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3/21/22, 7:05 PM Les Fake News au prisme des théories sur les rumeurs et la propagande

Études de communication
langages, information, médiations

53 | 2019

Fake-News ! Pouvoirs et conflits autour de l’énonciation publique du « vrai »


Dossier

Les Fake News au prisme des


théories sur les rumeurs et la
propagande
Considering Fake News in Light of Previous Research on Rumor and Propaganda

Florian Dauphin
p. 15-32
https://doi.org/10.4000/edc.9132

Résumés

☝🍪
Français English
L’objectif de cet article est de montrer que si la notion de « fake news » apparaît révélatrice d’enjeux
sociaux démocratiques, journalistiques et juridiques, particulièrement à l’ère des réseaux sociaux
Ce numériques,
site utilise elle
desn’en
cookies
demeure etpas moins une notion limitée pour les Sciences Humaines et Sociales
vous donne le contrôle sur les recherches antérieures sur les rumeurs et la propagande. Il s’agit
si elle ne prend pas en compte
donc de pointer l’intérêt et les critiques de ces notions, en sociologie, en histoire, en philosophie et
ceux que vous souhaitez
en psychologie sociale pour comprendre la complexité du phénomène et les limites de la notion de «
fake newsactiver
».

We argue that while the notion of “fake news” can shed light on democratic, journalistic and legal
✓ Tout
issues, particularly in the era of social networks, it is of limited value as a concept for the humanities
accepter
and social sciences as long as previous research on rumor and propaganda is not taken into account.
In order to understand the complexity of the phenomenon of “fake news” and the limits of the
✗ Tout
notion, refuser
it remains essential to examine how rumor and propaganda have been studied in sociology,
history, philosophy and social psychology.

Personnaliser

Entrées
Politique de d’index
confidentialité
Mots-clés : fake news, fausses nouvelles, rumeurs, propagande, information, désinformation

https://journals.openedition.org/edc/9132 1/13
3/21/22, 7:05 PM Les Fake News au prisme des théories sur les rumeurs et la propagande
Keywords: fake news, rumor, propaganda, information, misinformation

Texte intégral

Introduction
1 L’expression « fake news » a été largement médiatisée par les journalistes suite à deux
faits politiques majeurs sur le plan mondial dont les résultats vont à l’encontre des
prévisions journalistiques : l’élection du Président des États-Unis Donald Trump en 2016
et le référendum pour le retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne : le « Brexit » la
même année. Cette expression qui se démocratise dans le débat public apparaît
particulièrement polysémique et confuse (Tandoc et al., 2018). Nous pouvons distinguer
quatre types d’usage de la notion  : un usage journalistique (professionnel), un usage du
sens commun, un usage politique et un usage scientifique. Pour les journalistes, face à la
méfiance, voire à la défiance de l’opinion publique envers les professionnels de
l’information1, les fake news apparaissent comme un moyen de rendre légitime leur
métier. Leur crédibilité dépend justement de leur capacité à démentir les «  fausses
nouvelles »2 et à révéler leur naissance ainsi que les intérêts politiques et/ou économiques
des désinformateurs par les techniques professionnelles de «  fact checking  ». Par la
dénonciation des fausses nouvelles, les journalistes jouent donc leur rôle d’experts de
l’information et peuvent rendre légitime leur savoir être (posture, éthique et déontologie),
leur savoir-faire (investigation : recherche des faits et des sources) et leur faire savoir face
à une proportion croissante d’individus qui s’informent via les réseaux sociaux
numériques (RSN) : principalement Facebook et Twitter3. Chez les journalistes, la notion
reste floue, souvent employée comme synonyme de « rumeurs » comme nous le verrons.
Pour le « grand public », le concept de « fake news » semble également confus, comme en
témoigne une enquête menée aux États-Unis par Monmouth University en 2018. En
France, des entretiens qualitatifs montrent que l’expression n’est pas connue de tous, elle
est parfois comprise comme une information humoristique provenant de sites satiriques
ou comme une information non vérifiée qui circule sur les RSN4. Alors que le vocable a été
employé pour la première fois en 2014 par le journaliste Craig Silverman dans un tweet à
l’encontre de Trump pour dénoncer une rumeur colportée durant sa campagne, c’est le
Président américain lui-même qui le popularise. Sa célèbre invective à l’encontre d’un
journaliste de la CNN « You are fake news ! » le 11 janvier 2017, montre un usage politique
☝🍪
de l’accusation de mensonge pour décrédibiliser les contradicteurs. Face au succès de la
notion, des chercheurs ont tenté de la définir et d’en comprendre les enjeux. Certains ont
Ce relativisé
site utilise
la des cookies
portée et nouveau phénomène (Sauvageau et al., 2018 ; Bourdin et
du supposé
vous donne2018).
Le Bras, le contrôle
Mais lasur
majorité des travaux ne rendent pas précisément compte des
ceux que vous souhaitez
études antérieures sur les rumeurs et la propagande qui nous semblent pourtant
activer
incontournables pour comprendre le développement des dites « fake news ».

✓ Tout accepter
1. Les fake news au prisme des rumeurs
✗ Tout refuser
2 Les fausses nouvelles ne représentent ni une rupture, ni une révolution par rapport aux
rumeurs. Les travaux sur les rumeurs remontent à plus d’un siècle  ; elles sont un enjeu
Personnaliser
politique et de recherche depuis l’apparition de la presse. Comme le rappelle Kapferer
(1987), la
Politique derumeur circulant de bouche à oreille constitue le plus vieux media du monde. La
confidentialité
transmission de la rumeur orale a été étudiée dès 1902 par William Stern qui a proposé un
protocole expérimental (Froissart, 2002, 62-68), mais c’est à la fin de la Seconde Guerre
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mondiale que la rumeur est devenue, plus que jamais, un enjeu scientifique. À cette
époque, les psycho-sociologues Allport et Postman (1945) réalisent une étude en
laboratoire et montrent les processus de transformation des messages (réduction,
accentuation, assimilation). Les expérimentations sur les rumeurs ont suscité de
nombreuses critiques (Bloch, 1999 ; Reumaux, 1996). Dès la démocratisation d’internet en
France, des recherches (Dauphin, 2002  ; Taïeb 2001) ont interrogé l’impact du nouveau
média sur la circulation des rumeurs, improprement appelées hoax5. À cette époque, il
s’agissait de rumeurs et de légendes urbaines colportées de façon massive par courrier
électronique, avec des variantes internationales. Mais cela ne constituait en rien une
révolution. Une typologie révélait que leur contenu était sensiblement le même  que les
rumeurs classiques et légendes urbaines transmises par le bouche à oreille, et les « chaînes
magiques  » (Rouquette, 1994) circulant antérieurement par courrier postal. La seule
nouveauté de contenu était les rumeurs liées à l’informatique et en particulier aux virus.
La «  rumeur électronique  » subissait moins de transformation par rapport à celles se
diffusant de bouche à oreille. Autre différence notable, elles étaient majoritairement créées
intentionnellement dans le but de désinformer, via de fausses sources officielles. Mais la
rumeur échangée par email est devenue aujourd’hui minoritaire par rapport aux rumeurs
qui s’échangent sur les RSN et par les messageries privées mobiles comme WhatsApp.
L’effet de la participation en ligne des acteurs dans la diffusion de contenus informatifs
(like, retweet, repost, commentaires) concourt probablement au sens que prend
aujourd’hui l’expression « fake news », associée à internet et principalement aux médias
sociaux. Dans ce contexte, le mode d’accès et de transmission de l’information évolue. Les
RSN favoriseraient «  l’entre soi  » (Pariser, 2011) et la «  polarisation  » (Sunstein, 2017).
Par ailleurs, les fake news s’inscriraient selon Bronner (2013) dans un dérèglement du
« marché cognitif » abondant et concurrentiel de l’information.

1.1. Fausses nouvelles ou rumeurs provoquées ?


3 Si l’expression « fake news » naît et se popularise lors de la campagne de Trump et lors
du Brexit, l’essor de « fausses nouvelles » en politique n’est pas nouveau. Pour prendre le
cas de la France, on peut noter qu’à chaque campagne présidentielle, de nombreuses
rumeurs apparaissent. Des bruits courent sur tel ou tel candidat. Déjà en 1974, Jacques
Chaban-Delmas, candidat plausible à l’élection présidentielle est cible de rumeurs sur les
circonstances de la mort de sa femme dans un accident de voiture, qui sont même relayées
par la presse. Plus récemment, durant le débat du second tour de 2017, Marine Le Pen fait

☝🍪
elle-même allusion à un compte offshore aux Bahamas qu’aurait son adversaire
Emmanuel Macron. Des journalistes du Monde affirment que la rumeur «  est apparue
Ce moins de deux
site utilise heures avant
des cookies et le débat, sur un espace du forum américain 4chan,
conservateurs pro-Trump
vous donne le contrôle sur de l’alt-right [expression pour qualifier l’extrême droite
américaine], et a été
ceux que vous souhaitez ensuite partagée par des journalistes de cette mouvance, avant d’être
activer
relayée dans la “fachosphère” française, mais aussi par des comptes pro-russes »6. Il s’agit
donc de ce que l’on qualifie d’une rumeur « provoquée » à dessein de nuire, ici au candidat
Macron. Les adversaires qui ont créé et ont relayé massivement cette rumeur sont donc
✓ Toutetaccepter
multiples la situation correspond à l’usage de la rumeur comme outil de « propagande
politique » (Ellul, 1990). Dans ce cas, l’expression « fausse nouvelle » apparaît comme un
✗ Toutderefuser
synonyme « rumeur provoquée » pour désigner l’intentionnalité d’un message faux. La
notion de fake news suggère une intentionnalité, c’est-à-dire une information créée dans
Personnaliser
le but de duper un public (un fake  : un faux qui ressemble à un vrai, un truquage). Les
fausses nouvelles peuvent provenir d’un groupe d’individus ou d’un seul individu, via des
Politique
médias de confidentialité
traditionnels ou numériques. L’intentionnalité va de pair avec la question des
intérêts. La volonté d’induire en erreur par une « infox » s’effectue dans le but d’en tirer

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un avantage en influençant l’opinion publique dans les domaines du politique (pour


changer le cours d’une élection par exemple), de l’économique («  pièges à clics  » ou
campagne anti-vaccin dans le but de vendre des livres par exemple, etc.), ou même du
prestige (par le nombre de lecteurs, de like et de relayeurs, de retweet)7.

1.2. Une fausse nouvelle peut-elle être spontanée ?


4 Si la «  rumeur spontanée  » (non intentionnelle) ne rentre pas stricto sensu dans la
catégorie des fake news, les théories sur les rumeurs montrent que la distinction entre les
«  rumeurs provoquées  » et les «  rumeurs spontanées  » ne s’avère pas si évidente. Cette
classification dépend pour une part de la possibilité de remonter à la source première de la
rumeur et donc de dévoiler l’intentionnalité et son caractère de duperie. Les rumeurs ont
la particularité de ne jamais mentionner explicitement leur source (mis à part les rumeurs
électroniques comme on l’a vu). Un individu ne propage pas une rumeur en la faisant
directement sienne. Ce sont toujours des « on dit », ou bien « l’ami d’un ami ». Jamais le
relayeur n’est témoin direct. Ainsi, dans un nombre important de rumeurs, il n’est pas
possible de remonter à la source première. C’est particulièrement le cas des légendes
urbaines (Renard, 1999) et de nombreuses rumeurs classiques comme par exemple la
rumeur du baccalauréat qui circule chaque année à propos de l’épreuve de philosophie, où
il suffirait de répondre d’une phrase à un sujet de type « Qu’est-ce que l’audace ? » pour
avoir 20/20. Pour convaincre de sa véracité, sans indiquer précisément sa source, la
rumeur joue sur la source de confiance, selon l’expression de «  source sûre  ». Dans la
majorité des cas de bouche à oreille, la source serait « l’ami d’un ami » (une connaissance
directe et proche de la personne à qui est arrivé l’histoire). Cette caractéristique typique
des rumeurs est si fréquente qu’elle a amené Campion-Vincent et Renard (1992) à utiliser
le sigle «  ADUA  » (l’ami d’un ami). L’oralité de la rumeur implique le narrateur dans
l’histoire (Rouquette, 1990). Enfin, la rumeur n’expose pas clairement sa source
empêchant ainsi son démenti. A l’inverse, la fake news annonce souvent sa source. C’est le
cas des fausses nouvelles lancées par l’ancien maire de Londres Boris Johnson avant le
référendum sur le Brexit8, et par Donald Trump durant sa campagne et depuis sa
présidence. Nous verrons que la propagande peut utiliser la rumeur précisément parce que
la source n’est pas explicite.
5 En principe, l’usage du vocable « fake news » vise à designer les rumeurs provoquées,
mais ce n’est pas nécessairement le cas. Pendant l’incendie de Notre Dame de Paris, dans
la nuit du 15 avril 2019, des rumeurs se propagent à toute vitesse, qualifiées par les

☝🍪
journalistes de « fake news ». Par exemple, un article du Parisien intitulé « Notre-Dame :
une fake news fait d’une statue et d’un pompier des “pyromanes” »9, du 16 avril, fait état
Ce des
site rumeurs
utilise des circulant
cookiessuret Twitter s’appuyant sur une photo d’origine inconnue sur
laquelle l’on pourrait
vous donne le contrôle sur apercevoir un individu contemplant le feu, juché sur la coursive de la
tour que
ceux de lavous
cathédrale (cf. Figure 1). L’Agence France-Presse va aussitôt démentir cette
souhaitez
rumeur  :activer
ce que l’on pourrait prendre pour un individu n’est autre qu’une statue. Le
« grand public » ne voulant pas croire à la thèse accidentelle, de fil en aiguille les rumeurs
et les théories du complot vont surgir : les fomentateurs sont tour à tour des gilets jaunes,
des✓terroristes
Tout accepter
islamistes, des hommes politiques10, etc. De nombreuses autre rumeurs
s’appuyant sur d’autres photos ou vidéos vont s’opposer à la version officielle de l’accident.
« Il ✗
n’yTout
pas de refuser
fumée sans feu » comme dit le proverbe, ou bien la question « à qui profite
le crime  ?  » permettent de comprendre le raisonnement de causalité. Mais la rumeur
Personnaliser
spontanée peut prendre un caractère de propagande lorsqu’elle est relayée par exemple
par le chef du parti « Debout la France », Dupont-Aignan dans le but de faire parler de lui
Politique
pendantde confidentialité
la campagne des élections européennes11.

Figure 1 : Photographie de l’incendie de Notre-Dame


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Source : Twitter – auteur d’origine inconnu12

6 Par ailleurs, dans sa définition, une fake news ne pourrait pas être non intentionnelle,
ce qui exclut l’apparition de fausse nouvelle spontanée. Ainsi, le faux serait le propre de la
manipulation et ne pourrait pas être une invention du sens commun. Ce présupposé
renvoie à une conception de la démocratie où le faux proviendrait nécessairement d’une
manipulation de l’opinion publique. Enfin, la distinction entre «  fausse nouvelle  »
(provoquée) et «  rumeurs spontanées  », soulève au final les mêmes problématiques que
l’adhésion aux croyances fausses. L’intentionnalité de la rumeur, incluant le mensonge (ou
fake news) n’empêche pas que pour fonctionner elle doit paraître plausible afin de se
propager. Dans cette forme de transmission, le colporteur ne pense a priori pas diffuser
un mensonge, il transmet une information qu’il pense vraie ou du moins qu’il ne considère
a priori pas comme fausse. Autrement dit, une rumeur provoquée par des individus doit
pour fonctionner avoir une part de véracité et de crédibilité. La fausse information peut
émaner d’individus ayant de «  bonnes raisons  » (Boudon, 1990, 1995) de croire à
l’information qu’ils diffusent.
7 Le caractère spontané d’une rumeur pose une question complexe. Les rumeurs peuvent
naître spontanément sans être orchestrées et conscientisées en tant que désinformation
dans le but d’agir sur l’opinion publique. C’est le cas des légendes urbaines – elles trouvent
un écho dans les représentations sociales préexistantes chez les individus qui les relaient.

☝🍪
Selon Fargette, « Les rumeurs spontanées naissent d’événements fortuits, mal interprétés
et déformés, ou purement imaginaires. Par son effet rassurant et explicatif, la rumeur
Ce répond à la des
site utilise perplexité
cookiesde et
la population  » (2007, 313). Il s’agit en somme de la création
vous donne le contrôle surCe qui est pertinent pour expliquer la naissance des rumeurs
d’une croyance collective.
spontanées
ceux que vouspeutsouhaitez
l’être dans le cas des rumeurs provoquées (et donc des fake news) pour
expliqueractiver
l’adhésion. Marc Bloch (1999, 48-49), l’un des premiers historiens à rendre
légitime l’étude de la rumeur dans sa discipline, emploie à ce titre l’expression de « fausse
nouvelle  » comme un synonyme de «  rumeur  », écrivant  : «  Une fausse nouvelle naît
✓ Tout
toujours deaccepter
représentations collectives qui préexistent à sa naissance  ». L’adhésion à la
rumeur spontanée ou provoquée pose de nombreux problèmes épistémologiques d’analyse
✗ Tout
similaires refuser des croyances aux fake news. Le « paradigme psychopathologique »
à l’analyse
(Aldrin, 2005), considère la rumeur comme anomique et s’inspire des travaux sur la foule
Personnaliser
(la contagion, l’irrationalité et l’inconscient collectif). Le «  paradigme transactionnel  »
(Aldrin, 2005) apparaît plus stimulant, dans la mesure où dans une perspective
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microsociologique, il s’intéresse à la rumeur comme un phénomène normal de
communication dans lequel les acteurs sont actifs et pas nécessairement crédules. Dans

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cette perspective, Shibutani (1966) considère que la rumeur n’est pas forcément l’objet de
croyance mais peut être un moyen de socialiser, de donner du sens collectivement à un
évènement et d’envisager des versions alternatives. De même, la propagation de rumeurs
peut s’effectuer dans le but de négocier sa place au sein d’un groupe (Elias et Scotson,
1997). A contrario, les rumeurs dites « négatrices » (Renard, 2006) qui nient la réalité de
faits avérés, peuvent susciter une pleine adhésion à la croyance en une vérité cachée,
propre aux théories du complot (Taïeb, 2010), où l’individu se sent dépositaire d’un secret,
d’une vérité contre la vérité officielle en proposant une nouvelle réalité/vérité. Ces
rumeurs négatrices apparaissent largement minoritaires  par rapport aux rumeurs dites
« affirmatives » qui témoignent de « faits imaginaires » (Rouquette, 1975, 1990).

1.3. Fausses nouvelles et rumeurs : véracité, réalité


et mensonge
8 Pour adhérer à une rumeur, elle doit paraître plausible. Il en va de même pour la fausse
nouvelle. Toutes les rumeurs, comme les fake news, n’atteignent pas une popularité,
seulement certaines rencontrent du succès et se propagent abondamment. Classiquement,
la rumeur a la particularité d’être une histoire racontée comme vraie, mais non vérifiée,
d’une source inconnue mais de confiance. Du latin rumor, le terme rumeur apparaît au
XIIIe siècle et sert à qualifier un « bruit » informel, une nouvelle qui se propage dont la
source est anonyme et la véracité est incertaine, mais qui semble crédible et qui est
présentée comme véridique. Contrairement à l’acception du sens commun, ce qui définit la
rumeur n’est pas la fausseté du contenu mais le fait que l’information va à l’encontre de
l’information officielle. Par exemple, la rumeur sur le cancer du Président François
Mitterrand circulant lors de son premier septennat s’est avérée vraie. Si une rumeur
devient vraie, elle perd son statut de rumeur et devient une information. Par conséquent,
le critère de vérité n’est pas pertinent pour définir une rumeur (Morin, 1982).
Généralement, l’impossibilité de vérifier une information ne veut pas forcément dire
qu’elle soit fausse, comme on peut le constater avec l’exemple du cancer de François
Mitterrand. L’expression de « fausse nouvelle » induit que l’information est délibérément
fausse, mais cela ne se vérifie pas toujours dans les usages qu’en font les journalistes qui
emploient régulièrement le vocable de fake news pour définir les rumeurs, comme on en a
donné un exemple sur les supposés incendiaires de Notre-Dame de Paris. L’expression de
fausse nouvelle insiste sur le caractère totalement faux d’une information. Dans cette
conception, l’absolutisme du faux existerait face à l’information idéale, l’absolutisme du
☝🍪
vrai que défendent les journalistes. Pourtant, la rumeur entretient un lien complexe avec
la réalité. Certaines rumeurs peuvent devenir des « prophéties auto-réalisatrices » au sens
Ce de
siteMerton
utilise(1953),
des cookies
c’est le et
cas par exemple de certaines rumeurs de virus informatiques
vous donne le
(Dauphin, contrôle
2002), maissurc’est aussi le cas de ce que Vidal-Naquet (2000) appelle la
ceux que vous
«  rumeur souhaitez
performative  »  : une rumeur qui se traduit dans les faits. Les infox peuvent
activer
s’avérer «  vraies  » et «  réelles  » dans les comportements, attitudes ou croyances des
individus qui les colportent. Or, le sens de «  fake  » caractérise d’emblée les fake news
comme fausses, ce qui semble limité et postule l’existence d’une vérité toujours connue.
✓ Tout accepter
Ainsi, suivant la perspective pragmatique, ce que l’on entend par vrai et faux s’avère plus
complexe.
✗ Tout refuser

2. Personnaliser
Les fake news au prisme de la
propagande
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2.1. Fake news : la propagande 2.0 en démocratie ?


9 Les discours sur les fake news, en plus de faire abstraction des nombreux apports
théoriques sur les rumeurs, font table rase des travaux historiques, psychosociologiques et
sociologiques sur la propagande qui là encore présentent des éclairages pertinents. Les
notions de «  rumeur  », de «  propagande  » et de «  fake news  » s’entrecroisent. À la
différence de la propagande, la rumeur peut être spontanée, mais elle peut être aussi
déclenchée et devenir propagande. Ainsi, comme le remarque Fargette (2007) « répandre
ou exploiter des rumeurs à des fins propagandistes est facilité par le fait qu’une rumeur
reste une information anonyme transmise oralement, dont on ne peut dire ni où, ni quand
elle est apparue  ». La rumeur peut être employée contre l’opposant afin de le diaboliser
par la calomnie. La notion de fake news s’avère complexe à définir et peu opératoire si elle
ne prend pas en compte les nombreuses questions similaires que se sont posées les
théoriciens de la propagande. L’étymologie du terme propagande nous enseigne qu’il
renvoie d’abord à la botanique (la bouture qui va devenir une nouvelle plante) avant de
s’employer dans le domaine religieux au sens de transmission – littéralement pour
propager la doctrine catholique. Enfin, le terme prend un nouveau sens politique durant la
Révolution française, en qualifiant les moyens d’influencer l’opinion publique. La
connotation du terme devient négative et cela particulièrement lors de la Seconde Guerre
mondiale. Les deux Guerres mondiales vont contribuer à l’usage scientifique du terme de
propagande et à une littérature abondante. Aux États-Unis dans les années 1920, on a
défini la propagande en insistant sur ses aspects psychologiques : « la propagande est une
manipulation de symboles psychologiques ayant des objectifs dont l’auditeur est
inconscient » (Ellul [1962] 1990, 7). Cette conception de la propagande est présente chez
Edward Bernays (1928), publicitaire et neveu de Freud, qui se servit des acquis de la
psychanalyse et de la psychologie des foules (Le Bon, 1895) pour développer la
propagande politique institutionnelle et celle des «  relations publiques  » a visée
commerciale. Dans la même lignée, Lippmann (1922) considère la propagande comme « la
fabrique du consentement  » en démocratie. C’est également le sens que lui donne plus
récemment Chomsky et Herman (1988). Par ailleurs, deux auteurs ont rencontré un vif
succès  : Lasswell et Tchakhotine. Harold Lasswell (1929) démontre qu’il existe aussi des
moyens de propagande avec des objectifs avoués. Serge Tchakhotine (1939), biologiste, qui
a eu un rôle actif dans la propagande, tente de formaliser les techniques dans une
conception behavioriste. Dans la perspective de Lasswell, la propagande est une arme qui
vise à être efficace et à «  maximiser le pouvoir  ». Poursuivant cette idée, Ellul affirme
qu’« une propagande inefficace n’est pas une propagande [...]. Et comme toute technique,
☝🍪
la propagande est soumise à la loi de l’efficacité  » (6). Cette caractéristique nous paraît
généralement similaire à la conception des fake news qui vise l’efficacité via des
Ce techniques
site utiliseafin
desde cookies et un pouvoir politique et/ou économique. Ainsi, Ellul pointe le
renforcer
vous
rôledonne le contrôle
que joue sur sur l’influence sociale et sur la construction de l’opinion
la technique
ceux que vous souhaitez
publique.
10 Inspiréeactiver
de Lasswell, une définition de la propagande proposée par l’Institute for
Propaganda Analysis13 fait consensus : « C’est l’expression d’opinion ou l’action effectuées
délibérément par des individus ou des groupes en vue d’influencer l’opinion ou l’action
✓ Tout accepter
d’autres individus ou groupes, avec référence à des fins prédéterminées et au moyen de
manipulations psychologiques  » (Ellul, 1990, 7). Cette définition qui a rencontré un vif
✗ Tout
succès refuser pour définir les fake news. Malgré la complexité d’une définition,
peut s’appliquer
Ellul tente de réhabiliter l’usage scientifique et la pertinence de l’étude de la propagande
dansPersonnaliser
les démocraties, car elle constitue « un objet qui existe et qui doit être délimité », qui
est un «  phénomène sociologique existant  » (8) même si son étude se heurte à des
Politique
obstacles.deIlconfidentialité
est instructif de considérer qu’on peut aujourd’hui se poser les mêmes
questions à propos des fake news. La première « incertitude » est « provoquée par un a

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3/21/22, 7:05 PM Les Fake News au prisme des théories sur les rumeurs et la propagande

priori moral ou politique  » (6). Le fait que l’opinion courante considère la propagande
comme un mal ne permet pas d’envisager son existence dans les démocraties – ce qui est
la thèse du philosophe : la propagande est consubstantiellement liée à l’information et à la
technique. Selon lui, en démocratie comme en dictature, les techniques de propagande
existent. Ainsi, « la propagande est dans le monde actuel une nécessité à laquelle il n’est
guère possible d’échapper » (11). Dans cette perspective, les analyses attribuant aux fake
news l’avènement de l’ère de la «  post-vérité  »14 (Keyes, 2004) nous semblent peu
pertinentes et sont symptomatiques d’une conception démocratique des sociétés au sein
desquels l’individu est pensé comme un être purement rationnel et indépendant.
Deuxième incertitude selon Ellul, «  la propagande consiste principalement dans la
diffusion de “bobards”, par le moyen de mensonge ». Si la notion de mensonge (de faux)
est au cœur des fake news, la propagande est plus large. En effet, Ellul  distingue deux
types de propagande, la « propagande politique », déjà ancienne et largement étudiée et la
«  propagande sociologique  », propre aux démocraties, que Troude-Chastenet (2006)
résume de la manière suivante :

« La première (celle des gouvernements, partis et groupes de pression) se distingue


de la seconde qui, moins visible, se rapproche de la socialisation, que l’on peut définir
elle-même comme “processus d’inculcation des normes et valeurs dominantes par
lequel une société intègre ses membres”. Ellul oppose le caractère direct, délibéré et
coercitif de la propagande politique (que l’on trouve en priorité dans les régimes
totalitaires) au caractère “plus vaste”, “plus incertain”, idéologique, “diffus”,
inconscient et spontané, de la propagande sociologique ».

11 La complexité du sens que donne le philosophe à la « propagande sociologique » nous


semble peu opératoire pour comprendre le phénomène des fake news. En revanche, à
l’instar de la propagande politique, les fake news peuvent avoir un caractère institutionnel
(Trump, le Brexit) et délibéré, qui vise à produire de l’action. Mais les fausses nouvelles
émanent-elles toujours d’une institution  ? Comme on l’a vu, elles peuvent naître d’une
photographie postée par un individu n’ayant pas forcément le but de désinformer. Malgré
les similitudes entre les notions de fake news et de propagande, on peut observer
plusieurs distinctions. Leur mode de propagation apparaît différent  : classiquement la
propagande est verticale (c’est le cas dans les dictatures), elle vient d’en haut pour
contaminer le «  peuple  », or les fausses nouvelles se transmettent davantage dans
l’horizontalité, dans l’interaction, comme la rumeur. Avec les RSN, la propagande peut
devenir horizontale, ou «  intérieure  » comme la qualifie Badouard (2017). Une autre
spécificité, liée à la précédente, apparaît significative  : la rumeur peut parfois s’opposer
aux puissants, comme le font les théories conspirationnistes, or la propagande sert
☝🍪
historiquement les intérêts des dominants. Enfin, concernant les canaux de transmission,
historiquement, la propagande s’effectue par les médias traditionnels (affichage, radio,
Ce presse,
site utilise destélévision),
cinéma, cookies etalors que l’usage du terme «  fake news  » s’applique presque
vous donne le contrôle sur circulant sur internet et les RSN.
exclusivement à l’information
ceux que vous souhaitez
activer
2.2. Relativiser l’effet des fake news
12
✓ Tout accepter
Malgré l’intérêt des études sur la propagande, elles confèrent une toute-puissance et un
caractère déterministe aux médias. En effet, les travaux sur la propagande s’inscrivent
dans✗leTout refuser
modèle dit des « effets directs » des médias qui agiraient comme une « seringue
hypodermique », selon l’expression de Lasswell, piquant les individus passifs et crédules.
KatzPersonnaliser
et Lazarsfeld (1955) ont largement contribué à relativiser cette conception en
proposant le paradigme des «  effets limités  ». Les craintes liées au fake news semblent
Politique de confidentialité
nous replonger dans une conception déterministe et toute-puissante des médias. Éric
Maigret (2015, 50) remarque que si «  la propagande existe bien dans l’intention de

https://journals.openedition.org/edc/9132 8/13
3/21/22, 7:05 PM Les Fake News au prisme des théories sur les rumeurs et la propagande

l’émetteur, qui désire noyer toute résistance  [...] elle ne permet pas de comprendre les
actes du récepteur qui dispose de capacité de fuite et de contradiction ». C’est tout l’enjeu
de la compréhension de la réception des fake news. Comme nous l’avons vu, les
motivations à diffuser des rumeurs sont nombreuses et ne signifient pas nécessairement
des changements d’attitude et de comportement chez les individus qui les propagent ou
ceux qui cliquent (retweet, like, tag...). Le numérique permet de retracer le succès du
partage de fake news sur les RSN mais cela n’induit pas nécessairement des effets
significatifs sur les croyances. Maigret (2015, 50) conclut en affirmant que «  Utilisé
souvent dans un sens très large qui en trahit le véritable sens – l’idée que les médias
manipulent les gens – le concept de propagande est en fait un concept limité, peu
opératoire en tant que tel ». Ainsi, « le mot [propagande] pourrait être réservé aux sociétés
totalitaires où il n’y pas de pluralisme ni même de pluralité des messages et aux situations
de contrôle extrême de la communication publique, par exemple les guerres. Mais, là
encore, la question de l’effet des médias est à nuancer » (Maigret, 2015, 50). En effet, le
terme de propagande fait davantage consensus dans les dictatures au sein desquelles
l’information est contrôlée par le pouvoir. La notion de fake news apparait dans les
démocraties pluralistes où l’information émane des médias publics et privés. Si les
objections à l’usage du terme de propagande nous semblent judicieuses, comment peut-on
qualifier la manipulation d’informations en démocratie, particulièrement avec le
développement du numérique  ? Les fake news remettent au goût du jour la propagande
contemporaine en démocratie quand le terme apparait délaissé. L’expression «  fausses
nouvelles », à l’image de la propagande, peut servir à qualifier une action délibérée ayant
un caractère institutionnel dans le but de manipuler l’opinion publique par des mensonges
ou de la désinformation15. De même, à l’instar de la propagande, les fausses nouvelles
visent l’efficacité et l’obtention ou le maintien du pouvoir par un ensemble de techniques,
comme ce fut le cas pour le Brexit et l’élection de Donald Trump. Néanmoins, inférer
qu’une propagande a fonctionné parce que les effets se sont produits n’exclut pas que la
communication a simplement fait écho à des représentations préexistantes (confusion de
l’effet et de la cause). De fait, à l’instar des critiques que l’on peut émettre à l’encontre des
théories sur la propagande, les fake news ne sont pas toutes-puissantes, quelles que soient
leurs propriétés technologiques. Enfin, à l’image de la propagande, les fake news peuvent
être retournées contre leur détracteur. C’est le cas de Trump accusant les médias de
diffuser des fausses nouvelles alors que le terme a d’abord été employé à son encontre.
Dans ce cas, il s’agit de relever une supposée vérité en pointant un supposé mensonge de
l’autre camp.

☝🍪
Conclusion
Ce site utilise des cookies et
13 vousCet
donne le n’a
article contrôle
pas la sur
prétention de faire un état de l’art exhaustif des travaux sur les
ceux que vous souhaitez
rumeurs et sur la propagande, mais il permet de relativiser la prétendue nouveauté des
fake news.activer
En occultant les travaux antérieurs et donc par son a-historicité conceptuelle,
l’expression de « fake news » apparaît polysémique, confuse, simpliste et peu opératoire.
Si l’unification d’une théorie sur les rumeurs n’est pas évidente (Froissart, 2002), il y a un
✓ Tout accepter
consensus relatif sur la définition du terme et les travaux apparaissent heuristiques.
Comme on l’a vu, l’histoire des rumeurs montre que les distinctions entre les rumeurs
✗ Tout et
spontanées refuser
provoquées, et entre vérité et fausseté, sont complexes alors que la
définition de la notion de fake news signifie exclusivement l’intentionnalité et la fausseté.
Personnaliser
De même, les théories sur les rumeurs permettent d’éviter certains présupposés. Le
paradigme transactionnel, s’opposant au paradigme « psychopathologique », relativise la
Politique de confidentialité
crédulité totale de l’individu contaminé par la fausse information et considère que la
rumeur n’est pas pathologique mais qu’elle est normale et donc intemporelle dans la

https://journals.openedition.org/edc/9132 9/13
3/21/22, 7:05 PM Les Fake News au prisme des théories sur les rumeurs et la propagande

communication. De fait, relayer une rumeur ne signifie pas nécessairement y adhérer


totalement (Delouvée, 2015). L’hypothèse de la crédulité totale de l’individu, souvent
associée aux fake news, est discutable. Enfin, les théories sur les rumeurs nous montrent
que les fausses croyances n’apparaissent pas ex nihilo.
14 Ainsi les travaux sur les rumeurs ont posé des questions stimulantes sur la production,
la réception et donc sur les modèles d’explication des croyances. Quant aux travaux sur la
propagande, et en particulier ceux d’Ellul, ils permettent de comprendre comment la
désinformation est inhérente aux démocraties. Mais c’est finalement les critiques des
travaux sur la propagande qui permettent de relativiser les préconçus associés aux fake
news. Comme la propagande autrefois, l’efficacité toute-puissante prétendue des fausses
nouvelles renvoie à un déterminisme technique et donc à nier la question de la réception.
15 Cet article ne prétend pas trancher la question du bien-fondé ou non du terme, puisque
l’expression de fake news est déjà entrée dans le vocable commun. Mais, hormis la
dimension davantage technicisée de la rumeur et de la propagande, rien n’apparaît
nouveau. Seul le rôle des nouvelles technologies dans la formation de l’opinion publique
(participation active des usagers, robots, algorithmes dans l’information, etc.) et les
réactions qu’elles produisent sur les différents acteurs concernés sont réellement
originaux et donc à étudier. Le dernier exemple en date est le rôle des « deepfakes » (que
l’on peut traduire par hypertrucages), une technique de synthèse fondée sur
l’«  intelligence artificielle  » pour truquer des vidéos, en faisant dire à quelqu’un des
phrases qu’il n’a pas prononcées, en reconstituant sa voix, ou en remplaçant un visage par
un autre. Face à l’ampleur de l’infox, les géants du Net (GAFAM) sont sommés d’agir en
vue des élections de 2020 aux États-Unis. Par conséquent, quel que soit le sens donné et
les critiques que l’on peut opposer à cette notion, force est de constater que la popularité
des fake news les rendent performatives  : elles mobilisent des acteurs (journalistes,
politiques, juristes, GAFAM, enseignants, etc.), des discours et des pratiques qu’il convient
d’étudier.

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Notes

https://journals.openedition.org/edc/9132 11/13
3/21/22, 7:05 PM Les Fake News au prisme des théories sur les rumeurs et la propagande
1 Selon le 32e  baromètre de la confiance accordée par les Français aux médias réalisé par Kantar,
en 2019, la crédibilité accordée aux médias diminue (50 % de confiance en la radio, 44 % à la presse
écrite, 38  % à la télévision et 25  % à internet). Cf.  https://www.la-
croix.com/Economie/Medias/Barometre-medias-journalistes-sommes-remettre-question-2019-01-
24-1200997667?from_univers=lacroix
2 Par commodité, nous traduirons l’expression de « fake news » par « fausses nouvelles », même s’il
est nécessaire de préciser que le terme existe depuis longtemps dans la langue française. Marc Bloch
(1999) l’emploie dès 1921 et le terme a également une existence juridique. Cf. article 27 de la « loi du
29 juillet 1881 » sur la presse, à l’époque où elle émerge conjointement à l’opinion publique (Tarde,
1989).
3 Ce constat est particulièrement avéré pour les jeunes de  15 à 34  ans. En France, ils sont 71  % à
privilégier les réseaux sociaux comme moyen d’information et seulement 14 % à consulter la presse
papier ou en ligne. Cf.  Médiamétrie, Les jeunes et l’information, Synthèse, Juillet 2018  :
http://www.culture.gouv.fr/Presse/Communiques-de-presse/Les-jeunes-et-l-information-une-
etude-du-ministere-de-la-Culture-vient-eclairer-les-comportements-des-jeunes-en-matiere-d-acces-
a-l-information
4 Des entretiens menés dans le cadre d’un cours d’initiation aux méthodes qualitatives sur les usages
sociaux de l’information par des étudiants de Licence  3 Sciences de l’éducation à l’Université de
Picardie Jules Verne (2018-2019) en attestent.
5 Le terme « hoax », que l’on peut traduire par « canular », n’apparaît pas pertinent dans la mesure
où il réduit l’ensemble des rumeurs qui circulent entre les internautes à des messages intentionnels
créés dans un but ludique.
6 Samuel Laurent et Adrien Sénécat, « Présidentielle 2017 : une campagne plombée par les rumeurs,
les intox et les fausses “informations”  », Le Monde, Les décodeurs, 5  mai  2017  :
https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2017/05/05/une-campagne-plombee-par-les-
rumeurs-et-les-fausses-informations_5122623_4355770.html
7 On constate ici un paradoxe : plus l’information est relayée, plus elle semble vraie. Le phénomène
d’influence normative prend le pas sur la recherche de la vérité. La psychologie sociale montre que
face à la complexité du traitement de l’information, croire en la majorité paraît plus fiable et plus
rentable.
8 Boris Johnson, qui a mené à bien la campagne «  Vote Leave  » (pour la sortie de l’UE) lors du
référendum de 2016 sur le Brexit, a répété à maintes reprises que la contribution hebdomadaire du
Royaume-Uni à l’UE était de 350  millions de livres et que cette somme pouvait être utilisée pour
financer le NHS (équivalent britannique de la Sécurité sociale). Le message a été placardé sur les bus
de campagne de « Vote Leave » faisant le tour du pays.
9 http://www.leparisien.fr/faits-divers/notre-dame-une-fake-news-fait-d-une-statue-et-d-un-
pompier-des-pyromanes-16-04-2019-8054823.php
10 La thèse de l’islamisme est largement reprise. Suite à la photo citée précédemment, un internaute
demande qui est cet homme en djellaba. L’accusation des islamistes ira jusqu’aux États-Unis où Alex
Jones, influenceur complotiste de l’extrême droite américaine, pense que l’incendie de Notre-Dame
de Paris est un acte de terrorisme islamique. Certains gilets jaunes accusent le Président Macron,
l’un d’entre eux poste sur Facebook : « Un jour de bilan de grand débat... le hasard fait décidément
bien les choses... ». Enfin, les gilets jaunes sont également accusés, à la suite d’une vidéo montrant
☝🍪
des individus avec des gilets jaunes pendant l’incendie.
11 Il déclare  : «  dans un pays comme le nôtre, où il y a plus de 1000 incidents ou actes de
Ce malveillance
site utilise anti-chrétiens
des cookiesqui etsont cachés volontairement [...], c’est le devoir d’un homme politique
vous donne
de poser unele contrôleCf. l’article
question ». sur de Leia Hoarau et Benjamin Sportouch, « Notre-Dame : Nicolas
Dupont-Aignan
ceux continue de s’interroger sur l’hypothèse d’un attentat  », 21/04/2019,
que vous souhaitez
https://www.rtl.fr/actu/politique/notre-dame-nicolas-dupont-aignan-a-un-doute-sur-l-origine-de-
activer
l-incendie-7797475340
12 http://www.leparisien.fr/faits-divers/notre-dame-une-fake-news-fait-d-une-statue-et-d-un-
pompier-des-pyromanes-16-04-2019-8054823.php
✓ Tout accepter
13 Une organisation américaine à but non lucratif créée en 1937 dans le but d’« apprendre aux gens
comment penser plutôt que quoi penser  ». Malgré le succès de cet institut, il dut suspendre ses
✗ Tout
opérations carrefuser
« [il] fut placé devant un dilemme : en plus d’analyser la propagande de l’ennemi, il
aurait dû, afin d’être objectif, étudier également la propagande américaine, et du même coup lui
faire perdre de son efficacité en révélant ses secrets aux adversaires des États-Unis » (Augé, 2007,
11). Personnaliser
14 Le terme de « post-truth » fait son entrée dans le Oxford Dictionary en 2016. Il apparaît à la suite
Politique de confidentialité
des attentats du 11 septembre 2001 et devient populaire en même temps que l’expression de fake
news.

https://journals.openedition.org/edc/9132 12/13
3/21/22, 7:05 PM Les Fake News au prisme des théories sur les rumeurs et la propagande
15 Augé distingue cependant la propagande de la désinformation : « La désinformation emploie des
informations délibérément fausses, alors que la propagande joue sur l’apparence de
l’information  [...]. En fonction de ses objectifs, la désinformation présente donc  : une information
fausse comme vraie ; une information vraie comme fausse ; une partie d’information vraie comme
une totalité indépendante et vraie pour elle-même » (2007, 17-18).

Table des illustrations


Titre Figure 1 : Photographie de l’incendie de Notre-Dame
Crédits Source : Twitter – auteur d’origine inconnu12
URL http://journals.openedition.org/edc/docannexe/image/9132/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 75k

Pour citer cet article


Référence papier
Florian Dauphin, « Les Fake News au prisme des théories sur les rumeurs et la
propagande », Études de communication, 53 | 2019, 15-32.

Référence électronique
Florian Dauphin, « Les Fake News au prisme des théories sur les rumeurs et la
propagande », Études de communication [En ligne], 53 | 2019, mis en ligne le 01 janvier 2022,
consulté le 15 mars 2022. URL : http://journals.openedition.org/edc/9132 ; DOI :
https://doi.org/10.4000/edc.9132

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de Picardie Jules Verne Laboratoire Habiter le Monde (EA 4287)

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