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COURS DROIT
DES SOCIETES
ET DES
ASSOCIATIONS
VALÉRIE SIMONART
DROI-C-4033
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Fanny Streveler MA1 DROIT
PARTIE 1 –
INTRODUCTION
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Fanny Streveler MA1 DROIT
CHAPITRE 1 :
PANORAMA
GENERAL
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Fanny Streveler MA1 DROIT
NOTIONS
Une société est constituée par un acte juridique par lequel une ou plusieurs personnes,
dénommées associés, font un apport. Elle a un patrimoine et a pour objet l’exercice d’une ou
plusieurs activités déterminées. Un de ses buts est de distribuer ou procurer à ses associés un
avantage patrimonial direct ou indirect1.
Toute société doit donc avoir pour but de distribuer ou procurer à ses associés des avantages
patrimoniaux directs ou indirects mais elle peut avoir d’autres buts. Le législateur a ainsi visé les
sociétés qui poursuivent un but social ou prennent en compte des considérations écologiques.
Le bénéfice ou l’avantage patrimonial direct est celui qui ajoute à la fortune des associés (il s’agit
essentiellement des dividendes) ; le bénéfice ou l’avantage patrimonial indirect est celui qui leur
procure une économie (par exemple, dans certaines sociétés coopératives, les actionnaires de la société
sont également ses clients et perçoivent des ristournes en fonction du montant de leurs achats à la société ;
le seul bénéfice qu’ils retirent de leur participation à cette coopérative est l’économie ainsi réalisée).
On verra que le but lucratif de certaines sociétés coopératives (notamment celles agréées comme
entreprises sociales) est pour le moins ambigu.
Outre la société simple (livre 4), qui n’a pas la personnalité juridique, le CSA réglemente la SNC et la SComm
(livre 4), la SRL (livre 5), la SC (livre 6) et la SA (livre 7). Il comporte également des dispositions relatives à la
SE (livre 15), à la SEC (livre 16) et au GEIE (livre 18), qui sont au premier chef régis par des règlements
européens2.
Une association est constituée par une convention entre deux ou plusieurs personnes, dénommées
membres. Elle poursuit un but désintéressé dans le cadre de l'exercice d'une ou plusieurs activités
déterminées qui constituent son objet. Elle ne peut distribuer ni procurer directement ou
indirectement un quelconque avantage patrimonial à ses fondateurs, ses membres, ses
administrateurs ni à toute autre personne sauf dans le but désintéressé déterminé par les statuts3.
Outre les associations sans personnalité juridique, qui ne sont pas réglementées par le CSA, le CSA
réglemente l’ASBL (livre 9) et l’AISBL (livre 10). Cette dernière se caractérise par la dimension internationale
de son but.
Le CSA comporte également des dispositions relatives aux partis politiques européens, qui sont au premier
chef régis par un règlement européen4.
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Une fondation est une personne morale dépourvue de membres, constituée par une ou plusieurs
personnes, dénommées fondateurs. Son patrimoine est affecté à la poursuite d'un but désintéressé
dans le cadre de l'exercice d'une ou plusieurs activités déterminées qui constituent son objet. Elle
ne peut distribuer ni procurer, directement ou indirectement, un quelconque avantage patrimonial
à ses fondateurs, ses administrateurs ni à toute autre personne, sauf dans le but désintéressé
déterminé par les statuts5.
Le CSA réglemente deux types de fondations, la fondation privée et la fondation d’utilité publique (livre 11).
Cette dernière se caractérise par son but qui doit être philanthropique, philosophique, religieux, scientifique,
artistique, pédagogique ou culturel.
Le CSA comporte également des dispositions relatives aux fondations politiques européennes, qui sont au
premier chef régis par un règlement européen6.
CLASSIFICATIONS
Certaines classifications intéressent quasi toutes les entités. On les appellera les classifications générales. On
en retiendra ici six, fondées sur la jouissance ou non de la personnalité morale, sur l’existence ou non de
membres, sur l’étendue de la responsabilité des associés ou membres, sur le but, sur le droit applicable
(européen ou national) et sur la taille.
D’autres ne concernent que certaines entités. On les appellera les classifications spéciales. On en retiendra
trois, au sein des sociétés, fondées sur l’existence d’un régime de protection du capital ou des capitaux
propres, la cessibilité des titres et l’admission des titres sur un marché réglementé.
Ces classifications ont essentiellement un but didactique : l’appartenance d’une entité à l’une ou l’autre
catégorie commande une série de règles différentes.
1. CLASSIFICATIONS GÉNÉRALES
Personne juridique
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B. Existence de membres
Toutes les entités indiquées dans le tableau qui précède se composent de membres, à l’exception
des fondations, qui sont des masses de biens affectées à un but déterminé.
Toutes les entités composées de membres indiquées dans le tableau qui précède doivent avoir au
moins deux membres (associations)/associés (sociétés), à l’exception des SRL et des SA (qui
peuvent avoir un seul membre), des SC (qui doivent avoir au moins 3 membres) et des SCE (qui
doivent en principe avoir au moins 5 membres).
Ainsi, dans les sociétés simples et les associations sans personnalité morale, les associés ou les
membres sont responsables de tous les engagements de ces sociétés ou associations sur leur
patrimoine personnel.
Au sein des personnes morales, on distingue celles dans lesquelles les associés ou membres
n’engagent pas leur responsabilité, celles dans lesquelles ils la limitent à leur apport et celles dans
lesquelles ils sont responsables de tous les engagements de la personne morale.
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Les membres de l’organe d’administration et les délégués à la gestion journalière n’engagent jamais
en cette qualité leur responsabilité personnelle envers les tiers pour les obligations contractuelles
de la personne morale (comp. avec l’hypothèse où un administrateur est personnellement tenu des
obligations contractuelles qu’il a contractées en excédant ses pouvoirs).
En effet, ils peuvent être tenus soit parce qu’ils s’engagent volontairement (en qualité de caution par
exemple), soit parce qu’ils ont commis une faute, en abusant de leur position (abus de biens sociaux
par exemple), soit encore en une autre qualité (responsabilité en qualité de fondateur ou d’administrateur
par exemple).
La levée du voile social peut également conduire à la responsabilité des associés ou des membres.
Les lignes qui suivent doivent être lues en ayant à l’esprit ces tempéraments.
Personnes morales dont la responsabilité des actionnaires est limitée à leur apport :
La société anonyme (SA) est « une société dotée d’un capital et dans laquelle les actionnaires
n’engagent que leur apport »7.
La société à responsabilité limitée (SRL) est « une société dépourvue de capital dont les actionnaires
n’engagent que leur apport »8.
Comme la SRL, la société coopérative (SC) est une société dépourvue de capital dont les
actionnaires n’engagent que leur apport9. Elle se caractérise par le fait que des actionnaires
peuvent être admis, démissionner ou être exclus sans modification des statuts.
La société anonyme européenne, aussi dénommée « Societas Europaea » (SE), est régie par le
Règlement n°2157/2001 du Conseil du 8 octobre 2001 relatif au statut de la société européenne
(SE).
Elle est « une société dont le capital est divisé en actions » et dont « chaque actionnaire ne
s’engage qu’à concurrence du capital qu’il a souscrit »10.
La société coopérative européenne (SCE) est régie par le Règlement n°1435/2003 du Conseil du 22
juillet 2003 relatif au statut de la société coopérative européenne.
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Elle est une société dont le capital est représenté par des parts11 et dans laquelle, sauf dispositions
contraires des statuts, chaque membre ne s’engage qu’à concurrence de son apport 12. La limitation
de la responsabilité est donc la règle mais les statuts peuvent y déroger.
La société en commandite (SComm) est également conçue comme une variante (avec personnalité
morale) de la société simple. Elle se caractérise par l’existence de deux catégories d’associés : les
commandités, qui engagent leur responsabilité illimitée et solidaire (comme les associés en nom
collectif) et les commanditaires, qui limitent leur responsabilité à leur apport mais qui ne peuvent
pas prendre part à la gestion14.
Sous réserve de l’existence de deux catégories d’associés, la société en commandite est fort
semblable à la société en nom collectif.
Le groupement européen d'intérêt économique (GEIE) est régi par le Règlement n° 2137/85 du 25
juillet 1985 relatif à l'institution d'un groupement européen d'intérêt économique.
Les membres d’un GEIE ne doivent pas faire d’apport.
En contrepartie, chaque membre du GEIE est indéfiniment et solidairement responsable des
engagements du GEIE.
Sociétés Associations
Personnes morales / ASBL
caractérisées par l’absence de AISBL
responsabilité des membres Parti politique européen
pour les engagements de la
personnes morale
Personnes morales SRL /
caractérisées par la limitation SC
de la responsabilité de leurs SA
associés à leurs apports SE
SEC (mais les statuts peuvent
prévoir la responsabilité illimitée des
membres)
Personnes morales SNC /
caractérisées par la GEIE
responsabilité illimitée de
leurs associés pour leurs
engagements
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D. En fonction du but
Le CSA utilise la distribution de bénéfices ou l’octroi d’avantages patrimoniaux aux associés ou
membres comme critère distinctif entre, d’une part, les sociétés et, d’autre part, les associations et
fondations.
Outre ce but lucratif ou désintéressé, certaines personnes morales se caractérisent par le but
spécifique qui leur est imparti par le législateur :
- La SCE et la SC ont pour but principal la satisfaction des besoins et/ou le développement des
activités économiques et/ou sociales de leurs membres, notamment par la conclusion
d'accords avec ceux-ci en vue de la fourniture de biens ou de services ou de l'exécution de
travaux dans le cadre de l'activité que la société exerce ou fait exercer. Ces sociétés peuvent
aussi avoir pour objet de répondre aux besoins de leurs membres en favorisant, de la même
manière, leur participation à des activités économiques dans une ou plusieurs autres
sociétés15.
- La SC agréée comme entreprise sociale doit avoir pour but principal, dans l’intérêt général, de
générer un impact sociétal positif pour l’homme, l’environnement ou la société16.
- Le GEIE doit avoir pour but « de faciliter ou de développer l’activité économique de ses
membres, d’améliorer ou d’accroître les résultats de cette activité ; il n’est pas de réaliser des
bénéfices pour lui-même. Son activité doit se rattacher à l’activité économique de ses
membres et ne peut avoir qu’un caractère auxiliaire par rapport à celle-ci ». Compte tenu de ce
but spécifique, combiné à l’absence d’obligation des membres de faire un apport, le Règlement
n°2137/85 considère qu’il ne s’agit pas d’une société (cinquième considérant). Le législateur
consacre cependant le livre 18 du CSA au GEIE.
- La fondation d’utilité publique doit tendre à la réalisation d’une œuvre à caractère
philanthropique, philosophique, religieux, scientifique, artistique, pédagogique ou culturel 17.
- L’AISBL doit poursuivre un but d’utilité internationale18.
Le droit des sociétés et le droit des associations diffèrent au sein des pays membres de l’Union
européenne mais, en matière de sociétés, il existe une relative harmonisation à la suite de la
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transposition des directives en matière de sociétés (par définition, une directive n’est pas
directement applicable mais doit être transposée par les législateurs nationaux).
Le GEIE, la SE et la SCE ne peuvent avoir comme membres que des personnes ressortissant de
l’Union européenne et doivent avoir au moins deux membres d’Etats différents de l’Union
européenne.
A l’inverse d’une directive, un règlement est directement applicable dans tous les Etats membres et
obligatoire dans tous ses éléments, sans que les Etats aient le pouvoir d’y déroger ou même de les
transposer.
C’est ainsi qu’outre par les règlements précités, les SE, les SCE, le GEIE, les partis politiques
européens et les fondations politiques européennes sont également régis par les livres 15, 16, 18 et
17 du CSA.
Les petites sociétés sont les sociétés dotées de la personnalité juridique qui, à la date de bilan du
dernier exercice clôturé, ne dépassent pas plus d’un des critères suivants :
- nombre de travailleurs, en moyenne annuelle : 50 ;
- chiffre d’affaires annuel, hors TVA : 9.000.000 EUR ;
- total du bilan: 4.500.000 EUR19.
Les microsociétés sont les petites sociétés dotées de la personnalité juridique qui ne sont pas une
société filiale ou une société mère et qui à la date de bilan du dernier exercice clôturé, ne
dépassent pas plus d’un des critères suivants :
- nombre de travailleurs, en moyenne annuelle : 10 ;
- chiffre d’affaires annuel, hors TVA : 700.000 EUR ;
- total du bilan: 350.000 EUR 20.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
On appellera les sociétés qui dépassent plus d’un critère fixé pour les petites sociétés les grandes
sociétés.
Les très grandes sociétés sont celles qui, à la date de clôture de leur bilan, dépassent le nombre
moyen de 500 salariés sur l’exercice ou un total de bilan de 17 millions EUR ou un chiffre d’affaires
de 34 millions EUR21.
Cette classification revêt une importance considérable car le type de sociétés détermine les règles
applicables dans toute une série de matières :
- En matière comptable : les petites sociétés qui ne sont pas des sociétés cotées ou des entités
d’intérêt public ont la faculté d’établir leurs comptes annuels selon un schéma abrégé fixé par
le Roi22 ; les microsociétés ont la faculté d’établir leurs comptes annuels selon un microschéma
fixé par le Roi23 ; en outre, les petites sociétés qui ont adopté la forme d’une société SNC ou
d’une SComm ont la faculté de ne pas déposer leurs comptes annuels à la BNB24.
- En matière de transparence : les petites sociétés qui ne sont pas des sociétés cotées ou des
entités d’intérêt public ne doivent pas établir de rapport de gestion25 ; les entités d’intérêt
public et les très grandes sociétés doivent inclure dans leur rapport de gestion une déclaration
non financière26.
- En matière de contrôle : les petites sociétés ne doivent pas désigner de commissaire27.
- En matière de responsabilité des administrateurs : les plafonds en matière de limitation de
responsabilité des administrateurs (infra) recoupent partiellement les seuils précités.
ASBL et fondations :
Le CSA classe les associations en quatre types en fonction de leur taille : les micro-associations, les
petites associations qui ne dépassent pas plus d’un critère visé à l’article 3:47, § 2, les petites
associations qui dépassent plus d’un critère visé à l’article 3:47, § 2 et les autres associations.
- Les micro-associations sont les petites associations qui, à la date du bilan du dernier exercice
clôturé, ne dépassent pas plus d’un des critères suivants : nombre de travailleurs, en moyenne
annuelle : 10 ; chiffre d’affaires annuel, hors taxe sur la valeur ajoutée : 700.000 EUR ; total du
bilan : 350.000 EUR28.
- Les petites associations sont les associations qui, à la date du bilan du dernier exercice clôturé,
ne dépassent pas plus d’un des critères suivants : nombre de travailleurs, en moyenne
annuelle : 50 ; chiffre d’affaires annuel, hors taxe sur la valeur ajoutée : 9.000.000 EUR ; total
du bilan : 4.500.000 EUR 29.
- Le CSA opère au sein des petites associations une distinction entre celles qui, à la date du bilan
du dernier exercice clôturé, dépassent ou ne dépassent pas plus d’un des critères suivants : un
nombre de travailleurs en moyenne annuelle de 5 ; 334.500 EUR pour le total des recettes,
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autres que non récurrentes, hors taxe sur la valeur ajoutée ; 1.337.000 EUR pour le total des
avoirs ; 1.337.000 EUR pour le total des dettes 30.
- Les autres associations sont celles qui dépassent plus d’un des critères fixés pour les petites
associations. On les appellera les grandes associations.
Cette classification revêt une importance considérable car le type d’association ou de fondation
détermine la règle applicable dans toute une série de matières :
- En matière comptable : d’une part, les micro-associations et les micro-fondations peuvent
établir leurs comptes annuels suivant un micro-schéma déterminé par le Roi32 et les petites
associations et fondations qui ne dépassent pas plus d’un des critères visés à l’article 3:47, § 2
ou 3:51, § 2 peuvent établir leurs comptes annuels conformément à un modèle simplifié
déterminé par le Roi et plus généralement tenir une comptabilité simplifiée33 ; d’autre part,
seules les petites associations et fondations qui dépassent plus d’un des critères visés à l’article
3:47, § 2 ou 3:51, § 2 du CSA et les grandes associations et fondations doivent déposer leurs
comptes à la Banque nationale de Belgique34.
- En matière de transparence : seules les grandes associations et les grandes fondations doivent
rédiger un rapport de gestion35.
- En matière de contrôle : seules les grandes associations et les grandes fondations doivent
désigner un commissaire36.
- En matière de conflits d’intérêts : les petites ASBL qui dépassent plus d’un des critères visés à
l’article 3:47, § 2 et les grandes ASBL doivent appliquer, en cas de conflits d’intérêts, des règles
plus sévères que les autres ASBL37. Cette différence n’existe pas pour les fondations38.
- En matière de responsabilité des administrateurs : d’une part, l’article XX.227 du CDE
(responsabilité des administrateurs en cas de poursuite d’une activité déficitaire) n’est pas
applicable aux micro-associations et aux micro-fondations ainsi qu’aux petites associations et
fondations qui ne dépassent pas plus d’un des critères visés à l’article 3:47, § 2 ou 3:51, § 2 ;
d’autre part, les plafonds en matière de responsabilité des administrateurs (infra) recoupent
partiellement les seuils précités39.
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2. CLASSIFICATIONS SPÉCIALES
A. Règles de protection du capital ou des capitaux propres
Le capital est le montant égal à la valeur de l’ensemble des apports en numéraire et en nature au
moment où ces apports sont effectués.
Ce montant est représenté par un chiffre au passif du bilan qui ne peut être modifié que par une
augmentation ou une réduction de capital. Il s’agit donc d’un montant abstrait, qui ne correspond à
la valeur des apports que le jour de la constitution de la société et qui ne renseigne pas sur la valeur
de la société.
Alors que, sous l’empire du Code des sociétés, les SPRL, les SCRL, les SA et les SCA étaient dotées
d’un capital, sous l’empire du CSA, seules les SA sont dotées d’un capital (outre les SE et les SCE).
Le capital des SA fait l’objet de mesures imposées par la loi quant à sa formation (minimum imposé
par la loi, apports uniquement en espèces ou en éléments d’actif susceptibles d’évaluation
économique, règles spéciales applicables aux apports,...) et son maintien (règles en matière de
distribution de bénéfices, de rachat d’actions propres,...).
Bien que n’étant pas dotées d’un capital, les SRL et les SC sont soumises à un régime fort proche de
celui des SA : les « capitaux propres » jouent un rôle fort semblable à celui du capital.
A l’exception de l’exigence d’un minimum fixé par la loi, du type d’apport pouvant être fait et du
régime des quasi-apports, le CSA a étendu la plupart des règles applicables au capital des SA aux
capitaux propres des SRL et des SC (plan financier, intervention du notaire, règles en matière de
distribution des bénéfices, procédure de la sonnette d’alarme,...).
Les actions de la SRL ne peuvent en principe être cédées qu’à certaines conditions mais les statuts
peuvent rendre ses actions librement cessibles. Une SRL peut même faire admettre ses actions à la
négociation sur un marché réglementé (cette hypothèse est cependant assez théorique).
Sociétés dont les actions ou les parts ne peuvent pas être rendues librement cessibles :
Les actions d’une SC ne sont cessibles qu’à certaines conditions. Une SC ne peut pas faire admettre
ses actions à la négociation sur un marché réglementé40.
Les parts des SNC et des SComm sont en principe incessibles mais les statuts ou les associés
peuvent admettre la cession à certaines conditions.
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Société cotée :
La société cotée est celle dont les actions, les parts bénéficiaires ou les certificats se rapportant à
ces actions sont admis aux négociations sur un marché41 réglementé42. Les seuls marchés
réglementés en Belgique sont Euronext Brussels et le marché des instruments financiers dérivés
d’Euronext Brussels. Le Roi peut étendre les dispositions qui s’appliquent aux sociétés cotées aux
sociétés dont les actions ou les certificats se rapportant à ces actions sont négociés sur un système
multilatéral de négociation (MTF) ou sur un système organisé de négociation43. L’arrêté royal du 29
avril 2019 comporte des dispositions en ce sens pour l’acquisition de titres propres.
Le CSA exclut de la définition de société cotée les sociétés dont seules les obligations sont admises
aux négociations sur un marché réglementé.
Les seules sociétés pouvant être cotées sont les SRL, les SA et les SE.
Il s’ensuit que toute société cotée est une entité d’intérêt public, mais l’inverse n’est pas exact.
41 Soit un marché visé à l’article 3, 7°, de la loi du 21 novembre 2017 relative aux infrastructures des marchés
d’instruments financiers et portant transposition de la directive 2014/65/UE.
42 CSA, art. 1:11, al. 1.
43 CSA, art. 1:11, al. 2.
44 CSA, art. 1:12.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
Par exemple, une SA dont les obligations sont négociées sur Euronext Brussels n’est pas une société cotée
mais est une entité d’intérêt public.
Certaines dispositions du CSA s’appliquent uniquement aux sociétés cotées ou aux sociétés non
cotées ou aux entités d’intérêt public.
Par ailleurs, les règles de convocation aux assemblées générales diffèrent dans les sociétés cotées
et non cotées.
AGRÉMENT
Le Code des sociétés réglementait la société agricole et permettait à toute société dotée de la
personnalité morale d’avoir une finalité sociale plutôt qu’un but lucratif. La société à finalité sociale
n’était donc pas une forme distincte de société mais une société organisée par le Code des sociétés
(dans la plupart des cas, une SCRL) qui choisissait une finalité sociale.
La loi du 23 mars 2019 a modifié ce système. Elle a supprimé la société agricole et la société à
finalité sociale mais permet à certaines sociétés de se faire agréer, à certaines conditions, comme
entreprise agricole ou comme entreprise sociale.
Le principal intérêt de l’agrément comme entreprise agricole tient à une règle particulière pour
l’application de la loi sur le bail à ferme : l’exploitation à titre d’associé gérant d’une SNCEA,
d’associé commandité d’une SCommEA, d’administrateur d’une SRLEA ou d’administrateur d’une
SCEA, est assimilée à l’exploitation personnelle. Cette règle s’applique tant au preneur qu’au
bailleur47.
SC agréée :
Une SC dont le but principal consiste à procurer à ses actionnaires un avantage économique ou
social, pour la satisfaction de leurs besoins professionnels ou privés, peut être agréée en
application de la loi du 20 juillet 1955 portant institution d’un Conseil national de la Coopération,
de l’Entrepreneuriat social et de l’entreprise Agricole et de ses arrêtés d’exécution.
Elle ajoute à la dénomination de sa forme légale le terme « agréée » et est désignée en abrégé « SC
agréée »48.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
Une telle SC doit ajouter à sa dénomination les termes « société coopérative agréée comme
entreprise sociale » et est désignée en abrégé « SC agréée comme ES » si son but principal ne
consiste pas à procurer à ses actionnaires un avantage économique ou social pour la satisfaction de
leurs besoins professionnels ou privés49.
L’article 8:5, § 2, ajoute qu’ « une société coopérative dont le but principal ne consiste pas à
procurer à ses actionnaires un avantage économique ou social, pour la satisfaction de leurs besoins
professionnels ou privés, et qui est tant une société coopérative agréée visée à l’article 8:4 qu’une
société agréée en tant qu’entreprise sociale visée au paragraphe 1er, ajoute à la dénomination de sa
forme légale les termes ‘agréée’ et ‘entreprise sociale’ et est désignée en abrégé ‘SCES agréée’ »50.
En d’autres termes, une SC peut cumuler les deux agréments, en tant que « SC agréée » et en tant
que « SC agréée comme ES », et est alors une « SCES agréée ».
On peut s’interroger sur l’intérêt (autre qu’en matière de réputation) d’un tel agrément.
PROTECTION DU LABEL
La forme d’une entité renseigne immédiatement sur une série de règles qui lui sont applicables (par
exemple, si ses associés ou membres engagent ou non leur responsabilité personnelle pour les engagements
de cette entité).
Une personne morale ne peut faire usage dans sa dénomination ni autrement d’une autre forme
légale que celle qu’elle a valablement adoptée51.
Par exemple, une ASBL dont le but est la prévention des pandémies ne pourrait pas choisir comme
dénomination « Fondation de Prévention des Pandémies ».
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Fanny Streveler MA1 DROIT
BÉNÉFICIAIRES EFFECTIFS
Dans le cadre de la législation anti-blanchiment, le CSA impose à toutes les sociétés et à toutes les
personnes morales qu’il régit (à l’exception des partis politiques européens et des fondations
politiques européennes) de recueillir et de conserver les données relatives à leurs bénéficiaires
effectifs, afin d’alimenter une banque de données centralisées, le Registre des bénéficiaires
effectifs (Registre UBO, Ultimate Beneficial Owners). Ce registre a été constitué au sein de
l’Administration générale de la Trésorerie du SFP Finances52.
Les membres de l’organe d’administration qui omettent de procéder à ces formalités s’exposent à
des sanctions pénales53.
Les bénéficiaires effectifs sont la ou les personnes physiques qui, en dernier ressort, possèdent ou
contrôlent la société ou la personne morale.
Sont considérés comme possédant ou contrôlant en dernier ressort une société la ou les personnes
physiques qui possède(nt), directement ou indirectement, plus de 25 % des droits de vote ou des
actions ou du capital ou qui exerce(nt) le contrôle par d'autres moyens. Si ce n’est le cas de
personne, il s’agit de la ou des personnes physiques qui occupent la position de dirigeant principal.
Dans le cas des associations (internationales) sans but lucratif et des fondations, il s’agit des
membres de l’organe d’administration, des personnes habilitées à représenter l'association, les
personnes chargées de la gestion journalière, des fondateurs d'une fondation, des personnes
physiques dans l'intérêt principal desquelles l'association (internationale) sans but lucratif ou la
fondation a été constituée ou opère, ou de toute autre personne physique exerçant par d'autres
moyens le contrôle en dernier ressort54.
Tout citoyen peut consulter les données de ce registre, sur la base du numéro BCE ou du nom de
l’entreprise55.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
HISTORIQUE
1. « ANCIEN » DROIT
A. Sociétés
Code de commerce :
Le Code de commerce de 1807 consacrait le titre III du livre I aux sociétés commerciales.
Les lois coordonnées sur les sociétés commerciales firent à leur tour l’objet de très nombreuses
modifications, notamment en 1973 (pour transposer la première directive), en 1984 (pour transposer la
deuxième directive) et le 13 avril 1995 (acquisition de la personnalité morale subordonnée au dépôt de
l’acte constitutif).
En outre, à côté des sociétés à forme commerciale régies par les lois coordonnées sur les sociétés
commerciales, il y avait les sociétés civiles régies par le titre IX du Code civil (mais qui n’avaient pas la
personnalité morale), les sociétés agricoles régies par la loi du 12 juillet 1979 et les groupements d'intérêt
économique régis par la loi du 17 juillet 1989 (qui furent qualifiés de sociétés par la loi du 13 avril 1995).
Cette codification fut réalisée par la loi du 7 mai 1999 comportant le Code des sociétés.
Le Code des sociétés a intégré les dispositions qui se trouvaient, non seulement dans les lois coordonnées
sur les sociétés commerciales, mais également dans le titre IX du Code civil (titre relatif aux sociétés), la loi
du 12 juillet 1979 (société agricole) et la loi du 17 juillet 1989 (groupement d'intérêt économique). Il a
abrogé les lois coordonnées sur les sociétés commerciales, le titre IX du Code civil, la loi du 12 juillet 1979 et
la loi du 17 juillet 1989.
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CSA :
La loi du 23 mars 2019 introduisant le Code des sociétés et des associations et portant des dispositions
diverses a abrogé le Code des sociétés, sous réserve du droit transitoire.
B. Associations et fondations
La loi du 25 octobre 1919 a accordé la personnalité morale aux associations internationales poursuivant un
but philanthropique, religieux, scientifique, artistique ou pédagogique et la loi du 27 juin 1921 aux
associations sans but lucratif et aux établissements d’utilité publique.
La loi du 25 octobre 1919 et la loi du 27 juin 1921 avaient fait l’objet de relativement peu de modifications
jusqu’à 2019. Les principales modifications résultaient de :
- la loi du 2 mai 2002 sur les associations sans but lucratif, les associations internationales sans but
lucratif et les fondations, qui a modifié en profondeur la loi du 27 juin 1921 (elle a notamment rebaptisé
les établissements d’utilité publique en fondations, en opérant une distinction entre les fondations
privées et les fondations d’utilité publique) et y a intégré les associations internationales (elle a abrogé
la loi du 25 octobre 1919) ;
- la loi du 16 janvier 2003 sur la Banque-Carrefour des Entreprises, qui a prévu l’accomplissement des
formalités de constitution au greffe du tribunal de commerce (désormais, « de l’entreprise »). Cette loi
a été abrogée par le CDE, qui a repris la plupart de ses dispositions.
Sur plusieurs points, ces deux lois avaient dans une certaine mesure aligné le régime des associations et des
fondations sur celui des sociétés (par exemple, en ce qui concerne les modalités de constitution, les actes
accomplis au nom de l’association ou de la fondation en formation, le régime de la nullité).
La loi du 23 mars 2019 introduisant le Code des sociétés et des associations et portant des dispositions
diverses a abrogé la loi du 27 juin 1921, sous réserve des règles de droit transitoire.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
58A condition que son but corresponde à celui prévu par l’article 6:1 du CSA ; sinon, la SCRL doit se transformer en une
autre forme de société (en principe, une SRL).
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A. Architecture du CSA
Le CSA est divisé en 18 livres, plus des dispositions diverses, dont les dispositions abrogatoires (notamment
abrogation du Code des sociétés et de la loi du 27 juin 1921) et les dispositions transitoires (infra).
Les livres 1 à 3 contiennent des dispositions générales applicables tant aux sociétés, qu’aux associations et
aux fondations.
Les livres 4 à 8 comportent des dispositions spécifiques applicables aux sociétés (livre 4 : société simple, SNC
et SComm ; livre 5 : SRL ; livre 6 : SC ; livre 7 : SA ; livre 8 : agrément de sociétés).
Sous réserve des dispositions communes applicables à toutes les personnes morales (livre 2), le législateur a
voulu supprimer les renvois, dans un souci de lisibilité. Cela explique en partie la longueur du CSA. Il n’a
cependant pas évité tout renvoi. Ainsi, pour les SRL cotées, l’article 5:2, alinéa 1er, renvoie aux dispositions
applicables aux SA cotées qu’il énumère.
Les livres 15 à 18 traitent respectivement de la SE, de la SCE, du parti politique européen et de la fondation
politique européenne et du GEIE.
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DROIT TRANSITOIRE
Le système de droit transitoire de la loi du 23 mars 2019 s’articule autour de trois dates clés.
Les sociétés, associations et fondations n’ont pu se constituer depuis cette date que conformément
au CSA et ont été immédiatement soumises à toutes les dispositions du CSA.
Les sociétés, associations et fondations constituées avant cette date pouvaient décider d’appliquer
le CSA par une décision de leur assemblée générale aux conditions de majorité requises pour la
modification des statuts (« opt-in »).
Sont applicables tant les dispositions impératives du CSA (sans possibilité de dérogation par les
statuts : les clauses des statuts contraires sont réputées non écrites) que les dispositions
supplétives (sauf si elles sont contraires à des dispositions statutaires).
Lors de la première modification des statuts, les sociétés, associations et fondations constituées
avant le 1er janvier 2020 devront mettre les statuts en conformité avec le CSA, sauf s’il s’agit d’une
modification des statuts qui résulte de l’utilisation du capital autorisé, de l’exercice de droits de
souscription ou de la conversion d’obligations convertibles.
Il s’agit de la date ultime pour adapter les statuts. Les membres de l’organe d’administration seront
personnellement et solidairement responsables des dommages subis par la personne morale ou par
des tiers résultant du non-respect de cette obligation60.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
Elles restent soumises au Code des sociétés jusqu’à leur transformation, sous réserve de
l’application des dispositions légales impératives qui s’appliquent à la forme de société la plus
proche, notamment ;
- celles applicables à la SA pour la SCA, à l’exception des dispositions du livre 7, titre 4, chapitre
1er (administration), sauf les articles 7:97 et 7:102 (relatifs aux conflits d’intérêts) ;
- celles applicables à la SNC pour la SCRI, au GEIE et à la société agricole qui ne compte pas
d’associés commanditaires ;
- celles applicables à la SComm à la société agricole qui compte des associés commanditaires ;
- celles applicables à la SRL à la SCRL qui ne répond pas à la nouvelle définition de société
coopérative (à l’exception des dispositions du livre 2, titre 7 [Résolution des conflits internes],
du livre 5, article 5:1, titre 5 [Du patrimoine de la société] et titre 6 [Démission et exclusion à
charge du patrimoine social)63.
Le 1er janvier 2024, elles seront transformées de plein droit en la forme prévue par la loi :
- la SCRI et le GIE seront transformés en SNC ;
- la SCA sera transformée en SA avec un administrateur unique ;
- la société agricole sera transformée en SNC ou, si elle compte des commandités, en SComm ;
- la SCRL qui ne répond pas à la définition de SC sera transformée en SRL64.
Dans un délai de six mois à compter du jour de cette transformation de plein droit, l’organe
d’administration devra convoquer une assemblée générale ayant à l’ordre du jour l’adaptation des
statuts à la nouvelle forme légale65. Les membres de l’organe d’administration seront
personnellement et solidairement responsables des dommages subis par la personne morale ou par
des tiers résultant du non-respect de cette obligation66.
23
Fanny Streveler MA1 DROIT
Les SFS qui n’ont pas adopté la forme d’une SCRL et qui souhaitent conserver leur agrément comme
entreprise sociale devront se transformer en SC pour cette date67.
Si elles n’ont pas la forme d’une SC, elles doivent se transformer en SC avant le 1 er janvier 2024
sinon elles perdront leur agrément69.
4. EXCEPTIONS
La loi du 23 mars 2019 prévoit des exceptions au régime de droit transitoire, notamment :
- jusqu’à la prochaine modification de leurs statuts et jusqu’au 1er janvier 2024 au plus tard, les
sociétés dotées d’un comité de direction peuvent le conserver70 ;
- pour les personnes morales qui prévoient dans leurs statuts la compétence de l’organe
d’administration pour déplacer le siège, la loi assimile de plein droit la référence dans les
statuts à l’adresse à laquelle le siège de la personne morale est établi, à une mention en dehors
des statuts, de sorte que, depuis le 1er janvier 2020, l’organe d’administration peut déplacer le
siège pour autant que le transfert n’implique pas de changement de langue (sans modifier les
statuts si le siège est transféré au sein de la même Région, en modifiant les statuts si le siège
est transféré dans une autre Région). Cette adresse sera supprimée des statuts et remplacée
par une mention de la région dans laquelle le siège est établi à l’occasion de la première
coordination des statuts71. Si les statuts ne prévoient pas la compétence du conseil
d’administration pour déplacer le siège, il faut une modification des statuts, mais qui peut être
décidée par l’organe d’administration, pour autant que le transfert n’implique pas de
changement de langue72. Dans tous les cas, si le transfert implique un changement de langue,
l’assemblée générale doit modifier les statuts.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
CHAPITRE 2 :
THEORIES DE LA
GOUVERNANCE
D’ENTREPRISE
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Fanny Streveler MA1 DROIT
Le présent chapitre examine brièvement les principales théories de la gouvernance d’entreprise et les
modèles qu’elles proposent : la théorie de l’agence, le modèle de la primauté de l’actionnaire, le modèle
managérial, le modèle des parties prenantes, la théorie néo-libérale et les mouvements Law and Economics
et Law and Finance. Il explique leur impact sur la gouvernance d’entreprise en général et sur la
responsabilité sociétale des entreprises en particulier.
Ces théories ont eu le mérite d’alimenter la réflexion sur les mécanismes juridiques au cœur du droit des
sociétés, notamment par la prise en compte de considérations économiques. Un glissement s’est toutefois
produit dans la mesure où elles postulent un modèle unique d’entreprise et ont été parfois invoquées pour
légitimer un modèle de gouvernance, alors qu’elles restent relativement abstraites et que la réalité est
beaucoup plus nuancée.
La confrontation entre ces théories et les modèles qu’elles proposent reste cependant d’actualité, d’autant
que beaucoup font le parallèle entre la situation dans laquelle a émergé la théorie de la primauté de
l’actionnaire et celle qui prévaut aujourd’hui.
NOTIONS
Depuis les années nonante, la gouvernance a inspiré la réflexion par les régulateurs, à tous les
niveaux (mondial : OCDE ; européen : Commission ; législateurs nationaux), sur les principes qui
sous-tendent la législation sur les sociétés et, en particulier, les équilibres sociétaires et leur propre
rôle à cet égard, en vue de dégager un « modèle » d’organisation. Cette réflexion concerne les
sociétés mais la plupart des principes qui sont dégagés sont tout aussi valables pour les associations
et les fondations.
Un des avantages de ces codes par rapport à la loi est leur faculté de s’adapter beaucoup plus vite
aux évolutions.
La responsabilité sociétale des entreprises (RSE) (« corporate social responsibility », CSR) désignait
initialement l’intégration volontaire, par les entreprises, de préoccupations sociales et
environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations avec leurs parties prenantes,
au-delà des obligations juridiques qui leur incombent.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
Toutefois, compte tenu de la multiplication des obligations imposées aux sociétés en la matière,
cette définition a évolué vers « la responsabilité des entreprises pour les impacts de leurs décisions
et de leurs activités sur la société et sur l’environnement » ou, en d’autres termes, la responsabilité
des sociétés vis-à-vis des parties prenantes (la notion de « responsabilité » est ici entendue de
manière éthique et non juridique dans le sens de prise de responsabilité vis-à-vis de la société en
général et des parties prenantes).
Plus précisément, les entreprises doivent intégrer dans leur stratégie, leurs décisions et leurs
activités les questions relatives à l’organisation de l’entreprise ainsi que les préoccupations en
matière sociale (conditions du travail), environnementale, éthique, de droits de l’homme, de
consommateurs, de loyauté des pratiques (corruption,...) ; adopter un comportement éthique et
transparent ; avoir égard aux communautés et contribuer au développement local et au
développement durable (défini comme le développement qui répond aux besoins du présent sans
compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs) ; respecter les lois en
vigueur, les conventions collectives et les normes internationales de comportement .
Pour chacune de ces questions, l’entreprise doit identifier et traiter les domaines d’actions qui sont
pertinents pour ses activités. Certaines d’entre elles concernent toutes les entreprises (notamment
la gouvernance et la loyauté des pratiques) ; d’autres dépendent dans une large mesure du secteur
d’activités : par exemple, pour une société immobilière, la corruption et l’environnement sont généralement
des questions plus sensibles que le respect des droits de l’homme.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
Le cadre régissant la RSE consiste en des recommandations et des standards internationaux, ainsi
que des codes de conduite adoptés par les sociétés (sous des appellations diverses : code d’éthique
ou de déontologie, charte, règlement interne ou d’ordre intérieur...).
THÉORIES ET MODÈLES
1. THÉORIE DE L’AGENCE
De manière générale, la théorie de l’agence concerne les problèmes qui peuvent se poser entre le
représentant (l’« agent ») et le représenté (le « principal ») en raison du fait qu’ils ne sont pas
sensibles aux mêmes risques et poursuivent des buts différents (les termes « représentant » et
« représenté » étant ici entendus dans un sens large, non juridique).
Dans une entreprise, de nombreux conflits d’agence peuvent survenir : entre l’employeur et les
travailleurs, entre les dirigeants et les actionnaires, entre la banque et les épargnants,…
Cette théorie fait l’inventaire de ces problèmes, en décrit les conséquences et propose des
solutions.
Dans les petites entreprises, dans lesquelles les actionnaires et les dirigeants se confondent, il n’y a
par définition aucun risque de divergence entre les actionnaires et les dirigeants.
Cette dispersion des actionnaires et cette séparation entre la propriété et le pouvoir entraînent un
renforcement des pouvoirs des dirigeants et l’apparition de problèmes dits « d’agence » en raison
des divergences d’intérêts entre les propriétaires et les dirigeants.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
Aux Etats-Unis, l’actionnariat des grandes sociétés est fort dispersé, de sorte que les conflits
d’agence sont des conflits « classiques », entre les actionnaires et les dirigeants.
Il peut s’agir de divergences entre la poursuite d’une stratégie à long terme par les dirigeants et les
perspectives à court terme des actionnaires. Par exemple, quand une société a réalisé des bénéfices, les
dirigeants peuvent souhaiter les mettre en réserve pour réaliser des projets déterminés ou faire face à des
risques identifiés tandis que les actionnaires peuvent vouloir les distribuer immédiatement.
Il peut également s’agir d’une appréciation différente des risques, due au fait que les dirigeants
poursuivent généralement une stratégie à long terme et ont accès à davantage d’informations que
les actionnaires, qui, n’étant pas impliqués dans le fonctionnement de la société, peuvent ne pas
comprendre certaines décisions.
A l’inverse, et cette situation est beaucoup plus malsaine, il peut arriver que les dirigeants aient
intérêt à maximaliser les bénéfices à court terme parce que leur rémunération en dépend et
privilégient ainsi leurs intérêts personnels au détriment des intérêts à long terme des actionnaires.
D. Mécanismes de gouvernance
La théorie de l’agence invite à prévoir des mécanismes pour réduire ces conflits, aligner les intérêts
des dirigeants sur ceux des actionnaires et en définitive protéger les actionnaires.
De tels mécanismes font partie de la gouvernance de la société (transparence pour assurer l’accès des
actionnaires à l’information et la bonne communication entre les dirigeants et les actionnaires ; reporting ;
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Fanny Streveler MA1 DROIT
diversité au sein de l’organe d’administration ; plans d’intéressement des dirigeants à long terme pour les
inciter à prendre en considération la performance à long terme de la société ;…).
Ce modèle trouve son origine dans un article publié en 1931 par Adolf A. BERLE, Professeur à la
Columbia Law School, sur toile de fond de la Grande Dépression et des efforts du Gouvernement
américain de sortir de la crise. Dans cet article, BERLE affirma que « tous les pouvoirs accordés à
une société ou à la direction d'une société (...) sont nécessairement et à tout moment exerçables
uniquement au bénéfice proportionnel de tous les actionnaires en fonction de leur intérêt ».
Selon BERLE, les sociétés sont des véhicules pour promouvoir les intérêts des actionnaires. Toute
autre interprétation de la nature des sociétés « irait à l'encontre de l'objet et de la nature même de
la société ». Les dirigeants sont les « trustees » (administrateurs) des actionnaires et ont un devoir
fiduciaire d’exercer leurs pouvoirs au bénéfice de ces actionnaires.
Selon DODD, les dirigeants doivent tenir compte non seulement des intérêts des actionnaires mais
également des intérêts des travailleurs, des consommateurs et du public en général. Les dirigeants
sont les « trustees » non des actionnaires mais de la communauté.
DODD devint ainsi le promoteur du modèle managérial de gouvernance, qui fait confiance aux
dirigeants pour prendre les meilleures décisions dans l’intérêt des actionnaires.
Par rapport au modèle de la primauté de l’actionnaire, il semble en effet garantir une certaine
égalité puisque tous peuvent avoir accès au pouvoir grâce à la connaissance et à l’expérience,
plutôt que par l’héritage. Il semble aussi protéger les actionnaires contre la tyrannie d’un
paterfamilias.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
Le modèle managérial s’est heurté à la crise économique et aux scandales financiers des années
septante, remettant en cause le mythe de dirigeants efficaces, professionnels, attentifs aux intérêts
des actionnaires.
Il repose sur une conception de la société comme un nœud de contrats et un réseau complexe de
relations entre une série de parties.
Bien que l’éthique des entreprises soit beaucoup plus ancienne, ce modèle a été développé dans
les années quatre-vingts par Robert E. FREEMAN (à ne pas confondre avec le gourou de la théorie
néo-libérale, FRYDMAN ; voir ci-après), qui a forgé le terme « stakeholder » par opposition au
terme « stockholder » (actionnaire).
Il postule que la RSE serait créatrice de plus-value dans trois domaines : économique (profit pour
les actionnaires), social et environnemental.
31
Fanny Streveler MA1 DROIT
l’entreprise en question. Tous ces éléments ont des effets positifs, à moyen et à long terme, sur la
position de l’entreprise sur le marché. Par ailleurs, la RSE peut être synonyme de surcroît
d’efficacité dans la gestion de l’entreprise, par exemple par la réalisation d’économies en matière
de matériaux, de déchets, de consommation d’eau et d’énergie et par la réduction de produits
dérivés superflus ainsi qu’en termes de transport,... Pour toutes ces raisons, la RSE profite à la
réputation et à l’image de l’entreprise ».
4. THÉORIE NÉOLIBÉRALE
La théorie néolibérale s’est développée à partir des années septante. Elle s’oppose radicalement
tant au modèle managérial qu’au modèle des parties prenantes.
Elle est synthétisée par ces lignes de Milton FRIEDMAN, Prix Nobel d’Economie 1976 :
« Il n'y a qu'une seule et unique responsabilité sociale de l'entreprise : utiliser ses ressources et
s'engager dans des activités destinées à augmenter ses profits tant qu'elle reste dans les règles du
jeu, c'est-à-dire s'engager dans une concurrence ouverte et libre sans tromperie ni fraude ».
Dans cette théorie, la réglementation des sociétés ne se justifie que par la performance
économique finale.
Qu’on en juge par ces lignes de M. FRIEDMAN sur la responsabilité sociétale des entreprises :
« Dans un système de libre entreprise et de propriété privée, un dirigeant d'entreprise est un
employé des propriétaires de l'entreprise. Il est directement responsable devant ses employeurs.
Cette responsabilité consiste à mener l'entreprise conformément à leurs désirs, qui seront
généralement de gagner autant d'argent que possible tout en se conformant aux règles de base de
la société, tant celles qui sont consacrées par la loi que celles qui sont consacrées par les usages
éthiques. (...)
Bien entendu, le chef d'entreprise est aussi une personne à part entière. En tant que personne, il
peut avoir de nombreuses autres responsabilités qu'il reconnaît ou assume volontairement - envers
sa famille, sa conscience, ses sentiments de charité, son église, ses clubs, sa ville, son pays. Il peut
se sentir poussé par ces responsabilités à consacrer une partie de ses revenus à des causes qu'il
considère comme dignes, à refuser de travailler pour certaines sociétés, voire à quitter son emploi,
par exemple pour rejoindre les forces armées de son pays. Si nous le souhaitons, nous pouvons
qualifier certaines de ces responsabilités de "responsabilités sociales". Mais à ces égards, il agit en
tant que mandant et non en tant qu'agent ; il dépense son propre argent, son temps ou son
énergie, et non l'argent de ses employeurs ou le temps ou l'énergie qu'il s'est engagé à consacrer à
leurs objectifs. S'il s'agit de "responsabilités sociales", ce sont les responsabilités sociales des
individus, et non des entreprises.
Que signifie le fait que le chef d'entreprise a une "responsabilité sociale" en tant qu'homme
d'affaires ? Si cette déclaration n'est pas purement rhétorique, elle doit signifier qu'il doit agir d'une
manière qui n'est pas dans l'intérêt de ses employeurs. Par exemple, il doit s'abstenir d'augmenter
32
Fanny Streveler MA1 DROIT
le prix du produit afin de contribuer à l'objectif social de prévention de l'inflation, même si une
augmentation du prix serait dans l'intérêt de l'entreprise. Ou qu'il doit faire des dépenses pour
réduire la pollution au-delà du montant qui est dans l'intérêt de l'entreprise ou qui est requis par la
loi afin de contribuer à l'objectif social d'amélioration de l'environnement. Ou que, au détriment
des bénéfices de l'entreprise, il engage des chômeurs "purs et durs" au lieu d'ouvriers disponibles
plus qualifiés pour contribuer à l'objectif social de réduction de la pauvreté.
Dans chacun de ces cas, le dirigeant d'entreprise dépenserait l'argent de quelqu'un d'autre pour un
intérêt social général. Dans la mesure où ses actions en accord avec sa "responsabilité sociale"
réduisent le rendement des actionnaires, il dépense leur argent. Dans la mesure où ses actions
augmentent le prix pour les clients, il dépense l'argent des clients. Dans la mesure où ses actions
font baisser les salaires de certains employés, il dépense leur argent. (...)
Mais la doctrine de la "responsabilité sociale" prise au sérieux étendrait le champ d'application du
mécanisme politique à toute activité humaine. Elle ne diffère pas, sur le plan philosophique, de la
doctrine la plus explicitement collective. Elle ne diffère qu'en professant de croire que les buts
collectivistes peuvent être atteints sans moyens collectivistes. C'est pourquoi, dans mon livre
Capitalisme et liberté, je l'ai qualifiée de "doctrine fondamentalement subversive" dans une société
libre (...) ».
Selon cette théorie, la responsabilité sociétale des entreprises est un exemple de conflit d’agence
entre les dirigeants et les actionnaires : les dirigeants poursuivent avec l’argent des actionnaires des
buts qu’ils déterminent eux-mêmes, au mépris des intérêts des actionnaires.
Selon ce mouvement, le droit peut être expliqué en termes purement économiques. Il constitue un
instrument pour promouvoir l’allocation optimale des ressources et l’efficience économique,
considérées comme un idéal auquel il doit tendre. L’exemple-type d’opération promouvant l’efficience
économique est un contrat de vente dans lequel le vendeur valorise davantage l’argent qu’il reçoit que le bien
qu’il vend et l’acheteur valorise davantage le bien qu’il achète que le prix qu’il paie : chacune des parties est
gagnante (« win-win »).
Ce mouvement est fondé sur la prémisse que les sujets de droit sont des êtres rationnels qui
tendent à maximaliser leur satisfaction individuelle de la façon la plus efficace possible et que le
marché régule spontanément les opérations qui s’y déroulent.
Dans un monde idéal (entendez, dans cette théorie : de concurrence parfaite, sans monopole, où
les mécanismes de marché fonctionnent sans frottements), la régulation par le marché permettrait
d’atteindre cette efficience économique. Le droit serait réduit au principe de la liberté des contrats,
toute autre institution freinant les échanges et induisant des frottements dans les mécanismes du
marché.
« Autrement dit, le rôle du droit, dans cette conception, est d’en avoir le moins possible ».
33
Fanny Streveler MA1 DROIT
Mais comme ce monde idéal n’existe pas, le droit est nécessaire pour promouvoir cette efficience
économique. La norme juridique est « jugée utile (...) dans la mesure où elle encouragera ou
imposera une solution efficace conforme à celle qui aurait prévalu dans une situation idéale de
régulation par le marché ».
En particulier, le droit doit veiller à : interdire les situations de monopoles ; assurer que les contrats
valablement conclus puissent être exécutés ; éviter le report du coût d’un bien ou d’un service sur
des tiers (par exemple en cas de dommage causé à l’environnement) ; favoriser la transparence de
l’information. En substance, il doit tendre à reconstituer la solution qui aurait prévalu dans le
monde idéal du fonctionnement efficace du marché.
Le mouvement Law and Economics privilégie les normes les moins contraignantes : les contrats
ainsi que les codes et chartes de gouvernance d’entreprise plutôt que la loi, le recours à la justice
étant à éviter dans la mesure du possible.
Il trouve son origine dans un article de LA PORTA et al., qui conclut que les systèmes juridiques qui
protègent les actionnaires sont le plus à même d’assurer le développement des marchés. Ces
auteurs ont examiné les règles de protection des actionnaires et des créanciers et le niveau de
cette protection dans 49 pays. Selon ces auteurs, les systèmes de common law (comme les Etats-
Unis et le Royaume-Uni) ont le meilleur niveau de protection et l’actionnariat le plus dispersé tandis
que les systèmes de droit civil (comme la France) ont le plus faible niveau de protection et un
actionnariat plus concentré, l’Allemagne et les pays scandinaves se situant au milieu.
« Comme la protection dont bénéficient les investisseurs détermine leur volonté de financer les
entreprises, le financement des entreprises peut se tourner de manière critique vers ces règles
juridiques et leur application.
Les différences de protection juridique des investisseurs pourraient expliquer pourquoi les
entreprises sont financées et détenues de manière si différente dans les différents pays. Pourquoi
les entreprises italiennes s'introduisent rarement en bourse (Pagano, Panetta et Zingales 1998) ?
Pourquoi l'Allemagne a-t-elle un marché boursier si petit, mais aussi des banques très grandes et
très puissantes (Edwards et Fischer 1994) ? Pourquoi la prime de vote - le prix des actions à droit de
vote élevé par rapport à celui des actions à droit de vote faible - est-elle faible en Suède et aux
États-Unis, et beaucoup plus importante en Italie et en Israël (Levy 1983 ; Rydquist 1987 ; Zingales
1994, 1995) ? En effet, pourquoi les actions russes ont-elles été presque sans valeur
immédiatement après la privatisation - selon certaines estimations, elles étaient 100 fois moins
chères que les actions occidentales adossées à des actifs comparables - et pourquoi les entreprises
russes n'ont-elles pratiquement pas eu accès à des financements extérieurs (Boycko, Shleifer et
Vishny 1993) ? Pourquoi la propriété des grandes entreprises américaines et britanniques est-elle si
largement dispersée (Berle et Means 1932) ? Le contenu des règles juridiques dans les différents
pays peut éclairer ces énigmes de gouvernance d'entreprise ».
34
Fanny Streveler MA1 DROIT
Cet article a cependant fait l’objet de critiques, notamment en raison du paradoxe inhérent à
l’affirmation selon laquelle les systèmes de common law protègent mieux les investisseurs : la
supériorité des systèmes de common law résulterait des règles légales de protection des
actionnaires alors que, par définition, ces systèmes reposent moins sur des lois que les systèmes de
droit civil, de sorte que l’affirmation suivant laquelle « les pays dont les règles juridiques sont issues
de la tradition de common law ont tendance à protéger les investisseurs beaucoup plus que les
pays dont les lois sont issues de la tradition de droit civil, et en particulier du droit civil français »
peut paraître contradictoire.
Il a mis en avant l’importance des conflits d’agence et des risques de détournement des fonds par
les dirigeants, risques parfois jugés théoriques ou sous-estimés jusque-là, et conclu que la
protection légale des investisseurs et la reconnaissance du rôle des larges investisseurs sont des
éléments fondamentaux de la gouvernance d’entreprise.
Cela ne signifie évidemment pas qu’on peut réduire les conceptions actuelles en la matière à ce
mouvement.
A. Intérêt social
L’intérêt social est un concept fondamental de gouvernance d’entreprise : les dirigeants doivent
agir dans l’intérêt social.
Son contenu fait l’objet de controverses : en écho aux théories précitées, schématiquement, on
oppose les définitions centrées sur l’intérêt des actionnaires à celles articulées autour de
l’entreprise.
Les frontières entre ces deux définitions sont cependant floues car on peut comprendre l’intérêt
des actionnaires comme intégrant leurs intérêts à long terme, et ainsi, indirectement, les intérêts
des diverses parties prenantes (travailleurs, prêteurs, société au sens large).
S’inscrivant dans ce dernier courant, la Cour de cassation de Belgique a défini l’intérêt social
comme « le but de lucre collectif des associés actuels et futurs de la société ».
Il s’agit d’un arrêt de principe : pour rejeter le moyen qui invoquait la contrariété d’une clause
d’inaliénabilité à l’intérêt social, la Cour de cassation aurait pu se contenter de répondre que la
35
Fanny Streveler MA1 DROIT
Cette définition est une véritable auberge espagnole : comme elle est muette sur les parties
prenantes, elle renvoie à première vue au modèle de la primauté des actionnaires et de la
maximalisation de ses profits ; en réalité, en visant les associés futurs, elle englobe les intérêts des
parties prenantes, du moins dans la mesure où ils servent les intérêts à long terme des actionnaires.
Cette disposition règle le conflit d’agence qui peut survenir entre les administrateurs et les
actionnaires en reconnaissant une marge d’appréciation aux premiers.
Selon les travaux préparatoires de la loi du 23 mars 2019, ce principe ne déroge nullement au droit
commun : il prend en compte le fait que dans une situation déterminée deux personnes
normalement diligentes et prudentes peuvent raisonnablement adopter des comportements
différents. Tel est notamment le cas en matière de gestion d’une personne morale, qui implique la
prise de décisions pouvant présenter des risques, par exemple en matière d’investissements ou de
désinvestissements stratégiques. Ni les actionnaires ni les juges ne peuvent se substituer aux
administrateurs en émettant des jugements d’opportunité sur la décision prise.
C. Obligations de transparence
Les réflexions en matière de gouvernance d’entreprise ont entraîné le renforcement des obligations
d’information à l’égard des actionnaires, en particulier en droit financier.
Les codes de gouvernance d’entreprise et les chartes de gouvernance d’entreprise ont le mérite,
respectivement, de pouvoir s’adapter rapidement à l’évolution du marché et de pouvoir tenir
compte des spécificités de l’entreprise.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
Le Code de gouvernance d’entreprise (pour les sociétés cotées) a été élaboré par la Commission
Corporate Governance, créée à l’initiative commune de la Commission bancaire, financière et des
assurances, de Euronext et de la Fédération des entreprises de Belgique.
Ce Code s’adresse aux sociétés cotées mais, selon ses termes, peut « également servir de cadre de
référence pour toutes les autres sociétés ». La dernière version de ce Code date de 2019 (le « Code
de gouvernance d’entreprise 2020 »).
Ces Codes revêtent un caractère privé : il ne s’agit pas de lois ou de textes à valeur réglementaire.
En tant qu’ils fixent les règles de bonne pratique des sociétés, ces Codes revêtent cependant un
poids moral considérable : les sociétés qui s’en écarteraient sans pouvoir s’en justifier
s’exposeraient à une réaction négative de la part des investisseurs.
Les sociétés cotées doivent désigner, dans leur rapport de gestion, le code de gouvernement
d’entreprise qu’elles appliquent et indiquer les principes auxquels elles dérogent en s’en
expliquant. Le Roi peut désigner le Code de gouvernement d’entreprise qui s’appliquera73.
Cette formulation est pour le moins hypocrite car, d’une part, il n’existe en droit belge qu’un seul
code de gouvernement d’entreprise susceptible d’être appliqué par les sociétés cotées (le Code
belge de gouvernance d'entreprise) et, d’autre part, l’arrêté royal du 12 mai 2019 portant
désignation du Code de gouvernement d’entreprise à respecter par les sociétés cotées dispose que
les sociétés cotées doivent désigner le Code de gouvernance d’entreprise 2020.
Les sociétés cotées doivent également faire dans leur rapport de gestion une « déclaration de
gouvernement d’entreprise » qui comporte notamment un rapport de rémunération74.
37
Fanny Streveler MA1 DROIT
Une société cotée qui n’indiquerait pas qu’elle applique le Code belge de gouvernance d’entreprise
(hypothèse assez théorique) violerait le CSA et ses administrateurs engageraient leur responsabilité
solidaire.
En revanche, les sociétés non cotées n’ont pas l’obligation légale d’indiquer qu’elles appliquent le
Code Buysse III.
Le Code de gouvernance d’entreprise pour les sociétés cotées comporte des principes généraux
(prise en compte de l’intérêt social) et invite les sociétés à mettre en place diverses structures en
vue d’assurer une bonne gestion, le tout dans la plus grande transparence. Il n’est pas obligatoire
dans tous ses points : il prévoit des principes (obligatoires mais assez élémentaires), des
dispositions (obligatoires, mais auxquelles la société peut déroger en s’en expliquant : comply or
explain).
Par ailleurs, les sociétés cotées doivent établir une politique de rémunération des
administrateurs et autres dirigeants. Cette politique doit contribuer à la stratégie commerciale
de la société, à ses intérêts et à sa pérennité à long terme, et préciser la manière dont elle
contribue à ces objectifs. Elle doit notamment décrire les différentes composantes de la
rémunération et leur importance respective, les critères pour l’attribution de la rémunération
variable, les périodes d’acquisition et, le cas échéant, de conservation des actions quand la
société attribue une rémunération en actions, la durée des contrats avec les dirigeants,... Cette
politique de rémunération doit être approuvée par l’assemblée générale (de même que
chacune de ses modifications importantes et, en tout état de cause, au moins tous les quatre
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Fanny Streveler MA1 DROIT
Le législateur a ainsi veillé à encourager l’engagement à long terme des actionnaires dans les
sociétés cotées :
- en favorisant la communication entre la société et leurs actionnaires (obligation de publicité
dans le chef de la société mais également de tous les intermédiaires qui interviennent dans la
« chaîne » entre la société et ses actionnaires) ;
- en permettant aux sociétés d’identifier leurs actionnaires, en demandant des informations aux
intermédiaires (entreprises d’investissement, établissements de crédit, dépositaires centraux
de titres)78 ;
- en multipliant les possibilités pour les actionnaires de voter (en personne, par voie
électronique, par procuration, par correspondance) ;
- en imposant aux investisseurs institutionnels (entreprises d’assurances et fonds de pension) et
aux gestionnaires d’actifs (établissements de crédit, sociétés d’investissement, sociétés de
gestion d’organisme de placement collectif) qui investissent dans des sociétés cotées :
o d’établir une politique d’engagement qui décrit la manière dont ils intègrent
l’engagement des actionnaires dans leur stratégie d’investissement et assurent le suivi
des sociétés détenues (en matière notamment de stratégie, de performances financières
et non financières, de risques, d’impact social et environnemental, de gouvernance
d’entreprise, de conflits d’intérêts) ;
o de publier dans leur rapport annuel des informations sur la manière dont ils ont mis cette
politique en œuvre et dont ils ont exercé leurs droits de vote ainsi que sur la manière
dont leur stratégie d’investissement en actions est compatible avec leurs propres
engagements et contribue à leurs propres performances ;
o de publier les accords conclus entre investisseurs institutionnels et gestionnaires d’actifs ;
- en imposant aux conseillers en vote (« voting advisors ») qui conseillent les actionnaires
relativement à leurs actions dans les sociétés qui ont leur siège dans un État membre et dont
les actions sont admises à la négociation sur un marché réglementé dans un État membre, de
publier sur leur site web un code de conduite et leurs méthodes de travail (modèles utilisés,
contrôles, gestion des conflits d’intérêts,...)79.
39
Fanny Streveler MA1 DROIT
D’une part, l’article 1:1 énonce que « un de ses buts [de la société] et de distribuer ou de procurer à
ses associés un avantage patrimonial direct ou indirect »80.
L’exposé des motifs vise également des sociétés qui pourraient avoir un « objet désintéressé ».
D’autre part, le CSA subordonne l’agrément des sociétés coopératives en qualité d’entreprises
sociales à ce qu’elles poursuivent « pour but principal, dans l’intérêt général, de générer un impact
sociétal positif pour l’homme, l’environnement ou la société »81.
F. Instruments de la RSE
Lois :
Bien qu’à l’origine, la RSE procède d’une démarche volontaire, il existe une série de normes dont
l’entreprise doit tenir compte à titre d’obligation légale : en matière d’environnement, de travail,
de blanchiment, de corruption,...
Recommandations internationales :
En droit belge, il n’existe pas de « Code de RSE » comme il existe un Code de gouvernance
d’entreprise, ce qui s’explique en partie par les diversités sectorielles.
Il existe par contre une série de recommandations au niveau européen ou international, émanant
d’autorités (Commission européenne, Bureau international du travail, Nations-Unies, OCDE ,...) ou
d’organisations non gouvernementales (Organisation internationale de normalisation, Global
Reporting Initiative,…).
40
Fanny Streveler MA1 DROIT
Indicateurs :
La RSE suppose la mise en place d’indicateurs de performance qui mesurent les résultats concrets
des actions de RSE.
Le reporting de ces indicateurs permet une évaluation quantitative de la RSE, par exemple :
- en ce qui concerne l’impact sur l’environnement : la consommation d’énergie, les émissions de
gaz à effet de serre, les rejets,... ;
- en ce qui concerne les relations sociales : le taux d’absentéisme, le nombre de burns-out, le
nombre d’accidents du travail,... ;
- en termes de communauté : le nombre de projets sociaux et de personnes affectées.
Notations :
Certains organismes accordent une notation de nature qualitative aux entreprises en fonction de
critères sociaux et environnementaux :
- des agences de notation sociale et environnementale (ou extra-financière) (par exemple, Core
Ratings) ;
- des plateformes en ligne ; à titre d’exemple, en matière de prêt-à-porter ; Moralscore82, dont le «
pitch » est le suivant :
« Que faire pour avoir l’air stylé.e ? Se draper dans 1 milliard de tonnes d’équivalents CO2 ? Comment
être toujours élégant.e ? Porter la mort d'ouvrie.re.s sous-payé.e.s sur le dos ? Pour vous habiller
éthique, il est temps de vous retrousser les manches »
et qui donne « une « note » sur 100 aux entreprises de prêt à porter ;
- des publications ; à titre d’exemple, Forbes publie annuellement la liste des « The World’s Top CR
Companies ».
Il existe par ailleurs un index financier fondé sur la durabilité, le Dow Jones Sustainability Index.
Labels :
Il existe également des « labels » en matière de RSE : label LUCIE, label Engagé RSE, label
Responsabilité sociale,...
Rapport de gestion :
Le CSA impose aux sociétés qui doivent rédiger un rapport de gestion d’y inclure :
- une analyse de l’évolution des affaires et des résultats qui comporte « des indicateurs clés de
performance de nature tant financière que, le cas échéant, non financière ayant trait à
l’activité spécifique de la société, notamment des informations relatives aux questions
d’environnement et de personnel » ;
- la description de leur politique de diversité83.
82 https://moralscore.org/companies/
83 CSA, art. 3:6, § 1er, al. 2.
41
Fanny Streveler MA1 DROIT
Ces sociétés doivent s’appuyer sur des référentiels européens et internationaux reconnus et
indiquer le ou les référentiels sur lesquels elles se sont fondées. Un arrêté royal peut établir une
liste de ces référentiels84.
Comme on le voit, bien que la RSE procède au départ d’une démarche volontaire, la place de la
norme juridique est devenue très importante.
G. Défis
D’une part, la comparabilité des entreprises en matière de RSE est très difficile vu la quantité de
référentiels utilisés.
D’autre part, la RSE est devenue un instrument de marketing, avec le risque de « RSE washing » ou
de « greenwashing », c’est-à-dire une communication fondée sur la RSE sans que cela corresponde
à une véritable stratégie de RSE.
D’une part, il existe des labels, des notations, des normes de certification (supra).
D’autre part, les entreprises qui en ont les moyens et qui font appel à des fournisseurs ou sous-
traitants sur la base d‘un cahier des charges qui prévoit des exigences en matière de RSE peuvent
engager un organisme indépendant pour vérifier que les fournisseurs ou sous-traitants sélectionnés
satisfont effectivement aux indicateurs annoncés.
42
Fanny Streveler MA1 DROIT
PARTIE 2 –
SOCIETES
43
Fanny Streveler MA1 DROIT
TITRE 1 :
CONDITIONS
GENERALES DES
SOCIETES
44
Fanny Streveler MA1 DROIT
Les sociétés sont soumises, avec certaines réserves, aux conditions générales de validité des actes juridiques
unilatéraux ou des contrats, aux conditions communes à toutes les sociétés et à des conditions particulières
qui tiennent à leur finalité ou à leur forme légale, qui seront examinées à l’occasion de chaque forme de
société (infra).
Le contrat de société est bien distinct des autres contrats mais, dans certains cas, la question se pose de la
qualification du contrat en société ou en prêt.
1. NOMBRE D’ASSOCIÉS
Le CSA pose comme règle que la société peut être constituée par une seule personne : une société
est constituée par un acte juridique par lequel une ou plusieurs personnes, dénommées associés,
font un apport85.
Toutefois, la société simple, la SNC et la SComm doivent avoir au moins deux associés et la SC trois.
Seules la SRL et la SA peuvent avoir un seul associé (voir infra pour la SE et la SCE).
2. CONSENTEMENT
Le consentement de chaque partie doit être libre, conscient, exempt d’erreur, de dol, de violence et
de lésion.
Pour protéger les travailleurs, la loi du 03 juillet 1978 relative aux contrats de travail interdit de
subordonner la conclusion d’un contrat de travail à la souscription de parts ou d’actions 86. Toute
clause en ce sens serait nulle.
Le consentement peut émaner de l’associé lui-même, d’un mandataire ou d’un porte-fort sous
réserve de ratification.
3. CAPACITÉ
Lorsque la responsabilité des associés est illimitée, ils doivent avoir la capacité nécessaire pour
prendre des engagements illimités, ce qui implique l’application des règles spécifiques de
protection des mineurs, aliénés, faibles d’esprit, arriérés mentaux, prodigues et majeurs hors d’état
de gérer leurs biens.
En ce qui concerne les associés qui limitent leur responsabilité à leur apport, la souscription
d’actions ou de parts en contrepartie d’un apport en numéraire s’analyse en un acte
d’administration, sous réserve de l’hypothèse dans laquelle le souscripteur intervient en qualité de
45
Fanny Streveler MA1 DROIT
Les incapables peuvent souscrire des actions d’une société dont la responsabilité des actionnaires
est limitée lorsqu’ils sont, selon les cas, représentés, assistés ou autorisés.
L’objet de l’engagement d’un associé se confond avec son apport. Il peut s’avérer illicite s’il porte
sur un bien hors commerce ou s’analyse en une aide d’Etat illicite.
Toutefois, dans les SRL, SC et SA, seule l’illicéité de l’objet statutaire (par opposition à l’illicéité de
l’objet réel ou de la cause) peut entraîner la nullité de la société.
Les conditions de validité spécifiques aux sociétés tiennent aux apports à faire par les associés et à
leur but.
1. APPORTS
L’apport est une opération par laquelle une personne met à la disposition, soit de la société
lorsqu’elle est dotée de la personnalité morale, soit de l’ensemble des associés lorsqu’elle en est
dépourvue, certains éléments patrimoniaux, les soumet aux aléas sociaux et acquiert en
contrepartie des droits sociaux.
Dans toute société, chaque associé doit effectuer un apport. Les objets des apports de chaque
associé ne doivent avoir ni la même valeur ni la même nature. L’objet de l’apport doit être réel et
licite.
46
Fanny Streveler MA1 DROIT
Les apports en société doivent être distingués des avances et des prêts (infra). Même si l’avance en
compte-courant ou le prêt par une personne à une société ont pour effet de mettre une somme
d’argent à la disponibilité de cette société, ils ne s’analysent pas en un apport. Ces opérations ne lui
confèrent pas de droits sociaux, mais uniquement la qualité de prêteur, sauf requalification.
Cette disposition vise les distributions au sens courant du terme (p. ex. les distributions de dividendes)
ainsi que tous les mécanismes par lesquels la société procure directement ou indirectement un
avantage quelconque à ses associés.
Il peut s’agir d’économies ou d’opérations entre la société et ses associés dans lesquelles elle ne
reçoit pas de contrepartie suffisante par rapport à ses prestations89.
A. Buts multiples
Une société peut avoir d’autres buts que la distribution des bénéfices.
Une société peut ainsi avoir, à côté d’un objet lucratif classique, un but désintéressé auquel elle
affecte une partie de ses profits.
Le législateur a voulu ainsi encourager les fondateurs à prévoir des buts allant au-delà de la
distribution de bénéfices et portant, par exemple, sur l’environnement, ce qui confèrerait une certaine
protection aux administrateurs qui prennent en compte de tels intérêts dans leurs décisions.
Par ailleurs, les sociétés coopératives agréées comme entreprises sociales doivent avoir « pour but
principal, dans l’intérêt général, de générer un impact sociétal positif pour l’homme,
l’environnement ou la société »90, ce qui implique qu’elles puissent avoir un autre but que leur but
lucratif.
Reste que la société doit avoir pour but de répartir au moins une partie de ses bénéfices à ses
associés (alors que toute distribution est exclue dans les associations et fondations).
47
Fanny Streveler MA1 DROIT
B. Clauses léonines
En principe, les associés disposent de toute liberté pour régler entre eux le partage des bénéfices et
des pertes, la règle de proportionnalité contenue dans le CSA revêtant un caractère supplétif.
Cette liberté est cependant limitée par l’interdiction des clauses léonines.
Comme au moins un des buts de la société doit être de distribuer ses bénéfices entre les associés,
les statuts (ou une convention entre les associés) ne peuvent pas prévoir de clauses qui
donneraient à l’un des associés la totalité des bénéfices, ou exclurait un ou plusieurs associés de la
participation aux bénéfices. De telles clauses, dites « léonines » sont en effet contraires à la
définition même de société.
La définition des clauses léonines était beaucoup plus large sous l’empire du Code des sociétés. Elle
visait également « la stipulation qui affranchirait de toute contribution aux pertes, les sommes ou
effets apportées à la société par un ou plusieurs des associés »91, interdisant ainsi les opérations de
portage financier et notamment les conventions par lesquelles un investisseur fait un apport à une
société pour assurer son développement ou sa survie en se faisant promettre par ses associés qu’ils
reprendront les actions qu’il a souscrites au prix de souscription augmenté d’une indemnité
prédéterminée (généralement par l’octroi d’options).
Une telle interdiction était de nature à empêcher la conclusion de conventions utiles sur le plan
économique. La Cour de cassation a, par des arrêts successifs, réduit le champ d’application de
l’article 32 mais sa portée restait controversée.
La loi du 23 mars 2019 a supprimé la prohibition, prévue sous l’empire du Code des sociétés, des
clauses qui exonèrent un associé de toutes pertes, jugée surannée et de nature à empêcher la
conclusion de conventions utiles sur le plan économique.
48
Fanny Streveler MA1 DROIT
La question de la qualification du contrat se pose surtout à propos des contrats qui prévoient la
participation des parties aux bénéfices.
Dans le passé, la société a souvent servi à déguiser des prêts, car si l’Eglise interdisait le prêt à
intérêt, elle admettait la réalisation de profits dans les sociétés. Bien qu’en Occident la société ne
soit plus, de nos jours, utilisée à cette fin, la distinction entre le contrat de société et le contrat de
prêt est toujours importante.
Le prêt est un contrat par lequel une personne remet une chose à une autre pour s’en servir à
charge de la lui restituer après usage ou au terme convenu.
Le prêt avec une participation du prêteur aux bénéfices présente des analogies avec l’apport en
jouissance d’une somme d’argent dans une société et il n’est guère aisé de distinguer ces deux
catégories de contrats. L’hésitation peut porter sur la qualification du contrat en son entier (société
ou prêt) ou de la remise des fonds (apport dans une société ou avance à une société).
La difficulté concerne particulièrement la distinction entre, d’une part, le prêt et, d’autre part, la
société simple interne, en commandite ou de fait, en raison du caractère occulte de la première, de
la passivité des associés bailleurs de fonds dans la deuxième et de l’absence de toute précision
quant aux droits et obligations des parties dans la troisième.
En effet, la remise des fonds n’est pas significative car elle peut s’expliquer aussi bien par l’apport
en jouissance que le prêt ; la participation aux bénéfices peut se retrouver dans les deux contrats et
tant l’apporteur en jouissance que le prêteur peuvent être dispensés de contribuer aux pertes.
La parenté entre les contrats de société et de prêt se manifeste le plus fréquemment lors de
tentatives de requalification d’une contrat de société en un contrat de prêt par le prétendu prêteur
lorsque la société a subi des pertes, mais il arrive également que des créanciers tentent de
requalifier le prêt consenti par une banque en apport en société afin d’exercer leurs recours sur ces
fonds ou même tout le patrimoine du banquier ou, plus généralement, que l’emprunteur cherche à
se libérer d’une obligation de remboursement.
La question est relativement simple à trancher lorsque le contrat prévoit l’obligation de rembourser
les fonds quelles que soient les pertes subies, cette obligation pouvant même être assortie d’une
sûreté.
En l’absence d’une telle clause, lorsque les parties ne se sont pas expliquées sur la contribution aux
pertes, certains auteurs proposent comme critère distinctif de la société l’existence d’un pouvoir
d’intervention ou d’intrusion.
Celui-ci n’est cependant pas de l’essence de la société. En outre, cette conception revient à nier au
prêteur la possibilité de se réserver un droit de regard sur les affaires de son cocontractant et de
subordonner l’accomplissement de certaines opérations à son autorisation préalable, sous peine de
voir requalifier son prêt en apport. Or, un prêteur peut légitimement exercer un certain contrôle et
intervenir dans une société pour protéger ses investissements, pourvu qu’il n’exerce pas une
49
Fanny Streveler MA1 DROIT
activité positive de gestion et de direction. Ce n’est que dans des hypothèses marginales, lorsque le
banquier a accepté de courir des risques exceptionnels, que le contrat de prêt conclu avec une
banque peut être requalifié en contrat de société.
La poursuite d’un intérêt commun par les parties fournit un critère plus sûr.
50
Fanny Streveler MA1 DROIT
TITRE 2 :
SOCIETES SANS
PERSONNALITE
JURIDIQUE
51
Fanny Streveler MA1 DROIT
Le CSA ne reconnaît qu’un seul type de société sans personnalité juridique, la société simple (livre
4).
La société momentanée était une société sans personnalité juridique dont l’objet était limité à une
ou plusieurs opérations déterminée (exemple-type : société constituée entre des entreprises de travaux
pour construire un ouvrage d’art).
La société interne était une société « occulte » en ce sens qu’elle était administrée par un gérant
agissant en son nom propre, sans dévoiler aux tiers ni l’existence de la société, ni le nom des
associés, tandis que les autres associés (les « participants ») participaient aux résultats de l’activité
(exemple : dans le domaine de l’art pour ne pas dévoiler le nom de collectionneurs connus).
Comme la société simple peut être « interne » lorsqu’elle est gérée par un ou plusieurs gérants
agissant en leur nom propre94, ou être conclue pour une opération déterminée95, la société interne
et la société momentanée sont devenues superflues en tant que formes légales distinctes et le
législateur les a supprimées.
1. PATRIMOINE
En principe, dans un groupement sans personnalité juridique, les biens affectés à ce groupement
appartiennent soit à l’ensemble des membres ou associés, sous la forme d’un patrimoine indivis
entre eux96, soit à un associé. Généralement, dans les sociétés simples « internes », tous les biens
appartiennent à l’associé gérant.
Toutefois, aux termes de l’article 1:1 du CSA, toute société a un patrimoine. L’Exposé des motifs
précise que cette disposition s’applique à toute société, qu’elle soit dotée ou non de la personnalité
juridique .
52
Fanny Streveler MA1 DROIT
Cette disposition paraît révolutionner les principes fondamentaux suivant lesquels seules les
personnes ont un patrimoine et, corrélativement, le patrimoine suppose une personne qui en est le
support.
Déjà auparavant, la doctrine admettait, pour les sociétés sans personnalité juridique, la possibilité
d’affecter certains biens à leur but et de cette manière de privilégier les créanciers « sociaux » sur
les créanciers personnels des associés. Cela ne revenait évidemment pas à leur reconnaître un
patrimoine.
Le Conseil d’État s’est montré extrêmement critique dans son avis sur l’idée qu’une société
dépourvue de personnalité juridique puisse techniquement être titulaire d’un patrimoine. Le
Gouvernement s’est borné à répondre que :
« Cette critique se ramène en réalité à une question terminologique. Certes, techniquement une
société dépourvue de personnalité juridique ne peut être sujet actif ou passif de droit. Il n’en
demeure pas moins que, dans les faits et dans le langage courant, pareille société est à la tête d’une
universalité indivise, constituant techniquement un patrimoine d’affectation appartenant à ses
associés, mais qui ne se confond pas avec leurs biens propres. En effet, il est constant que les
créanciers personnels des associés ne peuvent saisir que la part de ceux-ci dans la société et n’ont
pas de droit direct sur le ‘patrimoine social’. Le contrat de société s’impose en effet à eux dans ses
effets externes et les créanciers des associés ne sauraient avoir plus de droits sur les biens mis en
commun que les associés eux-mêmes. À l’inverse, les créanciers dont la créance trouve sa cause
dans des opérations conclues au nom et pour le compte de la société (donc de l’ensemble des
associés dans les limites de l’objet de la société) ont un recours tant sur les biens mis en commun
que sur les biens propres de chacun des associés. Dans les faits, l’universalité indivise qui regroupe
les droits et les obligations ‘de’ la société constitue ainsi un patrimoine d’affectation distinct du
patrimoine personnel de chacun des associés. (...) L’article 1:1 ne dit rien d’autre lorsqu’il souligne
que toute société – donc aussi les sociétés non dotées de la personnalité juridique – ‘a un
patrimoine’. (...) L’intention des auteurs du projet n’est nullement d’attribuer une quelconque
personnalité juridique à la société simple, ni d’ailleurs aux associations de fait ».
Les articles 4:14 et 4:15 du CSA précisent à cet égard que les créanciers dont la créance trouve sa
source dans l’activité de la société peuvent exercer leur recours sur l’ensemble du patrimoine social
et que les associés sont personnellement et solidairement tenus à leur égard sur leur patrimoine
propre, tandis que les créanciers personnels des associés, dont la créance est étrangère à l’activité
sociale, n’ont de recours que sur la part de cet associé et les bénéfices qui lui sont distribués.
A vrai dire, ces dispositions suffisent à elles seules pour atteindre le but recherché, sans qu’il faille
affirmer que les sociétés simples ont un patrimoine.
Le système mis en place par le législateur est particulièrement confus : d’une part, le CSA énonce
que toute société (en ce compris la société simple, qui est une société dépourvue de personnalité
53
Fanny Streveler MA1 DROIT
morale) a un patrimoine 97 mais, d’autre part, il prévoit, sous un titre intitulé « Le patrimoine social
et les droits des créanciers », que « les biens apportés à la société ainsi que ceux qui résultent de
l’activité sociale forment un patrimoine indivis entre les associés »98. Or, le patrimoine ne peut à la
fois appartenir à la société, et être un patrimoine indivis entre les associés.
En définitive, le législateur se borne à consacrer le « privilège » des créanciers sociaux sur les
créanciers personnels des associés et utilise le terme « patrimoine » à mauvais escient, voulant
simplement dire que l’ensemble des biens et des obligations affectés à la société simple forment
une universalité de droit.
Elle reçoit ainsi un numéro d’entreprise101, qui est un numéro d’inscription dans le registre des
personnes morales, ce qui paraît curieux mais s’explique par le fait qu’il n’y a que deux registres :
celui des personnes physiques et celui des personnes morales.
Elle doit mentionner son numéro d’entreprise dans tous ses documents sociaux 102.
L’octroi par le législateur de la qualité d’entreprise à la société simple et l’obligation qui lui est faite
de s’inscrire à la BCE lui font ainsi perdre un de ses attraits (la discrétion à l’égard des tiers).
En particulier, on se demande comment cette publicité est compatible avec la possibilité pour une
société simple d’avoir encore un caractère occulte.
3. ACTIONS EN JUSTICE
Les groupements sans personnalité juridique n’ont pas la qualité requise pour ester en justice, sous
réserve des exceptions prévues par la loi (par exemple en faveur des syndicats).
54
Fanny Streveler MA1 DROIT
A. Principes : groupements sans personnalité juridique qui ne sont pas inscrits à la BCE
En principe, quand un litige concerne les droits et les obligations communs des associés ou des
membres ou les biens affectés à ce groupement, l’ensemble des associés ou membres doivent être
à la cause.
Il convient cependant de faire une distinction selon que les associés ou membres soient
demandeurs ou défendeurs.
Lorsqu’un groupement est inscrit à la BCE, la mention de sa dénomination et de son siège dans ses
données à la BCE suffit pour justifier dans les litiges de l’identité de ses associés ou membres. En
d’autres termes, l’acte introductif d’instance ne doit pas reprendre l’identité de tous les associés ou
membres mais peut se contenter de mentionner la dénomination et le siège de la société. La
citation peut donc être faite à l’adresse du siège.
Si l'inscription à la BCE contient également les données d'identification d'un mandataire général, le
groupement peut agir en justice, tant en demandant qu’en défendant, et comparaître en personne
à l'intervention de ce mandataire. Si le groupement n’a désigné aucun mandataire pour la
représenter, chacun des associés ou membres peut représenter seul le groupement en vertu d’un
mandat réciproque de gestion (infra).
55
Fanny Streveler MA1 DROIT
Par cette disposition, le législateur a reconnu une certaine capacité aux groupements sans
personnalité juridique.
4. PROCÉDURES D’INSOLVABILITÉ
Le livre XX du CDE, consacré aux procédures d’insolvabilité, s’applique aux entreprises au sens de
l’article I.I, al. 1er. Il s’agit de :
- toute personne physique qui exerce à titre indépendant une activité professionnelle ;
- toute personne morale, à l’exception des personnes morales de droit public et de certains
groupements comme l’Etat et les Régions ;
- et toute organisation sans personnalité juridique qui poursuit un but de distribution ou qui en
fait distribue des avantages à ses membres ou à des personnes qui exercent une influence
décisive sur sa stratégie. Ces précisions tendent à limiter cette inclusion aux sociétés sans
personnalité juridique, à l’exception des associations de fait.
Etant des entreprises, les sociétés simples peuvent introduire une requête en réorganisation
judiciaire et être déclarées en faillite.
Le législateur a justifié cette règle par la reconnaissance par « la majeure partie de la doctrine
actuelle » de la société simple comme un patrimoine distinct. Il s’agit d’une grossière simplification
(supra).
En soumettant les sociétés simples aux procédures d’insolvabilité, le tribunal de l’entreprise risque
donc de « prononcer la faillite d’une ‘organisation’ dont l’existence ne se révèlera qu’au moment de
sa faillite ».
56
Fanny Streveler MA1 DROIT
CONSTITUTION
1. CONDITIONS DE FOND
Le CSA définit la société simple comme un contrat par lequel deux ou plusieurs personnes
conviennent de mettre leurs apports en commun en vue de distribuer ou procurer à ses associés un
avantage patrimonial direct ou indirect. Elle est conclue pour l’intérêt commun des parties104. Elle
doit avoir un objet licite105.
Cette disposition ne prévoit donc pas de conditions supplémentaires de validité par rapport aux
conditions de validité communes aux sociétés, sinon qu’elle requiert au moins deux associés.
2. FORMALITÉS
En principe, le contrat de société est un contrat purement consensuel.
Le CSA n’exige pas un écrit mais on imagine difficilement les associés se contenter de paroles.
L’acte de constitution peut être sous seing privé ou authentique. Cet acte ne doit être ni déposé au
greffe, ni publié.
1. RÉPARTITITION EN PARTS
Les droits des associés sont exprimés en « parts ». Ces parts ne sont pas matérialisées par des
titres-papiers ; elles résultent de l’inscription dans le contrat de société du nombre de parts
revenant à chacun.
La part des associés dans les bénéfices et les pertes ainsi que dans le patrimoine social en cas de
dissolution est fixée dans le contrat de société. Elle ne doit pas nécessairement être proportionnelle
à leur apport. Ce n’est qu’à défaut de précision dans le contrat de société que les parts sont fixées
proportionnellement aux apports. Dans cette hypothèse, celui qui a apporté son industrie se voit
attribuer un nombre de parts égal à celui qui rémunère l’apport le plus faible autre qu’en
industrie106. Cette règle n’est pas nécessairement équitable et invite à régler la répartition des parts
dans le contrat de société.
57
Fanny Streveler MA1 DROIT
Toutefois, une telle cession doit se faire « d’après les formes du droit civil » c’est-à-dire
conformément aux règles en matière de cession de créance, sans pouvoir porter sur les
engagements de la société antérieurs à son opposabilité109.
Malgré le principe de l’incessibilité des parts, chaque associé peut, sans le consentement de ses
associés, s’associer une tierce personne relativement à la part qu’il a dans la société.
C’est ce qu’on appelle une convention de croupier. Elle s’analyse en un deuxième contrat de société
simple (interne) qui se greffe sur le premier110.
ADMINISTRATION
1. GÉRANTS
Le CSA organise un régime supplétif d’administration des sociétés simples.
A. Désignation de gérants
Les associés peuvent désigner un ou plusieurs gérants, fixer leurs pouvoirs et déterminer s’ils
peuvent agir séparément ou doivent agir collégialement, dans le contrat de société ou dans un acte
distinct. Ces gérants peuvent mais ne doivent pas être associés.
Dans cette hypothèse, la société est administrée par ce ou ces gérants. Sauf si la convention ou
l’acte qui les désigne prévoit qu’ils doivent agir conjointement, ces gérants peuvent agir
séparément111.
Les gérants désignés par une clause spéciale du contrat de société ne peuvent être révoqués que
pour de justes motifs laissés à l’appréciation du juge ou par décision des associés prise à l’unanimité
ou, si le contrat le prévoit, aux conditions de majorité prévues par celui-ci.
Les gérants désignés par un acte distinct peuvent être révoqués comme de simples mandataires112.
58
Fanny Streveler MA1 DROIT
2. ASSOCIÉS
Les associés prennent à l’unanimité toute décision qui intéresse la société ou qui a pour objet de
modifier la convention, à moins que la convention prévoie que leurs décisions seront prises à la
majorité.
Toutefois, même si les statuts prévoient la majorité, les associés ne peuvent modifier l’objet
essentiel de la société qu’à l’unanimité114.
Selon l’exposé des motifs, « l’‘objet essentiel’ de la société désigne à cet égard le cœur de l’objet de
la société. Une société constituée pour réaliser des opérations de transport ne saurait ainsi, par
exemple, être unilatéralement transformée en société de négoce de céréales ou en société de
conseil en informatique. En revanche, rien n’empêche que l’objet de la société soit adapté sur des
points de détail notamment pour l’adapter à l’évolution d’un secteur d’activité ».
« Les créanciers dont la créance trouve sa source dans l’activité de la société peuvent exercer leur
recours sur l’ensemble du patrimoine social »115.
Les associés sont personnellement et solidairement tenus à leur égard sur leur patrimoine propre.
Toutefois, si la société simple est interne, les tiers n’ont de recours qu’à l’égard de l’associé ou du
gérant qui a traité avec eux en nom personnel. Les tiers n’ont pas d’action directe contre les autres
associés116.
Sans préjudice de l’article 1166 du Code civil, les créanciers personnels des associés, dont la
créance est étrangère à l’activité sociale, et ceux qui ont traité avec un associé qui n’avait pas le
pouvoir de représenter les autres n’ont de recours que sur la part de cet associé et les bénéfices qui
lui sont distribués. Ils ne peuvent saisir les biens qui composent le patrimoine social ni exercer
aucun droit sur ceux-ci117.
59
Fanny Streveler MA1 DROIT
4. COMPTABILITÉ
En leur qualité d’entreprises, les sociétés simples doivent tenir une comptabilité118. Cette
comptabilité peut être simplifiée si le chiffre d’affaires ne dépasse pas 500.000 EUR (journal
financier, journal des achats et journal des ventes, inventaire annuel) 119.
Elles ne doivent pas déposer leurs comptes annuels à la Banque Nationale de Belgique.
DISSOLUTION ET LIQUIDATION
1. CAUSES DE DISSOLUTION
La société simple est dissoute :
- par l’expiration du terme ;
- par la perte matérielle ou juridique de la chose ou par la réalisation de l’opération si elle a été
créée exclusivement en vue de l’exploitation de cette chose ou l’accomplissement de cette
opération ;
- par la mort, l’incapacité, la liquidation, la faillite ou la déconfiture d’un des associés, sauf, en
cas de décès, si la convention prévoit une clause de continuation avec les héritiers de l’associé
décédé ou entre les associés restants ;
- par la décision des associés prise à l’unanimité ou, le cas échéant, à la majorité prévue par la
convention ;
- par la réalisation d’une condition résolutoire120 ;
- lorsque la société est conclue pour une durée indéterminée, par acte unilatéral de résiliation
moyennant un préavis raisonnable pour autant que cette résiliation soit de bonne foi et
n’intervienne pas à contretemps121 ;
- pour de justes motifs, par le président du tribunal de l’entreprise du siège de la société
siégeant comme en référé. Il y a justes motifs, non seulement lorsqu’un associé manque
gravement à ses obligations ou lorsque son infirmité le met dans l’impossibilité d’exécuter
celles-ci, mais encore dans tous les autres cas qui rendent impossible la poursuite normale des
affaires sociales, telle la mésintelligence grave et durable des associés122.
60
Fanny Streveler MA1 DROIT
2. DÉMISSION ET EXCLUSION
Le contrat de société simple peut prévoir la possibilité pour les associés de démissionner ou
d’exclure un associé sans que la société ne prenne fin à l’égard des associés restants123. Il peut
déterminer les conditions de majorité à laquelle la décision d’exclusion doit être prise ainsi que les
motifs d’exclusion mais il doit prévoir un délai de préavis raisonnable.
Sous réserve de convention contraire, l’associé qui démissionne ou est exclu a droit à la valeur de
ses parts au moment où il perd la qualité d’associé124.
4. LIQUIDATION
Le CSA réglemente uniquement la liquidation des sociétés dotées de la personnalité juridique (livre
2).
En l’absence d’un régime spécial de liquidation des sociétés simples dans le CSA, on applique les
règles de liquidation en matière de partage.
Toutefois ;
- le « patrimoine » de la société est censé subsister pour les besoins de sa liquidation jusqu’à la
clôture de celle-ci, ce qui signifie que, jusqu’à cette clôture, les créanciers sociaux sont
privilégiés ;
- tout intéressé peut demander la désignation d’un ou plusieurs liquidateurs au président du
tribunal de l’entreprise du siège de la société siégeant comme en référé ;
- les créanciers doivent être payés avant les associés et le liquidateur doit respecter le principe
d’égalité entre les créanciers126.
61
Fanny Streveler MA1 DROIT
TITRE 3 :
SOCIETES
DOTEES DE LA
PERSONNALITE
62
Fanny Streveler MA1 DROIT
CHAPITRE 1 :
PRINCIPES
GENERAUX
63
Fanny Streveler MA1 DROIT
1. CONDITIONS DE FOND
Comme toute société, les sociétés dotées de la personnalité morale sont soumises, avec certaines
réserves, aux conditions générales de validité des actes juridiques unilatéraux ou des contrats et
aux conditions communes à toutes les sociétés : chaque associé doit faire un apport et un des buts
de la société doit être de distribuer ou procurer à ses associés un avantage patrimonial direct ou
indirect (supra).
En outre, les SRL, les SC et les SA doivent remplir les conditions spécifiques qui tiennent à leur
forme légale, tandis qu’il n’y a pas d’autres conditions pour les SNC et les SComm sous réserve de
l’existence de deux associés.
Ces conditions doivent être réunies au plus tard le jour de la passation de l’acte constitutif.
2. FORMALITÉS
La constitution d’une société dotée de la personnalité morale s’articule autour des étapes
suivantes :
- la passation de l’acte constitutif ;
- le dépôt de l’acte constitutif et d’autres documents au greffe du tribunal de l’entreprise (→
acquisition de la personnalité morale) ;
- la publication d’un extrait de l’acte constitutif aux Annexes du Moniteur belge.
A. Acte constitutif
L’acte constitutif est l’acte rédigé (par écrit) en vue de la constitution de la société. Le CSA
réglemente sa forme et impose certaines mentions.
L’acte constitutif est l’acte établi au moment de la constitution de la société. Il reprend, outre les
statuts, une série de mentions historiques comme la date, l’identité des fondateurs, les avantages
qui leur sont octroyés, les constatations relatives aux apports initiaux, l’organisme auprès duquel
les apports en numéraire ont été déposés, la mention des frais de constitution,…
Les statuts sont le texte organique de la société qui comporte les mentions imposées par le CSA
ainsi que d’autres mentions reproduisant, complétant ou écartant certaines dispositions de ce
Code.
64
Fanny Streveler MA1 DROIT
Langue :
Les règles relatives à l’emploi des langues ne sont pas spécifiques aux sociétés mais concernent
l’entreprise.
Les dispositions en matière d’emploi des langues s'appliquent aux actes et documents imposés par
la loi et en particulier :
- l’acte constitutif ;
- tous les actes et documents qui doivent être déposés au greffe du tribunal de l’entreprise ;
- tous les actes et documents qui doivent être publiés aux Annexes du Moniteur belge.
La langue de l’acte constitutif est déterminée conformément à ces dispositions : les statuts sont
établis en français, en néerlandais ou en allemand.
La notion de siège statutaire ne joue aucun rôle en matière d'emploi des langues : c’est le siège
d’exploitation qui compte.
La société doit utiliser le français ou le néerlandais selon qu’elle a son siège d’exploitation dans la
Région de langue française ou la Région de langue néerlandaise.
Elle peut utiliser le français et le néerlandais, ou l'une de ces langues seulement, si elle a son siège
d’exploitation dans la Région de Bruxelles.
Elle doit utiliser le néerlandais si elle a son siège d’exploitation dans une commune de frontière
linguistique de la Région de langue néerlandaise (Voeren,...) ou dans une commune à facilité
(Drogenbos, Kraainem, Linkebeek, Rhode-Saint-Genèse, Wemmel, Wezenbeek-Oppem).
Elle doit utiliser le français si elle a son siège d’exploitation dans une commune de frontière
linguistique de la Région de langue française (Enghien,...) ou une commune malmédienne
(Malmédy,...).
Si elle a des sièges d’exploitation dans plusieurs régions linguistiques, elle doit utiliser les deux
langues.
127 Décret du 19 juillet 1973 du Conseil culturel néerlandais réglant l'emploi des langues en matière de relations sociales
entre employeurs et travailleurs, ainsi qu'en matière d'actes et de documents d'entreprise prescrits par la loi, tel que
partiellement annulé par l'arrêt de la Cour d'arbitrage du 30 janvier 1986.
128 Décret du 12 juillet 1978 du Conseil culturel de la Communauté culturelle française sur la défense de la langue
française.
129 Décret du 30 juin 1982 du Conseil de la Communauté française relatif à la protection de la liberté de l'emploi des
langues et de l'usage de la langue française en matière de relations sociales entre les employeurs et leur personnel ainsi
que d'actes et documents des entreprises imposés par la loi et les règlements, tel que partiellement annulé par les
arrêts des 30 janvier et 18 novembre 1986 de la Cour d'arbitrage.
65
Fanny Streveler MA1 DROIT
Si une société a l’intention d’avoir un siège d’exploitation dans plusieurs régions linguistiques, les
statuts doivent être rédigés dans la langue de chacune des régions concernées.
Contenu :
L’acte constitutif de chaque société doit contenir :
- toutes les mentions qui doivent être déposées et publiées par extrait conformément à l’article
2:8, § 2 du CSA : par définition, les mentions de l’extrait d’un acte proviennent de cet acte ; les
dispositions qui précisent le contenu de l’acte constitutif imposent certaines mentions outre les
données comprises dans l’extrait destiné à la publication130 ;
- des mentions spécifiques à l’acte constitutif de chaque société131.
B. Dépôt au greffe
Dossier :
Il est tenu, pour chaque personne morale, un dossier au greffe du tribunal de l’entreprise du siège
de la personne morale132, où sont déposés tous les actes, extraits d’actes, décisions et documents
dont la publicité est ordonnée par le Code133. Le dossier peut être électronique en tout ou partie 134.
Objet :
Il convient de déposer dans ce dossier :
- un extrait de l’acte constitutif ;
- sauf pour la SNC et la SComm, une expédition de l'acte constitutif authentique ou un double de
l'acte constitutif sous seing privé et une expédition des procurations authentiques ou un
original des procurations sous seing privé135.
Délai :
L’extrait de l’acte constitutif doit être déposé au greffe dans les 30 jours de la date de l’acte
définitif136.
Langue :
Les actes de la société, rédigés en français, en néerlandais ou en allemand en fonction de la
localisation du ou des sièges d’exploitation de la société (supra), doivent être déposés au greffe du
tribunal « dans la langue ou dans une des langues officielles de la région linguistique où le siège de
la personne morale est établi »137.
En tant qu’elle vise le « siège » de la personne morale, la loi doit être interprétée de manière
conforme à la législation existante comme visant le siège d’exploitation.
Une société peut faire établir et déposer une traduction dans une ou plusieurs langues officielles de
l’Union européenne.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
Sur la base de cette disposition, une société peut ajouter au document rédigé en français ou en
néerlandais une version en néerlandais ou en français, à titre de traduction volontaire dans une
langue officielle de l’Union européenne. Le législateur belge a choisi de ne pas imposer une
traduction certifiée pour ne pas augmenter les frais administratifs des entreprises.
En cas de discordance entre la version publiée dans la langue officielle et les autres versions, les
traductions ne sont pas opposables aux tiers : les tiers peuvent cependant s’en prévaloir, sauf si la
société prouve qu’ils ont eu connaissance de la version ayant fait l’objet de la publicité
obligatoire138.
Délai :
La publication doit être faite dans les 10 jours du dépôt140, à peine de dommages-intérêts contre les
fonctionnaires auxquels l’omission ou le retard seraient imputables.
D. Formalités ultérieures
Enregistrement auprès de la Banque-Carrefour des Entreprises :
Toute entreprise doit être enregistrée avant le début de ses activités dans la Banque-Carrefour des
Entreprises et se voit attribuer un numéro d’entreprise lors de son inscription141.
Plus précisément, chaque société doit être inscrite au registre des personnes morales, qui est un
« répertoire de la Banque-Carrefour des Entreprises »142.
Soit elle s’inscrit directement par voie électronique, soit elle est inscrite par le notaire
instrumentant, ou par le greffe du tribunal de l’entreprise dans le registre des personnes morales
de la Banque-Carrefour des Entreprises143.
Elle doit procéder à une modification avant la création de toute nouvelle unité d’établissement, soit
un « lieu d’activité, géographiquement identifiable par une adresse, où s’exerce au moins une
activité de l’entreprise ou à partir duquel elle est exercée »144.
67
Fanny Streveler MA1 DROIT
Autres formalités :
Si l’acte constitutif est notarié, il doit être enregistré.
S’il comporte un apport de biens immobiliers, il doit être transcrit au registre du bureau compétent
de l’Administration générale de la Documentation patrimoniale pour être opposable aux tiers145.
3. SANCTIONS
Plusieurs types d’irrégularités sont susceptibles d’être commises pendant le processus de
constitution de la société.
Elles peuvent uniquement affecter la validité de l’engagement d’un associé et entraîner la nullité de
cet engagement.
Dans un souci de sécurité juridique, le CSA privilégie les actions en responsabilité par rapport aux
actions en nullité. Ainsi, le CSA limite les causes de nullité des sociétés mais prévoit de nombreux
cas de responsabilité des fondateurs.
Le droit commun détermine les causes de nullité des engagements des associés ainsi que leur
régime.
Causes de nullité :
Conformément au droit commun, l’engagement d’un associé peut être annulé s’il ne satisfait pas :
- aux conditions générales requises pour la validité de tout contrat ou, s’il s’agit d’une société
unipersonnelle, des actes unilatéraux ;
- aux conditions communes à toutes les sociétés, par exemple si l’associé fait un apport inexistant ou
fictif ou se voit attribuer tous les bénéfices.
Les règles qui limitent les causes de nullité de certaines sociétés interfèrent toutefois avec ces
principes. Ainsi, lorsque le CSA prévoit que les clauses privant un associé de toute participation aux
bénéfices sont « réputées non écrites »146, le fait que cet associé n’ait droit à aucun bénéfice n’est
pas, en soi, une cause de nullité de son engagement.
68
Fanny Streveler MA1 DROIT
L’erreur ou le dol peuvent provenir d’informations inexactes figurant dans des documents de
présentations préparés par les fondateurs, par exemple le prospectus ou un formulaire de souscription.
Conformément au droit commun des obligations, la nullité peut être relative ou absolue.
Si un associé est victime d’une erreur, de violence ou de dol, ou s’il est incapable, la nullité est
relative. Seul l’associé concerné ou son représentant peut demander la nullité de son engagement.
Cette nullité peut faire l’objet d’une confirmation. Les mêmes principes s’appliquent mutatis
mutandis si c’est la société qui est victime d’une erreur, de violence ou de dol.
Rétroactivité :
Contrairement à la nullité de la société, la nullité de l’engagement d’un associé opère avec effet
rétroactif.
L’associé dont l’engagement est annulé peut en conséquence répéter l’apport qu’il a déjà libéré.
B. Nullité de la société
Causes de nullité :
Les causes de nullité de chaque société dépendent de sa forme légale et seront donc examinées à l’occasion
de l’étude des différentes sociétés.
En synthèse, le CSA ne limite pas les causes de nullité des SNC et des SComm mais limite les causes
de nullité des SRL, SC et SA.
L’article 2:36 du CSA consacre cette règle de manière imparfaite : « la nullité d’une société pour
vice de forme ne peut être opposée aux tiers par la société ou par un associé ou actionnaire, même
par voie d’exception, à moins qu’elle n’ait été constatée par une décision judiciaire publiée (...) ».
69
Fanny Streveler MA1 DROIT
On ne peut pas comprendre a contrario que cette règle ne vaut ni pour les vices de fond ni pour les
vices invoqués par les tiers. Une telle interprétation serait contraire à l’article 2:34 du CSA : la
nullité ne peut pas être opposée par voie d’exception quels que soient le vice invoqué ou la
personne qui l’invoque (société, associé, actionnaire ou tiers).
Régularisation :
Le juge peut accorder un délai pour permettre à la société de procéder à sa régularisation147.
Effets :
Absence d’effet rétroactif :
La nullité d’une société produit ses effets à dater de la décision qui la prononce148. Cette disposition
déroge au droit commun, en vertu duquel la nullité opère avec effet rétroactif, sous réserve des
tempéraments dictés par les contraintes de la réalité et par l’impossibilité d’effacer les effets
produits par certaines situations.
La décision qui prononce la nullité d’une société revêt donc un caractère constitutif et non
déclaratif.
Il s’ensuit que « la nullité ne porte pas atteinte par elle-même à la validité des engagements de la
société ou de ceux pris envers elle (...) »149. Cette disposition vise les engagements pris par ou
envers la société et, de manière générale, toutes les obligations nées avant la publication du
jugement prononçant la nullité de la société.
Liquidation :
La nullité entraîne la liquidation comme en cas de dissolution 151. Le régime ordinaire de liquidation
s’applique, sous certaines réserves.
Les tribunaux « peuvent désigner les liquidateurs »152. Il s’agit d’une faculté. Cette désignation
intervient à la requête d’un associé, d’un tiers ou même d’office. Dans certains cas, comme celui
d’un objet ou d’une cause illicite, on n’imagine pas que le juge ne désigne pas de liquidateur.
70
Fanny Streveler MA1 DROIT
SOCIÉTÉS EN FORMATION
Ceux qui prennent un engagement au nom d’une société en formation engagent leur responsabilité
personnelle et solidaire pour les engagements contractés au nom de cette société, sauf si elle se
forme dans les deux ans de la naissance de l’engagement et le reprend dans les trois mois de sa
constitution.
Seuls ceux qui ont pris personnellement ou par mandataire un engagement au nom de la société
engagent leur responsabilité conformément à cette disposition ; celle-ci ne rend pas tous les
fondateurs responsables.
1. ENGAGEMENTS ET CRÉANCES
Bien que l’article 2:2 du CSA ne vise que les engagements et soit libellé en termes de responsabilité,
il concerne également la reprise de contrats et de créances.
2. CONVENTIONS CONTRAIRES
Cette disposition réserve la possibilité de conventions contraires.
Celles-ci peuvent aggraver la responsabilité de ceux qui ont pris un engagement au nom d’une
personne morale en formation (par ex. en prévoyant qu’ils resteront tenus même après la reprise de
l’engagement par la personne morale, ou en abrégeant les délais fixés par la loi), la diminuer (par ex. en
supprimant la solidarité des promoteurs), ou même la supprimer.
71
Fanny Streveler MA1 DROIT
4. ANALYSE JURIDIQUE
Cette disposition établit une fiction : dans les limites de cette disposition, la société en formation
peut prendre des engagements comme si elle bénéficiait de la personnalité morale. La technique de
la fiction permet à la personnalité morale de rétroagir à un moment antérieur à la constitution.
Dans ce système, ceux qui prennent un engagement au nom d’une société en formation
contractent au nom de celle-ci mais sont personnellement tenus sous la condition résolutoire de la
constitution et de la reprise des engagements.
5. MODALITÉS DE LA REPRISE
La reprise peut être expresse (décision de l’organe d’administration spécialement convoqué à cette
fin) ou tacite (par ex., paiement du loyer dans l’hypothèse où un contrat de bail a été conclu au nom de la
société en formation).
Toutefois, la société n’a pas encore la personnalité morale au moment de la passation de l’acte
constitutif, de sorte qu’elle n’a pas encore d’organe pour reprendre les engagements et doit en
principe attendre le dépôt de son acte constitutif pour opérer la reprise. Le législateur n’a en effet
pas organisé de système permettant aux comparants à l’acte constitutif de faire reprendre les
engagements par la société.
FINANCEMENT
1. TYPES DE FINANCEMENT
Une société combine généralement plusieurs types de financement : les apports en numéraire de
ses associés, des emprunts, parfois des obligations ou du crowdfunding.
A. Apports
Le premier mode de financement d’une société résulte des apports en numéraire par ses associés.
Constituer une société avec uniquement des apports en industrie est assez théorique.
Des apports doivent être faits à la constitution, s’agissant d’une condition de constitution de la
société mais ils peuvent également être faits en cours de vie de la société. Ils seront en principe
rémunérés par de nouveaux titres, à l’occasion d’une augmentation de capital dans la SA.
Caractéristiques :
Les apports ne représentent pas une dette de la société envers les apporteurs, même si le poste
« capital » dans la SA (et les réserves dans les autres sociétés) est inscrit au passif du bilan.
72
Fanny Streveler MA1 DROIT
B. Emprunt
Auprès des associés ou de tiers :
L’emprunt est également une source de financement très importante de la société.
La société peut contracter des emprunts auprès des associés et/ou de tiers, par exemple des
établissements de crédit.
Les avances faites par les associés peuvent faire l’objet d’un contrat en bonne et due forme mais
sont souvent inscrites dans un compte-courant.
Les établissements de crédit ne consentiront généralement de prêt, surtout à une société qui vient
de se constituer, que moyennant des garanties. Il s’agira le plus souvent de sûretés réelles (sur les
actifs de la société ou d’un associé), les établissements de crédit étant devenus assez frileux à
l’égard des cautions (du moins lorsqu’elles sont consenties par des personnes physiques) en raison
des règles de protection des cautions personnes physiques.
Souvent un établissement de crédit n’accepte de consentir un prêt à la société que si les associés
font également un prêt à la société, et exigent que les créances des associés soient subordonnées à
la sienne.
Compte-courant d’associé :
Un compte-courant est un compte ouvert entre deux personnes physiques ou morales qui
conviennent de transformer leurs créances et leurs dettes réciproques en articles de débit et de
crédit dont le solde sera seul exigible.
Le compte-courant d’associé résulte de l’inscription d’une part d’avances faites par un associé à la
société et d’autre part de dettes de la société envers l’associé (remboursement de frais, sommes
dues à titre de dividendes,…).
Il ne fait l’objet d’aucun formalisme mais devrait idéalement faire l’objet d‘une convention
précisant ses modalités de fonctionnement et en particulier le taux d’intérêt dû par la partie en
négatif.
C. Obligations
Il n’existe pas en droit belge de définition légale de la notion d’obligations (au sens de titres).
On considère généralement que les obligations sont des titres en principe négociables,
représentant la fraction d’un emprunt collectif et donnant droit à un intérêt annuel et au
remboursement du principal.
73
Fanny Streveler MA1 DROIT
Les obligations se distinguent des créances ordinaires par l’unité de l’emprunt qui en fait les
coupures d’une émission globale, ainsi que leur caractère négociable et le groupement de leurs
titulaires en une assemblée générale, celle des obligataires, qui peuvent prendre à la majorité des
décisions obligatoires pour tous les titulaires des obligations de la tranche concernée. Ces deux
dernières caractéristiques résultent du CSA et sont spécifiques aux obligations émises par des
sociétés.
Sous réserve des exceptions prévues par la loi et moyennant l’accord du débiteur, toute dette peut
faire l’objet d’un titre de sorte que toute personne peut émettre des obligations.
En particulier, toute société, association ou fondation peut émettre des obligations même en
l’absence d’une clause des statuts en ce sens, sauf si les statuts interdisent le recours à ce mode de
financement.
Organe compétent :
En principe, l’organe compétent d’une société, d’une association ou d’une fondation pour émettre
des obligations est son organe d’administration mais les statuts pourraient attribuer cette
compétence à l’assemblée générale.
L’organe compétent pour émettre des obligations l’est aussi pour en fixer les conditions (montant,
durée, taux,…).
Forme :
Depuis le 1er janvier 2008, un émetteur ne peut émettre des titres que sous la forme nominative ou
dématérialisée153.
Les obligations émises par une société, une association ou une fondation incorporent une créance
financière à leur égard et constituent donc des titres.
Types d’obligations :
Les obligations peuvent être de plusieurs types : ordinaires (« plain vanilla »), hypothécaires
(garanties par une hypothèque sur un ou plusieurs immeubles de la société), subordonnées (qui ne
peuvent être remboursées qu’après d’autres dettes de la société), convertibles ou remboursables
en actions,…
Régime :
Sous réserve des règles de droit financier, le régime des obligations est organisé par le CSA
uniquement pour les SRL, les SC et les SA (infra).
Le régime des obligations émises par les autres sociétés, les associations et les fondations est
contractuel, à défaut d’autres règles légales.
Les conditions d’émission des obligations peuvent s’inspirer des règles du CSA en la matière, à
l’exception bien entendu des règles relatives aux obligations convertibles en actions (les
associations et fondations ne pouvant pas émettre des actions).
153 art. 3, § 1er, de la loi du 14 décembre 2005 portant suppression des titres au porteur.
74
Fanny Streveler MA1 DROIT
Elles peuvent par exemple organiser des assemblées générales des obligataires et leur permettre de prendre
à la majorité des décisions qui lient tous les obligataires, telles que, moyennant l’accord de l’émetteur, la
modification du taux des intérêts ou le remboursement anticipé des obligations.
D. Crowdfunding
Le crowdfunding est un mode de financement qui consiste à récolter des fonds auprès du public
afin de financer des projets généralement via une plateforme en ligne où sont mis à disposition les
contrats, les bulletins de souscription,…
Il couvre tant les appels au public pour investir dans un projet en vue de recevoir une contrepartie
sous forme de titres (actions, obligations,...) ou non (prêt à intérêt, contrepartie en nature,...) que
les appels au public pour soutenir gratuitement un projet.
Régime :
Lorsqu’il concerne des titres, le régime du crowdfunding résulte d’une combinaison de règles
applicables à ces titres et de règles de droit financier.
On se bornera ici à mentionner quelques règles fondamentales pour comprendre comment fonctionne le
financement des sociétés : les règles en matière d’intermédiation, d’offre publique et de dépôts
remboursables.
A. Monopole d’intermédiation
L’intermédiation est toute intervention, même temporaire ou accessoire, et en quelque qualité que
ce soit, à l'égard d'investisseurs dans le placement d'instruments de placement pour le compte de
l'offreur ou de l'émetteur, contre rémunération ou avantage de quelque nature que ce soit et
octroyé directement ou indirectement par l'offreur ou l'émetteur154.
Seuls les personnes ou établissements énumérés par l’article 21 de la loi du 11 juillet 2018
(essentiellement les établissements de crédit et les entreprises d’investissement) peuvent pratiquer
l'intermédiation, c’est-à-dire intervenir, même à titre temporaire ou accessoire, et en quelque
qualité que ce soit, à l'égard d'investisseurs dans le placement d'instruments de placement pour le
compte de l'offreur ou de l'émetteur, contre rémunération ou avantage de quelque nature que ce
soit et octroyé directement ou indirectement par l'offreur ou l'émetteur.
154art. 4, 6° de la loi du 11 juillet 2018 relative aux offres au public d'instruments de placement et aux admissions
d'instruments de placement à la négociation sur des marchés réglementés.
75
Fanny Streveler MA1 DROIT
La loi n’impose cependant pas de recourir à un intermédiaire : l'émetteur peut placer lui-même les
instruments qu'il émet155 ou confier cette tâche à une entreprise liée si l'offre s'adresse aux
membres du personnel de l'entreprise liée156.
De plus, elle comporte deux exceptions : le monopole d’intermédiation ne s’applique pas aux offres
de valeurs mobilières adressées uniquement aux investisseurs qualifiés ou aux offres de valeurs
mobilières adressées à moins de 150 personnes physiques ou morales, autres que des investisseurs
qualifiés, par État membre157.
Toutefois, le législateur a prévu la possibilité pour les personnes physiques ou morales qui offrent
des services de financement alternatif en qualité de plateforme de financement alternatif de se
faire agréer auprès de la FSMA moyennant certaines conditions 158. Les services de financement
alternatif sont définis comme ceux consistant à « effectuer, par le biais de sites Internet ou par tout
autre moyen électronique, la commercialisation d'instruments de placement émis par des
émetteurs-entrepreneurs, par des fonds starters ou par des véhicules de financement, dans le
cadre d'une offre, qu'elle soit publique ou non, sans prestation d'un service d'investissement
relativement à ces instruments de placement »159.
B. Offre publique
Constitue une offre au public d'instruments de placement toute communication adressée sous
quelque forme et par quelque moyen que ce soit à des personnes et présentant une information
suffisante sur les conditions de l'offre et sur les instruments de placement à offrir, de manière à
mettre un investisseur en mesure de décider d'acheter ou souscrire ces instruments de placement.
Ne constituent pas des offres au public les attributions à titre gratuit d'instruments de
placement160.
Les instruments de placement comportent notamment les valeurs mobilières161, ce qui inclut les
actions et les obligations.
76
Fanny Streveler MA1 DROIT
Actuellement, les seuls marchés réglementés en Belgique sont le marché Euronext Brussels et le
marché des instruments financiers dérivés.
Le prospectus doit comporter toutes les informations nécessaires pour permettre à un investisseur
d’évaluer l’offre en connaissance de cause163. Le Règlement indique les informations qu’il doit
contenir au minimum : les informations financières annuelles et semestrielles publiées au cours des
douze mois précédant l’approbation du prospectus ; les prévisions et estimations de bénéfice ; les
facteurs de risque ; le prix ;…164
Le prospectus ne peut être publié qu’après son approbation par la FSMA 165.
Il doit être mis à la disposition du public au plus tard au début de l’offre ou de l’admission à la
négociation sur un marché réglementé. Il est réputé être mis à la disposition du public lorsqu’il est
publié sous forme électronique sur le site de l’émetteur, des intermédiaires financiers ou du
marché réglementé166.
Exceptions :
L’obligation de publier un prospectus en cas d’offre publique d’instruments de placement ne
s’applique pas à certains types d’offres publiques, notamment :
- offres de valeurs mobilières par un organisme sans but lucratif d’un Etat membre de l’Espace
Economique européen, en vue de se procurer les moyens nécessaires à la réalisation de ses
objectifs non lucratifs167 ;
- offres de valeurs mobilières adressées uniquement aux investisseurs qualifiés168 ;
- offres de valeurs mobilières adressées à moins de 150 personnes physiques ou morales, autres
que des investisseurs qualifiés, par État membre169 ;
- offres de valeurs mobilières dont la valeur nominale unitaire s’élève au moins à 100.000
EUR170 ;
- offres de valeurs mobilières adressées à des investisseurs qui acquièrent ces valeurs pour un
montant total d’au moins 100.000 EUR par investisseur et par offre distincte 171 ;
77
Fanny Streveler MA1 DROIT
- lorsque le montant total de l’offre dans l'Union est inférieur ou égal à un montant de 5 millions
EUR, calculé sur une période de 12 mois172.
La note d'information est un document bref qui ne peut pas excéder 15 pages format A4175. Elle
constitue une information précontractuelle. Elle doit notamment contenir des informations sur
l'émetteur, le montant, la nature et les caractéristiques des instruments de placement offerts ou à
admettre à la négociation, les raisons et les modalités de l'offre ou de l'admission et les risques
attachés à l'émetteur et aux instruments de placement concernés, ainsi que les facteurs de
risque176.
La note d'information est mise à la disposition du public au plus tard le jour de l'ouverture de l'offre
au public ou de l'admission à la négociation. Elle est réputée être mise à la disposition du public dès
qu'elle est publiée sous une forme électronique sur le site web de l'émetteur et, le cas échéant, sur
celui des intermédiaires financiers177. Elle doit également être déposée auprès de la FSMA, qui la
publie sur son site internet178.
Exceptions :
L’obligation de publier une note d’information ne s’applique pas à certaines offres publiques,
notamment :
- offres au public visées à l'article 1er, § 4, a, b, c et d du Règlement 2017/1129 (qui bénéficient
d’exemptions de l’obligation de publier un prospectus) ;
- offres au public d'instruments de placement dont le montant total dans l'Union est inférieur ou
égal à un montant de 500.000 EUR, calculé sur une période de 12 mois 179 (exemption de
minimis) ;
78
Fanny Streveler MA1 DROIT
- offres au public d’instruments de placement par un organisme sans but lucratif d’un Etat
membre de l’Espace Economique européen, en vue de se procurer les moyens nécessaires à la
réalisation de ses objectifs non lucratifs180.
Une personne est réputée recevoir du public des dépôts d'argent ou d'autres fonds remboursables
ou faire appel au public en vue de recevoir de tels dépôts ou fonds, si une ou plusieurs des
circonstances suivantes est réalisée :
- la mise en œuvre de procédés de publicité de quelque nature qu'ils soient, visant plus de 50
personnes et destinés à annoncer ou à recommander la sollicitation de dépôts ou d'autres
fonds remboursables ;
- le recours direct ou indirect à un ou plusieurs intermédiaires ;
- la sollicitation de plus de 50 personnes.
Est considérée comme procédé de publicité l'utilisation de toute technique visant à porter la
sollicitation de dépôts à la connaissance du public, et notamment :
- la diffusion d'informations dans la presse écrite ou dans des publications, périodiques ou non,
ou par la radio, la télévision ou tout autre moyen audiovisuel ou par internet ;
- la diffusion de circulaires ou de tous autres documents standardisés relatifs à la sollicitation de
dépôts, même s'ils sont adressés personnellement au destinataire ;
- la diffusion d'informations par voie de téléphonie, par recours à un système de courrier
électronique ou par recours à toute autre mode de communication numérique181.
Monopole :
En vertu de l'article 28 de la loi du 11 juillet 2018, seules certaines personnes et institutions
peuvent faire appel au public en Belgique en vue de recevoir des dépôts d'argent ou d'autres fonds
remboursables.
79
Fanny Streveler MA1 DROIT
Elle peut bénéficier du monopole de réception de fonds remboursables si elle établit un prospectus
ou une note d’information ou peut se prévaloir d’une exception à l’obligation d’établir un
prospectus.
Aux termes de l’article 2:55, alinéa 1 du CSA ; « lorsqu’une personne morale assume un mandat de
membre d’un organe d’administration ou de délégué à la gestion journalière, elle désigne une
personne physique comme représentant permanent chargé de l’exécution de ce mandat au nom et
pour le compte de cette personne morale. Ce représentant permanent doit satisfaire aux mêmes
conditions que la personne morale et encourt solidairement avec elle les mêmes responsabilités
civiles et pénales, comme s’il avait exercé ce mandat en son nom et pour son compte ».
C’est la personne morale administrateur (et non la société administrée) qui choisit son représentant
permanent. L’organe compétent pour procéder à sa nomination est son organe d'administration.
Si la société anonyme A souhaite désigner la société anonyme B comme administrateur, la société anonyme B
doit lui indiquer qui sera son représentant permanent et la société anonyme A désignera la société anonyme
B, représentée par M. X, représentant permanent.
C’est la société administrée qui se charge de ces formalités ; ainsi, en consultant le dossier de la
société administrée, les tiers pourront déterminer qui peut valablement la représenter.
182 Par exception à ce principe, dans certaines sociétés réglementées (établissements de crédit, sociétés immobilières
réglementées, ...), seules des personnes physiques peuvent être membres de l’organe d’administration.
183 CSA, art. 2:55, al. 2.
80
Fanny Streveler MA1 DROIT
Les règles en matière de conflit d’intérêts applicables aux membres de l’organe d’administration
(infra) s’appliquent au représentant permanent.
C’est la raison pour laquelle le CSA prévoit que le représentant permanent d’une personne morale
qui est gérant et associé dans une SNC ou une SComm, ou qui est l’administrateur unique d’une SA
dont les statuts prévoient que l’administrateur est solidairement et indéfiniment responsable des
obligations de la société, ne contracte aucune responsabilité personnelle relative aux engagements
de la personne morale185.
B. Interdictions et incompatibilités
Il existe certaines interdictions ou incompatibilités pour les personnes physiques :
- Interdictions prévues par le livre XX du CDE :
Pour l'application de ces dispositions, sont assimilés au failli, les administrateurs et les gérants
d'une personne morale déclarée en faillite, dont la démission n'aura pas été publiée un an au
moins avant la déclaration de la faillite ainsi que toute personne qui, sans être administrateur
ou gérant, aura effectivement détenu le pouvoir de gérer la personne morale déclarée en
faillite186.
o Le tribunal qui a déclaré la faillite peut, s'il est établi qu'une faute grave et caractérisée
du failli a contribué à la faillite, interdire, par un jugement motivé, à ce failli d'exploiter,
personnellement ou par interposition de personne, une entreprise187. Comme l’exercice
d’un mandat d’administrateur comme activité professionnelle à titre indépendant
constitue une entreprise, cette interdiction vise notamment l’exercice des mandats
d’administrateur à titre d’activité professionnelle.
o Si, sans empêchement légitime, le failli ou les administrateurs et les gérants de la
personne morale faillie ont omis d'exécuter certaines obligations prescrites par le CDE
dans le cadre de la faillite, le tribunal de l'insolvabilité peut, par jugement motivé,
81
Fanny Streveler MA1 DROIT
COMPTES ET CONTROLE
1. COMPTES ANNUELS
Toute société dotée de la personnalité morale doit établir des comptes annuels.
A. Contenu
Chaque année, l’organe d’administration doit arrêter les comptes annuels, qui se composent du
bilan, du compte de résultats et des annexes.
82
Fanny Streveler MA1 DROIT
- Les microsociétés peuvent établir leurs comptes annuels selon le micro-schéma fixé par
l’annexe 4 de cet arrêté royal196.
- Les SNC, les SComm et les GEIE dont le chiffre d’affaires n’excède pas 500.000 EUR ont la
faculté de ne pas établir leurs comptes annuels selon un schéma fixé par le Roi et de tenir une
comptabilité simplifiée197.
A défaut, le dommage subi par les tiers est, sauf preuve contraire, présumé résulter de cette
omission198.
C. Publication
Dans les trente jours après l’approbation des comptes annuels et au plus tard sept mois après la
clôture de l’exercice, l’organe d’administration doit déposer auprès de la BNB les comptes
annuels199 ainsi que les autres documents visés à l’article 12 (rapport de gestion, rapport du
commissaire,…).
A défaut, le dommage subi par les tiers est, sauf preuve contraire, présumé résulter de cette
omission200.
Les petites sociétés qui ont adopté la forme d’une SNC ou d’une SComm, ainsi que les SNC, les
SComm et les GEIE dont tous les associés à responsabilité illimitée sont des personnes physiques,
ne doivent pas publier leurs comptes annuels 201.
D. Sanctions pénales
Alors que la loi du 23 mars 2019 a supprimé nombre de sanctions pénales qui figuraient dans le
Code des sociétés, jugeant la sanction de la responsabilité des administrateurs plus adaptée, le CSA
prévoit une série d’infractions en relation avec les comptes annuels (défaut de soumettre les
comptes annuels à l’assemblée générale dans les six mois de la date de clôture de l’exercice, défaut
de déposer les comptes annuels à la BNB dans les 30 jours de leur approbation par l’assemblée
générale et au plus tard dans les sept mois de la clôture de l’exercice, faux,...)202.
83
Fanny Streveler MA1 DROIT
2. RAPPORT DE GESTION
Chaque année, l’organe d’administration doit établir un rapport de gestion203.
Le rapport de gestion est un rapport dans lequel l’organe d’administration rend compte de sa
gestion. Il consiste en un exposé fidèle sur l'évolution des affaires, les résultats et la situation de
l'entreprise, ainsi qu'une description des principaux risques et incertitudes auxquels elle est
confrontée. Il comporte une analyse équilibrée et exhaustive de l'évolution des affaires, des
résultats et de la situation de l'entreprise, en rapport avec le volume et la complexité de ces
affaires. Dans la mesure nécessaire à la compréhension de l'évolution des affaires, des résultats ou
de la situation de l'entreprise, cette analyse comporte des indicateurs clés de performance de
nature tant financière que, le cas échéant, non financière ayant trait à l'activité spécifique de
l'entreprise, notamment des informations relatives aux questions d'environnement et de
personnel. Le rapport de gestion contient, le cas échéant, des renvois aux montants indiqués dans
les états financiers annuels et des explications supplémentaires y afférentes204. Il doit également
comporter les autres éléments précisés par le CSA.
Le rapport de gestion est communiqué par l’assemblée générale en même temps que les comptes
annuels mais il n’est pas soumis à l’approbation de l’assemblée générale (voir par ex. le libellé de
l’article 7:149 du CSA : « l’assemblée générale entend, le cas échéant, le rapport de gestion, le rapport de
gestion sur les comptes consolidés, le rapport des commissaires et les autres rapports prescrits par le code et
84
Fanny Streveler MA1 DROIT
discute les comptes annuels. Après l’approbation des comptes annuels, l’assemblée générale se prononce par
un vote séparé sur la décharge des administrateurs »).
En revanche, l’assemblée générale doit se prononcer sur le rapport de rémunération par vote
séparé209.
3. EXERCICE SOCIAL
L’exercice a un an, sous réserve :
- du premier et du dernier exercice, qui peut avoir une durée plus courte (jusqu’à un jour) ou
plus longue (jusqu’à deux ans moins un jour) ;
- de la faculté de prolonger ou de raccourcir, à titre tout à fait exceptionnel, un exercice ;
l’exercice ne peut jamais être inférieur à un jour ou supérieur à deux ans moins un jour.
4. COMMISSAIRE
Les sociétés doivent désigner un ou plusieurs commissaires, à l’exception des petites sociétés non
cotées qui ne sont pas des entités d’intérêt public et des SNC, des SComm et des GEIE dont tous les
associés à responsabilité illimitée sont des personnes physiques210.
Même si aucun commissaire ne doit être nommé en vertu de l’article 3:72, l’organe
d’administration doit soumettre à l’assemblée générale la demande d’un ou plusieurs associés ou
actionnaires de désigner un commissaire211.
Le commissaire doit être choisi parmi les membres de l’Institut des reviseurs d’entreprises (IRE) et
être nommé par l’assemblée générale212.
Le commissaire qui constate dans l’exercice de sa mission des faits graves et concordants
susceptibles de compromettre la continuité de l’activité économique de la société, doit en informer
l’organe d’administration par écrit et de manière circonstanciée. Dans ce cas, l’organe
d’administration doit délibérer sur les mesures qui devraient être prises pour assurer la continuité
de l’activité économique de la société pendant une période minimale de 12 mois. Si le commissaire
85
Fanny Streveler MA1 DROIT
n’est pas informé de cette délibération ou s’il estime les mesures prises insuffisantes, il peut saisir
le président du tribunal de l’entreprise215.
Le commissaire est également chargé d’une série d’autres missions plus ponctuelles (rapport en cas
d’augmentation de capital, vérification de la procédure en cas de conflits d‘intérêts,...).
A. Absence de commissaire
En l’absence de commissaire, chaque associé ou actionnaire a individuellement les pouvoirs
d’investigation et de contrôle d’un commissaire. Il peut se faire assister ou représenter par un
expert-comptable externe216.
Il arrive que des sociétés qui n’y sont pas légalement tenues désignent spontanément un
commissaire, préférant avoir affaire à un professionnel raisonnable qu’à un associé inexpérimenté
et émotif.
Le législateur a été écartelé entre le souhait de regrouper les règles communes aux sociétés dotées de la
personnalité morale dans le livre 2 du CSA et le souhait de rassembler dans un livre distinct les règles
applicables à chaque forme de société.
Il en résulte une cote mal taillée (mais comment faire autrement) : le livre 2 regroupe les dispositions
applicables à toutes les personnes morales, mais également certaines dispositions communes aux SRL, SC et
SA (notamment en matière de dissolution et de liquidation) ; le livre 4 est consacré aux SNC et aux SComm ;
les livres 5, 6 et 7 sont consacrés respectivement aux SRL, SC et SA mais comportent beaucoup de répétitions
sur certains points.
La simplicité des SNC et des SComm par rapport aux SRL, SC et SA se manifeste essentiellement sur
les points suivants :
- Leur processus de constitution est extrêmement simple et se résume aux règles examinées
dans le présent chapitre, tandis la constitution des SRL, SC et SA suppose l’application de règles
supplémentaires, notamment destinées à assurer l’existence de capitaux propres ou d’un
capital de départ suffisant.
- Le CSA ne limite pas les causes de nullité des SNC et des SComm, à l’inverse des SRL, SC et SA.
- Le CSA laisse pratiquement toute liberté en matière de gestion aux SNC et SComm, se bornant
à prévoir des règles pour l’essentiel supplétives, tandis que, tout en offrant le choix aux SRL, SC
et SA en ce qui concerne le modèle de gouvernance, il encadre très fort leur gestion.
- Les petites SNC et les SComm peuvent tenir une comptabilité simplifiée et ne doivent pas
déposer leurs comptes annuels à la Banque Nationale de Belgique.
86
Fanny Streveler MA1 DROIT
- La dissolution des SNC et SComm est extrêmement simple tandis que celle des SRL, SC et SA est
soumise à un ensemble de formalités essentiellement destinées à éviter une atteinte aux droits
des créanciers.
87
Fanny Streveler MA1 DROIT
CHAPITRE 2 :
SNC ET SCOMM
88
Fanny Streveler MA1 DROIT
Le CSA conçoit les SNC et les SComm comme des variantes de la société simple :
« La société simple dont les associés conviennent qu’elle sera dotée de la personnalité juridique
prend la forme d’une société en nom collectif ou d’une société en commandite »217.
C’est un peu surprenant puisque la société simple est dépourvue de la personnalité morale alors
que les SNC et les SComm sont des personnes morales.
Les SNC et les SComm sont soumises aux dispositions applicables à toutes les personnes morales
(livre 2) ainsi qu’à toutes les dispositions applicables à la société simple, à l’exception des
dispositions fondées sur l’absence de personnalité juridique de la société simple, soit les articles
4:13, al. 1er (les biens affectés à la société forment patrimoine indivis entre les associés), 4:14,
alinéa 2 (absence d’action des tiers contre les associés autres que le gérant dans une société
interne), et 4:21 (maintien du patrimoine pendant la liquidation ; c’est en effet plus généralement
la personnalité morale qui est maintenue pendant la liquidation) 218.
Il est donc renvoyé au chapitre consacré à la société simple, sous réserve de ces exceptions et des
développements qui suivent.
La société est en nom collectif lorsque tous les associés sont responsables de manière illimitée et
solidaire des engagements de la société.
La société est en commandite lorsqu’elle est contractée par un ou plusieurs associés indéfiniment
et solidairement responsables des engagements sociaux, dénommés les commandités, et un ou
plusieurs autres associés qui procèdent seulement à des apports en numéraire ou en nature et ne
participent pas à la gestion, dénommés les associés commanditaires219.
La SComm est donc une variante de la SNC avec deux catégories d‘associés.
Les associés en nom collectif engagent leur responsabilité personnelle pour tous les engagements
de la société.
En revanche, les associés commanditaires ne sont personnellement tenus qu’à concurrence des
sommes et des biens qu’ils ont promis d’apporter. Les créanciers de la société ont une action
contre eux en vue de les obliger à libérer leurs apports et pour les contraindre à rapporter à la
société les dividendes qu’ils ont perçus s’ils n’ont pas été prélevés sur des bénéfices réels et réalisés
de la société. Dans ce dernier cas, les commanditaires peuvent agir contre les gérants si ces
derniers sont coupables de fraude, mauvaise foi ou négligence grave220.
89
Fanny Streveler MA1 DROIT
Ils peuvent cependant donner aux gérants des avis, des conseils et des autorisations pour les actes
qui sortent de leurs pouvoirs221.
La responsabilité des associés en nom collectif et des associés commandités (voire des
commanditaires dans des cas exceptionnels) est subsidiaire : aucun jugement à raison
d’engagements de la société portant condamnation personnelle des associés en nom collectif ou en
commandite ne peut être rendu avant qu’il y ait condamnation de la société222.
Une manière – licite – de limiter la responsabilité dans les SNC et les SComm est de choisir comme
associés en nom collectif ou commandités des sociétés à responsabilité limitée (par exemple des SRL).
GESTION
Dans les sociétés en nom collectif et en commandite, le ou les gérants constituent l’organe
d’administration223.
DURÉE
Les statuts peuvent stipuler que la société en nom collectif ou en commandite continue en cas de
décès, de liquidation, d’incapacité ou de tout autre empêchement du gérant.
Dans ce cas, le président du tribunal de l’entreprise du siège de la société peut, sauf si les statuts en
disposent autrement, désigner, à la requête de tout intéressé, un administrateur provisoire, même
commanditaire (qui dans ce cas n’est responsable que de l’exécution de son mandat) 224.
90
Fanny Streveler MA1 DROIT
DISPENSES
Quelle que soit leur taille, les SNC et les SComm (ainsi que les GEIE) dont tous les associés à
responsabilité illimitée sont des personnes physiques sont, en raison de leur forme, dispensées de
l’application d’une série de règles :
- elles ne doivent pas établir de rapport de gestion225 ;
- elles ne doivent pas publier leurs comptes à la BNB226 ;
- elles ne doivent pas désigner de commissaire227.
91
Fanny Streveler MA1 DROIT
CHAPITRE 3 :
SA
92
Fanny Streveler MA1 DROIT
CONSTITUTION
1. CONDITIONS DE FOND
Les SA sont bien entendu soumises aux conditions de validité communes à toutes les sociétés.
Elles peuvent être constituées par une ou plusieurs personnes physiques ou morales.
Comme les actionnaires limitent leur responsabilité à leur apport, le CSA prévoit également des
règles destinées à protéger les tiers, en ce qui concerne le capital, le plan financier et les apports.
Des lois spéciales imposent des montants supérieurs pour les sociétés exerçant certaines activités
réglementées.
Cette interdiction ne s’applique pas à la souscription d’actions par la société filiale qui est « en sa
qualité d’opérateur professionnel sur titres, une société de bourse ou un établissement de
crédit »231.
93
Fanny Streveler MA1 DROIT
Libération du capital :
Le capital des SA doit être libéré au minimum à concurrence de 61.500 EUR 233.
Cette règle se cumule avec celles relatives à la libération des apports en numéraire et en nature.
Afin d’assurer un capital suffisant, le CSA impose que, préalablement à la constitution, les
fondateurs remettent au notaire instrumentant un plan financier dans lequel « ils justifient le
montant du capital de la société à constituer »235.
Cette technique, d’une part, force les fondateurs à réfléchir au montant du capital ou des capitaux
propres de départ et, d’autre part, permet de contrôler a posteriori si le capital ou les capitaux
propres de départ étaient suffisants au moment de la constitution, dans le cadre d’une action en
responsabilité contre les fondateurs.
Contenu :
Le plan financier est l’aspect chiffré d’un plan d’affaires conçu par les fondateurs. Il prend la forme
d’un état prévisionnel qui anticipe le chiffre d’affaires, les besoins d’investissement, de constitution
de stocks, de trésorerie, les frais,..., et qui démontre ainsi le caractère suffisant du capital pour
l’activité envisagée.
Bien que rien ne l’impose, il est opportun de s’appuyer sur des études de marché, des objectifs de
vente raisonnables, les données chiffrées relatives à l’exercice de l’activité apportée ou cédée à la
société,…
Le plan financier doit justifier un capital suffisant pour assurer « l’exercice normal de l’activité
projetée pendant une période de deux ans ou moins ». Ce délai vise les deux années calendrier qui
suivent la constitution et non les deux premiers exercices sociaux.
94
Fanny Streveler MA1 DROIT
Le plan n’est pas soumis au contrôle d’un réviseur d’entreprises ou d’un expert comptable externe.
Toutefois, le CSA prévoit que, si les fondateurs se font assister par un expert externe, ils doivent le
mentionner dans le plan financier.
Le notaire doit conserver le plan pendant une durée de trois ans à partir « de la constitution », ce
qui vise le dépôt de l’acte puisque, tant que l’acte n’est pas déposé, la société n’a pas la
personnalité et ne peut être déclarée en faillite. Le notaire doit conserver le plan au-delà de ce
terme de trois ans si la société est déclarée en faillite dans le délai de trois ans.
En cas de faillite de la société dans ce délai, le notaire doit transmettre le plan au tribunal de
l’entreprise, à la demande du juge-commissaire ou du Procureur du Roi.
Les règles qui suivent ne s’appliquent qu’aux apports qui contribuent à la formation du capital, par
opposition aux apports (en numéraire, en argent ou en industrie) faits en contrepartie de parts
bénéficiaires.
Apports en numéraire :
En propriété :
L’apport en numéraire ne peut être fait qu’en propriété : l’apport d’espèces en jouissance s’analyse
en un apport en nature. Lorsque des apports en numéraire contribuent à la constitution du capital,
le CSA impose des formalités particulières pour garantir la mise des fonds à la disposition effective
de la société au moment de sa constitution.
Une preuve du dépôt des apports en espèces auprès d’un établissement de crédit doit être remise
au notaire instrumentant.
Si la société n’est pas constituée dans le mois de l’ouverture du compte spécial, les fonds sont
restitués à leur demande à ceux qui les ont déposés237.
95
Fanny Streveler MA1 DROIT
Libération :
Les apports peuvent être libérés à concurrence d’une certaine fraction seulement. La libération des
actions à concurrence d’une fraction seulement permet aux actionnaires de ne pas devoir
immédiatement verser les fonds pour lesquels ils se sont engagés, tout en mettant à la disposition
de la société les fonds nécessaires pour entamer ses opérations.
Le législateur a cependant considéré qu’il fallait s’assurer du caractère sérieux des souscriptions.
Chacune des actions correspondant à un apport en numéraire doit être libérée au moment de la
passation de l’acte à concurrence d’un quart238.
L’acte constitutif peut toutefois exiger la libération des actions dans une mesure plus importante
que celle imposée par la loi, ou même leur libération intégrale.
Le CSA ne prévoit pas de délai maximal dans lequel les actions émises en contrepartie d’apports en
numéraire partiellement libérés au moment de la constitution doivent être entièrement libérées.
L’acte constitutif, les statuts ou un règlement d’ordre intérieur peuvent prévoir un calendrier de
libération des apports. A défaut, c’est l’organe d’administration qui détermine le moment des
appels de fonds, en respectant l’égalité des actions et conformément à l’intérêt de la société.
Apports en nature :
Objet :
Les apports en nature qui contribuent à la formation du capital doivent consister en éléments
d’actifs susceptibles d’évaluation économique, à l’exclusion des actifs constitués par des
engagements concernant l’exécution de travaux ou de prestations de services239.
Sont notamment considérés comme des éléments d’actifs susceptibles d’évaluation économique :
- tous les droits intellectuels (brevet, logiciel, marque) ;
- le savoir-faire qui se rapporte à un bien susceptible de faire l’objet d’un apport en nature, car il
est en principe inclus dans ce bien ;
- le goodwill, qui est indissociable du fonds de commerce auquel il se rapporte ;
- un contrat de concession ;
- une créance, par opposition à la position créditrice d’un compte-courant, qui ne constitue pas
une créance et ne peut faire l’objet d’un apport, sauf en cas de clôture de ce compte-courant
et d’exigibilité de son solde ;
- un fonds de commerce, de même que les branches d’activité et les universalités ;
- des droits de jouissance ;
- la mise à disposition d’un laboratoire ;
- les résultats d’études ou de projets ; en revanche, des engagements portant sur l’exécution de
travaux ou la prestation de services ne peuvent être rémunérés par des actions représentatives
de capital car il s’agit en réalité d’apports en industrie.
96
Fanny Streveler MA1 DROIT
Évaluation :
Les apports doivent être évalués à leur juste valeur.
S’ils sont surévalués de bonne foi, les fondateurs n’engagent pas leur responsabilité.
Toutefois, s’ils ont « manifestement » exagéré la valeur, ce qui laisse présumer qu’ils ont agi
sciemment, ils engagent leur responsabilité.
Sauf fraude aux droits des tiers, rien n’interdit une sous-évaluation des apports, par exemple parce
que les fondateurs estiment plus simple d’apporter des biens à leur valeur comptable.
Contrôle :
Sous réserve de certaines exceptions, les apports en nature doivent faire l’objet d’un contrôle
quant à leur valeur. Ce contrôle repose sur la rédaction d’un rapport spécial par les fondateurs et
d’un rapport par un réviseur d’entreprises.
Dans leur rapport, les fondateurs décrivent les apports en nature, les évaluent et exposent l’intérêt
qu’ils présentent pour la société240.
Les conclusions du rapport du réviseur doivent être intégralement et littéralement reproduites dans
l’acte constitutif. Les fondateurs préfèrent parfois, pour éviter une trop grande publicité, faire des
apports en numéraire et procéder ensuite à des quasi-apports (infra).
Les fondateurs ne sont pas tenus par les conclusions du réviseur mais, s’ils s’en écartent, ils doivent
justifier dans leur rapport les raisons pour lesquelles ils s’en écartent et courent le risque de voir
plus facilement démontrée une surévaluation manifeste des apports, auquel cas ils sont
susceptibles d’engager leur responsabilité.
97
Fanny Streveler MA1 DROIT
Ces rapports ne doivent par contre pas être annexés à l’acte constitutif.
Cette publicité soulève de délicats problèmes de discrétion puisque toute personne peut prendre
connaissance de ces rapports. Les fondateurs et le réviseur doivent concilier la description
adéquate des apports avec le secret des affaires de la société, notamment en cas d’apport de
brevet ou de savoir-faire.
Le rapport des fondateurs et le rapport du reviseur ne sont pas requis dans trois hypothèses dans
lesquelles le bien apporté a fait l’objet d’une évaluation récente :
- valeurs mobilières ou instruments du marché monétaire évalués au cours moyen pondéré
auquel ils ont été négociés sur un marché réglementé durant les trois mois précédant l’apport ;
- autres biens qui ont déjà été évalués par un reviseur d’entreprises dans les six mois précédant
l’apport ;
- autres biens dont la valeur est tirée des comptes annuels de l’exercice précédent à condition
que les comptes aient été contrôlés par un commissaire et que celui-ci ait donné une
attestation sans réserve de ces comptes.
Toutefois, les fondateurs doivent demander l’intervention du reviseur si la valeur du bien a été
affectée par des circonstances exceptionnelles (par ex. : le marché des valeurs mobilières n’est plus
liquide) ou nouvelles243.
Si l’apport a lieu sans l’intervention du reviseur, l’organe d’administration doit déposer une
déclaration au greffe du tribunal, dont le CSA indique le contenu.
Libération :
Le CSA exige la libération de chacune des actions correspondant à un apport en nature au moment
de la passation de l’acte à concurrence d’un quart. En outre, elles doivent être entièrement libérées
dans un délai de cinq ans à dater de la constitution de la société244.
Apports mixtes :
Les apports mixtes sont ceux qui sont effectués pour partie en nature et pour partie en numéraire
en contrepartie d’une seule action. De tels apports se font généralement lorsque chaque action a
une valeur nominale importante.
En cas d’apports mixtes, il faut combiner les règles relatives aux apports en numéraire et aux
apports en nature, et, quand cela n’est pas possible, comme c’est le cas lorsque les délais de
libération ne sont pas les mêmes, appliquer les règles les plus sévères.
Si l’apport forme un ensemble indivisible, il peut s’agir d’un apport en nature avec attribution d’un
avantage particulier ; si, en revanche, l’apport porte sur des biens distincts, il s’agit d’un apport en
98
Fanny Streveler MA1 DROIT
nature et d’une autre opération, par exemple une vente. Si les biens apportés pouvaient faire l’objet
d’une division mais ne l’ont pas fait (apport de marchandises ou de titres), l’apport doit être traité
comme celui d’un ensemble indivisible.
Dans le premier cas, il faut établir un seul rapport, en y mentionnant l’avantage particulier
attribué ; dans l’autre, il faut établir un rapport sur l’apport en nature et l’autre opération est, le cas
échéant, soumise au régime des quasi-apports.
Quasi-apports :
Problématique :
En l’absence de disposition spéciale, la réglementation sur les apports en nature pourrait aisément
être éludée en décomposant l’opération en une vente par l’actionnaire à la société suivie d’un
apport en espèces du produit de la vente par l’actionnaire à la société, ou l’inverse (apport en
espèces par l’actionnaire à la société puis vente d’un bien par l’actionnaire à la société à un prix
correspondant au montant des fonds apportés).
Pour prévenir une telle opération, le CSA impose le respect de formalités analogues à celles qui
sont prévues en cas d’apport en nature lorsque la société acquiert des biens de certaines personnes
pour une certaine valeur dans un certain délai après sa constitution. Cette opération est qualifiée
de quasi-apport245.
Champ d’application :
La réglementation des quasi-apports s’applique à l’acquisition par une société anonyme de tout
« bien ». Elle ne vise cependant pas l’opération par laquelle la société vend un bien à un actionnaire
alors que, dans cette hypothèse, se pose le problème inverse de la sous-évaluation. Une telle
opération peut donner lieu à l’application des règles relatives aux conflits d’intérêts.
Un bien est tout droit qui a une valeur pécuniaire, corporel ou incorporel, par exemple un immeuble
ou une créance.
Le bien que la société anonyme se propose d’acquérir doit appartenir à une personne qui a signé ou
au nom de laquelle a été signé l’acte constitutif, un actionnaire, un administrateur ou un membre
du conseil de direction et du conseil de surveillance.
L’acquisition doit avoir lieu dans un délai de deux ans à partir de la constitution de la société, ce qui
vise le dépôt de l’acte constitutif au greffe du tribunal. Sont également visées les acquisitions
résultant de la reprise, dans le délai de deux ans, d’engagements contractés par la société durant sa
période de formation. Cette précision était nécessaire : sinon, comme la reprise de l’engagement
rétroagit, ce dernier aurait été pris en dehors de la période de deux ans.
L’acquisition doit concerner un bien d’une contre-valeur au moins égale à un dixième du capital
souscrit. Seules les opérations importantes sont donc visées.
99
Fanny Streveler MA1 DROIT
Exceptions :
Ce régime ne s’applique pas :
- aux acquisitions faites dans les limites des opérations courantes conclues aux conditions et
sous les garanties normalement exigées par la société pour des opérations de même espèce ;
- aux opérations en bourse, qui se font par définition au prix du marché ;
- aux acquisitions résultant d’une vente ordonnée par justice, l’intervention du tribunal faisant
obstacle à toute surévaluation frauduleuse246 ;
- aux acquisitions de biens pour lesquels l’intervention du reviseur n’est pas requise en cas
d’apport en nature, avec les mêmes exceptions et également l’obligation de déposer une
déclaration au tribunal de l’entreprise dans le mois247.
Formalités :
Les quasi-apports doivent faire l’objet d’un rapport spécial de l’organe d’administration248 et du
commissaire ou, pour la société qui n’en a pas, d’un réviseur d’entreprises désigné par l’organe
d’administration249.
Dans ce rapport, l’organe d’administration expose, d’une part, l’intérêt que présente pour la société
l’acquisition envisagée et, d’autre part, les raisons pour lesquelles, éventuellement, il s’écarte des
conclusions du rapport du réviseur.
L’acquisition est soumise à l’autorisation préalable de l’assemblée générale250, qui se prononce sur
la base de ces rapports.
100
Fanny Streveler MA1 DROIT
2. CONDITIONS DE FORME
L’acte constitutif d’une SA doit être reçu par un notaire (→ acte authentique).
Celui-ci vérifie le respect des règles de constitution et notamment l’existence d’un plan financier, en
cas d’apports en espèces, le versement sur un compte spécial et, en cas d’apport en nature, la
rédaction du rapport des fondateurs et du rapport d’un reviseur d’entreprise.
3. SANCTIONS
A. Nullité
Conformément à la Directive 2017/1132, le CSA limite les causes de nullité des SA aux cas suivants :
l’absence d’un acte authentique ; l’absence de certaines des mentions que doit contenir cet acte ;
l’illicéité ou la contrariété à l’ordre public de l’objet et l’insuffisance du nombre de fondateurs 251.
Compte tenu de l’intervention obligatoire d’un notaire, ces causes de nullité sont assez théoriques.
Quelle que soit leur gravité, aucun autre vice ou irrégularité ne peuvent entraîner la nullité des
sociétés anonymes, que ce soit l’absence d’autres mentions que celles expressément indiquées,
l’illicéité de la cause, l’absence d’intérêt commun ou l’existence de clauses léonines252.
Selon plusieurs auteurs, le décret du 19 juillet 1973 du Conseil culturel de la Communauté culturelle
néerlandaise (qui prescrit l’usage du néerlandais dans les actes et documents imposés par la loi dans les cas
qu’il vise à peine de nullité) serait à cet égard contraire à la Directive 2017/1132, parce que d’une part il
créerait une nouvelle cause de nullité et d’autre part cette nullité opérerait avec effet rétroactif. Cette opinion
ne peut être suivie : la sanction édictée par le décret du 19 juillet 1973 frappe l’acte constitutif mais non la
société elle-même ; si la société est annulée, c’est en raison de l’absence d’acte authentique établi
conformément aux dispositions de la législation nationale et non en vertu d’une nouvelle cause de nullité qui
s’ajouterait à celles prévues par la directive ; si l’acte est annulé avec effet rétroactif, la société l’est pour
l’avenir seulement. Il s’ensuit que jusqu’au prononcé de la décision d’annulation, l’acte constitutif peut être
régularisé.
Cette disposition vise l’absence de toute indication par opposition à l’hypothèse dans laquelle des
indications figurent dans l’acte, mais sont incomplètes, imprécises, inexactes ou contraires à la loi.
101
Fanny Streveler MA1 DROIT
Ainsi, le libellé en termes vagues de l’objet, la fixation du capital à un montant inférieur au capital
minimum, ou une dénomination contraire aux règles applicables, n’entraînent pas la nullité de la
société.
Il s’agit de l’objet statutaire, par opposition à l’activité réellement exercée. L’exercice d’une activité
illicite peut tout au plus entraîner la dissolution de la société. De même, l’illicéité de la cause
(volonté de tromper les créanciers) n’entraîne pas la nullité.
L’insuffisance du nombre de fondateurs vise à la fois l’hypothèse dans laquelle le nombre de parties
à l’acte est insuffisant, ce qui est théorique puisqu’il doit être passé devant un notaire, et
l’hypothèse dans laquelle ce nombre devient insuffisant à la suite de l’annulation ultérieure de
l’engagement d’un ou plusieurs actionnaires.
Les comparants à l’acte constitutif sont considérés comme fondateurs de la société. Toutefois,
l’acte constitutif peut désigner comme fondateurs des actionnaires qui détiennent ensemble au
moins un tiers du capital. Dans ce cas, les autres comparants seront « tenus pour simples
souscripteurs », ce qui signifie qu’ils doivent uniquement répondre de leur souscription, sans
engager leur responsabilité comme fondateurs, à condition que 1) ils souscrivent uniquement des
actions en espèces ; 2) ils ne reçoivent aucun avantage particulier à cette occasion259.
102
Fanny Streveler MA1 DROIT
Libération effective :
Les fondateurs des SA sont tenus envers les intéressés :
- de la libération effective du capital minimum ;
- de la libération effective des actions à concurrence des fractions et dans les délais imposés par
la loi ;
- de la libération de la partie du capital dont ils sont réputés souscripteurs262.
Les fondateurs sont tenus « de la réparation du préjudice qui est une suite immédiate et directe de
la nullité de la société »264.
Comme la nullité opère sans effet rétroactif et la société annulée conserve sa personnalité pour les
besoins de la liquidation, il est rare qu’elle cause un préjudice aux tiers. En revanche, les
souscripteurs pourraient être lésés.
103
Fanny Streveler MA1 DROIT
Cette hypothèse n’est pas théorique. En effet, si, sous réserve de certaines exceptions, les
fondateurs doivent faire appel à un réviseur d’entreprises en cas d’apports en nature, ils ne sont
pas liés par les conclusions du réviseur ; en outre, il pourrait arriver qu’ils se dispensent à tort de
recourir à un réviseur (auquel cas le notaire qui prête son ministère à la passation de l’acte
engagerait sa responsabilité).
Le législateur a craint « que les appréciations portées après coup ne soient quelque peu
arbitraires ».
Conditions :
La mise en cause de la responsabilité des fondateurs sur cette base suppose la réunion des
conditions suivantes :
- Faillite dans les trois ans - La société doit être déclarée en faillite dans les trois ans de sa
constitution. La « constitution » au sens de ces dispositions vise le dépôt de l’acte constitutif.
- Capital manifestement insuffisant - Le capital doit être « manifestement insuffisant » pour
assurer l’exercice de l’activité pendant une période de deux ans au moins.
Ces termes traduisent l’idée que, conformément au droit commun, la responsabilité des
fondateurs doit s’apprécier de manière « marginale » : des divergences d’approche peuvent
exister et des erreurs raisonnables d’appréciation peuvent être admises.
Le contrôle du caractère manifestement insuffisant du capital s’opère par rapport au
comportement de personnes raisonnablement prudentes et diligentes placées dans les mêmes
circonstances, et non, in concreto, en fonction de leurs qualifications et professions.
L’absorption rapide par les frais de lancement de l’activité, des fonds apportés, est un indice
fréquent de l’insuffisance du capital, mais les tribunaux retiennent généralement un faisceau
d’éléments qui traduisent le manque de préparation des fondateurs.
- Sous-capitalisation lors de la constitution - Pour apprécier la sous-capitalisation de la société, le
juge doit se placer au moment de la constitution de la société et non a posteriori. Le juge doit
imaginer l’attitude d’un fondateur normalement prévoyant et consciencieux pour déterminer
si, eu égard aux prévisions raisonnables en matière de chiffre d’affaires, de crédits, d’avances,
de subsides, de frais et d’investissements, le capital (ou les capitaux propres de départ)
n’étaient pas manifestement insuffisants.
La capitalisation doit s’apprécier au regard de l’activité réellement projetée, et non de l’objet.
D’une part en effet, les clauses relatives à l’objet, souvent rédigées de manière large, ne sont
pas de nature à indiquer l’ampleur d’une activité ; l’activité ambitieuse annoncée dans les
statuts peut dissimuler une activité modeste, au regard de laquelle le capital sera amplement
104
Fanny Streveler MA1 DROIT
suffisant. D’autre part, on pourrait sinon éluder trop aisément les règles précitées, puisqu’il
suffirait à des fondateurs peu scrupuleux de prévoir dans les statuts une activité modeste et de
fixer le montant du capital en conséquence pour se soustraire à toute responsabilité sur cette
base, quels que soient l’activité réellement exercée et les risques réellement encourus.
Eléments d’appréciation :
Le plan financier n’est pas le seul élément d’appréciation. Il peut être complété et interprété à la
lumière d’autres documents, comme des études de marché ou des prévisions fondées sur le
rendement antérieur en cas d’apport d’une activité antérieure.
Même en l’absence de plan financier ou en cas de plan financier imprécis, les fondateurs peuvent
soumettre tous autres éléments pour souligner que le capital n’était pas manifestement insuffisant.
Pour poursuivre les fondateurs, il ne faut pas démontrer que la sous-capitalisation a été la cause,
ou l’une des causes, de la faillite. Les fondateurs ne peuvent donc pas s’exonérer de leur
responsabilité en prouvant que d’autres éléments ont provoqué la faillite.
Ces éléments peuvent cependant être pris en considération à d’autres fins, pour montrer qu’un
événement imprévisible a causé la faillite et que sans cet événement le capital aurait été suffisant.
Autres erreurs :
Les fondateurs ne sont pas responsables, en cette qualité, des erreurs de gestion commises
ultérieurement, même par eux. S’ils sont administrateurs, ils peuvent engager en cette qualité leur
responsabilité sur la base de l’article XX.225 du CDE (faute grave et caractérisée ayant contribué à
la faillite) ; il n’est pas rare que les deux fondements soient invoqués simultanément.
Etendue de la responsabilité :
Les fondateurs sont tenus des « engagements de la société », ce qui vise l’ensemble du passif, mais
uniquement « dans une proportion fixée par le juge ».
Pour fixer cette proportion, le tribunal se fonde sur des indices qui traduisent un mépris envers les
autres opérateurs économiques ou, à tout le moins, la désinvolture des fondateurs : l’insuffisance
du capital et l’absence de toute étude de la faisabilité du projet conduisent en général à condamner
les fondateurs à l’ensemble du passif.
Dans certains cas, les tribunaux déterminent le montant du capital complémentaire qui aurait été
nécessaire et en font la mesure de leur condamnation.
Certains tribunaux prennent en considération les avances faites à la société par les fondateurs
après s’être rendu compte de l’insuffisance du capital, dans la mesure où ces avances ont diminué
le montant des engagements de la société envers les tiers.
105
Fanny Streveler MA1 DROIT
Les dispositions du Code pénal relatives au faux ou à l’escroquerie sont susceptibles de s’appliquer
aux apports en société, par exemple en cas d’apport fictif, de surévaluation des apports en nature ou de
souscription simulée d’actions.
D. Responsabilité de tiers
Responsabilité du notaire :
Le notaire peut engager sa responsabilité s’il manque à son devoir de conseil ou s’il n’exécute pas
correctement les obligations qui lui incombent dans le cadre de la formation.
Le dépôt tardif de l’acte constitutif est sanctionné par une amende fiscale268.
Responsabilité du reviseur :
Le reviseur pourrait également engager sa responsabilité, envers les tiers, s’il n’a pas constaté dans
son rapport une surévaluation manifeste des apports en nature.
TITRES
Les sociétés anonymes doivent émettre au moins une action avec droit de vote mais peuvent
également émettre tous les titres qui ne sont pas interdits par la loi269, et notamment des parts
bénéficiaires, des droits de souscription et des obligations.
Elle peut émettre ces titres soit lors de la constitution de la société soit ultérieurement mais
l’émission de droits de souscription ou d’obligations lors de la constitution est plutôt théorique.
1. ACTIONS
Les actions sont des titres représentatifs du capital qui confèrent au moins le droit au dividende.
Les SA doivent émettre au moins une action et une action au moins doit avoir le droit de vote 270.
L’émission d’actions est décidée soit lors de la constitution, soit ultérieurement, par l’assemblée
générale ou l’organe d’administration dans le cadre du capital autorisé (infra).
Elles peuvent conférer des droits différents, en matière de vote, de dividendes, de présentation de
candidats à l’organe d’administration,…, auquel cas elles constituent des classes différentes
d’actions.
106
Fanny Streveler MA1 DROIT
Dans les sociétés non cotées, les statuts peuvent déroger à ce principe272 et prévoir un droit de vote
multiple.
Le CSA ne prévoit pas de limite sous forme de « multiplier » (fixation d’un maximum de droits de
vote par action).
Les actions représentant la même part du capital mais conférant des droits de vote distincts
constituent des classes différentes d’actions.
Dans les sociétés cotées, les statuts peuvent conférer aux actions entièrement libérées, qui sont
inscrites depuis au moins deux années sans interruption au nom du même actionnaire dans le
registre des actions nominatives, un double droit de vote par rapport aux autres actions
représentant une même part du capital273.
Ce « droit de vote de loyauté » vise un double objectif. D’une part, « cet avantage consenti aux
actionnaires fidèles vise à combattre le court-termisme et à promouvoir une vision à long terme »,
en vue d’encourager un actionnariat à long terme et l’engagement des actionnaires. D’autre part,
« il s’agit d’empêcher que, par peur d’une perte de contrôle, des actionnaires de contrôle décident
de ne pas franchir le pas d’une cotation en bourse dans des circonstances où un telle démarche
serait indiquée du point de vue économique et, plus précisément, du point de vue du financement
de l’entreprise » .
L’usage de cette possibilité suppose une décision de l’assemblée générale pour modifier les statuts,
à la majorité réduite des deux tiers des voix exprimées. Il ne peut être dérogé à cette majorité que
par une disposition statutaire qui vise spécifiquement l’introduction du droit de vote double. La
suppression du droit de vote double est soumise aux mêmes conditions de quorum et de majorité
que pour son introduction.
Les actions avec un double droit de vote de loyauté ne constituent pas une classe distincte 274. En
effet, le double droit de vote est lié à la personne de l’actionnaire et profite à toutes les actions à la
condition qu’elles satisfassent aux conditions.
Les actions avec un double droit de vote perdent ce double droit de vote dans une série
d’hypothèses, et notamment en cas de conversion en actions dématérialisées et en cas de cession
de la propriété (sous réserve de certaines exceptions : cessions au sein de la même famille ou d’un
même groupe de sociétés)275.
107
Fanny Streveler MA1 DROIT
Les actions sans droit de vote donnent droit nonobstant toute disposition contraire à une voix par
action dans les cas suivants :
- en cas de modification des droits attachés à des classes d’actions ;
- en cas de transformation de la société ;
- en cas de fusion transfrontalière entraînant la dissolution la société ;
- en cas de déplacement transfrontalier du siège276.
En cas d’émission d’actions sans droit de vote auxquelles un dividende privilégié est attribué, ces
actions bénéficient néanmoins d’un droit de vote, nonobstant toute disposition contraire dans les
statuts, la décision d’émission ou une convention si les dividendes privilégiés n’ont pas été
entièrement mis en paiement durant deux exercices successifs. Le droit de vote cesse à nouveau
lorsqu’il est distribué un dividende qui, additionné au dividende de l’exercice concerné, est
équivalent au montant des dividendes privilégiés non distribués277.
2. PARTS BÉNÉFICIAIRES
Les parts bénéficiaires sont des titres non représentatifs du capital, dont l’émission est décidée lors
de la constitution de la société ou par l’assemblée générale, qui confèrent un droit au dividende
ainsi que, le cas échéant, les autres droits déterminés par les statuts280.
En particulier, les statuts déterminent si, et dans quelle mesure, un droit de vote est accordé aux
titulaires de parts bénéficiaires.
Toutefois :
- les parts bénéficiaires ne peuvent, en aucun cas, se voir attribuer dans l’ensemble un nombre
de voix supérieur à la moitié de celui attribué à l’ensemble des actions, ni être comptées dans
le vote pour un nombre de voix supérieur aux deux tiers du nombre des voix émises par les
actions281 ;
émetteurs dont les actions sont admises à la négociation sur un marché réglementé et portant des dispositions
diverses.
280 CSA, art. 7:58, al. 1.
281 CSA, art. 7:59.
108
Fanny Streveler MA1 DROIT
- dans les sociétés cotées, les parts bénéficiaires ne peuvent pas donner droit à plus d’une voix
par titre282.
3. DROITS DE SOUSCRIPTION
Les droits de souscription sont des titres qui permettent de souscrire des actions de la société à un
prix fixé d’avance.
Ils peuvent être émis soit par l’assemblée générale soit par l’organe d’administration dans le cadre
du capital autorisé.
Ils sont fréquemment émis dans le cadre de plans d’intéressement du personnel aux résultats de la
société. Par exemple, la société les émet à un centime et ils donnent le droit de souscrire les actions de la
société à un prix égal à la valeur de ces actions au moment de la souscription des droits de souscription (par
exemple, 50 EUR). Le membre du personnel qui exerce son droit de souscription devra payer ce prix (par
exemple, 50 EUR) lors de l’exercice des droits de souscription, par exemple trois ans plus tard, même si à ce
moment la valeur de l’action est supérieure (par exemple, 100 EUR). Les objectifs poursuivis sont à la fois
l’optimalisation de la rémunération des travailleurs (grâce à un régime fiscal avantageux) et la
fidélisation des travailleurs (dans la mesure où ils ne peuvent exercer leurs droits de souscription
que si leur contrat de travail n’a pas pris fin au moment de cet exercice).
Les droits de souscription ne peuvent pas être confondus avec les options qui sont des titres qui
permettent d’acheter des actions.
4. OBLIGATIONS
En principe, l’organe compétent pour émettre des obligations est l’organe d’administration. Il peut
également s’agir de l’assemblée générale pour les obligations qui supposent une augmentation de
capital, soit les obligations convertibles ou remboursables en actions :
- les obligations convertibles en actions permettent à leur titulaire de souscrire des actions au
lieu d’obtenir le remboursement à l’échéance ;
- les obligations remboursables en actions sont remboursables non en argent mais en actions de
la société.
Les obligations convertibles ou remboursables en actions supposent que la société augmente son
capital au moment de la conversion ou du remboursement (sous réserve de l’hypothèse dans
laquelle elle détient des actions propres en nombre suffisant). Leur émission doit donc être décidée
soit par l’assemblée générale soit par l’organe d’administration dans le cadre du capital autorisé.
109
Fanny Streveler MA1 DROIT
Les statuts déterminent librement la forme des titres, sous réserve que les actions sont
obligatoirement nominatives dans les deux cas suivants :
- lorsqu’elles ne sont pas entièrement libérées283 ;
- lorsqu’un actionnaire demande la conversion de ses actions dématérialisées en actions
nominatives 284.
Le titre nominatif est celui dont la propriété s’établit par une inscription dans le registre des titres
nominatifs de la société. En principe, dès la constitution de la société, il faut donc procéder aux
inscriptions dans le registre.
Le titre dématérialisé est celui dont la propriété s’établit par une inscription dans le registre du
teneur de comptes (essentiellement les établissements de crédit) ou d’un organisme de liquidation
(Euroclear).
Les statuts (ou une convention entre actionnaires) peuvent cependant restreindre dans une
certaine mesure la libre cessibilité des titres, sans jamais pouvoir les rendre totalement incessibles.
Les clauses les plus fréquentes à cet égard sont les clauses d’inaliénabilité, les clauses d’agrément
et de préemption, les clauses de droit de suite (tag along) et d’obligation de suite (drag along) et les
clauses de buy or sell.
110
Fanny Streveler MA1 DROIT
Pour être valables, les clauses d’inaliénabilité doivent être justifiées par un intérêt légitime,
notamment en ce qui concerne leur durée. Les clauses d’inaliénabilité d’une durée indéterminée
peuvent à tout moment être dénoncées moyennant le respect d’un préavis raisonnable286.
Exemple : « les actions sont incessibles pendant cinq ans à compter de la date de l’acte constitutif de la
société ».
Lorsque la limitation résulte d'une clause d'agrément ou d'une clause de préemption, l'application
de ces clauses ne peut aboutir à ce que l'incessibilité soit prolongée plus de six mois à dater de la
demande d'agrément ou de l'invitation à exercer le droit de préemption ; si ces clauses prévoient
un délai supérieur à six mois, celui-ci est de plein droit réduit à six mois287.
Exemple :
1. Généralités
a) Sauf convention contraire, le présent Article s’applique à toute Cession de Titres, quelle qu’en soit la
forme.
b) Les Actionnaires peuvent renoncer aux délais prescrits par le présent Article.
2. Agrément
a) Tout Actionnaire qui envisage de céder des Titres à un tiers (le « Candidat Cessionnaire ») doit notifier
au conseil d'administration la Cession envisagée, en vue de l'agrément de ce dernier par le conseil
d'administration, en précisant :
i. l’identité complète du Candidat Cessionnaire;
ii. le nombre, et le cas échéant les numéros, des Titres à Céder (les « Titres
Offerts »);
iii. le prix convenu pour les Titres Offerts;
iv. les modalités et conditions de la Cession envisagée;
v. la preuve que le Candidat Cessionnaire dispose de moyens financiers suffisant pour acquérir les
Titres Offerts;
vi. l’accord irrévocable du Candidat Cessionnaire d’adhérer aux présentes comme s’il en était le
signataire dès l’origine en lieu et place de l'Actionnaire cédant.
A cette notification est jointe une copie de l'offre du Candidat Cessionnaire.
b) Dans les vingt (20) Jours Ouvrables qui suivent l'envoi de cette notification, le conseil d'administration
statue, à la majorité simple, sur l'agrément du Candidat Cessionnaire.
111
Fanny Streveler MA1 DROIT
Le refus d'agrément du Candidat Cessionnaire doit être fondé sur de justes motifs.
La décision du conseil d'administration n’est susceptible d’aucun recours. Le conseil d’administration la
notifie à l’Actionnaire cédant dans les trois (3) Jours Ouvrables à compter de la date à laquelle le conseil
d'administration s’est prononcé sur l’agrément.
A défaut de communication à l’Actionnaire cédant de la décision prise par le conseil d'administration dans
les trente (30) Jours Ouvrables de la notification de la demande d’agrément du Candidat Cessionnaire, le
conseil d'administration est réputé avoir donné son agrément à la Cession.
c) En cas de refus d'agrément, l'Actionnaire cédant doit notifier au conseil d'administration s'il renonce ou
non à son projet de Cession initial, c’est-à-dire relatif à l’ensemble des Titres Offerts, dans un délai de dix
(10) Jours Ouvrables à compter du refus, notifié ou non, du conseil d'administration. A défaut de
notification par l’Actionnaire cédant au conseil d'administration, l’Actionnaire cédant est réputé avoir
renoncé à son projet de Cession.
d) En cas de refus d’agrément du Candidat Cessionnaire et à défaut de renonciation à la Cession, le point
3 s’applique.
3. Droit de préemption
a) En cas de refus d’agrément du Candidat Cessionnaire et à défaut de renonciation à la Cession, les Titres
doivent être préalablement offerts à la vente aux autres Actionnaires de la manière décrite ci-après:
b) Le conseil d’administration notifie la Cession aux autres Actionnaires par lettre recommandée (la «
Notification de la Cession »), en précisant :
i. l’identité complète du Candidat Cessionnaire;
ii. les Titres Offerts ;
iii. le prix convenu pour les Titres Offerts;
iv. les modalités et conditions de la Cession envisagée;
v. la preuve que le Candidat Cessionnaire dispose de moyens financiers suffisant pour acquérir les
Titres Offerts;
vi. l’accord irrévocable du Candidat Cessionnaire d’adhérer aux présentes comme s’il en était le
signataire dès l’origine en lieu et place de l'Actionnaire cédant.
A cette notification, il joint une copie de l'offre du Candidat Cessionnaire.
c) Le droit de préemption des Actionnaires concerne l’ensemble des Titres Offerts, et s’exerce aux
conditions offertes par le Candidat Cessionnaire, étant toutefois entendu que :
i. en cas de Cession de Titres, ceux-ci doivent être cédés aux autres Actionnaires selon les mêmes
modalités et conditions que celles énoncées par le Candidat Cessionnaire, sous réserve que le prix leur
sera en toutes circonstances versé en numéraire ;
ii. toute Cession de Titres est soumise (i) à un droit de préemption de 1er rang au profit des
Actionnaires de la même catégorie (les « Actionnaires de Premier Rang »), (ii) à un droit de préemption
de 2ème rang au profit des Actionnaires de l’autre catégorie (les « Actionnaires de Second Rang »).
iii. Les Actionnaires de Premier Rang disposent d’un délai de trente (30) Jours Ouvrables à compter de
la Notification de la Cession pour exercer leur droit de préemption sur tout ou partie des Titres Offerts
et en aviser, par lettre recommandée, le conseil d'administration de la Société. L'absence d'exercice du
droit de préemption dans le délai imparti vaut renonciation expresse à l'exercice de ce droit. Au plus
tard huit (8) Jours Ouvrables après l'expiration du délai de trente (30) Jours Ouvrables susvisé, le
conseil d’administration informe les Actionnaires de Second Rang du nombre de Titres Offerts à l'égard
desquels un droit de préemption de 1er rang a été exercé (la « Notification 1 »).
iv. A défaut pour les Actionnaires de Premier Rang d'avoir exercé leur droit de préemption dans les
délais susvisés ou si leur droit de préemption n'a pas été exercé sur la totalité des Titres Offerts, les
Actionnaires de Second Rang disposent d’un délai de trente (30) Jours Ouvrables à compter de la
Notification 1 pour exercer leur droit de préemption sur le solde des Titres Offerts et en aviser, par
lettre recommandée, le conseil d'administration de la Société. L'absence d'exercice du droit de
préemption dans le délai imparti vaut renonciation expresse à l'exercice de ce droit. Au plus tard huit
(8) Jours Ouvrables après l'expiration du délai de trente (30) Jours Ouvrables susvisé, le conseil
112
Fanny Streveler MA1 DROIT
d’administration informe les Actionnaires du nombre de Titres Offerts à l'égard desquels un droit de
préemption de 2ème rang a été exercé (la « Notification 2 »).
v. si le nombre total de Titres pour lesquels les Actionnaires ont exercé leur droit de préemption excède
le nombre de Titres Offerts, les Titres Offerts sont répartis entre les Actionnaires ayant exercé leur droit
de préemption proportionnellement à leur participation dans le capital de la Société, laquelle est
calculée sans prendre en compte la participation de l'Actionnaire cédant et de tout Actionnaire non
intéressé.
vi. si les Actionnaires ne souscrivent pas ou souscrivent partiellement aux Titres Offerts, les
Actionnaires ayant exercé leur droit de préemption peuvent souscrire à de tels Titres ou au solde de
ceux-ci, proportionnellement à leur participation dans le capital de la Société, laquelle est calculée sans
prendre en compte la participation de l'Actionnaire cédant et de tout Actionnaire non intéressé.
vii. au cas où la totalité des Titres Offerts n'a pas été acquise par les Actionnaires restants, le Candidat
Cessionnaire peut acquérir les titres restants.
d) La propriété des Titres Offerts sera transférée aux Actionnaires ayant exercé leur droit de préemption
au jour du paiement du prix des Titres - lequel doit être exécuté dans les trente (30) Jours Ouvrables à
compter de la Notification 1 ou, le cas échéant, de la Notification 2.
Une clause de droit de suite est une clause en vertu de laquelle les actionnaires (généralement
minoritaires) ont le droit de céder, au même prix, leurs titres au tiers auquel d’autres actionnaires
(généralement majoritaires) cèdent leurs titres. Son objectif est de protéger les actionnaires
minoritaires d’un changement de contrôle de la société : s’ils ne font pas confiance au cessionnaire,
ils peuvent lui céder leurs titres.
Ces deux types de clauses sont souvent (mais pas toujours) combinées.
Exemple :
1. Droit de suite
a) Dans l’hypothèse où un ou plusieurs Actionnaires envisagent de Céder (en une ou plusieurs opérations
formant un tout) tout ou partie de leurs Actions représentant au moins cinquante pourcent (50%) des
Actions émises à ce moment, à un Tiers Acquéreur, les autres Actionnaires bénéficieront d’un droit de
suite, tel que modalisé au présent Article (le Droit de Suite).
b) Sauf en cas d’application de l’obligation de suite visée au point 2, l’Actionnaire qui envisage de Céder
tout ou partie de ses Actions à un Tiers Acquéreur devra notifier son intention aux autres Actionnaires et
au conseil d’administration, par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de dix (10)
Jours Ouvrables. Cette notification devra notamment comprendre les informations et déclarations
suivantes :
i. le nom, l'adresse, ou la dénomination et le siège social, ainsi que la nationalité du Tiers Acquéreur ;
ii. l'indication que son offre est ferme et irrévocable et financée de manière inconditionnelle ;
iii. le nombre et, le cas échéant, les numéros des Actions que l’Actionnaire concerné envisage de Céder ;
iv. le prix offert par le Tiers Acquéreur ainsi que les conditions et modalités de la Cession ;
v. le moment envisagé du transfert de propriété des Actions visées par la Cession ; et
vi. l’engagement du Tiers Acquéreur d’être lié par la présente Convention.
c) Dans les dix (10) Jours Ouvrables à compter de la réception de la notification visée au point 1.b, les
autres Actionnaires devront notifier à l’Actionnaire ayant procédé à la notification, (i) leur intention ou
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Fanny Streveler MA1 DROIT
non de faire usage du Droit de Suite et, le cas échéant, (ii) le nombre d’Actions pour lesquelles ils
souhaitent l’exercer. L’exercice du Droit de Suite par un Actionnaire déclenche de plein droit l’obligation
pour le Tiers Acquéreur ou, à défaut, pour l’Actionnaire ayant procédé à la notification, d’acquérir les
Actions mentionnées dans cette notification aux conditions indiquées.
d) Le prix représentant la contrepartie des Actions transférées devra être payé au plus tard au jour de la
réalisation de la Cession.
2. Obligation de suite
a) Chaque Actionnaire s’engage de manière inconditionnelle et irrévocable à ajouter l’ensemble de ses
Actions à une Cession effectuée par un ou plusieurs Actionnaires ayant décidé de céder ensemble plus de
quatre-vingt pourcent (80%) des Actions émises à ce moment et dont ils sont propriétaires en faveur d'un
Tiers Acquéreur (l’Obligation de Suite), étant entendu que l’Actionnaire qui est soumis à l’Obligation de
Suite doit Céder ses Actions au même prix, et sous les mêmes conditions et modalités que celles convenues
entre le Tiers Acquéreur et l’Actionnaire cédant.
b) L(les)’Actionnaire(s) cédant(s) notifiera(ont) aux autres Actionnaires et au conseil d’administration, par
lettre recommandée avec accusé de réception, l'application du présent Article dans un délai de dix (10)
Jours Ouvrables à compter de la réception de l’offre ferme et irrévocable du Tiers Acquéreur. Cette
notification devra notamment comprendre les informations et déclarations suivantes :
i. le nom, l'adresse, ou la dénomination et le siège social, ainsi que la nationalité, du Tiers Acquéreur ;
ii. l’indication que son offre est ferme et irrévocable ;
iii. le nombre et les numéros des Actions visées par la Cession ;
iv. le prix offert par le Tiers Acquéreur ainsi que les conditions et modalités de la Cession ; et
v. le moment envisagé du transfert de propriété des Actions visées par la Cession.
c) La propriété des Actions détenues par les Actionnaires soumis à l’Obligation de Suite, ainsi que
l'ensemble des droits qui y sont attachés, seront transférés au Tiers Acquéreur à la date à laquelle le(s)
compte(s) de ces Actionnaires aura (auront) été crédité(s) du montant du prix d’acquisition de leurs
Actions.
La clause de buy or sell est une clause qui permet à un actionnaire d’offrir ses titres en vente à un
autre actionnaire et, si ce dernier refuse, de lui acheter ses titres au même prix. Son objectif est de
mettre fin à des situations de blocage au sein de la société.
Exemple :
Clause de sauvegarde
1. Blocage Persistant
Si un organe de la Société se trouve dans l’impossibilité d’adopter une décision indispensable à la bonne
marche des activités de la Société conformément à son objet ou à la sauvegarde de ses intérêts commerciaux
fondamentaux, au cours d’au moins deux (2) réunions ayant cette décision à l’ordre du jour, étant précisé
qu’une période d’au moins un (1) mois devra s’être écoulée entre la première et la deuxième réunion, la
situation sera considérée comme un blocage persistant (le « Blocage Persistant »).
Si une Partie considère qu’un Blocage Persistant est survenu et qu’en conséquence, les affaires et les
perspectives de la Société sont gravement et de manière néfaste affectées, cette Partie peut le notifier à
l’autre Partie (la « Notification de Blocage Persistant »).
La Notification de Blocage Persistant contient :
i. un résumé de la situation de Blocage Persistant ;
ii. des propositions de solutions pour résoudre le Blocage Persistant, le cas échéant ; et
iii. trois (3) propositions de dates en vue d’organiser une réunion entre les administrateurs délégués
respectifs des Parties, ou à défaut d’administrateur délégué, entre les représentants seniors respectifs des
Parties, dans un délai de trente (30) Jours Ouvrables en vue de résoudre le Blocage Persistant.
114
Fanny Streveler MA1 DROIT
Chaque Partie s’efforce de se mettre d’accord sur une date pour une telle réunion (ou réunions) et négocie de
bonne foi pour tenter de résoudre le Blocage Persistant à l’amiable.
Si les Parties échouent à résoudre le Blocage Persistant dans un délai de soixante (60) jours après la date de
la Notification de Blocage Persistant, le point 2 sera d’application.
2. Clause de buy or sell
Au cas où un Blocage Persistant ne peut être résolu dans le délai visé au point 1, dernier alinéa :
i. Chacune des Parties (la « Partie Résiliante ») pourra, dans un délai de quinze (15) Jours Ouvrables après
l’expiration du délai mentionné ci-dessus, notifier par écrit à l’autre Partie (une «Notification de
Résolution de Blocage Persistant» et la «Partie non Résiliante ») (i) qu’elle souhaite acquérir l’ensemble
des Actions détenues par la Partie non Résiliante en (ii) spécifiant le prix et les conditions proposées par
Action. Une telle Notification de Résolution de Blocage Persistant est irrévocable. La Partie non Résiliante
ne peut plus ensuite notifier de Notification de Résolution de Blocage Persistant.
ii. La Partie non Résiliante, dans un délai de quinze (15) Jours Ouvrables après réception de la Notification
de Résolution de Blocage Persistant, pourra décider de soit (i) vendre toutes ses Actions à la Partie
Résiliante aux prix et conditions mentionnés dans la Notification de Résolution de Blocage Persistant ; ou
soit (ii) acheter l’ensemble des Actions de la Partie Résiliante au prix et aux conditions spécifiés dans la
Notification de Résolution de Blocage Persistant.
Si la Partie non Résiliante décide d’appliquer la solution mentionnée sous le point (i) ou si la Partie non
Résiliante ne réagit pas dans un délai de (15) Jours Ouvrables après réception de la Notification de Résolution
de Blocage Persistant, la vente de ses Actions sera mise en œuvre. Si la Partie non Résiliante décide d’opter
pour la solution mentionnée sous le point (ii), la vente des Actions de la Partie Résiliante sera mise en œuvre.
On peut citer comme arguments en faveur de l’insertion de ce type de clauses dans les statuts :
- leur force obligatoire vis-à-vis de tous les associés ;
- leur opposabilité aux tiers. Une cession faite en violation d’une restriction statutaire à la
cessibilité régulièrement rendue publique ne peut être opposée ni à la société, ni aux tiers
même de bonne foi, même lorsque la restriction statutaire ne figure pas dans le registre des
actionnaires 288. En revanche, les restrictions à la cessibilité qui figurent dans des conventions
d’actionnaires extrastatutaires et qui ne sont pas mentionnés dans le registre ne peuvent pas
être opposées aux tiers et ne peuvent donc pas être exécutées en nature, sauf en cas de tierce-
complicité du tiers ;
- la possibilité d’opposer une clause d’agrément à l’auteur d’une offre publique d'acquisition. En
principe, « dès la réception par la société de la communication faite par l’Autorité des services
et marchés financiers selon laquelle elle a été saisie d'un avis d'offre publique d'acquisition la
concernant et, en cas de refus d'agrément ou d'application des clauses de préemption, les
titulaires de titres doivent se voir proposer, dans les cinq jours suivant la clôture de l'offre,
l'acquisition de leurs titres à un prix au moins égal au prix de l'offre ou de la contre-offre, par
une ou plusieurs personnes bénéficiant de l'agrément ou à l'égard desquelles le droit de
préemption ne serait pas invoqué »289. Toutefois, « les clauses d'agrément figurant soit dans les
statuts, soit dans un acte authentique d'émission d'obligations convertibles ou de droits de
souscription pourront être opposées à l'auteur de l'offre publique par l’organe d'administration
de la société visée pour autant que le refus d'agrément soit justifié par l'application constante
115
Fanny Streveler MA1 DROIT
et non discriminatoire des règles d'agrément qu’il a adoptées (...) et communiquées à l’Autorité
des services et marchés financiers avant la date de la réception de la communication visée à
l'article 7:79 »290.
On peut citer comme arguments en faveur de l’insertion de ce type de clauses dans une
convention :
- leur discrétion, surtout s’il y a des éléments confidentiels concernant la fixation du prix ;
- la difficulté d’insérer dans les statuts des clauses parfois kilométriques (parfois six, sept tours,
avec des aller et retour vers les actionnaires d’une même catégorie si tous les actionnaires de
cette catégorie ne se portent pas acquéreurs au premier tour) ;
- seules les conventions extrastatutaires permettent de régler les cessions indirectes réalisées
par la cession du contrôle d’un actionnaire.
C. Publicité
Le registre des actions nominatives doit mentionner les restrictions à la cessibilité des actions
résultant des statuts et, lorsqu’une des parties le demande, celles résultant de conventions ou des
conditions d’émission291. En cas de contradiction entre les statuts et le registre des actions, les
statuts prévalent292.
Une cession contraire aux restrictions à la cessibilité qui figurent dans des statuts publiés
régulièrement n’est opposable ni à la société ni aux tiers, que le cessionnaire soit de bonne ou de
mauvaise foi, même lorsque la restriction statutaire ne figure pas dans le registre des
actionnaires 293.
Le cédant et le cessionnaire peuvent déterminer entre eux qui sera tenu in fine. A défaut d’accord
entre eux, c’est le cessionnaire qui est tenu295.
116
Fanny Streveler MA1 DROIT
même délai, en cas de cession de titres lorsque, à la suite de cette cession, les droits de vote
tombent en deçà du seuil précité de 25 %.
A défaut,
- celui qui a omis de faire cette déclaration 20 jours au moins avant l’assemblée générale ne peut
prendre part au vote à l’assemblée générale pour un nombre de voix supérieur ou égal à 25 %
du total des droits de vote existant à la date de l’assemblée générale296 ;
- à la demande de la société ou d’un ou de plusieurs actionnaires ayant le droit de vote, le
président du tribunal de l’entreprise du siège de la société, statuant comme en référé, peut :
o suspendre pour une période d’un an au plus l’exercice de tout ou partie des droits
afférents aux titres concernés ;
o suspendre pendant la durée qu’il fixe, la tenue d’une assemblée générale déjà
convoquée ;
o ordonner la vente, sous son contrôle, des titres concernés à un tiers297.
B. Sociétés cotées
Toute personne physique ou entité juridique qui acquiert, directement ou indirectement, des titres
conférant le droit de vote d'une société cotée doit notifier dans les 4 jours de cotation à celle-ci et à
la FSMA le nombre et le pourcentage de droits de vote existants qu'elle détient à la suite de cette
acquisition, lorsque les droits de vote attachés aux titres conférant le droit de vote atteignent une
quotité de 5 % ou plus du total des droits de vote existants, et ainsi de suite par tranches de 5%.
Une notification est également obligatoire lorsque, à la suite d'événements qui ont modifié la
répartition des droits de vote, le pourcentage de droits de vote attachés aux titres conférant le
droit de vote, détenus directement ou indirectement, atteint, dépasse ou tombe en dessous des
seuils, même en l’absence d’acquisition ou de cession298.
La société cotée qui a reçu une notification doit publier toutes les informations contenues dans la
notification au plus tard dans les trois jours de cotation qui suivent sa réception300.
A défaut,
- celui qui a omis de faire cette déclaration 20 jours au moins avant l’assemblée générale ne peut
prendre part au vote à l’assemblée générale pour un nombre de voix supérieur ou égal à 5 %
(ou la quotité inférieure fixée par les statuts) du total des droits de vote existant à la date de
l’assemblée générale ;
- à la demande de la société ou d’un ou de plusieurs actionnaires ayant le droit de vote, le
président du tribunal de l’entreprise du siège de la société, statuant comme en référé, peut :
actions sont admises à la négociation sur un marché réglementé et portant des dispositions diverses.
299 art. 18 de la loi du 2 mai 2007.
300 art. 14 de la loi du 2 mai 2007.
117
Fanny Streveler MA1 DROIT
o suspendre pour une période d’un an au plus l’exercice de tout ou partie des droits
afférents aux titres concernés ;
o suspendre pendant la durée qu’il fixe, la tenue d’une assemblée générale déjà
convoquée ;
o ordonner la vente, sous son contrôle, des titres concernés à un tiers301 ;
- le contrevenant s’expose à des sanctions pénales (emprisonnement et/ou amendes) et des
sanctions administratives (astreintes et amendes)302.
9. CERTIFICATION
Pas matière d’examen 2020-2021.
ADMINISTRATION
1. MODÈLES DE GOUVERNANCE
Le CSA prévoit trois modèles de gouvernance pour les sociétés anonymes :
- un conseil d’administration classique (système moniste) ;
- un administrateur unique qui peut être irrévocable et avoir un droit de veto sur certaines
décisions (ce qui « reconstitue » la société en commandite par actions) ;
- un véritable système dualiste, avec un conseil de direction et un conseil de surveillance. Ce
système consiste à répartir l’administration de la société entre deux organes dont les pouvoirs
sont définis par le CSA : un conseil de direction compétent pour l’ensemble des matières
opérationnelles et un conseil de surveillance appelé, d’une part, à se prononcer sur les grandes
orientations stratégiques de la société et sur un certain nombre de questions qui lui sont
spécifiquement réservées, et, d’autre part, à superviser le conseil de direction. Ces deux
organes sont nettement séparés : leurs compétences ne se chevauchent pas et nul ne peut être
membre des deux organes à la fois.
Les statuts peuvent apporter des restrictions aux pouvoirs du conseil d'administration. Ces
restrictions, de même que la répartition éventuelle des tâches dont les administrateurs seraient
convenus, ne sont pas opposables aux tiers, même si elles sont publiées304.
118
Fanny Streveler MA1 DROIT
Le conseil d'administration peut créer en son sein et sous sa responsabilité un ou plusieurs comités
consultatifs. Il définit leur composition et leur mission.
Administrateurs :
Le conseil d'administration doit comporter au minimum trois administrateurs, sauf dans
l’hypothèse où la société compte moins que trois actionnaires, auquel cas ils peuvent être deux305.
Les statuts peuvent prévoir un minimum supérieur et/ou un maximum.
Ils peuvent également prévoir un processus de présentation par les actionnaires des différentes
catégories.
L’assemblée générale nomme les administrateurs et peut les révoquer ad nutum, sans préavis ni
indemnité. Les statuts peuvent cependant prévoir que, sauf justes motifs, l’assemblée générale ne
peut mettre fin au mandat d’administrateur que moyennant le respect d’un préavis ou le paiement
d’une indemnité306.
Le principe de la révocation ad nutum est donc supplétif, sauf en cas de justes motifs.
En cas de vacance d’une place d’administrateur, les administrateurs restants ont le droit de coopter
un nouvel administrateur, sauf si les statuts l’excluent. La première assemblée générale qui suit se
prononce sur la confirmation du mandat de l’administrateur coopté307.
Administrateurs indépendants :
Les sociétés cotées doivent avoir au moins trois administrateurs indépendants.
Cette obligation résulte des articles 7:99 et 7:100 du CSA, qui leur imposent (sous réserve de
certaines exceptions) de constituer au sein de leur conseil d'administration un comité d’audit et un
comité de rémunération composé d’au moins un administrateur indépendant (comité d’audit) ou
d’une majorité d’administrateurs indépendants (comité de rémunération).
En outre, dans ces sociétés, les opérations visées par l’article 7:97 (opérations intra-groupe) doivent
être soumises à un comité composé de trois administrateurs indépendants, de sorte qu’il est utile,
pour ces sociétés, d’avoir, avant que la question ne se pose, trois administrateurs indépendants
(infra).
Enfin, le Code belge de gouvernance d’entreprise impose aux sociétés cotées d’avoir un nombre
approprié et au moins trois administrateurs indépendants308. Les sociétés cotées doivent désigner
dans leur déclaration de gouvernement d’entreprise (qui est une section spécifique du rapport de
gestion) le code de gouvernement d’entreprise qu’elles appliquent 309. Il s’agit obligatoirement du
Code belge de gouvernance d'entreprise 2020. En désignant ce Code, les sociétés cotées s’imposent
d’avoir au moins trois administrateurs indépendants.
119
Fanny Streveler MA1 DROIT
Un administrateur d’une société cotée est considéré comme indépendant s’il n’entretient pas avec
la société ou un actionnaire important de celle-ci de relation qui soit de nature à mettre son
indépendance en péril. Si l’administrateur est une personne morale, l’indépendance doit être
appréciée tant dans le chef de la personne morale que de son représentant permanent. Afin de
vérifier si un candidat administrateur répond à cette condition, il est fait application des critères
prévus dans le Code belge de gouvernance d’entreprise 2020. Un candidat administrateur qui
remplit ces critères est présumé, jusqu’à preuve du contraire, être indépendant310.
120
Fanny Streveler MA1 DROIT
Le Code belge de gouvernance d’entreprise 2020 prévoit que la majorité des administrateurs sont
non exécutifs312.
Parité :
Dans les entités d’intérêt public, au moins un tiers des membres du conseil d'administration
doivent être de sexe différent de celui des autres membres (le nombre minimum requis est arrondi
au nombre entier le plus proche)313.
Par exemple, si une société cotée a un conseil d'administration de dix membres, ce conseil d'administration
doit être composé comme suit : 3 + 7, 4 + 6 ou 5 + 5.
Sanctions :
- si la prochaine assemblée générale ne constitue pas un conseil d'administration dont la
composition est conforme à ces exigences, tout avantage, financier ou autre, de tous les
administrateurs, lié à l’exécution de leur mandat, est suspendu314 ;
- toute nomination ultérieure d’un administrateur du sexe surreprésenté est nulle315.
Réunions :
Les statuts peuvent prévoir les modalités de réunion du conseil d'administration (convocation,
présidence, nombre minimum de réunions par an,...) et quelles sont les personnes habilitées à
délivrer des extraits certifiés conformes des décisions du conseil d'administration (usuellement :
deux administrateurs, ou le président et un autre administrateur).
121
Fanny Streveler MA1 DROIT
Les administrateurs forment un collège. Ce principe implique une délibération mais pas une
réunion physique entre tous les administrateurs de sorte qu’une décision prise dans le cadre d’une
conférence téléphonique ou une vidéoconférence est valable. Les statuts peuvent le préciser.
Les décisions du conseil d'administration peuvent être prises par consentement unanime des
administrateurs, exprimé par écrit, à l’exclusion des décisions pour lesquelles les statuts excluent
cette possibilité316.
Les statuts peuvent prévoir que le conseil d'administration se réunit un minimum de fois par an,
que les administrateurs peuvent conférer des mandats spéciaux,...
Une série de précisions peuvent également se trouver dans la charte de gouvernance d’entreprise
de la société.
Dans les sociétés cotées, l’administrateur unique doit être une société anonyme administrée par un
organe collégial.
Dans ce cas, si l’administrateur unique est une société anonyme avec un conseil d’administration,
les dispositions en matière de conseil d’administration s’appliquent par analogie au conseil
d’administration de l’administrateur unique et aux membres de celui-ci. Par exemple, dans les sociétés
cotées, le conseil d’administration de l’administrateur unique doit comporter au moins trois administrateurs
indépendants et au moins un tiers des administrateurs doit être de l’autre sexe.
Si l’administrateur unique est une société anonyme avec une administration duale, les dispositions
en matière d’administration duale s’appliquent par analogie à son conseil de surveillance et à son
conseil de direction et à leurs membres.
Irrévocabilité :
Même si le consentement de l’administrateur unique est nécessaire à sa révocation en vertu d’une
disposition statutaire, l’assemblée générale peut mettre fin à son mandat sans son consentement,
aux conditions de quorum et de majorité requises pour la modification des statuts, pour de justes
motifs.
122
Fanny Streveler MA1 DROIT
Les titulaires d’actions avec droit de vote qui représentent au moins 10 % (ou, pour une société
cotée, 3 %) du capital peuvent néanmoins désigner à l’unanimité un mandataire spécial, actionnaire
ou non, chargé d’introduire une demande de révocation de l’administrateur 318.
Responsabilité :
Les statuts peuvent prévoir que l’administrateur unique est solidairement et indéfiniment
responsable des obligations de la société. Dans ce cas, l’administrateur ne peut être
personnellement condamné en raison des obligations de la société tant que cette dernière n’a pas
été elle-même condamnée.
Droit de veto :
Les statuts peuvent prévoir que le consentement de l’administrateur unique est exigé pour toute
modification de statuts, toute distribution aux actionnaires ou pour sa révocation.
Les membres du conseil de direction ne peuvent être en même temps membres du conseil de
surveillance, et vice-versa.
Les membres du conseil de direction et du conseil de surveillance ne peuvent pas, en cette qualité,
être liés à la société par un contrat de travail.
Conseil de surveillance :
Le conseil de surveillance est chargé de la politique générale et la stratégie de la société et de tous
les actes qui sont réservés spécifiquement au conseil d’administration par d’autres dispositions du
CSA. En particulier, il rédige tous les rapports et projets prévus par le CSA. Il exerce la surveillance
du conseil de direction320.
Il constitue un organe collégial composé d’au moins trois membres, personnes physiques ou
morales321.
Dans les sociétés cotées, il doit comporter des membres indépendants, dont l’indépendance
s’apprécie comme pour les administrateurs indépendants322 et, dans les sociétés cotées et les
entités d’intérêt public, au moins un tiers des membres de l’autre sexe323.
123
Fanny Streveler MA1 DROIT
Les membres du conseil de surveillance sont nommés par l’assemblée générale des actionnaires (ils
peuvent être désignés pour la première fois dans l’acte constitutif) pour six ans au maximum mais
leur mandat est renouvelable de manière illimitée.
Ils sont révocables ad nutum mais, comme pour les administrateurs, les statuts peuvent prévoir
qu’il ne peut être mis fin au mandat d’un membre du conseil de surveillance que moyennant le
respect d’un délai de préavis ou l’octroi d’une indemnité de départ. L’assemblée générale peut en
toute hypothèse mettre fin au mandat d’un membre du conseil de surveillance pour de justes
motifs, sans préavis ni indemnité324.
En cas de vacance, les autres membres du conseil de surveillance ont le droit de coopter un
nouveau membre, sauf si les statuts l’excluent. La première assemblée générale qui suit se
prononce sur la confirmation du mandat du membre coopté325.
Conseil de direction :
Le conseil de direction exerce tous les pouvoirs d’administration qui ne sont pas réservés au conseil
de surveillance326. Il dispose donc de la compétence exclusive pour le fonctionnement opérationnel
de la société et de toutes les compétences résiduaires.
Les statuts peuvent apporter des restrictions aux pouvoirs du conseil de direction. Une telle
restriction n’est pas opposable aux tiers, même si elle est publiée. Il en va de même pour une
répartition des tâches entre les membres du conseil de direction327.
Les statuts peuvent prévoir que certaines décisions prises par le conseil de direction doivent être
préalablement approuvées par le conseil de surveillance. De telles clauses statuaires n’ont qu’un
effet purement interne et ne sont pas opposables aux tiers.
Le conseil de direction constitue un organe collégial composé d’au moins trois membres, personnes
physiques ou morales. Les membres du conseil de direction sont désignés et révoqués par le conseil
de surveillance328.
124
Fanny Streveler MA1 DROIT
- il doit informer le ou les commissaires (en pratique, c’est généralement la société qui se charge
de cette communication) ;
- il ne peut ni assister aux délibérations du conseil d'administration relatives à cette opération, ni
prendre part au vote ;
- le conseil d'administration doit décrire dans son procès-verbal la nature de la décision ou de
l’opération en cause, justifier la décision qui a été prise et indiquer les conséquences
patrimoniales pour la société ;
- le rapport de gestion (ou un document déposé en même temps que les comptes annuels) doit
contenir l’entièreté de ce procès-verbal (comprendre : en tant qu’il concerne cette décision ou
opération, par opposition aux autres points à l’ordre du jour) ;
- le rapport des commissaires doit décrire les conséquences patrimoniales de cette décision ou
opération pour la société.
Lorsque tous les administrateurs ont un conflit d’intérêts, la décision ou l’opération est soumise à
l’assemblée générale ; en cas d’approbation de la décision ou de l’opération par celle-ci, le conseil
d’administration peut l’exécuter329.
En revanche, le CSA ne réglemente pas les conflits d’intérêts dans le chef du délégué à la gestion
journalière.
B. Administration unique
Lorsque l’administrateur unique est amené à prendre une décision ou se prononcer sur une
opération dans laquelle il a un intérêt direct ou indirect de nature patrimoniale opposé à celui de la
société, sauf s’il est également le seul actionnaire, il doit soumettre cette décision ou cette
opération à l’assemblée générale ; en cas d’approbation de la décision ou de l’opération par celle-
ci, il peut l’exécuter. La même règle s’applique lorsque tous les administrateurs ou membres du
conseil de surveillance de la société administrateur unique ont un conflit d’intérêts331. Ce principe
admet les mêmes exceptions qu’en cas de conflits d’intérêts au sein du conseil d’administration.
Toutefois, s’il est également l’actionnaire unique, il peut prendre la décision ou réaliser l’opération
lui-même332. Il doit décrire, dans un rapport spécial, la nature de la décision ou de l’opération, ainsi
que les conséquences patrimoniales de celle-ci pour la société et justifier la décision qui a été prise.
Il doit également mentionner dans son rapport spécial les contrats conclus entre lui et la société. Ce
rapport doit être reproduit dans son intégralité dans le rapport de gestion ou, pour les sociétés qui
ne doivent pas établir de rapport de gestion, dans une pièce qui doit être déposée en même temps
que les comptes annuels.
125
Fanny Streveler MA1 DROIT
Si la société a nommé un commissaire, elle doit l’en informer. Le commissaire doit évaluer dans son
rapport les conséquences patrimoniales pour la société des décisions de l’assemblée générale ou
de l’administrateur unique 333.
C. Système dual
Lorsque le conseil de direction est appelé à prendre une décision ou à se prononcer sur une
opération relevant de sa compétence à propos de laquelle un membre du conseil a un intérêt direct
ou indirect de nature patrimoniale qui est opposé à l’intérêt de la société, le conseil de direction
doit renvoyer cette décision au conseil de surveillance334.
Lorsque le conseil de surveillance est appelé à prendre une décision ou se prononcer sur une
opération relevant de ses pouvoirs à propos de laquelle un de ses membres a un intérêt direct ou
indirect de nature patrimoniale qui est opposé à l’intérêt de la société, ce membre doit en informer
les autres membres avant que le conseil de surveillance ne prenne une décision. Sa déclaration et
ses explications sur la nature de cet intérêt opposé doivent figurer dans le procès-verbal de la
réunion du conseil de surveillance qui doit prendre cette décision335.
Si la société a nommé un commissaire, elle doit l’en informer. Le commissaire doit évaluer dans son
rapport les conséquences patrimoniales pour la société des décisions du conseil de surveillance
entachées d’un conflit d’intérêts.
Le membre ayant un conflit d’intérêts ne peut pas prendre part aux délibérations du conseil de
surveillance concernant ces opérations ou ces décisions, ni prendre part au vote sur ce point.
Lorsque tous les membres du conseil de surveillance ont un conflit d’intérêts, la décision ou
l’opération est soumise à l’assemblée générale. En cas d’approbation de la décision ou de
l’opération par celle-ci, le conseil de surveillance peut l’exécuter336.
126
Fanny Streveler MA1 DROIT
Les filiales des sociétés cotées sont soumises au même régime sous réserve qu’elles doivent
demander l’autorisation de prendre ces décisions ou d’exécuter ces opérations à leur société-mère,
qui doit suivre la même procédure que si elle-même prenait cette décision ou exécutait cette
opération.
En substance, une partie liée à la société cotée au sens de la norme IAS 24 est une personne, ou un
membre de la famille proche de cette personne, qui :
- exerce un contrôle ou un contrôle conjoint sur la société cotée ;
- exerce une influence notable sur la société cotée ; ou
- fait partie des principaux dirigeants de la société cotée ou de sa société mère339.
A. Procédure
- « Le comité rend à l'organe d'administration [ou au conseil de surveillance] un avis écrit
circonstancié et motivé sur la décision ou l'opération envisagée qui traite au moins des
éléments suivants : la nature de la décision ou de l'opération, une description et une
estimation des conséquences patrimoniales, une description des éventuelles autres
conséquences, les avantages et inconvénients qui en découlent pour la société, le cas échéant,
à terme. Le comité place la décision ou l'opération proposée dans le contexte de la stratégie de
la société et indique si elle porte préjudice à la société, si elle est compensée par d'autres
éléments de cette stratégie, ou est manifestement abusive. Les remarques de l'expert sont
intégrées dans l'avis du comité ou y sont ajoutées en annexe »340.
- Le conseil d'administration ou le conseil de surveillance ne peut délibérer qu’après avoir pris
connaissance de cet avis. Il doit préciser que cette procédure a été respectée et, le cas échéant,
indiquer les motifs pour lesquels il déroge à l’avis du comité341.
- Lorsque la décision ou l’opération implique un administrateur ou un membre du conseil de
surveillance, celui-ci ne peut pas participer à la délibération ou au vote. Si tous les
administrateurs ou tous les membres du conseil de surveillance sont impliqués, ils doivent
soumettre la décision ou l’opération à l’assemblée générale. Si celle-ci approuve la décision ou
l’opération, le conseil d’administration ou le conseil de surveillance peut l’exécuter342.
- « Le commissaire évalue si les données financières et comptables figurant dans le procès-
verbal de l'organe d'administration / du conseil de surveillance et dans l'avis du comité ne
337 Il s’agit des administrateurs indépendants de la société cotée elle-même si elle a un conseil d’administration
classique ou des administrateurs indépendants de la société administrateur unique de la société cotée.
338 CSA, art. 7:97 et 7:116.
339 La norme IAS 24 prévoit également d’autres cas d’entités liées.
340 CSA, art. 7:97, § 3, al. 2 et 7:116, § 3, al. 2.
341 CSA, art. 7:97, § 4, al. 1 et 3 et 7:116, § 4, al. 1 et 3.
342 CSA, art. 7:97, § 4, al. 2.
127
Fanny Streveler MA1 DROIT
contiennent pas d'incohérences significatives par rapport à l'information dont il dispose dans le
cadre de sa mission. Cette appréciation est jointe au procès-verbal du conseil d'administration
/ du conseil de surveillance »343.
- Toutes ces décisions ou opérations doivent faire l’objet d’une annonce publique, au plus tard
au moment de la prise de la décision ou de la conclusion de l’opération. Cette annonce doit
notamment indiquer le nom de la partie liée, la nature de la relation avec cette la partie, la
date et la valeur de l’opération, ainsi que toute autre information nécessaire pour évaluer si la
transaction est juste et raisonnable. Cette annonce doit être accompagnée de la décision du
comité, le cas échéant des motifs pour lesquels le conseil d’administration ou le conseil de
surveillance ne suit pas l’avis du comité, ainsi que de l’appréciation du commissaire.
- Le rapport de gestion doit contenir un aperçu de toutes les annonces faites durant l’exercice,
en indiquant l’endroit où ces annonces peuvent être consultées344.
Exceptions :
Cette procédure ne s’applique pas :
- aux relations entre une société cotée (ou une de ses filiales) et ses filiales, sauf les filiales dans
lesquelles l’actionnaire de contrôle de la société cotée détient directement ou indirectement
une participation représentant au moins 25 % du capital de la filiale concernée ou lui donnant
droit en cas de distribution de bénéfices à au moins 25 % de ces bénéfices ;
- aux décisions et aux opérations habituelles intervenant dans des conditions et sous les
garanties normales du marché pour des opérations de même nature (à apprécier selon une
procédure à arrêter par l’organe d’administration) ;
- aux décisions et aux opérations représentant moins d'un pour cent de l'actif net de la société
cotée, tel qu'il résulte des comptes consolidés (les décisions ou opérations concernant la même
partie liée qui sont intervenues au cours d’une période de douze mois et qui, considérées
individuellement, tombent sous ce seuil doivent être agrégées pour le calcul de ce seuil) ;
- aux décisions et opérations concernant la rémunération des administrateurs (!), des autres
dirigeants et des délégués à la gestion journalière de la société ;
- à l’acquisition ou l’aliénation d’actions propres, à la distribution d’acomptes sur dividende et
aux augmentations de capital dans le cadre du capital autorisé sans limitation ou suppression
du droit de préférence des actionnaires existants345.
Cette personne porte le titre de délégué à la gestion journalière ou s’il s’agit d’un administrateur,
d’administrateur délégué.
La gestion journalière comprend tous les actes et les décisions qui n’excèdent pas les besoins de la
vie quotidienne de la société ainsi que les actes et les décisions qui en raison de l’intérêt mineur
128
Fanny Streveler MA1 DROIT
La clause en vertu de laquelle la gestion journalière est déléguée à une ou plusieurs personnes
agissant soit seules, soit conjointement est opposable aux tiers dans les conditions prévues par
l’article 2:18347.
5. COMITÉS
Les entités d’intérêt public doivent constituer un comité d’audit et les sociétés cotées doivent en
outre constituer un comité de rémunération, selon le modèle choisi, au sein de leur conseil
d’administration (modèle moniste348), de leur conseil de surveillance (modèle dualiste349) ou du
conseil d’administration ou du conseil de surveillance de l’administrateur unique société
anonyme350.
En outre, le CBGE 2020 prévoit la constitution d’un comité de nomination dans les sociétés cotées.
A. Comité d’audit
Le comité d’audit est composé de membres non exécutifs du conseil d'administration ou de
membres du conseil de surveillance ; au moins un membre doit être indépendant.
Missions :
- communication au conseil d’administration ou au conseil de surveillance d’informations sur les
résultats du contrôle légal des comptes annuels ;
- suivi du processus d’élaboration de l’information financière ;
- suivi de l’efficacité des systèmes de contrôle interne et de gestion des risques de la société ;
- s’il existe un audit interne, suivi de celui-ci et de son efficacité ;
- suivi du contrôle légal des comptes annuels et des comptes consolidés ;
- examen et suivi de l’indépendance du commissaire ;
- recommandation au conseil d’administration ou au conseil de surveillance pour la désignation
du commissaire.
Exception :
Les sociétés cotées répondant sur une base consolidée à au moins deux des critères suivants :
- nombre moyen de salariés : inférieur à 250 personnes ;
- total du bilan : inférieur ou égal à 43 millions EUR ;
- chiffre d’affaires net annuel : inférieur ou égal à 50 millions EUR ;
ne sont pas tenues de constituer un comité d’audit.
129
Fanny Streveler MA1 DROIT
Les fonctions attribuées au comité d’audit doivent alors être exercées par le conseil d'administration
(système moniste) ou le conseil de surveillance (système dualiste) dans son ensemble, pour autant que ce
conseil comporte au moins un membre indépendant et que, si le président du conseil est un membre
exécutif, il n’exerce pas les fonctions de président tant que le conseil exerce les fonctions de comité d’audit.
B. Comité de rémunération
Le comité de rémunération est composé de membres non exécutifs du conseil d'administration ou
de membres du conseil de surveillance et d’une majorité de membres indépendants.
Missions :
- formuler des propositions au conseil d'administration ou au conseil de surveillance sur la
politique de rémunération des administrateurs, des membres du comité de direction, des
autres dirigeants et des délégués à la gestion journalière ;
- formuler des propositions au conseil d'administration ou au conseil de surveillance sur la
rémunération individuelle des administrateurs, des membres du conseil de surveillance, des
membres du comité de direction, des autres dirigeants et des délégués à la gestion journalière,
y compris la rémunération variable, les options sur actions et les indemnités de départ ;
- préparer le rapport de rémunération, que le conseil d'administration ou le conseil de
surveillance doit insérer dans la déclaration de gouvernance ;
- commenter le rapport de rémunération lors de l’assemblée générale annuelle.
Exception :
Idem que pour le comité d’audit.
C. Comité de nomination
Le comité de nomination est composé majoritairement d’administrateurs non exécutifs
indépendants. En pratique, il est souvent combiné avec le comité de rémunération.
130
Fanny Streveler MA1 DROIT
6. REPRÉSENTATION
A. Organe d’administration
Quel que soit le modèle retenu, l’organe d’administration (l’administrateur unique, chaque
administrateur si les administrateurs ont des pouvoirs concurrents ou l’organe collégial) peut
représenter la société à l'égard des tiers et en justice, soit en demandant, soit en défendant.
Les statuts peuvent apporter des restrictions à ce pouvoir de représentation. Ces restrictions ne
sont pas opposables aux tiers, même si elles sont publiées. Il en va de même pour une répartition
des tâches entre les administrateurs (ou, dans le système dualiste, entre les membres du conseil de
surveillance ou entre les membres du conseil de direction) ayant le pouvoir de représentation351.
ASSEMBLÉE GÉNÉRALE
L’assemblée générale est un organe qui se compose de tous les actionnaires. Tous les actionnaires
peuvent y assister mais les actionnaires qui détiennent des actions sans droit de vote ne peuvent
exercer le droit de vote que dans les cas prévus par le CSA.
Les obligataires et les titulaires d’autres titres peuvent assister à l’assemblée générale.
Les administrateurs doivent y assister, en particulier lorsqu’un rapport rédigé par eux est à l’ordre
du jour.
1. POUVOIRS
L’assemblée générale a uniquement les pouvoirs qui lui sont confiés par le CSA : nommer et
révoquer les administrateurs, se prononcer sur le rapport de rémunération, approuver la politique
de rémunération, approuver les comptes et décider la distribution de dividendes, modifier les
statuts, augmenter et réduire le capital, décider des fusions, scissions et autres opérations de
restructurations, décider la dissolution.
131
Fanny Streveler MA1 DROIT
2. CONVOCATION
A. Auteur
L’organe compétent pour convoquer l’assemblée générale est l’organe d’administration (le conseil
de surveillance dans le système dualiste) et, le cas échéant, le commissaire.
B. Contenu
Les convocations doivent mentionner le lieu, la date ainsi que l’heure de l’assemblée générale, et
contenir l’ordre du jour ainsi que les documents exigés en vue de certaines modifications des
statuts.
C. Formalités et délais
Les formalités et les délais de convocation des actionnaires dépendent du fait que la société est
cotée ou non et des éventuelles règles statutaires plus sévères que les règles légales.
132
Fanny Streveler MA1 DROIT
3. ENREGISTREMENT
Le droit de participer à l’assemblée générale d’une SA cotée et d’y exercer le droit de vote est
subordonné à l’enregistrement comptable des actions au nom de l’actionnaire le quatorzième jour
qui précède l’assemblée générale, à 24 heures (ce jour et cette heure constituent la date
d’enregistrement)355.
L’enregistrement se fait par l’inscription sur le registre des actions nominatives de la société ou
l’inscription dans les comptes d’un teneur de comptes agréé ou d’un organisme de liquidation. Ce
teneur de comptes ou cet organisme de liquidation délivre une attestation à l’actionnaire.
Il n’est pas tenu compte du nombre d’actions détenues par l’actionnaire au jour de l’assemblée
générale.
Ils peuvent subordonner l’admission à l’assemblée générale au dépôt d’une attestation établie par
le teneur de comptes ou l’organisme de liquidation ou à une notification préalable par l’actionnaire,
dans le délai qu’ils fixent.
Dans les sociétés cotées, les actionnaires doivent communiquer à la société leur volonté de
participer à l'assemblée générale, au plus tard le sixième jour qui précède la date de l'assemblée,
ainsi que l’attestation établie par le teneur de comptes agréé ou par l'organisme de liquidation
certifiant le nombre d'actions dématérialisées inscrites à son nom dans ses comptes à la date
d'enregistrement, pour lequel l'actionnaire a déclaré vouloir participer à l'assemblée générale356.
133
Fanny Streveler MA1 DROIT
7. MODALITÉS DU VOTE
Le vote peut se faire en personne.
Il peut également se faire par mandataire359. Les statuts ne peuvent pas limiter la possibilité pour
des personnes d’être désignées comme mandataires dans les sociétés cotées360.
Les statuts peuvent également autoriser tout actionnaire à voter à distance avant l’assemblée
générale, par correspondance ou sous forme électronique, au moyen d’un formulaire mis à
disposition par la société361.
8. RÉUNION
En principe, la réunion a lieu « en présentiel ». En toute hypothèse, une réunion physique doit
toujours être organisée car les membres du bureau de l'assemblée générale, les administrateurs et
le commissaire ne peuvent pas assister par voie électronique à l'assemblée générale.
Les statuts peuvent cependant prévoir la possibilité de participer à distance à l’assemblée générale
grâce à un moyen de communication électronique, à condition d’être à même de vérifier l’identité
des actionnaires et de garantir l’intégrité du vote. Les actionnaires qui participent de cette manière
à l’assemblée générale sont réputés présents pour le calcul des conditions de quorum et de
majorité362.
L’arrêté royal n°4 du 9 avril 2020 portant des dispositions diverses en matière de copropriété et de
droit des sociétés et des associations dans le cadre de la lutte contre la pandémie Covid-19 a prévu,
à titre exceptionnel et pour une durée limitée, la pssobilité d’organiser des assemblées générales
uniquement à distance.
357 A l’exception d’une assemblée générale convoquée après une assemblée de carence.
358 CSA, art. 7:130.
359 CSA, art. 7:142.
360 CSA, art. 7:143, § 1er, al. 3.
361 CSA, art. 7:146, § 1er, al. 1er.
362 CSA, art. 7:137.
134
Fanny Streveler MA1 DROIT
RÉSERVES ET DIVIDENDES
1. RÉSERVES
L’assemblée peut constituer des réserves qui peuvent être disponibles (distribuables à tout
moment) ou statutairement indisponibles (auquel cas, il faut une modification des statuts pour les
distribuer).
En outre, chaque année, l’assemblée générale doit faire, « sur les bénéfices nets, un prélèvement
d'un vingtième au moins, affecté à la formation d'un fonds de réserve ; ce prélèvement cesse d'être
obligatoire lorsque le fonds de réserve atteint le dixième du capital »365. C’est la réserve légale.
2. DIVIDENDES
Pour assurer le maintien du capital, le CSA prévoit un test d’actif net.
Aucune distribution ne peut être faite lorsque l’actif net, tel qu’il résulte des comptes annuels, est,
ou deviendrait, à la suite d’une telle distribution, inférieur au montant du capital libéré ou, si ce
montant est supérieur, du capital appelé, augmenté de toutes les réserves que la loi ou les statuts
ne permettent pas de distribuer. Par actif net, il faut entendre le total de l’actif, déduction faite des
provisions, des dettes et, sauf cas exceptionnels à mentionner et à justifier dans l’annexe aux
comptes annuels, des montants non encore amortis des frais d’établissement et des frais de
recherche et de développement366.
135
Fanny Streveler MA1 DROIT
Cette règle s’applique à toutes les distributions : dividendes, tantièmes, achat d’actions propres,
octroi d’un financement pour l’acquisition des actions par un tiers,...
En principe, c’est l’assemblée générale qui est compétente pour décider la distribution de
dividendes. Toutefois, les statuts peuvent donner à l’organe d’administration le pouvoir de
distribuer un acompte à imputer sur le dividende qui sera distribué sur les résultats de l’exercice367.
Les actionnaires et toutes autres personnes doivent restituer toute distribution irrégulière si la
société prouve que les actionnaires ou toutes autres personnes en faveur desquelles la distribution
a été décidée étaient informés de l’irrégularité ou ne pouvaient l’ignorer compte tenu des
circonstances 368.
Le CSA prévoit également des peines d’amendes et le cas échéant d’emprisonnement à charge des
administrateurs qui ont contrevenu aux règles en matière de distribution de dividendes.
A. Déplacement du siège
Les statuts doivent seulement indiquer la Région dans laquelle le siège est établi369. Ils ne doivent
plus (mais peuvent) indiquer l’adresse à laquelle le siège est établi370. L’adresse doit toutefois
figurer dans l’acte constitutif et dans l’extrait de cet acte destiné à la publication371, et doit être
indiquée à la Banque-Carrefour des Entreprises.
Sauf disposition contraire des statuts, l’organe d’administration est compétent pour déplacer le
siège de la personne morale en Belgique, sans modification des statuts, pour autant que ce
déplacement n’entraîne pas de modification du régime linguistique de la personne morale, que ce
déplacement ait lieu au sein de la même Région et que l’adresse de la personne morale ne figure
pas dans les statuts. Si ce déplacement a lieu vers une autre Région (sans que ce déplacement
entraîne une modification du régime linguistique) ou que l’adresse du siège figure dans les statuts,
l’organe d’administration est encore compétent mais il doit procéder à la modification des
statuts372.
bilingue) mais la Communauté germanophone et la région linguistique germanophone font géographiquement partie
de la Région wallonne.
370 CSA, art. 2:4, al. 1er.
371 CSA, art. 2:8, § 2, al. 1, 2°.
372 CSA, art. 2:4, al. 2 et 3.
136
Fanny Streveler MA1 DROIT
Un déplacement du siège vers une autre région linguistique entraîne l’obligation de rédiger les
statuts dans une autre langue et implique toujours une modification des statuts à décider par
l’assemblée générale aux conditions de majorité et dans les formes requises par la loi373, donc par
acte authentique s’il s’agit d’une SA.
Le transfert transfrontalier du siège sera examiné dans le chapitre relatif aux opérations
transfrontalières.
B. Site internet
L’organe d’administration peut modifier l’adresse du site internet et l’adresse électronique de la
société même si elles figurent dans les statuts, ou adopter et publier un site internet ou une
adresse électronique si cela n’a pas été fait dans l’acte constitutif 374.
C. Capital autorisé
Les statuts peuvent attribuer à l’organe d’administration la compétence d’augmenter le capital
dans le cadre du capital autorisé375.
On examinera dans les lignes qui suivent les modifications de statuts les plus fréquentes.
Ces mesures sont destinées à prévenir les manœuvres des sociétés qui tentent d’échapper aux
enquêtes des chambres d’enquête commerciale.
La neutralisation des abstentions se justifie par le souci de tenir compte de la volonté réelle des
actionnaires : « actuellement, pour des décisions relatives à la modification des statuts, une
abstention a valeur de vote négatif, alors que souvent les intéressés ne le ressentent pas et ne l’ont
137
Fanny Streveler MA1 DROIT
pas voulu ainsi : en s’abstenant, ils entendent ne pas peser sur le résultat du vote. La modification
rencontre cette préoccupation ».
Pour la détermination des conditions de quorum et de majorité, il n’est tenu compte ni des actions
ou parts bénéficiaires sans droit de vote (sauf si un droit de vote leur est reconnu) ni des actions
dont le droit de vote est suspendu379.
4. ACTE AUTHENTIQUE
Les statuts ne peuvent être modifiés que par acte authentique.
Il n’est pas possible de modifier les statuts par résolution circulaire : le CSA admet la possibilité de
prendre par écrit toutes les décisions qui relèvent du pouvoir de l’assemblée générale mais fait une
exception pour celles qui doivent être passées par un acte authentique 380, ce qui aboutit à exclure
les modifications des statuts.
Le texte de la première version des statuts issu de l’acte constitutif et celui de la version
coordonnée des statuts après chaque modification sont conservés dans un système de base de
données électronique consultable publiquement, qui fait partie du dossier de la personne morale et
qui est géré, pour les statuts et leurs mises à jour qui découlent d’actes notariés reçus en Belgique,
par la Fédération Royale du Notariat belge et pour les autres par une instance à désigner par le
Roi382.
Ce rapport doit être annoncé dans les convocations à l’assemblée générale et mis à la disposition
des actionnaires.
L’assemblée générale ne peut valablement délibérer et statuer sur la modification à l’objet que si
ceux qui assistent à la réunion représentent la moitié au moins du capital (ainsi que, s’il en existe, la
moitié du nombre total des parts bénéficiaires). Si cette condition n’est pas remplie, une nouvelle
convocation sera nécessaire. Pour que la deuxième assemblée délibère valablement, il suffit qu’une
portion quelconque du capital y soit représentée.
138
Fanny Streveler MA1 DROIT
Une modification n’est admise que si elle réunit les quatre cinquièmes au moins des voix. Les
abstentions sont neutralisées.
Nonobstant toute disposition contraire des statuts, les parts bénéficiaires donnent droit à une voix
par titre. Elles ne peuvent se voir attribuer dans l’ensemble un nombre de voix supérieur à la moitié
de celui attribué à l’ensemble des actions, ni être comptées dans le vote pour un nombre de voix
supérieur aux deux tiers du nombre des voix émises par les actions. Si les votes soumis à la
limitation sont émis en sens différents, la réduction s’opérera proportionnellement ; il n’est pas
tenu compte des fractions de voix383.
La notion de classe d’actions se définit par rapport aux droits spécifiques attachés à une action ou
à une série d’actions par rapport à d’autres actions émises par la même société384.
En revanche, il n’y a pas de droits spécifiques attachés à une classe d’actions si tous les actionnaires
peuvent bénéficier de certains droits s’ils remplissent les conditions prévues par les statuts.
Contre-exemples :
- Des actions ayant été émises à des prix d’émission différents mais conférant des droits identiques.
- Des actions conférant un droit de vote double « de loyauté » (sociétés cotées ou non cotées).
- Des actions conférant d’autres droits particuliers (droit de vote multiple ou droit privilégié au dividende,
par exemple) susceptibles de bénéficier à l’ensemble des actions en fonction de critères objectifs, comme
l’écoulement du temps.
- Des actions conférant à un actionnaire les droits spécifiques accordés par les statuts à cet actionnaire,
comme un droit de présentation de candidats administrateurs (la modification de ces droits requiert le
consentement de l’actionnaire en bénéficiant).
- Des actions nominatives et dématérialisées.
L’assemblée générale des actionnaires peut, nonobstant toute disposition statutaire contraire,
émettre de nouvelles classes d’actions ou de parts bénéficiaires, supprimer une ou plusieurs
classes, unifier les droits attachés à une classe d’actions et ceux attachés à une autre classe et
modifier, directement ou indirectement, les « droits respectifs attachés à une classe de titres »385.
139
Fanny Streveler MA1 DROIT
Il y a modification directe des droits respectifs lorsque la décision modifie formellement les droits
attachés à une classe d’actions.
Exemples :
- Suppression d’une classe d’actions (exemple : suppression des actions conférant un dividende privilégié).
- Modification des droits attachés à une classe (exemple : réduction ou augmentation du dividende
privilégié).
- Fusion de classes, ce qui est une manière de modifier les droits d’au moins une classe (exemple :
suppression des actions conférant un dividende privilégié).
Il y a modification indirecte des droits respectifs lorsque la décision ne modifie pas formellement les
droits attachés à une classe d’actions mais affecte économiquement ces droits, par exemple, en cas
d’émission de nouvelles actions qui ne s’effectue pas proportionnellement au nombre d’actions ou de parts
bénéficiaires émises dans chaque classe.
A. Procédure
- Phase d’information
o L’organe d’administration doit justifier, dans un rapport spécial, «les modifications
proposées et leurs conséquences sur les droits des classes existantes ».
o « Si des données financières et comptables sous-tendent également le rapport de
l’organe d’administration, le commissaire ou, lorsqu’il n’y a pas de commissaire, un
réviseur d’entreprises ou un expert-comptable externe désigné par l’organe
d’administration évalue si ces données financières et comptables figurant dans le rapport
de l’organe d’administration sont fidèles et suffisantes dans tous leurs aspects
significatifs pour éclairer l’assemblée générale appelée à voter sur cette proposition ».
o Le ou les rapports sont annoncés dans l’ordre du jour et mis à la disposition des titulaires
d’actions (et d’éventuels autres titres). Ils sont déposés dans le dossier de la société et
publiés.
o En l’absence de ces rapports, la décision de l’assemblée générale est nulle.
- Règles spéciales de modification des statuts
o La décision de modifier les statuts relève de l’assemblée générale.
o La décision « doit être prise dans chaque catégorie [lire « classe »] dans le respect des
conditions de quorum et de majorité requises pour la modification des statuts » (vote par
classe).
o Nonobstant toute disposition statutaire contraire, « les parts bénéficiaires donneront
droit à une voix par titre » ; il n’y pas de limite au nombre de voix que les titulaires de
parts bénéficiaires peuvent exercer386.
140
Fanny Streveler MA1 DROIT
1. AUGMENTATION DU CAPITAL
Comme les SA doivent mentionner le montant du capital dans leurs statuts 387, toute augmentation
de capital requiert une modification des statuts388.
A. Organe compétent
L’assemblée générale est en principe compétente pour augmenter le capital (SA) mais ce pouvoir
peut également être conféré à l’organe d’administration grâce à l’insertion dans les statuts d’une
clause de capital autorisé389.
La clause de capital autorisé est celle par laquelle les statuts autorisent l’organe d'administration
(dans le système dual, il s’agit du conseil de surveillance) à augmenter en une ou plusieurs fois le
capital souscrit à concurrence d’un montant déterminé qui, pour les sociétés cotées, ne peut être
supérieur au montant du capital. Cette autorisation n’est valable que pour cinq ans à dater de la
publication de l'acte constitutif ou de la modification des statuts. Toutefois, elle peut être
renouvelée une ou plusieurs fois pour une durée n'excédant pas cinq ans par l'assemblée générale
délibérant aux conditions requises pour la modification des statuts390.
Le capital autorisé ne peut jamais être utilisé pour certaines augmentations de capital :
- « les augmentations de capital à réaliser principalement par des apports en nature réservées
exclusivement à un actionnaire de la société détenant des titres de cette société auxquels sont
attachés plus de 10 % des droits de vote » ;
- « l’émission de droits de souscription réservée à titre principal à une ou plusieurs personnes
déterminées autres que des membres du personnel » ;
- « l’émission d’actions à droit de vote multiple ou de titres donnant droit à l’émission de ou à la
conversion en actions à droit de vote multiple » ;
- « l’émission d’une nouvelle classe de titres »392.
387 CSA, art. 2:8, § 2, al. 2, 5° et 7:14, renvoyant aux mentions que doit comporter l’extrait de l’acte constitutif.
388 CSA, art. 7:177.
389 CSA, art. 7:198.
390 CSA, art. 7:199, al. 1er.
391 CSA, art. 7:199, al. 2 et 3.
392 CSA, art. 7:201.
141
Fanny Streveler MA1 DROIT
Le capital autorisé ne peut être utilisé pour les augmentations de capital suivantes que si les statuts
le prévoient expressément :
« 1° les augmentations de capital à l’occasion desquelles le droit de préférence des actionnaires est
limité ou supprimé ;
2° les augmentations de capital ou les émissions d’obligations convertibles ou de droits de
souscription à l’occasion desquelles le droit de préférence des actionnaires est limité ou supprimé
en faveur d’une ou plusieurs personnes déterminées, autres que les membres du personnel ; dans
ce cas, les administrateurs qui représentent en fait le bénéficiaire de l’exclusion du droit de
préférence ou une personne liée au bénéficiaire ne peuvent participer au vote ;
3° les augmentations de capital effectuées par incorporation de réserves »393.
Pour le surplus, les règles applicables sont les mêmes que l’augmentation de capital soit décidée
par l’assemblée générale ou l’organe d'administration.
B. Modes
L’augmentation du capital d’une SA peut se faire au moyen d’apports :
- en numéraire, auquel cas un compte spécial indisponible doit être ouvert au nom de la société,
mutatis mutandis conformément aux règles lors de la constitution de la société ;
- ou en nature, auquel cas les règles applicables lors de la constitution de la société s’appliquent
mutatis mutandis avec les mêmes exceptions en ce qui concerne le rapport du réviseur et le
droit pour des associés détenant au moins 5 % du capital d’exiger l’intervention d’un
réviseur394.
L’augmentation de capital d’une SA peut également se faire par incorporation des réserves.
Pour que l’augmentation de capital puisse se réaliser en un seul acte, il faut soit que les apporteurs
soient présents ou représentés à l’assemblée générale et que toutes les formalités aient été
accomplies au préalable (dépôt sur un compte spécial, rapports de l’organe d'administration et du
commissaire,...), soit que l’augmentation de capital se réalise par incorporation des réserves.
142
Fanny Streveler MA1 DROIT
capital n’est augmenté à concurrence des souscriptions recueillies que si les conditions de
l’émission ont expressément prévu cette possibilité396.
E. Prix d’émission
Justification du prix d’émission :
En cas d’augmentation de capital par apports (par opposition aux augmentations de capital par
incorporation de réserves), l’organe d’administration doit rédiger un rapport sur l’opération, qui
justifie spécialement le prix d’émission et décrit les conséquences de l’opération sur les droits
patrimoniaux et les droits sociaux des actionnaires.
Ces rapports doivent être déposés et publiés. Ils sont annoncés dans l’ordre du jour. Les
actionnaires peuvent en obtenir une copie.
Toutefois, sauf si les actions sont émises à titre de rémunération d’un apport en nature,
l’assemblée générale, à laquelle l’ensemble des actionnaires sont présents ou représentés, peut
renoncer par une décision unanime à ces rapports399.
La technique des primes d’émission peut être utilisée lors de la constitution de la société, mais elle
est plus fréquente à l’occasion des augmentations de capital.
Le CSA ne réglemente pas les primes d’émission. Il se borne à prévoir que le montant des primes
d’émission doit être intégralement libéré dès la souscription400.
143
Fanny Streveler MA1 DROIT
C’est la raison pour laquelle c’est l’organe compétent pour augmenter le capital ou émettre de
nouvelles actions (c’est-à-dire l’assemblée générale ou l’organe d'administration dans le cadre
d’une délégation) qui peut prendre cette décision.
L’organe d’administration doit rédiger un rapport spécial dans lequel il justifie l’opération et le prix
d’émission et décrit les conséquences de l’opération sur les droits des actionnaires401.
Ce rapport doit être annoncé dans l’ordre du jour. Les actionnaires peuvent en obtenir une copie.
L’absence de rapport entraîne la nullité de la décision de l’assemblée générale.
G. Droit de préférence
En cas d’augmentation de capital par apports en numéraire, les actions doivent être offertes par
préférence aux actionnaires proportionnellement à la partie du capital que représentent leurs
actions402. Les statuts ne peuvent ni limiter ni supprimer le droit de préférence403.
Le droit de préférence ne s’applique qu’en cas d’augmentation de capital par apport en numéraire
(et donc pas en cas d’augmentation de capital par apport en nature, ce qui s’explique par le fait
qu’en principe, seul l’apporteur est susceptible d’apporter le bien en question).
Les actionnaires peuvent bien sûr renoncer à leur droit de préférence. Il n’y a pas suppression ou
limitation du droit de préférence lorsque chaque actionnaire renonce à son droit de préférence lors
de la décision de l’assemblée générale d’augmenter le capital. La renonciation au droit de
préférence de chaque actionnaire est actée dans l’acte authentique relatif à la décision
d’augmentation du capital404.
Exercice :
Le droit de préférence peut être exercé pendant un délai qui ne peut être inférieur à 15 jours à
dater de l’ouverture de la souscription405.
L’ouverture de la souscription ainsi que son délai d’exercice doivent être annoncés par un avis
publié huit jours au moins avant cette ouverture, aux Annexes du Moniteur belge406, ainsi que dans
un organe de presse de diffusion nationale, papier et électronique et sur le site internet de la
société407. Si toutes les actions de la société sont nominatives, la société peut se limiter à
communiquer cet avis aux actionnaires408.
Moniteur.
407 La communication de cet avis aux actionnaires et la publication de cet avis ne constituent pas, par elles- mêmes, un
144
Fanny Streveler MA1 DROIT
Toutefois, l’assemblée générale peut, dans l’intérêt social, aux conditions de quorum et de majorité
prévues pour la modification des statuts, limiter ou supprimer le droit de préférence. Cette
proposition doit être spécialement annoncée dans la convocation409.
L’organe d’administration doit justifier sa proposition dans un rapport détaillé, portant notamment
sur le prix d’émission et sur les conséquences de l’opération sur les droits des actionnaires.
Ces rapports doivent être déposés au greffe du tribunal de l’entreprise. Ils doivent être annoncés
dans l’ordre du jour et les actionnaires peuvent en obtenir une copie. L’absence de ces rapports
entraîne la nullité de la décision de l’assemblée générale.
Des règles supplémentaires s’appliquent quand le droit de préférence est limité ou supprimé en
faveur d’une ou plusieurs personnes déterminées qui ne sont pas membres du personnel 411.
145
Fanny Streveler MA1 DROIT
- de la réparation du préjudice qui est une suite immédiate et directe, soit de l’absence ou de la
fausseté des mentions prescrites par le CSA dans l’acte, soit de la surévaluation manifeste des
apports en nature416.
En outre, le CSA prévoit des peines d’amendes et le cas échéant d’emprisonnement à charge des
administrateurs pour diverses infractions en matière d’augmentations de capital et notamment s’ils
n’établissent pas les rapports exigés en cas d’apport en nature417.
2. RÉDUCTION DU CAPITAL
Le capital peut être réduit :
- par remboursement aux actionnaires ou dispense de libération de leur apport ;
- par absorption des pertes ;
- en constituant une réserve pour couvrir une perte prévisible.
Les convocations à l’assemblée générale doivent indiquer la manière dont la réduction proposée
sera opérée ainsi que le but de cette réduction418.
Si la réduction du capital s’opère par un remboursement aux actionnaires ou par dispense totale ou
partielle du versement du solde des apports, les créanciers peuvent demander une sûreté dans les
deux mois de la publication aux Annexes du Moniteur belge de la décision de réduction du capital.
La société peut écarter cette demande en payant la créance à sa valeur, après déduction de
l’escompte.
A défaut d’accord ou si le créancier n’est pas payé, la contestation est soumise par la partie la plus
diligente au président du tribunal de l’entreprise dans le ressort duquel la société a son siège. La
procédure s’introduit et s’instruit et la décision s’exécute en référé. Le président détermine la
sûreté à fournir ou décide que la société ne doit pas en fournir. La société ne peut effectuer aucun
remboursement à ses actionnaires aussi longtemps que les créanciers qui ont fait valoir leurs droits
dans le délai de deux mois n’ont pas obtenu satisfaction à moins qu’une décision judiciaire
exécutoire n’ait rejeté leurs prétentions à obtenir une garantie420.
146
Fanny Streveler MA1 DROIT
B. Réduction en vue d’apurer une perte subie ou en vue de constituer une réserve pour couvrir une
perte prévisible
Dans ces hypothèses, le capital peut être réduit en dessous du minimum légal mais cette réduction
ne sort ses effets qu’à partir du moment où intervient une augmentation portant le montant du
capital à un niveau au moins égal au minimum légal421. C’est ce qu’on appelle le « coup
d’accordéon ». Le capital peut même être réduit à zéro : dans cette hypothèse, toutes les parts ou
actions sont annulées et de nouvelles actions sont émises dans le cadre de l’augmentation de
capital.
La réserve constituée pour couvrir une perte prévisible ne peut excéder 10 % du capital souscrit
après réduction. Cette réserve ne peut, sauf en cas de réduction ultérieure du capital, être
distribuée aux actionnaires ; elle ne peut être utilisée que pour compenser des pertes subies ou
augmenter le capital par incorporation de réserves422.
ASSISTANCE FINANCIÈRE
Pendant longtemps, le législateur a interdit aux sociétés dotées d’un capital d’avancer des fonds, accorder
des prêts ou donner des sûretés en vue de l’acquisition de leurs actions par des tiers car ces opérations
aboutissent à rendre le capital fictif. Ces opérations pouvant cependant être utiles, il a fini par les autoriser
mais à certaines conditions.
1. CONDITIONS
Les SA ne peuvent avancer des fonds, accorder des prêts ou donner des sûretés en vue de
l’acquisition de leurs actions par des tiers qu’à certaines conditions :
- les opérations ont lieu sous la responsabilité de l’organe d’administration ;
- l’organe d’administration doit rédiger un rapport indiquant les motifs de l’opération, l’intérêt
qu’elle présente pour la société, les conditions auxquelles elle s’effectue, les risques qu’elle
comporte pour la liquidité et la solvabilité de la société ainsi que le prix auquel le tiers est
censé acquérir les actions ; ce rapport doit être annoncé dans l’ordre du jour et une copie doit
être communiquée aux actionnaires qui le demandent ; en l’absence d’un tel rapport, la
décision de l’assemblée générale est nulle ;
- l’opération est soumise à une décision préalable de l’assemblée générale aux conditions de
quorum et de majorité requises pour la modification des statuts ;
- les sommes affectées à l’avance ou au prêt ou la contrevaleur de la sûreté doivent être
susceptibles d’être distribuées et la société doit inscrire au passif une réserve indisponible d’un
montant correspondant à l’aide financière totale ;
- lorsque le tiers bénéficiant de l’assistance financière acquiert des actions aliénées par la société
ou souscrit des actions dans le cadre d’une augmentation de capital, cette acquisition ou
souscription doit être effectuée à un juste prix423.
147
Fanny Streveler MA1 DROIT
sûretés consentis à des membres du personnel de la société ou d’une société liée ou à des sociétés
liées détenues par les membres du personnel424.
Le CSA prévoit indirectement des sanctions pénales via les dispositions qui répriment la violation
des dispositions en matière de distribution425.
La souscription par une société de ses propres titres est strictement interdite (supra) mais
l’acquisition par une société de ses propres titres d’une autre manière (achat,...) est moins
critiquable car ces titres ont une valeur.
Il n’empêche que l’acquisition de titres propres pourrait aboutir à priver les créanciers de tout
recours (exemple d’une SA qui achète toutes ses actions, rendant son capital fictif et s’autocontrôlant).
1. OBJECTIFS
L’acquisition par une société de ses propres titres peut avoir des objectifs divers :
- soutenir le cours ;
- remplir certaines obligations de la société (dans le cadre de plans de stock-options par exemple) ;
- se protéger contre une offre inamicale ;
- distribuer des actions.
Selon l’objectif poursuivi, la société peut acquérir ses titres pour les aliéner ultérieurement, ou les
acquérir et les annuler immédiatement, dans le cadre ou non d’une réduction de capital.
2. CONDITIONS
L’article 7:215 du CSA subordonne l’acquisition par une société anonyme de ses propres actions,
parts bénéficiaires et certificats426 aux conditions suivantes.
1° En principe, l’acquisition est soumise à une décision préalable de l’assemblée générale aux
conditions de quorum et de majorité requises pour la modification des statuts.
L’assemblée générale ou les statuts doivent fixer notamment le nombre maximum d'actions à
acquérir, la durée pour laquelle l'autorisation est accordée (qui ne peut excéder cinq ans) ainsi que
les contre-valeurs minimales et maximales. Il s’agit d’une autorisation : c’est l’organe
d'administration qui décide les acquisitions au cas par cas. L’autorisation de l’assemblée générale
peut être inscrite dans les statuts ou non. L’intervention du notaire n’est donc pas obligatoire.
148
Fanny Streveler MA1 DROIT
Toutefois,
- une décision de l’assemblée générale n’est pas requise lorsque la société acquiert ses propres
actions pour les distribuer au personnel427 (mais la société doit les transférer au personnel dans
les 12 mois) ;
- les statuts peuvent prévoir que la décision de l'assemblée générale n'est pas requise lorsque
l'acquisition est nécessaire pour éviter à la société un dommage grave et imminent ; cette
faculté n'est valable que pour une période de trois ans à dater de la publication de l'acte
constitutif ou de la modification des statuts mais peut être prorogée (conditions de quorum et
de majorité prévues pour la modification des statuts).
2° Les sommes affectées à cette acquisition doivent être susceptibles d’être distribuées.
3° L’opération ne peut porter que sur des actions entièrement libérées.
4° L’offre d’acquisition doit être faite aux mêmes conditions428 à tous les actionnaires, sauf pour les
acquisitions décidées à l’unanimité et, concernant les sociétés cotées à condition qu’elles
garantissent l’égalité de traitement des actionnaires moyennant l’équivalent du prix offert (ce qui
vise les acquisitions en bourse) ; dans ce dernier cas, la société ne doit pas lancer d’offre publique
d'acquisition.
Toute société cotée qui envisage d’acheter ses propres titres doit en informer au préalable la FSMA
et prévenir la FSMA de la mise en œuvre de l’opération429.
3. RÉGIME DE LA DÉTENTION
Les actions acquises peuvent être annulées ou détenues en portefeuille.
Aussi longtemps que les actions sont comptabilisées à l'actif du bilan, une réserve indisponible doit
être constituée, dont le montant est égal à la valeur à laquelle les actions acquises sont portées à
l'inventaire431.
Le CSA frappe de caducité le droit aux dividendes433. Cela signifie qu’il ne faut pas prendre en
compte les actions acquises pour calculer le dividende. La société ne peut donc pas s’octroyer le
dividende, ou en suspendre le paiement jusqu’à la vente des titres concernés.
149
Fanny Streveler MA1 DROIT
4. RÉGIME DE L’ALIÉNATION
Une SA ne peut aliéner les actions acquises que dans les cas suivants :
1° à la suite d’une offre de vente adressée à tous les actionnaires aux mêmes conditions ;
2° sur le marché où ses actions sont cotées ;
3° aux fins d’éviter un dommage grave et imminent, en vertu d’une autorisation statutaire ;
4° à une ou plusieurs personnes déterminées autres que le personnel en vertu d’une autorisation
statutaire ; dans ce cas, les administrateurs qui représentent en fait cette personne ou les
personnes qui lui sont liées ne peuvent participer au vote ;
5° au personnel dans les 12 mois de l’acquisition ;
6° l’aliénation porte sur des actions acquises à la suite d’une transmission du patrimoine à titre
universel ou dans le cadre d’une vente publique pour recouvrer une créance de la société sur le
détenteur de ces titres, lorsque la société est dans l’impossibilité de constituer une réserve
indisponible ; dans ce cas, ces actions doivent être aliénées dans un délai de 12 mois434.
5. REPORTING ET PUBLICITÉ
La SA doit rendre compte des acquisitions et aliénations dans son rapport de gestion435.
En outre, les sociétés cotées doivent rendre publiques les opérations d’achat au plus tard à la fin de
la septième journée boursière436.
7. SANCTIONS
Les actions acquises en violation de ces dispositions ou non aliénées dans les délais prescrits sont
nulles, ce qui entraîne la suppression de la réserve indisponible (ou si elle n’a pas été constituée, la
diminution des autres réserves ou du capital)437.
En outre, le CSA prévoit indirectement des sanctions pénales via les dispositions qui répriment la
violation des dispositions en matière de distribution438.
150
Fanny Streveler MA1 DROIT
8. PRISE EN GAGE
La prise en gage par une société anonyme de ses propres actions (soit par elle-même, soit par une
filiale directe, soit par une personne agissant en son nom propre mais pour compte de la société ou
cette filiale directe) est assimilée à une acquisition pour l’application des articles 7:215, § 1er
(conditions pour l’acquisition d’actions propres), 7:216, 2° (exception relative à la transmission de
patrimoine à titre universel) et 7:220 (reporting).
Cette assimilation est écartée pour les opérations courantes conclues aux conditions et sous les
garanties normalement exigées, pour des opérations de la même espèce, des établissements de
crédit.
Nonobstant toute disposition contraire, la société ne peut pas exercer le droit de vote attaché aux
titres qui lui ont été remis en gage439.
SONNETTE D’ALARME
A moins qu’il ne propose la dissolution, l’organe d’administration doit justifier les mesures qu’il
compte adopter en vue de redresser la situation financière de la société dans un rapport spécial
tenu à la disposition des actionnaires au siège de la société quinze jours avant l’assemblée
générale. Ce rapport doit être annoncé dans l’ordre du jour et les actionnaires peuvent en obtenir
une copie. Il est prescrit à peine de nullité de la décision de l’assemblée générale440.
Les mêmes règles doivent être observées si, par suite de pertes, l’actif net est réduit à un montant
inférieur au quart du capital mais, en ce cas, la dissolution aura lieu si elle est approuvée par le
quart des voix émises à l’assemblée441.
Lorsque l’assemblée générale n’a pas été convoquée conformément à ces règles, le dommage subi
par les tiers est, sauf preuve contraire, présumé résulter de cette absence de convocation.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
Les commissaires sont investis d’une mission particulière à cet égard. Les commissaires qui
constatent dans l’exercice de leur mission des faits graves et concordants susceptibles de
compromettre la continuité de l’entreprise doivent en informer l’organe d’administration. Dans ce
cas, l’organe d’administration doit délibérer sur les mesures qui devraient être prises pour assurer
la continuité de l’entreprise pendant une période minimale de douze mois. Si, dans un délai d’un
mois à dater de cette communication, les commissaires n’ont pas été informés de la délibération de
l’organe d’administration sur les mesures prises ou envisagées, ou s’ils estiment que ces mesures
ne sont pas susceptibles d’assurer la continuité de l’entreprise, ils peuvent en informer le président
du tribunal de l’entreprise443.
Les articles 2:52 et 3:69 ne sont pas spécifiques aux SA mais s’appliquent à toutes les personnes
morales régies par le CSA.
Elle intéresse cependant directement le droit des sociétés dans la mesure où, d’une part, la société-cible
peut se protéger par des mesures que le CSA réglemente et où, d’autre part, le déroulement de l’OPA a une
incidence sur la gouvernance de la société.
On se contentera donc ici d’observations très générales sur le mécanisme de l’OPA en lui-
même pour se concentrer sur les mécanismes anti-OPA et sur la gouvernance.
Les OPA sont régies par la loi du 1er avril 2007 relative aux offres publiques d'acquisition (« loi
OPA ») et l’arrêté royal du 27 avril 2007 relatif aux offres publiques d’acquisition (« AR OPA »).
Une offre publique d’acquisition est une offre publique s'adressant aux détenteurs de titres de la
société visée et destinée à acquérir tout ou partie de leurs titres, que l’offre soit volontaire ou
obligatoire444. Une offre revêt un caractère public lorsque l’offrant diffuse, sur le territoire belge,
une communication adressée à des personnes, sous quelque forme et par quelque moyen que ce
soit, qui présente une information suffisante sur les conditions de l'offre pour mettre un détenteur
de titres en mesure de décider de céder ses titres et met en œuvre, sur le territoire belge, des
procédés de publicité de quelque nature qu'ils soient, destinés à annoncer ou à recommander
l'offre d'acquisition445.
152
Fanny Streveler MA1 DROIT
Par exception, la loi considère que les offres suivantes volontaires ne sont pas des offres publiques :
les offres sur des titres répandus uniquement parmi des investisseurs qualifiés, les offres adressées,
à des conditions identiques, sur le territoire belge, à moins de 150 personnes, les offres portant sur
des titres dont la valeur nominale unitaire s'élève au moins à 100.000 EUR.
Une offre peut être volontaire (et dans ce cas, amicale ou hostile selon qu’elle ait lieu avec ou sans
l’approbation de l’organe d’administration de la société visée) ou obligatoire (en substance,
lorsqu’une personne franchit à la suite d’acquisitions le seuil de 30 % des titres avec droit de vote
d'une société qui a son siège statutaire en Belgique et dont une partie au moins des titres avec droit
de vote sont admis à la négociation sur un marché réglementé, elle est tenue de lancer une OPA sur
tous les autres titres)446.
Le champ d’application de la loi du 1er avril 2007 est différent en fonction de la nature de l’offre :
une OPA volontaire peut porter sur les actions d’une société qui n’est pas cotée (mais dont les
actions sont répandues dans le public) tandis qu’une OPA ne revêt un caractère obligatoire que
pour les sociétés cotées447.
Une OPA peut être une offre d’achat (l’offre paie un prix en argent en contrepartie des titres de la
société cible) ou une offre d’échange (l’offrant offre des actions d’une autre société en contrepartie
des titres de la société cible).
1. CONDITIONS
Une OPA doit porter sur la totalité des titres avec droit de vote ou donnant accès au droit de vote
émis par la société visée et non encore détenus par l'offrant.
En cas d'offre publique d'achat, l’offrant doit disposer des fonds nécessaires à la réalisation de
l'offre (soit en un compte auprès d'un établissement de crédit, soit sous la forme d'un crédit
irrévocable et inconditionnel ouvert à l'offrant par un établissement de crédit).
En cas d'offre publique d'échange, l'offrant doit disposer soit des titres à offrir en contrepartie, soit
du pouvoir de les émettre, du droit de les acquérir ou de les faire émettre448.
2. PROCÉDURE
Quiconque se propose d'effectuer une offre publique d'acquisition en avise préalablement la
FSMA449. Il doit joindre à cet avis un dossier comportant notamment un projet de prospectus ainsi
que, si l’offre est lancée par une personne détenant le contrôle de la société, le rapport d’un expert
indépendant désigné par le comité d’administrateurs indépendants sur le prix450.
153
Fanny Streveler MA1 DROIT
Le prospectus comporte les conditions de l’offre et les informations nécessaires pour que les
détenteurs de titres de la société visée puissent porter un jugement fondé sur l'opération451.
Lorsqu'elle a été saisie d'un avis d’OPA, la FSMA rend cet avis public et en informe l'entreprise de
marché (s’il s’agit d’une société cotée), la société visée et l'offrant452.
Le prospectus ne peut être publié qu’après son approbation par la FSMA 453. Il est publié sous forme
électronique sur le site web de l'offrant et, le cas échéant, sur celui des intermédiaires financiers
qui interviennent dans l’offre454.
La société visée établit un mémoire en réponse et le publie sur son site455. Ce mémoire en réponse
comporte au moins :
- les remarques éventuelles de la société visée concernant le prospectus ;
- les clauses statutaires impliquant une limitation de la cessibilité ou de la possibilité d'acquérir
des titres avec droit de vote ou donnant accès au droit de vote de la société visée ; si les statuts
contiennent des clauses d'agrément ou de préemption, l'organe d'administration indique si ces
clauses s'appliquent à l'égard de l'offrant et dans l’affirmative si l'organe d'administration
accordera ou refusera l'agrément et s'il demandera l'application des clauses de préemption ;
- dans la mesure où l'organe d'administration de la société visée en a connaissance, une liste des
droits préférentiels qui auraient été consentis à certaines personnes en vue d'acquérir des
titres avec droit de vote ou donnant accès au droit de vote ;
- l’avis motivé sur l'offre, avec notamment les intentions des administrateurs qui détiennent des
actions (les règles relatives aux décisions et opérations avec une patrie liée ne s’appliquent en
principe pas) ;
- les répercussions de la mise en œuvre de l'offre sur l'ensemble des intérêts de la société, des
détenteurs de titres, des créanciers et du personnel, en ce compris l'emploi ;
- le point de vue de l'organe d'administration concernant les plans stratégiques de l'offrant pour
la société visée et leurs répercussions probables sur les résultats de celle-ci ainsi que sur
l'emploi ;
- le point de vue de l'organe d'administration sur l'opportunité, pour les détenteurs de titres, de
céder à l'offrant, dans le cadre de l'offre, les titres qu'ils possèdent456.
Le mémoire en réponse ne peut être publié qu’après son approbation par la FSMA 457.
La période d'acceptation de l'offre, de deux à dix semaines, débute au plus tôt soit cinq jours
ouvrables après l'approbation du prospectus soit, si celle-ci a eu lieu plus tôt, après l'approbation
du mémoire en réponse458.
154
Fanny Streveler MA1 DROIT
3. RÉOUVERTURE DE L’OFFRE
L'offre doit être rouverte dans les cas suivants :
- l'offrant détient à l'expiration de la période d'acceptation de l'offre, 90% ou plus des titres avec
droit de vote de la société visée ;
- l'offrant demande, dans les trois mois qui suivent l'expiration de la période d'acceptation de
l'offre, la radiation des titres de la société visée du marché sur lequel ils sont admis ;
- l'offrant s'est engagé, avant l'expiration de la période d'offre, à acquérir des titres de la société
visée à un prix supérieur au prix de l'offre459.
4. CONTRE-OFFRE ET SURENCHÈRE
Le prix d'une contre-offre ou d'une surenchère doit excéder d'au moins 5 % celui de la (dernière)
offre, contre-offre ou surenchère460. L'avis annonçant l'intention de lancer une contre-offre ou de
surenchérir est rendu public deux jours au moins avant l'expiration de la période d'acceptation de
la dernière offre, contre-offre ou surenchère461.
En substance, les contre-offres et les surenchères sont soumises aux mêmes conditions que l’offre.
Toutefois, moyennant l'autorisation de la FSMA, l'offrant peut modifier ou retirer son offre dans les
cinq jours ouvrables qui suivent la notification qui lui a été faite par la société visée :
- de l'émission de titres nouveaux avec droit de vote ou donnant accès au droit de vote, sauf si
cette émission représente moins de 1% du nombre total des titres avec droit de vote ou
donnant accès au droit de vote émis et découle d'engagements souscrits avant la période
d'offre463 ;
- des décisions ou opérations qui ont ou peuvent avoir pour effet de modifier de manière
significative la composition de l'actif ou du passif de la société visée, ou des engagements
souscrits sans contrepartie effective464.
En outre, l’offrant peut retirer son offre dans les cas suivants :
- en cas de contre-offre ou de surenchère ;
retire pas son offre, doit étendre celle-ci, éventuellement à des conditions modifiées, aux titres nouvellement créés.
464 art. 16 de l’AR OPA.
155
Fanny Streveler MA1 DROIT
- en cas de défaut d'autorisation administrative requise pour l'acquisition des titres qui font
l'objet de l'offre ;
- au cas où, indépendamment de la volonté de l'offrant, une condition de l'offre autorisée par la
FSMA et indiquée dans l'avis notifié à la FSMA n'est pas remplie ;
- moyennant l'autorisation motivée de la FSMA, en cas de circonstances exceptionnelles ne
permettant pas la réalisation de l'offre pour des raisons objectives, indépendantes de la
volonté de l'offrant465.
Dans ce cas, l'offrant doit rouvrir son offre dans un délai de trois mois à dater de l'expiration de la
période d'acceptation de l'offre. Cette réouverture s'effectue aux mêmes conditions que l'offre ; la
période d'acceptation de l'offre rouverte compte au moins quinze jours ouvrables. Cette
réouverture équivaut à une offre de reprise mais laquelle l'arrêté royal relatif aux offres publiques
de reprise (infra) n'est pas applicable. Les titres non présentés à l'expiration de la période
d'acceptation de l'offre ainsi rouverte sont réputés transférés de plein droit à l'offrant. Les fonds ou
titres nécessaires au paiement du prix des titres ainsi transférés sont consignés auprès de la Caisse
des dépôts et consignations au profit de leurs anciens propriétaires.
A l'issue de l'offre, les titres de la société sont radiés du marché sur lequel ils étaient admis467.
156
Fanny Streveler MA1 DROIT
Un cours des actions élevé décourage les OPA inamicales en raison du prix que l’offrant devrait
payer pour acquérir toutes les actions.
Pour le surplus, une société peut se protéger contre le risque d’OPA par une série de mesures, qui
peuvent être mises en œuvre en cas d’OPA et qui rendent la société plus chère ou moins attractive.
Tout en étant de nature à décourager des OPA, de telles mesures peuvent s’expliquer par la volonté
de certains actionnaires et/ou de l’organe d’administration de conserver la structure en place,
créent généralement un conflit d’intérêts dans le chef des membres de l’organe d’administration et
risquent d’aller à l’encontre de l’intérêt social et même de s’avérer catastrophiques pour la société
et en particulier les actionnaires minoritaires. Or, l’organe d’administration doit toujours agir dans
l’intérêt de la société dans son ensemble469.
A. Réglementation
Cela explique que ces mécanismes soient réglementés.
Transparence :
Tout d’abord, la société visée doit aviser sans délai la FSMA et l'offrant de toute décision d'émission
de titres avec droit de vote ou donnant accès au droit de vote, et de toute autre décision ayant
pour but ou étant susceptible de faire échouer l'offre470.
157
Fanny Streveler MA1 DROIT
- Pendant la période d’OPA (dès la réception par une société, cotée ou non, d’une telle
communication) :
o Seule l’assemblée générale peut prendre des décisions ou procéder à des opérations qui
auraient pour effet de modifier de manière substantielle la composition de l’actif ou du
passif de la société, ou assumer des engagements sans contrepartie effective. Elle ne
peut pas prendre ou exécuter ces décisions ou opérations sous condition de la réussite
ou de l’échec de l’OPA. L’organe d’administration peut toutefois mener à terme les
opérations suffisamment engagées avant la réception de cette communication. Il doit
porter ses décisions immédiatement à la connaissance de l’offrant et de la FSMA et les
rendre publiques472.
o L’organe d’administration ne peut plus procéder à une augmentation de capital par
apports en nature ou par apports en numéraire ou créer de nouveaux titres conférant le
droit de vote en limitant ou supprimant le droit de préférence des actionnaires. Il peut
toutefois exécuter les engagements valablement pris avant la réception de cette
communication et procéder aux augmentations de capital aux conditions suivantes : (1) il
a été expressément et préalablement habilité par une assemblée générale, statuant
comme en matière de modification des statuts, tenue trois ans au maximum avant la
réception de cette communication, (2) les actions nouvelles soient dès leur émission
intégralement libérées, (3) le prix d’émission des actions nouvelles ne soit pas inférieur
au prix de l’offre et (4) le nombre d’actions ne dépasse pas un dixième des actions
représentatives du capital émises antérieurement à l’augmentation de capital (dans ce
cas, par dérogation à l’article 7:200, 2°, deuxième phrase, les administrateurs qui
représentent en fait le bénéficiaire de l’exclusion du droit de préférence peuvent
participer au vote). Il doit porter ces décisions immédiatement à la connaissance de
l’offrant et de la FSMA et les rendre publiques473.
Par exception, l’organe d’administration peut opposer les clauses d’agrément figurant soit dans les
statuts, soit dans un acte authentique d’émission d’obligations convertibles ou de droits de
souscription à l’auteur de l’offre pour autant qu’il justifie le refus d’agrément par l’application
constante et non discriminatoire des règles d’agrément qu’il a adoptées et communiquées à la
FSMA avant la date de la réception de l’avis d’OPA476.
158
Fanny Streveler MA1 DROIT
OFFRES DE REPRISE
1. SOCIÉTÉS COTÉES
Une offre de reprise est une offre faite par un actionnaire qui détient au moins 95 % des titres
conférant le droit de vote émis par une société anonyme cotée sur la totalité des titres de cette
société sans que les actionnaires puissent refuser de céder leurs titres.
Cette offre permet de faire perdre à une société sa qualité de société cotée. Elle peut notamment
avoir lieu à la suite d’une OPA.
A. Conditions
Toute personne physique ou morale, qui, agissant seule ou de concert, détient au moins 95 % des
titres conférant le droit de vote émis par une société anonyme cotée, peut faire une offre publique
de reprise afin d’acquérir en contrepartie d’un prix en argent la totalité des titres de cette société
conférant le droit de vote ou donnant accès au droit de vote.
B. Procédure
L’offrant doit aviser la FSMA et lui communiquer un dossier comportant notamment projet de
prospectus et un rapport d’un expert indépendant sur le prix offert477.
La FSMA rend cet avis public et en informe l'entreprise de marché concernée, la société visée et
l’offrant.
L’organe d'administration de la société visée rédige un mémoire en réponse qui comporte son
appréciation à propos du rapport de l'expert indépendant et son opinion sur le prix. Si les membres
de l'organe d'administration n'adoptent pas une position unanime, l'avis mentionne les positions
divergentes des membres, en précisant s'il s'agit de membres considérés comme administrateurs
indépendants ou de membres qui représentent en fait certains détenteurs de titres478.
La FSMA autorise l'offrant à lancer son offre à condition que l'expert indépendant ait conclu que le
prix offert ne méconnaît pas les intérêts des détenteurs de titres et qu’elle ait approuvé le
prospectus et le mémoire en réponse480.
La période d'acceptation de l'offre, d’une durée de deux à dix semaines, débute après l'approbation
du mémoire en réponse de la société visée481.
477art. 3, 4 et 6 de l’arrêté royal du 27 avril 2007 relatif aux offres publiques de reprise.
478 art. 7/1 et 7/2 de l’arrêté royal du 27 avril 2007.
479 art. 10 de l’arrêté royal du 27 avril 2007.
480 art. 16/1 de l’arrêté royal du 27 avril 2007.
481 art. 17 de l’arrêté royal du 27 avril 2007.
159
Fanny Streveler MA1 DROIT
L'offrant doit payer le prix dans les dix jours ouvrables qui suivent la publication des résultats de
l'offre482.
C. Effet
Les titres non présentés à l'expiration de l'offre sont réputés transférés de plein droit à l'offrant,
que leur propriétaire se soit ou non manifesté. Les fonds nécessaires au paiement des titres ainsi
transférés sont consignés auprès de la Caisse des dépôts et consignations au profit de leurs anciens
propriétaires483.
A l’issue de l’offre de reprise, la société n’est plus considérée comme une société cotée484. Elle est
radiée du marché sur lequel ses titres étaient admis à la négociation.
B. Effet
A l’issue de la procédure, les titres non présentés sont réputés transférés de plein droit à la
personne ayant fait offre de reprise avec consignation du prix, à l’exception des titres dont le
propriétaire a fait savoir expressément et par écrit qu’il refusait de s’en défaire.
A l’inverse de l’offre de reprise sur une société cotée, les actionnaires ne sont donc pas tenus de
céder leurs titres.
Les titres dématérialisés dont le propriétaire a fait savoir qu’il refusait de se défaire sont convertis
de plein droit en titres nominatifs et sont inscrits au registre des titres nominatifs par l’émetteur.
Cette offre n’est pas soumise à la loi du 1er avril 2007 relative aux offres publiques d’acquisition 486.
160
Fanny Streveler MA1 DROIT
CHAPITRE 4 :
SRL
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Fanny Streveler MA1 DROIT
CONSTITUTION
Les SRL sont bien entendu soumises aux conditions de validité communes à toutes les sociétés.
Elles peuvent être constituées par une ou plusieurs personnes physiques ou morales.
Le CSA prévoit à cet égard des règles de protection des créanciers qui sont quasi-identiques aux
règles relatives au capital des SA.
B. Points communs
- L’acte constitutif doit être reçu par acte authentique491.
- Les actions émises par les SRL et les SC doivent être intégralement et, nonobstant toute
disposition contraire, inconditionnellement souscrites492.
162
Fanny Streveler MA1 DROIT
- Les SRL et les SC ne peuvent souscrire leurs propres actions, ni directement, ni par une société
filiale, ni par une personne agissant en son propre nom mais pour le compte de la société ou de
sa filiale493.
- En ce qui concerne les apports en numéraire, les fonds doivent être déposés par versement ou
virement sur un compte spécial ouvert au nom de la société en formation auprès d’un
établissement de crédit494.
- Bien que les SRL et les SC soient dépourvues de capital, le CSA impose également aux
fondateurs de ces sociétés de rédiger un plan financier dans lequel ils justifient le montant des
capitaux propres de départ à la lumière de l’activité projetée495.
- Pour les apports en nature dans les SRL et les SC, le CSA requiert également un rapport des
fondateurs et un rapport d’un reviseur d’entreprise496, sous réserve de certaines exceptions.
2. SANCTIONS
Le régime de la nullité des SRL et des SC497 est identique à celui des SA498, sinon que bien entendu il
ne comporte pas de cause de nullité déduite de l’absence de mention du capital dans les statuts.
En ce qui concerne la responsabilité des fondateurs, le CSA comporte des règles semblables pour
les SRL et les SC, adaptées pour tenir compte de l’absence de capital dans ces sociétés499. En
particulier, les fondateurs engagent leur responsabilité en cas de faillite de la société dans les trois
ans si les capitaux de départ étaient manifestement insuffisants pour assurer l’exercice de l’activité
projetée pendant au moins deux ans.
TITRES
1. ACTIONS
Les SRL doivent émettre au moins une action et une action au moins doit avoir le droit de vote.
Chaque action doit être émise en contrepartie d’un apport 500. Il peut s’agir d’un apport en
industrie.
Sauf disposition statutaire contraire, chaque action donne droit à une part égale du bénéfice et du
solde de la liquidation501 et dispose d’une voix502. Alors que, sous l’empire du Code des sociétés,
toutes les parts avaient impérativement les mêmes droits, le CSA permet aux statuts de déroger à
ce principe.
163
Fanny Streveler MA1 DROIT
Dès lors que les SRL n’ont pas de capital, les actions ne sont pas représentatives du capital et il n’y a
pas de lien nécessaire entre la valeur de l’apport et les droits attachés aux actions. Les statuts
peuvent donc conférer des droits différents à des actions émises pour un même apport, ou les
mêmes droits à des actions émises pour un apport différent. Il n’y a pas davantage de lien entre la
valeur historique de l’apport d’une action et les droits attachés à ces actions.
Toutefois, si la SRL est cotée, elle ne peut déroger à la règle proportionnelle qu’en émettant des
actions de fidélité avec un double droit de vote, comme les SA cotées503.
En cas d’émission d’actions sans droit de vote, celles-ci retrouvent le droit de vote dans les mêmes
circonstances que les actions sans droit de vote émises par les SA504.
L’exercice du droit de vote peut être suspendu dans diverses hypothèses prévues par le CSA, qui ne
coïncident pas exactement avec celles prévues pour les SA : suspension des droits de vote afférents
aux actions concernées aussi longtemps que les versements éligibles en vue de la libération n’ont
pas été effectués505 ; suspension des droits de vote de l’apporteur en industrie qui est dans
l’impossibilité temporaire d’exécuter ses obligations pour une période de plus de trois mois, pour
toute la durée de cette impossibilité qui dépasse cette période de trois mois506 ; suspension des
droits de vote afférents aux actions propres détenues par la société507.
B. Classes d’actions
Les SRL peuvent émettre des classes différentes d’actions.
Toutefois, compte tenu de l’absence de capital et du fait qu’en l’absence de capital, chaque apport,
y compris l’apport en industrie, est autorisé, le législateur n’a pas jugé nécessaire de prévoir que les
SRL peuvent émettre des parts bénéficiaires. La distinction entre les actions de capital et les parts
bénéficiaires n’a en effet de sens que dans les sociétés où l’on distingue le capital d’autres éléments
de fonds propres.
En toute hypothèse, dans les SRL, des droits de vote ne peuvent être attachés qu’à des actions509.
164
Fanny Streveler MA1 DROIT
3. FORME
Les actions émises par les SRL sont nominatives.
Toutefois, les statuts des SRL cotées peuvent prévoir qu’elles peuvent émettre des actions
dématérialisées.
Les autres titres émis par les SRL sont en principe nominatifs mais les statuts peuvent prévoir la
forme dématérialisée510.
4. CESSION
Alors que, dans les SPRL, les parts étaient quasi incessibles, le CSA rend le principe de la quasi-
incessibilité des actions supplétif.
Les statuts peuvent régler librement la cessibilité des actions émises par la SRL ; « l’on peut faire de
la SRL une société très fermée mais également très ouverte » , ce qui explique la disparition du
terme « privée » dans sa dénomination.
Le registre des actions nominatives doit mentionner les restrictions relatives à la cessibilité
résultant des statuts et, lorsqu’une des parties le demande, les restrictions relatives à la cessibilité
des actions résultant de conventions ou des conditions d’émission511. En cas de contradiction entre
les statuts et le registre des actions, les statuts prévalent, sauf si ceux-ci n’ont pas encore été
adaptés après une émission d’actions par l’organe d’administration 512.
Sauf disposition statutaire contraire, tout transfert d’actions est soumis à l’agrément d’au moins la
moitié des actionnaires possédant les trois quarts au moins des actions, déduction faite des actions
dont la cession est proposée. Cet agrément doit ressortir d’un document écrit, comme le procès-
verbal d’une assemblée générale ou un document signé par les actionnaires qui doivent donner
leur autorisation. Une assemblée des actionnaires n’est donc pas indispensable.
Cet agrément n’est toutefois pas requis lorsque les actions sont cédées ou transmises :
1° à un actionnaire ;
2° au conjoint ou au cohabitant légal du cédant ;
3° à des ascendants ou descendants du cédant en ligne directe513.
Les cessions réalisées en méconnaissance de cette disposition ne sont pas opposables à la société ni
aux tiers, indépendamment de la bonne ou la mauvaise foi du cessionnaire514.
Les parties à une cession peuvent s’opposer au refus d’agrément devant le président du tribunal de
l’entreprise siégeant comme en référé. Si le refus est jugé arbitraire, le jugement vaudra agrément,
165
Fanny Streveler MA1 DROIT
à moins que l’acheteur ne retire son offre dans un délai de deux mois suivant la signification du
jugement515.
Les héritiers et légataires d’actions qui ne peuvent devenir actionnaires parce qu’ils n’ont pas été
agréés ont droit, nonobstant toute disposition contraire, à la valeur des actions transmises, selon le
cas, à charge des actionnaires ou de la société qui se sont opposés à l’autorisation.
Le rachat peut être demandé à l’organe d’administration de la société, qui transmet sans délai une
copie de la demande aux actionnaires qui se sont opposés à l’autorisation. Les héritiers et légataires
ne peuvent plus demander la dissolution de la société.
À défaut d’accord entre les parties ou de dispositions statutaires, les prix et conditions de rachat
seront déterminés par le président du tribunal de l’entreprise siégeant comme en référé, à la
requête de la partie la plus diligente516.
Ce régime ne s’applique pas si les statuts prévoient un mécanisme qui permet aux actionnaires
concernés de céder leurs actions en cas de refus d’agrément, tel que des clauses d’agrément
assorties d’une obligation de rachat par les actionnaires qui refusent l’agrément ou un droit de
préemption proportionnel de tous les actionnaires.
Une cession contraire aux restrictions à la cessibilité qui figurent dans des statuts publiés
régulièrement, n’est opposable ni à la société ni aux tiers, que le cessionnaire soit de bonne ou de
mauvaise foi, même lorsque la restriction statutaire ne figure pas dans le registre des
actionnaires 517.
Les SRL peuvent faire admettre leurs actions sur un marché réglementé (auquel cas elles
deviennent des sociétés cotées) mais c’est fort théorique. Le CSA renvoie, pour les SRL cotées, à
une série de dispositions applicables aux SA cotées518. Lorsqu’il est fait référence, dans ces
dispositions, à une fraction ou un pourcentage du capital, cette disposition doit être lue comme une
fraction ou un pourcentage des actions émises.
ADMINISTRATION
1. MODÈLES DE GOUVERNANCE
Le CSA comporte également trois modèles de gouvernance pour la SRL : les statuts peuvent prévoir
que la SRL est administrée par un administrateur unique, par plusieurs administrateurs constituant
un collège ou par plusieurs administrateurs disposant de pouvoirs concurrents, qui peuvent être
des personnes physiques ou morales.
166
Fanny Streveler MA1 DROIT
Lorsque les administrateurs constituent un organe collégial et que la place d’un administrateur
devient vacante avant la fin de son mandat, les administrateurs restants ont le droit de coopter un
nouvel administrateur, sauf si les statuts l’excluent519.
Lorsque les administrateurs constituent un collège, les statuts peuvent apporter des restrictions
aux pouvoirs de ce collège. Une telle restriction n’est pas opposable aux tiers, même si elle est
publiée. Il en va de même pour une répartition des tâches entre les administrateurs521.
Les administrateurs sont nommés par l’assemblée générale des actionnaires pour une durée
déterminée ou indéterminée ; ils sont désignés pour la première fois dans l’acte constitutif. Ils
peuvent aussi être nommés dans les statuts523.
En principe, l’assemblée générale peut mettre fin à tout moment, avec effet immédiat et sans
motif, au mandat des administrateurs qui ne sont pas nommés dans les statuts mais les statuts ou
l’assemblée générale au moment de la nomination peuvent prévoir une autre solution. La
révocation d’un administrateur nommé dans les statuts requiert une modification de ceux-ci.
L’assemblée générale peut en toute hypothèse mettre fin au mandat d’un administrateur, nommé
ou non dans les statuts, pour de justes motifs, sans préavis ni indemnité524.
3. GESTION JOURNALIÈRE
L’organe d’administration d’une SRL peut charger une ou plusieurs personnes, agissant seules ou
collégialement, de la gestion journalière de la société, ainsi que de la représentation de la société
en ce qui concerne cette gestion525.
167
Fanny Streveler MA1 DROIT
Si tous les administrateurs ont un conflit d’intérêts, la décision ou l’opération doit être soumise à
l’assemblée générale. Si l’assemblée générale approuve la décision ou l’opération, l’organe
d’administration peut l’exécuter526.
B. Organe collégial
Si un seul administrateur a un conflit d’intérêts, la décision est prise ou l’opération accomplie par
l’organe d’administration. L’administrateur qui a un conflit ne peut participer ni aux délibérations ni
au vote.
Si tous les administrateurs ont un conflit d’intérêts, la décision ou l’opération doit être soumise à
l’assemblée générale. Si l’assemblée générale approuve la décision ou l’opération, l’organe
d’administration peut l’exécuter527.
C. Administrateur unique
S’il n’y a qu’un administrateur et qu’il a un conflit d’intérêts, il doit soumettre la décision ou
l’opération à l’assemblée générale, sauf s’il est le seul actionnaire 528.
D. Procédure
Les autres administrateurs, l’assemblée générale ou l’administrateur unique qui est également
l’actionnaire unique doivent décrire dans le procès-verbal ou dans un rapport spécial la nature de la
décision ou de l’opération ainsi que ses conséquences patrimoniales pour la société et justifier la
décision qui a été prise.
Lorsque l’administrateur est aussi l’actionnaire unique, il doit également inscrire dans son rapport
spécial les contrats conclus entre lui et la société.
Cette partie du procès-verbal ou ce rapport spécial doit être intégralement reproduit dans le
rapport de gestion.
168
Fanny Streveler MA1 DROIT
E. Exceptions
L’article 5:76, § 5, prévoit les mêmes exceptions qu’en cas de conflits d’intérêts au sein de l’organe
d’administration d’une société anonyme.
C. Comités
Les SRL cotées doivent instituer un comité d’audit et un comité de rémunération, comme les SA532.
6. REPRÉSENTATION
A. Organe d’administration
Le système de représentation est identique à celui des SA.
Quel que soit le modèle retenu, l’organe d’administration (l’administrateur unique, chaque
administrateur si les administrateurs ont des pouvoirs concurrents ou l’organe collégial) représente
la société à l'égard des tiers et en justice, soit en demandant, soit en défendant.
Les statuts peuvent apporter des restrictions à ce pouvoir de représentation. Ces restrictions ne
sont pas opposables aux tiers, même si elles sont publiées. Il en va de même pour une répartition
des tâches entre les administrateurs533.
169
Fanny Streveler MA1 DROIT
D. Mandats spéciaux
L’organe compétent peut également octroyer des mandats spéciaux à un administrateur, au
délégué à la gestion journalière ou à un tiers.
Les règles en matière d’assemblée générale et de modification des statuts applicables aux SRL sont
semblables à celles applicables aux SA.
Toutefois, sauf disposition contraire des statuts, les actionnaires peuvent se faire représenter par
un mandataire, qui ne doit pas être actionnaire534. A l’inverse de la solution admise dans les SA, les
statuts peuvent donc exclure cette possibilité, ou la restreindre en imposant que le mandataire soit
lui-même actionnaire.
RÉSERVES ET DIVIDENDES
1. RÉSERVES
Les SRL peuvent constituer des réserves disponibles ou statutairement indisponibles mais, à
l’inverse des SA, elles ne doivent pas constituer de réserve légale.
Pour rappel, le 1er janvier 2020, les SPRL constituées avant le 1er mai 2019 qui n’avaient pas mis
leurs statuts en conformité avec le CSA ont été renommées de plein droit SRL et leur capital a été
versé à un poste de réserves statutairement indisponibles. Pour distribuer les montants portés à ce
poste, les SRL doivent modifier leurs statuts.
2. DIVIDENDES
Compte tenu de la suppression du capital et de la nécessité de protéger les tiers, le CSA prévoit un
double test applicable à toute distribution de dividendes : un test d’actif net et un test de liquidité.
170
Fanny Streveler MA1 DROIT
Si elle dispose de capitaux propres qui sont légalement ou statutairement indisponibles, elle ne
peut procéder à aucune distribution si son actif net est inférieur au montant de ces capitaux
propres indisponibles ou le deviendrait à la suite d’une telle distribution.
L’actif net de la société est établi sur la base des derniers comptes annuels approuvés ou d’un état
plus récent résumant la situation active et passive.
Dans les sociétés qui ont nommé un commissaire, ce dernier doit évaluer cet état. Le rapport
d’examen limité du commissaire est joint à son rapport de contrôle annuel535.
B. Test de liquidité
L’organe d’administration ne peut exécuter la décision de distribution prise par l’assemblée
générale que s’il constate qu’à la suite de la distribution, la société pourra, en fonction des
développements auxquels on peut raisonnablement s’attendre, continuer à s’acquitter de ses
dettes au fur et à mesure de leur échéance pendant une période d’au moins 12 mois à compter de
la date de la distribution. Il doit justifier sa décision dans un rapport qu’il ne doit pas déposer.
Dans les sociétés qui ont nommé un commissaire, ce dernier doit évaluer les données comptables
et financières historiques et prospectives de ce rapport et mentionner dans son rapport de contrôle
annuel qu’il a exécuté cette mission536.
S’il est établi que lorsqu’ils prennent cette décision, les membres de l’organe d’administration
savaient ou, au vu des circonstances, auraient dû savoir, qu’à la suite de la distribution, la société
ne serait manifestement plus en mesure de s’acquitter de ses dettes, ils sont solidairement
responsables envers la société et les tiers de tous les dommages qui en résultent.
Ce système combine donc le test de l’actif net avec un test de liquidité, dans la perspective de
responsabiliser les administrateurs. On peut s’étonner que le CSA n’ait pas prévu de test de
liquidité pour les distributions dans les SA : cela s’explique par le fait que ce test est destiné à
« compenser » la suppression du capital dans les SRL.
Le CSA permet la distribution d’acomptes sur dividendes dans les SRL : les statuts peuvent déléguer
à l’organe d’administration le pouvoir de procéder, moyennant le respect des deux tests précités, à
des distributions provenant du bénéfice de l’exercice en cours ou du bénéfice de l’exercice
171
Fanny Streveler MA1 DROIT
précédent tant que les comptes annuels de cet exercice n’ont pas été approuvés, le cas échéant
réduit de la perte reportée ou majoré du bénéfice reporté538.
Les statuts peuvent prévoir que l’organe d’administration peut émettre des nouvelles actions sans
modifier immédiatement les statuts.
A. Organe compétent
L’assemblée générale est en principe compétente pour émettre de nouvelles actions mais les
statuts peuvent déléguer le pouvoir d’émettre de nouvelles actions à l’organe d’administration541.
Le CSA prévoit à cet égard des règles semblables à celles applicables aux SA542, sinon qu’il vise, non
les augmentations de capital, mais les émissions d’actions, d’obligations convertibles ou de droits
de souscription, qu’on ne peut bien sûr pas parler de clause de capital autorisé et qu’il ne reprend
évidemment pas l’exception relative à l’incorporation de réserves dans le capital.
Bien que les SRL n’aient pas de capital, l’organe d’administration doit également rédiger un rapport
qui justifie spécialement le prix d’émission et décrit les conséquences de l’opération sur les droits
patrimoniaux et les droits sociaux des actionnaires. Dans les sociétés où un commissaire a été
désigné, ce dernier rédige un rapport dans lequel il évalue si les données financières et comptables
contenues dans le rapport de l’organe d’administration sont fidèles et suffisantes pour éclairer
l’assemblée générale appelée à voter sur cette proposition. A l’inverse de la solution prévue pour
les SA, l’organe d’administration ne doit pas faire appel à un réviseur d’entreprise ou un expert-
comptable externe en l’absence de commissaire544. Ces rapports doivent être déposés et publiés. Ils
172
Fanny Streveler MA1 DROIT
sont annoncés dans l’ordre du jour. Les actionnaires peuvent en obtenir une copie. En l’absence de
ces rapports, la décision de l’assemblée générale est nulle. Toutefois, sauf si les actions sont émises
à titre de rémunération d’un apport en nature, l’assemblée générale, à laquelle l’ensemble des
actionnaires sont présents ou représentés, peut renoncer par une décision unanime à ces
rapports545.
C. Droit de préférence
En cas d’émission de nouvelles actions par apports en numéraire, les actions doivent être offertes
par préférence aux actionnaires proportionnellement au nombre d’actions qu’ils détiennent546.
Toutefois, l’assemblée générale peut, dans l’intérêt social, aux conditions de quorum et de majorité
prévues pour la modification des statuts, limiter ou supprimer le droit de préférence547.
Toutefois, la règle qui paralyse les augmentations de capital en cas d’OPA sur la société550 ne
s’applique pas aux SRL, même cotées551.
173
Fanny Streveler MA1 DROIT
- soit les apports supplémentaires se font sans émission d’actions nouvelles et sans modification
des statuts553, ce qui suppose une décision de l’assemblée générale statuant à la majorité
simple constatée par acte authentique. De tels apports ne nécessitent pas de modification des
statuts puisque le montant des capitaux propres ne figure pas dans les statuts et que le
nombre d’actions émises reste inchangé. Le législateur a songé à l’hypothèse dans laquelle
tous les actionnaires font des apports de valeur égale (par exemple l’apport d’un immeuble dont ils
sont copropriétaires à parts égales). En principe, cette opération ne présente pas de risques pour
les actionnaires existants puisque la valeur des actions augmente sans bouleverser les
équilibres entre actionnaires. L’organe d’administration doit ensuite comptabiliser ces apports
sous la rubrique comptable prévue à cet effet. Aucune forme de publicité n’est prévue.
Seules des personnes répondant aux conditions pour devenir actionnaires peuvent souscrire des
actions nouvelles 554. Cette disposition vise en particulier les actions qui n’ont pas été souscrites
dans le cadre du droit de préférence.
B. Démission
Les statuts des SRL peuvent prévoir que les actionnaires ont le droit de démissionner de la société à
charge de son patrimoine et régler les modalités de cette démission, moyennant le respect des
conditions suivantes :
1° nonobstant toute disposition statutaire contraire, un actionnaire ne peut démissionner qu’à
partir du troisième exercice suivant la constitution ;
2° sauf disposition contraire,
- un actionnaire ne peut démissionner que pendant les six premiers mois de l’exercice social ;
- un actionnaire ne peut démissionner que pour l’ensemble de ses actions, qui seront annulées ;
- la démission prend effet le dernier jour du sixième mois de l’exercice ;
- le montant de la part de retrait pour les actions pour lesquelles l’actionnaire concerné
demande sa démission est équivalant au montant réellement libéré et non encore remboursé
pour ces actions, sans cependant pouvoir être supérieur au montant de la valeur d’actif net de
ces actions telle qu’elle résulte des derniers comptes annuels approuvés ;
- la société doit payer la valeur de la part de retrait au plus tard dans le mois qui suit ;
3° le montant auquel l’actionnaire a droit à la démission est considéré comme une distribution.
Nonobstant toute disposition statutaire contraire, si la part de retrait ne peut être payée en tout ou
partie en raison des dispositions en matière de distribution, le droit au paiement est suspendu
jusqu’à ce que les distributions soient à nouveau permises. Le montant restant dû sur la part de
retrait devra être payé avant toute autre distribution aux actionnaires. Aucun intérêt n’est dû sur ce
montant.
L’organe d’administration doit faire rapport à l’assemblée générale des demandes de démission
intervenues au cours de l’exercice précédent. Ce rapport doit contenir au moins l’identité des
actionnaires démissionnaires, le nombre et la classe d’actions pour lesquelles ils ont démissionné,
le montant versé et les autres modalités éventuelles, le nombre de demandes rejetées et le motif
du refus555.
174
Fanny Streveler MA1 DROIT
C. Exclusion
Les statuts des SRL peuvent prévoir la possibilité d’exclure un actionnaire pour justes motifs ou
pour tout autre motif indiqué dans les statuts.
La proposition motivée d’exclusion doit être communiquée à l’actionnaire par courrier électronique
(si l’actionnaire a communiqué à la société une adresse électronique) ou à défaut par pli
recommandé. Seule l’assemblée générale est compétente pour prononcer une exclusion.
L’actionnaire dont l’exclusion est demandée doit être invité à faire connaître ses observations par
écrit à l’assemblée générale, dans le mois de la communication de la proposition d’exclusion.
L’actionnaire doit être entendu à sa demande. Toute décision d’exclusion doit être motivée.
L’organe d’administration doit communiquer dans les quinze jours à l’actionnaire concerné la
décision motivée d’exclusion et inscrire l’exclusion dans le registre des actions. Si l’actionnaire a
choisi de communiquer avec la société par courrier, il doit lui communiquer la décision par pli
recommandé.
Sauf disposition statutaire contraire, l’actionnaire exclu recouvre la valeur de sa part de retrait,
calculée comme en matière de démission, sinon que l’exclusion peut avoir lieu à tout moment. Les
actions de l’actionnaire exclu sont annulées556.
A contrario, les statuts pourraient priver l’actionnaire exclu de tout droit à la valeur de ses actions.
D. Formalités
L’organe d’administration doit mettre à jour le registre des actions (admissions, démissions,
exclusions, date à laquelle elles sont intervenues ainsi que le montant versé par et aux actionnaires
concernés).
Les émissions d’actions nouvelles et les modifications des statuts qui en découlent doivent être
constatées par un acte authentique reçu à la requête de l’organe d’administration557.
Toutefois, les statuts peuvent prévoir que l’organe d’administration peut émettre des actions sans
modifier immédiatement les statuts. Dans ce cas, les émissions et les modifications statutaires qui
en découlent doivent être constatées, avant la fin de chaque exercice, par un acte authentique reçu
à la demande de l’organe d’administration558.
De même, les démissions et les exclusions ainsi que les modifications statutaires qui en découlent
doivent être établies, avant la fin de chaque exercice, par un acte authentique reçu à la demande
de l’organe d’administration559. Pour les démissions et les exclusions, une clause statutaire n’est
donc pas nécessaire pour dispenser l’organe d’administration de modifier immédiatement les
statuts.
175
Fanny Streveler MA1 DROIT
ASSISTANCE FINANCIÈRE
Bien que les SRL n’aient pas de capital, le régime applicable à l’assistance financière est identique à
celui applicable aux SA 560, sous la seule réserve que cette disposition ne prévoit pas expressément
l’inapplication de la règle suivant laquelle, lorsque le tiers bénéficiant de l’assistance financière
acquiert des actions aliénées par la société ou souscrit des actions dans le cadre d’une
augmentation de capital, cette acquisition ou souscription doit être effectuée à un juste prix561.
1. CONDITIONS
L’acquisition par une SRL de ses propres actions est soumise aux mêmes conditions que celles
requises pour l’acquisition par une SA de ses propres actions, avec les différences suivantes :
- le CSA ne limite pas à cinq ans la durée de l’autorisation de l’assemblée générale562 ;
- la seule exception prévue à la nécessité d’obtenir l’autorisation de l’assemblée générale est
l’acquisition en vue de la distribution au personnel563 (le CSA ne prévoit pas d’exception en cas
de dommage grave et imminent, sauf pour les sociétés cotées564) ;
- le CSA ne limite pas à 12 mois le délai endéans lequel les actions doivent être transférées au
personnel565 ;
- comme pour les SA, le CSA écarte cette procédure pour l’acquisition d’actions par la société à
la suite d’une transmission de patrimoine à titre universel ou lors d’une vente publique en vue
de recouvrer une créance de la société sur le propriétaire de ces actions566 ; cette disposition
ne reprend logiquement pas l’exception relative à l’annulation des actions en vue de la
réduction du capital puisque la SRL n’a pas de capital ;
- le CSA ne prévoit pas pour les SRL qui aliènent leurs actions les exceptions à l’égalité de
traitement des actionnaires en cas d’aliénation aux fins d’éviter à la société un dommage grave
et imminent ou en vertu d’une autorisation statutaire explicite à une ou plusieurs personnes
déterminées autres que le personnel ;
- le CSA n’assimile pas l’acquisition des actions de la SRL par une filiale à une acquisition par la
SRL elle-même.
Le CSA impose aux SRL cotées les mêmes règles que pour les SA cotées en ce qui concerne l’égalité
de traitement des actionnaires et l’obligation de reporting à la FSMA567, sous réserve qu’il ne
renvoie pas à l’exception à l’égalité de traitement prévue pour les SA en cas d’aliénation de ses
actions aux fins d’éviter un dommage grave et imminent.
176
Fanny Streveler MA1 DROIT
2. RÉGIME DE LA DÉTENTION
Le régime de la détention est identique à celui prévu pour les SA568.
3. RÉGIME DE L’ALIÉNATION
La SRL ne peut aliéner les actions acquises qu’en vertu d’une décision de l’assemblée générale prise
aux conditions de quorum et de majorité requises pour la modification des statuts, qui détermine
les conditions d’aliénation.
Les actions doivent être offertes par préférence aux actionnaires existants proportionnellement au
nombre d’actions qu’ils détiennent.
Une telle autorisation n’est pas requise pour l’aliénation au personnel d’actions acquises à ces
fins569.
4. PRISE EN GAGE
Le CSA ne réglemente pas la prise en gage par une SRL de ses propres actions. Il ne s’agit pas d’un
oubli.
L’Exposé des motifs précise en effet que « la disposition relative à la prise en gage de parts
propres570 est supprimée en raison de son inefficacité. Les opérations pouvant donner lieu à une
prise en gage d’actions propres restent néanmoins soumises aux règles relatives à la gestion des
conflits d’intérêts et au prescrit de l’article 5:152 [disposition relative à l’assistance financière] ».
SONNETTE D’ALARME
A moins qu’il ne propose la dissolution, l’organe d’administration doit justifier les mesures qu’il
compte adopter en vue de redresser la situation financière de la société dans un rapport spécial
tenu à la disposition des actionnaires au siège de la société quinze jours avant l’assemblée
177
Fanny Streveler MA1 DROIT
générale. Ce rapport doit être annoncé dans l’ordre du jour et les actionnaires peuvent en obtenir
une copie. Il est prescrit à peine de nullité de la décision de l’assemblée générale.
Lorsque l’organe d’administration a rempli une première fois ses obligations, il n’est plus tenu de
convoquer l’assemblée générale pour les mêmes motifs pendant les 12 mois suivant la convocation
initiale.
Si l’assemblée générale n’a pas été convoquée dans ce délai, le dommage subi par les tiers est, sauf
preuve contraire, présumé résulter de cette absence de convocation571.
2. TEST DE LIQUIDITÉ
Les SRL doivent également appliquer cette procédure, avec les mêmes sanctions, lorsque l’organe
d’administration constate qu’il n’est plus certain que la société, selon les développements auxquels
on peut raisonnablement s’attendre, sera en mesure de s’acquitter de ses dettes au fur et à mesure
de leur échéance pendant au moins les 12 mois suivants572.
On peut regretter que le législateur n’ait pas repris cette règle pour les SA mais c’est cohérent avec l’absence
de test de liquidité pour la distribution des bénéfices d’une SA.
178
Fanny Streveler MA1 DROIT
CHAPITRE 5 :
SC
179
Fanny Streveler MA1 DROIT
CONSTITUTION
1. ACTE CONSTITUTIF
Les SC doivent être constituées par acte authentique574.
2. NOMBRE D’ACTIONNAIRES
Les SC doivent être constituées par au moins trois fondateurs, personnes physiques ou morales, et
doivent à tout moment avoir au moins trois actionnaires.
L’absence de trois fondateurs valablement engagés est une cause de nullité de la SC575.
« Si au cours de son existence une société coopérative compte moins de trois actionnaires, tout
intéressé peut en demander la dissolution devant le tribunal de l'entreprise du siège de la société.
Le tribunal peut accorder à la société un délai pour régulariser la situation en prenant une autre
forme légale ou en ramenant à nouveau le nombre d'actionnaires à trois »576.
3. BUT
« La société coopérative a pour but principal la satisfaction des besoins et/ou le développement des
activités économiques et/ou sociales de ses actionnaires ou bien de tiers intéressés notamment par
la conclusion d’accords avec ceux-ci en vue de la fourniture de biens ou de services ou de
l’exécution de travaux dans le cadre de l’activité que la société coopérative exerce ou fait exercer.
La société coopérative peut également avoir pour but de répondre aux besoins de ses actionnaires
ou de ses sociétés mères et de leurs actionnaires ou de tiers intéressés que ce soit ou non par
l’intermédiaire de filiales. Elle peut également avoir pour but de favoriser leurs activités
économiques et/ou sociales par une participation à une ou plusieurs autres sociétés »577.
Cette définition est calquée sur celle de la société coopérative européenne (infra).
180
Fanny Streveler MA1 DROIT
4. Autonomie et indépendance
5. Éducation, formation et information
6. La coopération entre coopératives
7. Souci de la communauté.
La flexibilité, qui constituait l’attrait des sociétés coopératives sous l’empire du Code des sociétés,
se retrouve désormais également dans la SRL.
Alors que, sous l’empire du Code des sociétés, les SCRL étaient très proches des SPRL sous réserve
de leur capital variable, désormais, les « fausses » coopératives ne peuvent plus prendre cette
forme et doivent se transformer, par exemple en SRL.
AGRÉMENTS
Pour être agréées, les SC doivent adopter des statuts conformes aux principes suivants 584 :
1° l'affiliation des actionnaires doit être volontaire et la société ne peut refuser l'affiliation
d'actionnaires ou prononcer leur exclusion que si les intéressés ne remplissent pas ou cessent de
remplir les conditions générales d'admission prévues dans les statuts ou s'ils commettent des actes
contraires aux intérêts de la société ;
181
Fanny Streveler MA1 DROIT
2° les actions, même si elles sont de valeur différente, confèrent, par catégories de valeurs, les
mêmes droits et obligations, sous réserve du droit de vote (infra) ;
3° tous les actionnaires ont une voix égale en toutes matières aux assemblées générales, quel que
soit le nombre d’actions dont ils disposent ;
4° les administrateurs et les commissaires sont nommés par l'assemblée générale ;
5° le dividende octroyé aux actionnaires ne peut dépasser 6 % de la valeur nominale des actions
après retenue du précompte mobilier ;
6° le but principal de la société est de procurer aux actionnaires un avantage économique ou social,
dans la satisfaction de leurs besoins professionnels ou privés ;
7° le mandat des administrateurs et des actionnaires chargés du contrôle est gratuit ;
8° une partie des ressources annuelles est consacrée à l'information et à la formation des
actionnaires, actuels et potentiels, ou du grand public.
L’intérêt d’un tel agrément tient à divers avantages fiscaux et en matière de sécurité sociale :
- exonération d'une partie des dividendes versés aux actionnaires ;
- absence de requalification d'intérêts en dividendes ;
- application étendue du tarif réduit à l'impôt sur les sociétés ;
- sécurité sociale des travailleurs pour les administrateurs ;
- participation à la formation du Conseil national de la Coopération ;
- logo pour les sociétés coopératives agréées.
2. ENTREPRISE SOCIALE
Une SC peut être agréée comme entreprise sociale si elle remplit les conditions prévues par l’article
8:5, § 1er, du CSA et l’arrêté royal du 28 juin 2019 fixant les conditions d’agrément comme
entreprise agricole et comme entreprise sociale :
1° elle doit avoir pour but principal, dans l’intérêt général, de générer un impact social positif pour
l’homme, l’environnement ou la société ;
2° il doit ressortir de son objet statutaire qu’il sert à générer un impact sociétal positif pour
l’homme, pour l’environnement ou pour la société ;
3° tout avantage patrimonial qu’elle distribue à ses actionnaires, sous quelque forme que ce soit,
ne peut, à peine de nullité, excéder le taux d’intérêt fixé par l’arrêté royal du 8 janvier 1962,
appliqué au montant réellement versé par les actionnaires sur les actions (actuellement, 6 %) ;
4° le montant du dividende ne peut être fixé qu’après fixation du montant réservé aux projets de la
société ;
5° en cas de démission, l’actionnaire reçoit au maximum la valeur nominale de son apport réel ;
6° aucun actionnaire ne peut prendre part au vote à l’assemblée générale pour un nombre de voix
représentant le dixième des voix attachées aux actions représentées ;
7° le mandat d’administrateur est gratuit ;
8° lors de la liquidation, le patrimoine subsistant après apurement du passif et remboursement de
la somme réellement versée par les actionnaires et non encore remboursée sur les actions doit être
réservé à une affectation qui correspond le plus possible à son objet comme entreprise sociale
agréée585.
585 CSA, art. 8:5, § 1er, al. 1 ; art. 6, § 1er de l’AR 28 juin 2019.
182
Fanny Streveler MA1 DROIT
Mis à part le « prestige » résultant d’un tel agrément, on n’aperçoit pas à ce stade l’avantage d’un
tel agrément.
Une telle SC doit ajouter à sa dénomination les termes « société coopérative agréée comme
entreprise sociale » et est désignée en abrégé « SC agréée comme ES » si son but principal ne
consiste pas à procurer à ses actionnaires un avantage économique ou social pour la satisfaction de
leurs besoins professionnels ou privés586.
3. DOUBLE AGRÉMENT
« Une société coopérative dont le but principal ne consiste pas à procurer à ses actionnaires un
avantage économique ou social, pour la satisfaction de leurs besoins professionnels ou privés, et
qui est tant une société coopérative agréée visée à l’article 8:4 qu’une société agréée en tant
qu’entreprise sociale visée au paragraphe 1er, ajoute à la dénomination de sa forme légale les
termes ‘agréée’ et ‘entreprise sociale’ et est désignée en abrégé ‘SCES agréée’ »587.
En d’autres termes, une SC peut cumuler les deux agréments, en tant que « SC agréée » et en tant
que « SC agréée comme ES », et est alors une « SCES agréée ».
Cette disposition est obscure, puisque l’une des conditions pour qu’une SC soit agréée est
précisément que le but principal consiste à procurer à ses actionnaires un avantage économique ou
social.
TITRES
1. ACTIONS ET OBLIGATIONS
Les SC peuvent uniquement émettre des actions (elles peuvent aussi les appeler « parts »)
nominatives avec droit de vote et des obligations588. Elles ne peuvent donc pas émettre de parts
bénéficiaires.
Les SC doivent émettre au moins trois actions avec droit de vote et chaque action doit être émise
en contrepartie d’un apport589.
Sauf disposition contraire, chaque action donne droit à une part égale du bénéfice et du solde de
liquidation590 et à une voix591. Les SC peuvent donc émettre des actions à droit de vote multiple et
des actions avec dividende privilégié.
183
Fanny Streveler MA1 DROIT
2. FORME
Une SC peut uniquement émettre des actions nominatives avec droit de vote et des obligations592.
L’exercice du droit de vote peut cependant être suspendu dans diverses hypothèses prévues par le
CSA : suspension des droits de vote afférents aux actions concernées aussi longtemps que les
versements éligibles en vue de la libération n’ont pas été effectués593 ; suspension des droits de
vote de l’apporteur en industrie qui est dans l’impossibilité temporaire d’exécuter ses obligations
pour une période de plus de trois mois, pour toute la durée de cette impossibilité qui dépasse cette
période de trois mois594.
3. CESSION
Sauf disposition statutaire contraire, les actions sont librement cessibles aux actionnaires, le cas
échéant dans les conditions prévues par les statuts595.
Le registre des actions nominatives doit mentionner les restrictions relatives à la cessibilité
résultant des statuts et, lorsqu’une des parties le demande, les restrictions relatives à la cessibilité
des actions résultant de conventions ou des conditions d’émission596. En cas de contradiction entre
les statuts et le registre des actions, les statuts prévalent597.
Les actions ne peuvent être transférées à des tiers que si ceux-ci appartiennent aux catégories
déterminées par les statuts et satisfont aux exigences statutaires pour devenir actionnaire. L’organe
d’administration a le pouvoir d’en décider, sauf si les statuts prévoient que ce pouvoir appartient à
l’assemblée générale. Les statuts peuvent prévoir que l’organe compétent peut refuser un candidat
acquéreur, à condition de motiver son refus598. A contrario, dans le silence des statuts, l’organe
compétent doit admettre toutes les personnes qui remplissent les conditions fixées par les statuts
pour devenir actionnaires.
Une cession contraire aux restrictions à la cessibilité qui figurent dans des statuts publiés
régulièrement, n’est opposable ni à la société ni aux tiers, que le cessionnaire soit de bonne ou de
mauvaise foi, même lorsque la restriction statutaire ne figure pas dans le registre des
actionnaires 600.
184
Fanny Streveler MA1 DROIT
A l’inverse des SA et des SRL, les SC ne peuvent pas faire admettre leurs actions sur un marché
réglementé601.
ADMINISTRATION
Le CSA prévoit les mêmes règles en matière d’administration pour les SC que pour les SRL non
cotées, notamment :
- les mêmes modèles de gouvernance602 ;
- les mêmes règles en matière de conflits d’intérêts603 ;
- les mêmes règles en matière de gestion journalière604 ;
- les mêmes règles en matière de représentation605.
Le CSA prévoit les mêmes règles en matière d’assemblée générale et de modification des statuts
pour les SC que pour les SRL non cotées, notamment :
- les mêmes règles de convocation aux assemblées générales des SC606 ;
- les mêmes règles en matière de modalité de vote à l’assemblée générale607 ;
- les mêmes règles en matière de quorum et de majorité à l’assemblée générale ; toutefois, ces
règles sont supplétives dans les SC608.
RÉSERVES ET DIVIDENDES
Le CSA prévoit les mêmes règles en matière de réserves et de dividendes que pour les SRL, et
notamment le double test pour distribuer des dividendes 609.
1. ORIGINALITÉ DES SC
Traditionnellement, les sociétés coopératives se caractérisaient par la faculté pour les SC d’émettre
des nouvelles actions et d’admettre de nouveaux actionnaires sans modifier leurs statuts. De
même, des associés pouvaient être exclus ou démissionner sans modification des statuts. C’était un
des points majeurs qui les distinguait des SPRL.
Le CSA conserve cette règle (infra). Cela reste donc un point majeur qui distingue les SC des SRL.
185
Fanny Streveler MA1 DROIT
Toutefois, le CSA prévoit que, comme les SRL, les SC doivent mentionner le nombre d’actions
qu’elles ont émises dans leurs statuts610. L’obligation de mentionner le nombre d’actions dans les
statuts, plutôt que dans l’autre partie de l’acte constitutif, résulte manifestement d’une erreur : il
est incohérent d’imposer la mention du nombre d’actions dans les statuts d’une SC, alors qu’il est
possible de devenir actionnaire d’une SC, de démissionner ou d’être exclu sans modification des
statuts. La Cour constitutionnelle vient d’annuler cette disposition 611.
2. ADMISSION
L’organe d’administration peut, sans modification des statuts, décider d’émettre de nouvelles
actions et de les attribuer aux personnes qui satisfont aux exigences statutaires pour devenir
actionnaires, sauf si les statuts réservent ce pouvoir à l’assemblée générale612.
Nonobstant toute disposition statutaire contraire, les actionnaires et les tiers qui satisfont aux
exigences statutaires pour devenir actionnaires peuvent souscrire à des actions nouvelles sans
modification statutaire, conformément aux conditions prévues par les statuts613. Les statuts
peuvent cependant prévoir que l’organe compétent peut refuser un candidat actionnaire, à
condition de motiver son refus614. A contrario, dans le silence des statuts, l’organe compétent doit
admettre toutes les personnes qui remplissent les conditions fixées par les statuts pour devenir
actionnaires.
3. DÉMISSION
« Nonobstant toute disposition statutaire contraire, les actionnaires ont le droit de démissionner de
la société à charge de son patrimoine »615. Une telle démission n’est autorisée qu’à partir du
troisième exercice suivant la constitution616.
Les statuts peuvent régler les modalités de la démission mais ne peuvent pas l’interdire.
186
Fanny Streveler MA1 DROIT
S’agissant d’une distribution, nonobstant toute disposition statutaire contraire, si la part de retrait
ne peut être payée en tout ou partie en raison des dispositions en matière de distribution, le droit
au paiement est suspendu jusqu’à ce que les distributions soient à nouveau permises. Le montant
restant dû sur la part de retrait devra être payé avant toute autre distribution aux actionnaires.
Aucun intérêt n’est dû sur ce montant617.
Sous réserve que, dans les SC, les statuts ne peuvent écarter le droit de démission et la démission
n’entraîne pas de modification des statuts, le régime de la démission est identique dans les SC et les
SRL.
4. EXCLUSION
Nonobstant toute disposition statutaire contraire, la société peut exclure un actionnaire pour justes
motifs. Les statuts peuvent prévoir des motifs d’exclusion supplémentaires619.
L’assemblée générale est en principe compétente pour prononcer l’exclusion mais les statuts
peuvent attribuer ce pouvoir à l’organe d’administration620.
L’actionnaire dont l’exclusion est demandée doit être invité à faire connaître ses observations par
écrit à l’organe compétent pour décider de l’exclusion, dans le mois de la communication de la
proposition d’exclusion. L’actionnaire doit être entendu à sa demande.
Sauf disposition contraire des statuts, l’actionnaire exclu a droit à la valeur de ses actions (calculée
comme en cas de démission) 622.
A contrario, les statuts pourraient priver l’actionnaire exclu de tout droit à la valeur de ses actions.
187
Fanny Streveler MA1 DROIT
ASSISTANCE FINANCIÈRE
Le CSA prévoit les mêmes règles en matière d’assistance financière pour les SC que pour les SRL623.
Le CSA interdit aux SC d’acheter leurs propres titres624 (exception en faveur des sociétés de bourse
et des établissements de crédit).
SONNETTE D’ALARME
Le CSA prévoit les mêmes règles en matière de sonnette d’alarme pour les SC que pour les SRL625.
188
Fanny Streveler MA1 DROIT
CHAPITRE 6 :
GROUPEMENTS
EUROPEENS
189
Fanny Streveler MA1 DROIT
Pour faciliter la constitution de groupements entre les ressortissants d’Etats membres de l’Union
européenne et les opérations transfrontalières (déplacement transfrontalier du siège et fusion
transfrontalière), le législateur européen a créé des groupements directement soumis au droit
européen : le groupement européen d'intérêt économique (GEIE), la société européenne (SE) et la
société coopérative européenne (SCE).
A l’inverse d’une directive, un règlement est directement applicable dans tous les Etats membres et
obligatoire dans tous ses éléments, sans que les Etats aient le pouvoir d’y déroger ou même de les
transposer.
On compte à ce jour :
- 3.349 SE (Airbus, Allianz, BASF, Getlink (anciennement Eurotunnel), LVMH, Zalando,…) ;
- 2.193 GEIE (Arte, Rail Manche Finance, The Mont Blanc Tunnel, ...).
Si ces chiffres sont modestes, plusieurs SE sont de très grandes sociétés cotées en bourse.
SE
→ Règlement n°2157/2001.
La société anonyme européenne, aussi dénommée « Societas Europaea » (en abrégé « SE ») est
« une société dont le capital est divisé en actions » et dont « chaque actionnaire ne s’engage qu’à
concurrence du capital qu’il a souscrit »626.
Le capital souscrit doit être d’au moins 120.000 EUR 627. Le capital doit être libéré à concurrence
d’au moins 61.500 EUR 628.
1. LOI APPLICABLE
La SE est régie par le Règlement n° 2157/2001 du Conseil du 8 octobre 1981 (ci-après, le Règlement
SE). Ce Règlement est complété par la Directive 2001/86/CE du Conseil du 8 octobre 2001 pour ce
qui concerne l'implication des travailleurs (ci-après, la Directive SE).
L’objectif du Conseil était essentiellement de créer une forme supranationale de société pour
faciliter le rapprochement et la réorganisation de sociétés ayant une dimension européenne.
190
Fanny Streveler MA1 DROIT
Toutefois, le Règlement constitue plutôt un cadre général qui laisse beaucoup de questions à la loi
de l’Etat où la SE est immatriculée. L’avantage d’une réglementation supranationale est donc
partiellement neutralisé par les références aux lois nationales.
La SE est également régie par les dispositions du livre 15 du CSA adoptées en application de ce
Règlement et, pour les matières non régies par ce Règlement, par les dispositions du livre 7 du CSA,
applicables aux SA.
En conséquence, il n’y a pas une seule SE, mais autant de SE que d’Etats membres de l’Union
européenne.
En Belgique, outre le Règlement SE, la SE est régie par les dispositions du livre 15 du CSA adoptées
en application de ce Règlement et, pour les matières non réglées par ce Règlement, par les
dispositions du livre 7 du CSA applicables aux SA629.
2. FACTEUR DE RATTACHEMENT
Le Règlement SE a tenté de trouver un compromis entre la théorie du siège réel (la société est régie
par la loi de l’Etat du lieu où elle a son siège réel) et la théorie de l’incorporation ou du siège
statutaire (la société est régie par la loi de l’Etat où elle a été constituée ou où elle a son siège
statutaire).
Il prévoit en effet que « le siège statutaire de la SE est situé à l'intérieur de la Communauté [lire
l’Union], dans le même État membre que l'administration centrale. Un État membre peut en outre
imposer aux SE immatriculées sur son territoire l'obligation d'avoir leur administration centrale et
leur siège statutaire au même endroit »630. A défaut, la SE doit régulariser la situation et si elle ne le
fait pas elle doit être dissoute631.
191
Fanny Streveler MA1 DROIT
3. CONSTITUTION
La SE peut être constituée de quatre manières : constitution d’une société holding, constitution
d’une société filiale par des sociétés nationales ou par une SE, fusion, transformation d’une SA
préexistante. Elle ne peut donc être créée qu’à partir d’une ou plusieurs sociétés préexistantes et
jamais ex nihilo.
En principe, seules des sociétés constituées selon le droit d'un État membre et ayant leur siège
statutaire et leur administration centrale dans l’Union européenne peuvent participer à la
constitution d’une SE.
Les formes de sociétés pouvant participer à la constitution d’une SE et les critères à remplir
dépendent du mode de constitution :
La SE holding est constituée par des apports d’actions ou de parts par les actionnaires ou associés
de ces sociétés.
192
Fanny Streveler MA1 DROIT
Ce projet est soumis pour approbation à l’assemblée générale de chacune des sociétés. Si les
assemblées générales des sociétés promotrices approuvent le projet de constitution, les sociétés
promotrices peuvent lancer la procédure de constitution. Ensuite, les actionnaires des sociétés
promotrices ont « un délai de trois mois pendant lequel ils peuvent communiquer aux sociétés
promotrices leur intention d’apporter leurs actions ou parts en vue de la constitution de la SE ».
L’opération ne se réalise que si le pourcentage minimal d’actions ou parts prévu par le projet est
apporté. Dans ce cas, l’acte constitutif de la SE holding constate que les actionnaires des sociétés
promotrices ont apporté le pourcentage minimal d’actions ou parts de chaque société fixé
conformément au projet de constitution et que toutes les autres conditions sont remplies.
La SE holding peut devenir une société de participation financière ou une tête de groupe.
La SE filiale est constituée par des apports en espèces ou en nature par ces sociétés et entités.
C. Transformation
Une SA peut se transformer en SE si elle a depuis au moins deux ans une société filiale relevant du
droit d’un autre Etat membre637. Elle ne peut pas transférer son siège statutaire dans un autre Etat
membre à l’occasion de cette transformation 638.
Une SE peut se transformer en SA mais cette décision ne peut être prise qu’après un certain délai :
deux ans à partir de l’immatriculation et approbation des deuxièmes comptes annuels 639.
193
Fanny Streveler MA1 DROIT
D. Fusion
Une SE peut être constituée par fusion (par constitution de société nouvelle ou par absorption).
Dans ce dernier cas, la société absorbante doit prendre la forme d’une SE simultanément à la
fusion640.
Il s’agit en Belgique du registre des personnes morales. L’immatriculation doit être publiée dans
l’Etat où la SE s’est constituée.
Elle fait ensuite l’objet d’un avis publié pour information au Journal officiel de l’Union européenne
après la publication nationale.
Les différences entre les législations des Etats membres en la matière ont été la principale pierre
d’achoppement des négociations sur la création de la SE, ce qui explique qu’elles aient duré une
trentaine d’années : les Etats qui n’ont pas de système de participation (par exemple, la Belgique)
craignaient une atteinte aux droits des actionnaires et un effet de contagion sur leur législation
194
Fanny Streveler MA1 DROIT
nationale, tandis que les Etats membres avec un tel système (par exemple, l’Allemagne) craignaient
au contraire qu’un système plus souple que le leur permette de le contourner.
La SE ne peut être immatriculée dans un Etat membre que si un accord a été conclu sur les
modalités relatives à l’implication des travailleurs644.
Bien entendu, ce principe ne s’applique que si les sociétés participantes ont des travailleurs.
La Directive SE comporte des règles extrêmement détaillées et complexes qui visent en substance à
sauvegarder les droits qu’avaient les travailleurs avant la constitution de la SE.
Ces règles impliquent une chance ou un risque (selon ses sensibilités,...) d’exportation des systèmes
de participation des Etats qui en ont dans les Etats qui n’en ont pas. Par exemple, une SE immatriculée
en Belgique issue de la fusion entre une société belge et une société allemande, ou de la transformation de
cette SE, pourrait se voir appliquer le système de Mitbestimmung allemand.
Cela peut rendre les opérations avec des sociétés régies par les lois d’Etats avec un tel système
moins attractives pour les sociétés régies par les lois d’Etats sans un tel système, et vice-versa.
Outre leur complexité, la principale faiblesse des règles prévues par la Directive SE est leur
caractère statique : elles s’appliquent au moment de la constitution de la SE, sans avoir égard à
l’évolution ultérieure du nombre de travailleurs.
Dans les Etats qui ont un système de participation, il existe donc un risque de détournement des
règles nationales par la constitution d’une SE avant que le seuil (ou que le seuil suivant) prévu par la
législation soit atteint, ou par la constitution de SE coquilles vides qui ont pu s’immatriculer sans
négociations préalables en l’absence de travailleurs.
5. ORGANES
Les organes de la SE sont l’assemblée générale des actionnaires et soit un organe de surveillance et
un organe de direction (système dualiste), soit un organe d'administration (système moniste), selon
l'option retenue par les statuts645.
6. TRANSFERT TRANSFRONTALIER
Une SE peut transférer son siège statutaire dans un autre Etat membre de l’Union européenne sans
dissolution ni création d’une personne morale nouvelle, moyennant le respect des conditions fixées
par l’article 8 du Règlement SE, qui sont analogues à celles prévues en cas de fusion.
Le Ministre de l’Economie peut s’opposer au transfert du siège d’une SE ayant son siège statutaire
en Belgique dans un autre Etat membre pour des raisons d’intérêt public646.
195
Fanny Streveler MA1 DROIT
7. AVANTAGES ET INCONVÉNIENTS
A. Avantages
- Application d’un règlement supranational (avec les réserves indiquées ci-avant).
- Possibilité d’effectuer des fusions transfrontalières (mais cet avantage doit être relativisé
depuis la transposition de la directive sur les fusions transfrontalières).
- Possibilité de déplacer le siège dans un autre Etat (mais cet avantage doit être relativisé depuis
la réglementation par le CSA des transformations transfrontalières).
- Choix du modèle de gouvernance. Ainsi, la majorité des SE sont des sociétés allemandes et tchèques,
qui ont choisi cette forme car elle leur permet d’opter pour le système moniste (alors que le droit
allemand et le droit tchèque imposent le système dualiste).
B. Inconvénients
- Droit très partiellement supranational.
- Complexité du système de constitution ; impossibilité de constituer une SE ex nihilo.
- Complexité de la mise en place du système de participation des travailleurs, coût et durée des
négociations.
SCE
→ Règlement n°1435/2003.
La SCE est « une société dont le capital souscrit est divisé en parts » et où « le nombre des membres
ainsi que le capital (...) sont variables »647.
Sauf dispositions contraires des statuts, chaque membre de la société coopérative européenne ne
s’engage « qu’à concurrence du capital qu’il a souscrit », auquel cas la dénomination sociale doit
être suivie des termes « à responsabilité limitée »648.
Le but principal de la SEC est « la satisfaction des besoins et/ou le développement des activités
économiques et/ou sociales de ses membres notamment par la conclusion d’accords avec ceux-ci
en vue de la fourniture de biens ou de services ou de l’exécution de travaux dans le cadre de
l’activité que la SEC exerce ou fait exercer »649. « La SEC peut aussi avoir pour objet de répondre aux
besoins de ses membres en favorisant, de la même manière, leur participation à des activités
économiques dans une ou plusieurs SEC et/ou coopératives nationales ». Elle « ne peut admettre
des non membres au bénéfice de ses activités ou permettre à ceux-ci de participer à ses opérations,
sauf dispositions contraires des statuts »650. La société peut « mener ses activités par
l’intermédiaire d’une filiale »651.
196
Fanny Streveler MA1 DROIT
Le capital souscrit doit être d’au moins 30.000 EUR 652. Le capital doit être libéré à concurrence d’au
moins 6.200 EUR653.
1. LOI APPLICABLE
La société coopérative européenne (en abrégé « SEC ») est régie par le Règlement n° 1435/2003 du
Conseil et la directive 2003/72/CE du Conseil du 22 juillet 2003, qui complète le statut de la société
coopérative européenne pour ce qui concerne l’implication des travailleurs.
Le Règlement SCE prévoit un système de hiérarchie des normes semblable à celui du Règlement SE.
En outre, la SCE est régie par les dispositions du livre 16 du CSA adoptées en application de ce
Règlement et, pour les matières non réglées par ce Règlement, par les dispositions du livre 6 du
CSA, applicables aux SC654.
2. CONSTITUTION
La SCE peut être constituée de trois manières : par des associés, par fusion ou par transformation.
La SCE acquiert la personnalité morale au moment de son immatriculation dans le registre désigné
par l’Etat membre où elle a son siège statutaire655.
B. Transformation
Une société coopérative peut se transformer en SCE si elle a depuis au moins deux ans un
établissement ou un filiale relevant du droit d’un autre Etat membre657. Elle ne peut pas transférer
son siège statutaire dans un autre Etat membre à l’occasion de cette transformation 658.
197
Fanny Streveler MA1 DROIT
Une SEC peut se transformer en société coopérative mais cette décision ne peut être prise qu’après
un certain délai : deux ans à partir de l’immatriculation et approbation des deuxièmes comptes
annuels659.
C. Fusion
Une SCE peut être constituée par « fusion de coopératives constituées selon le droit d’un Etat
membre et ayant leur siège statutaire et leur administration centrale dans [l’Union européenne], si
deux d’entre elles au moins relèvent du droit d’Etats membres différents »660.
4. ORGANES
Les organes de la SCE sont l’assemblée générale et soit un organe de surveillance et un organe de
direction (système dualiste), soit un organe d'administration (système moniste) selon l'option
retenue par les statuts663.
En principe, chaque membre de la SEC dispose d'une voix à l’assemblée générale, quel que soit le
nombre de parts qu'il détient664.
Toutefois, les statuts peuvent prévoir qu'un membre dispose d'un nombre de voix qui est
déterminé par sa participation aux activités de la coopérative, à l'exclusion de sa participation sous
forme de contribution au capital665. Les voix ainsi attribuées ne peuvent dépasser le nombre de cinq
par membre, ou 20 % du total des droits de vote si ce nombre est inférieur666.
5. TRANSFERT TRANSFRONTALIER
Les SCE peuvent transférer leur siège dans un autre Etat membre de l’Union européenne tout en
conservant leur personnalité morale667.
198
Fanny Streveler MA1 DROIT
GEIE
→ Règlement n°2137/85.
Aux termes de l’article 1, § 3 du Règlement GEIE, les États membres déterminent si les
groupements immatriculés à leurs registres ont ou non la personnalité juridique. En Belgique, le
GEIE est une personne morale668.
Le GEIE se caractérise par son but : « le but du groupement est de faciliter ou de développer
l’activité économique de ses membres, d’améliorer ou d’accroître les résultats de cette activité ; il
n’est pas de réaliser des bénéfices pour lui-même. Son activité doit se rattacher à l’activité
économique de ses membres et ne peut avoir qu’un caractère auxiliaire par rapport à celle-ci ».
199
Fanny Streveler MA1 DROIT
1. LOI APPLICABLE
Le groupement européen d'intérêt économique est régi par le Règlement n° 2137/85117 et à titre
subsidiaire par la loi interne du siège671, qui correspond en principe au lieu où le groupement a son
administration centrale 672. Il s’agit en Belgique du livre 18 et, pour les matières non réglées par le
ce Règlement, du livre 2, titre 4 (Constitution et formalités de publicité) du CSA673.
2. MEMBRES
Le GEIE doit comporter au moins deux sociétés européennes appartenant à deux États membres
différents et ne peut avoir comme membres que des membres ressortissant de l’Union européenne
(ce qui s’apprécie en fonction du lieu de l’activité pour les personnes physiques et, pour les
personnes morales, de leur siège statutaire ou de leur administration centrale).
Les membres du GEIE sont indéfiniment et solidairement responsables des dettes contractées par
celui-ci674.
De nouveaux membres peuvent être admis ; des membres peuvent démissionner ou être exclus
dans les conditions fixées par le contrat de groupement675.
3. APPORTS ET CAPITAL
Le Règlement GEIE n’impose ni apports ni capital minimum.
4. FORMALITÉS
Le GEIE est constitué par un contrat qui peut être sous seing privé. Ce contrat doit être déposé dans
le registre de l’Etat membre où il est immatriculé676.
Il fait l’objet d’une publicité dans le journal national de l’Etat où il est immatriculé et ensuite sous
forme d’un avis dans le Bulletin officiel de l’union européenne677.
200
Fanny Streveler MA1 DROIT
5. ORGANES
Les organes du groupement sont les membres agissant collégialement et le ou les gérants (une ou
plusieurs personnes physiques nommées dans le contrat de groupement ou par une décision des
membres)678.
Le contrat de groupement peut prévoir d'autres organes ; il en détermine alors les pouvoirs.
En principe, chaque membre dispose d'une voix. Le contrat de groupement peut toutefois attribuer
plusieurs voix à certains membres, à condition qu'aucun d'eux ne détienne la majorité des voix679.
6. NOMBRE DE TRAVAILLEURS
Un GEIE ne peut pas avoir plus de 500 travailleurs 680.
7. TRANSFERT DU SIÈGE
Le GEIE peut transférer son siège à l’intérieur de l’Union européenne681.
8. AVANTAGES ET INCONVÉNIENTS
A. Avantages
- Constitution aisée et peu coûteuse (pas d’acte notarié).
- Possibilité de transférer le siège à l’intérieur de l’Union européenne (mais cet avantage doit
être relativité depuis la réglementation par le CSA des transformations transfrontalières).
B. Inconvénients
- Le but extrêmement spécifique du GEIE.
- La responsabilité personnelle et solidaire des membres pour tous les engagements du GEIE.
201
Fanny Streveler MA1 DROIT
CHAPITRE 7 :
GROUPE –
FILIALES –
SUCCURSALES
202
Fanny Streveler MA1 DROIT
Un groupe de sociétés est un ensemble formé par une société-mère et ses filiales et sous-filiales qui
fonctionnent comme un seul ensemble grâce à une source unique de contrôle. La société-mère est
celle qui exerce le contrôle sur une ou plusieurs autres sociétés, appelées « filiales ».
L’existence d’un groupe explique aussi la réglementation en matière d’opérations entre sociétés
liées (supra).
Une filiale est une société dotée de la personnalité morale contrôlée par une autre (appelée la
société-mère), généralement grâce à la détention de la majorité des droits de vote.
Une société sur laquelle plusieurs sociétés exercent un contrôle conjoint est appelée filiale
commune682.
Une succursale est un établissement secondaire où une personne morale exerce son activité et qui
est doté d’une certaine autonomie de gestion. Par exemple : l’agence d’une banque gérée par un
directeur.
Il ne faut pas confondre une succursale avec un siège d’exploitation, qui est un établissement où la
société exerce son activité et qui bénéficie ou non d’une certaine autonomie de gestion (par
exemple, les magasins de chaussures exploités par une SA ayant pour objet toutes activités de chausseur).
Un siège d’exploitation peut correspondre à une succursale (par exemple, une agence bancaire) mais
pas nécessairement (par exemple, un magasin dans lequel les vendeurs n’ont aucun pouvoir de gestion).
CONTRÔLE
Le contrôle d’une société est le pouvoir de droit ou de fait d’exercer une influence décisive sur la
désignation de la majorité des administrateurs ou gérants de celle-ci ou sur l’orientation de sa
gestion683.
1. CONTRÔLE DE DROIT
Le contrôle est de droit et présumé de manière irréfragable :
1° lorsqu’il résulte de la détention de la majorité des droits de vote attachés à l’ensemble des
actions, parts ou autres titres de la société en cause ;
2° lorsqu’un associé a le droit de nommer ou de révoquer la majorité des administrateurs ou
gérants ;
203
Fanny Streveler MA1 DROIT
3° lorsqu’un associé dispose du pouvoir de contrôle en vertu des statuts de la société en cause ou
de conventions conclues avec celle-ci ;
4° lorsque, par l’effet de conventions conclues avec d’autres associés de la société en cause, un
associé dispose de la majorité des droits de vote attachés à l’ensemble des actions, parts ou autres
titres de celle-ci ;
5° en cas de contrôle conjoint684.
2. CONTRÔLE DE FAIT
Le contrôle est de fait lorsqu’il résulte d’autres éléments.
Un associé est, sauf preuve contraire, présumé disposer d’un contrôle de fait sur la société si, à
l’avant-dernière et à la dernière assemblée générale de cette société, il a exercé des droits de vote
représentant la majorité des voix attachées aux actions, parts ou autres titres représentés à ces
assemblées685.
Une participation de 20 %, voire 10 %, peut suffire à avoir le contrôle d’une société cotée dont
l’actionnariat est fort dispersé.
Le contrôle peut ainsi être exercé avec une participation infime à l’aide de pyramides, c’est-à-dire
de « couches » successives de sociétés contrôlées à moins de 100 % entre la société mère et la
filiale indirecte ultime.
Le contrôle conjoint est le contrôle exercé ensemble par un nombre limité d'associés, lorsque ceux-
ci ont convenu que les décisions relatives à l'orientation de la gestion ne pourraient être prises que
de leur commun accord687.
204
Fanny Streveler MA1 DROIT
INTÉRÊT SOCIAL
L’organe d’administration doit bien entendu toujours agir dans l’intérêt de la société dans laquelle
ils exercent un mandat.
Lorsque la société fait partie d’un groupe, la question se complique car il faut déterminer si et dans
laquelle mesure les administrateurs peuvent prendre en compte l’intérêt du groupe.
Cette question concerne non seulement la responsabilité civile des administrateurs mais également
leur responsabilité pénale (abus de biens sociaux).
Par ailleurs, en pratique, les administrateurs des filiales sont plus ou moins obligés de respecter les
instructions de la société-mère (sauf à la convaincre, à démissionner ou à être révoqués).
La question se pose dès lors également du droit de la société-mère de donner des instructions à ces
administrateurs de ses filiales et du droit de ces administrateurs de respecter ces instructions.
1. JURISPRUDENCE
En principe, chaque société appartenant à un groupe doit être gérée dans son propre intérêt.
Toutefois, une société peut tenir compte de l’intérêt du groupe auquel elle appartient dans la
mesure où elle tire des avantages de son appartenance au groupe de sorte que son intérêt se
confond partiellement avec celui-ci.
Dans son arrêt phare sur la question, la Cour de cassation de France a décidé ce qui suit :
« Le concours financier apporté, par les dirigeants de fait ou de droit d'une société, à une autre
entreprise d'un même groupe dans laquelle ils sont intéressés directement ou indirectement, doit
être dicté par l'intérêt économique, social ou financier commun, apprécié au regard d'une politique
élaborée pour l'ensemble de ce groupe, et ne doit être démuni de contrepartie ou rompre
l'équilibre entre les engagements respectifs des diverses sociétés concernées, ni excéder les
possibilités financières de celle qui en supporte la charge ».
L’intérêt de groupe peut conduire à imposer certains sacrifices aux filiales pour autant que les
conditions suivantes soient remplies :
- l’existence d’un véritable groupe animé d’une véritable politique commune ;
- la prise de la décision dans l’intérêt du groupe ;
- l’équilibre entre les sacrifices imposés à une société membre du groupe et les avantages qu’elle
retire de son appartenance au groupe ;
- le support fourni par une société aux autres ne peut pas excéder ses capacités et la mettre en
danger. En d’autres termes, une filiale ne peut pas être sacrifiée dans l’intérêt du groupe.
205
Fanny Streveler MA1 DROIT
La question de la responsabilité des sociétés appartenant à un groupe les unes pour les autres (en
pratique, il s’agit surtout de la responsabilité de la société-mère pour ses filiales) se pose
généralement lorsque la filiale est incapable de remplir ses engagements ou de réparer le
dommage qu’elle a causé.
Cette question se complique quand le groupe a une dimension internationale car il faut déterminer
la loi applicable et la juridiction compétente.
Un des cas les plus célèbres est celui consécutif au naufrage en 1978, de l’Amoco Cadiz au large des côtes
bretonnes, dans lequel la responsabilité de la société-mère fut retenue pour la pollution des côtes françaises
après le naufrage de l’Amoco Cadiz sur la base d’une levée du voile social en raison du contrôle étroit exercé
par la société-mère sur sa filiale.
Le principe est simple : le groupe n’a pas la personnalité juridique et sa responsabilité ne peut pas
être engagée ; chaque membre du groupe est une personne juridique distincte et ne répond en
principe pas des engagements des autres membres du groupe.
Une société-mère peut également remettre au créancier de sa filiale une lettre de confort (ou lettre
de patronage).
De telles lettres ont un contenu assez variable. Elles comportent généralement des obligations de
moyen mais peuvent également comporter des obligations de résultat. Elles peuvent en effet :
- uniquement porter sur la reconnaissance par la société-mère qu’elle est parfaitement informée
de l’existence d’un engagement souscrit par sa filiale (par exemple, un prêt) ;
- affirmer que la situation de sa filiale est saine ;
- déclarer que la politique de la société-mère est de mettre les moyens nécessaires à la
disposition de ses filiales pour leur permettre d’exécuter leurs engagements ;
- comporter un engagement de la société-mère à cet égard ;
- …
La responsabilité de la société-mère sur la base de telles lettres dépend donc de leur libellé et de
l’intention des parties.
206
Fanny Streveler MA1 DROIT
La levée du voile social est très rarement invoquée en Belgique et concerne plutôt les relations
entre un actionnaire majoritaire personne physique et « sa » société que les relations au sein de
groupes de sociétés.
D. Droit de la concurrence
En droit de la concurrence, quand une société-mère détient 100 % du capital de sa filiale ayant
commis une infraction aux règles communautaires de la concurrence, la Cour de Justice considère
que, d’une part, cette société-mère peut exercer une influence déterminante sur le comportement
de cette filiale, et que, d’autre part, il existe une présomption réfragable selon laquelle ladite
société-mère exerce effectivement une influence déterminante sur le comportement de sa filiale.
Dans ces conditions, la société-mère est solidairement responsable pour le paiement de l’amende
infligée à sa filiale, à moins qu’elle ne renverse cette présomption et démontre que sa filiale se
comporte de façon autonome sur le marché.
207
Fanny Streveler MA1 DROIT
B. Actions en justice
Les actionnaires minoritaires peuvent également agir contre la société-mère ou les administrateurs
de la filiale (voire de la société-mère) :
- Action en désignation d’un expert ;
- Action en nullité des décisions contraires à l’intérêt social et causant un préjudice aux
actionnaires minoritaires ;
- Action en responsabilité contre les administrateurs de la filiale (et le cas échéant contre la
société-mère ou ses propres administrateurs en qualité d’administrateur de fait) via l’action
minoritaire (faute de gestion ; violation des statuts ; abus de majorité ;…) ;
- Action en abus de majorité contre la société-mère en sa qualité d’actionnaire majoritaire ;
- Action en désignation d’un administrateur provisoire ;
- Droit de retrait ;
- …
1. DOSSIER
Les personnes morales qui ont leur siège statutaire à l’étranger peuvent exercer leurs activités,
ester en justice en Belgique, et y établir une succursale688.
Pour chaque personne morale étrangère ayant une succursale en Belgique, il est tenu un dossier au
tribunal de l’entreprise dans le ressort duquel la succursale est établie. Si la personne morale
étrangère a plusieurs succursales en Belgique, le dossier est tenu au greffe du tribunal de
l’entreprise dans le ressort duquel une des succursales est établie, ceci au choix de la personne
morale étrangère689.
Toute société étrangère qui ouvre une succursale en Belgique doit avant l’ouverture de cette
succursale déposer une série de documents dans ce dossier, dont notamment sa dénomination et
sa forme légale, ses statuts, le registre auprès duquel elle est immatriculée dans l’Etat dont elle
relève (de même que son numéro d’immatriculation dans ce registre), un document émanant de ce
registre attestant son existence, l’adresse et l’indication des activités de la succursale, l’identité des
personnes qui ont le pouvoir de représenter la société à l’égard des tiers, ses comptes annuels et
ses comptes consolidés afférents au dernier exercice clôturé.
Elle doit également y déposer dans les 30 jours toute modification de ces mentions, la dissolution
de la société, la nomination, l’identité et les pouvoirs des liquidateurs, ainsi que la clôture de la
liquidation, toute procédure de faillite, de réorganisation judiciaire ou toute autre procédure
analogue dont elle fait l’objet, la fermeture de la succursale.
208
Fanny Streveler MA1 DROIT
Le dépôt de ces documents est publié par mention aux Annexes du Moniteur belge690. Ce dépôt
rend ces documents opposables aux tiers691.
2. COMPTES ANNUELS
Toute société étrangère qui a une succursale en Belgique doit déposer ses comptes annuels et ses
comptes consolidés à la Banque nationale de Belgique, annuellement, dans le mois qui suit
l’assemblée générale et au plus tard sept mois après la date de clôture de l’exercice692.
3. SANCTIONS
Les actions intentées par les personnes morales étrangères qui ont une succursale en Belgique sont
irrecevables si elles n’ont pas déposé leur acte constitutif au tribunal de l’entreprise693.
Par ailleurs, les documents non déposés sont inopposables aux tiers.
Toute personne qui intervient pour une personne morale étrangère dans un acte qui ne respecte
pas ces conditions peut être déclarée responsable des engagements qui y sont pris695.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
CHAPITRE 8 :
CONFLITS
210
Fanny Streveler MA1 DROIT
Le CSA comporte une série de dispositions destinées à prévenir les conflits d’agence (désignation
d’administrateurs indépendants dans les sociétés cotées ; réglementation des conflits d’intérêts au
sein de l’organe d’administration ; réglementation des opérations avec des parties liées ;
transparence de la rémunération des dirigeants ;...) et à permettre aux actionnaires de protéger
leurs droits (droit d’exiger la convocation d’une assemblée générale et de faire ajouter certains
points à l’ordre du jour à certaines conditions ; droit de poser des questions à l’assemblée
générale ;...) (supra). C’est l’enjeu même d’une bonne gouvernance d’entreprise.
Le présent chapitre est d’abord consacré aux droits, mesures et actions à la disposition des associés
et actionnaires en cas de conflit.
Certains sont destinés à obtenir des informations, généralement dans le but d’alimenter une action
en responsabilité ou en nullité ultérieure. C’est le cas du droit d’investigation individuel et de
l’action en désignation d’un expert.
D’autres tendent à la nullité d’un vote ou d’une décision de l’assemblée générale ou de l’organe
d’administration et/ou à la mise en cause de la responsabilité des autres actionnaires ou des
administrateurs (parallèlement ou non à l’exercice d’une action en nullité d’une décision).
D’autres encore tendent à l’exclusion d’actionnaires ou au rachat forcé des actions détenues.
Les actions les plus radicales sont les actions en désignation d’un administrateur provisoire, en
nullité de la société et en dissolution de la société.
Ce chapitre concerne également les actions à la disposition des tiers. Ceux-ci peuvent exercer une
action en responsabilité, essentiellement contre les administrateurs, en nullité des décisions de la
société (voire de la société elle-même) ou en désignation d’un administrateur provisoire.
Dans les sociétés dans lesquelles aucun commissaire ne doit être nommé, l’organe d’administration
est tenu de soumettre à l’assemblée générale la demande d’un ou de plusieurs associés ou
actionnaires visant à la nomination d’un commissaire696.
Plutôt que de demander la nomination d’un commissaire, chaque associé ou actionnaire peut,
nonobstant toute disposition statutaire contraire, exercer individuellement les pouvoirs
d’investigation et de contrôle d’un commissaire. Il peut se faire représenter ou se faire assister par
un expert-comptable externe697.
Cet associé ou cet expert-comptable externe a alors les pouvoirs d’un commissaire (contrôler la
situation financière, les comptes annuels et la régularité, au regard du CSA, des opérations à
constater dans les comptes annuels).
211
Fanny Streveler MA1 DROIT
La rémunération de cet expert-comptable externe incombe à la société s’il a été désigné avec son
accord ou si cette rémunération a été mise à sa charge par une décision judiciaire698.
Une manière pour la société d’éviter l’exercice d’un tel droit (qui peut perturber l’activité de la
société lorsque l’associé ou l’actionnaire en question n’est pas un professionnel et est trop émotif)
est de désigner un commissaire.
1. CHAMP D’APPLICATION
Ce droit peut être exercé dans toutes les sociétés dotées de la personnalité morale.
2. OBJECTIF
Ce droit a pour but de permettre aux associés qui ne sont pas impliqués dans la gestion quotidienne
de la société de contrôler cette gestion et son impact sur les comptes et sur la situation financière.
L’objectif du demandeur est souvent d’obtenir des informations destinées à alimenter une action
en nullité d’une décision de l’assemblée générale ou de l’organe d’administration ou une action en
responsabilité contre les administrateurs ou les autres actionnaires.
S’il existe des indices d’atteinte grave ou de risque d’atteinte grave aux intérêts de la société, un ou
plusieurs actionnaires possédant au moins 10 % du nombre d’actions émises (SRL et SC) ou un ou
plusieurs actionnaires possédant au moins 1 % des voix attachées à l’ensemble des titres existants,
ou possédant des titres représentant une fraction du capital égale à 1.250.000 EUR au moins (SA),
peuvent demander au président du tribunal de l’entreprise siégeant en référé de nommer un ou
plusieurs experts ayant pour mission de vérifier les livres et les comptes de la société ainsi que les
opérations accomplies par ses organes699.
Les conditions de l’exercice d’une telle action sont donc tout à fait différentes de celles de l’exercice
par un associé ou actionnaire de son droit individuel d’investigation : alors que ce dernier n’est
soumis à aucune autre condition que l’absence de désignation d’un commissaire, l’action en
désignation d’un expert suppose des indices d’atteinte grave ou de risque d’atteinte grave aux
intérêts de la société.
1. CHAMP D’APPLICATION
Le CSA ne prévoit un tel droit que dans les SRL, les SC et les SA.
212
Fanny Streveler MA1 DROIT
2. OBJECTIF
L’objectif est d’obtenir des informations destinées à alimenter une action en nullité d’une décision
de l’assemblée générale ou de l’organe d’administration ou une action en responsabilité contre les
administrateurs ou les autres actionnaires.
1. CHAMP D’APPLICATION
Les articles 2:42 à 2:48 du CSA réglementent la nullité de votes ou de décisions des organes. Ils
s’appliquent à toutes les personnes morales visées par le CSA.
2. CAUSES DE NULLITÉ
A. Causes de nullité des votes
Les causes de nullité d’un vote sont les mêmes que celles de tout autre acte juridique (vices de
consentement,...).
La nullité d’un vote entraîne la nullité de la décision prise si le demandeur prouve que le vote nul a
pu influencer la décision qui a été prise700.
213
Fanny Streveler MA1 DROIT
- L’abus de minorité suppose que les actionnaires minoritaires refusent leur concours pour la
formation d’une décision dans l’intérêt social qui requiert la majorité qualifiée ;
- L’excès de pouvoir vise toute décision prise par un organe en dehors de ses compétences ainsi
que toute décision qui viole une règle de droit impérative ;
- Le détournement de pouvoir vise toute décision prise en tenant compte d’intérêts autres que
ceux de la société et correspond généralement à l’abus de droit ou l’abus de majorité (par
exemple : vote en faveur de la vente d’un immeuble à un actionnaire majoritaire à des conditions
clairement inférieures à celles du marché) ;
3° lorsque des droits de vote ont été exercés alors qu’ils étaient suspendus en vertu d’une
disposition légale et que, sans ces droits de vote illégalement exercés, les conditions de quorum ou
de majorité requis pour les décisions d’assemblée générale n’auraient pas été réunis ;
4° pour toute autre cause prévue dans le CSA702. Exemple : nullité de la décision de l’assemblée générale
d’une SA autorisant un quasi-apport en l’absence des rapports requis703 ; nullité des décisions prises ou des
opérations accomplies en violation des règles en matière de conflits d’intérêts si l’autre partie à ces décisions
ou opérations avait ou devait avoir connaissance de cette violation704.
Le juge doit procéder à une appréciation marginale et ne peut pas substituer sa propre appréciation
à celle de l’organe.
3. DEMANDEUR
La personne morale elle-même ou toute personne qui a intérêt au respect de la règle de droit
méconnue (essentiellement les associés ou actionnaires et les membres de l’organe
d’administration) peut demander la nullité au tribunal de l’entreprise.
N’est pas recevable à invoquer la nullité celui qui a voté en faveur de la décision attaquée, à moins
que son consentement a été vicié, ou celui qui a renoncé au droit de s’en prévaloir, à moins que la
nullité ne résulte d’une règle d’ordre public705.
Les tiers (créanciers, membres du personnel,...) n’ont pas intérêt au respect des règles de droit
relatives à la forme des résolutions des personnes morales.
4. DÉFENDEUR
L’action en nullité est dirigée contre la personne morale706.
Cette règle donne lieu à une situation curieuse si c’est la personne morale qui est demandeur.
214
Fanny Streveler MA1 DROIT
5. SUSPENSION
Dans les cas qu’il estime urgents, le président du tribunal de l’entreprise peut, à la requête de la
personne morale ou d’une personne qui a intérêt au respect de la règle de droit méconnue,
ordonner en référé la suspension d’une décision si les moyens invoqués peuvent justifier prima
facie l’annulation de la décision attaquée707.
6. RÉPARATION
En cas d’abus de minorité, l’abus consiste généralement en ce que la minorité fait obstacle à la
prise d’une décision. A première vue, la nullité des votes ne constitue donc pas une réparation
efficace.
Le principe de la primauté de la réparation en nature devrait permettre au juge de décider que son
jugement tiendra lieu de vote.
Bien que la jurisprudence était généralement hostile à cette solution, la loi du 23 mars 2019 a
consacré cette solution : le juge peut décider que sa décision tiendra lieu de vote positif, à titre de
réparation en nature de l’abus de droit commis par la minorité708.
On peut cependant se demander si l’intervention du législateur était nécessaire compte tenu d’une
autre réforme contenue dans le CSA, relative à la neutralisation des abstentions pour déterminer si
les conditions de majorité spéciales requises pour certaines décisions sont atteintes (supra). Ne
faut-il pas également neutraliser les votes nuls ? Apparemment non, car si c’était le cas, l’article
2:43, alinéa 2 du CSA serait superflu.
La nullité ne peut cependant pas être opposée aux tiers qui, sur la base de la décision, ont acquis
des droits à l’égard de la personne morale sans qu’ils aient eu ou dû avoir connaissance du vice
dont la décision était entachée709. En d’autres termes, la nullité n’affecte pas les droits acquis par
des tiers de bonne foi à l’égard de la personne morale, par exemple les contrats conclus sur la base
d’une décision de l’organe d’administration qui a été annulée. Le demandeur conserve néanmoins son
droit à demander des dommages-intérêts.
Par exception à cette règle, la nullité peut toujours être opposée aux membres des organes
d’administration qui, en cette qualité, auraient acquis des droits à l’égard de la personne morale sur
215
Fanny Streveler MA1 DROIT
la base de la décision annulée710. L’Exposé des motifs cite les décisions relatives à leur nomination,
décharge ou rémunération.
8. PRESCRIPTION
L’exercice d’une action en nullité de la décision d‘un organe est soumise à un délai de prescription
de six mois à partir de la date à laquelle la décision est opposable à celui qui invoque la nullité ou
est connue par lui711.
Une action en responsabilité contre les actionnaires peut être intentée indépendamment ou en
complément d’une autre action.
Ainsi ;
- l’abus de majorité ou de minorité peut être sanctionné par la nullité de la décision obtenue de
manière abusive ou la substitution de la décision du juge au vote abusif (supra) mais une action
en annulation n’est pas toujours possible ; en outre, l’annulation de la décision litigieuse ne
répare pas toujours intégralement le préjudice causé ; les actionnaires victimes de l’abus
peuvent également exercer une action en responsabilité contre les auteurs de l’abus ;
- l’action en retrait et l’action en exclusion tendent à remédier à une situation qui rend
impossible le fonctionnement normal de la société (infra) mais n’ont pas un caractère
indemnitaire ; le demandeur peut également exercer une action en responsabilité contre le
défendeur ;
- la même observation vaut pour l’action en dissolution.
216
Fanny Streveler MA1 DROIT
A. Champ d’application
Ce régime s’applique à toutes les personnes morales visées par le CSA et concerne les membres de
l’organe d’administration et les délégués à la gestion journalière mais également les
administrateurs de fait, définis comme ceux qui ont effectivement détenu le pouvoir de gérer la
personne morale713.
Ils engagent leur responsabilité solidaire lorsque l’organe d’administration forme un collège et,
même s’il ne forme pas un collège, en cas d’infractions aux dispositions du CSA ou aux statuts de la
personne morale.
Comme exemples de fautes dans l’accomplissement de leur mission susceptibles d’entraîner leur
responsabilité envers la personne morale, on peut citer : le fait de consentir sans sûreté un prêt à un débiteur
notoirement insolvable, le défaut de poursuites contre un débiteur qui ne s’exécute pas, l’absence de
renouvellement d’une inscription hypothécaire contre un débiteur insolvable, l’oubli de faire assurer
l’immeuble contre l’incendie,...
Comme exemples de violation du CSA ou des statuts susceptible d’entraîner leur responsabilité envers la
personne morale, on peut citer : le dépassement de l’objet, la violation des règles légales en matière de
conflits d’intérêts (infra), le défaut de publication de la démission ou de la révocation d’administrateurs, le
défaut de convoquer l’assemblée générale dans les cas prévus par la loi, le défaut de tenir une comptabilité
régulière,...
C. Décharge
Après l'approbation des comptes annuels, l'assemblée générale doit se prononcer par un vote
spécial sur la décharge des administrateurs ou des membres du conseil de surveillance. En
accordant la décharge, l’assemblée générale reconnaît que les administrateurs ou les membres du
conseil de surveillance se sont bien acquittés de leur mission pendant l’exercice qui fait l’objet des
comptes annuels. L’octroi de la décharge requiert un vote spécial, distinct de l’approbation des
comptes annuels.
La décharge fait en principe obstacle à l’exercice d’une action en responsabilité à leur encontre
(voir infra pour l’action minoritaire).
La décharge n'est valable que lorsque les comptes annuels ne contiennent ni omission, ni indication
fausse dissimulant la situation réelle de la société et, si des opérations ont été accomplies en
217
Fanny Streveler MA1 DROIT
violation des statuts ou du CSA, que lorsqu'elles ont été spécialement indiquées dans la
convocation à l’assemblée générale714.
Dans les SA qui ont opté pour un système dual, le conseil de surveillance se prononce sur la
décharge des membres du conseil de direction715.
D. Exonération
Les membres de l’organe d’administration et les délégués à la gestion journalière sont déchargés de
leur responsabilité pour les fautes auxquelles ils n’ont pas pris part (par exemple, parce qu’ils se sont
opposés à la décision fautive ou parce qu’ils étaient légitimement absents lors de la réunion au cours de
laquelle la décision a été prise) s’ils ont dénoncé la faute alléguée, selon les cas, à tous les autres
membres de l’organe d’administration, à l’organe d’administration collégial ou au conseil de
surveillance716.
Ce principe se justifie de plusieurs manières : c’est à l’assemblée générale, et non aux associés ou
actionnaires individuels (qui ne constituent pas un organe de la société), d’apprécier si les
administrateurs ont commis une faute ; c’est la société qui souffre le dommage causé par les
administrateurs (diminution de l’actif ou augmentation du passif), le dommage subi par les
actionnaires l’étant par répercussion ; si les associés ou actionnaires pouvaient poursuivre
individuellement les administrateurs, ils pourraient se faire indemniser deux fois (une fois via la
société et une deuxième fois directement) ; ils recevraient cette indemnisation au préjudice de tous
les autres associés ou actionnaires.
Ce n’est que dans l’hypothèse dans laquelle ils auraient subi un préjudice personnel distinct du
préjudice subi de la même manière par tous (résultant de l’atteinte portée au patrimoine ou à la
réputation de la personne morale) que les associés ou actionnaires peuvent mettre en cause la
responsabilité des administrateurs.
Action minoritaire :
Toutefois, dans les SRL, SC et SA, les actionnaires minoritaires peuvent, à certaines conditions,
intenter une action contre les administrateurs pour le compte de la société.
218
Fanny Streveler MA1 DROIT
Dans les SRL et SC, ils doivent avoir des titres auxquels sont attachés au moins 10% des droits de
vote718 ; dans les SA, ils doivent avoir des titres auxquels est attaché au moins 1% des droits de vote
ou des titres représentant une fraction du capital égale à 1.250.000 EUR719.
Seuls ceux qui n’ont pas voté la décharge et ceux qui ont voté une décharge qui n’est pas valable
peuvent intenter l’action minoritaire.
Si la demande est rejetée, les demandeurs peuvent être condamnés personnellement aux dépens
et, s’il y a lieu, à des dommages-intérêts envers les défendeurs.
Si la demande est accueillie, les sommes dont les demandeurs ont fait l’avance, et qui ne sont pas
comprises dans les dépens mis à charge des défendeurs, doivent être remboursées par la société.
Ils engagent leur responsabilité solidaire lorsque l’organe d’administration forme un collège et,
même s’il ne forme pas un collège, en cas d’infractions aux dispositions du CSA ou aux statuts de la
personne morale, tout en pouvant se décharger de cette responsabilité en dénonçant l’infraction
(supra).
Comme exemples de fautes dans l’exercice de leurs fonctions susceptibles d’entraîner leur responsabilité
envers les tiers, on peut citer : une rupture abrupte des négociations avec un tiers ainsi que la plupart des
fautes qui constituent des infractions pénales (par exemple, abus de biens sociaux).
Comme exemples de violation du CSA ou des statuts susceptibles d’entraîner leur responsabilité envers les
tiers, on peut citer : le dépassement de l’objet ; le défaut de convocation de l’assemblée générale pour
délibérer sur les mesures à prendre quand la société a subi de lourdes pertes ; le fait de contracter des
engagements au nom de la personne morale tout en sachant qu’elle est devenue insolvable et ne pourra
donc jamais faire face à ses obligations (poursuite d’activités déficitaires) ; le défaut de faire aveu de la
faillite,...
La faute commise par les administrateurs d’une personne morale entraîne la responsabilité directe
de celle-ci mais cette responsabilité n’exclut pas, en règle, la responsabilité personnelle des
administrateurs : elle coexiste avec celle-ci. Cette règle ne va pas de soi : en principe, la théorie de
l’organe devrait conduire à imputer les fautes des administrateurs commises dans les limites de
leurs fonctions à la personne morale ; retenir systématiquement la responsabilité personnelle des
administrateurs n’est ni logique ni juste, car la faute résulte souvent d’un « risque d’entreprise »
(par ex., rupture de négociations) ; autre chose est évidemment de retenir la responsabilité des
administrateurs lorsqu’ils sortent de leurs fonctions ou abusent de leurs fonctions.
219
Fanny Streveler MA1 DROIT
En vertu de la théorie du concours de responsabilités, lorsque deux personnes sont liées par un
contrat, le créancier ne peut mettre en cause la responsabilité extracontractuelle de son débiteur
que si la faute constitue également un manquement à une obligation générale s’imposant à tous et
si ce manquement a entraîné un dommage distinct de celui résultant de la simple inexécution du
contrat (sauf si la faute constitue une infraction pénale).
La théorie du concours de responsabilités connaît une application particulière pour les agents
d’exécution. L’agent d’exécution est celui qui a été chargé par le débiteur principal d’exécuter tout
ou partie des obligations découlant du contrat qu’il a conclu avec le créancier. La Cour de cassation
assimile les administrateurs à des agents d’exécution.
Un créancier ne peut pas agir contre les agents d’exécution de son débiteur sur une base
contractuelle. Le principe de la relativité des conventions s’oppose en effet à une telle action
puisque l’agent d’exécution n’est pas partie au contrat.
Un créancier ne peut agir contre les agents d’exécution de son débiteur sur une base
extracontractuelle que si la faute qui lui est imputée constitue la violation, non de l’obligation
contractuelle, mais de l’obligation générale de prudence qui s’impose à tous et si cette faute a
causé un dommage distinct de celui résultant de la simple inexécution du contrat.
Il en résulte une quasi-immunité des agents d’exécution vis-à-vis des cocontractants du débiteur
principal, et notamment des administrateurs vis-à-vis des cocontractants de la société.
Cette théorie ne trouve cependant pas à s’appliquer lorsque la faute constitue une infraction
pénale.
220
Fanny Streveler MA1 DROIT
La coexistence de ces deux formes de responsabilités ne requiert pas que le dommage subi par le
tiers soit étranger à l’exécution du contrat.
Ces principes s’appliquent aussi aux fautes commises par les agents d’exécution et notamment par
les membres des organes d’administration et les délégués à la gestion journalière : les tiers peuvent
mettre en cause leur responsabilité sur la base de manquements par ces administrateurs à leurs
obligations envers la société (par exemple, ne pas avoir accompli les démarches nécessaires pour
permettre à la société d’obtenir les subsides auxquels elle a droit). Dans ce cas, les administrateurs ne
bénéficient donc pas vis-à-vis des tiers d’une quasi-immunité.
Cette disposition n’est pas applicable lorsque l’entreprise en faillite a réalisé au cours des trois
exercices qui précèdent la faillite ou au cours de tous les exercices si l’entreprise a été constituée
depuis moins de trois ans, un chiffre d’affaires moyen inférieur à 620.000 EUR hors taxe sur la
valeur ajoutée et lorsque le total du bilan du dernier exercice n’a pas dépassé 370.000 EUR722. Il
s’agit pour l’essentiel des micro-sociétés, des micro-associations et des micro-fondations723.
Cette action peut être introduite tant par le curateur que, en cas d’inaction du curateur, par tout
créancier lésé724.
micro-associations ou micro-fondations. Celles-ci ne peuvent pas dépasser plus d’un des critères suivants : 10
travailleurs, chiffre d’affaires : 700.000 EUR HTVA ; bilan : 350.000 EUR HTVA.
724 CDE, art. XX.225, § 3.
221
Fanny Streveler MA1 DROIT
- la personne concernée n’a pas, agi comme l’aurait fait un administrateur normalement prudent
et diligent placé dans les mêmes circonstances 725.
Cette disposition n’est pas applicable lorsqu’il s’agit d’une ASBL, AISBL ou fondation 726 qui tient une
comptabilité simplifiée727.
Le Code de droit économique prévoit un tempérament à ce principe : les créanciers lésés peuvent
également intenter l’action en comblement de passif en cas d’inertie du curateur730 et l’ONSS peut
mettre en cause la responsabilité des administrateurs pour les dettes de cotisations sociales dans
certains cas731.
222
Fanny Streveler MA1 DROIT
déchargés de leur responsabilité s’ils n’ont pas pris part à la faute et l’ont dénoncée aux autres
membres de l’organe d’administration 733.
B. Respect des règles en matière de conflits d’intérêts mais préjudice causé à la société ou aux tiers
En outre, et c’est de prime abord plus surprenant, les administrateurs ou membres du conseil de
surveillance, de même que les membres de l’organe d’administration de l’administrateur unique,
sont personnellement et solidairement responsables du préjudice subi par la société ou les tiers à la
suite de décisions prises ou d’opérations accomplies conformément aux règles en matière de conflit
d’intérêts si la décision ou l’opération a procuré à un ou plusieurs d’entre eux un avantage financier
abusif au détriment de la société734. En ce qui concerne les membres du conseil de direction, ils
engagent leur responsabilité uniquement s’ils omettent de renvoyer une décision ou une opération
au conseil de surveillance dans les cas imposés par la loi.
En réalité, cette solution est également conforme au droit commun : le simple fait de prendre une
décision ou d’accomplir une opération qui procure un avantage financier abusif à un tiers au
détriment de la société constitue en effet une faute de gestion.
travailleurs.
223
Fanny Streveler MA1 DROIT
L’article 2:58 exclut toute limitation de responsabilité contractuelle ou statutaire qui irait au-delà. Il
interdit également les clauses d’exonération de responsabilité et de garantie vis-à-vis des tiers
contractées par avance par une personne morale au profit des membres de l’organe
d’administration et des délégués à la gestion journalière.
L’Exposé des motifs de la loi du 23 mars 2019 justifie ce système par plusieurs considérations :
- la différence de traitement entre la responsabilité illimitée des membres de l’organe
d’administration et la responsabilité limitée des autres hauts dirigeants, qui dans leur grande
majorité, sont soit des travailleurs bénéficiant de la protection de l’article 18 de la loi du 3
juillet 1978 relative aux contrats de travail (alors que les administrateurs ne peuvent pas
exercer leurs fonctions dans les liens d’un contrat de travail), soit des indépendants qui
exercent leurs activités au travers d’une société dans laquelle ils limitent leur responsabilité à
leur apport et qui, dès lors, bénéficient en fait d’une limitation de leur responsabilité (alors que
les administrateurs personnes morales doivent désigner un représentant permanent personne
physique qui encourt la même responsabilité) ;
- l’accroissement du risque de responsabilité, en raison notamment de la responsabilité de la
direction en matière de « compliance » et de « risk management », ce qui rend ce risque
difficilement assurable ;
- la difficulté de recruter des administrateurs de talent (war for talent).
A. Caractère impératif
L’article 2:57 du CSA est impératif en ce sens que, d’après ses termes, est interdite toute limitation
qui irait au-delà, qu’elle soit statutaire ou conventionnelle.
B. Champ d’application
L’article 2:57 du CSA a a priori un champ d’application extrêmement large :
- ces plafonds bénéficient aux membres de l’organe d’administration et aux délégués à la gestion
journalière de toute personne morale visée par le CSA ;
- ils s’appliquent à la responsabilité pour les dommages causés par n’importe quel type de
faute ;
- peu importe le fondement de l’action en responsabilité (contractuel ou extracontractuel) ;
- ils s’appliquent également à la responsabilité pour les dettes de la personne morale résultant
de l’article XX.227 du CDE ;
- ils s’appliquent vis-à-vis de la personne morale et des tiers.
224
Fanny Streveler MA1 DROIT
Ils s’appliquent par fait générateur, ce qui implique qu’ils ne sont pas multipliés en cas de pluralité
de demandeurs ou d’administrateurs en faute.
On constate que ces plafonds ne correspondent pas exactement aux seuils utilisés en matière
comptable par exemple.
D. Exceptions
L’article 2:57, § 3 du CSA prévoit une série d’exceptions qui limitent très fort la portée de l’article
2:57. Ces plafonds ne s’appliquent pas :
- en cas de fautes légères présentant un caractère habituel, de faute grave, de fautes commises
dans une intention frauduleuse ou à dessein de nuire ;
- aux obligations de garantie, c’est-à-dire lorsque l’administrateur doit assurer l’engagement
d’un tiers, comme par exemple en cas de nullité d’une souscription à une augmentation de capital ou
de non-respect de l’obligation de libération des apports à concurrence du minimum obligatoire740 ;
- à la responsabilité envers l’administration fiscale prévue par certaines dispositions fiscales
(notamment en cas de responsabilité des administrateurs en cas de non-paiement du
précompte professionnel ou de la TVA dans les cas indiqués supra) ;
740 CSA, art. 5:138 et 7:205 ; le législateur a oublié de viser l’article 6:16 pour les sociétés coopératives.
225
Fanny Streveler MA1 DROIT
- à la responsabilité prévue par l’article XX.226 du CDE (responsabilité des administrateurs en cas
de non-paiement des cotisations sociales par la personne morale ; supra).
L’article 2:58 n’empêche pas qu’une personne morale, après la commission d’une faute par un
administrateur, renonce à agir contre cet administrateur ou prenne à sa charge les dommages-
intérêts auxquels il serait condamné mais on n’aperçoit pas très bien l’intérêt de la personne
morale d’agir ainsi ; une telle décision peut s’avérer contraire à l’intérêt social.
6. RESPONSABILITÉ PÉNALE
Les membres de l’organe d’administration, les délégués à la gestion journalière et les
administrateurs de fait d’une personne morale peuvent engager leur responsabilité pénale sur la
base du droit pénal commun ou de dispositions particulières du CSA.
Ils peuvent engager leur responsabilité pénale en raison d’infractions qu’ils commettent eux-
mêmes (défaut de soumettre les comptes annuels à l’assemblée générale ou de les déposer à la
BNB dans les délais requis ; distribution de dividendes fictifs ; faux dans les comptes ; violation des
règles en matière de distribution des dividendes ;...) ou d’infractions commises par la personne
morale qui leur sont également imputables.
Ces actions sont des alternatives à la dissolution judiciaire pour justes motifs (infra).
Ces actions ne sont possibles que dans les SRL et les SA, à l’exception des sociétés cotées741.
On n’aperçoit pas la raison pour laquelle le CSA ne les permet pas dans les SC.
Ces actions doivent être introduites devant le président du tribunal de l’entreprise du siège de la
société, siégeant comme en référé.
La société doit être citée à comparaître en tant que partie et doit avertir à son tour les autres
actionnaires 742.
226
Fanny Streveler MA1 DROIT
1. ACTION EN EXCLUSION
A. Conditions
Un ou plusieurs actionnaires d’une SRL ou d’une SA détenant ensemble des titres représentant 30%
des voix attachées à l’ensemble des titres existants, ou des actions dont la valeur nominale ou le
pair comptable représente 30% du capital de la société (SA) ou des titres auxquels 30% des droits
aux bénéfices sont attachés, peuvent demander en justice, pour de justes motifs, qu’un actionnaire
transfère ses titres aux demandeurs743.
B. Distinction entre l’exclusion au sens de l’article 2:63 du CSA et l’exclusion au sens de l’article
5:155 du CSA
L’exclusion au sens de l’article 2:63 du CSA se distingue de l’exclusion au sens de l’article 5:155 :
- l’exclusion au sens de l’article 5:155 n’est possible que dans les SRL, tandis que l’article 2:63
s’applique aux SRL et SA ;
- l’exclusion au sens de l’article 5:155 est à charge de la société et entraîne l’annulation des
actions de l’actionnaire exclu, tandis que l’article 2:63 entraine un transfert de propriété des
actions entre des actionnaires ;
- l’exclusion au sens de l’article 5:155 peut avoir lieu pour tout motif précisé par les statuts
tandis l’article 2:63 suppose de justes motifs ;
- l’exclusion au sens de l’article 5:155 suppose une décision de l’assemblée générale tandis que
l’article 2:63 suppose une action en justice ;
- le prix des actions est fixé conformément aux statuts dans un cas et par le juge dans l’autre
(infra) ;
- le paiement du prix est soumis au double test d’actif net et de solvabilité en cas d’exclusion au
sens de l’article 5:155, tandis que ces tests ne trouvent pas à s’appliquer en cas d’exclusion au
sens de l’article 2:63, dès lors que ce n’est pas la société qui paie le prix des actions.
227
Fanny Streveler MA1 DROIT
C. Inaliénabilité
Pour éviter que le défendeur ne prive l’action de tout intérêt en aliénant ses titres, le CSA lui
interdit d’aliéner ses titres ou de les grever de droits réels pendant toute la durée de la procédure,
sauf avec l’accord du juge ou des parties à la cause745.
Lorsqu’il fixe le prix de reprise, le juge est tenu par les dispositions contractuelles ou statutaires
relatives à la fixation de la valeur des titres, pour autant que ces dispositions se rapportent
spécifiquement à l’hypothèse d’une exclusion judiciaire et que ces conventions ne donnent pas lieu
à un prix manifestement déraisonnable. En tous les cas, le juge peut se substituer à toute partie ou
à tout tiers désigné par les statuts ou les conventions pour fixer le prix.
Sous l’empire du Code des sociétés, la jurisprudence était divisée quant à la date de référence pour
la fixation du prix et l’influence éventuelle de l’attitude des parties sur la valeur des titres.
Cette jurisprudence a été critiquée par la doctrine car, singulièrement en cas de retrait,
l’actionnaire retrayant transfère ses actions à l’actionnaire à l’origine des justes motifs à un prix
impacté par ces justes motifs. Elle obligeait dès lors le demandeur à exercer d’autres actions pour
obtenir la réparation intégrale de son dommage.
Dans des arrêts ultérieurs, la Cour de cassation a décidé que le juge doit faire abstraction des
circonstances qui ont conduit à l’action et de l’attitude des parties à la suite de cette action ; cela
implique que si le juge constate que ces circonstances ont eu une incidence sur la valeur des parts
telle qu’elle est détermine à la date du transfert, il doit neutraliser cette incidence, quitte à fixer la
date de référence à un autre moment que la date de transfert.
Le CSA tranche la controverse en posant le principe que le juge estime la valeur des titres au
moment où il ordonne leur transfert, sauf si cela conduit à un résultat manifestement
déraisonnable. Dans ce cas, il peut, en tenant compte de toutes les circonstances pertinentes,
décider d’une augmentation ou d’une réduction équitable du prix.
Le transfert a lieu, le cas échéant, après l’exercice des droits éventuels de préemption mentionnés
dans le jugement, proportionnellement à la détention de titres de chacun, à moins qu’il en soit
convenu autrement746.
228
Fanny Streveler MA1 DROIT
2. ACTION EN RETRAIT
A. Conditions
Tout actionnaire peut, pour de justes motifs, demander en justice que les actionnaires à l’origine de
ces justes motifs reprennent tous ses titres747.
La seule condition est donc l’existence de justes motifs dont les défendeurs sont à l’origine.
L’article 2:68 ne fixe aucune condition quant au pourcentage de titres détenus par les demandeurs
ou les défendeurs.
Cette action est en général intentée par un actionnaire minoritaire contre les actionnaires
majoritaires. L’hypothèse inverse est possible mais elle est assez théorique.
B. Distinction entre le retrait au sens de l’article 2:68 du CSA et la démission au sens de l’article
5:154 du CSA
Le retrait au sens de l’article 2:68 du CSA se distingue de la démission au sens de l’article 5:154 :
- la démission n’est possible que dans les SRL, tandis que le retrait est prévu dans les SRL et les
SA ;
- la démission peut être totale ou partielle tandis que le retrait porte nécessairement sur tous les
titres de l’actionnaire ;
- la démission est à charge de la société tandis que le retrait est à charge des actionnaires à
l’origine des justes motifs ;
- la démission entraîne l’annulation des actions à concurrence desquelles l’actionnaire
démissionne, tandis que le retrait entraîne le transfert de leur propriété ;
- la démission n’est pas subordonnée à des motifs particuliers tandis que le retrait suppose de
justes motifs ;
- la démission ne peut en principe se faire que dans certaines fenêtres et moyennant un délai de
préavis, tandis que l’action en retrait peut être intentée n’importe quand ;
- la démission est un acte juridique unilatéral tandis que le retrait suppose une action en justice ;
- le prix des actions est fixé conformément aux statuts en cas de démission et par le juge en cas
de retrait (infra) ;
- le paiement du prix est soumis au double test d’actif net et de solvabilité en cas de démission,
tandis que ces tests ne trouvent pas à s’appliquer en cas de retrait dès lors que ce n’est pas la
société qui paie le prix des actions.
C. Absence d’inaliénabilité
A l’inverse de ce qu’il prévoit pour l’exclusion, le CSA n’interdit pas aux défendeurs d’aliéner leurs
titres pendant la procédure. En effet, cela ne les empêcherait pas d’acheter les titres du
demandeur748.
229
Fanny Streveler MA1 DROIT
En cas de difficultés graves empêchant le fonctionnement normal de la société, tout intéressé peut
demander au tribunal de l’entreprise (le plus souvent en référé) de désigner une personne
étrangère à la société en qualité d’administrateur provisoire en vue d’exercer des pouvoirs de
gestion, allant de l’exercice d’un droit de veto sur les décisions de l’organe d’administration
pendant une durée déterminée à la substitution pure et simple à l’organe d’administration, en vue
de sauvegarder les intérêts de la société.
Il s’agit généralement d’aménager une situation d’attente afin de permettre aux parties de trouver
une solution.
La désignation d’un administrateur provisoire est une mesure d’immixtion du juge dans la gestion
de la société que seules des circonstances exceptionnelles peuvent justifier.
749 Sous réserve de l’administrateur provisoire visé à l’article 4:28 du CSA, qui est désigné non en raison de conflits
perturbant le bon fonctionnement de la société mais pour faire face aux difficultés qui se présentent quand le gérant
d’une SNC ou d’une SComm décède ou ne peut plus exercer ses fonctions.
750 CSA, art. 4:28.
230
Fanny Streveler MA1 DROIT
2. PUBLICITÉ
L’extrait de l’acte relatif à la nomination et à la cessation des fonctions des administrateurs
provisoires doit être déposé au greffe du tribunal de l’entreprise751 et publié aux Annexes du
Moniteur belge.
3. AVANTAGES ET INCONVÉNIENTS
La désignation d’un administrateur provisoire est un remède efficace à la paralysie de la société.
Elle risque cependant de nuire à la société en raison de la publicité dont elle fait l’objet et de la
méfiance qu’elle peut susciter dans le chef des relations d’affaires de la société.
Le but est ici non pas de sauvegarder les intérêts de la société mais de protéger son actif dans
l’intérêt des créanciers et des travailleurs.
231
Fanny Streveler MA1 DROIT
Des associés ou actionnaires mécontents peuvent demander la nullité de leur engagement et/ou de
la société selon les règles examinées supra.
On verra dans le chapitre consacré à la dissolution et à la liquidation que le CSA prévoit les causes
de dissolution volontaires, de plein droit et judiciaires.
L’action en dissolution pour justes motifs est le « remède ultime » pour résoudre un conflit si le
règlement des litiges prévu aux articles 2:60 à 2:69 du CSA n’apporte pas de solution.
Il y a justes motifs, non seulement lorsqu’un actionnaire ou un associé manque gravement à ses
obligations ou lorsque son infirmité le met dans l’impossibilité d’exécuter celles-ci, mais encore
dans tous les autres cas qui rendent impossible la poursuite normale des affaires sociales, telle la
mésintelligence grave et durable des actionnaires ou des associés755.
Seuls les associés et actionnaires peuvent intenter cette action, à l’exclusion de tiers même
intéressés (comme les travailleurs) et du ministère public.
232
Fanny Streveler MA1 DROIT
PARTIE 3 –
ASSOCIATIONS
ET FONDATIONS
233
Fanny Streveler MA1 DROIT
CHAPITRE 1 :
PRINCIPES
GENERAUX
234
Fanny Streveler MA1 DROIT
LIBERTÉ D’ASSOCIATION
Outre les dispositions de droit interne756, la liberté d’association est garantie par la Convention
européenne des droits de l’homme 757 et le Pacte international des droits civils et politiques 758.
La liberté d’association est le droit fondamental par lequel plusieurs personnes décident ensemble
de poursuivre un but collectif par la mise en commun de moyens, de connaissances et d’activités de
manière libre et sans autres entraves que celles qui sont rendues nécessaires par la vie en commun
dans une société démocratique.
Elle s’applique bien entendu tant aux associations qu’aux sociétés mais les associations constituent
son domaine de prédilection.
1. RESTRICTIONS
A. Conditions
Selon l’article 22 du Pacte international des droits civils et politiques et l’article 11, § 2, de la
Convention européenne des droits de l’homme, l’exercice du droit de libre association peut faire
l’objet de restrictions dans les conditions suivantes :
1) La restriction doit être prévue par la loi : l’ingérence doit avoir une base en droit interne et la loi
doit répondre à des « standards de qualité ».
2) La restriction doit viser un but légitime : elle doit être nécessaire dans l’intérêt de la sécurité
nationale, de la sûreté publique, de l’ordre public, ou pour protéger la santé ou la moralité publique
ou les droits et les libertés d’autrui (Pacte) ou poursuivre un but légitime (Convention).
3) La restriction doit être nécessaire (ce vocable n’a pas la souplesse des termes « utile » ou
« opportun ») dans une société démocratique, répondre à un besoin social impérieux et être
proportionnée au but légitime poursuivi.
B. Applications
Il faut d’abord s’entendre sur le terme « restriction ». Il n’existe de véritable restriction au principe
de la liberté d’association qu’en cas de mesures préventives empêchant la constitution de
l’association (interdiction) ou la rendant plus difficile (conditions, modalités,...) ou d’injonctions de
dissolution.
En droit belge, les cas d’interdiction pure et simple sont rares. On peut citer l’interdiction des
milices privées759.
Le législateur considère l’objet même de ces associations comme contraire à l’ordre public et ces
interdictions sont nécessaires dans une société démocratique.
235
Fanny Streveler MA1 DROIT
Sous sa forme positive, il permet à plusieurs personnes (physiques ou morales) de constituer une
association ou d’adhérer à une association.
A. Liberté positive
Sous sa forme positive, le principe de liberté d’association signifie que des personnes peuvent
constituer une association ou adhérer à une association préexistante.
Les personnes qui veulent jouir des avantages des ASBL et AISBL doivent respecter les conditions et
accomplir les formalités prévues par le CSA.
Elles peuvent constituer une association en dehors du cadre du CSA mais cette association ne sera
pas dotée de la personnalité morale.
236
Fanny Streveler MA1 DROIT
Il n’implique pas le droit d’être admis dans une association préexistante : des associations peuvent
refuser d’admettre des membres ou en exclure, au nom de la liberté (négative) de s’associer, ce qui
soulève un problème lorsque l’adhésion à l’association est une condition pour bénéficier de
certains avantages. Ce problème sera examiné à propos de la liberté négative de s’associer.
B. Liberté négative
Sous sa forme négative, le principe de liberté d’association signifie que nul ne peut être contraint
de s’associer.
Cette forme négative n’est pas inscrite dans le texte de l’article 11 de la Convention européenne
des droits de l’homme.
Toutefois, à plusieurs reprises, la Cour européenne des droits de l’homme a considéré que cette
disposition consacre implicitement la liberté négative de ne pas s’associer.
Conformément à cette jurisprudence, il est bien admis en droit belge que nul ne peut être contraint
de s’affilier à une association, par exemple un syndicat.
La loi du 24 mai 1921 garantissant la liberté d’association consacre le droit des membres de se
retirer d’une association : « quiconque se fait recevoir membre d’une association, accepte, par son
adhésion, de se soumettre au règlement de cette association, ainsi qu’aux décisions et sanctions
prises en vertu de ce règlement. Il peut en tout temps se retirer en observant le règlement ; toute
disposition réglementaire ayant pour effet d’annihiler cette liberté est réputée non écrite »761.
L’article 9:23, alinéa 1, du CSA précise que « tout membre de l’association est libre de se retirer en
adressant sa démission au conseil d'administration ». Le livre X du CSA, consacré aux AISBL, ne
comporte pas de disposition similaire mais le droit de se retirer d’une AISBL découle de l’article 2 de
la loi du 24 mai 1921.
La Cour européenne des droits de l’homme favorise une approche au cas par cas de cette question,
en faisant la balance des intérêts en cause : on peut subordonner l’octroi des avantages fournis par
une association à l’adhésion à cette association, sauf quand ils sont nécessaires pour exercer une
activité déterminée.
237
Fanny Streveler MA1 DROIT
La jurisprudence belge est partagée. Certaines juridictions estiment que, n’étant pas obligé de
prendre en location un bien situé dans un centre commercial, le locataire qui le fait est lié par la
clause d’affiliation qui constitue un accessoire du contrat de bail et qu’il souscrit librement ;
d’autres considèrent que le bailleur ne peut pas imposer aux locataires d’adhérer à une ASBL.
Dans le même sens, la Cour de cassation de France considère que « la clause d’un bail commercial
faisant obligation au preneur d’adhérer à une association des commerçants et à maintenir son
adhésion pendant la durée du bail est entachée d’une nullité absolue ».
A première vue, cette jurisprudence peut paraître inéquitable : le locataire profite de l’animation,
de la promotion et de la publicité du centre commercial faites par l’association des commerçants.
Toutefois, dans un centre commercial, l’adhésion des locataires à une association n’est pas
nécessaire pour répartir les frais : le bailleur peut leur imposer par le bail une quote-part des
charges liées à l’exploitation du centre commercial. Contraindre des locataires à adhérer à une
association pour leur faire supporter une partie de ces charges va au-delà de ce qui est nécessaire à
l’équilibre des intérêts en présence.
En principe, en vertu de leur liberté (négative) d’association, les membres d’une association
peuvent refuser d’admettre de nouveaux membres, sans devoir motiver ou justifier leur décision.
Toutefois, si l’adhésion à l’association est une condition nécessaire pour exercer une activité, le
refus d’admettre de nouveaux membres pourrait, selon les circonstances, être constitutif d’un
abus, sauf si l’association accepte de leur fournir ces avantages bien qu’ils ne soient pas membres.
238
Fanny Streveler MA1 DROIT
ACTIVITÉS ET BUT
1. ACTIVITÉS
La loi du 27 juin 1921 interdisait aux associations d’exercer des activités commerciales ou
industrielles. Il était généralement admis que les associations pouvaient néanmoins exercer des
activités commerciales ou industrielles à titre accessoire pour autant qu’elles affectent l’ensemble
des bénéfices en résultant à leur but. La notion d’« activités commerciales à titre accessoire » était
cependant une bouteille à l’encre.
Un des éléments majeurs de la réforme est la possibilité pour les associations d’exercer n’importe
quel type d’activités. Le CSA impose désormais de mentionner, non seulement le but, mais
également l’activité dans les statuts762, alors que la loi du 27 juin 1921 imposait uniquement aux
associations de mentionner leur but dans leurs statuts763.
L’article 39, § 4 de la loi du 23 mars 2019 prévoit que « tant qu’une ASBL ou une AISBL n’a pas
modifié son objet, elle ne peut exercer que les seules activités entrant dans les limites de l’article
1er respectivement 46 de la loi du 27 juin 1921 sur les associations sans but lucratif, les fondations,
les partis politiques européens et les fondations politiques européennes. L’interdiction d’exercer
d’autres activités prend fin au 1er janvier 2029 ».
Alors que les associations soumises au CSA peuvent exercer n’importe quel type d’activités, les
associations constituées sous l’empire de la loi du 27 juin 1921 qui n’adaptent pas leur objet au CSA
restent soumises à l’interdiction d’exercer des activités autres que celles permises par la loi du 27
juin 1921 jusqu’au 1er janvier 2029, ce qui implique qu’elles ne peuvent pas exercer des activités
commerciales à titre principal.
Il ne s’agit pas d’une sanction mais « de protéger les ASBL » : les associations craignaient que la
nouvelle règle ait pour effet de les soumettre à l’impôt des sociétés. Cette crainte paraît non
fondée car ce qui détermine l’application de l’impôt des sociétés ou de l’impôt des personnes
morales, ce n’est pas ce que les associations peuvent faire mais ce qu’elles font en pratique.
Quoi qu’il en soit, l’article 39, § 4 de la loi du 23 mars 2019 déroge ainsi au système général de droit
transitoire car, en l’absence de cette règle, les associations auraient pu exercer n’importe quel type
d’activités à partir du 1er janvier 2020, sous réserve de dispositions contraires dans leurs statuts.
Il ne modifie en rien l’obligation qui incombe aux associations d’adapter leurs statuts au CSA pour le
1er janvier 2024 au plus tard.
239
Fanny Streveler MA1 DROIT
En effet, la loi du 15 avril 2018 portant réforme du droit des entreprises a supprimé la notion de
commercialité. Aux termes de l’article 254 ;
« A compter de la date d'entrée en vigueur de la [...] loi [le 1er novembre 2018], sauf dispositions
contraires, dans toutes les lois, la notion de “commerçant” au sens de l'article 1er du Code de
commerce doit être comprise comme “entreprise” au sens de l'article I.1 du Code de droit
économique.
Par dérogation à l'alinéa 1er, la [...] loi ne porte pas atteinte aux dispositions légales, réglementaires
ou déontologiques qui, en faisant référence aux notions de “commerçant”, “marchand” ou à des
notions dérivées, posent des limites aux activités autorisées de professions réglementées ».
Si on appliquait à la lettre l’article 254, alinéa 1, aux associations, cela signifierait que, tant qu’elles
restent régies par la loi de 1921, elles ne peuvent pas être des entreprises au sens de l’article I.1 du
CDE, ce qui n’aurait aucun sens puisque toute personne morale est une entreprise.
Il faut donc sans doute interpréter l’article 254, alinéa 2 comme visant également la loi de 1921,
bien que celle-ci ne pose pas de « limites aux activités autorisées de professions réglementées ».
Dans cette interprétation, les associations régies par la loi du 27 juin 1921 restent soumises à
l’interdiction d’exercer des activités commerciales, avec toutes les difficultés et controverses
relatives à la portée de cette interdiction.
Dans l’intervalle, les associations constituées avant le 1er mai 2019 peuvent bien entendu continuer
à exercer les activités non commerciales et non industrielles à titre principal qu’elles exerçaient
auparavant.
2. BUT
Sous l’empire de la loi du 27 juin 1921, les associations devaient avoir un but non lucratif, ce qui
impliquait l’interdiction de distribuer des bénéfices à leurs membres, mais on admettait
généralement que ce but ne devait pas être désintéressé. Il s’ensuivait que les associations
pouvaient avoir pour but de procurer des bénéfices patrimoniaux indirects à leurs membres, par
exemple sous la forme d’économies.
Ce n’est en principe plus possible : une association ou une fondation « ne peut distribuer ni
procurer directement ou indirectement un quelconque avantage patrimonial à ses fondateurs, ses
membres, ses administrateurs ni à toute autre personne sauf dans le but désintéressé déterminé
par les statuts »764.
La distribution indirecte d’un avantage patrimonial vise toute opération par laquelle les actifs de
l’association ou de la fondation diminuent ou ses passifs augmentent et pour laquelle celle-ci soit
ne reçoit pas de contrepartie soit reçoit une contrepartie manifestement trop faible par rapport à
764
CSA, art. 1:2 ; l’article 1:3 prévoit la même règle pour les fondations sinon qu’il ne vise évidemment pas les
membres.
240
Fanny Streveler MA1 DROIT
sa prestation765. Il s’agit par exemple de baux consentis par des membres ou des administrateurs à
l’association pour un loyer excessif ou de rémunérations excessives payées par l’association pour des
prestations de services.
Un but désintéressé ne coïncide pas avec un but non lucratif. Par exemple, une entité peut exploiter
une centrale d’achat dans un but non lucratif mais intéressé (procurer des économies aux sociétés qui en sont
membres). Son but serait désintéressé si elle l’exploitait en faveur de personnes en situation précaire pour
leur permettre de continuer à vivre dans la dignité humaine.
Bien entendu, une association peut effectuer des opérations ou rendre des services qui s’inscrivent
dans l’essence même de son but, même en faveur de ses membres766, pour autant que ces
avantages se situent dans les limites d’une réalisation normale de l’objet et du but de l’association.
L’Exposé des motifs de la loi du 23 mars 2019 donne une série d’exemples : une association sportive peut
autoriser ses membres à utiliser gratuitement ou à des prix de faveur les installations sportives dont elle est
propriétaire ; un théâtre amateur peut accorder à ses membres ou à des tiers un accès gratuit à des
représentations ; une association qui se consacre à dispenser des soins médicaux peut les prodiguer
gratuitement à ses membres ou leur faire bénéficier d’une réduction ; une fondation qui lutte contre certaines
maladies peut distribuer gratuitement des médicaments ou accorder des prix ou des subventions à des
personnes impliquées dans la lutte contre ces maladies ; une association de consommateurs peut donner
gratuitement à ses membres des avis juridiques concernant le droit de la consommation ; une association
professionnelle peut organiser des formations pour ses membres ; une association peut organiser des séjours
de vacances pour les enfants du personnel ; …
FINANCEMENT
Les modes de financement des associations et des fondations leur sont spécifiques. Alors que les
sociétés peuvent essentiellement compter sur les apports de leurs associés ou actionnaires, des
avances ou des emprunts (principalement auprès de leurs associés ou actionnaires,
d’établissements de crédit ou du public sous la forme d’obligations) et le produit de leurs activités,
le CSA ne comporte aucune obligation d’apport dans le chef des membres. La faible surface
financière de certaines associations et fondations est parfois un obstacle à leur accès aux formes
classiques d’emprunt. Bien qu’elles puissent désormais exercer n’importe quel type d’activités,
beaucoup d’entre elles consacrent l’essentiel de leurs ressources à la réalisation de leur but
désintéressé plutôt qu’à la recherche de fonds.
Toutefois, malgré l’absence de toute obligation légale, les associations et les fondations bénéficient
souvent d’« apports » et de cotisations de leurs membres. Elles peuvent accepter des libéralités,
organiser des collectes et recevoir des subsides767. Certaines recourent à l’emprunt, parfois sous
des formes alternatives, ou au crowdfunding. Enfin, le produit de leurs activités peut dans certains
cas constituer une source de financement.
241
Fanny Streveler MA1 DROIT
1. « APPORTS »
La notion d’« apports » à une association ou à une fondation revêt un sens particulier. Il s’agit des
biens que les fondateurs ou les membres mettent, sans contrepartie, à la disposition de
l’association ou de la fondation.
Le CSA n’impose pas aux fondateurs ou aux membres de faire des apports, sous réserve que
l’affectation de biens à la réalisation du but est une condition de constitution de la fondation.
A. Nature juridique
Ces apports ne sont certainement pas des apports au sens du CSA puisque les apporteurs ne
reçoivent en principe pas de droit en contrepartie et, en tout cas, pas d’actions ou de parts
représentant des droits dans l’association ou la fondation. Les statuts pourraient cependant créer
plusieurs catégories de membres et, par exemple, accorder aux membres un droit de vote en
fonction de l’importance de leur apport.
Les apports ultérieurs peuvent cependant s’analyser en libéralités s’ils sont inspirés par le souhait
de faire une libéralité à l’association ou à la fondation.
Selon que l’apport s’analyse en une libéralité ou un acte de cession à titre gratuit, les règles
suivantes s’appliqueront ou non :
- les règles en matière d’autorisation des libéralités ;
- les règles en matière de réserve légale des héritiers ;
- le principe de l’irrévocabilité des donations.
242
Fanny Streveler MA1 DROIT
B. Droit de reprise
Les statuts d’une fondation peuvent prévoir que, lorsque le but désintéressé de la fondation est
réalisé, le fondateur ou ses ayants-droit peuvent reprendre les biens apportés ou un somme égale à
leur valeur769.
A contrario, ils ne peuvent pas prévoir un tel droit en cours de vie sociale ou à la dissolution si elle
n’a pas réalisé son but.
Le CSA ne comporte pas de disposition semblable pour les associations. En l’absence de règle sur ce
point, les statuts des associations pourraient prévoir un droit de reprise pour les apports qui ne
constituent pas des libéralités770 et pourraient même l’étendre à d’autres hypothèses : la perte par
l’apporteur de sa qualité de membre en cours de vie sociale, la dissolution de l’association (qu’elle
ait ou non réalisé son but),... Une telle clause s’apparente à une condition résolutoire assortissant
l’apport.
2. COTISATIONS
Les cotisations sont les contributions dont les statuts des associations peuvent imposer aux
membres le paiement.
A. Plafond
Pour les ASBL, le CSA impose d’indiquer dans les statuts le montant maximum des cotisations 771.
Les statuts peuvent indiquer un montant maximum mais également une fourchette, un plafond
différent en fonction des catégories de membres, un montant assorti d’une clause d’indexation,...
En l’absence d’une telle clause, les ASBL ne peuvent pas imposer à leurs membres le paiement de
cotisations. Sous réserve de l’hypothèse dans laquelle les statuts prévoient le principe de
cotisations, il n’est pas possible de modifier autrement qu’à l’unanimité les statuts pour introduire
l’obligation de payer des cotisations car on augmenterait sinon les engagements des membres sans
leur accord.
Le CSA ne comporte pas une telle règle pour les AISBL mais rien n’empêche de mentionner dans les
statuts le montant maximal des cotisations.
B. Adhérents
Les statuts des ASBL doivent indiquer si les cotisations sont dues uniquement par les membres
effectifs ou également par les adhérents. S’ils ne précisent rien, les adhérents ne sont pas tenus
puisque ceux-ci n’ont que les droits et les obligations fixés par les statuts772.
Généralement, quand il existe des adhérents, le montant des cotisations dans leur chef est moins
élevé que pour les membres effectifs.
243
Fanny Streveler MA1 DROIT
C. Montant
Le montant des cotisations est en principe fixé, dans les limites indiquées par les statuts, par le
conseil d’administration, sauf si les statuts ou le conseil lui-même délèguent cette compétence à un
autre organe, par exemple l’assemblée générale.
On peut également imaginer que les statuts fixent un montant fixe mais cette formule manque de
souplesse.
Les statuts doivent fixer la périodicité des cotisations. S’ils ne précisent rien, on peut généralement
considérer qu’elles sont dues chaque année.
D. Défaut de paiement
Le membre qui ne paie pas ses cotisations peut être présumé démissionnaire773. S’agissant d’une
sanction à l’encontre du membre défaillant, l’ASBL a le choix : elle peut, soit le considérer comme
démissionnaire, soit demander en justice sa condamnation au paiement des cotisations impayées.
3. LIBÉRALITÉS
Aux termes de l’article 9:22, al. 1er du CSA, « à l’exception des dons manuels, toute libéralité entre
vifs au profit de l’association dont la valeur excède 100.000 EUR doit être autorisée par le ministre
de la Justice ou son délégué ».
Des dispositions similaires existent pour les fondations et les associations internationales 774.
A l’origine, cette règle avait pour but d’éviter la prolifération des biens dits de mainmorte (c’est-à-
dire essentiellement les biens des congrégations religieuses, d’une durée infinie, de sorte que ces
biens étaient soustraits à toute mutation) mais aussi de protéger l’intérêt des familles. Ce deuxième
objectif est toujours d’actualité même si, aujourd’hui, il s’agit surtout d’assurer une certaine
surveillance sur les associations et les fondations. Ainsi, l’autorisation est refusée si elles n’ont pas
publié leurs statuts, les actes de nomination de leurs administrateurs ou leurs comptes 775.
244
Fanny Streveler MA1 DROIT
B. Procédure
L’association ou la fondation bénéficiaire doit adresser sa demande au Service public fédéral
Justice, Direction générale de la Législation, Droits fondamentaux et Libertés.
L’autorisation prend en principe la forme d’un arrêté ministériel mais la libéralité est réputée
autorisée si le Ministre de la Justice ou son délégué n'a pas réagi dans un délai de trois mois à dater
de la demande d'autorisation qui lui est adressée776.
L’autorisation ne peut pas être accordée si l’association ou la fondation n’a pas rempli les
formalités visées par le CSA (notamment le dépôt des statuts, des actes de nomination des
administrateurs,...).
Même si ces formalités ont été respectées, le Ministre de la Justice conserve un pouvoir
d’appréciation.
D’autres raisons qui pourraient justifier le refus sont l’incompatibilité de la libéralité avec l’objet de
l’association, l’exercice par l’association d’une activité contraire à la loi, la situation des héritiers, la
situation du donateur qui se dépouille en laissant des créanciers impayés ou en portant atteinte à la
réserve de ses héritiers,...
4. EMPRUNTS ET OBLIGATIONS
A. Contrat d’emprunt
Financement classique :
Les associations et les fondations peuvent se financer par l’emprunt, auprès de leurs membres,
d’établissements de crédit ou de n’importe quel tiers.
Financement alternatif :
Les associations et les fondations peuvent également solliciter du crédit auprès d’établissements de
crédit alternatifs.
B. Obligations
Possibilité pour les associations et fondations d’émettre des obligations :
Comme ni le CSA ni aucune autre loi n’interdisent aux associations et fondations d’émettre des
obligations, elles peuvent en principe le faire, même en l’absence d’une clause des statuts en ce
sens, sauf si les statuts interdisent le recours à ce mode de financement.
245
Fanny Streveler MA1 DROIT
Organe compétent :
En principe, l’organe compétent d’une ASBL ou d’une fondation pour émettre des obligations est
son organe d’administration, en sa qualité d’organe souverain mais les statuts pourraient attribuer
cette compétence à l’assemblée générale.
L’organe compétent pour émettre des obligations l’est aussi pour en fixer les conditions (montant,
durée, taux,…).
Régime :
Les obligations émises par les associations ou les fondations doivent revêtir la forme nominative ou
dématérialisée.
Sous réserve des règles de droit financier, le régime des obligations émises par une association ou
une fondation est contractuel.
Les conditions d’émission des obligations peuvent s’inspirer des règles prévues par le CSA pour les
sociétés anonymes, à l’exception bien entendu des règles relatives aux obligations convertibles ou
remboursables en actions puisque les associations et fondations ne peuvent pas émettre d’actions.
Elles peuvent par exemple organiser des assemblées générales des obligataires et leur permettre de prendre
à la majorité des décisions qui lient tous les obligataires, telles que, moyennant l’accord de l’émetteur, la
modification du taux des intérêts ou le remboursement anticipé des obligations.
Toutefois, généralement, les associations et les fondations qui émettent des obligations ne doivent
pas rédiger de prospectus ou de note d’information :
- soit parce qu’elles offrent des obligations sans faire d’offre publique ;
- soit, si elles offrent des obligations dans le cadre d’une offre publique, parce qu’elles peuvent
invoquer l’exemption de minimis : 500.000 EUR sur une période de 12 mois à condition que
chaque investisseur ne peut donner suite à l’offre que pour un montant maximal de 5.000
EUR777 ;
- soit, si elles offrent des obligations dans le cadre d’une offre publique, parce qu’elles peuvent
invoquer l’exception en faveur des organismes sans but lucratif qui émettent des instruments
de placement en vue de se procurer les moyens nécessaires à la réalisation de leurs objectifs
non lucratifs778.
777 art. 10, § 3, 2° de la loi du 11 juillet 2018 relative aux offres au public d'instruments de placement et aux admissions
d'instruments de placement à la négociation sur des marchés réglementés (supra).
778 art. 10, § 2, 5° de la loi du 11 juillet 2018.
246
Fanny Streveler MA1 DROIT
5. CROWDFUNDING
Généralement, les associations et les fondations qui recourent au crowdfunding ne doivent pas
établir de prospectus ou de note d’information, soit parce qu’elles n’offrent pas d’instruments de
placement, soit si elles offrent des instruments de placement (généralement des obligations), pour
les raisons précitées.
Dans l’hypothèse plus rare où elles feraient une offre publique d’instruments de placement sans
pouvoir se prévaloir de ces exemptions, elles devraient établir, selon les cas, un prospectus ou une
note d’information.
La mesure dans laquelle le produit de leurs activités contribue à leur financement est très variable
d’une association ou fondation à l’autre : certaines exercent quotidiennement des activités
lucratives (hôpitaux,...) ; d’autres n’en organisent pas ou se contentent d’organiser des événements
ponctuels (fancy-fairs,...) ; d’autres encore perçoivent uniquement les revenus de leurs
investissements (fondations accordant des bourses).
Un règlement d’ordre intérieur est un acte par lequel une personne morale, représentée par son
assemblée générale ou son organe d'administration, organise son fonctionnement.
Il s’agit d’une délibération sociale d’une nature particulière qui se situe dans le prolongement des
statuts.
Ces dispositions ne sont pas spécifiques aux associations mais en pratique les associations adoptent
davantage un règlement d’ordre intérieur que les sociétés (avec une exception pour les sociétés
coopératives, dont l’article 6:69 réglemente le règlement d’ordre intérieur), pour préciser des
règles de fonctionnement, développer les objectifs poursuivis ou réglementer des aspects pratiques
(heures d’ouverture d’une bibliothèque, tenue vestimentaire sur un court de tennis,...).
247
Fanny Streveler MA1 DROIT
1. ORGANE COMPÉTENT
Si les statuts le prévoient, l’organe d’administration peut adopter un règlement d’ordre intérieur779.
Les statuts peuvent cependant attribuer à l’assemblée générale le pouvoir d’adopter le règlement
d’ordre intérieur.
Il en résulte que les statuts doivent nécessairement comporter une référence à un règlement
d’ordre intérieur ou, plus exactement, au règlement d’ordre intérieur puisqu’ils doivent indiquer la
dernière version approuvée du règlement.
En cas de modification du règlement, l’organe d’administration (dans l’hypothèse où les statuts ne
lui enlèvent pas le pouvoir d’adopter le règlement) peut cependant adapter les statuts sur ce point
sans décision de l’assemblée générale.
2. PUBLICITÉ
La mention du règlement d’ordre intérieur dans les statuts avertit les membres de son existence
mais elle ne suffit pas : la personne morale doit soit le communiquer aux membres (de même que
ses modifications), le cas échéant via leur adresse électronique, soit le mettre à disposition sur son
site internet780.
Elle n’est donc pas obligée de publier le règlement d’ordre intérieur aux Annexes du Moniteur
belge.
3. CONTENU
Le règlement d’ordre intérieur ne peut pas déroger aux dispositions légales impératives ou aux
statuts ou réglementer une matière pour laquelle le CSA exige une disposition statutaire781. Cette
dernière règle s’explique par l’absence de publication.
En outre, le CSA prévoyait qu’il ne peut pas contenir de disposition qui touche aux droits des
membres, aux pouvoirs des organes ou à l’organisation et au mode de fonctionnement de
l’assemblée générale782. Or, d’une part, de telles dispositions n’affectent pas les tiers et, d’autre
part, cette dernière règle est écartée pour les SC783.
Dans un arrêt récent, la Cour constitutionnelle a décidé qu’il n’était « pas objectivement et
raisonnablement justifié que le règlement d’ordre intérieur ne puisse toucher aux droits des
associés, actionnaires ou membres, aux pouvoirs des organes ou à l’organisation et au mode de
fonctionnement de l’assemblée générale que dans le cas d’une société coopérative ». Elle a par
conséquent annulé cette dernière disposition.
248
Fanny Streveler MA1 DROIT
CHAPITRE 2 :
ASBL
249
Fanny Streveler MA1 DROIT
CONSTITUTION
« Une association est constituée par une convention entre deux ou plusieurs personnes,
dénommées membres. Elle poursuit un but désintéressé dans le cadre de l’exercice d’une ou
plusieurs activités déterminées qui constituent son objet. Elle ne peut distribuer ni procurer
directement ou indirectement un quelconque avantage patrimonial à ses fondateurs, ses membres,
ses administrateurs ni à toute autre personne sauf dans le but désintéressé déterminé par les
statuts »784.
Cette définition vaut tant pour les ASBL que pour les AISBL.
1. CONDITIONS DE FOND
Toute association suppose un accord de volonté entre plusieurs personnes pour produire des effets
juridiques et repose donc sur un contrat : le contrat d’association. A ce titre, elle est soumise à
toutes les conditions requises par la loi pour la validité des contrats.
Désormais, 2 membres suffisent pour constituer une ASBL785, alors qu’il en fallait au moins 3 sous
l’empire de la loi du 27 juin 1921, à peine de nullité.
Comme toute personne morale, les ASBL doivent être identifiées par une dénomination.
2. FORMALITÉS DE CONSTITUTION
Le CSA ne prévoit pas de formalités préalables à la passation de l’acte constitutif.
Les ASBL peuvent être constituées par acte authentique ou sous seing privé (deux originaux
suffisent)786. Le CSA indique les mentions minimales de l’acte constitutif.
250
Fanny Streveler MA1 DROIT
Ces documents doivent ensuite être publiés aux annexes du Moniteur belge789.
Le dépôt doit intervenir dans les 30 jours de l’acte définitif790 et la publication dans les 10 jours du
dépôt791.
4. NULLITÉ
Le CSA énumère de manière limitative les causes de nullité des ASBL :
1° lorsque le nombre de fondateurs valablement engagés est inférieur à 2 ;
2° lorsque la constitution n’a pas eu lieu par acte authentique ou par acte sous seing privé ;
3° lorsque les statuts ne contiennent pas les mentions relatives à sa dénomination, la région dans
laquelle son siège est établi, son but et son objet ;
4° lorsque le but ou l’objet en vue duquel elle est constituée, ou son but ou objet réel, contrevient à
la loi ou à l’ordre public ;
5° lorsqu’elle a été constituée dans le but de fournir à ses membres effectifs ou adhérents, aux
membres de son organe d’administration ou à toute autre personne, sauf dans le but désintéressé
déterminé par les statuts, des avantages patrimoniaux directs ou indirects 792.
Ces causes sont similaires à celles prévues pour les SRL, les SA et les SC, sinon que le CSA ajoute les
hypothèses suivantes : le but ou l’objet réel de l’association contrevient à la loi ou à l’ordre
public793 ; l’association a été constituée dans le but de fournir des avantages patrimoniaux à
quiconque sauf dans son but désintéressé statutaire (ce qui est d’ailleurs inutile puisque, dans ce
cas, le but contrevient à la loi, hypothèse déjà visée) ; ainsi que, plus curieusement, les statuts ne
mentionnent pas la région dans laquelle le siège est établi.
La nullité d’une association doit être prononcée par une décision judiciaire et produit ses effets à
compter de cette décision794.
251
Fanny Streveler MA1 DROIT
MEMBRES
1. NOMBRES ET QUALITÉ
Deux fondateurs suffisent pour constituer une ASBL795.
Toute personne physique ou morale peut être fondateur et devenir membre d’une ASBL.
Les sociétés peuvent également participer à la constitution d’une association ou adhérer à une
association existante, malgré leur but lucratif : d’une part, elles peuvent accomplir des actes à titre
gratuit lorsqu’elles poursuivent ainsi un but lucratif à long terme ; d’autre part, elles peuvent avoir
d’autres buts que leur but lucratif.
Les membres effectifs sont les fondateurs de l’association et ceux qui ont été ultérieurement admis
en qualité de membre effectif, pour autant bien entendu qu’ils soient toujours en vie, n’aient pas
démissionné et n’aient pas été exclus. Ils sont parties au contrat d’association et ont, en vertu de la
loi, le droit de prendre part à l’assemblée générale et de voter ainsi que les autres droits découlant
de la loi et des statuts. Ce sont les seuls véritables membres.
Quant aux membres adhérents ou, comme il aurait été plus clair de les appeler, les adhérents, il ne
s’agit pas de véritables membres mais de tiers qui ont un lien avec l’association et qui ont cette
qualité aux conditions fixées par les statuts796. Ils entretiennent des relations privilégiées avec
l’association en vertu d’un contrat sui generis avec celle-ci.
Les droits et obligations des adhérents sont exclusivement déterminés par les statuts797.
Généralement, les adhérents doivent payer une cotisation dont le montant est fixé par les statuts ;
ils sont informés des activités de l’association (par exemple, l’organisation de concerts) et peuvent y
prendre part (par exemple, assister à ces concerts gratuitement ou à un tarif préférentiel).
Les adhérents sont admis et peuvent démissionner ou être exclus aux conditions fixées par les
statuts.
Leurs droits et obligations envers l’association sont purement contractuels, en ce sens qu’ils
jouissent uniquement des droits qui leur sont accordés conformément aux statuts, outre bien sûr
les droits qui résultent du droit commun comme le droit de prendre connaissance des décisions de
l’assemblée générale qui les concernent.
252
Fanny Streveler MA1 DROIT
3. CATÉGORIES
Outre la distinction entre les membres effectifs et adhérents, les statuts peuvent prévoir plusieurs
catégories de membres.
4. ADMISSION ET SORTIE
A. Admission
Ce sont les statuts qui fixent les conditions et les formalités d’admission des membres.
Les conditions d’admission sont les règles auxquelles les candidats doivent satisfaire pour pouvoir
être admis. Les statuts peuvent fixer n’importe quel critère pour autant qu’ils ne contreviennent
pas à l’ordre public ou à des lois impératives (par exemple, en fixant des critères qui constitueraient une
discrimination injustifiée en vertu de l’âge, du sexe ou de l’origine) et qu’ils n’imposent pas au candidat de
commettre des actes fautifs au sens de l’article 1382 du Code civil. Ils peuvent ainsi subordonner
l’admission à la qualité d’ancien étudiant de telle école (pour une association d’alumni), à
l’exploitation d’une entreprise dans tel quartier (pour une association de commerçants), à
l’adhésion à un parti (pour une association politique),...
Dans ces limites, ils peuvent fixer des critères qui s’expliquent par le but de l’association : une
association qui a pour but de rapprocher les expatriés américains en Belgique peut admettre uniquement des
citoyens américains ; une association qui a pour but de favoriser la pratique des sports par les jeunes en
permettant l’accès à des installations sportives à moindre coût peut admettre uniquement des jeunes ; une
congrégation religieuse qui prône le célibat peut admettre uniquement des célibataires ; une association qui
a pour but de promouvoir le rôle des femmes dans la vie économique en leur donnant les moyens nécessaires
pour y parvenir (formations, conférences,...) peut admettre uniquement des femmes ; ...
Les statuts pourraient fixer uniquement certaines conditions d’admission et laisser à l’organe
compétent le pouvoir discrétionnaire de se prononcer sur les admissions.
B. Démission
En règle générale, une partie à un contrat à durée indéterminée peut le résilier à tout moment en
ce qui la concerne car, sinon, elle resterait liée ad vitam eternam, ce qui irait à l’encontre de la
prohibition des engagements perpétuels. Le principe de la liberté d’association impose également
que les membres puissent démissionner.
253
Fanny Streveler MA1 DROIT
Tout membre d'une association est libre de se retirer de celle-ci en adressant sa démission au
conseil d'administration798. Cette disposition est d’ordre public et les statuts ne peuvent pas
interdire aux membres de démissionner.
En principe, conformément au droit commun des actes réceptices, la démission sort ses effets dès
qu’elle est adressée au conseil d'administration, sans qu’elle doive être acceptée par celui-ci.
Les statuts doivent indiquer les conditions et les formalités d’admission et de sortie des
membres799. L’absence d’une telle clause ne fait pas obstacle à la démission (comparer avec
l’exclusion ; infra) mais la facilite au contraire, puisqu’elle ne sera subordonnée à aucune condition
ou formalité.
Les statuts peuvent réglementer la démission en imposant un préavis, l’envoi d’une lettre
recommandée,... mais ne peuvent pas fixer des conditions ou formalités qui la rendent
anormalement difficile ou impossible.
Le CSA prévoit qu’un membre qui ne paie pas les cotisations peut être réputé démissionnaire800.
Cette disposition n’est pas impérative et les statuts peuvent l’écarter.
C. Décès
La qualité de membre d’une association est intuitu personae : le membre est admis en raison de ses
caractéristiques.
La qualité de membre se perd par le décès (ou, pour les personnes morales, par la clôture de la
liquidation ou la dissolution-liquidation en un seul acte). Elle est intransmissible aux héritiers ou aux
ayants-droit même universels des personnes morales.
D. Exclusion
L’exclusion d’un membre s’analyse comme une résolution du contrat d’association à son encontre.
Les statuts doivent prévoir les conditions et les formalités d’exclusion801. En l’absence d’une clause
d’exclusion, une association ne peut pas exclure de membres.
Seule l'assemblée générale, statuant dans le respect des conditions de quorum et de majorité
requises pour la modification des statuts, peut prononcer l'exclusion d'un membre. Les statuts ne
peuvent pas fixer des conditions de majorité moins sévères mais peuvent renforcer ces règles.
Le membre dont l’exclusion est envisagée peut prendre part au vote puisqu’il reste membre aussi
longtemps que son exclusion n’a pas été prononcée et que la loi n’empêche pas le membre qui est
concerné par un point à l’ordre du jour de l’assemblée générale de voter sur ce point.
254
Fanny Streveler MA1 DROIT
L’association doit notifier au membre concerné les griefs qui lui sont faits. Elle doit lui permettre de
faire valoir ses observations à l’assemblée générale, par écrit ou par une audition s’il le souhaite.
Dans le silence des statuts, l’assemblée générale jouit d’un pouvoir discrétionnaire en matière
d’exclusion. Dans ce cas, les tribunaux peuvent uniquement apprécier la régularité formelle de la
décision (respect des conditions légales et statutaires) et ne peuvent pas se substituer à
l’assemblée générale en appréciant l’opportunité ou le bien-fondé des motifs. Ils peuvent
cependant annuler une décision manifestement abusive.
En principe, l’exclusion ne doit pas être motivée mais les statuts peuvent imposer une telle
motivation. L’absence de motivation n’est pas incompatible avec le respect des droits de la
défense, qui tend à initier un débat devant l’assemblée générale.
Les statuts peuvent cependant énumérer des motifs d’exclusion. Ces motifs doivent être
suffisamment graves pour justifier l’exclusion car une sanction doit être proportionnelle à son but.
Dans ce cas (sauf si cette énumération reste exemplative et ne porte pas atteinte à son pouvoir
discrétionnaire) l’assemblée générale doit constater l’existence d’un de ces motifs dans le chef du
membre avant de prononcer son exclusion et motiver l’exclusion ; fût-ce simplement par la
référence à ce motif et la constatation des faits constitutifs de ce motif. Les tribunaux disposent
alors d’un pouvoir plus important : ils peuvent contrôler la matérialité des faits reprochés au
membre exclu et vérifier s’ils sont visés par la clause des statuts.
L’exclusion irrégulière peut être annulée. Le tribunal peut uniquement vérifier si les règles de forme
ont été respectées ; il ne peut exercer qu’un contrôle marginal sur la décision d’exclusion. Seul le
membre exclu peut demander cette annulation.
E. Suspension
La compétence exclusive de l’assemblée générale en matière d’exclusion ne fait pas obstacle à la
clause des statuts qui confère au conseil d'administration le pouvoir de suspendre un membre
jusqu’à la prochaine assemblée générale.
On considère généralement que le membre suspendu conserve tous ses droits découlant de la loi et
des statuts, ce qui implique notamment qu’il doit être convoqué à l’assemblée générale et peut y
exercer le droit de vote, car, sinon, il se trouverait dans la même situation qu’un membre exclu.
Toutefois, si le membre exclu conservait tous ses droits, on n’apercevrait pas l’utilité d’une
suspension. On peut faire une distinction entre les droits qui découlent de la loi et les autres droits :
la suspension n’a aucun effet sur les droits légaux mais les statuts pourraient prévoir qu’elle
entraîne la suspension des droits supplémentaires qui résultent des statuts et du règlement d’ordre
intérieur.
255
Fanny Streveler MA1 DROIT
F. Condition résolutoire
Les statuts peuvent prévoir que le membre qui ne remplit plus les conditions d’admission ou se
trouve dans certaines situations (condamnation pénale même non définitive,...) perd de plein droit
sa qualité de membre. Il s’agit, non d’une exclusion, mais de la réalisation d’une condition
résolutoire et la procédure d’exclusion ne doit pas être respectée. En effet, en adhérant au contrat
d’association, le membre accepte les conditions d’admission.
En l’absence d’une telle clause, la perte des conditions d’admission n’entraîne pas de plein droit la
perte de la qualité de membre.
Le membre démissionnaire, exclu ou qui a perdu autrement sa qualité de membre reste tenu des
cotisations échues avant sa démission, son exclusion ou la perte de sa qualité. Il n'a aucun droit sur
le fonds social et ne peut pas réclamer le remboursement des cotisations qu'il a versées, à moins de
stipulations contraires dans les statuts.
Les statuts peuvent prévoir que les membres qui se retirent ont le droit de reprendre leur apport
ou la valeur de celui-ci802.
5. DROITS ET OBLIGATIONS
A. Membres effectifs et adhérents
Les adhérents jouissent uniquement des droits et ont uniquement les obligations que les statuts
leur reconnaissent explicitement. Il s’agit généralement de droits en relation avec les activités de
l’association mais il peut également s’agir de droits relatifs à son fonctionnement, comme le droit
d’assister à l’assemblée générale, voire d’émettre un veto pour certaines décisions. Les statuts ne
peuvent cependant pas leur reconnaître le même droit de vote que les membres effectifs (tout en
les traitant comme adhérents dans le but, par exemple, de pouvoir les exclure sans respecter les
conditions légales en matière d’exclusion) car, dans cette hypothèse, ils pourraient être requalifiés en
membres effectifs.
Sous réserve de dispositions contraires des statuts, ces droits et ces obligations peuvent être
modifiés sans leur consentement, ce qui pose surtout un problème pour l’augmentation du
montant des cotisations.
256
Fanny Streveler MA1 DROIT
B. Droits
Les membres effectifs ont les droits qui résultent de la loi et des statuts :
- Droit de demander la convocation de l’assemblée générale : les membres représentant un
cinquième du nombre de membres peuvent exiger la convocation d’une assemblée
générale803.
- Droit de demander l’inscription d’un point à l’ordre du jour : toute proposition signée par un
nombre de membres au moins égal au vingtième doit être portée à l'ordre du jour804.
- Droit de participer à l’assemblée générale : tous les membres peuvent participer à l’assemblée
générale, ce qui implique le droit d’y être convoqués (au moins quinze jours avant). Ils peuvent
se faire représenter à l'assemblée générale par un autre membre ou, si les statuts l'autorisent,
par un tiers805.
- Droit de vote à l’assemblée générale : sauf disposition contraire des statuts, les membres ont
un droit de vote égal806. Les statuts peuvent déroger au principe selon lequel chaque membre a
une voix mais ne peuvent pas priver un membre du droit de vote.
- Droit de consulter au siège de l'association le registre des membres807.
Les statuts peuvent accorder aux membres d’autres droits, relatifs au fonctionnement de
l’association (droit de présenter un ou plusieurs candidats au conseil d'administration, droit de
veto,...) ou à ses activités (droit d’avoir accès à certaines activités ou installations de l’association,
ou d’y avoir accès à des conditions avantageuses, droit de recevoir les publications de l’ASBL,...).
Ils ne peuvent bien entendu pas accorder aux membres des avantages patrimoniaux.
C. Obligations
Tout membre doit payer les cotisations décidées par le conseil d'administration ou l’assemblée
générale (en fonction des statuts) ; les statuts doivent en toute hypothèse fixer le montant
maximum808.
Seule l’assemblée générale peut relever le plafond des cotisations, dans le cadre d’une modification
des statuts.
Les statuts peuvent fixer des cotisations différentes en fonction de la catégorie de membres.
257
Fanny Streveler MA1 DROIT
D. Responsabilité
Les membres ne sont en cette qualité pas responsables des engagements de l’association809.
Les membres doivent cependant exécuter les obligations découlant du contrat d’association : ils
doivent payer les cotisations fixées conformément aux statuts et respecter les diverses obligations
mises à leur charge. A défaut, ils peuvent en principe être exclus.
L’hypothèse d’une faute des membres susceptible d’engager leur responsabilité envers
l’association se rencontre surtout quand ils sont également administrateurs (de droit ou de fait) car
ce sont généralement des fautes dans la gestion de l’association qui causent un dommage à
l’association ou aux tiers.
Les membres pourraient également engager leur responsabilité envers les tiers à la suite d’une
« levée du voile social » s’ils confondent le patrimoine de l’association et le leur mais une telle
confusion suppose généralement qu’ils aient des pouvoirs d’administrateur, de droit ou de fait.
ORGANE D’ADMINISTRATION
Un des objectifs de la réforme de 2019 était d’unifier le droit des sociétés et des associations. C’est
sans doute en ce qui concerne l’organe d’administration qu’elle a le mieux atteint son objectif. La
loi du 23 mars 2019 a en effet éliminé une série de différences injustifiées entre les règles
applicables à l’organe d’administration des sociétés anonymes et des ASBL, différences qui tenaient
davantage à des erreurs de rédaction de la loi du 2 mai 2002 qui a modifié la loi du 27 juin 1921
(déjà dans une optique d’harmonisation) qu’à un choix délibéré du législateur.
Comme pour les sociétés anonymes, le CSA prévoit que cet organe doit en principe comporter au
moins 3 membres mais qu’il peut n’en comporter que 2 lorsque l’ASBL n’a que 2 membres. Dans ce
cas, si les statuts octroient une voix prépondérante à l’un des administrateurs, cette disposition
perd de plein droit ses effets811.
258
Fanny Streveler MA1 DROIT
2. ADMINISTRATEURS
A. Nomination, rémunération et révocation
Les administrateurs peuvent être des personnes physiques ou morales812 mais toute personne
morale qui exerce un mandat d’administrateur doit désigner un représentant permanent813.
C’est en principe l’assemblée générale qui désigne les administrateurs814 et c’est toujours elle qui
fixe leur rémunération815.
A l’instar de la solution prévue pour les SRL, les SC et les SA, le CSA ajoute une possibilité de
cooptation : en cas de vacance de la place d’un administrateur avant la fin de son mandat, les
administrateurs restants ont le droit de coopter un nouvel administrateur. La première assemblée
générale qui suit se prononce sur la confirmation du mandat de l’administrateur coopté ; en cas de
confirmation, l’administrateur coopté termine le mandat de son prédécesseur, sauf si l’assemblée
générale en décide autrement. En l’absence de confirmation, le mandat de l’administrateur coopté
prend fin à l’issue de l’assemblée générale, sans que cela affecte la régularité de la composition de
l’organe d’administration jusqu’à ce moment. Les statuts peuvent cependant exclure le pouvoir des
administrateurs restants de coopter un administrateur 816.
En l’absence d’une telle clause, un administrateur ne peut donc pas se faire représenter par un
collègue.
Il est donc indispensable de prévoir dans les statuts d’une ASBL une clause spécifique si on veut
permettre aux administrateurs de se faire représenter par un collègue. Les statuts pourraient
limiter le nombre de mandats confiés à un administrateur.
259
Fanny Streveler MA1 DROIT
3. POUVOIRS
Le conseil d’administration a le pouvoir d’accomplir tous les actes nécessaires ou utiles à la
réalisation de l’objet de l’association, à l’exception de ceux que la loi réserve à l’assemblée
générale. Les statuts peuvent apporter des restrictions à ses pouvoirs. Une telle limitation n’est pas
opposable aux tiers, même si elle est publiée. Il en va de même pour une répartition des tâches
entre les administrateurs819.
5. CONFLITS D’INTÉRÊT
La loi du 27 juin 1921 ne comportait aucune disposition en matière de conflits d’intérêts de sorte
que la question était laissée aux statuts, au règlement d’ordre intérieur et aux principes généraux
de bonne gouvernance.
La loi du 23 mars 2019 a comblé cette lacune en s’inspirant de la procédure applicable aux sociétés
anonymes.
Désormais, lorsque l’organe d’administration d’une ASBL est appelé à prendre une décision ou à se
prononcer sur une opération relevant de sa compétence à propos de laquelle un administrateur a
un intérêt direct ou indirect de nature patrimoniale qui est opposé à l’intérêt de l’association, cet
administrateur doit en informer les autres administrateurs avant que l’organe d’administration ne
prenne une décision. Sa déclaration et ses explications sur la nature de cet intérêt opposé doivent
figurer dans le procès-verbal de la réunion de l’organe d’administration qui doit prendre cette
décision. Il n’est pas permis à l’organe d’administration de déléguer cette décision.
260
Fanny Streveler MA1 DROIT
Dans les ASBL qui dépassent plus d’un des critères visés à l’article 3:47, § 2, l’organe
d’administration doit décrire dans son procès-verbal la nature de la décision ou de l’opération et les
conséquences patrimoniales de celle-ci pour l’association et justifie la décision qui a été prise. Il
doit reprendre l’intégralité de cette partie du procès-verbal dans son rapport de gestion ou, si
l’association ne dépose pas de rapport de gestion, dans le document déposé en même temps que
les comptes annuels.
Si le conflit est isolé, l’administrateur ayant un conflit d’intérêts ne peut pas prendre part aux
délibérations de l’organe d’administration concernant ces décisions ou ces opérations, ni prendre
part au vote sur ce point.
Si le conflit est généralisé, en ce sens que la majorité des administrateurs présents ou représentés
ont un conflit d’intérêts, la décision ou l’opération est soumise à l’assemblée générale. En cas
d’approbation de la décision ou de l’opération par celle-ci, l’organe d’administration peut les
exécuter822.
Cette procédure n’est pas applicable lorsque les décisions de l’organe d’administration concernent
des opérations habituelles conclues dans des conditions et sous les garanties normales du marché
pour des opérations de même nature823.
En cas de méconnaissance de ces règles, les tiers intéressés peuvent demander la nullité ou la
suspension de la décision de l’organe d’administration, de même que l’association si l’autre partie à
ces décisions ou opérations avait ou devait avoir connaissance de cette violation 824. En outre, les
administrateurs peuvent engagent leur responsabilité. A l’inverse de la solution retenue pour les
SRL, les SC et les SA, le CSA ne prévoit pas expressément que les administrateurs sont responsables
du préjudice subi par l’ASBL ou les tiers à la suite de décisions ou d’opérations qui leur ont causé un
avantage financier abusif. Mais la prise d’une telle décision ou l’accomplissement d’une telle
opération constituerait une faute de gestion dans leur chef.
Les ASBL peuvent bien entendu prévoir des règles de conflits d’intérêts plus sévères. Par exemple, les
petites ASBL peuvent adopter dans leurs statuts le régime applicable aux grandes.
261
Fanny Streveler MA1 DROIT
6. DÉLIBÉRATIONS ÉCRITES
Les décisions de l’organe d’administration peuvent être prises par décision unanime de tous les
administrateurs, exprimée par écrit, à l’exception des décisions pour lesquelles les statuts excluent
cette possibilité825.
Cette possibilité devient donc de droit. Une ASBL peut cependant l’exclure par ses statuts.
7. GESTION JOURNALIÈRE
L’organe d’administration peut charger une ou plusieurs personnes, qui agissent chacune
individuellement, conjointement ou collégialement, de la gestion journalière de l’association, ainsi
que de la représentation de l’association en ce qui concerne cette gestion. Cette disposition est
opposable aux tiers si elle est publiée. Les limitations au pouvoir de représentation de l’organe de
gestion journalière ne sont toutefois pas opposables aux tiers même si elles sont publiées826.
Le CSA reprend la même définition de la gestion journalière que pour les sociétés : elle comprend
aussi bien les actes et les décisions qui n’excèdent pas les besoins de la vie quotidienne de
l’association que les actes et les décisions qui, soit en raison de l’intérêt mineur qu’ils représentent,
soit en raison de leur caractère urgent, ne justifient pas l’intervention de l’organe
d’administration827.
8. SONNETTE D’ALARME
Lorsque des faits graves et concordants sont susceptibles de compromettre la continuité de
l’entreprise, le conseil d’administration est tenu de délibérer sur les mesures qui devraient être
prises pour assurer la continuité de l’activité économique pendant une période minimale de 12
mois828.
En outre, dans les grandes associations, le commissaire qui constate dans l’exercice de sa mission
des faits graves et concordants susceptibles de compromettre la continuité de l’activité
économique doit en informer l’organe d’administration par écrit et de manière circonstanciée.
L’organe d’administration doit délibérer sur les mesures qui devraient être prises pour assurer la
continuité de l’activité économique pendant une période minimale de 12 mois. Si le commissaire
n’a pas été informé par l’organe d’administration des mesures prises ou envisagées dans le mois à
dater de la communication de cette information, ou s’il estime que ces mesures ne sont pas
susceptibles d’assurer la continuité de l’activité économique pendant une période minimale de 12
mois, le commissaire peut communiquer par écrit ses constatations au président du tribunal de
l’entreprise829.
262
Fanny Streveler MA1 DROIT
ASSEMBLÉE GÉNÉRALE
1. POUVOIRS
L’assemblée générale est (exclusivement) compétente pour les décisions suivantes :
1° la modification des statuts ;
2° la nomination et la révocation des administrateurs et la fixation de leur rémunération dans les
cas où une rémunération leur est attribuée ;
3° la nomination et la révocation du commissaire et la fixation de sa rémunération ;
4° la décharge à octroyer aux administrateurs et au commissaire et l’introduction d’une action de
l’association contre les administrateurs et les commissaires ;
5° l’approbation des comptes annuels et du budget ;
6° la dissolution de l’association ;
7° l’exclusion d’un membre ;
8° la transformation de l’ASBL en AISBL, en société coopérative agréée comme entreprise sociale et
en société coopérative entreprise sociale agréée ;
9° effectuer ou accepter l’apport à titre gratuit d’une universalité ;
10° tous les autres cas où la loi ou les statuts l’exigent830.
2. CONVOCATION
Le conseil d’administration doit convoquer l’assemblée générale dans les cas prévus par la loi ou les
statuts ou lorsqu’au moins un cinquième des membres en fait la demande.
Le cas échéant, le commissaire peut convoquer l’assemblée générale. Il doit la convoquer lorsqu’un
cinquième des membres de l’association le demande.
Le délai de convocation est de 15 jours831. Toutefois, lorsque la convocation est faite sur requête
des membres, l’assemblée générale doit être convoquée dans les 21 jours de la demande de
convocation et se tenir au plus tard le 40ème jour suivant cette demande, sauf disposition statutaire
contraire832.
263
Fanny Streveler MA1 DROIT
Le CSA impose un quorum de présence de deux tiers des membres (avec l’obligation de convoquer,
en cas de carence, une nouvelle réunion qui ne peut être tenue moins de 15 jours après la première
réunion et qui délibérera valablement quel que soit le nombre de membres présents ou
représentés)833 et des conditions de majorité de deux tiers, portées à quatre cinquièmes en cas de
modification du but ou de l’objet834 et en cas de dissolution835. Les abstentions doivent être
neutralisées836.
264
Fanny Streveler MA1 DROIT
CHAPITRE 3 :
AISBL
265
Fanny Streveler MA1 DROIT
CONSTITUTION
1. CONDITIONS DE FOND
A. But désintéressé
L’AISBL est une association et à ce titre doit, comme l’ASBL, avoir un but désintéressé837.
On peut citer comme exemple : favoriser la paix dans le monde par la diplomatie préventive, encourager les
échanges culturels entre les pays, apporter une assistance médicale aux victimes des conflits armés,
conscientiser les gouvernements ou les peuples au réchauffement climatique,...
2. FORMALITÉS
A. Acte authentique
Les statuts des AISBL doivent être constatés par acte authentique 838.
Cet arrêté royal permet de vérifier le caractère licite et d’utilité internationale du but des AISBL et
leur confère également un certain prestige.
Les AISBL acquièrent la personnalité morale à la date de cet arrêté royal (et non à la date de dépôt
des statuts).
À cette fin, le notaire doit communiquer l’acte constitutif au Ministre de la Justice avec la demande
d’octroi de la personnalité juridique et d’approbation des statuts. La personnalité juridique sera
accordée si l’AISBL poursuit un but d’utilité internationale839.
En principe, le Roi ne pourrait donc pas refuser l’octroi de la personnalité juridique pour des raisons
étrangères à ce but, par exemple parce que les statuts ne comportent pas certaines mentions. Il ne
pourrait pas non plus refuser l’octroi de la personnalité morale au motif que le but ne lui plaît pas,
ou rend l’AISBL redondante par rapport à d’autres.
En pratique, le notaire rédige d’abord un projet de statuts qu’il envoie au Ministre de la Justice, afin
de pouvoir le cas échéant modifier son projet conformément aux observations du fonctionnaire en
charge du dossier. Il ne reçoit l’acte que lorsque le projet peut être considéré comme final. Il envoie
alors au Ministre les statuts avec la demande d’octroi de la personnalité juridique et d’approbation
des statuts.
266
Fanny Streveler MA1 DROIT
Après la signature de l’arrêté royal, l’administration envoie des expéditions de l’arrêté royal au
notaire, qui peut alors déposer au greffe les statuts et les actes relatifs à la nomination des
administrateurs et des personnes habilitées à représenter l’AISBL.
C. Nullité
Le CSA énumère de manière limitative les causes de nullité des AISBL :
1° lorsque le nombre de fondateurs valablement engagés est inférieur à deux ;
2° lorsque l’acte constitutif n’est pas établi en la forme requise ;
3° lorsque les statuts ne contiennent pas les mentions relatives à sa dénomination, la région dans
laquelle son siège est établi, son but et son objet ;
4° lorsque le but ou l’objet en vue duquel elle est constituée, ou son but ou objet réel, contrevient à
la loi ou à l’ordre public ;
5° lorsqu’elle a été constituée dans le but de fournir à ses membres, à ses membres adhérents, aux
membres de son organe d’administration ou à toute autre personne, sauf dans le but désintéressé
déterminé par les statuts, des avantages patrimoniaux directs ou indirects 840.
MEMBRES
1. NOMBRE ET QUALITÉ
Il suffit de deux membres pour constituer une AISBL841.
2. CATÉGORIES
Comme les ASBL, les AISBL peuvent avoir, outre des membres effectifs, des membres adhérents, et
plus généralement créer diverses catégories de membres. Le CSA ne comporte aucune disposition à
cet égard.
3. ADMISSION ET SORTIE
Les statuts doivent prévoir les conditions et les formalités d’admission et de sortie des membres842.
Le CSA ne comporte aucune disposition à cet égard.
267
Fanny Streveler MA1 DROIT
Les statuts peuvent prévoir que les membres peuvent être exclus et déterminer quel est l’organe
compétent à cet égard mais en toute hypothèse, l’AISBL doit respecter les droits de la défense du
membre qu’elle se propose d’exclure. En l’absence d’une clause d’exclusion dans les statuts, elle ne
peut pas exclure des membres.
GOUVERNANCE
1. ORGANE D’ADMINISTRATION
Alors que dans les sociétés, les ASBL et les fondations, l’organe d’administration est l’organe
souverain, ce n’est pas nécessairement le cas dans les AISBL : ce sont les statuts qui déterminent
quel est l’organe souverain.
Le CSA renvoie aux statuts pour la forme, la composition, le fonctionnement et les pouvoirs de
l’organe d’administration ainsi que le mode de désignation des personnes qui ont le pouvoir de
représenter l’AISBL843. De même, ce sont les statuts qui réglementent, le cas échéant, la procédure
à suivre en cas de conflit d’intérêts.
2. ASSEMBLÉE GÉNÉRALE
Les statuts règlent librement les modalités de convocation et de réunion de l’assemblée générale
ainsi que ses pouvoirs, sous réserve des règles impératives suivantes :
- Seule l’assemblée générale est compétente pour 1° la nomination et la révocation du
commissaire et la fixation de sa rémunération ; 2° l’approbation du budget et des comptes
annuels ; 3° tous les autres cas où la loi ou les statuts l’exigent844.
- L’assemblée générale doit en tout cas pouvoir être convoquée à la requête d’un cinquième des
membres845.
- Au moins une assemblée générale doit se tenir chaque année, pour approuver le budget et les
comptes846.
Toutefois, alors qu’une AISBL doit être constituée par acte authentique et être reconnue par arrêté
royal, ses statuts peuvent être modifiés par acte sous seing privé, à l’exception des mentions
suivantes dont la modification requiert un acte authentique : les attributions, le mode de
convocation et le mode de décision de l’assemblée générale, ainsi que les conditions dans
lesquelles ses résolutions sont portées à la connaissance des membres ; les conditions de
268
Fanny Streveler MA1 DROIT
Par ailleurs, la modification du but doit être approuvée par arrêté royal849.
269
Fanny Streveler MA1 DROIT
CHAPITRE 4 :
FONDATIONS
270
Fanny Streveler MA1 DROIT
Il existe deux types de fondations : les fondations privées et les fondations d’utilité publique.
Toutes les deux sont dépourvues de membres et doivent poursuivre un but désintéressé850.
La fondation d’utilité publique est celle qui tend à la réalisation d’une œuvre à caractère
philanthropique, philosophique, religieux, scientifique, artistique, pédagogique ou culturel.
Une fondation privée est une fondation qui n’est pas reconnue comme étant d’utilité publique851.
Elles sont soumises aux mêmes règles, sauf les exigences particulières en ce qui concerne le but de
la fondation d’utilité publique ainsi que le processus de constitution et de modification des statuts.
CONSTITUTION
« Une fondation est une personne morale dépourvue de membres, constituée par un acte juridique
par une ou plusieurs personnes, dénommés fondateurs. Son patrimoine est affecté à la poursuite
d’un but désintéressé dans le cadre de l’exercice d’une ou plusieurs activités déterminées qui
constituent son objet. Elle ne peut distribuer ni procurer, directement ou indirectement, un
quelconque avantage patrimonial à ses fondateurs, ses administrateurs ni à toute autre personne,
sauf dans le but désintéressé déterminé par les statuts »852.
1. CONDITIONS DE FOND
Le CSA fixe deux conditions pour la constitution d’une fondation.
D’une part, son but doit être désintéressé (et en outre, s’il s’agit d’une fondation d’utilité publique,
tendre à la réalisation d’une œuvre à caractère philanthropique, philosophique, religieux,
scientifique, artistique, pédagogique ou culturel).
C’est à tort que le CSA utilise le terme « patrimoine », qui vise un ensemble de biens et
d’obligations : ce sont des biens qui doivent être affectés à la fondation.
S’il y a plusieurs fondateurs, il suffit que l’un d’eux affecte des biens à la fondation : la loi ne
requiert pas que chaque fondateur affecte des biens.
Il peut s’agir d’une somme d’argent, d’un immeuble, d’une collection d’œuvres d’art, d’un
portefeuille de titres,...
271
Fanny Streveler MA1 DROIT
Par l’acte d’affectation, le fondateur met un bien à la disposition de la fondation sans recevoir
aucune contrepartie. Cet acte fait partie du processus de constitution et s’analyse en un acte sui
generis (cession à titre gratuit) (supra).
2. FORMALITÉS
Les fondations privées et les fondations d’utilité publique doivent être constituées par acte
authentique853.
Pour le surplus, le processus de constitution des fondations privées est analogue à celui des ASBL
tandis que le processus de constitution des fondations d’utilité publique est analogue à celui des
AISBL.
3. NULLITÉ
La nullité d’une fondation ne peut être prononcée que dans les cas suivants :
1° lorsque l’acte constitutif n’est pas établi en la forme requise ;
2° lorsque les statuts ne contiennent pas les mentions visées à l’article 2:11, § 2, 2° (dénomination
et région dans laquelle le siège est établi) et 3° (but et activités) ;
3° lorsque le but ou l’objet en vue duquel elle est constituée, ou son but ou objet réel, contrevient à
la loi ou à l’ordre public ;
4° lorsqu’elle a été constituée dans le but de fournir à ses fondateurs, aux membres de son organe
d’administration ou à toute autre personne, sauf dans le but désintéressé déterminé par les statuts,
des avantages patrimoniaux directs ou indirects854.
GOUVERNANCE
1. ORGANE D’ADMINISTRATION
La fondation est administrée par un ou plusieurs administrateurs, qui sont des personnes physiques
ou morales. S’il y a plusieurs administrateurs, ils exercent leur mandat de manière collégiale855.
A. Pouvoirs
L’organe d’administration a le pouvoir d’accomplir tous les actes nécessaires ou utiles à la
réalisation de l’objet de la fondation.
C’est notamment lui qui nomme le commissaire856, établit le budget857 et arrête les comptes.
Les administrateurs peuvent convenir de la répartition des tâches entre eux. Une telle répartition
des tâches n’est pas opposable aux tiers, même si elle est publiée858.
272
Fanny Streveler MA1 DROIT
B. Représentation de la fondation
L’organe d’administration représente la fondation, dans les actes et en justice.
Les statuts peuvent prévoir que la fondation est représentée par un ou plusieurs administrateurs,
agissant seuls ou conjointement. Cette clause est opposable aux tiers si elle est publiée.
Les statuts peuvent apporter des restrictions à ce pouvoir de représentation. Une telle limitation
n’est pas opposable aux tiers, même si elle est publiée. Il en va de même pour une répartition des
tâches entre les administrateurs ayant le pouvoir de représentation859.
C. Conflits d’intérêts
Lorsque l’organe d’administration est appelé à prendre une décision ou à se prononcer sur une
opération relevant de sa compétence à propos de laquelle un administrateur a un intérêt direct ou
indirect de nature patrimoniale qui est opposé à l’intérêt de la fondation, cet administrateur doit en
informer les autres administrateurs avant que l’organe d’administration ne prenne une décision.
Sa déclaration et ses explications sur la nature de cet intérêt opposé doivent figurer dans le procès-
verbal de la réunion de l’organe d’administration qui doit prendre cette décision. Il n’est pas permis
à l’organe d’administration de déléguer cette décision.
L’administrateur ayant un conflit d’intérêts ne peut prendre part aux délibérations de l’organe
d’administration concernant ces décisions ou ces opérations, ni prendre part au vote sur ce
point860.
Lorsqu’il n’y a qu’un administrateur et que celui-ci a un conflit d’intérêts, ou si tous les
administrateurs ont un conflit d’intérêts, ils peuvent eux-mêmes prendre la décision ou accomplir
l’opération861.
Si la fondation a nommé un commissaire, elle doit lui communiquer ce procès-verbal. Dans son
rapport, le commissaire doit évaluer les conséquences patrimoniales pour la fondation des
décisions de l’organe d’administration pour lesquelles il existe un intérêt opposé862.
Ces dispositions ne s’appliquent pas lorsque les décisions de l’organe d’administration concernent
des opérations habituelles conclues dans des conditions et sous les garanties normales du marché
pour des opérations de même nature863.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
2. ADMINISTRATEURS
A. Nomination
Les statuts doivent indiquer le mode de nomination des administrateurs865.
Cette clause est d’autant plus importante que la fondation n’a pas d’assemblée générale.
Les premiers administrateurs sont désignés, soit dans les statuts eux-mêmes, soit dans l’acte
constitutif de la fondation, mais les statuts doivent nécessairement prévoir des règles pour la
nomination de leurs successeurs.
Les statuts disposent de toute liberté à cet égard ; les mécanismes les plus fréquents sont les
suivants :
- cooptation par l’organe d'administration de la fondation ;
- en cas de mandats à durée déterminée (expirant chaque fois à une année d’intervalle),
cooptation d’un nouvel administrateur tous les ans ;
- désignation par l’organe d'administration de la société qui a constitué la fondation ;
- désignation par le fondateur ou ses héritiers ;
- désignation par un tiers, par exemple une association ou une fondation active dans le même domaine
ou un expert ;
- fixation dans les statuts de conditions de qualité libellées de telle manière que certaines
personnes deviennent administrateurs de plein droit ; ce type de clause est à rédiger avec
prudence car les personnes concernées pourraient refuser ;
- …
Le cas échéant, les statuts peuvent imposer de choisir les administrateurs dans des « catégories »
spécifiques (telle branche de la famille, telle profession,...).
En principe, tout administrateur peut démissionner à tout moment, pour autant qu’il ne le fasse pas
à contretemps. Les statuts peuvent cependant imposer un préavis.
274
Fanny Streveler MA1 DROIT
Les statuts peuvent prévoir que les administrateurs sont révocables ad nutum ou uniquement pour
de justes motifs, énumérés ou non. Ils peuvent également prévoir que tous les administrateurs ou
certains d’entre eux sont irrévocables, même si ce n’est pas toujours opportun.
Si les statuts sont muets sur la question, le pouvoir de révoquer les administrateurs appartient à
l’organe d'administration en sa qualité d’organe souverain, titulaire des pouvoirs résiduaires.
En toute hypothèse, le tribunal de l’entreprise dans le ressort duquel la fondation a son siège peut
prononcer la révocation des administrateurs qui font preuve de négligence manifeste, qui ne
remplissent pas leurs obligations légales ou statutaires, ou qui disposent des biens de la fondation
contrairement à leur destination ou à des fins contraires aux statuts, à la loi ou à l’ordre public.
Dans ce cas, le tribunal doit nommer les nouveaux administrateurs en conformité avec les
statuts867.
3. GESTION JOURNALIÈRE
L’organe d’administration peut charger une ou plusieurs personnes, qui agissent chacune
individuellement, conjointement ou collégialement, de la gestion journalière de la fondation, ainsi
que de la représentation de la fondation en ce qui concerne cette administration.
Si le maintien des statuts sans modification aurait des conséquences que le fondateur n'a
raisonnablement pas pu vouloir au moment de la création, et que les personnes habilitées à les
modifier négligent de le faire, le tribunal de l'entreprise peut, à la demande d'un administrateur au
moins ou à la requête du ministère public, modifier les statuts. Dans ce cadre, il veille à s'écarter le
moins possible des statuts existants870.
275
Fanny Streveler MA1 DROIT
PARTIE 4 –
OPERATIONS
EXCEPTION-
NELLES
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Fanny Streveler MA1 DROIT
CHAPITRE 1 :
DISSOLUTION ET
LIQUIDATION
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CAUSES DE DISSOLUTION
871 CSA, art. 2:70, 1° pour les sociétés et art. 2:109, 1° pour les associations.
872 CSA, art. 2:70, 2° pour les sociétés et art. 2:109, 2° pour les associations.
873 CSA, art. 4:16.
874 CDE, art. XX.135, § 2.
875 CSA, art. 2:70, 3° pour les sociétés et 2:109, 3° pour les associations.
876 CSA, art. 2:73.
877 CSA, art. 2:74.
878 CSA, art. 7:229.
879 CSA, art. 6:127.
880 CSA, art. 6:126.
881 CSA, art. 8:7, al. 1 et 2.
882 CSA, art. 2:113.
883 CSA, art. 2:114.
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Seul le tribunal peut prononcer la dissolution d’une fondation : pour celles-ci, il n’existe pas de
causes de dissolution de plein droit et l’organe d’administration ne peut pas mettre fin à la
fondation.
L’assemblée générale doit désigner un ou plusieurs liquidateurs mais cette décision peut être prise
à la majorité simple885.
L’absence d’autres formalités (comparer avec le régime des autres sociétés et des grandes
associations ; infra) s’explique, pour les sociétés simples, les SNC et les SComm, par le fait que le
législateur a estimé que leurs créanciers étaient suffisamment protégés par la responsabilité
illimitée des associés, des associés en nom collectif et commandités et, pour les petites
associations, par le fait que le législateur a estimé qu’il n’était pas opportun de leur imposer des
frais supplémentaires.
Toutefois, les SNC, les SComm et les petites associations qui veulent se dissoudre et se liquider en
un seul acte doivent accomplir certaines formalités supplémentaires (infra).
La société peut écarter cette faculté en prévoyant dans ses statuts que tout associé peut
démissionner887.
884 Pour les AISBL, il s’agit de l’organe désigné par les statuts.
885 CSA, art. 2:83 et 2:118, § 2.
886 CSA, art. 4:17, § 1er.
887 CSA, art. 4:19.
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Il a étendu ces règles aux grandes associations (celles qui doivent désigner un commissaire).
Formalités préalables :
La proposition de dissolution des SRL, SC, SA, SE et SCE ainsi que des grandes associations doit faire
l’objet d’un rapport justificatif établi par l’organe d’administration et annoncé dans l’ordre du jour
de l’assemblée générale appelée à statuer.
L’organe d’administration doit joindre à ce rapport un état résumant la situation active et passive
de la société, arrêté à une date ne remontant pas à plus de trois mois. Sauf dérogation motivée, il
doit établir cet état conformément aux règles d’évaluation pour l’hypothèse de la discontinuité des
activités.
Une copie de ces rapports et de cet état résumant la situation active et passive doit être adressée
aux actionnaires ou aux membres 889 en même temps que la convocation.
Le CSA étend l’application de ces dispositions aux SNC et SComm si elles souhaitent recourir à la
procédure de dissolution-liquidation en un seul acte891.
Acte de dissolution :
S’analysant en une modification des statuts, la décision de l’assemblée générale de dissoudre la
société doit être prise dans les formes requises pour la modification des statuts et, s’il s’agit d’une
SRL, SC, SA, SE ou SCE, être constatée par acte authentique.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
Dans les sociétés, « avant de dresser l’acte authentique de la décision de dissolution de la société,
le notaire doit vérifier et attester l’existence et la légalité externe des actes et formalités incombant
(...) à la société auprès de laquelle il instrumente »893, c’est-à-dire de la rédaction du rapport
justificatif de l’organe d’administration accompagné de l’état résumant la situation active et passive
et du rapport du commissaire, du réviseur d’entreprise ou de l’expert-comptable externe sur cet
état, ainsi que de l’annonce de ces rapports dans l’ordre du jour de l’assemblée générale appelée à
statuer sur la dissolution.
Le notaire doit donc refuser de recevoir l’acte si ces rapports n’ont pas été établis ou n’ont pas été
communiqués aux actionnaires.
L’assemblée générale doit, d’une part, prononcer la dissolution et, d’autre part, nommer un ou
plusieurs liquidateurs, sous réserve de la dissolution-liquidation en un seul acte (infra).
L’assemblée générale nomme les liquidateurs à la majorité simple, sauf disposition contraire des
statuts.
Modification de la durée :
En principe, rien n’interdit à une société ou une association à durée illimitée de modifier ses statuts
pour limiter sa durée.
Lorsqu’une SRL, SC, SA, SE, SCE ou une grande association veut procéder à une telle modification
des statuts en fixant une durée très limitée, la prudence est de mise : ne tente-t-elle pas de se
soustraire à ces dispositions, ce qui constituerait une fraude ? Le cas échéant, le notaire devra
refuser son ministère.
Sauf disposition statutaire contraire, les SRL, les SC, les SA, les SE et les SCE ainsi que les
associations sont constituées pour une durée illimitée. Lorsqu’une durée est déterminée,
l’assemblée générale peut décider la prorogation pour une durée limitée ou illimitée. Cette décision
requiert une modification des statuts895.
Lorsque la société ou l’association est à durée limitée, celle-ci commence à courir à partir de la
conclusion de l’acte, indépendamment de la date à laquelle elle a acquis la personnalité morale,
sous réserve d’une règle contraire dans les statuts.
La stipulation d’une durée déterminée n’empêche pas la société ou l’association de contracter des
engagements pour une durée supérieure : elle les exécutera le cas échéant pendant sa période de
liquidation.
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La seule arrivée du terme entraîne la dissolution de la société ou de l’association si elle n’a pas été
prorogée avant, sans qu’il soit possible d’y remédier a posteriori.
Les statuts de la société peuvent prévoit que le décès d’un associé n’entraîne pas la dissolution de
la société, mais qu’elle se poursuit avec les héritiers et légataires de l’associé décédé (clause de
continuation avec les héritiers), soit qu’elle se poursuit avec les associés survivants (clause de
continuation avec les associés restants)898.
Les statuts peuvent également prévoir une clause de continuation avec les associés restants en cas
d’incapacité, de faillite ou de liquidation d’un associé.
3. DISSOLUTION JUDICIAIRE
A. Sociétés
Causes :
Justes motifs :
Pour rappel, tout actionnaire ou associé peut demander au président du tribunal siégeant comme
en référé la dissolution de la société pour justes motifs899.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
A défaut, et au plus tôt 7 mois après la clôture de l’exercice comptable, tout intéressé ou le
ministère public peut assigner la société et demander au tribunal de l’entreprise de prononcer sa
dissolution. Le tribunal doit accorder un délai de régularisation de 3 mois au moins901.
Cette cause de dissolution vise essentiellement les sociétés en sommeil ou laissées à l’abandon.
Si l’actif net est réduit à un montant inférieur à 61.500 EUR (soit le montant minimum du capital
pour une SA), tout intéressé ou le ministère public peut demander la dissolution judiciaire de la
société. Le tribunal peut accorder un délai de régularisation à la société902.
Il n’y a pas d’équivalent de cette disposition pour les autres sociétés puisque la SA est la seule
société à avoir un capital.
Absence d’agrément d’une société qui se présente comme une SC agréée ou comme une SC agréée
comme ES :
A la requête de tout intéressé, du ministère public ou du Ministre de l’Economie, le tribunal peut
prononcer la dissolution d’une société qui se présente comme une SC agréée bien qu’elle ne soit
pas agréée ou d’une SC agréée comme entreprise sociale, bien qu’elle ne soit pas agréée905. Le
tribunal peut accorder à la société un délai en vue de régulariser sa situation906.
B. Associations
Causes :
Incapacité de remplir ses engagements :
Cette cause de dissolution907 a une origine historique : avant l’entrée en vigueur de la loi du 11 août
2017 portant insertion du Livre XX "Insolvabilité des entreprises" dans le CDE, les associations ne
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Fanny Streveler MA1 DROIT
pouvaient pas être déclarées en faillite. L’action en dissolution des associations insolvables, prévue
par la loi du 27 juin 1921 était un équivalent.
Le CSA a repris cette cause de dissolution bien que désormais les associations puissent être
déclarées en faillite.
Il ne semble pas très cohérent d’avoir maintenu cette cause de dissolution judiciaire pour les
associations, sans l’avoir étendue aux sociétés.
Affectation du patrimoine ou des revenus à un autre but que le but statutaire ou distribution
d’avantages patrimoniaux :
Le CSA prévoit également comme causes de dissolution l’affectation du patrimoine ou des revenus
à un autre but que le but statutaire909 et la distribution d’avantages patrimoniaux910, mais il s’agit là
d’actes qui constituent une violation du CSA ou des statuts de sorte que ces causes de dissolution
font double emploi.
Conformément au droit commun, le demandeur doit justifier d’un intérêt né et actuel, personnel et
légitime pour poursuivre la dissolution, qui doit être nécessaire et proportionnel à l’atteinte à ses
droits, et sa demande ne peut pas constituer un abus de droit, même si la disposition sur laquelle il
fonde sa demande est d’ordre public.
Ce principe explique que l’action en dissolution est plus facilement reconnue aux associés,
actionnaires et membres qu’aux tiers. Les premiers bénéficient en quelque sorte d’une
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Fanny Streveler MA1 DROIT
présomption d’intérêt personnel et légitime à agir mais ils ne peuvent se dispenser de démontrer
leur intérêt en cas de contestation.
Le seul souhait d’éliminer une entreprise du marché ne crée pas, en soi, un intérêt légitime mais un
concurrent peut avoir un intérêt légitime à demander la dissolution d’une société qui méconnaît les
règles du jeu.
Peuvent être intéressés, outre les associés, actionnaires et membres, les administrateurs, les
créanciers, et également, dans certains cas, les débiteurs et les concurrents si le défendeur ne
respecte pas les règles du jeu.
Tribunal compétent :
Le tribunal compétent pour prononcer la dissolution est toujours le tribunal de l’entreprise du siège
de la société ou de l’association, sous réserve qu’il s’agit du président siégeant comme en référé
pour l’action en dissolution d’une société pour justes motifs (ce qui s’explique par le fait que, la
société ne pouvant généralement plus fonctionner, l’action est urgente).
Régularisation :
Les sociétés et les associations peuvent régulariser leur situation entre l’assignation et la clôture
des débats. En effet, le tribunal doit apprécier l’existence du motif de dissolution au moment où il
prononce sa décision.
En outre, sauf en cas d’action en dissolution pour justes motifs, le tribunal peut ou doit accorder un
délai aux sociétés pour se régulariser.
D. Fondations
Compétence exclusive du tribunal :
Seul le tribunal de l’entreprise du siège d’une fondation peut prononcer sa dissolution. Même le
fondateur, s’il est encore en vie, ne peut pas unilatéralement dissoudre sa fondation. Même
l’arrivée du terme n’emporte pas la dissolution de plein droit de la fondation.
Il existe une exception : la dissolution de plein droit en cas de fusion ou de scission (infra).
Motifs :
Cette compétence exclusive s’explique par une volonté de contrôler les fondations, qui n’ont ni
membres ni assemblée générale.
Causes :
Les causes de dissolution judiciaire recoupent dès lors les causes de dissolution de plein droit et
judiciaires des sociétés et des associations : incapacité de poursuivre son but ou son objet ;
violation de l’interdiction de distribuer ou procurer un avantage patrimonial ; violation du CSA ou
de l’ordre public ; violation grave des statuts ; défaut de dépôt des comptes annuels ; réalisation du
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but ou de l’objet ; expiration du terme ; réalisation d’une condition résolutoire expresse prévue par
les statuts912.
Procédure :
Le fondateur ou ses ayants droit, un ou plusieurs administrateurs, tout tiers intéressé (supra) et le
ministère public peuvent demander la dissolution judiciaire d’une fondation.
Ce sera en principe l’organe d’administration qui demandera la dissolution dans les cas qui
entraînent, pour les sociétés et les associations, une dissolution de plein droit.
LIQUIDATION
Il ne sera traité ici que de la liquidation des sociétés et associations dotées de la personnalité
morale.
La liquidation des sociétés simples n’est quasi-pas réglementée par le CSA, sous réserve qu’un ou
plusieurs liquidateurs doivent être désignés et que le « patrimoine » de la société est censé
subsister pour les besoins de la liquidation jusqu’à la clôture de celle-ci913.
1. EFFET DE LA DISSOLUTION
La dissolution fait entrer la société, l’association ou la fondation dans une phase de liquidation, sous
réserve des hypothèses suivantes :
(1) dissolution et liquidation en un seul acte ;
(2) dissolution sans liquidation (fusions et scissions) ;
(3) dissolution avec clôture immédiate de la liquidation (clôture de la faillite et, le cas échéant,
dissolution judiciaire des sociétés, associations et fondations qui restent en défaut de déposer leurs
comptes annuels).
2. PHASE DE LIQUIDATION
A. Distinction
Pour les SRL, les SC, les SA, les SE et les SCE, ainsi que pour les grandes associations, le système de
liquidation est fondé sur une distinction entre les liquidations déficitaires, soumises à un double
contrôle par le président du tribunal de l’entreprise (approbation de la nomination des liquidateurs
et du plan de répartition) et les liquidations bénéficiaires, qui n’y sont pas soumises.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
Le but du législateur est de réserver au président du tribunal de l’entreprise les liquidations les plus
susceptibles d’avoir un impact sur les droits des créanciers, et de ne pas l’encombrer avec les
liquidations bénéficiaires.
Ce système repose sur la confiance faite aux sociétés et associations ; il y a cependant un risque que
les sociétés et associations moins soucieuses des droits des créanciers trafiquent leur comptabilité
pour faire apparaître la liquidation comme bénéficiaire.
Si, en cours de liquidation, la liquidation qui, de prime abord, apparaissait bénéficiaire, s’avère
déficitaire, la nomination du liquidateur ne devrait pas être remise en cause, mais le liquidateur
devra soumettre au président du tribunal le plan de répartition.
Ne peuvent être désignés comme liquidateurs ni les personnes qui ont été condamnées pour
certaines infractions pénales (infraction aux articles 489 à 490bis du Code pénal ou pour vol, faux,
concussion, escroquerie ou abus de confiance) ni les dépositaires, tuteurs, administrateurs ou
comptables, qui n'ont pas rendu et soldé leur compte en temps utile (durée de cette exclusion : dix
ans)915.
Les personnes qui ont été déclarées en faillite sans avoir obtenu la réhabilitation et celles qui ont
encouru une peine d'emprisonnement, même avec sursis, pour l'une des infractions mentionnées à
l'article 1er de l'arrêté royal n°22 du 24 octobre 1934, pour une infraction au livre III du Code de
droit économique (règles en matière de comptabilité), ou pour une infraction à la législation fiscale,
ne peuvent pas non plus être nommées comme liquidateurs, sauf homologation par le président du
tribunal de l’entreprise917.
Si le liquidateur est une personne morale, celle-ci doit désigner un représentant permanent918.
Pour le surplus, il faut opérer une distinction selon que la liquidation apparaisse de prime abord
comme bénéficiaire ou déficitaire.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
Dans les SRL, SC, SA, SE et SCE ainsi que dans les grandes associations, lorsqu’il résulte de l’état
résumant la situation active et passive que tous les créanciers ne pourront pas être intégralement
remboursés, le CSA impose de soumettre la nomination des liquidateurs au président du tribunal
de l’entreprise du siège de la société ou de l’association le jour de la dissolution pour
confirmation919.
Pour les sociétés, cette confirmation n’est pas requise s’il résulte de cet état que la société n’a de
dettes qu’envers ses actionnaires et que tous les actionnaires qui sont créanciers de la société
confirment par écrit leur accord sur cette nomination920.
La raison pour laquelle le CSA n’a pas prévu pareille exonération pour les associations n’est pas
claire. S’agit-il d’un oubli ou le législateur a-t-il considéré une telle règle inutile dans les associations
car leurs membres leur avancent plus rarement des fonds ?
Le président du tribunal de l’entreprise est saisi par une requête unilatérale de la société ou de
l’association, du procureur du Roi ou de tout tiers intéressé921. Il statue au plus tard dans les 5 jours
ouvrables du dépôt de la requête922.
Il n'accorde confirmation de la nomination qu'après avoir vérifié que les liquidateurs offrent toutes
les garanties de compétence et d’intégrité923 pour l'exercice de leur mandat.
Cette disposition ne confère aux administrateurs et gérants qu’une compétence passive en faveur
des tiers afin de permettre à ceux-ci de continuer valablement à introduire des actions contre la
société. Ces administrateurs et gérants ne disposent pas de tous les pouvoirs de véritables
liquidateurs et ils ne peuvent pas invoquer cette qualité pour agir directement.
Les auteurs de l’amendement à la base de cette disposition ont donné les explications suivantes :
« Il va de soi que les liquidateurs de plein droit sont compétents pour convoquer l’assemblée
générale après la dissolution (de plein droit), en vue de la nomination d’un liquidateur. Ils peuvent
contester une décision judiciaire de refus de confirmation ou d’homologation de liquidateurs
nommés. Ils sont également compétents pour former opposition à une dissolution judiciaire avec
clôture immédiate de la liquidation. Ils sont compétents en outre pour convoquer l’assemblée
générale en vue de l’approbation des comptes annuels concernant l’exercice précédant l’année de
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Fanny Streveler MA1 DROIT
dissolution si ce n’est pas encore fait et l’exercice jusqu’à la dissolution et au dépôt de ces comptes
annuels (...). En d’autres termes, les liquidateurs de plein droit n’ont pas le pouvoir, comme un
liquidateur nommé ou désigné, de liquider la société en vendant et en distribuant des actifs ».
La solution est différente dans les associations : le tribunal nomme les liquidateurs sur requête
motivée d’un membre, d’un tiers intéressé ou du ministère public925.
Dans les sociétés et les associations, les liquidateurs ont en principe le pouvoir d’accomplir tous les
actes nécessaires ou utiles à la liquidation, sous les réserves suivantes :
- Les statuts ou la décision de nomination peuvent limiter les pouvoirs des liquidateurs. Sauf
dans les SNC et les SComm, cette limitation n’est pas opposable aux tiers même si elle est
publiée927.
- Nonobstant toute disposition statutaire contraire, le liquidateur ne peut accomplir certains
actes qu’avec l’autorisation de l’assemblée générale, accordée en principe à la majorité
simple : poursuivre les activités ; contracter des crédits ; hypothéquer ou donner en gage les
biens ; vendre les immeubles928 929.
Pour les fondations, le CSA ne précise rien quant aux pouvoirs des liquidateurs, ce qui s’explique
par le fait qu’ils sont toujours désignés par le tribunal, qui détermine leurs pouvoirs.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
En outre, s’il résulte des comptes que tous les créanciers ne pourront pas être payés, le liquidateur
soumet par requête unilatérale le plan de répartition de l'actif entre les différentes catégories de
créanciers pour accord au tribunal 931. Cette obligation ne s’applique pas aux sociétés lorsque les
créanciers qui n’ont pas été entièrement remboursés sont des actionnaires et que ces actionnaires
approuvent le plan de répartition par écrit et renoncent à soumettre celui-ci au tribunal932.
G. Clôture de la liquidation
L'assemblée générale (qui ne doit pas se tenir devant notaire) entend le cas échéant le rapport du
commissaire, se prononce sur l’approbation des comptes et statue sur la décharge des liquidateurs
et la clôture de la liquidation934.
Pour les fondations, lorsque la liquidation est terminée, les liquidateurs doivent faire rapport au
tribunal et lui soumettre une situation comptable ainsi que la proposition d’affectation de l’actif. Le
tribunal autorise l’affectation des biens dans le respect des statuts et prononce la clôture de la
liquidation936.
Passifs oubliés :
Pour les sociétés, s’il reste des dettes qui n’ont pas été payées au plus tard lors de la clôture de la
liquidation et pour lesquelles un montant suffisant n’a pas été consigné, les actionnaires des SRL, SC
et SA en sont responsables, sans solidarité entre eux, s’ils en connaissaient l’existence ou ne
pouvaient les ignorer compte tenu des circonstances. La responsabilité de chaque actionnaire est
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Fanny Streveler MA1 DROIT
limitée au montant égal à la somme de l’apport qui lui est remboursé et de sa part dans le solde de
liquidation reçue avant ou lors de la clôture de la liquidation de la société938.
Il n’existe pas de dispositions analogues pour les associations car par définition les membres ne
peuvent rien recevoir dans le cadre de la liquidation.
Les SNC et les SComm peuvent également se dissoudre et se liquider en un seul acte mais à
condition de se conformer aux règles en matière de dissolution volontaire applicables aux SRL, SC,
SA, SE et SCE943. L’assemblée générale doit se prononcer en faveur de la dissolution et liquidation
en un seul acte à l’unanimité de tous les associés.
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B. Actifs restants
Sociétés :
A la suite de la clôture de la liquidation, les associés ou actionnaires deviennent, de plein droit
chacun pour leur part, propriétaires indivis de tous les actifs de la société même si ceux-ci ne sont
pas connus au moment de la clôture de la liquidation944.
Associations :
Tous les actifs doivent nécessairement être affectés conformément aux statuts ou à la décision de
l’assemblée générale sans jamais pouvoir être distribués aux membres ou aux administrateurs945.
C. Passifs oubliés
Dans les SRL, SC et SA, s’il reste des dettes de la société dissoute qui n’ont pas été payées au plus
tard lors de la clôture de la liquidation et pour lesquelles un montant suffisant n’a pas été consigné,
les actionnaires en sont responsables, sans solidarité entre eux, indépendamment du fait qu’ils en
aient ou non eu ou dû avoir connaissance compte tenu des circonstances, à concurrence du
montant qui leur a été payé dans le cadre de la liquidation946.
Leur responsabilité est donc aggravée par rapport à celle des actionnaires des sociétés qui suivent
une procédure de liquidation, parce que le recours à la procédure accélérée offre en principe moins
de garanties aux créanciers.
S’ils sont de bonne foi, les actionnaires peuvent cependant exercer un recours contre les derniers
membres de l’organe d’administration en fonction.
La responsabilité de chaque actionnaire à l’égard des tiers est limitée au montant égal à la somme
de l’apport qui lui a été remboursé et de sa part dans le solde de liquidation reçue avant ou lors de
la clôture de la liquidation de la société947.
Cette disposition ne s’applique pas aux associés des SNC et des SComm qui décideraient la
dissolution-liquidation en un seul acte puisque de toute manière ils engagent leur responsabilité
personnelle pour toutes les dettes de la société.
Elle ne s’applique pas non plus aux membres des associations, mais pour une autre raison : par
définition, ils ne peuvent rien recevoir dans le cadre de la liquidation.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
Ce sera notamment le cas s’il n’y a rien à liquider (parce que la société est devenue une coquille
vide, parce que la fondation a apporté tout son actif à une autre fondation,...).
La clôture de la faillite d’une société ou d’une association entraîne également sa dissolution avec
clôture immédiate de sa liquidation.
5. RÉOUVERTURE DE LA LIQUIDATION
A. Conditions
S’il s’avère, après la clôture de la liquidation, qu’un ou plusieurs actifs ont été oubliés, tout
créancier qui n’a pas recouvré l’intégralité de sa créance peut demander la réouverture de la
liquidation en intentant une action en réouverture de la liquidation contre les derniers liquidateurs
en fonction.
Le tribunal n’ordonne la réouverture de la liquidation que si la valeur de l’actif oublié dépasse les
frais de réouverture949.
B. Effet
Si le tribunal rouvre la liquidation, la société ou l’association recouvre la personnalité juridique et
devient de plein droit propriétaire de l’actif oublié. Les derniers liquidateurs en fonction recouvrent
cette qualité, sous réserve de certaines exceptions950.
293
Fanny Streveler MA1 DROIT
CHAPITRE 2 :
TRANSFORMAT-
ION
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Fanny Streveler MA1 DROIT
La transformation d’une personne morale est la modification de sa forme légale. Elle peut se
concevoir soit entre sociétés (une société constituée selon une forme déterminée adopte une autre
forme), soit entre des formes différentes de personnes morales (par exemple, une société se
transforme en ASBL).
La transformation n’a évidemment d’intérêt que si la personnalité morale est maintenue (par
opposition à l’opération consistant en la dissolution d’une personne morale suivie par un apport
par cette personne morale ou ses associés à une nouvelle personne morale).
La loi du 23 mars 2019 a multiplié et va multiplier les cas de transformation : une série de sociétés
souhaitent profiter des nouvelles opportunités offertes par cette loi ; les personnes morales dont la
forme légale est supprimée et les « fausses » sociétés coopératives doivent adopter une autre
forme légale avant le 1er janvier 2024.
Le CSA consacre le livre 14 à la transformation des sociétés, des associations et des fondations.
Par ailleurs, la loi du 23 mars 2019 prévoit à titre de disposition transitoire la transformation de
plein droit le 1er janvier 2024 des personnes morales dont elle supprime la forme légale et qui, à
cette date, n’auront pas été transformées en une autre personne morale, en la forme légale jugée
la plus proche958.
Enfin, en vertu des règlements européens applicables, une SA peut se transformer en SE, et vice-
versa, et une SC peut se transformer en SCE, et vice-versa.
En dehors de ces hypothèses, la transformation d’une personne morale en une personne morale
d’une autre forme entraîne sa dissolution et la création d’une nouvelle personne morale.
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Fanny Streveler MA1 DROIT
PRINCIPES GÉNÉRAUX
En général, la décision est prise au quorum de la moitié et à la majorité des quatre cinquièmes.
L’unanimité est cependant requise lorsque la forme de société en laquelle une société se
transforme est une société à responsabilité illimitée des associés : on ne peut augmenter les
engagements d’un associé sans son accord individuel ; la transformation d’une société dans laquelle
la responsabilité des associés est limitée à leur apport en société dans laquelle leur responsabilité
est illimitée accroît leurs engagements.
Alors qu’en matière d’actes de sociétés et d’associations, c’est en principe la forme de la société ou
de l’association et la nature de l’acte en cause qui déterminent si l’intervention du notaire est
requise, pour les opérations de transformation, c’est uniquement la nature de l’acte qui compte :
sous réserve d’une exception959, la transformation de n’importe quelle forme de société ou
d’association requiert un acte authentique.
Ainsi, si une SNC se transforme en SA, elle doit se doter de fonds suffisants pour atteindre le capital minimum.
3. SANCTIONS
Le non-respect de ces formalités est généralement sanctionné par la nullité de la transformation :
celle-ci ne produit aucun effet.
La personne morale dont la transformation a échoué subsiste dans sa forme ancienne, mais elle
s’expose à des sanctions si la transformation était imposée par les circonstances (diminution du
nombre d’associés sous le seuil minimum imposé par la loi, entrée de mineurs dans une SNC, perte
grave du capital par une SA,...).
296
Fanny Streveler MA1 DROIT
HYPOTHÈSES DE TRANSFORMATION
Une copie de ces rapports ainsi que le projet de modification aux statuts doivent être annexés à la
convocation des associés ou communiqués aux actionnaires964.
Dans les autres cas, le quorum de présence est de la moitié du capital ou, en l’absence de capital,
du nombre total d’actions967.
La majorité est de quatre cinquièmes968. Le CSA ne prévoit pas la neutralisation des abstentions,
alors que c’est devenu la règle pour toutes les modifications des statuts (en ce compris celle de
l’objet et des buts). Il s’agit manifestement d’un oubli.
« Nonobstant toute disposition contraire des statuts, les parts bénéficiaires donneront droit à une
voix par titre »969. Le cas échéant, s’il existe plusieurs classes de titres et si la transformation
960 Dans une SA avec une administration duale, il s’agit du conseil de surveillance (CSA, art. 14:1, § 2).
961 « Clôturé » et non « arrêté » : il faut se référer à la date des chiffres et non de l’établissement du document
contenant ces chiffres.
962 CSA, art. 14:3 et 14:5.
963 CSA, art. 14:4.
964 CSA, art. 14:6.
965 CSA, art. 14:7.
966 CSA, art. 14:8, § 4.
967 CSA, art. 14:8, § 1er, 1°.
968 CSA, art. 14:8, § 1er, 2°, a.
969 CSA, art. 14:8, § 2, al. 2.
297
Fanny Streveler MA1 DROIT
entraîne une modification de leurs droits respectifs, le quorum et la majorité doivent être réunis
dans chaque catégorie.
Sans énoncer explicitement cette règle, le CSA prévoit la responsabilité des associés des SNC, des
commandités des SComm ainsi que des membres de l’organe d’administration de toute autre
société qui se transforme pour la différence éventuelle entre l’actif net de la société après
transformation et le capital minimum requis 970.
Le cas échéant, la société qui souhaite se transformer en SA doit au préalable augmenter son actif.
En cas de transformation d’une SNC ou d’une SComm971 en une SA, une SE ou une SCE, le capital
après transformation ne pourra pas être supérieur à l’actif net tel qu’il résulte de cet état972.
Le CSA n’écarte pas expressément les dispositions qui imposent aux fondateurs de remettre au
notaire un plan financier. Sous l’empire du Code des sociétés (qui n’écartait pas non plus ces
dispositions), la doctrine s’accordait à considérer qu’il s’agissait d’un oubli du législateur et que ces
dispositions ne devaient pas être respectées car la transformation ne réalise pas d’apport par elle-
même. En toute hypothèse, comme les règles en matière de responsabilité des fondateurs ne
s’appliquent pas, l’absence de plan financier devrait n’avoir aucune conséquence.
E. Acte authentique
Sous réserve d’une exception (infra), toute transformation d’une société doit, à peine de nullité,
être constatée par un acte authentique, même lorsque la société qui se transforme n’a pas été
constituée par un acte authentique. Ainsi, la transformation d’une SNC en SA doit être constatée par un
acte authentique.
F. Statuts
Immédiatement après la décision de transformation, les statuts de la société sous sa forme
nouvelle, y compris les clauses qui modifieraient son objet, doivent être arrêtés aux mêmes
conditions de présence et de majorité que celles requises pour la transformation. A défaut, la
décision de transformation reste sans effet974.
298
Fanny Streveler MA1 DROIT
G. Dépôt et publication
L’acte de transformation et les statuts doivent être déposés et publiés aux annexes du Moniteur
belge simultanément. L’acte de transformation doit être publié en entier ; les statuts, par extrait975.
H. Exception
Comme les mineurs ne peuvent être associés en nom collectif, pour éviter la dissolution, les statuts
des SNC prévoient parfois qu’en cas de décès d’un associé laissant des héritiers mineurs, la société
continuera avec ses ayants droit, qui auront la qualité de commanditaires. Bien qu’il s’agisse d’une
transformation, le CSA écarte les articles 14:3 à 14:12 et donc notamment l’exigence d’un acte
authentique976.
I. Responsabilité des associés en nom collectif ou commandités pour les dettes sociales
En cas de transformation d’une SNC ou d’une SComm en une société dans laquelle la responsabilité
des associés est limitée, les associés en nom collectif ou les associés commandités restent tenus
solidairement et indéfiniment à l’égard des tiers, des engagements de la société antérieurs à
l’opposabilité aux tiers de l’acte de transformation 977.
En cas de transformation en SNC ou en SComm, les associés en nom collectif ou les associés
commandités répondent indéfiniment à l’égard des tiers, des engagements de la société antérieurs
à la transformation978 ; et forcément aussi des engagements ultérieurs.
L’associé démissionnaire doit notifier sa démission à la société 5 jours au moins avant la date de
l’assemblée. Sa démission n’aura d’effet que si la proposition de transformation est adoptée. Les
convocations à l’assemblée doivent reproduire ces règles979.
299
Fanny Streveler MA1 DROIT
B. Motifs
Depuis la réforme, les sociétés et les associations peuvent exercer les mêmes activités. La seule
différence qui subsiste concerne le but.
Il faudrait donc imaginer une société qui ne voudrait plus distribuer ou procurer d’avantages
patrimoniaux à ses associés ou actionnaires. L’hypothèse n’est pas théorique pour les SC agréées et
les SC agréées en qualité d’ES.
C. Procédure
La procédure est calquée sur celle de la transformation entre sociétés, sous réserve des points
suivants :
- l’organe d’administration de la société doit joindre à son rapport le projet de statuts de l’ASBL
ou de l’AISBL ;
- comme cette transformation prive les associés ou actionnaires du droit de participer aux
bénéfices, elle suppose leur accord unanime 980.
Il s’ensuit qu’une ASBL qui souhaite procurer ou distribuer un avantage patrimonial à ses membres
doit se transformer.
B. Procédure
La procédure est calquée sur celle de transformation entre sociétés, sous réserve des points
suivants :
- l’organe d’administration de l’ASBL doit joindre à son rapport le projet de statuts de la SC ;
- quorum de présence : au moins deux tiers des membres ; à défaut, une seconde convocation
est nécessaire et la nouvelle assemblée délibère et statue valablement, quel que soit le nombre
300
Fanny Streveler MA1 DROIT
de membres présents ou représentés ; la seconde assemblée ne peut pas être tenue dans les
15 jours après la première assemblée ;
- conditions de majorité : quatre cinquièmes des voix des membres présents ou représentés,
sans qu’il soit tenu compte des abstentions au numérateur ni au dénominateur ;
- l’actif net de l’ASBL tel qu’il résulte de l’état résumant la situation active et passive, doit être
identifié dans les comptes annuels de la SC et versé sur un compte de réserve indisponible ;
- ce montant ne peut faire l’objet, sous quelque forme que ce soit, d’un remboursement aux
actionnaires ou d’une distribution ;
- lors de la liquidation de la SC, après le règlement de tous les créanciers, le liquidateur donne à
ce montant une affectation qui se rapproche autant que possible du but assigné à la société981.
B. Motifs
La principale différence entre les ASBL et les AISBL tient à la dimension internationale du but de
l’AISBL. Une ASBL peut avoir une dimension internationale mais une AISBL doit avoir un but à
caractère international.
Il s’ensuit qu’une ASBL qui acquiert une dimension internationale peut vouloir se transformer en
AISBL (par exemple pour des raisons de prestige) et qu’une AISBL qui réduit son but pour le limiter à
des préoccupations nationales doit se transformer en ASBL.
C. Procédure
La procédure est calquée sur celle de la transformation entre sociétés (en particulier, la décision de
transformation requiert également un acte authentique), sous réserve des points suivants :
- l’organe d’administration doit joindre à son rapport le projet de statuts de l’AISBL ou de l’ASBL
en laquelle l’association sera transformée ;
- la décision est soumise aux conditions de quorum et de majorité requises pour la modification
de l’objet982, soit un quorum de présence des deux tiers et la majorité des quatre cinquièmes,
sous réserve de conditions plus sévères prévues par les statuts ;
- en cas de transformation d’une ASBL en AISBL, l’acte de transformation ne produit ses effets
qu’après l’approbation du Roi983.
301
Fanny Streveler MA1 DROIT
Le législateur n’a pas indiqué pour quelle raison une fondation d’utilité publique ne peut pas se
transformer en fondation privée ; la raison en tient sans doute au risque de fraude.
B. Motifs
Une fondation privée peut avoir n’importe quel but désintéressé tandis que le but désintéressé
d’une fondation publique doit être philosophique, philanthropique, pédagogique, religieux,
scientifique, artistique ou culturel.
Une fondation privée qui poursuit un tel but pourrait vouloir se transformer en fondation publique
pour des raisons de prestige.
C. Procédure
L’organe d’administration doit établir un rapport justificatif auquel il doit joindre un état résumant
la situation active et passive de la fondation, clôturé à une date ne remontant pas à plus de 3 mois
avant la réunion de l’organe d’administration appelée à se prononcer sur le projet.
L’organe d’administration doit prendre sa décision par acte authentique et la transformation est
soumise à l’approbation par le Roi984.
B. SE en SA ou SCE en SC
Une SE peut se transformer en SA, et une SCE en SC, après un certain délai : 2 ans à partir de
l’immatriculation et approbation des deuxièmes comptes annuels986.
302
Fanny Streveler MA1 DROIT
Dans un délai de 6 mois à compter du jour où ces personnes morales auront été transformées de
plein droit en une autre personne morale, l’organe d’administration devra convoquer une
assemblée générale ayant à l’ordre du jour l’adaptation des statuts. Comme la personne morale
aura déjà été transformée (de plein droit), cette adaptation se fera conformément aux règles en
matière de modification des statuts (et non aux règles en matière de transformation). Les membres
de l’organe d’administration seront personnellement et solidairement responsables des dommages
subis par la personne morale ou par des tiers résultant du non-respect de cette obligation989.
Cette solution est a priori étonnante (une véritable transformation peut être décidée aux
conditions de la modification des statuts). Elle s’explique par le fait que la procédure de
transformation ne s’applique pas à la transformation qui s’opère de plein droit au 1er janvier 2024
et que le législateur a jugé qu’il était inutile d’imposer à ces personnes morales la lourde procédure
de transformation si elles adoptent volontairement la nouvelle forme légale de personne morale
désignée par la loi avant le 1er janvier 2024 .
987 A ne pas confondre avec le GEIE (groupement européen d’intérêt économique), qui est prévu par un règlement
européen et que le législateur belge ne pouvait évidemment pas supprimer.
988 art. 41, § 2 de la loi du 23 mars 2019.
989 art. 41, § 3 de la loi du 23 mars 2019.
990 art. 41, § 4, 1ère phrase de la loi du 23 mars 2019.
303
Fanny Streveler MA1 DROIT
En cas de transformation d’une SCA en SA, les associés commandités restent tenus solidairement et
indéfiniment à l’égard des tiers des engagements de la société antérieurs à l’opposabilité aux tiers
de l’acte de transformation991.
Même si la forme légale indiquée dans le CSA pour chacune des formes de sociétés amenées à
disparaître est la plus proche de la leur, et si la procédure de modification des statuts est plus
simple et moins onéreuse que celle de la transformation, ces sociétés peuvent choisir une autre
forme conformément à la procédure de transformation (on pense par exemple aux SCA conçues comme
outil de planification successorale, qui pourraient préférer la forme de la SRL à celle de la SA).
304
Fanny Streveler MA1 DROIT
CHAPITRE 3 :
OPERATIONS DE
RESTRUCTURAT-
ION
305
Fanny Streveler MA1 DROIT
Le présent chapitre est consacré aux opérations internes de restructuration (fusions, scissions,
apports et cessions d’universalité et de branche d’activités).
Les opérations transfrontalières sont beaucoup plus rares et ne seront pas examinées dans le cours.
SOCIÉTÉS
1. CHAMP D’APPLICATION
Le livre 12 du CSA (« Restructuration de sociétés ») s’applique à toutes les sociétés dotées de la
personnalité juridique régies par le CSA, sous réserve des règles particulières applicables aux SE et
aux SEC. Ces règles priment sur les dispositions nationales.
Peu importe la forme des sociétés qui participent à une opération de restructuration : une SRL peut
se faire absorber par une SA ; une SA peut se scinder entre une SRL et une SNC ; une SComm peut faire un
apport d’universalité à une SA. En pratique, ce sont surtout les SA et les SRL qui recourent à ces
opérations.
306
Fanny Streveler MA1 DROIT
B. Scission
La scission est l’opération par laquelle une société transfère à plusieurs sociétés, par suite de sa
dissolution sans liquidation, l’intégralité de son patrimoine, activement et passivement, moyennant
l’attribution aux associés de la société dissoute d’actions ou de parts des sociétés bénéficiaires (et,
le cas échéant, d’une soulte en espèces ne dépassant pas, pour les SA, le dixième de la valeur
nominale des actions ou parts attribuées ou, à défaut de valeur nominale, de leur pair comptable).
Pour les sociétés sans capital, le CSA assimile au pair comptable la valeur des apports autres qu’en
industrie et des réserves indisponibles, divisée par le nombre d’actions ou de parts.
La partie du patrimoine transférée ne doit pas (mais peut) constituer une branche d’activités.
Le CSA ne mentionne pas parmi les opérations assimilées à la scission l’opération par laquelle une
société transfère, par suite d’une dissolution sans liquidation, l’intégralité de son patrimoine,
activement et passivement, à deux ou plusieurs autres sociétés qui sont déjà titulaires de toutes ses
307
Fanny Streveler MA1 DROIT
actions et autres titres conférant un droit de vote dans l’assemblée générale. Pourtant, dans cette
hypothèse également, les sociétés absorbantes n’émettent pas de nouvelles parts ou actions, de
sorte qu’il s’agit également d’un cas d’opératino assimilée à la scission.
E. Procédure
Projet de fusion ou de scission :
Les organes d’administration des sociétés concernées doivent établir un projet de fusion ou de
scission.
Le projet de fusion doit comporter au moins les mentions requises par le CSA1000. Une mention
capitale est le rapport d’échange des actions ou parts (ainsi que, le cas échéant, le montant de la
soulte en espèces). Cette mention n’est pas requise pour le projet des opérations assimilées à la
fusion par absorption car la société absorbante n’émet pas de nouvelles actions ou parts 1001.
Le projet de scission doit comporter, mutatis mutandis, les mêmes mentions et, en outre, la
description et la répartition précises des éléments du patrimoine actif et passif à transférer à
chacune des sociétés bénéficiaires, la répartition aux associés de la société à scinder des actions ou
parts des sociétés bénéficiaires, ainsi que le critère sur lequel cette répartition est fondée1002.
Le projet de fusion ou de scission doit être déposé au greffe du tribunal de l’entreprise par chacune
des sociétés concernées 6 semaines au moins avant l’assemblée générale appelée à se prononcer
sur l’opération. Le projet de fusion ou de scission doit ensuite être publié aux annexes du Moniteur
belge1003.
308
Fanny Streveler MA1 DROIT
Etat comptable :
Lorsque le projet de fusion ou de scission est postérieur d’au moins 6 mois à la fin de l’exercice
auquel se rapportent les derniers comptes annuels, la société qui participe à une opération de
fusion ou de scission doit établir un état comptable arrêté à une date ne remontant pas à plus de 3
mois avant la date du projet de fusion ou de scission1008.
A titre d’exemple, si l’exercice social se termine le 31 décembre et que le projet de fusion est établi au 15
septembre, il faut établir un état comptable arrêté au 15 juin ou postérieurement.
1006 CSA, art. 12:25, al. 2, 12:38, al. 2, 12:65 et 12:81 ; art. 12:26, § 1er, al. 6, 12:39, al. 6, 12:65 et 12:78, al. 6.
1007 CSA, art. 12:77, al. 2 et 12:78, al. 7.
1008 CSA, art. 12:28, § 2, 5°, art. 12:41, § 2, 5°, art. 12:51, § 2, 4°, art. 12:64, § 12, 5° et 12:80, § 2, 5°.
1009 CSA, art. 12:28, § 2, 5°, 12:41, § 2, 5°, 12:51, § 2, 4°.
1010 CSA, art. 12:28, § 2, 5°, 12:41, § 2, 5°.
309
Fanny Streveler MA1 DROIT
- en cas de scission par constitution de sociétés nouvelles, si les actions ou les parts de chacune
des nouvelles sociétés sont attribuées aux actionnaires ou associés de la société scindée
proportionnellement à leurs droits dans le capital ou leur part dans les capitaux propres de la
société scindée1011 ;
- en cas d’opérations assimilées à la fusion par absorption (les articles 12:50 à 12:58, n’imposent
pas cet état).
En outre, dans les SRL, SC et SA, tout actionnaire a le droit, au moins un mois avant la date de la
réunion de l’assemblée générale appelée à se prononcer sur le projet de fusion ou de scission, de
prendre connaissance au siège des comptes annuels des 3 derniers exercices de chacune des
sociétés concernées, des rapports des commissaires des trois derniers exercices et des rapports des
administrateurs ainsi que de l’état comptable1014.
Alternativement, les sociétés peuvent mettre ces documents sur leur site internet1015.
310
Fanny Streveler MA1 DROIT
Organe compétent :
En principe, l’assemblée générale est compétente pour approuver la fusion ou la scission.
En principe, il faut un quorum de présence de la moitié. Si cette condition n’est pas remplie, une
nouvelle convocation est nécessaire et la nouvelle assemblée peut délibérer et statuer valablement
quelle que soit la portion du capital représentée. L’assemblée générale se prononce à la majorité
des trois quarts des voix1019.
Exception :
Dans certains cas, l’organe d’administration est compétent pour approuver la fusion ou la scission :
- Fusion par absorption : l’approbation par l’assemblée générale de la société absorbante qui a la
forme légale d’une SRL, d’une SC, d’une SA n’est pas requise si elle détient au moins 90 %, mais
pas la totalité1022, des actions et des autres titres conférant un droit de vote de la société
absorbée1023.
- Opération assimilée à la fusion : ni l’approbation par l’assemblée générale de la société
absorbante qui a la forme légale d’une SRL, d’une SC, d’une SA ni l’approbation par l’assemblée
générale de la société absorbée ne sont requises1024.
- Scission par absorption : l’approbation par l’assemblée générale de la société à scinder n’est
pas requise si les sociétés bénéficiaires détiennent toutes les actions ou parts de la société
scindée1025.
Ces exceptions sont extraordinaires en ce sens qu’elles permettent la disparition volontaire d’une
société sans l’intervention de son assemblée générale.
Dans ces hypothèses, c’est l’organe d’administration qui approuve la fusion. Les dispositions
relatives au capital autorisé ne sont pas applicables à cette décision.
Acte authentique :
Dans chaque société participant à l’opération, tant le procès-verbal de l’assemblée générale ou de
l’organe d’administration qui décide l’opération que l’acte constitutif des nouvelles sociétés et
l’acte de modification des statuts des sociétés absorbantes doivent, à peine de nullité, être établis
par acte authentique 1026.
311
Fanny Streveler MA1 DROIT
L’intervention du notaire est requise quelle que soit la forme légale des sociétés participant à
l’opération : ainsi, même les fusions entre SNC ou la constitution d’une nouvelle société sous forme
de SNC requièrent l’intervention du notaire.
Réalisation de la fusion :
Fusion ou scission par absorption :
L’assemblée générale de la ou des sociétés absorbantes (ou l’organe d’administration dans les cas
exceptionnels où cet organe peut prendre la décision) doi(ven)t non seulement se prononcer sur la
fusion mais également modifier les statuts. A défaut, la décision reste sans effet. La fusion ou la
scission est réalisée lorsque sont intervenues les décisions concordantes prises au sein de toutes les
sociétés intéressées1027.
Il ne faut cependant pas remplir les formalités requises pour la forme de société choisie et,
notamment, rédiger un plan financier 1029. Ce serait inutile puisque le capital ou les capitaux propres
de départ de la société nouvelle a ou ont déjà été justifiés et que les conséquences de la fusion ou
de la scission ont été décrites dans le rapport de l’organe d’administration.
L’assemblée générale de chacune des sociétés intéressées doit non seulement se prononcer sur la
fusion ou la scission mais également modifier les statuts, devant notaire et aux mêmes conditions
de présence et de majorité que celles requises pour la décision de fusion ou de scission. A défaut, la
décision de fusion ou de scission reste sans effet1031.
Publicité :
Les actes constatant les décisions de fusion ou de scission doivent être déposés au greffe du
tribunal de l’entreprise et publiés par extrait aux annexes du Moniteur belge, de même que, le cas
échéant, les actes modifiant les statuts de la société absorbante ou l’acte constitutif de la nouvelle
société1033.
312
Fanny Streveler MA1 DROIT
Le CSA comporte cependant certaines exceptions, notamment pour les actes translatifs ou
déclaratifs de droits réels immobiliers autres que les privilèges et hypothèques qui ne sont
opposables aux tiers que moyennant la transcription sur le registre du bureau compétent de
l'Administration générale de la Documentation patrimoniale 1034.
SC – démission :
Dans les SC, chaque actionnaire a la faculté, nonobstant toute disposition contraire des statuts, de
démissionner à tout moment au cours de l'exercice social et sans avoir à satisfaire à aucune autre
condition, dès la convocation de l'assemblée générale appelée à décider la fusion de la société avec
une société absorbante ou nouvelle d'une autre forme légale. La démission doit être notifiée à la
société. Elle n'a d'effet que si la fusion est décidée1036.
F. Effets
Disparition des sociétés transférantes :
Les sociétés transférantes cessent d’exister. Elles sont cependant réputées exister durant un délai
de 6 mois en vue de l’exercice éventuel d’une action en nullité de la fusion ou de la scission1037.
Une société bénéficiaire ne peut émettre aucune action ou part en échange d’actions ou de parts
d’une société dissoute qui étaient détenues par la société bénéficiaire elle-même, par la société
dissoute elle-même ou une personne agissant en son nom propre mais pour leur compte 1040.
313
Fanny Streveler MA1 DROIT
Transfert du patrimoine :
L’ensemble du patrimoine actif et passif de la ou des sociétés dissoutes est transféré à la ou aux
sociétés bénéficiaires1042, sauf en cas de scission partielle puisque, par définition, une partie
seulement du patrimoine de la société est transférée à la société bénéficiaire.
Comme indiqué ci-avant, sous réserve de certaines exceptions, la publication des procès-verbaux
des assemblées générales des sociétés concernées rend ce transfert opposable à tous sans qu’il soit
nécessaire de dépecer l’opération en fonction des éléments de l’actif et du passif et de respecter
les formalités prévues pour le transfert et l’opposabilité aux tiers de chacun de ces éléments.
La société bénéficiaire peut écarter cette demande en payant la créance à sa valeur, après
déduction de l'escompte.
H. Responsabilités
SNC et SComm – responsabilité des associés personnellement tenus pour les dettes de la société
dissoute ou bénéficiaire :
Si la société dissoute est une SNC ou une SComm, les associés en nom collectif ou les associés
commandités restent tenus solidairement et indéfiniment à l'égard des tiers, des engagements de
la société dissoute antérieurs à l'opposabilité aux tiers de l'acte de fusion ou de scission1045.
Si la société bénéficiaire est une SNC ou une SComm, les associés en nom collectif ou les associés
commandités répondent solidairement et indéfiniment à l'égard des tiers, des engagements de la
société dissoute antérieurs à la fusion ou à la scission et qui, dans ce dernier cas, ont été transmis à
la société bénéficiaire. Ils peuvent cependant être exonérés de cette responsabilité par une clause
expresse insérée dans le projet et l'acte de fusion ou de scission rendue opposable aux tiers 1046.
314
Fanny Streveler MA1 DROIT
Responsabilité solidaire des sociétés bénéficiaires en cas de scission pour les dettes de la société
scindée :
En cas de scission, les sociétés bénéficiaires demeurent solidairement tenues des dettes certaines
et exigibles au jour de la publication aux annexes du Moniteur belge des actes constatant la
scission, ainsi que des dettes pour lesquelles une action a été introduite en justice ou par voie
d'arbitrage avant l'acte constatant la scission.
Cette responsabilité est limitée à l'actif net attribué à chacune de ces sociétés.
En cas de scission partielle, la société scindée est considérée comme une société bénéficiaire pour
l’application de cette règle et la responsabilité de la société scindée est limitée à l’actif net conservé
par elle1047.
I. Nullité
Causes de nullité :
Outre les cas de nullité des décisions de l’assemblée générale1049 (supra), le CSA prévoit les causes
de nullité suivantes pour les opérations de fusion et de scission :
- lorsque la soulte en espèces dépasse le dixième de la valeur nominale ou du pair comptable
des actions ou parts attribuées1050 ;
- si les décisions des assemblées générales ou des organes d’administration qui ont approuvé la
fusion ou la scission n’ont pas été constatées par acte authentique 1051 ;
- si ces décisions ont été prises en l’absence des rapports requis1052.
Le tribunal peut cependant, dans ces deux derniers cas, attribuer aux sociétés un délai pour
régulariser la situation.
Effet :
En cas de nullité d'une fusion ou d'une scission par constitution d’une nouvelle société, la décision
judiciaire qui prononce cette nullité prononce également la nullité de la nouvelle société1053.
L’extrait de cette décision doit être publié1054.
315
Fanny Streveler MA1 DROIT
La cession d’universalité est l’opération par laquelle une société transfère sans dissolution
l’intégralité de son patrimoine activement et passivement à une ou plusieurs sociétés existantes ou
nouvelles, moyennant un prix (cession à titre onéreux) ou même gratuitement (cession à titre
gratuit).
Une branche d’activités est un ensemble qui, du point de vue technique et sous l’angle de
l’organisation, exerce une activité autonome et est susceptible de fonctionner par ses propres
moyens1056.
L'apport d'une branche d'activités est l'opération par laquelle une société transfère, sans
dissolution, à une autre société une branche de ses activités ainsi que les passifs et les actifs qui s'y
rattachent, moyennant une rémunération consistant exclusivement en actions ou parts de la
société bénéficiaire de l'apport1057.
La cession de branche d’activités est l’opération par laquelle une société transfère sans dissolution
à une autre société une branche de ses activités ainsi que les passifs et les actifs qui s’y rattachent
moyennant une rémunération consistant en un prix ou même gratuitement.
Cession d’universalité ou de branche d’activité effectuée par une autre personne morale :
Le régime de la cession d’universalité ou de branche d’activité s’applique par analogie à toute
personne morale qui opte expressément pour son application1059.
B. Procédure
Régime facultatif :
Pour les apports de branche d’activités et les cessions d’universalité et de branche d’activités, le
CSA permet, dans une certaine mesure, aux parties de choisir le régime applicable :
- en cas d’apport de branche d’activités, les sociétés concernées peuvent décider de ne pas
soumettre l’apport au régime organisé par le CSA en en faisant mention dans l’acte d’apport ;
en ce cas, l’apport n’entraîne pas de transfert de plein droit de la branche d’activités1060 ;
316
Fanny Streveler MA1 DROIT
Dans les lignes qui suivent, il ne sera traité que du régime organisé par le CSA.
Projet d’apport :
Les organes d’administration de la société apporteuse et de la société bénéficiaire doivent établir
un projet d’apport1064 et le déposer au greffe du tribunal de l’entreprise 6 semaines au moins avant
la réalisation de l’apport1065.
Rapports :
L’organe d’administration de la société apporteuse doit établir un rapport écrit et circonstancié qui
expose la situation patrimoniale des sociétés concernées et qui explique et justifie, du point de vue
juridique et économique, l'opportunité, les conditions, les modalités et les conséquences de
l'apport1066 1067. A l’inverse de ce qui est prévu en cas de fusion et de scission, le CSA n’impose pas
de rapport du commissaire ou d’un réviseur d’entreprises.
Si la société bénéficiaire a la forme d’une SRL, SC ou SA, son organe d’administration et son
commissaire (ou un reviseur d’entreprise ou un expert-comptable externe) doivent établir les
rapports prescrits pour les apports en nature.
Organe compétent :
Société apporteuse :
L’apport d’universalité doit être décidé par l’assemblée générale de la société apporteuse1068, aux
conditions de présence et de majorité requises pour la modification des statuts 1069. L’accord de
tous les associés est requis dans les SNC et l’accord de tous les associés commandités est requis
dans les SComm1070.
L’apport de branche d’activités doit être décidé par l’organe d’administration de la société
apporteuse1071.
1061 Cet acte doit être établi en la forme authentique (CSA, art. 12:103, al. 2), quelle que soit la forme légale des sociétés
concernées.
1062 CSA, art. 12:1, § 1er, al. 2 et 12:103.
1063 CSA, art. 12:101.
1064 CSA, art. 12:93.
1065 CSA, art. 12:93.
1066 CSA, art. 12:94, § 2, al. 2.
1067 Comme en cas de fusion et de scission, le CSA prévoit une exception pour les SC : le projet est tenu à la disposition
317
Fanny Streveler MA1 DROIT
Société bénéficiaire :
La société bénéficiaire émet de nouvelles parts ou actions, ce qui requiert en principe une décision
de l’assemblée générale (sauf clause de capital autorisé ou d’émission autorisée) et, dans les SRL,
SC et SA, un acte authentique.
Dépôt et publication :
L’acte constatant l’apport d’une universalité ou d’une branche d’activités doit être déposé au greffe
du tribunal de l’entreprise et publié par extrait aux annexes du Moniteur belge1072, ce qui rend
l’apport ou la cession opposable aux tiers1073.
Le CSA comporte à cet égard les mêmes exceptions qu’en cas de fusion et de scission (notamment
en ce qui concerne les droits réels immobiliers).
C. Effets
Transfert d’actif et de passif :
L’apport ou la cession d’universalité ou de branche d’activités entraîne de plein droit le transfert à
la société bénéficiaire de, respectivement, l’ensemble du patrimoine actif et passif de la société
transférante ou des actifs et passifs se rattachant à la branche d’activités transférée1074.
Cela peut sembler bizarre en cas d’apport ou de cession d’universalité puisque, par hypothèse, la
société transférante transfère l’ensemble de son patrimoine actif et passif. Toutefois, en principe,
elle reçoit en contrepartie soit des actions ou parts émises par la société bénéficiaire, soit un prix
payé par la société bénéficiaire.
Reste la cession d’universalité à titre gratuit. Une telle opération n’est pas théorique : on peut
imaginer que la société cédante soit à ce point endettée que la société bénéficiaire reprenne ses
dettes mais ne lui paie aucun prix.
318
Fanny Streveler MA1 DROIT
E. Responsabilités
Responsabilité de la société apporteuse ou cédante :
La société apporteuse reste solidairement tenue des dettes certaines et exigibles au jour de
l’apport qui sont transférées à une société bénéficiaire ainsi que des dettes qui font l'objet d'une
action en justice, introduite en justice ou par voie d'arbitrage avant l’acte constatant l'apport mais
cette responsabilité est limitée à l’actif net conservé par la société apporteuse ou cédante en
dehors du patrimoine apporté1076.
En rédigeant cette disposition, le législateur a perdu de vue que la société qui apporte une
universalité ne conserve aucun actif net de sorte qu’elle échappe à toute responsabilité au regard
de cette disposition.
Ce mécanisme risque d’être utilisé frauduleusement pour transférer des dettes à une société
insolvable et les actifs à une société solvable.
Responsabilité de la personne physique qui apporte une branche d’activités à une société :
En cas d’apport de branche d’activités par une personne physique à une société, lorsque cet apport
est soumis au régime du CSA, l’apporteur est, pour cette responsabilité, assimilé à un associé
solidairement tenu1078.
ASSOCIATIONS ET FONDATIONS
1. FUSIONS ET SCISSIONS
A. Bénéficiaires
Les ASBL et les AISBL peuvent procéder à une fusion ou une scission uniquement en faveur d’une
ou plusieurs personnes morales poursuivant un but désintéressé1079. Il peut s’agir d’ASBL, d’AISBL
et de fondations, mais également d’universités ou de personnes morales de droit public
poursuivant un but désintéressé.
Les fondations peuvent procéder à une fusion ou une scission uniquement en faveur de fondations,
d’universités ou de personnes morales de droit public poursuivant un but désintéressé. En outre,
les fondations d’utilité publique ne peuvent pas fusionner ou se scinder avec des fondations
privées.
319
Fanny Streveler MA1 DROIT
Le transfert du patrimoine d’une association ou d’une fondation à une université ou une institution
de droit public leur permet de créer un fonds non personnalisé au sein de cette université ou
institution pour perpétuer l’œuvre du fondateur tout en faisant des économies en termes de
gestion.
B. Procédure
La procédure en cas de fusion ou de scission est inspirée de celle applicable aux sociétés mais elle
est plus simple.
Projet :
Les organes d’administration des personnes morales parties à l’opération doivent établir
conjointement un projet de fusion ou de scission. Ce projet doit décrire les motifs de cette
opération ainsi que l’ensemble de ses modalités et, si le patrimoine de la personne morale dissoute
est apporté à plusieurs bénéficiaires, la manière dont il est réparti. Ce projet ne doit pas être
déposé et publié.
Etat comptable :
Ils doivent joindre à ce projet un état résumant la situation active et passive de la personne morale
appelée à se dissoudre clôturé à une date ne remontant pas à plus de 3 mois avant celle à laquelle
les organes compétents des personnes morales concernées doivent se prononcer et, si la personne
morale appelée à bénéficier de l’apport est une ASBL, une AISBL ou une fondation, un état
résumant la situation active et passive de celle-ci.
Ce rapport indique notamment si les états auxquels ils ont trait traduisent d’une manière complète,
fidèle et exacte la situation de la personne morale concernée.
320
Fanny Streveler MA1 DROIT
S’il s’agit d’une fondation, la décision doit être prise par son organe d’administration statuant à
l’unanimité de ses membres1080.
S’il s’agit d’une ASBL ou d’une AISBL, la décision doit être prise par son assemblée générale aux
conditions requises pour la modification de son but ou de son objet, sauf conditions plus strictes
imposées par les statuts.
S’il s’agit d’une fondation, la décision doit être prise par son organe d’administration statuant à
l’unanimité de ses membres et, s’il s’agit d’une autre personne morale, par l’organe compétent aux
conditions requises par les dispositions légales, réglementaires ou statutaires qui lui sont
applicables1081.
L’intervention du notaire est requise sauf s’il s’agit d’une université ou d’une personne morale de
droit public1082.
C. Publicité
Les procès-verbaux doivent être déposés et publiés par extraits, ce qui rend la fusion ou la scission
opposable aux tiers.
Le CSA comporte à cet égard les mêmes exceptions qu’en cas de fusion et de scission (notamment
en ce qui concerne les droits réels immobiliers)1083.
D. Effets
La fusion ou la scission d’associations et de fondations produit certains effets identiques à ceux de
la fusion ou de la scission de sociétés :
- l’ensemble du patrimoine actif et passif de la personne morale dissoute est transféré à la ou
aux personne(s) morale(s) bénéficiaire(s) (même solution qu’en cas de scission des sociétés si
un élément du patrimoine actif ou passif n’est pas attribué dans le projet de scission)1084 ;
- les associations ou fondations qui fusionnent ou se scindent sont dissoutes de plein droit sans
liquidation1085.
321
Fanny Streveler MA1 DROIT
G. Nullité
Outre les cas de nullité des décisions de l’assemblée générale1089 (supra), le CSA prévoit les causes
de nullité suivantes pour les opérations de fusion et de scission d’associations et de fondations :
- si les décisions des assemblées générales ou des organes d’administration qui ont approuvé la
fusion ou la scission n’ont pas été constatées par acte authentique ;
- si ces décisions ont été prises en l’absence du projet de fusion ou de scission ou en l’absence
du rapport du commissaire, du reviseur d’entreprises ou de l’expert-comptable externe1090.
A. Régime
Les associations et les fondations peuvent soumettre cette opération au régime organisé par le CSA
pour les apports d’universalité et de branche d’activités, auquel cas le régime examiné ci-avant
pour les sociétés s’applique par analogie. Cette méthode s’écarte du parti pris du législateur de
répéter les dispositions légales pour chaque forme de personne morale plutôt que de faire des
renvois.
La décision de procéder à l’apport est prise aux conditions de quorum et de majorité requises pour
la modification des statuts, par l’assemblée générale dans les associations et par l’organe
d’administration dans les fondations.
322
Fanny Streveler MA1 DROIT
L’acte constatant l’apport d’universalité ou l’apport de branche d’activités doit être établi en la
forme authentique1091.
B. Caractère facultatif
Le régime prévu par le CSA présente l’avantage d’entraîner un transfert de plein droit de
l’universalité ou de la branche d’activités qui est opposable aux tiers par la simple publication des
actes de transfert.
Il est cependant facultatif : les associations et fondations peuvent alternativement procéder à une
cession d‘universalité ou de branche d’activités conformément au droit commun.
323
Fanny Streveler MA1 DROIT
TABLE DES
MATIERES
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7. RÈGLES SPÉCIFIQUES EN CAS DE MODIFICATION DES DROITS RESPECTIFS ATTACHÉS AUX DIFFÉRENTES
CLASSES DE TITRES ....................................................................................................................................................139
A. Procédure ......................................................................................................................................................................140
OPÉRATIONS SUR LE CAPITAL ........................................................................................................................................141
1. AUGMENTATION DU CAPITAL .........................................................................................................................141
A. Organe compétent ........................................................................................................................................................141
B. Modes ............................................................................................................................................................................142
C. Augmentation de capital en un seul ou plusieurs actes ...............................................................................................142
D. Interdiction de la souscription par la société elle-même ou ses filiales .......................................................................143
E. Prix d’émission...............................................................................................................................................................143
F. Emission d’obligations convertibles ou de droits de souscription ................................................................................144
G. Droit de préférence .......................................................................................................................................................144
H. Responsabilité des administrateurs ..............................................................................................................................145
2. RÉDUCTION DU CAPITAL .................................................................................................................................146
A. Réduction par remboursement ou dispense ................................................................................................................146
B. Réduction en vue d’apurer une perte subie ou en vue de constituer une réserve pour couvrir une perte prévisible 147
ASSISTANCE FINANCIÈRE ...............................................................................................................................................147
1. CONDITIONS ....................................................................................................................................................147
ACQUISITION D’ACTIONS PROPRES ...............................................................................................................................148
1. OBJECTIFS ........................................................................................................................................................148
2. CONDITIONS ....................................................................................................................................................148
3. RÉGIME DE LA DÉTENTION..............................................................................................................................149
4. RÉGIME DE L’ALIÉNATION ...............................................................................................................................150
5. REPORTING ET PUBLICITÉ................................................................................................................................150
6. ACQUISITION, DÉTENTION ET ALIÉNATION PAR UNE FILIALE DIRECTE ..........................................................150
7. SANCTIONS ......................................................................................................................................................150
8. PRISE EN GAGE ................................................................................................................................................151
SONNETTE D’ALARME ....................................................................................................................................................151
1. RÉDUCTION GRAVE DE L’ACTIF NET ................................................................................................................151
2. MISE EN PÉRIL DE LA CONTINUITÉ DE L’ENTREPRISE......................................................................................152
OFFRES PUBLIQUES D’ACQUISITION ..............................................................................................................................152
1. CONDITIONS ....................................................................................................................................................153
2. PROCÉDURE .....................................................................................................................................................153
3. RÉOUVERTURE DE L’OFFRE .............................................................................................................................155
4. CONTRE-OFFRE ET SURENCHÈRE ....................................................................................................................155
5. MODIFICATION OU RETRAIT DE L’OFFRE ........................................................................................................155
6. OFFRE DE REPRISE PAR L’OFFRANT APRÈS UNE OFFRE VOLONTAIRE ............................................................156
7. DROIT DE VENTE APRÈS UNE OFFRE VOLONTAIRE .........................................................................................156
8. MESURES DE DÉFENSE ANTI-OPA ...................................................................................................................156
A. Réglementation .............................................................................................................................................................157
OFFRES DE REPRISE ........................................................................................................................................................159
1. SOCIÉTÉS COTÉES ............................................................................................................................................159
A. Conditions......................................................................................................................................................................159
B. Procédure ......................................................................................................................................................................159
C. Effet ...............................................................................................................................................................................160
2. SOCIÉTÉS NON COTÉES ....................................................................................................................................160
A. Conditions......................................................................................................................................................................160
B. Effet ...............................................................................................................................................................................160
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CONTRÔLE .....................................................................................................................................................................203
1. CONTRÔLE DE DROIT .......................................................................................................................................203
2. CONTRÔLE DE FAIT ..........................................................................................................................................204
3. CONTRÔLE DIRECT ET CONTRÔLE INDIRECT ...................................................................................................204
4. CONTRÔLE EXCLUSIF ET CONTRÔLE CONJOINT ..............................................................................................204
INTÉRÊT SOCIAL .............................................................................................................................................................205
1. JURISPRUDENCE ..............................................................................................................................................205
RESPONSABILITÉ DE LA SOCIÉTÉ-MÈRE POUR SES FILIALES ...........................................................................................206
1. RESPONSABILITÉ ENVERS LES CRÉANCIERS .....................................................................................................206
A. Responsabilité contractuelle de la société-mère ..........................................................................................................206
B. Responsabilité extracontractuelle de la société-mère .................................................................................................207
C. Levée du voile social ......................................................................................................................................................207
D. Droit de la concurrence .................................................................................................................................................207
E. Responsabilité des administrateurs de la filiale ou des administrateurs de la société-mère ......................................207
2. RESPONSABILITÉ ENVERS LES ACTIONNAIRES MINORITAIRES........................................................................207
A. Mesures préventives .....................................................................................................................................................207
B. Actions en justice ..........................................................................................................................................................208
RÉGIME DES SUCCURSALES ...........................................................................................................................................208
1. DOSSIER ...........................................................................................................................................................208
2. COMPTES ANNUELS.........................................................................................................................................209
3. SANCTIONS ......................................................................................................................................................209
4. MENTIONS DANS LES ACTES............................................................................................................................209
CHAPITRE 8 : CONFLITS ........................................................................................................................................210
DROIT D’INVESTIGATION INDIVIDUEL ...........................................................................................................................211
1. CHAMP D’APPLICATION ..................................................................................................................................212
2. OBJECTIF ..........................................................................................................................................................212
ACTION EN DÉSIGNATION D’UN EXPERT........................................................................................................................212
1. CHAMP D’APPLICATION ..................................................................................................................................212
2. OBJECTIF ..........................................................................................................................................................213
ACTION EN NULLITÉ DE VOTES OU DE DÉCISIONS .........................................................................................................213
1. CHAMP D’APPLICATION ..................................................................................................................................213
2. CAUSES DE NULLITÉ.........................................................................................................................................213
A. Causes de nullité des votes ...........................................................................................................................................213
B. Causes de nullité des décisions .....................................................................................................................................213
3. DEMANDEUR ...................................................................................................................................................214
4. DÉFENDEUR .....................................................................................................................................................214
5. SUSPENSION ....................................................................................................................................................215
6. RÉPARATION ....................................................................................................................................................215
7. EFFETS DE LA NULLITÉ OU DE LA SUSPENSION DE LA DÉCISION ....................................................................215
8. PRESCRIPTION .................................................................................................................................................216
ACTION EN RESPONSABILITÉ CONTRE LES ACTIONNAIRES ............................................................................................216
ACTION EN RESPONSABILITÉ CONTRE LES ADMINISTRATEURS .....................................................................................216
1. RESPONSABILITÉ DE NATURE CONTRACTUELLE ENVERS LA PERSONNE MORALE .........................................216
A. Champ d’application......................................................................................................................................................217
B. Fautes commises dans l’accomplissement de leur mission ..........................................................................................217
C. Décharge........................................................................................................................................................................217
D. Exonération ...................................................................................................................................................................218
E. Titulaires de l’action en responsabilité .........................................................................................................................218
2. RESPONSABILITÉ DE NATURE AQUILIENNE ENVERS LES TIERS .......................................................................219
A. Action en responsabilité extracontractuelle par des cocontractants de la société – application de la théorie du
concours de responsabilités.....................................................................................................................................................220
B. Action en responsabilité extracontractuelle par des créanciers de la société – application de la théorie du cumul de
responsabilités .........................................................................................................................................................................220
C. Actions contre les dirigeants en cas de faillite ..............................................................................................................221
D. Titulaires de l’action en responsabilité .........................................................................................................................222
3. CAS PARTICULIER : RESPONSABILTIÉ EN MATIÈRE DE CONFLITS D’INTÉRÊTS ................................................222
A. Méconnaissance des règles en matière de conflits d’intérêts ......................................................................................222
B. Respect des règles en matière de conflits d’intérêts mais préjudice causé à la société ou aux tiers ..........................223
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Fanny Streveler MA1 DROIT
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Fanny Streveler MA1 DROIT
B. Obligations.....................................................................................................................................................................245
5. CROWDFUNDING ............................................................................................................................................247
6. PRODUIT DES ACTIVITÉS..................................................................................................................................247
STATUTS ET RÈGLEMENT D’ORDRE INTÉRIEUR..............................................................................................................247
1. ORGANE COMPÉTENT .....................................................................................................................................248
2. PUBLICITÉ ........................................................................................................................................................248
3. CONTENU.........................................................................................................................................................248
CHAPITRE 2 : ASBL ...............................................................................................................................................249
CONSTITUTION ..............................................................................................................................................................250
1. CONDITIONS DE FOND ....................................................................................................................................250
2. FORMALITÉS DE CONSTITUTION .....................................................................................................................250
3. FORMALITÉS POSTÉRIEURES À LA PASSATION DE L’ACTE CONSTITUTIF ........................................................250
4. NULLITÉ ...........................................................................................................................................................251
MEMBRES ......................................................................................................................................................................252
1. NOMBRES ET QUALITÉ ....................................................................................................................................252
2. MEMBRES EFFECTIFS ET ADHÉRENTS .............................................................................................................252
3. CATÉGORIES ....................................................................................................................................................253
4. ADMISSION ET SORTIE.....................................................................................................................................253
A. Admission ......................................................................................................................................................................253
B. Démission ......................................................................................................................................................................253
C. Décès .............................................................................................................................................................................254
D. Exclusion ........................................................................................................................................................................254
E. Suspension.....................................................................................................................................................................255
F. Condition résolutoire ....................................................................................................................................................256
G. Effets de la perte de la qualité de membre...................................................................................................................256
5. DROITS ET OBLIGATIONS .................................................................................................................................256
A. Membres effectifs et adhérents....................................................................................................................................256
B. Droits .............................................................................................................................................................................257
C. Obligations.....................................................................................................................................................................257
D. Responsabilité ...............................................................................................................................................................258
ORGANE D’ADMINISTRATION........................................................................................................................................258
1. ORGANE D’ADMINISTRATION COLLÉGIAL .......................................................................................................258
2. ADMINISTRATEURS .........................................................................................................................................259
A. Nomination, rémunération et révocation .....................................................................................................................259
B. Représentation au conseil d’administration .................................................................................................................259
3. POUVOIRS........................................................................................................................................................260
4. REPRÉSENTATION VIS-À-VIS DES TIERS ...........................................................................................................260
5. CONFLITS D’INTÉRÊT .......................................................................................................................................260
6. DÉLIBÉRATIONS ÉCRITES .................................................................................................................................262
7. GESTION JOURNALIÈRE ...................................................................................................................................262
8. SONNETTE D’ALARME .....................................................................................................................................262
ASSEMBLÉE GÉNÉRALE ..................................................................................................................................................263
1. POUVOIRS........................................................................................................................................................263
2. CONVOCATION ................................................................................................................................................263
3. MODIFICATION DES STATUTS..........................................................................................................................264
CHAPITRE 3 : AISBL ..............................................................................................................................................265
CONSTITUTION ..............................................................................................................................................................266
1. CONDITIONS DE FOND ....................................................................................................................................266
A. But désintéressé ............................................................................................................................................................266
B. But d’utilité internationale ............................................................................................................................................266
2. FORMALITÉS ....................................................................................................................................................266
A. Acte authentique ...........................................................................................................................................................266
B. Arrêté royal de reconnaissance.....................................................................................................................................266
C. Nullité ............................................................................................................................................................................267
MEMBRES ......................................................................................................................................................................267
1. NOMBRE ET QUALITÉ ......................................................................................................................................267
2. CATÉGORIES ....................................................................................................................................................267
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Fanny Streveler MA1 DROIT
3. ADMISSION ET SORTIE.....................................................................................................................................267
GOUVERNANCE..............................................................................................................................................................268
1. ORGANE D’ADMINISTRATION .........................................................................................................................268
2. ASSEMBLÉE GÉNÉRALE ....................................................................................................................................268
3. MODIFICATION DES STATUTS..........................................................................................................................268
CHAPITRE 4 : FONDATIONS ..................................................................................................................................270
CONSTITUTION ..............................................................................................................................................................271
1. CONDITIONS DE FOND ....................................................................................................................................271
2. FORMALITÉS ....................................................................................................................................................272
3. NULLITÉ ...........................................................................................................................................................272
GOUVERNANCE..............................................................................................................................................................272
1. ORGANE D’ADMINISTRATION .........................................................................................................................272
A. Pouvoirs .........................................................................................................................................................................272
B. Représentation de la fondation ....................................................................................................................................273
C. Conflits d’intérêts ..........................................................................................................................................................273
D. Délibérations par écrit ...................................................................................................................................................274
2. ADMINISTRATEURS .........................................................................................................................................274
A. Nomination ....................................................................................................................................................................274
B. Fin des fonctions............................................................................................................................................................274
C. Représentation au sein de l’organe d’administration...................................................................................................275
3. GESTION JOURNALIÈRE ...................................................................................................................................275
4. MODIFICATION DES STATUTS..........................................................................................................................275
PARTIE 4 – OPERATIONS EXCEPTIONNELLES ..........................................................................................................276
CHAPITRE 1 : DISSOLUTION ET LIQUIDATION ........................................................................................................277
CAUSES DE DISSOLUTION...............................................................................................................................................278
1. DISSOLUTION VOLONTAIRE PAR DÉCISION DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE .......................................................279
A. Sociétés simples, snc, scomm et petites associations ..................................................................................................279
B. Autres societes et grandes associations........................................................................................................................280
2. CAUSES DE DISSOLUTION DE PLEIN DROIT .....................................................................................................281
A. Expiration du terme.......................................................................................................................................................281
B. Réalisation d’une condition résolutoire expresse .........................................................................................................282
C. Impossibilité de réaliser l’objet ou réaliser de l’objet ...................................................................................................282
D. Décès, incapacité, faillite ou liquidation d’un associé ..................................................................................................282
3. DISSOLUTION JUDICIAIRE ................................................................................................................................282
A. Sociétés..........................................................................................................................................................................282
B. Associations ...................................................................................................................................................................283
C. Procédure commune aux sociétés et associations .......................................................................................................284
D. Fondations .....................................................................................................................................................................285
LIQUIDATION .................................................................................................................................................................286
1. EFFET DE LA DISSOLUTION ..............................................................................................................................286
2. PHASE DE LIQUIDATION ..................................................................................................................................286
A. Distinction......................................................................................................................................................................286
B. Nomintion des liquidateurs ...........................................................................................................................................287
C. Absence de nomination de liquidateurs .......................................................................................................................288
D. Dépôt et publicitation de l’acte de nomination ............................................................................................................289
E. Mission des liquidateurs................................................................................................................................................289
F. Formalités en cours de liquidation ................................................................................................................................289
G. Clôture de la liquidation ................................................................................................................................................290
H. Actifs et passifs oubliés .................................................................................................................................................290
3. DISSOLUTION ET LIQUIDATION EN UN SEUL ACTE..........................................................................................291
A. Conditions......................................................................................................................................................................291
B. Actifs restants ................................................................................................................................................................292
C. Passifs oubliés................................................................................................................................................................292
4. DISSOLUTION AVEC CLÔTURE IMMÉDIATE DE LA LIQUIDATION ET DISSOLUTION SANS LIQUIDATION ........293
A. Dissolution avec clôture immédiate de la liquidation...................................................................................................293
B. Dissolution sans liquidation ..........................................................................................................................................293
5. RÉOUVERTURE DE LA LIQUIDATION................................................................................................................293
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A. Conditions......................................................................................................................................................................293
B. Effet ...............................................................................................................................................................................293
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