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(ITEM N 213 j

Anémie chez l'adulte et l'enfant

la+ Connaître les principales hypothèses diagnostiques et les examens complémentaires pertinents
la+ Apprécier la gravité d'une anémie
la+ Connaître les urgences liées à l'anémie et les signes de gravité (terrain, rapidité d'installation et profondeur)

Rang Rubriqu� Intitulé


A Définition Définition anémie

mr
A Prévalence Connaître la première cause d'anémie

Éléments physiopathologiques Principes de l'érythropoïèse

A Diagnostic positif Diagnostiquer une anémie

A Diagnostic positif Apprécier la gravité d'une anémie

A Identifier une urgence Connaître les mesures d'urgence d'une anémie

Connaître la démarche étiologique clinique et biologique


A Diagnostic positif
(arbre décisionnel) devant une anémie

Connaître les deux urgences liées à l'anémie et les signes de gravité


A Identifier une urgence
(terrain, rapidité d'installation et profondeur)

A Étiologies Connaître les différents types d'anémie

A Examens complémentaires Conduire l'enquête étiologique d'une anémie chez l'enfant


32

n° 213. Anémie chez l'adulte et l'enfant

Anémie: généralités

•MID
► Définition biologique: Hb < 13 g/dL chez l'homme et Hb < 12 g/dL chez la femme
► Lhémodilution peut entraîner un tableau de fausse anémie: grossesse, lg monoclo­
nale, insuffisance cardiaque, hypersplénisme
► On distingue les anémies microcytaires / normo-macrocytaires en fonction du VGM
qui est une donnée de l'hémogramme
► On distingue les anémies régénératives / arégénératives devant le compte des réticu­
locytes qui doit être demandé devant une anémie normo-macrocytaire
► La cause la plus fréquente d'anémie est la carence martiale
► La tolérance d'une anémie dépend de sa profondeur, de sa rapidité d'installation
et du terrain sous-jacent

DÉFINITIONS
• Lanémie est définie biologiquement par:
- Hb < 13 g/dL chez l'homme,
- Hb < 12 g/dL chez la femme non enceinte,
- Autres:
< 10,5 g/dL chez la femme enceinte à partir du 28 trimestre (en raison de !'hémodilution
physiologique pendant la grossesse),
chez l'enfant: voir infra, « Spécificités pédiatriques "·
• Rappelons les constantes caractérisant la lignée érythrocytaire:
- Le VGM (Volume Globulaire Moyen): VGM = Ht/nb GR (Normale= 80 à 100 fL),
- La CCMH (Concentration Corpusculaire Moyenne en Hémoglobine): CCMH = Hb/Ht
(Normale= 32 à 36 g/dL),
- La TCMH (ou Teneur Corpusculaire Moyenne en Hémoglobine): TCMH = Hb/nb GR
(Normale= 27 à 32 pg/GR) (peu utilisée en pratique courante).
N.B. Connaître la formule du VGM afin de pouvoir le calculer si seuls /'Ht et le nombre de GR sont
donnés dans l'énoncé d'un cas clinique.

LE SYNDROME ANÉMIQUE
• Il se traduit initialement par:
- Sur le plan cutanéo-muqueux: une décoloration des muqueuses (à rechercher au niveau
des conjonctives) puis par une pâleur généralisée de la peau.
Item n ° 213 -Anémie chez l'adulte et l'enfant 33

• On note plus tardivement des signes liés à !'anoxie comme:


- Sur le plan général: asthénie,
- Sur le plan neurologique: céphalées, bourdonnements d'oreille, vertiges,
- Sur le plan cardiaque: tachycardie, souffle systolique apexien fonctionnel voire angor
chez le sujet âgé ou antérieurement porteur d'une pathologie coronarienne,
- Sur le plan respiratoire: polypnée, dyspnée d'effort parfois aggravée par une compo­
sante d'insuffisance cardiaque.
N.B. En cas d'anémie d'installation progressive (carence martiale par exemple), une anémie très
profonde peut être bien tolérée contrairement à une anémie d'installation brutale (hémolyse
massive par exemple).

ÉTIOLOGIES
• LOrientation diagnostique après avoir éliminé une fausse anémie par hémodilution (hyperpro­
tidémie par pic monoclonal, grossesse au 3 e trimestre, splénomégalie, surcharge volémique
sur insuffisance cardiaque) repose sur 2 éléments essentiels:
- Le VGM < 80 fL ou > 80 fL (anémie microcytaire versus normo-macrocytaire),
- Le taux de réticulocytes > 150 G/L ou< 150 G/L (anémie régénérative versus arégénérative).
• Ces 2 éléments permettent de définir 3 types distincts d'anémie:
- Les anémies microcytaires (VGM < 80 fL):
anémie par carence martiale,
anémie inflammatoire (à un stade avancé),
autres anémies microcytaires.
- Les anémies normo- ou macrocytaires (VGM > 80 fL) régénératives (réticulocytes
> 150 G/L):
anémie hémolytique,
autres.
- Les anémies normo- ou macrocytaires (VGM > 80 fL) arégénératives (réticulocytes
< 150 G/L):
éliminer les étiologies suivantes avant réalisation d'un myélogramme:
---+ alcool,
---+ insuffisance rénale chronique,
---+ hypothyroïdie,
---+ anémie inflammatoire débutante (l'anémie précède la microcytose),
puis en fonction des résultats du myélogramme:
---+ moelle riche:
• anémies macrocytaires carentielles,
• myélodysplasie,
• envahissement médullaire,
• érythroblastopénie,
---+ moelle pauvre:
• aplasie médullaire,
• myélofibrose.
N.B. Dans les anémies régénératives, l'augmentation du VGM est due à la présence de réticulo­
cytes circulants dont le volume est supérieur à celui des hématies.
34 Hématologie générale

EXAMENS COMPLÉMENTAIRES
Une fois identifiée l'une des 3 catégories précédentes (voir " Tableau récapitulatif des causes
d'anémie ») les examens complémentaires à réaliser sont indiqués dans l'arbre décisionnel
(cf. figure ci-après).

lntt«trfliiiibû@tiii
■ Carence en folates -+ vitamine B 12
■ Grossesse (à partir de T2) (anémie mégaloblastique)
■ Hyperprotidémie importante ■ Défaut de synthèse de l'hème
(lg monoclonale) (anémie sidéroblastique)
■ Insuffisance cardiaque ■ Hémolyse (anomalie morphologique
■ Hypersplénisme ou hypophosphorémie)
■ Carence martiale
(saignements digestifs chroniques)
■ Hémorragie digestive aiguë (rupture de VO)
■ Hypersplénisme par HTP (hémodilution)
■ Myélotoxicité (toxicité directe sur les GR
ou leurs progéniteurs)
■ Inflammation (infection chronique, e.g. BK)

Constante Définition Anomalies

Hb Quantité(poids) d'Hb par volume de sang circulant Anémie si:

• < 13 g/dl chez homme


• < 12 g/dl chez femme
• < 14 g/dl chez nouveau-né
• < 10,5 g/dl chez femme enceinte
(à partir de T2)

Polyglobulie si:

• > 16,5 g/dl chez homme


• > 16 g/dl chez femme

Ht Volume du sang occupé par les GR(= GR x VGM) Polyglobulie si:

• > 49 % chez homme


• > 48 % chez femme

VGM Volume moyen des GR(= Ht/GR) • Microcytose si < 80 fl


• Macrocytose si > 100 fl

CCMH Concentration moyenne en Hb de chaque GR(= Hb/Ht) • Hypochromie si< 32 g/dl

TCMH Poids moyen d'Hb contenu dans un GR(= Hb/GR) • Hypochromie si < 27 pg

Réticulocytes Précurseurs des GR(contenant des ribosomes • Régénératif si > 150 G/L
cytoplasmiques) .... reflètent l'érythropoïèse 1 • Arégénératif si _<_1_5o_G_IL___�
Item n ° 213 -Anémie chez l'adulte et l'enfant 35

Anomalies morphologiques des GR

Anomalie GR Description Situation pathologique

Hématie normale Cellule anuclée, biconcave Normal

Hémolyse mécanique
Schizocytes Fragments d'hématies
(MAT, valves cardiaques ..)

Drépanocytes Hématie en forme de faucille Drépanocytose

Sphérocytose héréditaire
Mlc,o-sphé,ocytes - Petites hématies sphériques (Minkowski-Chauffard), mais non
spécifique

Acanthocytes Spicules à la surface des GR Cirrhose

Dacryocytes Hématies en larmes Myélofibrose

Hématies Ponctuations basophiles Saturnisme, myélodysplasie,


ponctuées (ARN dénaturé) thalassémie hétérozygote

Inclusion basophile
Corps de Jolly (reliquat nucléaire Asplénisme
intracytoplasmique)

Corps de Heinz Agrégats d'Hb oxydée Déficit en G6PD

Anisocytose: Hématies de taille inégale.


Poikilocytose: Hématies de formes différentes.
36 Hématologie générale

Tableau récapitulatif des causes d'anémies

Microcytaire Normo- ou macrocytaire


- ANÉMIE

.
(VGM < 80 IL)
.
(VGM � 80 fl)
Hyposidérémique (fer sérique bas): Éliminer:
- Carence martiale - Hypothyroïdie
- Sd inflammatoire - Insuffisance rénale*
- Alcoolisme chronique
Non hyposidérémique (fer sérique
- Anémie inflammatoire débutante*

Arégénérative
normal ou i):
- Thalassémie . Moelle pauvre au myélogramme
- Anémie sidéroblastique génétique (à confirmer par une BOM):
(Réticulocytes
(rare) - Aplasie médullaire
< 150 G/L)
- Myélofibrose

. Moelle riche au myélogramme:


- Myélodysplasie
- Envahissement médullaire
- Anémie mégaloblastique

,__ ___ - - -
.
- Érythroblastopénie*

.
IMPOSSIBLE Hémorragie aiguë
Régénérative (Le seul cas où l'on peut rencontrer

.
Régénération médullaire
(Réticulocytes une réticulocytose est celui
Anémies hémolytiques

1
> 150 G/L) des thalassémies mineures où il peut
exister une discrète hémolyse.)

(*) Ces anémies sont généralement normocytaires.

Anémies microcytaires = défaut de synthèse de l'Hb

Fer Protoporphyrine

- Carence martiale� ✓
Anémie sidéroblastique
- Sd inflammatoire* '/ � / ,. génétique**

Hème Globine

� /rhalassémie­

Hb

* Séquestration du fer par les macrophages.


•• Mutation récessive liée à /'X le plus souvent.
••• Anémie par défaut de synthèse d'Hb et hémolyse.
Item n ° 213 -Anémie chez l'adulte et l'enfant 37

Fausse anémie par hémodilution


"'::>
' ------· --------'...
Surcharge volémique (insuffisance cardiaque)
1
1 Grossesse (3 e trimestre)
Splénomégalie
ANEMIE Hyperprotidémie (pic monnoclonal)
Hb<13 g/dL(homme)
Hb< 12 g/dl(femme)

ANEMIE MICROCYTAIRE ------ VGM ANEMIE NORMO-MACROCYTAIRE


VGM<80fL VGM>80fL

t
FERRITINE - Anémie ferriprive

t
VS/CRP - Anémie inflammatoire

Electrophorèse-­ Thalassémie (alpha, beta)


Hypothyroïdie
de l'Hb Ethylisme chronique

�----==:::;---� Saturnisme r-{..-....


1
Insuffisance rénale chronique
1 7' Inflammation débutante
Anémie sidéroblastique génétique • 11 Insuffisance surrénale lente
1
1

ANEMIE REGENERATIVE ANEMIE AREGENERATIVE


RETICULOCYTES>15 0 G/L RETICULOCYTES ----+ RETICULOCYTE5<150 G/L

HAPTOGLOBINE effondrée
BILIRUBINE augmentée
LDH (augmentée mais inconstante)
!
MYELOGRAMME

(ANEMIE HEMOLYTIQUE) • OUI j NON � (AUTRE)

RÉGÉNÉRATION MÉDULLAIRE
Crise réticulocytaire
post-carentielle (fer, B9, Bl 2)
� Régénération anémie Compléter par une BOM
TEST DE COOMBS centrale toxique (post-chimio)
SCHIZOCYTES
ELECTROPHORESE Hb
AUTRES (immunophénotypage, ektacytométrie...) MOELLE RICHE MOELLE PAUVRE

MvtLODYSPLASIE APLASIE MÉDULLAIRE

rCORPUSCULAIR,ilc EXTRA-CORPUSCULAIRE l MtGALOBLASlOSE


Carence en B9 ou Bl 2
MYÉLOFIBROSE
Primitive ou secondaire
ENVAHISSEMENT
ANOMALIE DE MEMBRANE IMMUNOLOGIQUE
HPN LA, lymphome, métastase
Auto-immune ERYTHROBLASTOPÉNIE
Sphérocytose héréditaire lmmuno-allergique Auto-immune, virus Bl 9
Allo-immune
ANOMALIE ENZYMATIQUE
Déficit en G6PD
Déficit en PK NON-IMMUNOLOGIQUE
Infectieuse
1
ANOMALIE DE L HÉMOGLOBINE Toxique
Drépanocytose Mécanique

Orientation diagnostique devant une anémie


38 Hématologie générale

ANÉMIE: LES SPÉCIFICITÉS PÉDIATRIQUES


L.:hémogramme s'interprète toujours selon l'âge:

Valeurs moyennes de l'Hb et du VGM selon l'âge (N.B.: après 12 ans, idem adulte)

J0-J3 J30 M3-6 M6-24 2-6 ans 6-12 ans


16,5 14 12 12 13,5
-
Hb moy. 11,5

VGM moy. 110 105 90 80 80 85

Valeurs seuils d'anémie et de microcytose selon l'âge

J0-J3 J30 M3-6 M6-24 2-6 ans 6-12 ans


14 10 10,5 11,5 11,5
-- -
Hb min. (-2 DS) 9,5

VGM min. (-2 DS) 100 85 75 70 75 77

Après 2 ans, la valeur des -2 OS (déviation standard) du VGM s'obtient par la formule " 70 + âge "·

L.:anémie est l'atteinte hématologique la plus fréquente chez le nourrisson et l'enfant, la carence
martiale constituant l'étiologie dominante. Avoir bien intégré les arbres diagnostiques précédents
et les orientations étiologiques avant de lire ci-dessous (la plupart des maladies mentionnées
sont hors programme).

1. Anémies microcytaires
• La carence martiale en est de loin la principale pourvoyeuse, suivi par ordre de fréquence
des thalassémies, des anémies inflammatoires, du saturnisme et des anémies sidéroblas­
tiques congénitales (isolées ou syndromiques).
• Les anémies inflammatoires sont rares (inflammation chronique, par exemple lymphome de
Hodgkin ou rhumatisme inflammatoire).

2. Anémies non microcytaires centrales (non régénératives)


• Principales causes des aplasies médullaires:
- Constitutionnelles: maladie de Fanconi principalement (voir encadré), dyskératose
congénitale, Schwachman, Blackfan-Diamond (voir encadré),
- Médicamenteuses (chimiothérapie), toxiques,
- Virales (parvovirus 819, CMV, EBV...),
- HPN,
- Idiopathique: diagnostic d'élimination.
• La myélofibrose ne se voit pas en pédiatrie (ni chez l'adolescent).
• Cas des myélodysplasies:
- Toujours évoquer l'anémie de Fanconi (voir encadré),
- Dysérythropoïèses congénitales, maladies génétiques rares (hémolyse souvent associée),
- Myélodysplasie acquises: chimiothérapie, radiothérapie, toxiques.
N.B. Comme chez l'adulte, la monosomie 7 sur caryotype médullaire est de mauvais pronostic
(risque évolution LAM).
Item n ° 213 -Anémie chez l'adulte et l'enfant 39

• Envahissements médullaires:
- leucémies aiguës majoritairement: 1 er cancer de l'enfant, répartition LAL 80 % et LAM 20 %.
- lymphomes agressifs:
chez l'enfant: en termes de fréquence, Burkitt --+ lymphome lymphoblastique
--+ lymphome anaplasique;
chez l'adolescent: Hodgkin --+ lymphome B diffus à grandes cellules.
- Neuroblastome, principal diagnostic différentiel des LA avant 3 ans devant une pancyto­
pénie et une AEG (petites cellules bleues au myélogramme),
- Cancers solides autres (sarcome d'Ewing, rhabdomyosarcomes...),
- La LLC et le myélome multiple ne se voient ni chez l'enfant ni chez l'ado.
• Cas des anémies mégaloblastiques: déficit d'apport maternel si allaitement exclusif (carence
ou Biermer chez la mère) ou anomalie constitutionnelle des cobalamines (défaut d'absorption
ou de transport ou de métabolisme).
• Cas des érythroblastopénies: 3 principales causes en pédiatrie:
- Auto-immune (érythroblastopénie transitoire du nourrisson),
- Primo-infection au parvovirus B19 en cas d'hémolyse chronique sous-jacente (SH,
drépanocytaires),
- Constitutionnelle: anémie de Blackfan-Diamond.

kfùiYuUJ,iiifù&M•
■ Retard statural (constant),
■ Anomalies cutanées à type d'hypopigmentation (constant),
■ Anomalies de la colonne radiale (fréquent),
■ Syndrome dysmorphique (possible): dysmorphie faciale, anomalies rénales et urologiques (30%),
anomalies sensorielles (vision, audition)...
■ Atteinte hématologique constante à partir de 20 ans, débutant souvent précocement (possible
dès 2 ans), classiquement par myélodysplasie avant évolution vers l'aplasie médullaire; risque
de transformation en LAM à n'importe quel âge,
■ Génétique: anomalie de réparation de l'ADN (transmission autosomique récessive). Prédisposition
aux LA et aux cancers solides,
■ Diagnostic sur caryotype constitutionnel avec recherche de cassures aux agents sensibilisants,
puis enquête génétique,
■ Traitement hématologique: allogreffe de moelle osseuse après conditionnement atténué.

RlukikûdM@tt®'@111i ùi 1 1

■ Anémie normo- ou macrocytaire arégénérative apparaissant avant l'âge de 2 ans,



Myélogramme: absence ou diminution importante des précurseurs de la lignée érythrocytaire
(< 5%),
■ 30 à 40% de malformations associées (yeux, pouces, dysmorphie faciale...),
■ Absence de fragilité chromosomique au caryotype constitutionnel (diagnostic différentiel anémie
de Franconi),
■ Progression rare mais possible vers l'aplasie médullaire; transformation possible en LA (2%),
■ Génétique: grande hétérogénéité. Sporadique dans 55% des cas, familial autosomique dominant
dans 45%. Mutation sur un gène codant pour une protéine ribosomique retrouvée dans 50%
des cas (gène RPS19 dans 25%),
■ Traitement: corticothérapie initiale. Support transfusionnel + chélation si surcharge martiale.
Allogreffe de moelle osseuse dans les formes sévères.
40 Hématologie générale

3. Anémies hémolytiques {régénératives)


• Anémies corpusculaires: voir chapitre correspondant.
N.B. L'HPN ne se voit que rarement avant 18 ans et est plus volontiers révélée par une aplasie
médullaire.

• Anémies extra-corpusculaires:
- Causes non immunologiques à éliminer rapidement: syndrome hémolytique et urémique
(thrombopénie+ IRA+ schizocytes sur le frottis), sepsis sévère (notamment purpura
fulminans), paludisme, CIVD (contexte traumatique ou réanimatoire le plus souvent),
- Causes allo-immunes chez le nouveau-né et le polytransfusé,
- Causes immuno-allergiques beaucoup plus rares que chez l'adulte,
- AHAI (voir ci-après).

li@m&@foMMhtWiir•M ki0kt111 1
11

■ Évoquer en priorité l'origine allo-immune -+ Coombs en urgence et confronter le groupe maternel


avec le groupe du nouveau-né,
■ Bilan d'hémolyse à prélever avant transfusion ! En cas d'anémie mal tolérée, attendre que les
CGR soient sur le point d'être branchés pour le prélever au dernier moment [représente de gros
volumes pour le nouveau-né dont la masse sanguine s'estime entre 200 mL et 320 mL (BO ml/kg)],
■ Un ictère précoce, prolongé, avec ou sans antécédents familiaux d'ictère néonataux évoque
une hémolyse corpusculaire,
■ �-thalassémies et drépanocytose ne se révèlent pas avant 6 mois.

AHAI de l'enfant (données de la cohorte française CEREVANCE, 2003-2010)


[ Rares, prévalence< 112000.

• Âge médian 3 ans.


.....
• Un syndrome d'Evans (association avec thrombopénie) est retrouvé dans 37 % des cas et s'accompagne
d'une plus grande sévérité qu'une AHAI isolée en termes de résistance aux immunosuppresseurs
et d'une plus fréquente association à une dysimmunité sous-jacente.

• L:origine post-infectieuse ne doit pas être sur-estimée (moins de 25 % des cas). Elle fait le plus souvent
intervenir des auto-anticorps de type agglutinines froides, au décours des principales infections suivantes:
mycoplasme, EBV, CMV, grippe, maladies éruptives. À noter qu'en cas de Coombs positif de type lgG
ou lgG+C3d l'évolution est moins favorable qu'une origine post-infectieuse simple,

1 Recherche systématique d'un déficit immunitaire primitif:


- Dosage des lgG, lgA, lgM (+ sous-classes lgG si> 2 ans),

l - lmmunphénotypage lymphocytaire,
- Radiographie thoracique.

Traitements (Référence http:/lwww.cerevance.org AHAI de l'enfant, recommandations thérapeutiques,


Aladjidi et al. 11/03/2011): transfusion si menace vitale, débit lent; corticothérapie (urgente sauf si Hb> 80 g/L
bien tolérée en contexte post-infectieux avec Coombs + à complément), Prednisone 2-3 mg/kg/j puis
décroissance très progressive à partir J15-J30; place du Rituximab imprécise; splénectomie uniquement
J
après 5 ans. _
41

n° 213. Anémie chez l'adulte et l'enfant

Anémie inflammatoire

•iiiD
► Anémie normocytaire, arégérative, normochrome d'abord puis microcytaire, arégénéra­
tive, hypochrome
► Diagnostic différentiel de l'anémie par carence martiale
► Inflammation et carence martiale sont toutes deux responsables d'une anémie avec
hyposidérémie, c'est-à-dire avec fer sérique bas
► Inflammation et carence martiale sont toutes deux responsables d'une thrombocytose
réactionnelle
► La ferritinémie permet la distinction des deux étiologies: élévation de la ferritine dans
l'inflammation, abaissement de la ferritine dans la carence martiale
► Le traitement est celui de la cause de l'inflammation

GÉNÉRALITÉS

1. Épidémiologie
Elle représente une cause fréquente d'anémie.

2. Physiopathologie
Elle est complexe. Schématiquement la synthèse de cytokines de l'inflammation (IL-1, TNF-a,
INF-v) entraîne
• Une inhibition de l'érythropoïèse,
• Une séquestration macrophagique du fer avec diminution du fer disponible pour la synthèse
de l'hème responsable d'une microcytose (d'une façon comparable à l'anémie ferriprive
bien qu'ici la ferritine soit élevée et non abaissée),
• Une diminution de la synthèse et de l'action de l'EPO.

DIAGNOSTIC

1. Diagnostic clinique
• Le plus souvent les signes de la pathologie responsable du syndrome inflammatoire sont
au premier plan.
• Le syndrome inflammatoire lui-même est souvent présent (sueurs, hyperthermie, asthénie,
anorexie, amaigrissement).
• L'anémie en elle-même est souvent bien tolérée et le syndrome anémique est tardif.
42 Hématologie générale

2. Diagnostic biologique
• Anémie normochrome normocytaire initialement puis microcytaire et hypochrome dans les
formes évoluées, arégénérative.
• Augmentation possible des plaquettes et des polynucléaires neutrophiles.
• Bilan martial:
- Fer sérique diminué,
- Ferritinémie augmentée,
- Transferrine diminuée,
- CTF, CS, et récepteur soluble à la transferrine le plus souvent normaux.
N.B. La ferritine est un marqueur positif de l'inflammation, elle sera donc élevée dans ce contexte.
• Syndrome inflammatoire avec augmentation de:
- La vitesse de sédimentation,
- La CRP,
- L'orosomucoïde,
- L'haptoglobine,
- Le fibrinogène,
- Les a et y-globulines.
• Objectivables par l'électrophorèse des protéines sériques.

- ÉTIOLOGIES

1. Maladies de système
Lupus érythémateux disséminé, polyarthrite rhumatoïde, maladie d'Horton...

2. Néoplasies
Tumeurs solides, hémopathies ...

3. Infections
Endocardite infectieuse, abcès profond, tuberculose, brucellose...
N.B. Le plus souvent l'anémie est découverte dans le cadre du bilan d'une pathologie responsable
d'un syndrome inflammatoire mais elle en est parfois le signe révélateur.
Item n ° 213 -Anémie chez l'adulte et l'enfant 43

-TRAITEMENT
• La transfusion sanguine est à proscrire de même que le traitement martial (les réserves en
fer sont pleines).
• Le traitement est donc purement étiologique.

Anémie Anémie Anémie


Paramètre Définition
ferriprive inflammatoire mixte••

t
Fer circulant
-+-
Fer sérique

Ferritinémie Réserves en fer de l'organisme !, �ou î

Transporteur plasmatique du fe r î, �ou!


Transferrine
!*
(= sidérophiline)

CTF
(capacité totale de fixation
de la transferrine)
à la tmcste,cice i
Quantité de fe r qui peut être fixée 1
I
î, �ou!

CS
Fer sérique/CTF
1
(coefficient de saturation ! 1

de la transferrine)

RsTF Fo r me soluble du récepteu r


(Récepteur soluble qui pe r met l'internalisation
de transferrine) du fe r dans les cellules

* Par hypercatabolisme.
** Carence martiale + sd inflammatoir e.
N. B.. dans les anémies mixtes (carence martiale+ sd inflammatoire, ex: cancer du colon ou entéropathie inflammatoire),
/'augmentation du r écepteur soluble de la transferrine permet de diagnostiquer la carence ma rtiale associée (ce
que ne permet pas la ferritinémie dont /'augmentation masque la carence martiale).
Cette capacité du RsTF à discriminer anémie in flammatoir e et anémie mixte reste toutefois contr o versée.
44

n° 213. Anémie chez l'adulte et l'enfant

Anémie ferriprive

•MG+
► Anémie microcytaire, arégénérative, hypochrome
► Diagnostic différentiel de l'anémie inflammatoire
► Carence martiale et inflammation sont toutes deux responsables d'une anémie avec
hyposidérémie, c'est-à-dire avec fer sérique bas
► Carence martiale et inflammation sont toutes deux responsables d'une thrombocy­
tose réactionnelle
► La ferritinémie permet la distinction des deux étiologies: abaissement de la ferritine
dans la carence martiale, élévation de la ferritine dans l'inflammation
► Le traitement repose sur la substitution en fer et sur le traitement de la cause de la
carence martiale

-GÉNÉRALITÉS

1. Épidé'miologie
Elle représente la cause la plus fréquente d'anémie dans les pays industrialisés.

2. Physiopathologie
Le fer (environ 4 g chez l'adulte) est présent dans l'organisme sous 3 formes:
• Fer héminique 80% (hémoglobine principalement, myoglobine et enzymes),
• Réserves en fer 20% (ferritine et hémosidérine),
• Fer sérique 0,1 % lié à la transferrine.

L.:alimentation de type occidentale (viande, poisson, jaune d'œuf et légumes verts notamment)
apporte 2 mg/j réellement absorbés (duodénum et jéjunum proximal). Elle suffit à couvrir les
besoins sauf quand ceux-ci sont accrus: nourrissons, grossesse, allaitement.
Les pertes (selles, desquamation cutanée et menstruations chez la femme) représentent 1 à
3 mg/j.

La majorité du fer utilisé pour l'érythropoïèse provient du recyclage du fer contenu dans les
GR sénescents.

La carence martiale entraîne:


• Au niveau hématopoïétique: une diminution de la synthèse d'hémoglobine avec microcytose
puis hypochromie avant d'entraîner une anémie.
• Au niveau des tissus extra-hématopoïétiques: anomalies de la peau et des phanères, tissus
qui ont eux aussi besoin de fer.
Item n ° 213 -Anémie chez l'adulte et l'enfant 45

DIAGNOSTIC CLINIQUE

1. Circonstances de découverte
• Le plus souvent sur un syndrome anémique.
• Parfois fortuite sur un hémogramme réalisé à titre systématique.
• Pica: trouble du comportement alimentaire induit par la carence en fer surtout chez l'enfant
avec consommation de terre, craie.

2. Examen clinique
• Conséquences hématologiques:
- Syndrome anémique d'installation progressive et habituellement bien supporté (parfois
jusqu'à des valeurs < 5 g/dl).
• Conséquences extra-hématologiques (sd carentiel):
- Fragilité des phanères: ongles mous et cassants, koïlonychie, cheveux secs et fragiles,
- Peau sèche,
- Atteinte de la muqueuse oro-digestive: perlèche, glossite, œsophagite, gastrite,
- Sd de Plummer-Vinson = Sd de Kelly-Paterson: triade anémie par carence martiale
+ dysphagie + membranes œsophagiennes.

- DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE

1. Hémogramme
• Anémie hypochrome (CCMH < 32 g/dl) microcytaire (VGM < 80 fl).
• Thrombocytose modérée réactionnelle fréquente.

2. Frottis sanguin
li retrouve de multiples anomalies de couleur et de forme des hématies: anisocytose, poïkilo­
cytose, microcytose, hématies en cible.

3. Bilan martial (référentiel HAS 2011)


• Soit ferritinémie abaissée< 20 µg/L chez la femme ou < 30 µg/L chez l'homme ou la femme
ménopausée mais variable selon les laboratoires (test le plus sensible et le plus spécifique
donc le plus performant pour dépister une carence martiale). Cependant, une ferritinémie
normale n'exclut pas une carence martiale lorsqu'il existe un syndrome inflammatoire associé,
en raison de l'augmentation non spécifique de la ferritine sérique qui en résulte (demander
éventuellement une CRP en cas de doute pour mieux interpréter la ferritinémie).
• Soit fer sérique abaissé (< 11 µmol/L) ET:
- Transferrine augmentée (> 4 g/L) ou,
- Coefficient de saturation de la transferrine diminué (CS < 20 %) ou,
- Capacité totale de fixation de la transferrine augmentée (CTF > 70 µmol/L).
N.B. Attention, une anémie microcytaire est quasiment toujours arégénérative: la numération des
réticulocytes n'a aucun intérêt diagnostique dans ce contexte.
Attention, il n'y a pas lieu de doser le fer sérique et la ferritinémie: on dose soit la ferritinémie
seule soit le fer sérique et au choix la transferrine ou la CTF ou le CS.
Voir les RMO en fin de chapitre qui sont fondamentales à conna'ftre.
46 Hématologie générale

• Cinétique d'apparition des anomalies du bilan martial au cours de la carence en fer:


!Ferritine➔ îTransferrine, îRSTr, îCTF, !CS➔ !Fer sérique➔ !VGM (microcytose)
➔ !Hb (anémie)➔ !CCMH (hypochromie).

Les anomalies se corrigent en sens inverse après traitement martial.

- DIAGNOSTIC ÉTIOLOGIQUE

1. Pertes excessives par saignement chronique


• Saignements digestifs (cause n° 1 chez l'homme et la femme hors période d'activité génitale):
- Œsophage: cancer, œsophagite, varices (dans le cadre d'une hypertension portale),
- Estomac: cancer, ulcère et gastrite (favorisés par la prise d'AINS ou d'aspirine à recher-
cher, de même qu'une infection par Helicobacter Py/ori),
- Grêle: cancer, maladie de Crohn, diverticule de Meckel,
- Colon et rectum: cancer, maladie de Crohn, rectocolite ulcéro-hémorragique.
N.B. Les saignements hémorroidaires sont un diagnostic d'élimination.
• Saignements gynécologiques (méno- ou métrorragies) (cause n° 1 chez la femme en
période d'activité génitale):
- Causes néoplasiques: cancer de l'endomètre ou du col utérin,
- Causes organiques non néoplasiques: fibrome utérin, endométriose,
- Causes fonctionnelles: ménorragies ou métrorragies (par insuffisance lutéale ou autres),
- Causes iatrogènes: DIU, implant contraceptif.
• Autres:
- Hématurie macroscopique chronique,
- Dons de sang multiples chez l'adulte ou prélèvements sanguins répétés chez l'enfant,
- Épistaxis à répétition (angiodysplasie ou maladie de Rendu-Osier).

2. Défaut d'absorption du fer


• Post-chirurgical: gastrectomie, by-pass gastrique, résection étendue du grêle.
• Cause médicale: maladie de Crohn, maladie cœliaque, maladie de Whipple.
• Autre: consommation excessive de thé.

3. Augmentation des besoins (carence relative d'apport)


• Nourrisson surtout en cas de prématurité, de gémellarité, d'absence de supplémentation
en fer.
• Femme enceinte en cas de grossesses répétées et rapprochées.

4. Autres
• Syndrome de Lasthénie de Ferjol: pertes par saignées volontaires cachées (pathologie
psychiatrique).
• Hémosidérinurie: dans le cadre d'une hémolyse chronique (ex.: sur valve cardiaque).
N.B. Les troubles de l'hémostase (maladie de Willebrand. . .) ou la prise de médicaments dépri­
mant /'hémostase (anticoagulants, anti-agrégants plaquettaires, anti-inflammatoires) peuvent
favoriser un saignement occulte mais ne doivent pas dispenser d'une recherche étiologique
approfondie.
Item n ° 213 -Anémie chez l'adulte et l'enfant 47

TRAITEMENT

1. Traitement étiologique (systématique et fondamental)

2. Traitement curatif
Substitution martiale per os:
• 100 à 200 mg/j de fer élément si possible à jeun (ou fractionné pendant les repas en cas
de mauvaise tolérance digestive). Ex.: Tardyferon® (comprimé à 80 mg): 2 comprimés par
jour pendant 4 mois.
• Les effets secondaires (dont il faut prévenir le patient) du traitement sont:
- L'apparition de selles noires,
- La présence de troubles digestifs à type de douleurs abdominales, de diarrhées ou de
constipation,
- L'apparition rare de céphalées, vertiges.
• Durée du traitement: elle est d'environ 4 mois, jusqu'à normalisation du taux d'hémoglobine
et de la ferritine.
N.B. La crise réticulocytaire au 8° jour n'est pas à documenter.

Substitution martiale parentérale:


• Ex.: Venofer® ou Ferinject®: ses indications sont extrêmement limitées (notamment insuffi­
sant rénal dialysé sous EPO chez qui un traitement per os s'est révélé insuffisant ou en cas
de malabsorption majeure).

3. Traitement préventif
Indications limitées chez les sujets à risque, notamment:
- Femmes enceintes après 24 SA,
Nourrisson ayant un régime lacto-farineux exclusif,
- Gastrectomisés et patients atteints d'un syndrome de malabsorption.
N.B.1 En cas d'inefficacité du traitement, suspecter. une inobservance, une erreur diagnostique
(reprendre l'ensemble des investigations), un diagnostic associé (carence en folates asso­
ciée avec apparition d'une macrocytose au décours du traitement martial), des saignements
provoqués (pathologie psychiatrique).

N.B.2 Aucune indication transfusionnelle même en cas d'anémie profonde sauf critères de gravité
(angor, patient coronarien).
48 Hématologie générale

CAT devant une anémie ferriprive

Pertes digestives Pertes gynécologiques Autres

• ATCD digestifs (personnels î-. ATCD gynéco-obstétricaux, • ATCD chirurgicaux,


et familiaux), Ménorragies: présence • Valve cardiaque,
• Méléna, de caillots? • Épistaxis,
Interro­ • Rectorragies, • Métrorragies, Dons sang,
gatoire • Hématémèse, • Moyen contraceptif (DIU). Grossesses multiples,
• Douleurs ulcéreuses. Consommation thé,
r• Prises médicamenteuses: • Signes de malabsorption.
- Aspirine, AINS, AVK ..

• Palpation abdominale • Palpation pelvienne,


(hépatomégalie, tumeur ..), • Toucher vaginal,
Examen
clinique • Toucher rectal (hémorroïdes, • Examen au spéculum.
tumeur...).
.J
• Orienté par la clinique: • Orienté par la clinique: • Orienté par la clinique.
- FOGD + biopsies - Frottis (FCV),

J
systématiques, - Écho pelvienne +/-
Examens - Coloscopie +/- biopsies, endovaginale.
paracliniques - Vidéocapsule ou
entéroscopie si bilan négatif.

N.B. Au total on retiendra l'algorithme d'investigation suivant:


• chez la femme en période d'activité génitale: bilan gynécologique clinique (+/- examens
complémentaires dont échographie pelvienne et endovaginale) par un spécialiste et absence
d'investigation digestive si origine gynécologique confirmée;
• dans les autres cas: FOGD (avec biopsies systématiques à la recherche d'une maladie
cœliaque) + coloscopie en cas de négativité (ou inversement si clinique évocatrice d'emblée
d'une étiologie basse), puis entéroscopie et/ou vidéocapsule en 2e intention en absence
d'efficacité d'un traitement martial bien conduit ou en cas de rechute de l'anémie ferriprive.

CARENCE MARTIALE: LES SPÉCIFICITÉS PÉDIATRIQUES

1. Diagnostic biologique
Identique à l'adulte.

2. Particularités de l'examen clinique


• l'interrogatoire se concentrera principalement sur l'enquête nutritionnelle, l'évaluation du
contexte socio-économique ➔ la carence d'apports étant le cas de figure le plus fréquent.
• l'évaluation de la tolérance comporte la recherche d'une asthénie, de céphalées (fréquentes),
d'une dyspnée d'effort chez l'enfant, de difficultés alimentaires chez le nourrisson. La pré­
sence d'un souffle systolique fonctionnel est banale.
Item n ° 213 -Anémie chez l'adulte et l'enfant 49

3. Examens paracliniques
À la différence de la prise en charge des carences martiales chez l'adulte, aucun examen
paraclinique systématique n'est à envisager à la recherche d'une étiologie sous-jacente.
L'éventualité d'une cause sous-jacente se présente néanmoins dans certains cas particuliers:
• adolescente réglée (saignements occultes gynécologiques),
• suspicion de syndrome de malabsorption (maladie cœliaque, allergie aux protéines de lait
de vache ... ),
• patient porteur d'un syndrome de prédisposition aux cancers, tels que Li-Fraumeni, polypose
adénoïde familiale (saignements occultes digestifs),
• patient psychotique ou autiste (auto-mutilations),
• non-correction de l'anémie après supplémentation bien conduite et bien prise.
N.B. L'association d'une carence martiale et d'une thalassémie est à suspecter chez le patient
d'origine méditerranéenne en cas de diminution forte du VGM, plus que ne le laisserait
supposer le degré d'anémie. Cependant, il est inutile de réaliser une analyse de l'Hb avant
correction de la carence (faux négatifs très fréquents) comme indiqué dans le point 4 des
RMO. Il convient de la demander après correction de la ferritine, en cas de persistance de
la microcytose.

4. Traitement
• Tardyferon (Cps de 80 mg de fer) à partir de 6 ans:
- 1 Cp/j de 6 à 10 ans,
- 1 à 2/j après 10 ans.
• Fumafer ou Ferrostrane solution buvable (34 mg de fer par cuiller à café):
- 1 à 2 cuillers / jour entre 5 et 8 kgs,
- 2 à 3 c./j entre 8 et 12 kgs,
- 3 à 4 c./j entre 12 et 20 kgs,
- 4 à 5 c./j entre 20 et 30 kgs (en 2 à 3 prises).
• Pendant 3 à 6 mois.
• Les effets indésirables sont à mentionner systématiquement.
• Traitement préventif chez le prématuré < 34 SA, jusqu'au 38 mois de vie.

Références médicales opposables (RMO)


1. Il n'y a pas lieu, pour dépister une carence martiale, de prescrire simultanément un dosage
de fer sérique et la ferritinémie.
2. Il n'y a pas lieu de prescrire un dosage de fer sérique, en présence d'une ferritinémie basse.
3. Il n'y a pas lieu, en cas d'anémie hypochrome microcytaire par carence martiale, de demander:
- une numération des réticulocytes,
- un myélogramme.

4. Il n'y a pas lieu de demander en première intention, devant une anémie microcytaire, une
électrophorèse de l'hémoglobine à la recherche d'une thalassémie hétérozygote sans s'être
assuré de l'absence de carence martiale.
5. Il n'y a pas lieu de prescrire la voie parentérale pour traiter une carence martiale, en raison
du risque d'effets indésirables, sauf dans les cas où la voie orale est impossible ou inadaptée
(malabsorption sévère, hémodialyse).
6. Il n'y a pas lieu de prescrire par voie orale, une forme galénique de fer destinée à la voie parentérale.
50

n ° 213. Anémie chez l'adulte et l'enfant

Anémies macrocytaires carentielles


(carence en 8 9 , carence en 8 12 )
•Mil&
► Anémie macrocytaire arégénérative
► B9 (folates): présence dans les fruits, légumes et foie, stock hépatique de quelques
mois, absorption au niveau du jéjunum proximal
► B12 (cobalamines): présence dans les viandes, poissons, œufs, stock hépatique de
plusieurs années, absorption au niveau de l'iléon terminal
► Myélogramme: moelle riche, mégaloblastes, asynchronisme nucléo-cytoplamsique
► Rechercher la cause de la carence vitaminique
► Première cause de carence en vitamine B12 : maladie de Biermer

GÉNÉRALITÉS

1. Physiologi1e
L'anémie macrocytaire carentielle peut être due à une carence en vitamine B12 (ou cobalamines)
ou en vitamine B9 (ou folates).
• La vitamine 8 12 est présente dans la viande, le poisson, les abats, les œufs et les laitages,
elle est absorbée au niveau de l'iléon terminal à condition qu'elle soit associée au facteur
intrinsèque sécrété par les cellules pariétales du fundus gastrique.
• La vitamine 8 9 est présente dans les légumes (épinards, brocolis), les fruits, et le foie, elle
est absorbée au niveau du jéjunum proximal.
• Toutes deux sont stockées au niveau hépatique essentiellement avec des réserves pour
plusieurs années pour la vitamine B12 et quelques mois pour les folates.

2. Physiop,at1ho1:og'ie
• Les vitamines B9 et B12 sont toutes 2 nécessaires à la synthèse d'ADN. La carence en
l'une ou l'autre de ces vitamines va entraîner une accumulation héminique avec absence
de division cellulaire responsable d'une macrocytose (schématiquement: réduction du
nombre de mitoses aboutissant à un globule rouge volumineux).
•' Tous les tissus à renouvellement cellulaire rapide seront également touchés par cette carence
(muqueuses notamment).
Item n ° 213 -Anémie chez l'adulte et l'enfant 51

DIAGNOSTIC CLINIQUE

1. Caractéristiques cliniques communes aux carences en folates


et en vitamine 8 12
• Conséquences hématologiques:
- Syndrome anémique d'installation progressive et habituellement bien supporté (parfois
jusqu'à des valeurs< 5 g/dl).
• Conséquences extra-hématologiques (sd carentiel):
- Fragilité des phanères: ongles mous et cassants, cheveux secs et fragiles,
- Peau sèche,
- Atteinte de la muqueuse oro-digestive: xérostomie, glossite dite de Hunier, œsophagite,
gastrite.

2. Caractéristique clinique propre à la carence en vitamine 8 12 :


la sclérose combinée de la moelle
• Elle est rare.
• La symptomatologie est souvent fruste.
• Elle est caractérisée par l'association d'un syndrome pyramidal (parésie, Babinski bilatéral)
et d'un syndrome cordonal postérieur (sensation de marcher sur du coton, hypopallies­
thésie) bilatéraux.

- DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE

1. Hémogramme
• Anémie normochrome macrocytaire (VGM parfois> 120 fl) arégénérative.
• Neutropénie et thrombopénie frustes parfois associées.
N.B. Attention, il peut exister une carence mixte en folates ou vitamine 8 12 et en fer auquel cas
l'anémie peut être normocytaire.

2. Frottis sanguin
Il retrouve les stigmates de dysérythropoïèse avec:
• Corps de Jolly (débris nucléaires), ponctuations basophiles (acides nucléiques résiduels),
anneaux de Cabot (vestiges du fuseau) au niveau des hématies,
• Polynucléaires hypersegmentés,
• Plaquettes géantes.
52 Hématologie générale

3. Myélogramme
Rappelons qu'il doit être systématique devant toute anémie normo ou macrocytaire arégé­
nérative en l'absence de cause évidente (insuffisance rénale connue, éthylisme chronique
notoire par exemple). En effet, on ne peut se permettre de passer à côté d'une étiologie grave
(myélodysplasie, envahissement médullaire) associée à la carence vitaminique.
• Mœlle riche.
• Lignée érythroblastique largement représentée confirmant l'érythropoïèse inefficace.
• Précurseurs hématopoïétiques de grande taille avec asynchronisme de maturation nuclé­
ocytoplasmique (synthèse correcte d'hème mais absence de maturation nucléaire en raison
du manque d'ADN): on parle de mégaloblastes (d'où le nom d'anémie mégaloblastique).
On parle parfois de « moelle bleue » en raison de l'abondance de cytoplasme qui apparaît
bleu à la coloration.
N.B. Il n'y a pas de blocage de maturation, pas d'accumulation b/astique et pas d'infiltration par
des cellules malignes.

4. Dosages vitaminiques (à réaliser avant toute supplémentation)


• Folates sériques: ils sont diminués en cas d'anémie par carence en folates (N > 5 µg/1).
• Vitamine B 12 sérique: abaissée en cas d'anémie par carence en vitamine B 12 (N > 200 ng/1).
N.B. Les folates intra-érythrocytaires sont abaissés dans les dép/étions en folates anciennes et
restent bas en début de correction de la carence (par traitement substitutif ou en cas de
transfusion) d'où parfois l'intérêt de leur dosage.
On peut retrouver quelques stigmates d'hémolyse en raison d'un avortement de l'érythro­
poïèse. Les LDH sont souvent très élevées dans les anémies méga/ab/astiques.

DIAGNOSTIC ÉTIOLOGIQUE

1. Carence en folates
• Diminution des apports alimentaires en folates:
- Dénutrition,
- Alcoolisme chronique,
- Alimentation parentérale sans supplémentation en folates.
• Augmentation des besoins en folates:
- Grossesse,
- Croissance,
- Anémie hémolytique chronique,
- Dermite exfoliatrice sévère (psoriasis).
N.B. Les deux causes sont souvent intriquées (exemple . grossesses répétées et rapprochées et
dénutrition dans les pays en voie de développement).
Item n ° 213 -Anémie chez l'adulte et l'enfant 53

• Malabsorption:
- Cause médicale:
maladie cœliaque,
maladie de Crohn,
insuffisance pancréatique exocrine.
- Cause chirurgicale:
résection chirurgicale du jéjunum proximal.
• Iatrogène: par blocage de la transformation de l'acide folique en son métabolite réduit
l'acide folinique:
- Bactrim®,
- Méthotrexate,
- Malocide® .

2. Carence en vitamine 8 12
• Diminution des apports alimentaires en vitamine 8 12 (exceptionnel):
- Régime végétalien strict.
• Malabsorption:
- Déficit en facteur intrinsèque:
anémie de Biermer (voir encadré ci-après),
gastrite atrophique.
- Autres causes médicales:
maladie de Crohn,
maladie cœliaque,
maladie d'lmerslund: cause rare dans les familles nordiques (défaut du récepteur
de la vitamine Bd,
infection par le botriocéphale (parasite des poissons des lacs du Nord de l'Europe),
pullulation microbienne.
- Causes chirurgicales:
gastrectomie totale sans vitaminothérapie substitutive associée,
résection iléale.
N.B. Dans les ma/absorptions les carences sont parfois mixtes en fo!ates et en vitamine B 12.
54 Hématologie générale

-TRAITEMENT

1. Carence en vitamine 8 12
• Traitement d'attaque:
- Vitamine B injectable: 1 000 µg/jour IM pendant 10 jours.
12

• Traitement d'entretien:
- Vitamine B injectable: 1 000 µg/mois IM à vie, injection trimestrielle probablement
12
suffisante.
• Effets secondaires:
- Douleur au point d'injection,
- Allergie au point d'injection,
- Coloration des urines en rouge.
• Traitement associé:
- Beaucoup associent un traitement en fer (200 mg de fer élément/jour po) pour éviter de
démasquer une carence martiale sous-jacente.
N.B. Efficacité de la voie per os à de fortes doses de vitamine 8 12 dans certains cas (AVK inter­
disant les injections IM etc.).

2. Carence en folates
Vitamine B9 en comprimé: Speciafoldine® 5 mg par jour pendant un mois.

3. Traitement préventif
• Traitement substitutif à vie en vitamine B12 pour tous les patients gastrectomisés ou ayant
subi une résection iléale.
• Traitement préventif des anomalies de fermeture du tube neural, à partir du projet de grossesse
jusqu'à la 128 semaine d'aménorrhée: 0,4 mg/j dans le cas général, 5 mg/j si antécédents
d'anomalie de fermeture du tube neural, diabète, traitements anti-épileptiques ...
N.B. Ne pas oublier la surveillance par fibroscopie gastrique des patients atteints de maladie
de Biermer.
Item n ° 213 -Anémie chez l'adulte et l'enfant 55

Anémie de Biermer
1. Généralités
- Définition: gastrite chronique auto-immune responsable d'une atrophie fundique entraînant:
une achlorydrie - augmentation de la gastrine par absence de rétrocontrôle,
- un déficit en facteur intrinsèque - défaut d'absorption de la vitamine 8 12 au niveau
de l'iléon terminal.
- Épidémiologie: la maladie de Biermer ou anémie pernicieuse est la cause la plus fréquente
de carence en vitamine B12.
- Elle atteint plus fréquemment les femmes de plus de 60 ans.
2. Clinique
- Voir caractéristiques cliniques de la carence en vitamine B12.
- Rechercher des signes de pathologies auto-immunes associées:
- Dysthyroïdie,
- Diabète,
- Vitiligo (plaque de dépigmentation cutanée),
- Possiblement dans le cadre d'une polyendocrinopathie auto-immune de type 1 ou 2.
3. Biologie
- Dosage vitaminique:
Carence isolée en vitamine B12 (folates normaux),
- Dosage de la gastrine: toujours augmenté en cas d'achlorydrie par absence
de rétrocontrôle (attention le dosage de la gastrine est aussi augmenté en cas de prise
d'IPP).
- Bilan auto-immun:
- Anticorps anti-facteur intrinsèque: très spécifiques mais peu sensibles,
- Anticorps anti-cellules pariétales gastriques: très sensibles mais peu spécifiques.
- Bilan digestif:
Fibroscopie gastrique avec biopsies: retrouve une gastrite atrophique fundique
non spécifique,
- Tubage gastrique: le dosage de l'acide chlorhydrique retrouve une achlorhydrie
pentagastrino- et histamino-résistante (absence de stimulation par la pentagastrine
ou l'histamine normalement observée),
Dosage du facteur intrinsèque dans le liquide gastrique: absence.
- Pathologies auto-immunes associées:
- Bilan thyroïdien +/FAN.

N.B Le test de Schilling n'est plus utilisé.


4. Traitement
- Voir traitement de la carence en vitamine B12.
5. Surveillance
Normalisation de l'hémogramme,
Fibroscopie gastrique régulière (env/2 ans car risque de cancer gastrique augmenté).
u,
cr,

> (D,
:3
CD,
ô
Fer Vitamine B 12 Folates (vitamine B 9)
CD =ëi,
=
U)

Fer héminique (absorbé directement): boudin noir, Protéines animales I» (D,


Végétaux crus
=-
CD (D,
Source foie de veau, huîtres, viande rouge (abats, viande, poisson) (légumes verts et fruits)
Absente des végétaux CD
• Fer non héminique: vin rouge, céréales, cacao, lentilles, épinards
CD
U)
Duodénum Iléon terminal Jéjunum
Absorption (en association au FI sécrété
par les cellules gastriques fundiques)

Réserves Faibles Importantes (3-4 ans) Faibles (3-4 mois)


1
NFP Anémie microcytaire +/- thrombocytose Anémie macrocytaire +/- leucopénie/thrombopénie

Mécanisme de l'anémie Défaut de synthèse d'Hb Défaut de synthèse d'ADN

• Carence d'apport (exceptionnelle) • Carence d'apport= régime • Carence d'apport+++


Perte ➔ saignement chronique végétalien strict (exceptionnelle) - Dénutrition
Gynécologique: femme en âge de procréer • Malabsorption - Éthylisme chronique(4l
Digestif: homme, femme ménopausée Déficit en FI: maladie - Nutrition parentérale
- Saignées volontaires (Sd de Lasthénie de Ferjol) de Biermer +++, gastrectomie Augmentation des besoins
- Maladie de Crohn Physiologique: grossesse,
• Malabsorption
- Résection iléale prématurité
- Résection du grêle, de l'estomac(')
- Sd de non-dissociation de la B1 pl Pathologique: hémolyse
Étiologie Gastrite, maladie cœliaque
- Thé(2l chronique

Augmentation des besoins • Malabsorption+++


Nourrisson, enfant - Maladie cœliaque
- Grossesse - Résection jéjunale

• Médicaments antifoliques( 5 l:
Méthotrexate, Triméthoprime
(Bactrim®)
Fer Vitamine B 12 Folates (vitamine B 9)
Étiologique +++ • Étiologique si possible • Étiologique si possible
Supplémentation : Fer métal po, 100-200 mg/j pendant 4 mois, • Supplémentation: Cyanocobalamine • Supplémentation( 6):
jusqu'à correction des réserves (ferritinémie) IM - Acide folique (Spéciafoldine® )
Tt curatif - Traitement d'attaque: po 5 mg/j en cas de carence
1 000 ug x 10 injections, puis - Acide folinique po (Lederfoline® )
- Traitement d'entretien: ou IV (Elvorine® )
1 000 ug/3 mois, à vie en cas de traitement antifolique( 5)
---.----
Patients gastrectomisés ou résection • Hémolyse chronique
Tt préventif
iléale

• Troubles digestifs: douleurs abdominales, diarrhées, constipation, • Douleur au point d'injection Aucun
nausées (moins importantes si prise pdt repas mais absorption • Réaction allergique
Effets secondaires du Tt
moindre)
• Coloration des urines en rouge
Selles noires
(1) L'acidité gastrique rend le fer plus absorbable (état ionisé) donc gastrectomie ➔ carence martiale
(2) Le thé diminue l'absorption du fer (4) Mécanismes de la carence en folates chez l'éthylique chronique: malnutrition
(3) Sd de non-dissociation de la vitamine 812 de ses protéines porteuses: + ma/absorption (toxicité OH et carence en folates) + altération du stockage
• Mécanisme: incapacité de /'organisme à libérer et extraire la 812 des aliments et protéines et de la libération hépatique des folates
auxquelles elle est liée /5) Les médicaments antifoliques (MTX, 8actrim) bloquent la conversion d'acide 0
• Étiologies: folique en acide fa/inique en inhibant l'enzyme DHFR (dihydrofolate réductase) �
l'v
(A)
- Gastrite atrophique, infection à Helicobacter Pylori (6) Si administration de folates à un patient porteur d'une carence en vitamine 812, 1
- Prise d'anti-acide (/PP) ou de biguanide (metformine) risque de troubles neurologiques irréversibles (➔ supplémenter en vitamine )>
::::,
• Terrain. sujet âgé (1'• cause de carence en 812 dans cette population) 812 en l'absence de dosage disponible). CD,

l
• Clinique: manifestations hématologiques et neuropsychiatriques (neuropathie, troubles
=
CD
C")
cognitifs) fréquentes CD
• Diagnostic d'élimination
• Traitement par Vitamine 812 orale possible
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58

n° 213. Anémie chez l'adulte et l'enfant

Anémies hémolytiques

► L'hypothèse d'une hémolyse doit être évoquée devant une anémie normo-macrocy­
taire régénérative
► Devant une anémie normo-macrocytaire régénérative, il convient de doser les marqueurs
de l'hémolyse: LDH, haptoglobine, bilirubine libre
► Hémolyse: LDH élevées, haptoglobine effondrée, bilirubine libre élevée
► L'hémolyse peut être due à une cause corpusculaire ou extra-corpusculaire
► L'hémoglobinurie paroxystique nocturne est une exception car il s'agit d'une cause
acquise d'hémolyse corpusculaire
► Tout patient atteint d'une hémolyse chronique doit bénéficier d'une supplémentation
en vitamine B 9 (folates)

DÉFINITION
Anémie provenant d'une destruction anormale des globules rouges. Cette anémie est classi­
quement régénérative et macrocytaire. La macrocytose est liée aux nombreux réticulocytes
dont le VGM est élevé (autour de 110-120 fl). Au frottis sanguin, il n'y a pas de macrocytose
avéré des globules rouges eux-mêmes.

Étiologies des anémies hémolytiques (AH)

AH corpusculaires AH extra-corpusculaires

• ]•
,
Liées à un défaut intrinsèque au GR Liées à une agression extrinsèque au GR
Anomalies congénitales (sauf HPN) Anomalies acquises

• Anomalies de membrane: , lmmunologiques (Coombs+):


- Sphérocytose héréditaire - Auto-immune (AHAI)
- Hémoglobinurie paroxystique nocturne - lmmuno-allergique (iatrogène)
- Alloimmune (incompatibilité fœto-maternelle ou
• Anomalies enzymatique:
transfusionnelle)
- Déficit en G6PD
- Déficit en PK • Non-immunologiques (Coombs-):
- Infectieuses (paludisme ..)
Anomalies de l'Hb:
- Toxiques (plomb...)
- Thalassémie (anomalie quantitative: îHbA2)
- Mécanique (valve, MAT .. ---. schizocytes)
- Drépanocytose (anomalie qualitative: HbS)
Item n ° 213 -Anémie chez l'adulte et l'enfant 59

BILAN INITIAL EN URGENCE


DEVANT UNE SUSPICION D'HÉMOLYSE
• Triade diagnostic: LDH, haptoglobine, bilirubine libre
- Bilan d'orientation étiologique devant une anémie hémolytique: Coombs direct, frottis
sanguins (avec recherche de schizocytes ++),
- Bilan pré-thérapeutique : groupe, RAI (on essaie dans la limite du possible de ne pas
transfuser mais il n'est pas rare d'être obligé de le faire devant une mauvaise tolérance).

Attention le pronostic vital peut être mis en jeu lors d'une hémolyse aiguë.

Hémolyse lntra-vasculaire lntra-tissulaire

Lyse par le complément Phagocytose dans les tissus (rate, foie)


dans la circulation sanguine -+ Hémolyse chronique
Mécanisme
-+ Hémolyse aiguë

- l ----
· Début brutal • Pâleur, asthénie
1. • Ictère à bilirubine librel****l
Fièvre +/- frissons
• Malaise intense, hypotension, nausées, • SMG (élimination des GR par le système
diarrhées, choc réticulo-endothélial)
• Douleurs lombaires et/ou abdominales,
Clinique céphalées
• Urines « rouge porto " (hémoglobinurie)
• Ictère retardé (� 48 h)
• Risque d'insuffisance rénale aiguë ++

• i Haptoglobine l*l
• î BR libre l**l
Biologie
• î LDH l**l

• Test de Coombs
Bilan • Frottis sanguin (sphérocytes, schizocytes .. )
étiologique • Électrophorèse de l'hémoglobine et ektacytométrie(***) en 2• intention

(*) L'haptoglobine est le marqueur le plus sensible d'hémolyse. Il s'agit d'une protéine synthétisée par le foie dont
la fonction est de fixer /'Hb libre. Elle augmente en cas de syndrome inflammatoire et peut donc être normale
ou élevée en cas de syndrome inflammatoire associé à l'hémolyse.
(**) L'augmentation des LDH et de la bilirubine libre sont des marqueurs d'hémolyse moins sensibles et moins
spécifiques. Les LDH peuvent être augmentées lors de la lyse d'autres types cellulaires (/DM, nécrose tissulaire,
hépatite .. .) et inversement les LDH peuvent être normales en cas d'anémie hémolytique notamment intratissulaire.
À noter que les LDH sont souvent très élevées dans les anémies méga/ab/astiques. La bilirubine libre peut être
augmentée en cas de résorption d'un hématome ou de maladie de Gilbert (déficit en glucuronyl-transférase).
(***) Ektacytométrie: test permettant l'étude de la déformabilité et la fragilité des globules rouges (résultat altéré dans
les anomalies de membranes).
(****) Dans l'ictère à BR libre, il n'y a pas de prurit, les selles sont foncées et les urines sont claires, à /'inverse de
l'ictère rétentionnel (à BR conjuguée) qui s'accompagne d'un prurit, de selles décolorées et d'urines foncées.
60

Anémies hémolytiques corpusculaires


par anomalie de la membrane
(HPN, Minkowski-Chauffard)

HÉMOGLOBINURIE PAROXYSTIQUE NOCTURNE (HPN)


OU MALADIE DE MARCHIAFAVA-MICHELI

1. Généralités
• Seule anémie hémolytique corpusculaire acquise.
• Touche les deux sexes indifféremment.
• Est due à une mutation au niveau d'un gène (PIG-A) conduisant à un défaut d'ancrage des
protéines à ancre GPI protégeant notamment les hématies de la lyse par le complément
(COSS, CDS9).
• Cette lyse survient par accès notamment la nuit en raison de la diminution du pH sanguin.
• Il existe également un risque accru de thrombose.

2. Diagnostic clinique
• La maladie évolue par crises d'hyper-hémolyse caractérisées par:
- Un syndrome anémique,
- Une hémoglobinurie plus volontiers nocturne avec coloration rougeâtre des urines qui
noircissent à la lumière (Urines Porto),
- Un ictère cutanéo-muqueux,
- Parfois des douleurs lombaires ou abdominales.
• On retrouve parfois un facteur déclenchant:
- Infection virale, vaccination,
- Chirurgie,
- Effort physique important.
N.B. Il existe une splénomégalie dans 50 % des cas environ due à l'hémolyse chronique.

3. Diagnostic biologique
• Stigmates classiques d'anémie hémolytique.
• Neutropénie et thrombopénie retrouvées dans 30 % des cas (pouvant évoluer vers l'aplasie)
dans ce cas réaliser un myélogramme voire une biopsie médullaire.
• lmmunophénotypage sanguin à la recherche d'un clone HPN: diagnostic porté sur l'exis­
tence d'une population déficitaire notamment en CD55 et CD59 au niveau des 3 lignées
ou plus récemment par le marquage FLAER.
Item n ° 213 -Anémie chez l'adulte et l'enfant 61

4. Complications
• Aplasie médullaire.
• Leucémie aiguë myéloïde rare.
• Crises d'hyperhémolyse.
• Thromboses veineuses: notamment syndrome de Budd-Chiari (thrombose des veines
sus-hépatiques), mais aussi thrombophlébite cérébrale, mésentérique, portale ou rénale,
embolie pulmonaire.
• Susceptibilité aux infections augmentée.

5. Traitement
• Symptomatique:
- Transfusions de concentrés de globules rouges en cas de déglobulisation sévère
(déplasmatisés),
- Anticorps monoclonal dirigé contre la protéine C5 du complément (Soliris® ) ayant main­
tenant l'AMM,
- Pas de consensus pour un traitement anti-agrégant plaquettaire en prévention primaire.
• Étiologique:
- Lallogreffe de moelle osseuse est discutée en cas de complications sévères récidivantes,
ainsi que dans les cas d'aplasie médullaire, chez le sujet jeune.
• Préventif des complications:
- Contre-indication aux œstro-progestatifs (risque majoré de thrombose),
- Traitement anticoagulant au long cours en prévention secondaire après accident throm-
botique.

SPHÉROCYTOSE HÉRÉDITAIRE
OU MALADIE DE MINKOWSKI-CHAUFFARD

1. Généralités
• Anémie hémolytique corpusculaire la plus fréquente en France.
• Touche les deux sexes indifféremment.
• Mode de transmission autosomique dominant dans la grande majorité des cas (75 %)
mais il existe une forme de transmission récessive (25 %) expliquant l'existence de cas
sporadiques.
• Est due à des anomalies de protéines membranaires du GR responsable d'une perte de
surface membranaire avec déformation sphérique: on parle de sphérocytes (on peut
observer certains microsphérocytes résultant de la phagocytose partielle de sphérocytes
par les macrophages, néanmoins le VGM est habituellement normal dans la maladie).
• Ces sphérocytes sont peu déformables et sont séquestrés puis détruits dans la rate.

2. Diagnostic clinique
• Le diagnostic est souvent porté dans l'enfance sur la clinique, la survenue de complications
et l'existence d'antécédents familiaux de sphérocytose héréditaire.
• La maladie évolue par crises d'hyperhémolyse caractérisées par:
- Un syndrome anémique franc,
- Un ictère cutanéo-muqueux franc.
62 Hématologie générale

• Dans un contexte d'hémolyse chronique:


- Syndrome anémique modéré,
- Subictère conjonctival,
- Splénomégalie (les sphérocytes sont détruits dans les capillaires spléniques).

3. Diagnostic biologique
• Stigmates classiques d'hémolyse.
• Frottis sanguin: présence de sphérocytes (peut aussi se rencontrer dans d'autres anémies
hémolytiques notamment auto-immunes ou par enzymopathie).
• Les tests spécialisés d'hémolyse retrouvent une augmentation de l'autohémolyse mais sont
peu spécifiques.
• Le marquage des GR au chrome 51 (rarement réalisé) montre un raccourcissement de la
durée de vie avec une séquestration splénique.
• Test à l'éosine 5-maleimide (EMA) (anomalie membranaire - déficit en Protéine Bande 3 -
évaluée par cytométrie en flux),
• l'.ektacytométrie (quantification de la déformabilité), test le plus spécifique réalisé dans
quelques laboratoires spécialisés, permet de poser le diagnostic.

4. Complications
• Hyperhémolyse (suite à un stress: infection, grossesse, effort physique).
• Lithiase vésiculaire pigmentaire avec risque de colique hépatique ou cholécystite aiguë.
• Érythroblastopénie aiguë dans les suites d'une infection par le parvovirus 819 (détruit les
érythroblastes entraînant une impossibilité de régénérer l'anémie chronique: y penser si
les réticulocytes sont bas).

5. Traitement
• Splénectomie: elle constitue le traitement de référence de la sphérocytose héréditaire, après
l'âge de 5 ans (en raison du risque infectieux trop grand avant). Elle doit être encadrée par
les mesures préventives présentées en encadré.
• Transfusions de CGR en cas de déglobulisation sévère.
• Supplémentation en acide folique comme dans toute anémie hémolytique chronique.
• Enquête familiale et conseil génétique.
63

Anémies hémolytiques corpusculaires


par anomalie enzymatique
(déficit en G6PD, PK)

- DÉFICIT EN G6PD (GLUCOSE-6-PHOSPHATE


DÉSHYDROGÉNASE)

1. Épidémiologie
• Cause la plus fréquente d'anémie par déficit enzymatique dans le monde.
• Environ 400 millions de personnes atteintes.
• Prédominance masculine liée au mode de transmission récessif lié à l'X.
• Prédomine dans le pourtour méditerranéen, l'Afrique noire, l'Asie.

2. Physiopathologie
• La G6PD permet via la production de NADPH au cours du shunt des pentoses de lutter
contre le stress oxydatif.
• En l'absence de G6PD, ce stress oxydatif est responsable d'une fragilisation des membranes
avec hyperhémolyse.
• Tout facteur responsable d'une augmentation du stress oxydatif (et notamment certains
médicaments) est susceptible d'entraîner une crise d'hyperhémolyse.

UlùM hVi'lk@Wl &i01MWINIUMiilM11111Mhfüill kùEIIWâiîbilWR1I


1 1 1

■ Médicaments:
- Sulfamides (Bactrim® ++, Diamicron®... ),
- Antipaludéens (Disulone®),
- Quinolones (Ciflox®, Oflocet®),
- Dérivés nitrés (Trinitrine®),
- Bleu de méthylène.
■ Aliments:
- Fèves.
■ Autres:
- Infections (hépatites virales notamment).

3. Diagnostic clinique
• Les poussées d'hémolyses sont caractérisées par:
- Un syndrome anémique,
- Un ictère cutanéo-muqueux.
64 Hématologie générale

• Il existe schématiquement deux formes d'atteinte:


- Une forme évoluant par crises hémolytiques,
- Une forme à laquelle s'ajoute une hémolyse chronique (patients originaires du pourtour
méditerranéen) où l'on retrouve alors une splénomégalie dès l'enfance.

4. Diagnostic biologique
• Au cours des crises:
- Stigmates d'hémolyse,
- Frottis sanguin: corps d'Heinz au sein des GR (présence d'hémoglobine dénaturée),
- Tests spécialisés d'hémolyse montrant une hyperhémolyse.
N.B. Attention: le taux de G6PD peut être normal à la phase aiguë car les réticulocytes sont riches
en G6PD.
• À distance des crises:
- Stigmates d'hémolyse en cas de forme chronique,
- Frottis sanguin: corps d'Heinz en cas d'adjonction d'agent oxydant,
- Taux de G6PD diminué.

5. Traitement
• De la crise:
- Arrêt du facteur déclenchant,
- Transfusion en cas de déglobulisation massive.
• Préventif:
- Éducation du patient avec liste des facteurs déclenchants,
- Enquête familiale.

- DÉFICIT EN PK (PYRUVATE KINASE)

1. Généralités
• Plus rare que le déficit en G6PD.
• Maladie génétique autosomique récessive.
• La PK sert à la synthèse d'ATP.
• En cas de déficit, déstabilisation membranaire avec hémolyse. Le diagnostic est pédiatrique.

2. Diagnostic
• Clinique: hémolyse chronique variable.
• Biologique: stigmates d'hémolyse+ taux de PK abaissé.

Traitement
• Transfusion si anémie sévère.
• Splénectomie à discuter si destruction splénique des GR.
Item n ° 213 -Anémie chez l'adulte et l'enfant 65

Déficit G6PD PK
• Oxyda-réduction • Glycolyse
Rôle des enzymes -+ lutte contre l'oxydation -+ production d'énergie
Via NADPH Via ATP

Fréquence +++ Rare

Transmission Récessif lié à l'X Autosomique récessif

Sexe Hommes Hommes = Femmes

Méditerranée, Afrique, Asie Europe du Nord


Origine
(cf. paludisme*)

Hémolyse Aiguë Chronique

Agents oxydants (hémolyse


provoquée):
Facteurs déclenchants - Médicaments
- Infections
- Aliments (fèves .. )

7
Corps de Heinz!**) • Diagnostic pédiatrique
Diagnostic
• Dosage de l'enzyme!***) • Dosage de l'enzyme

(*) Le déficit en G6PD est protecteur contre les formes sévères de paludisme.
(**) Corps de Heinz= dépôts d'Hb oxydée fixés à la membrane.
(***) Les réticulocytes sont riches en G6PD donc le dosage doit être fait à distance de l'hémolyse (2-3 mois)
ou couplé avec une autre enzyme érythrocytaire (PK) pour interprétation.
66

Anémies hémolytiques corpusculaires


par anomalie de l'hémoglobine
(drépanocytose, thalassémie)

GÉNÉRALITÉS SUR L'HÉMOGLOBINE


• L'.hémoglobine (Hb) est composée de 4 molécules de globines identiques 2 à 2.
- La sous-unité a est toujours présente quel que soit le type d'Hb,
- Chez le fœtus, l'Hb F y2a2 est prédominante,
- Chez l'adulte et l'enfant, l'Hb A �2a2 est prédominante,
- L'.Hb A2 62a2 apparaît après la naissance et reste minoritaire.
• On comprend aisément que chez l'enfant et l'adulte ce sont donc les sous-unités a et 13
qui jouent un rôle fondamental.
- Il existe 2 copies du gène a sur chaque chromosome 16 d'un individu soit 4 en tout,
- Il existe 1 copie du gène � sur chaque chromosome 11 d'un individu soit 2 en tout.

Globine

- Hème = protoporphyrine + fer


- 4 globines = 2 chaînes a+ 2 chaînes � (HbA),
ô (Hb A2), ou y (HbF)

THALASSÉMIES

1. Physiopathologie
Transmission autosomique récessive.
• Anomalie de la synthèse de la globine responsable, comme dans le cas des anémies
ferriprives, d'une microcytose.
• Tetramères a-4 ou �-4 formés en excès (car il n'existe plus un ratio 2:2 entre les globines)
responsables d'une hémolyse intramédullaire et périphérique.
N.B. Bien qu'elle soit classée dans cet ouvrage dans les anémies hémolytiques qui sont clas­
siquement régénératives, il existe une composante centrale expliquant le caractère peu
régénératif ou arégénératif de l'anémie.
Item n ° 213 -Anémie chez l'adulte et l'enfant 67

2. a-thalassémies
On les rencontre essentiellement en Asie et dans le pourtour méditerranéen mais également
en Afrique noire (où les formes mineures prédominent).
Comme les sous-unités a sont produites chez le fœtus, la symptomatologie peut apparaître
déjà in utero.

Comme il existe 4 gènes codant pour la sous-unité a, il existe 4 formes cliniques selon le nombre
de globines a délétées (mécanisme le plus fréquent) ou mutées:
• 4 gènes délétés ou mutés: anasarque de Bart
- Les sous-unités a sont remplacées par des sous-unités y chez le fœtus (Hb Bart = y4),
- Thalassémie non viable avec mort in utero ou périnatale avec anasarque fœtoplacentaire
(hydrops fœtalis).
• 3 gènes délétés ou mutés: a-thalassémie majeure ou hémoglobinose H
- Les sous-unités a sont en partie remplacées par des sous-unités � chez l'adulte (Hb H
= �4 à l'électrophorèse qui précipite pour former des corps d'Heinz sur le frottis sanguin),
- Anémie microcytaire hypochrome profonde peu ou arégénérative (en tout cas faiblement
par rapport à la profondeur de l'anémie),
- Il existe une splénomégalie.
• 2 gènes délétés ou mutés: a-thalassémie mineure ou trait thalassémique a
- Électrophorèse de l'Hb quasi normale (faible diminution de l'Hb A2),
- Microcytose isolée sur l'hémogramme.
• 1 gène délété ou muté: a-thalassémie silencieuse
- Électrophorèse normale, microcytose modérée, absence de répercussion clinique.
-
-
Hb F (fœtale)
globines
g2a2
-- naissance
80%
6mçis
4%
adulte
< 1%
-
HbA (adulte)
- c---
b2a2
-
20% 95%
1%
--
98%
-2%
-
HbA2 d2a2 0%

3. J3-thalassémies
On les retrouve dans le pourtour méditerranéen ainsi qu'au Moyen et Extrême-Orient.
Comme les sous-unités� sont produites à partir de la naissance, la symptomatologie n'apparaît
qu'au bout de quelques mois.
Comme il existe 2 gènes codant pour la sous-unité�. il existe 2 formes cliniques selon le nombre
de globines � mutées (mécanisme le plus fréquent) ou délétées:
• 2 gènes mutés ou délétés: �-thalassémie homozygote ou majeure ou anémie de Cooley
- Cliniquement:
syndrome anémique franc à partir de 3 mois,
splénomégalie par hémolyse,
hépatomégalie par érythropoïèse ectopique.
- Biologiquement:
anémie profonde microcytaire hypochrome arégénérative (ou peu régénérative),
stigmates d'hémolyse,
érythroblastose circulante,
absence totale d'Hb A à l'électrophorèse de l'Hb remplacée par Hb F.
• 1 gène muté ou délété: �-thalassémie hétérozygote ou mineure ou trait thalassémique �
- Cliniquement: asymptomatique,
- Biologiquement:
anémie hypochrome microcytaire modérée,
augmentation de l'hémoglobine A2 (> 3,5 %) à l'électrophorèse de l'Hb.
68 Hématologie générale

N.B. 1 Il n'est pas exceptionnel, notamment en Afrique, que les patients [3-thalassémiques hétéro­
zygotes ne soient pas anémiques.

N.B. 2 Il existe dans les thalassémies mineures (a et [3) une pseudo-polyglobulie (augmentation du
nombre de GR sans augmentation de l'Hb et de la masse globulaire).

N.B. 3 Il faut s'assurer de l'absence de carence martiale associée avant la réalisation d'une élec­
trophorèse de l'Hb car elle en fausse les résultats (en déprimant la synthèse des chaînes de
globines et donc le taux d'Hb A2 sur lequel repose notamment le diagnostic de �-thalassémie
mineure) réaliser un traitement substitutif préalable si besoin.

4. Complications des thalassémies majeures (a et �)


• Déglobulisation aiguë: notamment d'origine centrale après infection par le parvovirus
B19 responsable d'une érythroblastopénie et donc d'une impossibilité de régénération
médullaire temporaire.
• Déformations osseuses et troubles de la croissance staturo-pondérale par hyperplasie de
la moelle osseuse: crâne " en poils de brosse », faciès mongoloïde..
• Hépato-splénomégalie résultant de l'hématopoïèse extra-médullaire et de l'hémolyse.
• Hémochromatose secondaire post-transfusionnelle systématique: atteinte cardiaque,
endocrinienne (fonctions gonadotrope et pancréatique), cutanée.
• Lithiases pigmentaires dues à l'hémolyse chronique avec rarement colique hépatique.
N.B. En l'absence de soutien transfusionnel ces formes évoluent vers le décès.

5. Traitement des thalassémies majeures (a et �)


• Soutien transfusionnel:
Il vise à maintenir un taux d'hémoglobine suffisant pour empêcher les complications.
• Traitement chélateur du fer:
Il vise à diminuer ou du moins retarder les complications liées à l'hémochromatose secondaire:
- Par exemple: Déféroxamine (Desféral®) en SC la nuit plusieurs fois/semaine ou Déférasirox
(Exjade® ) par voie orale sous surveillance étroite de la fonction rénale (AMM dans les
�-thalassémies majeures transfusées fréquemment et dans les autres formes de surcharge
martiale post-transfusionnelles avec contre-indication ou intolérance au Desféral® )
N.B. Voir encadré pour les mesures communes aux thalassémies et aux drépanocytoses.
Item n ° 213-Anémie chez l'adulte et l'enfant 69

Thalassémie a 13
Homozygote Hétérozygote
Anasarque Hémoglobinose
Sous-type Mineure Silencieuse = Majeure = Mineure

i 1__ r
de Bart H
(Cooley) (trait)

14�t r-
Mutation/
3 gènes 2 gènes 1 gène

t-
2 gènes 1 gène
Délétion
l
Létale • Sd anémique Sd anémique
(anasarque dès la à partir
Clinique Asymptomatique Asymptomatique Asymptomatique
fœto­ naissance de 3 mois
placentaire) • SMG • SMG, HMG

1 Anémie
Anémie
Anémie modérée
Anémie modérée 1 profonde (Hb
modérée modérée ou absente
NFP (Hb = 9 - 10 g/dl) < 7 g/dl)
M1crocytose Microcytose (Hb > 10 g/dl)
m1crocyta1re microcytaire

+
possible possible microcytaire

r
(VGM < 65 fi)
(VGM < 75 fi)

7
1
Hémolyse Oui Oui Non Non Oui Non

• Hb Bart (y4) ,
HbH (B4)
_ _ _-+1-
---r.
HbA absente 1
HbA2
Électrophorèse = 90% >3,5%
= 10-30% Normale Normale 1• îîTHbF(30- •
Hb • HbH (B4) HbF norma I e

l
J_HbA = 70% 80%)
= 10% ou peu T
1
---+--------!-------+------
Aucun
• Transfusions • Transfusions (dépistage
du conjoint
• Chélation • Chélation
Traitement Aucun Aucun (NFP)
du fer du fer
pour conseil
• Allogreffe • Allogreffe génétique
éventuel)

DRÉPANOCYTOSE

1. Épidémiologie
• La drépanocytose, ou hémoglobinose S, ou anémie falciforme:
- Touche également les hommes et les femmes,
- Touche principalement les populations noires mais également le pourtour méditerranéen
ainsi que le Moyen-Orient.

2. Physiopathologie
• La drépanocytose se transmet sur un mode autosomique récessif (les hétérozygotes ont
suffisamment d'Hb normale pour ne pas avoir de symptômes).
• Elle est due à une mutation ponctuelle au niveau du gène de la globine � (conduisant à la
substitution d'un résidu Glutamine en un résidu Valine en position 6).
• On parle d'Hb S pour décrire cette globine anormale.
• Cette seule anomalie est responsable d'un changement structurel entraînant une poly­
mérisation, notamment lorsque la PaO2 baisse au niveau des capillaires, de l'hémoglobine S
avec déformation du GR en forme de faux (d'où l'appellation d'anémie falciforme).
70 Hématologie générale

• Cette polymérisation est responsable d'une double symptomatologie:


- Un versant thrombotique car les GR anormaux sont peu déformables et s'agrègent
au niveau des petits capillaires,
- Un versant hémolytique car ces hématies bloquées sont détruites par le système
macrophagique.
N.B. La drépanocytose confère un avantage sélectif aux hétérozygotes vis-à-vis du paludisme
puisque le parasite se développe plus difficilement dans les hématies atteintes.

3. Diagnostic clinique
• En l'absence de crise vaso-occlusive l'examen clinique est pauvre. Il retrouve:
- Une splénomégalie chez l'enfant (qui disparaît le plus souvent à l'âge adulte suite aux
multiples infarctus spléniques: la rate ne fonctionne alors plus et on parle d'asplénie
fonctionnelle),
- Un subictère cutanéo-muqueux lié à l'hémolyse chronique peut se rencontrer,
- Un syndrome anémique le plus souvent discret (malgré des chiffres bas en Hb la faible
affinité de l'hémoglobine S pour 1'0 2 permet une bonne distribution aux tissus).
• Penser à chercher des ATCD familiaux.
• Toute crise douloureuse chez un sujet noir est suspecte de crise drépanocytaire.

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• Modifications thermiques:
- Chaud (fièvre, chaleur),
- Froid (baignade, hiver).

• Infections,
• Déshydratation,
• Hypoxie (dont altitude, voyage en avion).

4. Diagnostic biologique
• Hémogramme:
- Anémie normochrome, normocytaire régénérative à 7-9 g/dl (parfois discrète macrocy­
tose en raison de l'hyperréticulocytose).
• Frottis sanguin:
- Il retrouve une anisocytose, une poïkilocytose, une polychromatophilie, la présence de
ponctuations basophiles,
- Il retrouve surtout des drépanocytes (ou hématies falciformes).
• Hémolyse chronique:
- LDH augmentés,
- bilirubine libre augmentée,
- haptoglobine effondrée.
• Électrophorèse de l'hémoglobine:
- La principale anomalie est bien sûr la présence d'une hémoglobine S (Hb S) norma­
lement absente chez l'individu sain (Hb S > 50%) si homozygote SS,
- Il n'existe pas d'hémoglobine adulte A normale (Hb A= 0%),
- L.:hémoglobine fœtale (Hb F) est anormalement élevée (Hb F > 5%).
N.B. L'électrophorèse de l'hémoglobine doit être réalisée si possible à distance de toute transfu­
sion.
Item n ° 213 -Anémie chez l'adulte et l'enfant 71

5. Les complications aiguës


• Crises vaso-occlusives:
Elles se manifestent par des douleurs souvent très intenses d'apparition brutale et pouvant
toucher tous les territoires:
- Ostéo-articulaire le plus souvent (classiquement au niveau des extrémités chez l'enfant
« syndrome pieds-mains », lombalgies et torticolis à l'adolescence),
- Thoracique (syndrome thoracique aigu avec: fièvre, hypoxie et anomalies radiologiques
des bases: urgence thérapeutique),
- Abdominal (éliminer un infarctus splénique, une cholécystite sur lithiase biliaire).
• Certains accidents vaso-occlusifs peuvent être graves:
- AVC le plus souvent ischémique (surveillance par le Doppler transcrânien pendant
l'enfance),
- Infarctus pulmonaire avec insuffisance respiratoire,
- Ostéonécrose aseptique fémorale,
- Occlusion de l'artère centrale de la rétine,
- P riapisme.
Il faut toujours chercher un facteur déclenchant (voir encadré).
N.B. Les crises vaso-occ/usives ne doivent pas masquer une pathologie associée ou un diagnostic
différentiel (!DM, embolie pulmonaire, ostéomyélite.. .). Le diagnostic est d'autant plus difficile
qu'une hyperthermie modérée est souvent présente lors des crises vaso-occlusives.

• Déglobulisation aiguë:
- D'origine périphérique par hyperhémolyse ou par séquestration splénique (notamment
chez le nourrisson avec pronostic vital en jeu),
- D'origine centrale par érythroblastopénie liée au parvovirus B19.
• Infections:
Elles sont fréquentes et parfois sévères (en raison de l'asplénie fonctionnelle due aux infarctus
spléniques):
- Germes encapsulés notamment (pneumocoque ++, méningocoque, haemophilus influen­
zae): pneumopathie, méningite,
- Autres (staphylocoque, salmonelle, E. Coli): ostéomyélite ...

6. Les complications chroniques


Elles résultent des multiples accidents vaso-occlusifs et/ou de la répétition d'épisodes infectieux.
• Chez l'enfant:
- Retard staturo-pondéral,
- Retard pubertaire,
- Séquelles psychologiques.
• Chez l'adulte:
- Séquelles neurologiques (post-AVC),
- Séquelles oculaires (rétinopathie proliférante avec risque d'hémorragie ou de décol-
lement rétinien),
- Séquelles cardio-pulmonaires (HTAP, cardiomyopathie dilatée),
- Séquelles pulmonaires (syndrome restrictif et obstructif),
- Séquelles néphrologiques (insuffisance rénale),
- Séquelles hépato-biliaires (sur lithiases),
- Autres (ulcères de jambes, impuissance, fausses couches ...).
72 Hématologie générale

7. Traitement
• Traitement des crises vaso-occlusives:
• Critères d'hospitalisation:
- Fièvre > 38,5 °C,
- Crise hyperalgique ou ne cédant pas après 24 heures de traitement ambulatoire,
- Complications graves (troubles neurologiques ou ophtalmologiques, priapisme),
- Syndrome anémique majeur,
- Syndrome thoracique aigu.
• Traitement hospitalier:
- Éviction des facteurs déclenchants (réchauffement+ hyperhydratation alcaline+ oxygéno-
thérapie),
- Traitement antalgique avec palier 3 si nécessaire,
- Transfusion voire saignée-transfusion(= exsanguino-transfusion) en absence d'amélioration,
- Érythraphérèse parfois:
en urgence si AVC, thrombose rétinienne, priapisme,
en différé si accident vaso-occlusif persistant,
- Antibiothérapie active notamment sur le pneumocoque si température > 38,5 °C.
• Traitement préventif:
- Des crises vaso-occlusives:
éviction des facteurs déclenchants (bonne hydratation, éviter changements brutaux
température et séjours en altitude),
traitement par Hydroxyurée,
saignée transfusion voire érythraphérèse parfois.
- Des infections par asplénie:
vaccins anti-pneumococcique, méningococcique et hœmophilus,
Oracilline® en continu chez l'enfant,
- Des séquelles: surveillance annuelle par:
échographie cardiaque et abdominale,
radiographies ostéoarticulaires,
FO,
protéinurie,
EFR,
Doppler transcrânien chez l'enfant.
N.B. La drépanocytose doit être considérée comme une maladie systématique, pouvant avoir des
conséquences sur tous les organes.

N.B. Voir tableau pour les mesures communes aux thalassémies et aux drépanocytoses.
Item n ° 213 -Anémie chez l'adulte et l'enfant 73

1�4fü4ii•111111Mdiit4i•@•Mt@9i4#14•btMH#utiiidht&iUii
■ Speciafoldine® : 1 comprimé/jour 10 jours/mois (à adapter),
■ Vaccination contre l'hépatite B,
■ Prise en charge à 100%,
■ Diagnostic prénatal lors des grossesses ultérieures (conseil génétique),
■ Enquête familiale,
■ Éducation du patient et de sa famille,
■ Idéalement prise en charge dans un centre de référence,
■ L'allogreffe de cellules souches hématopoïétiques est à discuter dans les formes de thalassémies
très sévères ou de drépanocytoses compliquées.

Distribution géographique des hémoglobinopathies congénitales

Thalassémie
Drépanocytose
74 Hématologie générale

Drépanocytose Thalassémie
• Anomalie qualitative de l'Hb (Hb anormale) • Anomalie quantitative de l'Hb
• Mutation ponctuelle (substitution d'un acide (défaut de synthèse d'une Hb normale)
aminé) de la chaîne� de la globine (Hb S) • Inactivation (mutation/délétion)
déformant les GR (hématies falciformes rigides) d'un ou plusieurs gènes de globine entraînant:
Physiopathologie
et entraînant: - Défaut de synthèse d'Hb ➔ microcytose
- Obstruction des petits vaisseaux ➔ ischémie - Excès de chaînes de globines homologues
- Phagocytose des hématies rigides (précipitation dans les GR) ➔ hémolyse
➔ hémolyse (intramédullaire et périphérique)

Transmission • Autosomique récessive • Autosomique récessive

Origine • Afrique noire* • Bassin méditerranéen et Asie du Sud-Est*


• Formes hétérozygotes (AIS): asymptomatique • Formes mineures: asymptomatique
i
• Formes homozygotes (S/S): symptomat que • Fo rmes majeures: anémie chronique
qq mois après la naissance (apparition de la
chaîne�):
Clinique
- Anémie hémolytique
- C r ises vaso-occlusives (osseux, cérébrales,
spléniques...) douloureuses (thromboses,
infarctus)
i
• Présence d'Hb S • a -thalassém es ➔ électrophorèse Hb:
i i
- Formes hétérozygotes: HbS < 50% - Normale si 2 chaînes a ou mo ns atte ntes
i
Diagnostic - Formes homozygotes**: HbS > 50% - Hb H (�4) si 3 chaînes a atte ntes
positif • �-thalassémies:
- Hétérozygotes: Hb A2 > 3,5 %
- Homozygotes: Hb A< 50%, Hb F > 50 %
• Aiguës • Aiguës
- Crises vaso-occlus ives - Dég lobulisation aiguë (pa rvovirus 819)
- Déglob ulisation aiguë
• Chroniques
(hémo lyse ou pa rvovirus 819)
- Déformations osseuses
• Chroniques - Hémochromatose post-transfusionnelle
- Infections (germes encapsulés, - Retard pubertaire
Complications salmonelle) par asplénie fonctionne lle - Trouble de la croissance staturo-pondérale
(infarctus spléniques)
- Séque lles des accidents vaso-occlus ifs
(neurologiques, oculaires, cardiaques,
pulmonaires, rénales ...)
- Retard pubertaire
- Trouble de la croissance staturo-pondérale
• Prévention et tra itement des n
i fections • Transfusions
• Traitement des crises • Chélateurs du fer
- Antalgiques • Greffe de moelle allogènique
- Hydratation
• Conseil génétique
- Transfusions
i r
Traitement - Tra tement du facteu déclenchant
(formes • Traitement de fond
symptomatiques) - Programme transfusionnel (saignées­
transfusions ou érythraphérèses)
- Hydroxyurée

• Conseil génétique
• Greffe de moe lle allogènique
L_- �-
-
(*) Mais présent partout dans le monde du fait des flux migratoires importants.
(**) Ou hétérozygotes composites (SIC, S/[ 3°thal, S/[ 3 +thal).
75

Anémies hémolytiques extra­


corpusculaires immunologiques
Le chapitre concernant les AHAI a été modifié selon les recommandations du protocole national
de diagnostic et de soins 2017 (PNDS Anémie Hémolytique Auto-Immune).

-ANÉMIES HÉMOLYTIQUES AUTO-IMMUNES (AHAI)

1. Épidémiologie et physiopathologie
• Les AHAI sont 5 à 10 fois plus rares que le purpura thrombopénique immunologique.
• Il existe une légère prédominance féminine (sex ratio entre 1.5 et 2).
• Il existe une mortalité non négligeable associée aux épisodes d'hémolyse aiguë (8 à 15 %
dans la littérature).
• Les AHAI sont dues à la fixation d'auto-anticorps sur les GR du patient reconnaissant des
antigènes notamment Rhésus, 1, i, ou P.
• Leur lyse s'effectue le plus souvent via l'action du complément.
• Néanmoins:
- Le complément ne fixe pas les lgA,
- Les lgM ne sont pas retrouvées sur le Coombs direct car elles sont éluées spontanément
à température ambiante lors du prélèvement,
- Le complément ne fixe pas les anticorps (même les lgG) si ceux-ci sont trop éloignés
les uns des autres sur la membrane du GR (ex.: anti-Rhésus).

2. Techniques diagnostiques
• Test de Coombs direct plutôt appelé test direct à l'antiglobuline actuellement ou TDA:
sert à détecter des anticorps fixés sur les GR du patient:
- Utilisation d'un sérum animal immunisé contre les anticorps et le complément humain,
S'il existe des anticorps (lgG ou lgA puisque les lgM ne sont pas retrouvées) et/ou du
complément sur la membrane des GR du patient ce sérum agglutine les GR,
En cas de positivité on précise le diagnostic en utilisant un sérum animal dirigé spécifi­
quement contre les lgG, lgA, et complément humains.
En cas de positivité les résultats sont rendus de la façon suivante:
Coombs positif de type:
---+ lgG OU,
---+ complément seul (correspondant à une lgM) ou,
---+ lgG + complément (présence d'lgG + lgM) ou,
---+ lgA rare.
Technique d'élution des anticorps: sert à identifier ces anticorps:
---+ Les anticorps sont détachés des GR,
---+ Ils sont testés contre un panel d'hématies test pour chercher une spécificité
(anti-Rhésus, anti-i, 1...),
---+ Selon la température de fixation ou optimum thermique (37 °C ou 4 °C) permet
de distinguer les Ac « chauds ,, et les Ac « froids ,, voire « biphasiques ,, (fixation
à 4 °C, hémolyse à 37 °C)
76 Hématologie générale

• Test de Coombs indirect: sert à détecter les Ac circulants du patient:


- Permet de déterminer le titre en anticorps par dilutions successives (sérum du patient
contre un panel d'hématies test).

3. Étiologies des AHAI


• Infection (virale ou bactérienne):
- cytomégalovirus,
- mononucléose infectieuse,
- mycoplasme,
- infections rhino-pharyngées virales de l'enfant.
• Hémopathie maligne:
- LLC,
- LNH plus souvent de type T,
- maladie de Waldenstrbm.
• Maladie auto-immune associée:
- lupus surtout,
- sclérodermie.
N.B. On parle de syndrome d'Evans lorsqu'il existe une thrombopénie auto-immune associée à
uneAHAI.
• Éliminer 2 étiologies particulières:
- tumeur de l'ovaire,
- prise de méthyl-dopa (HTA) ou de lévodopa (Parkinson).
• Idiopathiques (les plus fréquentes mais diagnostic d'élimination):
- maladie chronique des agglutinines froides,
- AHAI idiopathique isolée.

4. Clinique
• Les AHAI peuvent être aiguës ou chroniques.
• Elles peuvent être déclenchées par le froid (Ac « froids ») ou se produire à température
ambiante (Ac « chauds »).
• Les signes cliniques associent à des degrés variables:
- en cas d'hémolyse aiguë:
syndrome anémique,
ictère,
urines foncées ou porto fonçant à la lumière (hémoglobinurie),
douleurs abdominales ou lombaires,
- en cas d'hémolyse chronique:
syndrome anémique,
ictère,
splénomégalie.

5. Biologie
• On retrouve:
- Anémie normo ou macrocytaire régénérative (la macrocytose est liée à l'hyper-réticulo­
cytose),
- Stigmates classiques d'hémolyse (haptoglobine effondrée, LDH et bilirubine libre aug­
mentées),
- Abaissement du complément (C3 et C4) en cas de Coombs de type complément (seul
ou associé à une lgG).
• Pour les différences entre Ac chauds et froids voir tableau.
Item n ° 213 -Anémie chez l'adulte et l'enfant 77

6. Formes cliniques particulières


Parmi les AHAI à auto-Ac« chauds» (80%):
• AHAI liées à une tumeur de l'ovaire (rarissime) ou à la prise de méthyl-dopa:
- à part car guérissent avec l'éviction du facteur déclenchant (contrairement aux hémo­
pathies malignes dont le traitement n'a guère d'influence),
- Coombs de type lgG anti-Rh.

Parmi les AHAI à auto-Ac« froids» (20%):


• AHAI transitoires post-infectieuses:
- Le plus souvent chez l'enfant après une infection virale rhinopharyngée ou une infection
à mycoplasma pneumoniae,
- Présentation aiguë déclenchée typiquement par le froid,
- Anticorps lgG « biphasique » on parle d'hémoglobinurie paroxystique aiguë a frigore (rare),
- Ou anticorps lgM « froids » anti-1 (mycoplasma) ou i (EBV ) on parle d'agglutinines froides
(plus fréquent),
- Coombs direct de type complément le plus souvent,
- Évolution rapidement favorable (1 à 2 semaines) spontanément avec repos au chaud.
• Maladie chronique des agglutinines froides:
- Évolution chronique avec poussées d'hémolyse,
- Acrosyndrome voire nécrose des extrémités,
- lgM « froide » monoclonale anti-1,
- Idiopathique le plus souvent mais attention à une hémopathie lymphoïde (Waldenstrôm+)
pouvant se démasquer des années plus tard.

7. Traitement
• Il s'agit fréquemment d'une urgence, pouvant parfois mettre en jeu le pronostic vital.
• L'avis d'un spécialiste (hématologue, interniste, hémato-pédiatre le cas échéant) est nécessaire.
• Une bonne hydratation, notamment pour éviter la toxicité rénale de l'hémoglobinémie en
cas d'hémolyse intra-vasculaire aiguë, est recommandée.
• Spécifique (voir tableau),
• Mesures associées:
- Éviction du froid dans les AHAI à Ac « froids »,
- Traitement étiologique dans les tumeurs de l'ovaire et les hémopathies malignes,
- Supplémentation en folates systématique,
- Prévention du risque de MTEV par HBPM lors des poussées d'hémolyse aiguë,
- Prévention du risque de pneumocystose par Batrim si corticothérapie prolongée et/ou
rituximab,
- Vaccination saisonnière (grippe ++), et vaccinations usuelles en cas de splénectomie
envisagée (cf. chapitre PT/),
- Mesures associées en cas de corticothérapie au long cours,
- L'éducation thérapeutique du patient est essentielle, notamment la reconnaissance des
signes d'hémolyse (ictère, pâleur, asthénie, tachycardie...) devant motiver une consul­
tation en urgence.
N.B. Les transfusions de GR sont à éviter sauf en cas d'intolérance clinique majeure (elles aggravent
l'hémolyse).
78 Hématologie générale

IWMUll@1111111ii &i@W@,&i®M 1

Définition: anémie hémolytique auto-immune à anticorps froids de type lgM anti-érythrocytaire


(système 1/i essentiellement reconnu) fixant le complément à la surface des globules rouges
à basse température et entraînant une hémolyse.
• Étiologie: origine « idiopathique ,, le plus souvent, mais parfois associée à une hémopathie
lymphoïde B (Waldenstrôm).
• Symptomatologie: hémolyse chronique avec poussées d'hémolyse et d'acrocyanose déclenchées
par le froid.

Tableau récapitulatif des anémies hémolytiques auto-immunes

AHAI Auto-anticorps « chauds » Auto-anticorps " froids »

Fréquence 1 80% 20%

Nature de l'Ac lgG lgM

Spécificité
Anti-Rhésus Anti-1 ou anti-i
de l'Ac

Résultats du
lgG ou lgG+ Ct Ct(*)
test de Coomb
. Idiopathique . Idiopathique = Maladie des agglutinines

.
• Secondaire: froides(**)
- Hémopathie lymphoide maligne (LLC ) Secondaire:

Étiologies
- Maladie auto-immune (LED ... )
.
- 1 nfection:
- Tumeur ovarienne
- Médicament: a-méthyl-dopa (Aldomet® ) . Virale (MNI, CMV, VIH)
Bactérienne (mycoplasma
pneumoniae)
- Hemopath1e lympho1de maligne (LNH)

• 1 re ligne: corticoïdes (au minimum pendant • Réchauffement/éviction du froid+++


3 à 4 semaines à 1-1.5 mg/kg puis avec • Corticoïdes et splénectomie inefficaces
une décroissance très progressive).
• Rituximab possible (maladie
La durée actuellement recommandée
des agglutinines froides)
est de 3 à 6 mois après l'obtention
d'une réponse complète. • Transfusion de CG R réchauffés à 37 °C
en cas de mauvaise tolérance de l'anémie
Traitement • 2e ligne (si corticorésistance
ou corticodépendance):
- Splénectomie
- Rituximab

• Traitement étiologique si possible


• Supplémentation en folates systématique

Ct = complément (usuellement anti-C3d).


(*) Les lgM sont éluées spontanément et ne sont donc pas retrouvées lors du test de Coombs (résultat de type Ct).
(**) Peut précéder la survenue d'une hémopathie lymphoïde maligne (Waldenstrôm en particulier).
Item n ° 213 -Anémie chez l'adulte et l'enfant 79

Examens à visée étiologique à réaliser au diagnostic d'AHAI


à auto-anticorps «chauds» de l'adulte {PNDS 2017)

Examens recommandés à titre Examens non systématiques à discuter


Maladie recherchée
systématique en fonction du contexte
• Anticorps anti-nucléaires +/- ANCA • Anti-phospholipides (= anticardiolipides,
Maladie auto-immune
anti-B2GP1, ACC de type lupique)
(LED, SAPL)
1 • C3, C4, CH50

1. Électrophorèse des protéines • BOM el/ou biopsie ganglionnaire si


sériques+immunofixation argument en faveur d'un syndrome
Hémopathie lymphoïde • lmmunophénotypage lymphocytaire lymphoprolifératif
sur sang périphérique
• Scanner TAP

• Scanner TAP

• Dosage pondéral des lg • Phénotypage des sous-populations


Déficit immunitaire
lymphocytaires

• Sérologies VIH, VHC • CMV ou EBV si sd mononucléosique


Infection • Sérologie VHB (en pré-rituximab) • Sérologie +/- PCR B19 si réticulocytes bas
• Syphilis

Examens à visée étiologique à réaliser au diagnostic d'AHAI


à auto-anticorps «froids» de l'adulte {PNDS 2017)

Examens recommandés à titre Examens non systématiques à discuter


Maladie recherchée
systématique en fonction du contexte
• Sérologie mycoplasme
Infection • Sérologie VIH, VHC, EBV, CMV, parvovirus
� +/- PCR EBV, CMV, B19___
Électrophorèse des protéines • BOM el/ou biopsie ganglionnaire si
sériques+immunofixation argument en faveur d'un syndrome
Hémopathie lymphoïde lmmunophénotypage lymphocytaire lymphoprolifératif
sur sang périphérique • C3, C4, CH50

j" Scanner TAP

ANÉMIES IMMUNO-ALLERGIQUES

1. Physiopathologie
• L'autoanticorps est actif uniquement en présence du médicament responsable.
• Il existe 2 mécanismes de destruction du GR:
- Le médicament vient se fixer sur le GR et l'anticorps dirigé contre le médicament est
responsable de l'hémolyse (haptène),
- Le complexe anticorps-médicament vient s'adsorber sur le GR qui est ensuite détruit
par l'action du complément (immun-complexe).
• Les anémies immuno-allergiques (AC dépendants du médicament) se caractérisent par un
test de Coombs direct positif et un test de Coombs indirect négatif.
80 Hématologie générale

2. Étiologies
Ac dépendants du médicament(*) ,
AHAI Ac indépendants
Type néoantigène/immun-
médicamenteuses du médicament Type haptène/adsorption
complexe

Induction d'Ac anti- Les Ac sont dirigés Les Ac sont dirigés contre
GR par le médicament contre le médicament un antigène résultant
Mécanisme
(mécanisme mal connu) qui est lié aux GR de la liaison GR-médicament
---. Cf AHAI à Ac chauds ---. Hémolyse extra-vasculaire ---. Hémolyse in/ra-vasculaire
-- -
Coombs direct +
- + +

Coombs indirect - -
-- +

• Methyldopa • Pénicillines • Ceftriaxone

l• • Levodopa
Analogues des purines .
• Céphalosporines • Piperacilline
• Quinine/quinidine

1
Médicaments (fludarabine, • AINS
cladribine)
...

(*) Anémies immuno-allergiques.

ANÉMIES HÉMOLYTIQUES ALLO-IMMUNES

1. Physiopathologie
• Anticorps synthétisés par l'organisme en réponse à la présence d'allo-antigènes portés à
la surface des GR.

2. Étiologies
• Allo-immunisation post-transfusionnelle.
• Allo-immunisation materno-fœtale.

Étiologies des anémies hémolytiques immunologiques

• Idiopathique
• Sd lymphoprolifératif (LLC, LNH)
• Maladie auto-immune (LED)
• Infection:
- Virus (EBV, CMV, VIH)
1 - Bactérie (mycoplasme pneumoniae)

• Tumeur ovarienne
• Médicament (a-méthyl dopa, L-dopa, fludarabine, céphalosporine .. )
• Allo-immunisation

L
81

Anémies hémolytiques extra­


corpusculaires non immunologiques

a ANÉMIES HÉMOLYTIQUES TOXIQUES


1. Physiopathologie
• L'action est périphérique sur les hématies sauf pour le plomb où il existe également une
toxicité centrale.

2. Étiologies
• Venins de serpents ou d'araignées.
• Certains champignons vénéneux.
• Métaux lourds:
- Plomb notamment (saturnisme),
- Cuivre.
• Médicaments:
- Sulfamides,
- Ribavirine,
- Disulone...

ANÉMIES HÉMOLYTIQUES INFECTIEUSES

1. Physiopathologie
• L'hémolyse peut être directement causée par le pathogène (cas du paludisme notamment)
ou le plus souvent par des toxines (dans les causes bactériennes).

2. Étiologies
• Bactériennes:
- Clostridium perfringens.
• Parasitaires:
- Paludisme.
82 Hématologie générale

-ANÉMIES HÉMOLYTIQUES MÉCANIQUES

1. Physiopathologie
• Il existe une destruction des GR sur un obstacle mécanique du flux sanguin. La caractéris­
tique fondamentale de ce type d'anémie est la présence de schizocytes sur le frottis sanguin
qui la distingue de toutes les autres anémies.
• Néanmoins, on peut retrouver aussi des schizocytes dans:
- les anémies par carences martiales,
- les anémies mégaloblastiques,
- les myélodysplasies, notamment les anémies sidéroblastiques primitives,
- les schizocytes sont donc essentiellement caractéristiques des anémies hémolytiques
mécaniques en l'absence d'anomalie du VGM.

2. Étiologies
• Hémolyse cardiaque:
- Sur valve native calcifiée,
- Sur valve mécanique surtout en cas de désinsertion (doit être un signe d'appel faisant
réaliser une échocardiographie),
- Au cours d'une CEC.
• Microangiopathie thrombotique (MAT) (voir encadré):
- Syndrome hémolytique et urémique (SHU),
- Purpura thrombotique thrombocytopénique (PTT) ou syndrome de Moschcowitz.
N.B. Éliminer un HELLP syndrome, une HTA maligne, une maladie veina-occlusive, une TIH de
type 2, une CIVD qui peuvent présenter des caractéristiques clinico-biologiques similaires
avant de suspecter un SHU ou un PTT
Item n ° 213 -Anémie chez l'adulte e t l'enfant 83

Purpura thrombotique Syndrome hémolytique


MAT
thrombocytopénique (PT T ) et urémique (SHU)

Agression endothéliale initiale(infection, maladie auto-immune, médicament, chimiothérapie,


cancer, greffe, grossesse, parfois facteur déclenchant non retrouvé)
--+ Libération de substances pro-agrégantes
Mécanisme
--+ Formation de microthrombi plaquettaires

--+ Thrombopénie de consommation, anémie hémolytique mécanique, ischémie

Déficit sévère en protéase ADAMTS13 • Post-diarrhéique(= SHU épidémique


(enzyme impliquée dans le clivage ou typique, enfant > adulte) +++:
des multimères de facteur Willebrand): - Après une diarrhée sanglante
- Dû à des entérobactéries sécrétrices
• Congénital(rare) = mutation du gène
de shiga-toxines (E. Coli de souche
d'ADAMTS13
0157:H?+++) ayant un effet cytotoxique
Étiologies • Acquis (auto-immun)+++ sur les cellules endothéliales MAT
= Ac anti-ADAMTS13
--+

Défaut de clivage du facteur Willebrand • Sans diarrhée(= SHU sporadique


ou atypique, adulte >enfant):
--+

Agrégation plaquettaire et occlusion


- Parfois associé à un déficit(quantitatif
--+

capillaire
MAT ou fonctionnel) en protéines régulatrices
du complément(facteur H notamment)
--+

1
• Anémie hémolytique mécanique (schizocytes +, Coombs -)
--1--------'----------t

Signes • Thrombopénie périphérique de consommation


cardinaux • Fièvre
= « pentade » • Troubles neurologiques
• Insuffisance rénale

• Adulte surtout l. Enfant surtout(> 90%), par épidémies


• Troubles neurologiques prédominants • Insuffisance rénale aiguë prédominante
Particularités • Insuffisance rénale modérée et inconstante • HTA
(50%) . T hrombopénie modérée
1 • T hrombopénie profonde

1
1
1. En urgence +++
• PFC
• Échanges plasmatiques
Traitement • Corticothérapie
• Traitement étiologique
• Traitement symptomatique(dialyse si nécessaire, IEC si HTA .. )
• Supplémentat1on en folates

Autres causes de MAT.· médicaments (quinine, gemcitabine, ciclosporine . .), cancer (ADK), greffe de cellules
souches hématopoiëtiques, maladies autoimmunes, HTA maligne, grossesse ..

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