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PARTIE 2

LES SOCIÉTÉS COMMERCIALES

I.Introduction :

1) Le concept d’entreprise :
Le concept d'entreprise, englobant toutes les activités commerciales, est reconnu
économiquement, bien que non défini légalement. Au Luxembourg, il prend
principalement la forme de sociétés, distinctes des entreprises individuelles. Les
sociétés commerciales, avec une personnalité morale, possèdent un patrimoine
autonome, se différenciant des activités commerciales par la présence de
commerçants. La responsabilité peut être limitée dans une société commerciale à
responsabilité limitée, et le regroupement d'individus au sein de ces sociétés
renforce leur puissance financière.

2) L’intérêt de la forme sociale :


Les avantages de la forme sociale résident dans trois aspects clés. D'abord, pour les
associés, la possibilité de regrouper des capitaux et des compétences permet une
gestion plus efficace et l'atteinte d'objectifs inaccessibles pour une entreprise
individuelle. De plus, la forme sociétaire facilite la prise de décisions sans nécessiter
des réunions continues et un accord unanime. Elle offre également une autonomie
du patrimoine social, limitant ainsi les risques financiers pour les associés. Ensuite,
pour les dirigeants, la forme sociale offre un statut de salarié avec une meilleure
protection sociale par rapport aux travailleurs indépendants. Enfin, pour les tiers
(créanciers), la forme sociétaire assure une gestion claire en séparant le pouvoir
financier et le pouvoir de gestion, offrant une continuité et une stabilité à l'entreprise
qui n’est pas affectée par le décès, le divorce ou à la disparition du propriétaire
exploitant, contrairement à l'entreprise individuelle.

3) La nature juridique de société :


La société est un contrat appelé "statuts," défini par l'article 1832 du Code civil
comme un regroupement volontaire de deux ou plusieurs personnes partageant
quelque chose en commun pour atteindre des objectifs communs. Le concept de
société-institution souligne le rôle crucial des sociétés dans la société, bien que cela
n'ait pas une grande utilité juridique. La société (anonyme) est considérée comme
une technique juridique au service de l'entreprise. La création de sociétés
unipersonnelles est autorisée dès la constitution.

4) Évolution du droit des sociétés :


L'évolution du droit des sociétés au Luxembourg repose sur la loi de 1915,
initialement inspirée du droit belge. Bien que des similitudes persistent, le droit
luxembourgeois s'autonomise, parfois s'éloignant de ses voisins. Les directives de
l'UE visent à harmoniser, mais la liberté d'adaptation rend le droit luxembourgeois
consensuel. Contrairement au droit français, il favorise la négociation entre les
parties, choisissant des modèles adaptés à chaque problématique, en suivant les
évolutions du marché.

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5) Différentes formes ou catégories de sociétés et groupements d’affaires :
Différentes formes de sociétés et de groupements se distinguent tout d'abord par leur
caractère civil ou commercial, cette distinction pouvant coexister au sein d'une
société commerciale. De plus, les sociétés se différencient des autres groupements,
tels que les associations, par l'absence de recherche de bénéfices, ces dernières
ayant pour objectif de servir l'intérêt général.

6) Sociétés et qualification voisines :


Il existe une distinction entre le contrat de société et le contrat de travail, qui
comprend un lien de subordination de l’employé à l’employeur. Il existe également
une distinction entre le contrat de société et le contrat de prêt (où l’on connaît la
rémunération).

7) Classification des sociétés :


Deux distinctions majeures existent dans la classification des sociétés :
1. Entre associés et actionnaires, où les associés sont généralement responsables
indéfiniment, tandis que les actionnaires ont des risques limités à leurs apports.
2. Entre sociétés de personnes et sociétés de capitaux, où les associés forment des
sociétés de personnes, privilégiant leur personne, et les actionnaires forment des
sociétés de capitaux, mettant en avant les capitaux apportés.

Les sociétés peuvent être classées selon trois critères :


- Le caractère civil ou commercial de leur activité.
- Le caractère personnel plus ou moins prononcé.
- L'étendue de la responsabilité encourue par les associés.

1) Sociétés civiles et commerciales :


- Les sociétés commerciales sont déterminées par leur forme juridique, énumérées
dans l'article 2 de la loi de 1915, indépendamment de leur objet.
- Les sociétés civiles ou commerciales peuvent être définies en fonction de leur objet
social.
Sociétés commerciales peuvent être définies de deux manières :
a) Forme : Certaines automatiquement commerciales selon leur forme juridique (liste
de l'article 2 de la loi de 1915), indépendamment de leur objet. Une société civile
adoptant une forme commerciale reste commerciale.
b) Objet : Pour les autres sociétés, la classification dépend de leur objet social. Si
civil, la société est civile ; si actes de commerce, elle est commerciale. La forme
juridique n'influence pas cette classification. Une société civile d'objet civil reste
civile, même avec une forme commerciale.

2) Sociétés de personnes et sociétés de capitaux :


- Les sociétés de personnes sont basées sur la personne des associés, avec une
structure contractuelle et un organe de gestion individuel.
- Les sociétés de capitaux sont formées en raison des capitaux apportés, avec une
orientation institutionnelle, et sont souvent appelées "intuitu pecuniae."
- Les sociétés hybrides présentent des caractéristiques des deux types.

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3) Sociétés à risques limités et sociétés à risques illimités :
- Dans les sociétés à risques limités, la responsabilité des associés est limitée à leurs
apports, et les créanciers ne peuvent agir directement contre les associés.
- Dans les sociétés à risques illimités, les associés ont une responsabilité
personnelle et indéfinie, et les créanciers peuvent agir directement contre eux après
s'être adressés à la société en vain.

II.Droit commun des sociétés :


A. Notion de société :
1) Contrat de société :
a) Apports :
L'apport en société peut être en numéraire (somme d'argent avec attribution de droits
d'associés) ou en nature (apport d'un bien autre que de l'argent, évalué
pécuniairement et transférable à la société). L'apport en industrie concerne une
activité de l'associé, souvent justifié par ses compétences techniques ou
commerciales. Il est réalisé progressivement. Ces apports représentent le capital,
différencié selon les types de sociétés (numéraire et nature pour les sociétés de
capitaux, tous les types d'apports pour les sociétés de personnes). Les actions
peuvent être utilisées comme paiement pour un immeuble.

b) Participation aux résultats :


La participation aux résultats en société implique la contribution aux pertes et le
partage des bénéfices. La répartition se fait généralement proportionnellement aux
apports de chaque associé. Les clauses léonines, excluant un associé des pertes ou
des bénéfices, sont interdites. La loi autorise des partages inégaux entre classes
d'actions (A, B, C, etc.).

2) Personnalité morale des sociétés :


Les sociétés ont une personnalité morale distincte de celle des associés, définie par
leur statut juridique, conférant identité et autonomie financière dès la signature des
statuts. L'identité repose sur le nom (raison sociale ou dénomination sociale),
différent du nom commercial. Le siège social, lieu juridique, et la nationalité
déterminent la loi applicable.
Le patrimoine de la société, distinct de celui des associés, comprend actif (biens
sociaux) et passif (dettes envers des tiers). Le capital social, parfois exigé, est une
notion comptable. Les capitaux propres, reflétant la valeur économique, englobent le
capital, les réserves et le report à nouveau.
La société a une capacité juridique limitée par des principes spécifiques. Sa
responsabilité peut être civile, délictuelle, contractuelle ou pénale. La responsabilité
pénale est individuelle, visant les organes sociaux, la société et les associés, liée aux
infractions commises.

3) Autres groupements d’affaires :


Le GIE (Groupement d'Intérêt Économique) permet à des entreprises de collaborer
sans perdre leur indépendance, ne pouvant exercer une activité propre. L'association
sans but lucratif diffère des sociétés par l'absence de recherche de bénéfices
partagés entre membres. Elle acquiert la personnalité morale à la publication des
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statuts. La fondation, liée à des activités d'intérêt général, se distingue de
l'association en tant que groupement de biens plutôt que de personnes. La fondation
gère un patrimoine affecté sans cotisations, généralement issu d'un capital de
départ.

B. Constitution de la société :
1. Condition de fond : consentement, objet, cause
Les conditions de fond pour une société comprennent le consentement libre, la
capacité juridique, la licéité de la cause et de l'objet, en accord avec l'ordre public et
les bonnes mœurs. Le consentement doit être non vicié, sans dol ni violence. Au
moins deux personnes sont généralement requises, mais des exceptions existent.
Les associés peuvent être des personnes physiques ou morales, sous réserve de
capacité juridique pour les premières. La société entre époux est acceptée, et
certaines professions réglementées ne peuvent être exercées sous forme de
sociétés commerciales.

2. Conditions de forme : statuts, publicité, R.C.S


Les conditions de forme pour la création d'une société comprennent la rédaction des
statuts, qui doivent contenir des éléments essentiels tels que la forme sociétaire,
l'objet social, la raison de commerce, le siège social, la durée de vie, le capital social,
les noms des associés, et les détails sur les gérants. La rédaction des statuts est
généralement réalisée par écrit, et dans certains cas, en présence d'un notaire. La
publicité de l'acte constitutif, bien que ne conférant pas la personnalité juridique,
informe les tiers de l'existence de la société. La forme et l'étendue de la publicité
varient selon le type de société. En outre, l'immatriculation au Registre de Commerce
et des Sociétés (RCS) est une étape administrative essentielle, permettant à la
société d'agir en justice pour des activités commerciales. L'accomplissement de ces
formalités est crucial pour la création de la société.

3. Nullités :
La nullité d'une société peut découler de manquements aux conditions de fond
(consentement, capacité, objet, cause) et de forme (statuts, publicité,
immatriculation). Des vices du consentement comme le dol ou la violence, des
clauses contraires à l'ordre public, des décisions abusives peuvent également
entraîner la nullité. Elle peut être déclarée par voie judiciaire. Les règles varient selon
la législation et le type de société.

C. Fonctionnement de la société :
1) Les dirigeants sociaux
a) Nomination :
Les dirigeants d'une société sont nommés librement par les associés. Cette
nomination doit être publiée pour protéger les tiers. Les dirigeants sont mandatés par
les associés via une élection au suffrage direct. Le mandat peut se terminer par
révocation, démission ou d'autres causes externes. La révocation peut se faire "ad
nutum", sans motif particulier. Les actes de nomination, révocation et démission
doivent être publiés conformément aux statuts pour être opposables aux tiers de
bonne foi.
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b) Pouvoirs :

Les dirigeants ont des pouvoirs de gestion et d'administration, tandis que l'assemblée
générale a des pouvoirs de disposition. Ils ont le pouvoir de représenter la société,
agissant en son nom et n'engageant pas leur patrimoine personnel. Les pouvoirs de
gestion varient selon le type de société, régis par la loi dans les rapports avec les
tiers et par les statuts dans les rapports internes à la société. Cela s'inscrit dans une
politique de gouvernance d'entreprise alignant les intérêts des dirigeants sur ceux de
la société.

c) Devoirs et responsabilités :
Les dirigeants, dans l'intérêt de la société, ont des devoirs alignés sur les
mandataires, incluant l'exécution sans faute de leur mission et la reddition de
comptes. Leur responsabilité couvre la dimension contractuelle, quasi-délictuelle en
cas de dépassement du cadre contractuel, et une responsabilité pénale, notamment
pour l'abus de biens sociaux.

2) Les associés :
a) Droits et obligations de nature patrimoniale
Les droits financiers des associés comprennent le droit de ne pas subir
d'augmentation d'engagements sans consentement et le droit aux bénéfices et à la
part de l'actif social lors du partage après liquidation.

b) Droits et obligations extrapatrimoniaux :


Les associés ont des droits tels que le droit de faire partie de la société, le droit de
sortir de la société, le droit à l'information, et le droit de participer à la vie sociale
pendant la période d'appartenance à la société.

3) Les contrôleurs :
a) Commissaires aux comptes :
Ce sont des auditeurs internes qui ont un statut de mandataire. Ils ont le droit de
contrôler tous les aspects de la société sans se déplacer, selon l'article 62 de la loi
de 1915. Leur responsabilité est à la fois contractuelle, vis-à-vis de la société, et
délictuelle, conformément à la loi.

b) Réviseurs :
Ils sont des auditeurs externes, distincts des commissaires aux comptes. Les
réviseurs ont un contrat de prestation de service avec la société. Ils sont contrôlés
par CSSF, conseiller de changer de réviseur régulièrement.

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