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Le goût du néant », prise de notes analyse linéaire

Poème publié dans l'édition de 1861, section « Spleen et Idéal ». Illustration du


« spleen », abandon de l'Idéal.
Une forme originale : 3 quatrains en alexandrins ponctués par un vers isolé mis en
valeur par deux blancs.
Chaque quatrain correspond à une étape progressive : expression générale du Spleen
grâce à une métaphore filée équestre (1er quatrain), l'expression se précise : le
narrateur a perdu le goût de l'amour et du débat intellectuel (2ème quatrain) et enfin
apparaît le thème du temps qui porte celui de la mort.
Comment Baudelaire exprime-t-il la tentation du suicide ?

Premier quatrain : l'état désespéré du poète

Le narrateur s'adresse à lui-même, soliloque pathétique : « Morne esprit » : périphrase


avec adjectif synonyme de tristesse et première synecdoque (la partie à la place d'un
tout)
-L'adverbe « autrefois » : antithèse avec le présent confirmée par la négation
partielle : « ne veut plus » qui s'oppose à l'imparfait « attisait ».
- Métaphore filée en rapport avec le champ lexical équestre pour exprimer le
nihilisme du poète : « éperon », « enfourcher », « vieux cheval », « obstacle » :
l'Espoir, majuscule donc allégorie, est représenté en cavalier qui a quitté le poète, lui
même évoqué par l'image animalisante du « cheval ». Le poète est abandonné par
l'Espoir : victime.
-Autre effet pathétique : le poète aspire au repos, comme s'il se laissait mourir dans
l'injonction  : « couche-toi », il ne parvient pas à avancer : « à chaque obstacle
butte ».

-Le vers isolé qui suit est redondant : nouvelles injonctions à lui-même avec une
périphrase contenant une seconde synecdoque ( « mon cœur ») et à nouveau le thème
du repos avec le mot « sommeil ».

Deuxième quatrain : le poète développe les objets de son nihilisme : l'amour et le


débat

-Il se désigne comme un « esprit vaincu, fourbu » : « vaincu » rappelle la « lutte »


évoquée au premier vers, « fourbu » rappelle le champ lexical équestre : la fourbure,
maladie des chevaux.
-nouvelle périphrase -autoportrait « vieux maraudeur » : répétition de l'adjectif
(« vieux cheval ») : idée de fatigue, « maraudeur » ici renvoie sans doute à son côté
marginal, qui inquiète la société. (Baudelaire n'était pas un voleur).
-Pour traduire son dégoût de tout il utilise un chiasme : les « chants du cuivre »
reprennent le thème de la dispute et « les soupirs de la flûte » reprennent le thème de
l'amour, les éléments sont inversés.
Baudelaire applique sa théorie des correspondances qu'il explique dans son poème du
même nom.
-Dans le dernier vers, il s'adresse aux « plaisirs », apostrophe poétique ; il ne veut
plus y succomber car il sait qu'ils mènent à une impasse.

Le vers isolé qui suit est symbolique de son nihilisme : le « printemps » symbolise le
renouveau, l'espoir, la beauté, mais il a perdu ses charmes « a perdu son odeur ».
Rythme régulier avec 4 accents toutes les 3 syllabes qui sonne comme une plainte :
c'est un tétramètre.

Dernier quatrain : apparaissent les thèmes du temps (comme dans « L'ennemi »,


« L'horloge ») et celui de la mort que le poète appelle de ses vœux
-Le poète utilise une double comparaison introduite par « comme » : deux comparés :
« le Temps » et le pronom « m' » et deux comparants « la neige » et « un corps pris de
raideur ». Le temps conduit inévitablement à la mort. L'élément « neige » annonce le
dernier vers et le froid est un attribut de la mort. A remarquer : l'allitération en M
évoque la dévoration exprimée par le verbe « engloutir » et fait penser à Chronos ou à
Saturne les dieux du temps dans l'antiquité (voir le dessin de Goya). L'assonance en I
est également un effet de mise en valeur.
Le poète a pris du recul par rapport au monde : « je contemple d'en haut », comme s'il
avait déjà rejoint les cieux, il se détache de la vie et renonce à y trouver une place :
« je n'y cherche plus l'abri d'une cahute » : antithèse avec le passé marquée par la
particule négative « plus » ; le terme péjoratif « cahute » illustre bien l'impossibilité
pour le poète de trouver une situation décente dans la société. Les effets sonores sont
nombreux : assonance en I qui revient et harmonie de sons nasalisés en [ON]et [EN]
qui suggèrent la souffrance car ils sont difficiles à prononcer.

Dernier vers isolé qui évoque l'envie d'en finir dans une apostrophe poétique :
apostrophe à une avalanche qui forme un champ lexical avec la présence de la
« neige », suivie d'une question rhétorique. Mise en valeur du dernier mot « chute »
qui constitue justement la chute du poème avec un effet de surprise puisque le poète
appelle la mort de ses vœux.

CCL :
Un poème qui illustre les thèmes baudelairiens du recueil : le spleen est victorieux et
conduit le poète à désirer la mort. Le temps est au centre du poème : il est l'ennemi
qui dévore le poète, le mettant en difficulté pour achever son œuvre.
Cependant la réussite du poème, sa beauté modèrent l'aspect tragique du poème.
L'écriture paraît ici comme une conjuration du spleen : la boue donne bien naissance
à l'or.

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