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LA GESTION DU RISQUE DE CHANGE

Section 1 : Principes clés

Le risque de change commercial concerne les entreprises effectuant des opérations


commerciales en devises (importations et exportations) ou des opérations de financement
en devises (emprunts, prêts, placements).
Les devises se négocient soit sur le marché des changes au comptant (« Spot »), soit sur le
marché des changes à terme (« Forward »).
Le calcul de la position de change permet de connaître le montant exposé à la hausse ou à la
baisse pour chaque devise utilisée par l’entreprise.
Pour limiter les pertes de change éventuelles, les entreprises disposent de plusieurs moyens
de couverture possibles (opérations de change, options…).

Section 2 : La mesure de l’exposition au risque de change

A) La cotation des devises


Sur le marché des changes, on négocie une devise contre une autre.
Le sens de l’opération (achat ou vente) s’applique sur la devise dite « principale » (la 1ère
citée de la parité). La 2ème devise est dite « secondaire » (ou devise de contre-valeur).
Exemple :

 Achat $/£ : on achète du dollar en l’échangeant contre de la livre sterling ;


 Vendre €/$ : on vend de l’euro en l’échangeant contre du dollar.

La cotation au certain est celle qui indique la quantité de devises obtenue en échange d’1
unité de la monnaie locale (ex. : 1 € = 1,25 $).
La cotation à l’incertain est celle qui indique la quantité de monnaie locale nécessaire pour
obtenir 1 unité d’une devise (ex. : 1 $ = 0,8 €).
Remarque : une cote à l’incertain est égale à l’inverse d’une cote au certain (= 1/cote au
certain), et vice-versa.
Exemple : le 29/08/N, la cotation de l’euro contre le dollar (€/$) est de 1,3592.
- Il s’agit d’une cotation au certain, puisqu’on exprime la quantité de devise pour 1
unité de monnaie locale : 1 € = 1,3592 $.
- Si le lendemain, la parité passe de 1,3592 à 1,3710, le cours de l’euro par rapport au
dollar augmente : on obtient plus de dollars pour 1 € (l’euro « s’apprécie »).

Les cours des devises sont cotés sous forme de fourchette (« spread ») entre :
- le cours « bid » : le cours acheteur pour la banque (le moins élevé) ;
- le cours « ask » : le cours vendeur pour la banque (le plus élevé).
La banque se rémunère sur cet écart.
Exemple : au bureau de change, un touriste achète des devises au ask et les vend au bid.

B) La position de change
Une entreprise peut avoir des engagements dans des devises différentes et pour des
échéances multiples (1 mois, 3 mois…). La position de change traduit alors l’exposition d’une
entreprise par devise et par échéance.

Position de change = Σ Avoirs dans une devise - Σ Dettes dans la même devise

Avec : Avoirs = prêts + créances + disponibilités + commandes reçues


Et : Dettes = emprunts + dettes + commandes passées

 Si le solde = 0 (Avoirs = Dettes), on dit que la position est fermée (sinon, elle est dite
ouverte) ;
 Si Avoirs > Dettes, on dit que la position est longue (ou prêteuse) et le risque est une
baisse de la devise (donc une appréciation de l’euro) ;
 Si Dettes > Avoirs on dit que la position est courte (ou emprunteuse) et le risque est
une hausse de la devise (donc une dépréciation de l’euro).

Ainsi, calculer la position de change permet de connaître le montant et la nature du risque


de change (hausse ou baisse de la devise), donc la nature et l’importance des moyens à
mettre en œuvre pour minimiser (voire neutraliser) le risque de change grâce aux différents
instruments de couverture.
Exercice :
A la date du 1er mars N, une entreprise française détient une créance de 135 450 $ dont
l’échéance est au 30 juin. Le cours de change à cette date est le suivant : 1 € = 1,25 $.
1. Quelle est la nature de la position de change de cette entreprise ? Quel est le risque
encouru ?
2. Quelle somme l’entreprise encaissera le 30 juin N si le change est : 1 € = 1,3545 $ ?
3. Quelle somme a-t-elle perdu ou gagné par rapport au 1er mars ?

1. L’entreprise a une position longue en dollars, ce qui l’expose à une baisse de sa


créance, donc une baisse du dollar par rapport à l’euro.

2. L’entreprise encaissera 100 000 € le 30 juin N (= 135 450 $ / 1,3545)

3. A la date du 1er mars, la créance était valorisée 108 360 € (= 135 450 $ / 1,25)
L’entreprise a donc perdu 8 360 €, soit 7,7 %.

Exercice :
A la date du 1er février N, une entreprise française constate les engagements suivants, en
dollars et pour la même échéance (30 avril N) :
- Une créance clients de 55 000 $ ;
- Une dette fournisseurs pour 70 000 $ ;
- Un prêt de 15 000 $ ;
- Une commande passée auprès d’un fournisseur pour 10 000 $.

1. Calculez la position nette de change qui découle de ces informations.


2. Quelle est la nature de la position de change de cette entreprise ? Quel est le risque
encouru ?

1. Position nette de change = (55 000 + 15 000) – (70 000 + 10 000) = – 10 000 $

2. La position est courte (Σ Dettes > Σ Avoirs), ce qui expose l’entreprise à un risque de
hausse du dollar.
Section 3 : Les moyens de couverture du risque de change

A) Les opérations de change à terme


L’achat ou la vente d’une devise à terme permet de fixer aujourd’hui le cours d’une devise
qui sera livrée à une date ultérieure.
Le cours à terme d’une devise est en principe différent du cours au comptant (Spot = cours
au jour de la transaction).
L’opération est effectuée auprès d’une banque pour la durée et le montant nécessaires.
Dans le cas d’une cotation au certain :

 Si les cours à terme sont supérieurs au comptant, la différence est appelée


« report » ;
 Si les cours à terme sont inférieurs au comptant, la différence est appelée « déport ».
Dans le cas d’une cotation à l’incertain, c’est l’inverse.

Sens de l’opération :

 Un exportateur procède à une vente à terme de devises. Il est protégé en cas de


baisse de la devise, mais il ne peut bénéficier d’une évolution favorable de la devise.
 Un importateur peut se couvrir grâce à un achat à terme de devises. Il est protégé en
cas de hausse de la devise, mais il ne peut bénéficier d’une baisse de la devise.

Exercice :
Une entreprise exporte à destination de la Grande-Bretagne, pour un montant de 200 000 £,
encaissable dans 3 mois. Sa banque lui propose une couverture sur le change à terme aux
conditions suivantes :
- Cours comptant : 1 £ = 1,275 €
- Cours à 3 mois : 1 £ = 1,272 €.

1. Qualifiez l’écart entre le cours Spot et le cours à terme.


2. Quelle position devra prendre l’entreprise pour se protéger du risque de change ?
3. Quelle sera la valeur des sommes qui seront encaissées dans 3 mois ?
4. Conclure sur l’opportunité de la couverture.

1. Cours à 3 mois (à terme) < cours comptant (Spot) => report.


2. Pour se protéger, l’entreprise qui se trouve en position « longue » (débitrice) en livres
sterling, devra vendre à terme (sous 3 mois) cette devise contre de l’euro en évitant
une dépréciation de la devise.

3. Contre-valeur de la créance encaissée : 200 000 x 1,272 = 254 400 €.

4. L’opportunité de la couverture doit s’apprécier au regard de la volatilité (càd


l’instabilité) de la devise étrangère, car si l’entreprise est protégée en cas de baisse
de la devise, elle ne peut plus profiter de son évolution favorable (hausse de la livre
sterling).

B) Les avances de trésorerie en devises

1. Principe général
Ces avances sont des crédits à court terme, libellés en devises et accordés par des banques
aux entreprises exportatrices et importatrices. Celle-ci peuvent convertir l’avance obtenue
en euros, et éventuellement les placer. Elles permettent de constituer une trésorerie en
euros, permettant ainsi de financer les opérations d’importation ou d’exportation. A
l’échéance de ces dernières, le règlement en devises permet à l’entreprise de rembourser
l’avance à la banque.
Elles peuvent revêtir deux formes :
- L’emprunt en devises
- Le placement de devises (prêt ou dépôt)

2. Emprunt en devises
Son mécanisme, très similaire à la vente à terme de devises, est le suivant :

 L’entreprise exportatrice va emprunter auprès de sa banque une somme en devises ;


 Cette somme en devises sera ensuite convertie en euros au cours Spot (= du jour)
 L’entreprise remboursera à la banque le montant de l’emprunt en devises, lorsque le
client de l’entreprise paiera en devises, à l’échéance prévue.
Ainsi, le risque de change est éliminé, à l’exception de celui qui concerne les intérêts nets
supportés.
Exercice :
Une entreprise exportatrice a facturé une vente de marchandises pour 100 000 USD. Cette
créance est encaissable à une échéance de 2 mois. Le cours au comptant du dollar est de
0,75 €.
1. Quel est le risque encouru par l’entreprise exportatrice sur sa créance ?
2. Quelle conséquence aura la mise en place d’un emprunt en devises de 100 000 USD
sur une durée de 60 jours, au taux de 4 %.

1. L’entreprise a une position longue (débitrice) sur sa créance en devises, le risque qui
y est attaché est donc une dépréciation du dollar.

2. L’entreprise encaisse une somme de 100 000 dollars provenant de l’emprunt en


devises. Cette somme sera convertie en euros au cours du jour, soit 75 000 € (=
100 000 USD x 0,75). A l’échéance, l’entreprise devra rembourser en dollars le
montant de l’emprunt et les intérêts dus, soit 666,67 USD (= 100 000 USD x 4 % x
60/360). Au total, la somme remboursée sera de 100 666,67 USD.

Finalement, la position longue (sur la créance) est compensée par la positon courte (sur
l’emprunt) majorée du coût financier. Le risque sur la créance de baisse du dollar est donc
compensé par le gain spéculatif sur l’emprunt en devises, minoré des intérêts (perte
plafonnée).

3. Placement en devises
Ce type d’opération concerne les entreprises importatrices.
Il suppose que l’entreprise détienne des excédents de liquidités (en devises) ou qu’elle les
emprunte à sa banque.
Les entreprises peuvent ainsi obtenir de leur banque des conditions favorables de placement
(taux de placement en devises > taux de placement en euro) ou d’emprunt (coût de
l’emprunt en devises < coût du financement en euro).

C) Les options de change


Définition :
Une option de change donne à son acquéreur le droit (et non l’obligation) d’acheter
(« call ») ou de vendre (« put ») une devise à une échéance et à un prix d’exercice (« strike
») fixé à l’avance, moyennant le paiement d’une prime.
Caractéristiques :

 L’option d’achat (call) donne à son acquéreur le droit d’acheter des devises à
l’échéance. C’est le type d’options qui intéresse les importateurs.
 L’option de vente (put) permet à son acquéreur de vendre des devises à l’échéance.
Elle est utilisée par les exportateurs.
 La prime (p) constitue le prix de l’option. Elle est toujours payée par l’acquéreur
(l’entreprise) au début de l’opération.
 Le strike (K) est le prix auquel les devises seront achetées ou vendues en cas
d’exercice de l’option. Il est fixé dès l’acquisition de l’option.
 On différencie 2 types d’option :
- Si l’exercice de l’option se fait uniquement à l’échéance, on parle alors d’option
européenne ;
- S’il se fait à tout moment jusqu’à l’échéance, on parle alors d’option américaine.

Exercice de l’option :
Seul l’acheteur de l’option peut décider d’exercer ou non l’option.
L’option est exercée chaque fois que le risque prévu (hausse ou baisse de la devise) se
réalise :
- Option d’achat : exercice si le cours de la devise (S) > strike (K)
- Option de vente : exercice si le cours de la devise (S) < strike (K)
Si le risque prévu ne se réalise pas, l’option est abandonnée et la prime versée à
l’échéance est perdue.

Représentation graphique d’une option d’achat (call) :


Remarque : la perte est limitée à la prime (p) et la possibilité de gains est théoriquement
illimitée. On remarque qu’une perte est possible en cas d’exercice de l’option lorsque le
cours est supérieur au prix d’exercice mais qu’il ne permet pas de couvrir le montant de
la prime (perte plafonnée).

Représentation graphique d’une option de vente (put) :

Remarque : la perte est également limitée à la prime (p) et la possibilité de gains est
théoriquement illimitée.

Exemple :
Une entreprise exportatrice décide d’acheter une option d’achat €/$ ayant un prix d’exercice
(strike K) de 1,30 $ à échéance décembre. La prime (p) est de 0,02 $ par euro et le cours au
comptant (spot) est de 1,38 $.
Par son activité d’exportation, l’entreprise reçoit des dollars. Sa position de change est
longue et le risque est dans la baisse du dollar (hausse de l’euro) d’ici à l’échéance de
l’encaissement.
La négociation de l’option lui donne la possibilité d’acheter une quantité déterminée d’euros
(devise principale) contre des dollars (devise secondaire) à prix fixé d’avance (1 € = 1,30 $).
Si, à l’échéance, le cours de l’euro contre dollar :
- a progressé (1 € > 1,3 $) : l’entreprise exercera l’option et recevra des euros sur la
base de 1,3 $ (strike) ;
- a baissé (1 € < 1,3 $) : l’entreprise abandonnera l’option et changera ses dollars sur le
marché au comptant (spot).
Si le cours de l’euro (sous-jacent) à échéance est inférieur au prix d’exercice (strike),
l’acheteur de l’option d’achat n’a pas en principe intérêt à exercer l’option. Au pire, sa perte
maximale est limitée au montant de la prime versée (- p = - 0,02 USD par euro).
Dès que le cours de l’euro (sous-jacent) atteint le niveau du prix d’exercice (strike), la perte
maximale (S – K – p) se réduit pour devenir nulle au seuil de rentabilité de la position.
Au-delà du seuil de rentabilité (K + p, soit 1,30 + 0,02 = 1,32 USD), l’acheteur peut exercer
son option (ou la revendre) et le gain est théoriquement illimité.

Exercice :
Une société française réalise de nombreuses opérations en dollars avec l’étranger. Le
trésorier, anticipant une évolution défavorable de cette devise, a rassemblé des informations
permettant d’analyser la situation :
Postes concernés (en dollars) :
- Créances clients : 52 000 USD ;
- Disponibilités : 25 400 USD ;
- Dettes fournisseurs : 457 000 USD
- Commandes passées : 52 400 USD
Moyens de couverture possibles (à une échéance de 2 mois) :
- Achat de dollars à terme : 1 € = 1,3420 USD
- Option de change EUR/USD : strike : 1 € = 1,3520 USD et prime unitaire = 0,01 €.

1. Calculer la position de change en dollars. Qualifier cette position.


2. Le trésorier décide de se couvrir pour un montant de 400 000 dollars. Préciser le type
d’option à acquérir et calculer son coût.
3. Pour chacune des couvertures, calculer le prix d’achat total d’1 dollar.
4. Un exportateur achète une option de vente USD/EUR pour un montant de 100 000
USD (aux mêmes conditions que l’option d’achat). Indiquer ce qu’il ferait à l’échéance
et calculer le prix de vente net du dollar si :
o 1 € = 1,4010 USD ;
o 1 € = 1,2462 USD.
o Calculer le prix de vente net du dollar dans chaque cas.

1. Position de change (en dollars) = Σ Créances – Σ Dettes


= (52 000 + 25 400) – (457 000 + 52 400)
= - 432 000 USD
On constate que la société est en position de payer (en dollars), ce qui correspond à une
position courte.

2. La société craint une hausse du dollar : pour se couvrir, elle doit acheter une option
d’achat (call) de dollars contre euros (sous-jacent : cours USD/EUR).
Prime totale = 400 000 x 0,01 = 4 000 €

3. Achat à terme : 1 € = 1,3420 $  1 $ = 1 / 1,342 = 0,7451 €


Option d’achat :
o Cours du dollar < Prix d’exercice (strike)
 Il y a abandon de l’option et les dollars nécessaires sont
achetés sur le marché des changes au comptant. La prime
versée à l’achat de l’option vient majorer le prix d’achat :
1 $ = y € + 0,01 €, avec y le cours du dollar à l’échéance.

o Cours du dollar >= Prix d’exercice (strike)


 L’option d’achat est exercée et, conformément au contrat, les
dollars sont fournis par la banque au prix d’exercice :
1 $ = 1 / 1,352 + 0,01 = 0,7396 + 0,01 = 0,7496 €

4. Pour 1 € = 1,4010 $ :

Le dollar a baissé par rapport à l’euro, puisqu’il faut plus de dollars pour obtenir 1 €
(1,4010 > 1,352). Or, 1 € = 1,4010 $  1 $ = 1 / 1,4010 = 0,7138 €. Le cours est donc
en-dessous du prix d’exercice (0,7138 < K=0,7396). L’exportateur exerce son option
de vente et la banque lui achète 100 000 $ à 0,7396 € (hors prime).

Prix de vente net du dollar, en considération de la prime, qui vient diminuer le prix
reçu : 1 $ = 0,7396 € - 0,01 = 0,7296 €

Pour 1 € = 1,2462 $ :

Le cours du dollar est devenu supérieur au prix d’exercice (1 $ = 1 / 1,2462 = 0,8024 €


> K = 0,7386). Il y a donc abandon de l’option. Les dollars sont achetés à leur cours (y)
sur le marché au comptant.

Prix de vente net du dollar : 1 $ = y – 0,01 € (prime)

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