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DROIT DES SOCIETES COMMERCIALES

Aymar Djefri EBINA


Juriste Conseil Agréé ;
Conseiller à la Primature, Secrétariat Général du Gouvernement ;
Juriste d’Affaire, spécialiste en Droit des Activités Maritimes et Portuaires.
L’étude du droit des personnes permet de se rendre compte qu’il ya d’une part les personnes
physiques et d’autre part les personnes morales. Les personnes physiques sont les êtres humains
qui jouissent de droits tandis que les personnes morales sont des groupements dotés de la
personnalité juridique : il peut s’agir de groupement sans but lucratif comme les associations et des
groupements à but lucratif tels que les sociétés commerciales, objet de notre étude.
Avant l’avènement du Traité OHADA, le droit hérité de la colonisation est souvent balkanisé,
c’est-à-dire qu’il varie d’un territoire à un autre. Cet état de fait a créé une insécurité juridique et
judiciaire dénoncée le plus souvent par les investisseurs étrangers. Il fallait donc mettre en place
un droit harmonisé ou uniformisé. L’Acte Uniforme portant droit des Sociétés commerciales et
Groupement d’Intérêt économique est dérivé du Traité OHADA signé à Port Louis en Ile Maurice
le 17 octobre 1993 par les Etats africains membres de la zone franc. Il a été adopté à Cotonou le 17
Avril 1997, publié dans le Journal Officiel de l’OHADA à Yaoundé le 11 octobre 1997, et entré en
vigueur le 1er Janvier 1998.
Il y a lieu de préciser que deux séries de textes s’appliquent aux sociétés commerciales : l’Acte
Uniforme précité (Article 1er AUSCGIE : « toute société commerciale, y compris celle dans
laquelle un Etat ou un personne morale de droit public est associé, dont le siège social est situé
sur le territoire de l’un des Etats parties est soumise aux dispositions du présent Acte uniforme) et
la loi nationale (Alinéa3 1er : « en outre, les sociétés commerciales et les groupements d’intérêt
économique demeurent soumis aux lois non contraires au présent Acte uniforme qui sont
applicables dans l’Etat partie où se situe leur siège social »).
Mais qu’est-ce qu’une société commerciale ?
Aux termes de l’article 4 AUSC et GIE : « la société commerciale est créée par deux ou plusieurs
personnes qui conviennent, par un contrat, d’affecter à une activité des biens en numéraire ou en
nature, dans le but de partager le bénéfice ou de profiter de l’économie qui pourra en résulter. Les
associés s’engagent à contribuer aux pertes dans les conditions prévues par le présent acte
uniforme. La société commerciale doit être créée dans l’intérêt commun des associés ». Cette
disposition met en évidence les éléments constitutifs du contrat de société à savoir les apports, la
participation au bénéfice et aux pertes et l’affectio societatis. On voit également à travers cette
définition qu’en principe, pour créer une société, il faut au moins deux personnes. L’exception à
cette règle est prévue à l’article 5 AUSCGIE qui précise que la société peut être créée par une seule
personne. On remarque donc que la société commerciale est à la fois un contrat et une institution.
Il faut tout de même préciser que la société, comme tout contrat doit respecter les conditions de
validité citées à l’article 1128 C. Civ français c’est-à-dire le consentement, la capacité, l’objet et la
cause.
Le critère de commercialité de la société dépend soit de sa forme soit de son objet. Ainsi sont
commerciales par leur forme, les S.N.C, les S.C.S, les S.A.R.L et les S.A (Article 6 AUSCG et
GIE). La commercialité par l’objet suppose que la société accomplit des actes de commerce et en
fait sa profession habituelle.
Il existe plusieurs sortes de sociétés commerciales : celles dans lesquelles l’intuitu personae c’est-
à-dire la personnalité des associés, est importante (SNC et SCS) et celles dans lesquelles seuls les
capitaux jouent un rôle déterminant (S.A, S.A.R.L)
Dans le cadre de ce cours, nous allons étudier d’une part les règles communes à toutes les sociétés
commerciales (Titre 1) et d’autre part les règles propres à chaque type de société (Titre 2)

TITRE 1- LES REGLES COMMUNES A TOUTES LES SOCIETES


COMMERCIALES
Les règles communes à toutes les sociétés renvoient à la constitution, au fonctionnement, à la
dissolution et aux liens entre sociétés.

CHAPITRE I- LA CONSTITUTION DES SOCIETES COMMERCIALES


La constitution des sociétés commerciales renvoie à leur naissance : c’est donc se poser la question
de savoir comment les sociétés commerciales sont-elles créées, comment naissent-elles ? La
constitution des sociétés commerciales est soumise à des conditions, (Section 1) lesquelles,
lorsqu’elles ne sont pas réunies sont sanctionnées par la nullité, la responsabilité des fondateurs et
des premiers dirigeants (Section 2).

SECTION 1- LES CONDITIONS DE CONSTITUTION DES SOCIETES


COMMERCIALES
Les conditions de constitution des sociétés commerciales sont de deux ordres : il ya des conditions
de fond (Paragraphe 1) d’une part et des conditions de forme (Paragraphe 2) d’autre part.
PARAGRAPHE 1- LES CONDITIONS DE FOND
Malgré la controverse doctrinale qui a existé pendant un certain temps concernant la nature de la
société, nul ne peut nier le fait que la société soit un contrat. Pour preuve, l’article 4 AUSCG précité
et l’article 105 AUSCG qui dispose qu’: « entre la date de constitution de la société et celle de son
immatriculation au registre du commerce et du crédit mobilier, les rapports entre les associés sont
régis par le contrat de société et par les règles générales du droit applicable aux contrats et aux
obligations ». Ces règles dont il est question constituent le Code civil français en vigueur au Gabon.
Ainsi, la société commerciale en tant que contrat est soumise aux conditions de validité prévues à
l’article 1128 C. Civ.
Toutefois, la société est également soumise à des règles particulières de constitution. La société
peut être créée par deux ou plusieurs personnes (Article 4) comme être unipersonnelle. Aux termes
de l’article 5 : « la société commerciale peut également être créée, dans les cas prévus par le
présent Acte uniforme, par une seule personne, dénommée associé unique, par un acte écrit ». La
loi a prévu la société d’une seule personne dans trois cas : la S.A.R.L (article 309, alinéa 2), la S.A
(article 385, alinéa 2) et la SAS (853-2).
Les conditions de fond particulières de constitution des sociétés commerciales sont :
- les apports ;
- le partage des bénéfices et la participation aux pertes ;
- l’affectio societatis.
✓ La combinaison des articles 4 et 37 AUSCG met en évidence l’idée selon laquelle, les
associés doivent obligatoirement faire des apports. En effet, il existe trois types d’apports :
en nature, en numéraire et en industrie.
Les deux premiers types d’apports sont des apports capitalisés c’est-à-dire ceux qui entrent dans la
composition du capital social.
▪ Les apports en nature sont les apports de tout bien, meuble ou immeuble, corporel
ou incorporel autre que du numéraire c’est-à-dire en espèces monétaires. Donner juste la définition
des différents apports.
Il existe deux modalités de l’apport en nature : l’apport en pleine propriété et l’apport en
jouissance. Ils sont prévus aux articles 46 et 47 AUSCG.
Il y a apport en pleine propriété, lorsque l’associé transfère la propriété de son bien à la société et
le perd définitivement le bien au profit de celle-ci. Il ne pourra le récupérer en cas de dissolution
de la société. L’apport en pleine propriété s’apparente avec la vente certes, mais à la différence de
celle-ci l’associé ne reçoit aucun prix en contrepartie, mais des droits sociaux.
Le législateur OHADA a prévu les modalités de réalisation des apports en nature. Ainsi, aux termes
de l’article 45 AUSCGIE, les apports en nature sont réalisés par les transferts des droits réels ou
personnels correspondant aux biens apportés et par la mise à la disposition effective de la société
des biens sur lesquels portent ces droits. En outre, il est précisé que les apports en nature sont
libérés intégralement lors de la constitution de la société. On dit qu’une société est constituée
lorsque ses statuts ont été signés par les associés. Si un bien ou un droit soumis à publicité est
apporté, il peut être publié avant que la société ne soit immatriculée au RCCM.
Lorsqu’un fonds de commerce est apporté en pleine propriété, il doit y avoir une publicité comme
c’est le cas pour la vente sous peine d’inopposabilité aux tiers.
L’apport en jouissance renvoie à l’hypothèse où l’apporteur ne confère qu’un simple droit de
créance, un peu comme celui d’un preneur à bail. Donc l’apporteur en garde la pleine propriété et
en cas de dissolution le bien peut être récupéré. Toutefois, si l’apport en jouissance porte sur des
choses de genre ou sur des biens appelés à être renouvelés pendant la durée de la société, celle-ci
devient propriétaire des biens, à charge pour elle d’en rendre une pareille quantité, qualité et valeur
à l’apporteur. Dans ce cas précis, l’apporteur est garant envers la société comme un vendeur envers
l’acheteur.
Les apports en nature posent le problème de leur évaluation. Il appartient aux associés de les évaluer
et de faire figurer cette évaluation dans les statuts. Si dans les SA les apports en nature doivent
obligatoirement faire l’objet d’une évaluation par un commissaire aux apports, tel n’est pas le cas
dans les SARL où l’évaluation ne devient obligation que lorsque la valeur de chaque apport ou de
l’ensemble des apports en nature est supérieure à 5.000.000.
En effet, il peut y avoir surévaluation des parts ou actions, c’est-à-dire lorsque l’apporteur reçoit
plus d’actions ou de parts que ce à quoi il devrait avoir droit ou sous-évaluation. Le législateur
OHADA a prévu l’évaluation des apports en nature dans les sociétés anonymes et les sociétés à
responsabilité limitée. Ainsi les articles 312 et 400 disposent respectivement que : « cette
évaluation est faite par un commissaire aux apports dès lors que la valeur de l’apport ou de
l’avantage considéré, ou que la valeur de l’ensemble des apports ou avantages considérés, est
supérieure à cinq millions (5000.000) de francs CFA » et que : « les apports en nature et / ou les
avantages particuliers doivent être évalués par un commissaire aux apports ».
Les commissaires aux apports sont choisis parmi les commissaires aux comptes à l’unanimité par
les futurs associés ou, à défaut, par le président de la juridiction compétente, à la demande des
fondateurs de la société ou de l’un d’entre eux.
Il faut dire cependant que pour remédier au problème de la surévaluation, le législateur a prévu la
libération entière des apports en nature lors de la constitution de la société (Article 45), leur
évaluation par les associés sous le contrôle d’un commissaire aux apports et enfin leur évaluation
dans les statuts. Au-delà des apports en nature comme apport capitalisé, il ya les apports en
numéraire.
▪ Les apports en numéraire sont ceux qui consistent à mettre une somme d’argent à la
disposition de la société. Ils posent deux problèmes : la souscription et la libération.
La souscription est la promesse faite par l’associé de réaliser un apport en numéraire.
Quant à la libération, elle consiste en l’exécution de cette promesse et au versement de la somme
due dans les caisses sociales.
L’article 41 AUSCG et GIE dispose que sauf disposition contraire du présent Acte uniforme, les
apports en numéraire sont libérés intégralement lors de la constitution de la société. Cette
disposition doit être complétée par l’article 313 AUSCGIE qui prévoit le dépôt des fonds par le
fondateur dans un compte en banque ouvert au nom de la société en formation ou à l’étude d’un
notaire et l’article 389 qui dispose que les actions représentant des apports en numéraire sont
libérées, lors de la souscription du capital, d’un quart au moins de leur valeur nominale.
En tout état de cause, si les sommes restantes dues à la société ne sont pas versées dans les délais
prévus, elles portent de plein droit intérêt au taux légal à compter du jour où le versement devait
être effectué, sans préjudice de dommages et intérêts, s’il y a lieu.
▪ L’apport non capitalisé c’est l’apport en industrie. Il n’apparait qu’une seule fois dans
l’Acte Uniforme c’est-à-dire à l’article 40 AUSCG. Son régime juridique n’est pas fixé par le
législateur OHADA. Mais seule la main d’œuvre est considérée comme un apport en industrie.
Autrement dit, l’apporteur en industrie doit être un travailleur ; pas comme les autres.
Mais en cas de partage, l’apporteur en industrie doit avoir en droit Sénégalais par exemple, une
part égale à celle de l’apporteur en numéraire dont l’apport est le plus modique.
Après l’étude des différents types d’apports, celle de leur régime juridique mérite examen.

Le régime juridique recouvre les obligations des apporteurs et celles de la société.


Aux termes de l’article 37 AUSCG : « chaque associé doit faire un apport à la société. Chaque
associé est débiteur envers la société de tout ce qu’il s’est obligé à lui apporter en numéraire ou
en nature ».
En dehors de ces règles générales, il y a des règles particulières à chaque type d’apporteurs. Nous
allons voir d’abord les obligations de celui qui fait un apport en nature, de l’apporteur en numéraire
ensuite et enfin de l’apporteur en industrie.
Selon qu’il s’agisse des apports en pleine propriété et en jouissance, les obligations de l’apporteur
en nature varient. Ainsi, dans le premier cas, l’apporteur est garant envers la société comme un
vendeur envers son acheteur. Dans le second cas, il faut faire une distinction entre les choses
fongibles ou de genre c’est-à-dire interchangeables et les corps certains. S’il s’agit de choses
fongibles, l’apporteur est garant envers la société comme un vendeur envers l’acheteur. S’il s’agit
d’un corps certain, l’apporteur est tenu envers la société comme un bailleur envers son locataire. Il
doit garantir à la société une jouissance paisible.
L’apporteur en numéraire est tenu de verser à la date indiquée les sommes promises sinon en cas
de retard, les sommes qui restent dues portent intérêt de plein droit aux taux légal, ceci, sans
préjudice d’une condamnation au paiement de dommages et intérêts à la société.
Quant à l’apporteur en industrie, même si le législateur OHADA n’a rien prévu, il faut dire que ce
dernier doit respecter ses engagements.
La contrepartie des apports faits par les associés c’est le bénéfice des titres sociaux comme le
précise l’article 51 AUSCG. Pour les sociétés anonymes, on parle d’actions et pour les autres
sociétés, de parts sociales. Le législateur OHADA a prévu la transmission des titres sociaux. Dans
les sociétés dans lesquelles les associés sont indéfiniment et solidairement responsables (S.N.C et
S.C.S), la cession ne se fait qu’à l’unanimité des associés (Article 274 et 296). Dans les S.A.R.L et
les S.A., la cession est libre même si des limites sont constatées (majorité des associés non cédants
représentant les trois quarts des parts sociales- article 319 AUSCG, agrément-article 321 AUSCG
et 765 AUSCG).
✓ Au-delà des apports, nous avons la participation aux bénéfices et la contribution aux
pertes.
Le principe est que les droits ou titres sociaux prévus à l’article 53 AUSCG sont proportionnels au
montant des apports faits par les parties. Mais rien n’empêche les associés de déroger à cette règle ;
autrement dit qu’ils peuvent décider de donner plus de parts à un autre associé, à condition que
cette clause ne soit pas léonine. Il s’agit d’une stipulation attribuant à un associé la totalité du profit
procuré par la société ou l’exonérant de la totalité des pertes, ainsi que celle excluant un associé
totalement du profit ou mettant à sa charge la totalité des pertes.
✓ Quant à l’affectio societatis, c’est l’intention de s’associer, la volonté de collaborer
ensemble sur un pied d’égalité au succès de l’entreprise commune.

PARAGRAPHE 2 LES CONDITIONS DE FORME


Les conditions de forme sont l’établissement de l’acte de la société et la publicité.
▪ L’établissement de l’acte de société, c’est la formalisation de la volonté : il s’agit
des statuts dont nous allons étudier la forme et le contenu.
Pour ce qui concerne la forme des statuts, il faut dire que les statuts sont établis par acte notarié ou
par un acte présentant des garanties d’authenticité dans un Etat partie c’est-à-dire qu’il doit être
déposé auprès d’un notaire. Les statuts peuvent également être rédigés par un acte sous seing privé.
Dans ce cas, il est dressé autant d’originaux qu’il est nécessaire pour le dépôt d’un exemplaire au
siège social et l’exécution des diverses formalités requises. Un exemplaire des statuts établi sur
papier libre doit être remis à chaque associé sauf pour le cas des S.N.C et S.C.S où un exemplaire
original est remis à chaque associé.
Quant au contenu des statuts, l’article 13 dispose que les statuts énoncent :
- la forme de la société ;
- la dénomination suivie le cas échéant de son sigle ;
- la nature et le domaine de son activité, qui forment son objet social ;
- son siège social ;
- sa durée (celle-ci ne peut dépasser 99 ans)
- l’identité des apporteurs en numéraire avec, pour chacun d’eux, le montant des apports, le
nombre et la valeur des titres sociaux remis en contrepartie de chaque apport ;
- l’identité des apporteurs en nature, la nature et l’évaluation de l’apport effectué par chacun
d’eux, le nombre et la valeur des titres sociaux remis en contrepartie de chaque apport ;
- l’identité des bénéficiaires d’avantages particuliers et la nature de ceux-ci ;
- le montant du capital social ;
- le nombre et la valeur des titres sociaux émis, en distinguant, le cas échéant, les différentes
catégories de titres créées ;
- les stipulations relatives à la répartition du résultat, à la constitution des réserves et à la
répartition du boni de liquidation ;
- les modalités de fonctionnement.
Douze mentions obligatoires doivent donc figurer dans les statuts ; à défaut, tout intéressé peut
demander au Tribunal dans le ressort duquel se trouve le siège social d’ordonner la régularisation.
Le Ministère public peut également agir aux mêmes fins (Article 75 AUSCG).
▪ L’autre condition de forme au-delà de l’établissement de l’acte de société, c’est la publicité.
Cette notion recouvre deux aspects : l’immatriculation au R.C.C.M et l’insertion de l’avis de
constitution de la société dans un journal d’annonces légales.
Concernant l’immatriculation, aux termes de l’article 97 AUSCG, la société doit être immatriculée
au registre du commerce et du crédit mobilier. Nous allons étudier la procédure d’immatriculation
d’abord, ensuite les effets de l’immatriculation.
La procédure d’immatriculation est prévue aux articles 27 et 28 AUDCG. Ainsi, toute société
commerciale doit, dans le mois de sa constitution requérir son immatriculation au R.C.C.M de la
juridiction dans le ressort de laquelle est situé son siège social. Cette demande a un contenu précis
(Article 27 AUDCG). A cette demande, sont jointes des pièces justificatives (Article 28). Il
appartient au greffier en charge du R.C.C.M de vérifier que les demandes sont complètes et
conformes aux pièces justificatives. S’il constate des inexactitudes ou lorsqu’il rencontre des
difficultés dans sa mission, il en saisit la juridiction compétente (Article 41 AUDCG)
C’est avec l’immatriculation que la société acquiert la personnalité morale comme le précise
l’article 98 AUSCG : « toute société jouit de la personnalité juridique à compter de son
immatriculation au registre du commerce et du crédit mobilier ». Les autres effets de
l’immatriculation au R.C.C.M concernent la présomption d’acquisition de la qualité de
commerçant et l’obligation d’indiquer sur ses factures, bons de commande, tarifs et documents
commerciaux, ainsi que sur toute correspondance, son numéro et son lieu d’immatriculation au
Registre (Article 38 AUDCG).
On ne saurait terminer l’étude de l’immatriculation au R.C.C.M sans faire cas des attributs de la
société immatriculée. Ainsi, celle-ci a, à compter de l’acquisition de la personnalité juridique, un
siège social, une dénomination sociale, un patrimoine et une nationalité. Le siège social est le
domicile de la société, le lieu de son principal établissement. Ce lieu doit être mentionné dans les
statuts. Il doit être fixé au choix des associés soit au lieu du principal établissement, soit au centre
de direction administrative et financière de la société. Cette disposition met en évidence l’idée selon
laquelle le choix du siège social n’est pas arbitraire. Le siège social ne peut pas être constitué
uniquement par une domiciliation à une boîte postale ; il doit être localisé par une adresse ou une
indication géographique suffisamment précise. A la lecture de l’article 26 AUSCG, on se rend
compte qu’il ya une distinction entre le siège réel et le siège statutaire. Le siège réel est le lieu où
la société est gouvernée, le lieu de sa direction financière et administrative. En cas de discordance
entre siège réel et statutaire, les tiers peuvent selon leur intérêt choisir entre les deux.
La dénomination sociale c’est le nom de la société. Aux termes de l’article 14 AUSCG, toute
société est désignée par une dénomination sociale qui est mentionnée dans ses statuts. Désormais,
on ne parle plus de raison sociale. La dénomination sociale peut comporter le nom d’un ou plusieurs
associés ou anciens associés. Elle doit figurer sur tous les actes et documents émanant de la société
et destinés aux tiers, notamment les lettres, les factures, les annonces et publications diverses. Elle
doit être précédée ou suivie immédiatement en caractères lisibles de l’indication de la forme de la
société, du montant de son capital social, de l’adresse de son siège social et de la mention de son
immatriculation au R.C.C.M.
La société a un patrimoine qui lui est propre différent de celui des associés. Le patrimoine social
est l’ensemble des droits et obligations de la société. Il est essentiellement mouvant dans la mesure
où il augmente ou diminue suivant que la société réalise des bénéfices ou des pertes. Le patrimoine
social permet de distinguer entre les créanciers sociaux et les créanciers des associés. Ces derniers
ne peuvent saisir les biens de la société.
Le dernier attribut de la société immatriculée c’est la nationalité. L’Acte Uniforme ne définit pas
les critères de détermination de la nationalité.
L’étude de l’immatriculation au R.C.C.M permet de faire la transition et d’étudier les sociétés sans
personnalité juridique. Il s’agit de la société en participation, de la société créée de fait et de la
société de fait. Aux termes de l’article 854 AUSCG, la société en participation est celle dans
laquelle les associés conviennent qu’elle ne sera pas immatriculée au R.C.C.M et qu’elle n’aura
pas la personnalité morale. Le législateur OHADA a prévu les rapports entre associés et avec les
tiers. Dans le premier cas, ce sont les règles de la S.N.C qui s’appliquent. A l’égard des tiers, chaque
associé agit pour son propre compte et donc engage sa responsabilité. Mais lorsque les associés
affichent leur qualité d’associé au vu et au su des tiers, ils engagent leur responsabilité à l’égard de
ceux-ci.
La société créée de fait est celle qui ne peut être immatriculée parce qu’aucun écrit n’a été établi.
Pourtant l’article 115 AUSCG qui traite de la société créée de fait renvoie aux articles 864 et
suivants relatifs à la société de fait. On parle de société de fait lorsque deux ou plusieurs personnes
physique ou morale se comportent comme des associés sans avoir constitué une société reconnue
par l’A.U. De même, il y a société de fait lorsque deux ou plusieurs personnes physiques ou morales
ont constitué une société reconnue par l’A.U sans pour autant avoir accompli les formalités légales
constitutives ou ont constitué entre elles une société non reconnue par l’A.U.
Aux termes de l’article 261 AUSCG, lorsque les formalités de constitution de la société ont
été accomplies, et dans un délai de quinze jours suivant l’immatriculation, un avis est inséré dans
un journal habilité à recevoir les annonces légales dans l’Etat-Partie du siège social. L’avis est
signé par un notaire et contient des mentions obligatoires.
La publicité peut se faire par dépôt d’actes ou de pièces au greffe du tribunal chargé des
affaires commerciales du lieu du siège social.
Les autres conditions de forme préalables à l’immatriculation sont la déclaration de
régularité et de conformité c’est-à-dire le dépôt au R.C.C.M par les fondateurs et premiers
dirigeants d’une déclaration dans laquelle ils relatent toutes les opérations effectuées en vue de
constituer régulièrement la société et par laquelle ils affirment que cette constitution a été réalisée
en conformité du présent acte uniforme (Article 73 AUSCG) et la déclaration notariée de
souscription et de versement (Article 314 et 392 AUSCG).
Lorsque les conditions de constitution n’auront pas été respectées, il y aura une sanction.

SECTION 2- SANCTIONS DE L’INOBSERVATION DES CONDITIONS DE


FORMATION
Elles sont au nombre de deux : la nullité et la responsabilité des fondateurs et premiers
dirigeants de la société.
✓ Le législateur a prévu la nullité de la société et des actes sociaux au Livre 8 de l’A.U.SC.G.
Nous rappelons que ce qui nous intéresse c’est la nullité de la société dont nous allons
étudier les causes, le régime et les effets.
Les causes de la nullité sont de fond et de forme.
Les causes de nullité de fond sont :
- les vices de consentement,
- l’incapacité d’un associé,
- l’illicéité de l’objet social et,
- le fait pour un associé ou des associés de ne pas participer à l’acte constitutif de
la société.
Ce qu’il y a lieu de préciser c’est que ni les vices de consentement, ni l’incapacité ne sont une cause
de nullité dans les S.A.R.L et S.A à moins que celle-ci n’atteigne tous les associés fondateurs.
Quant aux causes de nullité de forme, le législateur OHADA précise que dans les S.N.C et les
S.C.S, l’accomplissement des formalités de publicité est requis à peine de nullité (Article 245
AUSCG). De même, il est dit que les formalités de publicité sont effectuées à la diligence et sous
la responsabilité des représentants légaux des sociétés.
Ce qu’il y a lieu de préciser c’est que la nullité de la société est assortie de limites. Ainsi, il n’y a
pas de nullité sans texte. Il peut s’agir d’une disposition expresse de l’A.U ou d’un texte régissant
la nullité des contrats en général ou du contrat de société en particulier. De même, le tribunal a la
faculté de ne pas prononcer la nullité encourue si aucune fraude n’est constatée. En outre, lorsque
la cause de nullité a cessé d’exister le jour où le tribunal statue sur le fond en première instance,
l’action en nullité est éteinte sauf si l’objet social est illicite.
Le juge peut accorder un délai aux associés pour couvrir la nullité de la société lorsqu’il est saisi
d’une action en nullité. En tout état de cause, le prononcé de la nullité ne peut se faire moins de
deux mois à compter de la saisine.
Toujours dans le souci de réduire les cas de nullité, le législateur OHADA précise qu’en cas de
nullité pour vice de consentement ou incapacité d’un associé et si la régularisation est possible,
tout intéressé peut demander à la personne donc le consentement est vicié ou incapable de
régulariser sa situation ou d’agir en nullité dans un délai de six mois.
Dans le courant de ce délai, la société ou un associé peut proposer au juge le rachat des droits
sociaux (parmi d’autres mesures tendant à supprimer l’intérêt du demandeur) de l’incapable ou de
la personne dont le consentement est vicié. Dans cette hypothèse, le tribunal peut soit prononcer la
nullité, soit accepter la mesure proposée par la société ou l’associé
Le régime de la nullité renvoie aux personnes habilitées à agir en nullité et au délai de prescription.
Ainsi, toute personne intéressée peut agir en nullité dans un délai de trois ans à compter de
l’immatriculation de la société ou de la publication de l’acte modifiant les statuts sauf si la nullité
est fondée sur l’illicéité de l’objet social et sous réserve de la forclusion prévue à l’article 248 de
l’Acte Uniforme (Il s’agit du délai de 6 mois). Mais comme nous l’avons dit, le législateur OHADA
a tout fait pour limiter la nullité d’où donc la raison d’être de la régularisation (Article 75 et 250
AUSCG).
Les effets de la nullité de la société sont prévus à l’article 253 et 255 AUSCG. Ainsi, la nullité de
la société met fin à l’exécution du contrat sans rétroactivité et ni la société, ni les associés ne
peuvent se prévaloir d’une nullité à l’égard des tiers de bonne foi sauf si l’associé est un incapable
ou son consentement vicié.
✓ La seconde sanction des conditions de formation de la société c’est l’engagement de la
responsabilité des fondateurs et premiers dirigeants.
Aux termes de l’article 78 AUSCG, les fondateurs et les premiers dirigeants sont responsables
solidairement du préjudice causé soit par le défaut d’une mention obligatoire dans les statuts, soit
par l’omission ou l’accomplissement irrégulier d’une formalité prescrite par la constitution de la
société. L’action en responsabilité se prescrit par cinq ans à compter, selon le cas, du jour de
l’immatriculation de la société. Cette responsabilité est civile. Quant à la responsabilité pénale, elle
renvoie au cas où il y a une fausse déclaration notariée de souscription et de versement des fonds
(Article 887).
En outre, s’il est avéré que la nullité est imputable aux associés et aux dirigeants sociaux, ces
derniers peuvent être déclarés responsables solidairement et indéfiniment. L’action en
responsabilité se prescrit 3 ans à compter du jour où la décision d’annulation est passée en force de
chose jugée.

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