conseil d'Etat d’assurer le principe de primauté. Il l’a rappelé
par exemple dans une décision du 3 septembre 1986, loi relative aux conditions d’entrée et de séjour à
des étrangers en France.

Nuances : le Conseil constitutionnel en revanche a accepté de contrôler la conventionnalité d’une loi dès lors
où il n’intervient plus en tant que juge constitutionnel mais en tant que juge électoral.

La mise en place de la QPC mise en place par la loi organique du 10 décembre 2009 relative à l’application de
l’Article 61-1 de la Constitution n’a nullement remis en cause cette situation. Le Conseil constitutionnel a eu
l’occasion de confirmer la distinction entre le contrôle de constitutionnalité qui relève de sa compétence, du contrôle de
conventionnalité qui relève toujours de la compétence des juridictions ordinaires (décision du 12 mai 2010, loi relative à
l’ouverture à la concurrence, à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne).

2) Position des juridictions judiciaires

Pendant longtemps, la Cour de cassation a refusé de faire prévaloir un traité ou un accord international sur
une loi postérieure (loi adoptée après traité) au motif notamment qu’il ne se reconnaissait pas le droit de
remettre en cause la volonté du législateur (jurisprudence Matter).

Quelques mois après la décision du Conseil constitutionnel, et dès le 24 mai 1975, la Cour de cassation
abandonne sa doctrine à l’occasion de l’affaire Société des cafés Jacques Vabre.

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Ici, la Cour de cassation va faire primer une disposition du Traité de Rome sur une loi nationale postérieure en appuyant
son raisonnement non seulement sur la spécificité de l’ordre juridique de l’Union, mais également sur l’Article 55 de la
Constitution, consacrant ainsi la primauté du DUE sur la loi nationale, même postérieure.
La Cour de cassation va confirmer sa jurisprudence. Elle l’a confirmé à plusieurs reprises en reprenant son
raisonnement.

3) Position du juge administratif

Le Conseil d'Etat va rester attaché à la fameuse doctrine Matter en considérant que l’Article 55 ne l’autorisait
seulement à faire prévaloir les traités de L’UE que sur les lois antérieures à ces traités communautaires.
Le Conseil d'Etat l’a affirmé dans l’arrêt du 7 juillet 1978, arrêt Croissant.

Le Conseil d'Etat se refusait d’admettre, comme le juge judiciaire, la primauté du DUE sur une loi postérieure
contraire. Pourquoi ? Parce qu’il estimait que cela revenait à contrôler la conformité des lois au regard des
traités internationaux. Or c’est une mission qui ne devrait revenir qu’au seul Conseil constitutionnel en
application de l’Article 61 de la Constitution.
Il l’a affirmé dans un arrêt du 1er mars 1968, arrêt Syndicat général des fabricants de semoule de France. Dans cet arrêt
le Conseil d'Etat refuse de faire primer un règlement du Conseil de L’UE sur une ordonnance à valeur législative au motif
que ce règlement communautaire était antérieur à l’ordonnance.

En dépit des interventions du Conseil constitutionnel, et de la Cour de cassation, le Conseil d'Etat va rester
sur sa position pendant une vingtaine d’années. Il ne changera d’avis que dans l’arrêt Nicolo du 20 octobre
1989. Il va abandonner la théorie de la loi écran. Pour la 1 ère fois, il va consacrer la primauté du droit primaire sur une
loi postérieure. Dans cet arrêt, le Conseil d'Etat va se fonder uniquement sur l’Article 55 de la Constitution et
non sur la spécificité de l’Union. Cette position a toujours été réaffirmée par le Conseil d'Etat.

Cette position est extrêmement critiquable puisqu’avec la révision constitutionnelle qui a précédé la ratification du
Traité de Maastricht, le Conseil d'Etat disposait d’un fondement légitime à la primauté du DUE sur la loi.

Progressivement, la jurisprudence du Conseil d'Etat semble s’infléchir puisqu’en 2007, il a accepté


d’examiner la conformité d’un décret français par rapport à la directive en se référant non seulement à
l’Article 55 de la Constitution, mais pour la 1 ère fois aussi à l’Article 88-1. Quelques part, il reconnait le
principe de primauté de l’Union en se référant à l’Article 88-1 (arrêt Conseil d'Etat, 8 février 2007, arrêt société
Arcelor Atlantique et Lorraine).

La primauté du DUE sur les lois nationales postérieures contraires est donc largement admise par les
juridictions administratives dans la mesure où la jurisprudence Nicolo a été étendue au règlement
communautaire (Conseil d'Etat, 24 septembre 1990, Boisdet).
Puis le Conseil d'Etat a étendu sa jurisprudence Nicolo aux directives (Conseil d'Etat, 28 février 1992, L’arrêt SA
Rothman international France et SA Philip Morris France).

Egalement étendu au PGD communautaires (CE, 3 décembre 2001, Syndicat national de l’industrie
pharmaceutique).

B) Le DUE et la Constitution

La Constitution de 1946 était très favorable au droit communautaire. Il était notamment indiqué dans cette
Constitution que la France était favorable et qu’elle se conformait aux règles du droit international public. Et sous
réserve de réciprocité, la France consent aux limitations de souveraineté nécessaires à l’organisation et à la défense de la
paix (alinéas 14 et 15 du Préambule de la Constitution de 1946).
En revanche, cette Constitution ne prévoyait aucun contrôle de constitutionnalité des traités internationaux.
A ce titre, et c’est pourquoi les ratifications du traité de Paris (CECA) et du traité de Rome (CEE et Euratom) ne
soulèveront aucune difficulté. La Constitution de 1958 paradoxalement, n’est pas aussi favorable au DUE.

On a quelques dispositions s’agissant des traités :

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 Par exemple l’Article 11 qui prévoit que le Président de la République peut soumettre au
référendum la ratification d’un traité.

 L’Article 54 de la Constitution quant à lui instaure un contrôle préalable et préventif de


constitutionnalité des engagements internationaux.
Dans ce cadre, le Conseil constitutionnel peut être saisit par le Président de la République, le Premier Ministre, le
Président de l’Assemblée Nationale ou du Sénat, ou encore 60 députés ou 60 sénateurs, afin qu’ils se prononcent sur la
compatibilité avec la Constitution d’un engagement international dont la ratification ou l’approbation est envisagée.
Si le Conseil constitutionnel juge qu’une disposition ou un traité dans son entier est inconstitutionnelle, donc
contraire à la Constitution, l’autorisation de ratifier ou d’approuver ce traité ne pourra intervenir qu’après la
révision préalable de la Constitution.
On a 2 techniques pour réviser la Constitution : soit par référendum, soit par un vote à la majorité des 3/5 ème du
Parlement (les 2 Chambres sont réunies). On dit qu’ils sont réunis en « Congrès ».

1) La position du juge constitutionnel

 S’agissant de la Constitution et du droit primaire :

Les traités et accords internationaux adoptés avant l’entrée en vigueur de la Constitution de 1958
bénéficient d’une présomption de compatibilité avec la Constitution de 1958.

Le Conseil constitutionnel a eu se prononcer dans une décision du 19 juin 1970, « traité signé à Luxembourg le 22 avril
1970 ». Les 3 premiers traités, selon le Conseil constitutionnel, (traité de Paris et les 2 traités de Rome) ont été
régulièrement ratifiés et publiés et donc ils bénéficient d’une immunité constitutionnelle (càd qu’à aucun
moment on ne va les remettre en cause) et d’une autorité supérieure à celle des lois.
Les traités relatifs à l’Union approuvés et ratifiés postérieurement à l’entrée en vigueur de la Constitution de
1958, ont pu et peuvent encore faire l’objet d’un contrôle, on parle ici d’un contrôle a priori de
constitutionnalité par le Conseil constitutionnel soit de l’Article 54, soit de l’Article 61 de la Constitution.
On dit bien que ces traités bénéficient d’une immunité constitutionnelle (càd que normalement, on ne peut plus
trop les remettre en cause), dès lorsqu’ils n’ont pas été soumis à l’appréciation du Conseil constitutionnel (il y en
a 2 : l’AUE et le traité de Nice qui n’ont fait l’objet d’aucune saisine du Conseil constitutionnel) ou lorsque celui-ci fait
un contrôle positif de constitutionnalité (ils sont conformes à la Constitution). On a eu des décisions positives du
Conseil constitutionnel : cas d’une décision du 30 décembre 1976. Le Conseil constitutionnel a dû apprécier la
constitutionnalité d’une décision du Conseil des communautés européennes relative à l’élection de l’assemblée des
communautés (ancien nom du Parlement européen) au suffrage universel direct. Il a estimé que cette décision du
Conseil qui datait du 20 septembre 1976 ne comportait aucune clause contraire à la Constitution.

Par la suite, le Conseil constitutionnel va s’opposer à certains traités :

 Le 1er traité déclaré inconstitutionnel en partie est le traité de Maastricht (décision du 9 avril 1992
relative au traité sur L’UE).
Pour la 1ère fois on reconnaissait le droit de vote et d’éligibilité. En France c’était très nouveau, il fallait
mettre des garde-fous. Il fallait donc réviser la Constitution. + Création d’une loi économique et
monétaire. C’est donc perdre le pouvoir de battre monnaie.
On révise donc la Constitution le 25 juin 1992. Cette loi constitutionnelle du 25 juin 1992 introduit un
Titre XV dans notre Constitution, relatif à L’UE.

 Le Conseil constitutionnel sera aussi saisit du traité d’Amsterdam (décision du 31 décembre 1997).
Ce traité opère un nouveau transfert de compétences au profit de L’UE notamment dans le domaine de
l’asile, de l’immigration et du franchissement des frontières. Le nouveau traité d’Amsterdam pourra
être ratifié une fois qu’on aura révisé la Constitution française par une loi constitutionnelle du 25
janvier 1999.

 Le Conseil constitutionnel a estimé qu’il fallait aussi réviser la Constitution avant qu’on puisse
approuver le traité établissant une Constitution pour l’Europe. Le Conseil constitutionnel rend sa

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décision le 19 novembre 2004 et la Constitution sera révisée par une loi constitutionnelle du 1 er mars
2005, même si ce traité n’entrera jamais en vigueur (référendum négatif).

 Le traité de Lisbonne : Il sera aussi considéré partiellement comme inconstitutionnel par le Conseil
constitutionnel dans une décision du 20 décembre 2007. Ce traité de Lisbonne opérait également des
transferts de compétences à L’UE, notamment en matière de lutte contre le terrorisme. Et aussi
notamment parce qu’on donnait plus de pouvoirs aux Parlements nationaux. Donc la Constitution
française est révisée par la loi constitutionnelle de 4 février 2008.

Le Conseil constitutionnel a pu se prononcer sur les rapports existants entre la Constitution française et le
droit primaire. Le Conseil constitutionnel a tenu à rappeler que les rapports devaient s’entendre comme
étant des rapports de compatibilité entre Constitution et traité communautaire, et non de hiérarchie. Il est
plus simple de réviser la Constitution que de réunir 28 Etats et de renégocier le traité de l’Union.
Le Conseil constitutionnel met en avant les exigences de la construction de l’Union et surtout sa spécificité.

 S’agissant de la Constitution et du droit dérivé :

Le Conseil constitutionnel depuis une décision du 30 décembre 1977 (décision sur la loi de finance pour 1978) a posé le
principe selon lequel le droit dérivé bénéficie d’une immunité constitutionnelle tout simplement parce que ces
actes de droit dérivé, pris par les instances d’une organisation internationale, ne doivent être soumis ni à
ratification, ni à approbation. Et donc ils ne peuvent lui être soumis au titre de l’Article 54. Ils échappent à tout
contrôle de constitutionnalité.

Il a à plusieurs reprises rappelé cette immunité juridictionnelle. Notamment dans une décision du 10 juin 2004, loi pour
la confiance dans l’économie numérique. Il avait été saisit pour éventuellement contrôler la constitutionnalité des lois de
transposition des directives. Il a refusé de faire ce contrôle. Pourquoi ? Parce qu’il estime que cette transposition d’une
directive n’est qu’une simple exigence constitutionnelle à laquelle il ne pourrait être fait obstacle qu’en raison d’une
disposition expresse contraire de la Constitution. Il n’a donc pas ce rôle de contrôler. C’est une exigence constitutionnelle
et non communautaire. Il estime que si la loi de transposition n’est pas bonne, il reviendrait à un juge nationale de saisir
la Cour de justice d’une question préjudicielle.
Cette décision de 2004 confirme la jurisprudence du Conseil constitutionnel selon laquelle il se refuse de
reconnaître la primauté du DUE sur la Constitution. C’est un contrôle de compatibilité, mais pas un contrôle
hiérarchique. Il a clairement exprimé la supériorité de la Constitution sur le DUE dans une autre décision du 27 juillet
2006, loi relative aux droits d’auteur.

Le juge constitutionnel français ne peut pas non plus faire l’économie de la particularité du DUE.
Le juge constitutionnel français reconnaît malgré tout la spécificité à l’ordre juridique communautaire ainsi
que son intégration dans l’ordre juridique français.
Mais il n’en demeure pas moins que le Conseil constitutionnel ne reconnait qu’une valeur relative à la
primauté du DUE, qui doit céder le pas devant les exigences constitutionnelles. En conséquence de quoi, pour
le juge constitutionnel, la Constitution demeure la norme suprême de l’ordre juridique français.

Le Conseil d'Etat et la Cour de cassation vont également affirmer la supériorité de la Constitution sur le DUE.

2) La position des juges ordinaires

Le Conseil d'Etat a reconnu qu’une convention internationale ne peut porter atteinte à des principes de valeur
constitutionnelle. Il va donc dans le même sens que le Conseil constitutionnel (CE, 3 juillet 1996, arrêt Koné).

Il a confirmé également cette position en jugeant que la supériorité des traités posée par l’Article 55 de la
Constitution ne peut être opposée aux dispositions de valeur constitutionnelles. Il a donc ainsi consacré la
primauté des règles à valeur constitutionnelle sur les traités internationaux (30 octobre 1998, Sarran
Levacher).

Il a fallu avoir le même raisonnement par rapport au DUE. Le Conseil d'Etat a affirmé ensuite la prééminence
des dispositions constitutionnelles sur le DUE (3 décembre 2001, Syndicat national de l’industrie pharmaceutique).
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Pour le Conseil d'Etat le principe de primauté du DUE ne saurait conduire dans l’ordre interne à remettre en cause la
suprématie de la Constitution.

La Cass aura le même raisonnement. Dans son arrêt du 2 juin 2000, arrête Fraisse, la Cass reconnait également la
suprématie de la Constitution par rapport aux règles de droit international et par rapport au droit de L’UE.

Section 5 : Les Etats et l’ordre juridique communautaire


La création du droit de L’UE relève avant tout des institutions, notamment le trinôme de la Commission, du
Conseil et du Parlement européen.

En revanche, sa mise en œuvre relève bien des Etats qui doivent prendre toutes les mesures nécessaires afin
de mettre en œuvre et d’exécuter le DUE. On dit que chaque Etat membre va mettre à disposition de L’UE son
administration. De même, les Etats membres mettent toujours à disposition de l’Union leurs organes
normatifs, càd le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif, pour adopter les actes nationaux nécessaires. Les Etats
mettent aussi à disposition leur justice pour assurer le respect du DUE, mais également la protection des
citoyens européens.

Les Etats sont tenus à une obligation de coopération loyale, même s’ils disposent d’une certaine autonomie
institutionnelle et procédurale. Autonomie que la Cour de justice est venue malgré tout encadrer.

§1 : L’obligation de coopération loyale des Etats membres

La Cour de justice n’a pas créé ce principe. Ce principe découle directement des traités constitutifs et notamment
cette obligation est visée à l’Article 4, §3 du TUE. Cet Article dit que les Etats doivent faciliter l’accomplissement par
l’Union de sa mission et doivent s’abstenir de toutes mesures susceptibles de mettre en péril la réalisation
des objectifs de l’Union. Ça veut dire que les Etats doivent prendre toutes les mesures nécessaires permettant
d’adopter les mesures prévues par les traités ou par le droit dérivé. Egalement, ils sont tenus d’intervenir spontanément
quand c’est nécessaire.

Pourtant c’est dans ce domaine de coopération loyale, que la Cour de justice a développé le plus de
jurisprudence. Notamment, la Cour de justice a rappelé les contours de ce qu’on entendait par coopération
loyale : c’est l’obligation d’assurer l’effet utile du DUE. Par exemple transposer correctement une directive.
Il faut aussi fournir à la Commission une information claire et précise, par exemple, sur l’application du DUE, lui
permettant en tant que gardienne des traités, de s’assurer de cette bonne application du DUE.
Il faut également répondre dans des délais raisonnables à toute demande de renseignements lorsque ces derniers sont
demandés par les institutions communautaires.

§2 : Le principe d’autonomie institutionnelle et procédurale des Etats membres

Le principe d’autonomie institutionnelle et procédurale des Etats membres signifie qu’à chaque fois que des mesures
nationales doivent être arrêtées par les Etats membres (càd adoptées par les Etats membres pour mettre en œuvre
le DUE), ces derniers disposent d’une certaine liberté et en application de leur système constitutionnel de
choisir les autorités nationales compétentes ainsi que les procédures nécessaires pour mettre en œuvre ce
DUE. Cette liberté a été posée dans l’arrêt Cour de justice, 15 décembre 1971, International Fruit Company. C’est l’arrêt
qui pose le principe de l’autonomie des Etats en la matière.

Cette liberté s’applique non seulement aux autorités nationales (càd exécutif et législatif), mais s’applique
aussi aux juges nationaux.

 Cela signifie que ce dernier, en sa qualité de juge de l’Union de droit commun, doit assurer
l’application du DUE et la protection des droits que les particuliers tirent de ce droit.

 En revanche, il est clair que l’intervention des juges nationaux s’inscrit dans le cadre des
systèmes juridiques nationaux. Et donc les juges statuent selon l’organisation juridictionnelle
propre à leur Etat. Donc il appartient bien à chaque Etat membre, en application de ce principe
d’autonomie institutionnelle et procédurale, de désigner les juridictions compétentes et d’en fixer les

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pouvoirs, de déterminer la condition de recevabilité des recours, et ce afin de sauvegarder les droits des
justiciables.
La Cour de justice dit simplement ici que parmi les divers procédés de l’ordre juridique interne, le juge national doit
appliquer ceux qui sont le plus appropriés pour sauvegarder les droits individuels conférés par le DUE.

Ce principe d’autonomie aurait pu conduire à une mauvaise application du DUE, à une mauvaise accessibilité des
justiciables à leur juge. Donc la CJ a encadré par sa jurisprudence le principe d’autonomie procédurale. Pour la
Cour de justice, le principe d’autonomie procédurale des Etats (organisation interne) n’existe qu’en cas d’absence
d’harmonisation de l’Union. Ce qui signifie que cette liberté n’existe que si le DUE n’a pas procédé à un
aménagement des procédures nationales à court terme.
Par exemple, le recours préjudiciel a été imposé par le DUE. A ce titre, les Etats n’ont pas le droit de modifier
l’organisation d’un recours préjudiciel.

Donc on dit que l’autonomie institutionnelle des Etats membres est absolue. Cela signifie que les Etats sont
complètement libres d’avoir le régime politique qu’ils souhaitent ou l’organisation des institutions qu’ils souhaitent.
En revanche, l’autonomie procédurale (méthode de travail) est relative.

Donc la Cour de justice a encadré et limité cette autonomie procédurale en imposant aux Etats 2 principes,
avec toujours le même objectif : assurer la protection des justiciables au maximum.

 Le principe de l’autonomie procédurale est d’abord encadré par le principe d’effectivité. Cette
effectivité s’applique aux juges nationaux.
Cela signifie que la protection des justiciables doit être effective, ce qui signifie que les procédures
des recours juridictionnels destinées à assurer la sauvegarde du DUE, ne peuvent pas être
aménagées de manière à rendre impossible ou difficile l’exercice des droits que les
juridictions nationales ont l’obligation de sauvegarder. C’est donc rendre effectif les droits
qu’un justiciable peut tirer du DUE.
Notamment Arrêt Cour de justice, 9 novembre 1983, San Giorgio.  Impossibilité devant un juge
nationale d’obtenir le remboursement de taxes perçues en violation du droit communautaire. Càd que
si nécessaires les juges nationaux doivent s’adapter au DUE et si nécessaire cela peut entrainer une
révision législative au sein de l'Etat concerné.

 Enfin, pour encadrer l’autonomie procédurale et rendre effective l’applicabilité du DUE, la Cour de
justice a dégagé un 2nd principe : le ppe d’équivalence (équivalence entre DUE et droit national).
Ce principe signifie que les règles procédurales applicables aux recours juridictionnels
destinées à assurer la sauvegarde du DUE ne doivent pas être moins favorables que celles qui
s’appliquent à des recours similaires de droit interne. Ex : Ce serait le cas par exemple d’un Etat
qui se voit attaqué pour violation du DUE par un justiciable. Il voit sa responsabilité engagée.
C’était le cas d’un Etat qui estimait que pour voir sa responsabilité engagée devant un juge national, il
fallait épuiser toutes les voies de recours internes alors même qu’une telle obligation procédurale
n’était applicable lors d’une action en responsabilité dirigée contre lui, Etat, en violation du DUE.
On doit avoir la même protection devant le juge communautaire que devant le juge
nationale. Cette autonomie est limitée car aucun Etat ne doit complexifier, rendre
inaccessible le recours à un juge national lorsque ce dernier doit mettre ne œuvre le DUE .
L’autonomie procédurale devant les juridictions est limitée par la Cour de justice.

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PARTIE 2 : LE SYSTEME JUDICAIRE DE L’UNION EUROPEENNE

Chapitre 1 : Les caractères généraux des juridictions de l'Union

Section 1 : Présentation du système

§1 : Nature de la justice de l'Union

A été abandonnée très rapidement sous l’influence allemande, et dès les négociations du traité CECA (années 50), l’idée
d’un Tribunal arbitral conçu sur le modèle d’une juridiction internationale. A été retenu le principe d’une juridiction
qui devait se comporter comme un juge interne à L’UE dont les Etats membres, les institutions
communautaires, mais également les particuliers sont de véritables justiciables. On oppose le DUE au droit
international. Quelles sont ces différences ? Quelle est l’originalité du système judiciaire de L’UE ?

En droit international, la justice est volontaire et consentie. Cela signifie que la saisine du juge international
relève de l’accord préalable des Etats.
Quand on prend la Cour internationale de justice (CIJ), il existe une clause facultative de saisine. Peu d’Etats ont refusé la
compétence obligatoire de la CIJ, mais ces Etats l’ont assortie de réserves. Il est donc difficile de mettre en œuvre cette
compétence. Aujourd'hui, la saisine de la CIG n’est toujours pas automatique.
Pour en revenir à l’Union, elle dispose d’une compétence obligatoire dès lors qu’on est un membre de L’UE (on
ne peut pas émettre de réserves, …). Ça signifie également que son intervention est exclusive de tout autre mode
de règlement. L’autre intérêt de la Cour de justice : la Cour de justice peut être saisit unilatéralement, càd par un
seul Etat, une seule institution. On n’a pas besoin de l’accord de l’autre Etat. On n’a pas besoin de s’entendre pour une
saisine de la Cour de justice de l’Union.

La Cour de justice de l’Union a pour pouvoir de juger les différends entre des particuliers, personne
physiques et morales, avec les institutions, voire même les particuliers ont un accès direct à la Cour de justice de L’UE.
Exception : On peut saisir la CEDH. Mais la France n’a accepté la saisine de la CEDH par les particuliers français que
depuis 1981.  En revanche, en droit international, la personne physique et morale est très largement tenue à
l’écart de la juridiction internationale, elle ne participe pas à la procédure. Notamment, l’accès à la CIJ n’est
réservé qu’aux seuls Etats.

 Les arrêts, les sentences, rendus par les juridictions internationales ne sont obligatoires que pour les
Etats membres et n’existent que dans l’ordre international.
 Au contraire les arrêts de la Cour de justice de l’Union ont non seulement force obligatoire, mais surtout
force exécutoire sur le territoire de tous les Etats membres. Ces arrêts s’imposent à tous et doivent être exécutés
par tous. Une jurisprudence du DUE peut être invoquée devant le juge national.

Il existe également une différence quantitative entre la CIJ et la Cour de justice de l’Union.
 Entre 1947 et 2010, 150 affaires ont été inscrites au rôle de la CIJ.
S’agissant de la Cour de justice de l’Union, entre 2005 et 2010 (6 années), on a presque 3500 affaires.
 Pour les 3 juridictions au niveau de L’UE, sur 6 années, on a plus de 7500 affaires. Donc les 3
juridictions de L’UE traitent globalement environ 1300 affaires par an.
Pour la CIJ ce n’est que 3 affaires par an.

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L’UE dispose bien d’un système judicaire à la mesure de son ambition de créer un ordre juridique autonome
et intégré. C’est un système judiciaire qui garantit l’unité d’application du DUE mais également le respect et
la protection des justiciables. Cela s’explique notamment car la Cour de justice s’est vue reconnaitre de
multiples fonctions (5) qui se complètent les unes les autres.

 1ère fonction : Fonction de justice administrative.


ère
1 mission confiée car il fallait que la justice communautaire protège les sujets de DUE (Etats et individus) contre les
agissements illégaux ou dommageables des institutions communautaires. (Aujourd'hui, on se rend compte qu’on se
protège avant tout des agissements illégaux des Etats). A ce titre on va se référer au Conseil d'Etat français. On
présentait la CJCE comme une transposition du Conseil d'Etat français. En parallèle on va confier à cette Cour
de justice des litiges se rapprochant des litiges existants en droit administratif français. Par exemple, la Cour de
justice va pouvoir annuler pour illégalité les actes normatifs pris par les institutions. C’est un peu le même rôle que le
Tribunal administratif ou le Conseil d'Etat français. On a calqué le REP français.
La Cour de justice peut aussi réparer les dommages causés par les institutions. C’est le recours de plein contentieux qu’on
a en droit administratif français.

 2ème fonction : La Cour de justice a aussi une fonction de justice constitutionnelle.


Elle l’exerce quand elle contrôle la conformité aux traités des actes dérivés pris par les institutions. Ca serait une
sorte de contrôle de constitutionnalité.
Juge constitutionnel aussi car la Cour de justice de l’Union va s’assurer par son intervention à la bonne
répartition des compétences entre les institutions et les Etats. Egalement comme un juge constitutionnel, la Cour
de l’Union dispose également d’une compétence consultative qui lui permet de se prononcer par exemple sur la
compatibilité avec les traités d’un accord international envisagé par L’UE.

De même, la Cour a aussi pour mission de trancher les conflits entre la Commission européenne (gardienne des
traités) et les Etats qui sont poursuivis pour manquement.

 3ème fonction : Fonction de justice internationale.


Ici elle se rapproche de la mission d’un juge international qui est chargé de trancher les litiges entre les Etats
(ici entre Etats membres), notamment, lorsque les Etats membres de l’Union s‘opposent sur l’interprétation ou
l’application d’un traité communautaire.

 4ème fonction : Fonction de justice régulatrice.


En raison de la complexité du DUE, la Cour de justice doit assurer une unité d’interprétation et d’application du
droit communautaire, via notamment le recours du renvoi préjudiciel.

 5ème fonction : Fonction de Haute justice (ou de Haute Cour de justice)  Article 247 du TFUE.
L’Article 247 dispose que « Tout membre de la Commission, s'il ne remplit plus les conditions nécessaires à
l'exercice de ses fonctions ou s'il a commis une faute grave, peut être déclaré démissionnaire par la Cour de
justice ». Ce rôle de contrôle à l’égard des membres de la Commission vaut également à l’égard des membres de la Cour
des comptes.

§2 : La structure du contentieux de L’UE

Les auteurs des traités ont voulus doter la Communauté d’un pouvoir judicaire autonome, mais également
créer un lien organique entre la Cour de justice et les juridictions nationales en vue d’une application
harmonieuse et d’un développement cohérent du droit communautaire. C’est pourquoi le système judicaire
de l’Union ne réside pas exclusivement dans la Cour de justice, mais dans un ensemble juridictionnel plus
vaste qui englobe les juridictions des Etats membres et la Cour de justice.
 Donc la Cour de justice n’est pas la seule à appliquer le DUE.

Le système judicaire communautaire n’a jamais eu pour but de soumettre à la Cour tous les litiges qui
mettent en jeu le droit communautaire. Effectivement il est commun de dire aujourd'hui que le juge national est le
juge communautaire de droit commun, tandis que la Cour de justice ne dispose à cet égard que d’une
compétence d’attribution. Càd compétence attribuée expressément par les traités.

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Concrètement, cette compétence d’attribution a été réduite au strict minimum, compatible avec l’autonomie de
l’Union. Ne relève de la Cour de justice de l’Union que les recours en annulation et en carence contre les
institutions, les recours en manquement contre les Etats et les recours en responsabilité extracontractuelle
de l’Union. Pour le reste, le juge national est compétent pour connaitre de l’ensemble du contentieux entre les
particuliers, entre les particuliers et les Etats membres.
On estime que ce système juridictionnel de L’UE est particulièrement respectueux des souverainetés des Etats.
Il permet de faire l’économie d’un vaste appareil de juridiction européenne qui aurait rendu la justice sur
l’ensemble des territoires des Etats membres. Ce système européen ne prive les juridictions nationales d’aucunes de leur
compétences naturelles.
En France, on a même estimé que les juges nationaux se sont libérés de la séparation des pouvoirs. Càd que le juge
français n’hésite pas à écarter une loi contraire au DUE. Donc finalement, le juge national est devenu le garant des droits
que les particuliers tirent du DUE. Ce qui prouve aussi l’efficacité du système mis en place au niveau de L’UE.

Cependant, il existait un risque évident avec ce système pour l’application uniforme et cohérente du droit
communautaire. On aurait pu avoir autant d’interprétation qu’on a d’Etats.

Il aurait pu être envisagé de créer une instance spécifique, une sorte de juridiction suprême au DUE, chargée
de la régulation, de l’harmonie des normes au niveau communautaire. Mais ce système aurait présenté
plusieurs inconvénients :
 Il aurait mis en œuvre un processus très lourd. Ce qui aurait conduit à des inégalités de traitements
entre les justiciables des Etats membres.
 D’autre part, ça aurait créé une subordination hiérarchique entre les juridictions nationales et cette
fameuse Cour suprême. Or, il n’existe pas de lien hiérarchique entre les juridictions nationales et la
Cour de justice. La Cour de justice ne fait que s’appuyer sur le réseau existant. C’est de la collaboration.

C’est pourquoi a été retenu afin d’assurer l’uniformisation du droit le principe du renvoi préjudiciel organisé
par l’Article 267 du TFUE. Renvoi préjudiciel piloté par la Cour de justice.
 Donc 2 niveaux de juridictions.
Ici, cette question préjudicielle, par le biais de l’interprétation donnée par la Cour de justice, s’inscrit dans les 2 niveaux
de juridictions, dans un système de coopération. La Cour de justice rend un avis lors d’une question préjudicielle,
et le juge statut en son nom propre.

Section 2 : La Cour de justice de L’UE


La Cour de justice a joué un rôle essentiel dans la consécration, le développement, la structuration, et la pérennisation
de l’ordre juridique communautaire.
Le Traité de Lisbonne a parachevé la construction communautaire à ce titre puisqu’elle a consacré la notion
de Cour de justice de L’UE comme regroupant les 3 juridictions existantes :
 La Cour de justice elle-même.
 Le Tribunal
 Le Tribunal de la fonction publique.

§1 : L’évolution du système juridictionnel de l’Union

Comment sont apparues les 3 Cours ?

La sauvegarde de l’unité du DUE impose le principe de l’unité de la juridiction européenne. C’est à ce titre
que la CJCE (Cour de justice de L’UE) était unique, notamment depuis la convention relative à certaines institutions
communes de 1957. On n’avait donc qu’une seule Cour de justice pour les 3 traités (CECA, CEE et Euratom).
Mais également, pendant longtemps, l’unité a justifié que la CJCE soit resté longtemps la seule juridiction créée
dans l’ordre communautaire.

Mais on s’est vite rendu compte que la CJCE était débordée par le nombre d’affaires. On s’est rendu compte
que le principe d’unité ne devait pas être confondu avec le principe d’unicité de la juridiction de l’Union. Cela
signifie qu’il était parfaitement envisageable de disposer d’une diversification de la structure
juridictionnelle européenne pouvant entrainer la création d’autres juridictions.

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Effectivement, dès 1974, le Conseil avait marqué son accord pour créer une juridiction de 1 ère instance (il y
aurait eu appel ou cassation devant la CJCE) uniquement chargée des litiges entre les institutions et leur
personnel. Cependant, la Commission européenne ne va réagir qu’à partir de 1978 et va proposer d’instituer un
Tribunal administratif des communautés. Malheureusement, à partir de 1978, ce projet va être abandonné, cette
proposition de Tribunal ne rencontrera pas la volonté des Etats membres.
En 2004, la Cour de justice a estimé que ce projet n’était plus d’actualité.

Cependant, la Cour de justice continuait à être envahie par les affaires. Et donc il était temps de créer un
Tribunal permettant d’alléger les tâches de la CJCE de l’époque, mais surtout d’assurer une bonne
administration de la justice. On s’est rendu compte par exemple qu’il fallait dans les années 80 environ 25 mois à la
Cour de justice pour rendre un arrêt. Il fallait assurer un meilleur accès plus rapide des justiciables à la Cour. En
1980, la Cour avait jusqu’à 587 affaires inscrites au rôle.

Très rapidement, va être adopté par une décision du Conseil du 24 octobre 1988, le Tribunal de 1ère instance (TPI),
qui aujourd'hui est le « Tribunal ». Le TPI va être institutionnalisé dans le traité de Maastricht. Il était donc fait
pour durer. Mais le TPI lui-même va être très vite débordé. Par exemple, en 2010, le TPI a été saisit de 636 nouvelles
affaires (saisit directe). La Cour de justice n’arrêtait pas de critiquer le TPI. Par exemple, la Cour de justice avait pu
constater que le TPI avait mis 5 ans à rendre un arrêt en 1ère instance.
 Il fallait donc une nouvelle juridiction.

Ce TPI étant débordé, il a été question de créer des Tribunaux spécifiques, càd des Chambres juridictionnelles
spécifiques. C’est le traité de Nice (2001) qui va donner la possibilité de créer des Chambres juridictionnelles
pour le traitement en 1ère ressort de contentieux spéciaux. Aujourd'hui, on préfère parler de « Tribunaux
spécialisés ». Grâce au traité de Nice sera adoptée la décision du Conseil du 2 novembre 2004 qui va créer le Tribunal
de la fonction publique de L’UE. C’est un Tribunal qui est chargé spécifiquement de connaitre en 1 ère instance
des litiges opposants les institutions de l’Union à ses agents.

Donc aujourd'hui on a 3 juridictions.


Il est toujours possible d’envisager la création de nouvelles juridictions. Il serait question de créer un
Tribunal spécifique aux questions de la propriété intellectuelle. On y réfléchit depuis 2003. Un Tribunal du brevet,
validé par le Conseil en 2001, qui devait gérer les litiges de contrefaçon et de validité des brevets. Finalement, ce projet
va évoluer vers une coopération renforcée (un groupe d’Etats vont coopérer entre eux dans ce domaine).

 Aujourd'hui, sur l’Article 19 du TUE, la Cour de justice de L’UE comprend donc la Cour de justice
(l’ancienne CJCE, ou la CJUE), le Tribunal, et les Tribunaux spécialisés et dont notamment aujourd'hui
le Tribunal de la fonction publique de l’Union.

§2 : Composition
A) La Cour de justice
1) L’organisation

La Cour de justice est composée de 28 juges assistés de 9 avocats généraux. Ces membres sont nommés d’un
commun accord par les Gouvernements des Etats membres. Ces juges et avocats généraux sont désormais
nommés après la consultation d’un Comité, Comité chargé de donner un avis sur l’adéquation des candidats
proposés à l’exercice des fonctions en cause.

Il n’y a rien dans les traités qui disait qu’il fallait un juge par Etat.
La pratique suivie a été que la Cour comprenne toujours au moins un national de chacun des Etats membres.
Cette pratique se justifie non pas d’un point de vue politique, mais d’un point de vue juridique. Car dès lors que ces juges
statut en séance plénière, il est important d’avoir un juge particulièrement familiarisé avec le système
juridique de chaque Etat membre. Le traité de Nice a consacré cette pratique.

Autre originalité de la Cour : à côté de ces juges siègent des avocats généraux (ils n’existent nulle part en droit
international) dont le rôle est de représenter en toute impartialité et en toute indépendance des conclusions
motivées (une sorte de rapporteur public). On s’est inspiré de la structuration française.

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Leur place se justifie également par la recherche devant la Cour de justice d’une transparence dans le rendu
des décisions. Surtout, ce sont eux qui ont permis de faire évoluer la jurisprudence.

Le statut des juges et des avocats généraux leur permet d’assurer leur mission avec des garanties de
compétence, de continuité et d’indépendance. Par exemple, on prend les juges qui ont exercé dans leur Etat les plus
Hautes fonctions juridictionnelles. En France, ce sera plutôt le choix de Hauts magistrats.

A un moment donné on s’est inquiété de leur indépendance au regard de leur mode de nomination. En réalité,
aucun Etat n’a jamais contesté le choix d’un autre.
Mais la mise ne place d’un Comité qui rend un avis sur leur compétence depuis 2009 (Traité de Lisbonne) a
permis d’écarter ces critiques d’indépendance. Le Comité est composé de 7 anciens juges des instances
communautaires. Aujourd'hui, ce sont les personnes membres du Comité chargées de rendre un avis sur la
qualité des juges de la Cour sont nommé pour un mandat de 4 ans, mandat renouvelable une fois pour des
raisons d’indépendance.

En revanche, les juges de la Cour de justice et les avocats généraux sont bien renouvelables sans limitation dans le temps.
En pratique, les juges qui arrivent au sein de la Cour de justice ont déjà un passé assez long. Les juges et les avocats ne
font dans pas plus de 2 mandats de 6 ans en pratique. Effectivement, afin d’assurer une certaine continuité
dans la composition de la Cour, le mandat est de 6 ans, mais le renouvellement des juges se fait de manière
partielle tous les 3 ans par tiers.

Pendant la durée du mandat, il a fallu protéger l’indépendance des juges. Pour assure l’indépendance des juges
un régime d’immunités et d’incompatibilités a été mis en place.
 S’agissant de l’immunité, cela signifie que dans l’exercice de leurs fonctions, leurs actes, leurs paroles,
leurs écrits, sont protégés. Ils bénéficient de l’immunité après la fin de leurs fonctions.
 L’incompatibilité signifie qu’on ne peut être juge ou avocat général qu’au sein de la Cour de justice. Sinon
conflit d’intérêt.

S’agissant de son organisation interne, la Cour de justice a à sa tête un Président élu en son sein. Il est élu pour un
mandat de 3 ans renouvelables.

La Cour de justice a à sa disposition un certain nombre de collaborateurs.


 On va distinguer parmi les avocats généraux, le 1er avocat général, qui sera désigné par la Cour elle-
même. Ce 1er avocat général a pour mission d’attribuer les affaires aux avocats généraux.
 De même, il existe un greffier qui est nommé pour 6 ans par la Cour.

La Cour peut siéger dans différentes formations :

 D’abord en Assemblée plénière, càd les 28 juges réunis. Cette formation est assez exceptionnelle.
Désormais, les juges ne siègent en Assemblée plénière que lorsque c’est expressément prévu par
les traités. Par exemple, lorsqu’on doit déclarer démissionnaire d’office un Commissaire européen qui
aurait manqué à ses obligations.
En dehors des traités, la Cour peut aussi décider de siéger en session plénière lorsqu’une affaire
revêt une importance particulière, voire même exceptionnelle.

 La Cour de justice peut également siéger en Grande Chambre, càd à 15 juges. Elle siège en Grande
Chambre lorsqu’un Etat membre ou une institution qui est partie à l’instance le demande, ou
encore pour les affaires particulièrement importantes ou complexes.

 Sinon la Cour a l’habitude de siéger en Chambre à 5 ou 3 juges. Avec à chaque fois un Président
de Chambre élu pour une durée déterminée. (Par exemple, les Président des Chambres à 5 juges
sont élus pour 3 ans, et ceux des Chambres à 3 juges pour 1 an).
Ce sont les formations les plus classiques. Le tiers des affaires que connait la Cour de justice est
jugée par une chambre à 3 juges et le reste à 5 juges (au moins la moitié restante).

2) …

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B) Le Tribunal

Le Tribunal est composé d’au moins 1 juge par Etat membre (donc 28 juges aujourd'hui). Ils sont nommés d’un
commun accord par les Etats membres, mais après consultation d’un Comité chargé de donner un avis sur
l’adéquation des candidatures.
En revanche, le Tribunal ne dispose pas d’avocats généraux. Mais exceptionnellement, un juge peut être appelé à
remplir ce rôle d’avocat général. Ces juges du Tribunal sont désignés pour 6 ans avec un renouvellement partiel
tous les 3 ans. Leur mandat est renouvelable (généralement pas plis de 2 mandats).

Ils vont désigner parmi eux un Président pour 3 années. Sera également désigné un greffier pour 6 ans.

Ils bénéficient des mêmes conditions d’exercice de leur mandat que les juges de la Cour de justice, càd qu’ils vont
bénéficier de privilèges, d’immunités, et ils font l’objet d’incompatibilités (par exemple, ne plus exercer la
fonction de juge dans leur Etat).

Il existe en termes de fonctionnement plusieurs Chambres :


 Assez classiquement, le Tribunal va siéger en formation de 3 ou 5 juges. En 2010, sur 527 affaires,
423 l’ont été. Donc quasi-totalité des affaires jugées dans ces formations de 3 à 5 juges.
 Il existe aussi pour aller plus vite la formation à un seul juge. (Pas de succès).
 Il peut également siéger en Grande Chambre, càd à 15 juges, ou en formation plénière, càd à 28,
lorsque la complexité juridique ou l’importance de l’affaire le justifie.

L’indépendance du Tribunal a été particulièrement confortée, notamment par le fait que le Tribunal dispose
d’un greffe indépendant. En revanche, le Tribunal va bénéficier des mêmes services administratifs et
linguistiques que la Cour de justice. (Aujourd'hui, 24 langues officielles).

C) Le Tribunal de la fonction publique

C’est la 1ère juridiction à vocation particulière créée en 2004. Ce Tribunal a uniquement pour mission de juger les
litiges opposant les fonctionnaires européens à l’administration européenne. Pas de lien avec les Etats.
A ce titre, ce Tribunal n’est composé que de 7 juges qui sont nommés par le Conseil pour une période de 6 ans
renouvelables. Ils sont nommés après appel à candidature et après avis d’un Comité qui va apprécier
l’adéquation du profil du futur juge avec la fonction du juge du Tribunal de la fonction du juge.
Ces juges peuvent voir leur équipe compléter par des juges suppléants.

Le Conseil va aussi veiller à une composition équilibrée du Tribunal sur une base géographique. On essaye
d’équilibrer la composition géographique. On va s’assurer qu’ils représentent les principaux systèmes juridiques
existants.

Différentes formations :
 Ce Tribunal siège en Chambre composée de 3 juges (formation classique).
 Mais quand on a des questions complexes, ou plus importantes, les juges siègent en
formation plénière, càd à 7.
Il y a en réalité peu d’affaires. Il y a environ 120 affaires par an.

Il dispose de son propre greffe et d’un greffier nommé pour 6 ans.


Il va s’appuyer sur les services administratifs et linguistiques de la Cour comme le Tribunal.

§3 : La cohérence de l’ensemble juridictionnel


A) La répartition des compétences

C’est l’Article 256 du TFUE qui a tranché la question des compétences entre les 3 juridictions.

1) La Cour de justice

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Elle est compétente :


- pour connaître des recours en manquement.
- pour connaitre des recours en annulation et en carence introduits par un Etat membre à l’encontre des
institutions de l’Union (Parlement, Conseil, Commission).
- pour les recours en annulation et en carence introduits par une institution de l’Union contre un acte,
une abstention de statuer du Parlement européen, du Conseil, de la Commission et de la BCE.

- pour les demandes de démission d’office d’un membre de la Commission, du Médiateur européen, ou
d’un membre de la Cour des comptes.
- pr connaitre des demandes d’avis sur la compatibilité d’un accord externe envisagé par l’UE avec le
DUE.
- pour connaitre des pourvois contre les arrêts du Tribunal.
- pour connaître des réexamens des arrêts de pourvoi du Tribunal, des avis, des décisions du Tribunal de
la fonction publique.
- (La Cour de justice est aussi compétente en matière de renvoi préjudiciel).

2) Le Tribunal

Le Tribunal est compétent :


- pour connaître des recours introduits par les personnes physiques ou morales visant à l’annulation
d’actes des institutions, des organes, des organismes de L’UE dont elles sont les destinataires, ou qui
les concerne directement et individuellement.
Par exemple, le Tribunal connait d’un recours formé par une entreprise contre une décision de la Commission
qui lui infligerait une amende.
- pour connaitre des recours formés par les Etats membres contre la Commission.
- Il connait des recours formés par les Etats membres contre le Conseil concernant les actes pris dans le
domaine des aides d’Etat ou encore dans le domaine des mesures de défense comme le dumping.
- pour connaitre des recours visant à obtenir la réparation des dommages causés par les institutions ou
par les organismes de l’Union, ou par leurs agents.
- pour connaitre des recours se fondant sur des contrats passés par l’Union prévoyant expressément la
compétence du Tribunal.
- des recours dans le domaine de la propriété intellectuelle en attendant la création d’un Tribunal spé.
- des pourvois contre les décisions du Tribunal de la fonction publique (ici juridiction d’appel).

 Toutes ces décisions du Tribunal peuvent faire l’objet d’un pourvoi (un appel, un recours) dans
un délai de 2 mois à compter de leur notification, pourvoi limité aux questions de droit,
devant la Cour de justice.

3) Le Tribunal de la fonction publique

Le Tribunal de la fonction publique est spécialisé dans le contentieux de la fonction publique de L’UE et ne peut
pas en sortir. Mais il ne connaît de ce contentieux que la 1 ère instance. Ce ne sont qu’en 150 affaires par an (peu)
alors qu’il y a 40 000 agents.

On trouve tout type de contentieux.


 Notamment, il connait des litiges liés à la rémunération.
 Puis vient le déroulement de la carrière.
 Ensuite, les questions de recrutement.
 Par la suite, les mesures disciplinaires. Une sanction peut être une exclusion temporaire sans rémunération,
un blâme, un avertissement, la révocation, la radiation sans droit à la retraite, …

Le Tribunal de la fonction publique est également compétent pour connaitre des litiges liés au régime de la
Sécurité sociale. Donc tout ce qui touche à la maladie, la vieillesse, invalidité, accident du travail ou encore tout ce qui
touche aux allocations familiales. Il y a une limite : Ce Tribunal ne connaît pas des litiges des agents nationaux.

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Ces décisions peuvent faire l’objet dans un délai de 2 mois d’un pourvoi devant le Tribunal. Il est ensuite
possible de déférer le jugement du Tribunal devant la Cour de justice afin que la décision du Tribunal fasse
l’objet d’un réexamen.

B) La prévention des erreurs et des conflits de compétences

Il existe 2 procédures permettant d’éviter les erreurs ou les conflits de compétence :

 La 1ère technique vise à régler les confusions entre les greffes. (Le greffe est celui qui va recevoir la
requête). Les greffes des 3 juridictions ont l’obligation de réparer automatiquement les erreurs. Donc
dès lors qu’un greffe se déclare incompétent, il doit renvoyer au greffe compétent. C’est une
obligation.

 La 2ème technique est mise en place dans un souci d’économie de procédure et afin d’éviter les
contrariétés de JP. C’est le cas notamment lorsque le Tribunal et la Cour sont saisis d’affaires
ayant le même objet, ou mettant en cause l’interprétation ou la validité du même acte.
Dans cette hypothèse exceptionnelle, la Cour ou le Tribunal peuvent décider de suspendre la
procédure jusqu’au prononcé de l’arrêt de l’autre juridiction. Ou sinon, le Tribunal peut
décider de se dessaisir, notamment dans le cadre d’un recours en annulation. C’est une
ordonnance de dessaisissement.

C) Les voies de recours

La difficulté s’est présentée lorsqu’on a créé plusieurs juridictions, d’assurer l’unité du DUE en évitant les
jurisprudences contradictoires + d’alléger le travail de la Cour. 2 systèmes :
 Les pourvois
 Le réexamen.

1) Les pourvois (= appel)


a) Pourvoi contre les décisions du Tribunal

Certaines décisions peuvent faire l’objet d’un pourvoi devant la Cour de justice.
 Il s’agit d’abord des décisions du Tribunal mettant fin à l’instance. Càd une décision définitive.
 On peut aussi déférer au pourvoi devant la Cour de justice les décisions qui tranchent partiellement un
litige sur le fond ou qui mettent fin à un incident de procédure portant sur une exception
d’incompétence ou d’irrecevabilité.

Ce pourvoi devant la Cour n’est ouvert que dans un délai de 2 mois à compter de la notification aux parties de la
décision du Tribunal.

Les parties qui interviennent dans le litige ne peuvent former un tel pourvoi que lorsque la décision du
Tribunal les affecte directement.
Mais de manière assez particulière, les Etats membres et les institutions de l’Union et qui ne sont pas
intervenues en 1ère instance devant le Tribunal, pourront intervenir au pourvoi devant la Cour de justice.

On ne peut introduire un pourvoi devant la Cour de justice que sur des questions de droit . C’est surtout pour
alléger. Par exemple, elle va refuser de réexaminer les faits.

Qu’est-ce qu’on peut invoquer devant la Cour de justice ?


La Cour de justice va accepter d’apprécier si le Tribunal en 1ère instance a violé le DUE.
La Cour de justice peut également apprécier les irrégularités de procédure et portant atteinte aux intérêts de la partie
requérante. En revanche, on ne peut pas non plus faire un recours devant la Cour de justice afin que soit revue
par exemple le montant des indemnités reçues devant le Tribunal.

Un pourvoi n’a pas d’effet suspensif, càd que si on a été commandé par le Tribunal a payé une somme, revoir une
législation, faire une entreprise, on doit le faire dans l’attente d’une décision de la Cour de justice. On doit exécuter.

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En revanche, il est possible d’assortir sa demande devant la Cour d’une demande de sursis exécution, càd de
stopper l’exécution de 1ère instance. La Cour de justice y fait droit souvent lorsque l’équilibre financier ou des emplois
sont en cause. Elle peut aussi prononcer des mesures conservatoires visant à protéger des intérêts.

Si le pourvoi n’est pas fondé, la Cour de justice va rejeter le pourvoi. Lorsque le pourvoi est fondé, la Cour de justice va
annuler la décision du Tribunal. Elle va donc lui renvoyer l’affaire pour qu’il statue définitivement. Ici le Tribunal est lié
à la Cour de justice. Dans un souci de bonne administration de la justice, parfois, lorsque l’affaire est en état d’être
jugée², la Cour peut statuer définitivement.

b) Pourvoi contre les décisions du Tribunal de la fonction publique (TFP)

Peuvent faire l’objet d’un pourvoi devant le Tribunal, les décisions du TFP mettant fin à l’instance, ainsi que celles qui
tranchent partiellement le litige sur le fond, ou qui mettent fin à un incident de procédure portant sur une exception
d’incompétence ou d’irrecevabilité. Délai du pourvoi est de 2 mois.

- Qui peut faire un pourvoi devant le Tribunal ?


Ce pourvoi peut être formé par toute partie ayant partiellement ou totalement succombé en ses conclusions.
Les parties qui interviennent dans le litige, autre que les Etats membres et les institutions de l’Union, ne peuvent former
un tel pourvoi devant le Tribunal que lorsque la décision du TFP les affecte directement.

Il est possible de demander un sursis exécution.

Le Tribunal ne va se prononcer que sur les questions de droit. Par exemple, le Tribunal va pouvoir apprécier la
violation du droit par le TFP.

Le pourvoi peut être rejeté si le TFP n’a commis aucune erreur de droit.
Sinon, la décision du TFP est annulée. Dans ce cas, soit le TFP est ressaisit et doit suivre la décision du
Tribunal, soit le Tribunal décide de juger lui-même l’affaire car elle est en état d’être jugée.

c) Le réexamen

Les décisions rendues par le Tribunal, suite à un pourvoi contre les décisions du TFP, peuvent exceptionnellement faire
l’objet d’un réexamen par la Cour de justice en cas de risque sérieux d’atteinte à l’unité ou à la cohérence du DUE.

C’est une procédure qui a été critiquée car elle est maitrisée par le 1 er avocat général de la Cour de justice.
Donc on doute du côté démocratique. C’est lui qui décide de ce risque d’atteinte à l’unité du DUE. Il dispose précisément
d’un délai d’un mois pour le faire, à compter du prononcé de la décision du Tribunal pour apprécier ce caractère
d’atteinte à l’unité.
La Cour elle-même dispose ensuite d’un délai d’un mois à compter de la proposition qui lui est faite par le 1 er avocat
général de réexaminer, d’apprécier s’il y a lieu ou non de réexaminer. Si tel est le cas, la Cour de justice va statuer sur les
questions faisant l’objet du réexamen sur la base du dossier transmis par le Tribunal. Si la Cour constate
qu’effectivement la décision du Tribunal porte atteinte à l’unité ou à a cohérence du DUE, elle renverra l’affaire au
Tribunal, ou elle jugera elle-même.

Causes de la critique :
 procédure maitrisée par une seule personne.
 proposition ou non de saisir la Cour de justice n’est pas rendue publique.
 Et si la Cour refuse de réexaminer, son refus n’a pas à être motivé.

Section 3 : La procédure devant le juge de L’UE


§1 : Caractéristiques de l’instance

La procédure applicable devant les juridictions de l’Union s’inspire de celles s’appliquant devant le Conseil
d'Etat français. Effectivement, la procédure est identique devant les 3 juridictions.

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Les différentes caractéristiques de cette procédure sont les suivants :

 La procédure est MIXTE, càd qu’elle se décompose entre une phase orale et une phase écrite.

 Elle est semblable pour tous les recours directs. Ça signifie que la phase écrite de la procédure
repose avant tout sur une requête introductive d’instance, puis sur un mémoire en défense.

Ensuite est déposé un mémoire en requête du requérant (= mémoire en réplique) (facultatif), puis un
mémoire en duplique du défendeur (facultatif). Enfin, sera porté affaire un rapport préalable du juge
rapporteur.

 La procédure est CONTRADICTOIRE. Tous les mémoires, requêtes, pièces et documents transmis au
greffe de la juridiction saisie par l’une des parties au litige sont communiquées à l’autre partie,
ainsi qu’aux institutions de l’Union dont les décisions sont en cause.

 Procédure INQUISITOIRE, les juridictions de l’Union peuvent ordonner toutes les mesures
d’instruction qu’elles jugent opportunes comme par exemple des demandes de renseignement, une
expertise, une audition de témoin, ou encore la production de documents.

 Il s’agit d’une procédure PUBLIQUE. Le huis-clos est très rare. Sauf la procédure facultative.

 Il s’agit d’une procédure GRATUITE. On n’a pas à payer un droit de timbre.

 C’est une procédure MULTILINGUISTE (24 langues officielles).


En principe, la langue de procédure est choisie par le requérant, sauf si le défendeur est un Etat
membre ou une personne physique ou morale ressortissant d’un Etat membre. Dans ce cas, la langue
de procédure sera la langue officielle de l'Etat. Il arrive que les parties choisissent entre elles une
langue de procédure. Sinon, recours à la traduction. Une fois la langue choisie, c’est la même pendant
toute la procédure. La version de l’arrêt qui fait foi sera déterminée par le choix de la langue de
procédure.

 Les PARTIES DOIVENT ÊTRE REPRÉSENTÉES.


Généralement, les institutions de l’Union, les Etats membres ou les Etats tiers recourent à la
représentation par le biais d’agents (juristes ou spécialistes de l’affaire en cause). Les autres parties
(notamment personnes physiques ou morales doivent recourir à un avocat inscrit à un barreau d’un
Etat membre. Donc on ne peut pas se représenter.
Dans certains Etats de l’Union, les professeurs d’Université peuvent plaider et assurer la
représentation. Ce n’est pas le cas de la France.

§2 : Déroulement de la procédure

La procédure de l’instance se décompose en 2 phases bien distinctes qui précèdent le délibérer et le prononcé de l’arrêt :
l’une est écrite, l’autre est orale. Cela vaut pour toutes les procédures.

Il peut arriver que la Cour de justice, le Tribunal ou le TFP soient manifestement incompétents pour connaître d’un
recours, ou que ce recours est manifesté irrecevable. Dans ces 2 hypothèses, la requête sera déclarée irrecevable par voie
d’ordonnance motivée.
De même, à tout moment au cours de la procédure, d’office, càd par elle-même, les juridictions peuvent statuer sur les
fins de non-recevoir d’ordre public, ou constater que le recours est devenu sans objet et qu’il n’y a plus lieu de statuer.

De plus, les Présidents des 3 juridictions peuvent statuer seuls sur des conclusions tendant à l’obtention d’un sursis
exécution, ou à l’application de mesures provisoires, ou encore à la suspension de l’exécution forcée d’un arrêt. Dans
cette hypothèse, l’ordonnance n’a qu’un caractère provisoire et ne préjuge en rien la décision de la juridiction de l’Union
statuant au principal.

A) La phase écrite
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La partie demanderesse va déposer une requête écrite au greffe de la juridiction concernée par pli
recommandé, par fax, ou par pièce-jointe à un mail. La requête doit être signée de sorte que si la transmission
est électronique, la date retenue sera celle de l’envoi par original. Original qui doit intervenir dans les 10 jours de la
saisine par fax ou mail de la juridiction.
La requête introductive doit comporter le nom des parties, l’objet du litige, les conclusions ainsi que la
présentation des moyens. Une requête introductive d’instance peut difficilement être complétée
contrairement au droit français. Rigidité car on veut que tout soit fixé dès la requête initiale.
La requête doit être assortie de toutes les pièces nécessaires mais certifiées conformes.

Les communications aux autres parties sont réalisées par le greffier dans l’ordre et les délais déterminés par le
règlement de procédure. Pour être recevable, la requête doit être présentée dans les délais fixés par les traités
pour chaque type de recours.

La requête introductive d’instance est signifiée par le greffe aux parties adverses qui disposent d’un délai
d’un mois devant la Cour, ou de 2 mois pour les autres tribunaux, pour présenter un mémoire en défense.
Ensuite, les parties, dans les délais fixés par le Président de la juridiction, vont s’échanger les mémoires. Parfois, le
Président peut décider de fixer le nombre de mémoire.

A l’issue de la phase écrite, et une fois tous les documents traduits, le juge rapporteur, lors d’une réunion
interne au juge, va présenter un rapport préalable. Notamment, le juge rapporteur va exposer les points de
droit essentiels et il va proposer telle ou telle mesure d’instruction.
Par exemple, le juge peut décider de procéder à des expertises, des enquêtes par témoins, une descente sur les lieux. Ces
mesures d’instructions ont relativement rares devant la Cour. Elles sont plus nombreuses devant le Tribunal.
En effet, le Tribunal intervient sur des affaires plus techniques (brevet, aides, propriété intellectuelle, …).

A l’issue de cette procédure, va s’ouvrir la phase orale.


B) La phase orale

Le Président de la juridiction va fixer la date d’ouverture de la phase orale. Il s’agira d’approfondir les points
essentiels qui sont apparus au cours de la phase écrite. Cette procédure de la phase orale est très codifiée.

1ère étape : Elle commence par la lecture du rapport d’audience du juge rapporteur. Ce rapport d’audience
contient le rappel des faits, le rappel des règles applicables, on indique les conclusions des parties et les moyens
invoqués. Rapport très dense.
En pratique, cette lecture pouvant être pesante, ce rapport d’audience est communiqué aux parties
environ 3 semaines avant l’audience. Cela permet au rapporteur d’en faire une synthèse.

2ème étape : Après la lecture du rapport d’audience, seront présentées les plaidoiries des parties. Parfois, il
arrive que la Cour omette l’audience des plaidoiries, sauf si l’une des parties, 3 semaines après la
clôture de la phase écrite demande expressément à être entendue.
Lors des plaidoiries, les juges ont pris l’habitude de poser des questions.
En pratique, il est demandé depuis quelques années aux avocats de faire des plaidoiries de 20 minutes.
+ Nécessité d’adresser à l’avance son dossier de plaidoiries pour les traducteurs. Traduction simultanée.

 Donc on donne peu d’importance à la phase orale. On tend progressivement à limiter la lecture du
rapporteur et on limite les plaidoiries.

3ème étape : Présentation des conclusions de l’avocat général lorsqu’on est devant la Cour. Ce n’est pas
systématique. L’avocat général peut présenter ses conclusions par écrit.

Là s’achève la procédure. Et ensuite la Cour ouvre son délibéré sur l’affaire. Cela va aboutir à la rédaction de
l’arrêt avec la formule « arrêt rendu en audience publique ».
C) L’intervention à l’instance

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Les Etats membres et les institutions de l’Union peuvent intervenir dans un litige soumis aux juridictions
sans avoir à justifier d’un intérêt à la solution du litige.

Les organes et organismes de l’Union, ainsi que les personnes physiques ou morales peuvent également
intervenir à l’instance s’ils justifient d’un intérêt à la solution d’un litige soumis à la juridiction de l’Union. Il
faut justifier ici d’un intérêt à agir.
NB : Ces personnes physiques ou morales ne peuvent intervenir dans les affaires entre Etats membres, entre
institutions ou entre institution et Etat membre.

- Quel est l’intérêt d’intervenir à l’instance ? L’intervention à l’instance va se traduire par la production
d’un mémoire. L’objet de cette intervention est de soutenir l’une ou l’autre des parties.

D) Les référés

Les référés sont visés aux Articles 278 et 279 du TFUE et ils donnent compétence à la Cour de justice, mais
également aux autres juridictions, pour ordonner le sursis exécution d’un acte contesté et pour prescrire
toute mesure provisoire nécessaire. Il s’agit aussi de mesures d’urgence pour préserver les intérêts des
parties à un litige. Elles peuvent être utilisées par les parties à tout moment. En revanche, il existe des règles :

Pour être recevable à introduire une demande de sursis à exécution d’un acte d’une institution, le demandeur doit
avoir également attaqué cet acte dans un recours devant cette même juridiction.
La même exigence se pose pour les mesures provisoires. Il faut un lien avec l’affaire en cause.

Autre condition : Lorsqu’on demande un sursis exécution ou une mesure conservatoire, il faut également
prouver l’existence d’un préjudice grave et irréparable. Notamment toute ce qui est lié aux sommes d’argent, ou
au licenciement, … Il s’agit d’une demande faite par acte séparé donc obéissant à un certain formalisme. Donc
demande à part qui obéit à un formalisme.

- Qui va se prononcer ?
La demande est traitée directement par le Président de la juridiction (mesure d’urgence et mesure grave). Il va
rendre une ordonnance motivée, quelle que soit l’issue de la demande.
Cette ordonnance n’a qu’un caractère provisoire et elle ne préjuge en rien de la solution finale. Elle peut être à
tout moment modifiée ou remise en cause.

L’ordonnance de référé va laisser la place, à l’issue de l’instance, au jugement. L’ordonnance qui décide du sursis
exécution ou qui met en place une mesure provisoire est insusceptible de recours.

E) La fermeture de l’instance

La juridiction saisit d’une affaire va délibérer sur la base du projet d’arrêt rédigé par le juge rapporteur. Ces
délibérations sont secrètes. Seuls les juges ayant assisté à la procédure orale prennent part au délibéré.

Une juridiction de l’Union ne peut délibérer qu’en nombre impair.


Chacun des juges présents au délibéré va exprimer son opinion en la motivant. Ensuite, les juges vont voter. A défaut de
consensus, l’arrêt sera adopté à la majorité des juges. Tous doivent signer l’arrêt. Ce 1 er résultat est un projet d’arrêt ou
d’ordonnance.

Ensuite, le juge rapporteur rédige la version définitive de l’arrêt. Il l’a fait approuver définitivement ensuite
par la formation de jugement. La version définitive est celle envoyée au traducteur.

Ensuite l’arrêt est prononcé en séance publique dans la langue de procédure en principe. En pratique, seul
est lu le dispositif, mais c’est l’ensemble de l’arrêt qui bénéficie de l’autorité de chose jugée.

Les arrêts sont généralement décomposés en 3 parties :


 La 1ère partie expose les faits, le déroulement de la procédure, les moyens et arguments des parties.

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 La 2ème partie de l’arrêt présente le juridiquement juridique de la Cour. On discute ici des prétentions
de chacune des parties. La Cour affirme ici sa position.
 La 3ème partie est le dispositif, càd la solution juridique de l’arrêt. La Cour se prononce aussi sur les
dépens (la partie qui succombe est condamnée au paiement des dépens, càd des frais d’instance).
L’arrêt contient aussi la signature du Président et de chacun des juges présents.
Les arrêts ont force obligatoire à compter de leur prononcé : autorité de chose jugée.

Ils sont publiés au Journal Officiel de L’UE. La pratique que souhaite de plus en plus mettre en place la Cour de justice
est le règlement amiable des affaires, càd la négociation, les parties signant un protocole d’accord permettant de mettre
fin au différend et de prendre toutes les mesures appropriées visant à faciliter le règlement du litige.

Chapitre 2 : Les voies directes et incidentes de droit

Il est possible de classifier les différents recours et voies de droit existants devant la Cour de justice.

 Il est notamment possible de les classer en fonction des types de SAISINE. Notamment de distinguer
entre les attributions contentieuses, préjudicielles et consultatives.
 Il existe une autre forme de classification des recours en fonction de leur OBJET.
Distinction entre le contentieux objectif et le contentieux subjectif :
Dans le cadre du contentieux objectif, la question posée au juge est celle de savoir si un acte juridique est
conforme ou non au droit. On retrouve les contentieux suivants : le recours en annulation, le recours en carence, le
recours en manquement et l’exception d’illégalité. Ce contentieux est « objectif » car les questions posées au juge sont
indépendantes du justiciable.
Dans le contentieux subjectif, la question posée au juge est celle de savoir si une personne est titulaire ou
non d’un droit qu’elle invoque. Si la réponse est affirmative, il s’agira alors de connaître l’étendue de ce droit.
Cela concerne les recours en responsabilité et le contentieux contractuel, le contentieux de la fonction publique.

Section 1 : Le contentieux objectif de l’annulation et de la déclaration

§1 : Le recours en annulation (articles 263, 264 et 266 du TFUE).


Il consiste à demander l’annulation d’un acte de l’Union (émanant d’une institution) pour illégalité. Il se présente
dans son mécanisme général comme une transposition du recours pour excès de pouvoir (REP) français. En revanche,
s’agissant des titulaires, le DUE présente des particularités.

A) Les actes susceptibles de recours

Le traité de Lisbonne a clarifié la question des actes susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation. Selon article
263 al 1, la Cour de justice est compétente pour contrôler la légalité :
 Des actes législatifs, càd les actes adoptés par le Parlement et/ou le Conseil au terme de la procédure
législative ordinaire ou spéciale.
 Des actes du Conseil autres que législatifs.
 Des actes de la Commission et de la Banque centrale européenne (BCE), mais autre que les
recommandations et les avis.
 Des actes du Parlement européen et du Conseil européen.
Pour les 3 dernières catégories, l’Article 263, alinéa 1 er exige bien que ces actes doivent être destinés à produire
des effets juridiques vis-à-vis des tiers.
A contrario, il existe de nombreux actes que l’on ne peut pas déférer à la Cour de justice.
 La Cour a estimé qu’on ne pouvait pas lui déferrer les actes préparatoires car ils ne constituent pas
une manifestation définitive de volonté, puisque seul l’acte définitif que ces actes préparatoires, sera
attaquable. Par exemple, les évaluations scientifiques sont des actes préparatoires.
 Les actes purement confirmatifs ne sont pas non plus attaquables. Pour la Cour de justice, ils ne
sont pas attaquables car ils n’ajoutent rien au droit.
 De même, les actes interprétatifs sont exclus du recours en annulation car ils ne créent pas de droit,
ils ne font qu’interpréter.

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 Difficulté : Il arrive que certains actes interprétatifs soient attaquables s’ils créent des
obligations nouvelles. Ex : C’était le cas des orientations internes de la Commission créant des
sanctions financières et donc mettant à la charge des Etats des obligations nouvelles. De même, qu’un
Code de conduite créant de nouvelles obligations est un acte attaquable. C’est donc ici du cas par cas.
 Ne sont pas attaquables les manifestations d’opinion écrites. Une simple déclaration d’intention
n’est pas de nature à faire l’objet d’un recours en annulation.
 De même, la transmission d’informations par l’institution de l’Union n’affecte pas non plus les
intérêts des tiers et donc n’est pas attaquable.
 Ne sont pas non plus attaquables les mesures d’ordre intérieur. Ce sont les éléments comme les
circulaires, les instructions, les règlements intérieurs, qui même s‘ils produisent des effets de droit, ne
valent pas en dehors de l’administration communautaire elle-même.

B) La qualité pour agir (article 263)


3 catégories de requérants :
 Les Etats membres,
 Les institutions
 Les personnes physiques ou morales.

1) Les Etats membres (263 al 2)

Les Etats membres ont un droit illimité d’agir en annulation. Ce sont des « requérants privilégiés ». Cela signifie
que les Etats n’ont pas à justifier d’un intérêt à agir et qu’ils peuvent se prévaloir de tout moyen d’annulation.
Un Etat peut ainsi demander l’annulation d’une décision adressée à un autre Etat sans avoir à établir qu’elle affecte ses
intérêts. Ça met les Etats en position de gardien objectif de l’ordre juridique.

Cependant, les juridictions de l’Union ont une notion restrictive de la notion d’Etat membre. Cette notion vise
les seules autorités gouvernementales des Etats membres. Cette notion d’Etat membre ne saurait être élargie au
gouvernement de région ou de communauté autonomes, (ni même les collectivités territoriales).

En pratique, ce sont les Etats qui vont introduire le plus de recours en annulation . Ils s’attaquent surtout aux
actes de la Commission et du Parlement.

2) Les institutions et organes de l’Union (263 al 2 et 3)

D’une part : Le Parlement européen, le Conseil et la Commission. Ces 3 institutions bénéficient du même droit à
agir en annulation que les Etats membres. On parle toujours de « requérants privilégiés ».
D’autre part : La Cour des comptes, la BCE, et depuis le traité de Lisbonne, le Comité des régions ne peuvent agir
en annulation seulement si le recours formé tend à la sauvegarde de leurs prérogatives. On les qualifie de
« requérants intermédiaires ».

3) Les personnes physiques ou morales (263 al 4 et 5)

Concerne les personnes physiques ou morales de droit privé ou de droit public qui disposent d’un droit
d’agir en annulation mais dans des conditions de recevabilité particulièrement restrictives. Une personne
physique ou morale ne peut former un recours en annulation que contre les actes dont elle est destinataire ou qui la
concernent directement et individuellement, ainsi que contre les actes règlementaires qui la concernant directement et
qui ne comportent pas de mesures d’exécution.
Finalement, une personne physique ou morale ne peut agir que contre une décision de
portée individuelle dont elle est destinataire ou contre un acte de portée générale qui la
concerne directement et individuellement.
Le juge va vérifier si la personne physique ou morale est bien atteinte par cet acte. On doit démontrer ici l’intérêt agir.

On dit que ces personnes physiques ou morales ont des « requérants ordinaires » car elles ne peuvent former de
recours en annulation que sous réserve de justifier de cet intérêt à agir, càd d’établir que l’acte en question affecte leur
situation juridique et leur cause un préjudice.

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Cela signifie aussi que l’intérêt à agir doit être né et actuel. Cependant, la Cour de justice admet un intérêt à agir
futur s’il est certain et non-hypothétique.
- Qu’en est-il des associations en charge de défendre des intérêts collectifs ?
Elles sont recevables à agir lorsqu’elles représentent les intérêts de personnes physiques ou morales qui elles seraient
recevables à agir. Elles peuvent aussi faire un recours lorsqu’une disposition légale leur reconnait expressément cette
compétence. Elles peuvent aussi agir lorsqu’un acte a affecté leurs intérêts propres en tant qu’association.

C) Les moyens d’annulation (263)

La Cour est compétente pour se prononcer sur les recours pour incompétence, pour violation des formes substantielles,
pour violation des traités ou de toute règle de droit relative à leur application, pour détournement de pouvoir.
L’incompétence et la violation des formes substantielles sont des moyens d’ordre public, ce qui signifie que le juge pet les
examiner d’office, càd même lorsque ces moyens n’ont pas été soulevés par les requérants.

1) L’incompétence

En pratique, l’incompétence est rarement retenue par le juge communautaire car les institutions ne font pas
d’erreur. Cependant, l’incompétence peut revêtir plusieurs formes :

 1er cas : L’acte est écrit par une institution dans un domaine qui ne relève pas de la
compétence de l’Union. Une institution qui a pris une décision en empiétant sur les compétences des
Etats membres, sur des compétences pas transférées à L’UE.
Ex : Cour de justice, 23 avril 1986, parti écologiste Les Verts. On parle ici d’ « incompétence
externe ».

 2ème cas : L’acte est écrit par l’institution dans un domaine qui relève de la compétence d’une
autre institution. C’est l’ « incompétence interne ». C’est le cas le plus fréquent.
Par exemple, la Commission qui a excédé les compétences d’exécution qui ont été confiées par le
Conseil. Elle l’a fait notamment en matière de lutte contre le terrorisme.

 3ème cas : L’acte qui est pris par un membre d’une institution qui ne bénéficie pas d’une
habilitation ou d’une délégation régulière. Il s’agit ici d’une personne physique.
Par exemple, un Commissaire qui n’a pas reçu une délégation de la Commission pour signer l’acte. Ici,
c’est purement formel. On parle ici d’ « incompétence intérieure à une institution ».

 4ème cas : L’acte pris par une institution incompétente ratione temporis ou ratione loci.
C’est le cas d’un acte adopté par une institution en dehors des limites de temps fixées pour l’exercice
d’une compétence déterminée. Là c’est l’incompétence ratione temporis.
Un acte adopté par une institution mais qui produit ses effets en dehors du territoire sur lequel
s’exerce sa compétence. Là c’est l’incompétence ratione loci.

2) La violation des formes substantielles

Il s’agit là encore d’un moyen d’ordre public. L’expression « violation substantielle » a été précisée par la JP :
Il s’agit notamment de la violation de l’obligation de motivation prévue par l’Article 296 du TFUE. Ici, la Cour de
justice est assez souple. Elle relativise cette exigence de motivation et apprécie en fonction des circonstances de l’espèce.
Elle va vérifier le contenu de l’acte, la nature des motifs invoqués, et l’intérêt également que les destinataires de l’acte
peuvent avoir à recevoir des explications.

2ème élément de violation des formes substantielles, c’est la violation des règles de procédure relative à
l’élaboration des actes. Souvent les actes de L’UE font appel à la nécessité de recueillir des avis, des recommandations.
Certains actes supposent que soient recueillis des avis et des recommandations en amont. Notamment, pour la Cour de
justice, on doit recueillir dans certains cas l’avis du Parlement. La Cour va veiller spécialement si tous les avis et
consultations ont été menés avant l’adoption de l’acte si elles sont nécessaires.

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La Cour de justice va également vérifier l’authentification régulière d’un acte devant précéder sa publicité.
Ex : La Cour va vérifier si une décision de la Commission a été régulièrement signée selon les règles définies par son
règlement intérieur.

La Cour de justice va également vérifier si ont bien été respectées les garanties liées au respect des droits de la
défense et le respect du contradictoire. Il s’agit de principes fondamentaux du DUE. Concrètement, la Cour peut ici
vérifier si la Commission a bien communiqué aux intéressés les éléments de fait sur lesquels elle fonde ses griefs. On fait
cela dans un but de sécurité juridique et de bonne administration de la justice.
NB : Le non-respect du contradictoire ne va pas nécessairement entrainer l’annulation de l’acte.
3) La violation des traités ou de toute règle de droit relative à leur application

En droit français, c’est l’équivalent de la violation de la loi. On peut ici invoquer le « bloc de la légalité
communautaire », càd qu’on peut invoquer la violation des traités mais également leurs annexes, protocoles et
conventions. Ca englobe aussi le droit dérivé (règlements, directives et décisions, de même que les règlements
d’exécution). On peut aussi invoquer la violation d’un principe général du DUE ainsi que les accords externes concluent
par l’Union. C’est le moyen d’annulation le plus courant.
Moyen d’annulation qui va permettre à la Cour de justice d’annuler un acte qui serait contraire à une norme
qui lui est juridiquement supérieure, càd lorsqu’une institution a méconnu le ppe de la hiérarchie des normes.
4) Le détournement de pouvoir

Pour la Cour de justice, un acte n’est entaché de détournement de pouvoir que s’il apparait qu’il a été pris
dans le but exclusif d’atteindre des fins autres que celles excipées (celles avancées par l’acte) ou d’éluder une
procédure spécialement prévue par le traité pour parer aux circonstances de l’espèce (Cour de justice, 13
juillet 1995, Parlement contre Commission).

Le détournement de pouvoir ne peut être présumé. Il faut apporter la preuve qu’il y a détournement de pouvoir.
Le requérant doit apporter des éléments objectifs de preuve à l’appui de son moyen d’annulation.
Quel type de preuve ? Il s’agit d’indices objectifs, pertinents et concordants permettant d’établir avec certitude
que l’acte litigieux visait un autre but que celui poursuivi par la réglementation en cause.

Par ailleurs, lorsque l’institution en cause dispose d’un pouvoir discrétionnaire d’appréciation, le juge de
l’Union refuse de contrôler l’opportunité de l’acte contesté. Pourquoi ? Parce qu’ici le juge de l’Union estime
qu’il ne peut pas substituer sa propre appréciation à celle de l’institution qui a adopté l’acte en cause . Ici, on
dit que la Cour de justice exerce un contrôle minimum, notamment sur la violation du droit.

D) Le délai pour agir

Le délai pour former un recours en annulation est un délai de 2 mois à compter de la publication de l’acte (acte de
portée générale) ou à compter de sa notification au requérant (acte de portée individuelle).
Le Traité (Article 263, alinéa 6 du TFUE) dispose qu’en l’absence de notification ou de publication (rare), le délai
commence à courir le jour où le requérant a eu connaissance de l’acte.

La Cour de justice considère que la date de publication ou de notification est le critère décisif pour déterminer
le point de départ du délai de recours pour des raisons de sécurité juridique. En définitive, un requérant ne
peut invoquer le fait d’avoir pris connaissance de l’acte attaqué postérieurement à sa publication afin de
retarder ce point de départ.

La Cour de justice rappelle que lorsqu’il n’y a eu ni publication, ni notification, il appartient au requérant qui a eu
connaissance de l’existence d’un acte qui le concerne d’en demander le texte intégral dans un délai raisonnable.
A ce titre, le délai de recours ne saurait courir qu’à partir du moment où le tiers concerné a une connaissance exacte du
contenu et des motifs de l’acte en cause de manière à pouvoir faire l’utilisation correcte de son droit de recours.

A défaut, le recours introduit après l’expiration du délai de 2 mois est irrecevable quel que soit le requérant
(Etat, …). Ce délai est un délai d’ordre public. Il existe cependant une exception. La Cour de justice admet
exceptionnellement qu’une erreur excusable puisse justifier une dérogation aux règles s’agissant du délai du

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recours introduit par les particuliers. C’est notamment le cas de la force majeure. Par exemple, une grève de La
Poste qui va paralyser un pays en entier. Une catastrophe climatique (lettre perdue sous les eaux).

Le fait de saisir le juge de l’Union d’un recours en annulation n’a pas d’effet suspensif . Càd que l’acte reçu doit
s’appliquer jusqu’à son annulation par le juge. Cependant, le requérant, par une requête séparée, peut demander
le sursis exécution de l’acte contesté (Article 278 du TFUE).
E) L’autorité de l’arrêt d’annulation

Si le recours est fondé, la Cour de justice de L’UE va déclarer nul et non avenu l’acte contesté (article 264, al
1er).
L’arrêt d’annulation a un effet rétroactif ce qui signifie que l’acte annulé est censé n’avoir jamais existé.
L’arrêt d’annulation a un effet erga omnes, càd qu’il a une autorité absolue de chose jugée.

L’annulation porte en principe sur l’ensemble des dispositions de l’acte en cause, mais une annulation
partielle est également possible à condition que les dispositions annulées soient détachables du reste de
l’acte litigieux sans faire perdre à celui-ci sa raison d’être. Si l’acte est un tout, l’acte sera annulé dans son
ensemble.
C’est l’Article 264, alinéa 2 du TFUE qui dispose que la Cour indique, si elle l’estime nécessaire, ceux des effets de l’acte
annulés qui doivent être considérés comme définitifs.
Cette faculté a été introduite par le Traité de Lisbonne pour éviter que les institutions n’est à reprendre toute une
législation. L’acte est considéré comme valide sauf les dispositions annulées. C’est ici la bonne administration.

En revanche, le rôle du juge est limité. La Cour de justice qui annule un acte ne peut se substituer à
l’institution dont émane l’acte litigieux, ni même lui adresser des injonctions.

Les institutions ont cependant l’obligation de rétablir la légalité. L’Article 266, al 1er prévoit que l’institution dont
émane l’acte annulé est tenue de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt de la Cour de justice. Les
institutions doivent agir dans un délai raisonnable.

§2 : Le contentieux de la déclaration

A) L’exception d’illégalité (article 277)

L’exception d’illégalité* consiste en la possibilité d’invoquer à l’occasion d’un litige l’illégalité d’un acte d’une
institution. C’est une sorte d’incident de procédure. On a le procès au principal et on profite de ce procès pour
pointer du doigt un autre acte qui est illégal. On a donc un litige principal et à l’occasion va se greffer un autre litige.
On soulève l’exception d’illégalité d’un autre acte. Il y a quand même un lien entre les actes.

L’article 277 dispose que toute partie peut, à l’occasion d’un litige mettant en cause un acte de portée générale
adopté par une institution, se prévaloir des moyens prévus à l’Article 263, alinéa 2 (moyens qu’on invoque
devant le recours en annulation) pour invoquer devant la Cour de justice l’inapplicabilité de cet acte.

Cette procédure vise à pallier le délai très bref du recours en annulation (2 mois), mais aussi à compenser les conditions
restrictives auxquelles sont soumises les personnes physiques ou morales pour exercer un tel recours.

Cette exception d’illégalité a pour objet de protéger les justiciables contre l’application d’un acte de portée générale
illégal, sans que soit pour autant remis en cause cet acte, lui-même devenu inattaquable par l’écoulement des délais du
recours en annulation.

1) Les conditions de recevabilité de l’exception d’illégalité

L’Article 277 précise que l’exception d’illégalité peut être soulevée à l’encontre de tout acte de portée générale
émanant d’une institution, d’un organe, ou d’un organisme de l’Union. La Cour de justice a toujours utilisé
l’exception d’illégalité. Ex : Elle l’a fait à l’occasion de l’arrêt Simmenthal.

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Pour être recevable, la Cour de justice exige qu’un rapport particulier existe entre l’acte individuel faisant
l’objet du litige principal et l’acte contre lequel l’exception d’illégalité est soulevée. La Cour de justice considère
que cette condition est remplie lorsque l’acte individuel est fondé sur l’acte qu’on soulève au titre de l’exception
d’illégalité, càd notamment lorsque le requérant soulève, dans le cadre d’un recours en annulation formé contre une
décision individuelle, l’illégalité de l’acte réglementaire qui en constitue la base juridique. Ce lien est impératif.

L’exception d’illégalité peut être soulevée à tout moment du procès et par toutes les parties dès qu’est
invoqué un des moyens d’annulation ou un intérêt à agir. L’exception d’illégalité ne sera recevable que si ce
recours incident est déterminant pour la solution du litige principal.
2) Le caractère incident de l’exception d’illégalité
L’exception d’illégalité n’est pas une procédure autonome. Elle ne peut être invoquée que dans le cadre d’une
procédure poursuivie devant la Cour de justice. Donc en l’absence d’un recours principal (introduit dans les
délais), on ne peut pas invoquer le bénéfice de l’Article 277.
L’exception d’illégalité se greffe plutôt naturellement sur le contentieux de l’annulation.
Cependant, cette exception d’illégalité peut être également soulevée à l’occasion d’autres voies de recours et
notamment à l’appui d’un recours contre les sanctions, à l’appui d’un recours formé par un fonctionnaire de l’Union, ou
encore à l’appui d’un recours en manquement.

En revanche, cette procédure d’exception d’illégalité est irrecevable si elle est formée à l’appui d’un recours
devant le juge national car si on détecte un acte illégal, le juge national dispose de la question préjudicielle. Càd qu’il
va demander un avis à la Cour sur la légalité de l’acte.

Sont avant tout concernés par cette procédure les requérants personnes physiques et morales.

3) Les effets de l’admission de l’exception d’illégalité

Si le juge de l’Union reconnait l’exception d’illégalité d’un acte de portée générale, celui-ci ne sera pas annulé,
mais seulement déclaré inapplicable en l’espèce.
La déclaration d’illégalité de la Cour de justice n’a donc autorité de chose jugée qu’à l’égard des parties à l’instance et
donc ne peut être invoquée par des tiers. C’est l’effet relatif de l’autorité de chose jugée. On laisse subsister un
acte illégal.

B) Le recours en carence (II) (article 265)

Le recours en carence vise à faire constater par la Cour de justice l’illégalité d’une abstention d’une institution
de L’UE. L’intérêt de cette voie de recours consiste en ce que l’inaction illégale du Conseil, de la Commission permet
aux institutions et aux Etats membres, ainsi que dans certains cas aux particuliers, de saisir la Cour afin que
celle-ci déclare que l’abstention d’agir est contraire au traité dans la mesure où l’institution concernée n’a
pas remédié à cette abstention (Cour de justice, 12 juillet 1987, Commission contre Conseil).

1) La notion de carence (A)

L’objet de ce recours n’est pas de censurer un acte. Au contraire, c’est un recours qui va censurer une absence
d’acte, une abstention illégale dont s’est rendue coupable une institution qui aurait dû agir en vertu du DUE.

Il s’agit d’un recours rarement engagé. Par exemple, entre 2004 et 2009 aucun recours en carence n’a été introduit.

La difficulté est de déterminer la réalité de l’illégalité commise par une institution. Il faut identifier l’obligation d’agir.
Pour qu’il y ait carence, il faut d’abord identifier une obligation d’action.
 Si l’institution était dans une situation de compétences liées, il n’y a aucun doute sur la non-intervention.
 Lorsqu’une institution dispose d’un pouvoir discrétionnaire, càd lorsqu’une institution est libre ou non d’agir,
il n’y a pas de carence possible.

Ensuite, il faut pouvoir identifier l’action obligatoire. Càd qu’il faut que l’omission reprochée à l’institution porte sur
des mesures dont la portée est suffisamment définie pour qu’elle puisse être individualisée, et ce pour que la Cour de

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justice puisse apprécier l’illégalité de la non-adoption de l’acte et surtout, pour que l’arrêt de carence éventuel puisse
faire l’objet d’une exécution.

Ensuite, il faut une véritable abstention. C’est par exemple le refus de statuer, le refus de prendre position.
Il faut aussi que le recours en carence ne soit pas un recours en annulation déguisé. Il faut bien sanctionner une
institution qui n’intervient pas.

Enfin, la carence doit résulter d’une abstention abusivement longue. Un délai non-raisonnable c’est par exemple
ne pas intervenir dans un délai de 31 mois ou de 47 mois.
- Qui peut être l’auteur de la carence ? Quelles sont ces institutions qui peuvent se voir condamner ?
Ce sont le Conseil et la Commission, le Parlement et la BCE.
En revanche, se pose toujours la question du Médiateur. Il ne peut pas faire l’objet d’une procédure en carence.
La question n’est pas tranchée non plus pour la Cour des comptes.
Le Traité de Lisbonne a rajouté le Conseil européen.
2) La qualité pour agir

a) Les Etats membres et les institutions de l’Union

Initialement, cette procédure leur été réservée. On dit toujours qu’ils constituent des requérants privilégiés. Ils
disposent donc d’un droit illimité d’agir en carence. Ils n’ont pas à justifier d’un intérêt à agir.

b) Les personnes physiques ou morales

L’Article 265, alinéa 3 du TFUE prévoit que toute personne physique ou morale peut saisir la Cour pour faire grief
à l’une des institutions d’avoir manqué de lui adresser un acte autre qu’une recommandation ou un avis.

On ne peut que constater que le traité est particulièrement restrictif à l’égard des requérants particuliers.

Tout d’abord, à la différence des requérants privilégiés, les personnes physiques ou morales ne peuvent pas
mettre en cause la carence d’une institution qui n’aurait pas adopté un acte non-obligatoire (avis ou
recommandation). + D’autre part, ces requérants ne peuvent agir en carence que contre les décisions
individuelles dont ils sont les seuls destinataires.
Cependant, la Cour de justice a accepté de dépasser la formulation de cette disposition et aligner les conditions de
recevabilité du recours en carence sur celles du recours en annulation en admettant la recevabilité d’un recours en
carence formé par un particulier directement et individuellement concerné par une décision adressée à une
autre personne.

3) Les aspects procéduraux du recours en carence

Le recours en carence se décompose en 2 phases :


 Une phase de précontentieux (ayant pour objectif d’éviter d’aller jusqu’au contentieux).
 Une phase contentieuse.

a) La phase précontentieuse (article 265 al 2)

Cet article subordonne la recevabilité du recours en carence à l’accomplissement d’une phase précontentieuse. Dans
cette phase, le requérant va inviter l’institution en cause à agir. Il s’agit ici malgré tout d’une véritable mise en
demeure d’agir. Cette mise en demeure emprunte la voie écrite. A ce titre, l’invitation à agir doit être motivée et
suffisamment explicite et précise pour permettre à l’institution de connaître de manière concrète le contenu
de la décision qui lui est demandée de prendre. Parce que cette demande va d’ores et déjà délimiter le cadre de
l’éventuel recours contentieux.

L’Article 265 ne fixe pas de délai pour inviter l’institution sollicitée à agir. Si on voit qu’une institution n’agit pas, on
n’a pas de délai. Mais, pour des raisons de sécurité juridique, mais également pour des raisons de continuité de l’action
communautaire, il est évident que les justiciables doivent le plus rapidement possible enclencher cette phase

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précontentieuse et donc mettre en demeure l’institution d’agir. On a estimé cependant, que plus de 18 mois à
intervenir était trop long. Il faut un délai raisonnable pour enclencher cette 1ère phase.

A compter du moment où on met en demeure une institution, s’ouvre un délai de 2 mois pendant lequel
l’institution en cause doit prendre l’acte demandé. L’institution ne doit pas prendre une décision d’attente,
mais elle doit concrètement agir.

 Si l’institution agit dans ce délai, cette phase précontentieuse s’achève. Ici s’éteint le contentieux.
 En revanche, si à l’expiration de ce délai de 2 mois l’institution sollicitée n’a pas mis fin à la carence
ou si l’institution fait une réponse d’attente, une réponse évasive, ou une réponse dilatoire (hors-sujet), on va
estimer que la carence est constituée. S’ouvre alors un nouveau délai de 2 mois pendant lequel la
juridiction compétente peut être saisie.

b) La phase contentieuse
Cette phase contentieuse débute par l’introduction d’un recours qui doit être introduit par le même requérant
que celui qui a présenté la demande préalable (mise en demeure). Ce requérant doit faire une demande qui
porte sur les mêmes mesures que celles ayant fait l’objet de l’invitation à agir.

Il peut arriver que cette saisine de la Cour de justice alerte l’institution qui peut se décider à adopter l’acte. Si
l’institution réagit après la saisine de la Cour, mais avant que la Cour ait rendu son arrêt, le recours en carence devient
sans objet. Dans ce cas, la Cour de justice va rendre une ordonnance de non-lieu à statuer qui clos définitivement le
contentieux en carence.

 L’objectif ici n’est pas de condamner à tout prix, mais simplement à ce qu’il soit mis fin à un
comportement irrégulier.

4) Les effets de l’arrêt en constatation de carence

L’Article 266 du TFUE vise à la fois les conséquences d’une annulation ou d’un constat de carence. Ici on est dans la
situation où la Cour de justice a pris un arrêt de carence contre une institution.

- S’agissant de la nature de l’arrêt :


On dit que l’arrêt en carence a simplement un caractère déclaratoire. Cela signifie qu’il se borne à constater
l’abstention illégale de statuer d’une institution. Cet arrêt impose à l’institution de prendre toutes les
mesures que comporte l’arrêt de la Cour et ce dans un délai raisonnable. On est ici dans le contentieux de la
déclaration. Ce qui signifie qu’ici la Cour de justice a un rôle limité, càd qu’elle ne peut pas adresser des injonctions à
l’institution défaillante (car il n’y a pas de hiérarchie entre les institutions). Généralement, les institutions
répondent à ces arrêts en constation de carence et adoptent les actes demandés.

En cas d’immobilisme d’une institution, la déclaration de carence peut se prolonger par une action en
responsabilité extracontractuelle de l’UE.

C) Le recours en manquement (articles 258, 259 et 260)

C’est le seul recours existant permettant de contrôler d’un point de vue juridictionnel les Etats membres par
le contrôle du juge de l’Union. Egalement appelé « recours en constation de manquement ». Il vise à faire
constater par la Cour l’inexécution par un Etat membre des obligations qui lui incombent en vertu des
traités.
Cette procédure peut être essentiellement introduite devant la Cour de justice.

1) La notion de manquement

Interprétation très large de la part de L’UE. Il est clair qu’un Etat ne sera condamné que s’il méconnait une norme
obligatoire et contraignante de l’Union. Et donc la Cour de justice a détaillé au fur et à mesure par le biais de
sa jurisprudence ce que l’on devait entendre par manquement.

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Globalement, le manquement* d’un Etat peut découler de la violation d’obligations découlant de l’ensemble
des sources du DUE comme les traités, les actes de droit dérivé (règlements, directives et décisions), ou encore
violation d’un accord international conclu par l’Union, voire même d’un PGD.
En pratique, le manquement peut recouvrir des situations très diverses. Exemples :
 Il peut s’agir d’une action positive d’un Etat membre comme par exemple le maintien d’une norme
nationale contraire aux obligations que lui impose le DUE.
 Il peut aussi venir de l’adoption d’un texte national contraire aux obligations que lui impose le DUE.
 Ou encore l’adoption d’un texte national ne remplissant que partiellement les obligations qu’imposent
le DUE.

La carence ne concerne que les institutions. Il peut donc arriver qu’un Etat n’agisse pas ou mal.
Le manquement peut également consister en une abstention ou une inaction d’un Etat membre. Exemples :
 L’Etat qui n’adopte pas un texte demandé par le DUE.
 On abroge une disposition nécessaire à la mise en œuvre du droit communautaire.
 Les Etats qui ne souhaitent pas remettre en cause des rapports privilégiés avec des Etats tiers.
L’absence de renégociation ou de dénonciation (résiliation) d’un accord conclu avec un Etat tiers à
l’Union peut être constitutive d’un manquement.
 L’absence également de poursuites et de répression à l’encontre de ressortissants nationaux dont les
agissements sont contraires au DUE est constitutive d’un manquement.
Ex : Cour de justice, 1er février 2001, Commission contre France : Ici, la Cour de justice a constaté en
France l’absence d’un mécanisme de sanction administrative à l’encontre des pêcheurs français qui
avaient dépassé les quotas de pêche.
La France a été également condamnée s’agissant de la pêche pour ne pas avoir suffisamment affecté
de personnel à la réalisation de contrôle efficace de ces quotas de pêche. L’Espagne a aussi été
condamnée à ce titre pour ne pas avoir affecté suffisamment de personnel pour le contrôle sanitaire
de ses abattoirs.

En pratique, la quasi-totalité des recours en manquement sont relatifs aux défauts de transposition dans les
délais des directives. Concrètement, ce manquement peut prendre la forme d’une absence de transposition, d’une
transposition incomplète ou incorrecte ou encore le défaut de transmission des mesures nationales de transposition à la
Commission.

- Qui peut être à l’origine du manquement ?


Le manquement peut émaner de n’importe quel organe de l'Etat membre ou d’une communauté infra-
étatique comme par exemple une commune. C’est surtout le fait de régions autonomes (Espagne, Italie, ou Belgique où
les régions ont de grands pouvoirs) ou encore d’un district urbain.
La Cour de justice est allée plus loin et a pu estimer qu’une entreprise privée pouvait être à l’origine d’un
manquement dès lors qu’existait des liens suffisamment étroits entre l’Etat et cette société privée (souvent
des entreprises nationales)  Cour de justice, 24 novembre 1982, Commission contre Irlande.

Enfin, la question s’est posée de savoir si la Cour de justice pouvait faire un recours en manquement contre
une juridiction. Oui, en 1985, la Commission a tenté de faire un recours en manquement contre une juridiction
allemande. Elle l’a fait aussi en 2003 contre une juridiction italienne. Au final, ce sont les Etats qui étaient plus mis en
cause que les juridictions elles-mêmes.

La Cour de justice va écarter toute une série de circonstances exonératoires invoquées par les Etats.
 Ainsi, les Etats ne peuvent invoquer la situation de leur ordre juridique interne pour justifier de
son manquement. Les Etats ont l’obligation d’avoir un système institutionnel assez étoffé.
 De même, les Etats ne peuvent invoquer des raisons politiques pour ne pas respecter le DUE.
La France a tenté d’invoquer l’opposition d’une partie de son opinion publique pour refuser d’accomplir une
disposition communautaire. De même, d’autres Etats ont aussi invoqué des arguments éthiques ou religieux.
C’était le cas de la Pologne.
La France a invoqué aussi la dissolution imprévue de son Parlement pour refuser d’appliquer le droit de L’UE en
1997. La France a été condamnée par la Cour de justice en 1998.
De même, la Belgique n’a pas eu de Gouvernement pendant plus de 180 jours (en 2014). Elle a invoqué la
nécessité d’une révision constitutionnelle pour refuser d’appliquer le DUE et a été condamnée à ce titre en 1998.

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 En aucun cas, un Etat ne peut s’exonérer de sa responsabilité vis-à-vis de l’Union.


 La force majeure est très difficilement admise par L’UE.
 Il est interdit aux Etats d’invoquer le fait qu’un autre Etat méconnait le DUE pour soi-même
s’exonérer. C’est le ppe de loyauté qui s’applique, celui de coopération loyale. N’existe pas en DUE le ppe de
réciprocité.

En définitive, seule une impossibilité absolue d’exécuter convenablement une obligation qu’impose le DUE
peut être admise par la Cour de justice. Encore faut-il prouver que l'Etat collabore de bonne foi avec la
Commission pour surmonter les difficultés rencontrées.

2) La constation du manquement
Le recours en manquement est ouvert à la Commission (Article 258 du TFUE) et aux Etats membres (Article 259).
Ils n’ont pas à justifier d’un intérêt à agir pour mettre en œuvre la procédure et donc on n’a pas à démontrer
l’existence d’un préjudice.
Dans la pratique, c’est surtout la Commission qui a un rôle essentiel dans cette procédure en raison de son
rôle de gardienne des traités. Surtout, on s’est rendu compte que les Etats étaient réticents à agir les uns contre
les autres (raisons diplomatiques).

La Commission peut se saisir d’office d’une affaire de manquement, mais elle peut aussi agir sur la base de
plaintes de la part des Etats membres, ou de personnes physiques ou morales.
Le recours en manquement n’est pas ouvert aux particuliers. Cependant, rien ne les empêche d’informer la
Commission des violations du DUE qui seraient le fait de leur Etat d’origine ou de tout autre Etat membre de l’Union.

Le déclenchement de la procédure est une compétence discrétionnaire de la Commission (opportunité des


poursuites). Le déclenchement de la procédure n’est pas susceptible de recours.

L’objectif n’est pas de condamner à tout prix l’Etat. L’objectif est le bon fonctionnement de l’Union. On ne veut pas
condamner pour condamner. La procédure en manquement est donc composée de 2 phases :
 Une phase précontentieuse.
 Et une phase contentieuse.

a) La phase précontentieuse (ou la « phase administrative préalable »)

- Il s’agit d’une phase obligatoire.

Selon l’Article 258 du TFUE, si la Commission estime qu’un Etat membre a manqué à une des obligations qui lui
incombent en vertu des traités, elle émet un avis motivé à ce sujet après avoir mis cet Etat en demeure de
présenter ses observations.
En effet, la Commission va tout d’abord adresser à l'Etat membre concerné une lettre de mise en demeure qui va
précisément délimiter le manquement reproché à l'Etat. Elle va également l’inviter à présenter dans un certain délai ses
observations sur les griefs formulés par la Commission.

Pour la Cour de justice, cette phase est essentielle car elle donne l’occasion à l'Etat de justifier sa position et
le cas échéant de permettre à la Commission d’amener l'Etat à se conformer à ses exigences. Ici l’objectif est
de mettre fin aux violations, plutôt que de condamner l'Etat.

L’Etat dispose d’un délai déterminé. Ici, le délai imparti par la Commission aux Etats est fonction des
circonstances et peut être prolongé à la demande des Etats. Là c’est une phase de discussion.

(Si l'Etat répond à la mise en demeure de la Commission s’éteint le litige).


Si à l’issue de cette phase (enfermée dans un délai) l'Etat maintient sa position et si la Commission continue à
constater une violation des traités, la Commission va émettre un avis motivé dans lequel elle va formaliser sa
position et fixer le contentieux éventuel.
Cet avis (motivé) va constater le manquement, il invite l'Etat à y mettre fin et généralement, la Commission
indique les moyens permettant de régulariser la situation.

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La Cour de justice va vérifier cet avis. La Cour de justice rappelle que la Commission doit véritablement
constater un manquement. De simples présomptions de violation du DUE ne sont pas suffisantes pour justifier le
manquement. Cet avis va prescrire pour son exécution un délai raisonnable donné à l'Etat. C’est un délai qui
varie en fonction de la nature de l’infraction et qui là encore peut faire l’objet de prolongation . Ex : La
Commission a accepté de prolongé un délai car l'Etat était en pleine élection législative.

Si l'Etat obtempère et met fin au manquement pendant le délai imparti, la Commission va classer l’affaire.
En revanche, si la Commission estime que l'Etat ne s’est pas conformé à l’avis motivé, dans ce cas, elle peut
saisir la Cour de justice.
b) La phase contentieuse
La Commission est libre de décider de l’opportunité d’introduire un recours. La saisine n’est pas systématique.
Par ailleurs, la Commission n’est pas enfermée dans un délai pour saisir la Cour de justice. Cependant, la Cour
de justice estime que la Commission doit le faire dans un délai raisonnable. C’est à la Commission qu’il
conviendra d’introduire une requête introductive d’instance devant la Cour de justice.
La Commission doit s’en tenir aux griefs invoqués dans son 1 er avis motivé. On ne peut pas introduire devant la CJ
un grief qui n’aurait pas déjà été invoqué dans la phase précontentieuse, on peut simplement les étendre. La Commission
doit fournir à la CJ tous les éléments nécessaires à la vérification de la réalité du manquement.

En revanche, l’Etat dispose d’une plus grande liberté pour se défendre et peut faire état d’arguments qu’il
n’aurait pas exposé au cours de la phase précontentieuse en application du principe général du droit de la défense.

Le litige est donc porté par la Commission. La Commission peut à tout moment se désister de la phase contentieuse en
retirant sa requête contre l'Etat défendeur qui aurait régularisé sa situation en mettant fin au manquement.

3) La sanction du manquement

La Cour de justice dispose dans le cadre de ce contentieux de larges pouvoirs, notamment lors de l’examen au
fonds de la demande de constation de manquement. Effectivement, elle ne va pas se contenter de contrôler les
motifs exprimés par la Commission dans son avis, elle ne va pas non plus procéder à un simple contrôle de légalité mais
elle va aussi juger du comportement concret de l’Etat dans son ensemble (Etat récidiviste, …) et également
tenir compte de toutes les circonstances de l’espèce (tenir compte par exemple de la nature de la législation violée,
quels sont les arguments avancés, …). C’est un moyen de faire évoluer la législation. Ce type de recours permet aussi
de combler les éventuelles lacunes du droit communautaire.
Parfois, la Cour de justice peut choisir de retenir une solution politique, càd de ne pas nécessairement
condamner l'Etat. 2 solutions :

 La Cour peut constater que l'Etat n’a pas commis de manquement et dans ce cas, pas d’arrêt
de constation en manquement. Hypothèse plutôt rare.

 Si un Etat membre a manqué à ses obligations qui lui incombent en vertu du DUE, la Cour de
justice va adopter un arrêt en constation de manquement. C’est un arrêt purement
déclaratoire. Seuls les Etats peuvent en tirer les conséquences. La Cour ne peut procéder d’elle-même
à la suppression de la mesure incriminée (elle ne peut pas se substituer au législateur).
Cet arrêt ne peut contraindre l'Etat condamné, il ne peut contenir des injonctions de faire à
l’encontre de l'Etat condamné. On ne peut même pas lui prescrire les mesures concrètes qu’il (l’Etat)
devrait prendre.
De même, pendant longtemps, on ne pouvait pas condamner l'Etat à des dommages-intérêts.
Les choses ont un peu évoluées ici.

Cependant, cet arrêt en déclaration de manquement a une autorité absolue de chose jugée et peut
dès lors être invoqué par une personne physique ou morale en vue d’obtenir du juge
national l’inapplication de toute norme nationale qui serait contraire au DUE.

Aidée par les traités, la Cour de justice a réussi à rendre obligatoire ces arrêts en
manquement, à imposer aux Etats le respect de ces arrêts en constation de manquement.

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a) L’exécution de l’arrêt en constation de manquement


Lorsque la Cour de justice a constaté qu’un Etat membre a manqué à l’une des obligations qui lui incombe en
vertu du DUE, cet Etat est tenu de prendre une mesure que comporte l’exécution de l’arrêt de la Cour.
Cette exécution doit être entamée immédiatement et elle doit aboutir dans les délais les plus brefs possibles.

Les Etats doivent prendre toutes les mesures nécessaires permettant de donner son plein effet au droit
communautaire. Ça peut être un changement de législation, l’obligation de sanctionner des particuliers, ou encore
l’obligation de résilier un contrat conclu par une collectivité territoriale pour l’élimination des déchets, contrat conclu en
méconnaissance du DUE (Cour de justice, 18 juillet 2007, Commission contre Allemagne).

b) Les sanctions au manquement


Les Etats n’exécutent pas nécessairement ces arrêts en manquement. Or, pendant longtemps, cette
inexécution ne pouvait faire l’objet d’aucune sanction.
La seule solution qui s’offrait à la Commission était d’introduire une nouvelle procédure de manquement devant la Cour
de justice.

Le 1er traité à réagir est le traité de Maastricht et il va combler cette lacune en permettant à la Cour de justice d’infliger
à un Etat membre qui ne s’est pas conformé à son arrêt de constation en manquement au paiement d’une somme
forfaitaire ou d’une astreinte. Le traité de Lisbonne a parachevé ce système de sanction pécuniaire.

 La sanction en cas d’inexécution de l’arrêt en constation de manquement :

Article 260, §2 du TFUE. Si la Commission constate qu’un Etat membre n’a pas pris les mesures nécessaires
pour exécuter un arrêt en constation de manquement, elle va de nouveau saisir la Cour de justice, en mettant
cependant l'Etat en mesure de présenter ses observations. Ici, Lisbonne a supprimé l’étape précontentieuse.

La Commission va indiquer à la Cour le montant de la somme forfaitaire (somme globale) ou l’astreinte (somme
journalière) à payer par l'Etat membre fautif en fonction des circonstances de l’affaire. On a donc introduit ici
une sorte de voie d’exécution forcée contre les Etats (comparaison avec le droit français).

La Commission européenne a été amenée à plusieurs reprises à préciser les modalités de mise en œuvre de
ces astreintes et sommes forfaitaires à payer, notamment sur la question du calcul des sommes.

Le 1er Etat qui va être condamné sera la Grèce dans un arrêt du 4 juillet 2000, Commission contre Grèce. On a estimé que
la somme incitative pour la Grèce était de 20 000€ par jour de retard pour inexécution d’un arrêt en manquement relatif
au non-respect par cet Etat de 2 directives en matière d’environnement.
La Cour de justice a précisé à l’occasion de cette affaire, que malgré les propositions faites par la Commission
sur les sommes à payer, elle souhaitait se réserver une grande liberté sur ce qui concerne le montant des
astreintes adapté aux circonstances, proportionné aux manquements constatés, ainsi qu’à la capacité de
paiement de l'Etat membre. Est important ici le principe d’autonomie de la Cour.

Elle a eu l’occasion de rappeler son autonomie dans un arrêt du 12 juillet 2005, Commission contre France. Elle pouvait
même décider de cumuler les 2 sanctions pécuniaires. La France refusait d’exécuter un arrêt en manquement datant de
1991 (14 ans plus tard) dans le domaine du contrôle des activités de pêche. La France a dû payer en 2005 une somme
forfaitaire de 20 millions d’euros, assortie d’une astreinte périodique de plus de 57 millions d’euros pour chaque période
de 6 mois de retard jusqu’à l’exécution de l’arrêt de juin 1991.
Suite à cet arrêt, la Commission a rappelé une dernière fois dans une communication du 14 décembre 2005
que le montant des sanctions pécuniaires doit prendre nécessairement en compte 3 critères fondamentaux :
la gravité de l’infraction, sa durée, et la nécessité d’assurer l’effet dissuasif de la sanction elle-même afin
d’éviter les récidives.
Aujourd'hui, les sanctions pécuniaires infligées aux Etats obéissent à certains coefficients. Aujourd'hui, on a
un socle minimal déterminé par Etat si on devait les sanctionner pour éviter cet excès de 2005 contre la France.
Le socle minimal pour l’instant est Malte avec 174 000€. Le plus important est l’Allemagne. Le socle minimal de
l’Allemagne est environ 11 millions d’euros. La France a un socle minimal de 10 millions d’euros environ. On peut aller
au-delà, mais il faut le justifier.

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Le DUE ne permet pas le recouvrement forcé des astreintes.


Cependant, depuis les années 2000, on tire un bilan positif de ce mécanisme d’astreinte. Pour les juristes, on estime que
le mécanisme de sanction pécuniaire à tendance à jouer un rôle dissuasif efficace car on a constaté un grand
nombre de régularisations précipitées intervenues dès que la Commission a menacé de déclencher la
procédure de non-respect de l’exécution de l’arrêt en manquement.

Section 2 : Le contentieux de pleine juridiction ou le recours en responsabilité


Les recours en responsabilité visent à obtenir de la Cour de justice la réparation des préjudices causés par
l’Union soit à l’occasion de ses activités matérielles ou normatives (responsabilité extracontractuelle), soit à
l’occasion de l’exécution d’un contrat (responsabilité contractuelle).

Il revient à la Cour de justice en cas de difficulté de déterminer si un litige relève de la responsabilité


extracontractuelle ou contractuelle de l’Union.
§1 : Recours en responsabilité extracontractuelle

Selon l’Article 268 du TFUE, la Cour de justice a compétence exclusive pour connaitre des actions visant à faire
condamner l’Union à indemniser les dommages causés en dehors de l’inexécution d’un contrat.

La responsabilité non-contractuelle de l’Union ne peut être engagée que pour les dommages causés par les
institutions. Et donc par extensions, les dommages causés par les organes et organismes de l’Union.
Egalement, cette responsabilité extracontractuelle peut être engagée en raison du comportement fautif des
agents de l’Union, mais dans l’exercice de leurs fonctions. (Rare)

En revanche, l’Union ne peut être tenue responsable des dommages causés aux personnes privées par les organismes, les
agents des Etats membres, ou lorsqu’ils agissent en violation du DUE. Dans cette dernière hypothèse, la question de la
réparation sera uniquement appréciée par les juridictions nationales.

Comme chaque recours, ce recours en responsabilité extracontractuelle est autonome du recours en


annulation et du recours en carence. (Si on veut des dommages-intérêts il faut exercer une action en parallèle de la
demande d’annulation de l’acte).

A) Les conditions de recevabilité du recours en responsabilité extracontractuelle

L’Article 268 du TFUE n’énumère pas les personnes susceptibles d’introduire un tel recours. On en a donc déduit que les
Etats membres, mais également les Etats tiers, ainsi que les personnes physiques ou morales quelle que soit leur
nationalité pouvaient introduire un tel recours dès lors que ces requérants estiment avoir subi un préjudice l’affectant
dans son patrimoine propre du fait des activités de l’Union. Ces personnes peuvent également donner mandat à une
association ou à une organisation syndicale pour les représenter.

L’action en responsabilité doit être dirigée contre une institution, un organe ou un organisme de l’Union
auteur du dommage, même si en réalité c’est la responsabilité de l’Union que l’on cherche à engager car seule
l’Union a la responsabilité juridique.

La Cour de justice a une vision assez élargie de la notion d’institution. Par exemple, elle a accepté que soit
engagée la responsabilité de la BCE. De même elle a une notion très large de la notion d’acte. Pour elle, tous les
actes sont susceptibles d’un recours, de même que les actes et les actions provenant de l’un de ses agents en
activité. Le recours doit bien être formé contre l’institution dont dépend l’agent.
Comme en France, l’Union peut cependant se retourner contre cet agent pour demander réparation du dommage
subi ou encore pour obtenir le remboursement des sommes versées au demandeur.

- Quel est le délai pour agir en responsabilité extracontractuelle?


Les actions contre l’Union en matière de responsabilité extracontractuelle sont prescrites dans un délai de 5
années à compter de la survenance du fait litigieux.

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Mais le délai de prescription ne serait commencé à courir avant que ne soit réuni toutes les conditions
auxquelles se trouve subordonnée l’obligation de réparation. Notamment ce délai de 5 ans va commencer à
recourir que dès lors que tous les effets dommageables de l’acte se sont produits.

En revanche, la prescription de 5 ans est interrompue soit par la requête formée devant la Cour de justice,
soit par une demande préalable que la victime peut adresser à l’institution, organe ou organisme de l’Union
auteur du dommage. Cette requête préalable doit être formée dans un délai de 2 mois à compter du fait
dommageable.

B) Mise en œuvre de la responsabilité extracontractuelle

L’engagement de la responsabilité extracontractuelle de l’Union et subordonnée à la réunion de 3 conditions


cumulatives dont la preuve incombe au demandeur :
 Une illégalité commise par une institution, un organe ou un organisme ou encore par un des agents.
 Il faut un préjudice indemnisable.
 Un lien de causalité entre l’illégalité et le préjudice allégué.
Ces 3 conditions sont cumulatives ce qui signifie que lorsque l’une d’elle n’est pas remplie, le recours en responsabilité
doit être rejeté dans son ensemble. Il s’agit de conditions classiques en droit de la responsabilité et qui notamment ont
été précisées par un arrêt de la Cour de justice en date du 5 mars 1996, Brasserie du pêcheur SA, et factortame.

1) Une illégalité

2 conditions doivent être réunies pour que les institutions ou leurs agents voient leur responsabilité
reconnue et engagée pour des dommages causés aux particuliers :

 1ère condition : La règle de droit enfreinte doit avoir pour objet de conférer des droits aux
particuliers.

 2ème condition : La violation doit être suffisamment caractérisée. Ça signifie qu’il faut être face à
une méconnaissance manifeste et grave du DUE.
Cette violation du droit sera plus facile à prouver si l’institution en cause disposait d’une faible marge
d’appréciation dans sa mise en œuvre du droit communautaire.

2) Un préjudice indemnisable

La Cour de justice considère que la responsabilité de l’Union peut être engagée quelle que soit la nature de
l’activité en cause. En pratique, le fait générateur du dommage est généralement matériel, càd économique ou
financier. Ce dommage doit être né, actuel et certain. Mais la Cour de justice a ajouté que ce dommage doit
également pouvoir être évalué financièrement.

La Cour de justice peut exceptionnellement admettre la réparation de dommage futur (càd qui n’est pas encore
né) si toutefois il n’est pas purement hypothétique.
Ex : Directive qui va supprimer les aides mais qui n’est pas encore appliquées formellement en droit interne car la
directive n’est pas encore transposée.

La difficulté c’est que c’est au demandeur de prouver le dommage.


Le requérant devra dans tous les cas étayer, préciser ses allégations par des éléments concrets et objectifs qui permettent
au juge communautaire d’établir non seulement l’existence du dommage, mais également son étendue.

Dans le domaine économique, où les institutions peuvent disposer d’une large marge d’appréciation, la Cour de
justice exige de plus que le préjudice soit spécial. Un préjudice spécial* est un préjudice qui concerne une
personne précisément, ou un groupe restreint de personnes dites « opérateurs économiques ».
Toujours dans le domaine économique, elle va également exiger que ce dommage soit anormal, càd que c’est un
dommage qui va dépasser les limites des risques économiques inhérents (= découlant) des activités du
secteur concerné. Prise de risque qui dépasse l’aléa économique normal. Ex : législation qui modifie le classement du
Calvados : alcool ? spiritueux ?

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Le dommage doit être direct, càd qu’il peut être le fait d’une institution ou de l’un de ses agents dans
l’exercice de ses fonctions. Ce qui signifie que la Cour de justice va rechercher si le fait dommageable résulte
d’une faute de service ou d’une faute personnelle.
 Si la faute de l’agent est produite lorsqu’il est en exercice se sera bien une faute de service*
engageant la responsabilité de l’Union.
 En revanche, si nous sommes face à une faute personnelle* d’un agent (ex : faute commise en dehors
des heures de travail), elle n’engagera pas la responsabilité de l’Union. Mais il y a toujours faute. Dans ce
cas l’agent est responsable devant sa juridiction nationale.
3) Un lien de causalité entre l’illégalité et le préjudice allégué

C’est toujours au demandeur d’établir cette réalité, d’apporter la preuve de ce lien entre la violation du droit et le
dommage subi. Si ce lien n’existe pas, il n’y aura pas droit à réparation.

Parfois, malgré tout, on se rend compte que celui qui a subi le dommage n’est pas exempt de toute
responsabilité. On peut être soi-même à l’origine du dommage que l’on subit.
Le juge communautaire, dans certaines circonstances, peut tenir compte d’éventuelles négligences ou imprudences
imputables au requérant. Dans cette hypothèse, la Cour de justice va constater que ces agissements du requérant
sont de nature à remettre en cause l’existence d’un lien de causalité entre le préjudice subi et le
comportement de l’institution ou de l’agent. Dans ce cas-là, il n’y aura pas réparation. (La Cour de justice va
quand même apprécier le niveau de négligence).
Le juge considère que si le préjudice ne trouve pas sa cause exclusive dans le comportement de l’institution, dans ce cas
la responsabilité de l’Union sera donc partielle, voire parfois inexistante.

En revanche, s’il est établi qu’une institution est responsable, la Cour de justice dans son arrêt prononcera le
versement d’une indemnité au profit du requérant.

§2 : Recours en responsabilité contractuelle (articles 272 et 340)

C’est un contentieux très peu fourni. Il y a environ une dizaine d’affaires par an. C’est un contentieux qui relève plus
du droit international privé que du droit communautaire.

L’UE disposant de la personnalité juridique dans les Etats membres, les contrats passés avec ses
cocontractants sont susceptibles de donner lieu à des différends et d’engager sa responsabilité contractuelle.

Les différends qui peuvent subvenir à l’occasion de l’exécution d’un contrat ne relèvent pas automatiquement de la
compétence des juridictions de l’Union.
 Pour que la Cour de justice soit compétente, il est nécessaire que figure dans le contrat une clause
compromissoire*. Il s’agit d’une clause écrite dès la négociation du contrat qui automatiquement doit donner
compétence à la Cour de justice.
 A défaut de cette clause, les différends contractuels relèvent de la compétence du juge national.

En pratique, seuls les contrats (de droit public ou de droit privé qu’ils soient passés par l’Union ou pour son compte) les
plus importants sont dotés d’une clause compromissoire et relèvent donc de la compétence de la Cour de justice.
Ça peut être des contrats dans le domaine de la recherche, des nouvelles technologies, les brevets, … Très rare.

S’agissant ensuite du droit applicable, selon Article 340 du TFUE, la responsabilité contractuelle de l’Union est
régie par la loi applicable au contrat en cause. (La loi applicable est déterminée par le contrat).
Le droit applicable au contrat pourra être le DUE. La Cour de justice va simplement se référer aux traités.
Mais le contrat peut décider qu’il est régit soit par le DUE, soit par le droit de l’un des Etats membres.
En pratique, il n’y a pas de DUE spécifique en matière de contrat. Lorsqu’on se réfère au DUE, on se réfère aux PGD. Par
exemple, l’enrichissement sans cause.

C’est un contentieux qui peut donner lieu à une interprétation du contrat de la part de la Cour de justice
lorsqu’elle est saisie, et au versement de dommages-intérêts.

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Chapitre 3 : La coopération entre le juge de L’UE et le juge national

Le juge national est le juge communautaire de droit commun. A ce titre, la procédure prévue à l’Article 267 du
TFUE vise à assurer une interprétation et une application uniforme du DUE dans l’ensemble des ordres juridiques des
Etats membres au regard de la multiplicité des juridictions et ce grâce à une collaboration entre la Cour de justice et le
juge national.

Globalement, s’agissant du mécanisme, lorsqu’un juge national est confronté dans un litige qui lui est soumis à un
problème touchant à l’interprétation d’une norme, ou à l’appréciation de la validité d’un acte de droit communautaire,
ce juge national doit surseoir à statuer, càd qu’on arrête le procès, et il pose une question à la Cour de justice. Ces
questions sont des « questions préjudicielles ». A ce titre, la Cour de justice va rendre un arrêt : « l’arrêt préjudiciel ». La
procédure juridictionnelle interne reprend et le juge national peut trancher le litige.

Ce renvoi préjudiciel est une procédure non-contentieuse qui se déroule devant le juge communautaire. On
dit qu’il s’agit d’ « un incident du litige principal » qui se déroule devant le juge national.

Section 1 : Le renvoi préjudiciel par les juridictions nationales


§1 : La notion de juridiction nationale

A) Le concept de juridiction

L’article 267, alinéa 2 dispose que le renvoi préjudiciel ne peut être formé que par une juridiction d’un Etat membre.
La Cour de justice a estimé que la définition de juridiction au sens de l’Article 267 devait intervenir au niveau
communautaire et non au niveau national.
La Cour va donc apprécier si l’organisme qui l’a saisi possède bien cette qualité de juridiction en tenant
compte d’un ensemble d’éléments tels que l’origine légale de l’organe (c’est mieux si la juridiction saisit est créée
par la loi ou la Constitution), sa permanence, le caractère obligatoire de sa juridiction, la nature contradictoire
de la procédure, l’application par l’organisme des règles de droit (à quoi se réfère-t-on ?), et enfin, elle vérifie
l’indépendance de l’organisation.

Mais ces critères ne sont pas d’application absolue :


Par exemple, la Cour de justice a reconnu la qualité de juridiction au Conseil d'Etat néerlandais à une époque où il ne
disparait que d’une simple compétence consultative (dans les années 70).
Ou encore, elle a reconnu cette qualité à une Commission fédérale allemande de surveillance en matière de passation de
marché public.
Enfin, elle a reconnu cette qualité à une organisation professionnelle néerlandaise. Commission de recours pour la
médecine parce qu’elle exerçait une réelle fonction juridictionnelle.

En revanche, la Cour de justice ne reconnait pas cette qualité de juridiction, par exemple, aux instances arbitrales de
droit privé. Elle a notamment estimé que c’était une compétence facultative, elle n’est pas permanente.
De même, elle ne reconnait pas cette compétence par exemple aux Conseils professionnels lorsqu’ils ne sont pas appelés à
statuer en matière disciplinaire.

Pour la Cour de justice, il est important que la juridiction qui la saisit soit capable de statuer dans le cadre
d’une procédure permettant d’aboutir à une véritable décision juridictionnelle.
Le droit de saisir la Cour de justice à ce titre appartient à n’importe quelle juridiction nationale, qu’elle soit civile,
commerciale, administrative, fiscale, sociale ou pénale et même le juge des référés.

B) Les 2 catégories de juridictions visées par l’Article 267 du TFUE

Ce recours est purement facultatif. On n’est jamais obligé de saisir la Cour de justice. Le renvoi préjudiciel aurait pu
ne jamais fonctionner à ce titre. De même, il était impossible de le rendre obligatoire car c’était entraîner un
encombrement de la Cour de justice.

Il a donc fallu opérer une distinction entre les juridictions concernant leur obligation ou non de saisir la
Cour de justice. En pratique, l’Article 267 distingue entre 2 catégories de juridictions :
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 Les juridictions dont les décisions ne sont pas susceptibles d’un recours juridictionnel de
droit interne. Ce sont les juridictions qui interviennent en dernier ressort. Ex : Conseil d'Etat ou Cour
de cassation en France. Ces juridictions ont l’obligation de saisir la Cour de justice.
 Les juridictions dont les décisions sont susceptibles d’un recours juridictionnel en droit
interne. Ces juridictions ont seulement la faculté, la liberté de saisir la Cour de justice.

1) L’obligation de renvoi des juridictions supérieures

A la lecture de l’Article 267 on a l’impression que les Cours suprêmes doivent systématiquement saisir la Cour de justice
lorsqu’elles se posent une question préjudicielle. En pratique, cette obligation de saisine obligatoire de la part de
ces juridictions suprêmes s’est considérablement assouplie. Effectivement, ces juridictions suprêmes ne sont
pas obligées de saisir la Cour de justice dans certaines circonstances.

1er assouplissement : Tout d’abord, il y a les effets des décisions préjudicielles antérieures.
Cela signifie que ces juridictions suprêmes sont dispensées de saisir la Cour de justice dès lors que cette
question a déjà été tranchée par la Cour de justice et qu’elles appliquent la réponse déjà donnée.
2ème assouplissement : Le maintien d’une compétence d’appréciation du juge national.
Càd que le juge national conserve malgré tout la faculté d’apprécier la pertinence de saisir le juge communautaire. Donc
parfois, une Cour nationale peut refuser de saisir la Cour de justice.

3ème assouplissement : La théorie de l’acte clair.


Le juge français (Conseil d'Etat) avait élaboré la théorie de l’acte clair dans un arrêt du 19 juin 1964, Société Shell-Berre.
Cette théorie résulte d’une certaine répugnance du Conseil d'Etat à saisir la Cour de justice puisque le Conseil d'Etat
estime que dès lors qu’il n’existe aucune difficulté réelle d’interprétation ou de validité du DUE, et qu’il n’existe aucun
doute sérieux sur le sens ou sur la validité de la disposition communautaire concernée, le juge national peut l’appliquer
immédiatement.
En définitive, même la Cour de justice a adopté cette théorie de l’acte clair (arrêt du 6 octobre 1982, arrêt CILFIT). Elle
reconnait qu’effectivement, si l’acte communautaire est suffisamment clair, ces juridictions suprêmes n’ont pas
l’obligation de la saisir. Cependant, la Cour de justice encourage ces juridictions suprêmes à la saisir dès lors
qu’apparait l’ombre d’un doute sur le sens ou la portée du droit communautaire.

2) La faculté de renvoi des juridictions ne statuant pas en dernier ressort

Selon l’Article 267 du TFUE, ces juridictions n’ont pas l’obligation de saisir la Cour de justice de question
d’interprétation. Elles peuvent donc elles-mêmes interpréter le DUE.

Cependant, la Cour de justice a atténué cette liberté, notamment dans un arrêt du 22 octobre 1987, Foto-Fraust. Elle
va notamment distinguer en fonction de l’objet du renvoi.

a) S’agissant du renvoi en interprétation

Ce renvoi en interprétation pour la Cour de justice est facultatif pour les juridictions qui ne statuent pas ne
dernier ressort. Elles ont le choix de saisir ou non la Cour de justice.

b) S’agissant du renvoi en appréciation de validité

On demande ici au juge communautaire de dire si oui au non cette question est légale. Au regard de l’importance de
la question posée, contrairement au texte de l’Article 267, la Cour de justice fait plutôt obligation à ces
juridictions de renvoyer à la Cour de justice ces questions.
La Cour de justice interdit à ces juridictions de déclarer invalides les actes des institutions et leur fait obligation de
renvoyer dès qu’elles éprouvent des doutes sur leur validité.

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Que se passet-il quand on ne veut pas renvoyer ? Quelle est la sanction de l’omission de renvoyer à la Cour de justice ?

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La méconnaissance par une juridiction nationale de son obligation de renvoi constitue une violation de
l’Article 267. Cela autorise la Commission, en application de l’Article 258 du TFUE, à déclencher la procédure de
manquement d’Etat. Ensuite, saisir la Cour pour condamner l'Etat pour violation de l’Article 267.

En pratique, on s’est rendu-compte que la Commission, qui maîtrise toute la procédure, se réserve la possibilité ou
non de déclencher cette procédure en manquement.
En pratique, la Commission le fait rarement et préférera tout simplement, en cas de manquement flagrant et
répété, faire part au Gouvernement (par la voie diplomatique) de sa préoccupation et de présenter des
observations. Elle leur demande de présenter leurs observations pour non-respect de l’Article 267.

§2 : L’objet du renvoi préjudiciel


En application de l’Article 267, alinéa 1 er du TFUE, le renvoi ne peut porter que sur l’interprétation des traités ou
des actes pris par les institutions, organes ou organismes de l’Union, ou encore sur l’appréciation de la
validité de ces mêmes actes. Donc la compétence de la Cour est limitée à l’examen des seules dispositions du DUE.
A) L’interprétation des traités
L’interprétation des traités peut porter sur toutes les dispositions d’un traité, mais y compris leurs annexes,
leurs protocoles, ainsi que sur les traités portant modification des traités constitutifs et les traités
d’adhésion.
B) L’interprétation des actes pris par les institutions, organes et organismes de l’Union

Il s’agit bien du droit dérivé issu des institutions visées à l’Article 13 du TUE, càd les actes émanant du
Parlement européen, du Conseil européen (à ne pas confondre avec le Conseil), la Commission européenne, la
Cour des comptes, la BCE, et la Cour de justice.

Elle estime également que sont inclus dans cette liste les accords externes conclus par l’Union et les accords
mixtes conclus par l’Union et les Etats membres avec des pays tiers.

C) L’appréciation de la validité des actes pris par les institutions, organes et organismes de l’UE

L’appréciation de la validité des actes de l’Union va permettre à la Cour de justice d’opérer un contrôle de la
légalité externe et interne des actes adoptés par les institutions, organes ou organismes.
Ce contrôle peut être assimilé à celui que la Cour exerce dans le cadre du recours en annulation.

Tous les actes émanant des institutions, sans exception, peuvent faire l’objet d’une telle appréciation de validité.
En revanche, il y a une particularité. Les arrêts rendus par les juridictions de l’Union ne peuvent pas faire l’objet d’une
appréciation de validité.

§3 : L’étendue de la liberté du juge national dans l’utilisation du renvoi préjudiciel

Le juge national est seul compétent pour décider d’un renvoi préjudiciel. Les parties au litige ne peuvent
directement saisir la Cour de justice. Le juge national peut saisir la Cour de justice à tous les stades de la procédure.

Cependant, cette liberté est encadrée par la Cour de justice s’agissant du formalisme à respecter (= manière de
saisir la Cour de justice). Ca signifie que le juge national doit strictement définir le cadre factuel et règlementaire dans
lequel s’insère les questions qu’il pose et expliquer les hypothèses sur lesquelles ces questions sont fondées.
Concrètement le juge national doit indiquer les raisons qui le poussent à saisir la Cour de justice. Il faut également qu’il
donne un minimum d’explications sur les raisons du choix des dispositions communautaires dont il demande
l’interprétation. Il doit aussi établir un lien entre les dispositions communautaires et la législation nationale applicable.

Cette exigence découle du caractère utile du recours préjudiciel. Sinon, le juge communautaire peut déclarer
irrecevable la question posée.

Section 2 : Le jugement des questions préjudicielles par la Cour de justice


§1 : Les procédures préjudicielles

Le renvoi préjudiciel s’organise autour de 3 procédures selon nature des q° posées par les juridictions nat° :

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A) La procédure préjudicielle standard (article 23 du statut de la Cour de justice)

La question préjudicielle posée par le juge national est enregistrée au greffe de la Cour. Puis, elle est notifiée aux
éventuelles autres parties au litige en cause, aux Etats membres, à la Commission en tant que gardienne des traités, ainsi
qu’à l’institution, organe ou organisme qui a adopté l’acte dont la validité est contestée ou dont l’interprétation est
demandée. Toutes ces parties disposent dès lors d’un délai de 2 mois pour déposer devant la Cour des
mémoires et des observations écrites.

De manière exceptionnelle, la Cour de justice peut rapidement, par voie d’ordonnance, motiver, statuer, mais
après avoir informé la juridiction nationale de renvoi et aussi après avoir entendu les observations des
destinataires de la demande préjudicielle et ce dans 3 hypothèses :
 Lorsque la question posée est identique à une question sur laquelle la Cour a déjà statué.
 Lorsque la réponse à la question préjudicielle posée peut être clairement déduite de la
jurisprudence.
 Lorsque la réponse à la question ne laisse place à aucun doute raisonnable.
Dans ces 3 hypothèses, le renvoi préjudiciel s’achève via cette ordonnance motivée.

La Cour peut également rejeter cette question préjudicielle par voie d’ordonnance lorsqu’elle constate une
irrecevabilité manifeste ou lorsqu’elle constate qu’elle est incompétente. Ou encore orque la question posée
est sans incidence sur la solution du litige principal.

De manière générale, la Cour manifeste une très grande liberté à l’égard des questions qui lui sont posées afin d’être à
même d’apporter des réponses utiles aux questions préjudicielles formulées par les juridictions nationales.
Par exemple, la Cour peut demander des éclaircissements au juge national. Elle peut même reformuler les questions
posées par le juge. Elle peut même interpréter les questions qui lui sont posées. Elle peut aussi modifier l’ordre des
questions.
Donc la Cour dispose d’un large pouvoir et va aller parfois jusqu’à déclarer d’office invalide un acte alors qu’on
demandait simplement sur interprétation (elle change la nature du recours).

Cependant, il y a des limites :


Ainsi, dans le cadre du recours préjudiciel, la Cour ne peut apprécier la compatibilité ou la conformité du droit national
avec le DUE. Elle n’est pas non plus compétente pour appliquer le DUE à un litige donné. Elle ne peut pas se prononcer
sur les dépens.

A l’issue de la procédure, la Cour de justice va rendre un arrêt préjudiciel qui est transmis au juge national
qui va donc reprendre le cours du litige et qui doit trancher dans le sens de la Cour.

B) La procédure préjudicielle accélérée (article 23 bis du statut de la Cour de justice)

A la demande d’une juridiction nationale, le Président de la Cour de justice peut exceptionnellement, sur
proposition du juge rapporteur, et après avoir entendu l’avocat général, décider de soumettre un renvoi préjudiciel
à une procédure accélérée si le juge national prouve une urgence extraordinaire.
Dans cette hypothèse, le Président de la Cour va fixer immédiatement une date d’audience qui est
communiquée aux parties intéressées qui ne disposeront que d’un délai de 15 jours pour présenter leurs
observations. Ensuite, le Président rend son arrêt préjudiciel.

C) La procédure préjudicielle d’urgence (toujours article 23 bis)

Cette procédure va concerner une question portant sur l’espace de liberté, de sécurité et de justice. C’est une
question qui s’insère au Titre V de la 3ème partie du TUE.

Il s’agit d’une demande d’une juridiction nationale qui va exposer les circonstances de droit et de fait qui
établissent l’urgence. Ca peut être un problème de visa, un problème de droit d’asile, …

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Si la procédure d’urgence est activée, la Cour de justice va désigner une Chambre qui va prendre en compte
cette urgence.
Ici, la Cour va fixer les délais qui peuvent être parfois que de 8 jours (voire à 5 jours). La Chambre désignée va fixer
les délais pendant lesquels les parties au litige peuvent déposer des mémoires ou des observations écrites.
La Chambre peut également préciser les points de droit sur lesquels devront être présentés des observations
écrites. Elle peut également fixer la longueur maximale des mémoires.

La date de l’audience est immédiatement fixée et dans certaines circonstances, dans les cas d’extrême
urgence, la Cour de justice peut même supprimer la procédure écrite et seulement conserver la phase orale,
puis ensuite l’affaire est jugée par la Cour de justice.

Il s’agit d’une procédure assez rare et qui est entièrement maîtrisée par la Cour de justice.

§2 : Les effets des arrêts préjudiciels


A) L’effet obligatoire des arrêts préjudiciels
1) A l’égard de la juridiction de renvoi
L’arrêt préjudiciel s’impose au juge national à l’origine du renvoi, mais ce dernier dispose de la faculté de
saisir à nouveau la Cour d’une nouvelle question préjudicielle s’il rencontre des questions de compréhension
de l’arrêt préjudiciel.

Cependant, cette faculté d’interroger de nouveau la Cour de justice sur la même question ne saurait permettre
à la juridiction nationale de remettre en cause la validité de l’arrêt préjudiciel rendu par la Cour.

2) A l’égard des autres juridictions nationales

- S’agissant de l’arrêt en interprétation, ce dernier s’impose à toutes les juridictions nationales (aux
juridictions de tous les Etats membres). La Cour de justice à créer un précédent dont on doit tenir compte si une
question identique se pose.

- S’agissait de l’arrêt en appréciation de validité , cet arrêt s’impose à toutes les juridictions nationales.
Cependant, la Cour de justice accepte qu’une nouvelle juridiction la saisisse pour la même
appréciation en validité s’il subsistait de nouvelles questions.

3) A l’égard des institutions de L’UE et des Etats

La Cour de justice considère qu’un arrêt déclarant l’invalidité d’un acte de l’Union va lier l’institution dont il
émane ainsi que les autorités nationales.
Donc l’auteur de l’acte invalide doit prendre toutes les mesures permettant de remédier à cette invalidité.

Quant aux autorités nationales, elles doivent tirer toutes les conséquences dans leur ordre juridique de la
déclaration d’une telle invalidité.
Par exemple, ce serait modifier un acte de droit interne. Il faudra peut-être restituer une somme d’argent, …

B) L’effet dans le temps des arrêts préjudiciels

1) Les effets dans le temps des arrêts interprétatifs

Les arrêts interprétatifs ont un caractère rétroactif. Ca signifie que la norme de l’Union interprétée doit être
appliquée par le juge national, même à des rapports juridiques constitués avant l’arrêt statuant sur la demande
d’interprétation.

La Cour de justice a nuancé cette position puisqu’à titre exceptionnel, elle accepte de limiter cet effet
rétroactif si des considérations impérieuses le justifient, càd si cet effet rétroactif conduit à remettre en cause
cette situation juridique et instaurer de l’instabilité dans des rapports qui auraient établis de bonne foi.

2) Les effets dans le temps des arrêts de déclaration d’invalidité

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- En principe, également, cet arrêt a un effet rétroactif.

- Mais là encore la Cour de justice a été amenée à nuancer ce caractère rétroactif.

Effectivement, dans l’arrêt du 26 avril 1994, Roquette Frères elle estime que pour des raisons de sécurité
juridique, la Cour de justice peut être amenée, à titre exceptionnel et lorsque d’impérieuses
considérations le justifient, à déterminer les effets d’un acte de l’Union qu’elle déclare invalide que
pour l’avenir.

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