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gage est figuré, et ne signale rien de plus qu'une vigoureuse opposition au

péché, alors le verset n'influe pas sur la datation du livre. Mans même si l'on von

dans la phrase, ce qui est d'ailleurs le plus naturel, une reference à la mort de

martyrs, il est excessivement difficile d'en tirer des conclusions incontestées

On pourrait, par exemple, en déduire qu'il faut exclure l'Eglise de Rome pen

dant ou immédiatement après la persécution de Néron, car des chrétiens, à

cette époque, perdirent la vie. Ce qui pourrait suggérer une date antérieure à la

persécution de Néron (64 apr. 1.-C.). D'un autre côté, on pourrait supposer que

cette parole fut écrite à des croyants d'un autre endroit de l'Empire, qui avaient

appris que leurs frères avaient déjà souffert sous Néron, mais qui n'avaient pas

eux-mêmes fait face à une telle opposition. Dans ce cas, le livre aurait été écrit

après Néron. Des arguments analogues ont été avancés à propos du règne de

Domitien. Il faut ajouter que l'opposition de la synagogue, qui éclata sporadi

quement ici et là, à chaque décennie du 1 siècle (à partir de 30 apr. 1-C), rend

plutôt risqué l'usage d'Hébreux 12.4 en faveur d'une date précise

5. L'un des arguments les plus couramment invoqués repose sur la présence

de verbes au présent, en rapport avec le rituel (7.8; 9.6-7, 9, 13, 15.10). Dans les

traductions, le texte se lit comme si les cérémonies se poursuivaient au moment

où l'auteur écrit. Mais le raisonnement contient deux failles. Premièrement, en

grammaire grecque, le présent, même à l'indicatif, ne fait pas nécessairement

référence au moment présent. Même les approches traditionnelles de la gram

maire grecque relèvent la fréquence de ce que l'on appelle le présent historique

grec; dans une approche linguistique plus avancée, prenant en compte la théo

rie de l'aspect, on doutera même que le présent (morphologique) ait une

quelconque influence directe sur le moment de l'action Deuxièmement, Cle


ment de Rome, écrivant après la destruction du Temple, utilise le présent pour

décrire un rituel analogue (1 Clément 41); de même, losèphe fait alterner le

présent et le passé dans sa discussion du tabernacle et de ses ustensiles (A/ IV,

102-150), ainsi que des vêtements des prêtres (A/ IV, 151-187). Certains font

aussi remarquer que l'épitre aux Hébreux ne mentionne jamais spécifiquement

le Temple; elle se concentre sur le tabernacle biblique. Cela laisse penser

(disent-ils) que la destruction du second Temple n'aurait pas beaucoup inté

ressé l'auteur; le silence, donc, quant à sa destruction, n'est pas une preuve de

l'ancienneté du texte.

Mais même si l'argument linguistique n'est pas décisif, sous une autre forme,

il a davantage de poids. Lorsque losèphe, par exemple, décrit le tabernacle, sex

ustensiles et les vêtements sacerdotaux, il n'entre pas dans un raisonnement

théologique sur leur obsolescence, leur remplacement complet par les réalités

correspondantes de la nouvelle alliance-idée qui est au coeur même du raison

nement de l'épitre aux Hébreux. Lorsque l'auteur de l'épitre aux Hébreux cite

la prophétie de Jérémie à propos de la nouvelle alliance (Ir 31.31-34; He 8.7-

12), il en déduit qu'en appelant cette alliance nouvelle, le Seigneur, par lérémie,

30. Stanley E. Porter, Verbal Aspect in the Greek of the New Testament, SDG 1. Bere P Lang

en année. Si elle l'avait pa

continuait à offrir des sacrifices

e percevait pas une continuité fonda

me ce fut le cas en 70 ape. 1-C), il serait

revite de le signaler. Comme

difficile de comprendre comment il pourrait a

Findique Landes de maitresse de sa théorique est d'établir le caractère de


ce du Christ, et d'empêcher ses lecteurs de revenir

lequel il avaient rompu en devenant chrétiens. Si les

ement aurait été présenté

gument du silence, mais l'ar

poids etant donné la nature de la polémique de l'écrit, on aurait

ain'y a que silence; il est difficile d'imaginer com

pa gander un tel silence s'il écrivait après la destruction du

datation de l'epire aux Hébreux antérieure à 70

faveur d'une datation tardive repose sur la

da la trajectoire de développement du christianisme

sont prenda, par exemple, que la christologie de l'épitre aux

correspondait au même genre de haute christo

exemple, celle de Luc-Actes, de 1 Pierre ou des Pastorales, écrits

quemment dates de 75-90. Toutefois, il faut rappeler que la datation

duae, et que de nombreux spécialistes proposent

70 pour l'un ou l'autre d'entre eux. De plus, et c'est plus

important encore la christologie d'Hebreux 1.1-3 n'est certainement pas plus

1 Corinthiens 8.6, Philippiens 2.6-11, ou

Colossi 1.15-20 Or Timmense majorite des spécialistes reconnaissent que

70 et beaucoup d'entre eux pensent même qu'ils re-

propaulinienne

présentent une pense

Ainsi, même si l'on ne peut exclure avec certitude aucune date de la fourchette

60-100 apr. J.-C., le poids des données favorise une date antérieure à 70",
DESTINATAIRES

Puisque l'auteur fait référence à des expériences de la vie de ses lecteurs (p. ex.

en 10.32-34), on a de bonnes raisons de supposer qu'il vise un groupe précis.

De nombreux commentateurs anciens, et certains modernes, pensaient que les

destinataires vivaient en Palestine, peut-être même à Jérusalem. Ce point de

vue s'appuie sur les fréquentes mentions du culte. L'absence de toute allusion

au Temple (par opposition au tabernacle), cependant, affaiblit légèrement cette

thèse. L'épitre est écrite dans un grec élégant, et aucune des citations et allusions

vétérotestamentaires ne dépend indiscutablement de l'hébreu ou de l'ara-

méen: on doit en déduire que l'auteur ne connaissait pas la langue sémitique,

ou que ses lecteurs, s'ils étaient à Jérusalem, étaient tous des expatriés, des gens

de langue grecque, qui avaient choisi de vivre à Jérusalem ou dans les environs.

Quoi qu'il en soit, de nombreux Juifs de divers lieux de l'Empire visitaient lé-

rusalem lors des grandes fêtes, en particulier lors de la Pâque. Les Juifs qui vi-

vaient hors de Palestine mais qui s'en référaient néanmoins au culte de Jérusa-

lem pour les questions de purification et de relation avec Dieu étaient donc très

nombreux. Il est en fin de compte difficile de percevoir quelles sont les données

du livre qui privilégient Jérusalem ou la Palestine au détriment d'autres lieux de

l'Empire.

Bien que beaucoup d'autres destinations candidates aient été avancées, dont

Alexandrie, Antioche, la Bithynie et le Pont, Césarée, Colosses, Corinthe,

Chypre, Ephèse et Samarie, la seule autre suggestion qui s'est acquise un certain

soutien est celle de Rome". Dans la littérature qui nous est parvenue, c'est le

premier lieu dans lequel l'épitre est connue (dans les écrits de Clément de

Rome; voir la section Origine», supra). Que l'Eglise romaine, et l'Occident en


général, aient mis autant de temps à l'attribuer à Paul pourrait soutenir l'idée

selon laquelle on y disposait d'informations comme quoi elle n'avait pas été

écrite par l'apôtre. Comme nous l'avons vu, ce point de vue suppose que ceux

-d'Italie (1 13.24, NBS) soient des Italiens qui avaient quitté leur patrie et

qui, au moment de la rédaction, vivaient ailleurs comme Priscille et Aquiles

le gre permet cette interprétation Harnack" et Manson" ont tenté d'intégrer

cette théorie a l'histoire primitive du christianisme de Rome, Harnack avançant

Thepothèse que les destinataires faisaient partie d'une Eglise de maison, a

Rome, et Manson envisageant une faction conservatrice judéo-chrétienne de

cette même ville; leurs théories ont été reprises et amplifiées par de nombreux

Rome constitue en effet une hypothèse intéressante. Mais il ne s'agit de guère

plus qu'une hypothèse. Heureusement, peu de questions exégétiques dé

pendent de la localisation géographique des destinataires. La situation que met

en lumière cette épitre est de loin plus importante.

BUT

L'étude du but de l'épitre aux Hébreux est inextricablement liée à la compré-

hension que l'on a de l'identité des destinataires : on ne peut aborder la question

du but sans présupposer à leur propos certains traits caractéristiques, et vice

versa. Dans la plus ancienne forme du texte qui nous soit parvenue, P", le livre

porte le titre de poc Epalous (Pros Hebraious, Aux Hébreux »). Apparem-

ment, Clément d'Alexandrie, qui écrivait en 180 apr. J.-C. environ, connaissait

le livre sous ce titre, puisqu'il indique qu'il a été écrit Eppaiong (Hebraiois, aux

Hébreux ; HE VI, 14, 3-4). La plupart des spécialistes pensent qu'il s'agit d'un

ajout rédactionnel ultérieur, attaché à l'oeuvre par commodité, qui ne doit donc
pas influencer la recherche de l'identité des destinataires. Mais la conclusion est

trop sceptique (cf. les commentaires du chap. 3, supra, à propos de l'auteur de

Matthieu). Quoi qu'il en soit, c'est le contenu du livre qui doit en dernier lieu

définir l'orientation de la discussion, en particulier parce que le titre, même si

l'on admet qu'il est original, n'en est pas moins ambigu (il pourrait par exemple

faire référence à des judéo-chrétiens, dont la langue maternelle était l'hébreu/

araméen (Ac 6.1), ou à des chrétiens qui étaient juifs de naissance, indépen-

damment de leur langue maternelle (Ph 3.5))",

Tous s'accordent pour dire que le livre a été écrit pour des chrétiens, qui sont

exhortés à demeurer fermement attachés à la foi qu'ils confessent (voir p. eL

3.6, 14, 4.14; 10.23). Leur arrière-plan ethnique est plus discuté. Même si le

livre est imprégné d'allusions vétérotestamentaires et de rituels lévitiques, ce

n'est pas pour autant que l'auteur ou les lecteurs sont nécessairement des

judéo-chrétiens, on sait que certains pagano-chrétiens s'étaient immergés dans

l'Ancien Testament grec. On fait souvent remarquer que la connaissance

qu'avait l'auteur du rituel juif, de même que la connaissance qu'il présuppose

chez ses lecteurs, est une connaissance littéraire: elle provient de l'Ancien Tes-

18 Harnack

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