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Hémophilie

Dr Jérôme KOULIDIATI

OBJECTIFS :
1. Définir l’hémophilie A et B.
2. Décrire les signes cliniques de l’hémophilie
3. Décrire les signes biologiques
4. Décrire le diagnostic de l’hémophilie acquise.
5. Décrire les règles de conduite en milieu médical pour prévenir les
accidents hémorragiques.

PLAN :
Introduction
1. Manifestations cliniques
2. Diagnostic d'une hémophilie
3.Hémophilie acquise
4. Principes du traitement d'un hémophile et surveillance.
Conclusion.

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Introduction
Les pathologies hémorragiques constitutionnelles de la coagulation sont dominées
par l'hémophilie due à un déficit en Facteur VIII (= hémophilie A) ou en Facteur IX (=
hémophilie B). Plus rarement, elles concernent une autre protéine de la coagulation
et sont diagnostiquées à un âge variable, parfois chez l'adulte.
L'hémophilie est due à un déficit en Facteur VIII (hémophilie A), touchant un garçon
pour 5000 naissances, ou à un déficit en Facteur IX (hémophilie B) cinq fois moins
fréquent.
L'hémophilie est transmise selon un mode récessif lié au sexe, les gènes des
facteurs VIII et IX étant localisés sur le chromosome X.
Seuls les garçons sont donc atteints (sauf cas exceptionnel) et les femmes sont
conductrices.
Environ 30 % des cas sont dus à une mutation de novo, sans antécédent familial.
La gravité du syndrome hémorragique dépend de la sévérité du déficit en Facteur
VIII ou Facteur IX : le déficit peut être sévère (taux <1 %), modéré (taux entre 1 et
5 %) ou mineur (taux entre 5 et 30 %). Si le taux de FVIII ou de FIX est compris entre
30 et 50 %, l'hémophilie est dite fruste, car le plus souvent de découverte fortuite et
asymptomatique. En règle, la sévérité de l'hémophilie et le taux de facteur VIII ou IX
sont similaires chez les sujets atteints d'une même famille.
Intérêt thérapeutique : - traitement substitutif
- Thérapie ciblée (EMICIZUMAB/ HA)
- Thérapie génique
Epidémiologie : mode de transmission

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Mode récessif lié chromosome X

néo-mutation dans 1/3 des cas.

Les patients hémophiles majoritairement de sexe masculin.

Les femmes sont dites conductrices du fait de la transmission récessive liée au chromosome X.

Dans 25-30% des cas, il n’y a pas d’antécédents familiaux d’hémophilie : on parle alors d’une néo-
mutation.

Cette mutation nouvellement apparue peut avoir eu lieu dans l’ovule de la mère ou dans le
spermatozoïde du père, ou plus tard chez le foetus lui-même.

Cette mutation sera transmissible à la descendance

Cas particuliers de la femme Hémophile :

 Syndrome de Turner (45, X)

 Père hémophile et mère conductrice

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 Inactivation fortuite pendant l’embryogénèse d’une majorité de X portant l’allèle normal.

Tableau 1 : Caractéristiques des facteurs de la coagulation

Lieu de Vitamine K Concentration


Demi-vie
synthèse dépendant plasmatique
(h)
(mg/l)

Facteur I
Foie Non 2-4 ´ 103 120
(Fibrinogène)

Facteur II
Foie Oui 100-150 80
(Prothrombine)

Facteur V
Foie Non 5-10 24
(Proaccélérine)

Facteur VII
Foie Oui 0,35-0,6 6
(Proconvertine)

Factur VIII (Fact.


Foie + SRH Non 0,1-0,2 12
antihémophilique A)

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Facteur IX (Fact.
Foie Oui 3-5 24
antihémophilique B)

Facteur X
Foie Oui 7-17 48
(Fact. Stuart)

Facteur XI
Foie Non 3-6 60
(Fact. Rosenthal)

Facteur XII
Foie Non 30-40 60
(Fact. Hageman)

Facteur XIII (facteur


stabilisant de la Foie Non 20-30 240
fibrine)

Figure 1 : Schéma récapitulatif de la coagulation.

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1. Manifestations cliniques
Elles sont dominées par les saignements provoqués par un choc parfois minime. Le
diagnostic d'hémophilie sévère se fait habituellement à l'âge de la marche :
• les hémarthroses sont les manifestations les plus typiques : elles touchent surtout
les genoux, les coudes et les chevilles ; récidivantes, elles peuvent entraîner une
arthropathie évolutive dont la forme la plus évoluée est la destruction articulaire avec
malformations et rétractions tendineuses conduisant à une invalidité sévère ;
• les hématomes des tissus sous-cutanés ou affectant les muscles :
– ils peuvent être graves de par leur volume ou leur localisation, avec un risque fonc
tionnel ou vital : hématome du plancher de la bouche (risque d'asphyxie), de la loge
antérieure de l'avant-bras (risque de syndrome de Volkmann), du creux axillaire ou
du creux poplité (risque de compression vasculaire), rétro-orbitaire (risque de cécité),
– un hématome du psoas est parfois difficile à évoquer lorsqu'il est révélateur d'une
hémophilie, pouvant simuler une appendicite aiguë ; le plus souvent il faut avoir
recours à une échographie pour confirmer le diagnostic ;
• les hématomes intracrâniens sont très rares, mais parfois révélateurs chez le
nouveau-né.
2. Diagnostic d'une hémophilie
Il est en règle assez aisé ; associé à la symptomatologie clinique, il repose sur la
mise en évidence :
• d'un allongement isolé du TCA, sans anticoagulant circulant (allongement corrigé
après addition de plasma témoin normal), avec un temps de Quick et temps
d'occlusion plaquettaire sur PFA-100 ou 200 normaux ;
• d'un déficit isolé en Facteur VIII ou Facteur IX (le taux de Facteur XI est normal).

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En cas de déficit en Facteur VIII, il convient aussi de vérifier que le taux plasmatique
de facteur Willebrand est normal (VWF:Ag et Von Willebrand Factor (VWF)
activité >50 %).
3.Hémophilie acquise
3.1. Étiologie
L'hémophilie acquise affecte majoritairement les sujets très âgés ou, plus rarement,
les femmes jeunes dans le post-partum ou à distance d'un accouchement. Dans
50 % des cas, il n'y a pas d'étiologie retrouvée. Un anticorps anti-VIII peut être
associé à une pathologie auto-immune, un cancer ou une hémopathie maligne.
Pour les patients âgés, aucune cause sous-jacente n'est identifiée dans la moitié des
cas.
3.2. Diagnostic
• Le diagnostic d'une hémophilie acquise est évoqué devant des saignements
inexpliqués :
hématomes, ecchymoses, plus rarement hémorragie digestive ou rétropéritonéale,
hématurie chez un patient n'ayant pas d'antécédent hémorragique significatif.
• Le TCA est constamment allongé et non corrigé par l'apport de plasma témoin
normal.
• Le taux de FVIII est diminué (souvent <5 %), parfois effondré (<1 %).
• Les autres paramètres de l'hémostase sont classiquement normaux.
• Dans le plasma du malade, il existe un anticorps anti-facteur VIII : sa recherche doit
être demandée au laboratoire devant toute découverte d'un déficit en facteur VIII
particulièrement chez l'adulte.

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4. Principes du traitement d'un hémophile et surveillance
Tous les hémophiles doivent être suivis par un centre spécialisé et posséder une
carte précisant notamment le type et la sévérité de la maladie, ainsi que le(s)
médicament(s) habituellement utilisé(s) pour traiter et prévenir les saignements.
Les gestes vulnérants (injections intramusculaires), les situations à risque (sports
violents), les médicaments modifiant l'hémostase (aspirine et autres médicaments
antiplaquettaires) sont à proscrire. Toute ponction veineuse ou injection sous-
cutanée (pour une vaccination, par exemple) nécessite une compression prolongée
et un pansement compressif.
Le patient et sa famille doivent bénéficier d'une éducation précise et encadrée afin de
connaître la maladie et les modalités de traitement. De même, un conseil génétique
et une démarche visant à permettre un diagnostic anténatal sont à proposer chez les
conductrices d'hémophilie sévère.
Le traitement substitutif repose sur l'injection de concentrés de Facteur VIII ou de
Facteur IX d'origine plasmatique ou recombinante. Le rythme des injections et la
posologie dépendent de l'indication (saignement, chirurgie ou prophylaxie), du poids
corporel et de la demi-vie du facteur injecté (proche de huit heures pour le Facteur
VIII et douze heures pour le Facteur IX).
Deux risques principaux sont associés à ces traitements substitutifs :
• le risque majeur actuellement est celui d'un inhibiteur anti-Facteur VIII ou anti-
Facteur IX, particulièrement élevé chez l'hémophile A sévère, au décours des
premières injections ; l'inhibiteur est suspecté en cas d'inefficacité du traitement et
systématiquement recherché lors du suivi du patient ;
• le risque infectieux est devenu aujourd'hui exceptionnel, même avec les facteurs
d'origine plasmatique, mais nécessite cependant la surveillance des sérologies
virales (hépatite B, C, et VIH); il est considéré comme nul avec les Facteur VIII et IX
recombinants.

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Chez l'hémophile A, dans les formes mineures, l'utilisation de la desmopressine
(DDAVP) permet souvent de corriger de façon transitoire le déficit en Facteur VIII.
Tout comme pour la maladie de Willebrand, il convient de vérifier que le patient est
bon-répondeur à ce médicament qui n'est utilisable que pour des saignements
mineurs ou des interventions chirurgicales associées à un risque de saignement
relativement faible.
Le traitement d'une hémophilie acquise a deux objectifs :
• contrôler les saignements par des agents court-circuitant l'inhibiteur : le facteur VIIa
d'origine recombinante (rFVIIa, Novoseven®) et le concentré de facteurs activés du
complexe prothrombinique, d'origine plasmatique ;
• inhiber la synthèse de l'anticorps par un traitement immunomodulateur tel que
l'association : corticothérapie et cyclophosphamide ou le rituximab.

Conclusion :
L'interrogatoire est fondamental pour distinguer : les syndromes hémorragiques
secondaires à un trouble acquis d'un déficit constitutionnel ; une maladie de
l'hémostase primaire d'une coagulopathie.
Une hémophilie constitutionnelle sévère affecte le garçon à l'âge de la marche. Le
temps de céphaline + activateur est le meilleur examen de dépistage en objectivant
un allongement.
Une hémophilie acquise peut affecter le sujet âgé ou une femme jeune dans le post-
partum. Le diagnostic est évoqué chez un patient sans antécédent hémorragique par
un syndrome hémorragique associé à un allongement du TCA, non corrigé par
l'addition de plasma normal, et il est confirmé par la mise en évidence d'un taux de
Facteur VIII diminué et par la mise en évidence d'un anticorps dirigé contre le facteur
VIII.

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