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Article de la semaine

Quelles sont les origines respectives de la démocratie aux États Unis, en


France et au Sénégal ?

Selon Alexis de Tocqueville, l’égalisation des conditions (démocratie) est


universelle et irréversible. Cependant, il ne convient pas non plus de la précipiter
comme en France ni d’être imposé comme au Sénégal. Ces derniers et les États-
Unis apparaissent alors comme des modèles bien distincts.
France : démocratie avec révolution
La révolution fut l’évènement ayant conduit à la démocratie en France. Dans ce
pays, la révolution démocratique s’est opérée dans le matériel de la société, sans
qu’il se fît, dans les lois, les idées, les habitudes et les mœurs, le changement qui
eût été nécessaire pour rendre cette révolution utile. Ainsi nous avons la
démocratie, moins ce qui doit atténuer ses vices et faire ressortir ses avantages
naturels ; et voyant déjà les maux qu’elle entraîne, nous ignorons encore les biens
qu’elle peut donner.1 Tocqueville affirme que la Révolution Française est allée
trop vite : « la démocratie a donc été abandonnée à ses instincts sauvages ». La
révolution ne serait pas nécessaire, ni même utile au progrès de l’égalité. Il indique
à ce propos que si, à partir du XIème siècle, vous examinez ce qui se passe en
France de cinquante en cinquante années, au bout de chacune de ces périodes,
vous ne manquerez point d’apercevoir qu’une double révolution s’est opérée dans
l’état de la société. Le noble aura baissé dans l’échelle sociale, le roturier s’y

A. Tocqueville De la démocratie en Amérique, 1835, p. 16


1
sera élevé ; l’un descend, l’autre monte. Chaque demi-siècle les rapproche, et
bientôt ils vont se toucher. Et ceci n’est pas seulement particulier à la France. De
quelque côté que nous jetions nos regards, nous apercevons la même révolution
qui se continue dans tout l’univers chrétien.2
États-Unis : démocratie sans révolution
L’Amérique nous dit Tocqueville est un pays dans le monde où la grande
révolution sociale (l’égalité des conditions) dont je parle semble avoir à peu
près atteint ses limites naturelles ; elle s’y est opérée d’une manière simple et
facile, ou plutôt on peut dire que ce pays voit les résultats de la révolution
démocratique qui s’opère parmi nous, sans avoir eu la révolution elle-même.3
En Amérique, Si l’état social (la législation et les mœurs) est encore plus
démocratique que la France), nos lois sont donc plus démocratiques que les
leurs. Il explique cette situation par le fait que : En France, la démocratie est
encore occupée à démolir ; en Amérique, elle règne tranquillement sur des
ruines.4 L’état social des Américains est éminemment démocratique. Il a eu ce
caractère dès la naissance des colonies ; il l’a plus encore de nos jours.
L’Amérique présente donc, dans son état social, le plus étrange phénomène. Les
hommes s’y montrent plus égaux par leur fortune et par leur intelligence, ou, en
d’autres termes, plus également forts, qu’ils ne le sont dans aucun pays du
monde, et qu’ils ne l’ont été dans aucun siècle dont l’histoire garde le souvenir.
Sénégal : une démocratie sans révolution mais imposée ou héritée.
Ayant connu la colonisation, le régime démocratique sénégalais est un héritage
colonial. La démocratie telle qu’on la connait au Sénégal est une œuvre
coloniale. Ce qui veut dire que ce régime politique n’est favorisé ni par l’état
social ni par une révolution quelconque mais relève d’une imposition coloniale.
Ce qui nous fait dire que, contrairement en France et en Amérique où la
démocratie s’est opérée dans le matériel de la société, au Sénégal, la démocratie
s’est opérée uniquement dans les lois (imposées) sans en réalité se transposer
dans les idées, les pratiques (sociale et politique), les mœurs. D’ailleurs comme
certains l’affirment avec énergie, l’État en Afrique occidental n’existe pas. En
réalité il y a un héritage d’une administration coloniale centralisée et forte et ce
depuis 1960 à nos jours.

2 Idem, p. 15
3 Idem, p. 20
4
Idem, p. 159

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