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BELGIQUE-BELGIË

1348 LOUVAIN-LA-N
P.P. 7 1245

L’ESSENTIEL
DU PROGRAMME
EUROPÉEN MIEL
Ed. resp. : E. Bruneau / CARI / Place Croix du Sud 4 / 1348 Louvain-la-Neuve

Allergies
danger ...
AT T ENT I O N , A B EILLES

Les images des chasseurs de miel au


bout de leur échelle, avec une protec- EN CAS DE PIQÛRE
tion des plus sommaires, nous laisse
entrevoir les risques que les hommes En cas de piqûre, on peut observer
étaient prêts à encourir pour récolter plusieurs types de réactions.
du miel. Chez nous, aujourd’hui, les
choses ont bien changé et plus person- ■ Le plus souvent, suite à une ou quel-
ne ne serait prêt à courir de tels risques ques piqûres lors d’une visite de
pour quelques kilos de miels. Pourtant, ruches, on note une brûlure qui dis-
même si la sélection nous permet de paraît quelques minutes plus tard.
travailler avec des abeilles plus douces, La réaction est locale. On observe
nul n’est à l’abri d’une piqûre. Le ris- de petits gonflements durs de 2 cm
que est présent et ne peut être sous- de diamètre assez douloureux et en-
estimé. L’apiculteur est responsable tourés de rougeurs. Ces symptômes
vis-à-vis de lui-même mais également apparaissent pendant 2 à 8 heures.
vis-à-vis de ses proches et de toute En fonction de l’endroit de la piqûre,
autre personne qui peut entrer en con- de la quantité de venin injectée et
tact avec ses abeilles. S’il connaît les du manque d’immunisation de l’api-
risques du métier et qu’il ne réagit plus culteur, le gonflement pourra être
aux piqûres, il n’en va généralement plus important. Le venin d’abeille
pas de même pour les autres. Par- contient entre autres une substance
fois, les conséquences sont loin d’être (peptide MCD) qui attaque des cel-
bénignes. lules entre autres présentes dans
Ainsi, la compréhension que peut avoir l’épiderme (mastocytes), ce qui
l’apiculteur des risques réellement en- provoque la libération de plusieurs
courus par une personne qui se fait substances, dont l’histamine (dégra-
piquer et le décodage des symptômes nulation des mastocytes). Le gonfle-
permettent de réagir efficacement et ment local (zone de diffusion du ve-
de donner des conseils utiles. La lec- nin) accompagné de démangeaisons
ture de ce texte de vulgarisation de- va s’observer près de 24 heures et
vrait vous aider dans ce sens et vous une seconde journée sera nécessaire
permettre de distinguer une réaction pour que l’on retrouve une situation
normale d’une réaction allergique aux normale. Ces réactions sont consi-
piqûres d’hyménoptères. dérées comme normales.

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■ Il vous est peut-être déjà arrivé de ■ En cas de réaction allergique, une
vous faire piquer en quelques ins- seule piqûre suffit. Les réactions
tants par un grand nombre d’abeilles. locales étendues peuvent toucher
On peut dans ce cas avoir une réac- 10 (2-19) % de la population et les
tion toxique liée à la quantité de réactions générales (systémiques)
venin. Même si vous ne réagissez de 1 à 3 % de la population géné-
plus aux piqûres, il faut malgré tout rale. Ces réactions allergiques vont
faire attention. Il y a danger de mort de la réaction locale étendue au choc
à partir de 150 piqûres au m2. Un anaphylactique parfois mortel. On
petit calcul nous donne un seuil de cite des chiffres de 50 décès par an
250 piqûres pour un adulte moyen aux Etats-Unis, de 25 à 30 par an en
(1,8 m2 de peau). La mort survient France, et certains auteurs trouvent
après une hémorragie cérébrale et/ ces chiffres sous-estimés. Ils méri-
ou une insuffisance rénale. Les cas tent cependant considération et doi-
sont heureusement rares. vent être à l’esprit des apiculteurs
lorsqu’ils font visiter leur rucher.

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L ’ A L L ER G I E : l e s différents stades

■ Dans le cas de réactions locales difficultés à respirer


exagérées, le gonflement est plus - douleurs abdominales, diarrhée
important que la zone directe de dif- - nausée, vertiges
fusion du venin et peut ainsi s’éten-
dre jusqu’à deux articulations ; les 3. Réaction généralisée grave :
démangeaisons peuvent durer 24 à un ou plusieurs symptômes du
48 h et s’accompagner d’une légère stade 2 associés à au moins
anxiété. deux des symptômes suivants :
- respiration rapide, manque
■ Viennent ensuite les réactions gé- d’air (dyspnée)
nérales. On les classe en plusieurs - difficulté à avaler (dysphagie)
stades : - confusion mentale
- angoisse
1. Réaction généralisée légère : - impression de mort prochaine
urticaire généralisé,
démangeaisons, malaise et 4. Choc anaphylactique : un ou
anxiété plusieurs symptômes du stade
3 associés à au moins deux des
2. Réaction généralisée forte : symptômes suivants :
un ou plusieurs symptômes - pâleur bleue
du stade 1 associés à au moins - chute de tension artérielle
deux des symptômes suivants : - collapsus (diminution de la
- gonflement de la gorge, du perfusion sanguine des organes
visage, des paupières, des lèvres vitaux : cerveau, cœur et reins)
(œdème de Quincke) - perte de connaissance
- oppression thoracique, - mort

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Première piqûre
Venin

Mastocytes

Macrophages

Allergènes

IgM IgE

Plasmocyte

Lymphocytes T

Plasmocyte
Lymphocytes B

L ’ A L L ER G I E res (aidant ou « helper »), désignés


EN Q U ELQ U ES M O TS sous l’abréviation TH, sont les premiers
à agir. Ils ont pour mission d’identifier
Le mécanisme de l’allergie est com- l’ennemi et de transmettre l’ordre de
plexe car il se déroule en deux temps destruction à d’autres groupes de lym-
et fait intervenir plusieurs cellules de phocytes (B) qui vont produire des an-
notre système immunitaire. ticorps, appelés immunoglobulines (Ig)
Lors de la première piqûre, des cellules de type E. En parallèle, d’autres lym-
(macrophages) vont avaler (phagocyter) phocytes TH vont commander la pro-
les molécules étrangères, puis les digé- duction d’immunoglobuline de type M,
rer à l’aide d’enzymes. Les morceaux puis G, et d’un inhibiteur de production
digérés, que l’on appelle antigènes, ar- d’IgE. Les anticorps IgE se fixent sur
rivent alors en contact avec les lympho- certains globules blancs du sang (les
cytes (globules blancs). Ces cellules ap- basophiles) et sur les mastocytes, qui
partiennent à une famille dans laquelle se trouvent en très grand nombre dans
chaque groupe occupe une fonction la peau et les muqueuses. Leur rôle
particulière. Les lymphocytes auxiliai- sera de capturer les allergènes la pro-

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chaine fois qu’ils circuleront à proximi- Chez la personne allergique au venin
té. Ces cellules capables de répandre d’abeille, le circuit de production d’an-
des produits plus ou moins agressifs, ticorps IgE est excessif par rapport au
comme l’histamine, constituent les ar- circuit de production d’IgM, d’IgG et de
mes de défense pour une agression ul- l’inhibiteur d’IgE. Les risques se renfor-
térieure. Avec les lymphocytes TH, qui cent à chaque piqûre et l’on en arrive
gardent en mémoire l’agression durant alors à des réactions anormales, ex-
de nombreuses années et qui commu- cessives et d’une grande brutalité qui
niquent entre eux, le corps est et reste peuvent aller jusqu’au choc anaphylac-
« armé », prêt à faire face à toute nou- tique. L’allergie est donc une réaction
velle intrusion. d’hypersensibilité, de défense exces-
Lors des piqûres suivantes, si le début sive à l’allergène.
du circuit est identique avec les mas-
tocytes qui digèrent les allergènes, les En absence de piqûres, le nombre d’IgG
antigènes produits rentrent alors en va diminuer, ce qui explique que chez
contact avec les IgE fixés sur les baso- l’apiculteur, le taux d’IgG varie avec les
philes et les mastocytes, provoquant saisons : de faible au printemps, il at-
dès lors la libération de l’histamine et teint un maximum au moment de la ré-
d’autres substances aussi agressives. colte, pour retomber en automne. Une
De plus, lors du contact de l’allergène longue période sans piqûres fait perdre
avec les lymphocytes, le message est l’immunisation.
passé dans tout le corps, ce qui ampli-
fie le phénomène de réaction.
En se répandant dans le circuit san- VENINS, LE SAVIEZ-VOUS ?
guin, ces produits libérés par le masto-
cyte dilatent les vaisseaux sanguins et La composition du venin est comple-
augmentent leur perméabilité. En con- xe. Malgré la « ressemblance » en-
clusion, le sérum sort des vaisseaux, tre les venins des vespidés (guêpes
s’infiltre sous le derme (la peau) et et frelons) et des apidés (abeilles
provoque un œdème qui soulève la et bourdons), il s’agit en réalité de
peau : c’est l’urticaire. Au niveau des deux venins différents. De plus, la
poumons, les médiateurs provoquent composition du venin d’abeilles
la contraction des petits muscles qui n’est pas constante. Elle évolue se-
entourent les bronches. Les bronches lon les saisons et l’alimentation de
se ferment et la muqueuse qui les ta- l’abeille. Il existe aussi de petites
pisse gonfle, ce qui entraîne siffle- différences entre les individus et les
ments, difficulté à respirer, sensation espèces.
d’être bloqué : c’est l’asthme. Cette composition évolue avec l’âge
de l’abeille. Pratiquement inexis-
tante avant le troisième jour, la

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C O M M ENT R ÉA G I R ?

Dans tous les cas, il est conseillé d’ex-


traire le dard par raclage. En cas de pi-
qûre d’un visiteur, il faut, après avoir
enlevé le dard, rassurer la personne et
rester attentif à l’évolution de son état.
L’utilisation d’une pommade anti-his-
taminique permet souvent de la rassu-
rer.

Dans le cas d’une réaction locale exa-


gérée, il est préférable de voir un mé-
decin pour qu’il puisse évaluer le ni-
veau d’allergie de la personne. phylactique), qui peut être répétée en
En cas de réaction allergique généra- fonction de l’évolution, ainsi que des
lisée, il ne faut pas hésiter à appeler corticoïdes pour éviter une réaction re-
un médecin. Le traitement de toute tardée ; une orientation du malade vers
réaction généralisée demande l’admi- un service hospitalier est recommandée
nistration d’adrénaline (impératif pour pour surveillance et en présence d’une
les stades graves et pour le choc ana- symptomatologie sérieuse. Il convient
surtout, suite à un tel accident, de pré-
coniser un traitement préventif, à sa-
production va augmenter jusqu’au voir une immunothérapie spécifique.
13e jour et rester constante jusqu’à
la mort de l’abeille. On enregistre En cas de réaction allergique généra-
cependant un pic entre le 16e et le lisée grave, de choc anaphylactique
21e jour. C’est normal, vu que les ou d’intoxication (très grand nombre
abeilles sont à ce moment-là deve- de piqûres), n’hésitez pas à appeler les
nues gardiennes. services de secours (100 ou 112) car
La production de venin cesse en quelques minutes de gagnées peuvent
cas de carence en pollen, elle dimi- sauver la vie.
nue au fil de l’été.
La reine, qui n’attaque que les
autres reines, possède un venin
deux fois moins létal. Il deviendrait
inactif à partir de deux ans.
Il n’y a habituellement pas d’aller-
gie croisée entre venin d’abeilles et
venin de guêpes (10 % seulement).

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DÉS ENS I B I L I S ATION A TTENTION
D E S A L L ER G I ES

Une personne qui a eu une réaction On sait que l’immunité d’un api-
allergique généralisée ou un choc ana- culteur évolue dans le temps, en
phylactique vit dans l’inquiétude durant fonction des piqûres reçues. Ce
toute la belle saison. Au service pneu- que l’on sait moins, c’est que dans
mologie d’un établissement hospita- certaines circonstances (prise de
lier, une analyse de sang et des tests certains médicaments, stress…),
cutanés détermineront avec certitude notre organisme peut réagir dif-
s’il y a vraiment allergie et à quel venin féremment. Certains médicaments
(test cutané positif et présence d’IgE vont avoir une influence directe sur
spécifiques dans le sang). Seules les la libération d’histamine au départ
réactions générales doivent faire l’objet des macrocytes : salicylés, morphi-
d’une désensibilisation spécifique. En niques, codéine, protamine, am-
effet, les patients ayant présenté une phétamines, macromolécules (dex-
réaction locale étendue n’ont qu’un tran), produits de contraste iodés,
faible risque (5 %) de réaction géné- certains anesthésiques généraux
ralisée lors d’une nouvelle piqûre. Par (D tubocurarine, halothane), cer-
contre, en présence d’un antécédent tains antibiotiques (polymyxine B,
de réaction généralisée, le risque d’une colimycine, néomycine), anti-hyper-
nouvelle réaction grave est voisin des tenseurs (réserpine, hydralazine),
25 % pour les stades de réaction géné- thiamine, quinine, scopolamine,
ralisée légère et forte, et de 50 % pour pilocarpine, chymotrypsine, ACTH.
les stades graves et les chocs anaphy- Un traitement par bêtabloquants
lactiques. Un traitement sera alors pro- (médicaments utilisés notamment
posé. La désensibilisation est efficace à contre l’hypertension artérielle) est
plus de 90 % pour le venin de guêpes et également contre-indiqué chez les
à 80 % pour le venin d’abeilles. patients allergiques et en cours de
Ce traitement est initié en milieu hos- désensibilisation.
pitalier et dure de quelques heures à
quelques jours (selon la proposition du Si vous connaissez d’autres apiculteurs,
pneumologue ou de l’allergologue). En- membres de votre section ou isolés, qui
suite, le traitement se poursuit chez le n’ont pas reçu ce numéro d’Actu Api,
médecin traitant à raison d’une injec- transmettez leur adresse au CARI asbl
pour que nous puissions leur faire par-
tion mensuelle durant cinq ans, voire
venir cette brochure gratuitement.
durant toute la vie. Ce traitement con-
siste à injecter une quantité progres- Coordonnées du CARI :
sive de venin, jusqu’à l’équivalent de 4, Place Croix du Sud
deux poches de venin. 1348 Louvain-la-Neuve
Tél. : 010/47 34 16
e-mail : info@cari.be

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