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To cite this article: Bernard Vaudois & Yves Tourte (1976) La « paroi spéciale » de l'oosphère
d'une Ptéridophyte; nature, activité et rôle possible, Bulletin de la Société Botanique de France,
123:sup1, 81-88, DOI: 10.1080/00378941.1976.10839388
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INTRODt:CTION
fig a et c). Cependant, elle est considérablement plus épaisse dans la partie
faisant face à la cellule ventrale (Pl. II, fig. a et b ). Elle est dense aux électrons
et creusée d'alvéoles disposés sans régularité ct au centre desquels sc trouve
un amas granuleux globulaire que des fibrilles enchevêtrées relient au bord de
la cavité (Pl. II, fig. d).
Bien que plusieurs publications lui aient été partiellement [3] ou entière-
ment [4, 5] consacrées, on ignore encore beaucoup de sa nature, de son origine
et du rôle qu'elle peut jouer, en particulier lors de la fécondation. Nous nous
proposons donc de faire, ici, le bilan des connaissances actuelles qui concernent
cette structure particulière, en envisageant successivement ces trois points.
MATÉHIEL ET TECHNIQUES
RÉSULTATS
sur sa nature chimique. En effet, elle joue un rôle de barrière sélective comme
en témoignent les deux observations suivantes :
- d'une part, BELL [2] rapporte l'impossibilité, pour certains nucléotides,
de pénétrer librement dans les embryons de Pteridium aquilinum ;
--- d'autre part, CAVE et BELL [51 ont remarqué que l'apparition de cette
m.:-mbrane était contemporaine d'un brusque déclin de l'aptitude de l'œuf à
incorporer des nucléosides radioactifs et des acides aminés.
Il apparaît donc nécessaire de rechercher les différents composés carbonés
qui entrent dans la composition de cette" membrane "·
- les amylases [23] se sont révélées sans action, montrant par là l'absence
d'amylose et d'amylopectine (polyholosides).
---- les tentatives de digestion par la pectinase [23] se sont révélées égale-
ment négatives (Pl. II, fig. g), ce qui induit à conclure qu'il n'existe pas, dans
crtte membrane, de molécules du type des pectines (polyholosides).
- la réaction de HOTCHKISS-MAC MAXUS (PAS) essayée par CAVE et BELL
[5] s'est soldée négativement, confirmant pour eux l'absence de polyholosides.
- la présence de callose (polyholoside) a également été recherchée par
CAVE et BELL [5] grâce à la fluorescence sous l'influence de bleu d'aniline. Les
résultats qu'ils observèrent furent quelque peu particuliers puisque la cellule
du canal du ventre donna une fluorescence légèrement diffuse et que la plus
forte fluorescence vint du cytoplasme même de l'oosphère ct non de la " mem-
brane n spéciale. Ils attribuent cette fluorescence à une complexion du colorant
avec les protéines et concluent qu'il n'y a pas de preuves de l'existence de
callose dans cette " membrane "·
Cette conclusion mérite d'être discutée à la lumière des travaux de GonsKA-
BnYLASS [11, 12]. Cet auü•ur nous apprend que l'individualisation des cellules
sexuelles mâles ct femelles passe toujours par un stade à callose chez les Angios-
permes, les Gymnospermes, les Ptéridophytes et les Bryophytes ; il donne mê-
me des figures montrant les cellules du canal, la cellule ventrale et l'oosphère
entourées d'une couche de callose détectée au bleu de résorcine et par la
fluorescence au bleu d'aniline chez Adiantum cuneatum. Cependant, il ne
fait aucune allusion à une " membrane "• mais il est vrai qu'il utilise le micros-
cope photonique. Il est donc possible que la "membrane n spéciale comporte
au moins un peu de callose et que ce soit elle que GonsKA-BRYLASS montre
entourant complètement l'oosphère. Ce stade à callose des cellules sexuelles
est transitoire et disparaît avec l'ouverture de l'archégone; or CAVE et BELL
[5] ne précisent pas les stades de maturation étudiés. Peut-être ont-ils fait
leurs observations juste après l'ouverture du col et la fluorescence serait
due à des produits diffusibles issus de la dégradation de la callose et encore
assez proches d'elle pour donner une certaine fluorescence.
L'existence de la callose dans un matériel voisin ajoutée au fait que ce
polyholoside typique présente une réaction entièrement négative aux tests de
type PATAg [18], par suite de l'absence de liaisons vic-glycol (1-:~), justifie-
raient donc une nouvelle tentative de mise en évidence d'un polyholoside aussi
particulier.
Cependant, malgré ces différents résultats qui ne permettent guère d'augu-
rer de la présence de polyholosides bien définis, des tests de détection globale
de sucres polymérisés, conduits par nous, se sont avérés nettement positifs
84 SOCIÉTÉ BOTANIQUE DE FRANCE
(Pl. J, fig. a et c) par comparaison avec des témoins n'ayant pas subi l'hydro-
lyse à l'acide periodique (Pl. 1, fig. b ct d).
L'acétolysc contrôlée selon ERDTMANN [10] détruit le cytoplasme, mais n'a
aucune action sur la membrane spéciale. Ce traitement, d'après les auteurs
précités, élimine communément les protéines et les polyholosides tout en respec-
tant notamment la sporopollénine, la lignine, la subérine et la cutine. Ils ne
retrouvent cependant pas la fluorescence jaune verdâtre de la sporopolléninc.
Le mode d'apparition de la "membrane n spéciale à l'extérieur du plasmalem-
me, à la manière d'un exsudat, s'oppose à celui de la lignine qui se dépose à
partir de la lamelle moyenne et aucun test classique de la lignine n'est positif.
La membrane spéciale ne présente pas, non plus, la brillante autofluorescence
de la subérine et il est peu probable enfin qu'il y ait de la cutine [5].
Il est donc possible de conclure que des polyholosides, de nature encore
insuffisamment précisée, entrent dans la composition permanente de cette
" membrane , et que pourraient s'y ajouter, de façon transitoire, des dépôts
de callose.
Toutefois, cela n'exclut pas la présence d'autres catégories de substances
carbonées; c'est pourquoi nous avons élargi nos recherches aux protides et
aux lipides.
Les digestions par la pro nase, la pepsine et la protéase [ 1, 24] sont également
négatives, De même, selon CAvE et BELL [5] la ribonucléase est sans action.
Il ne reste plus à envisager que l'éventualité d'une composition lipidique
ou Iipoprotéiquc. C'est ce qu'avaient déjà présumé BELL et MüHLETIIALER
dès 1962 [4] rien qu'en constatant sa densité aux électrons après fixation au
permanganate de potassium et coloration à l'acétate d'uranyle.
De leur côté, CAVE et BELL [5] en utilisant Je noir Soudan B qui décèle les
lipides et les phospholipides ont obtenu une réaction franchement positive
leur permettant de conclure à la présence des lipides dans cette structure.
Aussi nous a-t-il paru très utile de rechercher la localisation fine des lipides
qui participent à l'architecture de cette " membrane n en utilisant, au niveau
des infra-structures, des digestions par une lipase.
Sur une électronographie d'un témoin, la substance propre de la " membra-
ne n apparaît comme une juxtaposition de points sombres au sein d'une matrix
moins opaque aux électrons, et les alvéoles signalés plus haut renferment, le
plus souvent, une sphérule qui apparaît formée de grains d'un noir intense
noyés dans une matrix plus grise (Pl. II, fig. d).
Les coupes qui ont flotté 4 h sur la lipase montrent une coloration nette-
ment moins intense de la membrane elle-même (Pl. II, fig. e et f) (matrix et
points) s'accompagnant d'une perte de la matrix grise des sphérules des alvéo-
les, alors que les grains noir intense constituant chaque sphérule subsistent,
à peine atténués. Des zones diffuses, moins attaquées par la lipase existent,
de place en place, ct offrent à l'observation un net rappel des coupes témoin.
Sur ces coupes digérées on note une forte atténuation du plasmalemme ; on
note aussi, en de nombreux endroits, que la partie externe de la " membrane n
est fort diffuse. Ces différences d'aspect entre les coupes digérées ct les coupes
non digérées ne devant rien au séjour dans le tampon seul, nous pouvons en
conclure que les deux composants de la membrane elle-même (granules et
matrix) ainsi que la matrix des sphérules logées dans les alvéoles sont suscep-
tibles d'être attaqués par la lipase ct révèlent, par là même, une teneur appré-
D. VAUDOIS ET COLL. 85
II - ÜRIGI::-;"E
III - RÔLE
Le rôle de cette structure particulière est encore mal élucidé et reste, par
conséquent, essentiellement au stade des hypothèses. Il convient toutefois de
remarquer que sa présence au moment de la fécondation laisse présager de
son intervention dans le bon déroulement de cette étape fondamentale du
cycle vital.
86 SOCI~T~ BOTANIQUE DE FRANCE
Parmi les rôles éventuels qui nous paraissent susceptibles d'être retenus,
nous citerons :
CONCLUSION
BIBI.IOGHAPJIIE
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88 SOCIÉTÉ BOTANIQUE DE FRA:-ICE
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PLANCHE l
PLANCHE II
(Réaction de PATAg)
Fig. a . - Vue partielle de la cellule ventrale (CV) en cours de sécrétion de mucilage (mud
et de l'oosphère bordée par la" membrane spéciale "(flèche). P: paroi peclo-cellulosique.
Fig. b.- Détail de la« membrane spéciale , dans la partie faisant face à la cellule ventrale.
Elle est relativement épaisse.
Fig. e. - Détail de la "membrane spéciale, dans la partie distale, là où elle apparaît
beaucoup plus fine.
Fig. d.- Détail, sur coupe tangentielle, des alvéoles de la "membrane spéciale,, montrant
au centre de ceux-ci un amas granulaire relié au bord de la cavité par des fibrilles
enchevêtrées.
Fig. e et f . - La digestion par la lipase montre la sensibilité de certaines zones de la« mem-
brane spéciale " à cette enzyme, et une résistance des amas granulaires.
Fig. g. - Digestion par la pectinase montrant une résistance de la «membrane spéciale"
à cette enzyme, contrairement au mucilage (mue) environnant.
Fig. h et i. - Certaines images montrent une possible réabsorption èe substances par le
cytoplasme de l'oosphère (flèches).
Fig. j. - Origine de la "membrane spéciale , à partir de certaines catégories de vésicules
golgiennes.
J'I.ASCIII-: J