Vous êtes sur la page 1sur 12

Revue des Études Grecques

Aristote et Euripide
Mary-Anne Zagdoun

Citer ce document / Cite this document :

Zagdoun Mary-Anne. Aristote et Euripide. In: Revue des Études Grecques, tome 119, Juillet-décembre 2006. pp. 765-775;

doi : https://doi.org/10.3406/reg.2006.4680

https://www.persee.fr/doc/reg_0035-2039_2006_num_119_2_4680

Fichier pdf généré le 19/04/2018


VARIETES

Mary-Anne ZAGDOUN

ARISTOTE ET EURIPIDE

Le sujet n'est pas neuf. Mais il vaut peut-être la peine d'esquisser ici
dans ses grandes lignes une problématique qui n'a cessé de s'enrichir au
gré des publications modernes. Il y a d'ailleurs un paradoxe1 à chercher à
préciser le rôle d'un poète particulier dans la Poétique d'Aristote. La tragédie
n'est-elle pas en effet un être vivant qui se développe selon ses lois et sa
structure propres, sous l'emprise de la nature plus que d'un auteur
particulier, lorsqu'il s'agit du genre même de la tragédie2 ? Préciser la relation de
tel auteur tragique et d'Aristote permet pourtant à la fois de mettre en
valeur des points de la théorie aristotélicienne de la tragédie et d'éclairer
le problème si controversé des sources de cette théorie.
La structure même des pièces, le rôle du chœur et la place du divin
illustrent à plus d'une reprise le décalage entre la théorie aristotélicienne de la
tragédie et toutes les pièces dramatiques en général qui ont survécu3. On
peut y ajouter l'absence de la cité dans la Poétique, alors que les tragédies

1 II a été souligné en particulier par St. Halliwell, Aristotle's Poetics2 (1986), 1998,
Londres, pp. 94-96.
2 Voir Poét. 23, 1459 a 17-21 et D. Gallop, « Animals in the Poetics », dans Oxford
Studies in Ancient Philosophy 8 (1990), J. Annas éd., pp. 145-171. Si Poét. 4, 1449 a
15-19, souligne le rôle d'Eschyle et de Sophocle dans le développement de la tragédie,
en 1449 a 24, c'est la nature elle-même qui trouve le mètre approprié à la lexis de
la tragédie.
3 La négligence de l'élément lyrique et le rôle du divin dans la théorie
aristotélicienne de la tragédie sont unanimement reconnus, voir M. Husain, Ontology and the
Art of Tragedy, State University of New York, 2002, p. 122, n. 3.

REG tome 119 (2006/2), 765-775.


766 MARY- ANNE ZAGDOUN [REG, 119

d'Euripide sont imprégnées de l'esprit de leur temps et très ouvertes aux


réalités politiques d'Athènes. Après avoir exprimé une certaine forme
d'admiration pour Euripide, Aristote nous apparaîtra comme un de ses
détracteurs, passant sous silence certains aspects de la tragédie d'Euripide, qui
n'entraient pas dans sa théorie.
Aristote est très partagé en ce qui concerne Euripide. Du point de vue
de la scène et des concours, il considère Euripide, avec la fin malheureuse
donnée à ses pièces, comme étant le plus tragique des poètes4. Cette remarque,
sur laquelle nous ne pouvons plus nous prononcer, s'applique à l'ensemble
de l'œuvre d'Euripide, en grande partie perdue aujourd'hui. Elle est
d'autant plus curieuse qu'Euripide ne fut couronné que quatre fois au cours de
sa carrière5. Elle montre du moins le succès populaire d'Euripide, qui influença
nombre de ses successeurs et dont les pièces furent souvent reprises au
IVe siècle6. Aristote se place ici du point de vue du public, auquel il fait
confiance. On renverra ici au passage célèbre et souvent commenté du
livre III de la Politique7 où Aristote montre qu'au théâtre le jugement de
la foule a plus de valeur que l'appréciation des experts8.
Pour en revenir à la remarque d' Aristote sur la qualité tragique
d'Euripide, elle paraît également surprenante d'un autre point de vue. Aristote
admire en effet particulièrement Ylphigénie en Tauride d'Euripide, qu'il cite
à plusieurs reprises, le plus souvent sous le titre d'Iphigénie9. Or VIphigénie
en Tauride a une fin heureuse, contrairement à l'ensemble des pièces
d'Euripide, contrairement aussi à Y Œdipe Roi de Sophocle10, tant admiré par
Aristote et qui illustre de façon exemplaire la destinée même du héros
tragique, un homme « intermédiaire », qui tombe du bonheur dans le malheur11.
On a très souvent opposé le chapitre 13 de la Poétique, dont les exigences
sont illustrées par YŒdipe Roi de Sophocle et le chapitre 14, dans lequel
la fin heureuse de la tragédie est assurée par une reconnaissance antérieure
à l'acte tragique, ce qu'illustrent particulièrement bien Ylphigénie en Tauride
et une autre pièce d'Euripide, aujourd'hui fragmentaire, le Cresphonte12. Cette

4 Poét. 13, 1453 a 23-30.


5 Voir P. Decharme, Euripide et l'esprit de son théâtre, Paris, 1893, p. 14.
6 Sur la fortune d'Euripide, voir P. Decharme, op. cit., pp. 18-24. Sur l'influence
et la fortune d'Euripide au IVe siècle plus particulièrement, voir G. Xanthakis-
Karamanos, Studies in Fourth-Century Tragedy, Athènes, 1980, pp. 28-34.
7 Pol. Ill, 6, 1281 a 40-1281 b 10. Voir notamment sur ce passage, D. Micalella,
« Giudizio artistico e maturità politica. Una tematica aristotelica », Athenaeum, N.S.,
64 (1986), pp. 127-137.
8 II y a une contradiction apparente entre ce passage de la Politique et Pol. VIII,
7, 1242 a 18-28, qui dénigre la qualité et les goûts d'un certain public. Peut-être faut-
il situer ce dernier passage dans le cadre d'une cité à gouvernement de type dévié,
donc mauvais et dont l'influence sur le public laisse par conséquent à désirer.
9 Poét. 14, 1454 a 7 ; 16, 1454 b 32 ; 17, 1455 b 3.
10 La pièce elle-même est citée à plusieurs reprises dans la Poétique, cf. Poét. 11,
1452 a 32-33 ; 15, 1454 b 7-8 ; 16, 1455 a 18 ; 26 1462 b 2.
11 Poét. 13, 1453 a 7-11.
12 Voir R. Kannicht, Tragicorum Graecorum Fragmenta (TrGF), vol. 5, Euripides,
t. I, Gottingen, 2004, pp. 477-493 (39).
2006] ARISTOTE ET EURIPIDE 767

contradiction a paru insoluble. Elle peut pourtant s'expliquer de plusieurs


façons. Aristote, à plusieurs reprises, classifie les tragédies selon des critères
différents et aboutit ainsi à des classifications qui ne se recoupent pas
toujours. VŒdipe Roi de Sophocle reste un modèle, mais VIphigénie en
Tauride trouve d'autant plus l'approbation d'Aristote qu'elle répond au critère
de la meilleure pièce complexe et qu'elle est parfaite par sa structure même :
histoire qui se déroule de façon vraisemblable, voire nécessaire,
reconnaissance, ici double, qui coïncide de façon parfaite avec le revirement13. On
comprend que le caractère heureux ou malheureux de la fin passe au second
plan. On peut aussi dire qu'Euripide, en terminant ses pièces de façon
malheureuse, suscite davantage la pitié des spectateurs. C'est pourquoi
Aristote le nomme « le plus tragique des poètes ». Dans VIphigénie en Tauride,
Euripide répond mieux à nos désirs secrets. Dans l'un et l'autre cas, il se
montre d'un art supérieur14.
Une autre raison, négligée jusqu'ici, peut expliquer les hésitations
d'Aristote. La fin heureuse d'Iphigénie en Tauride s'explique par l'antériorité de
la reconnaissance qui empêche l'acte tragique, le pathos, de s'accomplir -
ce que ne pouvait qu'approuver Aristote, qui se montre sévère pour tout
ce qui, dans la tragédie, relève du spectacle ou lui est apparenté15. Or qu'est-
ce que le pathos, sinon « une sorte d'intrusion du spectacle dans l'histoire »16,
puisque, source de destruction et de douleur, il se produit en général de
façon visible (εν τω φανερω)17 ? Le pathos, qui constitue avec le coup de
théâtre et la reconnaissance une des parties de l'histoire18, est dans
VIphigénie en Tauride atténué par la reconnaissance, puisque celle-ci se produit
en premier lieu, empêchant l'horreur de l'acte tragique. Les sentiments de
pitié et de crainte auront atteint leur point de plus forte intensité dans
l'attente de l'irréversible, sans que l'auteur n'ait eu à sacrifier à la part du
.

spectacle tragique. On comprend dès lors qu'Aristote ait aimé l'intensité


d'un pathos qui ne va pas à son terme, puisque précédé par la
reconnaissance. Ce type de tragédie évite ainsi la tentation du spectacle19.
Quant au type même de reconnaissance dans la même tragédie, la
reconnaissance d'Iphigénie par Oreste appartient pour Aristote à la meilleure
espèce de reconnaissance, celle qui résulte des faits eux-mêmes20. Plus contes-

13 La reconnaissance est plus dramatique, lorsqu'elle coïncide avec le revirement,


voir Poét. 11, 1452 a 32-33.
14 Voir S.A. White, « Aristotle's Favorite Tragedies », dans Essays on Aristotle's
Poetics, par A. Oksenberg Rorty (éd.), Princeton, 1992, p. 235.
15 Poet. 6, 1450 b 16-20.
16 Voir R. Dupont-Roc et J. Lallot, op. cit. (η. 23), p. 234, η. 4.
17 Poét. 11, 1452 b 11-13. Comme l'indique E. Belfiore, Tragic Pleasures, Aristotle
on Plot and Emotion, Princeton, 1992, pp. 135-137, έν τω φανερφ ne se limite pas à
ce qui se passe sur la scène, mais s'applique aussi à tout ce qui met le pathos sous
les yeux, comme par exemple les récits de messagers.
18 Poét. 11, 1452 b 9-10.
19 Sur cette classification de la tragédie d'après l'ordre respectif de la
reconnaissance et du pathos, voir Poét. 14, 1453 b 29- 1454 a 8.
20 Poét. 16, 1455 a 16-21.
768 MARY- ANNE ZAGDOUN [REG, 119

table est la reconnaissance d'Oreste par Iphigénie car elle est due non aux
faits, mais à un artifice du poète21.
\JIphigénie en Tauride permet aussi à Aristote de montrer au poète
comment il faut travailler. Aristote résume le « schéma général » (τό καθόλου)
de VIphigénie en Tauride, en distinguant la situation de la prêtresse en pays
barbare, obligée de sacrifier à la déesse Artémis tout étranger abordant dans
ce pays, l'arrivée de son frère et la reconnaissance qui apporte le salut22.
L'expression « schéma général »23 est une autre façon de dire l'action, qui
fait partie intégrante de l'histoire, sans toutefois se confondre avec la
totalité de celle-ci. Le « schéma général » peut en effet commencer avant
l'histoire (l'oracle d'Apollon, l'objet du voyage d'Oreste sont en effet « en dehors
de l'histoire », cette expression désignant le lieu par excellence de
l'irrationnel)24. L'histoire elle-même peut s'enrichir d'épisodes qui sont en dehors
de l'action à proprement parler, mais à l'intérieur de l'histoire tragique (folie
d'Oreste, salut procuré par la purification)25.
Histoire et action dans la théorie aristotélicienne de la tragédie ont été
tant de fois étudiées que l'on ne s'y attardera guère ici26. On voudrait
toutefois souligner que l'action et l'histoire se confondent en partie l'une avec
l'autre, comme on l'a vu, et que les deux termes sont pratiquement
synonymes dans certains" passages de la Poétique21. Il faut souligner qu'histoire
et action subissent la transformation de la mimésis pour devenir éléments
d'une œuvre tragique. C'est ce qui leur permet d'être à la fois nécessaires
ou vraisemblables et d'avoir une unité. Ces deux caractéristiques ne se
retrouvent pas dans les événements de la vie qui n'ont souvent aucun rapport les
uns avec les autres28. On voudrait aussi introduire ici la distinction toute
moderne, mais si utile, de l'action et de l'histoire avec l'intrigue, celle-ci
comprenant tous les procédés, dont la péripétie et la reconnaissance, qui
relèvent de la technique dramatique pure. Pour reprendre une expression
heureuse d'A. Rivier, l'intrigue est « l'armature extérieure » de la pièce29.
L'intrigue, ainsi définie, n'en est pas moins essentielle à l'action d'une tragédie.
Il est en effet possible, comme on l'a souvent remarqué, de résumer d'une
façon identique deux pièces d'Euripide, VHélène et Ylphigénie en Tauride.

21 Poét. 16, 1454 b 32-37. Le chapitre 16 n'est probablement qu'une addition tardive,
voir G. Else, Aristotle's Poetics: The Argument, Cambridge (MA), 1957, pp. 484-485,
mais il reste dans la tradition aristotélicienne en affirmant la suprématie d'un
agencement nécessaire ou vraisemblable des faits. Sur le nombre controversé des types de
reconnaissance, voir E. Belfiore, op. cit., Princeton, 1992, p. 154-155.
22 Poét. 17, 1455 a 34-1455 b 12.
23 Cette expression est de R. Dupont-Roc et J. Lallot, Aristote, La Poétique, Paris,
1980, p. 93, 1. 35 et 37. Sur le « schéma général », voir ibid., pp. 286-288, n. 8.
24 Poét. 24, 1460 a 27-31.
25 Poét. 17, 1455 b 14-15.
26 On se contentera ici de renvoyer à S. Klimis, Le statut du mythe dans la Poétique
d 'Aristote. Les Fondements philosophiques de la tragédie, Bruxelles {Cahiers de
Philosophie ancienne, n° 13), 1997.
27 Poét. 9, 1451 b 33 et 11, 1452 a 37.
28 Ce point a été développé en particulier par R. Bittner, « One Action », dans
Essays on Aristotle's Poetics, par A. Oksenberg Rorty (éd.), Princeton, 1992, pp. 97-
110.
29 Voir A. Rivier, Essai sur le tragique d'Euripide2, Paris, (1944), 1975, p. 114, n. 4.
2006] ARISTOTE ET EURIPIDE 769

Mais c'est au prix de certains choix et de certains aménagements. Comme


le fait remarquer très justement E. Belfiore qui reprend ce résumé pour
l'analyser, un tel résumé transforme les deux pièces en tragédies de
caractère, mettant l'action dans la dépendance du caractère, alors qu'Aristote
prône à maintes reprises la suprématie de l'action sur toutes les autres
parties qualitatives d'une tragédie30. D'autre part, un tel résumé ne tient
aucun compte de ce qui, pour Aristote, fait l'intérêt même de VIphigénie en
Tauride : la parenté exacte qui unit Iphigénie à Oreste et la reconnaissance
qui permet à Oreste d'être sauvé31.
Le « schéma général » de VIphigénie en Tauride ne comporte aucun nom.
C'est au moment où l'on donne des noms aux personnages qu'il faut
introduire les épisodes et développer l'histoire32. Au sens étroit du terme,
l'épisode est une partie quantitative de la tragédie, formant un tout et qui se
situe entre deux chants du chœur, formant également un tout33. Mais
Aristote connaît aussi un sens plus large du terme34. Comme exemples
d'épisodes au sens moderne d'actions incidentes rattachées à l'action principale,
Aristote désigne pour VIphigénie en Tauride la folie d'Oreste et le salut
procuré par la purification. Les épisodes sont ici appropriés, car ils
complètent l'action de la pièce. Ils enrichissent l'action, sans donner lieu à des
scènes spécifiques. Ils orientent l'action qu'ils étoffent. Dans le cas de
VIphigénie en Tauride, les faits qui relèvent de l'épisode (folie d'Oreste, salut
procuré par la purification) sont mentionnés dans la pièce, mais se
déroulent « en dehors de l'histoire » et font l'objet d'un récit, pour la folie, et,
en ce qui concerne la purification, d'une annonce d'Athéna dans Vexodos.
Les épisodes sont ici liés à la particularité du nom d'Oreste et l'on sait
qu'Aristote, s'il ne défendait pas d'inventer des personnages nouveaux ou
de représenter des histoires inédites, pensait qu'il n'était pas possible de
déformer les histoires traditionnelles35.
Mais si Euripide est pour Aristote le plus tragique des poètes, il commet
plus d'une faute dans l'organisation même de ses pièces36. Cette remarque
laconique devient plus claire lorsqu'on regarde la nature des pièces
d'Euripide. Ce travail a été fait de façon minutieuse par W. Soffing37 auquel nous

30 Voir par ex. Poét. 6, 1450 a 15.


31 E. Belfiore, « Aristotle and Iphigenia », dans Essays on Aristotle's Poetics, par
A. Oksenberg Rorty (éd.), Princeton, pp. 360-362. Elle donne au mot « intrigue » un
autre sens qu'ici, mais cela n'affecte pas le déroulement de son raisonnement.
32 Poét. 17, 1455 b 12-15.
33 Poét. 12, 1452 b 20-21.
34 K. Nickau, « Epeisodion und Episode. Zu einem Begriff der aristotelischen
Poetik », Museum Helveticum 23 (1966), pp. 155-171. Pour l'histoire simple à épisodes
(ni vraisemblables, ni nécessaires), voir Poét. 9, 1451 b 33-35. Comme le remarque
K. Nickau, loc. cit., p. 166, Aristote donne toujours à l'épisode un sens péjoratif,
lorsqu'il emploie l'adjectif έπεισοδιώδης, à épisodes.On reverra à M. Heath, Unity in Greek
Poetics, Oxford, 1989, pp. 49-55, pour un exposé clair sur les différentes nuances
d'« épisode » dans la Poétique, selon qu'il s'agit de l'épopée ou de la tragédie.
35 Poét. 14, 1453 b 19-26.
36 Poét. 13, 1453 a 28-30.
37 W. Soffing, Deskriptive und Normative Bestimmungen in der Poetik des Aristo-
teles, Amsterdam, 1981, pp. 234-260.
770 MARY- ANNE ZAGDOUN [REG, 119

renvoyons, nous contentant de retenir ici les grandes lignes qui se dégagent
de son étude. Parmi les pièces d'Euripide qui nous sont parvenues, la tragédie
des Bacchantes est la seule à répondre aux critères d'Aristote pour une
bonne tragédie, tels qu'il les a formulés au chapitre 13 de la Poétique et
qu'il retrouve dans V Œdipe Roi de Sophocle. La structure des Bacchantes
est en effet complexe, comme dans les meilleures tragédies38, c'est-à-dire
qu'elle comporte péripétie et reconnaissance. Penthée est le type même de
« l'homme intermédiaire », qui, à la suite d'une faute (hamartia), tombe du
bonheur dans le malheur39. La tragédie des Bacchantes présente ainsi plus
d'un trait qui la rapproche de VŒdipe Roi de Sophocle, une des pièces
considérées comme un modèle par Aristote40. Pour la plupart, les pièces
d'Euripide ne se conforment pas à ce modèle. Elles ne sont que rarement
fondées sur une faute tragique41, Yhamartia n'existant pratiquement plus dans
la tragédie d'Euripide42. Un certain nombre de ses pièces n'observe pas la
règle de l'unité d'action, mais met en scène deux actions différentes43.
Certaines tragédies n'ont pas d'action du tout, mais sont construites comme
une succession d'épisodes44. Certaines de ses tragédies sont de type simple45,
alors qu' Aristote préférait les tragédies complexes. Seules huit tragédies —
en comptant la tragédie des Bacchantes déjà mentionnée — sont de type
complexe, avec péripétie et reconnaissance et encore certaines d'entre elles
comportent des manquements importants aux règles aristotéliciennes46.
D'autres critiques d'Aristote sont plus explicites. L'intrusion d'un élément
irrationnel dans une tragédie affaiblit le caractère nécessaire ou
vraisemblable de l'action et elle est par conséquent à condamner. Ainsi, l'arrivée à
Corinthe d'Egée dans la Médée d'Euripide est inespérée pour l'héroïne, elle
vient à point nommé, sans que rien dans l'action ne la justifie47. Les
messagers des jeux pythiques dans Electre constituent également un élément
irrationnel48. De même, le recours au deus ex machina auquel Euripide fait
appel à plus d'une reprise dans ses tragédies pour dénouer le plus souvent

38 Poét. 13, 1452 b 31-32.


39 Sur cette condition de la tragédie, voir Poét. 13, 1453 a 7-12.
40 Pour un rapprochement détaillé entre les Bacchantes d'Euripide et Y Œdipe Roi
de Sophocle, voir W. Sôffing, op. cit., p. 259.
41 A l'exception des Bacchantes et peut-être de la Folie d'Héraclès, voir W. Soffing,
op. cit., p. 237, tabl. 15.
42 S. Saïd, La faute tragique, Paris, 1978, p. 447, maintient qu'il y a faute tragique
chez Euripide, mais qu'il y a déplacement de la faute tragique sur tous les
personnages d'une pièce, de sorte « qu'il ne reste plus qu'une poussière de fautes diverses ».
43 Hécube, Andromaque, les Suppliantes et la Folie d'Héraclès, voir W. Sôffing,
op. cit., pp. 240-241.
44 Les Héraclides, les Troyennes, les Phéniciennes, voir W. Sôffing, op. cit., pp. 241-
242.
45 Aux trois tragédies mentionnées dans la note précédente, W. Sôffing op. cit.,
pp. 244-246, ajoute Andromaque, les Suppliantes et Médée, voir Poét. 14, 1453 b 27-
29 (tragédie sans reconnaissance) et, non sans quelques restrictions, Hippolyte, Oreste
et Iphigénie en Aulide.
46 Ce sont Alceste, Electre, Hélène, Iphigénie en Tauride, Ion, Hécube (dont nous
avons vu le manque d'unité dans l'action) et la Folie d'Héraclès (qui ne présente pas
non plus une action une), voir W. Sôffing, op. cit., pp. 246-255, pour une analyse plus
détaillée.
47 Poét. 25, 1461 b 19-21.
48 Poét. 24, 1460 a 30-31.
2006] ARISTOTE ET EURIPIDE 771

des situations inextricables49 est condamné par Aristote : l'intervention divine


ne se justifie pour Aristote que lorsqu'il s'agit d'exposer les événements
antérieurs au début d'une tragédie — et l'on sait qu'Euripide fait souvent
apparaître les dieux dans le prologue50 de ses pièces — ou à la fin, pour
annoncer des événements que le spectateur ne peut connaître, mais que les
dieux qui savent tout peuvent annoncer51. Comme exemple du mauvais
emploi de la « machine », Aristote cite Médée52, dont Vexodos nous montre
l'héroïne debout sur un char et disparaissant dans les airs, à la fin de son
altercation avec Jason — ce qui est une façon de mettre fin à l'action.
Le caractère de certains personnages d'Euripide donne lieu à la critique
aristotélicienne. Ainsi, Aristote fustige à deux reprises la méchanceté de
Ménélas dans VOreste d'Euripide53, comme étant un trait rapporté, non
nécessaire à l'action. Le caractère (ήθος), qui forme chez Aristote la deuxième
partie qualitative de la tragédie54, ne correspond pas en effet à ce que les
Modernes entendent sous ce nom. Il ne s'agit pas de décrire l'épaisseur
psychologique d'un personnage. Le caractère n'est pas celui d'un individu,
mais plutôt celui d'un type moral. Et les traits de caractère doivent découler
des faits eux-mêmes auxquels ils sont soumis. Ainsi, Aristote condamne Iphi-
génie pour ses pleurs et ses supplications qui en font, dans VIphigénie en
Aulide, un être si différent de ce qu'elle sera par la suite dans cette même
tragédie. Là où un Moderne verrait avec intérêt l'évolution d'un caractère,
Aristote voit la marque d'un caractère inconstant, à proscrire dans une
tragédie55. Les raisons du revirement d'Iphigénie ont donné lieu à de
nombreuses interrogations56. Il faudrait surtout y voir la description d'une
sensibilité qu'Euripide excelle à décrire, comme il décrit les hésitations de
Médée ou de Phèdre, les revirements d'Electre et d'Oreste, après le meurtre
de leur mère dans Electre51. Sans écrire des tragédies de caractère, Euripide,
par sa connaissance du cœur humain et de ses passions, ne se conforme
déjà plus à la définition aristotélicienne du caractère comme simple type
moral et, sans prendre la première place réservée à l'action, ses caractères
montrent tout l'intérêt du dramaturge pour une richesse psychologique toute
nouvelle dans le théâtre grec.
Cet intérêt pour la psychologie des personnages a entraîné Euripide à
mettre en scène des caractères réalistes, avec leurs travers et leurs bassesses
et aussi à montrer des gens simples, tel le Laboureur, époux d'Electre dans
la pièce du même nom. Aristote dit lui-même que, de l'aveu même de
Sophocle, celui-ci peignait les hommes tels qu'ils doivent être et Euripide
les hommes tels qu'ils sont58. Aristote ne pouvait pas approuver Euripide

49 On renverra à A. Spira, Untersuchungen zum Deus ex machina bei Sophocles


und Euripides, Kallmunz, 1960, pp. 85-155.
50 Voir Alceste, Hippolyte, Ion, les Troyennes, les Bacchantes.
51 Poét. 15, 1454 b 2-7.
52 Poét. 15, 1454 a 37-1454 b 1.
53 Poét. 15, 1454 a 28-29 et 25, 1461 b 19-21.
54 Poét. 6, 1450 a 38-1450 b 4.
55 Poét. 15, 1454 a 31-33.
56 Voir D. Sansone, « Iphigeneia Changes Her Mind », Illinois Classical Studies,
pp. 161-172 (avec de nombreux renvois à des hypothèses antérieures).
57 Voir J. de Romilly, La tragédie grecque1, Paris, (1970), 2002, pp. 130-133.
58 Poét. 25, 1460 b 33-34.
772 MARY- ANNE ZAGDOUN [REG, 119

sur ce point, la tragédie devant représenter pour lui des hommes meilleurs
que dans la réalité et la comédie les montrer pires qu'ils ne le sont59. Il y
a donc dans le choix d'Euripide un risque de mélanger deux registres
différents et d'introduire dans la tragédie des éléments comiques, qui ne sont
du reste pas toujours faciles pour nous de comprendre et d'interpréter60. De
même, le rire n'est pas absent des œuvres des deux autres grands Tragiques
et provient souvent, mais pas uniquement, de la mise en scène de gens
humbles, proches de la réalité de tous les jours61.
Parmi les caractères d'Euripide, Aristote critique Mélanippe, qui est
l'héroïne de la Mélanippe savante, une pièce aujourd'hui fragmentaire62.
Mélanippe était raisonneuse, voire philosophe, ce qui pour Aristote est une faute
de convenance chez une femme63. Mélanippe est δεινή, terme que l'on peut
traduire par « éloquente »64 ou « intelligente »65. L'idée de convenance, qui
manque à Mélanippe, est une idée esthétique très répandue chez les Anciens
avant de trouver, sous le nom de decorum, un grand retentissement dans la
morale et l'esthétique stoïciennes d'époque romaine66.
Aristote critique enfin le rôle du chœur chez Euripide : le chœur doit
être considéré comme l'un des acteurs et participer à l'action, à la manière
de Sophocle et non d'Euripide. Aristote condamne l'usage des interludes
(εμβόλιμα) qui n'ont aucun lien avec l'action et qui peuvent indifféremment
figurer dans des tragédies différentes, pratique qu'il faut faire remonter à
Agathon67. Aristote se montre sur ce point un peu sévère pour Euripide et
peu soucieux de différencier les formes variées d'intervention du chœur dans
une tragédie grecque68. On a même pu écrire qu' Aristote est peu sensible
à la place du chœur dans une tragédie grecque : le chœur n'occupe ainsi
aucune place dans le « schéma général », déjà examiné, d'Iphigénie en Tauride,
bien que ses liens avec l'action soient étroits dans cette tragédie69. Le juge-

59 Poét. 2, 1448 a 16-18.


60 Voir par ex. J. Gregory, « Comic Elements in Euripides », dans Euripides and
Tragic Theatre in the Late Fifth Century, M. Cropp, K. Lee et D. Sansone éd.,
Champaign (Illinois), 2000, pp. 59-74.
61 Voir J. Jouanna, « Le sourire des Tragiques grecs », dans Le Rire des Anciens,
Actes du colloque international, M. Trédé et Ph. Hoffmann éd., avec la collaboration
de Cl. Auvray-Assayas, Paris, 1998, pp. 161-176.
62 Voir R. Kannicht, TrGF 5,1, op. cit., pp. 525-536 (44).
63 Poét. 15, 1454 a 23-24 et 31.
64 Voir R. Dupont-Roc et J. Lallot, op. cit., p. 85, 1. 24.
65 St. Halliwell, The Poetics of Aristotle, translation and commentary, Londres, 1987,
p. 47. D'une façon plus générale, δεινός désigne la personne habile qui réalise avec
facilité les moyens d'une fin, mais qui est indifférente à la qualité de la fin {Éthique
à Nicomaque VI, 13, 1144 a 23-29), voir P. Aubenque, La Prudence chez Aristote,
Paris, 1963, pp. 61-62.
66 Voir M.-A. Zagdoun, La Philosophie stoïcienne de l'art, Paris, 2000, pp. 95-97 et
234-235.
67 Poét. 18, 1456 a 25-32.
68 Elles ont été rappelées par ex. par J. Jouanna, « Lyrisme et drame : le chœur
dans YAntigone de Sophocle », Le Théâtre grec antique : la tragédie, Actes du
VIIIe colloque de la Villa Kérylos, sous la présidence de J. Leclant et la direction de
J. Jouanna, Paris, 1998, pp. 103-106.
69 Voir St. Halliwell, op. cit., p. 247.
2006] ARISTOTE ET EURIPIDE 773

ment d'Aristote sur la place du chœur chez Euripide se justifie pourtant :


si le chœur apparaît chez Euripide lié dans l'ensemble à l'action70, Euripide
ouvre la porte71 aux innovations d'Agathon par l'usage qu'il fait du chœur
dans certaines de ses pièces. Aristote ne pouvait admettre cette atteinte à
l'unité de l'action.
Le décalage entre la théorie aristotélicienne de la tragédie et les œuvres
des trois grands Tragiques est particulièrement marqué en ce qui concerne
les dieux. Ceux-ci sont très présents dans la tragédie grecque qui se déroule
très souvent sur deux niveaux, le niveau divin et le niveau humain, de sorte
que l'action peut être expliquée de deux façons différentes, l'universel divin
se manifestant dans le particulier humain72. Ceci est vrai pour Eschyle et
Sophocle, mais aussi partiellement pour Euripide, que l'on songe à Hippo-
lyte, où Aphrodite et Artémis se confrontent l'une à l'autre ou encore à
Hélène, où l'action humaine est rendue possible par la complicité divine73.
Il y a aussi chez Euripide le rôle des dieux, qui apparaissent dans le prologue
des pièces ou à la fin des tragédies. Dans le dernier cas, ce sont souvent,
pour reprendre un terme de J. de Romilly74, des apparitions « plus ou moins
falotes », dont le seul rôle se borne souvent à dénouer commodément une
intrigue devenue inextricable. Beaucoup plus importante, pour l'étude des
dieux dans la tragédie d'Euripide, paraît être leur mention constante, qu'ils
soient critiqués ou aimés, comme dans Hippolyte, de façon quasi mystique.
Sans entrer ici dans le sujet si controversé de la religion d'Euripide, il nous
paraît tentant de voir en lui une âme religieuse et tourmentée75, en même
temps qu'influencée par les idées de son temps et particulièrement des
Sophistes76.
Il n'y a rien de semblable dans la Poétique d'Aristote. Les dieux n'y ont
aucune place, sinon, comme on l'a vu, pour annoncer l'avenir imprévisible
aux hommes ou encore comme élément irrationnel, à situer « en dehors de
l'histoire ». Aristote accepte que les dieux trouvent leur place dans la
religion de la cité, comme dans la poésie77, parce qu'il s'agit là de traditions

70 Voir sur ce point par ex. G.M.A. Grube, The Drama of Euripides, Londres, 1941,
pp. 99-126.
71 Voir M. Hose, Studien zum Chor bei Euripides, vol. 2, Stuttgart, 1991, pp. 404-
413.
72 Voir H.D.F. Kitto, « The Idea of God in Aeshylus and Sophocles », dans La
notion du divin depuis Homère jusqu'à Platon, Vandœuvres-Genève (Entretiens sur
l'Antiquité classique, t. I), 1952, pp. 172-176.
73 Voir F. Chapouthier, « Euripide et l'accueil du divin », ibid., pp. 207-208.
74 Voir J. de Romilly, op. cit., p. 145.
75 Voir A.-J. Festugière, « La Religion d'Euripide », dans L'Enfant d'Agrigente, Paris,
1950, pp. 1-32 ; F. Chapouthier, loc. cit., pp. 205-237. On ajoutera à cette tendance de
la critique l'étude de H. Yunis, A New Creed: Fundamental Religious Beliefs in the
Athenian Polis and Euripidean Drama, Gottingen (Hypomnemata 91), 1988, voir en
particulier le chap. 7, pp. 139-171.
76 Voir D. Conacher, Euripides and the Sophists. Some Dramatic Treatments of
Philosophical Ideas, Londres, 2003 (1998).
77 Voir D. Babut, La religion des philosophes grecs de Thaïes aux Stoïciens, Paris,
1974, p. 126, qui renvoie à Poét. 25, 1460 b 37.
774 MARY-ANNE ZAGDOUN [REG, 119

vénérables et qu'il accorde beaucoup d'importance à la tradition comme


source possible de vérité78. La religion « populaire » reste tout extérieure
pour Aristote et il n'a guère essayé de concilier ses propres vues
philosophiques sur la divinité avec la théologie traditionnelle79.
De même, la cité occupe une place très importante dans l'œuvre
d'Euripide, alors qu'elle est pratiquement absente dans la Poétique. Certaines
pièces d'Euripide sont pleines d'allusions à la vie politique de leur temps80,
à la politique extérieure d'Athènes81. La cité est une réalité chez Euripide,
même s'il met en scène dans Médée82 une héroïne « apatride » et qu'il
s'interroge sur la validité de la cité dans une des reconstitutions modernes du
Philoctète83. Aristote ne donne aucune place à la cité dans la Poétique84,
alors que tragédie et cité ont des liens étroits l'une avec l'autre notamment
dans la Politique.
En conclusion, on peut dire que les mentions d'Euripide85 dans la Poétique
sont suffisamment significatives pour pouvoir opposer à la théorie
aristotélicienne du genre tragique la réalité de l'œuvre d'un dramaturge. On ne
pourra qu'admirer que deux des pièces d'Euripide, les Bacchantes et'VIphi-
génie en Tauride illustrent si parfaitement les chapitres respectivement 13 et
14 de la Poétique. Une théorie ne saurait prendre en compte toutes les
exceptions et toutes les nuances et le mérite d'Aristote est d'autant plus
grand qu'il avait à sa disposition un très grand nombre de pièces86, en grande
partie disparues aujourd'hui. Lorsqu'on regarde les critiques d'Aristote envers
Euripide, on voit qu'elles se ramènent presque toutes à l'exigence d'une
action une, nécessaire ou vraisemblable. Cette exigence, en enlevant toute
contingence au drame, donne à nouveau à la poésie toute sa dignité, mise

78 Voir W.J. Verdenius, « Traditional and Personal Elements in Aristotle's Religion »,


Phronesis 5 (1960), pp. 56-70 et plus particulièrement pp. 56-61.
79 Voir D. Babut, op. cit., pp. 127-135.
80 On peut se contenter de renvoyer ici à G. Zuntz, The political plays of
Euripides, Manchester, 1955, et à M. Borowska, Le Théâtre politique d'Euripide, Varsovie,
1989.
81 Voir notamment É. Delebecque, Euripide et la Guerre du Péloponnèse, Paris,
1951.
82 Voir D. Conacher, « Medea apolis : on Euripides's dramatization of the crisis of
the polis », dans Tragedy, Comedy and the Polis, A.H. Sommerstein {et al.) éd., Bari,
1993, pp. 219-239.
83 Voir C.W. Millier, « Euripides' Philoctetes as a political play », ibid., pp. 241-252.
84 Voir E. Hall, « Is there a Polis in Aristotle's Poetics ? », dans M.S. Silk (éd.),
Tragedy and the Tragic, Greek Theatre and Beyond, Oxford, 1996, pp. 295-309.
85 Et des deux autres grands Tragiques, voir St. Halliwell, Aristotle's Poetics2, Londres
(1986), 1998, pp. 40-41.
86 Trois cents pièces, en considérant uniquement l'œuvre des trois grands Tragiques,
voir St. Halliwell, op. cit., p. 39.
2006] ARISTOTE ET EURIPIDE 775

à mal par les attaques platoniciennes87. La poésie se rapproche de la


philosophie et s'éloigne de l'histoire. Quoi que l'on fasse, l'art d'Euripide se
définira toujours, après Aristote, par rapport à une norme qui est celle de la
Poétique. La démarche du philosophe et celle du dramaturge ne pouvaient
pas se rencontrer sur tous les plans, mais l'une et l'autre ont leur nécessité
et leur grandeur.
Mary-Anne Zagdoun,
CNRS, Paris,
UMR 8167, Centre Lenain de Tillemont.

87 Voir M. Gellrich, Tragedy and Theory. The Problem of Conflict since Aristotle,
Princeton, 1988, pp. 159-162.

Vous aimerez peut-être aussi