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Droit fiscal 2021-2022

CROMIE Clara

Cours du 22/09

Impôts sur les revenus – Généralités

• Les textes principaux sont

- Le Code des impôts sur les revenus de 1992 (CIR) et son arrêté d’exécution (AR/CIR)
qui est en fait un ensemble de dispositions existantes qu’on a simplement coordonné.

La liste suivante explique l’origine du Code de 1992 :

1. La loi du 29 octobre 1919 à l’origine de notre système d’impôts sur les revenus
(adopté au lendemain de la première guerre mondiale)
2. Les « lois coordonnées » : la loi du 29 octobre 1919 coordonnée à intervalles
périodiques avec les lois modificatrices
3. La loi du 20 novembre 1962 portant réforme des impôts sur les revenus
4. Le Code des impôts sur les revenus de 1964
5. Le Code des impôts sur les revenus de 1992

- La loi spéciale de financement du 16 janvier 1989


- Les Conventions préventives de la double imposition (utilisation du Modèle OCDE
2017 dans le cadre du cours) qui sont des conventions internationales bilatérales
conclues entre la Belgique et un autre État
- Les Directives de l’UE dans le domaine de la fiscalité des entreprises et de la
coopération administrative

• Les impôts sur les revenus sont au nombre de quatre (article 1er, §1, du CIR)

- Un impôt sur le revenu global des habitants du Royaume, dénommé impôt des
personnes physiques (IPP)
- Un impôt sur le revenu global des sociétés résidentes, dénommé impôt des sociétés
ISoc)
- Un impôt sur les revenus des personnes morales belges autres que les sociétés,
dénommé impôt des personnes morales (IPM)
- Un impôt sur les revenus des non-résidents, dénommé impôt des non-résidents (INR)

Ces impôts peuvent être distingués selon ce qui fonde la compétence fiscale de la Belgique.
L’IPP, l’ISoc et l’IPM fondent leur compétence fiscale sur le domicile fiscal. En revanche, ce
qui fonde la compétence fiscale de l’INR est la source du revenu. Il peut s’agir d’un loyer, d’un
revenu mobilier, d’un dividende perçu par une société établie en Belgique, … La différence est
donc que la Belgique impose le contribuable sur leur revenu mondial dans les 3 premiers tandis
que le dernier impose le contribuable sur ses seuls revenus de source belge. Pour comparer avec
le droit américain par exemple, la compétence fiscale est également fondée sur la nationalité
là-bas.

Lorsque deux États adoptent le même système, on a parfois un problème de double imposition.
On a par exemple le contribuable qui a son domicile fiscal dans un État et qui perçoit un revenu

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qui trouve sa source dans un autre État. On peut remédier à ce problème de deux façons qui
sont soit ceux organisés par le CIR, soit ceux organisés par des conventions internationales
bilatérales dites les « conventions préventives de la double imposition » (CPDI).

• Structure du CIR est telle :

- Titre I. Divers impôts sur les revenus- définitions (art. 1 et 2)


- Titre II. Impôt des personnes physiques (art. 3 à 178/1)
- Titre III. Impôt des sociétés (art. 179 à 219quater)
- Titre IV. Impôt des personnes morales (art. 220 à 226)
- Titre V. Impôt des non-résidents (art. 227 à 248/3)
- Titre VI. Disposition commune aux quatre impôts (art. 249 à 296)
- Titre VII. Établissement et perception des impôts (art. 297 à 463)
- Titre VIII. Attribution aux provinces, aux agglomérations et aux communes (art. 464 à
470/2)
- Titre IX. Le revenu cadastral des biens immobiliers (art. 471 à 504)
- Titre X. Dispositions transitoires (art. 505 à 549)

Impôt des personnes physiques – Vision d’ensemble

• L’assujettissement à l’IPP

L’art. 3 du CIR : « Sont assujetties à l’impôt des personnes physiques les habitants du
Royaume » (notion définie à l’article 2, §1, 1° du CIR).

L’art. 4 du CIR énonce ceux qui ne sont pas assujettis à l’impôt des personnes physiques.

En ce qui concerne les habitants du Royaume (art. 2 du CIR), il y a un critère physique (avoir
son domicile en Belgique ou y avoir le siège de sa fortune) qui s’apprécie en fonction des
éléments de fait. Cette notion présente deux présomptions dont l’une est réfragable et concerne
l’inscription au Registre national des personnes physiques et dont l’autre est irréfragable et
concerne l’endroit où est établi le ménage (pour les personnes mariées et les cohabitants
légaux).

Cas pratiques :

1. Quid si une personne physique qui vit et travaille en Belgique, mais achète une maison en
Colombie (pas de CPDI avec la Belgique), pays dans lequel elle se rend 15 jours chaque année,
et déclare y établir son domicile fiscal ?

Le domicile d’une personne s’apprécie sur base des éléments de fait et comme la personne vit
et travaille en Belgique, cette personne physique est assujettie à l’IPP en vertu des articles 2 et
3 du CIR.

2. Quid si une personne physique qui vit et travaille en Colombie mais qui vivait et travaillait
autrefois en Belgique et a oublié de se faire radier du registre national des personnes physiques ?

L’inscription au Registre national des personnes physiques étant une présomption réfragable,
elle devra prouver qu’elle a quitté la Belgique et déménagé en Colombie.

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3. Quid si une personne physique qui vit et travaille en Colombie mais dont la fortune est
constituée de trois biens immobiliers situés en Belgique ?

La notion de siège de la fortune a une signification particulière puisqu’on vise non pas l’endroit
où se situe la fortune, mais bien l’endroit d’où elle est gérée. Donc ici, bien que la fortune soit
située en Belgique, elle est gérée depuis la Colombie à partir du moment où c’est l’endroit où
la personne physique vit et y a établi son domicile. La personne physique ne sera pas assujettie
à l’IPP, mais bien à l’INR.

4.Quis si une personne physique qui travaille en Colombie toute l’année mais dont le conjoint
et les enfants vivent en Belgique ?

Le ménage étant établi en Belgique, cette personne physique est assujettie à l’IPP puisque la
présomption est irréfragable en ce qui concerne l’endroit où est établi le ménage.

• Base imposable – généralités

La base imposable à l’IPP est le « revenu imposable », à savoir « l’ensemble des revenus nets,
diminué des dépenses déductibles » (CIR art. 6, al. 1er).

Le point de départ est les revenus bruts. Il peut s’agir d’un revenu, de revenus immobiliers, de
dividendes des intérêts, … Pour les conserver j’ai dû exposer certaines dépenses/frais (revenus
nets). Ces frais, sur le plan des principes, le Code en autorise la déduction parce que mon
enrichissement véritable doit s’apprécier uniquement compte tenu de ces frais. Une fois que j’ai
mon revenu net, je vais encore devoir en déduire les dépenses déductibles sur une logique
d’incitant fiscal. Il ne reste aujourd’hui plus que les rentes alimentaires.

Ce revenu final qui forme le revenu imposable à l’impôt des personnes physiques va être
apprécie sur une période qui est la période dite imposable qui dure généralement 1 an. Enfin, il
faut tenir compte de deux critères qui viennent compliquer les choses qui sont le cas des pertes
et le cas du mariage et de la cohabitation légale.

En principe, les montants mentionnés dans le Code sont des montants de base, donc non-
indexés. Pour connaître le montant applicable des revenus de 2021, il faut se référer à l’avis
d’indexation relatif à l’exercice d’imposition 2022. La base légale est l’article 178 du CIR et
reprend les calculs faits par l’administration fiscale. Ils n’ont pas de force normative puisqu’il
s’agit d’un simple calcul sur la base de ce que prévoit l’article 178 du CIR.

• Base imposable – revenus bruts

Notre droit fiscal adopte une approche cédulaire. A contrario l’approche du droit fiscal
américain dit qu’est un revenu tout enrichissement quelle qu’en soit la source. Chez nous le
seul enrichissement ne suffit pas à former un revenu car il faut en plus que cet enrichissement
tombe dans une des catégories de revenu prévues par le CIR. Le terme cédule était utilisé pour
désigner une catégorie de revenu et la loi du 29 octobre 1919 était d’ailleurs intitulée « loi
établissant des impôts cédulaires sur les revenus et un impôt complémentaire sur le revenu
global ».

Aujourd’hui il existe 4 grandes catégories, elles-mêmes composées de sous-catégories : revenus


immobiliers (loyers tirés d’une immeuble mis en location), revenus mobiliers (dividendes,
intérêts), revenus professionnels (bénéfices et profits (revenus d’indépendants), rémunérations

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(de travailleurs ou de dirigeants d’entreprise), et revenus de remplacement (allocations de
chômage, pension)) et revenus divers (catégorie plus récente et instaurée par la loi du 20
novembre 1962).

Cette opposition entre une approche cédulaire et une approche plus globale où l’on frapperait
tout enrichissement du contribuable quelle qu’en soit la source doit être nuancée depuis
l’introduction de la catégorie des revenus divers et plus particulièrement depuis l’introduction
de la sous-catégorie de revenus divers visée aujourd’hui à l’art. 90, al. 1, 1°, du CIR. Cette
disposition est libellée en des termes très larges et vise « les bénéfices ou profits, quelle que
soit leur qualification, qui résultent, même occasionnellement ou fortuitement, de prestation,
opération ou spéculations quelconques ou de services rendus à des tiers, en dehors de l’exercice
d’une activité professionnelle, à l’exclusion des opérations de gestion normale d’un patrimoine
privé consistant en biens immobiliers, valeurs de portefeuille ou objets mobiliers ». On peut
donc très vite tomber dedans tant elle est large.

Le principe demeure tout de même comme l’illustre l’exemple de la donation. En principe, le


donataire n’est pas imposable sur la donation qu’il reçoit à défaut d’intervention active parce
que quand on lit la disposition et qu’on en apprécie la portée au regard des travaux préparatoires,
il faut à tout le moins une intervention active du contribuable. Or, le donataire, quand il reçoit
une donation, il n’y a aucune intervention active de sa part. Il n’est donc pas imposable sur ce
qu’il reçoit à titre de revenus divers. Il y a donc une exception qui est que si le donataire se livre
à des manœuvres de captation, il y a une intervention active et l’administration fiscale serait
permise de taxer les montants obtenus à la suite de ces manœuvres de captation à titre de
revenus divers. Il y a donc bien un contraste avec le droit américain puisque le droit fiscal taxe
tout enrichissement quelle qu’en soit la source, donc aussi tout ce qui est perçu par un donataire.
C’est la raison pour laquelle sur le plan de la technique législative, contrairement à notre CIR,
en droit fiscal américain on a une disposition qui exclut expressément ce que le donataire reçoit
de la base imposable.

Le revenu brut peut être de source belge ou étrangère (art. 5 CIR) et il peut également être en
espèce ou en nature sachant que le revenu en nature peut poser des difficultés sur le plan de
l’évaluation. C’est la raison pour laquelle le CIR recourt à des forfaits notamment en matière
de revenus professionnels.

• Base imposable- revenus nets

Quand on pense à l’opposition entre revenu brut et revenu net, on pense parfois à une distinction
différente de celle que l’on retrouve dans le code parce qu’on oppose revenu brut et revenu net
pour viser par revenu net, le revenu net d’impôt ou de précompte diminué également des
cotisations de sécurité sociale. Le cas type est celui de la rémunération mensuelle brute de
3000€. La rémunération nette sera celle de la rémunération brute déduction faite du précompte
professionnel et des cotisations de sécurité sociale à charge du travailleur (1000€) qui sera donc
de 2000€.

Ce n’est pas la signification que le CIR emploie puisqu’il entend par revenu net « les revenus
nets des frais faits en vue de les acquérir ou de les conserver ». Le cas type est celui des frais
professionnels. Un travailleur a des revenus professionnels bruts constitués de rémunérations
de travailleur de 40000€, des frais professionnels de 15000€ qu’il peut déduire et donc des
revenus professionnels nets de 25000€.

La logique est que l’enrichissement du contribuable correspond au revenu net. C’est un principe
qui est très ancien puisqu’on le retrouve déjà en droit romain à propos de la notion de fruits qui
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est la manière dont le droit civil appréhende la notion de revenus. On entend par fruit que ce
qui provient d’une chose, déduction faite des dépenses qu’ils ont occasionnées pour les faire
venir, les amasser et les conserver.

• Base imposable – dépenses déductibles de l’ensemble des revenus nets

A côté des revenus professionnels nets, le contribuable peut également avoir des revenus
d’autres catégories.

Après avoir diminué le revenu brut des frais en vue de les acquérir ou de les conserver, on a les
dépenses déductibles. On n’est plus dans une optique de limiter le revenu frappé par l’impôt à
l’enrichissement effectif du contribuable, mais bien dans une optique d’incitant fiscal. Il
n’existe aujourd’hui plus que les rentes (et arriérés de rentes) alimentaires. Selon cet incitant
fiscal, le contribuable peut déduire de l’ensemble de ses revenus nets 80% des rentes
alimentaires pour autant que

1. le crédirentier ne fasse pas partie du ménage du contribuable (étudiant en kot qui rentre le
weekend chez ses parents ne remplit pas cette condition)

2. la rente alimentaire soit payée en exécution d’une obligation résultant du Code civil ou du
Code judiciaire ou d’une obligation légale analogue d’une législation étrangère

3. le paiement soit « régulier ». L’administration fiscale considère qu’une simple périodicité


suffit, mais des auteurs considèrent que la condition serait en fait plus sévère et qu’il faut
entendre par paiement régulier, le paiement dont le débirentier s’acquitte en temps et en heure.
Si le débirentier tarde à effectuer le paiement, la condition ne serait pas remplie avec la
conséquence que le débirentier perdrait le bénéfice de cet incitant fiscal consistant à pouvoir
déduire 80% des rentes alimentaires.

Exemple :
Un contribuable dont l’ensemble des revenus nets est de 35000€ (revenus professionnels nets
constitués de rémunérations de travailleurs à 25000€ et revenus immobiliers nets à 10000€).
Les dépenses déductibles sont de 4000€ (rentes alimentaires de 5000€ x 80%). L’ensemble des
revenus nets diminués des dépenses déductibles (base imposable à l’IPP) est donc de 31000€
(35000€-4000€).

Il faut bien distinguer les dépenses déductibles des frais faits en vue de conserver ou d’acquérir
un revenu brut puisqu’il intervient à un stade différent et répond à une logique différente
(l’incitant fiscal n’ayant pour but que de frapper l’enrichissement effectif du contribuable).

Le régime fiscal chez le crédirentier assujetti à l’IPP (qui a donc son domicile fiscal en
Belgique) est imposable sur 80% des rentes alimentaires à titre de revenus divers. On en tire
généralement un avantage fiscal puisque l’IPP est progressif par tranches et que le taux
marginal d’imposition du crédirentier est souvent inférieur, en raison d’un revenu imposable
moindre, à celui du débirentier.

Les dépenses déductibles se limitent aux rentes alimentaires. Le législateur fédéral et les
législateurs régionaux privilégient aujourd’hui une autre technique pour octroyer un avantage
fiscal qui est celle de la réduction d’impôts. C’est parce que la dépense déductible de l’ensemble
des revenus nets a un effet paradoxal qui est celui de favoriser davantage les contribuables les
plus aisés. En effet, la dépense déductible de l’ensemble des revenus nets est d’autant plus
avantageuse que le taux d’impôt est élevé, or l’IPP est un impôt progressif par tranches et le
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taux d’imposition marginal (applicable sur la dernière tranche de revenus) est d’autant plus
élevé que les revenus sont importants.

Exemple :
Que la dépense déductible est d’autant plus avantageuse que le taux d’impôt est élevé.
J’ai une dépense déductible de 1000€. Si le taux d’impôt est de 90%, ça fait 900€. Pour une
base imposable de 10000€, l’impôt est de 9000€ sans la déduction (10000€ x 90%) et de 8100
avec la déduction (9000€ x 90%). L’avantage fiscal est une économie de 900€. J’ai aussi une
dépense déductible de 1000€. Si le taux d’impôt est de 10%, ça fait 100€. Pour une base
imposable de 10000€, l’impôt est de 1000€ sans la déduction (10000€ x 10%) et de 900€ avec
la déduction (9000€ x 10%). J’ai une économie d’impôt de 100€.

•Base imposable – période imposable

Le « revenu imposable » s’apprécie sur une période donnée, à savoir la « période imposable »,
qui correspond en principe à l’année civile. On dit en principe puisqu’on aura des périodes où
la période imposable sera moindre (résident fiscal belge qui s’expatrie, décès) (AR/CIR, art.
203, §1, al. 2.). Dans ce cas précis, la période imposable est celle qui correspond à la partie de
l’année au cours de laquelle ces conditions ont été réunies. Par dérogation à l’article 200, le
millésime de l’année au cours de laquelle les conditions d’assujettissement à l’impôt ont cessé
d’être réunies désigne l’exercice d’imposition.

L’impôt est établi en principe pour l’exercice d’imposition (= l’année où l’administration


fiscale est sensée effectuer ses travaux d’imposition) dont le millésime suit celui de la période
imposable. La cotisation d’impôt des personnes physiques que l’administration établit sur le
revenu imposable du contribuable sur la période imposable 2021, l’administration fiscale n’est
pas en mesure d’établir les cotisations en 2021 parce que le revenu imposable du contribuable
pour la période imposable de 2021 ne sera connu qu’à la clôture de la période imposable et
donc pas encore connu avant 2022 (CIR, art. 360 et AR/CIR, art. 200, a)

Il est important de déterminer la période imposable à laquelle se rattache tel ou tel élément
concourant à former la base imposable à l’IPP. L’article 360, al. 1er du CIR dispose que
« l’impôt dû pour un exercice d’imposition est établi sur les revenus que le contribuable a
recueillis pendant la période imposable ». Cela revient à dire que le revenu se rattache en
principe à la période imposable de sa naissance.

Exemple :
Je travaille pour un employeur et j’effectue des prestations en 2021 pour lesquelles l’employeur
me doit une rémunération. Cette rémunération devient exigible en 2021 et est de 40000€ brut.
L’employeur ne paie en 2021 que 25000€ et me paie 15000€ en 2022. A quelle période
imposable va-t-on rattacher ces rémunérations relatives à des prestations effectuées en 2021 qui
sont devenues exigibles en 2021, mais dont une partie n’a été payée qu’en 2022 ? Le droit fiscal
doit prévoir un critère pour déterminer la manière de rattacher différents frais que le
contribuable a pu exposer pour acquérir ou conserves ses revenus. La réponse est qu’on ne va
pas regarder le moment où les prestations ont été accomplies ni le moment où les rémunérations
sont devenues exigibles, mais bien le moment où la rémunération a été mise à la disposition du
contribuable. Donc par application du principe que le revenu se rattache à la période imposable
de sa naissance, les rémunérations de travailleurs se rattachent à la période imposable 2021 à
concurrence de 25000€ et à concurrence de 15000€ pour la période imposable de 2022 s’il ne
peut pas ou ne veut pas me payer les 40000 en 2021. Par contre, si c’est à ma demande qu’il le
fait, les 40000€ se rattacheront à la période imposable de 2021.

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Il est donc important de déterminer la période imposable à laquelle se rattache tel ou tel élément
concourant à former la base imposable à l’IPP. Le fait générateur du revenu de droit commun
est la mise à disposition (supra) laquelle comporte deux extensions par rapport au paiement. La
première est que le revenu est mis à disposition dès qu’il est susceptible de paiement immédiat
parce que le débiteur peut et veut payer, peu importe que le paiement effectif intervienne plus
tard (on veut éviter que le contribuable décide sur quelle période imposable il préfère se voir
recevoir le paiement). La deuxième est que la mise à disposition peut revêtir une forme autre
que le paiement (un vol, un détournement par le contribuable).

Remarque : pour viser le revenu mis à disposition, le CIR et l’AR/CIR utilisent plutôt
l’expression de revenu « payé ou attribué ».

Il y a trois conceptions sur la distinction entre les impôts directs et les impôts indirects.

1. l’impôt direct frappe une situation durable (revenu imposable sur une période donnée en
matière d’impôts sur les revenus), alors que l’impôt indirect frappe un fait ou un acte isolé
(importation de marchandises, livraison de bien, …)

2. L’impôt direct est établi par voie de rôle, ce qui n’est pas le cas de l’impôt indirect.

3. L’impôt direct frappe le débiteur de l’impôt, alors que l’impôt indirect frappe un tiers, à qui
le débiteur de l’impôt le répercute.

• Base imposable – cas des pertes

La perte est un solde négatif, pour une catégorie ou sous-catégorie de revenus, entre les revenus
bruts et les frais faits en vue de les acquérir ou de les conserver.

Exemple :
J’ai une rémunération de 10000€, j’ai des frais professionnels de 15000€. J’ai donc une perte
de 5000€. C’est donc le solde entre mes revenus bruts et les frais faits en vue de conserver ou
d’acquérir ce revenu brut pour une catégorie ou sous-catégorie de revenus.

La logique du système est telle qu’il n’y a pas d’imputation de la perte sur les revenus nets
d’autres catégories ou sous-catégories (approche cédulaire). Elle est telle qu’il n’y a pas non
plus d’imputation de la perte sur les revenus nets de la même catégorie ou sous-catégorie mais
c’est ok de les imputer sur une autre période imposable (principe d’annualité de l’impôt).

Le législateur a par contre prévu des exceptions, en particulier en ce qui concerne les revenus
professionnels.

• Base imposable- cas du mariage et de la cohabitation légale

La difficulté théorique est de savoir si en cas de mariage ou de cohabitation légale il faut


considérer d’un point de vue fiscal qu’on a qu’un seul contribuable puisqu’il entraine la
formation d’une unité fiscale ou au contraire, faut-il considérer qu’on a deux contribuables
distincts. Le CIR adopte une position entre les deux puisqu’il pose comme principe « qu’en cas
de mariage ou de cohabitation légale, une imposition commune (CIR, art. 2, §1er, 3°, et 126,
§1er) est établie au nom des deux conjoints ». Il y a donc une déclaration commune et un impôt
établi au nom des deux conjoints avec une solidarité de principe à la dette de l’impôt. Le CIR
expose ensuite un « décumul » des revenus pour la détermination du revenu imposable à l’IPP :

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« nonobstant cette imposition commune, le revenu imposable de chaque conjoint est fixé
séparément » (CIR, art.126, §1er). C’est ensuite l’article 127 du CIR qui dit ce qu’il faut faire
pour déterminer le revenu imposable à l’IPP de chaque conjoint. Pour synthétiser, le revenu
imposable de chaque conjoint correspond à ses revenus d’activité, aux revenus qui lui sont
propres en vertu du droit patrimonial et à 50% de la totalité des autres revenus.

Il y a quelques mécanismes qui viennent lisser la base imposable des deux conjoints dans une
certaine mesure. Le premier est que les pertes sont imputables sur les revenus de l’autre conjoint
dans une certaine mesure (CIR, art. 129). Le deuxième est le régime du quotient conjugal (CIR,
art. 87 et 88). En effet, si les revenus professionnels d’un conjoint n’atteignent ni 11170€
(montant indexé pour l’exercice d’imposition 2022 ; montant de base de 6700€), ni 30% du
total des revenus professionnels des deux conjoints. L’imputation d’une quote-part permet
d’atteindre le premier de ces deux seuils. Troisièmement on a le régime du conjoint aidant (CIR,
art. 86). En cas d’activité indépendante (« bénéfices ou profits »), lorsque les revenus tirés par
le conjoint aidant d’une éventuelle activité professionnels distincte ne dépassent pas 14510€
(montant indexé pour l’exercice d’imposition 2022 ; montant de base de 8700€). Il peut y avoir
une imputation d’une quote-part des bénéfices ou profits au conjoint aidant, à concurrence de
la rémunération normale des prestations, sans pouvoir dépasser 30% des revenus de l’activité
professionnelle exercée en commun, « sauf s’il est manifeste que les prestations du conjoint
aidant lui ouvrent droit à une quote-part plus importante ».

Cours du 23/09

IPP – Calcul de l’IPP

• Le principe – l’imposition globale

Le principe de l’imposition globale au tarif d’imposition se trouve à l’article 130 du CIR (dont
les montants sont indexés pour l’exercice d’imposition 2022). Il est de

- 25% pour la tranche de revenus de 0,01 à 13540€


- 40% pour la tranche de revenus de 13540 à 23900€
- 45% pour la tranche de revenus de 23900 à 41360€
- 50% pour la tranche de revenus supérieure à 41360€

L’impôt progressif par tranches consiste en une division du revenu imposable en tranches et en
une augmentation du taux d’imposition à mesure que l’on passe aux tranches les plus élevées.
On obtient ainsi l’impôt de base.

Exemple :
Le contribuable a un revenu imposable à l’IPP de 41360€ (revenus professionnels nets
constitués de rémunérations de travailleurs de 25000€ et revenus immobiliers nets de 16360€).
Il y a un impôt sur les différentes tranches. Un impôt sur la première tranche de 3385€ (25% x
13540€), un impôt sur la deuxième tranche de 4144 € (40% x (23900€ - 13540€)) et un impôt
sur la dernière tranche de 7857 € (45% x (41360€ - 23900€). L’impôt de base est donc de
15386€ (3385€ + 4144€ + 7857€).

Il faut tenir compte de la quotité de revenu exemptée d’impôt dont les modalités sont inscrites
aux articles 131 et suivants du CIR. L’idée de cette dernière est que par rapport aux tarifs qu’on
a à l’article 130, la première tranche de revenus doit être frappée non pas de 25%, mais doit
être exonérée. Le montant de base est de 9050€ (montant indexé pour 2022), majoré de
suppléments pour personnes à charge.
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La raison d’être de la quotité du revenu exemptée d’impôt est qu’il faut un minimum vital. D’un
point de vue technique, le calcul aboutit à un résultat un rien plus favorable pour le contribuable
dans certaines constances que la technique qui consisterait à exonérer purement et simplement
la première tranche de revenus. Donc, techniquement l’impôt de base est diminué de l’impôt
sur la quotité du revenu exemptée d’impôt.

Exemple :
On a un impôt de base de 15386€. L’impôt sur la quotité du revenu exemptée d’impôt est de
2262,5€ (25% x 9050€). L’impôt de base diminué de l’impôt sur la quotité du revenu exempté
d’impôt est de 13123,5€ (15386€ - 2262,5€). Ce montant correspond à « l’impôt État » (loi
spéciale de financement, art. 5/2, §2 – voir infra).

Remarque terminologique :
Le taux marginal est le taux le plus élevé auquel le contribuable est imposé. Ainsi, le taux
marginal du contribuable qui a un revenu imposable de 20000€ est de 40%, tandis que le taux
marginal du contribuable qui a un revenu imposable globalement de 45000€ est de 50%.
Attention, il ne faut pas le confondre avec le taux moyen que l’on obtient en divisant l’impôt
par le revenu imposable. Dans l’exemple, le taux s’élève à 31,73% (impôt de 13123,5€, revenu
imposable de 41360€). En application, l’imposition est distincte des indemnités de préavis
(CIR, art. 171, 5°, a).

• L’exception – l’imposition distincte

Par exception, certains revenus sont imposables distinctement, donc non pas de manière
globale. Le régime est organisé à l’article 171 du CIR. Le régime de faveur ne s’applique pas
si l’imposition distincte est moins favorable que l’imposition globale (CIR, art. 171 in limine).

Exemple :
Un contribuable a un revenu imposable à l’IPP de 42360€ (ses revenus professionnels nets
constitués de rémunérations de travailleurs est de 25000€, ses revenus immobiliers nets de
16360€ et ses revenus mobiliers nets constitués d’un dividende de source française, encaissé
auprès d’une banque française est de 1000€).
Sans le régime d’imposition distincte, le dividende de 1000€, globalisé avec les autres revenus
serait imposable au taux de 50% ce qui donnerait un supplément d’impôt de 500€. L’impôt
(après application de la quotité exemptée serait de 13623,5€ (13123,5€ + 500€).
Avec l’application du régime de l’imposition distincte, le dividende, au lieu d’être globalisé
avec les revenus professionnels et les revenus immobiliers est imposable directement à un taux
qui est en principe de 30% (CIR, art. 171, 3°), ce qui donne un supplément d’impôt de 300€.
L’impôt (après application de la quotité exemptée) serait de 13423,5 (13123,5€ + 300€).

Exemple :
Quid si le contribuable a un revenu imposable à l’IPP de 8000€ constitué par des revenus
professionnels nets de 7000€ et un dividende de source française encaissé auprès d’une banque
française de 1000€ ?
Comme le contribuable a des revenus faibles, qu’on a une quotité du revenu exempté d’impôt
de 9050€, un contribuable ne paiera en principe pas d’IPP. Donc si on soumet ce dividende au
régime de l’imposition distincte, le contribuable se retrouverait dans une situation où il devrait
payer un impôt de 300€, alors que lorsqu’on globalise ce dividende avec ses 7000€ de revenus
professionnels et qu’on soumet les 8000€ au régime de l’impôt global, comme on a ce
mécanisme de quotité du revenu exempté d’impôt, l’impôt global est de 0. Dans cet exemple,

9
le dividende ne sera pas soumis au régime de l’imposition distincte, mais sera imposable
globalement avec les revenus professionnels.

• Régionalisation partielle de l’IPP

Les Régions sont autonomes fiscalement, mais « la loi détermine (…) les exceptions dont la
nécessité est démontrée » (Const., art. 170, §2). Il y a une interdiction faite aux Régions de
lever des impôts dans les matières qui font l’objet d’une imposition par l’État, sauf dans les cas
prévus par la loi spéciale de financement (loi du 23 janvier 1989 relative à la compétence
fiscale, art 1er).

La loi spéciale de financement, art. 5/1, §1er, al. 1er exprime que les Régions ont le droit d’établir
des centimes additionnels sur une partie de l’impôt des personnes physiques, ainsi qu’elles ont
le droit d’appliquer (notamment) des réductions d’impôt sur ces centimes additionnels (voir
infra).

Le critère de localisation est l’endroit où le contribuable a établi son domicile fiscal (loi spéciale
de financement, art. 5/1, §1er, al. 1er, et §2).

Les centimes régionaux sont établis sur « l’impôt État réduit », lequel se détermine à partir de
« l’impôt État » (loi spéciale de financement, art. 5/1, §1er, al. 1, et 5/2).

La notion « d’impôt État » est à trouver dans la loi spéciale de financement à l’article 5/2, §2.

Exemple :
Un contribuable a un revenu imposable à l’IPP de 42360€ (ses revenus professionnels nets
constitués de rémunérations de travailleurs sont de 25000€, ses revenus immobiliers nets sont
de 16360€ et ses revenus mobiliers nets constitués d’un dividende de source française, encaissé
auprès d’une banque française de 1000€).

- Notion « d’impôt État »


La partie globalement imposable s’élève à 41360€, la partie imposable distinctement
s’élevant à 1000€. Concernant l’impôt sur la partie imposable globalement, l’impôt de
base est de 15386€ et l’impôt de base diminué de la quotité du revenu exemptée d’impôt
est de 13123,5€. En ce qui concerne l’impôt total sur les revenus imposés distinctement
est de 300€. Le principal + l’impôt total sur les revenus imposés distinctement est donc
de 13423,5€. L’impôt d’État est donc de 13123,5€, car il faut soustraire la partie de
l’impôt afférent aux dividendes, laquelle s’élève à 300€ (cette partie constitue 100% de
l’IPP fédéral – voir la loi spéciale de financement, art. 5/1 ,3). La raison est telle que
l’impôt afférent aux dividendes doit rester à 100% pour l’État, voilà pourquoi on ne veut
pas les faire rentrer dans la définition d’impôt État (qui est la base pour définir la
compétence fiscale de l’État et des Régions en matière d’IPP). Une autre raison est que
ce régime d’imposition distincte s’applique aussi dans certains cas à d’autres types de
revenu.

- Notion « d’impôt État réduit »


La loi spéciale de financement, art 5/2, §1er, al. 1er dit que ça correspond à « l’impôt État
diminué d’un montant égal à l’impôt État multiplié par le facteur d’autonomie ». Le
facteur d’autonomie est de 24,957% (AR du 19 décembre 2017 fixant le facteur
d’autonomie). L’impôt État réduit correspond donc à 75,043% de l’impôt État (1 –
24,957% d’impôt État). Dans l’exemple, l’impôt État réduit s’élève à 9848,27€
(13123,5€ x 75,043%).

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Exemple de la Région wallonne pour les centimes additionnels régionaux :
Les centimes additionnels de l’impôt État réduit sont de 33,257% (décret wallon du 13
décembre 2017 portant diverses modifications fiscales, art. 33). Dans l’exemple, les centimes
additionnels régionaux sont donc de 3275,24€ (9848,27€ x 33,257%). L’impôt État réduit
majoré des centimes additionnels s’élève à 13123,51€ (9845,27€ + 3257,24€) ce qui correspond
au montant de l’impôt État qui est de 13123,5€.

L’incidence est nulle ou faible de ce volet de la régionalisation partielle de l’IPP pour le


contribuable. En Région flamande l’impôt État réduit majoré des centimes additionnels
régionaux correspond à l’impôt État (comme en Région wallonne). En Région de Bruxelles-
Capitale, l’impôt État réduit majoré des centimes additionnels régionaux correspond à 99,5%
de l’impôt État (légère diminution en faveur du contribuable).

L’impôt total dans l’exemple de 13423,5€. L’impôt des personnes physiques fédéral est de
10148,27€ (impôt État réduit de 9848,27€ et impôt afférent aux dividendes de 300€). L’impôt
des personnes physiques régional est de 3275,24€.

• La réduction d’impôt (technique aujourd’hui privilégiée pour octroyer un incitant fiscal)

Tant l’État fédéral que les Régions octroient des réductions d’impôt. Les Régions sont par
contre seules compétentes pour octroyer des réductions d’impôt relatives aux dépenses visées
à l’article 5/5, §4, al 1er, de la loi spéciale de financement (comme « les dépenses payées (…)
pour des prestations payées avec des titres-services » (loi spéciale de financement, art. 5/5, §4,
al 1er, 4°)).

Il y a pourtant quelques réductions d’impôt (fédérales) importantes en pratique :

- Les réductions d’impôt pour épargne de long terme (CIR, art. 1451 à 14516), notamment
*La réduction d’impôt relative à l’épargne-pension
*La réduction d’impôt relative aux sommes affectées à l’amortissement ou à la
reconstitution d’un emprunt hypothécaire contracté en vue de construire, acquérir ou
transformer une habitation située dans l’EEE autre que l’habitation propre du
contribuable.
® La réduction d’impôt relative aux dépenses en vue d’acquérir ou de conserver
l’habitation propre sont de compétence exclusive des Régions (loi spéciale de
financement, art. 5/5, §4, al. 1er, 1°).
® Sur la notion d’habitation propre, voir le CIR, art. 2, §1er, 15°, et la loi spéciale de
financement, art. 5, §4, al. 2 et suivants).
- Les réductions pour libéralités (CIR, art. 14533).
- Les réductions d’impôt pour garde d’enfant (CIR, art 145 35).

Le cas de la réduction pour épargne-pension est de 30% si le paiement maximum est de 990€
(et de 25% si le paiement est supérieur jusqu’à 1270€ ; montants indexés pour l’exercice
d’imposition 2022). Si le paiement d’impôt est de 990€, la réduction d’impôt est de 297€ (30%
de 990€).

Exemple :
Si on reprend l’impôt total dans l’exemple de 13423,5€, l’impôt État réduit et l’impôt afférent
au dividende est de 10148,27€. La réduction d’impôt est de 297€. LIPP fédéral est de 9851,27€
(10148,27€ - 297€). L’IPP régional est de 3257,24€. L’impôt total est donc de 13126,51€

11
(9851,27€ + 3257,24€). Pour comparer avec le montant de 13423,51€, la différence s’explique
par la réduction d’impôt fédérale pour épargne-pension de 297€).

• Additionnels communaux

Il y a une autonomie fiscale des communes, mais « la loi détermine (…) les exceptions dont la
nécessité est démontrée » (Const., art. 170, §4). Il y a une interdiction de principe pour les
communes (et les provinces) d’établir des centimes additionnels à l’IPP, à l’Isoc, à l’IPM et à
l’INR « ou des taxes similaires sur la base ou sur le montant de ces impôts » (CIR, art. 464, 1°).
Par dérogation, « les communes peuvent établir une taxe additionnelle à l’impôt des personnes
physiques » (CIR, art. 465). Le calcul sur l’impôt total est diminué de la partie de l’IPP fédéral
afférent aux dividendes et aux intérêts (CIR, art. 466).

Illustration :
Le règlement-taxe de la ville de Braine-le-Comte du 4 novembre 2019 qui instaure une taxe
communale additionnelle de 8,8%.
Si on poursuit avec le même exemple (en tenant compte de la réduction pour épargne-pension),
l’impôt total de 13126,€ est afférent au dividende de 300€. La base de calcul de la taxe
communale additionnelles est de 12828,51€ (13126,51€ - 300€). La taxe communale
additionnelle est donc de 1128,73€ (12826,51€ x 8,8%) et la charge fiscale totale est de
14255,25€ (13126,51€ + 1128,73€).

Précomptes et versements anticipés

Le principe est que « les impôts sont perçus par voie de précomptes dans les limites et aux
conditions prévues au titre VI, chapitre 1er » (CIR, art. 1er, §2).

Il existe trois précomptes

- Le précompte professionnel (PrPr) qui est une véritable avance sur l’impôt
- Le Précompte mobilier (PrM) qui est une véritable avance sur l’impôt sur le plan des
principes puisque l’impôt est souvent définitif en pratique en raison du régime du
précompte mobilier libératoire (infra).
- Le précompte immobilier (PrI) qui est devenu un impôt distinct (régionalisé).

Illustration du mécanisme à l’aide du PrPr


- Le principal cas d’application est le PrPr dû par le débiteur de rémunérations de source
belge (CIR, art. 270, al. 1er, 1°).
- Les barèmes sont établis par le Roi (CIR, art. 275 ; voir AR/CIR, art. 88 et annexe 3).
- Il est « exigible » en raison de la mise à disposition des rémunérations (CIR, art. 273,
1°).
- La déclaration au PrPr est à déposer par le débiteur des rémunérations (CIR, art. 312, et
AR/CIR, art. 90).
- Le paiement au Trésor est mensuel ou trimestriel selon que le PrPr afférent aux revenus
de l’année précédente atteint ou non 41700€ (avec cependant un régime particulier de
fin d’année) (CIR, art. 412, al2 à 6).
- Il est imputable sur l’IPP (CIR, art. 276, al. 1er, et 296, al. 1er) et sur la taxe communale
additionnelle (CIR, art. 304, §2, al. 1er).
- Si le PrPr est inférieur à ce que doit le contribuable, ce dernier devra payer la différence
dans les deux mois de l’envoi de l’avertissement-extrait de rôle (CIR, art. 413, al. 1er).
- Enfin, si le PrPr est supérieur à ce que doit le contribuable, il se verra rembourser la
différence (CIR, art. 304, §2, al. 1er).

12
Cours du 29/09

Il y a une majoration de l’impôt total en cas d’absence ou d’insuffisance de versements anticipés


(CIR, art. 157 à 168). Il concerne en substance les indépendants (revenus professionnels ayant
la nature de bénéfices, de profits, de rémunérations des dirigeants d’entreprise ou de
rémunérations des conjoints aidants (CIR, art. 157, al. 1er). Pourquoi ? Parce que le système du
précompte leur est malaisément transposable. En l’absence de ce système de précompte
professionnel, ça voudrait dire que l’indépendant, pour les revenus qu’il perçoit en 2021,
contrairement au cas du travailleur où une partie de ses revenus est prélevée par l’employeur et
versée au Trésor, qu’il pourrait conserver l’intégralité de son revenu, le placer en banque,
toucher es intérêts et puis payer l’impôt seulement fin 2022-début 2023. Pour mettre travailleurs
et indépendants sur le même pied d’égalité, on a un système de versements anticipés. S’il ne le
fait pas, l’indépendant va devoir payer une majoration financière (infra) de telle manière que
ce ne soit pas plus intéressant pour lui de placer ses fonds en banque et d’attendre deux ans pour
payer son IPP. Il y a par contre une exception en faveur des indépendants débutants (les trois
premières années de l’exercice de l’activité professionnelle (CIR, art. 164) sachant que tout
bout d’année vaut pour une année complète).

Il y a une incitation à estimer l’impôt total qui se rapportera aux revenus professionnels précités
et à effectuer des versements anticipés pendant la période imposable. A défaut, il y a une
majoration de 2,25% (exercice d’imposition de 2022) qui correspond à 2,25 fois le taux de
référence (CIR, art. 159, 1°). Par ailleurs, le taux de référence est le taux le plus élevé entre 1%
et un taux directeur de la BCE au 1er janvier de la période imposable, qui s’élevait à 0,25%
(CIR, art. 161).

La base de calcul de la majoration de l’impôt en cas d’absence ou d’insuffisance de versements


anticipés correspond à 106% de l’impôt total (avec une prise en compte des additionnels
communaux de manière forfaitaire) (CIR, art. 165). C’est en général ce que doit le contribuable
puisqu’il doit payer l’IPP et les additionnels communaux (entre 0% et 9%). Le Code, pour éviter
d’avoir à le calculer à chaque fois prévoit une sorte de forfait en faisant correspondre les
additionnels communaux à 6%. La majoration est pourtant limitée à 90% (CIR, art. 160). L’idée
du législateur est d’atténuer cette mesure pour contrer des éventuelles erreurs de
calcul,…exception faite des sociétés qui ne bénéficient pas de l’atténuation de l’article 160.

Les taux de valorisation des versements anticipés (qui ont donc été faits) pour l’exercice
d’imposition 2022 (CIR, art. 159, 2°, et 161) sont de

- 3% avant le 10 avril
- 2,5% avant la 10 juillet
- 2% avant le 10 octobre
- 1,5% avant le 20 décembre

Exemple :
On a un impôt total se rapportant à des profits de 10000€ avec un versement anticipé de 1000€
effectué le 5 avril de la période imposable. La différence positive de l’article 159 du CIR est de
208,5€ (238,5€ - 30€). Le premier terme sera de 238€ (10000€ x 106% x 2,25%) et le second
terme sera de 30€ (1000€ x 3%). La majoration étant limitée à 90%, elle sera de 187,65€ (208,5€
x 90%).

Le taux de valorisation des versements anticipés est à mettre en parallèle avec la « bonification
pour versement anticipé de l’impôt » (CIR, art. 175 à 177). Elle s’applique en substance à la

13
partie de l’impôt total non couverte par des précomptes dans des circonstances où le
contribuable n’est pas pénalisé s’il n’effectue pas de versements anticipés (CIR, art. 175)
comme les indépendants débutants ou le contribuable percevant des rémunérations des
travailleurs d’emplois à temps partiel par exemple. La bonification a lieu selon des taux moitié
moindres que ceux du régime de la majoration (CIR, art. 177). Par exemple, un versement de
1000€ le 5 avril de la période imposable donnera une bonification de 15€ (1000€ x 1,5%).

Impôt des personnes physiques – Examen plus détaillé de chaque catégorie


de revenus
Revenus immobiliers

La particularité est que l’imposition du contribuable a lieu sur le seul usage du bien, alors même
qu’il n’y a pas de revenu au sens strict du terme. En effet, le simple fait que je puisse occuper
le bien est constitutif d’un revenu imposable.

L’importance du revenu est présumé formé par le « revenu cadastral » (RC). En effet, en général
le CIR cherche à atteindre le revenu réel. Les raisons d’être de l’exception en matière de revenus
immobiliers sont

- La particularité précitée
- Qu’on évite que le revenu du bien immobilier donné en location contre un loyer
dérisoire soit moindre que celui du bien occupé personnellement
- Qu’elle évite la fraude consistant pour le bailleur à ne déclarer qu’une partie du revenu

Le revenu cadastral (=revenu présumé utilisé dans le régime du revenu immobilier) est parfois
identifié au précompte immobilier dans le langage courant, mais à proprement parler il s’agit
d’un revenu et pas d’un impôt.

• Notion de revenu cadastral

On attribue le RC à trois catégories de bien immobiliers (CIR, art. 471, §1er, al. 1er) qui sont

- Les biens immobiliers bâtis


- Les biens immobiliers non bâtis
- Le matériel et l’outillage qui présente le caractère d’immeuble par nature ou par
destination. « Tous appareils, machines et autres installations utiles à une exploitation
industrielle, commerciale ou artisanale » autres que les « locaux, abris et des accessoires
indispensables à ces derniers » (CIR, art. 471, §3, al. 1er). Il y a tout de même une
restriction concernant les immeubles par destination (CIR, art. 471, §3, al. 2).

On attribue un revenu cadastral à des biens immobiliers situées en Belgique (CIR, art. 471, §1er,
al. 1er, 1°) et à certains biens immobiliers situées à l’étranger (depuis 2021). Pour l’essentiel,
ceux sur lesquels les contribuables assujettis à l’impôt des personnes physiques ou à l’impôt
des personnes morales ont un droit réel (CIR, art. 471, §1er, al. 1er, 2°, a). La notion de « droit
réel » signifie ici « tout type de droit étranger sur un bien immobilier qui, par le fait que son
titulaire en perçoit les fruits, s’apparente aux droits de propriété, d’emphytéose, de superficie
ou d’usufruit » (CIR, art. 471, §1er, al. 2).

14
Le revenu cadastral est « le revenu moyen normal net d’une année » (CIR, art. 471, §2). Il est
fixé en principe par « parcelle cadastrale » (CIR, art. 472, §1er) pour un immeuble bâti (AR du
30 juillet 2018, art. 14) qui est

- Un bâtiment constituant une seule unité d’habitation ou d’exploitation avec ses


dépendances bâties et non bâties contigües
- Une entité d’habitation ou d’exploitation distincte, ou partie privative identifiée dans un
acte de base

La mission du revenu cadastral est confiée à l’Administration générale de la documentation


patrimoniale (CIR, art. 472, § 1er). Elle est confiée plus précisément à l’administration
Mesures&Evaluations, autrefois dénommée administration du Cadastre.

Le revenu cadastral des biens immobiliers bâtis et non bâtis est fixé à partir d’une « époque de
référence » (CIR, art. 477, §1er, al. 1er, et 479, §1er). Sur le plan des principes, on a une
« péréquation générale » tous les 10 ans (CIR, art. 478, §1er). C’est l’opération par laquelle
l’administration fiscale revoit les revenus cadastraux de tous les immeubles situés en Belgique.
Pourtant, l’époque de référence est aujourd’hui le 1er janvier 1975 (loi du 19 juillet 1979, art.
44), sûrement à cause de raisons politiques. Le RC est donc indexé pour compenser l’absence
de péréquation générale (CIR, art. 518). Le coefficient d’indexation pour la période de 2021 est
de 1,863 (voir l’avis d’indexation, point I). Le revenu cadastral indexé reste pourtant en général
bien inférieur au revenu réel net de l’immeuble. En effet, l’indexation est faite seulement à
partir de la moyenne des indices des prix des années 1988 et 1989 (et la période non couverte
a été une période de forte inflation). L’indexation n’est pas faite en fonction de l’évolution des
loyers, mais bien en fonction de l’indice des prix à la consommation qui est un indice beaucoup
plus large. Le RC, même indexé est donc généralement très inférieur à la valeur locative
normale nette de l’immeuble.

Cas de l’immeuble bâti nouvellement construit.


Le contribuable doit déclarer l’occupation ou la location, si celle-ci précède l’occupation, dans
les 30 jours de l’évènement (CIR, art. 473, §1er, 1er tiret, et §2). L’évaluation du RC est faite
par l’administration selon trois ou quatre méthodes qui sont aussi les méthodes qui s’appliquent
en cas de péréquation générale (CIR, art. 477) :

1. Pour connaître la valeur locative nette de la parcelle bâtie au 1er janvier 1975 (CIR, art. 477,
§1er, al. 1er) on part du revenu normal brut, à savoir « le montant total du loyer et des avantages
locatifs » dans des circonstances normales (CIR, art. 477, §§2 et 3) et on obtient la valeur
locative normale nette en déduisant du revenu normal brut un forfait de 40% pour frais
d’entretien et de réparations (CIR, art. 477, §2).

2. A défaut, on la compare avec une « parcelle de référence », à savoir une « parcelle bâtie
similaire dont le revenu cadastral est devenu définitif » (CIR, art. 477, §1er).

3. A défaut encore une fois, on prend 5,3% de la valeur vénale normale de la parcelle au 1er
janvier 1975 (CIR, art. 478, al. 1er). S’il n’est pas possible de déterminer la valeur vénale
normale au 1er janvier 1975, la valeur vénale normale actuelle est divisée par un facteur de
correction (CIR, art. 478, al. 3). Le facteur de correction est de 15,018 pour la période imposable
2021 (avis du SPF Finances, MB, 8 mars 2021).

15
Exemple :

Evaluation du RC - 3ème méthode lorsque la valeur vénale normale au 1er


janvier 1975 est impossible à déterminer (illustration)

Appartement acheté par le contribuable à un tiers pour 250.000 euros


pendant la période imposable 2021
(vente dans des circonstances normales)

Valeur vénale normale en 2021 250 000 €


Facteur de correction pour l'année 2021 15.018
(250.000 euros
Valeur vénale au 1er janvier 1975 16 646.69 € / 15,018)
(16.646,69
RC au 1er janvier 1975 882 € euros x 5,3 %)

Le RC prend effet le premier jour du mois qui suit, selon le cas, l’occupation ou la location
(CIR, art. 494, §5, al. 1er).

• Impôt des personnes physiques

Le contribuable est le « propriétaire, possesseur, emphytéote, superficiaire ou usufruitier » du


bien (CIR, art. 11).

La base imposable dépend de l’affectation du bien (examen fait des seuls biens immobiliers
bâtis).
- S’il n’est pas mis en location. L’affectation doit être faite à des fins privées ou
professionnelles (infra). En effet, l’habitation propre est exonérée (CIR, art. 2, §1er, 15°,
art. 7, §1er, 1°, 1er tiret, et art. 12, §3 ; loi spéciale de financement, art. 5, §4, al.2 et s.).
S’il s’agit d’autre chose que l’habitation propre comme une seconde résidence, le revenu
cadastral est indexé de 40% (CIR, art. 7, §1er, 1°, 2nd tiret, et 518). En ce qui concerne
l’affectation des fins professionnelles, il ne peut pas y avoir de revenus immobiliers.
L’immeuble qui contribue à générer des revenus professionnels est imposable à ce titre
(CIR, art. 37, al. 1er).
- S’il est mis en location, l’affectation du locataire doit être faite à des fins privées,
professionnelles ou mixtes. En ce qui concerne les fins privées, le RC indexé est majoré
de 40% (CIR, art. 7, §1er, 2°, a, 2nd tiret, et 518). En ce qui concerne l’affectation par le
locataire à des fins professionnelles (bien donné en location à une société), on retient
le montant le plus élevé entre le « loyer et les avantages locatifs » et le RC indexé majoré
de 40% (CIR, art. 7, §1er, 2°, c, et 518). La base d’imposition va être déterminée par
comparaison entre le revenu réel et le revenu présumé constitué par le RC (indexé
majoré de 40%) formant la base minimum d’imposition. En d’autres termes, le revenu
présumé va jouer le rôle de base minimum d’imposition. On retiendra presque toujours
le revenu réel puisque le revenu cadastral est un revenu présumé devenu déconnecté de
la réalité et donc plus beaucoup plus bas que le revenu locatif normal de l’immeuble.
La raison d’être de ce mécanisme est la déduction des loyers faite par le locataire à titre
de frais professionnels. Pour les fins mixtes, il faut une détermination séparée des
revenus afférents à chaque partie si

1. le loyer et les avantages locatifs (en nature comme des travaux) sont ventilés dans le
bail

16
2. le bail est enregistré (CIR, art. 8).

A défaut, le bien est considéré comme étant affecté à 100% à des fins professionnelles
(voir CIR, art. 7, §1er, 2°, a et c : la a vise seulement le cas du bien donné en location à
une personne physique qui ne l’affecte « ni totalement ni partiellement à l’exercice
d’une activité professionnelle »).

- L’affectation sans but de lucre par le contribuable ou l’occupant (d’une partie) d’un bien
immobilier située dans l’EEE « à l’exercice public d’un culte ou de l’assistance morale
laïque, à l’enseignement, à l’installation d’hôpitaux, de dispensaires, de maisons de
repos, de homes de vacances pour enfants ou personnes pensionnées, ou d’autres œuvres
analogues de bienfaisance » sont exonérées (CIR, art. 12, §1er).

L’immeuble nouvellement construit, changeant d’affectation ou cédé pendant la période


imposable donne lieu à un RC au prorata (voir CIR, art. 9).

Le passage du brut au net constitue un forfait pour frais d’entretien et de réparation de 40%. Le
revenu présumé constitué par le revenu cadastral est déjà pris en compte pour calculer le RC
(CIR, art. 477, §§1er et 2). Le revenu réel constitué par le loyer et les avantages locatifs implique
une déduction du forfait du montant brut, avec un plafond correspondant à 2/3 du RC revalorisé
en fonction de l’évolution des loyers commerciaux depuis le 1er janvier 1975 (4,63 pour
l’exercice d’imposition 2022 – voir AR/CIR, art. 1er) (CIR, art. 13, 1er tiret). Les frais de
financement sont des intérêts de dettes contractées spécifiquement en vue d’acquérir ou de
conserver un bien immobilier (CIR, art.14).

Le calcul de l’impôt se fait sur base de l’imposition globale (CIR, art 130 et s. Et art. 171 a
contrario).

Cours du 30/09

Cas des « sommes obtenues à l’occasion de la constitution ou de la cession d’un droit


d’emphytéose ou de superficie ou de droits immobiliers similaires ». On assimile ces sommes
à des revenus immobiliers, alors que ça n’en est pas (CIR, art. 7, §1er, 3°). Ce régime est très
défavorable si l’acquéreur est une personne physique (la situation est tout autre s’il s’agit de
deux personnes morales), spécialement en cas de constitution d’un droit en contrepartie d’un
canon unique. En effet, il y a une imposition sur la base du revenu réel, peu importe l’affectation
donnée au bien par l’acquéreur (CIR, art. 7, §1er, 3°, et 10, §1er, al. 1er). Le revenu naît lorsqu’il
est mis à la disposition du constituant et se rattache pour le tout à la période imposable de sa
naissance (voir CIR, art. 10, §1er, al. 3). Le revenu est imposable globalement (CIR, art. 130 et
s. Et art. 171 a contrario). On verra infra une comparaison en matière de revenus divers et dans
le régime de la vente. La raison d’être peut-elle être la contrepartie du régime favorable en
droits d’enregistrement ? La cession ne concerne pas l’usufruit selon l’administration fiscale
(Com. IR, n° 10/6). Il y a certaines exonérations en cas de cession de droit (CIR, art. 12 §4,
notamment

- La cession « au plus tôt cinq ans après la date de l’acte authentique de constitution ou
d’acquisition du droit »
- La cession de l’habitation qui « a été l’habitation propre du contribuable pendant une
période ininterrompue d’au moins 12 mois qui précède le mois au cours duquel
l’aliénation a eu lieu »

17
• Précompte immobilier

Il s’agit d’un « impôt régional » (loi spéciale de financement, art. 3, 5°) qui est de la compétence
des Régions qui peuvent modifier le taux d’imposition, la base d’imposition et les exonérations
du PrI relatif aux biens situés sur leur territoire, sans toutefois pouvoir modifier le RC (loi
spéciale de financement, art. 4, §2, et art. 5, §1er et 2, al 1, 5°). Le « service » du PrI est repris
par les trois Régions, lesquelles sont dès lors également compétentes pour fixer les règles de
procédure administrative (loi spéciale de financement, art. 5, §3, al. 1er, et §4).

L’impôt distinct ayant perdu sa nature de précompte, il n’est plus du tout imputable sur l’impôt
total (IPP) (voir CIR, art. 276, al. 1er, et l’abrogation des art. 277 et 278).

Le PrI frappe uniquement les revenus des biens immobiliers situées en Belgique (CIR, art. 249,
al. 1er). Les personnes redevables du PrI sont le propriétaire, le possesseur, l’emphytéote, le
superficiaire ou l’usufruitier (CFF, art. 2.1.2.0.1. ; CIR, art. 251 tel qu’applicable en Région de
Bruxelles-Capitale ; CIR, art. 251 tel qu’applicable en Région Wallonne). La région flamande
était-elle bien compétente pour prendre cette disposition ? Bof bof vu que la loi spéciale de
financement dit que le PrI est un impôt régional, que cela signifie que les Régions sont
compétentes pour modifier les taux, la base d’imposition et les exonérations, mais pas le
redevable. Après on peut comprendre que pour plus de clarté, le CFF reproduise la disposition.

Cas pratique :
Quid si le bien est donné en location et que le contrat met le PrI à charge du locataire (lorsque
le droit civil ne l’interdit pas) ?

Le propriétaire ne pourrait pas le faire puisque le droit fiscal est d’ordre public. Le propriétaire
ne pourrait donc pas y déroger par une convention particulière. Ensuite, le fisc n’est pas partie
à la convention, donc même au regard du principe de droit privé une telle convention n’aurait
aucun effet. De plus, le fisc ne pourrait pas renoncer au fait que le propriétaire est redevable du
précompte immobilier. Cette clause est pourtant fréquente.

En ce qui concerne la base imposable elle est définie à partir du RC qui est indexé au premier
janvier de l’exercice d’imposition (CFF, art. 2.1.3.0.1 ; CIR, art. 255 tel qu’applicable en
Région de Bruxelles-Capitale, al. 1er ; CIR, art. 255 tel qu’applicable en Région Wallonne, §1er,
al. 1er). Elle correspond au 1er janvier de la période imposable. En effet, en matière de PrI, la
période imposable coïncide avec l’exercice d’imposition (CIR, art. 254 et 360, AR/CIR, art.
199, a (textes fédéraux encore applicables en Région de Bruxelles-Capitale) ; CFF, art. 3.3.2.0.1
al. 1er, 1°, et al. 2, 1° ; décret de la Région Wallonne du 6 mai 1999, art. 19, al. 2, 2nd tiret).
L’incidence est bien plus faible de l’affectation du bien en comparaison avec l’IPP, elle est
nulle en cas d’affectation sans but de lucre (comp. avec CIR, art. 7 en matière d’IPP et voir
aussi CIR, art. 37, al. 1er (« sans préjudice de l’application des précomptes »)).

Pour l’immeuble nouvellement construit changeant d’affectation ou cédé pendant la période


imposable, la circonstance est sans incidence sur la base imposable puisqu’on ne regarde que
la situation au 1er janvier.

Exemple :
Un bien nouvellement construit est occupé pour la première fois le 5 janvier 2021, sans avoir
été donné en location auparavant. Le RC n’a lieu qu’à partir du 1er février 2021 (voir supra,
partie sur le RC) et le PrI est établi pour la première fois pour l’exercice d’imposition 2022 sur
le revenu de la période imposable 2022 (voir les dispositions citées juste avant). C’est la raison
pour laquelle il faut une clause dans les contrats de vente répercutant à l’acheteur un prorata de

18
PrI. S’il l’occupe pour la première fois le 29 décembre 2020 par contre, le RC d’immeuble bâti
est établi à partir du 1er janvier 2021 et j’aurai un PrI pour l’exercice d’imposition 2021 sur ce
revenu cadastral.

Pour le calcul du PrI, le taux est en principe de 1,25% en Région de Bruxelles-Capitale et en


Région wallonne et de 3,97 en Région flamande (CIr, art. 255 tel qu’applicable en Région de
Bruxelles-Capitale, al. 1er ; CIR, art. 255 tel qu’applicable en Région wallonne, §1er, al. 1er ;
CFF, art. 2.1.4.0.1, §1er). Il y a également diverses réductions à caractère social notamment
pour les enfants à charge.

Toujours dans le calcul du PrI, pour ce qui est des additionnels provinciaux ou de
l’agglomération bruxelloise et communaux, il y a une autonomie fiscale des provinces, de
l’agglomération bruxelloise et des communes… mais « la loi détermine (…) les exceptions dont
la nécessité est démontrée » (Const., art. 171, §3, al. 2, et §4, al. 2). Il y a une interdiction de
principe d’établir des centimes additionnels à l’IPP, à l’ISoc, à l’IPM et à l’INR « ou des taxes
similaires sur la base ou sur le montant de ces impôts » (CIR, art. 464, 1°). Par dérogation, « les
provinces, les agglomérations et les communes peuvent établir des centimes additionnels sur le
précompte immobilier » (CIR, art. 464/1, 1°). Ces additionnels représentent en pratique la plus
grande partie de la charge fiscale totale – exemple de la ville de Mons (exercice d’imposition
2021).

Exemple :
Les centimes additionnels de la Province du Hainaut sont de 1,895 (Résolution du Conseil
provincial du 27 octobre 2020) et ceux de la Ville de Mons sont de 2,990 (Règlement-taxe du
8 octobre 2019).

Revenus mobiliers

En ce qui concerne les catégories de revenus mobiliers (CIR, art. 17), « les revenus des capitaux
et biens mobiliers sont tous les produits d’avoirs mobiliers engagés à quelque titre que ce soit,
à savoir

1° les dividendes ;

2° les intérêts

3° les revenus de la location, de l’affermage, de l’usage et de la concession de biens mobiliers

4° les revenus compris dans les rentes viagères ou temporaires qui ne constituent pas des
pensions et qui (…) sont constituées à titre onéreux à charge de personnes morales ou
d’entreprises quelconques (…) ;

5° les revenus qui résultent de la cession ou de la concession de droits d’auteur et de droits


voisins, ainsi que des licences légales et obligatoires (…) ».

• Les cinq catégories de revenus mobiliers

1. Dividende

Le dividende a un sens propre au droit fiscal est « les avantages attribués par une société aux
actions, parts et parts bénéficiaires, quelle que soit leur dénomination, obtenus quelque titre et
sous quelque forme que ce soit » (CIR, art. 18, al. 1er, 1°). Il y a diverses extensions aux
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dividendes par rapport au droit privé : nous en examinerons certaines dans la partie consacrée
à l’ISoc.
Le CIR prévoit une exonération de la première tranche de 800€ pour les dividendes autres que
ceux distribués par des organismes de placement collectif (CIR, art. 21, al. 1er, 14°, et AR/CIR,
art. 2ter ; montant indexé pour l’exercice d’imposition 2022). L’idée derrière le placement
collectif est que si je veux investir, je peux soit le faire moi-même ou alors je peux acheter des
parts d’un organisme de placement collectif qui est soit une société (Sicav), soit un organisme
transparent sur le plan fiscal qui va lui-même acheter des actions ou des obligations.

2. Intérêts

« Les intérêts, primes et tous autres produits et prêts, y compris de conventions constitutives de
sûreté réelle sur des instruments financiers, de dépôts d’argent et de toute autre créance » (CIR,
art. 19, §1er, 1°). Il y a tout de même une exonération de la première tranche de 980€ des intérêts
d’un livret d’épargne répondant à certaines conditions (CIR, art. 21, al. 1er, 5° ; montant indexé
pour l’exercice d’imposition 2022).

Il y a diverses extensions, notamment concernant les Sicav de capitalisations obligataires (CIr,


art. 19bis). Elles concernent plus précisément : « les organismes de placement collectif dont
plus de 10% du patrimoine est investi directement ou indirectement en créances » (CIR, art.
19bis, §1er, al. 1er). Plutôt que d’investir directement dans des obligations, le contribuable peut
acheter des parts d’une société d’investissement à capital variable (Sicav, qui est une forme
d’organisme de placement collectif), laquelle collecte l’épargne publique et investit elle-même
dans les obligations. La Sicav peut soit distribuer annuellement son bénéfice (« Sicav de
distribution »), ce revenu ayant la nature d’un dividende, soit le conserver (« Sicav de
capitalisation »), ce qui augmente la valeur des parts. Le contribuable qui investit dans un Sicav
obligataire de capitalisation plutôt que directement dans des obligations convertit donc des
intérêts imposables en une plus-value, laquelle est en principe exonérée. Le législateur a étendu
la notion d’intérêts afin d’imposer le contribuable au moment où il « sort » de la Sicav
capitalisation. C’est donc un régime complexe dont l’examen plus détaillé sort du cadre du
cours.

Il y a une proratisation des intérêts concernant les titres à revenus fixes. En effet, « les titres à
revenus fixes » sont en substances « les obligations, bons de caisse et autres titres analogues
(CIR, art. 2, §1er, 8°). Les intérêts « sont imposables dans le chef de chaque détenteur successif
de titres en proportion de la période au cours de laquelle il les a détenus » (CIR, art. 19, §2, al.
2).

Exemple :
J’ai une obligation émise par une société française d’une valeur d’émission de 1000€, coupon
annuel de 50 payable le 1er novembre. Le contribuable a été propriétaire de l’obligation du 1er
mars au 31 août de la période imposable 2021 (obligation déposée sur un compte-titres
français). Le montant imposable, à reprendre dans la déclaration à l’IPP de l’exercice
d’imposition 2022 est d’environ 25€ (184/365 des 50€ payés le 1e novembre 2021).

3. Loyers et redevances

Les loyers ou redevances sont tirés de la concession de la jouissance d’un bien mobilier ou
corporel (meubles meublants, voiture, appareil de jardinage, …) ou incorporel (brevet) (voir
CIR, art. 17, §1er, 3°, qui ne comporte pas de restriction concernant la nature du bien mobilier).

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Pour le cas du bien immobilier bâti loué meublé, il faut que la ventilation soit prévue dans le
contrat et si le loyer est global, 2/5 du loyer sont censés représenter le montant brut des revenus
mobiliers imposables (CIR, art. 4, 2°, b).

4. Revenus compris dans les arrérages de rentes temporaires ou viagères

Cela vaut seulement si la rente est à charge d’une « personne morale » ou d’une « entreprise
quelconque » et donc pas si la rente est à charge d’une personne privée (CIR, art. 17, §1er, 4°).
Pour ce qui est de la rente à capital abandonné, c’est difficile de ventiler entre la composante
capital et la composante revenus des arrérages. Plusieurs solutions sont possibles sur le plan
des principes. Les solutions sont dans le CIR comme le revenu annuel imposable correspondant
à 3% du capital abandonné (CIR, art. 20).

5. Droits d’auteur

En cas d’activité professionnelle, la nature mobilière du revenu est conservée jusqu’à un seuil
de 62550€ (CIR, art. 37, al. 1er et 2 ; montant indexé pour l’exercice d’imposition 2022).

Ils sont soumis à un régime fiscalement favorable, en tout cas quand il s’agit d’une personne
qui normalement devrait être taxée à titre de revenu professionnel sur ses droits d’auteur qu’elle
cèderait en l’absence de ce régime propre aux droits d’auteur. En effet, les revenus
professionnels sont imposable au régime progressif par tranche (CIR, art. 130). Il faut aussi
tenir compte du fait que ces revenus sont soumis aux cotisations de sécurité sociale.

Ce régime est plus favorable parce que d’abord, lorsqu’on passe du montant brut au montant
net, il y a des pourcentages de frais forfaitaires assez généreux qui s’appliquent (50% sur une
première tranche qui s’élève à un peu plus de 15000€ et 25% pour une seconde tranche qui
s’élève un peu au-delà des 30000€). Plutôt que de frapper ces revenus par le régime
d’imposition par tranches, il sont frappés par l’imposition distincte à un taux de 15%. La moitié
de la première tranche est donc déductible à titre de frais (15000€ x 50%), seul la moitié du
revenu brut est donc taxable à l’application d’un taux de 15%. Le revenu brut est donc taxable
à un taux de 7,5% (15% x 50%) (infra).

L’idée du législateur était de réserver ce régime aux artistes, mais la notion de droits d’auteur a
une notion bien plus générale. Est protégé par le droit d’auteur toute création originale. Les
architectes, les journalistes, … ont commencé à prétendre à ce régime favorable. A certaines
conditions, ces personnes peuvent donc aussi revendiquer le bénéfice de ce régime. Le rapport
annuel des services des décisions anticipées en matière fiscale montre que beaucoup de
personnes cherchent à se prévaloir de ce régime favorable. C’est une entité au sein du SPF
Finances que les praticiens fréquentent puisque cette entité autonome donne des décisions sur
les situations qui n’ont pas encore produit leur effet sur le plan juridique en confirmant le
traitement que suggère le contribuable. C’est donc cette entité qui se prononce sur le fait que
telle ou telle activité entre dans le champ d’application du régime favorable.

• Le passage du revenu brut au revenu net

Pour le régime du dividende, des intérêts et de la composante revenus des arrérages de rentes
temporaires ou viagères. Il y a pour ces régimes, une déduction de l’impôt étranger (imposition
du « net frontière »). En cas d’imposition globale, il y a une déduction en outre des frais
d’encaissement, des frais de garde et des autres frais analogues y afférents (CIR, art. 22, §1er,
al. 2).

21
Pour ce qui est du régime des loyers et des redevances et des droits d’auteur (CIR, art. 22, §3),
il y a une application du principe de déduction des frais faits en vue d’acquérir ou de conserver
les revenus. Il y a une évaluation forfaitaire qui est faite « à défaut d’éléments probants », les
pourcentages étant fixés par le Roi. Il est de 15% en principe (AR/CIR, art. 3, 1°). Mais il y a
des pourcentages plus élevés dans certaines circonstances comme pour

- 50% pour les meubles meublants (AR/CIR, art. 4, 2°, b)


- 85% pour la concession du droit de distribution de projection des films
cinématographiques et d’œuvres audiovisuelles analogues (AR/CIR, art. 4, 3°)
- 50% pour une première tranche de revenus et 25% pour une seconde tranche de revenus
en ce qui concerne les droits d’auteur (AR/CIR, art. 4, 1°)

• le Calcul de l’impôt

Les revenus sont imposable distinctement, plutôt qu’une imposition progressive par tranches.
Le taux d’intérêt général est de 30% (CIR, art. 171, 3°). Celui des intérêts d’un livret d’épargne
au-delà du seuil d’exonération de 980€ est de 15% (CIR, art. 171, 3°quinquies). Et celui des
droits d’auteur est de 15% (CIR, art. 2°bis).

Les additionnels communaux ne s’appliquent pas sur la quotité de l’impôt relative aux
dividendes et aux intérêts (CIR, art. 466, al. 2).

• Le précompte mobilier

Les personnes redevables d’un PrM sont

- Le débiteur d’un revenu mobilier de source belge (CIR, art. 261, al. 1er, 1°)
- L’intermédiaire établi en Belgique qui intervient à quelque titre que ce soit dans le
paiement du revenu (CIR, art. 261, al. 1er, 2°)

Remarque : le PrM est dû sur les premiers 800€ de dividende même si ceux-ci sont exonérés
(CIR, art. 261, §1er, 1°).

Le taux général est de 30% (CIR, art. 269, §1er, 1°). Le taux des intérêts d’un livret épargne au-
delà de 980 est de 15% (CIR, art. 269, §1er, 2°) et celui des droits d’auteur jusque 62500€ est
de 15% (CIR, art. 2°bis).

Le précompte mobilier est


- « exigible » en raison de la mise à disposition du revenu (CIR, art. 267, al. 1er).
- La déclaration au PrM est à déposer par le débiteur des rémunérations (CIR, art. 312 et
AR/CIR, art. 85).
- Le paiement au Trésor est à faire dans les 15 jours de la mise à disposition du revenu
(CIR, art. 412, al. 1er).
- Les exonérations de PrM (CIR, art. 264 à 266, et AR/CIR, art. 105 et s.) concerne le
bénéficiaire assujetti à l’IPP pour ce qui est des loyers et redevances (AR/CIR, art. 111)
et des arrérages des rentes viagères ou temporaires (AR/CIR, art. 112).
- Il est imputable en principe sur l’IPP 5CIR, art. 279) et sur la taxe communale
additionnelle (CIR, art. 304, §2, al. 1er) et l’éventuel excédent est remboursable (CIR,
art. 304, §2, al. 1er).
- Il y a un mécanisme de « précompte mobilier libératoire » pour les dividendes et les
intérêts. En effet, le PrM correspond à l’IPP la plupart du temps (comp. CIR, art. 171,

22
3°quinquies, et CIR, art. 269, 1° et 2°). Lorsque le PrM « a été réellement retenu », on
a la faculté de ne pas déclarer les dividendes et les intérêts (CIR, art. 313, in limine).

Cas pratiques
1. Quid si le dividende est distribué non pas par une société belge, par une société
allemande et encaissé auprès d’une banque belge ?

La société allemande ne va pas retenir le PrM, mais bien la banque qui intervient à titre
intermédiaire (CIR, art. 261). Il ne va pas devoir reprendre le dividende dans sa
déclaration fiscale puisque le PrM a été retenu au taux de 30%, imposition distincte au
taux de 30% qui fait qu’il peut ne pas déclarer puisque s’il le fait ça ne va rien changer
à sa situation fiscale.

2. Quid si le dividende est distribué par une société allemande et encaissé auprès d’une
banque allemande?

Il n’y aura pas de retenue de PrM belge et le PrM libératoire (CIR, art. 313) ne
s’appliquera pas puisque le PrM n’aura pas été réellement retenu.

Cours du 06/10

Ce mécanisme de « précompte mobilier libératoire » explique pourquoi les additionnels


communaux ne frappent pas la quotité de l’impôt total relative aux dividendes et aux
intérêts (modification apportée à l’art. 466 du CIR à la suite de la condamnation de la
Belgique par la CJUE).

Il est donc parfois plus avantageux de déclarer comme dans le cas où l’imposition
globale est plus favorable (pour les faibles revenus) ou le cas des premiers 800€ de
dividende (on a un PrM de 30%, alors qu’on a une exonération d’IPP).

• Le régime anti-évitement

Il y a deux régimes

- Un régime assez ancien prévu à l’article 344, §2 du CIR


- Le régime le plus récent de la « taxation par transparence », dénommé également « taxe
Caïman » (CIR, art. 2, §1er, 13° et 14°, et 5/1).

Le cas-type est celui des biens mobiliers productifs de revenus logés dans une société située
dans un « paradis fiscal ». Mais le champ d’application de ces deux régimes est plus large.
L’article 344, §2 du CIR s’applique au contribuable assujettis à un impôt autre que l’IPP. La
taxe Caïman concerne également les trusts et les revenus autres que mobiliers.

La disposition assez ancienne de l’article 344, §2 du CIR dit qu’est inopposable à


l’administration fiscale de la vente, la cession ou l’apport d’actions, d’obligations, de créances
ou d’autres titres constitutifs d’emprunts, de brevets d’invention, de procédés de fabrication, de
marques de fabrique ou de commerce, ou de tous autres droits analogues ou de sommes
d’argent. Cette inopposabilité s’applique au contribuable non-résident, qui dans son État de
résidence fiscale n’est pas assujetti à un impôt sur les revenus et bénéficie d’un régime de
taxation notablement plus avantageux pour les revenus produits par les biens et droits aliénés
que celui auquel les revenus de même espèce sont soumis en Belgique. Il doit rapporter la
contre-preuve que l’opération répond à des besoins légitimes de caractère financier ou

23
économique, ainsi que la contre-preuve que la contre-valeur reçue pour l’opération produit un
montant de revenus soumis effectivement en Belgique a une charge fiscale normale par rapport
à celle qui aurait subsisté si cette opération n’avait pas eu lieu.

Le régime plus récent de la taxe-Caïman est une taxation par transparence : « les revenus perçus
par la construction juridique sont imposables dans le chef de l’habitant du Royaume qui est le
fondateur de la construction juridique, comme si cet habitant du Royaume les avait recueillis
directement » (CIR, art. 5/1, §1er, al. 1). Cette construction juridique vise notamment (CIR, art.
2, §1er, al. 1er, b, et al. 2) tout entité ayant la personnalité juridique qui n’est pas assujettie à un
impôt sur les revenus, mais est soumise à un impôt sur les revenus qui s’élève à moins de 15%
du revenu imposable de cette construction juridique déterminé conformément aux règles
applicables pour établir l’impôt belge sur les revenus correspondants (seuil de 15% ramené à
1% si l’entité est établie dans l’EEE : voir AR du 18 décembre 2015, art. 1er, al. 1er, 3°). Le
régime est non applicable, sous certaines conditions, en présence d’une « activité économique
effective » (CIR, art. 5/1, §3, b).

Revenus professionnels

« Les revenus professionnels sont les revenus qui proviennent, directement ou indirectement,
d’activités de toute nature et les revenus qui y sont assimilés, à savoir

1° les bénéfices ;

2° les profits ;

3° les bénéfices ou profits d’une activité professionnelle antérieure ;

4° les rémunérations ;

5° les pensions, rentes et allocations en tenant lieu » (CIR, art. 23, §1er).

• Les cinq catégories de revenus professionnels

1. Bénéfices

Il s’agit des bénéfices « des entreprises industrielles, commerciales ou agricoles » (CIR, art. 24,
al. 1er). Le montant brut des bénéfices englobe le chiffre d’affaires ainsi que les plus-values
réalisées sur les éléments d’actif affectés à l’exercice de l’activité professionnelle, qu’elles
résultent ou non de l’activité professionnelle (comme la plus-value sur un immeuble affecté à
l’exercice de l’activité professionnelle, même si cette plus-value résulte seulement de la hausse
générale des prix de l’immobilier dans le quartier).

Il existe deux patrimoines à des fins fiscales : le patrimoine privé et le patrimoine professionnel.
Les revenus des biens du patrimoine professionnel sont des revenus professionnels – et pas des
revenus immobiliers ou mobiliers (CIR, art. 37, qui précise cependant in limine que cela vaut
« sans préjudice de l’application des précomptes »).

Le bénéfice imposable se détermine à partir du bénéfice comptable. « Sous réserve des


dispositions dérogatoires dans le présent Code, les dispositions légales particulières relatives
aux impôts sur les revenus et les arrêtés pris pour l’exécution, les bénéfices imposables sont
déterminés conformément à la législation belge relative aux obligations comptables des
entreprises » (CIR, art. 24, al.3). Une des conséquences est que le revenu naît selon le fait
24
générateur comptable (à l’inverse du fait générateur de droit commun de la mise à disposition
des revenus). Le revenu va donc naître au regard du droit comptable quand l’entreprise a
exécuté l’essentiel de ses obligations. Il ne faut donc pas attendre le moment où le client a payé.
A partir du moment où l’entreprise a une créance qui a atteint un certain degré de certitude, on
est bon. L’autre spécificité est le régime des avantages anormaux et bénévoles (CIR, art. 26).
Pour plus de détails, voir infra l’ISoc sur la base imposable des sociétés se déterminant par
renvoi aux règles applicables aux bénéfices (CIR, art. 183).

2. Profits

Il y a deux sous-catégories de profits (CIR, art. 27, al. 1er) qui sont les revenus d’une profession
libérale (avocats, médecins, notaires,…), charge ou d’office et une catégorie résiduelle qui
comprend tous les revenus d’une occupation lucrative qui ne sont pas considérés comme des
bénéfices ou des rémunérations.

Comme en matière de bénéfices, le montant brut des profits englobe le chiffre d’affaires (« les
recettes ») et les plus-values réalisées sur les éléments actifs affectés à l’exercice de l’activité
professionnelle (voir CIR, art. 27, al. 2, 1° à 3°). Comme en matière de bénéfices également, le
contribuable a un patrimoine privé et un patrimoine professionnel à des fins fiscales, les revenus
des biens du patrimoine professionnel étant des revenus professionnels par application de
l’article 37, al. 1er, du CIR. A la différence des bénéfices par contre, le revenu imposable du
contribuable naît selon le fait générateur de droit commun de mise à disposition du revenu (le
contribuable sera imposable non pas sur la simple créance et les régime des avantages
anormaux ou bénévoles ne s’applique pas.

3. Bénéfices ou profits d’une activité professionnelle antérieure

Les bénéfices ou profits d’une activité professionnelle antérieure englobent notamment les
« plus-values de cessation » et les revenus « promérités » (seuls éléments à connaître dans le
cadre du cours).

Les plus-values de cessation (CIR, art. 28, al. 1er, 1°) sont des « revenus (…) qui proviennent
de plus-values sur des éléments de l’actif affectés à l’activité professionnelle ». Ils sont
« obtenus ou constatés en raison ou à l’occasion de la cessation complète et définitive de
l’entreprise ou de l’exercice d’une profession libérale, charge, office ou occupation lucrative ».
Le terme « obtenus » veut ici dire « réalisés ». Et selon le prof, le terme « constatés » veut dire
« transférés vers le patrimoine privé » (interprétation de l’administration : « constatés » dans
un acte quelconque) (exemple : conserver un bâtiment affecté à l’utilisation de la profession
dans son patrimoine professionnel donc, pour le faire passer ensuite dans son patrimoine privé)

Les bénéfices ou profits « promérités » (CIR, art. 28, al. 1er, 2°) sont les « revenus qui sont
obtenus ou constatés postérieurement à la cessation et qui proviennent de l’activité
professionnelle antérieure ». En pratique, il concerne surtout les profits payés après la cessation
de l’activité professionnelle.

4. Les rémunérations

Il y a trois sous-catégories de rémunération (CIR, art. 30)

- Les rémunérations des travailleurs : « toutes rétribution qui constituent, pour le


travailleur, le produit du travail au service d’un employeur » (CIR, art. 31, al. 1er). C’est
le cas même si la rémunération est mise à disposition du travailleur par un tiers (par

25
exemple : une autre société du groupe). Les rémunérations des travailleurs comprennent
les allocations de chômage (CIR, art. 31, al. 2, 4°).
- Les rémunérations des dirigeants d’entreprise : « toutes les rétributions allouées ou
attribuées à une personne physique
1° qui exerce un mandat d’administrateur, de gérant, de liquidateur ou des fonctions
analogues
2° qui exerce au sein de la société une fonction dirigeante ou une activité dirigeante de
gestion journalière, d’ordre commercial, financier ou technique, en dehors d’un contrat
de travail » (CIR, art. 32, al. 1er).
- Les rémunérations des conjoints aidants (voir supra)

Il y a un élément particulier en ce qui concerne les rémunérations des dirigeants d’entreprise


qui est une requalification de certains revenus immobiliers (CIR, art. 32, al. 2, 3°). Le champ
d’application concerne le dirigeant d’entreprise de la première catégorie (c’est-à-dire visé à
l’article 32, al. 1er, 1° du CIR) qui donne en location un bien immobilier à la société dans
laquelle il exerce un mandat ou des fonctions analogues. La raison d’être de la règle est une
crainte du législateur fiscal que le loyer, convenu entre parties liées, soit exagéré en pareille
hypothèse, spécialement si le dirigeant d’entreprise a financé l’acquisition di bien immobilier
par emprunt. Il y a donc une requalification en rémunérations des dirigeants d’entreprise de la
partie du montant brut du loyer et des avantages locatifs qui excède 5/3 du RC revalorisé. Le
coefficient de cette revalorisation est prévu à l’article 1er de l’AR/CIR. La fraction est de 5/3 du
RC, car cela est censé correspondre au revenu normal brut. En effet, le RC s’obtient en
diminuant ce revenu normal brut de 40% (CIR, art. 477, §2 – voir supra), ce qui revient à
multiplier le revenu normal brut par 3/5. On retrouve donc le revenu normal brut en multipliant
le RC par 5/3. La conséquence est qu’il n’y a pas de déduction des frais relatifs au bien
immobilier sur la partie requalifiée (CIR, art. 32, al. 2, 3°, seconde partie).

Exemple (exercice d’imposition 2022) :


Le montant brut du loyer et des avantages locatifs est de 36000€. Les intérêts relatifs à
l’emprunt ayant servi à acquérir l’immeuble est de 36000€. Le RC est de 3500€ et le coefficient
de revalorisation de l’art 1er de l’AR/CIR est de 4,63. 5/3 du RC revalorisé vaut donc 27008,33€.
Pour les revenus immobiliers, on a un montant brut de 27008,33€ et un montant net de 0€ (après
déduction du forfait pour frais d’entretien et de réparation et des frais de financement).
La partie requalifiée en rémunérations des dirigeants d’entreprise est de 8991,67€ (36000€ -
27008,33€) (aucune déduction de frais relatifs au bien immobilier, mais il y a une augmentation
le cas échéant de la base de calcul des frais professionnels forfaitaires – voir infra).

Cours du 07/10

Toujours en ce qui concerne les rémunérations des travailleurs et des dirigeants d’entreprise, il
y a un remboursement des frais propres à l’employeur ou à l’entreprise. Il n’y a pas d’imposition
chez le travailleur ou dirigeant (CIR, art. 31, al. 2, 1°, et art. 32, al. 2, 1°) et les frais
professionnels sont en principe déductibles chez l’employeur ou l’entreprise. Le
remboursement se fait sur une base réelle (mon employeur m’envoie acheter un truc pour lui,
je garde la facture et il me rembourse ce bien) ou sur une base forfaitaire (il y a de nombreuses
décisions sur ce point comme la décision anticipée n°2021.0397 du 17 août 2021 et aussi le
« formulaire standard en matière de frais propres » disponible sur le site du Service des
décisions anticipées).

Toujours dans la même catégorie, on a aussi l’avantage de toute nature (« ATN »). Pour
l’évaluation, le principe est que « les avantages de toute nature qui sont obtenus autrement
qu’en espèces sont comptés pour la valeur réelle qu’ils ont dans le chef du bénéficiaire » (CIR,

26
art. 36, §1er, al. 1er). Il est par contre parfois difficile ou fastidieux à appliquer (comme pour
l’usage d’un bien à la fois à des fins privées et à des fins professionnelles). C’est la raison pour
laquelle l’évaluation est forfaitaire dans certains cas.
Exemples d’évaluation forfaitaire d’ATN :
- Le véhicule dans le CIR même : évaluation en fonction de l’émission de CO2 (CIR, art.
36, §2)
- Le PC portable dans l’AR/CIR qui est de 72€ (CIR, art. 36, §1er, al. 2, et AR/CIR, art.
18, §3, point 10, premier tiret (pas d’indexation à défaut de disposition en ce sens))
- Les options sur actions dans une loi fiscale particulière (loi du 26 mars 1999 relative au
plan d’action belge pour l’emploi en 1998 et portant des dispositions diverses, art. 41 et
s.)

Toujours en ce qui concerne l’ATN, il y a un avantage fiscal dans certaines circonstances. Chez
le bénéficiaire, le forfait sera plus faible que la valeur réelle de l’ATN. Chez l’entreprise, il y
aura une déduction des frais relatifs à l’ATN à titre de frais professionnels (avec une limitation
cependant dans le cas particulier des véhicules (voir infra))

Toujours dans le régime des travailleurs et des dirigeants d’entreprise, on a les avantages
sociaux (CIR, art. 38, §1er, al. 1er, 11° - exemples tirés des travaux préparatoires de la loi du 8
août 1980, rapport de la commission des Finances, Doc. Parl., Chambre, 1979-1980, n° 323/47,
p. 18). On a

- A : « les avantages dont il n’est pas possible en raison des modalités de leur octroi de
déterminer le montant effectivement recueilli par chacun des bénéficiaires » comme
l’accès gratuit à des terrains de sport appartenant à l’entreprise, la fête de Saint-Nicolas
organisée pour les enfants des membres du personnel, …
- B : « les avantages qui, bien que personnalisables, n’ont pas le caractère d’une véritable
rémunération » comme les secours dans des circonstances exceptionnelles (opération
chirurgicale, …))
- C : « les menus avantages ou cadeaux d’usage obtenus à l’occasion ou en raison
d’événements sans rapport direct avec l’activité professionnelle » comme le menu
cadeau à l’occasion d’un mariage ou d’une naissance

En ce qui concerne le régime fiscal, il n’est pas imposable chez le bénéficiaire (CIR, art. 38,
§1er, 11°) et n’est pas déductible par l’entreprise (CIR, art. 53, 14°)

5. Les pensions, rentes et allocations en tenant lieu

Il y a deux groupes : les pensions de retraite légales comme complémentaires. En général, il y


a une imposition comme revenus professionnels parce que les cotisations ayant servi à financer
les pensions sont déductibles à titre de frais professionnels ou ont donné lieu à une réduction
d’impôt. A l’inverse, la pension constituée dans un cadre purement privé et sans avantage fiscal
n’est pas imposable à titre de revenus professionnels – mais une partie peut l’être à titre de
revenus mobiliers (voir supra).

Il y a également des indemnités qui réparent ou qui sont censées réparer une perte permanente
de revenus professionnels comme l’indemnité perçue en raison d’un accident du travail ou
d’une maladie professionnelle.

27
• Passage du revenu brut au revenu net

Le principe est énoncé à l’article 49, al. 1er du CIR : « A titre de frais professionnels sont
déductibles les frais que le contribuable faits ou supportés pendant la période imposable en vue
d’acquérir ou de conserver les revenus imposables et dont il justifie la réalité et le montant au
moyen de documents probants ou, quand cela n’est pas possible, par tous autres moyens de
preuve admis par le droit commun, sauf le serment ».

Exemples donnés par l’art. 52 du CIR :


- « Le loyer et les charges locatives, ainsi que le précompte immobilier, y compris les
centimes additionnels afférents aux biens immobiliers ou parties de biens immobiliers
affectés à l’exercice de la profession et tous frais généraux résultant de leur entretien,
chauffage, éclairage, … » (CIR, art. 52, 1°)
- « Les intérêts des capitaux empruntés à des tiers et engagés dans l’exploitation » (CIR,
art. 52, 2°)
- « Les rémunérations des membres du personnels » (CIR, art. 52, 3°)
- « Les cotisations personnelles dues en exécution de la législation sociale » (CIR, art. 52,
7°)
- « Les amortissements relatifs (…) aux immobilisations incorporelles et corporelles dont
l’utilisation est limitée dans le temps » (CIR, art. 52, 6°). Par exemple si j’achète une
voiture, c’est un bien dont la durée de vie est limitée dans le temps. Cette dépense n’est
pas faite complètement à fond perdu puisque je vais pouvoir l’utiliser pendant un temps
supérieur à la période imposable. Ce que je paie pour la voiture, je ne vais pas pouvoir
le déduire de mes revenus de la période imposable pour lesquels j’ai exposé la dépense,
je vais pouvoir en déduire seulement une partie. Je vais déduire un montant X pour
chaque période imposable, c’est donc ça un amortissement. La vision comptable
consiste à dire qu’on répartir la valeur du bien comptable sur le nombre d’exercices
comptable (=le nombre de périodes imposables) qui correspondent à la durée de vie du
bien et la vision fiscale consiste à dire que ça représente la dépréciation du bien.

Les exemptions à la déductibilité sont (CIR, art. 53) :


- L’IPP, « y compris les sommes versées à valoir sur cet impôt », les centimes
additionnels, ainsi que « les accroissements, majorations, frais et intérêts de retard
afférents » à cet impôt (CIR, art. 53, 2°, 3° et 5°)
- « Les amendes, y compris les amendes transactionnelles », ainsi que « les amendes
administratives infligées par des autorités publiques (CIR, art. 53, 6°) (c’est
essentiellement pour des raisons morales)
- En règle, les frais de vêtements (CIR, art. 53, 7° - régime de cette disposition à connaitre
pour l’examen !!!). Dans les années 80, le fisc a prévu une interdiction générale, sauf
vêtements professionnels spécifiques, comme la toge des avocats et non pas les
costumes (point b).
- « 50% de la quotité professionnelle des frais de réception et de cadeaux d’affaires, à
l’exclusion toutefois des articles publicitaires portant de manière apparente et durable
la dénomination de l’entreprise donatrice » (CIR, art. 53, 8°)
- En règle, 31% de la quotité professionnelle des frais de restaurant » (CIR, art. 53, 8°bis)
- Les avantages sociaux (CIR, art. 53, 14° ) voir supra sur cette notion)
- Les frais professionnels afférents à l’utilisation d’un véhicule (pour les véhicules acquis
après le 1er janvier 2018). Il sont déductibles seulement selon un % compris entre 40 et
100% (véhicule électrique), lequel varie en fonction des émission de CO2 (CIR, art. 66,
§1er, al. 1er et 2). Pour les frais professionnels afférents aux déplacements entre le
domicile et le lieu de travail, il y a un forfait de 0,15€ par km parcouru (CIR, art. 66,
§4).

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Pour ce qui est du régime du forfait (CIR, art. 51), il a lieu en substance pour les rémunérations,
les profits et les bénéfices (CIR, art. 51, 1er). Il a lieu lorsque la déduction sur la base des frais
réels n’est plus avantageuse pour le contribuable (idem – voir les termes « à défaut de
preuves »). Les cotisations de sécurité sociale personnelle sont déductibles en plus du forfait
(idem – voir les termes « sommes visées à l’article 52, 7° du CIR). Par exemple (CIR, art. 51,
al. 2 et 3 ; montants pour l’exercice d’imposition 2022), le forfait des rémunérations des
travailleurs est de 30%, avec un plafond de 4920€. Le forfait des rémunérations des dirigeants
d’entreprise est de 3% avec un plafond de 2590€.

Le régime de l’article 57 du CIR est comme suit :


« Les frais ci-après ne sont considérés comme des frais professionnels que s’ils sont justifiées
par la production de fiches individuelles et d’un relevé récapitulatif établis dans les formes et
délais déterminés par la Roi :

1° commissions, courtages, ristournes commerciales ou autre, vacations ou honoraires


occasionnels ou non, gratifications, rétributions ou avantages de toute nature qui constituent
pour les bénéficiaires des revenus professionnels imposables ou non en Belgique, à l’exclusion
des rémunération visées à l’article 30, 3° ;

2° rémunérations, pensions, rentes ou allocations en tenant lieu, payées aux membres du


personnel, aux anciens membres du personnel ou à leurs ayants droit, à l’exclusion des
avantages sociaux exonérés dans le chef des bénéficiaires :

3° indemnités forfaitaires allouées aux membres du personnels en remboursement de frais


effectifs propres à l’employeur ».

Cet article explique la délivrance des fiches 281.10 (rémunérations des travailleurs), 281.20
(rémunérations des dirigeants d’entreprise), 281.50 (Commissions, courtages, ristournes,
vacations, honoraires, gratifications, rétributions ou avantages de toute nature), … Il n’y a pas
d’échappatoire en le comparant à l’Isoc, et le régime de l’art. 219 du CIR. La Cour
constitutionnelle estime qu’il n’y a pas de discrimination (arrêt n°90/2016 du 9 juin 2016). Si
je ne remplis pas ces fiches, je ne vais pas pouvoir déduire ce montant à titre de frais
professionnels.

• Calcul de l’impôt

L’imposition est globale en général. Il y a pourtant certains cas d’imposition distincte comme
Les plus-values en matière de bénéfices, profits et bénéfices ou profits d’une activité
professionnelle antérieure.

- On a les plus-values dans le cours ordinaire de l’activité ou lors de la cessation, sur des
immobilisations corporelles affectées à l’exercice de l’activité professionnelle depuis
plus de 5 ans : en principe 16,5% (CIR, art. 171, 4°, a).
- On a les plus-values de cessation sur les immobilisations incorporelles : en principe
33% sur une première tranche (CIR, art. 171, 1°, c ; imposition globale au-delà).
- Et on a les plus-values de cessation sur les immobilisations corporelles ou incorporelles
en cas de cessation de l’activité à partir de 60 ans ou de décès : par exception, le taux
est plus favorable de 10% (CIR, art. 171, 2°, a ; pour les immobilisations corporelles
seulement sur la tranche imposable distinctement).

29
Le taux distinct correspond au taux moyen afférent l’ensemble des revenus imposables de la
dernière année antérieure pendant laquelle le contribuable a eu douze mois de revenus
professionnels imposables. On a

- Les indemnités de licenciement (CIR, art. 171, 5°, a)


- Les rémunérations, ainsi que pensions, rentes ou allocations en tenant lieu, « dont le
paiement n’a eu lieu, par le fait d’une autorité publique ou de l’existence d’un litige,
qu’après l’expiration de la période imposable à laquelle elles se rapportent
effectivement » (CIR, art. 171, 5°, b)
- Les bénéfices ou profits promérités (CIR, art. 171, 5°, c)

Les pensions complémentaires liquidées en capital subissent soit l’imposition distincte (pas
connaitre pour l’examen), soit le « régime de la rente fictive » où le capital est alors converti en
une rente à des fins fiscales, des arrérages fictifs concourant alors à former le revenu net global
pendant un certain nombre d’années » (CIR, art. 169 et 170).

Il y a également une réduction pour pensions et revenus de remplacement comme lorsque le


revenu net global se compose exclusivement d’allocations de chômage. En principe, la
réduction d’impôt est de 1841,96€ (montant indexé pour l’exercice d’imposition 2022).

• Précompte professionnel

Il a déjà été examiné supra.

En effet, il y a des dispenses de versement du PrPr en faveur de l’employeur dans certaines


hypothèses (CIR, art. 2751 à 27511) comme l’incitant fiscal à l’embauche dans certaines
catégories de travailleurs. Par exemple, les universités sont dispensées de verser au Trésor 80%
des rémunérations mises à la disposition de certains chercheurs (CIR, art. 2753). Ce PrPr retenu
par l’employeur qui est dispensé de de le verser au Trésor est tout de même imputable sur l’IPP
du travailleur (CIR, art. 296, al. 2, premier tiret).

Revenus divers

Ces revenus forment un ensemble assez hétéroclite.

Remarque : les rentes alimentaires obtenues en vertu d’une obligation légale sont également
des revenus divers (voir supra).

• Revenus divers visés à l’article 90, al. 1er, 1° du CIR

Texte de la disposition :

« Sans préjudice des dispositions (des) (…) 8° et 10°, les bénéfices ou profits, quelle que soit
leur qualification, qui résultent, même occasionnellement ou fortuitement, de prestations,
opérations ou spéculations quelques ou de services rendus à des tiers, en dehors de l’exercice
d’une activité professionnelle, à l’exclusion des opérations de gestion normale d’un patrimoine
privé consistant en biens immobiliers, valeurs de portefeuille et objets mobiliers ».

Il nécessite une intervention active du contribuable (par exemple, le bien donné n’est pas un
revenu imposable en principe – voir supra).

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Pour ce qui est du terme « en dehors de l’exercice d’une activité professionnelle » : il s’agit
sinon de revenus professionnels constitutifs de bénéfices ou de profits. Pour ce qui est du « à
l’exclusion des opérations de gestion normale d’un patrimoine privé », il faut l’entendre à
l’inverse de la spéculation, à savoir « l’achat de bien comportant un risque de perte mais
effectué dans l’espoir de réaliser par la revente un bénéfice à la faveur de la hausse des prix du
marché » (Cass., 6 mai 1988, Pas., 1988, I, p. 1092), mais aussi à l’inverse de la gestion normale
d’un patrimoine privé même sans spéculation. Cependant, si seule la cession – et donc pas
l’acquisition préalable – sort du cadre de la gestion normale du patrimoine privé, le revenu
imposable se limite à ce qui résulte du caractère anormal de la cession (à l’inverse donc de toute
plus-value en cas de cession d’un bien) (Cass., 30 novembre 2006, Pas., 2006, n°614). Le terme
« consistant en biens immobiliers, valeurs de portefeuille et objets mobiliers » veut dire les
plus-values sur actions en dehors du cadre de la gestion normale du patrimoine privé qui est
une disposition spécifique de l’article 90, al. 1er , 9°, premier tiret. Selon la Cour de cassation,
« objets mobiliers » doit s’entendre à l’inverse de biens corporels (voir Cass., 10 septembre
2010, Pas., 2010, n°507). Le terme « sans préjudice des dispositions (des) (…) 8° et 10° » veut
quant à lui dire que la plus-value sur un immeuble, mémé réalisée dans le cadre de la gestion
normale du patrimoine privé, est parfois imposable (voir infra).

Le passage du brut au net se fait par application du principe exprimé à l’article 97, §1er du CIR :
« Les revenus visés à l’article 90, alinéa 1er, 1° s’entendent de leur montant net, c’est-à-dire de
leur montant brut diminué des frais que le contribuable justifie avoir faits ou supportés pendant
la période imposable en vue d’acquérir ou de conserver ces revenus ». Il y a une déduction des
pertes éprouvées au cours des cinq périodes imposables antérieurs des revenus résultant de
l’exercice d’activités visées à l’article 90, al. 1, 1° (CIR, art. 103, §1er, al. 1er). L’imposition est
distincte et au taux de 33% (CIR, art. 171, 1°, a).

• Certaines plus-values sur actions ou parts

Il y a deux hypothèses

1. les plus-values « réalisées à l’occasion de la cession à titre onéreux (des) actions ou parts, en
dehors de l’exercice d’une activité professionnelle, à l’exclusion des opérations de gestion
normale d’un patrimoine privé » (CIR, art. 90, al. 1er, 9°, premier tiret). La sous-catégorie est
assez récente et vise à faire échec à l’enseignement de l’arrêt précité de la Cour de cassation du
30 novembre 2006.

2. Les plus-values sur « participations importantes » (CIR, art. 90, al. 1er, 9°, second tiret).
Ici, on a une participation de plus de 25% des droits sociaux d’une « société résidente » à un
moment quelconque au cours des cinq années précédant la cession, directement ou
indirectement, que le contribuable soit seul ou avec certains proches. Cette application est
rarissime en pratique parce qu’il y a des conditions supplémentaires de cession à une personne
morale établie hors EEE. Il faut cependant faire attention à l’article 94 du CIR, en effet, il y a
une clause à insérer dans la convention de cession d’actions interdisant au cessionnaire de céder
à son tour les actions dans les douze mois à une personne juridique établie hors EEE.

Il y a une imposition distincte de

- 33% pour les plus-values de la première sous-catégorie (CIR, art. 171, 1°, e)
- 16,5% pour les plus-values de la seconde sous-catégorie (CIR, art. 171, 4°, e)

31
• Certaines plus-values sur immeubles

Elle s’applique à la cession d’un droit réel autre que le droit d’emphytéose ou de superficie ou
qu’un droit similaire (CIR, art. 90, al. 1er, 8° et 10° in limine). L’immeuble qui a été l’habitation
propre du contribuable pendant une période ininterrompue de douze mois échappe à ce régime
(CIR, art. 93bis, 1°).

L’imposition a lieu seulement si le contribuable n’a pas conservé l’immeuble suffisamment


longtemps.
- L’immeuble non-bâti : en règle, la plus-value n’est imposable que si la cession
intervient dans le 8 ans de l’acte d’acquisition à titre onéreux (CIR, art. 90, al. 1er, 8°, a)
- L’immeuble bâti : en règle, la plus-value n’est imposable que si la cession intervient
dans les 5 ans de l’acte d’acquisition à titre onéreux (CIR, art. 90, al. 1er, 10°, a)

L’immeuble est considéré comme non bâti si la valeur vénale des bâtiments est inférieur
à 30% du prix de la réalisation de l’ensemble (CIR, art. 91).

La plus-value imposable ne cas de cession de la propriété correspond en règle à la différence


entre le prix de la cession ; et le prix payé lors de l’acquisition majoré d’un forfait de 25%, ce
montant étant lui-même augmenté de 5% par année écoulée (CIR, art. 101, §§1er et 2).

Il y a une imposition distincte

- Pour la plus-value sur immeuble non-bâti de 33% les 5 premières années et de 16,5%,
les 3 pannées suivantes (CIR, art. 171, 1°, b et 4°, d)
- Pour la plus-value sur un immeuble bâti de 16,5% (CIR, art. 171, 4°, e)

• Revenus tirés de la sous-location ou de la cession de bail d’immeubles

Pour les revenus visés à l’article 90, al. 1er, 5° du CIR, pour la base imposable, il y a une
différence entre (CIR, art. 100, al. 1er, 1°)

- A : « le montant total formé par les loyers et autres avantages locatifs recueillis par la
locataire ou le cédant, et la valeur locative des locaux qu’il occupe lui-même » ; et
- B : « le montant total des loyers et charges locatives payées par le locataire ou le cédant
ainsi que les frais qu’il justifie avoir faits ou supportés pendant la période imposable en
vue d’acquérir ou de conserver ces revenus »

L’imposition distincte est au taux de 30% (CIR, art. 171, 3°).

Cours du 13/10

Impôt des sociétés – Examen global

• Assujettissement

Sont assujetties à l’ISoc, les « sociétés résidentes » (CIR, art. 2, §1er, 5°, et 179).

Il y a 3 conditions :

1. Avoir la personnalité juridique (CIR, art. 2, §1er, 5°, a, al. 1er).

32
Cette notion renvoie au droit privé, belge ou étranger. Il y a une extension qui est faite pour la
société régie par un droit étranger qui n’a pas la personnalité juridique mais qui a une forme
analogue à celle d’une société de droit belge dotée de la personnalité juridique. Sinon, la société
est dite « transparente » sur le plan fiscal, les associés étant directement imposables sur leur
quote-part dans les revenus (CIR, art. 29, §1er, et 364).

2. Se livrer à des opérations à caractère lucratif (CIR, art. 2, §1er, 5°, a, al. 1er).

Il se dégage de la jurisprudence de la Cour de cassation que la société au sens du droit privé qui
se limiterait à gérer « passivement » ses biens « se livre » néanmoins à des opérations de
caractère lucratif car son activité est nécessairement professionnelle (Voir Cass., 20 mai 2005,
Pas., 2005, n° 287). Le but de lucre n’est pas requis, il y aura un assujettissement à l’impôt des
sociétés même en cas d’affectation des bénéfices à des fins désintéressées.

Une ASBL peut-elle être assujettie à l’ISoc ?


Elle peut parfaitement être en conformité avec le droit privé, donc avoir un but désintéressé. En
revanche, en matière fiscale, le critère n’est pas de savoir si l’ASBL a ou non un but lucratif,
mais bien de savoir si elle se livre à des opérations à caractère lucratif. Donc si les opérations
se répètent, elle sera assujettie à l’ISoc.

Si l’ASBL n’est pas assujettie à l’ISoc, elle le sera à l’IPM. On a une base imposable qui est
alors limitée à quelques éléments de revenu : voir art. 221 et s. du CIR.

Pour ce qui est des cas particuliers, il faut aller voir les articles 180 à 182 du CIR, l’article 182
prévoyant ainsi que « ne sont pas considérées comme des opérations à caractère lucratif

1° les opérations isolées ou exceptionnelles ;

2° les opérations qui consistent dans le placement des fonds récoltés dans l’exercice de leur
mission statutaire ;

3° les opérations qui constituent une activité ne comportant qu’accessoirement des opérations
industrielles, commerciales ou agricoles ou ne mettant pas en œuvre des méthodes industrielles
ou commerciales ».

3. Avoir sa résidence fiscale en Belgique

La « société résidente » est en substance « toute société qui a en Belgique son principal
établissement ou son siège de direction ou d’administration » (CIR, art. 2, §1er, 5°, b, al. 1er).
Le critère du siège réel est à prendre à l’inverse du critère du siège statutaire en droit
international privé (en comparaison avec le Code de droit international privé, art. 110 : « la
personne morale est régie pas le droit de l’État où se situe son siège statutaire »). Mais il y a
une présomption que la société qui a son siège statutaire en Belgique y a également son siège
réel (CIR, art. 2, §1er, 5°, b). Cette présomption est en général réfragable, mais elle devient
cependant irréfragable si la société ne peut pas démontrer qu’elle a un domicile fiscal dans un
autre État.

• Assiette et base imposable

Tous les revenus d’une société sont professionnels. « Sous réserve de dérogations prévues au
présent titre, les revenus soumis à l’impôt des sociétés ou exonérés dudit impôt sont, quant à
leur nature, les mêmes que ceux qui sont envisagés en matière d’impôt des personnes

33
physiques » (CIR, art. 183, premier morceau de phrase). Tout l’activité d’une société est
nécessairement professionnelle (voir notamment Cass., 12 juin 2015, deux arrêts, Pas., 2015,
n° 393 et 395), le reste n’étant pas un revenu divers. Le CIR, art. 37, al. 1er (voir supra) n’y
inclut donc ni les revenus immobiliers, ni les revenus mobiliers.

La détermination du bénéfice imposable à partir du bénéfice comptable : « leur montant est


déterminé d’après les règles applicables aux bénéfices » (CIR, art. 183, second morceau de
phrase). On renvoie notamment à l’article 24, al. 3 du CIR (voir supra). Pour ce qui est de la
notion de « législation belge », elle doit être comprise à l’inverse du référentiel IFRS. Et c’est
le droit comptable relatif aux comptes annuels qui doit être pris en compte et non pas celui des
comptes consolidés.
Toujours pour ce qui est de la détermination du bénéfice imposable à partir du bénéfice
comptable, le CSA, art. 3, §1er, première phrase dispose que « chaque année, l’organes
d’administration dresse un inventaire suivant les règles d’évaluation fixés par le Roi et établit
les comptes annuels dont la forme et le contenu sont déterminés par le Roi ». Ces règles figurent
principalement dans le livre 3 de l’AR/CSA. Elles transposent la « directive comptable unique »
(directive 2013/34/UE du Parlement européen et de Conseil du 23 juin 2013 relative aux états
financiers annuels, aux états financiers consolidés et aux rapports y afférents de certaines
formes d’entreprises, modifiant la directive 2006/43/CE du Parlement européen et du Conseil
et abrogeant les directives 78/660/CEE du Conseil). La seconde phrase de l’article 3, §1er du
CSA dit que « ces comptes annuels comprennent le bilan, le compte de résultat ainsi que
l’annexe et forment un tout » (voir infra).

Il y a une importance donnée aux avis de la Commission des Normes comptables (CNC). C’est
« une institution autonome dotée de la personnalité juridique » qui a notamment pour mission
« de contribuer au développement de la doctrine comptable (…) par la voie d’avis » (CDE, art.
III.93, §1er, al. 1er, 2°, et §2). Ces avis n’ont aucune forme normative, comme la CNC l’explique
elle-même : ils « remplissent la même fonction juridique que la doctrine juridique » et « tirent,
tout comme la doctrine juridique, leur autorité de leur acceptation par le corps social comme
source de droit, complémentaire aux dispositions légales ou réglementaires », « cette
acceptation (étant) à son tour essentiellement tributaire de la validité du raisonnement qui (les)
sous-tend » (CNC, avis n° 14/1 du 1er février 1993 « compétence d’avis », www.cnc-cbn.be –
voir annexe). Il s’agit souvent quand même d’une doctrine autorisée, car les avis de la CNC
sont suivis en pratique, sauf en cas de bons arguments contre la légalité de tel ou tel avis.

Il y a certains ajustement apportés au bénéfice comptable. Le bénéfice comptable n’est qu’un


point de départ. Le bénéfice imposable s’obtient en procédant à une série d’ajustements, à la
hausse comme à la baisse.

La période imposable correspond à l’exercice comptable tel que fixé dans les statuts de la
société. La comptabilité est tenue par année civile et l’impôt est donc établi en principe pour
l’exercice d’imposition dont le millésime suit celui de la période imposable (CIR, art. 360, et
AR/CIR, art. 200, b). Par exemple, pour l’exercice comptable et donc la période imposable du
1er janvier au 31 décembre 2021, l’impôt sera établi pour l’exercice d’imposition 2022. Si la
comptabilité est tenue autrement que par année civile, l’impôt est établi pour l’exercice
d’imposition dont le millésime correspond à l’année au cours de laquelle la période imposable
se termine (CIR, art. 360, et AR/CIR, art. 202). Par exemple, pour l’exercice comptable et donc
la période imposable du 1er avril 2021 au 31 mars 2022, l’impôt sera établi pour l’exercice
d’imposition 2022.

34
• Calcul de l’ISoc

Le taux d’impôt est de 25% en principe (CIR, art. 215, al. 1er). Il est ramené à 20% sur la
première tranche de 100000€ à certaines conditions (CIR, art. 215, al. 2). Il faut que ce soit une
petite société au sens du CSA. En substance, il faut que la société, a la date du bilan du dernier
exercice comptable clôturé ne dépasse pas plus d’un des critères suivants (CSA, art. 1 :24,
§1er) :

- Nombre de travailleurs, en moyenne annuelle : 50


- Chiffre d’affaires annuel, hors TVA : 9 millions €
- Total du bilan : 4,5 millions €

L’appréciation est faite sur une base consolidée si la société fait partie d’un groupe (CSA, art.
1 : 24, §6). Il faut que

- La valeur d’acquisition des actions ou parts que la société aurait dans d’autres sociétés
n’excède 50% du capital libéré augmenté des réserves taxées et des plus-values
comptabilisées
- Les actions ou parts de la société ne sont pas aux mains d’autres sociétés à concurrence
de plus de 50%
- Au moins un dirigeant d’entreprise a une rémunération égale ou supérieure à 45000€
ou, si le bénéfice imposable est inférieur à 45000€, à ce bénéfice imposable (exemple :
un bénéfice imposable de 25000€ et une rémunération de 26000€).

La cotisation distincte est de 100% (CIR, art. 219). Il y a deux grands cas d’application (CIR,
art. 219, al. 1er). En substances, les « dépenses visées à l’article 57 (…) qui ne sont pas justifiés
par la production de fiches individuelles et d’un relevé récapitulatif » et les « bénéfices
dissimulés qui ne se retrouvent pas dans le patrimoine de la société ». Il y a d’ailleurs une
présomption irréfragable que de tels bénéfices ont servi à financer des dépenses visées à l’article
57 du CIR qui ne sont pas justifiées.

Le taux est ramené à 50% si la société rapporte la preuve que le bénéficiaire est une personne
morale (CIR, art. 219, al. 2).

Il y a trois exceptions à la cotisation distincte de 100% (CIR, art. 219), qui sont :

- La mention par le bénéficiaire dans une déclaration matière d’impôts sur les revenus
régulièrement introduite ou dans une déclaration analogue introduite à l’étranger (CIR,
art. 219, al. 5)
- L’identification du bénéficiaire de manière univoque au plus tard dans un délai de 2 ans
et 6 mois à partir du 1er janvier de l’exercice d’imposition concerné (CIR, art. 219, al.
6)
- L’imposition effective du montant dans le chef du bénéficiaire, avec l’accord de celui-
ci dans les délais imposables (CIR, art. 219, al. 6)

A la différence de l’IPP, les dépenses non justifiées sont en principe déductibles à titre de frais
professionnels (CIR, art. 197 – référence aux « alinéas 6 et 7 » de l’article 219 vise en réalité
les alinéas 5 et 6 de cet article). La sanction est donc différente, on aura une non-déductibilité
à l’IPP et une cotisation distincte de 100% de l’ISoc. La cotisation distincte en tant que
composante de l’impôt des sociétés, n’est cependant pas elle-même déductible (CIR, art. 198,
§1er, 1°, et 219).

35
• Précomptes et versements anticipés

Pour ce qui est des précomptes, tous les revenus d’une société sont professionnels et leur
montant est déterminé d’après les règles applicables aux bénéfices (voir supra). Il y a tout de
même une réserve de l’article 37, al. 1, in limine, du CIR qui expose « sans préjudice de
l’application des précomptes ». Le PrM est en principe imputable et, à concurrence de
l’éventuel excédent, restituable (CIR, art. 279 et 304, §2, al. 2). Le PrI n’est lui pas imputable
(voir supra) mais déductible comme frais professionnels (voir d’ailleurs CIR, art. 52, 1°, auquel
l’art. 183 de ce Code renvoie).

Pour ce qui est des versements anticipés, un renvoi est effectué, avec quelques aménagements,
au régime applicable à l’IPP (CIR, art. 218, §1er, al. 1er). Il y a tout de même une exception en
faveur des petites sociétés débutants (pour les trois premiers exercices comptables) (CIR, art.
218, §2). Il y a une majoration de 6,75% (exercice d’imposition 2022) qui correspond à é,25
fois le taux de référence (CIR, art. 159, 1°). Le taux de référence est quant à lui le taux le plus
élevé entre 3% et un taux directeur de la BCE au 1er janvier de la période imposable, qui
s’élevait à 0,25% (CIR, art. 161 et 218, §1er, al. 2). La base de calcul n’est pourtant pas portée
à 106% et la majoration n’est quant à elle pas limitée à 90% (CIR, art. 218, §1er, al. 3).

Impôt des sociétés – Examen plus approfondi de diverses questions

• Activité indépendante exercée en personne physique ou en société

En personne physique, il n’y a qu’un seul niveau d’imposition, mais il y a un tarif progressif
par tranches, notamment 45% pour la tranche de 23000€ à 41360€ et 50% au-delà de 41360€.
Il y a également des additionnels communaux et des cotisations de sécurité sociale
indépendantes.

En société, il y a un double niveau d’imposition aboutissant à un taux combiné de 47,50%. On


a l’ISoc sur le bénéfice imposable de la société au taux ordinaire de 25% (CIR, art. 219, al. 1er),
le PrM et une imposition distincte de l’IPP sur les dividendes distribués avec un taux qui s’élève
en principe à 30% (CIR, art. 171, 3°, et 269, §1er, 1°). Il n’y a par contre ni additionnels
communaux, ni cotisations de sécurité sociale des indépendants (si ce n’est qu’une cotisation
annuelle forfaitaire à charge des sociétés).

Il y a des avantages fiscaux supplémentaires pour la « petite société » au sens de CSA avec un
ISoc de 20% sur la première tranche de 100000€ sous certaines conditions (CIR, art. 219, al. 2
– voir supra).

Il s’agit du régime « VVPRbis » (VVPR pour « verlaagde voorheffing/précompte réduit » et


« bis » pour le distinguer d’un régime similaire entre-temps abrogé) dans lequel le PrM et
l’imposition distincte sont limités à 15% si (CIR, art. 171, 3° sexies, et 269, §2)
- Un apport en numéraire est efectué par le contribuable
- On respecte un délai d’attente de trois ans avant la distribution

On a aussi le régime « de la réserve de liquidation » ou « VVPRter ». Dans ce régime, la société


peut soumettre tout ou partie de son bénéfice comptable après impôt à une cotisation distincte
de 10% (CIR, art. 184quater et 219quater). Le Prm et l’imposition distincte sont ici limités à
5% si on respecte un délai d’attente de cinq ans avant la distribution (CIR, art. 171, 3°septies,
et 269, §1er, 8°) (on a même une exonération si la distribution intervient lors de la liquidation –
voir CIR, art. 21, al. 1er, 11°).

36
De lege lata, dès que l’activité indépendante génère un niveau de revenus assez faibles, il est
donc plus intéressant de l’exercer sur le plan fiscal. La conclusion varie cependant dans le temps
et l’espace.

• Contours du bénéfice comptable

Pour les comptes annuels (annexe : modèle établi par la BNB pour les sociétés sans capital), on
a le bilan qui est le patrimoine au dernier jour de l’exercice comptable (exemple : bilan au 31
décembre 2021). Au bilan, on a un actif (emploi des ressources) et un passif (les ressources
elles-mêmes).
Dans l’actif, on a les « immobilisations » ou « actifs immobilisés » (synonymes) qui sont « les
actifs qui sont destinés à servir de façon durable à l’activité de l’entreprise » (directive
comptable unique, art. 2, point 4, et 12, point 3). On a également les actifs circulants qui sont
les autres éléments de l’actif. Selon la destination qui lui est donnée, un bien immeuble, une
machine, … a la qualité d’immobilisation ou d’actif circulant. On a trois catégories
d’immobilisations : corporelles, incorporelles ou financières.
Dans le passif, on a pour l’essentiel les capitaux propres et les dettes.

Cours de 14/10

Le compte de résultats est le résultat obtenu sur la période de l’exercice comptable (exemple :
compte de résultat pour la période allant du 1er janvier 2021 au 31 décembre 2021). Il retrace
les revenus bruts et les frais se rattachant à cette période ou, plus exactement, les « produits »
et les « charges » dans le langage comptable. Les produits sont pour l’essentiel :
- Le chiffre d’affaires (en substance) qui est « le montant des ventes de biens et des
prestations de services à des tiers, relevant de l’activité habituelle de la société (…) »
(AR/CSA, art. 3 : 90, I.A).
- Les plus-values sur les éléments d’actif (autres que les stocks et les commandes en cours
d’exécution).

Il y a des informations complémentaires en annexe.

Remarque : sur l’importance de ces expressions en droit fiscal, voir notamment CIR, art. 2, §1er,
9°.

Pour la reconnaissance du chiffre d’affaires, elle se fonde sur la comptabilité d’engagement (par
opposition à une comptabilité de trésorerie). La reconnaissance du chiffre d’affaires se fait par
la prestation d’un service qui est le moment où la société a accompli l’essentiel de sa prestation
(voir CNC, avis n° 2012/17 du 7 novembre 2012 « reconnaissance des produits et des charges »,
www.cnc-cbn.be, n°5). Par exemple, je vends en 2021 des tickets pour un concert que j’organise
seulement en 2022. Sur la base du critère dégagé par la CNC, je vais reconnaître le chiffre
d’affaires seulement en 2022 donc. La reconnaissance du chiffre d’affaires se fait également
par la vente d’un bien. Selon la CNC, c’est le moment où la société a transféré l’essentiel des
risques de perte du bien par cas fortuit à l’acheteur (ibid., n°4). Selon le prof, il s’agit également
du moment où la société a exécuté l’essentiel de ses obligations, à savoir en général le moment
où la société a rempli son obligation de délivrance (voir ancien CCiv, art. 1604, al. 2 : « la
délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et la possession de l’acheteur »).

La valeur d’acquisition d’un élément actif est évalué à son coût historique (donc ce que l’actif
a coûté à la société). Ca comprend l’achat du bien, donc le prix d’acquisition, à savoir « outre
le prix d’achat, les frais accessoires tels que les impôts non récupérables (la TVA) et les frais
de transport » (AR/CSA, art. 3 : 13, al. 2, et art. 3 : 14, al. 1er) ainsi que la fabrication du bien

37
qui est quant à lui le coût de revient (AR/CSA, art. 3 : 13, al. 2, et art. 3 : 15). L’acquisition en
elle-même ne dégage pas de résultat sur le plan comptable, même si la valeur vénale est
supérieure à la valeur d’acquisition ainsi définie (solution consacrée par la CJUE, 3 octobre
2013, État belge c. GIMLE SA, C-322/12 – exemple : un bien acheté pour 100€ alors que sa
valeur vénale est de 1000€).

La valeur d’un élément actif, en substance « les éléments de l’actif sont évalués à leur valeur
d’acquisition déduction faite des amortissement et réductions de valeur y afférents » et
augmentée des plus-values de réévaluation y afférents (AR/CSA, art. 3 : 13, al. 1er).

Les amortissements, en substance (AR/CSA, art. 3 : 23, al. 1er) sont « les montants pris en
charge par le compte de résultats », « relatifs aux (…) immobilisations incorporelles (ou)
corporelles dont l’utilisation est limitée dans le temps » et « en vue de répartir (…) le coût
d’acquisition (…) de ces immobilisations sur leur durée d’utilité ou d’utilisation probable ». Ils
sont calculés selon un plan (AR/CSA, art. 3 : 39, §1er, al. 1er, et 3 : 42, §1er, al. 1er).

Exemple de plan d’amortissement :


On a une machine acquise le 1er janvier 2021 et destiné à servir de façon durable à l’activité de
l’entreprise. Sa valeur d’acquisition, donc son prix d’acquisition est de 100000€ hors TVA
(TVA déductible). Sa durée d’utilisation probable est de 5 ans. En utilisant la méthode linéaire
(voir Com. IR, n° 61/102 : « méthode suivant laquelle l’amortissement est fixé annuellement à
un montant fixe, obtenu en appliquant un pourcentage constant déterminé à la valeur
(d’acquisition) de l’élément à amortir »), le taux d’amortissement sera le nombre 100 divisé par
le nombre d’années de la durée d’utilisation probable (voir Com. IR, n° 61/103) qui sera donc
de 20% dans ce cas-ci.

Années Valeur à amortir Amort. annuels Amort. cumulés Valeur comptable


2021 100.000 euros 20.000 euros 20.000 euros 80.000 euros
2022 100.000 euros 20.000 euros 40.000 euros 60.000 euros
2023 100.000 euros 20.000 euros 60.000 euros 40.000 euros
2024 100.000 euros 20.000 euros 80.000 euros 20.000 euros
2025 100.000 euros 20.000 euros 100.000 euros 0 euro

En droit fiscal (CIR, art. 61, al 1er) : « les amortissements sont considérés comme des frais
professionnels dans la mesure où (…) ils sont nécessaires et où ils correspondent à une
dépréciation réellement survenue pendant la période imposable ». Cette précision n’ajoute rien
à l’exigence de prudence, de sincérité et de bonne foi prévue par le droit comptable (exemple :
amortir une voiture sur 1,5 an plutôt que sur les 5 années prévues. On ne respecte pas le principe
de bonne foi) (AR/CSA, art. 3 : 10 et 3 : 24) (Voir Cass., 22 mars 1991, Pas., 1991, n° 932). Il
y a pourtant certaines restrictions par rapport au droit comptable comme les amortissement sur
les véhicules tels que les voitures qui sont seulement déductibles selon un pourcentage compris
entre 40% et 100%, lequel varie en fonction des émissions de CO2 (CIR, art. 66, §1er, al. 1er et
2, et art. 198bis). Il y a des taux indicatifs dans le Com. IR comme un amortissement de 5%
pour les bâtiments industriels (Com., IR, n° 61/120 à 61/122) ou un amortissement de 3% pour
les immeubles de bureaux, commerciaux ou affectés à l’exercice d’une profession libérale
(partie bâtiment) (Com., n° 61/123), … A l’ISoc, il y a une proratisation de la première annuité
d’amortissement (CIR, art. 196, §2). Dans l’exemple, si la machine avait été acquise le 1er
février, la première annuité d’amortissement aurait été limitée à 334/365 x 20000€ (ce qui
donne 18301,37€).

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La notion de réduction de valeur est les « abattements portés (à la valeur) d’acquisition des
éléments de l’actif (non amortissables comme un terrain, une œuvre d’art, une créance,…), et
destinés à tenir compte de la dépréciation, définitive ou non, de ces derniers à la date de clôture
de l’exercice » (AR/CSA, art. 3 : 23, al. 2). Il y a un régime pour chaque catégorie d’éléments
d’actif.

Par exemple :
a. Les immobilisations corporelles ou incorporelles « dont l’utilisation n’est pas limitée dans le
temps ne font l’objet de réductions de valeur qu’en cas de moins-value ou de dépréciation
durable » (AR/CSA, art. 3 : 42, §2).
b. « Les créances (…) font l’objet de réductions de valeur si leur remboursement à l’échéance
est en tout ou en partie incertain ou compromis » (AR/CSA, art. 3 : 46).

Toujours dans la notion de réductions de valeur, il y a des dispositions fiscales particulières


pour les réductions de valeur sur créances commerciales. Elles sont rajoutées en principe au
bénéfice comptable (CIR, art. 25, 5°, et 48, al. 1er – implicitement : résulte de l’historique et du
rapprochement des deux dispositions). Il y a par contre une « exonération » si les réductions de
valeur « sont comptabilisées (…) en vue de faire face à des pertes ou charges nettement
précisées et que les événements en cours rendent probables », et ce « dans les limites et aux
conditions déterminées par le Roi ». Le régime des dispositions fiscales particulières pour les
réductions de valeur sur créances commerciales est celui de l’AR/CIR (art. 22) qui dispose que

1° « les pertes auxquelles ces réductions de valeur sont destinées à faire face doivent (…) se
rapporter uniquement à des créances non représentées par des obligations ou autres titres
analogues, nominatifs, au porteur dématérialisé »

2° « ces pertes doivent être nettement précisées et leur probabilité doit résulter, pour chaque
créance, non d’un simple risque d’ordre général, mais bien de circonstances particulières
survenues au cours de la période imposable et subsistant à l’expiration de celle-ci ».

3° « les réductions de valeur doivent être comptabilisées à la clôture des écritures de la période
imposable et leur montant doit apparaître à un ou plusieurs comptes distincts »

4° « le montant total des réductions de valeur immunisées subsistant à l’expiration d’une


période imposable quelconque doit être justifié et détaillé, par objet, dans un relevé dont le
modèle est déterminé par le Ministre des Finances ou son délégué ».

En ce qui concerne les plus-values de réévaluation, leur comptabilisation est une simple faculté,
jamais une obligation (AR/CSA, art. 3 : 35, §1er, al. 1er : « les sociétés (…) peuvent procéder à
la réévaluation » - je souligne). Elles ne peuvent avoir lieu que pour les immobilisations
corporelles et les immobilisations financières consistant en actions ou parts (AR/CSA, art. 3 :
35, §1er, al. 1er). De plus, on doit supposer que la valeur d’utilité « présente un excédent certain
et durable » par rapport à la valeur comptable (AR/CSA, art. 3 : 35, §1er, al. 1er). La
reconnaissance en résultat, parmi les produits, est interdite, en effet, les plus-values actées
« sont imputées directement » aux capitaux propres, « à la rubrique III du passif ‘Plus-values
de réévaluation’ et y sont maintenues aussi longtemps que les biens auxquels elles sont
afférentes ne sont pas réalisés » (AR/CSA, art. 3 : 35, §3, al. 1er).

En droit fiscal, les plus-values de réévaluation sont les « plus-values exprimées » qui font en
principe partie du bénéfice imposable (voir CIR, art. 24, al. 1er, 2°, qui vise les plus-values
« réalisées ou exprimées dans la comptabilité ou les comptes annuels »). En règle générale, ces
plus-values sont exonérées :

39
- En matière d’IPP « sont exonérées les plus-values exprimées mais non réalisées, à
l’exception des plus-values sur les stocks et les commandes en cours d’exécution »
(CIR, art. 44, § 1er, 1°). Cette exception n’en est pas vraiment une, puisque je ne peux
acter une plus-value de réalisation seulement sur mes immobilisations corporelles et sur
les participations constitutives d’immobilisations financières. Donc si je suis taxé parce
que j’acte une plus-value sur un stock, c’est parce que j’ai violé le droit comptable.
- En matière d’ISoc, « dans la mesure où ‘la plus-value actée’ est portée et maintenue à
un ou plusieurs comptes distincts du passif et où elle ne sert pas de base au calcul de la
dotation annuelle de la réserve légale ou des rémunérations ou attributions
quelconques » (CIR, art. 190 – conditions d »intangibilité »). En droit comptable, cette
condition sera respectée puisque je ne peux pas le prendre au compte de résultat.

La Rubrique III du passif ‘Plus-values de réévaluation’ est « un compte distinct du passif ».

Pour les plus-values réalisées, on prend la valeur de réalisation moins la valeur comptable.
Si on reprend l’exemple de la machine, réalisée le 1er janvier 2022 pour 110000€. La valeur de
réalisation est de 110000€. La valeur comptable est de 80000€ (à savoir la valeur d’acquisition
de 10000€ déduction faite de l’amortissement y afférent de 20000€ - voir supra). La plus-value
réalisée sera de 30000€ (110000€ - 80000€).

En droit fiscal, la plus-value réalisée est exposée à l’article 43 du CIR comme tel : « la plus-
value réalisée est égale à la différence positive entre d’une part (…) la valeur de réalisation du
bien (…) et d’autre part sa valeur d’acquisition (…) diminuée des réductions de valeur et
amortissement admis antérieurement ».

On peut reprendre le même exemple, mais avec un élément supplémentaire qui est que le fisc
considère que la machine a une durée d’utilisation probable de 10 ans et n’admet dès lors qu’un
amortissement de 10000€ pour la période imposable de 2021. La valeur de réalisation est de
110000€, la valeur d’acquisition (100000€) diminué des seuls amortissements admis
antérieurement (10000€) est de 90000€. La plus-value réalisée sur le plan fiscal est alors de
20000€ (110000€ - 90000€).

Le régime du remploi est un incitant à l’investissement qui prend la forme d’une exonération
temporaire (CIR, art. 47). La plus-value réalisée a dans l’intervalle le statut de « réserves
exonérées » également dénommées « réserves immunisées » (réserves qui n’échappent que
provisoirement à l’ISoc). Pour le bien aliéné (CIR, art. 47, §1er, 2°, al. 1er – cas de l’aliénation
volontaire), il y a une immobilisation corporelle ou incorporelle, mais seulement dans ce dernier
cas, si « des amortissement ont été admis fiscalement », ce qui exclut la clientèle constituée. Il
faut que la nature de l’immobilisation ait plus de 5 ans au moment de l’aliénation.
Le remploi est le « montant égal (…) à la valeur de réalisation » (par opposition à la plus-value)
(CIR, art. 47 in limine) en « immobilisations corporelles ou incorporelles amortissables,
utilisées dans un État membre de l’(EEE) » (CIR, art. 47, §2). Pour ce qui est du délai du
remploi, en principe c’est un « délai de 3 ans prenant cours le premier jour de la période
imposable de réalisation des plus-values » (CIR, art. 47, §3, 2°). On a un régime plus favorable
en cas de remploi en « immeuble bâti, navire ou aéronef » (CIR, art. 47, §4, al. 1er). Le délai est
alors porté de 3 à 5 ans et on a alors aussi la faculté de remploi anticipé (le contribuable peut
choisir de faire courir le délai de 5 ans depuis « le premier jour de la pénultième (= l’avant-
dernière) période imposable précédant celle de la réalisation de la plus-value »). Il y a un relevé
à joindre aux déclarations fiscales (CIR, art. 47, §5). Il faut y joindre la déclaration fiscale « de
l’exercice d’imposition afférent à la période imposable de réalisation de la plus-value » ainsi
que les déclarations fiscales des exercices d’imposition ultérieurs « jusqu’à imposition
complète de la plus-value réalisée ». Il faut également respecter la condition d’intangibilité de

40
l’article 190 du CIR (voir les rubriques « réserves immunisées » et « impôts différés »).
L’imposition a lieu au rythme des amortissement sur le bien acquis en remploi. En effet, les
plus-values « sont considérées comme des bénéfices ou profits de la période imposable au cours
de laquelle les biens en remploi sont acquis ou constitués et de chaque période imposable
subséquente et ce, proportionnellement aux amortissements afférents à ces biens qui sont admis
à la fin, respectivement, de la première période imposable et de chaque période imposable
subséquente » (CIR, art. 47, §1er, al. 1er).

Exemple :
Je fais une vente le 1er juillet 2019 pour 200000€ d’une machine ayant une valeur comptable et
fiscale de 150000€ (la plus-value s’élève onc à 50000€). Je fais un remploi le 1er janvier 2021
de la valeur de réalisation de 200000€ dans une machine achetée pour 250000€ et dont la durée
d’utilisation probable est de 5 ans. Il y a une amortissement de la nouvelle machine à
concurrence de 50000€ lors de chacune des périodes imposables 2021 à 2025. La plus-value
devient imposable à concurrence de 10000€ lors de chacune des périodes imposables 2021 à
2025.

• Financement de la société

Pour le financement par fonds propres, il n’y a aucune charge sur le plan comptable, le
dividende intervenant au stade de l’affectation du résultat, il n’y a donc en principe aucune
déduction sur le plan fiscal. Les dividendes sont cependant parfois exonérés chez le bénéficiaire
qui est une autre société (voir infra).

Pour le financement par emprunt, la charge financière sur le plan comptable (voir schéma du
compte de résultats) est en principe déductible sur le plan fiscal. Les intérêts sont cependant en
principe imposables chez le bénéficiaire. Il y a donc un incitant fiscal à l’endettement.

Il y a deux types de réaction :

1. Donner un incitant fiscal pour le financement par fonds propres qui est la déduction pour
capital à risque ou « d’intérêts notionnels ».

« Notionnels » par opposition à réels veut dire qu’on peut déduire à des fins fiscales un intérêt,
en faisant comme si les fonds propres avaient été empruntés. Pour la base de calcul de la
déduction, pendant longtemps il s’agissait de l’ensemble des fonds propres, aujourd’hui elle se
base sur leur seule augmentation. L’étalement se fait sur 5 ans et la base de calcul est d’1/5 de
l’augmentation des fonds propres pendant 5 ans (CIR, art. 205ter, §1er, et 205quater, §1er). Pour
le taux de la déduction, il y a le taux moyen des obligations à 10 ans de l’État belge pour les
mois de juillet, août et septembre de l’année précédente (CIR, art. 205quater, §2). Aujourd’hui,
le taux est négatif (-0,16%) (n’a-t-on donc pas plutôt un désincitant fiscal plutôt ?). La
déduction est donc inexistante (confirmation par le CIR, art. 205quater, §6/1). Il y a néanmoins
une exception pour la petite société avec un taux de 0,34% car la petite société bénéficie d’un
avantage fiscal consistant à majorer le taux de 0,5% (CIR, art. 205quater, §6).

2. Prévoir des restrictions relatives à la déduction des intérêts.

Pour les restrictions à caractère général, on a

- La restriction fondée sur le taux du marché, les intérêts sont déductibles seulement dans
la mesure où ils ne dépassent pas « le taux d’intérêt pratiqué sur le marché, compte tenu
des éléments particuliers propres à l’appréciation du risque lié à l’opération, et

41
notamment de la situation financière du débiteur et de la durée du prêt (CIR, art. 55, al.
1er et 2). Pour les intérêts de prêt non-hypothécaires sans terme, il y a un plafond
correspondant à un taux de référence majoré de é,5% sauf si l’emprunt est contracté
auprès d’une entité visée à l’art. 56 du CIR (CIR, art. 55, al. 1er, 1°, et 56).

Cours du 20/10

- La restriction fondée sur la comparaison entre le résultat et les « surcoûts d’emprunt »


(qui sont l’excédent des intérêts payés sur les intérêts reçus (CIR, art. 198/1, §2), le
résultat servant d’étalon étant « l’EBITDA discal ». En substance, c’est le résultat de la
période imposable (« E » pour « earnings », « B » et « T » pour « before taxes »),
augmenté (« B » pour « before ») des surcoûts d’emprunt (« I » pour « interests ») et
des amortissements et réductions de valeur (« D » pour « depreciation » et « A » pour
« amortisation ») et diminué de revenus non imposables tels que certains dividendes et
certaines plus-values sur actions (CIR, art. 198/1, §3, al. 2). Il y a une non-déductibilité
des surcoûts d’emprunt dans la mesure où ils dépassent à la fois 3 millions € et 30% de
« l’EBITDA fiscal » (CIR, art. 198/1, §3, al. 2). Il y a certaines exceptions à cette
restriction comme la « société isolée » au sens de l’article 198/1, §6, 14° du CIR et les
établissements de crédit (CIR, art. 198/1, §6, 1°).

Remarque : l’article 198 reprend, en matière d’impôt des sociétés tous les frais qui ne sont pas
déductibles à titre de frais professionnels en plus de ceux énumérés à l’article 53 du CIR.

- On a également les restrictions visant les intérêts payés à une société à régime fiscal
favorable. La restriction est fondée sur la « sous-capitalisation » de la société (CIR, art.
198, §1er, 11°). La sous-capitalisation étant le ratio dettes/fonds propres qui excède 5.
Notons que les intérêts afférents à l’excédent ne sont pas déductibles. La restriction en
tant que telle est fondée sur le respect de certaines formalités et le « caractère réel et
sincère » de l’opération (CIR, art. 198, §1er, 10°). Il y a déduction seulement si le
paiement a été repris dans une annexe à la déclaration et que le contribuable justifie
« par toutes voies de droit qu’ils sont effectués dans le cadre d’opérations réelles et
sincères et avec des personnes autres que des constructions artificielles ». Il y a une
règle de minimis de 100000€. On peut également aller se référer à l’article 54 du CIR.
Cette restriction a lieu en raison des liens du prêteur avec la société (CIR, art. 18, al. 1er,
4°, et al. 8). Le prêteur est l’actionnaire, le dirigeant d’entreprise ou un membre de sa
famille. La règle est de type « sous-capitalisation » et signifie que le ratio dettes/fonds
propres est de 1/1 et les intérêts afférents à l’excédent d’intérêts ne sont pas déductibles.

• Avantages anormaux ou bénévoles

Exemple introductif :
Une société résidente fabrique des savons dont le coût à l’unité est de 5€. Elle les vend à 5€ à
une société en Irlande qui fait partie du même groupe (il n’est pas contestable que le siège de
la direction effective de cette société se situe bien en Irlande). Elle ne fait donc aucun bénéfice
puisqu’elle les revend au prix de coût à l’unité. La société établie en Irlande les revend à 30€ à
une société établie aux USA qui ne fait pas partie du groupe. La société résidente expédie
directement les savons à la société aux USA.

Que peut faire l’administration fiscale belge ?


Elle va mettre en place le régime des avantages anormaux ou bénévoles (voir infra).

42
Pour ce régime, il faut ajouter à la base imposable de la société résidente l’avantage anormal
ou bénévole accordé par celle-ci (CIR, art. 26, al. 1er). Il y a des exceptions « si les avantages
interviennent pour déterminer les revenus imposables des bénéficiaires » (CIR, art. 26, al. 1er).
C’est le cas dans l’exemple supra. Mais l’article 26, al. 2, 1° du CIR prévoit que « nonobstant
la restriction prévue à l’alinéa 1er, sont ajoutés aux bénéfices propres les avantages anormaux
ou bénévoles que (l’entreprise établie en Belgique) accorde à un contribuable visé à l’article
227 (= le contribuable assujetti à l’INR) à l’égard duquel l’entreprise établie en Belgique se
trouve directement ou indirectement dans des liens quelconques d’interdépendance ».

En ce qui concerne la situation de la double imposition économique, il faut une imposition du


même revenu entre les mains de deux contribuables différents. On peut la comparer à la double
imposition juridique qui est l’imposition du même revenu entre les mains du même
contribuable. Certains instruments internationaux offrent au contribuable des recours
permettant de faire supprimer cette double imposition économique.

Quid si la société qui achète les savons est résidente (plutôt que d’être établie en Irlande) ?
Il faut faire application de l’exception prévue à l’article 26, al. 1er, in fine, du CIR. Cette
différence de traitement est une restriction à la liberté d’établissement garantie par le TFUE
mais elle est justifiée « par la nécessité de sauvegarder la répartition équilibrée du pouvoir
d’imposition entre les États membres « (voir CJUE, 21 janvier 2010, SGI, C-311/08).

Quid si la société qui achète les savons est résidente et a en outre d’importantes pertes
antérieures ?
Les pertes peuvent en principe être déduites des revenus des périodes imposables suivantes
(CIR, art. 206, §1er, al. 1er). Par contre il y a une exception qui fait qu’aucune déduction n’est
admise sur la partie du résultat qui provient d’avantages anormaux ou bénévoles (CIR, art. 207,
al. 7, et 79). L’exception de l’article 26, al. 1er, in fine, du CIR s’applique également.

Quid si la société qui achète et revend les savons est résidente et qu’elle achète les savons à 2€
pièce (plutôt qu’à 5€ pièce) ?
A concurrence de la partie de l’avantage accordé qui représente un manque à gagner, on se
réfère à l’article 26, al. 1er, in fine, du CIR. A concurrence de la partie de l’avantage accordé
qui représente une dépense (3€ dans cet exemple), l’exception de l’article 26 s’applique. Si on
suit le régime de l’article 49, l’exception ne s’applique pas (la dépense qui n’est pas faite en
vue d’acquérir ou de conserver des revenus imposables n’est pas déductible). Il y a une primauté
de l’article 49 consacrée à l’article 26, al. 1er, in limine (« sans préjudice de l’application de
l’article 49 ») et l’exception ne s’applique donc pas. Le cas de la double imposition économique
est assumé par le législateur.

Quid si la société n’achète pas des savons destinés à être revendus mais une machine qu’elle
affecte durablement à son activité (prix convenu entre les parties de 10000€ ; valeur vénale de
250000€) et qu’elle est résidente ?
On a un avantage anormal ou bénévole de 240000€. L’exception s’applique. Il n’y a pas
d’imposition immédiate de l’avantage. La détermination du bénéfice imposable se fait à partir
du bénéfice comptable (CIR, art. 24, al. 3, et 183). En vertu du droit comptable, la machine doit
être comptabilisée à sa valeur d’acquisition de 10000€ et pas à sa valeur vénale de 250000€
(AR/CSA, art. 3 : 13 et art. 3 : 14, al. 1er ; question tranchée par la CJUE, 3 octobre 2013,
GIMLE, C-322/12). Il n’y a pas d’imposition à terme de l’avantage. Les amortissements sont
moindres puisqu’ils sont calculés sur 10000€ au lieu de l’être sur 250000€. En cas de revente,
la plus-value sera plus importante, la plus-value étant également déterminée à partir de la valeur
d’acquisition de 10000€ et pas de la valeur vénale de 250000€.

43
• Régime de la société qui a des actions ou parts dans une autre société

1. Dividendes

Voici la position du problème : il y a une double imposition économique si la société


bénéficiaire était imposée sur les dividendes reçus de la société distribuée. Ces dividendes
proviennent de bénéfices, qui, en général, ont déjà été imposés chez cette dernière. Une pareille
imposition en cascade serait un frein à la formation de groupes de sociétés, notamment dans
l’UE. L’UE a créé la directive européenne dite « mère-filiale » pour éviter cette exonération en
cascade (directive 2011/96/UE du Conseil du 30 novembre 2011 concernant le régime fiscal
commun applicable aux sociétés mères et filiales d’États membres différents). Le premier type
de mesure est l’exonération de la retenue à la source (qui est le PrM en Belgique) sur les
dividendes versés par la société distributrice (la « filiale » où il faut répondre à des critères
fiscaux particuliers). La deuxième mesure est un remède à la double imposition économique
chez la société bénéficiaire (la « mère »).

Exemple :
Je suis une société belge qui reçoit un dividende d’une société allemande, filiale. Qu’est-ce qui
va être régit par le droit belge ?
Il faut d’abord bien regarder où se trouvent les deux sociétés. Donc la question de l’exonération
du revenu à la source est en fait une question de droit fiscal allemand et non de droit fiscal
belge. Sous l’angle du droit fiscal belge, la seule question qui se pose est : quel est le remède à
la double imposition économique qui est le régime de la déduction RDT (voir infra).
Si par contre la société belge distribue un dividende à la société allemande, la seule question
qui se pose du point de vue belge est celle de l’exonération de la retenue à la source.

Pour ce qui est de la directive « mère-filiale », il y a une exonération de la retenue à la source


sur les dividendes versés par la société distributrice (la « filiale ») (directive, art. 5). Le remède
à la double imposition économique chez la société bénéficiaire (la « société mère ») est l’option
choisie par la Belgique : « l’État membre de la société mère (…) (s’abstient) d’imposer (les)
bénéfices (distribués) » (directive, art. 4, §1er, a).

Pour ce qui est de la transposition en Belgique, il y la solution de l’exonération du PrM (dans


l’AR/CIR sur pied du CIR, art. 266, al. 1er). La société mère doit être résidente, établie dans
une État membre de l’UE ou établie dans un État avec lequel la Belgique a conclu une CPDI
(avec un niveau suffisant d’échange de renseignements dans ce dernier cas) (AR/CIR, art. 106,
§5, al. 1er, et §6, al. 1er). Il y a une condition de participation qui est que la société mère doit
avoir au moins 10% du « capital » de la filiale (AR/CIR, art. 106, §5, al. 2, §6, al. 2 et §6bis).
Pour ce qui concerne la notion de « capital » propre, il faut se référer à l’article 2, §1er, 6°, a du
CIR). Pour ce qui est de la condition de « détention », la société mère doit conserver la
participation dans la filiale pendant une période ininterrompue d’au moins 1 an (AR/CIR, art.
106, §5, al. 2, et §6, al. 2 – « est ou a été » car la condition peut être remplie après le moment
de la distribution). Il y a des conditions supplémentaires pour la société autre que résidente qui
sont que

- La forme doit être énumérée dans l’annexe 1 de la directive mère-filiale ou par forme
analogue si la société est établie dans un État hors UE avec lequel la Belgique a une
CPDI (AR/CIR, art. 106, §5, al. 3, a).
- La société a bien son domicile fiscal dans l’État où elle est dit être établie (AR/CIR, art.
106, §5, al. 3, b).
- Elle est assujettie à l’impôt sur les sociétés (à comparer avec la directive mère-filiale,
art. 2, point a, iii, et AR/CIR, art. 106, §5, al. 3, c).

44
L’autre solution est le remède chez la société mère puisque la déduction fiscale correspond à
100% des dividendes reçus. C’est la « déduction pour revenus définitivement taxés » ou
« déduction RDT » (CIR, art. 202, §1er, al. 1er, 1°, et 204). Il y a plusieurs conditions :

- Une condition de participation : la société mère doit avoir au moins 10% du « capital »
de la filiale ou une participation d’une valeur d’acquisition d’au moins 2,5 millions €
(CIR, art. 202, §2, al. 1er, 1° - plus souple donc qu’en matière d’exonération de PrM ;
sur la notion de « capital » dans le CIR, voir supra).
- Une condition de « détention » : la société mère doit conserver la participation dans la
filiale en pleine propriété pendant une période ininterrompue d’au moins un an (CIR,
art. 202, §2, al. 1er, 2° - « est ou a été » car la condition peut être remplie après le moment
de la distribution).
- Une condition de taxation. Il faut se référer à la disposition très complexe de l’article
203 du CIR. Par exemple, la déduction ne s’applique pas si le dividende est distribué
par « une société qui n’est pas assujettie à l’impôt des sociétés ou à un impôt étranger
analogue à cet impôt ou qui est établie dans un pays dont les dispositions du droit
commun en matière d’impôts sont notablement plus avantageuses qu’en Belgique »
(CIR, art. 203, §1er, al. 1er, 1°). Dans certains cas, la déduction n’est rejetée qu’à
concurrence d’une partie du dividende distribué. Par exemple, la déduction ne
s’applique pas pour le dividende distribué par une société « dans la mesure où (cette
société) réalise des bénéfices par l’intermédiaire d’un ou de plusieurs établissements
étrangers qui sont assujettis de manière globale à un régime de taxation notablement
plus avantageux qu’en Belgique » (CIR, art. 203, §1er, al. 1er, 4°).

Il y a 3 particularités qui résultent de la nécessité pour la Belgique de se conformer au droit de


l’UE

- Une en matière d’exonération de PrM en faveur de la société mère autre que résidente
qui répond aux conditions vues précédemment lorsque sa participation est inférieure à
10% du capital de la filiale mais a une valeur d’acquisition d’au moins 2,5 millions €
(CIR, art. 264/1, §1er). En effet, lorsque la société mère est belge, le PrM n’est qu’en
avance sur l’impôt des sociétés (contrairement à l’impôt définitif à l’INR lorsque la
société est établie à l’étranger : CIR, art. 248, al. 1er). Ce régime fait suite à la
condamnation de la Belgique pour violation de la libre circulation des capitaux (CJUE,
12 juillet 2012 (ord.), Tate & Lyle Investments, C-348/11).
- Lorsque la filiale est établie dans l’EEE, la déduction RDT peut être reportée sur les
périodes imposables postérieures (CIR, art. 205, §2, al. 2, et §3). Ce régime fait suite à
la condamnation de la Belgique pour violation de l’article 4, §1er, a, de la directive mère-
filiale en vertu duquel la Belgique doit s’abstenir d’imposer les bénéfices distribués
(CJUE, 12 février 2009, Cobelfret, C-138/07). En effet, en vertu de l’article 202, §1er,
1°, du CIR, la déduction est accordée « dans la mesure où (les dividendes) (se)
retrouvent (dans) (l)es bénéfices de la période imposable ». Selon la CJUE, cette
dernière règle aboutit à une imposition indirecte lorsque la société mère a par ailleurs
une perte d’exploitation.

Par exemple :
Une perte de 40 sans dividende a une perte reportable de 40. Une perte de 40 avec un
dividende de 100, ce qui donne un bénéfice de 60 avant déduction de RDT. La réduction
de RDT étant limitée à 60, on n’a donc pas ici de perte reportable de 40. La solution
adopté par la Belgique est que les excédents de RDT sont reportables de 40.

45
- La déduction RDT n’est pas imputable sur certaines dépenses non admises, mais
seulement dans le cas où la filiale est établie en dehors de l’EEE (CIR, art. 205, §2). Par
exemple, la partie non déductible des frais de voiture (CIR, art. 205, §2, al. 1er, 6°, et al.
2).

2. Plus-values, réductions de valeur et moins-values

Les plus-values sont les exonérations des plus-values sur actions ou parts « dans la mesure où
les revenus éventuels de ces actions ou parts sont susceptibles d’être déduits des bénéfices en
vertu des articles 202 et 203 (…) » (CIR, art. 192, §1er, al. 1er).

Les réductions de valeur et moins-values sont non déductibles en règle générale (CIR, art. 198,
§1er, 7°).

• Liquidation

Il y a trois types de fonds propres fiscaux. Le prof se limite au cas de la distribution à un


contribuable assujetti à l’IPP :

- 1. Le premier niveau est celui du capital libéré qui n’implique aucune charge fiscale.
« Les dividendes comprennent les remboursements totaux ou partiels de capital, à
l’exception des remboursements qui sont censés provenir (…) du capital libéré (…) et
opérés en exécution d’une décision régulière de la société conformément au Code des
sociétés et associations ou, si la société n’est pas régie par ce Code, conformément aux
dispositions du droit qui la régit » (CIR, art. 18, al. 1er, 2°).

Pour ce qui est du « capital », voir supra, le « capital libéré » est « le capital dans la
mesure où celui-ci est formé par des apports réellement libérés en numéraire ou en
nature, autres qu’en industrie, et où il n’a fait l’objet d’aucun remboursement ou
réduction » (CIR, art. 2, §1er, 6°, b, et 184, al. 1er). C’est la mise des actionnaires. Si une
société anonyme augmente son capital par incorporation de réserves ayant le statut de
« réserves taxées » en droit fiscal, ce nouveau capital constitue-t-il du capital libéré (en
d’autres termes, cette opération transforme-t-elle les réserves taxées en capital libéré) ?
Non, c’est d’ailleurs pour cela qu’on a cette notion de capital libéré qui est distincte de
celle du capital social. C’est pour rendre clair que le capital libéré est seulement le
capital formé par des apports réellement libérés en nature ou en numéraire, par
opposition à des réserves incorporées.

- 2. Le deuxième niveau est celui des réserves taxées (bénéfice qui a été imposé mais pas
encore distribué). Il n’y a pas d’ISoc, mais un PrM et une imposition distincte à l’IPP
(avec régime du PrM libératoire).

- 3. Pour finir, on a les réserves exonérées (voir supra). Il y a un Isoc, un PrM et une
imposition distincte à l’IPP (avec le régime du PrM libératoire). C’est ce qu’il y a de
moins bien comme régime fiscal.

Cours du 21/10

Passons maintenant au régime applicable en cas de réduction de capital par remboursement aux
actionnaires. Il est plus favorable en principe qu’une distribution de dividende, du moins dans
la mesure où le capital a la nature de capital libéré (CIR, art. 18, al. 1er, 2°).

46
Exemple 1 :
Une société anonyme peut incorporer dans son capital des réserves disponibles qui ont la nature
fiscale de réserves taxées. Imaginons une SA, les actionnaires ont fait des apports en numéraire
à concurrence de 500000€ entièrement libérés (=capital libéré) et cette société fait aussi des
bénéfices de telle sorte qu’elle a également des réserves disponibles en droit des sociétés,
réserves taxées d’un montant de 500k. Cette SA souhaite verser 400k à ses actionnaires et elle
hésite entre procéder à une réduction de capital par remboursement aux actionnaires et procéder
à une distribution de dividendes. D’un point de vue fiscal, qu’est-ce que cette société a intérêt
à faire ?
Fiscalement, d’après ce qu’on a vu jusqu’à présent, il serait dès lors plus intéressant de d’abord
rembourser un maximum de capital (dans la mesure où il a la nature de capital libéré) aux
actionnaires et puis seulement de leur distribuer des réserves taxées (en général sous la forme
de dividendes).
Pour éviter ça, le CIR prévoit une règle proportionnelle (CIR, art. 18, al. 2 et 7). Le
remboursement de capital imputable sur le capital libéré n’est possible qu’à concurrence d’une
fraction ayant, en substance, comme numérateur le capital libéré et comme dénominateur le
capital libéré et les réserves taxées. Le solde doit être distribué sous la forme d’un dividende
ou, à défaut, est de toute manière censé provenir des réserves taxées. Donc ici dans l’exemple,
elle va procéder à une réduction de capital par remboursement à concurrence de 200k et à une
distribution de dividende de concurrence de 200k également (400k/1M= 400k).

Exemple 2 :
Une société ayant un capital libéré d’un million € et des réserves taxées de neuf million €
souhaite verser à ses actionnaires un montant de deux millions €. L’imputation sur le capital
libéré sera limitée à 1/10 (numérateur d’un million et dénominateur de 10 millions) des deux
millions, soit 200000€. Le solde de 1.8 millions devra être distribué sous la forme de dividende
ou, à défaut, sera de toute manière censé provenir des réserves taxées de 9 millions.

Pour ce qui est de la liquidation, l’actionnaire personne physique reçoit le remboursement de


sa mise (le « capital libéré ») et est imposable à titre de revenus mobiliers sur l’excédent, que
l’on intitule en pratique le « boni de liquidation » (= ce que je récupère en plus de ma mise). Le
CIR, art. 209, al. 1er dispose que « en cas de partage de l’avoir social d’une société, par suite de
dissolution ou de toute autre cause, l’excédent que présentent les sommes réparties, en espèces,
en titres ou autrement, sur la valeur réévaluée du capital libéré, est considéré comme un
dividende distribué ». L’article 18, al. 1er, 2°ter du CIR énonce que « les dividendes
comprennent les sommes définies comme dividendes par l’article 209 en cas de partage total
(…) de l’avoir social d’une société résidente ».

Il y a une imposition sur le PrM et une imposition distincte à l’IPP (avec le régime du PrM
libératoire). La société même reste assujettie à l’ISoc pendant la liquidation (CIR, art. 208, al.
1er). Si, plutôt que de réaliser un bien et de distribuer le produit de réalisation aux actionnaires,
la société décide de distribuer ce bien de nature, la plus-value demeure imposable (voir CIR,
art. 208, al. 2, qui vise « les plus-values réalisées ou constatées à l’occasion du partage de
l’avoir social »). On a voulu viser par les plus-values réalisées ou constatées, la situation où la
société a un bien, une immobilisation par exemple et qu’il y a une plus-value latente et que
plutôt que de vendre ce bien sur lequel il y a cette plus-value puis de le distribuer sous forme
de réalisations aux actionnaires, la société décide de distribuer directement ce bien en nature
aux actionnaires.
Par exemple : une SRL en liquidation distribue à son actionnaire unique un brevet qui a une
valeur comptable et fiscale de 100k mais dont la valeur vénale est d’un million €. La SRL en
liquidation est imposable à l’ISoc sur une « plus-value constatée » de 900k (1 million€ - 100k
- voir supra à propos de la détermination de la plus-value).

47
• Réorganisations

Définition : « l’opération par laquelle une ou plusieurs sociétés transfèrent à une autre société,
par suite d’une dissolution sans liquidation, l’intégralité de leur patrimoine, activement et
passivement, moyennant l’attribution aux associés ou actionnaires de la société dissoute de
parts ou d’actions de la société bénéficiaire et, le cas échéant, d’une soulte en espèces ne
dépassant pas le dixième de la valeur nominale des parts ou actions attribuées, ou à défaut de
valeur nominale, de leur pair comptable » (CSA, art. 12 : 2).

Le prof se limite au cas où tous les actionnaires sont assujettis à l’IPP.

Le CIR assimile l’absorption à la liquidation (CIR, art. 210, §1er, 1° et §2). Pour les sociétés
absorbées, l’ISoc porte sur les plus-values latentes (qui doit être considérée comme absorbée)
et les réserves exonérées. Pour les actionnaires assujettis à l’IPP, comme on considère qu’on
doit associer l’absorption à une liquidation, les actionnaires subissent l’imposition distincte aux
taux de 30%, ainsi que le PrM (avec régime du PrM libératoire) sur le boni de liquidation
distribué (sous réserve de controverses).

Le coût fiscal est tel (il est en effet prohibitif) qu’il constituerait un obstacle aux réorganisations,
nationales ou transfrontalières. Il y a donc une directive fiscale sur les réorganisations (directive
2009/133/CE du Conseil du 19 octobre 2009 concernant le régime fiscal commun applicable
aux fusions, scissions, scission partielles, apports d’actifs et échanges d’actions intéressant des
sociétés d’États membres différents, ainsi qu’un transfert du siège statutaire d’une SE ou d’une
SCE d’un État membre à un autre).

Le régime de neutralité se fait sous trois conditions (régime le plus fréquent en pratique) :

- L’opération est une « fusion par absorption » au sens du CIR, définition qui est calquée
ici sur celle du CSA (CIR, art. 2, §1er, 6°/1, a, et 211, §1er, al. 1er, in limine).
- « La société absorbante (…) (est) une société résidente ou une société intra-
européenne » (CIR, art. 211, §1er, al. 4, 1° ; si la société absorbante est intra-européenne,
la matière imposable – plus-values latentes et réserves exonérées – doit demeurer en
Belgique (CIR, art. 211, §1er, al. 5).
- « L’opération ne peut avoir comme objectif principal ou comme un de ses objectifs
principaux la fraude ou l’évasion fiscales » (CIR, art. 183bis, al. 1er, et 211, §1er, al. 4,
3°). Il y a une présomption réfragable que tel est le cas en l’absence de « motifs
économiques valables » (CIR, art. 183bis, al. 2).

• Limitations à l’imputation des déductions fiscales

Pour les déductions fiscales, le prof se limite à la déduction des pertes antérieures, à la déduction
des excédents de RDT et à la déduction pour capital à risque.

La première limitation à l’imputation des déductions fiscales est le régime de la corbeille (= qui
rassemble un ensemble de déductions fiscales) (CIR, art. 207, al. 5) est un régime d’imputation
limitée par période imposable à un million € plus 70% de la quotité qui excède un million €
(CIR, art. 207, al. 5). Le but est d’atteindre les sociétés qui ont un important stock fiscal.

Exemple :
On a des pertes antérieures de 10 millions €, un bénéfice imposable de 3 millions € et un
déduction limitée à 2,4 million € (1 million € + 1,4 millions € (70% de la quotité qui excède 1
million €, à savoir ici 2 millions €)). Le bénéfice imposable subsistant est de 600k.

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La deuxième limitation est celle de la rectification ou taxation d’office ? Il n’y a pas
d’imputation « sur la partie du résultat qui fait l’objet d’une rectification de la déclaration (…)
ou d’une imposition d’office (…) pour laquelle des accroissement d’un pourcentage égal ou
supérieur à 10% (…) sont effectivement appliqués » (CIR, art. 207, al. 7).

La troisième limitation est celle des avantages anormaux ou bénévoles reçus où il n’y a pas
d’imputation sur la partie du résultat qui provient de tels avantages (CIR, art. 207, al. 7) : voir
supra.

On a également une mesure qui vise à éviter le commerce des sociétés en perte comme le dit
l’article 207, al. 9 du CIR : « en cas de prise ou de changement, au cours de la période imposable
du contrôle d’une société, qui ne répond pas à des besoins légitimes de caractère financier ou
économique, ne sont pas déductibles des bénéfices de cette période, ni d’aucune autre période
imposable ultérieure », notamment les pertes antérieures et les excédents de RDT.
Autrefois, on avait un marché des sociétés en perte parce que si je m’étais lancé dans un
commerce qui n’avait connu aucun succès, cette personne subissait des pertes pendant quelques
années. Il n’y avait plus d’actif, mais elle avait tout de même un stock de pertes fiscales. Une
personne qui aurait voulu reprendre cette société ne payait donc pas d’impôts sur le montant
des pertes. C’est pour éviter ça que l’article 207, al. 9 est venue y remédier.

La dernière mesure concerne les réorganisations et principalement le cas de la fusion par


absorption. En l’absence de disposition spécifique, le sens de la fusion influence le montant
après fusion des pertes antérieures et des excédents de RDT. En effet, la société absorbante
conserve tout, alors que la société absorbée ne conserve rien. Il y a un intérêt fiscal à faire
absorber une société prospère par une coquille vide ayant d’importantes pertes antérieures ou
excédents de RDT.
Pour éviter cela, la réaction du législateur (CIR, art. 206, §2, al. 1er et 2) est de dire que
l’élément-clé du régime est que la part de l’actif net fiscal (le patrimoine en quelque sorte) de
la société absorbée ou absorbante dans l’actif net des deux sociétés réunies (avant fusion). Pour
mémoire, l’actif net sont les éléments d’actif moins les dettes et les provisions. On parle ici
d’actif net fiscal parce qu’il est déterminé sur la base de la valeur fiscale nette des éléments
(voir supra, à propos des plus-values réalisées sur les éléments d’actif. A la différence de la
valeur comptable, on ne tient compte que des amortissements et réductions de valeur qui ont
été admis sur le plan fiscal). La société absorbante ne conserve ses pertes antérieures et
excédents de RDT qu’en proportion de la part de son actif net fiscal des deux sociétés réunies.
Pour ce qui est de la société absorbée on a une sorte de mesure favorable puisque ses pertes
antérieures et excédents de RDT demeurent déductibles malgré la fusion en proportion de la
part de son actif net fiscal dans l’actif net fiscal des deux sociétés réunies. L’idée de cette mesure
est de faire en sorte que le sens de la fusion ait moins d’importance d’un point de vue fiscal et
nait pas d’importance sur les déductions fiscales reportées.

Exemple :
L’actif net fiscal de la société absorbée est de 6 millions €. L’actif net fiscal de la société
absorbante est de 4 millions €. L’actif net fiscal des deux sociétés réunies est donc de 10 million
€. Les pertes antérieures de la société absorbante sont de 100 millions €. Les pertes antérieures
demeureront déductibles après fusion seulement à concurrence de 40 millions € (4/10 x 100
millions €).

49
Droit fiscal international

Il s’agira ici d’un examen de la situation du contribuable belge, assujetti à l’IPP ou à l’ISoc, qui
reçoit des revenus de source étrangère.

Il y a deux types de remède : les remèdes de droit interne et les Conventions préventives de la
double imposition (« CPDI »).

• Remèdes de droit interne

Le premier remède de droit interne est le principe du « net frontière ». Pour les contribuables
assujettis à l’IPP, il y a une réduction de moitié de la partie de l’impôt afférente à certains
revenus de source étrangère. Pour les contribuables assujettis à l’ISoc, il y a une « quotité
forfaitaire d’impôt étranger » pour les intérêts et les redevances. L’impôt étranger réduit la base
imposable en Belgique (exemple du principe du net frontière en annexe 1 infra). Ca vaut en
principe pour les quatre catégories de revenus, mais l’administration fiscale le conteste depuis
peu en matière de revenus immobiliers.

Annexe 1 :

I. De source belge (sur les détails du régime, voir supra)

Montant du dividende 1000


Imposition distincte à l'IPP / Pr. M. (30 %) 300
Montant du dividende après impôt 700

II. De source étrangère sans convention

Montant du dividende 1000


Impôt étranger (par hypothèse 25 %) 250
Revenu "net frontière" 750
Imposition distincte à l'IPP / Pr. M. (30 %) 225
Montant du dividende après impôt 525

III. De source étrangère avec convention (impôt étranger limité à 15 % - pas d'imputation en Belgique)

Montant du dividende 1000


Impôt étranger limité à 15 % 150
Revenu "net frontière" 850
Imposition distincte à l'IPP / Pr. M. (30 %) 255
Montant du dividende après impôt 595

L’autre remède du droit interne est la réduction de moitié de la partie de l’impôt afférente à
certains revenus de source étrangère. Cette réduction est prévue par l’article 156 du CIR. Dans
le calcul de l’IPP (loi spéciale de financement, art. 5/2, §2, 3° et 4°) il y a une réduction
appliquée sur l’impôt de base diminué de l’impôt sur la quotité du revenu exempté d’impôt. Il
permet d’obtenir le « principal » (sur cette notion, voir supra). La réduction ne s’applique par
contre pas aux revenus mobiliers et ne s’applique qu’à certains revenus divers. Il y a une
50
condition d’imposition pour les revenus professionnels et certains revenus divers (CIR, art. 156,
al. 1er, 2° et 3°, a). Le revenu doit avoir été « imposé » à l’étranger : voir infra sur la portée de
cette expression. Voir exemple en annexe 2.

Annexe 2 :

Rémunérations - contribuable assujetti à l'IPP isolé et ayant son domicile fiscal en


Région wallonne

I. Sans convention (CIR, art. 156)

Rémunérations nettes de source étrangère (par hypothèse) 25 000.00 €


Impôt étranger (par hypothèse) 5 000.00 €
Revenu "net frontière" 20 000.00 €
Rémunérations nettes de source belge (par hypothèse) 21 360.00 €
Revenu imposable 41 360.00 €
(voir calcul cours
Impôt de base diminué de l'impôt sur la quotité du revenu exempté d'impôt 13 123.50 € du 23 septembre)
Partie de l'impôt qui correspond au revenu étranger 6 345.99 €
Réduction pour revenus d'origine étrangère (moitié de la partie de l'impôt qui correspond
au revenu étranger) -3 172.99 €
"Principal", qui correspond dans cet exemple à l'impôt total 9 950.51 €

II. Exonération pure et simple (pour illustrer la différence avec le III)

Rémunérations nettes de source étrangère (par hypothèse) 25 000.00 €


Impôt étranger (par hypothèse) 5 000.00 €
Revenu "net frontière" 20 000.00 €
Rémunérations nettes de source belge (par hypothèse) 21 360.00 €
Revenu imposable 21 360.00 €
Impôt de base diminué de l'impôt sur la quotité du revenu exempté d'impôt, qui (voir détail ci-
correspondrait dans cet 4 250.50 € dessous)
exemple au "principal" et à l'impôt total

III. CPDI prévoyant réserve progressivité (politique conventionnelle belge)

Rémunérations nettes de source étrangère (par hypothèse) 25 000.00 €


Impôt étranger (par hypothèse) 5 000.00 €
Revenu "net frontière" 20 000.00 €
Rémunérations nettes de source belge (par hypothèse) 21 360.00 €
Revenu imposable 41 360.00 €
(voir calcul cours
Impôt de base diminué de l'impôt sur la quotité du revenu exempté d'impôt 13 123.50 € du 23 septembre)
Partie de l'impôt qui correspond au revenu étranger 6 345.99 €
Réduction pour revenus d'origine étrangère (partie de l'impôt qui correspond au revenu
étranger) -6 345.99 €
"Principal", qui correspond dans cet exemple à l'impôt total 6 777.51 €

(détail du calcul de l'impôt dans le cas II)

Impôt sur la première tranche, imposable à 25 % (0,01 euro à 13.540 euros) 3 385.00 €
Impôt sur la deuxième tranche, imposable à 40 % (13.540 euros à 21.360 euros) 3 128.00 €
Impôt de base 6 513.00 €
Quotité du revenu exempté d'impôt (montant indexé EI 2022) 9 050.00 €
Impôt sur la quotité du revenu exempté d'impôt 2 262.50 €
Impôt de base diminué de l'impôt sur la quotité du revenu exempté d'impôt 4 250.50 €

51
• CPDI

Voici quelques généralités sur les CPDI. Il s’agit de traités internationaux bilatéraux. Il y des
CPDI avec les 26 autres Etats membres de l’UE et la plupart des partenaires économiques de la
Belgique. Il y a une forte similitude entre les différentes CPDI conclues par la Belgique, et ce
pour deux raison : elles s’inspirent pour la plupart du Modèle OCDE et la Belgique a une
certaine Politique conventionnelle. Le prof va se concentrer sur le Modèle OCDE dans le cadre
du cours en précisant la politique conventionnelle de la Belgique sur certains points. Ca ne doit
pas nous occulter l’importance d’aller lire à chaque fois les dispositions de la CPDI applicable.
En principe il y a deux conventions qui sont un peu particulières qui sont : celle avec la France
et celle avec les USA.

1. Modèle OCDE

Il signifie « organisation de coopération au développement économique ». C’est une


organisation internationale située à Paris, avec notamment un « Comité des Affaires fiscales »
composé de représentants des administrations fiscales membres de l’OCDE. Le modèle
s’accompagne d’un commentaire détaillé. Une importante révision du Modèle OCDE est
intervenue en 2017. Elle est intervenue à la suite des travaux sur « l’érosion de la base
d’imposition et le transfert de bénéfices ». Il y a une « Convention multilatérale » (« MLI ») en
vue d’adapter plus rapidement les CPDI existantes.

En ce qui concerne le champ d’application de la convention, les personnes visées sont les
« personnes qui sont résidentes d’un État contractant ou des deux États contractants » (Modèle
OCDE 2017, art. 1, §1er). « Résident d’un État contractant » vise « toute personne qui, en vertu
de la législation de cet État, est assujettie à l’impôt dans cet État en raison de son domicile, de
sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue (Modèle
OCDE 2017, art. 4, §1er). Pour le cas où une personne est résidente dans deux États contractants,
on a une règle de départage (Modèle OCDE 2017, art. 4, §§2 et 3). Les impôts visés sont les
« impôts sur le revenu et sur la fortune perçus pour le compte de l’État contractant, de ses
subdivisions politiques ou de ses collectivités locales, quel que soit le système de perception »
(Modèle OCDE 2017, art. 2, §1er).

Il y a un pouvoir d’imposition laissé à l’État de la source. Pour les revenus immobiliers et les
gains en capital sur des biens immobiliers, il y a un pouvoir illimité de l’État de la source
(Modèle OCDE 2017, art. 6, §1er, et 13, §1er). Pour les bénéfices des entreprises (« entreprise »
« s’applique à l’exercice de toute activité ou affaire » (Modèle OCDE 2017, art. 3, §1er, c)), tout
dépend de la présence ou non d’un établissement stable dans l’État de la source. En l’absence
d’établissement stable, il n’y a aucun pouvoir d’imposition de l’État de la source (Modèle
OCDE 2017, art. 7, §1er, in limine). En présence d’un établissement stable, il y a un pouvoir
d’imposition illimité de l’État de la source sur les bénéfices attribuables à l’établissement
(Modèle OCDE 2017, art. 7, §1er). L’établissement stable peut être « matériel ». Il s’agit de
« l’installation fixe d’affaires par l’intermédiaire de laquelle une entreprise exerce tout ou partie
de son activité », telle qu’une succursale, un bureau, une usine, … (Modèle OCDE 2017, art.
5, §§1 et 2). Il y a par contre une exception qui est celle de l’activité qui ne revêt qu’un caractère
préparatoire ou auxiliaire (Modèle OCDE 2017, art. 5, §4). Pour ce qui est du cas du chantier
de construction, n’est un établissement stable que le chantier qui dépasse douze mois (Modèle
OCDE 2017, art. 5, §3 – point qui est susceptible de varier de convention en convention).
L’établissement stable peut également être « personnel » et c’est alors une personne autre qu’un
agent indépendant qui agit ou est réputé agir au nom et pour le compte de l’entreprise (Modèle
OCDE 2017, art. 5, §§5 et 6). L’attribution des bénéfices à l’établissement stable est une fiction
de l’entreprise indépendante (Modèle OCDE 2017, art. 7, §2). Pour ce qui est des dividendes

52
et des intérêts, le pouvoir de l’État de source est limité. Le Modèle OCDE plafonne l’imposition
à 15% pour les dividendes en règle générale et à 10% pour les intérêts (Modèle OCDE 2017,
art. 10, §§1 et 2, et 11, §§1 et 2). Ca vaut aussi pour les entreprises sauf si les actions ou la
créance sont affectés à un établissement stable dans l’État de la source (Modèle OCDE 2017,
art. 10, §4, et 11, §4).

La règle générale est celle des gains en capital sur des biens mobiliers. Il n’y a aucun pouvoir
d’imposition de l’État de la source (Modèle OCDE 2017, art. 13 §5). Ca vaut aussi pour les
entreprises sauf si les biens mobiliers sont affectés à un établissement stable dans l’État de la
source (Modèle OCDE 2017, art. 13, §2). Cela n’est pas à dire qu’il y aura nécessairement une
imposition dans l’état de résidence : pourquoi ?

Pour ce qui est des rémunérations maintenant, il y a un pouvoir illimité de l’Etat de la source
mais sur les seules rémunérations qui proviennent d’un emploi exercé dans cet Etat et avec une
importante exception (Modèle OCDE 2017, art. 15, §§1 et 2).

Il y a une exception à l’article 15, §2, du Modèle OCDE 2017.


Quid si le bénéficiaire des rémunérations travaille pour un employeur qui est résident dans le
même Etat que lui et exerce son emploi dans l’Etat de la source pendant 65 jours ?
Les conditions de l’exception de l’article 15, §2 sont réunies. On est en dessous du total de 183
jours, les rémunérations sont payées par un employeur qui n’est pas établi dans l’autre Etat,
mais en Belgique et la charge des rémunérations est supportée par un établissement stable que
cette société belge aurait dans l’autre Etat.

Quid si le bénéficiaire des rémunérations travaille pour un employeur qui est résident dans
l’Etat de la source et exerce son emploi dans l’Etat de la source pendant 65 jours ? L’Etat de la
source va-t-il pouvoir imposer la rémunération afférente à ces 65 jours de travail ?
Oui puisque les conditions de l’article 15 sont cumulatives. L’exception du 62 ne s’applique
pas.

Pour la disposition-balai (Modèle OCDE 2017, art. 21, §1er), la règle est qu’il n’y a aucun
pouvoir d’imposition de l’Etat de la source. Par exemple, les rentes alimentaires. Cette
disposition nous dit quoi faire quand on est en présence d’un élément de revenu qui n’est pas
visé aux disposition précédentes.

Il y a plusieurs méthodes pour éliminer les doubles impositions (à appliquer par l’Etat de
résidence). Il y a la méthode d’exemption (ou d’exonération) et la méthode d’imputation
(Modèle OCDE, art. 23A, §1er, et 23B, §1er) (annexe 3). D’après la Politique conventionnelle
de la Belgique, le choix a été d’opter pour la méthode d’exemption (voir par exemple la CPDI
belgo-néerlandaise, art. 23, §1er, a).

La méthode d’exemption : « Lorsqu’un résident d’un Etat contractant reçoit des revenus qui
sont imposables dans l’autre Etat contractant conformément aux dispositions de la présente
Convention, le premier Etat exempte de l’impôt ces revenus, sous réserve des dispositions des
paragraphes 2 et 3 ».

La méthode d’imputation : « Lorsqu’un résident d’un Etat contractant reçoit des revenus qui
sont imposables dans l’autre Etat contractant conformément aux dispositions de la présente
Convention, le premier Etat accorde
a) sur l’impôt qu’il perçoit sur les revenus de ce résident, une déduction d’un montant égal à
l’impôt sur le revenu payé dans cet autre Etat ;

53
b) su l’impôt qu’il perçoit sur la fortune de ce résident, une déduction d’un montant égal à
l’impôt sur la fortune payé dans cet autre Etat.
Dans l’un ou l’autre cas, cette déduction ne peut toutefois excéder la fraction de l’impôt sur le
revenu, calculé avant déduction, correspondant selon le cas aux revenus imposables dans cet
autre Etat ».

Annexe 3 :

Société

Méthode d'exemption (d'exonération)

Bénéfices attribuables à l'établissement stable 100 000.00 €


Impôt Etat de la source (par hypothèse 20 %) 20 000.00 €
Impôt Etat de résidence (par hypothèse 30 % mais exemption) 0.00 €

Remarques
Charge fiscale totale : 20.000 € (impôt étranger)
Neutralité de l'importation des capitaux

Méthode de l'imputation

Bénéfices attribuables à l'établissement stable 100 000.00 €


Impôt Etat de la source (par hypothèse 20 %) 20 000.00 €
Impôt Etat de résidence (par hypothèse 30 %) avant imputation impôt étranger 30 000.00 €
Imputation impôt étranger -20 000.00 €
Impôt Etat de résidence après imputation impôt étranger 10 000.00 €

Remarques
Charge fiscale totale : 30.000 € (impôt étranger de 20.000 € et impôt Etat de résidence 10.000 €)
Neutralité de l'exportation des capitaux

Cours du 27/10

La réserve de progressivité est une porte laissée ouverte par le Modèle OCDE (Modèle OCDE
2017, art. 23A, §1er). La Politique Conventionnelle de la Belgique est de le prévoir (voir par
exemple la CPDI belgo-néerlandaise, art. 23, §1er, a où la Belgique exempte de l’impôt ces
revenus qui sont imposés aux Pays-Bas, mais peut , pour calculer le montant de ses impôts sur
le reste du revenu, appliquer le même taux que si les revenus n’avaient pas été exemptés.). Pour
ce qui est de la mise en œuvre, il faut se référer à l’article 155, al. 1er, du CIR (voir suite annexe
2, III).

Pour ce qui est des dividendes et intérêts, la Politique conventionnelle de la Belgique est de ne
pas éliminer la double imposition (voir par exemple la CPDI belgo-néerlandaise, art. 23, §1er,
a à c). L’avantage que le contribuable tire de la CPDI se limite donc au plafonnement de la
retenue à la source étrangère (voir exemple en annexe, suite annexe 1, II et III). Selon la CJUE,
il n’y a pas de restriction injustifiée à la libre circulation des capitaux car ils résultent de
l’exercice parallèle des compétences fiscales des Etats membres (voir not. CJUE, 14 novembre
2016, Kerckhaert-Morres, C-513/04).

Il y a une seuil d’imposition exigé qui varie d’une convention à l’autre. Il y a trois seuils (voir
circulaire AAF n° 4/2010 du 6 avril 2010, n° 5 et s. – les exemples en sont inspirés) :

- Le revenu « imposable » dans l’Etat de la source. Il y a une exemption même si le revenu


n’a pas été soumis à un régime fiscal. Par exemple, l’Etat qui limiterait la notion de

54
rémunérations imposables aux rémunérations en espèces (sans viser donc les
rémunérations en nature).
- Le revenu « imposé » dans l’Etat de la source. Il y a une exemption seulement si le
revenu a été soumis à un régime fiscal, qui peut cependant consister en une exonération.
Par exemple, l’Etat qui impose en principe les rémunérations quel que soit le secteur
d’activité mais qui aurait prévu en faveur des travailleurs dans le secteur du textile une
exonération pendant une période de 5 ans à titre de mesure de soutien.
- Le revenu « effectivement imposé » dans l’Etat de la source. Il y a une exemption
seulement si le revenu a été soumis à une régime fiscal et qu’il ne bénéficie d’aucune
exonération.

Procédure, spécialement en matière d’impôts sur les revenus

• Naissance, exigibilité et extinction de la dette d’impôt

La naissance de la dette d’impôt se fait en deux étapes en matière d’IPP et d’ISoc.

La première étape est la naissance imparfaite de la dette de l’impôt à l’expiration de la période


imposable. Les revenus bruts qui naissent pendant la période imposable concourent en principe
à former le revenu imposable de cette période (principe d’annualité de l’impôt de l’article 360,
al. 1, du CIR, en vertu duquel « l’impôt dû pour un exercice d’imposition est établi sur les
revenus que le contribuable a recueillis pendant la période imposable » - voir supra). Le revenu
imposable du contribuable devient donc déterminé à l’expiration de la période imposable. Il y
a donc une rétroactivité de la norme postérieure à la période qui augmenterait le montant de
l’impôt dû sur ce revenu imposable.

La seconde étape est celle de la dette d’impôt tout à fait formée par un acte individuel
d’établissement de l’impôt accompli par l’administration. Il faut aller voir le CIR, art. 413, al.
1er, première phrase : « les impôts directs et le précompte immobilier portés au rôle
conformément à l’article 304 sont exigibles à la date à laquelle le rôle a rendu exécutoire » (le
prof souligne). Le rôle étant « l’acte authentique par lequel l’administration (…) se crée un titre
contre le contribuable et manifeste sa volonté d’exiger le paiement de l’impôt » (Cass., 17 juin
1929, Pas., 1929, p. 246 ; voir aussi Com. IR, n°298/1, qui se réfère à cet arrêt). Cette distinction
est inspirée du droit de la TVA entre « l’exigibilité de l’impôt » (propre au droit fiscal qui vise
le caractère « définitivement dû » de la dette de l’impôt) et « l’exigibilité du paiement » (dette
payable immédiatement). Il y a une matérialisation pour le contribuable de « l’avertissement-
extrait de rôle ». En l’absence d’acte individuel d’établissement de l’impôt dans le délai requis,
il y a un remboursement au contribuable qui est effectué des versements anticipés et des
précomptes. Cette seconde étape a en outre un caractère exécutoire (privilège de l’exécution
forcée). Il existe une situation similaire en matière de PrI (voir CIR, art. 413, al. 1er, première
phrase). En revanche, les deux moments sont condensés en un seul en matière de PrPr et de
PrM. La mise à disposition fait naître, outre le revenu (voir supra), la dette d’impôt, et ce de
manière définitive (voir CIR, art. 267, al. 1er, et 273, 1°, et la réf. faite par ces deux dispositions
au caractère « exigible » du précompte).

En ce qui concerne l’exigibilité du paiement, pour l’IPP, l’ISoc et le PrI, il est exigible deux
mois après l’envoi de l’AER (CIR, art. 413, al. 1e, seconde phrase). Pour le PrPR, et le PrM, il
faut se référer aux délais de l’article 412 du CIR (voir supra). Par exception les impôts et
précomptes sont exigibles avant ces délais dès que « les droits du Trésor sont en péril » (CIR,
art. 413, al. 3).

55
En ce qui concerne les termes de grâce de l’exigibilité du paiement, l’ancien Code civil, art.
1244, al. 2 disposait que : « Le juge peut (…), nonobstant toute clause contraire, eu égard à la
situation des parties, en usant de ce pouvoir avec une grande réserve et en tenant compte des
délais dont le débiteur a déjà usé, accorder des délais modérés pour le paiement et faire surseoir
aux poursuites, même si la dette est constatée par un acte authentique autre qu’un jugement ».
Cette disposition ne s’applique pas en matière fiscale compte tenu du caractère d’ordre public
de la loi fiscale (Cass., 24 avril 2008, Pas., 2008, n°251). Mais le receveur, qui « dispose de la
possibilité d’organiser de manière autonome et à ses risques et périls le recouvrement », peut
« prévoir des facilités de paiement dans cette optique » (même arrêt).

Il n’y a pas d’exécution du paiement lorsque les revenus sont constatés. L’exécution est
suspendue en cas de recours administratif ou d’action en justice, pendant les délais
d’opposition, d’appel et de cassation et en cas de d’opposition, d’appel ou de cassation (CRec.
Art. 61 a contrario, et CIR, art. 377). L’administration peut prendre des mesures conservatoires
sont toutefois possibles (CRec, art. 60), sous réserve d’exceptions comme la partie de l’impôt
correspondant aux revenus déclarés (CRec, art. 61, al. 1er), le cas de la taxation d’office, où la
partie de l’impôt qui n’excède pas la dernière imposition définitivement établie à charge du
redevable pour un exercice d’imposition antérieur (CRec, art. 61, al. 1er) ou encore
l’assimilation des revenus sur lesquels le contribuable a marqué son accord à des revenus
déclarés (CRec, art. 61, al. 2).

L’extinction de la dette d’impôt se fait par le paiement par le contribuable ou par


l’annulation/dégrèvement par l’administration ou le juge. L’extinction se fait également par
prescription. En effet, le principe est qu’il y a un délai de cinq ans à compter de la date
exécutoire du rôle (CRec, art. 23, §1er). L’interruption de la prescription (CRec, art. 24, al. 1er)
se fait par renvoi à la plupart des modes interruptifs du droit civil, par la renonciation au temps
couru de la prescription (que bien souvent le contribuable accepte pour une question
d’économie de frais) ou encore par envoie, par courrier recommandé, d’une sommation de
payer « contenant de manière complète et non équivoque les données relatives à la créance ».
La suspension de la prescription se fait quant à elle par l’introduction d’un recours administratif,
jusqu’à l’expiration du délai pour introduire un recours en justice contre la décision rendue par
l’administration (CRec, art. 25, §2 – si introduction d’un recours en justice, renvoi à la règle
suivante). La suspension a également lieu par l’introduction d’un recours en justice, jusqu’au
jour où la décision est coulée en force de chose jugée (CRec, art. 25 §1er).

L’extinction de la dette d’impôt se fait aussi par la surséance indéfinie au recouvrement (CRec,
art. 63 à 69). Formellement, la dette d’impôt ne s’éteint pas, parce que l’administration ne peut
pas renoncer à sa créance en raison du caractère d’ordre public de la loi fiscale. Elle a lieu pour
le contribuable qui n’est pas en état, de manière durable, de payer ses dettes fiscales. Il s’agit
d’une demande à introduire auprès de l’administration fiscale. Le bénéfice de la mesure est
subordonnée au paiement d’une partie de l’impôt (montant et rythme fixé par l’administration).

• La déclaration

Il y a une grande importance de la déclaration en matière d’impôts sur les revenus. En effet, le
CIR cherche en général à atteindre un revenu réel plutôt que présumé…mais cela suppose que
l’administration puisse prendre connaissance de ce revenu réel. Pour ce qui est de la charge de
la preuve, l’administration doit prouver les éléments positifs (assujettissement, revenus) tandis
que le contribuable doit prouver les éléments négatifs (déduction, dépense donnant droit à une
réduction d’impôt, exonération).

56
En ce qui concerne les dispositions techniques, il y a une obligation d’introduire une déclaration
notamment en matière d’IPP, d’ISoc, de PrM et de PrPr (mais pas de PrI) (CIR, art. 305, al. 1er,
et 312 ; AR/CIR, art. 85, al. 1er, et 90, §1er). Le prof se concentrera sur les déclarations d’IPP et
d’ISoc.

En ce qui concerne les délais pour déposer la déclaration, pour l’IPP, il faut respecter le délai
« indiqué sur la formule » de déclaration, sans pouvoir être inférieur à un mois à compter de
son envoi » (CIR, art. 307bis, §2, et 308, §1er). En pratique, à l’IPP on a le choix de déposer
une version papier ou une version életronique. Il y a une obligation de demander une formule
de déclaration à défaut d’en avoir reçu une le 1er juin de l’année dont le millésime désigne
l’exercice d’imposition (sauf choix fait de déposer électroniquement) (CIR, art. 308, §3). Pour
ce qui est des délais de l’ISoc, il est de 7 mois après la clôture de l’exercice comptable (CIR,
art. 310, al. 1er, première phrase).
Tant pour l’IPP que pour l’ISoc, il y a une possibilité de demander une prolongation du délai
(CIR, art. 311) en cas de maladie grave du contribuable, de documents qui ont disparu à la suite
d’un vol ou d’un incendie, … (Com.IR, n°311/6). La décision doit être justifiée sur la base de
la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs.
L’administration fiscale est une autorité administrative (voir cette loi, art. 1er). Il y a une
obligation de motivation formelle pour les actes administratifs tels que pareille décision (cette
loi, art. 2).

Pour ce qui est de la forme de la déclaration, elle « est faite sur une formule dont le modèle est
fixé par le Roi » (CIR, art. 307, §1er). « La formule est remplie conformément aux indications
qui y figurent, certifiée exacte, datée et signée » (CIR, art. 307, §2). Il y a également une faculté
de déposer la déclaration IPP par voie électronique (CIR, art. 307bis, §1er), mais une obligation
de le faire pour la déclaration ISoc (CIR, art. 307bis, §3). Il y a certaines mentions particulières
à l’IPP. Il faut mentionner les comptes bancaires étrangers (+ une obligation de déclarer le
compte au « Point de contact central des comptes et contrats financiers » tenu par la BNB la
première année) (CIR, art. 307, §1er/1, al. 1er, a, et al. 2). Les comptes bancaires belges sont
également déclarés à ce Point de contact, mais par les institutions Financières elles-mêmes (loi
du 8 juillet 2018 et CIR, art. 322, §3). En ce qui concerne les « constructions juridiques », sur
cette notions voir supra la « Taxe Caïman » (CIR, art. 307, §1er, al. 1er, c). Pour les mentions
particulières à l’ISoc, il faut mentionner les paiements vers les « paradis fiscaux » (voir supra,
le financement des sociétés).

Pour ce qui est de la rectification de la déclaration, « la déclaration est vérifiée et la cotisation


est établie par l’administration en charge de l’établissement des impôts sur les revenus. Celle-
ci prend pour base de l’impôt les revenus et les autres éléments déclarés, à moins qu’elle ne les
reconnaisse inexacts » (CIR, art. 399, al. 1er). Elle suppose donc que le contribuable ait déposé
une déclaration. La procédure à suivre est celle de la procédure de rectification de la déclaration
(voir infra). On suppose que la déclaration ne soit pas inexistante ou réputée inexistante,
l’administration pouvant sinon recourir à la procédure de taxation d’office (voir infra). Cette
notion est à distinguer de la question de la charge de la preuve (voir supra). Le contribuable
peut également rectifier la déclaration qu’il a déposée. En effet, dans les années 40, la Cour de
cassation admis que le contribuable pouvait corriger l’erreur qu’il avait commise dans sa
déclaration, mais quid si le contribuable n’était pas de bonne foi ? Par exemple, en matière
d’ISoc, il est possible que le montant dans la déclaration soit plus élevé que le revenu que le
contribuable a réellement réalisé. En effet, l’organe d’administration de la société établit parfois
des comptes qui ne sont pas la réalité et d’un point de vue comptable, contrairement au droit
fiscal, quand il y a un problème avec les comptes annuels, ce n’est généralement pas parce que
je minore les bénéfices. La Cour de cassation, en 2016 a considéré, suite aux fondements qui
sont un principe constitutionnel de la légalité de l’impôt et un caractère d’ordre public de la loi

57
fiscale, que peu importe le caractère volontaire ou non de l’inexactitude, le contribuable doit
avoir la possibilité de modifier sa déclaration (Cass., 10 mars 2016, Pas., 2016, n° 171). Il existe
cependant une exception pour la fixation des indemnités ou dommages-intérêts réclamés aux
pouvoirs publics en fonction des revenus déclarés (CIR, art. 331, al. 1er). Ici, on parle donc
plutôt de l’hypothèse dans laquelle le contribuable a fraudé.

• Mode de preuve de l’administration

On peut utiliser tous les modes de preuve de droit commun à l’exception du serment (CIR, art.
340, al. 1er). En pratique, l’administration fiscale recourt surtout à la preuve par présomptions
de fait. Il existe également des modes de preuve spécifiques comme les procès-verbaux des
agents du SPF Finances (CIR, art. 340), la preuve par signes ou indices d’aisance (CIR, art.
341) ou encore la taxation par comparaison ou sur une base forfaitaire (CIR, art. 342).

La présomption de fait est « le mode de preuve par lequel le juge déduit l’existence d’un ou de
plusieurs faits inconnus à partir d’un ou plusieurs faits connus » (Nouveau C. Civ., art. 8.1).

Exemple :
Paul exploite un restaurant. Le fait connu est le nombre de boissons achetées. L’administration
déduit de ce fait connu le nombre de boissons servies. Ensuite, l’administration déduit du
nombre de boissons servies le nombre de repas servis, en considérant qu’un repas
s’accompagne d’une demi-bouteille de vin ou de deux boissons froides. Quelle est la décision
du juge quant à cette (double) présomption ? Le juge a été convaincu par ce raisonnement
« réaliste et logique ». Bruxelles, le 24 octobre 2012 (RG n°2002/3373, www.taxwin.be) :
admet le raisonnement présomptif, en le considérant « réaliste et logique ». Pour remarque, il y
aura quand même un contrôle marginal de la Cour de cassation, voir not. Cass., 17 décembre
2015, RG n° F.14.0020.N : « Le juge apprécie (…) de manière souveraine la valeur probante
des présomptions sur lesquelles il fonde sa décision », « La Cour examine uniquement si le juge
n’a pas méconnu la notion de ‘présomption de fait’ et, plus particulièrement, s’il n’a pas déduit
des faits qu’il a constatés des conséquences qui ne peuvent être justifiées sur la base de ces
faits », « A cet égard, il n’est pas requis que ces présomptions résultent nécessairement de ces
faits. Il suffit qu’elles puissent en être déduites ».

C’est difficile à présumer dans l’exemple supra puisque le nombre de boissons servies a lui-
même été déterminé par présomption. Y a-t-il donc une interdiction de la cascade de
présomptions (« Présomption sur présomption ne vaut ») ? Oui, selon une première thèse : le
fait présumé est par définition un « fait inconnu », alors que seul un « fait connu » peut servir
de base à la présomption. Non selon une seconde thèse : le « fait connu » est le « fait prouvé »,
y compris par présomption. La Cass., 22 mai 2014, RG n° F.13.0086 adopte la seconde thèse
et rejette en conséquence le pourvoi contre l’arrêt de la Cour d’appel de Bruxelles (« Les faits
sur lesquels (le juge) appuie son raisonnement doivent être établis, c’est-à-dire qu’ils doivent
être prouvés. Aucune disposition légale n’empêche toutefois que l’admission de ce fait même
puisse être le résultat d’une administration de la preuve par présomptions »). La Cour de
cassation a confirmé cette jurisprudence depuis lors (Cass., 17 décembre 2015, RG, n°
F.14.0020.N ; Cass., 20 janvier 2017, RG n° F.15.0129.N).

Pour la preuve des procès-verbaux des agents du SPF Finances, ils ont force probante jusqu’à
preuve du contraire (CIR, art. 340, al. 2). Ils ont lieu également dans d’autres matières fiscales
(not. En TVA et en droits d’enregistrement). La force probante est attachée aux seules
constatations personnelles de l’agent du SPF Finances. Les constatations ne sont pas ce que
l’agent en déduit à titre de présomption de fait. Et le terme « personnelles » s’oppose donc à ce
que les faits aient été « relatées par un tiers ».

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Pour ce qui est des signes ou indices d’aisance « Sauf preuve contraire, l’évaluation de la base
imposable peut être faite, pour les personnes morales comme pour les personnes physiques,
d’après des signes ou indices d’où résulte une aisance supérieure à celle qu’attestent les revenus
déclarés » (CIR, art. 341). Ce mode de preuve ne concerne en pratique que les personnes
physiques (même si l’article 341 du CIR vise aussi les personnes morales). Il faut un fait connu,
à savoir des signes ou indices d’où résulte une aisance supérieure à celle qu’attestent les revenus
déclarés. Par exemple, l’achat d’une voiture de luxe, des vacances chères, des loisirs coûteux,
un apport d’un montant élevé dans une société, etc. par un contribuable qui ne déclare que de
faibles revenus. Les publications sur les réseaux sociaux sont susceptibles de susciter des
investigations. Voir ainsi la déclaration d’un contrôleur : « Facebook est une mine d’or. Citons
comme exemple, les indépendants qui, d’après leur déclaration d’impôt, n’ont que peu de
revenus et qui donnent force détails concernant leurs loisirs coûteux sur Facebook (…) »
(reproduite dans une question parlementaire du 5 mars 2009, Bull. Q&R, Chambre, 2008-2009,
n°66, p. 94 et 95). Il est pourtant difficile de prouver par simple présomption de fait l’existence
de revenus imposables non déclarés à partir de la seule insuffisance indiciaire. Voir les travaux
préparatoires de la loi du 28 juillet 1938 à l’origine de la preuve par signes ou indices d’aisance :
« Des (contribuables) affirment qu’ils vivent sur leur capital ou celui de leur conjoint, qu’ils
ont emprunté ou encore qu’ils jouissent de revenus exonérés (…). Dorénavant, le contribuable
devra fournir la preuve de ces affirmations » (Exposé des motifs, Doc. Parl., Chambre, 1937-
1938, n°263, p. 9). D’où la double présomption légale instaurée par le législateur fiscal en
faveur de l’administration. L’insuffisance indiciaire est présumée provenir de revenus
imposables non déclarés (alors qu’ils auraient dû l’être, à l’inverse des dividendes ou intérêts
ayant subi le précompte mobilier). Les revenus imposables sont présumés avoir été recueillis
pendant la période imposable. La présomption est réfragable en deux aspects : 1. le contribuable
peut prouver que l’insuffisance ne provient pas de revenus imposables (fonds empruntés,
donation ou héritage, etc.) ou provient de revenus imposables qu’il ne devait pas déclarer
(dividendes ou intérêts ayant subi le précompte mobilier). 2. Le contribuable peut prouver
l’existence d’une épargne au dernier jour de la période imposable précédente.

Pour la taxation par comparaison ou sur une base forfaitaire (CIR, art. 342), on a trois sous-
régimes :

- La taxation par comparaison (CIR, art. 342, §1er, al. 1er).


Elle a lieu si l’administration prouve que la comptabilité, et donc la déclaration, n’est
pas fiable (voir CIR, art. 342, §1er, al. 1er : « à défaut d’éléments probants »). On part
d’un fait connu qui est l’exercice d’une activité professionnelle génératrice de bénéfices
ou de profits. Il y a une double présomption légale irréfragable. Les bénéfices ou profits
générés par l’activité correspondent à ceux déterminés en ayant égard aux bénéfices ou
profits normaux d’au moins trois contribuables similaires. Les données communiquées
par l’administration à propos des trois contribuables servant de points de comparaison
sont exactes (corollaire du secret professionnel auquel l’administration est tenu en vertu
de l’article 337 du CIR). Il s’agit d’une simple faculté pour l’administration : elle
demeure libre de privilégier la preuve par présomptions de fait.

Cours du 28/10

- Les bases forfaitaires de taxation convenues entre l’administration et un groupement


professionnel (CIR, art. 342, §1er, al. 2). On a ici la même condition d’application
(comptabilité non probante) et un même fait connu (exercice d’une activité
professionnelle génératrice de bénéfices ou de profits) qu’en matière de taxation par
comparaison. Il s’agit également d’une faculté pour l’administration comme pour le
contribuable (accords négociés avec les groupements professionnels).

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Par exemple en ce qui concerne les friteries : extrait des bases forfaitaires de taxation
des « marchands de frites » pour l’exercice d’imposition 2021 (version complète sur le
site Fisconetplus).
« Recettes forfaitaires provenant de la vente de frites
Multiplier le nombre total de kg achetés de
- pommes de terre non épluchées (y compris celles cultivées par l’exploitant) par 2,95€
- pommes de terre épluchées par 3,65€
- frites précuites par 5,90€ (…)
Le bénéfice brut est obtenu en diminuant des recettes forfaitaires mentionnées ci-avant
le prix d’achat des pommes de terre ou frites précuites »

- Minima imposables (CIR, art. 342, §§2 à 4). Il s’applique en cas d’absence de
déclaration ou de remis tardive de celle-ci, not. à l’assujetti à l’IPP exploitant une
entreprise ou titulaire d’une profession libérale et à la société assujettie à l’ISoc (CIR,
art. 342, §§3 et 4). Ainsi, pour la société assujettie à l’impôt des sociétés, il y a un
minimum absolu de 40k de bénéfices (CIR, art. 342, §4, al. 1er), mais le contribuable
peut rapporter la preuve contraire dans les limites de la procédure de taxation d’office,
applicable en pareille hypothèse (voir Cour constitutionnelle, arrêt n°47/2016 du 24
mars 2016 ; sur cette preuve contraire, voir infra).

• Pouvoirs d’investigation

« L’administration (…) peut procéder aux investigations (…) et à l’établissement éventuel


d’impôts ou du suppléments d’impôts même lorsque la déclaration du contribuable a déjà été
admise et que les impôts y afférents ont été payés » (CIR, art. 333, al. 1er). Le plus souvent,
l’administration taxe d’abord et vérifie la déclaration ensuite.

Pour ce qui est des délais, il y a une large symétrie avec les délais d’imposition de l’art. 354 du
CIR (infra). En principe, les investigations ont lieu pendant la période imposable et dans un
délai de trois ans à partir du 1er janvier de l’exercice d’imposition (CIR, art. 333, al. 2). Il y a
une suspension du délai de trois ans en cas d’introduction d’une réclamation, et ce jusqu’à la
décision administrative avec un maximum de 6 mois (CIR, art. 333, al. 2). Il y a donc un intérêt
pour le contribuable d’introduire sa réclamation, si cela lui est possible, après l’expiration du
délai.

Les délais pour les indices de fraude (CIR, art. 333, al. 3) sont de 7 (3+4) voire de 10 (3+7) ans
(CIR, art. 354, al. 2). Il faut une notification préalable au contribuable des indices de fraude,
« par écrit et de manière précise », « pour la période considérée », et ce « à peine de nullité de
l’imposition ». Il y a également une possibilité de procéder à des investigations dans le cadre
de l’application de certains délais spécifiques : voir CIR, art. 333/2 (qui va s’appliquer lorsque
l’administration va recevoir des informations des autorités fiscales étrangères dans le cadre
d’échange de renseignements) et 333/3 (qui vise le cas des infractions au dispositif en matière
de précompte mobilier et de précompte professionnel) et, sur les délais spécifiques infra.

Pour ce qui est des pouvoirs d’investigation à l’égard du contribuable, le premier pouvoir est
celui de l’examen des livres et documents. On peut prendre tous ceux « nécessaires à la
détermination du montant (des) revenus imposables » (CIR, art. 315, al. 1er). Ils ont lieu « sans
déplacement » du contribuable (c’est donc l’administration fiscale qui se déplace chez le
contribuable) (CIR, art. 315, al. 1er). Il y a une exception lorsque le contribuable recourt « à un
système informatisé ou à tout autre appareil électronique » : l’administration peut alors
demander la communication « via la plateforme électronique sécurisée du SPF Finances »

60
(CIR, art. 315bis, al. 1er et al. 4). Il y a une obligation de conservation « dans le bureau, l’agence,
la succursale ou tout autre local professionnel ou privé du contribuable où ces livres et
documents ont été tenus, établis ou adressés », et ce « jusqu’à l’expiration de la septième année
ou du septième exercice comptable qui suit la période imposable » (qui correspond au délai
d’investigation en cas de fraude) (CIR, art. 315, al. 2). Il y a tout de même un droit de rétention
par l’administration fiscale qui peut emporter les documents à condition de dresser un PV (CIR,
art. 315ter).

Le deuxième pouvoir d’investigation est celui de la demande de renseignements. La réponse


est à fournir par écrit, dans un délai de un mois (CIR, art. 316). Une prolongation est possible
« pour de justes motifs » (idem). La décision doit être justifiée sur la base de la loi du 29 juillet
1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs (voir déjà supra, à propos de la
prolongation du délai de dépôt de la déclaration). Il y a également une possibilité d’invoquer
pour l’imposition des tiers les renseignements recueillis en examinant les livres et documents
ou à la suite de demande de renseignements (CIR, art. 317).Il y a une exception qui concerne
les institutions financières (CIR, art. 318, al. 1). L’exception de l’exception est les « éléments
concrets permettant de présumer l’existence ou la préparation d’un mécanisme de fraude fiscale
(CIR, art. 318, al. 2).

Le troisième pouvoir est celui de la visite fiscale des locaux où une activité s’exerce ou est
présumé s’exercer (CIR, art. 319). La finalité est de « constater la nature et l’importance de
ladite activité et de vérifier l’existence, la nature et la quantité de marchandises et objets de
toute espèce que ces personnes y possèdent ou y détiennent à quelque titre que ce soit, en ce
compris les moyens de production et de transport ». Il s’agit « d’examiner tous les livres et
documents qui se trouvent dans les locaux » et, lorsque le contribuable recourt « à un système
informatisé ou à tout autre appareil électronique », de vérifier « la fiabilité des informations,
données et traitements informatiques ». Il ne s’agit pas d’un droit de perquisition (voir CC, arrêt
n° 116/2017 du 12 octobre 2017). Pour ce qui est des locaux habités, ils ne peuvent avoir lieu
que de 5h du matin à 9h du soir et avec l’autorisation du juge de police. L’autorisation doit être
expressément motivée (voir CC, arrêt n° 104/2019 du 27 juin 2019).

Pour ce qui est des pouvoirs d’investigation à l’égard des tiers maintenant, le premier est la
possibilité de faire une demande de renseignements « en ce qui concerne un contribuable
déterminé » (CIR, art. 322, al. 1) ou « sur toute personne ou ensemble de personnes même non
nominativement désignées, avec qui (ceux à qui les renseignements sont demandés) ont été
directement ou indirectement en relation en raison de ces opérations ou activités » (CIR, art.
323, §1er). Il y a un cas particulier en ce qui concerne les demandes de renseignements adressées
à des institutions financières. Il a lieu principalement dans les deux situations suivantes (et avec
certaines conditions) : les indices de fraude fiscale (CIR, art. 322, §1er, al. 1er) et la base
imposable déterminée sur la base de signes ou indices d’aisance (idem). Une notification est
faite au contribuable des indices de fraude fiscale ou « des éléments sur la base desquels elle
estime que les investigations menées peuvent éventuellement conduire à une application de
l’article 341 et qui justifient une demande de renseignements auprès d’un établissement
financier » (CIR, art. 333/1, §1er, al. 1er).

Le deuxième pouvoir est celui de l’échange d’informations au sein même du SPF Finances,
entre les différentes administrations qui le composent (CIR, art. 335, al. 1er). Une autre catégorie
d’échange de renseignements est celui de l’échange d’informations avec d’autres organismes
publics belges sur demande (CIR, art. 327, §1er, al. 1er et 2). Il s’agit des « services
administratifs de l’Etat, y compris les parquets et les greffes des Cours de toutes juridictions,
les administrations des Communautés, Régions, des provinces, des agglomérations, des
fédérations de communes et des communes ». Pour les documents ou renseignements relatifs à

61
des procédures judiciaires, il faut, pour donner suite à la demande l’autorisation expresse du
ministère public. Dans le cadre de ce même régime, l’administration fiscale peut également
demander des renseignements à des « établissement et organismes publics ». L’échange
d’informations avec d’autres organismes publics belges se fait spontanément. En effet, le Cicr,
art. 29bis : « si une enquête pénale révèle des indices de fraude en matière d’impôts directs ou
indirects, le procureur du Roi en informe le ministre des Finances ou le service qu’il désigne et
accorde consultation et copie sauf si l’accès au dossier et la prise de copie du dossier risquent
de compromettre des enquêtes pénales en cours ». La CTIF (Cellule de traitement des
informations financières) transmet également au ministre des Finances les informations
transmises au ministère public « relatives au blanchiment de capitaux provenant d’infractions
pouvant avoir des répercussions en matière de fraude fiscale grave, organisée ou non » (loi du
18 septembre 2017 relative à la prévention du blanchiment de capitaux et du financement du
terrorisme et à la limitations de l’utilisation des espèces, art. 83, §2, al. 5). Pour finir, il y a
l’échange d’informations avec les autorités fiscales étrangères et les instruments sont assez
nombreux. Par exemple, il y a un échange automatique d’informations entre les pays de l’UE à
propos de la propriété et des revenus de biens immobiliers (directive 2011/16/UE du Conseil
du 15 février 2011 relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant
la directive 77/799/CEE, art. 8, §1er, e). Il y a également un échange automatique d’informations
financières entre les pays de l’UE (directive précitée, art. 8, §3bis), pour les accords conclus
par l’UE avec la Suisse, Andorre, le Liechtenstein et Saint-Marin et pour l’accord multilatéral
entre autorités compétentes pour l’échange automatique de renseignements relatifs aux comptes
financiers (engagement à appliquer la « norme commune de déclaration » ou « Common
reporting standard » (« CRS » en abrégé) en anglais.

• Procédures de taxation

La rectification de la déclaration (CIR, art. 346) se fait par un avis de rectification (CIR, art.
346, al. 1er), par réponse du contribuable à l’avis de taxation (CIR, art. 346, al. 3) ou par
« décision de taxation » (CIR, art. 346, al. 5). La taxation d’office a lieu lorsqu’il y a un
manquement du contribuable à son obligation de collaboration (CIR, art. 351, al 1er). Il y a une
séquence similaire pour ce qui est de la notification d’imposition d’office, la réponse du
contribuable et la « décision de taxation » (CIR, art. 251, al. 2). La taxation d’office a lieu
lorsqu’il y a un renversement de la charge de la preuve en faveur de l’administration. Il y a alors
une taxation d’office « en raison du montant des revenus imposables (que l’administration) peut
présumer eu égard des éléments dont elle dispose » (CIR, art. 351, al. 1er, in limine). Il existe
deux moyens de défense pour le contribuable : rapporter « la preuve du chiffre exact dans ses
revenus imposables et des autres éléments à envisager dans son chef » (CIR, art. 352, al. 1er) et
le caractère arbitraire de la taxation d’office (voir CC, n° 47/2016 du 24 mars 20116, pt. B.7).

• Délais d’imposition

Le premier délai d’imposition générale est de 18 mois à partir du 1er janvier de l’exercice
d’imposition (CIR, art. 353, al. 1er, et 359). La déclaration doit être impeccable et le délai ne
peut être inférieur à 6 mois « à compter de la date à laquelle la déclaration est parvenue au
service indiqué sur la formule » (CIR, art. 353, al. 1er, in fine). Elle vise les sociétés tenant leur
comptabilité autrement que par année civile.

Exemple :
Une société qui clôture son exercice comptable le 30 novembre. Le délai de 18 mois pour
l’exercice d’imposition 2021 nous mène au 30 juin 2022. Or, telle est la date limite de dépôt de
la déclaration fiscale relative à l’exercice d’imposition 2022 (CIR, art. 310). Compte tenu de
l’extension, l’administration pourra taxer jusqu’au 31 décembre 2022.

62
Le second délai d’imposition générale est de 3 ans à partir du 1er janvier de l’exercice
d’imposition (CIR, art. 354, al. 1er) « en cas d’absence de déclaration, de remise tardive de
celle-ci, ou lorsque l’impôt dû est supérieur à celui qui se rapporte aux revenus imposables et
aux autres éléments mentionnées sous les rubriques à ce destinées d’une formule de
déclaration ». Il y a une suspension du délai de trois ans en cas d’introduction d’une
réclamation, et ce jusqu’à la décision administrative avec un maximum de 6 mois (CIR, art.
354, al. 6). Il y a donc un intérêt pour le contribuable d’introduire sa réclamation, si cela lui est
possible, après l’expiration du délai (voir déjà supra en matière de pouvoirs d’investigation).

Le troisième délai d’imposition général est de 7 ans (3+4) à partir du 1er janvier de l’exercice
d’imposition « en cas d’infraction aux dispositions du présent Code ou des arrêts pris pour son
exécution, commise dans une intention frauduleuse ou à dessein de nuire » (CIR, art. 354, al.
2). Il y a par contre un délai de 10 ans (3+7) à partir du 1er janvier de l’exercice d’imposition
en cas « d’infraction aux dispositions du présent Code ou des arrêts pris pour son exécution »,
en cas « d’usage de constructions juridiques visant à dissimuler l’origine ou l’existence du
patrimoine », ou encore lorsque l’Etat figurant sur la liste des Etats à fiscalité inexistante ou
peu élevée au sens de l’obligation de déclaration des paiements pour les sociétés assujetties à
l’ISoc (à l’exception des Etats avec lesquels a été conclue une convention préventive de double
imposition et à condition que cette convention ou un traité assure l’échange des informations
qui sont nécessaires afin d’exécuter les dispositions des lois nationales des Etats contractants).

Toujours en ce qui concerne les délais généraux, une société qui ne tient pas sa comptabilité
par année civile peut prolonger des délais « d’une période égale à celle qui s’étend entre le 1er
janvier de l’année dont le millésime désigne l’exercice d’imposition et la date de clôture de
l’exercice comptable au cours de cette même année » (CIR, art. 354, al. 5).

Par exemple :
Une société qui clôture son exercice comptable le 30 novembre qui remplit les conditions pour
appliquer le délai de 3 ans. Si on prend donc le délai de 3 ans à partir du 1 er janvier de l’exercice
d’imposition 2021, il expirera le 31 décembre 2023 (2 ans et un mois après la clôture de
l’exercice comptable allant du 1er décembre 2020 au 30 novembre 2021). Il y aura une
prolongation jusqu’au 30 novembre 2023 (délai de 3 ans après la clôture de l’exercice
comptable).

Le Code prévoit également des délais spécifiques à l’art 358 du CIR, ils ont lieu principalement
dans les circonstances suivantes :

- « Un contrôle ou une enquête se rapportant à l’application des impôts sur les revenus
dans le chef d’un contribuable déterminé dont apparaître que ce contribuable a
contrevenu aux dispositions du présent Code ou des arrêts pris pour son exécution en
matière de précomptes mobilier ou professionnel, au cours d’une des cinq années qui
précèdent celle de la constatation de l’infraction » (CIR, art. 358, §1er, al. 1er).
- « Soit l’obtention d’informations de l’étranger, pour lequel un fondement juridique
existe qui règle les échanges d’informations et sur lequel ce fondement juridique se
rapportant à un impôt est d’application, soit le contrôle visé à l’article 333/2 suite à
l’obtention de telles informations fait apparaître que des revenus imposables n’ont pas
été déclarés en Belgique :
a) au cours d’une des cinq années qui précèdent celle pendant laquelle les informations
sont venues à la connaissance de l’administration belge ;

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b) en cas d’intention frauduleuse ou à dessein de nuire, au cours d’une des sept années
qui précèdent celle pendant laquelle les informations sont venues à la connaissance de
l’administration belge » (CIR, art. 358, §1er, 2°).
- « Une action judiciaire fait apparaître que des revenus imposables n’ont pas été déclarés
au cours d’une des cinq années qui précèdent celle de l’intentement de l’action » (CIR,
art. 358, §1er, 3°).
- « Des éléments probants font apparaître que des revenus imposables n’ont pas été
déclarés au cours d’une des cinq années qui précèdent celle pendant laquelle ces
éléments probants sont venus à la connaissance de l’administration » (CIR, art. 358,
§1er, 4°).

L’administration dispose alors d’un certain délai pour établir l’impôt ou le supplément d’impôt
(CIR, art. 358, §§2 et 3).

Exemple 1 :
Les explications données par le contribuable lors d’un contrôle mené aujourd’hui (29 octobre
2021) font apparaître que celui-ci n’a pas déclaré des revenus imposables chaque année depuis
de très nombreuses années (pas de fraude). A l’IPP (et à l’ISoc si le contribuable tient sa
comptabilité par année civile), les éléments probants font apparaître que le contribuable n’a pas
déclaré des revenus imposables dans ses déclarations relatives aux exercices d’imposition 2016
à 2020 (périodes imposables 2015 à 2019). L’administration dispose d’un délai de douze mois
à partir du 29 octobre 2021 pour établir l’impôt ou un supplément d’impôt (CIR, art. 358, §2,
3°).

Exemple 2 :
Il s’agit d’une contestation, par une action intentée en 2016 dans le cadre d’un divorce houleux,
du montant des revenus de l’un des conjoints au cours des périodes précédentes, l’autre conjoint
soutenant que ces revenus sont supérieurs aux revenus mentionnés dans la déclaration fiscale.
Selon l’arrêt d’appel, coulé en force de chose jugée aujourd’hui, le 28 octobre 2021, les revenus
sont en effet supérieurs aux revenus mentionnés dans la déclaration fiscale. « L’action judiciaire
fait apparaître que des revenus imposables n’ont pas été déclarés au cours d’une des cinq années
qui précèdent celle de l’intentement de l’action », à savoir que le contribuable n’a pas déclaré
des revenus imposables dans ses déclarations des exercices d’imposition 2011 à 2015 (périodes
imposables 2010 à 2014). L’administration dispose d’un délai de douze mois à partir du 29
octobre 2021 pour établir l’impôt ou un supplément d’impôt (CIR, art. 358, §2, 3°).

Il y a également un délai spécifique, en matière de bénéfices, en cas de sous-estimation d’actif


ou de surestimation de passif. Le principe est celui d’annualité de l’impôt puisque le revenu
imposable se rattache à la période imposable de sa naissance. Par exemple, si un terrain est
amorti par erreur avec les bâtiments construits sur celui-ci, un revenu imposable correspondant
à l’amortissement naît lors de chaque période imposable pour laquelle l’amortissement est acté.
L’administration qui découvre l’erreur des années plus tard à l’occasion d’un contrôle ne
pourrait en principe rectifier le revenu imposable que pour un nombre limité de périodes
imposables. Il y a donc une dérogation au principe de l’annualité de l’impôt puisque la sous-
estimation d’actif ou la surestimation de passif se rattache non pas à la période imposable de sa
naissance, mais à celle de sa découverte. Les dispositions légales sont l’article 24, al. 1er, 4°(qui
énumère les différents éléments qui constituent les bénéfices : « les sous-estimations
d’éléments de l’actif ou de surestimations d’éléments du passif, dans la mesure où la sous-
estimation ou la surestimation ne correspond pas à un accroissement ou à un amoindrissement
(…), ni à des amortissements pris en considération pour l’application de l’impôt »), et 361 (qui
prévoit cette dérogation au principe de l’annualité de l’impôt).

64
• Fraude fiscale administrative et intérêts

Les sanctions pénales sont :

- Al. 1 : « Sera puni d’un emprisonnement de huit jours à deux ans et d’une amende de
250 euros à 500.000 euros, ou de l’une de ces peines seulement, celui qui, dans une
intention frauduleuse ou à dessein de nuire, contrevient aux dispositions du présent
Code ou des arrêts pris pour son exécution ».
- Al. 2 : « Si les infractions visées à l’alinéa 1er ont été commises dans le cadre de la
fraude fiscale grave, organisée ou non, le coupable est puni d’un emprisonnement de
huit jours à cinq ans et d’une amende de 250 euros à 500.000 euros ou de l’une de ces
peines seulement ».

Il y a également des sanctions administratives (voir infra).

Le principe « una via » est l’obligation pour l’administration fiscale de dénoncer au procureur
du Roi « les faits dont l’examen fait apparaître des indices sérieux de fraude fiscale grave,
organisée ou non, qui constituent des infractions pénales aux termes des lois fiscales et des
arrêtés pris pour leur exécution » (Cicr, art. 29, §3, al. 1er). L’AR du 9 février 2020 fixe les
critères auxquels ces faits répondent (art. 1er ; exécution de l’art. 29, §4, du Cicr). Il y a une
concertation et, sur base de celle-ci, « le procureur du Roi décide pour quels faits décrits dans
le temps et dans l’espace il exercera l’action publique » et en fait part à l’administration fiscale
(Cicr, art. 23, §3, al. 2 et 3).

Le principe de « non bis in idem » a lieu « lorsque l’administration fiscale établit des impôts
incluant les centimes et décimes additionnels, les accroissements et les amendes administratives
et fiscales (…), cela ne constitue pas une entrave à l’action publique dans la mesure où le
traitement fiscal et pénal des faits font partie d’un tout cohérent d’un point de vue temporel et
matériel » (Cicr, art. 29bis, al. 2). Il s’agit d’une transposition en droit belge de l’enseignement
d’un arrêt de la CEDH (CEDH, A et B c. Norvège, 15 novembre 2016, nos 24130/11 et
19758/11). Il y a une importance en pratique de la législation anti-blanchiment (volets préventif
et répressif) : voir le syllabus !

• Sanctions administratives et intérêts

En ce qui concerne les sanctions administratives, il y a un accroissement d’impôt : « en cas


d’absence de déclaration, de remis tardive de celle-ci ou en cas de déclaration incomplète ou
inexacte, les impôts dus sur la portion des revenus non déclarés ou déclarés tardivement,
déterminés avant toute imputation de précomptes, de crédits d’impôts, de quotité forfaitaire
d’impôt étranger et de versements anticipés, sont majorés d’un accroissement d’impôt fixé
d’après la nature et la gravité de l’infraction, selon une échelle dont les graduations sont
déterminées par le Roi et allant de 10% à 200% des impôts dus sur la portion des revenus non
déclarés » (CIR, art. 444, al. 1er). Pour l’échelle, voir AR/CIR, art. 225 à 229.

L’administration peut renoncer à l’accroissement de l’impôt en l’absence de mauvaise foi (CIR,


art. 444, al. 2). « Le total des impôts dus sur la portion des revenus non déclarés et de
l’accoisement d’impôt ne peut dépasser le montant des revenus non déclarés » (CIR, art. 444,
al. 3). Il y a une règle de minimis qui s’applique seulement si les revenus non déclarés atteignent
2500€ (CIR, art. 444, al. 4).

Pour ce qui est des amendes, « le fonctionnaire délégué par le conseiller général peut appliquer
pour toute infraction aux dispositions du présent Code, ainsi que des arrêtés pris pour leur

65
exécution, une amende de 50€ à 1250€ ». « Le Roi fixe l’échelle des amendes administratives
et règle les modalités d’application de celles-ci » : voir AR/CIR, art. 229/1 à 229/4. Le montant
peut être plus élevé (6250€) lorsque le contribuable assujetti à l’IPP ne mentionne pas une
construction juridique sans sa déclaration à l’IPP (CIR, art. 445, §2). Le montant peut également
être plus élevé en cas de non-respect des obligations de déclaration en matière de RC (CIR, art.
445, §4).

Le ministre des Finances a le droit de remettre totalement ou partiellement les sanctions


administratives. En général , on se réfère à l’article 9 de l’arrêté du Régent n°78 du 18 mars
1831. En matière d’impôts sur les revenus, la compétence est transférée au Service de
conciliation fiscale (loi du 29 mars 2018 visant à élargir les missions et à renforcer le rôle du
Service de conciliation, art. 5).

Le juge a un pouvoir sur les sanctions administratives en droit interne, mais à caractère pénal
au regard de l’article 6 de la CEDH, qui garantit le droit d’accès à un juge. La Cour de cassation
précise comme suit le pouvoir du juge (Cass., 18 avril 2013, Pas., 2013, n°244) : « le juge
auquel il est demandé de contrôler une sanction administrative qui a un caractère répressif au
sens de l’article de a CEDH doit examiner la légalité de cette sanction et peut examiner plus
particulièrement si cette sanction est conciliable avec les exigences impératives des traités
internationaux et du droit interne, y compris les principes généraux de droit. Ce droit de contrôle
permet en particulier au juge d’examiner, en prenant en considération l’ensemble des
circonstances de la cause, si la peine n’est pas disproportionnée par rapport à l’infraction, de
sorte qu’il peut examiner si l’administration pouvait raisonnablement infliger une amende
administrative de cette ampleur. Le juge peut, à cet égard, tenir compte spécialement de la
gravité de l’infraction, du taux des sanctions déjà infligées et de la manière dont il a été statué
dans des causes similaires, mais doit tenir compte de la mesure dans laquelle l’administration
était elle-même liée par cette sanction. Ce droit de contrôle n’implique pas que le juge peut
remettre ou réduire des amendes pour de simples motifs d’opportunité et à l’encontre des règles
légales ».
Le sursis qui aurait été accordé si la loi fiscale l’avait prévu implique une annulation de
l’amende pour autant que le contribuable le demande, parce que prévoir un régime de sursis
pour les sanctions pénales mais pas pour les sanctions administratives crée une discrimination
au détriment des personnes qui subissent une sanction administrative (CC, arrêt n° 13/2013 du
21 février 2013).

Cours du 03/11

Pour ce qui est des intérêts, on va commencer par un peu de terminologie en matière d’impôts
sur les revenus. Les « intérêts de retard » sont ceux dus par le contribuable et les « intérêts
moratoires », ceux dus par l’administration.

Pour les intérêts de retard, le taux annuel est actuellement de 4% (CIR, art. 414, §1er, al. 1er, et
2). Ils courent de plein droit et se calculent par mois entier (du premier jour du mois qui suit
l’échéance jusqu’au dernier jour du mois de paiement) (CIR, art. 414, §1er, et 4). Par exemple,
un contribuable qui doit payer une cotisation d’IPP de 10k le 20 février 2022 (AER envoyé le
20 décembre 2021), mais qui ne la paie que le 10 septembre 2022. Les intérêts de retard sont
dus pour 6 mois, de mars à septembre, ce qui donne un montant de 200€ (6/12 x 10000€ x 4%).

Il y a une suspension du cours des intérêts de retard 6 mois après l’introduction d’une
réclamation lorsque l’administration ne s’est toujours pas prononcée (CIR, art. 414, §2).

66
Il y a une prise de cours rétroactive au 1er juillet qui suit l’exercice d’imposition en cas
d’accroissement de 50% (CIR, art. 415, §1er, al. 1er et 3). Par exemple, un supplément d’IPP
relatif à l’exercice d’imposition 2016 établi aujourd’hui, le 3 novembre 2021, avec un
accroissement de 50% (déclaration incomplète ou inexacte avec intention d’éluder l’impôt –
voir AR/CIR, art. 226). Les intérêts de retard se calculent donc à partir du 1er juillet 2017.

L’administration peut accorder la remise des intérêts de retard « dans les cas spéciaux » (CRec.,
art. 70). Le législateur a voulu donner à l’administration fiscale le pouvoir de remettre des
intérêts de retard lorsque le contribuable est malheureux et de bonne-foi.

Pour les intérêts moratoires, le taux est actuellement de 2% (CIR, art. 418, al. 1er, et 2), il est
compté par mois entier (CIR, art. 418, al. 1er) et une mise en demeure est nécessaire (CIR, art.
418, al. 1er). La différence de traitement entre le Trésor et le contribuable (donc le taux de 2%
et le taux de 4%) n’est pas discriminatoire selon la Cour constitutionnelle (CC., n° 168/2018
du 29 novembre 2018).

• Recours du contribuable

Le recours administratif du contribuable peut se faire par réclamation. Elle doit être écrite et
motivée (CIR, art. 366, al. 1er, et 371, al. 1er). Elle doit être faite auprès du conseiller général
compétent (CIR, art. 366, al. 1er), mais la réclamation est généralement recevable si elle est
adressée à « un (autre) fonctionnaire de l’administration chargé de l’établissement des impôts
sur les revenus, à un agent de l’administration chargée de la perception et du recouvrement des
impôts sur les revenus, ou au Service de conciliation fiscale(…) » (CIR, art. 366, al. 3). Le délai
est de 6 mois et de 3 jours à partir de la date d’envoi de l’avertissement-extrait de rôle (CIR,
art. 371, al. 1er). Il ne commence qu’à courir que si le coordonnées du conseiller général
compétent et le délai sont indiqués dans l’avertissement-extrait de rôle (loi du 11 avril 1994
relative à la publicité de l’administration, art. 2, 4°, et CIR, art. 371, al. 1er).

Pour ce qui est de l’instruction de la réclamation, le contribuable a le droit d’être entendu (CIR,
art. 374, al. 3). Le contribuable a également le droit de prendre connaissance du dossier et d’en
recevoir copie (loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration, art. 1, al. 2, 2°, et
art. 4, al. 1er, et 2). La décision de la réclamation se fait par notification au contribuable par
envoi recommandée (CIR, art. 375, §1er, al. 3).

Il existe également une faculté de réimposition dans certaines circonstances pour la réclamation
(CIR, art. 355, al. 1er) : « Lorsqu’une imposition a été annulée pour n’avoir pas été établie
conformément à une règle légale autre qu’une règle relative à la prescription, l’administration
peut, même si le délai fixé pour l’établissement de la cotisation est alors écoulé, établir à charge
du même redevable, une nouvelle cotisation en raison de tout ou partie des même éléments
d’imposition, dans les trois mois de la date à laquelle la décision du conseiller général de
l’administration en charge de l’établissement des impôts sur les revenus ou du fonctionnaire
délégué par lui n’est plus susceptible de recours en justice ».

Le recours administratif du contribuable peut également avoir lieu par dégrèvement d’office
(CIR, art. 376). Cela implique qu’un contribuable peut, dans certaines conditions, demander la
révision d’une cotisation fiscale après l’expiration du délai ordinaire de réclamation. Il n’aura
lieu que dans certains cas (CIR, art. 376, al. 1er, in limine) :

- Les surtaxes résultant d’erreurs matérielles (par exemple, mes recettes s’élèvent à 50k
et j’ai rajouté un zéro par erreur (500k))

67
- Les surtaxes résultant de doubles emplois (par exemple, j’ai une créance d’honoraires
qui ne m’est payée qu’en 2021 et je les déclare pour la période imposable de 2020 parce
que je suis médecin, donc pas pro du droit fiscal)
- Les surtaxes qui apparaîtraient à la lumière de documents ou faits nouveaux probants,
dont la production ou l’allégation tardive par le redevable est justifiée par de justes
motifs. « N’est pas considéré comme constituant un élément nouveau, un nouveau
moyen de droit ou un changement de jurisprudence » (CIR, art. 376, §2). Elle ne vise
donc pas les arrêts de la Cour constitutionnelle rendus sur question préjudicielle.

La surtaxe est constatée par l’administration ou signalée par le contribuable dans la cinq ans à
partir du 1er janvier de l’année au cours de laquelle l’impôt a été établi (CIR, art. 376, al. 1er,
1°). Il a lieu seulement si le contribuable n’a pas déjà introduit une réclamation qui a donné lieu
à une décision sur le fond (CIR, art. 376, al. 1er, 2°).

Si je ne suis pas content du recours administratif, je peux faire un recours judiciaire. La


compétence matérielle exclusive est du tribunal de première instance pour les « contestations
relatives à une loi d’impôt » (Code jud., art. 569, al. 1er, 32°). Pour la compétence territoriale,
on se base sur le lieu où est situé « le bureau où la perception a été ou doit être faite » en principe
(Code jud., art. 632, al. 1er). Cette compétence a lieu seulement si (la division du) tribunal de
première instance qui siège a un chef-lieu de province (pour le Luxembourg, la division
Marche-en-Famenne est compétente plutôt qu’Arlon cependant) (Code jud., art. 632 et AR du
25 mars 1999). Pour le ressort, le jugement est susceptible d’appel même lorsque le montant de
la demande ne dépasse pas 2500€ (Code, jud., art. 617, al. 3).

Les délais en matière de recours judiciaire sont de trois mois à partir de la notification de la
décision administrative (Code jud., art. 1385undecies, al. 2). Cependant, si le recours
administratif est pendant depuis plus de 6 mois, (9 mois en cas de taxation d’office), il y a une
possibilité de saisir le tribunal à tout moment (Code jud., art. 1385undecies, al. 2et 3).

La requête contradictoire, toujours en matière de recours judiciaire se fait avec la copie de la


décision administrative (ou du recours administratif et de son accusé de réceptions lorsque
l’administration tarde à se prononcer) (Code jud., art. 1385decies, al. 1er, 3 et 4).

La représentation en justice peut également se faire par un fonctionnaire (CIR, art. 379). Et il y
a une faculté de réimposition similaire à celle prévue au stade de la réclamation (CIR, art. 356).

Droits d’enregistrement et droits de succession

• Régionalisation

Les impôts régionaux concernent certains droits d’enregistrement qui sont

- « les droits d’enregistrement sur les transmission à titre onéreux de biens immeubles
situées en Belgique » (LSF, art. 3, al. 1er, 6°). Il y a une exception en ce qui concerne
les transmissions résultant d’un apport dans une société, mais il y a une exception à
l’exception qui concerne les apports par une personne physique d’une habitation dans
une société belge.
- « Les droits d’enregistrement sur la constitution d’une hypothèque sur un bien
immeuble situé en Belgique » (LSF, art. 3, al. 1er, 7°, a).
- « Les droits d’enregistrement sur les partages partiels ou totaux de biens immeubles
situées en Belgique » et les actes équipollents à partage (LSF, art. 3, al. 1er, 7°, b).

68
- « Les droits d’enregistrement sur les donations entre vifs de biens meubles ou
immeubles » (LSF, art. 3, al. 1er, 8°)

Les impôts régionaux concernent aussi « les droits de succession d’habitants du Royaume et
les droits de mutation par décès de non-habitants du Royaume » (LSF, art. 3, al. 1er, 4°).

La compétence des régions sont le taux de taxation, la base d’imposition et les exonérations
(LSF, art. 4, §1er). Les régions peuvent également reprendre le « service » des impôts repris
par la Région flamande, laquelle est dès lors également compétente pour fixer les règles de
procédure administrative (LSF, art. 5, §3, al. 1er, troisième tiret, et §4). En application, en région
flamande, les droits d’enregistrement et les droits de succession sont portés au rôle (CFF, art.
3.2.1.0.1., §1er), il y a donc une naissance de la dette d’impôt en deux étapes en matière d’impôts
sur les revenus. Dans un premier temps de la naissance, on a l’expiration de la période
imposable et le second temps de naissance, c’est lorsque l’impôt est porté au rôle. En Région
Wallonne et en Région de Bruxelles-Capitale, la dette d’impôt nait en un seul temps en matière
de droits de succession et d’enregistrement. En effet, la dette d’impôt nait au moment où l’acte
est enregistré en matière de droits t’enregistrement et nait au moment du décès en matière de
droit des successions. Les régions n’ont par contre aucune compétence concernant la
détermination de la matière imposable (qui est « l’élément générateur de l’impôt, la situation
ou le fait qui donne lieu à la taxation » voir not. CC, arrêt n° 34/2018 du 22 mars 2018, pt. B.9).

Pour ce qui est des critères de localisation, les droits d’enregistrement sur les actes autres que
les donations faites par un habitant du Royaume et droits de mutation par décès (LSF, art . 5,
§1er, 4°, second tiret, 6°, 7°, et 8°, second tiret) se font à l’endroit où le bien immobilier est
situé. Le critère de départage se fait en fonction de la Région à laquelle appartient le bureau de
perception dans le ressort duquel se trouve la partie des biens qui représente le revenu cadastral
fédéral le plus élevé (pour le champ d’application : voir le texte des dispositions précitées).
Pour les droits d’enregistrement sur les donations faites par un habitant du Royaume et droits
de succession ( !seulement si le défunt était un habitant du Royaume au moment du décès !)
(LSF, art. 5, §1er, 4°, premier tiret, 8°, premier tiret), on se réfère à l’endroit du domicile fiscal
au moment de la donation du décès. Si le domicile fiscal a été dans plusieurs régions dans les 5
années précédant la donation ou le décès, on se base sur l’endroit où le domicile fiscal a été
établi le plus longtemps pendant cette période.

Pour ce qui est des textes, en Région de Bruxelles-Capitale et en Région Wallonne, il y a eu des
adaptations apportées dans les Codes fédéraux. Pour la Région flamande, on se réfère au Code
flamand de la fiscalité.

Remarque : sauf indication contraire, les références au CEnr. et au Csucc. Visent dans la suite
de la synthèse le Code des droits d’enregistrement et le Code des droits de succession tels
qu’applicables en Région de Bruxelles-Capitale (pour ne pas alourdir le cours ; attention
cependant qu’il faudra préciser le jour de l’examen de quoi il s’agit, du moins pour ce qui
concerne les dispositions relevant de la compétence des Régions).

• Droits d’enregistrement

Pour ce qui est de la notion, « l’enregistrement est une formalité qui consiste dans la copie,
l’analyse ou la mention d’un acte ou d’un écrit, dans un registre à ce destiné de l’Administration
générale de la Documentation patrimoniale ou sur tout autre support déterminé par le Roi »
(CEnr, art. 1er, al. 1er). En droit fiscal, il s’agit d’une formalité qui « donne lieu à la perception
d’un impôt dénommé droit d’enregistrement » (CEnr, art. 1er, al. 2). En droit civil par contre, il

69
s’agit d’une formalité qui donne une date certaine aux actes sous signature privée (nouveau
Code civil, art. 8 : 22, 1°).

Il y a trois typer de droit d’enregistrement (CEnr, art. 10) qui sont

- Les droits proportionnels (voir infra)


- Le droit fixe spécifique
- Le droit fixe général, d’un montant de 50€, applicable par défaut (CEnr, art. 11)

Pour l’immeuble situé à l’étranger, on lui appliquera seulement le droit fixe général (CEnr, art.
87, et 159, 7°), à l’exception de l’apport, soumis à un droit proportionnel de … 0%.

On applique le droit fixe général seulement en cas d’aliénation translative ou déclarative à titre
onéreux soumise à la TVA (CEnr, art. 159, 8° - même exception à propos de l’apport) :

- D’un « bâtiment » ou d’une « fraction de bâtiment », entendus comme « toute


construction incorporée au sol », et du « sol y attenant » entendu comme « le terrain sur
lequel il est permis de bâtir et qui est cédé par la même personne, en même temps que
le bâtiment et attenant à celui-ci » (renvoi fait à l’art. 1, §9, al. 1er, du CTVA).
- D’un « droit rée(l), autr(e) que le droit de propriété, donnant à (son) titulaire un pouvoir
d’utilisation » sur un bâtiment, une fraction de bâtiment et sous-sol y attenant (renvoi
fait à l’art. 9, al. 2, 2° du CTVA).

Le premier droit proportionnel que nous allons examiner est celui sur la transmission à titre
onéreux d’un immeuble. Les régions sont compétentes en ce qui concerne la base imposable,
le tarif et les exonérations. La matière imposable porte sur les « ventes, échanges et toutes
conventions translatives à titre onéreux de propriété ou d’usufruit de biens immeubles » (CEnr,
art. 44). Elle ne comprend pas la constitution ou la cession d’un droit d’emphytéose ou de
superficie comme le droit sur les baux, car en effet pour les besoins du CEnr, la constitution ou
la cession de ces droits est assimilée à un bail (voir infra). Elle ne comprend pas non plus le
partage et les actes qui y sont assimilés comme le droit de partage (voir infra), ni l’apport. Il y
a un droit d’apport en principe, mais celui-ci est ramené aujourd’hui à 0% (CEnr, art. 115bis,
al. 1er). Il y a par contre une exception pour l’apport qui est la mesure anti-évitement. Il s’agit
de l’apport d’un immeuble affecté ou destiné partiellement ou totalement à l’habitation et
apporté par une personne physique (CEnr, art. 44, 45 al. 3 et 115bis, al. 1er).

La base imposable, en ce qui concerne la vente de la pleine propriété, sera comptabilisée sur le
plus grand des deux montants entre, d’une part, le prix et les charges et, d’autre part, la valeur
vénale (CEnr, art. 45, al. 1er, et 46). Les abattements pour l’acquisition d’un premier immeuble
d’habitation en vue d’y établir sa résidence principale se font, en Région de Bruxelles-Capitale
à hauteur de 175k (mais seulement si la base imposable , abstraction faite de l’abattement est
inférieure à 500k) (CEnr tel qu’applicable en Région de Bruxelles-Capitale, art. 46bis). Il se
font, en Région Wallonne à hauteur de 20k (CEnr, tel qu’applicable en Région Wallonne , art.
46bis). Pour le détail des conditions, il faut aller voir les articles précités.

Passons à la base imposable qui concerne la constitution de l’usufruit. L’usufruit est le revenu
viager (ou à défaut la valeur locative) annuel brut multiplié par un coefficient qui dépend de
l’âge de l’usufruitier (CEnr, art. 47, al. 1er). Pour l’usufruit à durée limitée (CEnr, art. 47, al. 2),
il y a une capitalisation, à savoir qu’il faut actualiser les revenus (ou à défaut les valeurs
locatives) annuels bruts sur la durée de l’usufruit en appliquant un taux de 4% et puis les
additionner (voir les coefficients de conversion dans le syllabus). Il y a un plafond applicable
dans ce cas qui est, pour la base imposable en cas d’usufruit viager si l’usufruitier est une

70
personne physique, de 20 fois le revenu (ou à défaut la valeur locative) annuel brut si
l’usufruitier est une personne morale. Le plafond applicable dans les deux cas est des 4/5èmes de
la valeur vénale (CEnr, art. 47, al. 3).

Passons pour finir à la base imposable en ce qui concerne la vente de la nue-propriété (le
vendeur se réservant l’usufruit). Elle a lieu sur la valeur vénale de la pleine propriété malgré
tout (CEnr, art. 48), mais la cession ultérieure de l’usufruit à l’acheteur n’est soumise qu’au
droit fixe général (CEnr, art. 159, 3°).

Le calcul de l’impôt, en Région de Bruxelles-Capitale et Région Wallonne se fait au taux de


12,5% en principe (CEnr, tels qu’applicables respectivement dans ces deux régions, art. 44).
En Région flamande, le régime actuel se fait au taux de 10% en principe, ramené à 6% pour le
premier immeuble d’habitation acquis en vue d’y établir la résidence principale (CFF, art.
2.9.4.1.1 et 2.9.4.2.11. Il y a une réforme annoncée par le gouvernement flamand (qui a une
entrée en vigueur pour le 1er janvier 2022) qui monte le taux à 12% en principe et qui est ramené
à 3% pour le premier immeuble d’habitation acquis en vue d’y établir la résidence principale
(pour mémoire, à ne pas connaître l’examen).
Il y a un droit proportionnel de 5% pour les ventes publiques de biens meubles corporels (sauf
si ils sont soumis à la TVA) (CEnr, art. 77 et 80, al. 1er, 1°).

Le deuxième droit proportionnel que nous allons examiner porte sur le bail d’immeuble. Il vise
tant le sous-bail et la cession de bail (CEnr, art. 83, al. 1er, 1°), que la constitution ou la cession
d’un droit d’emphytéose ou de superficie (CEnr, art. 83, al. 3).
La base imposable a une durée limitée pour le « montant cumulé des loyers et des charges
imposées au preneur pour toute la durée du bail ou, s’il s’agit d’une cession, pour la période
restant à courir » (CEnr, art. 84, al. 1er) et une durée illimitée pour la « somme formée de dix
fois le loyer et les charges annuelles, sans que cette somme puisse être inférieure au montant
cumulé des loyers et des charges imposées au preneur pour la durée minimum prévue dans
l’acte de bail » (CEnr, art. 84, al. 2).

Pour le calcul de l’impôt, les baux, les sous beaux et la cession de baux, le taux est de 0,20%
(CEnr, art. 83, al. 1er, 1°). Pour la constitution ou la cession d’un droit d’emphytéose ou de
superficie, le taux est de 2% en principe (CEnr, art. 83, al. 1er, 2°). Pour les baux de résidence
principale, l’enregistrement est gratuit (CEnr, art. 161, 12°). Le droit proportionnel est de 1%
sur la constitution d’hypothèque sur un immeuble (CEnr, art. 87) et vient s’y ajouter un « droit
d’hypothèque » de 0,30% (CEnr, art. 262). Il s’agit de la technique du « mandat-hypothécaire ».

Le troisième droit proportionnel porte sur le partage d’immeuble. Il y a une application du droit
proportionnel sur la transmission à titre onéreux dans deux cas particuliers :

- L’attribution à un tiers qui a acquis conventionnellement une part indivise d’un bien
appartenant à une ou plusieurs personnes (CEnr, art. 113). Sinon, plutôt que d’acheter
un immeuble, on pourrait d’abord acheter une très grande part indivise et puis sortir
d’indivision. Il y a tout de même une exception en cas d’acquisition avec d’autres de la
totalité du bien (CEnr, art. 113, al. 2, seconde phrase – dans ce cas le droit proportionnel
sur la transmission à titre onéreux a été payée à ce moment-là).
- La remise d’un immeuble à un associé dans le cadre de la liquidation d’une société
(CEnr, art. 129, al. 1er, et 2, et 130). Il y a par contre deux exceptions en présence d’une
SNC, d’une SComm ou d’une SRL qui sont que 1. l’associé qui recueille l’immeuble
l’avait apporté à la société (CEnr, art. 129, al. 3, 1°) 2. l’associé qui recueille l’immeuble
était déjà associé au moment où la société l’a acquis et la société a payé à cette occasion

71
le droit proportionnel sur la transmission à titre onéreux d’un immeuble (CEnr, art. 129,
al. 3, 2°).

Il y a une extension de la notion de partage à deux actes équipollents qui a lieu en cas de :

- Cession à titre onéreux, entre copropriétaires, de parts indivises dans des biens
immeubles (CEnr, art. 109, 2°)
- Conversion de l’usufruit du conjoint survivant (CEnr, art. 109, 3°)

Si l’acte fait cesser « l’indivision », le droit est liquidé sur la valeur des biens, sinon le droit est
liquidé sur la valeur des quotités cédées (CEnr, art. 110).

Le taux, en Région de Bruxelles-Capitale et en Région wallonne est de 1% (CEnr tel


qu’applicable respectivement dans ces deux régions, art. 109 in limine). Le taux, en Région
flamande est de 2,5% ou 1% selon le cas (CFF, art. 2.10.4.0.1).

Le quatrième droit proportionnel porte sur l’apport. L’apport doit avoir lieu dans une société
ayant son siège de direction effective en Belgique ou son siège statutaire en Belgique et son
siège de direction effective en dehors de l’UE est ramené aujourd’hui à 0% (CEnr, art. 115, al.
1er, et 115bis, al. 1er). Pour le cas de l’apport immeuble affecté à ou destiné partiellement ou
totalement à l’habitation et apporté par une personne physique, il y a un droit proportionnel sur
la transmission à titre onéreux (CEnr, art. 44, 45, al. 3, et 115bis, al. 1er).

Pour ce qui est du cas de l’apport mixte, il faut aller voir l’art. 120, al. 1er du CEnr, qui dispose
que « lorsqu’un apport en société est rémunéré en partie autrement que par l’attribution de droits
sociaux, la conversion est, dans la mesure de cette rémunération, assujettie aux droits fixés dans
le présent chapitre pour les conventions à titre onéreux ayant pour objet des biens de même
nature ». Par exemple, un apport d’un immeuble d’une valeur d’un million d’euros avec reprise
d’une dette de 250k, le droit proportionnel sur la transmission à titre onéreux d’un immeuble
est dû sur les 250k. Il y a par contre un régime d’exemption en cas de réorganisation sous
certaines conditions (CEnr, art. 117 et 120, al. 3).

Le cinquième droit proportionnel porte sur les donations. Le régime de droit commun est un
tarif progressif par tranches (CEnr, applicable en Région de Bruxelles-Capitale, art. 131, 1er ;
CEnr applicable en Région Wallone, art. 131 ; CFF, art. 2.8.4.1.1, §1er). Ce régime est plus
favorable pour les donations de biens meubles. En Région de Bruxelles-Capitale, le taux est de
3% pour les donations en ligne directe, entre époux et entre cohabitants légaux, sinon il est de
7% (CEnr, art. 131, §2). En Région Wallonn, le taux est de 3% pour les donations en ligne
directe, entre époux et entre cohabitants légaux, sinon il est de 5,5 % (CEnr, art. 131bis, §1er,
al. 1er, 1° et 2°). En Région flamande, le taux est de 3% en ligne directe et entre « partenaires »,
sinon il est de 7% (CFF, art. 2.8.4.1.1., §2 ; sur la définition du terme « partenaires », voir CFF,
art. 1.1.0.0.2, al. 6 (commençant par (dans le titre 2, chapitre 7 et chapitre 8, on entend par
(…) »), 4° : vise, ou les cohabitation légale, la cohabitation de fait ininterrompue depuis au
moins un an). Il y a une régime d’exonération pour les donations d’entreprise sous certaines
conditions (CEnr, applicable en Région de Bruxelles-Capitale, art. 140/1 et suiv. ; CEnr
applicable en Région Wallonne, art. 140bis et suiv ; CFF, art. 2.8.6.0.3, §1er).

Le dernier droit proportionnel porte sur les arrêts et jugements des cours et tribunaux portant
condamnation à payer une somme d’argent (CEnr, art. 142, al. 1er). Le taux est de 3%, sauf
exceptions qui sont une somme d’argent inférieure à 12500€ (CEnr, art. 143, al. 2), les décisions
rendues en référé (CEnr, art. 143, al. 1er, 1°), les amendes pénales, civiles ou disciplinaires

72
(CEnr, art. 143, al. 1er, 2°) et les sommes d’argent consistant en une pension alimentaire (CEnr,
art. 143, al. 1er, 3°).

Cours du 04/11

Les actes obligatoirement enregistrables sont (énumérés à l’article 19 du CEnr qui doit être lu
en combinaison avec les articles 32 et 35 du CEnr qui précisent le délai dans lequel
l’enregistrement doit survenir et les personnes qui sont tenues à l’enregistrement) :

- Les « actes des notaires », « exploits et procès-verbaux des huissiers de justice » ;


« arrêts et jugements des cours et tribunaux qui contiennent des dispositions assujetties
(…) à un droit proportionnel » (CEnr, art. 19, al. 1er, 1°). Les délais sont de 15 jours
pour les actes des notaires, de 4 jours pour les actes des huissiers de justice et de 10
jours pour les arrêts et jugements des cours et tribunaux (CEnr, art. 32, 1° à 3°). Les
personnes tenues à l’obligation d’enregistrement sont les notaires, les huissiers de
justice, les greffiers (enregistrement en débet dans ce dernier cas) (CEnr, art. 35, al. 1er,
1°, 4° et 5°, et al. 2). Pour les greffiers, on parle d’enregistrement en débet puisqu’il se
fait sans paiement préalable des droits d’enregistrement. Ils seront payés par la suite par
ceux qui sont redevables de ce paiement.
- Les « actes translatifs ou déclaratifs de propriété ou d’usufruit d’immeubles situés en
Belgique » (CEnr, art. 19, al. 1er, 2°). Le délai est de 4 mois (CEnr, art. 32, 4°). Les
personnes tenues à l’obligation d’enregistrement sont les parties contractantes (CEnr,
art. 35, al. 1er, 6°). C’est ce qui explique le délai minimum séparant habituellement le
« compromis de vente » et l’acte authentique.
- Les « actes portant bail, sous bail, ou cession de bail d’immeubles ou de parties
d’immeubles situées en Belgique » (CEnr, art. 19, al. 1er, « °). Le délai est de 4 mois,
ramené à 2 mois pour la bail de résidence principale (CEnr, art. 32, 5°). Les personnes
tenues à l’obligation d’enregistrement sont les parties contractantes ou, dans le cas du
bail de résidence principale, le seul bailleur (CEnr, art. 35, al. 1er, 6° et 7°). Ca vaut aussi
pour la constitution ou la cession d’un droit d’emphytéose ou de superficie (voir supra).
- Les « actes contenant apport de biens à des sociétés possédant la personnalité juridique
et qui ont soit leur siège de direction effective en Belgique, soit leur siège statutaire en
Belgique et leur siège de direction effective hors du territoire des EM de la Communauté
économique européenne » (CEnr, art. 19, al. 1er, 5°). Le délai est de 4 mois (CEnr, art.
32, 7)). Les personnes tenues à l’obligation d’enregistrement sont les parties
contractantes (CEnr, art. 35, al. 1er, 6°). Si l’apport est constaté par acte authentique, le
délai est plus court (voir supra).
- Les « actes notariés passés en pays étranger qui font titre d’une donation entre vifs de
biens meubles par un habitant du royaume » (CEnr, art. 19, al. 1er, 6°). Le délai est de 4
mois (CEnr, art. 32, 8°). Les personnes tenues à l’obligation d’enregistrement sont les
parties contractantes (CEnr, art. 35, al. 1er, 8°).

Il n’y a pas de coïncidence parfaite donc entre droit proportionnel et obligation


d’enregistrement. Ainsi, tous les actes notariés sont enregistrés, même s’ils ne portent pas sur
un acte donnant lieu à pareil droit. A l’inverse, les dons manuels et les donations indirectes de
biens meubles ne sont pas soumis à l’obligation d’enregistrement, alors qu’ils donnent lieu,
s’ils sont néanmoins enregistrés, au droit proportionnel (mais à un tarif favorable – voir supra).

Pour les actes sous conditions suspensive, au moment de la conclusion de l’acte on applique
seulement le droit fixe général (CEnr, art. 16, al. 1er). Au moment de la réalisation de la
condition (CEnr, art. 16, al. 2), le droit auquel l’acte est tarifé devient dû (déduction faite du
droit fixe général déjà perçu). Le tarif applicable est celui en vigueur au moment de l’acte.

73
Imaginons que je veuille faire une donation que j’enregistre de 100k. Je la fais à mon fils avec
application du taux de faveur de 3%. Mais je dis que je fais cette donation sous la condition
suspensive que j’ai toujours mon emploi dans 1 an. L’article 16 du CEnr « ne donne lieu qu’un
droit fixe général aussi longtemps que la condition n’est pas accomplie ». Aujourd’hui, avant
que la condition ne se réalise, il ne faudra donc payer que le droit fixe général de 50€. Si la
condition se réalise, mon fils reçoit les 100k et l’article 16 du CEnr dispose que « le droit auquel
l’acte est tarifé est dû, sauf imputation du droit déjà perçu ». Je vais donc pouvoir déduire 3000€
des droits d’enregistrement. Si l’État ou la région change le taux pendant le délai de la condition
suspensive, il faut avoir égard au tarif au moment de la donation et pas au moment de la
réalisation de la condition (CEnr, art. 16, al. 2).

Pour ce qui est de la restitution, on se réfère à la disposition de l’art. 208 du CEnr. En principe,
« les droits régulièrement perçus ne peuvent être restitués, quels que soient les évènements
ultérieurs ». La raison d’être est la volonté d’assurer la stabilité des recettes fiscales. Il y a une
série d’exceptions qui sont

- La nullité de la convention (CEnr, art. 209, al. 1er, 2°)


- La résolution judiciaire de la convention (CEnr, art. 209, al. 1er, 3°) avec un délai de
maximum d’un an entre l’acte et la demande de résolution
- La réalisation d’une condition résolutoire dans certaines circonstances (voir ainsi CEnr
applicable en Région de Bruxelles-Capitale, art. 209, al. 1er, 3°/2)
- La résiliation amiable de la convention qui n’a pas encore été constatée dans un acte
authentique dans certaines circonstances (voir ainsi CEnr applicable en Région de
Bruxelles-Capitale, art. 209, al. 1er, 3°/2)
- Pour le droit proportionnel sur la transmission à titre onéreux d’un immeuble, la revente
de l’immeuble à bref délai dans certaines circonstances (voir ainsi CEnr applicable en
Région de Bruxelles-Capitale, art. 212, - restitution qui n’est que partielle dans cette
dernière hypothèse)

Pour ce qui est des droits procéduraux, les droits sont à payer en principe préalablement à
l’enregistrement. « Les droits et, le cas échéant, les amendes et les intérêts, tels qu’ils sont
liquidés par le receveur, sont payés préalablement à l’enregistrement » (CEnr, arT. 169ter). Il
y a également une expertise de contrôle : « (l)e receveur a la faculté de requérir l’expertise des
biens qui font l’objet de la convention, en vue d’établir l’insuffisance du prix énoncé ou de la
valeur déclarée, lorsqu’il s’agit de la propriété ou de l’usufruit d’immeubles situées en
Belgique » (CEnr, art. 189). La demande doit être faite dans un délai de 2 ans à compter du jour
de l’enregistrement (CEnr, art. 190, al. 1er).

Le CEnr prévoit également des sanctions administratives. En cas d’estimation insuffisante, il y


a une amende égale au droit éludé si l’insuffisance atteint ou dépasse le 8ème de la base
d’imposition, le droit éludé et l’amende étant dus, le cas échéant, indivisiblement (CEnr, art.
201 et 202n al. 1er). En cas de dissimulation du prix, des charges ou de la valeur conventionnelle,
le droit est dû indivisiblement par les parties contractantes et amende égale au droit éludé due
individuellement par chacune des parties contractantes (CEnr, arT. 203, al. 1er), mais on
suppose que la partie contractante ait connaissance de la dissimulation du prix : voir CC, arrêt
n° 115/2016 du 22 septembre 2016.

Il y a un délai de prescription des droits et amendes. Le délai général est de 15 ans (CEnr, art.
214, al. 1er, 7°). Les délais sont plus courts dans certaines circonstances, ainsi le délai en cas
d’insuffisance d’estimation est ramené à 2 ans (CEnr, art. 214, al. 1er, 2°).

74
• Droits de succession

Le droit de succession a lieu « sur la valeur, déduction faite du passif (admissible), de tout ce
qui est recueilli dans la succession d’un habitant du Royaume » (CSucc, art. 1er, al. 1er, 1°). Par
« habitant du Royaume », on entend « celui qui, au moment de son décès y a étbli son domicile
ou le siège de sa fortune » (CSucc, art. 1er, al. 2 – voir supra, assujettissement à l’IPP). Il y a
également un « droit de mutation par décès sur la valeur, déduction faite du passif (admissible)
si le défunt est un habitant de l’espace économique européen, des biens immeubles situés en
Belgique recueillis dans la succession d’un non-habitant du Royaume » (CSucc, art. 1er, al. 1er,
2°). On examinera par la suite le seul droit de succession.

Pour ce qui est du tarif, il s’agit d’un tarif progressif par tranches qui dépend de la proximité
avec le défunt (CSucc applicable en Région de Bruxelles-Capitale, art. 48 ; CSucc applicable
en Région Wallonne, art. 48 ; CFF, art. 2.7.4.1.1, §1er, al. 1er). Il y a une exception au tarif
progressif favorable, donc un allègement en Région flamande en ligne directe et entre
partenaires. En effet, les biens mobiliers et les biens immobiliers sont divisés en deux masses
distinctes pour les besoins de l’application du tarif (CFF, art. 2.7.4.1.1, §2 ; sur la notion de
« partenaires », voir supra). Il y a par contre un alourdissement en Région de Bruxelles-Capitale
et en Région flamande à partir de la relation oncle/tante et neveu/nièce. Les biens recueillis sont
regroupés pour les besoins de l’application du tarif (CSucc applicable en Région de Bruxelles-
Capitale, art. 48, §1er, al. 4 et 5 ; CFF, art. 2.7.4.1.1, §3).

Il existe des régimes de faveur en droit de succession notamment en ce qui concerne le logement
familial, cohabitants légaux et, en Région flamande, « partenaire » (CSucc applicable en
Région de Bruxelles-Capitale, art. 55bis ; CSucc applicable en Région Wallonne, art.
55quinquies et 60ter ; CFF, art. 2.7.4.1.1, §1er, al. 3). Il existe ce même régime en ce qui
concerne l’entreprise (CSucc applicable en Région de Bruxelles-Capitale, art. 60bis et suiv. ;
CSucc applicable en Région Wallonne, art. 60bis ; CFF, art. 2.7.4.2.2 et suiv.).

Le droit de succession frappe les immeubles à l’étranger (CSucc, art. 15 – à comparer avec le
régime en matière des droits d’enregistrement). Le remède à la double imposition est
l’imputation de l’impôt étranger. Pour les immeubles situés à l’étranger, le remède est organisé
par le CSucc : « lorsque l’actif de la succession d’un habitant du Royaume comprend des
immeubles situés à l’étranger qui donnent lieu à la perception, au pays de la situation, d’un
impôt successoral, le droit de succession exigible en Belgique est, dans la mesure où il frappe
ces biens, réduit à concurrence de l’impôt prélevé par le pays de la situation, converti en euro à
la date du paiement de l’impôt » (CSucc, art. 17, al. 1er). Pour les meubles détenus à l’étranger,
le remède est organisé par la CC, arrêt n° 80.2021 du 3 juin 2021. Limiter le régime de
l’imputation de l’impôt étranger aux immeubles situées à l’étranger est discriminatoire envers
les contribuables qui recueillent, dans la succession d’un habitant du Royaume, des meubles
détenus à l’étranger.

Par exemple :
On a un immeuble d’une valeur de 175k situé à l’étranger. Le défunt a toujours vécu à Bruxelles
et le leg est fait à une personne imposable au « tarif entre toutes les autres personnes » avec un
impôt étranger de 30k. Le droit de succession avant imputation est de 98750€ et le droit de
succession après imputation est de 68750€ (98750€ - 30000€).

La réintégration dans l’actif imposable peut être faite pour les donations de moins de trois ans
avant le décès (cinq ans en Région Wallonne à partir du 1er janvier 2022). Il faut se référer au
texte de l’article 7 du CSucc. C’est possible seulement pour les donations mobilières parce que
la donation d’un immeuble belge est toujours enregistrée et que la donation d’un immeuble

75
étranger n’est pas soumise à cette assimilation selon l’administration. Pour ce qui est de la
présomption légale, il faut aller voir l’article 108 du CSucc et pour le moyen de preuve il faut
aller voir l’article 100 du CSucc.

La deuxième possibilité de réintégration dans l’actif imposable correspond à ce que le


bénéficiaire recueille à titre gratuit au décès du défunt en vertu d’un contrat renfermant une
stipulation à son profit par le défunt ou par un tiers (CSucc, art. 8).

Le troisième cas de la réintégration dans l’actif imposable correspond au bien meuble ou


immeuble, acquis à titre onéreux, par le défunt pour l’usufruit et par le tiers pour la nue-
propriété (CSucc, art. 9). Le « tiers » vise, au sens de cette disposition pour l’essentiel les
héritiers, les légataires et les personnes incapables de recevoir en vertu du droit civil (CSucc,
art. 14, 2°, et 33). L’article 9 prévoit une double présomption qui est 1. que le tiers a acquis la
nue-propriété au moyen de fonds appartenant au défunt et 2. que le défunt n’a pas joui de son
usufruit. Il y a un caractère réfragable de la double présomption. En effet, la première manière
de renverser la présomption est de démontrer qu’il n’y a pas de libéralité et que le bien n’est
donc pas réintégré dans l’actif imposable (CSucc, art. 9, in fine). Elle vaut aussi si le défunt a
donné les fonds préalablement à l’acquisition, si le tiers prouve qu’il a effectivement affecté
ces fonds au paiement du prix de la nue-propriété (position de l’administration fiscale fédérale :
Rép., RJ, n°S 09/06-07). Le deuxième moyen de renverser la présomption est de prouver que
le défunt qui a réellement joui de son usufruit a eu droit à une diminution de la base imposable
à due concurrence (CSucc, art. 12).

Passons aux aspects procéduraux. La déclaration incombe aux héritiers et légataires universels
(CSucc, art. 38, 1°, al. 1er). Le délai est de 4 mois à partir du décès, porté à 5 mois en cas de
décès dans un autre pays d’Europe et à 6 mois en cas de décès hors Europe (CSucc, art. 40, al.
1er). Le délai de paiement est de deux mois à compter du jour de l’expiration du délai de
déclaration (CSucc, art. 77, al. 1er ). Pour la prescription, le délai général est de 10 ans à compter
de l’expiration du délai de déclaration (CSucc, art. 137, al. 1er, 3°). Les délais sont plus courts
dans certaines circonstances (CSucc, art. 137).

Principes transversaux

• Légalité de l’impôt

Aspect formel – relatif à l’auteur de la norme

L’énoncé du principe se fait comme suit : « aucun impôt au profit de l’État ne peut être établi
que par une loi » (Const, art. 170, §1er). Ca vaut aussi pour les impôts établis par les
communautés, régions, provinces et communes (Const, art. 170, §§ 2 à 4). Pareillement, « nulle
exemption ou modération d’impôt ne peut être établie que par une loi » (Const, art. 172, al. 2).

En ce qui concerne la portée donnée au principe par la Cour constitutionnelle : « la matière


fiscal est une compétence que la Constitution réserve à la loi » (CC, arrêt n° 24/2018 du 1er
mars 2018, pt. B.23.1). En effet, « il se déduit des articles 170, §1er, et 172, alinéa 2, de la
Constitution qu’aucun impôt ne peut être levé et qu’aucune exemption d’impôt ne peut être
accordée sans qu’ait été recueilli le consentement des contribuables, exprimé par leur
représentants » (ibid.). Il y a une certaine souplesse tout de même en ce qui concerne cette
portée puisque seuls les « éléments essentiels » de l’impôt ou de l’exemption doivent être
réglées par le législateur : « les dispositions constitutionnelles précitées ne vont toutefois pas
jusqu’à obliger le législateur à régler lui-même chacun des aspects d’un impôt ou d’une
exemption. Une délégation conférée à une autre autorité n’est pas contraire au principe de

76
légalité, pour autant qu’elle soit définie de manière suffisamment précise et qu’elle porte sur
l’exécution de mesures dont les éléments essentiels ont été fixés préalablement par le
législateur » (ibid.). Les éléments essentiels de l’impôt étant « la désignation des contribuables,
la matière imposable, la base imposable, le taux d’imposition et les éventuelles exonérations et
diminutions d’impôt » (CC, arrêt n°145/2017 du 21 décembre 2017, pt. B.52.2).

Passons au champ d’application du principe. Pour les impôts, la définition donnée par la Cour
de cassation est que « l’impôt est un prélèvement pratiqué par voie d’autorité d-par l’État, les
régions, les communautés, les provinces ou les communes sur les ressources des personnes qui
y vivent ou y possèdent des intérêts, pour être affecté aux services d’utilité publique » (Cass,
20 mars 2003, Pas., 2003, n°179).

Les impôts sont différents des rétributions puisque « hors les provinces, les polders et
wateringues et les cas formellement exceptés par la loi, le décret et les règles visées à l’article
134, aucune rétribution ne peut être exigée des citoyens qu’à titre d’impôt au profit de l’État,
de la communauté, de la régions, de l’agglomération, de la fédération de communes ou de la
commune » 5const, art. 173). Les rétributions concernent deux éléments (voir CC, arrêt n°
162/2015 du 25 novembre 2015, pt. B.5) : les rémunérations d’un service accompli par
l’autorité au bénéfice du redevable considéré isolément et le caractère purement indemnitaire,
ce qui suppose qu’un rapport raisonnable doit exister entre le coût ou la valeur du service fourni
et le montant dû par le redevable. De plus, la délégation peut porter sur des éléments essentiels :
« en matière de rétributions, il suffit que le législateur compétent détermine les cas susceptibles
de donner lieu à la perception de la rétribution, le règlement d’autres éléments essentiels,
comme le montant de la rétribution, pouvant faire l’objet d’une délégation » (CC, arrêt n°
162/2015 du 25 novembre 2015, pt. B.4).

Les impôts sont également différents des cotisations sociales puisque « biens que les impôts et
les cotisations de la sécurité sociale puissent avoir des caractéristiques communes du fait de
leur caractère obligatoire, ils diffèrent cependant fondamentalement : les impôts servent à
couvrir les dépenses générales d’intérêt public tandis que les cotisations à la sécurité sociale
sont exclusivement affectées au financement de régimes d’allocations de remplacement ou de
complément des revenus du travail » (CA, arrêt n° 14/99 du 10 février 1999, pt. B.6.2). La
matière de la sécurité sociale, contrairement à la matière fiscale, n’est pas une compétence
réservée au législateur : « sans doute l’article 23 de la Constitution dispose-t-il que ‘la loi, le
décret ou la règle visée à l’article 134 garantissent, en tenant compte des obligations
correspondantes, les droits économiques, sociaux et culturels, et déterminent les conditions de
leur exercice’ et que ces droits comprennent ‘le droit à la sécurité sociale’. Mais il ne saurait
être déduit de ces dispositions que le législateur ne peut attribuer certains pouvoirs au Roi »
(CA, arrêt n° 14/99 du 10 février 1999, pt. B.6.2).

Aspect matériel – relatif à la qualité de la norme

Selon la Cour constitutionnelle, « (le) principe (de la légalité de l’impôt), exprimé par l’article
170, §1er, de la Constitution, exige que les éléments essentiels de l’impôt établis par la loi soient
définis en des termes suffisamment clairs et précis pour permettre au contribuable de déterminer
le montant de l’impôt dû » (CC, arrêt n° 32/2010 du 30 mars 2010, pt. B.10.2). Ainsi, si la
« manière dont la base imposable (…) doit être établie n’est pas claire », la loi « porte une
atteinte disproportionnée au principe selon lequel tout contribuable doit pouvoir déterminer,
avec un niveau minimum de prévisibilité, le régime fiscal qui lui sera appliqué » (CC, arrêt n°
24/2018 du 1er mars 2018, pt. B.14.1).

77
Pour la Cour eur.D.H., 7 juillet 2011, Serkov. Ukraine, req. N° 39766/05, selon le premier
protocole de la CEDH, art. 1er, (protection de la propriété) : « Toute personne physique ou
morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause
d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit
international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les
États de mettre ne vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens
conformément à l’intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres
contributions alimentaires ». Ce principe de légalité comporte une exigence quant à la
« qualité » de la loi, à savoir que la loi doit être accessible pour ses destinataires, précise et
prévisible dans son application (pt. 34). Ce n’est pas le cas en l’espèce dans l’affaire (puisque
les lois ukrainiennes sont confuses sur la question de savoir si certaines petites entreprises
bénéficiaient ou non d’une exonération de la TVA à l’importation, ce qui a conduit la Cour
suprême ukrainienne à rendre deux décisions en sens contraire à moins d’un an d’intervalle, et
ce sans donner la moindre raison quant à ce revirement de jurisprudence).

Corollaires – l’interprétation de la loi fiscale

Il y a une interdiction de l’interprétation par analogie. « In dubio contra fiscum » (le doute doit
profiter au contribuable), en comparaison avec l’article 5 du Code judiciaire : « il y a un déni
de justice lorsque le juge refuse de juger sous quelque prétexte que ce soit, même du silence,
de l’obscurité ou de l’insuffisance de la loi ». Ce principe n’a lieu que si les méthodes
d’interprétation traditionnelles n’ont pas permis de dégager la portée de la disposition qui taxe.
L’application est rare en pratique.

Corollaires – libre choix de la voie moins imposée

On va voir deux arrêts célèbres chez les fiscalistes de la Cour de cassation.

1. L’arrêt Brepols (Cass., 6 juin 1961, Pas., 1961, I, P. 1082) : « Il n’y a pas de simulation
prohibée à l’égard du fisc, ni partant, fraude fiscale, lorsque, en vue de bénéficier d’un régime
fiscal plus favorable, les parties, usant de la liberté des conventions, sans toutefois violer aucune
obligation légale, établissent des actes dont elles acceptent toutes les conséquences, même si la
forme qu’elles leur donnent n’est pas la plus normale ». En l’espèce, on favorise le financement
par prêt plutôt que par apport.

2. Arrêt Au vieux Saint-Martin (Cass., 22 mars 1990, Pas., 1990, I, p. 849). L’attendu est
presque identique. En l’espèce, il s’agit d’une société en perte ayant absorbé une société
florissante (voir réaction du législateur supra).

La première limite est la simulation. Voici la définition de H. De Page (t. II, 3e éd., 1964, n°
618) : « il y a simulation lorsque les parties font un acte apparent dont elles conviennent de
modifier ou de détruire les effets par une autre convention, demeurée secrète. La simulation
suppose donc deux conventions, contemporaines, l’une de l’autre, mais dont l’une n’est
destinée qu’à donner le change. Il n’existe au fond qu’une seule convention réelle, la convention
secrète ».

Par exemple :
On a un immeuble vendu pour un prix de 300k selon l’acte apparent présenté à l’enregistrement,
alors que le prix réellement convenu entre les parties est de 400k (paiement « sous la table » de
100k). On a un immeuble qui aurait été vendu selon l’acte apparent présenté à l’enregistrement,
alors qu’en réalité l’immeuble a été donné (« prix » qui ne sera jamais payé).

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La deuxième limite est l’inopposabilité au fisc des actes qui violent une disposition légale
d’ordre public étrangère au droit fiscal en vue d’éviter l’impôt (Cass., 5 mars 1999, Pas., 1999,
I, n° 134). Par exemple, un pharmacien qui constitue une société et lui apporte son officine. Il
y a une imposition distincte des plus-values de cessation à l’IPP (voir supra). Mais le prix de
cession excédant cependant le maximum autorisé par la réglementation, il y a un rejet chez la
société des amortissements sur la partie excédentaire du prix.

La troisième limite est la disposition générale anti-évitement. Elle concerne les impôts sur les
revenus (CIR, art. 344, §1er), les droits d’enregistrement et droits de succession (CEnr et CSucc
applicables en Région de Bruxelles-Capitale et en Région Wallonne, art. 18, §2, et 106, al. 2 ;
CFF, art. 3.17.0.0.2). L’illustration, selon certaines auteurs est celle de la location et de la sous-
location pour échapper à la requalification de certaines revenus immobiliers en rémunérations
des dirigeants d’entreprise (CIR, art. 32, al. 2, 3°). Par exemple, le dirigeant donne l’immeuble
en location à son comptable plutôt qu’à la société dans laquelle il exerce un mandat, et c’est
ensuite le comptable qui sous-loue l’immeuble à la société. Il y a une incidence du droit de
l’Union Européenne. En matière de TVA, il y a une disposition anti-abus propre, construite sur
la notion de « pratique abusive », reprenant elle-même le concept d’ « abus » du droit de l’UE
(CTVA, art. 1er, §10, art. 59, §1er, art. 70, § 1erbis, et art. 79, §2). Selon la CJUE, le juge national
doit refuser l’avantage d’une disposition nationale transposant une directive fiscale, telle que la
directive mère-filiale, en présence d’un abus de droit de l’UE (voir réf. dans le syllabus I).Pour
rappel, la notion d’abus du droit de l’UE (CJUE (grande chambre), 29 février 2019, T Danmark
et Y Denmark, aff. Jointes C-216/16 et C-117/16, dispositif) : « la preuve d’une pratique abusive
nécessite, d’une part, un ensemble de circonstances objectives d’où résulte que, malgré un
respect formel des conditions prévues par la réglementation de l’Union, l’objectif poursuivi par
cette réglementation n’a pas été atteint et, d’autre part, un élément subjectif consistant en la
volonté d’obtenir un avantage résultant de la réglementation de l’Union en créant
artificiellement les conditions requises pour son obtention ».

Cours du 17/11

• Annualité de l’impôt

L’énoncé du principe est que « les impôts au profit de l’Etat, de la communauté et de la région
sont votés annuellement. Les règles qui les établissent n’ont force que pour un an si elles ne
sont pas renouvelées » (Const, art. 171).

Le principe de droit budgétaire est à ne pas confondre avec le principe homonyme énoncé à
l’article 360, al. 1er, du CIR en matière d’impôts sur les revenus.

• Égalité de l’impôt

L’énoncé du principe est qu’ « il ne peut être établi de privilège en matière d’impôts » (Const,
art. 172, al. 1er). Il s’agit simplement d’une application particulière des articles 10 et 11 de la
Constitution. Il y a un large pouvoir d’appréciation du législateur fiscal. En effet, « il appartient
au législateur de fixer la base et le taux d’impôt. Il dispose en la matière d’un large pouvoir
d’appréciation ». En effet, les mesures fiscales constituent un élément essentiel de la politique
socioéconomique. Elles assurent non seulement une part substantielle des recettes qui doivent
permettre la réalisation de cette politique, mais elles permettent également au législateur
d’orienter certains comportements et d’adopter des mesures correctrices afin de donner corps à
la politique sociale et économique » (CC, arrêt n° 2016/49, du 24 mars 2016, pt. B.8.2).

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• Principe de sécurité juridique (interdiction de la rétroactivité)

Le principe de sécurité juridique est un principe en vertu duquel « le contenu du droit doit en
principe être prévisible et accessible, de sorte que le sujet de droit puisse prévoir, à un degré
raisonnable, les conséquences d’un acte déterminé au moment où cet acte se réalise » (CA, arrêt
n° 25/90 du 5 juillet 1990).

Il y a un corollaire à ce principe qui est le principe de non-rétroactivité. C’est l’importance de


déterminer le moment de la naissance de la dette d’impôt (voir supra). Il y a un contrôle par le
biais des articles 10 et 11 de la Constitution, en effet il y a une discrimination au détriment de
ceux que la violation du principe de sécurité juridique affecte.

Illustration par la CA, arrêt n° 109/2004 du 23 juin 2004. Il concerne la loi du 24 décembre
2002, publiée au MB le 31 décembre 2002. Les bonis de liquidation, jusqu’alors exonérés,
deviennent imposables. La loi soumet au PrM les bonis de liquidation mis à la disposition du
contribuable pendant la période imposable de 2002. La loi soumet à l’IPP ces mêmes revenus.
La Cour constitutionnelle (alors Cour d’arbitrage) annule le premier des deux volets de cette
mesure, qui est le seul à être rétroactif sur le plan fiscal. La naissance de la dette de PrM est
mise à disposition du revenu. La naissance (imparfaite) de la dette d’IPP est établie à
l’expiration de la période imposable. La Cour constitutionnelle considère cependant que la
rétroactivité de la loi fiscale peut être justifiée. De manière générale, il y a une rétroactivité
« indispensable à un objectif d’intérêt général » (voir not. CC, arrêt n° 41/2008 du 4 mars 2008,
pt. B.6.1). La procédure judiciaire pendante concerne les « circonstances exceptionnelles » ou
« motifs impérieux d’intérêt général » comme le cas où une taxe est contestée, mais sur des
motifs autres que la rétroactivité. (voir not. CC, arrêt n°87/2013 du 13 juin 2013, pt. B.7). Pour
la décision coulée en force de chose jugée la rétroactivité n’est jamais justifiée (voir not. CC,
arrêt n°199/2009 du 17 décembre 2009, pt. B.8).

• Protection de la propriété (interdiction des prélèvements confiscatoires)

Il y a un droit au respect des biens. Il est exprimé à l’article 1er du premier protocole de la CEDH
déjà cité, ainsi qu’à l’article 16 de la Constitution : « nul ne peut être privé de sa propriété que
pour cause d’utilité publique, dans les cas et de la manière établis par la loi, et moyennant une
juste et préalable indemnité ». La conséquence est une interdiction des prélèvements
confiscatoires (Cour eur. D.H., 15 mai 2013, NKM c. Hongrie, req. N° 72638/01). Il y a un
rapprochement qui peut être fait avec la Cour constitutionnelle et son arrêt n° 107/2005 du 22
juin 2005, qui accueille le recours en annulation contre un décret de la région wallonne ayant
porté le taux marginal maximal des droits de succession de 80 à 90%.

Taxe sur la valeur ajoutée

• Principaux textes

On retrouve dans les principaux textes le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne
(puisqu’elle fait l’objet d’une harmonisation), comme son article 113 qui dispose que « Le
Conseil, statuant à l’unanimité conformément à une procédure législative spéciale, et après
consultation du Parlement européen et du Comité économique et social, arrête les dispositions
touchant à l’harmonisation des législations relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires, aux
droits d’accises et autres impôts indirects dans la mesure où cette harmonisation est nécessaire
pour assure l’établissement et le fonctionnement du marché intérieur et éviter les distorsions de
concurrence ».

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L’instrument de base aujourd’hui est la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre
2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (régulièrement modifiée)
(abrégée ci-après en « directive TVA »). Il y a une transposition de cette directive en droit belge.
Il s’agit du Code de la taxe sur la valeur ajoutée (abrégé ci-après en « CTVA »), ainsi que de
différents arrêtés royaux numérotés. On a par exemple l’arrêté royal n°1 relatif aux mesures
tendant à assurer le paiement de la taxe sur la valeur ajoutée, l’arrêté royal n°3 relatif aux
déductions pour l’application de la taxe sur la valeur ajoutée ou encore l’arrêté royal n°20 fixant
le taux de la taxe sur la valeur ajoutée et déterminant la répartition des biens et services selon
ces taux, … Il y a également une importance pratique des nombreux arrêts de la Cour de justice
de l’UE rendus sur la portée de la directive TVA.

• Mécanisme

Voici les traits principaux de la TVA (directive TVA, art. 1er, §2) :

- « Le principe du système commun de TVA est d’appliquer aux biens et aux services un
impôt général sur la consommation exactement proportionnel au prix des biens et des
services, quel que soit le nombre des opérations intervenues dans le processus de
production et de distribution antérieur au stade d’imposition »
- « A chaque opération, la TVA, calculée sur le prix du bien ou du service au taux
applicable à ce bien ou à ce service, est exigible déduction faite du montant de la taxe
qui a grevé directement le coût des divers éléments constitutifs du prix »
- « Le système commun de TVA est appliqué jusqu’au stade du commerce de détail
inclus »

Une autre caractéristique importante est qu’en général, l’acquéreur du bien ou le preneur de
service ne verse pas directement la taxe au Trésor. L’acquéreur du bien ou le preneur de service
supporte juridiquement la taxe, puisque la TVA est un « impôt général sur la consommation »
(voir supra). Mais plutôt que de verser la taxe directement au Trésor, il la verse en général à
son co-contractant, et c’est le co-contractant qui verse la taxe au Trésor. C’est une des raisons
pour laquelle la TVA est rangée parmi les « impôts indirects » (voir supra). La raison est
d’ordre pratique puisque sinon le consommateur final devrait verser la taxe au Trésor sur le
moindre bien ou service.

L’intérêt de la TVA en comparaison avec les taxes cumulatives en cascade est que la charge
fiscale totale ne dépend pas de la longueur de la chaine de production et de distribution. Le
moyen pour y parvenir est la « déduction taxe sur taxe », à savoir que « l’assujetti » peut en
principe déduire de la TVA reçue de ses clients (dénommée « TVA reçue », « TVA en aval »
ou encore « TVA collectée »), la TVA payée à ses fournisseurs (dénommée « TVA payée »,
« TVA en amont » ou encore « TVA déductible »).

Illustration vente de pains :


La première hypothèse est celle de la vente directe. L’agriculteur cultive et moud le blé,
fabrique les pains et vend les pains aux consommateurs finaux.
La seconde hypothèse est celle du circuit de production et de distribution. L’agriculteur vend
le blé au meunier, le meunier vend la farine au boulanger, le boulanger vend les pains à un
magasin et le magasin revend les pains aux consommateurs finaux.
Les consommateurs finaux paient un prix total de 100k. Le taux de la taxe est de 6%. (Par souci
de simplification, le prof décide de faire abstraction du régime particulier susceptible de
s’appliquer aux exploitations agricoles (CTVA, art. 57) et de certains coûts de fabrication).

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Illustration de taxes cumulatives de transmission (hypothèse 2). Pour la vente directe, la taxe
est de 6000€ (6% de 100k). Pour le circuit de production et de commercialisation dans le cas
de la taxe d’un montant total plus élevé, de 15k en l’occurrence. L’agriculteur vend le blé au
meunier pour 25k, l’agriculteur verse donc au Trésor une taxe de 1500€ (6% de 25k). Le
meunier qui vend la farine au boulanger pour 50k verse au Trésor une taxe de 3000€ (6% de
50k). Le boulanger qui vend les pains au magasin pour 75k verse au Trésor une taxe de 4500€
(6% de 75k). Et le magasin qui revend les pains aux consommateurs finaux pour 100k verse au
Trésor une taxe de 6000€ (§% de 100k).

Prenons le même exemple de la cas d’un circuit de production et de distribution avec la TVA
d’un montant total qui demeure à 6000€. L’agriculteur qui vend le blé au meunier pour 25 k
verse au Trésor une TVA de 1500€ (6% de 25k). Le meunier qui vend la farine au boulanger
pour 50k verse au Trésor une TVA de 1500€ (TVA reçue du boulanger de 3000€ = 6% de 50k
et TVA payée à l’agriculteur de 1500€). Le boulanger qui vend les pains au magasin pour 75
verse au Trésor une TVA de 1500€ (TVA reçue du magasin de 4500€ = 6% de 75k et TVA
payée au meunier de 3000€). La magasin qui revend les pains aux consommateurs finaux pour
100k verse au Trésor une TVA de 1500€ (TVA reçue des consommateurs finaux de 6000€ =
6% de 100k et TVA payée au boulanger de 4500€).

• Assujettissement

La définition se trouve à l’article 4, §1er du CTVA et dispose : « Qu’est assujetti quiconque,


dans l’exercice d’une activité économique, d’une manière habituelle et indépendante, à titre
principal ou à titre d’appoint, avec ou sans esprit de lucre, des livraisons de biens ou des
prestations de services visées par le présent Code, quel que soit le lieu où s’exerce l’activité
économique ». Le terme « d’une manière habituelle » veut dire pas en cas de livraison de bien
ou de prestation de service ayant un caractère occasionnel, mais peu importe le caractère
principal ou accessoire de l’activité. Le terme « d’une manière indépendante » signifie pas en
raison de prestations fournies dans le cadre d’un contrat de travail (lien de subordination). Le
terme « quiconque » vise les personnes physiques et personnes morales (sociétés comme
associations), mais aussi les sociétés sans personnalité juridique et les associations de fait. A
l’inverse, plusieurs sociétés dotées de la personnalité juridique peuvent, sous certaines
conditions, former une « unité TVA », c’est-à-dire être traitées comme un assujetti unique (voir
CTVA, art. 4, §2).

Analysons maintenant le cas des organismes publics (CTVA, art. 6). La notion vise « l’État, les
Communautés et les Régions de l’État belge, les provinces, les agglomérations, les communes
et les établissements publics » (CTVA, art. 6, al. 1er). Il y a tout de même une exclusion de
principe pour les opérations accomplies en tant qu’autorités publiques (ibid.). La première
exception est le non-assujettissement qui conduirait à une distorsion de concurrence (CTVA,
art. 6, al. 2). La seconde exception est relative à certaines activités expressément énumérées
(CTVA, art. 6, al. 3).

Pour ce qui est du cas de la société holding (qui est une société dont le patrimoine est
exclusivement composé de participations dans d’autres sociétés), la simple participation dans
une autre société n’entraine pas l’assujettissement, parce qu’il n’y a pas « une exploitation d’un
bien visant à produire des recettes ayant un caractère de permanence, dès lors que la perception
d’un éventuel dividende, fruit de cette participation résulte de la simple propriété du bien »
(CJUE, 5 juillet 2018, Marle Participations, C-320/17, pt. 28 – jurisprudence constante). Il en
est différemment en cas « d’immixtion, directe ou indirecte, dans la gestion de la filiale » (Ibid.,
pt. 29 – jurisprudence constate). Il s’agit, de la distinction, en matière de TVA entre la « société
holding passive » et la « société holding active ». La société holding passive est celle qui

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n’intervient pas dans la gestion de la filiale. Elle se contente de recueillir les dividendes. Dans
ce cas-là elle n’est pas assujettie à la TVA, alors que si elle s’immisce dans la gestion de la
filiale, il s’agit d’une société holding active qui est assujettie à la TVA (avis de la Cour de
justice constant).

Il y a un régime particulier qui concerne les petites entreprises notamment pour le régime de
franchise de la taxe pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 25k (CTVA,
art. 56bis, §1er, al. 1er). Ce régime concerne également les exploitations agricoles (CTVA, art.
57).

On va maintenant passer aux principales obligations des assujettis qui sont au nombre de trois.
Il y a des obligations de déclaration comme le fait de déclarer le début et la fin de l’activité
(CTVA, art. 53, §1er, al. 1er). En effet, l’administration fiscale attribue un numéro de TVA à
tout assujetti établi en Belgique (CTVA, art. 50, §1er, 1°) (« BE » suivi du numéro d’entreprise)
(CTVA, art. 53quater, §1er, al. 1er). Il y est aussi obligé pour la déclaration périodique (CTVA,
art. 53, §1er, al. 2, art. 53duodecies). Le dépôt a lieu par voie électronique (AR TVA n°1, art.
18, §4). En principe, la déclaration est mensuelle et est à déposer au plus tard le 20e jour du
mois qui suit (AR TVA n°1, art. 18, §1er). Par exception, la déclaration peut être trimestrielle
en-dessous d’un certain seuil de chiffre d’affaires annuel (en principe 2,5M) (AR TVA n°1, art.
18, §2, al. 1er, 1°). Il est également obligé de déclarer la liste annuelle des clients assujettis à la
TVA (CTVA, art. 53quinquies, art. 53duodecies et AR TVA n°23, art. 1er, §1er, al. 1er).

Il y a également une obligation de verser la TVA au Trésor (CTVA, art. 53, §1er, al. 1er, 3° et
art. 53 duodecies). En principe, le délai de paiement coïncide avec celui pour remettre la
déclaration (CTVA, art. 53, §1er, al. 1er, « °). Par exception, il peut y avoir un acompte en fin
d’année, pour les opérations effectuées jusqu’au 20 décembre (AR TVA n°1, art. 19).

L’assujetti est également obligé d’émettre une facture. Pour ce qui est du champ d’application,
en principe, il faut le faire pour toute livraison de bien ou de prestation de service à un assujetti
ou à une personne morale assujettie. (CTVA, art. 53, §2, al. 1er, 1°). Il faut parfois même le
faire en présence d’un client personne physique destinant le bien ou le service à un usage privé
(CTVA, art. 53, §2, al. 5, et AR TVA n°1, art. 1er, al. 1er). Il s’agit par exemple « des livraisons
effectuées par les entreprises de production ou de vente en gros » (AR TVA n°1, art. 1er, al. 1er,
8°). Pour ce qui est du délai, elle doit avoir lieu au plus tard le 15e jour du mois qui suit celui
du fait générateur (CTVA, art. 53duodecies, et AR TVA n°1, art. 4, §1er, al. 1er). Les principales
mentions sont (CTVA, art. 53duodecies et AR TVA n°1, art. 5) :

- Le nom ou la dénomination sociale, adresse du siège administratif ou social et le numéro


d’identification à la TVA du fournisseur et du client (AR TVA n°1, art. 5, §1er, 2°, al.
1er, et 3°).
- La date d’émission et le « numéro séquentiel » identifiant la facture dans le facturier de
sortie (AR TVA n°1, art. 5, §1er, 1°).
- « Les éléments nécessaires pour déterminer l’opération et le taux de la taxe, notamment
la dénomination usuelle des biens livrés et des services fournis et leur quantité ainsi que
l’objet des services » (AR TVA n°1, art. 5, §1er, 6°).

Les documents rectificatifs quant à eux sont « tout document qui modifie la facture initiale et y
fait référence de façon spécifique et non équivoque est assimilé à une facture » (CTVA, art. 53,
§2, al. 3).Il y a une obligation d’émettre pareil document lorsqu’une correction est nécessaire
(CTVA, art. 53duodecies, et AR TVA n°1, art. 12, §1er, al. 1er) comme une « note de crédit »
en cas de correction négative (erreur de facture au détriment du client, bien repris par le
fournisseur, etc.)

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• Opérations imposables

Il y a quatre opérations imposables qui sont (CTVA, art. 2 à 3bis) :

- La livraison d’un bien


- La prestation d’un service
- L’importation d’un bien
- L’acquisition intracommunautaire d’un bien

1. La livraison d’un bien


« Est considéré comme la livraison d’un bien , le transfert du pouvoir de disposer d’un bien
corporel comme un propriétaire » (CTVA, art. 10, §1er, al. 1er). Il s’agit d’une notion plus large
que la vente puisqu’elle vise aussi l’apport, le partage, la remise d’un bien faite à titre de prêt
de consommation, etc. (sur ces deux derniers points, voir CTVA, art. 10, §1er, al. 2, et 10, §3).
Il y a par contre une restriction liée au caractère « corporel » du bien (CTVA, art. 9, al. 1er, et
10, §1er, al. 1er). Elle concerne donc également l’électricité, le gaz, la chaleur et le froid (CTVA,
art. 9, al. 2, 1°), ainsi que certains droits réels sur immeubles (voir infra).

Il s’agit d’une opération imposable lorsqu’elle est effectuée à titre onéreux par un assujetti
agissant en tant que tel (CTVA, art. 2).

2. La prestation de services
« Est considérée comme une prestation de services, toute opération qui ne constitue pas une
livraison d’un bien au sens présent du Code » (CTVA, art. 18, §1er, al. 1er). On peut se référer
à la liste exemplative de l’art. 18, §1er, al. 2 du CTVA comme par exemple la vente ou l’apport
d’un brevet (CTVA, art. 18, §1er, 7° - en effet, il ne s’agit pas d’une « livraison de bien » au
sens du CTVA puisque la notion de « bien » se limite au « bien corporel »).

Il s’agit d’une opération imposable lorsqu’elle est effectuée à titre onéreux par un assujetti
agissant en tant que tel. Le terme à titre onéreux doit se comprendre à l’inverse d’un musicien
ambulant qui joue d’un instrument sur la voie publique et sollicite une obole de passants (CJUE,
3 mars 1994, Tolsma, C-16/93).

3. L’importation de biens
En substance, il s’agit de l’introduction sur le territoire belge d’un bien qui ne provient pas du
« territoire TVA », lequel correspond grosso modo, au territoire institutionnel de l’UE (CTVA,
art. 1er, §§3 à 5, et art. 23, §1er, 2°). Les importations peuvent être faites par quiconque (CTVA,
art. 3), mais il y a des franchises pour les biens contenus dans les « bagages personnels » des
voyageurs sous certaines conditions et dans certaines limites (CTVA, art. 40, §4, et AR TVA
n°7, art. 43). Il y a également une franchise pour l’envoi d’un bien particulier situé dans un pays
tiers à un particulier situé en Belgique lorsque la valeur globale n’est pas supérieure à 45€
(CTVA, art. 40, §4, et AR TVA n°7, art. 44).

4. Les acquisitions intracommunautaires


Il s’agit de « l’obtention du pouvoir de disposer comme un propriétaire d’un bien meuble
corporel expédié ou transporté à destination de l’acquéreur, par le vendeur ou par l’acquéreur
pour leur compte » à partir d’un autre État membre et vers la Belgique (CTVA, art. 25bis, §1er,
et 25ter, §1er, al. 1er). En principe, il s’agit d’une opération imposable seulement lorsqu’elle est
effectuée à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel, ou dans certaines circonstances,
par une personne morale non assujettie (CTVA, art. 3bis, et 25ter, §1er, al. 1er). Il y a tout de
même une exception en ce qui concerne l’acquisition de moyens de transport neufs, celle-ci
constituant une opération imposable même lorsqu’elle est effectuée à titre onéreux par une

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personne autre qu’un assujetti agissant en tant que tel ou qu’une personne morale non assujettie
(CTVA, art. 25ter, §2). Pour la notion de « moyens de transports neufs », il faut se référer à
l’article 8bis, §2 du CTVA (ibid.).Il y a une présomption que le moyen de transport est neuf
(CTVA, art. 25ter, §3).

Au-delà des opérations imposables, il y a des principales exonérations dans un contexte interne,
visées à l’article 44 du CTVA.
On a les exonérations en faveur d’activités d’intérêt général sous certaines conditions comme :

- Les opérations s’inscrivant dans un cadre médical (CTVA, art. 44, §1er, et§2, 1° et
1°ter).
- Les opérations étroitement liées à l’assistance sociale, à la sécurité sociale et à la
protection de l’enfance et de la jeunesse (crèches, maisons de repos, centres PMS,
centres de planning et de consultation familiale et conjugale, etc.) (CTVA, art. 44, §2,
2°).
- Les opérations s’inscrivant dans le cadre de l’enseignement (CTVA, art. 44, §2, 4° et
5°).
- Les opérations des clubs de sports et des musées et des jardins zoologiques et botaniques
(CTVA, art. 44, §2, 3° et 7°).
-
On a également d’autres exonérations comme :

- Les exonérations en matière immobilière (voir infra).


- Les contrats d’éditions d’œuvres littéraires ou artistiques (CTVA, art. 44, §3, 3°).
- Les opérations d’assurance ou de réassurance, y compris les prestations afférentes à ces
opérations accomplies par les courtiers et les mandataires (CTVA, art. 44, §3, 4°).
- L’octroi et la négociation de crédits, ainsi que d’autres opérations financières (CTVA,
art. 44, §3, 5° à 11°).

• Fait générateur et exigibilité

Commençons par quelques définitions. Le fait générateur de la taxe est « le fait par lequel sont
réalisés les conditions légales nécessaires pour l’exigibilité de la taxe » (CTVA, art. 1er, §12,
1°). L’exigibilité de la taxe est « le droit que le Trésor peut faire valoir aux termes de la loi, à
partir d’un moment donné, auprès du redevable pour le paiement de la taxe, même si le paiement
peut être reporté » (CTVA art. 1er, §12, 2°). C’est le montant des taxes exigibles qui doit être
mentionné dans la déclaration périodique (CTVA, art. 53, §1er, al. 1er, é°, b). Pour ce qui est de
l’exigibilité du paiement, voir supra. Le prof décide de se limiter ici aux livraisons de biens et
aux prestations de service dans un contexte externe.

Le fait générateur de la livraison d’un bien ou de la prestation de service est le moment où


l’opération est effectuée (CTVA, art. 16, §1er, al. 1er, 1ère phrase, et art. 22, §1er, al. 1er).

L’exigibilité de la taxe correspond, en général, au moment de l’émission de la facture, peu


importe que l’émission de la facture ait lieu avant ou après le moment où le fait générateur s’est
produit (CTVA, art. 17, §1er, al. 1er, et art. 22bis, §1er, al. 1er). Il y a des exceptions comme le
cas de la perception du prix de la taxe exigible à due concurrence, même si la facture n’a pas
encore été émise (CTVA, art. 17, §1er, al. 2, et art. 22bis, §1er, al. 2). Il y a également une
exceptions si l’assujetti tarde à émettre la facture. La taxe devient alors exigible le quinzième
du jour du mois qui suit celui au cours duquel le fait générateur s’est produit (CTVA, art. 17,
§1er, al. 3, et arT. 22bis, §1er, al. 3).

85
• Déduction

Le principe du droit à la déduction est énoncé à l’article 45, §1er, du CTVA comme tel : « Tout
assujetti peut déduire de la taxe dont il est redevable, les taxes ayant grevé les biens et les
services qui lui ont été fournis, les biens qu’il a importés et les acquisitions
intracommunautaires de biens qu’il a effectuées, dans la mesure où il les utilise pour effectuer :
1° des opérations taxées ;
2° des opérations exonérées en vertu des articles 39 à 42 ;
3° des opérations réalisées à l’étranger qui ouvriraient droit à déduction si elles étaient
effectuées à l’intérieur du pays (…) ».

Il y a des exceptions qui concernent :

- Les véhicules automobiles avec une déduction plafonnée en principe à 50% (CTVA,
art. 45, §2, al. 1er)
- Les tabacs manufacturés (CTVA, art. 45, §3, 1°)
- Les boissons spiritueuses (CTVA, art. 45, §3, 2° - voir exceptions visées par ce texte)
- Les frais de logement et frais de boissons et nourriture fournies dans les restaurants et
débits de boissons (CTVA, art. 18, §1er, al. 2, 10° et 11°, et 45, §2, 3° - voir exceptions
visées par ce dernier texte)
- Les frais de réception (CTVA, art. 45, §3, 4°)

Il existe des cas particuliers comme celui du cas des biens à usage mixte, l’utilisation sert à la
fois pour les besoins de l’activité économique de l’assujetti et pour ses besoins personnels. La
déduction n’a lieu qu’à concurrence de l’utilisation pour les besoins de l’activité économique
(CTVA, art. 45 §1er quinquies, CTVA, art. 49, et AR TVA n°3, art/ 1er, §2, al. 2). L’exemple
assez fréquent est celui des véhicules automobiles. La position de l’administration est exprimée
dans la circulaire AGFisc n°36/2015 du 23 novembre 2015 (pt. 6 ) 122 et se fait via trois
méthodes :

- Le registre des trajets


- La méthode « semi-forfaitaire » qui est de 200 fois le nombre de km du trajet aller et
retour du domicile au lieu de travail (nombre de jours de travail déterminé
forfaitairement) + 6000 km (pour une autre utilisation privée déterminée forfaitairement
par année civile)
- La méthode forfaitaire au coefficient de 35% ( on considère qu’il y a donc 65% à des
fins autres qu’économiques et 35% à des fins économiques)

Cours du 24/11

Passons au cas particulier des assujettis mixtes. Un tel assujetti effectue à la fois des opérations
qui donnent droit à déduction et des opérations qui, exonérés en vertu de l’article 44 du CTVA,
ne lui donnent pas déduction. Par exemple, un assujetti qui exerce à la fois une activité
comptable indépendant et de courtier en assurances. Par exemple, un assujetti qui exerce à la
fois une activité de comptable indépendant (montant des opérations effectuées pour l’année
2020 : 75k) et une activité de courtier en assurances (montant des opérations effectuées pour
l’année 2020 de 25k). Il existe deux méthodes pour déterminer l’étendue du droit à déduction :
le prorata général et l’affectation réelle (CTVA, art. 46).

La première méthode est celle du prorata général (CTVA, art. 46, §1er). Le montant des
opérations permettant la déduction au numérateur et le montant total des opérations au
dénominateur (CTVA, art. 46, §1er). Le prorata général est de 75% (numérateur du prorata de

86
75k, dénominateur du prorata de 100k). Si l’assujetti achète un ordinateur pour 1000€ + 210€
de TVA et qu’il l’affecte exclusivement à son activité économique, il pourra déduire 75% des
210€, à savoir 157,50€. On passe du prorata provisoire (le prorata définitif de l’année
précédente en principe) au prorata définitif (puisque le chiffre d’affaires des deux activités ne
seront connus qu’à l’expiration de l’année civile) (CTVA, art. 48, §1er). Dans l’exemple, le
prorata général de 75%, calculé sur la base des opérations réellement effectuées pendant
m’année 2020, est le prorata définitif pour l’année 2020 et le prorata provisoire pour l’année
2021. Il existe la faculté de ne pas opérer la révision lorsque la différence entre le prorata
provisoire et le prorata définitif n’atteint pas 10 points de pourcentage (CTVA, art. 49 et AR
TVA n°3, art. 15 et 17). Ainsi, dans l’exemple si le prorata définitif pour l’année 2021 est de
68%, on a la faculté de ne pas opérer de révision.

La seconde méthode est celle de l’affectation réelle (CTVA, art. 46, §2). La déduction est
opérée suivant l’affectation réelle de tout ou partie des biens et des services (CTVA, art. 46,
§2). Dans l’exemple, on peut aboutir à ce que les 210€ de TVA de l’ordinateur soient
déductibles pour le tout ou ne soient pas du tout déductibles, s’il est affecté exclusivement à
l’une des deux activités.

Il peut y avoir une révision éventuelle des taxes ayant grevé les biens d’investissement (CTVA,
art. 48, §2, et 49). Par biens d’investissement, on vise les biens et services « destinés à être
utilisés d’une manière durable comme instruments de travail ou moyens d’exploitation »
(CTVA, AR TVA n°3, art. 6, al. 1er). Les biens d’investissement autres qu’immobiliers sont
sujets à révision pendant une période de cinq ans (CTVA, art. 48, §2, al. 1er, première phrase).
La révision s’opère, chaque année à concurrence d’un cinquième du montant de ces taxes,
lorsque des variations sont intervenus dans les éléments qui ont été pris en considération pour
le calcul des taxes déductibles (CTVA, art. 48, §2, al. 1er, seconde phrase). Cette révision
concerne le bien d’investissement à usage mixte.

Par exemple :
Un véhicule automobile me coûte 20k, sur ces 20k, je vais avoir une TVA de 4200€. Sur 50%
de cette somme, elle n’est pas déductible, mais il reste 2100€. Comme je ne vais pas pouvoir
déduire la totalité de ces 2100€ suite à son usage mixte, je vais regarder la proportion
d’utilisation privée que je vais faire de ce véhicule. Imaginons que sur la base du prorata général
en vigueur à ce moment-là, il puisse déduire 35% de la taxe cette année-là. Mais comme la
voiture est destinée à être utilisée plusieurs années, ce n’est pas la méthode que le législateur
TVA a choisi. Il préconise de regarder le % d’utilisation privée pour chaque année. On va tout
d’abord admettre la déduction de la TVA sur ces 35% la première année par exemple et puis
on va régulariser en fonction de l’utilisation privée effective les années qui suivent. Pour une
voiture ce sera limité à 5 ans puisque le législateur a déterminé qu’une voiture était amortie sur
5 ans. Si je fais le choix de la méthode forfaitaire, tout ce questionnement ne se pose pas bien
sûr.

Mais si le bien d’investissement est affecté pour le tout et de manière définitive à des fins
étrangères à l’activité économique de l’assujetti, c’est alors le régime plus sévère du
« prélèvement » qui s’applique. Cette sortie du « patrimoine TVA » est assimilée à une
livraison de bien TVA (CTVA, art. 12, §1er, al. 1er, 1°). Cette révision concerne également le
bien d’investissement d’un assujetti mixte. En cas d’application de la méthode du prorata
général, il y a une faculté de ne pas opérer la révision lorsque la différence entre le premier
prorata définitif et le prorata définitif ultérieur considéré n’atteint pas dix points de pourcentage
(CTVA, art. 49 et AR TVA n°3, art. 16 et 17).

87
• Taux

La directive TVA implique une obligation pour les États membres de prévoir un taux normal,
identique pour les livraisons de biens et les prestations de services, qui ne peut pas être inférieur
à 15% (directive TVA, art. 96 et 97). Il y a pourtant une faculté pour les États membres de
prévoir un ou deux taux réduits, qui ne peuvent être inférieurs à 5%, mais seulement pour les
biens et services repris dans l’annexe III de la directive (directive TVA, art. 98, §§1er, et 2, et
art. 99, §1er). Il y a également une faculté pour les États membres de conserver les exonérations
avec droit à déduction et les taux réduits inférieurs à 5% qui existaient déjà au 1er janvier 1991
(directive TVA, art. 110).

Pour ce qui est de la transposition en Belgique, les taux sont fixés par le Roi et confirmés par
le législateur (CTVA, art. 37). Le taux normal est de 21% (AR TVA n°20, art. 1er, al. 1er). Le
taux réduit est de 6% (AR TVA n°20, art. 1er, al. 2, a) pour les livraisons de biens. Ca comprend
les produits alimentaires en général (AR TVA n°20, annexe, tableau A, rubriques II à X). Les
exceptions à ce taux réduit sont certains produits de luxe (caviar, homard, crabe, etc.) (AR TVA
n°2°, annexe, tableau A, rubrique III), les boissons alcoolisées (AR TVA n°20, annexe, tableau
A, rubrique X in fine) et la margarine, soumise au taux réduit de 12% (voir infra).

Le taux réduit de 6% concerne également les biens tels que la distribution d’eau (AR TVA n°2°,
annexe, tableau A, rubrique III), les médicaments, dispositifs médicaux et certaines biens et
relation avec la santé, l’hygiène ou un handicap (AR TVA n°20, annexe, tableau A, rubriques
XVII, XXII et rubrique XXIII, chiffres 2 à 11). Il concerne également les journaux, périodiques
et livres (AR TVA n°20, annexe, tableau A, rubrique XVII) (journaux et périodiques :
seulement si le taux plus favorable de 0% ne s’applique pas – voir infra), ainsi que les objets
d’art, de collection et d’antiquité (AR TVA n°20, annexe, tableau A, rubrique XXI). Le taux
réduit de 6% concerne également les services comme les droits d’auteur (avec une exonération
sans droit à déduction si il y a un contrat d’édition – voir supra) et certaines services
immobiliers (voir infra).

Pour ce qui est du taux réduit de 12% (AR TVA n°20, art. 1er, al. 2, b), il concerne les services
de restaurant et de restauration, à l’exclusion de la fourniture de boissons (AR TVA n°20,
annexe, tableau B, rubrique I). Les boissons, même non alcoolisées, qui sont consommées sur
place sont taxées à 21%). La nourriture à emporter est considéré comme une livraison de bien
avec application du taux réduit de 6% (sauf certains produits de luxe et les boissons alcoolisées :
voir supra). La margarine fait également partie du taux réduit de 12% (AR TVA n°20, annexe,
tableau A, rubrique IX, chiffre 4, et tableau B, rubrique VI).

Il existe également un taux de 0% (AR TVA n°20, art. 1er, al. 2, c). Il s’agit d’un synonyme
« d’exonération avec droit à déduction », par opposition à l’exonération visée à l’art. 44 du
CTVA. Il s’agit d’une exonération permanente qui fait l’objet de publications périodiques (AR
TVA n°20, annexe, tableau C, rubrique I). Il faut se référer aux conditions prévues aux §§1er et
2. Ce taux vaut aussi pour les publications digitales (voir les §§ 3 et 4). Adapter la directive
TVA a cependant été nécessaire, étant donné que les publications digitales n’existaient pas au
1er janvier 1991 (voir directive TVA, art. 99, §3).

Pour finir, il existe en outre des taux réduits qui ne sont que temporaires comme ceux relatifs à
l’épidémie du COVID-19. On a par exemple un taux de 6% jusqu’au 31 décembre 2021 pour
les masques buccaux et les gels hydroalcooliques pour les mains (AR TVA n°20, art. 1ter). On
a par exemple également un taux de 0% jusqu’au 31 décembre 2022 pour les vaccins contre
cette maladie et les dispositifs de diagnostic in vitro de cette maladie (AR TVA n°20, art.
1ter/2).

88
• TVA et immobilier

Commençons par le régime de livraison d’un immeuble. Le principe est qu’on a une
exonération. Parce que quand j’achète un bien immeuble je dois déjà payer un droit
d’enregistrement de 12,5% en Région wallonne et de Bruxelles-Capitale.. Donc si je dois payer
en plus la TVA de 21%, ça commence à faire beaucoup. Le CTVA prévoit cette exonération de
principe pour la livraison d’un bien immeuble par nature (CTVA, art. 44, §3, 1°, a, al. 1er). Sont
également exemptés de la taxe la « livraison » d’un droit réel autre que le droit de propriété
donnant à son titulaire un pouvoir d’utilisation sur un bien immeuble par nature (CTVA, art.
44, §3, 1°, b, al. 1er). Un pareil droit est en effet assimilé à un bien en matière de TVA en dépit
de son caractère incorporel (CTVA, art. 9, al. 2, 2°). Il y a également une application de
l’exemption de la taxe, selon le cas, du droit d’enregistrement proportionnel sur la transmission
à titre onéreux d’un bien immeuble ou, en cas d’emphytéose ou de superficie, du droit
d’enregistrement proportionnel sur le bail d’un immeuble (voir supra).

L’application de l’exemption de la taxe TVA s’applique aussi éventuellement en présence d’un


bâtiment neuf. Celà suppose que l’immeuble consiste dans un « bâtiment » ou une « fraction de
bâtiment », avec le « sol y attenant », et qu’il soit neuf (CTVA, art. 44, §3, 1°, a, al. 2, et b, al.
2). Le terme « bâtiment ou fraction de bâtiment » signifie « toute construction incorporée au
sol » (CTVA, art. 1er, §9, al. 1er, 1°). Le terme « sol y attenant » signifie quant à lui « le terrain
sur lequel il est permis de bâtir e qui cédé par la même personne, en même temps que le bâtiment
est attenant à celui-ci (CTVA, art. 1er, §9, al. 1er, 2°). Le caractère neuf suppose non seulement
un bâtiment nouvellement construit, mais également un bâtiment ancien profondément
transformé. Le bâtiment conserve son caractère neuf jusqu’au 31 décembre de la deuxième
année qui suit celle de la première utilisation du bien (occupation ou location) (CTVA, art. 44,
§3, 1°, a, al. 2, et b, al. 2). Par exemple, le bâtiment utilisé pour la première fois le 3 mars 2021
demeure neuf jusqu’au 31 décembre 2023.

L’assujetti, en matière d’application éventuelle de la TVA en présence d’un bâtiment neuf est
dénommé en pratique « le constructeur professionnel ». Il s’agit de l’assujetti qui de manière
habituelle cède à titre onéreux des bâtiments neufs (ou des droits réels donnant le pouvoir
d’utilisation des bâtiments neufs) qu’il a construits, fait construire ou acquis avec application
de la taxe (CTVA, art. 12, §2, et art. 44, §3, 1°, a, al. 2, premier tiret, et b, al. 2, premier tiret).
Il y a une obligation de soumettre la livraison à la TVA (CTVA, art. 44, §3, 1°, a, al. 2, premier
tiret, et b, al. 2, premier tiret). Si aucune livraison n’est intervenue au moment où l’immeuble
cesse d’être neuf, la livraison est censée intervenir à ce moment-là (fiction de prélèvement pour
les propres besoins de l’assujetti, le prélèvement étant assimilé, comme nous l’avons déjà vu, à
une livraison de bien) (CTVA, art. 12, §2). L’assujetti occasionnel, quant à lui, est une personne
qui, autrement que dans l’exercice d’une activité économique, a construit, fait construire ou
acquis avec application de la taxe bâtiment neuf (CTVA, art. 8). L’assujetti occasionnel a la
faculté, donc pas l’obligation de soumettre la livraison à la TVA (CTVA, art. 44, §3, 1°, a, al.
2, deuxième tiret, et b, al. 2, deuxième tiret). L’intérêt de ce statut d’assujetti occasionnel est la
possibilité de déduction de la TVA en amont en présence de cette opération taxée. Tout autre
assujetti a la faculté de soumettre la livraison de la TVA (CTVA, art. 44, §3, 1°, a, al. 2,
troisième tiret, et b, al. 2, troisième tiret).

En matière de droits d’enregistrement, il y a une application du droit fixe général de 50€ (voir
supra). Pour l’assujetti qui acquiert le bien ou le droit avec application de la taxe et qui l’utilise
comme bien d’investissement, le délai de révision est de 15 ans (CTVA, art. 48, §2, al. 2). Par
exemple, l’assujetti acquiert un immeuble de bureaux pour y loger son personnel.

89
Passons maintenant au régime de la location. Le principe général est celui d l’exonération
également (CTVA, art. 44, §3, 2°, in limine). L’application de la TVA, qui est donc une
exception au principe d’exonération a lieu pour les places de parking (CTVA, art. 44, §3, 2°, a,
premier tiret), les entrepôts (CTVA, art. 44, §3, 2°, a, deuxième tiret) et les fournitures de
logements meublés (CTVA, art. 44, §3, 2°, troisième tiret) comme par exemple les hôtels qui
est taxé au taux réduit de 6% (AR TVA n°20, annexe, tableau A, rubrique XXX).

Le régime de location concerne les leasing sous certaines conditions (CTVA, art. 44, §3, 2°, b),
ainsi que la location d’un bâtiment ou d’une fraction de bâtiment, le cas échéant avec le sol y
attenant, entre deux assujettis, le preneur utilisant le bien exclusivement pour son activité
d’assujetti. Il existe une faculté pour les parties de soumettre l’opération à la TVA (CTVA, art.
44, §3, 2°, d). Le délai de révision est porté à 25 ans.

Troisièmement on a un taux réduit de 6% pour les travaux immobiliers relatifs à un logement


privé (AR TVA n°20, annexe, tableau A, rubrique XXXVIII). Pour ce qui est de la notion de
travaux immobiliers, il faut se référer à l’AR TVA n°20, annexe, tableau A, rubrique XXXVIII,
§1er, 1°, et §3. Il concerne le bâtiment d’habitation qui après l’exécution des travaux est utilisé,
à tout le moins à titre principal, comme logement privé (AR TVA n°20, annexe, tableau A,
rubrique XXXVIII, §1er, 2°). Il faut que la première occupation précède d’au moins dix ans la
date d’exigibilité de la TVA sur les travaux immobiliers (AR TVA n°20, annexe, tableau A,
rubrique XXXVIII, §1er, 3°) (sur la date d’exigibilité en matière de prestations de services, voir
supra). L’opération est fournie et facturée au consommateur final (AR TVA n°20, annexe,
tableau A, rubrique XXXVIII, §1er, 4°). Il faut une attestation « formelle et précise » du client
5AR TVA n°20, annexe, tableau A, rubrique XXXVIII, §1er, 5°). Il y a cependant une exclusion
qui concerne les travaux de jardinage et travaux de clôture car ces travaux ne sont pas affectés
au logement privé proprement dit (AR TVA n°20, annexe, tableau A, rubrique XXXVIII, §3,
1°). La seconde exception concerne les travaux relatifs à des piscines, des saunas, des mini-
golfs et des courts de tennis (AR TVA n°20, annexe, tableau A, rubrique XXXVIII, §4, 2°).

Passons pour finir au régime de « l’autoliquidation » (AR TVA n°1, art. 20). Il s’agit d’un
synonyme du « report de perception ». Il concerne les travaux immobiliers effectués par un
assujetti établi en Belgique au profit d’un autre assujetti établi en Belgique, autre qu’un assujetti
exonéré. Pour ce qui est de la notion de travaux immobiliers, il faut se référer au CTVA, art.
19, §2, et à l’AR TVA n°1, art. 20, §2. Par dérogation au régime général, le client acquitte lui-
même la TVA dont il est redevable au Trésor, plutôt que de la verser au prestataire des travaux
immobiliers.

• TVA et commerce international

Il s’agit de la livraison d’un bien par un fournisseur établi dans le territoire TVA à un client
également établi dans le territoire TVA, mais dans un autre État membre. Le principe est celui
de localisation dans le pays d’origine. Ce principe est à combiner avec une série de correctifs
en faveur du pays de destination. Il existe deux techniques qui sont 1. de localiser, par exception
au principe, la livraison de biens dans le pays de destination et 2. d’ériger en opération
imposable distincte l’acquisition intracommunautaire de biens dans le pays de destination (avec
exonération corrélative de la livraison de biens, qui reste localisée dans le pays d’origine).

En ce qui concerne la livraison d’un bien par un fournisseur établi hors de Belgique mais dans
le territoire de la TVA, le principe est qu’il n’y a pas de TVA belge en raison de la localisation
dans le pays d’origine (CTVA, art. 14, §2, al. 1er). Par exemple, un belge va faire ses courses
dans un supermarché français. Il existe un correctif général (pour toutes les catégories
d’assujettis ou non – voir infra) en cas de livraison avec installation ou montage. Par exemple,

90
je commande une nouvelle bibliothèque en France et quelqu’un doit venir la monter en
Belgique. Il y a alors une modification de la règle de localisation en faveur du pays de
destination (CTVA, art. 14, §3) et donc la TVA belge s’applique. Si le fournisseur n’est pas
établi en Belgique et que le client l’est (et est tenu de déposer des déclarations périodiques), il
y a une autoliquidation de la TVA, à savoir que la TVA est due par le client (CTVA, art. 51,
§2, al. 1er, 5°).

Il y a également un correctif lorsque le client est un particulier. La règle de localisation dans le


pays d’origine va s’appliquer de manière assez large. Mais en ce qui concerne la livraison
portant sur un moyen de transport neuf, on parle alors d’acquisition intracommunautaire de
biens en Belgique (voir régime supra). Un autre correctif du particulier vise les ventes à distance
intracommunautaires de biens. Il s’agit de « livraisons de biens expédiés ou transportés par le
fournisseur ou pour son compte, y compris lorsque le fournisseur intervient indirectement dans
le transport ou l’expédition de biens, à partir d’un État membre autre que celui d’arrivée de
l’expédition ou de transport à destination de l’acquéreur » (CTVA, art. 1er, §19, in limine). Ce
régime a lieu seulement en l’absence de vente avec montage ou installation et pour les biens
autres que les moyens de transport neuf (CTVA, art. 1er, §19, 2°). En effet, la TVA belge est
déjà due sur la base des deux correctifs précédents. Il y a une modification de la règle de
localisation en faveur du pays de destination (CTVA, art. 15, §1er, al. 1er, 1°) et donc une
application de la TVA belge. Il y a par contre une règle de minimis qui est que la livraison de
biens reste localisée dans le pays d’origine lorsque les ventes à distance intracommunautaires
de biens, cumulées aux prestations de services visées à l’art. 21bis, §2, 9°, al. 2, b, du CTVA
(sur ces services, voir infra), n’excèdent pas un seuil annuel de 10k lors de l’année civile en
cours et lors de l’année précédente (sous certaines conditions et sauf exercice de l’option
contraire par le fournisseur) (CTVA, art. 15, §1er, al. 2).

Il existe un correctif aussi lorsque le client est assujetti ou une personne morale non assujettie.
Elle concerne l’acquisition intracommunautaire de biens en Belgique et donc la TVA belge
s’applique (CTVA, art. 3bis et 25ter, §1er, al. 1er). Et elle a lieu seulement en l’absence de
livraison avec montage ou installation (CTVA, art. 25ter, §1er, al. 1er). En effet, la TVA belge
est déjà due dans ces cas en vertu du premier correctif examiné. Il y a une règle de minimis pour
le « groupe des 4 » ou la « bande des 4 ». Il y a une dénomination informelle visant l’assujetti
« petite entreprise » qui bénéficie de la franchise de la taxe, l’assujetti exploitant agricole,
l’assujetti exonéré et la personne morale non assujettie (CTVA, art. 25ter, al. 2, 2°, a). Il n’y a
pas d’imposition lorsque les acquisitions intracommunautaires de biens n’excèdent pas un seuil
annuel de 11200€ lors d’une année civile en cours et lors de l’année précédente (CTVA, art.
25ter, al. 2, 2°, b et c, première phrase) sauf en cas d’exercice de l’option contraire par le client,
qui est présumée lorsque celui-ci communique son numéro de TVA au fournisseur pour faire
une acquisition intracommunautaire de biens (art. 25ter, al. 2, 2°, c, seconde phrase, et al. 4).
Cette règle de minimis ne vaut pas pour les moyens de transport neufs et les produits soumis à
accise (CTVA, art. 25ter, al. 2, 2°, in limine). Pour ce qui est des moyens de transport neufs,
c’est comme pour les particuliers (voir supra) et pour les « produits soumis à accise », il faut
aller voir le CTVA, art. 1, §6, 4°). Le régime des ventes à distance intracommunautaires de
biens est susceptible de s’appliquer, comme pour les particuliers (CTVA, art. 1er, §19, 1°).

En ce qui concerne maintenant la livraison d’un bien (de Belgique) à un client établi hors
Belgique, mais dans le territoire TVA, la TVA belge s’applique en principe étant donné que la
livraison de biens est localisée dans le pays d’origine (CVTA, art. 14, §2, al. 1er). Il y a un
correctif général en cas de livraison avec installation ou montage. La localisation de la livraison
de biens se fait à l’étranger et donc la TVA belge ne s’applique pas (CTVA, art. 14, §3). Il y a
par contre un maintien du droit à déduction car l’opération donnerait droit à déduction si elle
avait été localisée en Belgique (CTVA, art. 45, §1er, 3°).

91
Il existe également des correctifs lorsque le client est un particulier. La livraison de biens
demeure localisée en Belgique mais il y aura une acquisition intracommunautaire à l’étranger.
Il y a une exonération corrélative de la livraison de biens en Belgique (CTVA, art. 39bis, al. 1er,
2°). On maintient le droit à la déduction (CTVA, art. 45, §1er, 2°) (mais elle s’oppose à
l’exonération dans un contexte interne de l’art. 44 du CTVA). Pour la cas de la vente à distance
intracommunautaire de biens, la livraison de biens est localisée en principe à l’étranger, selon
un régime symétrique à celui que nous avons vu dans le cas où le client est établi en Belgique
et le fournisseur est établi à l’étranger, mais dans le territoire de de la TVA (CTVA, art. 15, §2).
Il y a une possibilité pour le fournisseur de recourir au régime du « guichet unique » (ou
« OSS » pour « One-stop-shop ») et la déclaration et le paiement de la TVA étrangère se fait en
Belgique (CTVA, art. 58quater). La livraison de bien, quoique demeurant en localisée en
Belgique, est exonérée (CTVA, art. 39bis, al. 1er, 1°), en corollaire de l’imposition à l’étranger
de l’acquisition intracommunautaire de biens. Il y a un maintien du droit à la déduction (CTVA,
art. 45, §1er, 2°) (à l’inverse de l’exonération dans un contexte interne de l’art. 44 du CTVA).

Il existe également un correctif lorsque le client est un assujetti ou une personne morale non
assujettie. L’assujetti se retrouve parfois en situation de crédit de TVA structurel. En effet, il
s’agit du cas où la TVA déductible est supérieure à la TVA belge collectée. Il y a donc une
possibilité, selon diverses procédures, d’obtenir la restitution de l’excédent. Il y a par contre un
risque de fraude pour les fiscs nationaux ce qui implique une exonération encadrée. En effet, il
faut :

- Une preuve que le bien a été effectivement transporté vers un autre État membre
(CTVA, art. 39bis, al. 1er, 1°, in limine).
- L’identification du client à la TVA dans cet autre État membre (CTVA, art. 39bis, al.
1er, b, premier tiret).
- La communication de ce numéro de TVA au fournisseur (CTVA, art. 39bis, al. 1er, b,
second tiret).
- Le fournisseur doit déposer un relevé des opérations intracommunautaires contenant les
informations requises concernant la livraison (CTVA, art. 39bis, al. 2, et 53sexies, §1er).

Maintenant, on va parler de l’importation et de l’exportation d’un bien. L’importation d’un bien


est une opération imposable déjà examinée supra. L’exportation d’un bien est quant à elle la
livraison d’un bien à une personne établie hors du territoire TVA. Il faut que la livraison soit
localisée en Belgique (CTVA, art. 14, §2, al. 1er), mais il y a une exonération (CTVA, art. 39,
§1er, 1°, et 2°). Il y a un maintien du droit à la déduction (CTVA, art. 45, §1er, 2°) (qui n’est pas
l’exonération dans un contexte interne de l’art. 44 du CTVA).

Pour terminer, on va examiner les prestations de service. D’abord on va examiner celles au


bénéfice d’un autre assujetti. Ce sont des prestation dénommées communément « B to B », pour
« business to business ». Il y a une large notion d’assujetti pour les besoins de cette disposition
(CTVA, art. 21, §1er). En règle générale, on se base sur l’endroit où le preneur de services a
établi le siège de son activité économique (CTVA, art. 21, §2). Par contre, on applique le régime
de l’autoliquidation lorsque le prestataire n’est pas établi en Belgique (CTVA, art. 51, §2, al.
1er, 1°). Il y a par contre des exceptions en ce qui concerne ces prestations qui concernent celle
relatives à un bien immeuble par nature, puisqu’on se base alors sur l’endroit où le bien est situé
(CTVA, art. 21, §3, 1°). Même chose pour la prestation de restaurant ou de restauration
puisqu’on se base sur l’endroit où la prestation de service est matériellement exécutée (en
principe) (CTVA, art. 21, §3, 4°).

Pour ce qui est des prestations de service au bénéfice d’un non assujetti, elles sont dénommées
communément « B to C », pour « business to consumer ». En règle général, on se base sur

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l’endroit où le prestataire de service a établi le siège de son activité économique (CTVA, art.
21bis, §1er). Il y a des exceptions en ce qui concerne la prestation relative à un bien immeuble
par nature puisqu’on se base alors sur l’endroit où est situé le bien (CTVA, art. 21bis, §2, 1°)
ou encore la prestation de restaurant ou de restauration puisqu’on se base sur l’endroit où la
prestation de service est matériellement exécutée (en principe) (CTVA, art. 21bis, §2, 6°). On
a également comme exception celle de l’endroit où le preneur de services est établi pour les
services fournis par voie électronique, les services de télécommunication et les services de
radiodiffusion et de télévision (CTVA, art. 21bis, §2, 9°, al. 1er). On applique le régime du
« guichet unique » pour le fournisseur (voir supra). Par exception, il y a également une règle
de minimis. Les services au bénéfice d’un non assujetti établi dans le territoire TVA mais dans
un autre État membre restent localisés à l’endroit où le prestataire de services est établi, sous
certaines conditions et sauf option contraire de celui-ci, lorsque cumulés aux ventes à distances
intracommunautaires de biens, ils n’excèdent pas un seuil annuel de 10k lors de l’année civile
en cours et lors de l’année précédentes (CTVA, art. 21bis, §2, 9°, al. 2 et al. 4). La dernière
exception à connaître est le fait qu’on se base sur l’endroit où le preneur de services est établi
lorsque celui-ci est établi en dehors du territoire TVA pour les prestations visées à l’article
21bis, §2, 10°, du CTVA (la prestation visée sub h ne fait pas partie de la matière d’examen !).

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