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Alcools, Apollinaire

Le recueil reflète 15 ans de création poétique. Ce n’est donc pas quelque chose de rapide, de
fulgurant, mais le fruit d’un travail (voire l’ordre des poèmes), d’une maturation (se débarrasser
d’influences pour créer quelque d’original)

Modernité et passé :

Le recueil est un mélange d’ode au progrès et d’anciennes légendes.

Du côté de la tradition :

- Des thèmes : * Des références savantes (érudition) : mythes antiques et chrétien


(« le Larron ») médiévaux (« Merlin et la vieille femme », « Lorelei »),
romantiques (« Lorelei », « Schinderhannes » etc.), Verlaine (« A la Santé »)i
* topos de la femme fatale (« Salomé », « Lorelei », « Merlin et la
vieille femme », « Rosemonde »…) :
* le rapport à l’existence personnelle, une inspiration puisée dans la
vie affective, les voyages, les expériences vécues (l’ivresse, peut-être ? (« Nuit
rhénane »), l’emprisonnement (« A la Santé »), les rencontres : « Annie », « Marizibill »,
« Poème lu au mariage d’André Salmon »….) : c’est un cadre traditionnel.

* La quête d’identité (Apollinaire a ses raisons ! origine polonaise, mère


noble, délaissement parfois de Guillaume et son frère par leur mère, père inconnu (ou qui ne l’a pas
reconnu) – Le poète ne trouve pas vraiment sa place dans le monde ou parmi les autres (« Le
voyageur », « l’Emigrant de Landor Road»… Voir aussi la fascination pour les tziganes – et le thème
de l’errance (y compris dans « Zone »), le sentiment de perte d’identité dans « A la santé : IV (v. 16)
ou VI (v. 4) )

- Une écriture : *tonalité lyrique traditionnelle et mélancolie

* formes contraignantes (sonnet masqué dans « Les Colchiques »,


romances (« Chanson du Mal Aimé ») et ballades (« Lorelei »), épithalameii (« Poème lu
au mariage d’André Salmon »)

Du côté de la modernité :

- Des thèmes : fascination pour le progrès (la tour Eiffel etc. dans « Zone », le pont Mirabeau)

- Une écriture : suppression de la ponctuation, liberté syntaxique, trouvaille sonore,


métaphores originales ou renouvelées, effets de ruptures (liens avec le Cubisme : collage et libre
association – annonçant le Surréalisme), émergence du vers libre (après le passage par
l’hétérométrie : « Le Pont Mirabeau » , « l’Emigrant de Landor Road »)
Un pied dans le passé, Apollinaire est cependant en relation intime avec la vie, les arts et la poésie de
son temps. Ce mélange de passé et de modernité se retrouve dans les images de permanence et de
mouvement observées dans « Le Pont Mirabeau ».

On peut rapprocher aussi la nostalgie du passé et la volonté de renouvellement poétique du double


sens qu’Apollinaire accorde à l’automne, à la fois saison du retour mélancolique sur le passé (au
terme de l’existence) et saison des vendanges, de la récolte d’un vin nouveau.

Le poète selon Apollinaire : Sous le signe du Phénix et d’Orphée –

Le Phénix : qui renaît de ses cendres (idée de destruction de soi, de plongée dans le passé le plus
profond pour renaître à la modernité)

Orphée : le poète, le créateur qui survit à la mort et à la perte grâce à la poésie.

Le poète apparaît comme un être magique qui, à travers une série d’épreuves (l’amour) a conquis le
pouvoir de revivifier le passé, de le renouveler, voire de révolutionner le monde. (voir « Cortège » :
de l’absence du poète à lui-même (v. 6, 20, 21, 48, 49) à la transformation en un personnage doté
d’un langage nouveau, son corps semblable à une tour qui rassemble les peuples, grâce à la
connaissance intime qu’il a des autres par le langage, l’imagination, les émotions (23-24))

* Notions et exemples étudiés sur le parcours associé : Le renouveau de l’écriture poétique (XIXe – XXe
siècle) : vers un espace de liberté
- la déconstruction des règles (Hugo, «  Réponse à un acte d’accusation », extrait),
Apollinaire et la ponctuation, au risque de choquer (Hugo, Apollinaire (suppression de la ponctuation
pas toujours bien reçue), Dada) MAIS : l’OuLiPo et le retour de l’écriture « sous contrainte ».
- S’affranchissant des règles, la poésie se fait plus ludique : Breton, l’OuLiPo,
Calligrammes d’Apollinaire
- De nouvelles techniques d’écriture : Breton, les Surréalistes, Apollinaire,
les « calligrammes ». (question : peut-on encore parler « d’écriture » ?)
- de nouvelles formes d’écriture : le vocabulaire et la déstructuration du rythme de
l’alexandrin (Hugo), le vers impair, le vers libre, le poème en prose (Verlaine, Breton, Ponge)
- l’importance de l’inconscient : l’écriture du rêve (Apollinaire, « La maison des
morts », Verlaine, « Colloque sentimental », « L’Ange du foyer ou le Triomphe du
Surréalisme » de Max Ernst), la responsabilité (et la liberté) du lecteur dans la construction
du sens (Breton, les surréalistes)
- le thème traditionnel de l’amour et de la femme, médiateurs de poésie (Breton,
Apollinaire, Eluard), mais aussi un renouveau des thèmes abordés de manière lyrique (Ponge)
- Vers une poésie où le sens se fait peu à peu secondaire par rapport à la « matière
sonore » du langage : Verlaine (« Art poétique », importance de la musique dans les Fêtes
galantes), les jeux sonores de Ponge (la poésie vient du mot lui-même), Breton (les
rapprochements sonores permettent de « construire » le collage), le langage imaginaire de
« Karawane », le Lettrisme d’Isidore Isou.
i
Verlaine aussi a écrit sur son emprisonnement, par exemple dans « Le ciel est par-dessus le toit » (in Sagesse) ou
« Impression fausse » et « Autre ») (in Cellulairement)
ii
Poème lyrique composé à l’occasion d’un mariage en l’honneur des nouveaux époux.

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