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Bulletin de la Société Botanique de France

ISSN: 0037-8941 (Print) (Online) Journal homepage: https://www.tandfonline.com/loi/tabg17

La « paroi spéciale » de l'oosphère d'une


Ptéridophyte; nature, activité et rôle possible

Bernard Vaudois & Yves Tourte

To cite this article: Bernard Vaudois & Yves Tourte (1976) La « paroi spéciale » de l'oosphère
d'une Ptéridophyte; nature, activité et rôle possible, Bulletin de la Société Botanique de France,
123:sup1, 81-88, DOI: 10.1080/00378941.1976.10839388

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Soc. bot. Fr., Coll. Sécrét. végét., 1976, Sl-!JO.

La «paroi spéciale» de l'oosphère d'une Ptéridophyte


nature, activité et rôle possible

PAR Bernard VAUDOIS ET Yves TOURTE


Université Pierre et 1'v!arie Curie, U.E.R. 59,
Laboratoire de Hiogloie llé!félale ll 0 :;,
9, quai St-Uernard, Bât. C, 7:)230 Paris Cedex 05

Résumé. - Au cours de la maturation de l'oosphère, chez certaines Ptéridophytes,


il apparaît une structure particulière d'origine probablement golgienne, qui forme un
revêtement continu à sa surface. Ce revêtement se révèle hétérogène tant par sa nature
chimique (glucides, lipides) que par son aspect alvéolé. Il jouerait un rôle aussi bien dans
le transfert et la sélection de substances variées, que dans l'isolement physiologique du
gamète et que, lors de la fécondation, dans le maintien de la spéciation ct de la monos-
permie.
II s'agit, en fait, d'une structure originale n'étant ni tout à fait une membrane ni
tout à fait une paroi, mais s'apparentant plutôt à un « glycocalix, exceptionnellement
développé.

Summary. - During oogcnesis, in sorne Pteridophyta, lherc appears a particular


structure probably originating from the Golgi apparatus, which makes a t•onlinuous coat
on the surface of the female reproductive cell. This coat is heterogeneous hoth hecause
of ils chemical nature and its pittcd aspect. It is supposee! lo play a part in the transfcr
and selection of sorne substances as weil as in the physiological isolation of the gamete
and also during fertilization, in the maintenance of the spcciation and of the monospermy.
In fact, it is an original structure neithcr exaclly a membrane or a ccii wall, but rather
an cxceptionally weil devcloped " glycocalix "·

*
* *

INTRODt:CTION

Cne particulat"ité de l'oophère, chez certaines Ptéridophytes, est de possé-


der à sa périphérie une " enveloppe » de plus que toutes les autres cellules,
qu'elles appartiennent au sporophyte ou au gamétophyte. Ce gamète possède,
en effet, une période de maturation précédant son éventuelle fécondation ou
sa dégénérescence, au cours de laquelle apparaît, entre le plasmalemme et le
cadre pectocellulosiquc, une structure particulière qui isole totalement la cel-
lule reproductrice müre de toutes les autres ct-llules prothallienncs, au fond
de la cavité archégoniale.
Cette structure est si fine qu'elle n'a pu être étudiée qu'en microscopie élec-
tronique, même si son existence avait déjà été décelée par DE MAG<>IO dès
1\161 16] en microscopie photonique. Elle se présente sous la forme d'une couche
continue, finement granuleuse, de 40 à 50 mn d'épaisseur en moyenne (Pl. II,
82 SOCIÉTÉ BOTANIQUE DE FRANCE

fig a et c). Cependant, elle est considérablement plus épaisse dans la partie
faisant face à la cellule ventrale (Pl. II, fig. a et b ). Elle est dense aux électrons
et creusée d'alvéoles disposés sans régularité ct au centre desquels sc trouve
un amas granuleux globulaire que des fibrilles enchevêtrées relient au bord de
la cavité (Pl. II, fig. d).
Bien que plusieurs publications lui aient été partiellement [3] ou entière-
ment [4, 5] consacrées, on ignore encore beaucoup de sa nature, de son origine
et du rôle qu'elle peut jouer, en particulier lors de la fécondation. Nous nous
proposons donc de faire, ici, le bilan des connaissances actuelles qui concernent
cette structure particulière, en envisageant successivement ces trois points.

MATÉHIEL ET TECHNIQUES

Des spores de Pleridium aquilinum sont mises à germer sur un milieu de


culture solide composé de liquide de Knop additionné de son volume d'eau,
de quelques gouttes de solution de Berthelot et de 1,25% de gélose. Les pro-
thalles âgés de 30 à 45 jours sont fixés au glutaraldéhyde tamponné à la pipé-
razine [19] ct postosmiés dans une solution de tétroxyde d'osmium à 2%. Après
déshydratation les prothalles sont inclus dans de la résine Durcupan ACM et
dans le mélange araldite-epon, selon MoLLENHAUER [15]. Les archégones sont
repérés à l'aide de la loupe binoculaire ct aussi grâce à des coupes scmi-fines
pratiquées périodiquement. Les coupes ultra-fines recueillies sur grille de cui-
\Te sont contrastées à l'acétate d'uranyle et à l'acétate de plomb selon REYNOL-
DS 117]. Celles qui sont destinées à la détection globale des glucides [21] sont
recueillies sur grilles en or. Les témoins ont été obtenus par flottage sur une
solution de peroxyde d'hydrogène à 20 volumes pendant 30 mn.
Celles destinées aux différentes digestions enzymatiques, recueillies de la
même façon, sont blanchies par traitement au peroxyde d'hydrogène à 20
volumes pendant 30 mn.
Les extractions enzymatiques ont été réalisées à l'aide de lipase, pronase,
protéase, pepsine pectinase et amylases.
La lipase (Merck) provient de pancréas d'origine non précisée. Elle a été
employée à raison de 7,5 mg pour 0,5 ml de tampon acide chlorhydrique-borate
de sodium à pH 8,9, à 30 oc pendant 4 h.
La pronase (Merck) a été utilisée selon la méthode de MoNNERON ct BERN-
HARDT [16] à raison de 0,1% à 40 °C pendant 1 h.
La pepsine et la protéase (NBC) ont été utilisées à 0,5% dans l'eau distillée
(pH 7,4) pendant 1 h à 38 °C.
La pectinase (NBC) et les amylases (Sigma) ont été utilisées sur des frag-
ments immergés dans des solutions à 0,2% dans un tampon acétate à pH 4,2,
à 37 oc, pendant des temps variant de 18 à 24 h.

RÉSULTATS

J - APPROCHE DE LA NATURE CIIDIIQUE

La découverte de cette "membrane , supplémentaire entourant l'oosphère


et le jeune embryon a amené tout naturellement les chercheurs à s'interroger
13. VAUDOIS ET COLL. 83

sur sa nature chimique. En effet, elle joue un rôle de barrière sélective comme
en témoignent les deux observations suivantes :
- d'une part, BELL [2] rapporte l'impossibilité, pour certains nucléotides,
de pénétrer librement dans les embryons de Pteridium aquilinum ;
--- d'autre part, CAVE et BELL [51 ont remarqué que l'apparition de cette
m.:-mbrane était contemporaine d'un brusque déclin de l'aptitude de l'œuf à
incorporer des nucléosides radioactifs et des acides aminés.
Il apparaît donc nécessaire de rechercher les différents composés carbonés
qui entrent dans la composition de cette" membrane "·
- les amylases [23] se sont révélées sans action, montrant par là l'absence
d'amylose et d'amylopectine (polyholosides).
---- les tentatives de digestion par la pectinase [23] se sont révélées égale-
ment négatives (Pl. II, fig. g), ce qui induit à conclure qu'il n'existe pas, dans
crtte membrane, de molécules du type des pectines (polyholosides).
- la réaction de HOTCHKISS-MAC MAXUS (PAS) essayée par CAVE et BELL
[5] s'est soldée négativement, confirmant pour eux l'absence de polyholosides.
- la présence de callose (polyholoside) a également été recherchée par
CAVE et BELL [5] grâce à la fluorescence sous l'influence de bleu d'aniline. Les
résultats qu'ils observèrent furent quelque peu particuliers puisque la cellule
du canal du ventre donna une fluorescence légèrement diffuse et que la plus
forte fluorescence vint du cytoplasme même de l'oosphère ct non de la " mem-
brane n spéciale. Ils attribuent cette fluorescence à une complexion du colorant
avec les protéines et concluent qu'il n'y a pas de preuves de l'existence de
callose dans cette " membrane "·
Cette conclusion mérite d'être discutée à la lumière des travaux de GonsKA-
BnYLASS [11, 12]. Cet auü•ur nous apprend que l'individualisation des cellules
sexuelles mâles ct femelles passe toujours par un stade à callose chez les Angios-
permes, les Gymnospermes, les Ptéridophytes et les Bryophytes ; il donne mê-
me des figures montrant les cellules du canal, la cellule ventrale et l'oosphère
entourées d'une couche de callose détectée au bleu de résorcine et par la
fluorescence au bleu d'aniline chez Adiantum cuneatum. Cependant, il ne
fait aucune allusion à une " membrane "• mais il est vrai qu'il utilise le micros-
cope photonique. Il est donc possible que la "membrane n spéciale comporte
au moins un peu de callose et que ce soit elle que GonsKA-BRYLASS montre
entourant complètement l'oosphère. Ce stade à callose des cellules sexuelles
est transitoire et disparaît avec l'ouverture de l'archégone; or CAVE et BELL
[5] ne précisent pas les stades de maturation étudiés. Peut-être ont-ils fait
leurs observations juste après l'ouverture du col et la fluorescence serait
due à des produits diffusibles issus de la dégradation de la callose et encore
assez proches d'elle pour donner une certaine fluorescence.
L'existence de la callose dans un matériel voisin ajoutée au fait que ce
polyholoside typique présente une réaction entièrement négative aux tests de
type PATAg [18], par suite de l'absence de liaisons vic-glycol (1-:~), justifie-
raient donc une nouvelle tentative de mise en évidence d'un polyholoside aussi
particulier.
Cependant, malgré ces différents résultats qui ne permettent guère d'augu-
rer de la présence de polyholosides bien définis, des tests de détection globale
de sucres polymérisés, conduits par nous, se sont avérés nettement positifs
84 SOCIÉTÉ BOTANIQUE DE FRANCE

(Pl. J, fig. a et c) par comparaison avec des témoins n'ayant pas subi l'hydro-
lyse à l'acide periodique (Pl. 1, fig. b ct d).
L'acétolysc contrôlée selon ERDTMANN [10] détruit le cytoplasme, mais n'a
aucune action sur la membrane spéciale. Ce traitement, d'après les auteurs
précités, élimine communément les protéines et les polyholosides tout en respec-
tant notamment la sporopollénine, la lignine, la subérine et la cutine. Ils ne
retrouvent cependant pas la fluorescence jaune verdâtre de la sporopolléninc.
Le mode d'apparition de la "membrane n spéciale à l'extérieur du plasmalem-
me, à la manière d'un exsudat, s'oppose à celui de la lignine qui se dépose à
partir de la lamelle moyenne et aucun test classique de la lignine n'est positif.
La membrane spéciale ne présente pas, non plus, la brillante autofluorescence
de la subérine et il est peu probable enfin qu'il y ait de la cutine [5].
Il est donc possible de conclure que des polyholosides, de nature encore
insuffisamment précisée, entrent dans la composition permanente de cette
" membrane , et que pourraient s'y ajouter, de façon transitoire, des dépôts
de callose.
Toutefois, cela n'exclut pas la présence d'autres catégories de substances
carbonées; c'est pourquoi nous avons élargi nos recherches aux protides et
aux lipides.
Les digestions par la pro nase, la pepsine et la protéase [ 1, 24] sont également
négatives, De même, selon CAvE et BELL [5] la ribonucléase est sans action.
Il ne reste plus à envisager que l'éventualité d'une composition lipidique
ou Iipoprotéiquc. C'est ce qu'avaient déjà présumé BELL et MüHLETIIALER
dès 1962 [4] rien qu'en constatant sa densité aux électrons après fixation au
permanganate de potassium et coloration à l'acétate d'uranyle.
De leur côté, CAVE et BELL [5] en utilisant Je noir Soudan B qui décèle les
lipides et les phospholipides ont obtenu une réaction franchement positive
leur permettant de conclure à la présence des lipides dans cette structure.
Aussi nous a-t-il paru très utile de rechercher la localisation fine des lipides
qui participent à l'architecture de cette " membrane n en utilisant, au niveau
des infra-structures, des digestions par une lipase.
Sur une électronographie d'un témoin, la substance propre de la " membra-
ne n apparaît comme une juxtaposition de points sombres au sein d'une matrix
moins opaque aux électrons, et les alvéoles signalés plus haut renferment, le
plus souvent, une sphérule qui apparaît formée de grains d'un noir intense
noyés dans une matrix plus grise (Pl. II, fig. d).
Les coupes qui ont flotté 4 h sur la lipase montrent une coloration nette-
ment moins intense de la membrane elle-même (Pl. II, fig. e et f) (matrix et
points) s'accompagnant d'une perte de la matrix grise des sphérules des alvéo-
les, alors que les grains noir intense constituant chaque sphérule subsistent,
à peine atténués. Des zones diffuses, moins attaquées par la lipase existent,
de place en place, ct offrent à l'observation un net rappel des coupes témoin.
Sur ces coupes digérées on note une forte atténuation du plasmalemme ; on
note aussi, en de nombreux endroits, que la partie externe de la " membrane n
est fort diffuse. Ces différences d'aspect entre les coupes digérées ct les coupes
non digérées ne devant rien au séjour dans le tampon seul, nous pouvons en
conclure que les deux composants de la membrane elle-même (granules et
matrix) ainsi que la matrix des sphérules logées dans les alvéoles sont suscep-
tibles d'être attaqués par la lipase ct révèlent, par là même, une teneur appré-
D. VAUDOIS ET COLL. 85

ciablc en lipides. Au contraire, les granules des sphérules se montrent infini-


ment plus réfractaires et ne doivent renfermer que fort peu de lipides.
Ne pouvant contrôler le degré de pureté de l'enzyme utilisée, il est néces-
saire que les résultats obtenus soient soumis à critique. Étant extraite du pan-
créas, la lipase que nous avons utilisée peut présenter au moins des traces
d'amylase ct de trypsine qui auraient donc pu attaquer de l'amidon aussi bien
que des protéines ou des polypeptides. Les expériences négatives en matière
d'amylases et de protéases, que nos devanciers ont conduites par d'autres pro-
cédés, nous permettent de n'attribuer nos observations qu'à la digestion des
seuls lipides. Les résultats que nous avons acquis nous permettent donc non
seulement de confirmer ceux de CAvE et BELL [5] mais encore d'apporter des
précisions nouvelles sur l'existence de polyholosides et sur la répartition de
la fraction lipidique sensible à l'action de la lipase.

II - ÜRIGI::-;"E

L'oosphère se comporte en cellule sécrétrice de mucilage durant toute sa


maturation même si, quantativcment, cette sécrétion est beaucoup plus faible
que celle des autres cellules de la rangée axiale. D'ailleurs, si le développement
du réticulum endoplasmique est important, l'appareil de Golgi est relativement
discret ct le nombre de vésicules qu'il émet est sans rapport avec cc qui sc
passe dans les cellules du canal. Cependant l'activité sécrétrice y est plus com-
plexe ct plus diversifiée au début de la phase de maturation, puisque, en plus
du mucilage, est sécrétée cette " paroi » spéciale. L'apparition de celle-ci corres-
pond à une accumulation de substance opaque aux électrons à l'extérieur du
plasmalemme dont elle suit fidèlement la sinuosité. Il se forme ainsi, au cours
de la maturation, un revêtement continu dont l'épaisseur peut atteindre 40
à 50 mn. Ce n'est que plus tardivement que cette nouvelle enveloppe s'épaissit
de façon importante dans la partie faisant face à la cellule ventrale. Son appa-
rition coïncide avec l'apparition de certaines catégories de vésicules de petite
taille, dont le contenu est particulièrement dense et qui viennent se déverser,
à la suite d'une exocytose, à la surface de l'oosphère (Pl. II, fig. f). Ces vésicules
auraient, selon les uns une origine golgienne [24] tandis que, pour d'autres,
elles résulteraient de la destruction autophagique de certains plastes et mito-
chondries [3, 5, 20]. Cependant, cette dernière hypothèse a été réfutée à plu-
sieurs reprises [13, 2:-J, 24]. Quelle que soit la nature des vésicules, l'origine de
la " membrane » apparaît comme interne à la cellule, telle une sécrétion, mais
n'exclut pas pour autant l'adjonction de substances provenant de la "phy-
toglée " du col archégonial.

III - RÔLE

Le rôle de cette structure particulière est encore mal élucidé et reste, par
conséquent, essentiellement au stade des hypothèses. Il convient toutefois de
remarquer que sa présence au moment de la fécondation laisse présager de
son intervention dans le bon déroulement de cette étape fondamentale du
cycle vital.
86 SOCI~T~ BOTANIQUE DE FRANCE

Parmi les rôles éventuels qui nous paraissent susceptibles d'être retenus,
nous citerons :

A. L'isolement physiologique du gamète.

Il est certain que, morphologiquement, cette structure isole l'oosphère des


cellules de l'enveloppe archégoniale. Il est assurément difficile de juger de son
incidence sur les échanges physiologiques que ce gamète peut entretenir avec
son environnement. Malgré tout, ces échanges ont depuis longtemps été consi-
dérés comme faibles ou nuls [27] et le microscope électronique apporte deux
arguments importants pour étayer ce point de vue:
--- la structure particulière en nappes présentée parfois dans l'oosphère par
le réticulum endoplasmique [9, 25], structure qui ne se retrouve que dans des
cellules en vie ralentie par le froid [7, 8] ;
--- l'observation des "complexes mitochondriaux" [24] constitués de mito-
chondries discoïdes empilées qui caractérisent les tissus dont l'activité n'spi-
ratoire est perturbée [14].
On peut encore y ajouter deux observations rapportant que, d'une part, les
nucléotides ne diffusent pas librement dans les embryons encore entourés de
la" membrane spéciale » [2] et que, d'autre part, l'apparition de la même" mem-
brane spéciale» coïncide avec un net déclin de l'aptitude de l'œuf à incorporer
des nucléotides radioactifs ct des acides aminés [4].

B. Transfert de substances el leur éventuelle sélection.

Cne activité de transport de produits figurés peut être déduite d'observa-


tions réalisées dans la partie la plus épaisse ct, en particulier sur les coupes
tangentielles, là où cette paroi apparaît fortement alvéolée. L'examen de nom-
breux clichés montre une identité d'apparence et une continuité entre le conte-
nu des alvéoles, le milieu externe ct le cytoplasme cortical de l'œuf (Pl. Il,
fig. h et i). Cette continuité apparente suggère des transferts de matière entre
le milieu externe ct le cytoplasme de l'œuf à travers cette paroi spéciale, même
s'il est parfois difficile de préciser le sens dans lequel sc font les échanges tout
au long de la maturation du gamète.

C. Rôle de celte structure lors de la fécondation.

Certaines observations rendent légitime d'accorder à cette structure un


rôle particulier dans la fusion gamétique [5]. A cet égard, nous retiendrons
les trois points essentirls suivants :
- la pénétration du spermatozoïde fécondant se fait toujours au niveau
où cette paroi est particulièrement épaisse ct alvéolée. Elle ne semble offrir
aucune résistance à la pénétration du spermatozoïde, contrairement au plasma-
lemme [22]. Cependant aucun des nombreux autres spermatozoïdes présents
dans la cavité archégoniale n'attaque cette paroi en un quelconque autre point.
- dès la pénétration du spermatozoïde fécondant, un second spermato-
zoïde s'insère dans l'ouverture ainsi faite mais s'y trouve rapidement bloqué.
Cc processus semble être responsable de la monospermie toujours constatée
dans les espèces étudiées.
B. VAUDOIS ET COLL. 87

- dès la fusion des deux gamètes, tous les spermatozoïdes de la cavité


archégoniale en contact avec cette " paroi » spéciale dégènèrent très rapide-
ment.
Ainsi, bien que l'apparition de cette structure précède l'insémination, on
ne peut manquer de la rapprocher de la " membrane de fécondation " qui entou-
re l'œuf chez de nombreuses espèces animales et dont le mode de formation
ct le rôle présentent certaines analogies.

CONCLUSION

Cette formation, qui apparalt au cours de la maturation de l'oosphère ct


qui isole totalement cette cellule reproductrice de son environnement, se révèle
tout à fait particulière à bien des titres :
- d'abord, par sa position, puisqu'elle s'insère entre le plasmalemme et
le cadre pecto-cellulosique.
- ensuite, par le fait qu'elle est peu répandue dans le Règne végétal où
elle semble précisément limitée à certaines Ptéridophytes seulement. Par exem-
ple, elle n'existe pas chez les Hydroptéridales [26].
- de plus, sa structure se révèle hétérogène dans l'espace tant par sa nature
chimique (on y trouve des lipides à côté des glucides) que par son aspect alvéo-
lé ; ct elle est peut-être aussi hétérogène dans le temps du fait de la présence
transitoire possible de callose.
-- enfin par le rôle qu'elle pourrait jouer, en particulier dans la féconda-
tion.
En fait, s'agit-il d'une " membrane spéciale » comme la désignent certains
auteurs [3, 4, 5] et comme semblerait le justifier le rôle de barrière et de trans-
port plus ou moins sélectif qu'elle parait exercer? Ou bien s'agit-il d'une sim-
ple " paroi " paraplasmique, comme le suggère son apparition à la manière d'un
exsudat '? Elle nous apparaît plutôt l'équivalent d'un "glycocalix » que l'on
déeoU\Te de plus en plus faire partie du revêtement habituel des cellules végé-
tales mais qui serait, ici, exceptionnellement développé.

BIBI.IOGHAPJIIE

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EXPLICATION DES PLANCHES

PLANCHE l

Fig. a. - Glularaldéhyde, osmium, PATAg. Oosphère du Pleridium aquilinum: "mem-


brane spéciale " (flèche) réagissant positivement, el située entre le plasmalemme ct
la paroi pecto-cellulosique (P.).
Fig. b . - Glutaraldéhyde, osmium, I-1 2 0 2 , TAg. Témoin (l'acide periodique a été remplacé
par H,O,) : la "membrane spéciale , est à peine visible (flèche).
Fig. c. - Glutaraldéhyde, osmium, PATAg. Détail de la membrane spéciale (flèche)
d'épaisseur variable, et qui montre une structure hétérogène comprenant une quantité
appréciable de polyholosides.
Fig. cl. - Glutaraldéhyde, osmium, H,O, TAg. Témoin correspondant au même stade
de maturation que la fig. c. La "membrane spéciale" (flèche) présente toutefois un
contraste différent de celui de la paroi pecto-cellulosique.

PLANCHE II
(Réaction de PATAg)

Fig. a . - Vue partielle de la cellule ventrale (CV) en cours de sécrétion de mucilage (mud
et de l'oosphère bordée par la" membrane spéciale "(flèche). P: paroi peclo-cellulosique.
Fig. b.- Détail de la« membrane spéciale , dans la partie faisant face à la cellule ventrale.
Elle est relativement épaisse.
Fig. e. - Détail de la "membrane spéciale, dans la partie distale, là où elle apparaît
beaucoup plus fine.
Fig. d.- Détail, sur coupe tangentielle, des alvéoles de la "membrane spéciale,, montrant
au centre de ceux-ci un amas granulaire relié au bord de la cavité par des fibrilles
enchevêtrées.
Fig. e et f . - La digestion par la lipase montre la sensibilité de certaines zones de la« mem-
brane spéciale " à cette enzyme, et une résistance des amas granulaires.
Fig. g. - Digestion par la pectinase montrant une résistance de la «membrane spéciale"
à cette enzyme, contrairement au mucilage (mue) environnant.
Fig. h et i. - Certaines images montrent une possible réabsorption èe substances par le
cytoplasme de l'oosphère (flèches).
Fig. j. - Origine de la "membrane spéciale , à partir de certaines catégories de vésicules
golgiennes.
J'I.ASCIII-: J

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