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du xxe siècle)
Benoît Lenoble
Dans Le Temps des médias 2004/1 (n° 2), pages 29 à 40
Éditions Nouveau Monde éditions
ISSN 1764-2507
ISBN 9782847360523
DOI 10.3917/tdm.002.0029
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de toutes pièces ou greffés sur l’ac- même jour ont lieu les épreuves éli-
tualité : jeux-concours, présentés minatoires pour la course cyclisteVer-
comme des activités instructives et di- dun-Paris,prévue le jour de la fête na-
vertissantes ;campagnes de lancement tionale,épreuve parallèle à la deuxième
de romans-feuilletons, s’appuyant sur édition de la course du flambeau. La
un affichage massif et la diffusion de semaine se termine avec le meeting in-
fascicules illustrés contenant les pre- ternational des champions d’athlé-
miers chapitres du récit ; manifesta- tisme au stade de Colombes. Durant
tions et festivités publiques pour atti- ces manifestations, Le Journal fait dis-
rer les foules ; compétitions sportives tribuer par ses crieurs des suppléments
réunissant professionnels et amateurs ; spéciaux et des programmes officiels
autant d’occasions, selon les moyens gratuits. En fait, il n’apporte qu’une
mis en œuvre, de faire parler d’un aide financière et logistique aux diffé-
quotidien. rentes compétitions, car l’initiative en
Prenons l’exemple de la course du revient aux institutions sportives (à
flambeauVerdun-Paris3,organisée par l’exception notable de la course du
Le Journal le 14 juillet 1925. Dans le flambeau).Cependant,la mise en récit
contexte sociopolitique de l’après- des performances accomplies et la mise
guerre, une telle épreuve doit hono- en scène concrète de ce sport-spec-
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L’autopromotion de la presse en France (fin du XIXe-début du XXe siècle)
dont l’existence témoigne d’un vendre à des prix inférieurs à ceux pra-
échange réel entre le quotidien et ses tiqués. La vente se fait, soit par corres-
clients. Ainsi, au moins jusqu’à la pondance, soit à l’hôtel du quotidien.
Grande Guerre, les suppléments illus- Les années suivantes, d’autres pro-
trés et les almanachs sont-ils vendus duits (alcools,cendriers,crayons…) di-
pour prolonger la lecture du journal. versifient les marchandises disponibles
À partir de la décennie 1880,de nom- qui, en quelques jours, sont écoulées
breux journaux, comme Le Petit Pari- auprès d’une large clientèle. Ces
sien, offrent gracieusement un calen- étrennes ne sont absolument pas ré-
drier à l’illustration symbolique. servées aux lecteurs du Journal.La pra-
Quatre ans après sa création, Le Petit tique, arme publicitaire, se prolonge
Nord diffuse environ 2 700 exemplaires durant l’entre-deux-guerres.Lors d’un
de son « calendrier 1882 » dont l’image court conflit commercial qui oppose
représente un crieur devant le siège du Le Petit Parisien à ses concurrents na-
journal5.Autre pratique fort répandue, tionaux, le principal dépositaire
mais ayant malheureusement laissé peu d’Auxerre offre ainsi, comme étrenne
de traces pour l’historien : la distribu- pour la nouvelle année 1919,une pho-
tion de primes gratuites. Cette der- tographie personnelle à tout lecteur
nière est considérée comme un pro- rapportant dix en-têtes de journaux
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DOSSIER : PUBLICITÉ, QUELLE HISTOIRE ?
soient crieurs attitrés ou dépositaires de réunir, sous son titre, plusieurs mil-
gérant une boutique,les commerçants lions de lecteurs, Le Petit Journal s’ex-
de la presse portent tous l’uniforme clame :« Les murs de toutes les gares de
sombre et la casquette arborant en France,jusque dans les localités les plus
lettres capitales le titre d’une feuille. À reculées, les hameaux bretons et pyré-
l’aide de leur voix et de leur corne, ils néens les plus infimes,ont annoncé de-
sillonnent la voie publique pour écou- puis vingt ans aux populations ébahies
ler le « papier »,c’est-à-dire la dernière que Le Petit Journal possédait trois mil-
édition.Avec le développement des ré- lions de lecteurs »8.
seaux de vente à la Belle Époque, le Bientôt, sur leurs murs peints et
marchand de journaux devient un per- leurs plaques émaillées, la plupart des
sonnage ordinaire, incarnant la presse feuilles de grande diffusion affirment
au plus près des lecteurs. De multiples être les plus lues.Cette mention,jointe
panneaux publicitaires familiarisent à d’autres qualificatifs,slogans et éven-
également les populations avec tel ou tuels logos, travaille l’imagination des
tel titre. De formes et de couleurs va- lecteurs, dont l’achat devient une
riables, des plaques émaillées colorent forme de participation à une dyna-
les façades des dépôts de journaux. mique de société. Prendre un journal,
Contrairement aux affiches intérieures c’est dépenser une très faible somme
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au détriment des autres. Quand la caisse,un journal populaire paie les ser-
masse des lecteurs atteint ses limites, vices d’individus et de sociétés di-
quand la hausse des tirages se ralentit, verses.Ateliers lithographiques et en-
la publicité des quotidiens vise à main- treprises d’affichage19, imprimeries de
tenir coûte que coûte la position ac- labeur, marginaux employés comme
quise. L’étiolement du prestige de la vendeurs occasionnels, etc., consti-
presse, l’augmentation du prix au nu- tuent autant de professions et d’acti-
méro et le développement du cinéma vités vivant en partie de la réclame de
(et,plus tard,de la radiodiffusion) bou- la presse.Les fonds d’affiches de presse
leversent le marché de la presse.Des ac- des musées et bibliothèques témoi-
cords entre les titres parisiens limitent gnent de la diversité des imprimeries
désormais la rivalité, et, par répercus- spécialisées dans la France de la Belle
sion, les effets d’une tactique conqué- Époque.La presse participe largement,
rante. Dans ces conditions, un quoti- avec d’autres secteurs économiques, à
dien s’attache avant tout à une stratégie l’essor de la publicité en tant qu’in-
médiatique, c’est-à-dire à intégrer un dustrie médiatique.À partir des années
système dont il est un composant parmi 1920, les commandes vont progressi-
d’autres. L’autopromotion des jour- vement à de grosses entreprises pro-
naux doit profiter à l’ensemble de la posant plusieurs services.Par exemple,
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Culture de presse,
culture médiatique
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