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Droit international public


Transcription des vidéos YouTube

Cette transcription a été réalisée tenu compte des éléments suivants :

a) Elle est basée, essentiellement mais pas exclusivement, sur les vidéos YouTube postée par
le titulaire du cours à savoir Monsieur Olivier Corten
b) Ce dernier m’ayant envoyé, début septembre 2021, lesdites vidéos
c) Partant, cette transcription est valable pour l’année académique 2021-0222 mais aucune
garantie n’est donnée ni pour les années antérieures ni ultérieures
d) Le contenu de la présente ne peut être reproduit en tout ou partie et ce document n’est
destiné qu’aux étudiants qui suivent le cours de « Droit international public » donné par M.
Corten, précité, durant l’année académique 2021-2022
e) Enfin, les présentes informations sont fournies à titre informatif et n’ont aucune valeur ni
contractuelle ni plus que l’exactitude des informations n’est en aucun cas garantie

Merci pour votre compréhension.

Joey Sakala
I. Introduction 2

Il s’agit d’une transcription des capsules vidéos « YouTube » réalisées par


le Professeur Corten pour le cours de droit international public dispensé en
Français à la faculté de droit et de criminologie de l’Université Libre de
Bruxelles (ILB).

Cette transcription a été rédigée par un étudiant. Il se peut donc qu’elle


contienne un certain nombre d’erreurs qu’il y aura lieu, le cas échéant, de
rectifier.

Les thèmes qui seront abordés dans ce cours sont :


1) Les ambivalences de l’ordre juridique international. Dans ce « bref »
chapitre, il y aura lieu de se pencher sur la question de l’histoire du
droit international pour suivre avec la question de savoir si le droit
international est du droit… Et enfin, nous nous demanderons qui
peut et doit interpréter le droit international.
2) Nous passerons ensuite dans la deuxième partie du cours. Nous
nous intéresserons d’abord à la création de l’Etat. Dans un second
chapitre de cette partie, nous nous pencherons sur la question des
frontières de l’Etat. Le menu se poursuivra avec la question de
l’exercice de la souveraineté. Le plat principal de ce menu de cette
seconde partie portera sur les organisations internationales et nous
aurons, enfin, pour dessert, les personnes privées en relation avec
le droit international.
3) La troisième partie de ce cours et non des moindres portera sur les
sources du droit international. Ainsi, nous aborderons d’abord la
coutume comme source du droit international pour suivre avec les
traités. Enfin, dans cette partie, il sera également question des
autres sources du droit international.
4) Nous terminerons ce cours par des considérations plus « agitées ».
En effet, nous parlerons d’abord de la guerre pour suivre avec la
responsabilité internationale. Mais enfin, nous conclurons avec une
note de douceur en abordant la question des règlements pacifiques
des différents.

C’est un menu fort copieux qui nous attend… Et la mise-en-bouche se


trouve dès la prochaine page… Bonne route dans ce labyrinthe du droit
international… !!!
II. Table des matières 3

Table des matières


I. Introduction ........................................................................................................................2
II. Table des matières .......................................................................................................3
III. Les ambivalences du droit international .......................................................5
IV. La création de l’Etat.....................................................................................................6
1. Sommes-nous en présence d’un Etat ? ..........................................................9
2. Cet Etat avait-il le droit de se proclamer indépendant ? .................... 11
3. Quels sont les effets juridiques des reconnaissances ? ...................... 17
V. Les frontières de l’Etat ............................................................................................. 21
VI. L’exercice de la souveraineté ............................................................................... 22
1. Contexte....................................................................................................................... 24
2. Un paradoxe ? ........................................................................................................... 25
3. Quant aux compétences Nationales des Etats ? ..................................... 28
4. La non-intervention ............................................................................................... 31
5. Les immunités .......................................................................................................... 32
VII. Les organes internationaux ............................................................................... 37
1. Définition d’une organisation internationale ............................................ 39
2. Jusqu’où vont les compétences ? ................................................................... 45
3. Enfin, pour ce chapitre… Quelles sont les relations entre la Cour
Pénale Internationale et les Nations Unies ?....................................................... 46
VIII. Les personnes privées en relation avec les organes
internationaux ......................................................................................................................... 49
1. Qu’en est-il des droits humains ? ................................................................... 52
2. Mise en œuvre des droits humains ................................................................ 58
3. Sujet de droit : Des droits mais aussi des obligations ......................... 60
IX. La coutume..................................................................................................................... 63
1. Les relations entre la coutume et les autres sources du droit ........ 67
2. Comment vérifier s’il y a coutume ou non ?.............................................. 77
3. La coutume, un paradoxe ?................................................................................ 80
X. Les traités ....................................................................................................................... 86
XI. Les autres sources du droit international .................................................... 102
1. Textes adoptés par des Etats qui ne sont pas des traités ou ne
renvoient pas à de la coutume… La portée ? ..................................................... 106
2. Les déclarations unilatérales .......................................................................... 110
4
3. Les principes généraux du droit .................................................................... 113
4. La doctrine et la jurisprudence ...................................................................... 113
XII. La Guerre ................................................................................................................... 117
1. La portée de l’interdiction du recours à la force ................................... 120
2. Légitime défense ? ............................................................................................... 125
3. Le droit des conflits armés ............................................................................... 128
XIII. La responsabilité internationale ................................................................... 132
1. L’attribution du fait illicite à l’Etat : La question de l’imputabilité
136
2. Des circonstances permettant d’exclure l’illicéité ? ........................... 139
3. Mise en œuvre de la responsabilité .................................................................................... 140
4. Mise en œuvre de la responsabilité d’organisations internationales .................................. 143
XIV. Le règlement amiable des différends ......................................................... 145
1. Dans quelle mesure la règle du règlement pacifique des conflits
est-elle autonome ? Quelle est sa portée ?......................................................... 149
2. Le choix souverain du mode de règlement pacifique des conflits
150
3. Les règlements judiciaires dans le cadre des règlements
pacifiques des différends ............................................................................................. 154
4. Fragmentation du droit international ......................................................... 159
XV. Réponses aux questions posées durant les cours oraux ...................... 161
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III. Les ambivalences du droit international

Ce chapitre sera développé non pas sur base des capsules vidéos mais
bien sur un résumé du livre. En effet, il n’existe pas de capsules vidéos
pour ce chapitre. Et pour le surplus, le titulaire indique que ce chapitre
sera traité en cours directement.
IV. La création de l’Etat 6

Cette transcription est notamment basée sur le chapitre II de l’ouvrage de


référence.

Le titulaire fait écouter, au début, une chanson qui évoque,


indirectement, le droit international en invoquant notamment le
colonialisme. Cette chanson fait appel à des déclarations d’indépendance.
Le titulaire souligne que le droit international a dénoncé le colonialisme
par le biais du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Lorsque l’auteur
chante cette chanson en 2008, il y a des difficultés avec notamment les
Iles Féroé ou encore le Kossovo. Il y a une tension entre le droit à
l’autodétermination et la réticence à l’appliquer et ce, tant la Serbie pour
ce qui était du Kossovo mais aussi d’Etats tiers.

S’agissant du Kossovo, il s’est déclaré indépendant en 2008. L’on peut


voir sur une carte qu’il y a des frontières administratives aux confins de la
Serbie et du Kossovo. Le 17 février 2008, le Kossovo déclare son
indépendance. Ceci 10 ans après une période de dix années de guerre
d’indépendance, une guerre civile. Cette guerre s’est produite au sein de
la Serbie. La minorité de la Serbie à savoir des Albanais du Kossovo
souhaitaient faire sécession. La volonté était donc de se séparer de la
Serbie. Toutefois, cette dernière ne l’a pas entendu ainsi et elle a fait une
répression assez violente de cette « guerre de sécession ». Toute une
série de droits humains relevant du droit humanitaire ont été violés. De
tentatives de médiation à l’échelle internationale ont eu lieu… Le 23 mars
1999, l’OTAN a bombardé la Serbie et ce, afin de mettre fin à la
répression qui était en cours. Le 10 juin 1999, le conseil de sécurité n’a
pas réellement pris position mais il a adopté une résolution qui a mis en
place une administration internationale. C’est-à-dire que le Kossovo était
administré par l’ONU. Toutefois, le Kossovo demeurait une province de la
Serbie. Il y avait un régime international très particulier. A savoir que,
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d’une part, il y avait un territoire administré par l’ONU mais, d’autre part,
ce territoire restait sous la souveraineté de la Serbie. Le 17 février 2008,
le Kossovo a déclaré son indépendance. C’est l’assemblée du Kossovo qui
a déclaré cette indépendance. C’est un organe qui avait été mis en place
par l’ONU afin de savoir ce que souhaitait la population du Kossovo. La
Serbie s’est opposée à cette déclaration d’indépendance. Selon elle, il
n’était pas du tout prévu dans le régime d’administration international que
le Kossovo devienne un état indépendant. Selon la Serbie, il faut continuer
à négocier entre les autorités de Belgrade et de Pristina pour essayer
d’obtenir un compromis. En déclarant unilatéralement l’indépendance, le
Kossovo, selon la Serbie, aurait violé le droit international. Très vite, un
certain nombre d’Etats ont reconnus le Kossovo mais pas tous… C’est là le
souci… Très rapidement, on a constaté de la part des autres que si
certains comme la France, les Etats-Unis, la Belgique ont rapidement
reconnu le Kossovo comme Etat, d’autres se sont positionnés tout à fait
différemment. En effet, la Chine, l’Espagne, la Russie considéraient que le
Kossovo n’était pas un Etat et n’avait donc pas le droit à le devenir. C’est
ainsi que le conflit est né à l’échelle des Nations Unies. La Cour
Internationale de Justice a rendu, le 22 juillet 2010, un avis qui était
sensé éclaircir cette situation. Cela n’a pas été réellement le cas. En effet,
la Cour ne s’est pas positionné sur tous les points mais elle a indiqué que
la déclaration d’indépendance et seulement la déclaration n’était pas
contraire au droit international. C’est uniquement sur ce point de la
déclaration d’indépendance que la Cour s’est prononcée. En d’autres
termes, elle ne s’est pas prononcée sur la question de l’indépendance
mais sur le fait que les Albanais du Kossovo ont pu déclarer
l’indépendance. Il demeurait des questions à savoir notamment est-ce que
le Kossovo est un Etat et a-t-il el droit d’être un Etat ? Quelles étaient les
conséquences de cette reconnaissance du Kossovo comme Etat ? Et,
aussi, il subsiste également la question des successions entre Etats.
Quelques années plus tard à savoir le 4 septembre 2020, il y a eu un
accord de normalisation économique. Cet accord s’est fait à la Maison
Blanche sous l’égide du Président Trump. Il y avait, comme intervenants,
le Président du Kossovo, d’une part, et celui de la Serbie, d’autre part. Cet
accord ne met pas fin au conflit ; Il engage à la négociation. Les parties se
rencontreront à Bruxelles pour « essayer d’aboutir à une solution ». En
septembre 2020, le Kossovo est reconnu par un total de 98 Etats sur les
193 que compte l’Organisation des Nations Unies. Il y a une grande
division qui subsiste au sein des Nations Unies. Ce constat semble peu
optimiste. En effet, depuis 2008, cela ne semble pas évoluer. Certains
Etats ayant même fait volteface et ayant retirés leur reconnaissance du
Kossovo comme Etat.
Nous allons, notamment au travers de l’exemple du Kossovo, nous poser
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quatre questions. La première est de savoir est-ce qu’objectivement le
Kossovo est un Etat ? Autrement dit, sommes-nous face à un Etat ? En
second, nous nous demanderons si le Kossovo a le droit d’être un Etat ?
Les deux questions ne sont pas semblables. Par exemple, la Belgique est
devenue indépendante en 1830 mais à l’époque, il n’y avait pas de droit à
l’autodétermination. Ainsi, ce n’est pas parce que l’on est indépendant que
l’on avait le droit de le devenir. D’autres cas pourraient être évoqués. Tel
est par exemple le cas pour le Sahara Occidental qui, selon la majorité des
Etats, a le droit de devenir un Etat mais ne l’est pas encore. Dans un
troisième temps, il faudra se demander si les Etats reconnaissent l’Etat
dont question ? Et enfin, nous évoquerons la question de la succession
d’Etat à savoir quelles sont les conséquences juridiques d’un « nouvel »
Etat.

Le site Internet des Nations Unies met à


disposition une page d’actualités relatives au Kossovo, voir :
https://news.un.org/fr/tags/kosovo

Nous allons donc, dans les lignes à suivre, nous


poser quatre questions à savoir :

➢ Sommes-nous face à un Etat ?


➢ Avait-il le droit de se « proclamer » Etat ?
➢ Qu’en est-il de la reconnaissance par les autres Etats ?
➢ Enfin, quelles sont les conséquences juridiques de la création de ce
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nouvel Etat ?

1. Sommes-nous en présence d’un Etat ?

Les sources sont essentiellement coutumières. Il y a des textes


conventionnels qui existent mais ces textes sont très généraux. Il n’y a
par exemple pas une charte qui défini de manière précise ce que serait un
Etat. Il existe une convention de 1933. Cette convention ne lie que
certains Etats à savoir une minorité d’Etat qui sont des Etats Latino-
Américain. Ensuite, cette convention défini très généralement l’Etat mais
sans donner de précision quant aux critères qui vont successivement être
analysés. Pour le reste, il y a un avis de la Commission d’arbitrage sur la
Yougoslavie qui pourrait être pertinent. C’est un rapport d’experts rendu le
20 novembre 1991 à savoir au début de la désintégration de la
Yougoslavie. Dans la convention précitée ainsi que l’avis précité, il y a une
définition très générale qui énumère quatre critères à savoir le territoire,
la population, le gouvernement et la souveraineté. Ces 4 critères sont
évoqués et nous allons, à nouveau, les confronter au cas du Kossovo.

Les premiers ne posent pas véritablement de problème. Si l’on reprend la


carte du Kossovo, on constate assez rapidement qu’il y a un territoire.
C’est vrai que le statut des lignes frontières pourraient être contestées et
d’ailleurs tel est le cas. Dans tous les cas, il y a une assise territoriale.
Nous ne sommes pas dans la situation ou il y aurait un territoire virtuel,
pas d’assise territoriale. Ensuite, il faut également une population. Il n’y a
pas d’exigence de cohérence particulière. Par exemple, au Kossovo, il n’y
a pas que des Albanais qui s’expriment dans cette langue mais il y a
également des Serbes et d’autres minorités. Toutefois, lorsque l’on dit
qu’il faut une population, l’on vise le fait qu’il faille qu’il y ait un certain
nombre de personnes qui vivent sous l’égide du Gouvernement. Pour le
cas du Kossovo, il n’y a pas de débat sur ce point. Sur le point du
gouvernement, il y a par contre des discussions. Il y a-t-il véritablement
un souveraineté ? La question est de savoir si l’Etat dont question est
souverain… C’est-à-dire sommes-nous ou pas soumis à une autorité
supérieure. Dans le cas du Kossovo, le problème « saute aux yeux ». Les
autorités de Pristina estiment qu’elles sont souveraines. Ces autorités
considère nt qu’elles ne sont plus soumises à l’autorité de Belgrade.
Tandis que ces derniers considèrent, au contraire, qu’il n’y a pas de
souveraineté du Kossovo. Selon Belgrade, il est vrai que la Serbie a
accepté que l’ONU administre le Kossovo mais c’est en tant que partie de
la Serbie. Dés lors, quels sont les critères qui pourraient « départager » ?
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Nous retrouverons ces critères déterminants dans la coutume à savoir
dans la pratique. On observe qu’il faut avoir un certain pouvoir effectif sur
la population et le territoire qui compose l’assise matérielle et humaine. Il
faut une effectivité… Il ne suffit ainsi pas de proclamer l’indépendance
d’une région. Il faut avoir réussi exercer une certaine effectivité sur le
territoire que l’on revendique. Il faut faire cela avec une certaine stabilité…
Nous pourrions prendre le cas de l’URSS qui, selon le titulaire, est
emblématique de la succession d’Etat et de la sécession. Dans le cas de
l’URSS, nous avons eu la création de toute une série d’Etats comme
l’Ukraine, la Biélorussie, l’Azerbaïdjan… Ces états ont proclamés
l’indépendance. Très rapidement, on a reconnu l’existence de l’Etat
puisque les autorités exerçaient effectivement leur pouvoir sur le territoire
avec une certaine stabilité. En effet, il n’y avait pas contestation et plus
particulièrement de contestation violente du pouvoir central c’est-à-dire
de Moscou. Dés lors, très rapidement, ces Etats ont, unanimes, été
reconnus comme de nouveaux Etats. Ils ont d’ailleurs été admis au sein
des Nations Unies. Si l’on prend le cas de la Yougoslavie. Ce cas étant en
rapport direct avec le Kossovo. Ce dernier n’étant qu’un « avatar » de la
désintégration de la Yougoslavie. On constate quelques cas de figure. Au
départ, la Yougoslavie s’était de la Slovénie tout au Nord jusqu’à la
Macédoine tout au Sud ; C’était un Etat Fédéral avec des Républiques à
l’intérieur de la République. Aujourd’hui, le cas du Kossovo est
controversé. Mais les autres Républiques d’ex Yougoslavie sont toutes
devenues des Etats indépendants. Il y a eu finalement trois cas de figure
qui peuvent illustrer la question de la stabilité à savoir, in fine, quand il y
a-t-il un nouvel Etat ? Le premier cas de figure que l’on peut illustrer par
le Monténégro et la Macédoine. Dans ces deux premiers cas, il n’y a pas
véritablement eu de conflit. Très rapidement, les autorités de Belgrade ont
admis l’indépendance. C’était explicite dans le cas du Monténégro mais
implicite dans le cas de la Macédoine devenue aujourd’hui Macédoine du
Nord. Il n’y a donc plus eu de contestation à cet égard ; La stabilité dés ce
moment est assez « évidente ». Ils sont ainsi rapidement devenus des
Etats. Avec, certes, une controverse sur le nom pour la Macédoine mais ce
sont devenus rapidement des Etats. Dans ce premier cas de figure, il y a
eu très rapidement un accord. Le second cas de figure portera sur la
Croatie, la Bosnie-Herzégovine et la Slovénie. Au départ, il n’y a pas eu
d’accord des autorités de Belgrade. Au contraire, il y a eu un conflit
armée, une guerre civile. Ce n’est qu’après quelques mois que les
autorités Yougoslaves ont renoncées à empêcher le sécession de ces trois
Etats. La proclamation d’indépendance de ces trois Etats a eu lieu durant
l’été 1991 et puis en avril 1992, la Yougoslavie a proclamé, dans une
nouvelle Constitution, l’existence d’une nouvelle République fédérative
Yougoslave avec comme composantes la Serbie et le Monténégro ce qui
signifie que les autres anciennes Républiques ne faisaient plus partie de la
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Yougoslavie. C’est partir de ce moment que ces nouveaux Etats ont été
admis au sein des Nations Unies. Ainsi, dans ce second cas, il y a d’abord
un conflit puis relativement rapidement un accord et une reconnaissance
massive de ces Etats. Le troisième cas de figure porte sur le Kossovo. IL y
a également, dans ce cas, au départ, un conflit mais qui, dans un premier
temps, ne dégénère pas en conflit armé. Néanmoins, la Serbie dit très
clairement qu’elle n’accepte pas l’indépendance du Kossovo. Le souci est
que tant que la Serbie ne reconnait pas, il n’y a pas de stabilité. On ne
sait pas très bien ce que sera l’avenir… La conclusion que l’on peut tirer de
cette question c’est que la question est débattue. Si l’on applique les
critères de la coutume, on doit plutôt conclure à l’idée de ce que sur le
terrain, il n’y a pas d’Etat. Il n’y a pas dans le chef des autorités centrales
à savoir les autorités Serbes un accord sur l’indépendance du Kossovo.

En bref, pour qu’il y ait un Etat, selon la coutume, quatre conditions


doivent être remplies :

➢ Un territoire
➢ Une population
➢ Un gouvernement
➢ Une souveraineté

Dans le cas analysé du Kossovo, il y a lieu de remettre en cause le fait


que nous soyons face à un Etat et, ce, pour toutes les raisons exposées ci-
dessus.

A noter que le droit conventionnel donne une idée « générale » de ce que


devrait être un Etat mais que c’est, à ce jour, la coutume qui règle cette
question.

2. Cet Etat avait-il le droit de se proclamer


indépendant ?

Nous allons ici nous poser la question de savoir si l’Etat avait le droit
d’être un Etat et, le cas échéant, s’il y avait une interdiction. S’agissant du
droit à devenir un Etat, il faut renvoyer au droit des peuples à disposer
d’eux-mêmes. Les Etats sont loin d’avoir admis pour les minorités se
trouvant sur leur territoire de se séparer des peuples qui se trouvent sur
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leurs territoires ; C’est une question de souveraineté et d’intégrité du
territoire. Les Etats auront des arguments de poids au regard du droit
international pour ouvrir ce droit. La principale convention est la charte
des Nations Unies qui évoque de manière lacunaire ce droit. Toutefois, des
résolutions des Nations Unies viennent « compléter le panel » avec,
notamment, les résolutions n°1514 et n°1441 adoptées en 1960 mais
également les résolutions 2625 et 3314 qui, pour cette dernière, défini
l’agression. Il s’agissait là de résolutions portant sur des peuples sous
domination voir sous régime raciste. Le cas du Kossovo se situe plus
globalement dans l’idée de se détacher d’un Etat. Doit-on considérer que
le maintien du Kossovo en Serbie est une forme de colonialisme ou de
néo-colonialisme ? Sur le plan du droit international, il y a une série de
critères très restrictifs pour savoir si l’Etat le droit ou non de proclamer
l’indépendance. Ce caractère restrictif tient en ce que les Etats craignent
des déclarations en cascade, un effet domino… Les critères dont question
se retrouvent surtout dans la Résolution n°1541 dont question ci-dessus.
En regardant une carte, le Kossovo est composé de toute une série de
populations ou de groupes sociaux et ethniques différents. Il y a
essentiellement des Serbes mais également d’autres minorités. La
séparation ethnique ou culturelle entre le Kossovo et le reste de la Serbie
apparaissant comme assez évidente puisqu’il y a une relative majorité
d’Albanais au Kossovo tandis que dans le reste de la Serbie, cette
« ethnie » n’est que minoritaire. L’on peut donc parler de séparation
ethnique et culturelle ; Il s’agit là de l’un des critères de la Résolution
n°1541, précitée. D’autre part, il y a également un critère de domination à
savoir la Serbie domine-elle le Kossovo ? Cette réponse est complexe à
fournir puisque, au moment de la déclaration d’indépendance, il y a un
régime international d’administration. Toutefois, la déclaration
d’indépendance fait suite à la crainte de ce que, au terme de
l’administration internationale, il y aurait une domination des autorités
Serbes. Ce critère est donc complexe à appliquer. S’agissant du troisième
critère, il faut avoir égard à la séparation géographique et ce critère se
retrouve également dans la Résolution n°1541, susmentionnée. Les
choses à cet égard seront plus objectives et pour qu’il y ait le droit à
l’autodétermination, il faut que la population soit séparée
géographiquement de la métropole. Tel était le cas avec le Congo. En
effet, il n’y avait pas qu’une frontière terrestre mais bien également des
milliers de kilomètres qui séparaient la métropole de la « colonie ». Dans
ce dernier cas, il n’y avait pas de territoires contigus. Relativement à la
Serbie et le Kossovo, il n’y a pas de séparation géographique. Si même
l’on considère qu’il en est distinct (de la Serbie), il y a une limite directe
entre les deux entités. Dés lors, en appliquant le critère géographique, le
« peuple » ou plutôt dire la minorité du Kossovo n’a pas le droit de faire
sécession. La Résolution n°1541 a été adoptée en 1960 et il est possible
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de se demander si les choses n’ont pas évolué. Nous pourrions envisager
qu’il y aurait un droit élargi à la sécession. Certains ont parlé de sécession
« remède » c’est-à-dire qu’il y aurait un remède à de graves violations du
droit international. En l’occurrence, si une minorité fait l’objet d’une
répression de la part de l’Etat central à savoir, en l’espèce, la Serbie, la
chose serait à envisager autrement. S’il y a une réelle « oppression », à
ce moment-là aurait le droit à l’indépendance comme remède à cette
« violation grave » du droit international dont cette population aurait été
victime. Dans le cas du Kossovo, il y a trois soucis si l’on souhaite
appliquer l’hypothèse de « l’indépendance remède ». Le premier souci est
qu’il faut une répression féroce. La déclaration d’indépendance a été
proclamée en février 2008 et à ce moment-là, il n’y avait pas du tout
d’oppression de la minorité Kossovare. La Serbie avait accepté un régime
« spécial » pour cette région. Si la déclaration avait été faite en pleine
guerre civile, on aurait peut-être pu appliquer l’hypothèse. Tel aurait pu
être le cas en 1991 alors que la guerre civile faisait rage. En second, si
l’on s’attache à la déclaration d’indépendance, l’on constate que le
Kossovo ne souhaite lui-même pas appliquer cette « sécession remède ».
D’ailleurs, l’on peut lire dans la déclaration que le Kossovo serait un
« special case » entendez un « cas spécifique ». La déclaration insiste sur
le fait qu’il ne s’agit pas d’un « précédent ». Les autorités du Kossovo ne
souhaitaient pas appliquer un droit qui aurait pu constituer un précédent.
Il s’agit ainsi d’un cas exceptionnel. En réalité, le Kossovo ne soulève pas
lui-même le droit à l’autodétermination ni plus qu’il ne souhaite faire
appliquer la « sécession remède ». En troisième lieu, si l’on examine la
position des autres Etats tant ceux qui ont reconnus le Kossovo que ceux
qui ont participés à l’avis rendu par la Cour Internationale de Justice, on
constate que la plupart ont plutôt suivi la « théorie » du Kossovo qui,
rappelons-le, est de faire de son cas un cas exceptionnel. Dés lors, ces
Etats ont reconnus le Kossovo non pas sur ces prémices mais bien sur les
éléments constitutifs de l’Etat à savoir, pour mémoire, le territoire, la
population, le gouvernement souverain… Selon ces Etats, dés lors que les
autorités Serbes ont, sur le territoire du Kossovo, renoncées, ipso facto, à
exercer un pouvoir sur ces terres, il y a une effectivité en faveur des
autorités du Kossovo. Partant, le Kossovo serait un Etat souverain. Il y a
néanmoins des discussions quant au fondement relatif à la « sécession
remède » en ce que le Kossovo mais également les Etats qui ont reconnu
le Kossovo auraient dû clairement invoquer la « théorie de la sécession
remède » mais tel ne fut pas le cas. A la suite de l’indépendance du
Kossovo, d’autres Etats comme l’Ossétie du Sud (région du Caucase) ou
l’Abkhazie ont également proclamées, la même année, leur indépendance.
Plus tard, en Ukraine, il y a également eu la Crimée. Dans ces derniers
cas, il n’y a pas de situation particulière et se faisant, il n’y a pas de droit
à invoquer le droit à l’autodétermination. Ainsi, nous pouvons dire que le
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Kossovo ne souhaitait pas faire de précédent mais dans les faits, tel fut le
cas… Ce que montre le Kossovo dans le cadre de la « théorie de la
sécession remède » c’est qu’il n’est pas du tout facile de l’appliquer et on
ne l’évoque pas aussi « facilement » que ce que certains souhaiteraient…
Il n’y a donc pas de droit à l’indépendance du Kossovo.

En bref, les questions à se poser sont :

➢ Une séparation culturelle ou ethnique ?


➢ Une domination ?
➢ Une séparation géographique ?

Selon les réponses à ces questions, nous pourrons conclure au droit à se


proclamer indépendant ou non et ce, grâce, notamment, à la
Recommandation n°1541 des Nations Unies. Toutefois, si cela ne
fonctionne pas, nous pourrions nous tourner vers l’autodétermination
remède qui requière que l’on envisage les trois points suivants :

➢ Est-ce qu’il y a, au jour de la déclaration d’indépendance, une


oppression / répression ?
➢ L’Etat qui se proclame indépendant évoque-il cette faculté
d’indépendance remède ?
➢ Le cas échéant, les Etats tiers reconnaissent-ils ce cas de figure à
savoir qu’il pouvait y avoir un droit à l’autodétermination remède ?

Par contre, il y aurait-il une violation du droit international ? Il y aurait-il


violation du principe « ex iniruria ius non oritur » ? A savoir que l’on ne
peut pas récompenser une violation du droit en lui reconnaissant des
effets juridiques… C’est ce qui ressort de certains articles de la
Commission du droit international sur la responsabilité internationale mais
c’est ce qui ressort aussi de la coutume. A ce dernier égard, nous
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pourrions prendre le cas de la Chypre Nord en 1974 ou encore de la
Crimée en 2014. Ce fut deux précédents assez clairs. Ces deux entités à
savoir Chypre Nord et la Crimée qui faisaient respectivement partie de
Chypre et de l’Ukraine ont proclamées l’indépendance avec certains effets
sur le terrain. Toutefois, les autres Etats n’ont pas reconnus l’effectivité de
la souveraineté (voir plus haut) puisque, pour Chypre Nord, il s’agissait
d’une intervention militaire de la Turquie en 1974 et de la Russie en 2014.
Dés lors, il y aurait une séquence d’évènements qui ferait en sorte que ce
serait contraire au droit international et partant, il ne peut y avoir d’effets
juridiques à cette « effectivité ». Il y aurait, en l’occurrence, une
interdiction de la sécession. Mais qu’en est-il pour le Kossovo ? La
situation est fort différente. La Cour internationale de Justice s’est
prononcée sur la déclaration d’indépendance. Deux paragraphes de l’avis
en question sont intéressants à analyser. En l’occurrence, il s’agit des
paragraphes 80 et 81. Le paragraphe 81 se prononce de manière générale
quant au fait que la déclaration d’indépendance ne viole pas l’intégrité du
territoire. En effet, suivant ce raisonnement, Chypre peut invoquer
l’intégrité territoriale par rapport à la Turquie ainsi que l’Ukraine à
l’encontre de la Russie. Il s’agit donc là de l’intégrité vis-à-vis de l’Etat
tiers ; Ce n’est donc que dans les relations entre Etats. En l’occurrence,
lorsqu’il y a une déclaration d’indépendance, ce sont des citoyens qui font
cette déclaration et non pas un Etat. L’on serait donc dans une situation
« interne ». Ce n’est donc pas une interdiction. Le droit international, à cet
égard, est neutre quant au droit à la sécession. C’est donc laisser au
rapport « des faits », des « négociations » le droit à la sécession.
Appliquant cela à la Belgique, il n’y a pas de droit au démembrement de
notre pays mais il n’y a pas non plus d’interdiction. Appliquant au
Kossovo, il n’y a donc pas de violation de l’intégrité territoriale de la
Serbie. Sous cet angle, ce n’est pas interdit de faire sécession.
Relativement au paragraphe 81 de l’avis précité, la Cour mettra l’accent
sur le cas de l’effectivité de Chypre Nord pour refuser et l’on a même dit,
en l’espèce, qu’il y avait violation du droit international et ce, parce que la
déclaration d’indépendance faisait suite à une intervention militaire de la
Turquie. Selon la Cour internationale, l’illicéité n’est pas due au simple fait
de déclarer l’indépendance mais bien parce que le recours à la force
(intervention militaire pour Chypre Nord) était illicite. S’il y avait d’autres
violations graves du droit international qui ont une nature impérative, le
souci est le même… En cas d’invasion, il y a une violation territoriale et
partant, tenu compte des prémices pré-décrits, il y a interdiction de faire
la déclaration d’indépendance. Ceci est vrai pour Chypre Nord et la Crimée
mais ce n’est pas vrai pour le Kossovo. L’on peut pu raisonner autrement
en pensant que puisqu’il y a eu intervention militaire de l’OTAN au
Kossovo, cet Etat a pu déclarer l’indépendance mais que sans cette
intervention, le Kossovo n’aurait pas été en mesure de négocier son
16
indépendance. Partant, dans une certaine « limite » et avec une
interprétation à méditer, il pourrait y avoir application du principe « ex
iniruria ius non oritur ». On considère que ce n'est pas le cas puisque le
Conseil de sécurité des Nations Unies n’a pas évoqué ceci et pour cause
puisque ce sont notamment les Etats-Unis qui ont poussés l’intervention
militaire de l’OTAN au Kossovo ; On voit mal comment cet Etat pourrait se
remettre en cause, faire « volte-face ». Par ailleurs, la déclaration est
arrivée 9 années après l’intervention militaire de l’OTAN ce qui voudrait
dire qu’il serait compliqué d’invoquer le principe « ex iniruria ius non
oritur ». Ce dernier étant un principe idéalise ; C’est une déclaration de
principe très forte qui indique que dans tous les cas, l’on doit respecter le
droit international mais, de facto, il y a la réalité de terrain et notamment
la réalité politique. Au Kossovo, il y a eu une stabilité dans le temps…
Conclusion, on peut estimer qu’il n’y a pas, pour le Kossovo, une
interdiction à la sécession.

La Cour Internationale de Justice met à disposition,


sur son site Internet, un résumé de l’avis relatif à la déclaration
d’indépendance du Kossovo, voir : 16011.pdf (icj-cij.org) Par ailleurs, sur
le site Internet de l’OTAN, on retrouve un dossier « spécial » relatif au rôle
de l’OTAN au Kossovo, voir : NATO - Topic: Le rôle de l'OTAN au Kosovo Il
y a également un article intéressant sur le site Internet de la Croix Rouge
internationale au sujet de l’intervention de l’OTAN de 1999, voir :
https://www.icrc.org/fr/doc/resources/documents/misc/5fzg3n.htm
En bref, nous devons méditer sur le fait de savoir si le Kossovo avait le
17
droit ou, au contraire, n’avait pas le droit de faire une déclaration
d’indépendance. Selon le titulaire, il n’y a véritablement un droit à
l’autodétermination ni plus qu’il n’y a une réelle interdiction. De fait, nous
sommes donc renvoyés à notre première question à savoir… Est-ce un
Etat ?

3. Quels sont les effets juridiques des


reconnaissances ?

Plus de la moitié des Etats membres ont reconnus le Kossovo. La


reconnaissance universelle est donc loin d’être acquise. D’autant que
certains Etats ont retirés les reconnaissances qu’ils avaient émis à savoir,
par exemple, le Suriname, Madagascar… Ces Etats ayant retirés leurs
reconnaissances. La Serbie mène des campagnes diplomatiques pour faire
retirer des reconnaissances tandis que le Kossovo mène également des
campagnes pour faire établir des reconnaissance ; Il s’agit là de rapports
de force de nature essentiellement politique. Le droit international a-t-il
quelque chose à dire sur ces questions politiques ?

D’abord, il y a-t-il des limites juridiques ? Ensuite, il y a—t-il des effets


juridiques à la reconnaissance ?

A la première question, la réponse est très simple. Non, si l’Etat ne


souhaite pas reconnaitre et quelque puisse être la raison, il ne reconnait
pas. Le cas d’Israël est emblématique. En effet, certains Etats ne
reconnaissent pas Israël et pourtant c’est un Etat. A contrario, il y a-t-il
des interdictions de reconnaitre ? Dans les cas de Chypre-Nord et de la
Crimée, il y avait une interdiction à reconnaitre. Le cas échéant, ce sera le
Conseil de Sécurité des Nations Unies ou la Cour internationale de Justice
qui pourront interdire. Tel fut par exemple le cas pour la Namibie ou les
« territoire occupés » de la Palestine. S’agissant donc de la limite de la
reconnaissance, mise à part « ex iniruria ius non oritur », il n’y a, à priori,
pas de limite. Toutefois, il y a également le principe de non-intervention.
La question qui se pose sous cet angle est de savoir si les Etats qui ont de
suite reconnus le Kossovo à la suite immédiate de la déclaration n’ont pas
fait une intervention qu’ils ne pouvaient donc pas faire. Ne se sont-ils pas
immiscés dans les affaires intérieures de la Serbie ? Cette reconnaissance
va renvoyer à la définition du principe de non-intervention. Ce principe
suppose que l’on ne fait pas que donner un avis sur une situation (analyse
juridique par exemple) mais on contraint. A priori, on peut donner son
18
avis mais on ne peut pas contraindre. En l’occurrence, contraindre la
Serbie à reconnaitre elle-même le Kossovo. La reconnaissance pourrait
être considérée contraire au principe de non-intervention. Ceci étant, s’il
n’y a que la reconnaissance et rien que ça… Il n’y a pas à priori aucun
souci puisque l’on peut mal imaginer une contrainte par une simple
reconnaissance. Certains Etats ont retirés leurs reconnaissances puisque
les attitudes de ceux-ci ont été « diplomatiques ». Ils ont réagis en
fonction de la situation qui était évolutive. Par contre, s’agissant des
Etats-Unis, ils ne se sont pas contentés de reconnaitre le Kossovo. En
effet, ils sont intervenus matériellement pour favoriser l’indépendance.
Dés lors, il n’y a pas eu que l’acte de reconnaissance mais bien plus ce qui
viole, en l’espèce, le principe de non-intervention. Le comportement des
Etats-Unis était un comportement de contrainte ; C’était même clairement
revendiqué par les Etats-Unis. Il y a des limites juridiques à la
reconnaissance mais elles sont « flous ».

Notons que le principe de non-intervention


sera analysé plus tard dans le cours…

D’autre part, quels sont les effets juridiques de la reconnaissance ? La


reconnaissance est-elle constitutive de l’existence de l’Etat ? Ou celle-ci se
borne-elle à reconnaitre la situation ? Ou, autrement dit, à simplement
constater la situation… Ce dernier cas est la théorie de la reconnaissance
déclarative. Par rapport au Kossovo, on voit qu’il y a une difficulté de la
thèse de la reconnaissance constitutive. Deux soucis se posent à cet
égard. Une série d’Etats ont optés pour la reconnaissance simplement
déclarative. L’article 3 de la convention de Montevideo qui met en œuvre
cette théorie dit que la reconnaissance est indépendante des autres
reconnaissances. En d’autres termes, on se borne à voir si l’on est dans
les conditions de l’existence de l’Etat sans avoir égard avec d’autres
reconnaissances. Le premier Etat qui reconnaitra ne pourra que se
satisfaire de ces critères d’existence de l’Etat à savoir le territoire, la
population, le gouvernement et la stabilité. S’agissant de l’agression, la
19
Résolution 3314 des Nations Unies évoque la définition de l’Etat. Cette
définition dit que la reconnaissance d’un Etat est indépendante de la
reconnaissance de cet Etat par un tiers. En d’autres termes, il est
indifférent, sous ces deux définitions, qu’un Etat ait déjà reconnu ou non.
Il suffirait de ne pas reconnaitre un Etat pour pouvoir l’agresser… C’est
précisément pour éviter l’agression que l’on écarte la théorie constitutive.
Sous cet angle, la théorie constitutive est juridiquement nulle. Autrement
dit, de ce point de vue, il n’y a pas d’effets en droit de la reconnaissance.
Il est donc indifférent qu’il y ait 1, 10, 50, 100, 193… reconnaissances. En
pratique, il y aura toujours des tensions entre la théorie et la
« philosophie ». Il serait difficilement imaginable de dire qu’un Etat peu
exister si personne ne le reconnait… Si par contre, la Serbie reconnait le
Kossovo, la chose devient fort différente… Dans ce cas, il y aurait
admission dans les organes internationaux. Les reconnaissances n’ont pas
d’effet au sujet du Kossovo sauf à ce que la Serbie ne reconnaissance elle-
même.

Mais qu’en serait-il au sujet de la succession d’Etat ? Nous sommes dans


le domaine du rapport de force, de la négociation. Il existe des
conventions. Celles-ci n’ont été que très peu ratifiées. En tout état de
cause, elles ne lient que les Etats existants. Une fois que l’on a un nouvel
Etat, il ne sera pas lié. Ainsi, ces conventions seront plus une sorte de
« ligne de conduite ». Deux questions peuvent se dégager. S’agissant des
organisations internationales, si l’on suppose que le Kossovo devienne un
nouvel Etat… En appliquant la coutume, le Kossovo ne sera pas membre
de plein droit (d’office) des organisations internationales ; Il devra en faire
la demande. Il ne sera non plus de droit membre du Conseil de l’Europe,
de l’OTAN… Il devra faire des demandes d’adhésion. Ce sont des
« clubs ».. Dans le cas de la Catalogne ou, le cas échéant, la Flandre, on a
souvent dit que ces « entités » seraient membres de plein droit des
« clubs » à savoir par exemple l’Union Européenne… Mais la coutume ne
montre pas du tout cela… En effet, s’agissant de l’ex Yougoslavie, les Etats
qui ont succédés ont dus faire des demandes… Par contre, le reste de
l’Etat « désintégré » reste membre des organisations dont il faisait partie.
Tel serait le cas pour la Serbie. C’est ce que l’on appelle l’Etat
continuateur. Au sujet du Kossovo, i la par exemple été autorisé à faire
une demande d’intégration au fond monétaire international. S’agissant de
la deuxième question à savoir l’adhésion aux conventions et traités, l’on
peut fournir la même réponse à savoir que l’Etat « nouveau-né » n’est pas
lié. Nous pouvons nous poser la question de la Convention Européenne de
sauvegarde des Droits de l’Homme (C.E.D.H.) et ce, s’agissant du
Kossovo. Notre réponse sera très claire : « Non, le Kossovo n’est pas lié ».
Lorsque l’on a un nouvel Etat, il devra demander de faire partie des
20
traités, d’y adhérer. Alors même que dans la convention de 1978, il y
aurait une adhésion d’office… La pratique / coutume indique le contraire.
L’Etat qui demeure reste membre des organisations et partie aux traités.

Conclusion :
Tout est question de négociation. Il y a du politique partout. Dans le cas
du Kossovo, on est en attente des résultats des négociations… La question
de la création de l’Etat est donc imprégnée d’aspects juridiques et
politiques…
Mais le Kossovo est-il un Etat ?

La vidéo YouTube de ce chapitre est disponible


en suivant ce lien : https://www.youtube.com/watch?v=Fqwlv6fGGKo
Et le titre de Bjork « declare indépendance » est disponible en suivant ce
lien : https://www.youtube.com/watch?v=eI4PYgn3oRE
La RTS (radio-télévision Suisse) a publié, en 2020, un reportage intitulé
« Kossovo, la guerre silencieuse », voir :
https://www.youtube.com/watch?v=5Y11W_nSpYk
Quant à « France 24 », ils ont publié une vidéo intitulée « Kossovo : Les
maux de l’indépendance », voir :
https://www.youtube.com/watch?v=AwZpOB-IkXw
V. Les frontières de l’Etat 21

Ce chapitre sera également, tout comme le chapitre I relative aux


ambivalences du droit international, transcrit sur base du livre « une
introduction critique au droit international » publié par le Professeur
Corten. Toutefois, il est à préciser que, selon un mail reçu du Pr. Corten,
ce chapitre n’est cette année pas matière d’examen.
VI. L’exercice de la souveraineté 22

Le professeur fait écouter, comme à l’accoutumée, une musique. Celle-ci


est pour le moins « entrainant ». Il s’agit de « Washington Bullets » du
groupe Clash. Ce groupe fait allusion aux évènements qui ont eu lieu à
l(époque (1980) au Nicaragua. Selon eux, il n’y a pas eu d’ingérence des
Etats-Unis dans les évènements qui ont eu lieu au Nicaragua. Il y a eu une
révolution. Mais les Etats-Unis ne sont pas intervenus. Il s’agissait d’une
dictature. Le fait que les Etats-Unis ne se sont pas immiscés est, selon le
groupe, conforme, d’une part, à l’exercice de la souveraineté mais, d’autre
part, également conforme au droit international et aux libertés
fondamentales. Selon la souveraineté, la protection des droits humains
n’est pas incompatible avec la souveraineté. Au contraire, la protection de
la première composante va de paire avec la seconde. Cette année-là le
Président Regan est arrivé au pouvoir. Il semblerait que le Président n’ait
pas été « charmé » par cette chanson puisque quelques mois après, il a
entamé une vaste opération au Nicaragua pour mette fin à la révolution.
Les Etats-Unis avait invoqué la protection des droits humains que pour
pouvoir prétendre avoir le droit d’intervenir. L’on pourrait, de ce point de
vue, penser que les droits humains sont opposés à l’exercice de la
souveraineté. Il s’agira, dans ce chapitre, de se demander si les deux sont
compatibles ou, au contraire, totalement opposés.

Cette chanson peut se retrouver sur :


https://www.youtube.com/watch?v=mkoWjhZOKWo

Le cas d’espèce ne sera pas le Nicaragua comme aurait pu le laisser


penser cette petite introduction mais bien la Syrie.
23

En effet, en Syrie, il existe un certain nombre de problématiques relatives


à la protection des droits humains. D’un côté, on pourrait se dire que ce
qui s’y passe, s’y passe mais, d’un autre côté, l’on peut penser qu’il y a
lieu de se pencher sur la question de la protection des droits humains. Il
s’agit de respecter les conventions qui lient la Syrie ainsi que le droit
humanitaire. Les Pays-Bas ont fait une annonce en septembre 2020
indiquant qu’ils allaient poursuivre la Syrie pour la violation de la
convention relative à l’interdiction de la torture à savoir, en l’espèce,
relative à une protection d’un droit humain. Cette annonce met en avant
cette problématique ou, autrement dit, cette « tension » entre
souveraineté et protection des droits humains. En dépit de la souveraineté
de la Syrie, les Pays-Bas estiment que, quand bien même cet Etat serait
souverain, il n’a pas le droit de violer les droits humains. Les Pays-Bas ont
envoyé une note diplomatique à la Syrie indiquant que l’Etat devait
respecter la convention interdisant la torture. Ils se sont déclarés prêts à
entamer des négociations, le cas échéant un arbitrage et si ça ne
fonctionne, ça volera devant la Cour Internationale de Justice. Les
mesures envisagées par les Pays-Bas sont elles compatibles avec la
souveraineté ? Par ailleurs, en Allemagne, un procès a démarré en avril
2020 contre deux « potentiels » tortionnaires Syriens et ce, sous le
couvert de la compétence universelle. Nous pourrions également citer
l’exemple de la confirmation (au travers de la presse) qui tend à dire que
Donald Trump avait pour projet d’exécuter Bachar El-Assad… Ce sont des
exemples qui permettent d’illustrer les 4 grandes idées qui feront le fil
rouge de ce chapitre. D’abord, il y a-t-il un paradoxe entre souveraineté et
protection des droits humains ? Peut-on donc dire souveraineté et droit
international ? En second, nous nous demanderons si les Etats sont
compétents pour la protection des droits humains ? Ou, pus
généralement, du droit international. Comment concilier l’exercice de
compétences d’Etats ? S’agissant, par exemple, de la Syrie sur son
territoire pour la protection des droits humains ou d’Etats tiers dans cette
même perspective. Tertio, nous nous demanderons si la Syrie pourrait
invoquer le principe de « non-intervention »… Et enfin, nous nous
poserons la question des immunités. Qu’en est-il des immunités de l’Etat ?
24
Des immunités de certains des représentants de l’Etat ? Les immunités
peuvent-elles jouer ? SI oui, dans quelle mesure ?

1. Contexte

Nous devons nous référer au printemps Arabe. De février à avril 2011, il y


a eu un certain nombre de révolutions désignées sous le nom de
printemps Arabe. Elles ont notamment eu lieu en Egypte, en Tunisie, au
Bahreïn… En Syrie, il y avait des protestations contre le régime dictatorial
qui existait déjà. Il y avait de très violenets répressions de ces
mouvements de contestation. Le Conseil des droits de l’homme des
Nations Unies va créer en août 2011 une commission internationale
indépendante d’enquête. Celle-ci sera chargée de savoir ce qu’il s’y
déroule et de faire le point sur les violations présumées des droits
humains dans ce pays. En septembre 2020, il y a eu un total de 21
rapports qui ont été publiés par la Commission. L’assemblée générale de
l’ONU dés le mois de décembre 2011 va adopter des résolutions
condamnant des violations des droits humains. En juin 2012, le comité
international de la Croix Rouge (en abrégé C.I.C.R.) va considérer que l’on
est entré dans une situation de conflit armé à base territoriale ; Le régime
ne contrôle plus l’ensemble de son territoire. D’autres états vont intervenir
dans le conflit. En particulier et par exemple, l’Arabie Saoudite va prendre
position favorablement pour les rebelles. Le 22 mai 2014, un projet du
conseil de sécurité tendant à renvoyer à la Cour Pénale internationale le
cas de la Syrie obtient 13 voix en faveur du projet et 2 voix contre. Il
s’agit de la Chine et de la Russie. IL y a donc deux vétos qui empêchent
que l’espèce ne puisse être renvoyé à la Cour Pénale internationale. Sur le
terrain, la situation va encore se complexifier avec, en juin 2014, la
proclamation du khalifat de l’Etat Islamique. Ceci va susciter un certain
nombre d’interventions militaires dont des Etats-Unis notamment en Iraq
mais aussi en Syrie. Toutefois, ce ne sera pas le seul pays à intervenir à
l’encontre de l’Etat Islamique. En effet, en octobre 2015, la Russie se
positionne en faveur du gouvernement Syrien. A partir de ce moment, le
conflit prend des proportions internationales. En avril 2017 et avril 2018,
les Etats puis la France et les Royaume-Unis vont bombarder la Syrie au
nom de la protection des droits humains dans ce pays. Le régime Syrien
avait utilisé l’arme chimique ce qui a entrainé ces réactions. Forcés de
constater qu’il y a, en Syrie, une situation très complexe avec une guerre
civile, des violations des droits humains commis… En 2020, il y a eu des
procédures judiciaires qui ont été entamées (voir introduction). Notons
que la Syrie n’est pas partie au statut de la Cour Pénale internationale.
25

Sur le site officiel des Nations Unies, il y a une


publication de « presse » relative au véto posé par la Chine et la Russie
relatif au projet du 22 mai 2014, voir : La Chine et la Fédération de Russie
bloquent un projet de résolution sur la saisine de la Cour pénale
internationale (CPI) pour les crimes graves commis en Syrie | Couverture
des réunions & communiqués de presse Sur le site de l’organisation
« HRW », il y a également une publication à ce sujet, voir :
https://www.hrw.org/fr/news/2014/05/22/conseil-de-securite-de-lonu-
les-deux-vetos-trahissent-les-victimes-syriennes

2. Un paradoxe ?

Dans le cas du Nicaragua, les « Clash », au travers de la chanson vue en


intro de ce chapitre, considèrent qu’il n’y a pas de contradiction. Toutefois,
l’administration Regan, quant à elle, considérait qu’il n’y avait pas de
souveraineté qui pouvait tenir quand les droits humains sont en jeu et
partant, il y a un droit d’intervention. De manière générale et la
jurisprudence plus particulièrement, il n’y a pas de contradiction. En 1923,
la Cour permanente de justice internationale, dans l’affaire du « vapeur
Wimbledon », indique que qu’il n’y a pas abandon de la souveraineté
quand un Etat conclu une convention internationale qui consiste à faire ou
ne pas faire. Dans ce cas précis, il était invoqué, qu’à la suite du traité de
Versailles, l’Allemagne était « neutre » dans la guerre qui opposait l’URSS
et la Pologne et à ce titre elle refuse le passage d’un bateau Français.
Considérant que l’Allemagne n’a pas transporté de munitions et qu’elle est
donc bien neutre, elle n’a pas violé le traité. Si l’on s’engage à respecter
les droits humains, l’on n’abandonne pas sa souveraineté. En l’occurrence,
si l’on s’engage, par traité, à respecter les droits humains, on conclu,
souverainement, que l’on respectera lesdits droits. En d’autres termes, si
l’on conclu une convention internationale ou on s’engage à respecter les
droits humains, on exerce sa souveraineté… Dans l’affaire Nicaragua, en
1986, la Cour internationale de justice condamne les Etats pour la
violation de la souveraineté du Nicaragua. La Cour précise, à cet égard,
26
deux éléments. D’une part, lorsque l’on est partie à une organisation
internationale, on ne délaisse pas sa souveraineté. Par exemple, si l’on est
membre de l’Union Européenne, nonobstant de ce que l’on peut entendre,
l’on n’abandonne pas sa souveraineté. L’on peut sortir de l’organisation tel
est le cas avec le Brexit… Dans une perspective « libérale », on peut
s’engager à être partie d’une organisation. En ce qui est des droits
humains, dans le paragraphe 268 de son arrêt, la Cour internationale de
Justice, indique que les Etats-Unis se sont prévalus de violations de droits
humains que pour intervenir mais cela est-il un titre que pour intervenir ?
Selon la Cour, si les Etats-Unis peuvent apprécier une situation à savoir la
violation de droits humains, cela ne signifie pas que l’emploi de la force
serait approprié que pour faire respecter ces droits. En bref, on peut
exiger d’un Etat qu’il respecte les droits humains mais l’on ne peut pas
prendre de mesures exécutives sur le territoire d’un état tiers ; C’est en
principe interdit par le droit international. S’i l’on applique cela à la Syrie,
on peut dire tout d’abord que la Syrie ne peut en aucun cas se prévaloir
de la souveraineté lorsqu’elle est critiquée pour la violation des droits
humains. La Syrie, par traité, s’est engagée à respecter des droits
humains. Si l’on consulte la base de données des Nations Unies, on
constate que la Syrie est partie à toute une série de traités. Notamment la
convention interdisant la torture, le pacte international sur les droits civils
et politiques. La Syrie doit respecter ces traités. Elle ne peut donc plus
dire que torturer relèverait de sa souveraineté.. A partir de ce moment-là,
les Pays-Bas peuvent exiger que la Syrie respecte la convention
internationale relative à la torture. Nous devons aussi vérifier si la Syrie
est partie aux traités mettant en œuvre les traités précités. L’on constate
que la Syrie n’est pas partie à toute une série de protocoles, instruments…
qui permettent à des personnes à titre individuel de porter plainte pour
violation des pactes (torture en l’occurrence). Les individus ne peuvent
donc pas dans ce cas saisir des organes internationaux puisque la Syrie
n’est pas partie à certains protocoles permettant aux personnes de saisir
ces instances. Dans ce cas, l’on a une contradiction, de tensions entre,
d’une part, la conséquence de l’exercice de la souveraineté qui implique
que la torture doit respecter les traités et donc ne pas torturer et, d’autre
part, un volet « frustrant » qui fait que la Syrie n’est pas partie à des
instruments qui permet de garantir, sur le terrain, l’exécution des
conventions. De plus, la Syrie n’est pas partie à la Cour Pénale
internationale. S’agissant des organes internationaux, la Syrie est membre
des Nations Unies et elle ne pourrait donc pas invoquer sa souveraineté si
les Nations Unies devait prendre une mesure coercitive à son encontre. La
Syrie a rejoint fin 2013, une convention relatif à l’interdiction de
l’utilisation des armes chimiques. Elle a été critiquée pour l’usage d’armes
chimiques. Soudainement, elle est devenue partie prenante à cette
convention et partant, elle ne pouvait plus invoquer sa souveraineté pour
27
faire usage des armes chimiques. L’autorité a envoyé des personnes sur
place pour vérifier que les armes chimiques avaient été démontées. Dans
ce cas, vu qu’elle a rejoint la convention, elle ne peut plus invoquer sa
souveraineté que pour interdire cette enquête sur son territoire… Dans le
contexte politique de 2013, il y avait un rapport de force. La Russie, alliée
de la Syrie, a demandé, de manière insistante, à la Syrie de devenir partie
à cette convention pour éviter que les Etats-Unis, le Royaume-Uni, la
France n’interviennent militairement. Pour éviter ces interventions, on a
accepté un compromis. Ce compromis a consisté en la non-intervention
militaire et en l’acceptation de la vérification du démentiellement des
infrastructures chimiques. On voit bien dans toutes ces questions que l’on
peut articuler la souveraineté et le respect des droits de l’homme mais sur
le terrain, ça peut être plus complexe… Les Etats ne sont pas obligés de se
faire membre d’une organisation mais quand ils y sont, ils doivent
respecter les préceptes de l’organisation.

Sur le site de la Cour internationale de justice, il y a


un article relatif à l’arrêt USA c. Nicaragua… Voir : https://www.icj-
cij.org/fr/affaire/70 Sur le site internet du Haut Commissariat des Nations
Unies relatif aux droits de l’homme, on retrouvera les conventions
suivantes : Convention internationale interdisant la torture et le pacte
international relative aux droits civils et politiques.

Oui mais donc… ?


Bien, dans une perspective libérale du droit international, on peut concilier
28
la souveraineté et le respect ou, le cas échéant, la violation des droits
humains. Toutefois, sur le terrain, les choses peuvent être plus
complexes…

3. Quant aux compétences Nationales des Etats ?

Les compétences sont, à la base, nationales mais peuvent être


extraterritoriales. Chaque Etat a compétence sur son territoire. C’est donc
à lui que revient la responsabilité de gérer la situation. Il peut donc faire
ce qu’il souhaite mais dans le respect des droits internationaux. Il s’agit
d’une compétence liée. La compétence est liée en ce qu’il est souverain
mais qu’il doit, en lien, respecter ses obligations internationales. Il doit
donc faire respecter, sur son territoire, le respect des droits humains. Il y
a un principe de « vigilance requise » qui impose qu’un Etat doit respecter
le droit international mais il doit aussi le faire respecter ; Sur son
territoire. Il doit donc prendre des mesures positives… Par exemple, il ne
peut pas dire qu’il s’agit de privés, de milices privées, des escadrons
privés que pour s’extirper de sa responsabilité. Il doit veiller, en toute
circonstance, que les droits fondamentaux seront respectés. Il s’agit donc
là de la compétence territoriale. Il y a un rapport de la commission
indépendante d’enquête sur la République Arabe Syrienne, précitée. C’est
un rapport du 14 août 2020. Dans ce rapport, la commission se
prononcera sur ce qu’il se passe en Syrie. Les paragraphes 66 à 68 du
rapport nous intéresse. Le paragraphe 66 indique que la commission a des
raisons de croire que des crimes de guerre ont été commis. Les membres
de l’armée Syrienne auraient donc commis des crimes de guerre à savoir
tortures, viols, séquestrations… Dans les paragraphes suivants, on voit
qu’un Etat doit faire respecter sur son territoire les droits humains.
Attention ! Sur son territoire mais aussi ou l’Etat pourrait se trouver. En
Syrie, la Turquie est présente en partie. A partir de ce moment-là, la
Turquie a la responsabilité d’assurer l’ordre public et de protéger les droits
humains. Elle doit assurer une protection particulière aux femmes et
enfants. Dans son paragraphe 68, la commission prend note des
allégations qui tendent à dire qu’il y a eu des pillages… On voit que la
Turquie pourrait être tenue pour responsable d’actes de torture alors
même qu’elle ne les a pas commis. C’est l’armée Syrienne qui a commis
ces actes de torture mais à partir du moment ou la Turquie est présente
et ou elle ne fait rien, elle peut être tenue pour responsable. Ce principe
de « vigilance requise » fait peser sur les états des obligations assez
fortes. Dans ce cas, la souveraineté ne peut être un bouclier qui
permettrait d’écarter toute accusation. Au contraire, il y a des critiques à
29
cet égard.

Un rapport, plus ancien que celui cité dans le


texte ci-dessus, apparait comme « très interpelant »,
voir :https://www.bing.com/search?q=rapport+14+ao%C3%BBt+2020+s
yrie&cvid=336bd9e6389945c7a7c82a2ffa812cec&aqs=edge.1.69i59i450l9
.1359203j0j1&FORM=ANSAB1&PC=HCTS Et le rapport dont question ci-
dessus est trouvable sur : https://undocs.org/fr/A/HRC/45/31

Sur le plan extraterritorial, les Etats peuvent exercer des compétences sur
leurs territoires mais aussi à l’étranger. C’est, selon le Pr. Corten, un
principe connu depuis longtemps en droit international. Il évoque
notamment l’affaire du « lotus ». Dans cette affaire « Lotus », un état
pourrait édicter des lois applicables à l’étranger. C’est du reste souvent le
cas en matière électorale, de statut personnel… Ce sont des choses
fréquentes. C’est possible ! On peut également parfois juger d’actes
commis à l’étranger. Par exemple, en droit pénal, s’il y a une victime
d’une infraction à l’étranger ou, à contrario, un ressortissant d’un état qui
commet une infraction à l’étranger, l’Etat impliqué par son ressortissant
qui, selon le cas, sera victime ou « suspect » pourra juger des faits
concernés. Par rapport à la Syrie, on a un exemple très intéressant. C’est
la compétence universelle. IL faut revenir sur le procès initié en Allemagne
pour actes de tortures. Ces actes ont été commis par des Syriens, en
Syrie, sur des Syriens. Il n’y a donc à priori aucun lien. A partir de ce
moment, on parlera d’une compétence universelle. L’on imagine, dans ce
cas, que la communauté internationale se trouve affectée par de tels
crimes, si graves… Que la compétence universelle pourrait jouer…
L’Allemagne interviendrait au nom de la communauté internationale et
non pas de l’Etat Allemand. C’est un concept ancien que l’on retrouve déjà
dans le cadre de la lute contre la piraterie. Plus récemment, on retrouve
cela aussi dans ce que l’on désigne comme « des crimes contre
l’humanité ». Cette compétence universelle n’est pas, en tant que tel,
contraire au droit international. Elle a été admise de manière générale.
30
Par contre, les Etats du tiers-monde notamment au travers du
mouvement des « états non-alignés » ont critiqués cela… Selon eux, ça
pourrait être abusif. Il s’agirait de ne pas donner le droit à des états
occidentaux de pouvoir juger tout ce qu’il se passe dans le monde et de
pouvoir faire des leçons de morale… Alors que ces états, selon ce
mouvement, ne sont pas exempts de tout reproches. Notamment, par
exemple, la guerre mondiale, les tortures en Iraq… Il y a donc cette
critique fondée sur des arguments politiques mais aussi juridiques. Il
s’agit de dire que les Etats qui invoquent la compétence universelle ne
doivent pas s’immiscer dans les affaires des états du sud. Mais au fond,
que veut dire « intervenir » ? Le simple fait de juger ce qu’il s’est passé à
l’étranger n’est pas un usage abusif de la compétence universelle.
S’agissant du cas de l’Allemagne et de la Syrie, on ne peut donc pas dire
qu’il y a eu un usage abusif de la compétence universelle. Sur ce point, il
n’y a donc pas violation du droit international. Cela ne veut pas dire pour
autant que l’on peut exécuter ces jugements par la force. Il faut revenir
sur l’idée que Donald Trump a eu à savoir assassiner Bachar El-Assad. Là,
on n’est plus sur un simple jugement mais il s’agit de pénétrer sur le
territoire d’un état et d’exercer une compétence exécutive. Et il s’agit
d’une compétence exécutive pour le moins radicale car il s’agit tout de
même de vouloir tuer cette personne sans procès préalable… Dans les cas
des bombardements de 2017 et 2018, précités, il y a également une
exécution. Dans ce cas, il y aura une opposition au principe de « non-
intervention » voir même du recours à la force. Enfin, s’agissant de la
compétence extraterritoriale, en principe il est possible d’exercer des
compétences législatives et judiciaires mais pas exécutives…

Et au final ?
Sur la compétence territoriale, l’état doit évidemment exercer ses
compétences. Il ne peut toutefois invoquer, en toutes circonstances, la
souveraineté que pour violer des droits humains. Et s’agissant de la
compétence extraterritoriale, l’état peut exercer sa compétence mais sous
la réserve qu’il s’agisse d’une compétence législative ou judiciaire et en
31
aucun cas exécutive et ce, sous réserve d’exceptions ou d’autres
développements tel que relatif au principe de non-intervention.

4. La non-intervention

Il s’agit d’un principe compliqué en droit international. IL y a une définition


générale qui a été donnée par la Cour internationale de Justice dans
l’affaire « Nicaragua », déjà évoquée. Cette définition est simple dans son
principe. IL faut d’abord une contrainte. Cette contrainte doit viser des
questions qui relève de la compétence Nationale des Etats. Si l’on exige
d’un Etat qu’il respecte le droit international, il n’y a à priori pas de
problème. Il faut vérifier qu’il y a à la fois contrainte et que ça vise la
compétence Nationale. Le seul précédent que l’on a est l’affaire
« Nicaragua ». Dans cette affaire, la Cour constate que les Etats-Unis sont
intervenus dans les affaires intérieures. Mais il y a en plus un recours à la
force. Dans ce cas, il y a toute une série de règles spécifiques telles que
celles relatives à la légitime défense. Si l’on est dans un domaine non-
militaire (sans recours à la force), on est dans une situation un peu plus
complexe. En l’occurrence, le Nicaragua se plaignait d’un embargo
prononcé par le Président Regan. Le Nicaragua indiquait que les Etats-Unis
refusait de commercer et que puisque les Etats-Unis refusent de
commercer avec le Nicaragua, il y a intervention dans les affaires
intérieures. La Cour internationale rejette cet argument. Selon la Cour, il y
a un lien avec les affaires intérieures du Nicaragua. Toutefois, il n’y a pas
d’élément de contrainte. En effet, ils ne sont pas obligés de commercer
avec le Nicaragua. Chaque Etat exerçant sa souveraineté. D’une part, les
Etats-Unis exercent leur souveraineté en refusant de commercer et,
d’autre part, le Nicaragua choisi son régime politique. Dans ce cas, les
Etats-Unis ont pu invoquer al souveraineté que pour se faire. Bien qu’il
s’agisse d’une pression, il n’y a pas de contrainte. Si l’on applique à la
Syrie, on doit distinguer trois types de mesures. Il y a donc eu trois types
de mesures prises par les Etats tiers. Ces mesures visaient à faire
pression sur la Syrie pour qu’elle change son régime et qu’elle respecte les
droits humains. Primo, il y a également eu des mesures d’embargo. Les
Etats indiquent que tant qu’il y a des violations des droits humains, il n’y
aura pas de commerce avec la Syrie… Sur ce point, il n’y a pas violation
du principe de non-intervention pour la même raison que relativement au
Nicaragua. C’est souverainement que les états tiers comme les Etats
membres de l’Union Européenne, les Etats-Unis… peuvent décider de ne
plus commercer avec la Syrie. Il n’y a pas vraiment de contrainte. Sauf à
démontrer qu’à travers une série de discours, d’ultimatum… Dans ces cas,
il pourrait y avoir contrainte donc violation du principe de non-
32
intervention. Il s’agirait, par exemple, de dire « Tant que vous ne changez
pas votre régime politique, on ne commercera pas et ce, pour telle date »
(par exemple). Secundo, il y a des mesures de livraison de matériel
militaire aux rebelles. Il y a dans ce cas une sorte d’exception à l’embargo
puisque l’on accepte de commercer mais dans la mesure ou l’on
commerce avec les rebelles… On est dans le domaine commercial et
militaire. IL ne fait aucun doute sur ce point qu’il y a violation du principe
de non-intervention. En effet, la Cour a constaté, dans l’affaire
« Nicaragua » que le fait de financer des rebelles du Nicaragua était
contraire au principe de non-intervention. Ici, il y a contrainte puisque l’on
fourni des armes. Quand bien même, on considère que les armes fournies
seraient « inoffensives »… Dans ce cas, il y aurait tout de même
contrainte puisque, in fine, les rebelles font usage de la force. Tertio,
après les mesures purement économiques et les fournitures d’armes, il y a
les mesures militaires déjà évoquées à savoir les bombardements. Dans
ce cas, il y a contrainte et donc violation du principe de non-intervention.
Mieux, les Etats empêchent la Syrie d’exercer ses compétences sur son
territoire en venant avec des avions bombarder et passer les frontières
Syriennes. Sauf à se prévaloir d’une exception au recours à la force, il y a
donc à fortiori violation du principe de non-intervention. A priori, c’est
simple à savoir contrainte et compétence territoriale mais sur le terrain,
ça peut être plus complexe…

5. Les immunités

Ce principe est unanimement admis en droit international à savoir


l’immunité des Etats et de ses représentants. IL s’agira d’appliquer à des
cas concrets. On ne peut juger un autre Etat ou certains des
représentants de l’Etat. C’est donc unanimement admis. Ce principe se
retrouve dans toute une série de conventions ou des instruments de type
doctrinal. Toutefois, deux questions vont nous intéresser. D’abord, il y
aurait-il exception au régime d’immunité dans le cas de crimes graves ?
Ce que l’on reproche dans les situations évoquées à savoir le cas de
l’Allemagne, l’initiative des Pays-Bas… Ce sont des choses graves qui sont
reprochées dans ces cas et n’y aurait-il donc pas exception à l’immunité
dans ces cas ? Ensuite, nous nous demanderons ce que l’on peut faire
concrètement pour juger des actes de torture commis en Syrie. Allons-y…

En premier, est-ce qu’il y a une exception ? Peut-on considérer que


lorsque l’on est devant un crime contre l’humanité, c’est tellement grave
que l’on peut appliquer une exception à l’immunité ? On a un argument
33
qui est défendu par toute une série d’auteurs. C’est sur ces valeurs
universelles que repose le droit international. Il s’agirait d’écarter, dans ce
cas, la souveraineté. Cet argument a-t-il été consacré dans la
jurisprudence ? Non. Au contraire, la Cour internationale de Justice a, à
deux reprises, dans deux précédents intéressants, rejeté l’argument. Il
s’agissait d’abord d’une affaire relative à un mandat d’arrêt au Congo.
Cette affaire opposait le Congo et la Belgique. La Cour s’est penchée sur
un aspect « coutumier ». En pratique, elle na pas constaté de précédent
par lesquels les Etats auraient admis qu’il y aurait exception à l’immunité
dans de tels cas. Une deuxième affaire portait sur une question
d’immunité entre l’Allemagne et l’Italie en 2012. Le paragraphe 82 de
l’arrêt. La Cour indique que, selon elle, logiquement, lorsque l’on est face
à un crime contre l’humanité, le crime est très souvent nié… Il y aura donc
un différent sur l’existence du crime contre l’humanité. Il faudrait donc
lever l’immunité pour éclairer la chose. Donc, faut-il lever l’immunité ?
Pour comprendre, savoir s’il y a crime contre l’immunité, il faudrait lever
l’immunité…

Le résumé de l’affaire du « mandat d’arrêt »


est disponible sur le site de la Cour internationale, voir : Derniers
développements | Mandat d'arrêt du 11 avril 2000 (République
démocratique du Congo c. Belgique) | Cour internationale de Justice (icj-
cij.org) L’arrêt Italie c. Allemagne est consultable via : https://www.icj-
cij.org/public/files/case-related/143/143-20120203-JUD-01-00-FR.pdf Et
le paragraphe 82 de l’arrêt Italie c. Allemagne est repris textuellement ci-
dessous :
«…»
82. La Cour se doit toutefois d’observer d’emblée que l’idée de
subordonner, dans une certaine mesure, le droit à l’immunité à la gravité
de l’acte illicite en cause pose un problème de logique. L’immunité de
juridiction permet d’échapper non seulement à un jugement défavorable
mais aussi au procès lui-même. Elle revêt donc nécessairement un
caractère préliminaire. C’est par conséquent avant de pouvoir examiner le
34
fond de l’affaire portée devant lui et avant que les faits aient été établis
que le tribunal national saisi doit déterminer si, au regard du droit
international, un Etat peut ou non prétendre à l’immunité. Si l’immunité
devait être fonction du point de savoir si l’Etat a véritablement commis
une violation grave du droit international des droits de l’homme ou du
droit des conflits armés, le tribunal interne saisi devrait se livrer à un
examen au fond pour déterminer s’il a compétence. Si, en revanche, il
suffisait d’accuser l’Etat d’avoir commis des actes illicites de cet ordre pour
le priver de son droit à l’immunité, une présentation habile de la
réclamation pourrait à elle seule avoir pour effet de faire échec à
l’immunité.
«…»

En second, il y a-t-il donc impunité ? Et concrètement ? IL serait


impossible, dans tous les cas, de juger ce qu’il s’est passé. La
jurisprudence a fourni à nouveau une réponse. Celle-ci a été fournie dans
l’arrêt Congo c. Belgique. Dans le paragraphe 61 dudit arrêt. La cour
considère que l’immunité ne signifie pas impunité. Il y a quatre
hypothèses qui permettent d’agir. En premier, lorsque l’on accuse
quelqu’un d’un crime, le premier réflex est de se dire que c’est l’état qui a
sa compétence territoriale et qui donc se prononcera… L’Etat a pour
obligation, pour rappel, de faire respecter le droit international et partant,
l’Etat doit juger les crimes contre l’humanité ou crimes graves commis sur
son territoire. Si l’on applique à la Syrie, si des militaires Syriens sont
accusés de crimes graves, ce serait à l’Etat Syrien des les juger. En
l’espèce, c’est assez peu probable sauf s’il devait y avoir un changement
de régime en Syrie. Les immunités sont des immunités d’Etat. Dans
l’actualité, au Soudan, une série d’actes de torture sont soumis aux Cours
& Tribunaux Soudanais y compris à l’encontre de l’ancien chef de l’Etat. La
deuxième possibilité serait le cas ou l’Etat levait l’immunité. Ce serait le
cas avec le dossier de l’Allemagne. La Syrie ne proteste pas pour ce qu’il
se passe en Allemagne. Ce sont des anciens officiers Syriens qui ont fuis
et sans doute que la Syrie considère ces gens comme des traites… EN tout
cas, la Syrie aurait, implicitement, levé l’immunité de ces anciens officiers.
La troisième possibilité serait si la personne dont question qui aurait cessé
d’exercer ses fonctions. Dans ce cas, il pourrait être jugé pour les actes
qu’il a commis durant l’exercice de ses fonctions pour autant qu’il
s’agissait d’actes privés. La logique est de protéger l’Etat. Tant qu’il est en
fonction, on ne peut pas le juger y compris pour des actes privés.
Provisoirement, on empêche des poursuites pour protéger l’Etat. Si l’on
transpose cela au cas de la Syrie, le jour ou Bachar El-Assad n’exercerait
plus ses fonctions et qu’il se rendrait à l’étranger,… On pourrait le juger
mais uniquement pour des actes privés. Les actes de tortures qu’il a
35
commis sont-ils des actes privés ? Certains estiment que ce serait d’office
à titre privé. Ces actes sont, selon le Pr. Corten, des actes d’Etat. Ils sont
accomplis dans le cadre d’une politique étatique. La responsabilité des
autorités de l’Etat serait engager. Mais si l’on considère qu’il s’agit d’actes
privés, cela voudrait justement dire que l’Etat ne serait pas responsable…
Il faut vérifier que les organes de l’Etat agissent dans ce cadre pour qu’il y
ait responsabilité. Pour la Syrie, c’est assez limité. La Cour évoque une
quatrième possibilité. Il s’agit de poursuivre les personnes concernées
devant des juridictions internationales. Si l’on va devant la Cour Pénale
internationale, on ne va pas devant un tribunal d’Etat. C’est un organe
internationale auquel les Etats sont libres d’adhérer. A partir du moment
ou l’Etat fait partie de l’organisation, il n’y a pas de problème d’immunité.
En effet, l’immunité ne vaut qu’entres Etats. Elle ne vaut pas vis-à-vis
d’une juridiction internationale. Par rapport à la Syrie, il y a deux choses.
D’abord, si jamais le Conseil de Sécurité des Nations Unies veut lancer
une procédure, ce serait possible puisque ce ne serait pas contraire au
droit international et d’ailleurs l’on l’a vu plus haut, il y a eu une tentative
mais qui a essuyée deux vétos de la Chine et de la Russie. Cela voudrait
dire aussi que s’il y avait un changement de régime en Syrie, ce nouveau
régime pourrait adhérer à la Cour Pénale internationale et lui donner
compétence que pour connaitre de ces crimes. Cela veut dire aussi que
tant que ces actes n’ont pas lieu, on ne peut pas passer par la Cour pénale
internationale. Dans le cas d’El-Assad, les immunités empêchent de le
poursuivre. Donc, dans ce cas-ci, il y a en effet une forme d’impunité. Les
Pays-Bas envisagent de porter la question devant la Cour Internationale
de Justice. Il y a un fondement dans la convention sur la torture. La Cour
est compétente que pour se prononcer de différents entres Etats. En
l’occurrence, la Syrie et les Pays-Bas. Ce ne serait pas une atteinte à
l’immunité de la Syrie. Dans ce cas, ce serait l’Etat qui serait condamné et
non El-Assad directement et partant, il n’y a pas de problème relatif à
l’immunité.
36

La vidéo YouTube de ce cours est disponible


sur : https://www.youtube.com/watch?v=3Ghj6MWmEpw
VII.Les organes internationaux 37

Le Professeur Corten fait écouter une musique, voir :


https://www.youtube.com/watch?v=zoNbn09ModM Attention cette
version YouTube est sans parole alors que la version diffusée dans le
podcast YouTube du Professeur Corten contient des paroles…

Le Professeur Corten fait allusion, très rapidement, à l’existence d’une


hymne des Nations Unies. Il s’agirait de ceci :
https://www.bing.com/videos/search?q=yymne+des+nations+unies&view
=detail&mid=65B5293919639B3E5AA965B5293919639B3E5AA9&FORM=
VIRE

L’on va se pencher, dans ce cours, sur la Cour Pénale Internationale. C’est


une organisation internationale souvent au centre de l’actualité. Fin 2020,
trois évènements peuvent être pointés. Il s’agit d’abord des déclarations
de l’administration Trump. Celui-ci avait en effet affirmé que des sanctions
pourraient être infligées à la Procureur de la Cour Pénale Internationale,
Fatou Bensouda. En effet, selon lui, c’est une Cour politisée qui pourrait
nuire aux intérêts des Etats-Unis et de ses ressortissants. C’est ainsi qu’il
aurait fallu, selon Trump, infliger des sanctions du type le gel des avoirs
aux USA de cette Procureur… Ce premier exemple nous montre que
lorsque l’on a une institution internationale, elle a une existence objective
même pour des Etats qui ne sont pas membres de l’institution en
question. En effet, les Etats-Unis ne sont pas membre de la Cour Pénale
Internationale. Tout ça va poser la question de la définition même de
l’organisation, de la personnalité juridique de l’institution. Un deuxième
exemple est celui d’Agnès Callamard. Celle-ci est rapportrice spéciale aux
Nations Unies. Elle a fait une déclaration sur les exécutions
extrajudiciaires sommaires en indiquant qu’il fallait développer les
compétences de l’ICC pour que la Cour puisse s’occuper de ce qu’il se
passe aux Philippines. En effet, il y aurait eu, sur le territoire de cet Etat,
de graves crimes contre l’humanité qui auraient été commis par le régime
de Rodrigo Duterte. Là, la Cour Pénale Internationale examine cette
situation. Et sur ce point, on verra les compétences de la Cour. Jusqu’où
vont les compétences de la Cour ? Un troisième exemple est celui du
Soudan. Cet Etat s’est déclaré prêt à livrer à la Cour Pénale Internationale
l’ancien Président. Il s’agit d’Omar Al-Bashir. Il a été renversé et il est
sous le coup d’un mandat d’arrêt de la Cour Pénale Internationale (ICC /
CPI). Il semble là que l’ancien Président soi amené devant la Cour Pénale
Internationale et que dés lors, celle-ci puisse effectivement exercer ses
compétences. Il est intéressant de souligner que le Soudan n’est pas
38
membre de la Cour. En même temps, la Cour exercera ses compétences
parce que le Conseil de Sécurité des Nations Unies a déféré à la Cour le
cas du Soudan. Ainsi, se pose la troisième question qui nous intéressera
dans ce chapitre à savoir « Quelle est la relation entre la Cour et les
Nations Unies ? ». Les relations entre les deux organisations sont assez
étroites. Nous profiterons de l’examen de la CPI pour rappeler, à la grosse
louche, les compétences des Nations Unies. En somme, au menu de ce
chapitre, il y a :

➢ La définition de l’organisation et sa personnalité juridique


➢ Jusqu’où vont les compétences de l’organisation
➢ Et enfin, quelles sont les relations entre la CPI et les NU ?

Avant d’entrer dans le détail de ces questions, rappelons, de manière


générale, ce qu’est la Cour Pénale Internationale, en Anglais ICC. Il faut
tout d’abord insister sur la dimension éthique de la Cour. Elle a été créée
en 1998 lorsque le droit pénal international était en plein essor. Il y avait
eu, à l’époque, des procédures à l’encontre du Rwanda, la Yougoslavie…
On a eu une volonté, au-delà de la création au cas par cas de tribunaux
« spécifiques », d’avoir une juridiction universelle qui couvre tous les
crimes commis dans l’ensemble de la planète. Ce n’est pas tout à fait
exact de dire tous les crimes. En effet, la Cour connait des crimes contre
l’humanité, des crimes de génocide, les crimes de guerre et aussi le crime
d’agression. Dans tous ces cas, l’idée était de conférer à une Cour Pénale
Internationale de connaitre de ces crimes. C’était également l’occasion de
rappeler les valeurs portées par la communauté internationale. Elle est
complémentaire aux cours & tribunaux des Etats. Normalement, elle n’a
pas à se substituer aux Cours & Tribunaux des Etats. Si les Etats ne
peuvent ou ne veulent agir, la Cour pourra le faire ; C’est le « principe de
complémentarité ». La Cour a une particularité d’être une organisation en
tant que tel. Il y a un secrétariat, un bureau du procureur, une assemblée
des Etats parties… Il y a donc des organes propres à la Cour. Mais en
même temps elle est aussi liée avec une dimension politique. Pour s’en
rendre compte, il suffit de consulter la carte qui reprend les Etats parties
au statut. On constate qu’il y a une majorité d’Etats qui sont membres. Un
certain nombre de très grands Etats ne sont pas membres tel que la
Russie, la Chine, l’Inde, les Etats-Unis. Il y a donc une limite à la vocation
universelle et l’on voit aussi l’étendue politique. Se faisant, la Cour ne
pourra pas nécessairement se pencher sur tout ce qu’il se passe à travers
le monde… Il y a des Etats qui ont signés le statut sans l’avoir ratifié.
Certains Etats n’ont même pas signés le statut. D’autres se sont retirés…
Tel fut le cas des Philippines ou du Burundi. De manière générale, il faut
39
préciser que la Cour ne peut se prononcer sur les crimes dont question ci-
dessus que s’ils ont été commis dans es Etats membres ; Par exemple,
dans l’UE, en Amérique Latine… Ce sont les crimes commis par les Nations
des Etats membres. La dimension éthique et politique se retrouve tant
pour les Nations Unies que pour la CPI. C’est une Cour de droit
Internationale qui est donc soumise aux « aléas politiques ».

Au menu, le cas non pas d’un Etat mais de la CPI…

1. Définition d’une organisation internationale

Il faut vérifier les éléments constitutifs de l’organisation. Les « réunions »


des G 7, G10,… ne sont pas en soi des organisations internationales. Pour
qu’il y ait une organisation internationale, il faut :

➢ D’abord, un acte constitutif, c’est-à-dire :

C’est-à-dire un traité conclu entre Etats qui traduisent la volonté de ces


Etats de donner à l’organisation une personnalité juridique : Ces Etats se
réunissent, ils adoptent un texte et dans ce texte, il doit y avoir une
volonté de créer une organisation. Il y a une dimension sociale,
institutionnelle. Il faut lire l’acte constitutif pour voir s’il y a cette volonté
de création. Sur la CPI, on voit qu’il y a un acte constitutif. Il a été signé à
Rome en 1998 et est entré en vigueur en 2002. Il a été conclu entre
Etats. C’est le Statut de Rome sur la Cour Pénale Internationale. En son
article 4, il y a une disposition qui reconnait à la Cour la personnalité
juridique internationale. Cela signifie donc qu’il y a l’existence d’une
institution. Ceci se traduit par différentes choses. Cela signifie qu’elle va
pouvoir développer du droit dérivé. Il s’agit de décisions qui seront
obligatoires pour les Etats parties. C’est indéniablement le cas pour la CPI.
Elle délivre des mandats d’arrêts, des jugements… EN vertu de l’acte
40
constitutif, de manière dérivée, les Etats seront soumis aux décisions de la
Cour. La Cour pourra aussi prendre des actes qui ont une portée
normative. Dans l’article 9 du Statut, on voit que la Cour peut adopter les
éléments de crime c’est-à-dire les textes qui définiront ce qu’est un crime
de génocide… Le statut défini dans les grandes lignes ces infractions mais
la Cour peut adopter des actes interprétant ce que sont ces infractions.
Tout comme les règles de preuve et de procédure sont délimitées par des
règlements et actes adoptés par l’assemblée des Etats partie.
Concrètement, si l’organisation adopte ces actes, ils seront directement
applicables pour les Etats parties. C’est une production « normative par le
haut ». Il y a donc une dimension institutionnelle forte.

Pour être certain que la chose n’ait pas été


« ignorée », nous remettons ici le lien vers la page officielle du Statut de
Rome sur le site de la CPI, voir : https://www.icc-
cpi.int/NR/rdonlyres/ADD16852-AEE9-4757-ABE7-
9CDC7CF02886/283948/RomeStatuteFra1.pdf

➢ L’interprétation de l’acte, c’est-à-dire :

Par exemple, pour les Nations Unies, l’article 27 du Statut du Conseil de


Sécurité des Nations Unies prévoit que pour le droit de véto, celui-ci n’est
pas exercé lorsqu’un Etat membre permanent s’abstient lors du vote.
Alors que comme nous avons pu le voir, le texte de l’article 27,
paragraphe 3 prévoit le vote positif des Etats membres. Il y a donc, de par
la pratique, une interprétation « souple » du statut en question. Qu’en
est-il pour la CPI ? L’article 12 du Statut de Rome prévoit que si un Etat
n’est pas membre, il peut néanmoins transmettre à la Cour une affaire en
relation avec un crime. La Cour a interprété cette disposition en disant
que c’était une « situation » et non pas un crime. La Palestine a, en 2009,
souhaité transmettre ce qui se serait passé à Gaza. Si on avait lu de
manière littérale le statut, on aurait pu connaitre que des crimes commis
41
par les Israéliens… Il aurait fallu donc transmettre tout le cas et non pas
seulement le crime qui aurait été commis, selon Gaza, par Israël. La Cour
aurait donc dû connaitre aussi des potentiels crimes / actes commis par le
Hamas. Si on défère une situation, on défère toute la situation. Elle a donc
interprété largement. La Cour a rejeté la « demande » non pas sur cette
base mais sur le fondement de la qualité d’Etat de la Palestine…

➢ La possibilité d’apporter des amendements au statut, c’est-à-dire :

L’exemple le plus frappant est celui du crime d’agression. Le Statut de


Rome ne défini pas précisément ce que c’est. Les crimes de génocide,
contre l’humanité et de guerre sont définis dans le Statut. Ce n’est pas le
cas pour le crime d’agression. En 2010, l’assemblée des Etats parties a
apporté un amendement . Lequel a inséré, dans le Statut, un article 8bis.
Cet article énonce la définition de l’agression. C’est une personne qui est
effectivement en mesure de gérer « l’infrastructure de l’Etat » qui pourrait
préparer ou faire le crime. C’est ici un crime particulier qui serait commis
par un dirigeant d’Etat. Les autres crimes peuvent être commis par toute
autre personne qui des dirigeants.

L’organisation « Human Rights watch » a publié, en


2021, un article qui retrace qui aurait pu potentiellement commis à Gaza…
https://www.hrw.org/fr/news/2021/07/27/gaza-crimes-de-guerre-
presumes-lors-des-affrontements-de-mai A prendre avec des
« pincettes »…

Il y a donc une activité normative de l’institution. Mais elle est également


soumise à un contexte politique. Ainsi, comme nous l’aurons vu, toute une
série d’Etats ne sont pas partie au Statut. Mais une autre question se
pose. A supposer qu’un Etat voudrait devenir membre… Pour les Nations
Unies, c’st en ordre. Pour la CPI, la question s’est notamment posée avec
la Palestine. En 2009, la Palestine a voulu déférer à la Cour une situation
42
sur base de l’article 12, paragraphe 3. La Cour a dû analyser la chose. La
majorité des Etats dans le monde reconnaissent l’Etat Palestinien. Elle a
dû se prononcer. Elle a temporisé. Elle a attendu que la question soi
tranchée par les Nations Unies. Malgré des oppositions notamment
Américaine, la Palestine a été reconnue Etat par le Conseil de Sécurité des
Nations Unies. Elle n’est pas membres des Nations Unies précisément en
raison de l’opposition Américaine. Par contre, elle a pu demander de
rejoindre la CPI et c’est ce qu’il s’est produit… On voit donc qu’il y a un
souci… Si le Kossovo, ferait une demande ; Ca pourrait poser souci. (Voir
le chapitre relatif à la création de l’Etat) Une autre question pourrait se
poser c’est-à-dire la question de savoir qui représente l’Etat en question…
Nous pourrions ici nous pencher sur le cas de l’Egypte. En 2013, le régime
a été renversé. Le Président Morsi a en effet été renversé emportant avec
lui son régime… Lors de ce coup d’Etat, l’Egypte a voulu déférer, à la
Cour, la situation en vertu de l’article 12, paragraphe 3 du Statut.
Toutefois, l’Egypte a été confrontée à un souci… L’Egypte n’est pas
membre, partie au statut. En décembre 2013, ça s’est déroulé. Elle a
refusé de donner suite à cette demande. La Cour constate qu’au sein de
l’Organisation des Nations Unies, c’est le nouveau régime qui représente
l’Egypte. Se faisant, il serait un peu ridicule que les nouveaux
représentants de cet Etat défèrent une situation qu’ils auraient… peut-
être… ou non… commis… Un dernier exemple qui démontre que l’on est
dans une sphère politique. En matière de retrait, on est dans du droit des
traités. Le droit conventionnel s’applique si c’est prévu ou en raison de la
nature du traité… Vu la nature du traité sur le Statut de la CPI, on peut
penser qu’ils peuvent se retirer de l’organisation moyennant un préavis,
une procédure… En l’occurrence, pour la CPI, c’est très explicitement
prévu, art. 127 du Statut. Ce délai est d’un an à compte de la notification
de retrait… En 2016, un certain nombre d’Etats africains ont voulu faire
pression sur la Cour. Ils pensaient que la Cour exerçait ses compétences
d’une manière discriminatoire. En effet, un certain nombre d’arrêts
concerne des Etats africains. L’Afrique du Sud avait notamment annoncé
son retrait mais ne l’a finalement pas fait. Par contre, le Burundi l’a fait.
Comme par hasard, pourrions-nous dire,… Car la Cour avait commencé à
enquêter sur des problèmes au Burundi. Le 18 octobre 2016, le Burundi a
notifié son retrait. La Cour n’a pas abandonné son enquête. Le même
schéma peut se retrouver par rapport aux Philippines. La Cour avait aussi
décidé un examen préliminaire de ce qu’il se passait. La Président
encouragerait à l’exécution sommaire de citoyens par exemple accusés de
trafics de drogue. La Cour a décidé d’examiner la situation et là tout à
coup les Philippines ont, en mars 2018, qu’ils quitteraient la Cour et en
mars 2019 ce retrait est devenu effectif. Comme le demande Agnès
Callamard, la Cour pourrait poursuivre mais pour ce qu’il s’est passé après
mars 2019, il n’est plus possible d’enquêter mais surtout de se prononcer
43
sur ce qu’il se passe sur place…

Mais quelles sont les conséquences de la personnalité juridique de


l’organisation ? Nous allons nous demander cela notamment à l’égard des
Etats non-membres. La Cour Internationale de Justice a tranché une
question relative à la personnalité juridique. Si un Etat existe, il existe et
ce, même pour les Etats qui ne reconnaissent pas l’organisation. Il y a des
droits propres à l’organisation et des obligations spécifiques. Par exemple,
s’il y a une responsabilité à engager, ce sera à priori l’organisation qui
sera responsable et non pas les Etats membres. D’abord, la personnalité
juridique « objective »… ; C’est quoi ? Nous pourrions prendre le cas du
Myanmar. Il y a la crise, dans ce pas, des « Rohingyas » ; C’est une
minorité ethnique en Birmanie (Myanmar) essentiellement musulmane.
Des crimes et une répression constitutive, semble-il, d’une crime contre
l’humanité se produirait dans ce pays à l’encontre de cette minorité. C’est
tel que le pouvoir du Myanmar organise la déportation des Rohingyas vers
le Bengladesh. C’est ceci qui a choqué un certain nombre d’organisations
de défense des droits humains. La Cour s’est penchée sur cette question.
On pourrait penser, de toute évidence, qu’il s’agit d’un crime contre
l’humanité. Si l’on regarde la carte des Etats membres, on voit qu’en Asie,
peu d’Etats sont membres… Le Myanmar n’est pas membre. La Cour ne
priori, selon le texte, exercer sa compétence dans ce cas. Mais, il s’agit
d’une déportation. Le Bengladesh est partie au Statut de la Cour. Le
raisonnement de la Cour est que le crime est en partie commis sur le
territoire du Bengladesh. Dés lors, vu que cet Etat est membre, par
extension la Cour considère qu’elle est compétente. Dans le paragraphe
37 de la décision du 6 septembre 2018, la Cour renvoi à l’affaire des
« réparations » (voir plus haut). Elle dit qu’elle a la personnalité juridique.
Dés lors, le Myanmar ne peut pas contester l’existence de la Cour. Si elle
ne viole pas les droits de l’Etat, elle peut exercer ses compétences… C’est
donc la personnalité juridique objective. Mais il y a aussi une autre
conséquence. Si l’on est un sujet de droit international, on a donc des
droits propres… Cela veut dire que l’organisation peut conclure des traités.
Si l’on pense à la Cour Pénale Internationale, elle a conclu un accord de
coopération entre l’ONU et la CPI par exemple la collaboration des agents
de l’ONU dans les enquêtes de la CPI ou encore la possibilité pour des
agents de la Cour pour venir s’exprimer aux Nations Unies. Si l’on reprend
le cas de la Procureur, elle a le droit de venir s’exprimer aux Nations
Unies. La Cour a donc des droits propres. Elle a également la capacité de
faire respecter ses droits. C’est pour les traités conclus avec l’ONU ou les
Etats. Par exemple, la Belgique a conclu un accord avec la CPI pour
pouvoir exécuter ses sentences. Elle a aussi conclu des accords avec les
Pays-Bas. En effet, pour ce dernier Etat, la Cour se trouve sur son
44
territoire ; Elle n'a pas elle-même de territoire. Il a donc fallu conclure un
accord avec les Pays-Bas notamment pour la détention des prévenus de la
CPI… Mais il y a également des accords relatifs à l’immunité des agents de
la Cour… Il y a également le droit général international. S’agissant des
menaces à l’encontre de la Procureur, il s’est posé la question de savoir si
le droit général international était applicable ? Par exemple, plus tôt, il a
été question de savoir si le recours à la force était interdit dans son cas. A
priori, oui. La Cour ne peut pas violer le droit international général mais
les Etats aussi doivent respecter ceci… Nous avons également une
troisième conséquence de la personnalité juridique internationale. Il s’agit
de la responsabilité propre au-delà de celle des Etats. On peut penser au
cas de l’affaire « Bemba », voir notamment sur le site de la Cour Pénale
Internationale. Il s’agit d’un Congolais qui a été accusé de crimes. Il a été
jugé par la CPI. Il avait été arrêté, en 2008, par la Belgique. Il a été jugé
et le jugement définitif a été rendu en 2008. Il a été acquitté des crimes
qui lui étaient imputés. La Cour n’a pas pu engager sa responsabilité
personnelle. Mais pourquoi cet exemple est intéressant ? Parce qu’il a
passé dix ans en prison. Il a demandé une compensation à la Cour.
L’article 85 du Statut prévoit l’indemnisation. Il n’y a pas une
indemnisation d’office. Le paragraphe 3 de l’article 85 du Statut énonce
qu’il est possible d’obtenir une indemnisation dans des circonstances
exceptionnelles. En cas d’erreur judiciaire grave et manifeste, il est
possible d’octroyer des dommages. A noter que ce n’est pas obligatoire.
C’est à l’appréciation de la Cour. La Cour refuse mais admet qu’elle aurait
pu ; Il y a donc une responsabilité qui aurait pu être engagée. Que
pourrait-il faire ? Il pourrait invoquer le droit international général devant
d’autres juridictions mais ce n’est que théorique puisque l’on est devant
une organisation qui a commis un acte illicite. Dans ce cas, la difficulté est
qu’il faut un juge compétent. A ce stade, retenons qu’il ne pourrait aller
devant une juridiction qui applique les droits de l’Homme comme la
C.E.D.H. puisque ce type de juridiction ne juge pas les organisations
internationales. En résumé, elle a une responsabilité de principe de
respecter le statut donc le droit spécifique mais aussi le droit international
général. Dans la logique du droit des organisations, lesdites organisations
ne sont pas des Etats souverains et elles n’en détiennent que si les Etats
lui ont conférés ces droits… Les Etats doivent avoir transférés des droits…
La Cour est donc liée au droit international général puisqu’elle n’a pas les
compétences de ne pas respecter ces règles. En résumé… La personnalité
juridique implique que :

➢ Des droits propres


➢ Des obligations propres
➢ Une responsabilité propre
45

La Cour a communiqué sur la décision du 6


septembre 2018 relative au Myanmar, voir : https://www.icc-
cpi.int/Pages/item.aspx?name=pr1403&ln=fr Le texte de la décision peut
être téléchargé via ce lien…

2. Jusqu’où vont les compétences ?

Les organisations doivent-elles avoir des compétences limitées à ce que


les Etats ont bien voulu lui donner c’est-à-dire des compétences
d’attribution ? Ou peuvent-elles développer leurs propres compétences ?
Sont-elles autonomes ?

Pour commencer, la Cour a reçu comme compétence de réprimer les


crimes les plus graves. Cela suppose que son budget de ±150 millions de
dollars. A l’échelle d’une organisation internationale, c’est très, très faible.
Elle a donc des moyens très limités. Elle devra donc opérer des choix, une
sélection… C’est ce que l’on appelle l’opportunité des poursuites. Lorsque
l’on lui reproche de se concentrer sur des Etats africains, on peut le faire
politiquement mais juridiquement c’est compliqué de faire le reproche.
C’est le Procureur et son bureau qui décide. C’est une compétence qui lui
est conférée. Cela pourrait poser des soucis sur le plan de l’universalité
des droits humains…

D’abord, il y a le principe d’attribution des compétences ou de spécialité


des compétences. Elle n’est de base compétente pour rien sauf si les Etats
lui ont conféré la compétence. C’est pour cela qu’elle n’est pas souveraine.
Elle est donc compétente, conformément au Statut, pour les crimes de
génocide, de guerre… Le féminicide, l’écocide… ne sont pas des
compétences de la Cour. En 2019, le Vanuatu a suggéré d’ailleurs de
transférer à la Cour la compétence de l’écocide. Ce serait possible d’opérer
46
un tel transfert mais tant que ce n’est pas le cas, elle n'est pas
compétente pour autre chose que les quatre crimes pour lesquels elle est
compétente. Il y aurait un excès de pouvoir si elle irait au-delà de ce qui
lui a été attribué. Mais faut-il que la compétence ait été transférée noir sur
blanc ? Il y a les pouvoirs implicites. Elle peut, en fonction de son objet et
son but, pour mieux accomplir sa mission interpréter le Statut afin de
connaitre d’un crime qui ne lui aurait pas été explicitement confié. On a vu
le cas de Myanmar. En l’occurrence, c’était sur le territoire d’un Etat non-
partie et des ressortissants de ce même Etat (Myanmar) mais c’était
partiellement sur le territoire d’un Etat partie au Statut. Par une espèce de
connexité, ça s’est fait. On aura beau lire le Statut, ça ne se retrouvera
pas. Ce serait donc les pouvoirs implicites.

3. Enfin, pour ce chapitre… Quelles sont les relations


entre la Cour Pénale Internationale et les Nations
Unies ?

L’O.N.U. est une organisation qui a une vocation universelle. Il y a, au


sein des Nations Unies, quatre organes principaux qui sont :

➢ Le secrétaire général : C’est l’administration, on ne va pas trop en


parler
➢ L’assemblé générale des Nations Unies : Composée de tous les
Etats, chacun ayant une voix et un siège
➢ Le Conseil de Sécurité : Composé de 15 Etats, chacun ayant un
siège mais les Etats permanents ont un droit de véto
➢ La Cour Internationale de Justice : L’organe judiciaire des Nations
Unies

L’on peut voir, au travers des trois derniers organes cités ci-dessus, un
« trio classique » législatif, exécutif et judiciaire.

Chacun de ces organes a des compétences particulières. Mais ici ce qui


nous intéresse c’est la relation avec la C.P.I.

D’abord, pour ce qui est de l’assemblée, la CPI s’est penchée sur les
travaux de l’assemblée concernant les crimes contre la paix… Mais aussi
plus concrètement lorsque la CPI a développé son activité, ce sera en lien
47
avec l’assemblée générale. S’agissant de l’agression, la Cour en
application de l’amendement adopté à Kampala le 10 juin 2010 renvoi à la
définition de l’agression telle qu’adoptée par les Nations Unies dans les
années 70. Sur le plan normatif, il y a donc une relation entre la Cour
Pénale et l’assemblée. Dans des affaires particulières, on a vu le cas avec
la Palestine. Pour rappel, dans ce cas, c’était le fait que les Nations Unies
on reconnus la Palestine comme Etat que la CPI l’a aussi reconnue comme
Etat. Pour l’Egypte, c’est au moment où au sein de l’Assemblée Générale ;
la représentation de l’Etat a été modifiée que la CPI a tenu compte de cet
élément que pour statuer pour savoir s’il y avait lieu ou non de
poursuivre… (voir plus haut) La Cour prend donc appui sur ce qui est
décidé aux Nations Unies. Peut-on aller plus loin ? Si on s’intéresse à la
Résolution pour le maintien de la Paix, on a considéré que l’Assemblée
Générale pouvait palier à un blocage au sein du Conseil de Sécurité.
L’Assemblée s’est substituée au Conseil de Sécurité. Mais cela peut-il se
transposer avec la CPI ? Oui, la Syrie. Le Conseil de Sécurité a voulu
déférer le cas mais deux Etats membres permanents ont fait blocage… Ce
serait une interprétation trop large de répondre positivement… Selon un
avis de la CIJ, en 1962, la Cour a fait une distinction. En effet, elle a
indiqué qu’il pouvait y avoir une substitution pour une recommandation
mais pas pour une décision ; C’est du droit international général. Un
second argument plaide à l’encontre de cette possibilité. Pour le crime
d’agression, c’est le Conseil de sécurité qui est compétent et personne
d’autre… Si ça avait été prévu, ça aurait été écrit. Troisième argument, on
aurait dû le faire dans une perspective éthique mais l’assemblée n’a pas
pu se substituer…

Concernant le Conseil de Sécurité et la Cour, les relations sont beaucoup


plus étroites… C’est prévu dans le Statut. Le Statut prévoit un rôle du
Conseil de Sécurité. Il y a deux aspects. D’abord, l’exercice positif d’une
compétence en vue de favoriser l’activité de la Cour. L’article 13 du Statut
prévoit que le Conseil de Sécurité peut renvoyer une situation à la Cour
alors même que l’Etat n’est pas partie au Statut. Tel a été le cas dans
l’affaire du Soudan, précitée. En 2005,, dans la Résolution n°1593, le
Soudan n’est pas partie au Statut. Le Conseil ne le fait pas souvent. Ce fut
le cas également pour la Lybie en 2011 mais à priori, c’est tout. On voit
bien que c’est une possibilité mais très peu exercée. Il y a d’un autre côté
l’article 16. Cela pourrait poser problème sur le plan de l’indépendance de
la Cour mais le texte est là… Le Conseil pourrait empêcher la Cour
d’exercer sa compétence. Pendant une année renouvelable, le Conseil
peut suspendre l’activité de la Cour… Ce fut le cas. La Résolution n°1422
l’a permis dans les années 2000. La Cour n’a pas pu exercer sa
compétence. Les soldats qui avaient été envoyés sur le terrain auraient pu
48
être poursuivis mais voilà que le Conseil de Sécurité a décidé d’activer
l’article 16 du Statut et du coup la Cour n’a pas pu poursuivre ; Ce fut une
demande des Etats-Unis. Le Conseil a renouvelé la chose avec la
Résolution n°1487. Le Conseil de sécurité est aussi compétent pour le
crime d’agression. L’amendement à ce sujet a été adopté par 39 Etats à
ce jour. IL fallait 30 Etats qui ont adoptés. Cet amendement est entré en
vigueur en 2018. Pour que la Cour puisse exercer sa compétence, il faut
soit que le Conseil de sécurité lui-même ait qualifié l’agression soit qu’il ne
l’aurait pas fait alors que le Conseil ne se soit pas opposé aux poursuites.

Enfin, il y a la Cour Internationale de Justice. Ses relations peuvent être


liées au droit matériel. Il se peut que la Cour dise qu’il y aurait des liens
entre les deux Cours. Par exemple, le recours à la force pourrait être
défini par la CIJ et la CPI utiliserait cette définition dans le cadre de
poursuites… Sur le plan institutionnel, ce sont deux organes différents. Il y
a un dernier exemple avec l’Union des Etats Africains. Ils ont indiqués que
la Cour se pencherait de trop sur les cas Africains. Les immunités, selon
eux, auraient pu empêcher la Cour d’exercer ses compétences. L’Union a
demandé que la CIJ donne un avis sur ces questions d’immunités. On
pourrait donc imaginer que la CIJ rende un avis sur le contexte en droit
international.

La vidéo YouTube de ce chapitre est disponible


en suivant ce lien : https://www.youtube.com/watch?v=8D2XBX57D7M
VIII. Les personnes privées en relation avec les 49
organes internationaux

Le Professeur Corten fait écouter le titre « A certain ratio » du groupe


« Family » qui commence de suite par « Born to be free » ; Le ton est
donné ! Voir, par exemple, sur :
https://www.shazam.com/fr/track/525093661/family

Le menu continue avec, aujourd’hui, une mise à l’honneur des personnes


privées dans leurs relations avec les organisations internationales.

Le Professeur Corten fait écouter une chanson qui évoque l’égalité.


Toutefois, il donne tout de suite le ton en indiquant que nous naissons pas
tous égaux, de fait… Il faut faire la distinction entre l’égalité des droits
humains en droit et en fait. Le but du droit est de changer les choses. N’y
a-t-il pas une tension entre un discours universaliste, d’une part, et un
discours plus nuancé avec une approche plus politique, plus relativiste… Il
y aurait, d’une part, une idée d’inexistence fort théorique des égalités
sans échelle, sans hiérarchie et, d’autre part, les égalités de fait avec les
circonstances factuelles qui les entourent…

Ce chapitre sera donc résolument tourné vers les droits humains. Il s’agira
d’avoir deux perspectives. D’abord, l’universalité des droits humains mais,
d’autre part, la souveraineté des Etats.

Sommes-nous égaux si nous naissons dans une famille milliardaire des


Etats-Unis, Anglaise ou encore avec un risque certain de mort dans
certaines régions reculées du Congo ?

Le Président Trump aurait eu pour projet de tuer Bachar El-Assad. Et en


fait, il n’a pas pu faire mais a pu aboutir à un autre projet d’exécution
extrajudiciaire avec le Général Iranien Qasem Souleimani qui fut tué le 3
janvier 2020 dans une « entreprise » Américaine…
50

Pour info, on peut aller lire la déclaration


Universelle des Droits de l’Homme, voir : https://www.un.org/fr/about-
us/universal-declaration-of-human-rights

Nous allons donc nous pencher sur les exécutions extrajudiciaires dans ce
chapitre.

Pour bien comprendre le mécanisme de l’exécution extrajudiciaire, il s’agit


d’un mécanisme politique qui a été initié sous la législature Obama. Il
s’agissait de désengager militairement toute une série de lieux à savoir la
Syrie, l’Afghanistan, l’Iraq… Se désengager voulait dire faire revenir à la
maison des soldats mais en même temps garder des actions sur place.
Des militaires, des USA, pilotent des drones qui vont exécuter des gens
sur le terrain… ; Oui, oui, on est en bien en 2021… Le corona est passé
par là mais les drones ont bien replacés les hommes dans des opérations
militaires… Mais parfois une mission très particulière est envoyée
« réellement » sur le terrain ; Ce sont les « attaques ciblées ». Il s’agit
dans ce cas d’attaques ciblées qui se substituent à des hordes d’hommes
en rangs armés sur place… D’autre Etats se livrent à ce type de chose… Il
s’agirait, par exemple, selon le journal « Le Figaro » du cas de la France
avec une politique qui aurait été menée sous le Président Hollande et
poursuivie sous la Présidence Macron ; Voir l’article à ce sujet de fin
septembre 2020 sur le site du Figaro… Le discours plus ou moins assumé
des autorités Russes vont dans ce même sens… C’est toute une série
d’Etats qui assument ou non. Les Etats-Unis et Israël assument ceci… Par
contre, la France ne l’assume pas.

En principe, les droits humains doivent être respectés même à l’encontre


de personnes considérées comme « ennemis », de gens qui, en tout cas,
ne respectent eux-mêmes pas les droits humains.
L’exécution extrajudiciaire consiste à exécuter quelqu’un à savoir planifier
51
la mort de quelqu’un, le punir, le sanctionner, l’exécuter en conséquence
de crimes qu’il aurait commis. Dans ce cas, on n’agit pas dans le feu de
l’action. On ne tue pas « à la volée ». Il existe même une liste de
« WANTED »… Cela signifie aussi qu’il n’y a pas de jugement qui
prononce cette exécution… Bon, en bref ça donne…

La récompense au bout du chemin, c’est l’exécution… Comme si le chef


d’Etat c’était dit… Tiens, tiens je vais ajouter à…

Allez, aujourd’hui… Ce sera… El-Assad ou Soleimani… ?

Plus sérieusement, l’exécution extrajudiciaire implique qu’il n’y a pas eu


de procès, pas de droits de la défense et donc aucune possibilité pour
l’inculpé de se défendre et notamment d’indiquer que ce serait infondé
soit en faits soit en droit… Par exemple, ce ne serait pas la personne qui
aurait commis le crime. Soit encore que le crime commis serait
52
potentiellement justifiable. Il y a toute somme faite un souci relatif aux
droits humains. C’est ainsi que les Nations Unies ont condamné à
plusieurs reprises les exécutions extrajudiciaires. Tel fut le cas avec la
Résolution n°73/172 du 17 décembre 2018. L’Assemblée, dans cette
Résolution, a condamné énergiquement toutes les exécutions
extrajudiciaires. Il s’agit, pour le droit, de réaffirmer son autorité face à de
telles pratiques. Cette Résolution a été adoptée avec 120 voix positifs,
aucun contre mais 60 abstentions… ; Ce sujet demeure donc complexe.

Suivons trois étapes… D’abord, la tension entre un développement des


droits de la personne qui pourront être évoquées pour s’opposer aux
exécutions extrajudiciaires mais tel ne sera pas toujours le cas. Ensuite,
au-delà des droits énoncés de manière abstraite, il y a-t-il des sanctions
derrières ? Si oui, lesquelles ? Puis, la mise-en-œuvre. Tout le monde doit
être protégé de la même manière ? Il faudra relativiser… Enfin, au-delà
des droits humains, il y a des obligations qui pèsent sur les individus sur
le plan du droit international. Donc, comment poursuivre des individus qui
se seraient rendus coupables de telles exécutions extrajudiciaires ?

1. Qu’en est-il des droits humains ?

A première vue, si on analyse les choses sous un angle historique, on


pourra croire que le droit international est idéaliste. En effet, il s’est
développé autour du droit des personnes. Jusqu’il y a une trentaine
d’années, les personnes étaient considérées non pas comme des sujets de
droit qui ont des droits propres mais bien comme des objets de droit
faisant partie du décor juridique,… Cependant, désormais, il y a toute une
série d’instruments visant à protéger les droits des personnes. Pour ce qui
est des exécutions extrajudiciaires, il y a la déclaration universelle des
droits de l’homme de 1948. Il y a également le pacte international sur les
droits civils et politiques. Ce pacte date du 16 décembre 1966. IL reprend
toute une série de droits qui vont être pertinents pour invoquer les
exécutions extrajudiciaires. Au niveau régional, il y a également des
conventions qui tendent à protéger, à accroitre la protection des droits
humains au niveau régional. Nous penserons notamment à la convention
interaméricaine de « San-José » de 1969 ou encore à la Convention
Européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme (C.E.D.H.). Tous ces
instruments reprennent des droits qui sont tout à fait pertinent pour notre
préoccupation à savoir l’exécution arbitraire. Il s’agirait d’une violation du
droit à la vie, du droit à un procès, à un procès équitable ou encore de
l’interdiction des traitements inhumains et dégradants. Il pourrait s’agir
53
d’attaques avec des drones qui surveillent et tout à coup, il y a une mise
en route… Il se peut aussi, sur le terrain, que des personnes soient
atteintes alors qu’il ne le fallait pas ; Tel est le cas d’enfants, par
exemple… S’arrêter à la lecture de conventions internationales serait naïf.
En effet, il faut contrebalancer l’universalité des droits. Comme nous
l’avons dit déjà plus haut, les droits humains ne sont pas universels et il
s’agira de relativiser ces droits. Divers motifs peuvent expliquer cette
obligation de relativiser. D’abord, les mêmes conventions et les mêmes
règles ne seront pas applicables partout dans le monde et ne le seront pas
de la même manière. Une affirmation « normative idéaliste » indique que
tout le monde devrait avoir les mêmes droits. En second, il s’agirait de
devoir interpréter le droit à l’aulne de divers contexte comme les facteurs
sociaux, politiques…

La Convention Européenne est disponible en


suivant ce lien, voir :
https://www.echr.coe.int/Documents/Convention_FRA.pdf (le lien de la
C.E.D.H.) dans le corps du texte ci-dessus est le lien vers la Convention
simplifiée…

S’agissant du droit applicable, il dépend des engagements des Etats à


accepter des traités. Dans le domaine des droits humains, il y a beaucoup
de conventions. Dans la leçon relative à la souveraineté, on a vu, par
exemple, que la Syrie était partie à des traités mais pas à d’autres… Si
l’on s’intéresse aux droits humains, on se pose la même question de
l’adhésion. S’agissant du pacte, on peut dire qu’il est applicable de
manière assez universelle. Un très grand nombre d’Etats sont partie à ce
pacte. Il y a, à ce jour, 173 Etats qui sont partie au pacte. N’est pas partie
au pacte, la Chine. Est par contre partie au pacte, les Etats-Unis mais ceci
seulement depuis juin 1992. La France est également partie ainsi que la
Russie. La Chine et l’Arabie-Saoudite n’étant pas membres, nous ne
pourrions pas leur opposer qu’ils doivent respecter le pacte puisque ces
Etats ne sont pas partie au pacte. S’agissant des conventions régionales, il
54
faut encore plus nuancer le propos. En effet, concernant le champ
d’application des « grandes conventions régionales », on voit qu’il y a un
« souci ». D’abord, concernant la C.E.D.H., quasi tous les Etats sont
parties à la Convention avec une exception notable ; La Biélorussie. Cet
Etat n’est pas membre de la Convention. S’agissant du continent
Américain, le Canada ou les Etats-Unis ne sont pas membres de la
Convention Américaine…

Le Professeur Corten fait allusion au cas de la


Biélorussie au titre de ce qu’il s’y déroule… En effet, des exécutions
« arbitraires » s’y déroulent… Le média « RFI » (France) a publié un
reportage à ce sujet, voir : Des centaines d'exécutions en toute opacité en
Biélorussie - Accents d'Europe (rfi.fr) Ce régime est conduit par le
Président Alexander Loukachenko. Un personne « privée » relativement
investie publie sur son site une macabre liste de personnes condamnées
par ce régime, voir : PdM — Exécutions capitales — Bélarus (Biélorussie)
(peinedemort.org)

S’agissant de l’acceptation, l’Etat peut accepter un traité sous réserves. En


effet, il peut indiquer qu’il accepte un traité mais indiquant, par exemple,
une disposition en particulier ne lui sera pas applicable et opposable dans
l’état dans lequel se trouve cette disposition. C’est vrai pour le pacte des
Nations Unies. Le pacte pourrait être opposable aux Etats-Unis. Ils ont
néanmoins fait une réserve sur le droit à la vie. Les Etats-Unis rappellent
à cet égard qu’ils pratiquent la peine de mort… Ensuite, ils renvoient vers
la Constitution Américaine. Laquelle serait déterminante. Dans ce prescrit
constitutionnel, on peut exécuter la peine de mort pour des mineurs. Or,
en droit « commun » international, on ne peut pas exécuter un mineur.
S’agissant des traitements inhumains et dégradants, les Etats-Unis
renvoient régalement vers leur prescrit constitutionnel. L’on peut donc
voir que certains Etats, pour interpréter du droit international, renvoient
vers le droit interne. En d’autres mots, c’est l’acceptation d’un traité sous
réserve de l’application du prescrit constitutionnel voulu.
55
Les instruments de protection des droits humains doivent tenir compte du
reste du droit international. En effet, par exemple, s’agissant de
l’immunité, il faut en tenir compte. (voir plus haut) Si l’on est victime
d’une exécution extrajudiciaire commise par une personne privée ou un
représentant de l’Etat, la chose sera fort différente… Il se pourrait en effet
que l’exécution soit pratiquée par des rebelles et dans ce cas, il n’y aura
pas d’immunité. Ce sont des forces irrégulières, privées. Dans le cas de
Soleimani, on doit se poser la question de l’immunité. Rappelons que c’est
le Président Trump qui a décidé l’exécution. Il s’agira là de chercher
l’immunité qui serait applicable.

Le quatrième facteur de nuance sera la possibilité de restreindre le droit


ou de déroger à certains droits. Par exemple, on pourrait trouver qu’il y a
des dispositions qui autorisent que certains droits ne seront plus
applicables. C’est ce que l’on pourra retrouvé dans l’article 4 du pacte
international ou l’article 15 de la C.E.D.H. Tel pourrait être le cas par
exemple pour le cas d’urgence. Concrètement, le droit ne sera pas
applicable si l’Etat a fait usage du droit de dérogation.

A noter que le droit à la vie quant à lui n’est pas dérogeable… On ne peut
jamais véritablement déroger au droit à la vie… Mais il faut se demander
ce qu’est le droit à la vie… Ce n’est pas le droit de vivre. En droit
international, il y a un droit à tuer. L’article 6 du pacte international dit
que le droit à la vie est le droit à ne pas arbitrairement être privé de la
vie. Il y aurait deux grands types de droit à tuer. La peine de mort en tant
que tel n’est pas contraire au droit à la vie. Les Etats peuvent
souverainement accepter de renoncer au droit à exécuter la peine de
mort. Toute une série d’Etats comme les Etats Européens ont acceptés de
déroger à ce droit « à tuer ». Ce n’est par contre pas le droit aux USA. En
second, en cas de légitime défense ou d’usage « normal » de la force par
une troupe régulièrement investie, il n’y aurait pas de violation du droit à
la vie. Du coup, qu’est-ce que c’est d’être privé du droit à la vie de
manière arbitraire ? Que veut dire sommaire ? Que veut dire arbitraire ?
C’est du cas par cas. Les Etats-Unis développent une argumentation
propre à cet égard. Pour eux, on est dans un contexte de guerre contre le
terrorisme. Le terrorisme n’a pas de frontière. Les Etats-Unis, en
particulier depuis le 11 septembre 2001, sont en guerre permanente
contre ces ennemis. Ce sont des ennemis de guerre mais paradoxalement
les Etats-Unis ne leur appliquent pas les droits rattachés aux « droits des
prisonniers de guerre ». Puisque ce sont des combattants ennemis, on
peut les tuer partout dans le monde. C’est donc une légitime défense ;
Sur le plan du recours à la force, ils font appliquer le pacte international
56
sur les droits civils et politiques. Ensuite, ils évoquent également le droit
des conflits armés. (le droit de la guerre) Pour conséquence finale, les
Etats-Unis auraient le droit de tuer. Cependant, ces arguments posent des
questions. Primo, si on applique le droit international, on ne peut pas dire
que le monde entier est en guerre. Si l’on mène une attaque en Syrie, au
Soudan, en Afghanistan,… L’on doit à chaque fois vérifier, dans chaque
cas, que l’on est bien dans une situation de guerre. Parfois, on se trouve
dans une situation de Paix. EN effet, si le terroriste se trouve sur un
territoire qui n’est pas en guerre… Norvège, Allemagne… Secundo, dés
que l’on est en guerre, seul le droit de la guerre s’applique. Donc, par
exemple le droit de mener des attaques contre les combattants et les
tuer. Se faisant, on n’aurait plus de droits de l’homme… Si l’on prend la
jurisprudence internationale, on voit que les Etats-Unis sont tout de même
isolés. La Cour Internationale de Justice dans divers avis a donné une
position certaine à ce sujet. Dans des avis relatifs au « mur en Israël » en
2004 ou encore concernant l’usage des armes nucléaires en 1997, elle
indique que les droits humains et le pacte international s’appliquent tant
en temps de guerre que de paix. C’est le contraire de la doctrine
Américaine. SI l’on prend le guide relatif à l’article 2 de la Convention
Européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme, on y lit que l’article
visé doit être interprété à l’aulne du droit international et plus
particulièrement du droit des conflits armés… Un précédent intéressant est
l’affaire « ISSAÏEVA c. RUSSIE » qui était pendante devant la C.E.D.H.. IL
s’agissait de bombardements. C’était entre la Tchétchénie et la Russie. Les
forces armées Russes bombardent un convoi. Mais des civils décèdent. Si
l’on suit la doctrine Américaine, elle n’aurait pu juger que le respect de la
C.E.D.H. puisqu’il y avait une situation de guerre qui, ceci dit, n’était pas
« internationale ». La Cour Européenne a appliqué l’article 2 de la
Convention. Partant, le droit à la vie s’applique bien dans le cadre d’une
guerre. Donc, même quand il y a guerre, le droit humain s’applique.
Tertio, même dans un cas de guerre, on ne peut pas tuer en toute
circonstance. Il y a en effet un critère de nécessité qui doit être appliqué
de manière stricte. On peut exécuter un ennemi si c’était strictement
nécessaire… Prenons le cas d’Oussama Ben Laden… Il a été exécuté le 2
mai 2011 par un commando Américain. Le commando est aller au
Pakistan, il est entré dans un bâtiment dans lequel il y avait Ben Laden
mais aussi ses accolâtes qui étaient là pour le défendre, armés… Le
commando a tué certaines de ces personnes. Il s’est ensuite dirigé vers
une chambre et Ben Laden était là. Deux versions ont été fournies au
sujet de son décès. La première version dit que Ben Laden avait un fusil et
avant d’être eux-mêmes tués par Ben Laden, ils ont tué Ben Laden. Dans
ce cas, si on va arrêter quelqu’un et que cette personne menace à votre
vie alors vous pouvez le tuer ; C’est une forme de légitime défense
appliquée au droit des conflits armés. Selon une deuxième version,
57
lorsque le commando est arrivé dans la pièce, Ben Laden était désarmé et
il n’aurait pas opposé de résistance. Dans ce cas, que l’on applique les
droits humains ou le droit des conflits armés, l’on ne pouvait pas le faire…
S’agissant de Soleimani, on peut se demander si c’était nécessaire. Selon
les USA , il avait déjà planifié des attaques sur les USA. Toutefois, ce jour-
là, rien ne démontre qu’il était dangereux. Selon la rapporteuse Angès
Callamard, il n’y avait pas de justification de la nécessité de tuer. Tout est
donc question d’espèce. C’est difficile de se prononcer de manière
générique. En conclusion, on voit bien qu’il y a des droits humains
applicables mais ce n’est pas toujours évident… Il y a donc une certaine
d’universalité mais même dans le cas de droits sensés être inatteignables,
ça peut, dans les faits, se produire…

La Croix Rouge internationale a publié, en


1997, un article relatif à l’avis consultatif de la C.I.J. concernant l’usage
des armes nucléaires, voir : Avis consultatif de la Cour internationale de
Justice sur la licéité de l'emploi d'armes nucléaires - Quelques réflexions
sur ses points forts et ses points faibles - CICR (icrc.org) On peut
retrouver l’avis lui-même sur le site de la CIJ, voir : 093-19960708-ADV-
01-00-FR.pdf (icj-cij.org) Concernant le « mur en Israël », voir : LA CIJ
DÉCLARE L’ÉDIFICATION DU MUR PAR ISRAËL DANS LE TERRITOIRE
PALESTINIEN OCCUPÉ, CONTRAIRE AU DROIT INTERNATIONAL |
Couverture des réunions & communiqués de presse Et voici le lien direct
vers l’avis concernant le « mur », voir : https://www.icj-
cij.org/fr/affaire/131

Affaire ISSAÏEVA c. RUSSIE :


58

https://hudoc.echr.coe.int/app/conversion/pdf/?library=ECHR&id=003-
1273439-1327314&filename=003-1273439-1327314.pdf

2. Mise en œuvre des droits humains

En cas d’exécution sommaire, le droit international renverra d’abord vers


l’Etat. Comme nous avons pu le voir, il est chargé de faire appliquer les
droits et de les faire respecter. L’Etat doit juger toutes les personnes qui
ont violées les droits humains. Même ses responsables d’Etat. Si, par
contre, c’est l’Etat qui a lancé une « procédure » d’exécution arbitraire, il
apparait peu probable que l’Etat juge son propre cas. En pareille situation,
ce seront des organisations internationales qui prendront le flambeau.

S’agissant de la protection des droits humains par l’Etat, il est question de


ce que ce serait l’Etat qui serait compétent sur son territoire que pour
connaitre de ce type de faits. Il pourrait y avoir des actions menées par
l’Etat à l’étranger. Il y a également des « escadrons de la mort », ce ne
sont pas des agents de l’Etat. L’Etat ne peut pas s’extirper de ce type de
responsabilité. Il y a donc une responsabilité de l’Etat. SI un Etat accepte
qu’un autre vienne sur son territoire pour qu’il y ait une exécution, il ne
peut pas s’extirper de sa responsabilité. S’agissant des USA, on peut
regarder les conventions. Le pacte international dit que l’Etat est
compétent que pour toute personne pour lequel l’Etat est compétent
tandis que la C.E.D.H. dit que c’est la personne qui est sous la juridiction
de l’Etat concerné. Que veut dire compétence ou juridiction ? Ce n’est pas
le territoire, c’est plus subtile. Il y a toute une série de jurisprudence qui
évoque ce sujet. Il y a d’abord l’occupation territoriale… Si l’on contrôle un
territoire, on a la juridiction. ON sera donc responsable. Quand bien même
juridiquement, ce n’est pas le territoire de l’Etat, c’est une occupation
donc c’est la juridiction de l’Etat voulu. Dans l’affaire « CARLOS », on
terroriste a été livré aux autorités Françaises. Dans ce cas, la France a
sous son autorité la personne. Elle se devait donc de veiller à la protection
des droits de l’homme. L’individu n’a pas été tué mais d’autres choses
seront contestées, voir notamment infos ci-dessous. Certains disent que
dans des cas de bombardements, il n’y aura pas de droit applicable.
59
Toutefois, dans le cadre d’un bombardement mené par des Etats
Européens en Yougoslavie, la Cour a dû se prononcer sur la question de la
territorialité. Des victimes privées ont subies ces bombardements. IL y a
donc eu un recours devant la CEDH. Elle n’a pas dit qu’il y avait eu
violation du droit à la vie. Selon al Cour, il y a un rapport de distance
entre le fait d’être à des dizaines de mètres voir milliers de mètres et dans
ce cas, il n’y aurait pas de territorialité. Si l’on suit ce raisonnement, cela
voudrait dire que dés lors que l’on utilise un drone, on est à l’abri de toute
poursuite… IL y a toute une série de problèmes juridiques qui résultent de
ce raisonnement. Dans l’affaire Bankovic, il s’agissait de bombardements.
C’était donc global. Il n’y avait pas une liste précise de personnes à tuer.
Lorsque l’on vise par exemple Soleimani, on vise une personne précise. Si
l’on prend aussi le cas d’Al-Baghdadi en 2019, il s’agissait également
d’une personne précise. On ne bombarde donc pas un village, une ville, un
quartier… IL y a donc une différence. Ces gens sont sous le contrôle. Se
faisant, Bankovic n’est pas applicable. En 2015, les Royaumes-Un ont
frappés des ressortissants Anglais et se faisant, on peut considérer qu’ils
étaient sous le contrôle direct de l’Etat en question. Un autre souci avec
Bankovic est que la CEDH refuse d’appliquer la Convention partout dans le
monde. Elle indique que la Convention est régionale. Par contre, le pacte
international a une portée universelle. Le comité des droits humains des
Nations Unies est compétent de manière universelle dont ses avis. Si un
territoire agit à l’étranger, il doit agir conformément à ce qu’il ferait sur
son territoire. Autrement dit, il doit respecter les droits humains même à
l’étranger. Dans un commentaire n° 36, le comité des droits de l’homme a
indiqué que dés que l’on va à l’étranger, on doit vérifier le respect des
conventions internationales. Le même avis fut émis dans le commentaire
général n°38. Troisième souci,… Bankovic est-il conforme au droit
international ? En résumé, selon Bankovic, on peut bombarder de manière
générale sans risquer des poursuites. Si, par contre, on prend les
précautions de cibler une personne en particulier, on n’a plus de souci.
Dans le cas des armes nucléaires, la Cour Internationale de Justice a
indiqué que le droit à la vie s’appliquait. (voir plus haut) En gros, cette
affaire « Bankovic » est controversée. En gros, tous les actes sont
responsables pour tous les actes commis à l’étranger.
60

La Cour Européenne des Droits de l’Homme


publie, sur son site, un article intitulé « Terrorisme et convention… »,
voir : https://www.echr.coe.int/Documents/FS_Terrorism_FRA.pdf Dans
un recueil de jurisprudence publié directement par la Cour Européenne, on
peut lire un extrait de l’arrêt « RAMIREZ SANCHEZ c. France » du 4 juillet
2006, voir : https://www.echr.coe.int/Documents/Reports_Recueil_2006-
IX.pdf S’agissant de l’affaire « Bankovic c. Belgique », la Cour a
communiqué à ce sujet, voir :
https://hudoc.echr.coe.int/app/conversion/pdf/?library=ECHR&id=003-
470525-471653&filename=003-470525-471653.pdf

Si l’Etat n’agit pas, ce sont les organisations internationales qui agissent.


Par exemple, au sein des Nations Unies, il y a des rapporteurs spéciaux.
Tel Agnès Callamard. Tel aussi Philippe Alston.. Il a rendu des rapports
très pointus sur les exécutions extrajudiciaires. Parfois, les individus
peuvent aussi faire appel aux organisations internationales pour aller à
l’encontre de ce genre de pratique. Pour ce qui est des exécutions
extrajudiciaires, on a égard au pacte international ou aux conventions
régionales. Si l’on veut faire une faction contre la France ou al Russie, on
ira devant la CEDH. Ce sera le cas pour les Etats parties à la CEDH. Pour
les USA, rappelons qu’ils ne sont pas partie à la convention de San-José.
Mais on pourrait demander un avis au comité des droits de l’homme de
l’ONU… L’effet de ce type d’avis n’est que peu contraignant. Il faut un
protocole facultatif pour fournir cet avis. Les USA n’ont pas acceptés cet
avis. On risque d’être relativement démuni si l’on a affaire aux USA…

3. Sujet de droit : Des droits mais aussi des obligations

Les individus sont soumis au droit pénal international. Dans certains cas
exceptionnels, les individus pourraient être eux-mêmes poursuivis… Est-ce
le cas ? Il n’existe pas de crime international d’assassinat. Pour pouvoir
conclure qu’il y a une exécution extrajudiciaire, il faut passer par les
mécanismes voulus sur le plan du droit pénal international. Dans le statut
de la CPI, on a le crime de guerre, d’agression,… Ce n’est pas évident de
61
conclure à un tel crime. Pour le génocide, si on analyse les termes du
Statut, on a d’abord l’exécution, un élément moral qui consiste à vouloir
s’en prendre à un groupe précis c’est-à-dire par exemple un groupe
ethnique ou religieux. L’on pense évidemment à la Choa. Si l’on regarde le
programme des Etats-Unis, on voit qu’il se pourrait que les Etats-Unis
veulent tuer des ennemis. Mais certains disent que ce sont des
Musulmans. Tel n’est pas le cas. Les USA eux-mêmes parlent d’ennemis et
non pas de s’en prendre à un groupe… Sur ce crime, ce n’est pas possible.
Pour le crime contre l’humanité, ce sont des actes commis dans le cadre
d’une attaque généralisée ou systématique contre un peuple. C’est donc
une exécution de masse. Il s’agirait de tuer des civils de manière
généralisée ou systématique. Si l’on a des listes précises de personnes
visées, on n’est pas dans le crime contre l’humanité. A moindre de
montrer qu’il y aurait un plan plus général d’exécution contre les civils. Il
y a un double souci. Ce sont des civils qui sont protégés et en plus la liste
est souvent contre des « non-civils ». Pour le crime de guerre, c’est une
infraction grave à la convention de Genève de 1949. Ce sera ici du cas par
cas. SI on prend l’exemple de Ben Laden et que l’on répute qu’il était
désarmé alors il y aurait une violation grave du droit de la guerre. Si, par
contre, on prend le cas d’Al-Baghdadi, on ne peut pas parler spécialement,
d’office d’une violation du droit de la guerre. On pourrait conclure qu’il y
aurait violation du droit à la vie par l’Etat mais pas contre une personne
précise. Le crime d’agression viendrait d’une personne qui s’en prend à un
Etat. Il faudrait vérifier qu’il y aurait une agression au sens du droit
international public. Ce point sera analysé un peu plus loin… Mais qui
qualifiera le crime d’agression ? Normalement, chaque Etat doit jugé les
crimes de guerre et autres mais en pratique c’est très rare. SI l’on prend
l’exemple du Vietnam, il n’y a eu que très peu de poursuites et s’il y en a
eu bien les peines étaient relativement faibles face à ce qui a été commis.
Soit il y a des tribunaux spécialement prévus comme tel fu le cas pour
Nuremberg, le Japon (Tokyo), ls tribunaux pour l’Ex-Yougoslavie, le
Rwanda… Ou alors la CPI pourrait agir. Elle a vocation Universelle mais en
réalité elle est limitée par le droit et le fait. Elle n’es compétente que pour
les Etats partie. Il pourrait donc y avoir une forme d’impunité ; Par
exemple, pour les USA. Les USA ne sont pas partie au Statut de la CPI. On
imagine donc mal que des ressortissants Américains soient poursuivis. On
pourrait par contre imaginer que le Président Macron puisse être poursuivi
mais il y a une limite politique énorme… La Cour n’a jugé qu’à ce stade
que des ressortissants Africains en la matière. Elle a engagée des
examens préliminaires pour des faits commis par exemple en Amérique du
Sud, en Asie,… Mais jusqu’ici, on a eu en réalité que des Africains. Pour la
Palestine, elle n’a pas agit. Pour montrer son universalité, elle aurait dû
agir dans certains de ces cas. Ce n’est peut-être pas un souci de volonté
mais il s’agit d’un rapport de force. IL y a des tensions entre l’universalité
62
et certains mécanismes juridiques et politiques.

La vidéo YouTube de ce cours est disponible


en suivant le lien : https://www.youtube.com/watch?v=0Rn1gg0Uxnc
L’exercice à la toute fin de la vidéo est en Français et porte sur la France
(voir à partir de la minute 1h28 sur 1h31)
IX. La coutume 63

Nous entamons cette partie du menu qui porte sur les sources du droit
international.

Nous allons tout d’abord envisager la coutume comme source du droit


internatinal.

Le Professeur Corten fait écouter, au début de la vidéo, la « célèbre »


chanson « Comme d’habitude », voir :
https://www.bing.com/videos/search?q=comme+d%27habitude+youtube
&qpvt=comme+d%27habitude+youtube&view=detail&mid=D9A016E2084
395CDCA28D9A016E2084395CDCA28&&FORM=VRDGAR&ru=%2Fvideos
%2Fsearch%3Fq%3Dcomme%2Bd%2527habitude%2Byoutube%26qpvt%
3Dcomme%2Bd%2527habitude%2Byoutube%26FORM%3DVDRE Mais
est-ce que les habitudes du droit international bousculent les choses ?
Allons jeter un coup d’œil, c’et ici que ça se passe.

Existe-il une contrainte sociale dans nos « habitudes » ? C’est peut-être


parce qu’il a une contrainte, une norme sociale, un fait qui induit qu’il
s’agirait d’être obligé de se conformer à des attentes que pour agir dans
ce sens. Cela s’applique aux relations humaines mais également au droit
international.

Au menu de ce chapitre, nous aurons le droit d’intervention humanitaire


pour exemplifier notre propos.

Nous avions déjà parlé des Rohingyas qui subissent des répressions au
Myanmar. L’affaire a été mise à l’ordre du jour de la CPI (Cour Pénale
Internationale. La Gambie a déposé, le 11 novembre 2019, une requête
devant la Cour Internationale de Justice que pour faire condamner le
Myanmar pour crime de génocide. Il s’agit en l’occurrence d’actions
judiciaires qui tendent à faire condamner l’Etat en question. Toutefois,
lorsque l’on parle d’intervention humanitaire « au sens stricte », il y a un
aspect de « contrainte » qui n’est pas présent dans ces actions en justice.
Ce sont donc des choses différentes. Lorsque l’on parle du droit
d’intervention humanitaire, on pense donc « militaire », « contrainte ». De
nombreux exemples d’actualité illustrent la chose. D’abord, il y a des
interventions sous l’égide du Conseil de Sécurité des Nations Unies. IL y a
64
eu, dans l’histoire, de telles procédures. Et ce, en particulier depuis les
années 1990. En effet, le Conseil de Sécurité a, à quelques reprises,
depuis lors autorisé des interventions « humanitaires » qui se sont faites
sous son égide, avec un certain cadre. Nous pourrions d’abord penser à la
Bosnie-Herzégovine, Etat dans lequel l’ONU a envoyé des missions. Nous
pourrions également évoquer la somalie en 1992 (voir plus bas, un article
du Soir). En 1994, le Rwanda a reçu une mission humanitaire. Dans ce
cas, c’était surtout la France qui avait reçu cette autorisation des Nations-
Unies. Dans les années 2010, en Lybie et en Côte d’Ivoire, des
autorisations ont également été données. Mais ce n’est toujours pas à cela
que l’on va s’intéresser. De manière plus courant, l’intervention
humanitaire est entrepris en s’affranchissant d’une autorisation des
Nations-Unies. Le dilemme est que le Conseil de Sécurité peut confier un
mandat mais il ne le fait pas toujours et dans ce cas, n’est-ce pas
envisageable tout de même d’entamer une intervention humanitaire ?
C’est dans ce sens qu’une certaine pratique peut être évoquée. Nous
avions envisagés l’idée du Président Trump qui consistait à vouloir
exécuter le Président El-Assad. En revanche, une action réelle s’est
produit en 2017 puis en 2018 en Syrie. Le but était de sanctionner le
régime qui avait utilisé des armes chimiques contre les rebelles. Nous
avons une pratique positive dans le cadre de ces volontés d’agir de
manière humanitaire. Il y a aussi, malheureusement, des cas dans
lesquels il y a des actions militaires qui violent le droit international et plus
précisément le droit humanitaire international. Tel est par exemple le cas
des interventions militaires d’Israël en Palestine. Ou encore s’agissant des
Kurdes. Tel est aussi le cas en Chine avec les Ouighours. Il y a une
pratique de « deux poids, deux mesures » à savoir, d’une part, des
interventions avec autorisation du Conseil de Sécurité et, d’autre part, une
observation de faits qui n’a aucune suite. Il n’existe pas, dans la charte
des Nations Unies, un droit d’intervention militaire. Par contre, elle prévoit
l’interdiction du recours à la force, la légitime défense, l’autorisation du
Conseil de Sécurité… Mais en complément à la charte, n’existe-il pas un
droit coutumier permettant d’intervenir ? L’action en Syrie ne serait-elle
pas le dernier épisode d’une série de précédents qui permettent
d’intervenir ? Dans la doctrine, c’est controversé. L’Institut de Droit
International en avait discuté mais n’était pas parvenu à un accord. Au
contraire, en 2007, une résolution précédée d’une déclaration
présidentielle est tombée et elle s’est bornée à constater l’absence
d’accord. L’Institut indique que certains sont pour et d’autres contres. Le
débat portait sur la coutume.
65

Le site de la CIJ publie un article intitulé


« derniers développements » concernant ce dossier. D’ailleurs, on peut y
lire qu’une ordonnance de fixation au sujet de la requête de la Gambie du
11 novembre 2019 a été rendue le 28 janvier 2021, voir : Derniers
développements | Application de la convention pour la prévention et la
répression du crime de génocide (Gambie c. Myanmar) | Cour
internationale de Justice (icj-cij.org)

Un article, relativement ancien, du journal « Le soir »


évoque l’intervention « RESTORE HOPE » menée par les Etats-Unis à la
suite du mandat confié par les Nations Unies. Pour lire cet article, voir le
QR code :
66

Nous allons analyser la chose en trois étapes. D’abord, la coutume ne peut


pas être analysée de manière isolée par rapport aux autres sources du
droit. Il fut un temps où les traités internationaux primaient, qui étaient
foisonnant. C’est toujours le cas mais désormais, il faut s’accoutumer de
la coutume… ; Autrement dit, malgré le « mauvais jeu de mot », il faut
utiliser la coutume au regard du droit conventionnel. Ensuite, on
s’intéressera à la définition de la coutume et de ses éléments constitutifs.
Il s’agit d’une pratique et d’une sorte de contrainte. Celle-ci étant
matérialisée dans le fait que l’on pense agir conformément à une règle de
droit. Il y a donc un aspect objectif à savoir la pratique elle-même mais
également plus subjectif à savoir ce sentiment de se conformer à une
règle. Enfin, nous nous demanderons si cette source n’est pas un peu
paradoxale. A la fois, elle vise à codifier la pratique, que les choses soient
bien claires, que la règle soit claire. Il s’agit de faire évoluer le droit en
faisant abstraction de procédures lourdes. La coutume, en droit
international, a une place très particulière ce qui n’est pas le cas pour
d’autres branches du droit où le droit écrit prime…
67
1. Les relations entre la coutume et les autres sources
du droit

Pour aborder cette question, il faut nécessairement faire un peu de théorie


du droit. On est obligé de renvoyer à un grand clivage entre les sources
du droit. Il y a d’abord la doctrine volontariste. Dans cette perspective, le
droit international est le produit de la volonté des Etats. Toutes les
sources, qu’il s’agisse des traités ou de la coutume sont l’émanation de la
volonté des Etats. EN opposition, on a l’idée de l’approche objectiviste. Il
s’agit des nécessités sociales. La règle s’impose, les Etats doivent vivre
entre eux et se conformer à certaines règles. Si l’on se penche sur le droit
d’intervention humanitaire, on se demandera ce que les Etats ont
acceptés. C’est donc relativiste. Si l’on est dans une démarche
objectiviste, on se demandera au-delà de al volonté de l’Etat, s’il n’y a pas
une volonté de se conformer à une certaine règle. L’interdiction du recours
à la force serait une espèce de prémices d règles qui s’impose
objectivement comme postulat qui pose que si l’on veut vivre ensemble
dans une « société internationale », il faut se conformer à un minimum de
règles. Il est interdit de mener des actions humanitaires car ça relève de
l’appréciation de l’Etat. En effet, ce serait faire « un tri » et ça relèverait
de la seule appréciation de l’Etat qui souhaiterait mener cette action. Ce
serait la perspective objectiviste. Par contre, les volontaristes diront que
s’il y a des choses tellement atroces, malgré ces règles, on doit pouvoir
venir, à titre exceptionnel, à ces gens qui vivent ces atrocités. Dés lors, il
y aurait objectivement un droit coutumier d’intervention humanitaire.

Il y a des enjeux concrets qui vont se poser. Si l’Etat a refusé la règle,


est-il tenu ? Dans une perspective volontariste, il ne sera à priori pas
tenu. Dans une perspective objectiviste, oui car il y a objectivement une
nécessité. Sur le plan des réserves aux traités, dans une perspective
volontariste, on donnera un plein effet aux réserves. Dans une perspective
objectiviste, on mettre plus facilement en cause la validité de la réserve.
Toutefois, nous traitons dans ce chapitre de la coutume. Cet « enjeu » est
donc mentionné mais ne sera pas traité ici. Enfin, il y a l’enjeu de
l’interprétation. SI on est dans une interprétation volontariste, on se
demander s’ils ont interprétés la charte, le traité dans un sens ou l’autre…
Dans une perspective objectiviste, on se posera plutôt dans une
interprétation téléologique. L’on sera donc, dans ce dernier cas, plutôt
dans une perspective « universaliste », éthique du droit. Dans la
démarche volontariste, on tend pus à se diriger vers la volonté des Etats,
la souveraineté. Mais pour échapper à cette réflexion théorique, ne peut-
on pas se tourner vers la jurisprudence ? La jurisprudence n’est pas très
68
claire, c’est contrasté. On peut s’intéresser à deux précédents à cet égard.
Il y a d’abord l’affaire des activités militaires et paramilitaires au
Nicaragua. Il y a ensuite l’affaire des bombardements de l’OTAN en
Yougoslavie en 1999.

La Cour, dans les deux affaires précitées, s’est penchée sur la question de
l’intervention humanitaire. Mais a-t-elle répondu de manière volontariste
ou téléologique ?

Dans l’affaire « Nicaragua », les Etats-Unis étaient intervenus car, selon


eux, il s’agissait, je cite « d’une dictature communiste totalitaire ». Ces
termes sont très forts. Selon les USA, ce pays violait, de manière
constante, les droits des minorités notamment d’Indiens… Pour cette
raison, les Etats-Unis ont affirmés, de manière « générale », qu’ils étaient
en droit d’intervenir. La Cour n’a pas été dans le sens des Etats-Unis. En
effet, elle a rejeté ceci, d’une part, parce que les Etats-Unis ont acceptés
l’interdiction de l’intervention et, d’autre part, la Cour a considéré que « si
les Etats-Unis peuvent porter leur propre appréciation sur la situation des
droits de l’homme au Nicaragua, l’emploi de la force ne saurait être la
méthode appropriée pour vérifier et assurer le respect de ces droits. La
protection des droits de l’Homme, vu son caractère strictement
humanitaire n’est en aucune façon compatible avec le minage de ports, la
destruction d’installations pétrolières ou encore l’entrainement,
l’armement et l’équipement des contras. ». L’on peut lire, dans un premier
temps, une perspective volontariste. Dans un second temps et l’extrait ci-
dessus en est l’occasion, l’on lira une perspective résolument objectiviste…
Selon la Cour, il y a donc une incompatibilité de principe (objectiviste)
entre le respect des droits de l’Homme / humain et le moyen qui réside
dans l’intervention militaire. Une intervention humanitaire militaire est un
oxymore… C’est donc incompatible selon la Cour. Suivant ce précédent, on
se réfère plutôt à une perspective objectiviste.
69

L’arrêt, du 27 juin 1986, au fond, relatif à


l’affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua est lisible en
suivant ce lien : https://www.icj-cij.org/fr/affaire/70 ➔ L’arrêt lui-même
se trouve en fin de documents, dans la liste des documents
téléchargeables et le Professeur Corten, dans son exposé, fait un arrêt sur
image sur le paragraphe 268 dudit arrêt.

Nous avons un second exemple, précédent. Il s’agit de l’affaire relative à


« la licéité de l’emploi de la force ». C’était la Yougoslavie qui avait saisi la
Cour à ce sujet. Il y avait donc eu une intervention militaires des Etats
membres de l’OTAN. Cette intervention était officiellement destinée à
mettre fin à de graves violations des droits humains. Ces Etats ne se sont
pas défendus en invoquant le droit d’intervention qui, pour rappel, est
exceptionnel. Ils invoquent par contre l’incompétence de la Cour. La Cour
sera amenée à se déclarer incompétente. Mais dans un premier temps,
elle était saisie d’une demande de mesures conservatoires. La Cour
n’accèdera pas à cette demande. Néanmoins, la Cour tient à dire qu’elle
est fortement préoccupée par l’emploi de la force en Yougoslavie. C’est,
dans le cadre de l’époque, une violation grave du droit international, selon
la Cour. C’est extrêmement lacunaire. En effet, la Cour se dit
incompétente et rend une ordonnance à cette fin mais elle tient
néanmoins à donner son avis, in fine, sur un point de droit. On ne peut
pas dire si ces problèmes déboucheront sur une analyse objectiviste ou
volontariste. Dans ce cas, la Cour n’arrive pas à proposer une perspective
ou l’autre…

Dans un certain nombre de cas, le choix pourra s’imposer. Dans le cadre


de certains enjeux, il faudra faire un choix. Le recours à la force à priori
n’est pas un enjeu. Il ne l’est pas parce qu’il s’agit d’une règle de droit
impératif. A priori, on ne peut donc pas y déroger. Elle a été acceptée
comme telle et n’acceptant aucune dérogation. Cela signifie que même si
l’Etat n’est pas d’accord, il doit se soumettre à la règle. C’est, en soi, un
point de vue objectiviste.
70
Nous devons nous pencher sur les relations entre la coutume et les
traités… Dans les droits « nationaux », la coutume a un rang inférieur à la
« loi ». Elle est hiérarchiquement inférieure, subordonnée. En droit
international, ce n’est pas le cas. Si l’on lit les grands textes comme
l’article 39 du Statut de la Cour de Justice, on constate que la coutume et
les traités sont mis sur le même piédestal. On se demande donc s’il y a un
droit d’intervention… Nous allons d’abord voir la charte des Nations Unies
de 1945 qui a été révisée puis nous irons voir la coutume. En effet, en
droit international, c’est la règle de la « loi / règle la plus récente » qui
prime. Si demain, il y a un doit d’intervention qui est intégré à la charte,
ce sera cette règle qui primera. L’article 31, paragraphe 3 de la
Convention de Vienne sur le droit des traités nous éclaire sur la méthode
d’interprétation. Cette disposition stipule que l’on doit tenir compte du
contexte et de tout accord ultérieurement suivi au sujet du traité. De plus,
toute pratique se rattachant au traité doit être prise en compte. Le point
« b », résumé ci-avant, évoque la coutume. La pratique et l’accord des
parties est donc la coutume en soi. Donc, pour interpréter la charte on
peut, par accord explicite (a, art. 31, 3), utiliser la pratique pour se faire
ou, de manière implicite (b, art. 31, 3). La relation entre la coutume doit
être très bien comprise selon le Professeur Corten ; Ce serait
fondamental. La coutume doit être interprétée en lien avec le traité.
S’agissant, par exemple, du droit de véto au Conseil de Sécurité, on voit
qu’une abstention ne fait pas obstacle à l’adoption d’une résolution. En
effet, le traité dont question dit le contraire mais la pratique ultérieure
l’autorise. L’article 27, 3° de la Charte des Nations Unies concernant le
droit de vote n’a pas été révisé. Ce sera donc la coutume qui, dans ce cas,
primera. Mais concernant le droit d’intervention militaire ? Rappelons
qu’en 2017, les USA sont intervenus… Mais…

Les Etats-Unis pourraient-ils se prévaloir d’une coutume que pour pouvoir


intervenir au Myanmar et autres ?
Pour répondre à cette question, nous allons, d’un point de vue
71
méthodologique, commencer par les textes. Vu que l’on doit interpréter
les traités, on partira de ceux-ci. SI l’on a une réponse, on ne s’y arrêtera
pas. Puisque, en droit international, la coutume est en relation. En droit
interne, en principe, si le texte dit que c’est blanc, ce sera blanc. Si, par
contre, il dit que c’est noir, ce sera noir. La coutume, en principe, en droit
interne, ne viendra pas détrôner ce que dit le texte. Si l’on examine le
texte de la Charte des Nations-Unies, on voit d’abord ce qui se trouve
dans le texte et ne s’y trouve pas. Par exemple, le droit d’intervention
militaire n’est pas dans le texte. Par contre, la légitime défense s’y
trouve… S’y trouve, le principe de l’interdiction du recours à la force, voir
art. 2, paragraphe 4 de la Charte. S’y trouve aussi, le principe du
règlement alternatif des différends. Si l’on examine la Charte, on voit,
dans l’article 103, que la charte primerait les autres traités. Mais si l’on
prend la convention sur la répression des crimes de génocide, l’on peut
lire que les Etats parties s’engagent à punir ces crimes. Il y aurait donc
une sorte de possibilité d’intervention. Dans le même sens, les
conventions de Genève de 1949 énoncent que les hautes parties
s’engagent à respecter et à faire respecter ces conventions. L’article 8 de
la Convention relative à la répression de génocides énonce qu’il est
possible de saisir le Conseil de Sécurité mais on ne peut donc pas agir
seul. Quant aux conventions de Genève, si l’on se penche sur le premier
protocole, l’on peut lire que les hautes parties s’engagent à agir tant
conjointement que séparément conformément et avec l’ONU. Dans le
Statut de la Cour Pénale Internationale, on lit que les Etats parties
s’engagent à respecter les conventions de l’ONU. Dans le Statut de la
C.P.I., il est même indiqué que les Etats s’abstiennent de recourir à la
force (emploi de la force). D’ajouter, dans le Statut, que rien ne peut
autoriser un Etat à s’immiscer dans les « affaires » d’un autre Etat. En
d’autres termes, à ce stade, dans les textes, on ne voit rien qui permette
de dire qu’il y aurait un droit d’intervention humanitaire. Tout semble au
contraire l’exclure. Cela dit, le débat ne s’arrête pas là. En effet, on peut
très bien admettre que la coutume ait abouti à une évolution qui irait à
l’encontre des textes susmentionnés. On constate tout d’abord que, dans
la pratique, il n’y a pas de précédent qui, dans l’ensemble, reconnait qu’il
y aurait un tel droit ; Les Etats dans leur ensemble ne reconnaissent pas
un tel droit. Un grand nombre de Résolutions des Nations-Unies ont été
adoptées sans le vote de certains Etats permanents ; Cela a permis de
« commencer une coutume ». L’article 31, paragraphe 3, a) de la
convention de Vienne sur le droit des traités prévoit que l’on doit tenir
compte des accords ultérieurs des Etats. A cet égard, on pourra citer deux
exemples à savoir la Résolution n°2625 de l’Assemblée Générale des
Nations-Unies ou encore la 3314 de la même Assemblée. Ces Résolutions,
selon la Cour Internationale de Justice, reflètent la « coutume
internationale ». L’on peut lire, dans la Résolution 2625,que tout Etat
72
s’abstient du recours à la force pour violer les frontières internationales
d’un autre Etat. Ce qui est intéressant dans ce cas, c’est que l’on a un
critère objectif à savoir « Tu passes, tu as fauté ! ». Dans ce cas, il n’y a
pas de critère subjectif à savoir une potentielle cause légitime de la
violation de la frontière. Le droit d’ingérence est explicitement condamné
par ce texte. S’agissant de la Résolution 3314 concernant l’agression,
l’article 5 dit qu’aucune considération de quelque nature qu’il soit ne
saurait justifier une agression. C’est très large mais si l’on analyse les
travaux préparations, on voit que, très précisément, les Etats qui ont
participés souhaités écarter un critère de « légitimité » ; L’on en revient
donc aussi sur un critère objectif comme dans la Résolution 2625. Si l’on
agit contre un Etat dictatorial et même si c’est légitime, ça ne suffit pas…
Des Etats comme les Pays-Bas, le Royaume-Uni, le Canada ont souhaités,
dans les années 50, établir un critère objectif. Les Pays-Bas ont dit que,
au nom de la libération d’un peuple, on ne peut pas admettre que l’on
viole els frontières d’un Etat. Le Royaume-Uni, quant à lui, disait que,
même sur des considérations humanitaires, on peut pas violer les
frontières d’un Etat. Ceci d’autant plus que l’interdiction du recours à la
force à savoir le « ius contrat bellum » à savoir le « droit contre la
guerre » est du droit impératif. Mais qu’est-ce que le droit impératif ?
L’article 53 de la Convention de Vienne, précitée, énonce que le droit
impératif est toute norme acceptée par les Etats et cette norme doit être
reconnue par ceux-ci comme impérative et ne permettant aucune
dérogation. Deux aspects émergent à savoir la reconnaissance par la
communauté internationale dans son ensemble et l’aspect « impossible de
déroger ». L’on peut établir des exceptions mais pas déroger. La légitime
défense est une exception mais pas une dérogation. Autrement, en droit
international, alors que l’on a fait des conventions, l’on ne peut pas se dire
que l’on va déroger pour un cas ou l’autre et pour des motivations
déterminées au droit établi. L’on ne peut donc pas introduire un régime
spécifique. Le droit National est plutôt libéral. Mais le droit international
n’est pas « libéral » à savoir la possibilité, comme en droit des obligations
au niveau National, de déroger. Par exemple, au niveau National, on ne
peut pas déroger à des règles impératives relevant du droit social. C’est la
même chose en droit international. SI la règle est impérative, on ne
déroge pas. La guerre concerne tous les Etats c’est pourquoi certains ne
pourraient pas tout à coup tenter de s’extirper. S’agissant du droit
d’intervention humanitaire, il y a un débat concernant l’Union Africaine. En
effet, l’article 4, h) de l’acte constitutif et l’article 53 de la Charte des
Nations Unies semblent se contredire. Pour cause, l’article 4, h) prévoit
que la conférence Africaine pourra discuter de la situation s’il y a un crime
contre l’humanité, de génocide… Tandis que l’article 53 de la Charte
prévoit, quant à lui, qu’il faudra un accord du Conseil de Sécurité des
Nations Unies. D’une part, dans l’acte constitutif, on dit qu’il faudrait un
73
accord de la conférence et, d’autre part, un accord du Conseil de Sécurité.
La simple lecture de ces deux textes ne suffit pas. En effet, si l’on va lire
le protocole relatif à la création du Conseil de Paix et de Sécurité de
l’Union africaine, l’on peut lire que le texte renvoi au chapitre VIII de la
Charte des Nations Unies qui contient notamment l’article 53, précité. Les
choses semblent du coup peu claires. Selon l’article 4, h) (précité), il y a
un renvoi à la conférence tandis que l’article 17 du protocole (précité)
renvoi quant à lui au Conseil de Sécurité. Pour trancher ce « conflit de
normes », il est nécessaire de se tourner vers la coutume. Lorsque l’on
analyse la pratique, il n’existe aucun précédent. La coutume semble donc
traduire un manque de conviction des Etats Africains que l’intervention
pourrait s’exercer sans l’accord du Conseil de Sécurité. Tout semble plutôt
indiquer que s’il y a un droit d’intervention, il doit plutôt se concilier et non
pas s’opposer avec l’article 53 de la Charte des Nations Unies. D’ailleurs,
si l’on analyse les prises de positions des Etats Africains en tant que
membres du mouvement des non-alignés, l’on voit que le mouvement
affirme la nécessité de respecter la Charte des Nations Unies. Selon eux,
derrières de « justes causes », il ne pourrait y avoir d’interventions des
grandes puissances. Ce ne sont pas généralement les Etats membres du
mouvement des non-alignés qui mettent en œuvre des interventions.
C’est une des raisons qui justifie qu’ils souhaitent le stricte respect de
l’article 53de la Charte, précité. Dés lors, la coutume, par le biais de ces «
accords informels », nous semble laisser à penser qu’il faut interpréter le
droit de manière restrictive. Pour conclure au sujet de ce premier point
relatif aux relations entre les traités et la coutume, l’on peut dire que la
coutume peut aboutir à une modification des traités. Toutefois, cela se fait
à des conditions assez strictes. Il faut en effet démontrer un accord assez
clair entre les Etas pour qu’ils puissent s’écarter du sens littéral énoncé
dans les traités. Si l’on analyse tous ces éléments, on doit conclure que ce
n’est pas possible de prétendre qu’un droit d’intervention humanitaire
unilatéral est possible. C’est donc dans le sens du refus du droit
d’intervention humanitaire unilatéral c’est-à-dire sans l’accord du Conseil
de Sécurité que l’on va… La pratique témoigne plutôt de la possibilité pour
le Conseil de donner son accord. Par conséquent, un droit d’intervention
unilatéral des Etats-Unis est à priori impossible et ce, pour répondre à la
question posée tout au-dessus de ce paragraphe.
74

Le texte de l’article 2 de la Charte des Nations-Unies


est reproduit par capture d’écran ci-dessous. Ainsi qu’est également
reproduit, toujours par capture d’écran, l’article 103 de la charte. Mais
l’article 1er de la convention relative à la répression des crimes de
génocide est également reproduit ci-dessous par capture d’écran.
75
76

Ok, ok mais qu’est-ce qui se trouve dans les textes alors ?

Bah, faut lire ! Sinon, nous avons fait l’effort pour toi…

- Dans la Charte de l’ONU :

➢ Ne s’y trouve pas :


o Un droit d’intervention humanitaire ;
➢ S’y trouve :
o La légitime défense ;
o L’action du Conseil de Sécurité ;
o Le principe de l’interdiction du recours à la force, art. 2, par. 4
(voir plus haut) ;
o Le principe de règlement pacifique des différends ;

«…»

Ouais mais au final il y a-t-il un droit d’intervention ?


Pas dans le texte de la Charte. Par contre, la coutume semble le permettre
mais avec l’accord du Conseil de Sécurité. A priori, il n’y en a donc pas qui
puisse être exercé de manière unilatérale. Donc, à priori, pas
77
d’intervention des USA au Myanmar et autres…

2. Comment vérifier s’il y a coutume ou non ?

Nous avions déjà fait l’exercice mais, semble-il, pas de manière assez
précise…

Il y a deux éléments constitutifs de la coutume à savoir :

➢ La pratique, l’habitude : L’élément objectif ;


➢ L’opinio iuris : La conviction que l’habitude est devenue une
obligation. C’est la mise-en-œuvre d’une règle juridique.

En énonçant ces deux éléments, on constate qu’il y aura une difficulté


d’interprétation surtout pour ce qui est de l’élément subjectif à savoir
« l’opinio iuris ». En effet, pour la pratique, on peut l’interpréter assez
largement. C’est-à-dire c’est ce que font les Etats pendant un certain
temps. Ce « certain temps » peut aller vite pour autant que les choses
soient assez claires et que le deuxième élément constitutif soit présent à
savoir l’opinio iuris. Sur le plan de la pratique, il y a ce que font les Etats
et ce qu’ils ne font pas. Appliqué au droit d’intervention, on peut constater
que, la plupart du temps, les Etats n’interviennent pas. Il n’y a pas
d’intervention au Myanmar, en Turquie, en Israël, en Chine… Il y a donc
une abstention, une pratique négative. Cela veut-il dire qu’il n’y a pas de
coutume ? Non, une pratique négative peut être prise en compte. Il faut
se demander si l’on intervient en droit, avec la conviction que l’on a une
base « légale » que pour intervenir. Mais l’on peut aussi se demander si
l’on intervient pour des considérations morales… A contrario, l’on peut se
demander si l’on n’intervient pas si c’est basé ou non sur des
considérations juridiques. EN d’autres termes, quand l’on n’intervient, est-
ce une question de droit ou de volonté ? Ce serait trop dangereux ? Le
droit, la politique, la morale, l’éthique… sont liés. C’est une problématique
que l’on retrouve dans la jurisprudence. Tel pourrait être le cas pour
l’affaire du plateau continental de la mer du Nord. Mais aussi de la
jurisprudence plus spécifiquement consacrée au droit d’intervention. Pour
se faire, nous pourrions, une fois de plus, reprendre l’affaire
« Nicaragua ». La Cour est très claire sur le sujet du droit d’intervention.
D’abord, elle constate qu’il y a eu des droits d’interventions. Ensuite, elle
dit que pour qu’il puisse y avoir un droit coutumier à intervenir, il faut que
78
l’Etat intervenant évoque un nouveau droit qui pourrait tendre à modifier
le droit international coutumier. Si l’Etat évoque un droit d’intervention
humanitaire et pour autant que c’est accepté par les autres Etats, cela
pourrait entrainer une modification du droit coutumier. SI, par contre,
l’Etat intervenant se prévaut non pas d’un droit d’intervention au sens
juridique du terme mais dit qu’il a des motifs pour intervenir tel que la
politique intérieure de ce pays, son idéologie, l’orientation de sa politique
extérieure alors dans ce cas il en s’agit que de considérations politiques et
nullement de l’affirmation de règles de droit international. Selon la
« doctrine Regan », dés qu’il y a un régime communiste, il faut « agir » ce
qui, en tout état de cause, n’est pas l’évocation d’une règle de droit mais
bien de considérations politiques. Il n’y a donc pas, en l’espèce, pas de
droit d’intervention. Les Etats-Unis se reconnaissaient une capacité
d’intervention mais pas un droit. S’agissant du droit d’intervention, il faut
donc se demander s’i s’agit d’un droit et ensuite se demander si les autres
Etats l’on accepté. Si nous revenons concrètement au cas de l’intervention
militaire du 14 avril 2018 menée par les Etats-Unis, la France, le
Royaume-Uni en Syrie officiellement pour des raisons humanitaires. Il
s’agissait de mette fin à l’utilisation de l’arme chimique. Pour motiver cette
intervention, les Etats-Unis ont indiqués que les « Nations civilisées » se
sont réunies pour bannir l’utilisation d’armes chimiques. Ensuite, ils
renvoient aux intérêts nationaux à savoir la sécurité nationale. Et enfin, ils
se prévalent de la lute contre le barbarisme et la brutalité. C’est donc un
ensemble d’arguments politiques et « éthiques » qui ont été avancés par
les Etats-Unis et non pas des arguments juridiques. En pratique, cela se
passe souvent comme ça. Les Etas ne vont généralement pas faire un
cours de droit que pour se justifier de ce type d’intervention. On voit bien
que c’est difficile d’en déduire une doctrine juridique à savoir une opinio
juris. Selon la motivation Française, on a des sources juridiques mais elle
ne dit pas du tout qu’elle a un droit d’intervention. L’on s’approche donc
de motivations en droit mais elle ne motive pas d’un droit d’intervention.
La France dit que son action est légitime mais la légitimité n’est pas un
argument en droit. Elle ne dit donc pas que c’est conforme au droit
international. Elle dit qu’il s’agit de mettre fin à une violation du droit. Ce
n’est pas parce que l’on pense être légitime que l’on peut intervenir sinon
ce serait le chao ; Tout le monde commencerait à intervenir en invoquant
à chaque fois des raisons légitimes. Il s’agit donc là, une fois de plus,
comme pour les Etats-Unis, de raisons politiques et « éthiques » et non
pas juridiques. La déclaration du Royaume-Uni énonce quelque chose de
bien plus juridique. Le Royaume-Uni parle d’une « base juridique ». Il y a
une affirmation explicite qu’il y a un droit d’intervention. Il y a donc-il une
opinio juris du Royaume-Uni ? Jusqu’au début des années 2000, le
Royaume-Uni avait plutôt tendance à refuser les interventions. Le
Royaume-Uni a notamment condamné l’action au Cambodge entreprise
79
par le Vietnam en 1979. Le régime des Khmers rouges aurait commis des
crimes contre l’humanité et ils ont d’ailleurs eu divers procès. Le
Royaume-Uni semble avoir changé de position. En effet, pour ce » qui est
de l’intervention de 2018, on a clairement l’impression qu’ils évoquent un
droit d’intervention ainsi que pour d’autres interventions depuis les années
2000 mais tel ne fut avant pas le cas. Pour qu’il puisse y avoir une
« opinio juris », il faut que l’avis soit constant ou, le cas échéant, que les
autres Etats soient d’accord. Pour ce qui est de la Syrie, il y a une série
d’Etats qui déclarent être ou ne pas être d’accord. Globalement, un certain
nombre d’Etats n’ont pas admis que cette intervention était conforme à un
droit d’intervention militaire. D’ailleurs, au seing des Etats concernés, il
semblerait qu’il n’y ait pas un accord parfait non plus. En effet, comme on
l’a vu, les motivations des uns et des autres sont fort différentes. Et
admettons que la chose ait été acceptée par tout le monde, dans ce cas,
on aurait pu admettre une modification du droit international ; Se faisant,
une « opinio juris » qui, rappelons-le, constitue le second angle des
éléments constitutifs de la coutume.

Voici, ci-dessous, une capture d’écran du


paragraphe 207de l’arrêt « Nicaragua » concernant le droit coutumier :
80

Est-ce qu’il y a eu une coutume pour l’intervention militaire du 14 avril ?


Non, à priori il n’y a pas eu une pratique. D’ailleurs, le Royaume-Uni a
même opéré un renversement de pratique. Et il n’y a pas la conviction
d’agir conformément à une rège de droit. A cette fin, l’on constate qu’il
semble ne pas y avoir d’accord à cet égard s’agissant tant des Etats tiers
qui ne sont donc pas intervenus voir même au cœur des Etats
intervenants.

3. La coutume, un paradoxe ?

Dans ce cas, n’aurait-on pas quelque chose d’un peu paradoxal ? La


coutume est sensée stabiliser le droit, « dire » le droit. Dans ce as
hypothétique, on aurait eu une violation du droit. En effet, quand bien
même les Etats auraient acceptés l’intervention, ça n’aurait pas pu valoir
rétroactivement. Cela aurait signifié que la coutume aurait changé à partir
de la fin avril 2018. Cela aurait voulu dire que l’intervention était illégale
mais qu’à l’avenir, l’intervention ne serait plus illégale. Si on aurait eu un
tel avis, il n’y aurait à priori pas eu de suite et c’est, de fait, ce qu’il s’est
passé. Finalement, il y aurait-il un nouveau droit qui naitrait ? Ce principe
« ex in juria jus non oritur » (on ne peut pas récompenser la violation du
droit) trouverait à s’appliquer. En effet, on reconnaitrait le résultat de
« l’agression », de « l’action » sur le terrain d’une attaque contraire au
droit international mais en plus à l’avenir on pourrait le faire… Il y a donc
81
un paradoxe sur ce sujet. L’affaire « Nicaragua » nous intéressera une fois
de plus. Le paragraphe 186 nous intéressera très particulièrement. La
Cour dit que pour qu’il y ait une règle coutumière, il ne faut pas exiger
qu’il y ait toujours une pratique conforme à la règle. Cette pratique ne
pourra aboutir à un changement que si non seulement les Etats agissent
d’une certaine manière mais en plus qu’ils invoquent un nouveau droit.
Qu’il développent des actes, faits, discours… C’est à partir des discours
que l’on verra établir un nouveau droit coutumier. SI un Etat viole la règle
sans invoquer un nouveau droit, paradoxalement la règle n’est pas remise
en cause et elle est même confirmée. On pourrait s’attendre à ce qu’il
assume. Dans l’affaire « Nicaragua », les Etats-Unis auraient pu invoquer
le nouveau droit. Si l’on reprend la formule « ex in juria jus non-oritur »,
ce qui fait évoluer la règle ce n’est pas la violation elle-même de la règle.
Entre la violation et le changement, il y a quelque chose d’autre, c’est le
discours des Etats. La violation, c’est du fait. Si l’on viole en donnant un
discours qui dit qu’il y a une nouvelle règle et que les autres Etats
partagent ce discours alors la règle pourra changer. Ce sera un nouveau
consensus. Si l’on revient au droit d’intervention humanitaire, l’on peut
avoir deux illustrations. Si l’on prend d’abord le cas de l’intervention
militaire en Yougoslavie en 1999, les Etats de l’OTAN sont intervenus
comme nous le savons. Les Etats de l’OTAN ne se sont pas tous prévalus
d’un droit d’intervention militaire. Il y a eu un mécanisme assez proche
que ce que fait la Cour dans l’affaire « Nicaragua ». Les Etats de l’OTAN
renvoient explicitement à la responsabilité du Conseil de Sécurité.
Implicitement, ils reconnaissent que c’est le Conseil de Sécurité qui doit
autoriser une intervention militaire. Dés lors, ils n’invoquent pas une
nouvelle règle de droit. Il n’y aurait donc pas eu de droit d’agir sans le
Conseil de Sécurité. Les membres du « mouvement des non-alignés » et
le « mouvement des 77 » rejettent quant à eux de manière très explicite
le droit d’intervention militaire. La violation du droit n’a pas généré une
modification. Il n’y a pas eu d’accord. Ceux qui sont intervenus n’ont pas
invoqués ce droit d’intervention. Les autres Etats rejettent clairement la
chose… C’est à partir de ce moment que le débat sur le droit
d’intervention humanitaire a été relancé. Un dernier point est le fait qu’il
pourrait y avoir une évolution totalement déconnectée de toute violation…
Rien n’empêche les Etats de dire de manière générale que la règle a
changée. Il pourrait en effet y avoir des déclarations informelles. Par
exemple, des déclarations par l’intermédiaire de l’Assemblée Générale.
Elles peuvent être utilisées pour exprimer « l’opinio juris » des Etats ;
Pour exprimer un accord ultérieur des Etats sur l’interprétation des traités
qu’il convient de donner. (art. 31, paragraphe 3, point a) de la convention
de Vienne sur le droit des traités) Dans notre cas, on pourrait envisager la
« responsabilité de protéger » qui est souvent évoquée dans la presse.
L’on l’associe souvent au droit d’intervention humanitaire. C’est vrai que
82
les Etats en 2005, à l’occasion des 60 ans des Nations-Unies ont admis
qu’il y avait une responsabilité de protéger. Mais il y a-t-il un droit
d’intervention humanitaire ? Il faut lire les extraits des paragraphes 138
et139 de la Résolution 60/1 des Nations-Unies (2005) pour tenter de
répondre à cette question. Si l’on se penche sur ces paragraphes, l’on
peut lire que l’Assemblée dit que les Etats renvoient à une responsabilité
étatique. De poursuivre en disant que si les Etats ne le font pas, il y a
possibilité d’aller plus loin. Le paragraphe 139 appuie en indiquant que
cela (aller plus loin) se fera par l’entremise du Conseil de Sécurité et ce,
notamment conformément à la charte et son chapitre VII. Autrement dit,
la coutume qui s’est développée dans les années 1990 avec la Bosnie-
Herzégovine, le Rwanda, la Lybie… Cette pratique relève du droit
coutumier. C’est de la responsabilité de protéger. Car dans ces cas, il y a
eu une autorisation du Conseil de Sécurité. A l’origine, personne ne disait
que le Conseil de Sécurité pouvait autoriser des interventions
humanitaires mais la Charte, à travers la coutume précitée, a été
interprétée de manière large. Il s’agissait de faire respecter les droits
humains dans ce cas. A contrario, Ils ne disent pas que des actions
militaires en violation de la Charte, sans passer par le Conseil, sont
admises. L’on voit bien au travers de ces exemples comment l’on peut
évoluer à une évolution de la coutume. Il faut donc « l’opinio juris » ; Il
faut un accord. Si tel n’est pas le cas, on en reste aux textes. S’agissant
du droit d’intervention humanitaire, l’on peut donc penser que la coutume
n’a pas été réellement dans ce sens. Et vous, qu’en pensez-vous ?

Sur le site officiel du Gouvernement Français, il y a


une vidéo qui comprend la déclaration du Premier Ministre de l’époque
relative aux actions de frappes militaires menées en Syrie dans la nuit du
13 au 14 avril 2018, voir : https://www.gouvernement.fr/partage/10117-
declaration-du-premier-ministre-suite-a-l-intervention-des-armees-
francaises-contre-les-capacites
83

En fait, c’est quoi ex injuria jus non oritur ?


Un article intéressant à ce sujet est consultable dans la base de données
« STRADA LEX » avec la référence suivante :
LAGERWALL, A., « Chapitre 2 - L’existence du principe ex injuria jus non
oritur en droit international et ses présupposés » in Le principe ex injuria
jus non oritur en droit international, 1e édition, Bruxelles, Bruylant, 2016,
p. 165-185

La Résolution A/RES/60/1 de 2005 est


consultable en suivant le lien qui suit mais une capture d’écran des
paragraphes 138 et 138 est jointe ci-dessous également.
Le lien : https://undocs.org/fr/A/RES/60/1
La capture d’écran :
84

La vidéo YouTube de ce chapitre est


consultable ici : https://www.youtube.com/watch?v=t2CGZhqgxUU
85

Diverses chaines ont, au travers de diverses


émissions, discutées de ces bombardements en Syrie, voir notamment :
• C’est dans l’air : Syrie : Trump, Macron et May passent à l’attaque
#cdanslair 14.04.2018 - Bing video
• BBC – Latest News – « Syrian Air Strike », voir :
https://www.bing.com/videos/search?q=air+strike+syria+bbc&&vie
w=detail&mid=3ECB8F5139E0E75026653ECB8F5139E0E7502665&&
FORM=VRDGAR&ru=%2Fvideos%2Fsearch%3Fq%3Dair%2Bstrike%
2Bsyria%2Bbbc%26FORM%3DHDRSC3
• Sur la chaine « Algazeera », voir :
https://www.aljazeera.com/news/2018/4/14/us-and-allies-strike-
syria-the-full-story
86

X. Les traités

L’on commence, comme d’habitude, par une chanson à savoir « The


Pact » du groupe « The divine comedy », voir :
https://www.youtube.com/watch?v=NiD6_UNgSNM

Le cas illustré dans cette vidéo YouTube est celui du « G20 » en Arabie-
Saoudite, voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Sommet_du_G20_de_2020

Le cas du « jour », l’Arabie-Saoudite…

Cette séance sera donc relative aux traités comme sources du droit
international.

Dans la chanson que l’on a entendu au début, les auteurs font allusion à la
relation de couple. En effet, ils évoquent l’idée de l’entente dans un
couple, comme « pacte ». C’est une métaphore. L’idée est de se défendre
mutuellement dans le cadre de relations sociales. L’idée qui ressort de
cette chanson est le « pacte » entre la France et la Grande-Bretagne au
début du XXème. Il s’agissait d’une « paix commune ». La métaphore faite
par les auteurs fait un lien entre l’entente dans les couples et dans les
relations interétatiques.

L’on peut apprécier « l’entente », le « pacte » soit de manière


volontariste. C’est l’idée qu’ils ont décidés de se rencontrer, avoir des
accords informels ou formels entre eux à l’égard notamment des autres ;
87
Au travers de la sphère sociale. Pour les Etats, c’est un choix que de
s’allier à un moment donné en fonction de leurs intérêts pour avoir des
moyens de défenses contre les Etats tiers… On peut également
appréhender la chose de manière objectiviste. C’est l’idée que
naturellement, ils se sentiront « contraints » de se défendre mutuellement
pour garder une bonne entente dans le couple ; Maintenir la paix des
ménages. Pour les Etats, l’on pourrait envisager la chose aussi… Pour des
nécessités de paix, sociales, économiques, ils pourraient à un moment
donné « contraints » pour se faire de contracter des traités… C’est ce
genre de tensions que l’on va analyser. Il s’agira de se pencher sur la
question de l’application des traités. Il s’agira de se demander de manière
« dynamique » comment les traités s’appliquent. Pour se faire, on utilisera
un cas d’actualité à savoir le « G20 » en Arabie-Saoudite en novembre
2020. En Arabie-Saoudite, les droits humains ne sont pas toujours
respectés. Tel est par exemple le cas pour le droit des femmes. Dans le
cadre du « G20 », c’est à un tel point que des Parlementaires Européens
ont demandés à la Commission Européenne de « dégrader » sa
représentation, n’envoyer que des personnalités secondaires à ce sommet.
Il a même été question de boycotter le sommet… C’est le pas
qu’emprunteront un certain nombre d’ONG tel que Amnesty, HRW… en
dénonçant la tenue du sommet en Arabie-Saoudite. Quelques jours avant
la vidéo enregistrée (automne 2020), l’on apprenait que l’Arabie-Saoudite
n’était pas élue au Conseil des Droits de l’Homme. Elle avait pourtant posé
sa candidature et elle a pourtant été membre du Conseil. Pour la première
fois, elle a vu son élection recalée. Par ce vote, les Etats ont voulus
manifester les questionnements qu’ils ont concernant le respect des droits
humains et plus particulièrement la protection des « droits de la femme ».
Cette situation concrète en Arabie-Saoudite est très préoccupante,
problématique. Cela ressort de divers rapports notamment des Nations-
Unies, d’Human Rights Watch. Il y a toute une série de discriminations à
l’encontre des femmes, une restriction des droits d’expression,
d’association et de rassemblement, des violences sexuelles et/ou
domestiques faites aux femmes… Il n’existe pas de lute qui puisse être
possible. Des femmes qui tentent de luter pour leurs droits et ceux des
autres femmes sont enfermées. Tel est par exemple le cas de Loujain Al-
Hathloul. Il y a également des accusations de mauvais traitements en
détention, des viols, des tortures… Il y a également le système de la
« tutelle ». En effet, les femmes, dans ce « pays », doivent se soumettre
à obtenir l’accord ‘un homme pour poser toute une série d’actes. A cet
égard, l’Arabie-Saoudite a reçu toute une série de pressions. L’Arabie-
Saoudite a allégé toute une série de dispositions à la suite de ces
pressions… Mais tout un pan reste d’application tel que l’autorisation pour
avoir certains soins médicaux ou encore l’autorisation à se marier… Ces
actes demeurent soumis à une autorisation soit du mari soit du père.
88
D’autres problèmes sont maintenus. S’agissant de la levée de l’interdiction
pour les femmes de conduire ou certaines possibilités de droits de votes
mais ces avancées demeurent complexes à mettre en œuvre. Il y a des
obligations internationales. Ces obligations sont établies notamment par
les traités. Il faut vérifier concrètement si l’Arabie-Saoudite est partie aux
traités, ce qu’ils prévoient… Nous allons donc analyser de manière très
concrète la manière dont les traités sont respectés ou doivent l’être.
L’ordre du manuel ne sera pas exactement le même que ce qu’il y a dans
cette retranscription. Nous allons avoir au menu… D’abord, l’identification
des traités pertinents, voir si l’Arabie-Saoudite est partie aux traités,
quand ils sont applicables, s’ils sont valides… Il faudra également tenir
compte d’éventuelles réserves. Il y aura également la question du retrait.
Il faudra aussi se poser la question de l’interprétation, la preuve des
traités et du respect ou non-respect de ceux-ci… Enfin, on examinera la
question de mise-en-œuvre des traités…

S’agissant du refus essuyé par l’Arabie-


Saoudite pour le Conseil des Droits de l’Homme, voici quelques documents
qui pourraient être intéressants, voir :
➢ Un article de presse :
https://www.fr24news.com/fr/a/2020/10/larabie-saoudite-echoue-
dans-sa-candidature-au-conseil-des-droits-de-lhomme-de-lonu-
chine.html
➢ La candidature : https://undocs.org/fr/A/75/377
➢ La page sur le site des Nations-Unies relative à l’élection de la 75 ème
session, voir :
https://www.un.org/fr/ga/75/meetings/elections/hrc.shtml
➢ La Résolution 60/251 des Nations-Unies concernant la procédure
d’élection au Conseil des Droits de l’Homme, voir :
https://www.undocs.org/en/A/RES/60/251
➢ Enfin, la page relative à l’Arabie-Saoudite sur le site officiel du Haut
Commissariat des Droits de l’Homme, voir :
https://www.ohchr.org/FR/countries/MENARegion/Pages/SAIndex.as
89
px

Il y a du boulot, du… pain… sur la planche… On y va ?

Nous sommes dans un domaine très spécifique du droit international. Avec


une tendance de transmission de valeurs universelles, de droits
fondamentaux. La chose ne sera pas abordée de la même manière si l’on
se place dans une perspective idéaliste. C’est celle qui est appuyée par les
droits humains. Cette perspective peut se trouver en tension avec la
perspective de la souveraineté de l’Etat, perspective objectiviste. Nous
allons, à travers tout ce chapitre, osciller entre ces perspectives. D’un
côté, on voudra vouloir respecter les droits humains dans leur intégralité
car ils incarnent des droits fondamentaux. D’un autre côté, on aura le
souci de faire respecter la souveraineté de l’Etat. Il s’agira, dans ce
dernier cas, de s’assurer qu’il a bien consenti aux obligations auxquelles il
a souscrit et qu’il est possible de les moduler. On va tout d’abord aborder
la question de l’identification des traités pertinents. Dés lors que l’on se
trouve dans le domaine du respect des droits humains, on devra se
demander vers quels textes il faut se tourner.

L’un des textes les plus célèbres dans le domaine, c’est la déclaration
universelle des droits de l’homme adoptée en 1948.Il faut d’amblée
préciser qu’il ne s’agit pas d’un traité. Il s’agit d’une « simple » Résolution
de l’Assemblée Générale qui était alors composée de 58 Etats membres.
Cette déclaration énonce un idéal à atteindre. Le texte précise lui-même
qu’il n’y a pas d’obligations à l’égard des Etats. Il n’y a donc pas
d’obligations opposables aux Etats qui résulteraient de ce texte. Cela ne
veut pas dire que l’Arabie-Saoudite ne peut pas dire que le texte ne lui est
pas pleinement opposable mais cela veut simplement dire qu’il ne s’agit
pas d’une obligation conventionnelle, d’un traité. L’on peut dire la même
chose d’un autre texte. Il s’agit de la déclaration relative à l’élimination
des violences faites aux femmes de 1993.Cette dernière Résolution a été
90
adoptée en 1993.Il en s’agit pas d’une convention. La déclaration énonce
simplement qu’il s’agit de demander instamment aux Etats de faire
reconnaitre et respecter la déclaration. Le texte n’est d’ailleurs pas ouvert
à signature et ratification des Etats.

Ces textes étant écartés, l’on peut se tourner vers les textes
conventionnels. Il s’agira tout d’abord du pacte sur les droits civils et
politiques adoptés à New-York en 1966. Lorsque l’on regarde sur le site
des Nations-Unies, il y a 173 Etats parties ; C’est-à-dire qu’un grand
nombre d’Etat a ratifié ce traité. Toutefois, l’Arabie-Saoudite n’y est pas
partie. On ne peut donc pas opposer ce texte à l’Arabie-saoudite. Ce pays
n’est donc pas obligé de respecter les obligations qui résultent de ce texte.
Il en va de même pour un autre traité. Il s’agit du pacte international sur
les droits économiques, sociaux et culturels appelés par son petit « nom »
PIDESC adopté également en 1966. Cette fois, 171 Etats sont parties à ce
traité. Mais l’Arabie-Saoudite n’est toujours pas partie.

On va donc aller examiner des textes un peu plus spécifiques. Il s’agira, à


cet égard, de la convention sur l’élimination de toute forme de
discrimination à l’égard des femmes adoptée en 1979 à New-York, entrée
en vigueur en 1981 et ouverte à signature et ratification. C’est un texte
qui a été très largement ratifié. Là, 189 Etats sont parties… Pour le coup,
l’Arabie-Saoudite est égalent partie à cette convention. On constate que
certains Etats n’y sont pas partie. Tel est le cas des Etats-Unis. Même
dans des domaines fondamentaux comme le droit des femmes, certains
Etats n’adhèrent pas (ne ratifient pas). On a donc toujours un certain
relativisme des obligations. Pour entrer dans les détails, il faut d’abord
vérifier s’il est entré en vigueur, si oui quand, quand il est entré en
vigueur pour l’Etat partie. Si l’on se penche donc sur la convention sur
l’élimination de toute forme de discrimination à l’égard des femmes qui est
opposable à l’Arabie-Saoudite, on constate que c’est entré en vigueur en
1981 conformément à l’article 27 de la convention, que l’Arabie-Saoudite
est devenue partie en septembre 2000 et que dés lors la convention, en
vertu de l’article 27 précité, est entrée en vigueur à l’égard de l’Arabie-
Saoudite un mois après soit en octobre 2000. Seuls les faits intervenus à
partir de cette date pourront entrés dans la compétence matérielle de la
convention. On pourra également se pencher sur une autre convention
spécifique. Il s’agit de la convention contre les tortures, peines et autres
traitements inhumains ou dégradants de 1984. Là à nouveau, on constate
que 171 sont parties et que l’Arabie-Saoudite y est partie depuis 1997. Ce
sont des traités universels qui sont ouverts à signature, ratification et
adhésion par tous les Etats du Monde. Mais il y a également des textes
91
régionaux qui pourraient être applicables. L’on pensera, pour l’Arabie-
Saoudite, à la région « arabe » et plus particulièrement de l’organisation
de la « ligue Arabe » fondée en 1945 au Caire (Egypte). Il y aura plus
spécifiquement la charte Arabe sur les droits de l’homme (Arab charter on
human rights). Cette charte a été adoptée en 2005 et entrée en vigueur
en 2008. Le texte vise généralement les droits de l’homme mais pour la
région considérée. Il y a eu une juridiction qui a été établie mais le Statut
lui-même n’est pas encore entré en vigueur. L’Arabie-Saoudite est partie à
ce traité mais vu que celui-ci n’a pas encore été ratifié… Dans les traités, il
faut souvent qu’un certain nombre d’Etats aient ratifiés le traité pour qu’il
entre en vigueur. En l’occurrence, ce n’est pas encore atteint pour celui
qui fonde la Cour Arabe des droits de l’Homme établie à Manama.

L’on vient donc de dresser le portrait des traités applicables ou non à


l’Arabie-Saoudite. Si certains traités ne sont pas applicables, cela ne veut
pas dire que des obligations (certaines obligations) contenues dans le
pacte international sur les droits civils et politiques ne sont pas autrement
néanmoins applicables. En effet, il pourrait, au titre de la coutume, y avoir
des obligations applicables. Cependant, pour la suite de l’exposé, on ne se
penchera que sur les obligations conventionnelles.

Il faudra également se poser la question de la validité des traités


concernés. En l’espèce, il n’y a pas de problèmes particuliers pour la
convention dite « contre les discriminations à l’encontre des femmes »
(déjà citée plus haut) ou celle contre la torture en ce qui est de la validité.
L’Arabie-Saoudite « subit » certaines pressions politico-économiques pour
qu’elle adhère à certains traités en matière de droits humains mais ce ne
sera pas un motif d’annulation. Pour prendre un autre exemple, lorsque
l’on a fait des pressions extrêmement fortes sur la Syrie pour qu’elle
ratifie le traité relatif à l’utilisation des armes chimiques, elle a fini par le
ratifié mais on n’aurait pas pu tirer de ces pressions un motif d’annulation
92
puisqu’il en s’agissait pas de contraintes militaires. En d’autres termes, ce
n’est pas parce qu’un Etat subit des pressions politiques pour qu’il adhère
au traité que son adhésion qui aura été « politiquement forcée » sera
considérée comme nulle.

Ensuite, il y a la question de savoir dans quelle mesure les traités


s’appliquent. C’est donc la question des réserves. Il y a donc la
perspective idéaliste qui voudrait que l’on applique de manière intégrale
les traités. Il y a également la perspective qui consiste à renvoyer à la
souveraineté de l’Etat. Un des mécanismes qui existe en droit
international pour « soulager » ces tensions c’est celui des réserves. Le
régime des réserves est prévu par la Convention de Vienne sur le droit des
traités. L’Arabie-Saoudite est partie à ce dernier traité. Dés lors, l’on peut
lui opposer ce traité. Le régime des réserves est prévu par les articles 19
à 23 de la Convention de Vienne. Ces dispositions sont inspirées d’un avis
de la Cour Internationale de Justice qui portait sur les réserves concernant
la convention sur le génocide. De manière très substantielle, il ressort de
ce régime prévu notamment par l’article 19, précité, qu’il faut tout d’abord
s’interroger de savoir si le régime des réserves est prévu par la
convention (le traité). Les réserves sont-elles permises ? Interdites ? En
parties interdites ou permises ? Ce sont les questions qu’il faut se poser.
SI rien n’est prévu ou que rien n’est prévu pour certaines dispositions, il
faut se demander si la réserve est compatible avec l’objet et le but des
traités. Si elle est compatible, la réserve est admissible. Si, par contre,
elle n’est pas compatible, l’on doit considérer que la réserve n’existe tout
simplement pas. S’agissant des traités et du cas particulier de l’Arabie-
Saoudite, on va se pencher sur les traités pertinents. Prenons d’abord le
cas le plus simple à savoir celui de la convention sur la torture. Dans ce
cas, on constate que l’Arabie-Saoudite a fait une déclaration de réserve.
Tout d’abord, elle indique qu’elle ne reconnait pas les compétences du
comité contre la torture tel que c’est prévu par l’article 20 de la
convention sur la torture. Ensuite, elle dit qu’elle ne se considère pas liée
par l’article 30, paragraphe 1er de la convention. Pour ce qui est de la
première réserve, on est renvoyé au mécanisme de vérification qu’a le
comité sur la torture. Dans certains cas, le comité peut enquêter sur des
allégations de torture. L’Arabie-Saoudite a donc tout simplement écarté
cette compétence. La deuxième réserve renvoi au mécanisme général de
règlement à l’amiable des conflits interétatiques. En cas de différends sur
l’application de la convention, la Coure Internationale de Justice pourrait
être saisie dans une phase contentieuse ou par le biais d’un arbitrage.
Mais l’Arabie-Saoudite écarte cette possibilité aussi… Ce sont des réserves
qui sont souvent utilisées et ne posent souvent pas de souci de validité.
S’agissant de la convention sur la torture, les réserves sont possibles et
93
leurs régimes sont prévus aux articles 28 et 30 de la convention sur la
torture. Dans une affaire portant sur « des réserves » opposant la
République Démocratique du Congo et le Rwanda, la Cour Internationale
de Justice s’est dite incompétente. En effet, la question est de savoir si le
mécanisme de règlement des différends qui ne sont pas prévus par le
texte sont néanmoins admissibles au titre du droit international. La Cour a
tranché sur ce point. Le Congo prétendait que la réserve qui avait été faite
par le Rwanda sur la possibilité de règlements à l’amiable était nulle.
Selon le Congo, la répression du crime de génocide renvoi à une norme
impérative de droit international et dés lors, selon la R.D.C., écarte un
mécanisme de règlement des différends portant sur une norme impérative
devait être considéré comme nul. Dans ce cas, il serait contraire à l’objet
et au but du traité d’écarter, d’une part, le règlement à l’amiable prévu
par le traité et, d’autre part, le reste du traité. La Cour n’a pas du tout été
de cet avis. Selon la Cour, il faut faire la distinction entre la norme à
savoir la répression du génocide et la norme portant sur le règlement à
l’amiable. Selon la Cour, il faut donc distinguer la norme substantielle à
savoir le « crime de génocide » de la norme qui peut être « détachée » du
traité à savoir le « règlement amiable ». L’on peut ainsi imaginer le traité
indifféremment du règlement amiable. Si on examine désormais le cas de
la déclaration sur les discriminations à l’encontre des femmes (formule
abrégée, texte déjà cité plus haut), on voit que le traité (la convention)
prévoit explicitement le régime des réserves. La réserve que l’Arabie-
Saoudite a faite sur ce traité est beaucoup plus générale et porte sur la
substance du traité. Selon le texte, il y a un article spécifique relatif aux
réserves. En réalité, l’article 28 de la convention renvoi en fait à la
convention de Vienne. En effet, l’article 28, paragraphe 2 de la convention
énonce qu’aucune réserve incompatible avec l’objet et le but du traité ne
sera autorisé. A contrario, cela veut dire qu’une réserve compatible avec
la convention sera autorisée. C’est en fait ce qui est prévu par l’article 19
de la Convention de Vienne sur le droit des traités. La réserve émise par
l’Arabie-Saoudite dit d’abord qu’en cas de divergence entre les termes de
la convention et la loi Musulmane, le Royaume n’est pas tenu de respecter
les termes de la convention qui seraient divergents. Ensuite, le Royaume
ne se considère pas lié par l’article 9, paragraphe 2 de la convention ni
plus qu’il n’est lié par le paragraphe 1 de l’article 29 de la convention. Ces
articles disposent, pour l’article 9, que la Nationalité est transmise de la
mère à l’enfant indépendamment de la Nationalité du père et, pour
l’article 29, c’est la référence aux règlements à l’amiable des conflits
portant sur ce traité. Il faut constater pour ces réserves que l’Arabie-
Saoudite n’était pas le seul Etat Musulman à faire des réserves dans ce
sens. En effet, le Bahreïn, Oman, la Mauritanie,, le Brunei ont aussi fait
des renvois généraux en distant que la convention ne serait applicable que
si la convention est compatible avec la loi Musulmane. S’agissant du cas
94
spécifique de la réserve de l’Arabie-Saoudite portant sur cette convention,
il y a lieu de se pencher sur les deux volets de la réserve. Tout d’abord,
celle qui porte sur l’article 29, c’était permis par la Convention. La réserve
est donc valide sur ce point. Ensuite, sur les autres réserves, il y a des
soucis. La réserve de l’Arabie-Saoudite a fait l’objet de nombreuses
objections sur la validité elle-même. Ces objections ne portaient donc pas
sur le fait de savoir si la convention serait applicable entre les parties
malgré la réserve mais bien sur la validité elle-même. L’Allemagne a dit
que de l’avis de son Gouvernement, la réserve pouvait jeter le doute sur
la volonté du Royaume d’Arabie-Saoudite d’exécuter la convention et que
cette réserve serait donc incompatible avec l’objet et le but de la
convention. Sur la réserve portant sur l’article 9, paragraphe 2, cette
réserve, selon l’Allemagne, porte sur le fait d’éviter une discrimination et
partant, est contraire à l’objet et au but de la convention. On voit que
l’Allemagne considère que les deux réserves substantielles émises par
l’Arabie-Saoudite sont nulles car contraires à l’objet et au but de la
convention. D’autres Etats ont fait des déclarations qui vont dans le même
sens. L’on peut effectivement considérer dans cette perspective que ces
réserves sont nulles. D’abord, concernant la comparaison avec la loi
Islamique, c’est bien trop général. Il faudrait connaitre parfaitement la loi
Islamique que pour pouvoir en effet faire des comparaisons. Mais, de
toute façon, cette réserve rendrait sans effet la convention. Cette
convention ayant pour but que les Etats modifient leurs législations
lorsqu’il y a une discrimination. S’agissant de la transmission de la
Nationalité, la réserve est plus précise. L’Allemagne consdière néanmoins
que c’est contraire à la convention. Puisque c’est plus précis, il pourrait y
avoir un débat. Nous pourrions avoir le discours idéaliste qui dirait que
puisqu’il s’agit d’éliminer toute forme de discriminations, on ne peut pas
facilement imaginer des réserves surtout quand ça a un tel impact. Sinon,
nous aurions le point de vue volontariste. Celui-ci tendrait à la
souveraineté de l’Etat. Dans cette perspective, on concevrait que la portée
de la réserve est tellement limitée que la souveraineté de l’Etat pourrait
l’emporter. Au-delà de la réserve émise par l’Arabie-Saoudite, on peut
aller voir d’autres réserves d’autres Etats. Lesquelles sont plus
« limitées », « circonscrites ». Nous pourrions lire la réserve émise par
Monaco. Selon cette réserve, la convention n’aura pas d’impact sur la
transmission constitutionnelle du titre d’hériter au trône. C’est donc bien
plus limité. Il ne s’agit donc que de continuer la transmission mâle au
trône. La Belgique avait formulé la même réserve. Toutefois, depuis la
réforme constitutionnelle intervenue, les femmes peuvent accéder au
trône et tel sera le cas d’Elisabeth ce qui fait que la Belgique a retiré cette
réserve. S’agissant de toute cette question des réserves, de la validité, de
l’admissibilité… On doit naviguer entre la souveraineté de l’Etat et la
possibilité de modaliser les obligations et l’universalité de la convention
95
qui porte sur des droits humains ; La fameuse tension idéaliste et
volontariste. Le compromis entre les deux tensions se résoudra par
l’analyse de la validité. Si l’on prend les exemples ci-dessus, pour l’Arabie-
Saoudite ce serait beaucoup trop général tandis que pour Monaco se serait
suffisamment limité. Dans une affaire impliquant l’Etat Trinité-Tobago, le
Comité s’est penché sur la question de savoir si une réserve portant sur le
protocole facultatif au pacte international sur les droits civils et politiques.
Ce protocole permettait aux individus condamnés à mort de saisir le
comité. L’argument avancé par l’Etat de Trinité-Tobago était de dire que si
l’on permettait une telle procédure devant le Comité, on rallongeait la
détention avec la potentielle exécution et se faisant il y aurait un impacte
sur le traitement inhumain et dégradant. Selon le comité, la réserve est
discriminatoire. Lorsque l’on est face à un organe de contrôle, on a donc
l’impression qu’il souhaitera limiter au maximum les réserves. La
communication du comité est consultable ici et l’affaire est développée à
la page 378 du livre « une introduction critique au droit international ».
Dans la pratique des choses, cette attitude « maximaliste » peut
comporter un risque c’est-à-dire dissuader les Etats d’adhérer aux traités.
Mais il y a aussi le risque que l’Etat concerné se retire. C’était le cas avec
Trinité-Tobago puisqu’ils ont dénoncés le protocole. Se faisant, plus
personne ne peut faire de plainte individuelle en tout cas pour ce qui
concerne Trinité-Tobago.

Sur le site Internet du Haut Commissariat, il y


a la convention dont question dans les paragraphes ci-dessus. Il s’agit de
la convention sur l’élimination de toute forme de discrimination à l’égard
des femmes. En voici un lien et une capture d’écran concernant l’article 9.
Le lien :
https://www.ohchr.org/FR/ProfessionalInterest/Pages/CEDAW.aspx
96

S’agissant du retrait, on va appliquer la question à l’Arabie-Saoudite. Nous


allons nous demander si l’Arabie-Saoudite, pourrait, dans le cadre des deux
conventions spécifiques citées plus haut, se retirer et ce, en considérant par
exemple qu’elle reçoit trop de pressions. S’il y a trop de pressions pour
qu’elle respecte les traités, pourrait-elle se retirer ? Cela renvoi au régime
de dénonciation des traités. C’est prévu par la convention de Vienne sur le
droit des traités. Ce qui nous intéresse c’est l’article 56 de la convention de
Vienne. Soit, le retrait est prévu par le traité soit ce n’est pas le cas. Si c’est
prévu, c’est assez simple. Si, par contre, ce n’est pas prévu, la convention
de Vienne énonce que le retrait est possible dans un certain nombre de cas
particuliers. Deux options s’offrent à nous dans ce cas. L’on a une approche
subjective, volontariste. Dans ce cas, on doit admettre la possibilité du
retrait puisque l’Etat a librement adhéré, il doit pouvoir librement s’en
retirer. Dans une perspective plus idéaliste, on doit se dire qu’une fois qu’un
Etat ait adhéré à un traité et que si le retrait a des conséquences très
négatives, on aura difficile à admettre le retrait. Appliquons la chose à
l’Arabie-Saoudite… Pour la convention relative à la torture, l’article 31 de
ladite convention prévoit la faculté de retrait. Un Etat peut dénoncer la
convention. Il y a toutefois un certain délai entre la dénonciation et l’entrée
en vigueur du retrait à savoir 1 an. Dans l’intervalle, la convention reste
d’application. Tous les faits commis jusqu’au retrait obligeront encore l’Etat.
Pour la convention sur l’élimination des discriminations à l’égard des
femmes, c’est différent. Cette convention ne prévoit pas la faculté de retrait.
Dés lors, il faut appliquer le régime général prévu par la Convention de
Vienne. Cela découle-il de l’intention des parties ? Ou de la substance du
97
traité ? Ces questions posent des question s d’interprétations. Si l’on
examine l’ensemble de la convention, on va voir d’abord le préambule pour
interpréter. SI l’on est dans une perspective idéaliste, on aura égard à la
logique des droits fondamentaux et il s’agira dans ce cas de les garantir au
maximum. Le préambule énonce notamment qu’il s’agit de faire respecter
la dignité des femmes. L’on imagine donc mal dans une perspective idéaliste
que l’on dise que l’on va faire respecter la dignité des femmes puis tout à
coup se retirer… Il n’y a pas de clause de dénonciation et dans le domaine
des droits humains, en l’absence de clause, on doit considérer que le retrait
n’est pas possible. Autrement dit, dans ce domaine, on doit considérer que
le retrait doit être explicitement prévu. Ensuite, on peut se référer à certains
précédents. En effet, l’affaire Trinité-Tobago nous a montré que l’on peut
écarter, dans le domaine des droits humains, les réserves faites. Ici la non-
discrimination est au cœur du traité et l’on doit donc considérer qu’à défaut
de clause expresse, le retrait n’est pas possible. On peut également se
référer au précédent relatif au retrait par la Corée du Nord en 1997. La
Corée du Nord a fait une notification de retrait auprès du Secrétaire Général
des Nations-Unies. Lequel a pris position. Selon lui, c’est nul car ce n’est
pas conforme à l’intention des parties ou à la nature du traité. Cet avis a
ensuite été confirmé par le Comité des droits de l’homme dans son
observation générale n°26. Une fois que des droits individuels sont conférés
aux citoyens, on ne peut pas les retirer de manière unilatérale. Les droits
humains ne sont pas précaires, provisoires… Dans cette logique, il faudrait
considérer que le retrait ne serait pas admis au regard de cette logique
propre à la convention. SI l’on voudrait opter pour une perspective plus
volontariste, l’on aboutirait à autre chose. EN effet, dans ce cas, à défaut
d’exclusion explicite de la dénonciation, un Etat peut librement dénoncé ce
traité. Ce serait la perspective volontariste qui, rappelons-le, a pour idée la
souveraineté de l’Etat.

Voici une capture d’écran de l’article 56 de la


Convention de Vienne :
98

Si l’on fait le bilan à cet égard, pour l’Arabie-Saoudite, il y a eu un certain


nombre de réserves, celles concernant la convention sur l’élimination des
discriminations à l’égard des femmes devraient être considérées comme
nulles et il faut également constater que l’Arabie-Saoudite est partie à la
Charte Arabe. Si l’on passe à la question de l’application concrète des
dispositions de ces deux conventions et aux faits reprochés à l’Arabie-
Saoudite… Les faits reprochés sont notamment des discriminations à
l’égard des femmes ou encore des actes à l’encontre de personnes qui
militaient pour des droits engagés. Certaines femmes ont été
emprisonnées de manière arbitraire. Elles ont pu être torturées. Deux
problématiques arrivent… Il y a d’abord la question de la preuve et aussi
l’interprétation des dispositions concernées. SI l’on prend le cas des
traitements inhumains et dégradants allégués à l’encontre de l’Arabie-
Saoudite, il faudra rapporter des preuves irréfutables. En effet, il sera
compliqué d’accéder à des preuves de traitements inhumains et
dégradants commis sur des femmes. Il existe des présomptions, des
témoignages mais ce sera difficile d’avoir des preuves irréfutables. Dans
ce cas, il sera difficile donc d’avoir des preuves qui vont au-delà de tout
doute raisonnable ; Qui sont donc irréfutables. Il y aura également à
nouveau la difficulté de l’interprétation. Que recouvre le vocable
« traitement inhumain et dégradant » ? Quand a-t-on franchi la « ligne
rouge » ? ‘Quand les limites ont-elles été dépassées ? S’agissant de la
convention contre les discriminations µfaites aux femmes, il y a une série
de pratiques, d’usages qui sont mêmes reconnus par l’Arabie-Saoudite.
Dans son ordre juridique interne, un certain nombre de discriminations
99
sont inscrites dans la loi ou à tout le moins un certain nombre de
pratiques administratives généralisées. Elles sont constatées par toute une
série de rapports. Dans ce cas, sur le plan de la preuve, on n’aura pas
trop compliqué. En effet, c’est soit de notoriété publique soit noté dans la
loi. Là ou ce sera sans doute plus compliqué, ce sera sur des cas très
singuliers, personnels, individuels… S’agissant de cas de torture, il n’y a
pas de disposition explicite de la convention relative à l’élimination des
discriminions faites aux femmes. Tout au plus on pourra se référer à
l’article 7 de ladite convention. Celui-ci énonce les mesures que les Etats
parties doivent prendre pour éviter les discriminations faites aux femmes.
Nous pourrions considérer que d’enfermer des femmes pour leurs idées,
ce serait les empêcher de participer à la vie politique et publique. Dés lors,
nous pourrions faire entrer dans le champ de l’article 7 ces actes. A cet
égard, on peut s’aider sur un certain nombre de rapports. Si on s’interroge
sur les relations entre la convention précitée et al Charte Arabe, on aura
recours à différents mécanismes. D’abord, les traités ne sont opposables
qu’aux Etats parties à ces traités et ne sont donc pas opposables aux
tiers. Ensuite, il y a le cas de l’abrogation d’un traité antérieur par un
postérieur. L’abrogation peut être explicite ou « tacite ». C’est rare le cas
de l’abrogation implicite. Souvent, on aura plusieurs traités qui aborderont
la même matière. Dans ce cas, on utilisera le mécanisme de
l’interprétation. On aura d’abord le principe de la règle la plus spécifique
qui l’emporte sur la règle la plus générale. On a ensuite le principe de la
règle la plus récente qui l’emporte sur la plus ancienne. On a aussi
l’interprétation conciliante ; C’est-à-dire que l’on prend tous les traités
concernés et l’on regarde quelle interprétation pourrait le mieux se
concilier avec l’ensemble des traités. En l’occurrence, le problème posé
par la Charte Arabe est que l’on peut concevoir une approche beaucoup
plus flexible de la discrimination faite aux femmes que dans la convention
internationale déjà citée. L’article 3 de la Charte indique que les hommes
et femmes sont égaux dans le cadre de discriminations positives qui
seraient instituées soit conformément à la loi Islamique soit aux
instruments internationaux. Il y a donc cette référence à la loi Islamique
ce qui est assez général mais aussi à la discrimination positive et l’on ne
sait pas trop ce que recouvre exactement le terme « discrimination
positive ». On pourrait partir du principe que les femmes sont plus faibles
que les hommes et doivent être plus protégées… Mais elles auraient moins
de droits que les hommes… Elles seraient donc moins protégées que ceux-
ci. Dans quelle mesure l’Arabie-Saoudite pourrait tenter d’invoquer l’article
3 de la Charte pour tenter d’expliquer les discriminations faites aux
femmes ? Cette Charte ne sera applicable qu’entre Etats parties. En
l’occurrence, 22 Etats actuellement. C’est le principe de relativité des
traités. SI l’Allemagne demande des comptes, l’Arabie-Saoudite ne pourra
pas invoquer l’article 3 de la Charte. Nous pourrions également nous poser
100
la question de la validité de l’article 3 de la Charte. En effet, celui-ci serait
contraire à une norme de droit international de nature impérative. C’est
dans cette voie que s’est engagée Louise Arbor qui était alors Haute
Commissaire aux droits de l’homme au moment de l’adoption de la Charte
Arabe. Selon elle, l’article 3 de la Charte serait contraire à la convention
internationale. La non-discrimination étant souvent considérée comme une
norme impérative. Toutefois, on voit mal comment les Etats Arabes
pourraient invoquer entre eux la nullité en tout cas dans leurs relations...
Il faut également souligner que pour la règle applicable, il y aura lieu de
voir s’il y a un organe de protection de la norme. S’il existe, cet organe
aura tendance à faire prévaloir el traité dont il est gardien. SI l’on se
retrouve devant le Comité de la CEDAW (convention for elimination of
discrimination against woman). Par contre, si la Cour Arabe qui a été
instituée est effectivement crée alors cette institution serait également
tentée d’appliquer son traité et donc l’article 3. La Cour Arabe pourrait
interpréter la Charte en regardant la CEDAW pour autant que ce soit dans
la volonté et pour autant que la Cour existe un jour… Cela nous amène à
examiner un dernier point à savoir le contrôle du respect des traités
concernés…

Sur le plan du contrôle, on a de nouveau une tension idéalise et


volontariste. On constate dans le cadre de la convention contre la torture
et la CEDAW, c’est plutôt la perspective volontariste qui l’emporte. En
effet, les Etats peuvent faire des réserves par exemple aux mécanismes
de contrôles. L’Arabie-Saoudite a également fait le choix de ne pas ratifier
le protocoles relatifs aux plaintes individuelles. A ce jour, on n’a pas de
mécanisme un temps soi peu contraignant que les individus ne peuvent
pas mobiliser. Ces défenseurs des droits humains diront que l’Arabie-
Saoudite ne respecte pas tandis que l’Arabie-Saoudite pourra se réfugier
derrière ses réserves. Pour la CEDAW, il faut un rapport régulier. Le
comité de la CEDAW fera des recommandations incitatives. Nous sommes
donc plus sur des pratiques informelles. Tout ça est donc tributaire des
relations de force… L’Arabie-Saoudite est pour rappel économiquement
puissant. Dernièrement, une pression plus importante a été émise à la
suite de l’affaire Jamal Khashoggi. C’était un journaliste Saoudien qui a
été assassiné sur le territoire Turc. Les Etats ont à la suite de cette affaire
mis plus de pression…
101

Voici la vidéo YouTube de ce chapitre :


https://www.youtube.com/watch?v=w-Dcwguh3Pg
XI. Les autres sources du droit international 102

Comme d’habitude, nous écoutons d’abord une petite chanson. Il s’agit ici
de « My name is Liza Kalevage », voir :
https://www.bing.com/videos/search?q=my+name+is+liza+kalvelage&vi
ew=detail&mid=6911EAC2E459709367AF6911EAC2E459709367AF&FORM
=VIRE Cette chanson fait allusion à la jurisprudence du Tribunal de
Nuremberg. Ces Tribunaux ont donnés lieux à toute une série de principes
qui, pour l’époque, étaient tout à fait novateurs en droit pénal
international. A la suite de cela, la Commission du droit international a
codifié ces principes. De là, l’Assemblée Générale a mis « au propre » ces
principes. Sur la chanson, il est raconté que Liza Kalvelage serait
immigrante aux Etats-Unis et a été interrogée sur son histoire… Nous
allons donc examiner la migration au regard des autres sources de droit
international.

Nous allons d’abord rappeler un certain nombre d’éléments de contexte et


des faits d’actualité.

Tout d’abord, le 17 août 2020, nous avons eu une catastrophe avec le


naufrage d’un bateau qui transportait des migrants. 45 personnes ont
trouvées la mort dans ce naufrage. Voir notamment cet article :
https://www.la-croix.com/Monde/Migrants-mortelles-traversees-
Mediterranee-2020-08-20-1201109985

De manière plus générale, à la suite de cet évènement, le Haut


Commissariat pour les Réfugiés (HCR) a demandé aux Etats de modifier
leurs politiques migratoires pour éviter que ce genre de drame ne se
reproduise. En effet, les Etats Européens ont une politique migratoire
assez « dure ».

Des chiffres émis par le HRC ont établis que depuis 2013, il y a eu environ
70000 arrivées sur les côtes Européens. Mais environ 20000 personnes
ont trouvées la mort ou ont été déclarées disparues à l’occasion de
tentatives de traversées… Rien que pour 2020, on a compté 728 morts ou
disparus dans le cadre de ces traversées. Le HRC a constaté que la
Méditerranée est l’une des frontières des plus dangereuses au monde.
L’Union Européenne a mis en place toute une politique relative à
103
l’interception ou le sauvetage des migrants. Il s’agit notamment de
« frontex ». Soit les Etats soit l’UE naviguent en mer et font deux choses.
A savoir, d’une part, le sauvetage en mer et, d’autre part, le contrôle des
frontières… Deux choses fort différentes entre en confrontation. Lorsque
des migrants sont intercepts par des garde-côtes, ils sont généralement
placés dans des « hotspot ». Ce sont des camps généralement placés sur
des iles. Ils vivront dans des conditions très compliquées. L’on pourra,
avec une certaine aisance, parfois considérer qu’il s’agit de traitements
inhumains et dégradants. A Lesbos, en Grèce, un camp a flamé et selon
« MSF France », il s’agit du résultat d’années de traitements inhumains et
dégradants, voir : https://www.msf.fr/actualites/incendie-dans-le-camp-
de-moria-en-grece-le-resultat-de-cinq-ans-de-traitements-inhumains

Ces endroits dans lesquels sont « parqués « des gens ont été dénoncés
comme des endroits de traitements inhumains. Si l’on est renvoyé à
l’incendie de Moria (Lesbos), on constate que des milliers de personnes
ont été laissées sans-abris. Ce qui a très largement aggravé leurs
situations de précarité.

Par ailleurs, tous les migrants ne sont pas « sauvés ». D’autres font l’objet
d’autres traitements. Il y a des opérations de refoulement pur et simple.
Ce sera soit le garde-côte National ou de l’agence « frontex » qui
refoulera. Des ONG naviguent dans les eaux dites « dangereuses » dans
l’espoir de sauver des gens. Les Etats concernés ont une fâcheuse
tendance à se renvoyer la balle. Tel est le cas de la France, l’Italie,
l’Espagne… L’Italie a criminalisé ce type de sauvetage en disant qu’il
s’agirait d’aide au trafic d’humain. Sur ce point, un certain de questions se
posent aussi.

Enfin, s’agissant des traversées de méditerranée, il se peut qu’il y ait des


accords avec des Etats tiers. En effet, il y a des accords pour que d’autres
s’occupent des opérations de refoulement. C’est l’externalisation de ces
opérations. La Lybie, le Maroc, la Turquie pourraient être menés à faire de
telles opérations soit dans leurs eaux territoriales soit en haute-mer. Le
tout dans le but que les migrants n’atteignent pas les frontières
Européens.

Tout cela a amené une série d’ONG a publié des rapports concernant ces
pratiques mais également concernant des pratiques de surveillance par
des drones … Pour signaler des embarcations, des drones sont utilisés
104
pour être ensuite ramenés sur les côtes des « Etats partenaires ». Ces
politiques sont menées soit par les Etats Membres de l’Union Européenne
soit par l’Union elle-même.

Mais dans quelle mesure le droit international aide-il ces personnes qui
subissent ces « agissements » ?

Il y a toute une série d’obligations qui résultent notamment de


conventions internationales. Tout d’abord, la convention la plus spécifique
est la convention de Genève de 1951. Elle établit les conditions auxquelles
les Etats vont reconnaitre le statut de réfugié et le régime qui sera
appliqué à ces réfugiés. Dans cette convention, il y a un principe de
« non-refoulement »…

Sur le site du Haut Commissariat aux


Réfugiés des Nations-Unies, on peut retrouver le texte de la Convention
de Genève de 1951 mais aussi une foule d’autres infos, voir :
https://www.unhcr.org/fr/convention-1951-relative-statut-refugies.html

Nous avons également une convention très spécifique en droit de la mer.


Il s’agit de la convention internationale relative à la recherche et au
sauvetage en mer. Il en découle un certain nombre d’obligations pour
sauver des bateaux en détresse.

Nous avons également des obligations plus générales dont notamment le


pacte international sur les droits civils et politiques ou la Convention
Européenne de sauvegarde des Droits de l’Homme. Ces textes plus
généraux peuvent avoir des impactes tel que nous le verrons un peu plus
tard.
105
Il y a des droits coutumiers également. C’est notamment le principe de
« non-refoulement ». Il n’existe pas que dans la convention de Genève.
De manière plus générale, il s’agit de ne pas refouler quelqu’un vers un
territoire vers lequel il pourrait craindre pour sa vie ou craindre de subir
des traitements inhumains ou dégradants. Il y a là une obligation à charge
des Etats. Cela s’applique également pour les personnes qui cherchent à
trouver « refuge » sur le territoire Européen.

Au-delà de tout ce qui a déjà été énoncé des « normes habituelles » de


droit international, il pourrait y avoir, en l’espèce, d’autres sources qui
pourraient trouver à s’appliquer. Il pourrait soit en résulter des obligations
soit des possibilités d’interpréter de telles obligations. Il s’agirait de définir
les droits dont bénéficieraient les migrants. Nous pourrions mentionner la
déclaration de New-York adoptée en 2016. C’est la déclaration de New-
York pour les réfugiés et migrants. Plus tard, a été adopté le « célèbre »
pacte mondial sur la migration appelé par son petit nom « pacte de
Marrakech ». Après, il y a eu une approbation par l’Assemblée Générale
des Nations-Unies. D’autres textes encore plus spécifiques peuvent être
mentionnés. C’est le cas par exemple des directives du Haut Commissariat
aux Réfugiés. Ces directives données des lignes de conduites générales
aux Etats concernant l’accueil des réfugiés. On a également eu toute une
série de jurisprudences qui ont traitées de la migation.

Nous allons donc examiner la place de tous ces textes. Lesquels sont
moins formalisés que les traités et que la coutume. Mais nous nous
demanderons également quelle est la portée de ces textes…

D’abord, on se demandera dans quelle mesure des textes d’organisations


internationales peuvent avoir une portée contraignante. Ensuite, on se
demandera si l’on ne peut pas trouver un certain nombre d’engagements
unilatéraux qui engageraient donc l’Etat déclarant. Nous allons aussi nous
pencher sur la question de savoir s’il existe des principes généraux de
droit dans le domaine de la migration. Enfin, nous nous demanderons
quelle est la place de la doctrine et de la jurisprudence dans le thème de
la migration.
1. Textes adoptés par des Etats qui ne sont pas des 106
traités ou ne renvoient pas à de la coutume… La
portée ?

Pour établir un caractère potentiellement contraignant, on doit avoi égard


à deux choses. Tout d’abord, l’acte constitutif de l’organisation
internationale. Nous verrons quelle est la portée exacte des textes
concernés au regard de l’organisation. Ensuite, dans un second temps, on
se demandera quelle est la portée qui est conférée par le droit
international général ? Est-ce que ces textes ont une portée interprétative
ou reflètent-ils une coutume ?

D’abord, dans quelle mesure de tels textes peuvent-ils avoir un caractère


contraignant et être des textes de droit dérivé au regard du droit
« constitutionnel » de l’organisation ?

A ce point de vue-là, on se demandera si l’acte est d’une compétence de


l’organisation, l’organe qui la pris avait-il le pouvoir de le rendre
contraignant ? Est-ce que cet organe avait la volonté de produire des
effets juridiques ? Et enfin, qui sont les destinataires de ces actes ?

Si l’on examine le statut de l’acte au regard du droit international général,


on se demandera dans quelle mesure une Résolution peut être liée à un
traité ou que la Résolution viendrait établir une coutume, une « opinio
juris ».

Nous allons donc nous pencher sur deux Résolutions des Nations-Unies.
D’abord, la déclaration de New-York, précitée. Puis la Résolution qui
approuve le pacte de Marrakech. Il s’agit de deux Résolutions des Nations-
Unies. La déclaration de New-York fait l’objet de Résolutions adoptées par
l’Assemblée Générale. C’est également le cas pour la Résolution qui
approuve le pacte de Marrakech. Ces Résolutions ont été respectivement
adoptées en 2016 et 2018. ,Il faut se référer à la Charte des Nations-
Unies. Les articles 10, 11 et 13 de la Charte établissent que l’Assemblée
Générale émet des recommandations. Dés lors, à priori, ces textes n’ont
qu’une portée de recommandation. Dans certains domaines très
spécifiques, c’est plus qu’une recommandation comme le vote du budget
ou l’admission d’un nouvel Etat. Mais dans de telles hypothèses, ces actes
n’ont qu’une portée de recommandation. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a
aucune obligation juridique. Si l’on se tourne vers un autre organe des
107
Nations-Unies, ce sera différent. En effet, l’article 25 de la Charte prévoit
un caractère contraignant pour les actes du Conseil de Sécurité. Ces actes
sont susceptibles d’être des décisions contraignantes. Lorsqu’il s’agit d’une
décision, elle s’imposera à l’ensemble des Etats Membres. S’agissant du
domaine de la migration, certaines décisions du Conseil de Sécurité ont
été adoptées entre 2015 et 2020. La première décision est la Résolution
2240 du Conseil de Sécurité. Pour établir que la Résolution est
contraignante, il faut avoir égard au contenu, à la forme du texte pour
voir qu’il y avait la volonté d’établir une obligation. Dans le préambule, on
lit que le Conseil de Sécurité se place sous le chapitre VII de la Charte des
Nations-Unies à savoir le maintien de la paix. Cet élément n’est pas
décisif. Nous pourrions avoir des Résolutions du chapitre VI qui n’auraient
pas une portée contraignante ou à l’inverse du chapitre VII qui aurait une
portée contraignante. Si l’on va dans le corps du texte, on voit que le
paragraphe 4 dit que les Etats sont encouragés à faire preuve de
vigilance. Cela ressemble à des exhortations. Si on examine la Résolution
2240 plus en profondeur, l’on va jusqu’au paragraphe 8. Le Conseil décide
d’autoriser les Etats Membres à saisir des embarcations et les détruite.
Là, dans le paragraphe 8, on a des règles contraignantes. Le paragraphe
10 va encore plus loin. IL dit que les Etats ont tous les moyens
nécessaires que pour luter contre le trafic de migrants. Toutefois, cela doit
se faire dans le respect des droits humains. AU paragraphe 13, les Etats
sont à nouveau exhortés. Cette dernière exhortation est de respecter le
droit international. A travers la Résolution, il y a un rappel aux obligations
internationales. Cette Résolution semble donc bien contraignante. Au-delà
de la valeur de recommandation, il y a-t-il d’autres valeurs ? Peuvent-elles
venir compléter des obligations déjà existantes ? Si l’on se penche sur la
Résolution de 2016, on lit dans le préambule une volonté déclarative. La
volonté semble donc générale. Par rapport au pacte de Marrakech, au
paragraphe 7, on voit une autre recommandation. Il y a une précaution
générale de limiter à la recommandation. Nous allons néanmoins aller
creuser… D’abord, la déclaration de New-York de 2016. Il y a des
références faites au respect du droit international, droit international des
droits de l’homme, humanitaire… Si l’on se tourne vers la partie de la
déclaration qui reprend toute une série d’éléments considérés comme des
engagements, on voit qu’il faut aussi regarder de manière précise le
contenu. Au paragraphe 24, on voit que les Etats s’engagent à mettre en
place des procédures de contrôles aux frontières. Dans ce cas, on ne fait
qu’un rappel au droit international. Un peu plus loin dans le paragraphe
24, il y a un certain nombre de mesures que les Etats devraient prendre
pour que les agents qui travaillent dans les zones frontalières pour assurer
les droits fondamentaux. C’est déjà plus « spécifique ». On voit là que les
Etats doivent faire en sorte d’être capables de respecter les droits des
migrants. L’on peut se demander si l’on n’a pas une interprétation précise
108
en matière de contrôle des frontières. Pour éviter tout abus, il y aurait des
formations. Il s’agirait de standards de comportements des Etats.
Toujours dans le paragraphe 24, il y a une référence au principe de non-
refoulement. C’est un principe conventionnel basé sur la convention de
Genève de 1951 mais c’est également un principe coutumier qui va au-
delà du statut de réfugié. Les Etats ont le droit de prendre des mesures
pour empêcher des passages irréguliers. On voit mal comment les deux
pourraient se concilier à savoir ne pas refouler pour ne pas qu’ils risquent
mais en même temps établir des procédés pour empêcher les traversées
illicites des frontières… On voit à nouveau qu’il y a de manière générale le
principe de refoulement mais il n’y a pas de plus-value. Sur ce plan, on ne
sait pas comment la tension entre le respect des frontières et la
souveraineté des Etas et le non-refoulement. Si l’on analyse le pacte de
Marrakech, on voit également qu’il y aune volonté de s’’encrer dans une
série de textes conventionnels existants. Le pacte de Marrakech est sensé
s’inscrire dans le respect de ces textes. Il y a donc une volonté pour ce
pacte de venir traduire de manière concrète toute une série d’instruments
existants. A nouveau, il faut aller voir le contenu précis et les liens qui
peuvent être faits entre certaines parties de la déclaration et les traités
pertinents. Nous pouvons prendre un exemple à ce sujet. Il s’agit du pacte
de Marrakech qui contient toute une série d’objectifs fixés pour les Etats.
Il y a notamment l’objectif 21 qui a pour but de coopérer pour faciliter le
retour des migrants en toute sécurité et dignité et leur réintégrai durable.
Il s’agit ici non pas de coopérer pour faciliter l’intégration dans les Etas
mais plutôt de la question du retour. Si les migrants n’ont pas de motifs
légaux de rester sur le territoire, il faut que les Etats coopèrent pour que
les concernés retournent de manière à ce qu’ils soient en sécurité. On
indique également que l’on ne peut pas procéder à des expulsions
collectives lorsqu’il s’agit d’assurer la sécurité. Le langage est ici assez
flexible. Le traitement digne et d’autres font penser à des éléments
conventionnels déjà existants. Au-delà du texte général, il faut examiner
l’attitude de l’Etat lors des discussions qui tendaient à adopter cette
Résolution de l’Assemblée Générale. Il s’agira de voir l’attitude adoptée.
Nous avons deux exemples précis. C’est l’Autriche en premier. Elle a
indiqué qu’elle tenait à rappeler que le pacte est juridiquement non-
contraignant. Elle ajoute que, pour elle, il ne s’agit pas non plus d’une
« opinio juris ». De manière générale, l’Autriche récuse toute possibilité de
faire établir un droit coutumier. L’Autriche s’est d’ailleurs abstenue lors du
vote. L’Autruche a fait une déclaration relative à son abstention qui tend à
préciser qu’elle s’est abstenue pour s’assurer que le pacte ne soit en
aucun cas contraignant à son égard. Nous avons également l’exemple du
Danemark. Il a également pris position sur le pacte de Marrakech. Selon
le Danemark, il n’est juridiquement pas contraignant, ne peut pas être
interprété ou être utilisé pour réinterprété… On ne pourrait donc pas
109
utiliser le pacte comme preuve d’un droit coutumier. Le Danemark ajoute
que le pacte ne pourrait être interprété comme établissant un droit à la
migration. Si jamais il y avait des interprétations allant dans un sens d’un
droit à la migration, ce que le pacte ne fait pas… Mais admettons… SI tel
devait être le cas, le Danemark affirme que ça ne pourra pas être le cas
pour lui.

Voici une capture d’écran des articles 10 à 13 ainsi


que de l’article 25 de la Charte des Nations-Unies :
110

Oui mais c’est quoi ça ? Ce pacte de Marrakech…


Le pacte, voir : https://www.un.org/fr/conf/migration/global-compact-for-
safe-orderly-regular-migration.shtml
Il y a 23 objectifs à atteindre !

2. Les déclarations unilatérales

Existent-ils d’autres sources du droit international ? Il existe une autre


source qui n’est pas explicitement mentionnée à l’article 38 du Statut de
la Cour Internationale de Justice. Il s’agit des déclarations.
111

S’agissant du régime applicable, il était dans un premier temps énoncé


dans une série d’arrêts de la CIJ puis par la Cour permanente de justice
puis ils ont été codifiés par la commission du droit international dans une
série de « directives ». Les grands principes sont que pour qu’une
déclaration soit contraignante, il faut que la déclaration émane d’une
autorité qui a compétence pour gérer l’Etat ; Ca doit donc être une haute
autorité de l’Etat à savoir des Ministres, le chef de l’Etat… Il faudra
examiner que la déclaration soit faite à l’égard de certaines destinatoires.
Soit, envers certains destinataires précis ou un ensemble d’Etats. Ensuite,
il faut que, dans la déclaration, l’Etat ait l’intention de s’engager. Il faudra
vérifier à cet égard que la déclaration comprend des éléments clairs et
précis avec un contenu suffisamment décisif, normatif pour que l’on puisse
déceler la volonté de s’engager. L’on devra regarder ça au contexte dans
lequel la déclaration a été prise… Nous pouvons prendre pour exemple une
déclaration de l’Allemagne. C’était dans le contexte des incendies du camp
de Moria à Lesbos. Généralement, les personnes sont sauvées en mer puis
placées dans ce camp. A la suite des incendies, des milliers de gens se
sont retrouvés dans des situations encore plus précaires… A la suite de
cela, l’Allemagne par l’intermédiaire de son Vice-Chancelier Olaf Scholz a
déclarée qu’elle était prête à accueillir 1500 migrants qui se trouvaient à
Lesbos. Les termes de la déclaration étaient formulés ainsi : « Nous
garantissons que 1553 membres de famille qui sont déjà reconnus comme
réfugiés par les autorités Grecques vont quitter les Iles à destination de
l’Allemagne ». Si l’on applique les critères tels qu’ils ont été codifiés par la
commission du droit international, on pourra avoir à nouveau deux
112
perspectives à savoir volontariste ou objectiviste. Si l’on est volontariste,
on sera extrêmement stricte sur les critères à retenir pour établir une
obligation de l’Allemagne d’accueillir ces migrants. On va considérer qu’en
matière de migration, il y a une certaine sensibilité et qu’il y a une
compétence qui relève de la souveraineté des Etats. Dés lors, une
déclaration faite en des termes même relativement fermes pourrait ne pas
être contraignante. Si on est objectiviste, on considèrera que ça renvoi à
des principes fondamentaux en matière de droits humains. Dans ce cas,
l’Etat destinataire pourra se fier au texte pour adopter un certain
comportement qui sera fonction de ce qu’il a perçu comme étant un
engagement. Les terme utilisés sont assez forts. L’Allemagne dit qu’ils
garantissent. Il s’agirait donc d’un véritable engagement. La Cour
internationale de Justice dans l’affaire « Nicaragua » avait considéré que
le fait de s’engager à faire des élections rapidement n’était que purement
politique ; Perspective volontariste. Cela dépendra donc de l’optique.

Sur le site de la CIJ, il y a un petit bout


d’histoire de la CPIJ… Voir :
113

3. Les principes généraux du droit

Dans le domaine de la migration, il n’y a pas vraiment de principes


généraux. On ne peut pas facilement envisager facilement que ça puisse
se déployer. Il y aurait des pratiques nationales uniformes qui pourraient
être transposées dans l’ordre juridique international. C’est donc un
domaine plus du ressort de la souveraineté des Etats. Ce serait
probablement difficile de transposer les pratiques législatives nationales
au niveau international et en dégager des principes juridiques
contraignants. Le domaine privilégié des principes généraux c’est la
procédure judiciaire car il est plus facile de dégager des principes
généralement admis dans la procédure judiciaire pour les transposer
ensuite aux procédures devant les juridictions internationales. En matière
de droit pénal, on pourrait aussi facilement transposer des principes
généraux.

4. La doctrine et la jurisprudence

Si l’on se tourne vers l’article 38 du Statut (voir plus haut), ce sont des
sources auxiliaires du droit international. En effet, la jurisprudence va
toujours appliquer la coutume ou la doctrine commentera les autres
sources de droit international pour en tirer des conclusions. Ce sera donc
plutôt les enseignements que l’on pourra tirer de la doctrine ou de la
114
jurisprudence qui importeront. Ils seront utilisés comme source en lien
avec l’application des traités ou de la coutume. De prime abord, on
pourrait penser qu’il s’agit de sources subsidiaires. En réalité, il n’en est
rien… Si on est sur une approche assez formaliste, la jurisprudence a
souvent une marge d’interprétation assez large. Elle peut donc faire de
nombreuses déductions et extrapolations que ce qui était prévu au départ.
Tel est par exemple le cas pour le principe de non-refoulement. La place
sera plus ou moins grande selon que l’on est objectiviste ou volontariste.
Dans ce dernier cas, les juges doivent se limiter à interpréter le droit selon
la volonté des Etats, pas d’interprétation trop évolutive, trop
téléologique… On aura tendance à considérer que le rôle du juge est fort
limité. A fortiori, cela s’applique tout autant pour la doctrine. Si l’on se
place dans une perspective objectiviste, le juge a toute sa place pour faire
évoluer le droit international au regard des nécessités de la société. Dés
lors, il peut avoir un rôle important dan l’interprétation du droit. Dans
certaines extrapolations du droit existent, il pourra aller vers un progrès
plus spécialement dans le domaine des droits humains. Nous allons nous
intéresser au domaine de la migration et aux obligations des Etats dans le
domaine de la migration. On constate alors qu’il existe toute une série de
jurisprudence. Plus particulièrement de la Cour Européenne des Droits de
l’Homme (par son petit nom Cour EDH). A cet égard, on peut mentionner
deux grandes décisions qui ont un apport de ce point de vue. Nous allons
d’abord parler de l’affaire « HIRSSI JAMAA et autres c. Italie » du 23
février 2012. Il s’agissait de personnes migrantes qui se trouvaient sur un
bateau en haute mer. Ils ont été interceptés par des garde-côtes Italiens.
Ils ont ensuite été refoulés vers la Lybie. Ils ont donc dû accoster en Lybie
et finir dans des centres sur le territoire de la Lybie. La Cour a abordé le
principe de non-refoulement. D’une part, selon la Cour, le principe
s’applique même en Haute-Mer et du coup ils sont sous la juridiction de
l’Italie et, d’autre part, ils ne pouvaient pas infliger des traitements
inhumains et dégradants. En effet, en refoulant, ils renvoient vers un pays
ou la situation en la matière est très risquée. Dés lors, selon la Cour,
l’Italie a violé ce principe de refoulement. Il y avait également la violation
de l’interdiction de l’expulsion collective. On voit que le juge européen a
un rôle assez prépondérant. Il n’y a nulle part un principe de non-
refoulement. C’est la combinaison de l’article 2 (droit à la vie) et de
l’article 3 (interdiction de la torture) qui a permis l’extension vers la
violation du principe de non-refoulement. Il y a donc dans le chef de l’Etat
intéressé à savoir l’Italie de ne pas refouler vers un Etat ou la situation
n’est pas certaine, garantie. Il y a une interprétation audacieuse du juge
Européen. Un second arrêt est dans l’affaire « M.K. et autres c. Pologne »
du 23 juillet 2020. Là, on avait un problème de politique de la Pologne qui
empêchait les migrants d’entrer sur son territoire. Les migrants étaient
automatiquement refoulés dés qu’ils arrivaient à la frontière vers d’autres
115
territoires / Etats. Le tout sans même examiner la situation personnelle ou
s’assure qu’il n’y avait pas de risque au refoulement. La Cour a condamné
la Pologne pour sa politique sur pied de l’article 3. Elle a considéré qu’en
les empêchant d’accéder au territoire, il y avait bien application du
principe de non-refoulement. Quand bien même on est juste à la frontière,
il y a le refoulement vers un territoire tiers. Mais il y avait également
violation du protocole n°4 qui interdit les expulsions collectives. Là
également le fait d’avoir une politique générale appliquée à tous les
migrants était considérée comme une expulsion collective. A nouveau, il y
a un rôle important du Juge Européen. La jurisprudence est donc à lier
avec le texte conventionnel. C’est donc désormais bien établit, au sein du
Conseil de l’Europe (47 Etats), que le principe de non-refoulement existe.

Mais quelle est l’interaction entre la doctrine et la jurisprudence ? Quand


on parle de doctrine, on pense au premier chef aux articles, livres rédigés
par les spécialistes du droit international. Ces articles auront un rôle
secondaire. Ils dégageront des principes. Ca aidera les juges. Mais il y a
également un autre type de doctrine plus institutionnalisée. Il s’agit des
commentaires et travaux réalisés par les institutions et organisations
internationales. On peut penser à la commission du droit international.
C’est un organe subsidiaire des Nations-Unies. Il a pour objectif de codifier
le droit international. Il procèdera à son développement progressif. Il est
composé de spécialistes nommés par l’Assemblée Générale. Ces travaux
seront utilisés pour établir la preuve de la coutume, par exemple. De la
même manière, d’autres organismes comme le comité des droits de
l’homme ou le HCR fera des commentaires, rédigera des articles,
observations… Pour prendre un exemple concret, on peut prendre le cas
du comité des droits de l’homme. En 2018, il a rédigé une observation qui
portait sur le droit à la vie en lien avec les problématiques de
l’environnement, changement climatique et développement non-durable.
Tous ces éléments pouvaient constituer une atteinte au droit à la vie. Un
an plus tard dans un cas dont était saisi le comité, dans l’affaire
« TEITIOTA », le comité a décidé de considérer qu’en droit international,
on pouvait admettre le statut de réfugié climatique s’il y a un lien entre la
dégradation de l’environnement et les risques pour les personnes. Les
personnes doivent dans ce cas pouvoir trouver asile sur le territoire. La
plainte de Teitiota a été rejetée car il n’y avait pas d’éléments suffisants
mais sur le principe, il était possible d’admettre le principe de « réfugié
climatique » et le comité s’est basé sur ses propres écrits pour l’établir.
On voit qu’à travers un commentaire, il pourrait y avoir un développement
du droit international.
116

La vidéo YouTube de ce chapitre est disponible


en suivant ce lien, voir :
https://www.youtube.com/watch?v=mlFgW3uP2RY
XII.La Guerre 117

Comme d’habitude, nous commençons en chanson avec un morceau


intitulé « illegal attacks », voir :
https://www.youtube.com/watch?v=TywudAMw_7A

Cet auteur fait référence à des interventions militaires de Royaume-Uni,


des Etats-Unis, d’Israël qui ont menées des attaques militaires armées
aériennes en Palestine, Iraq, Pakistan… L’auteur qualifie ces attaques
d’illégales. Ceci pourrait renvoyer au « ius contra bellum » qui avait déjà
été évoqué plus haut ; Pour rappel, c’est l’interdiction de faire la guerre.
Mais ça peut également renvoyer aux modalités de l’intervention. Par
exemple, le fait de bombarder des zones civiles. L’auteur de la chanson
écoutée fait référence notamment à des mères ou des fils qui auraient pu
être tués dans les opérations. Ces deux éléments se retrouvent dans le
chapitre qui suit. Il y a donc tout d’abord le « ius contra bellum » c’st—à-
dire l’interdiction de faire la guerre ; Il s’agira donc de se poser la question
de la légalité des actions. Et cela renvoi également au droit des conflits
armés.

Nous prendrons comme « cas d’actualité » le Haut-Karabakh. Il s’agit du


« Haut-Karabakh », territoire qui tente de faire sécession. Ce conflit
oppose l’Azerbaïdjan, l’Arménie et les forces du Haut-Karabakh. Les
combats ont repris en septembre 2020 de manière assez violente. Ca fait
suite à des violences qui avaient reprises en 2016. Le tout remonte à un
conflit plus ancien. En effet, ça remonte aux années 1980 c’est-à-dire à la
fin de l’Empire Soviétique. Rappelons que l’U.R.S.S. a « chuté » le 25
décembre 1991 à la suite de la reconnaissance officielle des Etats qui
faisaient sécession… Il

Voici, ci-dessous, une vidée faite par le centre


de droit international qui répond à 12 questions au sujet de ce conflit : Le
conflit au Haut-Karabakh et le droit international en douze questions -
118
Centre de droit international (ulb.ac.be) Mais vous trouverez également
ci-dessous le lien d’un article rédigé par le Professeur Corten au sujet des
liens entre le Nicaragua et l’U.R.S.S., voir :
https://dipot.ulb.ac.be/dspace/bitstream/2013/36297/1/OC.URSS.NICARA
GUA.pdf De même, vous trouverez ci-dessous le lien vers un article
rédigé par M. Philippe Descamps fin des années 1990 qui évoque de
manière claire un état de guerre permanant dans ce territoire, voir :
https://cibleplus.ulb.ac.be/discovery/fulldisplay?docid=cdi_cairn_journals_
news_20121201_MD_48479&context=PC&vid=32ULDB_U_INST:32ULB_V
U1&lang=fr&search_scope=MyInst_and_CI&adaptor=Primo%20Central&t
ab=Everything&query=any,contains,haut-karabakh

Il faut rappeler qu’il s’agissait, à l’époque, d’une province de l’Union


Soviétique. C’était donc une province autonome située dans la République
d’Azerbaïdjan au sein de l’Union Soviétique. Elle a été intégrée au début
des années 20. A la fin des années 1980, il y avait environ ¾ d’Arméniens
et environ ¼ d’Azéris. Dans ce contexte de l’Union Soviétique
« finissante », il y a eu une demande des citoyens du Haut-Karabakh pour
l’obtention de l’indépendance voir le rattachement à l’Arménie. Ces
demandes indépendantistes se sont confrontées aux autorités
d’Azerbaïdjan et aux autorités Soviétiques. Cela a vite dégénéré. Il y a eu
des persécutions qui visaient la population Arménienne en Azerbaïdjan.
C’est ensuite devenu un conflit armé ouvert avec des forces sécessionistes
du Haut-Karabakh aidées par l’Etat Arménien qui se sont opposées aux
forces d’Azerbaïdjan. Au début des années 1990, on a eu un conflit armé
extrêmement violent qui a abouti à la mort d’environ 30000 personnes
dont un grand nombre de civils. A la fin des combats, on a obtenu un
accord de cessé le feu. Il a débouché à une occupation par l’Arménie du
Haut-Karabakh mais également de 7 districts qui jouxtaient le Haut-
Karabakh et qui avaient été occupés durant la guerre notamment par
l’Arménie. Ces 7 districts font une sorte de jonction entre l’Arménie et
l’Azerbaïdjan. On a eu environ 350000 Arméniens qui ont été déplacés
119
notamment de l’Azerbaïdjan vers le Haut-Karabakh… Nous avons
également à la suite de la sécession du Haut-Karabakh environ 800000
Azerbaidjanais qui ont été déplacés du Haut-Karabakh ou des districts
précités. Il y a eu un accord de cessé le feu, un « long processus » de paix
sous l’égide de l’OSCE. Il y a eu la formation du « groupe de Minsk » sous
l’impulsion de l’OSCE. Ces négociations n’ont pas abouties à un accord de
paix. Il y a donc eu une stagnation du conflit avec une zone de conflit qui
n’a pas bougée pendant tout un temps. Elle n’a pas bougée pendant
environ 25 ans. C’était au Haut-Karabakh mais aussi dans les districts
adjacents précités. Il y avait aussi une zone de conflit « gelée » avec les
frontières de l’Azerbaïdjan. C’est dans ce contexte, qu’en septembre 2020,
les conflits ont repris. Il y a eu des questions qui portaient de savoir qui a
commencé mais aussi de savoir qui a attaqué des civils et les méthodes
d’attaques de ceux-ci tel que des attaques portées sur des lieux
symboliques pour la population civile. C’est donc ce conflit que l’on va
examiner à l’alune des principes et règles énoncées par le droit
international. Nous allons aborder trois grands points. Tout d’abord, quelle
est exactement la portée de l’interdiction du recours à la force ? Telle que
cette interdiction est notamment énoncée à l’article 2, paragraphe 4 de la
Charte des Nations-Unies. Dans quelle mesure le « ius contra bellum »
s’applique. Quelle sont les parties qui ont violées l’interdictoin du recours
à la force ? Ensuite, on examinera la question de la « légitime défense ».
On se demandera qui peut se prévaloir de la légitime défense. En
troisième lieu, on se demandera ce qu’il en est par rapport au droit des
conflits armés. Comment appliquer ce droit au conflit au Haut-Karabakh ?
Quelles sont les règles précises applicables et envers qui ? Mais aussi de
quelles manière les hostilités ont-elles été menées ? On verra à chaque
fois apparaitre une tension entre la conception idéaliste. Il y aura dans ce
cas une interprétation stricte des exceptions qui existent. Que ce soit sur
la légitime défense ou d’autres exceptions qui ont parfois été avancées.
S’agissant du droit des conflits armés, sur le plan idéaliste, on aura un
point de vue « maximaliste » ce qui impliquera une restriction maximale
et ce, dans le but de protéger les populations civiles. Cette vision idéaliste
se heurtera à une perception plus réaliste du conflit. Ceci soit dans une
perspective plus « libéral », pour ménager davantage des exceptions qui
devraient s’adapter aux nouvelles réalités. Tel serait le cas par exemple
dans le cadre du terrorisme, nouvelle réalité. Certains avanceront des
considérations plus en phase avec la réalité militaire du terrain. On ne
pourrait pas de manière intégrale respecter toutes les règles du droit des
conflits armés. Dans quelle mesure ces tensions se retrouvent ?
120

Sur le site des Nations-Unies, on peut lire la


Charte soit de manière complète soit par chapitre. En l’occurrence, voici
une capture d’écran de l’article 2 de la Charte. Lequel mentionne en son
paragraphe 4 l’interdictoin du recours à la force.

1. La portée de l’interdiction du recours à la force

L’on peut voir en réalité non pas un « ius ad bellum » c’est-à-dire un droit
à faire la guerre et il faudrait respecter un certain nombre de conditions
pour pouvoir « faire la guerre ». Au contraire, c’est le principe
d’interdiction qui prévaut et à titre exceptionnel il y aurait un « droit ». Ce
principe est énoncé à l’article 2, ¶4 de la Chartes des N.U. (reproduit ci-
dessus) Pour examiner la manière dont ce principe cardinal en droit
international s’applique au conflit au Haut-Karabakh, il faudra distinguer
entre les relations entre l’Azerbaïdjan et « l’entité » sécessionniste du
121
Haut-Karabakh et les relations entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie qui, dans
une certaine mesure, est intervenue dans ce conflit. Tout d’abord, il faut
relever que le recours à la force est interdit dans son emploi effectif mais
également à la simple menace. Le titulaire pour la « simple menace »
renvoi au manuel. L’article 2, ¶4 énonce qu’il s’agit du recours à la force
dans les relations internationales. Mais de quoi s’agit-il lorsque l’on parle
de l’interdiction du recours à la force dans les relations internationales ? Il
s’agit de dire que ce qui est visé ce sont les relations interétatiques. Dans
toute une série de jurisprudence, il a été confirmé qu’il s’agit bien des
relations interétatiques. Le titulaire renvoi, à cet égard, à l’avis consultatif
de la Cour Internationale de Justice relatif à la déclaration d’indépendance
du Kossovo. Lorsque l’on prend de ce point de vue les relations spécifiques
entre l’Azerbaïdjan et l’entité sécessionniste du Haut-Karabakh, il faut
constater qu’il s’agit d’une situation qui sort du cadre de l’article 2, ¶4.
C’est-à-dire qu’en réalité, l’Azerbaïdjan intervient contre une entité qui
prétend faire sécession mais il intervient sur son propre territoire. De telle
sorte qu’en réalité, on n’entre pas dans le champ de l’interdiction du
recours à la force qui ne s’applique qu’aux relations internationales. On est
plutôt dans le cadre d’un principe de neutralité. Le droit international
l’interdit pas le recours à la force soit de l’Azerbaïdjan à l’encontre de
l’entité sécessionniste soit à l’inverse donc de cette dernière à l’encontre
de l’Azerbaïdjan. Le droit international n’encourage toutefois pas le
recours à la force, il ne l’autorise pas non plus. La situation est réglée par
d’autres règles plus générales du droit international. L’on serait par
exemple sur le champ des droits humains. Il s’agirait notamment du droit
à la vie. Ne pas priver, arbitrairement, quelqu’un de ce droit.
L’intervention de l’Azerbaïdjan et de l’entité sécessionniste n’entrent donc
pas dans le champ d’application de l’article 2, ¶4. De ce point de vue-là, il
faut préciser le statut du Haut-Karabakh. Dans un processus qui s’est
étalé entre 1991 et 1992, cette entité a déclaré son indépendance. Mais
celle-ci n’a été reconnue par aucun Etat. La communauté internationale ne
considère donc pas cette entité comme un Etat. Ce qui a pour effet que
cela ne change rien quant à l’application de l’article 2, ¶4. Il s’agit donc
bien d’un conflit interne. Il faut également préciser que l’Azerbaïdjan a été
reconnu, dans l’intégralité de ses frontières, en ce compris le Haut-
Karabakh, par la déclaration d’Alma-Ata du 21 décembre 1991. Cette
déclaration a été adoptée par toute une série d’Etats de l’ancienne
U.R.S.S. Lorsqu’ils ont déclarés leurs indépendances, ils ont adoptés cette
déclaration. Ils reconnaissaient mutuellement leurs frontières respectives.
L’on retrouve dans cette déclaration, d’une part, l’Azerbaïdjan et, d’autre
part, l’Arménie ce qui voudrait dire que ce dernier Etat a reconnu, en
décembre 1991, les frontières de l’Azerbaïdjan dont la province du Haut-
Karabakh. Ceci permet aussi de conclure qu’il s’agit bien d’une situation,
d’un conflit interne et qu’il ne peut donc être fait référence à l’article 2, ¶4
122
de la Charte des Nations-Unies. Si l’on se tourne vers les relations entre
l’Azerbaïdjan et l’Arménie, il y a bien deux Etats et l’on est donc dans le
cadre des relations interétatiques et partant, l’article 2, ¶4 s’applique
bien… Il y a donc, dans ce cas, une interdiction a recours à la force. Pour
bien comprendre la situation, il ne suffit pas de se borner au
déclenchement des hostilités qui a eu lieu en septembre 2020… Il faut
remonter à l’origine du conflit c’est-à-dire au début des années 1990. Il
faut constater que l’Arménie est intervenue dans un confit interne à
l’Azerbaïdjan. L’Arménie s’est donc immiscée dans un conflit interne et a
eu recours à la force dans ce cadre. Mais l’Arménie peut-elle se prévaloir
d’un certain nombre d’exceptions ? Des interprétations de l’article 2, ¶4
renvoie soit à ne conception réaliste ou idéaliste. Par rapport à ces motifs
qui justifieraient le recours à la force, que l’on se place en 2020 ou en
±1990, on doit savoir si l’Arménie n’a pas été invitée à intervenir.
L’Azerbaïdjan n’a jamais invité l’Arménie à intervenir militairement sur son
territoire. L’on peut donc d’amblée exclure cette possibilité. Mais il y
aurait-il eu une invitation du Haut-Karabakh ? Il voudrait faire sécession
et nonobstant sa déclaration d’indépendance, il n’est pas un Etat donc on
ne peut pas considérer qu’une potentielle « invitation » puisse être
constitutive d’une invitation régulière à intervenir puisqu’il ne s’agit pas
d’un Etat. On peut renvoyer en terme de principes à un attendu qui se
trouve dans l’arrêt « Nicaragua c. USA » de 1986 dans le cadre des
interventions militaires. La Cour rejette l’hypothèse par laquelle les USA
auraient été invités soit par le gouvernement en place soit par l’opposition
à intervenir. La Cour indique que « l’on voit mal ce qu’il resterait du
principe de non-intervention en droit international si l’intervention pouvait
être justifiée par un gouvernement et demandée par l’opposition de celui-
ci »… Rappelons, pour tout que de besoin, que le Nicaragua refusait
précisément cette intervention malgré que les Etats-Unis soutenaient des
« rebelles ». Si l’on transpose ceci au Haut-Karabakh, les forces
sécessionistes ne sont pas habilitées à faire une demande d’intervention
de la part de l’Arménie et de surcroit de manière militaire. Il faut donc
exclure cette possibilité de demander à l’Arménie d’intervenir. On a une
seconde possibilité qui est admise en matière de non-intervention et de
recours à la force. Elle fait référence au pouvoir du Conseil de Sécurité
d’autoriser le recours à la force. Ce pouvoir peut se déduire d’un certain
nombre de dispositions de la Charte et plus particulièrement du chapitre
VII de ladite Charte. Mais cette possibilité a surtout été consacrée par la
pratique. C’est surtout au début des années 1990 que ça a commencé
avec des autorisations dans le cadre de l’Iraq, de la Bosnie-Herzégovine,
Haïti, au Rwanda, en Somalie, ou encore en Côté d’Ivoire. Dans toute une
série de situations à savoir celles précitées, certains Etats ont, par le biais
d’un Résolution du Conseil de Sécurité, été autorisées à intervenir dans les
Etats précités. Il s’agissait bien souvent de regroupements d’Etats tel que
123
l’OTAN, par exemple. Là on sait que par rapport à cette possibilité
d’intervention, il y a toute une série de controverses. Même si les
Résolutions ne sont pas claires, certaines personnes disent qu’il faudrait
les interpréter dans le sens où il y aurait une autorisation, ne fusse
qu’implicite, que pour intervenir. Ce qu’i faut constater à cet égard c’est
qu’aucune Résolution n’a été formulée dans ce sens d’une quelconque
manière qu’il soit. Par contre, on trouve, au début des années 1990, une
série de Résolutions qui vont dans le sens de la condamnation de
l’intervention Arménienne. Si l’on prend par exemple la Résolution n°853,
on constate que le Conseil rappelle le principe d’intégralité territoriale et la
Souveraineté de l’Azerbaïdjan. Elle a également rappelé le principe
d’inviolabilité des frontières internationales ainsi que l’interdiction de
recourir à la force que pour acquérir des territoires. Cela vise
principalement l’intervention Arménienne. Il y a également une référence
aux forces d’occupations et à ce sujet une demande de retrait notamment
des forces rebelles mais aussi des forces Arméniennes. En aucune
manière, on ne peut interpréter cette Résolution comme conférant une
autorisation. L’on pourrait envisager un troisième motif que pour
« justifier » le recours à la force de l’Arménie. Ce serait la possibilité d’un
droit d’ingérence humanitaire. Il y a toute une série de discussions à ce
sujet, c’est au travers de la coutume que ça se discute… Il n’y aurait à
priori pas de principe coutumier qui autoriserait ceci à savoir l’ingérence
humanitaire. ON constate qu’il y a toute une série de références de la part
de l’Arménie qui consiste à dire qu’ils vont aider la population du Haut-
Karabakh. L’Arménie fait allusion à des interventions humanitaires à la
suite de la reprise des combats. Il n’y a pas de motivation fondée sur
l’article 2, ¶4 de la Charte. Il y a des considérations d’ordre « politique »
mais pas juridique… L’argument de l’Arménie est difficilement admissible à
ce sujet. Cela ne veut pas dire que les éventuelles persécutions vécues
par la population Arménienne n’est réglée par aucune règle de droit
international et que du coup la communauté internationale devrait rester
les bras croisés. Dans le document « final » faisant suite au sommet de
2005, les Nations-Unies ont affirmées la responsabilité de protéger. Il y a
un régime juridique à ce sujet. L’Azerbaïdjan doit protéger les droits
humanitaires des populations qui se trouvent sur son territoire notamment
les « populations » / « ethnies » Arméniennes qui s’y trouveraient. L’on
peut donc engager, à ce titre, la responsabilité de l’Azerbaïdjan. De
manière plus globale, il y a une responsabilité de la Communauté
internationale. Sur ce point, le Conseil de Sécurité n’a pas encore très actif
à ce sujet. Tout au plus, a-t-il fait une « sorte de communiqué de
presse ». L’OSCE a été en charge de mener des négociations pour obtenir
un règlement pacifique puis il y a eu également l’intervention de la Russie
pour obtenir un cessé le feu ; Tel fut le cas en octobre 2020 et novembre
2020. La protection des populations civiles justifierait difficilement une
124
intervention militaire.

Sur les noms des « Etats » mentionnés ci-dessus qui


ont « subits » des autorisations de recours à la force de la part du Conseil
de Sécurité, il y a à chaque fois le lien vers la Résolution qui, très
précisément, octroi le droit de recourir à la force sur ces territoires.
Toutefois, en ce qui est de l’Iraq, la Résolution n°687/1991 peut
également être intéressante c’est pourquoi son lien hypertexte se trouve
ici. En ce qui est d’Haïti, le Conseil de Sécurité a réaffirmé, en mars 2021,
qu’il y avait lieu de respecter la volonté démocratique des citoyens et a
exhorté les autorités Haïtiennes d’agir sans délai puis en octobre 2021, le
Conseil a insisté sur le fait qu’il fallait qu’il y ait des élections rapides…

Tu me files un DAFALGAN ou tu me résume le bin’s ?


Résumons…
➢ Soit, l’Etat demande une intervention mais ici il s’agit d’un conflit
interne…
➢ Soit, l’on est sur l’article 2, ¶4 de la Charte des Nations-Unies et il y
a une autorisation des Nations-Unies mais… Les N.U. n’ont pas
autorisé une telle intervention, au contraire…
➢ Soit, il y a la responsabilité de protéger mais c’est difficilement
admissible…
➢ En un mot, « non » ➔ Pas de possibilité de recourir à la force.
125
Il y aurait aussi la légitime défense. Mais ce serait compliqué aussi. Il y a
plusieurs conditions pour cela. D’abord, il faut avoir fait l’objet d’une
agression armée de la part d’un autre Etat. C’est la première condition et
c’est une condition de « principe ». Ensuite, il y a des conditions sur les
modalités du recours à la force. Il y atout d’abord une condition
procédurale. Il s’agit d’envoyer une lettre au Conseil de Sécurité pour
invoquer la légitime défense. Il y a des conditions de fond aussi… C’est-à-
dire que cela doit être nécessaire et proportionnel.

2. Légitime défense ?

S’agissant de la légitime défense et de la première condition, il faut donc


avoir été « victime » d’une agression armée préalable de la part d’un
autre Etat. L’Azerbaïdjan peut-il considérer que son recours à la force à
partir de septembre 2020 est une agression de la part de l’Arménie ? Pour
évaluer cette question, il faut se poser au point de départ. L’Arménie est
intervenue militairement au début des années 1990 et a maintenu son
armée et ce, afin d’aider le Haut-Karabakh à prendre son indépendance.
Pour voir si le comportement de l’Arménie peut être qualifié d’agression,
on se réfèrera à la Résolution 3314 des Nations-Unies. De prime abord, il
faut que l’on agresse en premier. C’est le cas. L’Arménie a envahi le
territoire de l’Azerbaïdjan dans els années 1990 dans la prolongation de la
sécession du Haut-Karabakh. Ensuite, l’article 3 de la Résolution n°3314
fait un renvoi à l’invasion du territoire. C’est aussi le cas. Et il y a
l’occupation militaire de toute ou partie d’un autre Etat. Il y a la présence
militaire des forces Arméniennes et ce, de manière continue depuis les
années 1990. Dés lors, il y a, de manière continue, une agression au sens
de la Résolution 3314. Les actes d’agression qui peuvent être attribués à
l’Arménie sont, d’une part, ceux menés par les forces armées directement
et, d’autre part, de manière indirecte, par les forces rebelles. Dans ce cas
précis, il s’agirait des forces séparatistes da la « République » du Haut-
Karabakh. La Résolution 3314 fait allusion à ces agressions indirectes.
L’article 3, G) de la Résolution 3314 fait référence à l’envoi en son nom de
bandes armées ou l’engagement substantiel dans des forces armées ou
groupes armés. S’agissant de l’Arménie, il y a un lien étroit entre les
groupes rebelles et les autorités Arméniennes. La Cour Européenne des
Droits de l’Homme a d’ailleurs constaté dans l’arrêt « Chiragov et autres c.
Arménie » que tel était le cas. Dés lors, on pourra considérer que font
partis des actes d’agression menées par le « Artsak ». Au regard de la
définition de l’agression, on peut donc considérer qu’il y a agression. L’on
pourrait donc ouvrir la porte à la légitime défense. Puis, l’Azerbaïdjan a en
effet transmis une lettre au Secrétaire Général des Nations-Unies. Ils
126
considèrent que les actions qu’ils mènent relève de la légitime défense. Il
serait probable que ça soit l’Azerbaïdjan qui ait commencé les hostilités en
septembre 2020. Toutefois, on pourrait considérer que c’est une réaction
à l’occupation continue des forces armées Arméniennes et des forces
« rebelles » du Haut-Karabakh. Il y aurait donc un motif d légitime
défense. En réalité, aucun Etat n’a contesté sauf l’Arménie. Sur le
principe, il y a donc une admissibilité à la légitime défense. Mais il y a des
conditions de fond pour que l’article 51 de la Charte (légitime défense)
puisse trouver à s’appliquer. Il s’agit de conditions tirées du droit
coutumier. De ce point de vue, il y a deux conditions. C’est, d’une part, la
conditions de nécessité et, d’autre part, de proportionnalité. Sur la
nécessité, il faut que le recours à la force soit une mesure nécessaire et
qu’une autre mesure qui aurait pu obtenir le même résultat ne soit pas
disponible. La question qui se pose est de se dire qu’après 30 ans de
conflit et une accalmie, on devrait considérer, dans ce cas, qu’il y aurait
un problème. Outre le fait de savoir qui a commencé, l’Azerbaïdjan, quant
à lui, considère que les négociations étaient au point mort et qu’il fallait
mettre un terme à l’occupation militaire sur son territoire qui est continue
depuis des décennies. C’est sur la question de la proportionnalité qu’il y
aura maintenant lieu de se pencher. Ceci s’évaluera à chaque moment du
conflit. En l’occurrence, il y a lieu de se demander s’il a limité le recours à
la force (sur son territoire) juste pour repousser les occupants ou a-t-il
menée des opérations en territoire Arménien ? Il faudrait, dans ce dernier
cas, qu’il y ait un rapport de nécessité entre l’action qu’il a entrepris et le
but poursuivi ; Le recours doit être nécessaire pour arriver à repousser les
occupants. S’il agit en dehors de son territoire, il doit aussi, bien entendu,
veiller à ce que les choses soient proportionnées. Il ne faudrait pas qu’il
s’agisse de la simple fin de l’occupation Arménienne. Il ne faudrait par
exemple pas qu’il s’agisse de supprimer toute présence Arménienne sur le
territoire ou dans les districts proches du Haut-Karabakh. Dans ce cas, la
légitime défense ne serait plus proportionnée. On peut aussi examiner une
facette particulière du droit de la légitime défense qui est apparue après
les attentats du 11 septembre 2001 aux USA. Il s’agit de la guerre contre
le terrorisme. Ce serait une manière d’interpréter plus largement le
principe de légitime défense en autorisant des interventions armées
menées contre des groupes non-étatiques. Tel serait le cas de groupes
« terroristes » qui seraient hébergés sur le territoire d’un Etat. Ce sont
des interprétations qui visent à étendre le champ de la légitime défense
en menant des actions directement menées contre des groupes
terroristes. C’est notamment dans le cas des opérations en Afghanistan,
au Yémen, en Syrie… S’agissant du conflit au Haut-Karabakh, chacune des
parties s’est référé à la lute contre le terrorisme. D’un côté, l’Arménie a
reproché à l’Azerbaïdjan d’avoir utilisé des mercenaires djihadistes
commandités par la Turquie. Ce serait une forme de lute contre le
127
terrorisme. D’un autre côté, on a l’Azerbaïdjan qui prétend que l’Arménie
aurait enrôlé des forces du PKK que l’Arménie considère comme terroriste.
De ce point de vue-là, on constate que ces invocations à la lute contre le
terrorisme sont invoquées à des fins bien plus politiques que directement
juridiques. Le concept de terrorisme est souvent mentionné à des fins
morales et politiques et ce, afin de légitimer sa propre action. Dans ce cas
du Haut-Karabakh, il n’y a visiblement pas d’argument que pour appuyer
la légitime défense au regard de la lute contre le terrorisme. En
conclusion, si l’n devait résumer, au regard de l’article 2, ¶4, c’est
l’Arménie qui semble avoir commencé dans les années 1990 et il semble
« évident » que l’Arménie a violé le principe de l’interdiction du recours à
la force. Par ailleurs, l’Arménie a occupé de manière continue, c’est donc à
l’Azerbaïdjan qui reviendrait le droit d’invoquer la légitime défense. Le
« ius contra bellum » a donc été analysé mais nous allons maintenant
nous pencher sur la question du droit des conflits armés…

Voir, ci-dessous, une extraction, par capture


d’écran, de l’article 51 de la Charte des Nations-Unies :
128

Voici, ci-dessous, le lien vers un article publié en libre


accès sur le site de l’Université du Québec à Montréal concernant la lute
contre le terrorisme et les USA, voir :
https://www.ieim.uqam.ca/IMG/pdf/Benjamin_me_moire_publication.pdf

3. Le droit des conflits armés

Le droit d’humaniser la guerre, c’est le « ius in bello ». Il est sensé faire


en sorte que lorsque la guerre est menée, indépendamment de savoir qui
mène la guerre, il y ait un corps de règle qui tend à humaniser celle-ci. Il
y aura principalement deux types de questions à se poser. D’abord, il y
aura lieu de savoir si ce conflit est applicable et si le droit des conflits
armés est applicable. Ensuite, on se demandera quelles sont les règles
précises applicables, quelles sont les règles applicables. L’on a, encore une
fois, des tensions entre la vision idéaliste et réaliste. Dans la perspective
129
idéaliste, il y aura une volonté d’appliquer strictement les règles du « ius
in bello ». Mais dans une perspective réalise, on renverra, comme
souvent, à la souveraineté des Etats.

Sur le plan de l’applicabilité et au regard du conflit au Haut-Karabakh, on


aura égard à deux catégories. D’abord, les conflits armés internationaux
qui renvoient à l’idée d’un conflit interétatique. Puis, il y aura le conflit
« interne » à savoir une guerre civile. Ce dernier principe renverra à la
possibilité d’un conflit entre un gouvernement central et des groupes
rebelles pour autant qu’ils soient suffisamment organisés, que ces groupes
soient une partie au conflit. Les corps de règles sont différents. De
manière générale, on constate qu’il y a plus de règles applicables aux
conflits internationaux. Dans les conflits non-internationaux, il n’y a pas
de statut de « combattant » qui permette de faire échapper l’utilisation
des armes au sens du droit pénal « traditionnel ». C’est-à-dire que, dans
le cadre d’un conflit « interne », l’on peut poursuivre les personnes qui
font usage d’armes. Dans le conflit interne, il n’y a pas non plus le statut
de prisonnier de guerre. Enfin, le statut de l’occupation belligérante ne se
conçoit que dans un conflit international. Lorsque l’on essaye de qualifier
un conflit de manière plus précise, on peut de prime abord identifier trois
parties. Il s’agit de l’Azerbaïdjan, l’Arménie et les forces sécessionistes du
Haut-Karabakh. Pour ces derniers, il s’agit bien d’un groupe qui n’a pas la
qualité d’Etat. Il y a deux approches par rapport à la possible qualification
de cette situation. On va en réalité distinguer les relations et les
bilatéraliser. Il y aura dans ce cas lieu de distinguer les relations entre
l’Azerbaïdjan et l’Arménie et puisqu’il s’agit de deux Etats, il y a donc
conflit international. Puis l’on peut avoir égard aux relations entre
l’Azerbaïdjan et les forces rebelles du Haut-Karabakh et là il n’y aura pas
de conflit international. L’autre possibilité c’est l’application du principe de
contrôle global. Ce dernier a été utilisé par le Tribunal Pénale
Internationale s’agissant de l’ex-Yougoslavie. C’est le fait de considérer
que dans un tel cas de figure, on va fusionner les relations en considérant
que les forces sécessionistes du Haut-Karabakh sont soutenues à un tel
point par un autre Etat à savoir l’Arménie qu’il faut considérer qu’il y a un
contrôle global de l’Arménie. Dés lors, dans cette seconde possibilité, on
considère qu’il y a donc un conflit entre Etats et qu’il s’agit donc d’un
conflit international. Cela aura pour conséquence d’avoir une application
intégrale des règles des conflits internationaux. Cela a pour conséquence
notamment qu’e les rebelles du Haut-Karabakh auront le statut de
prisonnier de guerre et qu’ils ne pourront être poursuivis pénalement pour
avoir pris les armes contre l’Azerbaïdjan. Si l’on examine plus
spécialement un certain nombre de questions qui se posent dans le cadre
du conflit portant sur le Haut-Karabakh, l’on a d’abord la question assez
130
sensible des prisonniers de guerre. SI l’on retient la qualification
« globale » de conflit international, tous les membres armés obtiendront le
statut de prisonniers de guerre ; C’est un statut protecteur. Dans le cadre
de ce conflit, la question s’est posée. Il y aurait eu, il y a peu, des
prisonniers de guerre Arméniens qui auraient té exécutés par
l’Azerbaïdjan ce qui constituerait incontestablement une infraction. Dans
l’accord de cessé le feu qui a été conclu le 10 octobre 2020, il y a eu un
accord d’échanges de prisonniers de guerre. Si l’on tente d’appliquer le
droit des conflits armés, on doit voir les règles en matière de conduite des
conflits. Les parties doivent distinguer. Ils doivent distinguer entre
objectifs civils et militaires. Il y a également le principe de
proportionnalité. En effet, il se peut qu’il y ait des victimes civiles
collatérales et les parties aux conflit doivent veiller à causer le moindre de
pertes civiles que possible. Il y a également les règles en matière
d’occupation militaire. Il y a donc un régime spécifique d’occupation. Ce
sont ces deux derniers points que nous nous proposons d’analyser dans
les lignes qui suivent. Les organes internationaux seront impliqués. C’esst
notamment le cas des Nations-Unies soit par le biais du Secrétaire Général
des N.U. soit par l’intermédiaire de la Haut-Fonctionnaire en charge des
droits de l’Homme à savoir Michelle Bachelet. Ils ont appelé les parties à
mettre tout en œuvre que pour épargner les populations civiles. Le 3
novembre 2020, Michelle Bachelet a rendu public un communiqué à ce
sujet. Elle y constate qu’il y aurait des crimes de guerre commis de part et
d’autre. Des écoles, des hôpitaux, bâtiments culturels, églises,
mosquées… étaient prises pour cibles… Et ce, directement et
intentionnellement. Si ces faits sont avérés, il y aurait une violation grave
du crime de guerre. Ce qui conduirait à la responsabilité pénale
individuelle mais également à la responsabilité des Etats. Dans la manière
dont les hostilités peuvent être conduites, il y a lieu d’avoir égard à la
manière dont les attaques peuvent être menées. Il faut respecter le
principe de distinction. Il faudrait, sur ce point, faire des attaques
indiscriminées. Sur ce point, des organismes comme Amnesty ou HRW ont
pointés des problèmes avec des preuves qui tendraient à faire penser que
l’Azerbaïdjan aurait utilisé des armes à sous-munitions. IL s’agit d’armes
qui vont rependre une série de petites bombes qui vont exploser avec un
petit retard voir un long retard. Par principe, une convention
internationale interdit l’usage de ce type d’armes. Mais ces deux Etats ne
sont pas parties à la convention en question. De facto, ce type d’armes est
interdite. Le type d’arme utilisée a un caractère indiscriminé c’est-à-dire
que ça pourrait exploser à tout moment donc toucher des civils de
manière indiscriminée…
Comme nous l’avons vu, il faut respecter l’interdiction du recours à la
131
force. Ce serait l’Arménie qui aurait commencé en premier à ce sujet. Ce
serait donc l’Azerbaïdjan qui serait agressé. Dés lors, il pourrait être en
état de légitime défense. Par ailleurs, on a vu que ce conflit pouvait être
qualifié de conflit international. Dés lors, le statut de prisonnier de guerre
est possible. Mais il y a aussi la manière de mener de tels conflits.

Sur le site d’Amnesty et d’HRW, on peut lire


des articles de décembre 2020 qui semblent rapporter des crimes de
guerre, voir : Arménie/Azerbaïdjan. Il faut enquêter d’urgence sur les
décapitations et sur les crimes de guerre relayés dans des vidéos sordides
(amnesty.org) et https://www.hrw.org/fr/news/2020/12/02/azerbaidjan-
des-prisonniers-de-guerre-armeniens-ont-ete-severement-maltraites

La vidéo YouTube de ce « chapitre » « est


consultable en suivant ce lien :
https://www.youtube.com/watch?v=TGIsVQhkiLM
132

XIII. La responsabilité internationale

Nous en sommes à notre avant-dernier chapitre dans ce long labyrinthe


du droit internatioanl…

Le morceau qui est diffusé au début de la vidéo est notamment


consultable via une ancienne « version » sur ce lien, voir :
https://www.youtube.com/watch?v=-CZ06Lq_mUw. Ou sinon, il y a cette
version :
https://www.bing.com/videos/search?q=mersonary+ready+for+ware&vie
w=detail&mid=5F8D8B3752EE8DED95815F8D8B3752EE8DED9581&FORM
=VIRE Il s’agit d’un morceau qui a été joué par John Cale et le titre est
« mersonaries ready for war ». Il évoque donc la thématique des
mercenaires. Sur le plan international, à qui incombe la responsabilité des
mercenaires ? Un mercenaire est un « militaire » privé engagé par l’Etat
pour mener une guerre pour le compte de l’Etat. Le personnage de la
chanson mentionnée ci-dessus dit qu’il se rend à Genève pour aller
recevoir un paiement… Cela veut dire qu’il est donc en effet payé. Mais
qui, que, quoi, comment… ?

Toute une série de questions seront abordées…

Pour que l’on puisse parler d’un ordre juridique, il faut qu’il y ait une
responsabilité. En effet, sans régime de responsabilité, on peut douter de
l’existence de la portée normative des règles établies dans « l’ordre ».
L’on verra qu’il y a une tension entre une tendance plus idéaliste de ce
régime. Dans cette perspective, la mise en œuvre est inhérente à l’ordre
juridique. Il y aura donc lieu, dans ce cas, de maximaliser la
responsabilité. De manière systématique, il faudra pouvoir engager la
responsabilité d’un Etat ou potentiellement d’une organisation
internationale. Dans une perspective plus réalise, la responsabilité sera
soumise à une série d’éléments plus aléatoires soumis aux rapports
politiques, de force. Dans cette perspective, il y aura lieu de renvoyer à la
souveraineté des Etats et organisations. Il faudra ne pas trop facilement
imputer des actes à un Etat dans cette tendance « réaliste ». Dans
l’édiction des règles de responsabilité, on verra qu’il y aura cette tension…
Les principes en matière de responsabilité sont édictés par la Commission
133
du droit international. Ils ont été endossés par l’Assemblée Générale par le
biais d’une Résolution et ce, toujours en 2001. On considère qu’il y a eu
une codification de la responsabilité. En effet, il y avait un droit coutumier
qui a été « codifié ». Il faut analyser, comme pour tous les travaux de la
commission du droit international, article par article pour voir ce qu’il en
ressort et y détecter l’éventuelle « opinio iuris » des Etats. On considère
de manière générale que les articles de la Commission reflète l’Etat du
droit coutumier. Comme on le verra, la Commission a également établi,
dix ans plus tard à savoir en 2011, des articles relatifs à la responsabilité
des organisations internationales mais la pratique à ce sujet est beaucoup
moins « abondante ».

Sur la page suivante, les travaux de la


Commission en matière de responsabilité, les fameux « projets
d’articles » :
https://legal.un.org/ilc/texts/instruments/french/commentaries/9_6_2001
.pdf Et pour une lecture critique et une remise en cause de l’existence
d’une opinio iuris comme élément constitutif de la coutume internationale,
voir : Schramm, B., « Chapitre 2 - La doctrine des deux éléments de la
coutume : Une fiction dogmatique morte-vivante au service d’un droit
international à la polynormativité ainsi limitée » in La fiction juridique et le
juge, 1e édition, Bruxelles, Bruylant, 2017, p. 213-280

Quand on se réfère à ce projet d’article de la Commission, on voit des


principes énoncés à l’article 2 des articles. On y trouve les conditions
d’établissement de la responsabilité de l’Etat. Il faut d’abord un fait. Qu’il
soit constitutif d’une violation d’une obligation internationale de l’Etat.
C’est-à-dire que l’on va établir un fait internationalement illicite en
vérifiant qu’il s’agit bien d’une violation d’une obligation internationale
opposable à l’Etat concerné. Il faut aussi que ce fait illicite puisse être
attribuable à l’Etat.
Pour examiner de manière concrète la responsabilité, nous analyserons le
134
cas du massacre de Srebrenica.

Une interview et un article sont disponibles en suivant ce lien :


https://www.facebook.com/sciencepoulb/posts/2755186174703655

Ce massacre a été perpétré par les forces Serbes en Bosnie en juillet 1995
et aurait fait environ 8000 victimes. Il soulève beaucoup de questions en
matière de responsabilité internationale. Cela nous permettra d’analyser
notamment les questions d’imputabilité. Il ne s’agissait pas de forces
Etatiques mais de forces sécessionnistes. Est-ce du coup imputable à
l’Etat ? Cela pose également des questions de coexistence de
responsabilités. En effet, l’ONU était chargé du maintien de la sécurité sur
place… Cela pose aussi la question du mode de réaction des Etats face à
de telles violations du droit international. Comment mettre fin à la
violation du droit international ou obtenir une certaine forme de
réparation ?

Pour bien comprendre, il faut reprendre certains éléments de contexte. Le


massacre a pris lieu dans le cadre du conflit en Yougoslavie qui a début au
début des années 1990. Ce conflit a eu lieu dans le cadre de dissentions
internes. Toutefois, il faut noter que l’on était également à la sortie de la
guerre froide… Ces dissentions politiques internes entre les différentes
républiques qui composaient l’Ex-Yougoslavie ont conduites à des conflits
concernant tout d’abord la Slovénie et la Croatie qui ont déclarés leurs
indépendances en 1991. En 1992, la guerre s’est étendue à la Bosnie.
Pour comprendre l’aspect de ce conflit, il faut savoir qu’il y avait plusieurs
populations. En effet, il y avait les « Musulmans Bosniaques » et les
« Croates ». En l’occurrence, le terme « Musulman » est pris au sens
patriotique dans le cas présent. Il y avait également des Serbes. La
minorité Serbe n’avait pas envie de rester dans un Etat Bosniaque qui
aurait été détaché d l’ex-Yougoslavie. Ils ne souhaitaient pas être
135
détachés de ce qui était la « Serbie-Monténégro ». Il y a eu une armée
Serbe de Bosnie qui s’est constituée. Cette armée a déclaré
l’indépendance de la République Serbie. Elle occupait une partie non-
négligeable de la Bosnie. Ils ont menés des opérations militaires qui ont
débouchés sur de graves violations du droit humanitaire mais aussi des
« nettoyages ethniques » ; De graves violations du droit international. A
Srebrenica, il y avait une enclave à forte population Musulmane qui était
donc enclavée dans cet « entité » de Serbie-Bosnie. La communauté
internationale a eu son attention attirée par les faits qui se déroulaient sur
place… Le Conseil de Sécurité a, dés 1993, adopté des Résolutions
pointant les problématiques en cause. Il y a d’abord eu la Résolution
819/1993 d’avril 1993. Le Conseil disait qu’il condamnait les actions
menées par cette « armée » qui tendaient à faire évacuer la population de
Srebrenica ainsi que d’autres régions de la Bosnie dans le cadre de sa
monstrueuse campagne de nettoyage ethnique… Cela a mené à déclarer
l’enclave de Srebrenica comme zone de sécurité à savoir une zone qui
n’aurait pas donner lieu à des opérations militaires. Dés 1993, on
identifiait déjà un risque particulier pour les populations civiles face à cette
armée Serbe. On en arrive aux évènements de juillet 1995… Il faut savoir
qu’à Srebrenica, il y avait des forces de l’ONU. Dans le cadre de
l’opération armée menée par les forces Serbes de Bosnie, ils ont fini par
prendre entièrement possession de Srebrenica. Ils vont demander aux
forces de l’ONU de leur remettre les populations civiles pour, soi-disant,
les évacuer vers d’autres territoires. En réalité, les forces Serbes vont
séparer les personnes males des groupes civils, des enfants et des
femmes. Ils vont massacrer environ 8000 hommes Musulmans de Bosnie.
Ces faits seront ensuite qualifiés de génocide. Il y a des questions qui sont
posées en matière de responsabilité. IL y a eu un fait internationalement
illicite. Il est évident que massacrer de la sorte 8000 hommes désarmés
est une violation extrêmement grave du droit international. Il y aura la
question de la qualification à savoir était-ce un crime contre l’humanité ou
un génocide ? Au final, les juridictions internationales vont retenir le crime
de génocide. Mais ce qui reste comme questions c’st la question de al
responsabilité dont l’imputabilité et les modes d’interaction entre les
différents protagonistes. Les individus qui ont commis les massacres sont
concernés, l’Etat Serbe qui avait des relations étroites avec l’entité
sécessioniste, la force de l’ONU présente sur place ou encore l’ONU elle-
même comme organisation sont, à des égards divers, concernés par ces
faits. On va examiner comment toutes ces questions se posent. On
envisagera du coup les divers éléments du chapitre XI. D’abord, la
question de l’attribution d’un comportement à un Etat. Ensuite, les
circonstances qui pourraient exclure l’illicéité seront abordées. Dans un
troisième temps, on verra concrètement comment al responsabilité d’un
Etat pourra être mise-en-œuvre. Enfin, dans un quatrième temps, on
136
analysera comment une organisation internationale pourrait voir sa
responsabilité engagée.

1. L’attribution du fait illicite à l’Etat : La question de


l’imputabilité

Le premier point qui sera abordé dans ce chapitre sera la question de


l’attribution, l’imputabilité. En l’occurrence, pour Srebrenica, se posait la
question de l’imputabilité de la République Serbie-Monténégro qui
s’appelait à l’époque République Fédérative de Yougoslavie. La question se
posait par rapport aux faits commis par l’armée Serbie de Bosnie. Il y
avait des relations étroites entre l’Etat Serbe et ses entités qu’il s’agisse
de son armée ou des entités sécessionistes. Peut-on considérer que
l’armée Serbe ou ses organes voir des entités placées sous son
indépendance pouvait se voir imputer les faits dont question ? Il y a deux
modes d’imputabilité. On a d’abord celui direct il y a un organe de l’Etat.
Puis un mode plus indirect où une entité privée reçoit des instructions de
l’Etat ou qui serait sous son contrôle effectif.

D’abord, l’attribution par un organe c’est-à-dire directe. Le principe est


énoncé à l’article 4 des articles de la commission internationale. Pour
savoir s’il s’agit d’un organe, il faudra regarder le droit interne de l’Etat. Si
c’est prévu dans le droit interne qu’il s’agit d’un organe, ce sera donc bien
un organe au sens de l’article 4 en question. Tout acte commis par un
organe de l’Etat lui sera en principe imputable. Il ne faudra pas se poser la
question de savoir, dans ce cas, si l’organe a agit sur instructions puisque,
dans l’ordre interne, c’est un organe de l’Etat donc l’Etat lui-même. L’on
pourra bien entendu écarter les actes commis de manière « privée » par
exemple si un policier rentre chez lui et assassine sa femme alors ce sera
une affaire privée. Si, par contre, un policier commet un acte de torture à
l’encontre d’un prisonnier, même s’il n’a pas reçu d’instructions dans ce
sens, l’acte sera imputable à l’Etat. Dans le cas du massacre de
Srebrenica, il était question de savoir si les actes n’avaient pas été émis /
commis par un organe de l’Etat Serbe. La question s’est posée par rapport
à un commando qui aurait participé à certains actes. Tel serait le cas pour
un groupe appelé « scorpion ». Il s’agissait d’un commando qui avait été
intégré à l’armée Serbe. Il avait été créé par un ancien chef de la sécurité
Serbe en Serbie. Dés lors, se posait la question de savoir si au moment
des faits, ce commando faisait toujours partie de l’Etat Serbe. Cette
question a été soulevée dans le cadre d’une affaire devant la Cour
Internationale de Justice. Elle a été soulevée par al Bosnie-Herzégovine.
137
Elle a invoqué la convention sur les génocides. Elle reprochait à la Serbie
sa responsabilité dans le cadre des massacres de Srebrenica. Cela posait
d’abord la question de l’imputabilité directe à travers des organes qui
seraient des organes de la Serbie. La Cour s’est référée au droit interne de
l’Etat Serbe pour vérifier s’il faisait bien partie de l’Etat au moment des
faits. La Cour a considéré après un examen des documents fournis qu’il
n’y avait pas d’éléments de preuve qui attestait que les scorpions faisaient
encore partie de l’Etat Serbe. Il était établi qu’elle avait fait partie d’une
autre entité sécessionniste à savoir l’armée Serbe de Croatie, pus
précisément l’entité de Krajina (République Serbe de Krajina). En juillet
1995, il n’y avait plus de lien au regard du droit interne. Il était par contre
établi qu’elle faisait partie de Krajina. On ne pouvait donc pas imputer les
faits commis par les scorpions à l’Etat Serbe. On devait alors se tourner
vers d’autres modes d’imputation, des modes plus exceptionnels. Il fallait
essayer d’imputer des faits de groupes privés à l’Etat.

La Cour a rendu, en février 2007, un


jugement relatif à la question de l’imputabilité directe en relation avec le
groupe « scorpions », voir : https://www.icj-cij.org/public/files/case-
related/91/091-20070226-JUD-01-00-FR.pdf

Ensuite, il y a la question de l’imputation « indirecte ». En raison d’une


série de circonstances, l’entité peut engager la responsabilité de l’Etat. Il y
a d’abord les organes de fait. On aura égard aux faits. En fait, l’entité
n’est-elle pas assimilable à un organe ou l’autre ? Ce serait le cas si des
instructions sont données à l’entité, si elle est sous le contrôle effectif de
l’Etat ou si cette entité dépend de l’Etat. Les faits ont été commis par la
République Serbe sécessioniste présidée par Radovan Karadzic mais aussi
par l’armée Serbe qui était commandée par Ratko Mladic. Il faut vérifier si
dans les faits, ces deux entités ne pouvaient pas être rattachées à la
Serbie et ainsi les considérer comme entités de fait, organes de fait. Le
premier mécanisme renvoi à un principe émis par la Cour Internationale
de Justice d’abord dans l’affaire « Nicaragua ». L’une des hypothèses
138
émise par la Cour, il y avait dépendance totale. Au regard des faits, une
entité ou un groupe est tellement dépendant d’un Etat, de l’aide que l’Etat
lui a apporté qu’il n’a aucune autonomie d’action. Il n’aurait, dans cette
perspective, aucune autonomie propre. Il n’est que l’outil, l’instrument de
l’Etat. Il ne fait que répondre à la volonté de l’Etat. Dans ce cas, il sera
assimilé à un organe de l’Etat et du coup on retombe sur l’article 4
mentionné plus haut. Tout acte quelconque commis par cette entité, dans
ce cas, sera imputé à l’Etat. La Cour a considéré, sous cette perspective,
au regard des éléments de preuve soumis par la Bosnie, la Cour a dit qu’il
n’y avait pas d’éléments suffisants que pour dire que ces entités n’étaient
pas totalement dépendantes. IL y avait notamment une politique propre
menée. En dépit d’une certaine aide apportée, d’un soutien de la Serbie, il
n’y avait pas de dépendance. Malgré des liens politiques également. Il y
avait des liens de personnel également. Toutefois, il n’y avait pas de
rapport de dépendance. On ne pouvait pas imputer tous les actes. La Cour
a donc envisagé un autre mode d’imputation. Il s’agit de l’article 8 des
articles sur la responsabilité. Cela vise les comportements commis par des
personnes privées qui agissent sous la direction ou le contrôle de l’Etat. Il
faudra vérifier que pour le comportement qui a donné lieu à des violations
du droit international, le groupe a agit soit sous la direction ou le contrôle
de l’Etat. Pour le comportement visé, l’entité privée a agit sous les
instructions ou les directives de l’Etat ou le contrôle de celui-ci. Pour
Srebrenica, les deux entités agissaient-elles sous la direction ou le
contrôle ? La Cour, encore une fois, a considéré qu’il n’y avait pas
d’éléments qui permettaient de dire que les deux entités agissaient sous la
direction ou le contrôle de l’Etat. L’opération particulière aurait-elle été
menée sous le contrôle de l’Etat Serbe ? Non. Il y avait des liens politiques
et des aides mais pas de nature tel qu’il fallait considéré qu’il y avait des
instructions ou un contrôle.

Dés lors, il n’y avait aucun moyen d’imputer à la Serbie le massacre. Mais
aurait-on pu « détourner » la chose ? On aurait peut-être pu invoquer
l’obligation de vigilance ? C’est le principe de vigilance due… Il y aurait
peut-être un palliatif. Il y a peut-être un substitut lorsque l’on ne peut pas
imputer soit directement soit indirectement. Ce serait le cas si les entités
auraient agit à partir du territoire de l’Etat ou s’il y avait des liens
particuliers entre l’Etat et le groupe visé. En l’occurrence, la Cour s’est
penchée sur cette question. Elle s’est appuyée sur la convention sur le
génocide. La convention prévoit une obligation de prévention par rapport
aux actes de génocide. L’article 1er de la convention prévoit le devoir de
prévention. La Cour a pu examiner dans quelle mesure l’Etat avait rempli
ou non son obligation. En prenant en considération le pouvoir d’influence
particulier que l’Etat Serbe avait en raison de ses liens avec le groupe
139
sécessionniste et plus particulièrement avec l’aide financière et militaire,
on pouvait considérer qu’il y avait un lien. AU regard de cette influence, il
y avait donc possibilité d’avoir un impact sur le comportement de la
République sécessioniste. La Serbie avait une obligation de moyens à cet
égard. Mais la Serbie avait-elle assez d’éléments en sa possession que
pour déterminer s’il y aurait un risque de massacre ? La Cour a considéré
que l’attention de la communauté internationale avait été portée sur ce
« cas » déjà depuis un certain temps… Par ailleurs, la Serbie savait que la
république sécessionniste allait mener une action particulière dans le
cadre de Srebrenica. Elle avait des contacts étroits par rapport à cela. Elle
ne savait pas qu’il y avait une intention spécifique de commettre un
génocide en tant que tel. Mais elle savait qu’il y aurait une action militaire
et un risque certain de massacre. La Cour a donc considéré que l’Etat de
Serbie n’avait pas fait ce qui était en son pouvoir pour faire des
avertissements plus pressants que pour éviter le génocide. Dés lors, la
Cour considère que la Serbie a manqué à son devoir de prévention en ne
mettant pas tout en œuvre que pour éviter. Elle avait un large pouvoir
d’influence et aurait donc pu influencer pour éviter ce qu’elle n’a pas fait.
Le Tribunal Pénal International pour l’Ex-Yougoslavie a également mis en
avant que la Serbie ne mettant pas tout en œuvre que pour faire traduire
des gens…

On constate donc que l’on a encore une fois de plus la tension entre
tendance réaliste et idéaliste. En effet, on voit la tendance réaliste avec un
seuil de preuve très exigent par rapport aux actes posés par ces
personnes privées. Les critères de la commission du droit international
sont très restrictifs. L’on voit la faculté de garde la souveraineté de l’Etat
dans ce cas. Il faut des liens très forts. L’Etat n’aura sa responsabilité
engagée soit que quand ce sera un organe de l’Etat soit s’il y a des
éléments très strictes qui permettent de relier l’Etat à l’entité privée. La
tendance idéaliste resurgit par cette possibilité « pragmatique » par le
biais de la vigilance due. L’on considèrera là que l’Etat n’a pas mis tout en
œuvre pour réprimer des actes commis par des entités privées qui
agissent sur le territoire de l’Etat ou qui ont des relations très privilégiées
avec l’Eta concerné.

2. Des circonstances permettant d’exclure l’illicéité ?

Sur ce point, nous irons très rapidement… Il n’y avait en l’occurrence pas
beaucoup de possibilités d’exclure l’illicéité. La Serbie accès sa défense sur
le fait que les actes ne lui étaient pas attribuables. Elle ne mettait pas en
140
cause l’illicéité des actes. Elle n’invoquait pas non plus des circonstances.
Ces circonstances se retrouvent dans les articles de la Commission du
droit international. Si elles devaient être interprétées, ce serait de manière
réaliste. Les Etats pourraient assez facilement échapper à leurs
responsabilités en invoquant des circonstances. Toutefois, souvent c’est
invoqué de manière restrictive donc idéaliste. Le consentement de l’Etat
victime n’était pas pertinent ni plus que la légitime défense ou encore les
contres mesures ou la force majeure. Il faut spécialement souligner que le
principe qui s’applique de manière générale est toujours soumise au
respect des normes impératives. En d’autres termes, l’invocation de ces
circonstances ne permet pas d’échapper à une norme de droit
international. Tel est le cas pour l’interdiction du génocide. Il est donc
difficilement concevable d’invoquer les contres mesures pour échapper à
l’interdiction du génocide… (par exemple) Pour le génocide, aucune
circonstance ne permet de le justifier.

3. Mise en œuvre de la responsabilité

L’on pourra reprocher une violation mais faut-il encore concrètement la


mettre en œuvre…

Sur le principe, la conséquence générale de l’engagement de la


responsabilité, c’est tout d’abord mettre fin à la violation. C’est
notamment le cas quand il y a une violation continue. Il doit aussi offrir
des garanties de non-répétition. Puis il y a une obligation de réparation.
Qu’il s’agisse de dommages matériels ou moraux, l’Etat doit réparer. Ces
conséquences sont codifiées dans les articles de la commission du droit
international, voir art. 30 et 31. Mais comment engager cette
responsabilité ? Qui peut mettre en œuvre ? Et quelles sont les modalités
de la réaction ? Il y a-t-il des moyens pour amener les Etats à respecter le
droit international ?

Sur la question de savoir qui peut mettre en œuvre, il y a une obligation


de mettre en œuvre le droit international. L’article 41 des articles de la
commission du droit international aborde ce sujet. C’est le cas où on est
en présence d’une violation grave d’une norme impérative de droit
international. Dans ce cas, il y a une obligation des Etats de réagir. Au
paragraphe 1er de l’article 41, il est indiqué que les Etats doivent
coopérés. C’est un énoncé très général qui figure à cet article. On aura
une approche réaliste du droit international et ça dépendra de la volonté
141
des Etats. Puis il y a d’autres conséquences des violations du droit
international. C’est notamment le cas de la non-reconnaissance de la
situation ainsi que de ne pas porter assistance à la situation litigieuse. Les
Etats ont certaines obligations qui doivent les amener à ne pas prêter ou
avaliser les obligations du droit international. Ce type d’obligation a été
mise en lumière dans l’affaire du mur en territoire occupé en Israël. Selon
la Cour, le mur établi des violations graves du droit international. Il y avait
des violations du droit de la guerre mais aussi du droit humanitaire. Les
Etats tiers ne pouvaient rester de marbre face à cela… Les Etats auraient
prendre des initiatives pour mettre fin à ces violations, ne pas reconnaitre
les effets du mur ni prêter aide ou assistance au maintien du mur. Il y
avait donc dans ce cas des obligations par rapport aux Etats tiers. Ils ne
doivent donc pas agir pour que la situation perdure… Mais dans quelle
mesure peuvent-ils réagir ?

Voici, sur le site de la Cour Internationale de Justice,


une page dédiée à l’affaire du « mur en territoire occupé » en Israël /
Palestine, voir : https://www.icj-cij.org/fr/affaire/131

Sur le fait de savoir dans quelle mesure les Etats tiers doivent agir, il y a
une tendance plus idéaliste. Les articles de la commission ont fait une
distinction entre deux catégories d’Etats. Il y aura d’abord l’Etat lésé et
puis les Etats autres. D’abord, il y a par exemple les traités bilatéraux en
matière de commerce ; Si l’un des Etats ne respecte pas ses obligations
relevant du traité, l’Etat en question pourra mettre en œuvre la
responsabilité. Ensuite, il y a les autres Etats. Dans ce cas, ils pourront
réagir et mettre en cause la responsabilité lorsque sont concernés des
obligations « erga omnes ». Cela veut dire que ça renverra à des
obligations de droit international. Les obligations « erga omnes » et
impératives sont corolaires mais ce ne sont pas deux notions identiques…
S’il y a une violation fondamentale du droit international à titre « erga
omnes », dans ce cas, tout Etat pourra mettre en œuvre la responsabilité.
Dans l’affaire « Hissène Habré – Belgique c. Sénégal », la Cour s’est
penchée sur cette question. Le problème c’est que le Sénégal n’avait ni
142
jugé ni extradé cet homme. La Belgique a invoqué la convention contre la
torture. La Cour avait effectivement un intérêt à agir. La Belgique est Etat
partie à la convention et il s’agissait d’obligations « erga omnes » dés lors
la partie avait intérêt. Dans le cas des massacres de Srebrenica, on trouve
aussi cette dichotomie entre les Etats lésés et qui peuvent agir. La Bosnie
a intenté une requête contre le Serbie devant la CIJ. La Croatie a eu la
même démarche en intentant elle-même une action. La Cour dans le cas
de la Croatie s’est déclarée incompétente. Encore fallait-il avoir une base
de compétence mais il s’agira de voir cela dans le dernier chapitre… Mais il
y a aussi la possibilité que des Etats non-lésés puissent agir. On n’a pas
d’exemple dans le cadre du massacre de Srebrenica. Mais on pourrait se
tourner vers un cas d’actualité… Il s’agit de la requête introduite par la
Gambie à l’encontre de la Birmanie. Il y a des soucis de génocide. Les
actes peuvent être assimilés, selon la Gambie, à des actes de génocide.
L’affaire est en cours (voir lien ci-dessus) mais cela montre que des Etats
non-concernés peuvent valablement, dans ces cas, introduire une
instance. Il suffit de se prévaloir d’Etat partie à la convention et du
caractère « erga omnes » des obligations. On voit que l’on a à l’œuvre une
mise en œuvre idéaliste. L’Etat pour faire respecter des normes tout à fait
fondamentales prendre des initiatives.

Mais il y a-t-il d’autres modalités de réactions ? Dans quelles mesures


peuvent-ils réagir ? (les Etats tiers) Ce sont des réactions qui peuvent être
mise en lien avec la responsabilité internationale. Il y a deux possibilités.
D’abord, les mesures collectives du Conseil de Sécurité ou des mesures
individuelles à savoir des mesures de rétorsion ou d’autres mesures.
Examinons dans quelle mesure ces modes de réactions ont été mobilisées.
La tendance idéaliste dira que l’ensemble des Etats se mobiliseront tandis
que la tendance réaliste dira que ça dépend des rapports de force, des
intérêts des Etats… S’agissant des réactions par rapport à Srebrenica, le
Conseil de Sécurité a adopté des mesures. Au moment où le Conseil a
décrété qu’il y avait une zone de sécurité, le Conseil a identifié comme
responsable les trois protagonistes dont question depuis le début… Dans la
foulée de l’adoption de la Résolution 819/1993, le Conseil a adopté une
Résolution 820/1993 avec un embargo et le gel de fonds internationaux…
C’était, pour la Résolution 820, à l’encontre de la Serbie. Les Etats ont-ils
pris des mesures ? Non. Le Conseil a condamné les massacres et il y a eu
la Résolution 820 mais en réalité c’est quasi tout pour le Conseil mais par
rapport à des Etats au niveau individuel, il n’y a pas eu d’actions. On a
menacé de poursuites et on a demandé à la Serbie d’apporter les
responsables mais sans plus. On pourrait se référer à un cas plus récent.
C’est la réaction face au massacre des Rohingyas… L’Union Européenne a
adopté des mesures restrictives à l’égard du Myanmar. A partir de 2018,
143
des mesures seront adoptées à l’encontre du Myanmar et en particulier
des restrictions de voyages par rapport à des Hauts dignitaires Birmans…
A la fois, il y a probablement de la part de l’UE la volonté de ne pas aider
en ne livrant plus des armes à la Birmanie car on sait que ces armes
seront utilisées contre les minorités mais on pourrait aussi y voir des actes
de rétorsions ou de contres mesures. Les actes de rétorsions sont licites
mais les contres mesures ne le sont à priori pas sauf à y voir une réaction.
Il faut identifier chaque mesure spécifique pour savoir si c’est juste une
marge de manœuvre, une liberté de livrer des armes par exemple. S’il
s’agit de refuser de livrer, l’UE est à priori libre de refuser de livrer des
armes donc ce sont de simples actes de rétorsions. S’agissant des contres
mesures, c’est autre chose… En matière de commerce, tel serait peut-être
le cas. Il y a toute une série de conditions énoncés par la coutume et
codifiée par la commission du droit international pour les contres mesures
mais il est renvoyé à l’ouvrage pour cela…

4. Mise en œuvre de la responsabilité d’organisations internationales

Les organisations sont également des sujets actifs du droit international.


Ces organes sont susceptibles de commettre des violations du droit
international. En 2011, des articles ont été adoptés par la commission du
droit international. Des questions peuvent être soulevées quant au
caractère réellement coutumier des responsabilités des organisations
internationales. Comme on l’a vu, dans le cas des massacres de
Srebrenica, l’ONU a envoyé des forces de maintien de la Paix. Les forces
sont envoyées par des Etats. Il se peut que les bataillons obéissent non
pas à des ordres de l’ONU mais bien de leurs Etats de provenance…

S’agissant du principe de la mise en cause de l’organisation internationale,


c’est codifié pour l’essentiel dans les articles. Il faut d’abord pouvoir
identifier un fait illicite et l’imputer ; Tout comme pour les Etats. C’est à
l’article 6 que l’on retrouve ce principe. C’est le même principe que pour
les Etats. L’organisation sera engagée selon le comportement. Ici on aura
égard au droit interne. Donc, aux traités et au droit dérivé des
organisations. Mais il y a aussi le cas où les Etats fournissent des aides à
l’organisation internationale. C’est l’hypothèse qui est visée par l’article 7.
Il y aura, dans ce dernier cas, la question du contrôle effectif soit des
autorités nationales ou de l’organisation. La responsabilité peut s’avérer
en pratique compliquée à être mise en œuvre. L’organisation a une
immunité. Par principe, les organisations internationales bénéficient d’une
immunité auprès des Etats. Il sera dés lors difficile d’engager la
144
responsabilité en tout cas devant des instances judiciaires des Etats. On
pourrait se tourner vers des juridictions internationales. Soit, il existe des
mécanismes soit il n’y en a pas. Pour Srebrenica, l’ONU était au premier
plan pour protéger les civils. Mais dans quelle mesure l’ONU aurait posé
souci ? Certains civils ont voulus engager la responsabilité de l’OUN
devant des juridictions Néerlandaises. Une action a été intentée en droit
interne sur un fondement de responsabilité civile aux Pays-Bas. Les
tribunaux ont considérés que l’action n’était pas recevable. En effet, selon
les autorités judiciaires, l’ONU bénéficiait d’une immunité. A la suite des
épuisements des voies de recours, ils sont partis devant la CEDH. Ils ont
dits devant la CEDH qu’il y avait une violation du recours effectif. La CEDH
n’a pas suivi l’argument des requérants. La CEDH a dit qu’il fallait
interpréter l’article 6 de la CEDH au regard du fait que l’ONU était connu
pour avoir une immunité. L’ONU a agit dans le cadre du chapitre VII de la
Charte. Les Etats ne pouvaient, dans ce cadre, pas interférer. Par ailleurs,
on ne peut pas invoquer d’autres jurisprudences relatives à d’autres
organisations puisque l’ONU a un rôle très spécifique… L’article 103 de la
Charte des Nations-Unies fait prévaloir le droit des Nations-Unies sur toute
autre disposition. Dés lors, la CEDH, sur tous ces fondements, a rejeté
l’argument. Cette mise en œuvre reste donc lettre morte. Mais existe-il un
moyen détourné ? Pourrait-on invoquer la responsabilité des Pays-Bas ?
L’armée Néerlandaise sur place a remis aux Serbes les Musulmans.
C’était, faut-il le rappeler, soi-disant pour les évacuer. Mais les Pays-Bas
et les forces présentes sur place se doutaient bien du triste sort funeste
qui attendait ces hommes… Dans une certaine mesure, les autorités des
Pays-Bas auraient-elles pu engager leur responsabilité ? Il y avait une
ventilation assez complexe à réaliser pour déterminer ce qui relevait du
contrôle effectif des Nations-Unies ou des Pays-Bas. A un certain moment,
les forces n’ont plus répondu qu’aux autorités des Pays-Bas et plus
particulièrement le 11 juillet à 23h. Jusqu’à cette heure-là, il n’y avait pas
de faute… Néanmoins, pour une partie des civils, les juridictions ont
considérées que les forces Néerlandaises auraient pu ne pas remettre… La
Cour suprême des Pays-Bas a, par un calcul inconnu, estimé que 10% des
hommes auraient pu échapper au massacre. Dés lors, il y a eu une
responsabilité à concurrence de ce pourcentage… Au final, c’est donc très
complexe…
145

La vidéo YouTube de ce chapitre est disponible


e nsuivant ce lien, voir :
https://www.youtube.com/watch?v=BypdQ0uZVNg

XIV. Le règlement amiable des différends

Nous abordons la dernière étape de ce parcours en pleine mer


internationale du droit international et de toutes ses facettes… Il s’agit du
règlement pacifique des règlements.

Cette fois, le morceau musical diffusé est un collage de chants Palestiniens


et un discours qui présente la déclaration universelle des droits de
l’homme… Le morceau est intitulé « In 1948 » et le groupe se nomme
« checkpoint 303 », voir :
https://www.youtube.com/watch?v=muI7fVuWSZw

C’est en 1948 que l’Etat d’Israël a été créé. Mais c’est à la même date
qu’à été prise la convention universelle des droits de l’Homme. A partir de
mai 1948, des populations ont été « contraintes » à l’exode.

Une page Wikipédia relate ce qui serait l’histoire d’Israël mais ce sujet est
si sensible que le lecteur est renvoyé à son libre examen et sa critique…
Voir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_d%27Isra%C3%ABl
146

(Pour des raisons de mise-en-page, les deux drapeaux n’ont pas pu être mis sur la même ligne…
Désolé…)

Il y a une obligation de régler les différends à l’amiable. Cette obligation


se retrouve à l’article 2, paragraphe 3 de la Charte des Nations-Unies.
Nous nous demanderons, comme toujours, si nous sommes dans une
perspective idéaliste ou réaliste.

Nous allons examiner la mise-en-œuvre de ces mécanismes au travers du


conflit Israélo-Palestinien. A ce jour, le conflit n’est malheureusement
toujours pas réglé… Le conflit trouve sa source aussi dans un conflit entre
Israël et certains Etats Arabes. On va examiner la manière dont été
mobiliser les mécanismes de règlements des différends.

Il faut faire une mise en contexte… On peut dater le début du conflit à


1917 c’est-à-dire le moment où le gouvernement Britannique rend public
la déclaration Balfour. Cette déclaration dit que Balfour se dit favorable à
la création d’un Etat d’Israël. C’est une déclaration à tendance
« sioniste ». Il s’agissait d’un appui au mouvement « sioniste ». L’idée
était d’adhérer à la création d’un foyer national juif… Cette déclaration
intervient en pleine première guerre mondiale. Mais elle intervient aussi
au moment où les forces Britanniques alors opposées à l’Empire Ottoman
s’apprêtent à envahir la Palestine… Les Anglais voulaient prendre le
contrôle de la Palestine. La Palestine a été sous mandat confié par la
Société des Nations, c’était la « Palestine Mandataire ». Le gouvernement
147
est chargé de favoriser un foyer national juif en Palestine. Toutefois, le
mandataire reçoit également mission de conserver les droits des
personnes sur place à savoir, en l’occurrence, à l’époque, une majorité
d’Arabes Palestiniens… Ils seront confrontés à toute une série de troubles
internes. Il y aura au fur et à mesure une série de conflits entre les
immigrants juifs et les arabes sur place… Ce qui sera, en tout état de
cause, un gros souci à gérer pour le mandataire Anglais… Ils vont une fois
favoriser une partie puis l’autre. Au sortir de la 2ème Guerre Mondiale, les
Britanniques vont se « débarrasser » de la question. Ils révoqueront leur
mandat et demanderont aux Nations-Unies qui vient d’être créée de gérer
le partage des territoires. L’Assemblée Générale adopte, en 1947, le plan
de partage. Il s’agit d’une proposition qui vise à créer un Etat Arabe d’un
côté et un Juif de l’autre. La proportion était sensée être de 46% pour la
partie Arabe et 54% pour la partie Juive… En 1948 alors que le mandat
Anglais prend fin, Israël fait sa déclaration d’indépendance. Il y a eu dans
la foulée du plan de partage des guerres civiles entre les sionistes et les
arabes. Cela a débouché, en mai 1948, à la susdite déclaration
d’indépendance d’Israël. Cela ouvrira un conflit international avec une
intervention plus directe des Etats Arabes. L’Etat d’Israël va conquérir
toute une série de territoires en plus que ce qui était alloué dans le plan
de partage… L’issue de ces combats sera donc favorable à Israël. Ils vont
désormais contrôler 78% du territoire de la Palestine. Il y aura des
accords de cesser le feu… Il y aura, en 1949, un certain nombre d’accords
d’armistices qui sont sensés être provisoires. En réalité, ce sera assez
permanent. Il y aura cette « ligne verte ». Cette ligne est donc sensée
être provisoire et constitue la « ligne verte » ; Celle-ci séparera Israël de
la Cisjordanie ou de Gaza. La Cisjordanie passera sous le contrôle de la
Jordanie tandis que Gaza passe sous contrôle Egyptien. La situation reste
assez stable jusqu’en 1967 avec une montée des tensions entre Israël et
les Etats Arabes et en particulier l’Egypte et la Syrie. Il n’est pas
nécessaire de s’étendre sur le fait de savoir qui a commencé à l’époque
puisque cette question est très largement débattue et controversée. C’est
ce que l’on a appelé la guerre des six jours… Israël prendra possession de
toute une série de territoires Arabes dont notamment Gaza, Jérusalem
Est, la Cisjordanie mais également le plateau du Golan qui appartenait à la
Syrie mais aussi le Sinaï qui appartenait à l’Egypte ou encore des
territoires reconnus comme Libanais… A l’issue de cette guerre, le Conseil
de Sécurité adopte la Résolution 242. Cette Résolution demande à Israël
de mettre fin à l’occupation des territoires Arabes occupés à la suite de la
guerre et d’un autre côté, il est prévu qu’il faut des accords pour avoir des
frontières sures et reconnues. En dépit d’un certain nombre de
négociations, les choses restent en l’Etat. En 1973, l’Egypte tente de
forcer la reprise du territoire. C’est ce que l’on appelle la guerre du Sinaï.
Sous l’administration Carter, on aura un accord en 1979 entre l’Egypte et
148
Israël. Du côté Palestinien, il y aura une première intifada entendez un
soulèvement à partir de 1987. En Cisjordanie et à Gaza, ça se produit… Il
y aura un processus avec une conférence à Madrid en 1991. Il y aura
aussi des négociations « secrètes ». Ces accords seront favorables tant à
Israël qu’à la Palestine qui est « représentée » par l’OLP (organisation
pour la libération de la Palestine). Il y aura des reconnaissances
mutuelles. Il y a un accord d’Oslo en 1993 avec un « soutien » des Etats-
Unis. Il devrait y avoir, selon les accords d’Oslo, une certaine autonomie
des territoires Palestiniens et un aboutissement final dans les 5 ans…
Toutefois, il n’y aura toujours rien d’abouti… Les dernières négociations
sérieuses ont eu lieu en 2001 avec des accords sous l’impulsion du
Président Clinton et Obama… Il y a eu le fameux « accord du siècle » qui
était présenté par l’administration Trump. Ce projet se détachait très fort
des approches précédentes. Ce « projet » (qui n’a jamais abouti) allait fort
dans le sens Israël et reprenait très peu les revendications
Palestiniennes… On peut dire que l’on en est là aujourd’hui. En 1988, la
Palestine a déclaré son indépendance. La Palestine a été admise, en 2012,
comme Etat observateur aux Nations-Unies. La Palestine est à ce jour
reconnue par 130 Etats. Notamment de très nombreux Etats
s’(abstiennent de reconnaitre cet Etat…

Le mandat en question est disponible sur le


site des Nations-Unies, voir : https://www.un.org/unispal/wp-
content/uploads/2017/05/C-529-M-314-1922-VI_BI.pdf

Nous allons examiner une série de questions… En premier, quelle est la


portée exacte du règlement amiable des conflits ? Dans quelle mesure
s’agit-il d’un régime autonome ? Est-il lié à d’autres principes ? Renvoi-il à
d’autres principes ? Ensuite, en second lieu, il y aura la question du libre
choix des règlements pacifiques des différends. Cela renverra au choix
souverain de l’Etat. Tertio, on aura un mécanisme judiciaire du règlement
amiable… C’est le recours à la CIJ. Et enfin, on se demandera dans quelle
mesure il y a une fragmentation du droit international qui conduirait à des
149
solutions incohérentes…

1. Dans quelle mesure la règle du règlement pacifique


des conflits est-elle autonome ? Quelle est sa
portée ?

Nous nous demanderons dans quelle mesure la règle du règlement


pacifique est autonome… Il y aura donc d’abord les rapports entre les
différentes possibilités. En droit international, le règlement pacifique des
conflits est un corolaire de l’interdiction du recours à la force et ce, surtout
à la suite de l’adoption de la Charte des Nations-Unies à la sorte de la
seconde Guerre Mondiale. Il était encore admissible avant de régler des
différends en utilisant les forces armées. L’interdiction du recours à la
force est quasi absolue sauf les exceptions prévues par la charte. Dés lors,
les Etats doivent régler pacifiquement leurs conflits. Cet élément se
retrouve dans un cas qui est l’adoption de la Résolution 242, précitée.
Dans ce contexte, on constate que dans le préambule, le Conseil fait une
allusion directe à l’interdiction pour Israël d’acquérir des territoires avec le
recours à la force… Dans la foulée, le Conseil fait une allusion à l’article 2
de la Charte. On trouve une expression de ce rappel dans le dispositif de
la Résolution puisque au point 3, il est mentionné que le Conseil désigne
un envoyé spécial au Moyen-Orient pour faire en sorte que les parties
négocient et acceptent un règlement pacifique des différends. Donc, le
Conseil dit que l’on ne peut pas avoir recours à la force pour obtenir un
territoire et qu’il faudra, en cas de litiges divers, utiliser le règlement
amiable. Mais il y a aussi les contres mesures… C’est le cas où un Etat
considèrera qu’un autre Etat aura violé le droit international. Les mesures
qui ne sont pas militaires sont licites en droit international. S’il s’agit d’une
rétorsion, c’est licite en droit international. Si l’on parle de l’embargo des
Etats Arabes à l’égard d’Israël, il s’agit de contres mesures et il se pourrait
que ça soit illicite… Enfin, il faut pointer le rapport entre le principe de
règlement pacifique des différends et la mise en œuvre des règlements
devant des tribunaux. En réalité, le règlement amiable ne sera pas
spécialement autonome. La Cour permanente de Justice a donné une
définition du différend. Il s’agissait du cadre de la Palestine mandataire à
savoir sous mandat Britannique. La définition a été donnée dans le cadre
de l’affaire des concessions « NAVROMATIS » à Jérusalem. Le différend
est défini de manière très large en disant qu’il s’agit d’une opposition
entre les parties sur des points de fait ou de droit. Dés qu’il y a la moindre
contestation entre Etats, on aura l’enclenchement de la « procédure ». Ca
renvoi vers d’autres règles du droit international. Il n’y a pas de contenu
très précis des obligations relatives à ce principe. En réalité, il y a un
150
renvoi vers le consentement des Etats… Les Etats ont le choix des modes
de règlement.

2. Le choix souverain du mode de règlement pacifique


des conflits

On peut se référer, à cet égard, à l’article 33 de la Charte des Nations-


Unies. Celui-ci établi une liste non-exhaustive de modes de règlements
pacifiques des différents. Il n’y a aucune forme de hiérarchie dans ces
modes. C’est à la libre disposition des Etats. On ne doit passer par un
avant de passer à l’autre. Toute une série de dénominations sont
mentionnées mais ils ne relèvent pas d’un régime juridique spécifique. Il
n’y a donc pas en réalité de règles formelles entourant ces différents
comme la médiation, la conciliation, le « bon office »… Dans la pratique,
on a plutôt une approche peu formaliste. ON peut combiner soit de
manière parallèle soit successive les différends modes de règlement des
différends sans que l’on doive obéir à des règles précises en la matière.

De manière générale, on distingue deux grandes modes de règlements.


Tout d’abord, les modes diplomatiques. Ils font appel à la négociation sous
toute une série de formes qui vise à aboutir à un accord entre Etats.
Ensuite, le mode judiciaire. Il s’agira là de soumettre le litige à un tiers
indépendant dans le cadre d’une procédure judiciaire. Ce tiers adoptera
une décision qui s’imposera aux Etats.

Nous allons commencer par les modes diplomatiques. Il y a toute une


série de modes diplomatiques qui sont mentionnés à l’article 33 de la
Charte des Nations-Unies. On peut constater que l’élément central dans le
mode diplomatique, c’est la négociation. Il s’agit de faire négocier les
Etats parties afin d’aboutir à une solution afin de mettre fin au litige qui
les opposent. On peut se référer dans le cadre du conflit Israélo-
Palestinien aux accords d’Oslo. Il y avait donc un accord entre Israël et
l’OLP avec le concours des Etats-Unis et de la Norvège. On a des accords
de 1993 qui sont le fruit de négociations. Ces accords qui prévoyaient un
régime intérimaire avec une autonomie confiée aux Palestiniens qui
auraient pu administrer un certain nombre de territoires prévoyaient aussi
un cadre pour des négociations futures. Ce n’était donc qu’un accord
intermédiaire. Il prévoyait des négociations futures pour aboutir à un
règlement futur définitif. Les points sur lesquels il devait encore y avoir un
accord étaient précisés. Il s’agissait du statut des territoires Palestiniens
151
occupés et leurs frontières, dans ce cadre le sors des colonies, le statut de
Jérusalem, la question de la sécurité Israélienne mais aussi le statut des
réfugiés Palestiniens. Dans la déclaration de principe, on identifie
clairement les points qui feront l’objet de négociations mais aussi certains
paramètres des négociations. Comme nous pouvons le lire à l’article 1er de
la déclaration de principe, il y a un renvoi à l’application des Résolutions
242 et 338 du Conseil de Sécurité des Nations-Unies. La Résolution 338
est à un appel à cesser le feu. La Résolution 242 prévoit qu’Israël doit se
retirer et chaque Etat se verra reconnaitre des frontières sures et stables.
On a donc le principe de ce que l’on nome les territoires contre la paix. En
réalité, ces Résolutions font l’objet d’interprétations divergentes de la part
d’Israël et de la Palestine. On a des principes de droit international qui
laissent une grande place à la discussion. Chaque partie en fonction de ses
alliés, de sa position… pourra faire jouer la négociation dans un sens ou
l’autre. Dans ce cadre, il apparait que ce serait Israël qui serait « en
position de force ». En effet, sur le terrain Israël bénéfice d’un soutien
extrêmement fort de la part des Etats-Unis qui concourent aux
négociations. De l’autre côté, la Palestine est en position plus « faible ».

Il y a ensuite l’enquête qui est prévue toujours à l’article 33 de la Charte.


S’il y a un différend entre Etats, il pourrait y avoir un souci quant à
l’établissement des faits. Par exemple, savoir ce qu’il s’est passer
exactement ; Qui a passé le premier la frontière ? Il peut être nécessaire
pour faire avancer une solution pacifique aux différends d’avoir une
solution sur les faits qui se sont passés. Ce mécanisme d’enquête
permettra de déterminer avec certitude ce qu’il s’est passé. Dans la
pratique, les mécanismes d’enquête font aussi appel à des mécanismes
juridiques ; Il s’agira de qualifier les faits sur le plan juridique. Nous avons
aussi un exemple dans le cadre de ce conflit. Il y a eu l’incident de la
flottille. Cela s’est passé en mai 2010. Un certain nombre de bateaux
affrétés par des ONG avaient envoyés par des ONG pour « briser le blocus
de la bande de Gaza ». Il s’agissait d’apporter des fournitures, du
matériel, de la nourriture… Des gardes côtés ont fait aborder le convoi. Il
s’en est suivi des conflits violents sur le bateau. Il y a eu des morts qui
étaient des nationalité Turque. La Turquie a dés lors demandée des
comptes à Israël. Israël a violé e droit international. Les deux Etats ont
chacun établis une commission d’enquête nationale. Ils sont arrivés à des
conclusions différentes. Pour aplanir le différend, le Secrétaire Général des
Nations-Unies a proposé aux parties d’établir une commission d’enquête
des Nations-Unies pour établir de manière objective les faits. Cela s’est
appelé la Commission Palmer du nom du Président de ladite commission.
En septembre 2011, un rapport a été rendu. Ils ont tentés de qualifier les
152
faits juridiquement et d’objectiver ces faits. Ils ont aussi demandés
d’arriver à une conciliation et à cette fin il y a toute une série de
recommandations. En 2016, un accord a été trouvé entre Israël et la
Turquie pour mettre fin au différend. D’un côté, Israël a payé un certain
dédommagement aux familles des victimes qui avaient trouvées la mort
sur ce bateau. De l’autre côté, la Turquie s’est engagée à mettre fin à
toute une série de procédures judiciaires en cours pour tenter d’engager la
responsabilité d’Israël. Entre temps, d’autres conflits sont apparus mais
c’est une autre histoire…

Sur le site des Nations-Unies dédié à la


question de la Palestine et sur le site général des N.U., il y a notamment
les documents suivants :

➢ La demande de Commission d’enquête émanent du Parlement


Européen : Microsoft Word - Document2 (un.org) Mais la proposition se retrouve
également sur le site du Parlement Européen :
https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/B-7-2010-0385_FR.html
➢ Sur le site Nations-Unies, une liste des commissions d’enquêtes internationales dont
certaines qui concernent Israël et la Palestine, voir la rubrique à ce sujet sur la page
suivante : Commissions et organismes d’enquête | Conseil de sécurité des Nations Unies
➢ La demande du Conseil de sécurité de créer une commission d’enquête : Le Conseil demande
une enquête prompte, impartiale et crédible sur l’opération militaire israélienne en mer
contre un convoi se dirigeant vers Gaza | Couverture des réunions & communiqués de presse
➢ Le rapport « Palmer » est difficilement trouvable mais en voici des
éléments sur le site Wikipédia… :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Rapport_Palmer

Un autre mécanisme diplomatique est la médiation. C’est aussi visé à


l’article 33 de la Charte. Il s’agit, pour un tiers, qu’il s’agisse d’un Etat ou
d’une personne, de rapprocher le point de vue des parties en faisant des
offres de solutions. On a déjà mentionné la médiation Américaine dans le
cadre des accords d’Oslo, précité. On peut aussi prendre l’exemple du
153
médiateur Folke Bernadotte. C’est un médiateur Suédois qui avait été
désigné à la suite du partage de 1948 et envoyé sur place pour rencontrer
les parties prenantes et trouver des aménagements au plan de partage et
le rendre plus praticable sur le terrain. Il faut constater qu’au cours de sa
mission, il a été assassiné par groupe sioniste extrémiste, le groupe
STERN. Ce groupe ne voulait pas que la situation soit mise en cause. On
constate que la médiation apparaitrait comme idéaliste mais il y a la
réalité des faits… On pourrait faire référence de l’autre côté aux attentats
terroristes commis par le Hamas pour tenter de faire bloquer les accords
d’Oslo. On constate aussi que les Etats-Unis jouent un rôle important dans
les médiations relatifs à Israël et la Palestine mais cela n’a pas été couvert
de succès. Ils sont toutefois un allié d’Israël ce qui amène à ce qu’ils
donnent une position plus en faveur d’Israël. On y voit donc des rapports
de force et donc une perspective réaliste du droit international. Le
caractère biaisé de la médiation Américaine a culminé sous la Présidence
Trump. En effet, dés son entrée au pouvoir, il a annoncé vouloir mettre un
terme au conflit mais rapidement il s’est montré en rupture complète avec
les négociations telles qu’elles avaient été menées avant. Il s’est
notamment écarté du droit international. Il a également vu les
Palestiniens quitter la table des négociations. Malgré cela, le Président
Trump, au début 2020, a publié ce qu’il a appelé l’accord du siècle…
C’était le document « Peace to prosperity ». En réalité, il ne faisait
quasiment qu’avaliser les positions d’Israël… Notamment, il y avait la
faculté, dans ce document, pour Israël d’annexer de très larges territoires
dont toutes les portions sur lesquelles sont installées les colonies d’Israël.
On voit donc que la médiation ne permet pas toujours d’aboutir à une
solution équitable et « raisonnable ».

L’article 33 de la Charte fait également référence en son paragraphe 2 à la


possible intervention du Conseil de Sécurité. Et effectivement, il y a eu
une production importante du Conseil de Sécurité. Il y a notamment eu la
Résolution 242 déjà citée plusieurs fois. L’on peut y voir une perspective
idéaliste. C’est un organe des N.U. qui pourra faire des propositions. Il
pourra lui-même établir un certain nombre de paramètres pour que les
parties règlent leurs différends. Mais il s’agit d’un organe politique. Ce qui
renvoi aux rapports de force. Donc ce qui renvoi à une perspective
réaliste. En effet, il y a des membres permanents au Conseil dont les USA.
L’on sait également que les USA ont opposés leurs vétos à des Résolutions
du Conseil. C’est un tableau contrasté qu’il faut faire pour ce mode de
règlement.
Il y a ensuite la possibilité de faire un recours aux organisations
154
régionales. C’est-à-dire qu’une organisation régionale peut tenter de
régler le conflit entre ses membres. Cette hypothèse ne peut pas se
rencontrer dans le cadre du conflit. En effet, Israël ne fait partie d’aucune
organisation régionale ce qui fait échec à ce mode de règlement. Ce qu’on
peut malgré tout mentionner ce sont des initiatives de la ligue Arabe. Ils
ont adoptés en 2002 l’initiative de paix Arabe. C’était une proposition de
règlement du conflit. Il était proposé de normaliser les relations. La
plupart des Etats Arabes ne reconnaissent pas Israël mais en échange
d’une normalisation des relations, il était proposé la création et la
reconnaissance de la Palestine sur base de la « ligne verte » (1967).
D’autres questions en litige étaient abordées aussi à savoir les réfugiés et
Jérusalem. Israël n’a pas pris en compte cette proposition. L’on voit, à
travers ce dernier exemple, la tendance réaliste.

3. Les règlements judiciaires dans le cadre des


règlements pacifiques des différends

Il s’agit de confier la solution au litige. Il s’agira d’un arbitre ou de Cours &


Tribunaux internationaux. Sur le principe, on voit une perspective
idéaliste. En effet, il s’agirait d’appliquer strictement les règles du droit
international avec une personne tierce au conflit qui serait donc
totalement indépendante et dotée de compétences tout à fait spéciales
pour l’application du droit international. Ce serait la « puissance » du droit
international. Toutefois, il y a lieu de fortement nuancer le propos. En
effet, les modes juridictionnels sont soumis à l’acceptation préalable des
Etats concernés. Dans la réalité des faits, il y a un nombre très limité de
différends qui vont trouvés une fin heureuse via le mode juridictionnel.

Mais quels sont ces modes ? Le plus traditionnel et le plus ancien est
l’arbitrage. Il s’agit de conclure, entre les Etats parties, un compromis
d’arbitrage qui va établir un tribunal arbitral. Cela laisse une large
autonomie aux Etats. En effet, ils pourront déterminer la procédure à
suivre, l’identité des arbitres dans une certaine mesure. Généralement, à
ce sujet, chaque Etat nommera un arbitre et un troisième arbitre sera
désigné. Les Etats pourront s’entendre sur les délimitations du droit
applicable. C’est donc un mécanisme très spécifique qui permet donc aux
Etats une très large autonome. Il est surtout apparu et a été utilisé
fortement au XIXème et au début du XXème siècle. Toutefois, il existe
encore beaucoup de procédures dans certains domaines comme celui du
commerce international ou de la protection internationale des
investissements. Avant d’introduire une requête, on aura tendance à
155
utiliser l’arbitrage. Dans le cadre du conflit en Israël et Palestine, on aura
un exemple. Il s’agit de la problématique avec l’Egypte. Dans le cadre du
conflit des six jours, après la guerre du Kippour, un traité a été conclu. Le
Sinaï devant être rendu à l’Egypte moyennant une série de garanties de
sécurité et il fallait également établir de manière très précise sur le terrain
la frontière entre Israël et l’Egypte. La délimitation de la frontière
internationale devait se faire à travers un balisage. Sur une certaine zone,
il n’a pas pu y avoir d’accord. Pour y arriver, ils ont mis en œuvre un
arbitrage qui était prévu à l’article 7 du traité de paix entre Israël et
l’Egypte. Il y avait donc une clause d’arbitrage. Le tribunal s’est prononcé
sur la délimitation exacte des frontières.

Au-delà de l’arbitrage, on a d’autres modes. Il y a des mécanismes


régionaux. On pensera notamment à la Cour de Justice de l’Union
Européenne, la Cour Européenne des Droits de l’Homme, la Cour
interaméricaine des Droits de l’Homme… Il y a aussi des Cours qui sont
universelles mais qui ont des compétences spécialisées comme le tribunal
international pour le droit de le mar. Mais on va surtout se concentrer sur
le cas de la Cour Internationale de Justice qui a de prime abord une
compétence universelle et qui peut traiter de quasi tous les sujets. Et elle
aura compétence sur tous les Etats des Nations-Unies. On verra si la CIJ
aura une tendance idéaliste ou volontariste (réaliste). De manière
schématique, la compétence de la CIJ se découpe en deux grands volets.
Il y a la compétence contentieuse par laquelle la Cour tranche des conflits
entre Etats et la compétence d’avis par laquelle elle donne des avis sur
des questions qui lui sont posées par les Nations-Unies ou d’autres
institutions spécialisées et spécialement habilitées. D’abord, la
compétence contentieuse… Il y a le fait d’abord qu’il s’agit de trancher les
conflits entre Etats. Ce sera donc seulement entre Etats. Donc on exclu la
possibilité de résoudre les conflits entre un Etat et une organisation ou
une autre sorte de personne… Il faut souligner que la Cour n’a pas de
compétence générale à l’égard de n’importe quel Etat. En réalité, pour
qu’elle soit compétente, il faut pouvoir se baser sur un consentement des
deux Etats concernés. Le simple fait d’être membre des Nations-Unies et
donc membre au Statut de la Cour ne suffit pas. Il y aura donc un
consentement à la soumission de la compétence. Il y a d’abord la
déclaration facultative de la compétence. De manière générale, l’Etat
acceptera la compétence de la Cour. L’Etat pourra émettre des réserves
ou limitations. On pourra donc moduler la compétence de la Cour à cet
égard. On voit qu’il y a une minorité d’Etats qui reconnaissent la
compétence de la Cour. La France ou les Etats-Unis ont retirés la
déclaration. Il y a aussi la possibilité d’insérer une clause compromissoire
dans un traité. La clause permettra dans le cadre de ce traité de donner
156
compétence à la Cour. Elle aura compétence uniquement pour ce traité. Il
y a aussi la conclusion d’un compromis entre Etats. Après la naissance
d’un différend, les Etats se mettront d’accord pour soumettre à la Cour un
litige particulier. Enfin, il y a aussi la possibilité d’introduire une requête
devant la Cour. Et il faudra avoir espoir que l’Etat mis en cause accepte de
se soumettre à cette requête. C’est toutefois super limité dans ce cas…

Si l’on tente d’appliquer mes modes d’introduction d’instance devant la


Cour au cas d’Israël et de la Palestine, on pourra relever que les
possibilités sont fortement réduites. S’agissant de l’Etat d’Israël, il faut
constater qu’il n’a pas fait de déclaration général facultative. Il faut aussi
constater qu’Israël a pour pratique de faire de manière systématique des
clauses compromissoires aux traités qu’il a ratifié. Il y a notamment la
convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de
discrimination. Tant Israël que la Palestine sont parties à ce traité. A
certains égards, on pourrait penser que cette convention serait pertinente
puisque les Palestiniens estiment que la population de Palestine est traitée
de manière discriminatoire dans le cade de ce conflit. Ils feraient l’objet de
mesures de ségrégation dans le cadre de choses qui sont faites par Israël
dans les territoires occupés. Cette convention contient une clause
compromissoire en son article 22. Toutefois, Israël a déclaré qu’il ne se
considérait pas lié par l’article 22. Dés lors, il n’est pas possible de saisir la
Cour sur l’application de cette convention. Ce qui pourrait malgré tout être
possible ce serait d’aller chercher d’autres Etats concernés ou impliqués
pour soumettre à la Cour. En effet, il arrive que certains Etats soient
concernés par des actions menées par Israël. Un tel cas s’et produit il y a
peu. En effet, l’administration Trump a reconnu Jérusalem comme étant la
capitale d’Israël en ce compris Jérusalem Est. Pourtant, des Résolutions
des Nations-Unies reconnaissent Jérusalem Est comme étant un territoire
occupé. L’administration Trump a décidé de déménager son ambassade de
Tel-Aviv à Jérusalem. Ce qui n’a pas manqué de provoquer de
nombreuses réactions notamment de la Palestine mais aussi d’autres
Etats… L’Assemblée Générale des Nations-Unies a également réagit. La
Palestine a invoqué la convention de Vienne sur les relations
diplomatiques et consulaires. Les USA sont parties au traité. La Palestine
et les USA sont parties à un protocole facultatif qui donne compétence à la
Cour… La Palestine considère que l’installation de l’ambassade à Jérusalem
contrevient à la convention précitée. La Palestine a donc pu trouver une
base de compétence pour protester. Ici c’était en relation avec les USA
mais il s’agit d’un élément central à savoir le statut de Jérusalem. Sur la
possibilité d’introduire une instance, il y a deux soucis. D’abord, c’est
entre Etats. Mais est-ce que la Palestine est un Etat ? La Cour devrait
trancher la question. De ce point de vue, il y a la déclaration
157
d’indépendance de la Palestine ainsi qu’à son adhésion comme non-
membre / observateur aux N.U.. Cela renvoi au fait que la Palestine n’est
membre des Nations-Unies. Ils ne sont donc pas parties au statut de la
CIJ. Toutefois, la Palestine a utilisé un autre mécanisme qui découle d’une
Résolution du Conseil de Sécurité adoptée en 1946. Il permet à des Etats
de faire une déclaration spécifique qui serait susceptible de donner
compétence à la Cour… On voit ici que la Palestine a envie de se
prononcer sur des questions fondamentales comme son statut d’Etat ou le
statut de Jérusalem. Si la Cour devait faire droit à cette demande, que
pourrait-il se passer ? On voit d’abord que les USA ont tout de suite
dénoncés le protocole facultatif. Ce qui empêchera des requêtes
ultérieures mais ne bloquera pas celle-ci. Sur le fond, on pourrait
envisager le fait que la Cour se prononce dans le sens d’une violation par
les USA. Pour autant, ça pourrait ne rien changer. En effet, on a déjà vu
au travers notamment de l’affaire Nicaragua que les USA s’étaient permis
de ne pas appliquer une décision de la Cour Internationale de Justice. L’on
voit au travers de ces deux derniers points qu’il y a une perspective
réaliste ou volontariste du droit international.

La Cour a une compétence d’avis aussi. C’est énoncé à l’article 96 de la


Charte des Nations-Unies mais aussi à l’article 65 du Statut sur la Cour
Internationale de Justice. La Cour répondra à une question juridique qui
lui sera soumise par des organes des Nations-Unies soit par un organe
spécialement autorisé à lui poser la question. Ce ne sera qu’un avis. Mais
elle se prononce sur l’Etat du droit international. L’organe qui a posé la
question devra donner suite, prendre attitude. Dans le cadre du conflit, il
y a eu l’avis sur la construction du mur. C’était au début des années 2000.
L’Assemblée Générale a condamné cela. Il n’y a pas eu de réaction. Du
coup, il y a eu une question. Les questions étaient de savoir si c’était licite
et si oui quelles étaient les conséquences. La politique de colonisation
était une violation du droit international. Dans cette mesure, puisque le
mur était sensé protéger les colonies d’Israël, il était, selon la Cour,
illicite. Il y a eu aussi des violations du droit humanitaire, droit de
l’occupation, droits humains mais aussi droit à l’autodétermination puisque
l’on peut présager des futures limites des frontières de l’Etat de Palestine.
A charge de l’Etat d’Israël de réparer. Mais il y avait également des
conséquences pour les Etats tiers qui ne sont pas intervenus. Ici on voit
une perspective idéaliste du droit international. Mais il y a le souci des
suites à donner. En effet, il y a eu un registre qui a été mis sur pied pour
pouvoir déterminer les dommages qui seraient réclamés par es
populations. Il y a également eu une Résolution qui a entériné l’avis mais
c’est à peu près tout… L’avis n’a donc pas réellement été suivi d’effets. Le
mur a été continué et terminé. Israël a récusé les conclusions de la Cour.
158
La Cour suprême d’Israël que la construction du mur n’était pas illicite au
regard du droit international… Israël s’est donc retranché derrière ses
propres décisions, de ses juridictions. En son principe, la construction du
mur, selon les juridictions d’Israël, était licite. L’avis est consultable ici. Il
n’a pas reçu réellement de suite. Du coup, on voit ici de nouveau une
perspective réaliste du droit international.

Ci-dessous, deux captures d’écran d’abord de l’article


96 de la Charte des Nations-Unies puis l’article 65 du statut de la CIJ :
159

4. Fragmentation du droit international

Le droit international s’est de plus en plus spécialisé. Il y a souvent des


modes de règlements qui sont appliqués dans une série de domaines. On
a différentes juridictions spécialisées. Comme la Cour internationale sur le
droit de la mer, la CEDH, la Cour interaméricaine sur les droits de
l’Homme, la Cour Africaine sur les Droits de l’Homme, dans le domaine du
commerce l’OMC… Il y a des arbitrages dans les domaines des
investissements. Il pourrait y avoir une spécialisation mais un renvoi aussi
à du droit international général. Il pourrait y avoir un croisement entre
diverses sources du droit. Il pourrait donc y avoir des solutions
incohérentes et des litiges stratégiques… C’est-à-dire qu’ils choisiront en
fonction de leurs intérêts les mécanismes qui conviennent le mieux. La
commission du droit international s’est penchée sur la question. IL y a
notamment le mécanisme d’interprétation conciliante. Dans le cadre du
conflit en Israël et Palestine, il y a des stratégies différentes selon les
acteurs. La Palestine plus faible sur le plan politique mais peut se prévaloir
de règles internationales… Elle tentera de neutraliser les rapports de force.
De son côté, Israël tentera de jouer dans la négociation pour éviter les
recours aux juridictions pour avoir une plus grande maitrise sur la solution
« finale ». S’agissant de la possibilité de la saisine de plusieurs
juridictions, on constate qu’il y a effectivement une série de juridictions
qui ont été saisis d’aspects globaux ou très particuliers. On a l’avis sur le
mur, la saisine concernant l’ambassade des USA, le fait de déférer une
160
situation à la CPI concernant les guerres de Gaza et la politique
d’occupation… Mais on aussi encore plus spécifiquement l’étiquetage sur le
marché Européen devait être attribué. C’est la CJUE qui a dû se pencher
sur la question. Certains ont voulus boycotter les produits venant d’Israël
et là c’est la CEDH qui s’est penchée sur cette question… A l’heure
actuelle, lorsque l’on examine des décisions, il n’y a pour l’instant pas de
contradictions. Au contraire, il y a une tentative de cohérence. La CJUE
pour l’étiquetage s’est référée à un avis de la CIJ. La CEDH a constaté
qu’il y avait des violations du droit international qui pouvaient être
constatés. Il y a encore pendant la requête concernant l’ambassade
Américaine ainsi que la saisine de la CPI. La CPI devra bientôt statuer. Il y
aura la question de l’Etat de Palestine et de son étendue. Dans le cadre de
l’affaire de l’ambassade des Etats-Unis, il y aura aussi la même question
relatif à l’Etat. Il pourrait y avoir des influences entre les deux décisions.

Conclusion et résumé des points de vue concernant ce chapitre :


Les modes de règlement diplomatiques vont vers une perspective réaliste
du droit international. C’est le choix d’introduire le recours et du dernier
mot aussi car il y a la problématique de la suite à donner…
En terme de mode juridictionnel, on a plutôt une perspective idéaliste
mais il y a également le souci des suites à donner…

La vidéo YouTube de ce chapitre est


consultable en suivant ce lien : https://www.youtube.com/watch?v=RWNqneahYhw
161

XV. Réponses aux questions posées durant les


cours oraux

La transcription des réponses arrivera… ASAP…


162

Nous espérons que vous avez apprécié le voyage et espérons vous


revoir très bientôt sur nos lignes idéalistes et réalistes du droit…
Enjoy your law !

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