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Corrigé Etude de Cas 3M

1. Que pouvez-vous dire de la stratégie « Corporate » du Groupe « 3M » ?

La stratégie d’entreprise (« Corporate ») consiste à composer et à gérer un portefeuille d’activités. À cet effet, il
va falloir développer ou a contrario écarter certaines d’entre elles. Le préalable à cette question est donc
d’identifier les grands pôles d’activités, appelés « DAS » (Domaines d’activité Stratégique) ou « Business
Units».
– Quels sont les domaines d’activité de 3M ?
3M présente ses grands pôles sur la page « produits et services ». Il est spécifié dans le texte qu’ils sont au
nombre de 7 : « le Groupe 3M est divisé en sept spécialités » .
Pourtant, si l’on dénombre les items, on trouve, contrairement à ce qui indiqué juste au dessus, non pas 7, mais 8
grandes catégories. En regardant de plus près, on s’aperçoit que la catégorie « Maison et Loisirs » contient des
produits présents dans d’autres catégories : « Produits de premiers soins : Nexcare » est dans le pôle « Santé », «
Adhésifs, rubans adhésifs, rubans adhésifs Scotch » dans « Grand Public et bureaux », « Nettoyage et entretien »
dans le pôle « Industrie ». On retrouve en effet dans cette catégorie les produits adhésifs (Scotch tape, Post It...),
des pro- duits de soin (gamme Nexcare : pansements, sparadraps ...), de nettoyage (éponges, éponges grattantes
...).
De manière classique, les segments stratégiques (les DAS) sont définis à partir des critères de
segmentation externe(clientèle, marché pertinent, réseau de distribution, concurrents) et de segmentation
interne (coûts partagés, technologie, compétences mobilisées, synergies).
Manifestement, le groupe 3M prend en compte les critères de segmentation externe à travers l’orientation
client du développement des produits qui implique « une connaissance très fine des métiers et des besoins ».
Mais les critères de segmentation interne constituent également une préoccupation fondamentale pour le groupe
qui s’appuie sur une base technologique (« 38 technologies de base ») permettant de générer des synergies entre
les activités : « La maîtrise technique de l’entreprise se fait de façon additive et dans des secteurs connexes. » .
Les DAS de 3M sont donc définis par ces deux types de critères à la fois. On peut donc considérer que la
catégorie « Maisons et loisirs » ne constitue pas un segment stratégique, mais plutôt une sous-segmentation
marketing de ces différents segments stratégiques. Afin d’éviter toute confusion entre segmentation stratégique
et marketing, les DAS « industrie » et « grand public et bureaux » sont renommés respectivement « abrasifs,
colles et entretien », et « adhésifs et fournitures de bureau ».
Au final, on distingue 7 DAS :
– signalisation, communication graphique et optique ;
– électronique, électricité et communication ;
– santé ;
– sécurité et protection ;
– transports ;
– abrasifs, colles et entretien (catégorie « industrie » dans l’annexe 5) ;
– adhésifs et fournitures de bureau (catégorie « grand public et bureaux » dans l’annexe 5).
Si l’on souhaite approfondir l’analyse, on pourra se demander si le DAS « Signalisation, communication
graphique et optique », ne pourrait pas être scindé en deux DAS : « Signalisation » d’une part, et «
Communication graphique et Systèmes Optiques » de l’autre, tant les deux activités sont différentes. La «
Signalisation » comprend les solutions d’images publicitaires promotionnelles et institutionnelles (3M habille
l’extérieur des TGV par exemple). La « Communication graphique et optiques » concerne les écrans LCD
(télévisions, téléphones, ordinateurs, assistants personnels, etc.), avec les films améliorant la qualité graphique,
ainsi que les solutions tactiles.
Un schéma peut présenter les DAS du groupe 3M, ainsi que les segments marketing qui leur sont associés.
– Quelles activités démarrer, développer, quitter ?
Les plates-formes technologiques (Annexe 5, page « Technologies ») servent de support au lancement de
nouveaux produits, ou au développement de produits existants.
– Démarrer : aucun nouveau DAS ne semble émerger compte-tenu des informations disponibles.
– Développer : les éléments mis en avant dans le cas ne permettent pas de conclusions définitives. Néanmoins ils
permettent d’ouvrir la discussion sur d’éventuels développements d’activité. En effet, les choix de
communication sur le site (Annexe 5, page « Technologies ») peuvent laisser penser que les technologies des
films et solutions optiques avec notamment les films Vikuiti™ permettent de soutenir le DAS « Signalisation,
communication graphique et optique ». En outre, l’annonce d’un effort de R&D (« imaginez qu’un jour... ») dans
le domaine des piles à combustibles annonce la création d’un nouveau DAS « Energie ».
– Quitter : Au sein du pôle « Santé », la branche pharmacie dont les spécialités étaient la Cardiologie et
l’Immunologie a été cédée fin 2006 (Annexe 4). Les recherches sur les Modificateurs de la Réponse
Immunitaire (IRM) étaient pourtant présentées comme un axe majeur de recherche « porteur d’espoir » sur le
même site web l’année précédente. Néanmoins, comme l’explique Brad Sauer, le responsable de 3M Santé, «
Nous pensons que notre portefeuille de marques pharmaceutiques est un actif de valeur mais qu’il existe plus de
synergies technologiques et commerciales avec un groupe autre que 3M » .

Comment procéder ? Faut-il acheter une autre entreprise, investir dans un nouvel équipement, s’allier à une autre
entreprise ?
L’entreprise procède par croissance interne en s’appuyant sur la R&D. Elle mobilise à cet effet des moyens
considérables : un milliard de dollars sont investis chaque année, 15 % du temps des chercheurs est consacré à
des projets personnels, et le système de management encourage les activités nouvelles. Il convient de compléter
le propos en évoquant les opérations decroissance externe, soit 9 acquisitions en 2006.

2. Quels sont les choix effectués en matière de stratégie « Business » ?


La stratégie par domaine d’activité (« Business ») consiste essentiellement à définir
l’avantage concurrentiel (Porter, 1986[3]) que l’on souhaite développer pour chaque activité. De
manière basique, le choix porte sur trois possibilités : être moins cher, être plus innovant, faire sur-mesure[4] .
Dans ce cas, c’est la deuxième solution « être plus innovant » qui a été choisie. Les innovations sont telles que
nombre d’entre elles ont vu leur nom devenir l’appellation générique du produit : Scotch, Post-It. Cette
différenciation par l’innovation va permettre de dégager « des marges de profit élevées pour les nouveaux
produits ». En effet, cette stratégie va augmenter la valeur perçue du produit, en contrepartie de quoi, le client va
consentir un surprix. De plus, la position de premier entrant sur le marché, et/ou le brevet associé au produit vont
produire des situations de monopole temporaire.

Concernant les produits pour lesquels l’innovation est ancienne (ex : le Post-It a été lancé en 1980), la
différenciation est assurée par la capitalisation sur la marque. Par exemple, les produits à destination du grand
public bénéficient du soutien de marques fortes (« la valeur de certaines d’entre elles dépasse un milliard de
dollars », en annexe 5, page « Marques »). À titre d’exemple, on remarquera la différence de prix, pour un
produit similaire, entre la marque Scotch-Brit de 3M, et la marque Carrefour (Annexe 3).

3. Qu’est ce qui légitime l’intérêt d’un niveau de stratégie « corporate » ?


Chez 3M, l’attention n’est pas focalisée sur la direction générale. Les collaborateurs du groupe ayant trouvé des
inventions sont plus connus à la fois dans et à l’extérieur du groupe. Les principes directeurs (ou valeurs) de 3M
sont autonomie et esprit d’entreprise. Ainsi, 3M fournit typiquement un exemple de management bas haut. 3M a
employé depuis son origine un grand nombre de personnes que l’on peut qualifier de « preneurs d’initiatives ».
Les histoires sur la façon dont un technicien de laboratoire a inventé le ruban masquant et le papier adhésif, la
manière dont un gestionnaire des ventes créa le support de papier collant à lame incorporée ou l’histoire d’Art
Fry qui inventa le post-it, sont devenues légendaires (culture d'entreprise).
On peut donc s’interroger sur le rôle de la direction générale, dépositaire de la stratégie « corporate ». En effet,
dans ce type d’organisation, le chef donne rarement des ordres. Les seniors managers agissent comme des
mentors, des entraîneurs et des sponsors. Ils sont là pour garder un œil sur les individus qui croient
passionnément en quelque chose et leur donner le pouvoir et les ressources pour suivre leurs intuitions.
En fait, un nombre très réduit d’acteurs prend les décisions liées à la stratégie « Corporate » dans l’entreprise :
ses dirigeants ou ses fondateurs. La stratégie Corporate (ou globale), qui est une réflexion structurante à long
terme est fondamentale dans le cas de 3M.
En effet, elle consiste à organiser un portefeuille d’activités selon deux principes :
– Définir des unités autonomes (les DAS) qui soient pertinents (chaque activité doit obéir à des facteurs clés de
succès (FCS) qui lui sont propres).
L’autonomie des activités de 3M peut être mise en évidence par la variété de la concurrence suivant les activités
considérées. De la même manière, il est aisé d’évoquer la spécificité des FCS suivant l’activité concernée.
– Identifier les synergies qui peuvent exister entre les différents domaines d’activité stratégiques (DAS).
Il existe des synergies entre les DAS : dans le cadre de 3M, la base technologique ( « la société 3M maîtrise 38
technologies de base ») constitue la principale source de synergies qu’il convient de gérer (en atteste la création
du sous-segment « Maison et loisirs »). Un autre exemple réside dans la gestion des marques, clairement
annoncée comme relevant du « corporate » (voir annexe 5, page « Marques»).
A contrario, il existe des groupes où l’interdépendance est uniquement financière (comme dans le modèle
matrice BCG où les DAS « vaches à lait » financent les « dilemmes » et les « vedettes »). Dans ces cas, le «
siège » est simplement allocateur des ressources financières.

[1] La philosophie de 3M présentée par le chairman de l’entreprise (Bartlett & Ghoshal, 1995, Transnational management
(2nd éd.). Chicago : Richard D. Irwin, Inc.) : « Le premier rôle de la direction est de mettre en place un cadre de travail dans
lequel les gens comprennent notre manière de fonctionner et y attachent de la valeur... Notre travail, c’est de la création et de
la destruction – encourager l’initiative individuelle tout en combattant la bureaucratie et le cynisme. Cela repose sur le
développement d’une relation inter- individuelle de confiance entre ceux qui sont en haut et les niveaux hiérarchiques en
dessous. »

[2] Microsoft a été l’entreprise qui a racheté le plus de sociétés en 2006, avec 14 acquisitions. Mais Oracle et le néerlandais
KPN talonnent de très près la firme de Redmond et comptent à leurs actifs 13 rachats. Suivent ensuite IBM (12 achats),
Hewlett-Packard, EMC et 3M, ont tous les trois acquis 9 sociétés.
[3] Porter M., L’avantage concurrentiel, comment devancer ses concurrents et maintenir son avance , InterEditions, Paris,
1986, (trad.).

[4] En d’autres termes, ne pas différencier son offre et viser des coûts inférieurs à ceux des concurrents pour un même prix de
vente, ou inversement différencier l’offre pour se distinguer des concurrents.

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