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Médecine et maladies infectieuses 38 (2008) 443–448

Communication

Actualités sur la vaccinologie en pathologie respiratoire


Current data on vaccines for respiratory diseases
C. Perronne 1
Service des maladies infectieuses et tropicales, hôpital universitaire Raymond-Poincaré,
Assistance publique–Hôpitaux de Paris, 92380 Garches, France
Reçu le 26 mai 2008 ; accepté le 17 juin 2008
Disponible sur Internet le 22 août 2008

Résumé
Les infections respiratoires sont une des principales causes de prescription d’antibiotiques. Certaines d’entre-elles peuvent être prévenues par des
vaccins. En France, les nouveautés concernent principalement les vaccins suivants : Haemophilus influenzae : outre le vaccin contre l’H. influenzae
b, souche capsulée virulente, un vaccin polyvalent actif sur les souches non capsulées, responsables des otites est en développement. Pneumocoques :
le vaccin conjugué heptavalent recommandé pour tous les nourrissons aux États-Unis depuis l’an 2000 a permis d’obtenir une chute de l’incidence
des infections invasives et des otites à pneumocoques, avec un impact indirect en réduisant la fréquence des pneumonies des adultes. Grippe :
la couverture vaccinale reste insuffisante chez les personnes ciblées, en particulier, les professionnels de santé. De nouvelles recommandations
concernent certains professionnels du voyage, l’entourage des jeunes enfants à risque et les femmes venant d’accoucher d’un enfant à risque.
Coqueluche : la couverture vaccinale des préadolescents est insuffisante. La vaccination des adultes est surtout destinée aux personnes devant
être en contact avec des nouveau-nés (professionnels de santé, parents). Tuberculose : l’obligation vaccinale BCG a été levée, remplacée par une
recommandation forte pour tous les nourrissons d’Île-de-France et de Guyane et pour les nourrissons à risque, notamment les enfants immigrés en
fonction de leur pays d’origine.Varicelle : la vaccination généralisée est déconseillée. Pour prévenir les complications respiratoires chez l’adulte,
la recommandation de vaccination est maintenant étendue à l’ensemble des adolescents n’ayant pas fait la varicelle.
© 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Abstract
Respiratory tract infections are a major reason of antibiotic prescription. Some of these infections can be prevented by vaccination. In France,
the main new data concerns the following vaccines: Haemophilus influenzae: besides the vaccine effectiveness H. influenzae b, that is a virulent
capsulated strain, a polyvalent vaccine effective against non-capsulated strains, responsible for otitis media, is under development. Pneumococci:
the conjugated heptavalent vaccine recommended for all infants in the USA since the year 2000 allowed a dramatic drop in the incidence of invasive
infections and of otitis media due to pneumococci, with an indirect impact reducing the frequency of pneumonia in adults. Influenza: the vaccinal
coverage remains insufficient in people targeted by recommendations, particularly in health care workers. New recommendations concern some
travel agents, people living in close contact with infants at risk and women immediately after delivery of a newborn at risk. Pertussis: the vaccinal
coverage of preadolescents is insufficient. Vaccination of adults is mainly recommended for people who are expected to be in close contact with
newborns (health care workers, parents). Tuberculosis: BCG vaccination is no longer mandatory, but is now strongly recommended for all infants
in the greater Paris area, French Guyana, and for all infants at risk, especially immigrants depending on their native country. Varicella: universal
vaccination is not recommended. To prevent respiratory complications in adults, the vaccine is now recommended for all varicella naive teenagers.
© 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Infections respiratoires ; Vaccination

Keywords: Respiratory tract infections; Vaccination

Adresse e-mail : c.perronne@rpc.aphp.fr.


1 Président de la Commission spécialisée Sécurité sanitaire du Haut conseil de la santé publique.

0399-077X/$ – see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.medmal.2008.06.017
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Les infections respiratoires représentent par leur fréquence immunogène qu’après l’âge de 18 mois environ. La conju-
une des principales préoccupations des médecins. Outre leurs gaison permet aussi, avec l’aide de rappels, d’obtenir une
conséquences en termes de morbidité et de mortalité, ces immunité prolongée et d’avoir un effet sur l’immunité des
infections représentent une cause majeure de prescriptions muqueuses, diminuant ainsi le portage des pneumocoques
d’antibiotiques. Certaines de ces infections, de l’adulte ou de concernés. Un vaccin pneumococcique conjugué heptavalent
l’enfant, peuvent actuellement être prévenues par des vaccins. (PCV7, Prévenar® ) est actuellement commercialisé dans de
De nombreuses nouveautés sont à prendre en compte pour opti- nombreux pays. Il est composé d’antigènes de sept sérogroupes
miser l’utilisation de ces vaccins. Il peut s’agir de l’apparition de pneumocoques fréquemment retrouvés dans les prélèvements
sur le marché de nouveaux vaccins ou de la modification de cer- de gorge des nourrissons. Ces sérogroupes sont en cause dans la
taines recommandations vaccinales tenant compte des données majorité des OMA purulentes à pneumocoques et représentent
épidémiologiques récentes [1]. des souches particulièrement touchées par la résistance aux anti-
biotiques, notamment la baisse de sensibilité aux bêtalactamines
1. Les infections respiratoires hautes et la résistance aux macrolides. Aux États-Unis, où la recom-
mandation de vaccination généralisée par le PCV7 existe depuis
La grippe, qui touche l’ensemble des voies respiratoires l’an 2000, on a observé une chute de l’incidence des infec-
hautes et basses, sera traitée au chapitre suivant. Les infections tions invasives à pneumocoques (méningites et bactériémies) des
respiratoires hautes qui peuvent être prévenues par la vaccination enfants vaccinés [4–7]. Le vaccin PCV7 exerce un effet protec-
touchent surtout l’enfant. Il s’agit des infections à H influenzae teur contre les OMA purulentes à pneumocoque. En Europe, une
et à Streptococcus pneumoniae (pneumocoques). Autorisation de mise sur le marché (AMM) a été accordée pour
l’indication OMA. Un autre impact bénéfique de la vaccination
1.1. Haemophilus influenzae généralisée par le PCV7 des nourrissons est une contribution
à la baisse de la résistance du pneumocoque aux antibiotiques.
L’H influenzae b (Hib), qui représente un sérogroupe cap- En France, cette baisse de la résistance, observée depuis 2001,
sulé virulent, était naguère responsable d’infections respiratoires est probablement liée à l’effet conjugué de l’utilisation des tests
graves, potentiellement mortelles, soit l’épiglottite aiguë, soit de diagnostic rapide du streptocoque A dans les angines et de
l’ethmoïdite aiguë. Outre ces infections otorhinolaryngologie la baisse de prescription des antibiotiques dans les infections
(ORL), le Hib était une des principales causes de ménin- respiratoires courantes liée aux campagnes médiatiques, puis à
gite bactérienne chez le nourrisson et l’enfant. La vaccination l’introduction du vaccin PCV7.
généralisée contre le Hib représente un immense succès de la Le vaccin PCV7 ne couvrant pas tous les sérogroupes de
vaccination, ayant permis la quasi-disparition des infections gra- pneumocoques, des déplacements dans l’épidémiologie des
vissimes dû à cette bactérie, avec une excellente tolérance du souches de pneumocoques responsables d’infection pourraient
vaccin [2]. La crainte de l’émergence d’autres sérogroupes cap- se produire. Dans les pays à forte couverture vaccinale, on note
sulés de H influenzae sous l’effet de la pression de sélection une augmentation progressive des cas d’infection dus à des
du vaccin Hib ne s’est pas confirmée. Ce vaccin garde donc sérogroupes non inclus dans le vaccin [8]. Ce phénomène de
toute son efficacité en 2008. En pathologie respiratoire, haute remplacement reste marginal pour l’instant, mais il semble pri-
ou basse, les souches de H influenzae non capsulées, peu viru- mordial de le surveiller sur le long cours. Aux États-Unis, ce
lentes, représentent la grande majorité des souches impliquées phénomène n’a eu pour l’instant un impact significatif qu’en
dans l’otite moyenne aiguë (OMA) purulente ou dans la surin- Alaska dans la population des Inuits, pour qui le bénéfice de
fection de bronchopneumopathie chonique obstructive (BPCO). la vaccination généralisée avec le PCV7 s’est altéré avec les
Ces infections à H influenzae sont habituellement bénignes, mais années.
représentent par leur fréquence, une cause majeure de consulta-
tion médicale et de prescription d’antibiotiques. Des recherches 2. Les infections respiratoires basses
sont en cours sur la mise au point d’un vaccin protégeant
contre l’ensemble des souches de H influenzae. Un vaccin conju- 2.1. Grippe saisonnière
gué associant 11 sérogroupes de pneumocoques à un antigène
commun de H influenzae (protéine D) est en cours de déve- La vaccination grippale reste une des principales vaccinations
loppement clinique [3]. Les premières études ont montré une dans le domaine des infections respiratoires basses. Les indica-
réduction significative, chez les nourrissons vaccinés, des OMA tions principales, à savoir les sujets à risque, enfants ou adultes,
purulentes dû aux sérogroupes de pneumocoques inclus dans le et les personnes âgées de plus de 65 ans n’ont pas changé. Mal-
vaccin, mais aussi des OMA purulentes à H influenzae. heureusement, on note que la couverture vaccinale des personnes
âgées stagne en France en dessous de 70 % [9]. La couverture
1.2. Pneumocoques vaccinale du personnel soignant reste largement insuffisante. On
sait que la vaccination des soignants dans les établissements de
Le développement récent de vaccins pneumococciques personnes âgées protège non seulement le personnel vacciné,
conjugués à une anatoxine a permis de rendre ces vaccins mais diminue de plus la mortalité chez les résidents, même si
efficaces dès l’âge de deux mois, alors qu’un vaccin pneu- ceux-ci ont été eux même vaccinés [10]. C’est ce que l’on appelle
mococcique polysaccharidique classique (Pneumo 23® ) n’est l’effet altruiste de certaines vaccinations. Les nouveautés en
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matière de recommandations pour le vaccin grippal concernent à développer des vaccins sur culture cellulaire, ce qui permettrait
les professionnels du voyage, les jeunes enfants et les femmes de s’affranchir de l’élevage de volailles. L’obligation vaccinale
venant d’accoucher. En plus des recommandations habituelles contre la grippe des professionnels travaillant en établissement
du vaccin qui s’appliquent aussi aux voyageurs faisant partie de santé a été inscrite dans la loi en janvier 2006. Cette mesure
des personnes à risque, la vaccination grippale est recomman- législative serait activée par le ministre de la Santé en cas de
dée chaque année pour les personnels de l’industrie du voyage pandémie grippale déclarée par l’Organisation mondiale de la
(guides) accompagnant les groupes de voyageurs, le personnel santé et concernerait les vaccins adaptés à la souche pandémique,
navigant des bateaux de croisière et des avions [11]. Suite à la voire prépandémique [16].
recommandation récente aux États-Unis et au Canada de vac-
cination généralisée des enfants contre la grippe, la France n’a 2.3. Pneumocoques
pas recommandé une telle indication [12]. Le Japon qui a eu une
politique de vaccination généralisée des enfants d’âge scolaire L’efficacité du vaccin pneumococcique polysaccharidique
de 1962 à 1987 a abandonné cette recommandation [13]. Grâce classique (Pneumo23® ) est limitée chez les personnes fragiles
à une couverture vaccinale élevée chez l’enfant, cette politique qui ont le plus besoin de protection, comme les sujets immuno-
avait permis une réduction nette de la grippe chez l’adulte, par déprimés et les personnes âgées. Chez les vieillards, le vaccin
effet indirect, et avait même eu comme conséquence une réduc- polysaccharidique n’a pas fait la preuve de son efficacité pour
tion significative de la mortalité des adultes liée à la grippe. la réduction de l’incidence des pneumonies à pneumocoque.
Cependant, cette politique vaccinale, nécessitant une injection Certaines données suggèrent une efficacité protectrice sur les
de vaccin chaque année aux enfants a été de plus en plus mal formes invasives de pneumonies avec hémocultures positives.
acceptée par la population, d’autant plus que le vaccin grip- C’est pourquoi il n’y a pas de recommandation de vaccination
pal ne protège pas à 100 % contre la vraie grippe et n’empêche généralisée des personnes âgées, mais une recommandation de
pas les enfants de développer des syndromes grippaux dus à vacciner les personnes à risque, y compris les personnes âgées
d’autres virus. Les rares effets secondaires de la vaccination [17,18].
étaient de moins en moins bien acceptés par les parents japo- Aux États-Unis, où la vaccination par le vaccin pneu-
nais. La recommandation française ne concerne que des enfants mococcique conjugué heptavalent (PCV7, Prévenar® ) est
à risque présentant une pathologie sous-jacente (notamment : recommandée depuis l’an 2000, on observe un impact indirect
cardiopathie congénitale, déficit immunitaire, pathologie pul- de la vaccination généralisée des nourrissons sur des populations
monaire ou neurologique, affection de longue durée, maladie non vaccinées. Ainsi, cet impact indirect se traduit par une baisse
inflammatoire nécessitant un traitement prolongé par aspirine). significative de l’incidence des pneumonies de l’adulte [19].
Malheureusement, le vaccin grippal ne peut pas être administré
avant l’âge de six mois. C’est pourquoi le Haut conseil de la santé 2.4. Coqueluche
publique (HCSP) vient de recommander en 2008 la vaccination
systématique contre la grippe de l’entourage d’un enfant à risque La coqueluche qui était essentiellement une maladie de
âgé de zéro à six mois [14]. La recommandation concerne aussi l’enfant a quasiment disparu chez l’enfant bien vacciné [20].
les femmes venant d’accoucher d’un enfant à risque, notamment Les adultes qui ont fait la coqueluche pendant l’enfance ou qui
d’un enfant prématuré, surtout s’il est porteur de séquelles de ont été vaccinés, perdent leur immunité progressivement au-
type bronchodysplasie [15]. delà de dix ans. C’est pourquoi dans tous les pays industrialisés
à forte couverture vaccinale coqueluche chez l’enfant, la mala-
2.2. En cas de grippe pandémique die est devenue préférentiellement une maladie des adultes, y
compris les personnes âgées. Les adultes font habituellement
Devant la menace récente d’une pandémie grippale, les fabri- des formes cliniques de la maladie bénignes. La conséquence
cants de vaccins ont, avec le soutien des autorités politiques de épidémiologique néfaste de la situation actuelle est la possible
plusieurs pays, développé des recherches sur la mise au point contamination de nouveau-nés par leurs parents ou leur entou-
d’un éventuel vaccin adapté à une souche pandémique. Grâce à rage immédiat avant qu’ils n’aient encore acquis une immunité
l’utilisation de nouveaux adjuvants puissants, les résultats pré- vaccinale. C’est pourquoi on observe une recrudescence de la
liminaires en cours montrent que l’on pourrait, si la menace coqueluche néo-natale, maladie potentiellement mortelle à cet
se précisait, prévacciner la population par un vaccin adapté à âge. En 1998, une première modification des recommandations
un virus prépandémique. Cela laisserait du temps pour isoler le avait conduit à supprimer le rappel de six ans et à instaurer un
vrai virus pandémique et préparer le vaccin définitif. Si les deux rappel coquelucheux systématique chez les préadolescents de 11
virus, prépandémique et pandémique n’étaient pas trop éloignés à 13 ans. Cela a été possible grâce à l’apparition sur le marché de
génétiquement, on obtiendrait lors de l’injection du vaccin pan- vaccins coquelucheux acellulaires inclus dans une combinaison
démique une réaction immunologique secondaire permettant quadrivalente (Infanrix tétra® , Tétravac acellulaire® ). Malheu-
d’apporter très rapidement un niveau de protection élevé. Les reusement, une enquête récente auprès de médecins libéraux
vaccins grippaux étant préparés sur œuf embryonné, il importe a montré que ce changement dans le calendrier vaccinal était
de sécuriser les élevages de poules afin que celles-ci ne suc- insuffisamment appliqué. Cela met en évidence l’insuffisance de
combent pas d’une épizootie liée au virus prépandémique ou communication officielle autour de la politique vaccinale. C’est
pandémique. C’est pourquoi les fabricants de vaccins cherchent pourquoi des cas de coqueluches sont encore observés chez cer-
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tains grands enfants ou adolescents. Actuellement, on dispose de répété ou prolongé avec un adulte contagieux (même si ces
vaccins quadrivalents destinés à l’adulte, incluant une valence enfants ont été vaccinés auparavant par le BCG), ainsi que
coqueluche, en plus des valences diphtérique (atténuée), téta- chez les adultes récemment contaminés [24]. Cela nécessite
nique et poliomyélitique (dTP) [21]. En l’absence de recul sur également le traitement systématique de l’infection tubercu-
la tolérance à long terme chez l’adulte d’injections répétées de leuse latente chez les sujets soumis à une immunodépression.
vaccin coquelucheux, ce vaccin n’est actuellement recommandé C’est pourquoi, la récente modification de la politique vac-
qu’une seule fois dans la vie d’adulte. Les études épidémiolo- cinale BCG s’inscrit dans le cadre d’un programme national
giques montrent que la cible idéale de ce rappel coquelucheux de lutte contre la tuberculose. L’obligation vaccinale BCG a
est représentée par les professionnels de santé au contact des été levée chez l’enfant en juillet 2007 [25]. Elle a été rempla-
nouveau-nés et par les parents. L’industrie pharmaceutique cée par une recommandation forte de vaccination des enfants à
n’ayant pas accepté de fabriquer un vaccin coquelucheux mono- risque de part l’origine géographique de leurs parents ou de part
valent pour l’adulte, la prescription de ce vaccin est rendue leur lieu de résidence (Île-de-France et Guyane). L’arrêt de la
difficile. Il faudrait théoriquement attendre un rappel décennal commercialisation de la bague BCG multipuncture Monovax®
de dTP. Cela empêche l’utilisation du vaccin chez les parents en janvier 2006 a favorisé la baisse de la couverture vacci-
récemment vaccinés par le dTP qui prévoient de mettre au nale. Les suppurations locales anormales au point d’injection par
monde un enfant. Cela gêne aussi l’utilisation de ce vaccin en voie intradermique surviennent avec une fréquence d’environ un
cas d’épidémie de coqueluche chez les professionnels de santé cas pour 1000 vaccinations. Le laboratoire fabricant a accepté
des maternités qui sont habituellement à jour de leur vacci- de changer l’aiguille contenue dans l’emballage du vaccin dès
nation dTP. Dans l’attente d’un vaccin monovalent, le vaccin 2008, pour la remplacer par une aiguille ultrafine limitant
coquelucheux quadrivalent est autorisé, en cas d’indication, si considérablement le risque d’injecter en sous-cutané, lorsque
la personne a reçu son vaccin dTP depuis au moins deux ans [22]. l’on garde l’aiguille quasiment parallèle à la peau. Les études
En effet, il n’a jamais été constaté d’effet délétère à réadminis- épidémiologiques prévoient que la baisse attendue des cas
trer à cet intervalle les valences d, T ou P. Lorsqu’une femme d’adénite à BCG, liée à la baisse de la couverture vaccinale, sera
enceinte n’a pas été revaccinée avant sa grossesse, la pratique compensée par une augmentation des cas pédiatriques d’adénite
du cocounage est recommandée. Il faut impérativement vacci- à mycobactéries atypiques contre lesquelles le BCG confère une
ner contre la coqueluche son conjoint et les éventuels autres protection élevée.
enfants s’ils ne sont pas immunisés et vacciner cette femme dès
l’accouchement, avant sa sortie de la maternité. Des enquêtes 2.6. Varicelle de l’adulte
récentes montrent que cette pratique du cocounage est malheu-
reusement très peu pratiquée par les médecins libéraux. La varicelle reste une maladie bénigne chez l’enfant immuno-
compétent. La maladie est volontiers plus sévère chez l’adulte,
2.5. Tuberculose avec un risque accru de pneumopathie parfois sévère. C’est
ainsi que la fréquence des complications de la varicelle et que
L’incidence de la tuberculose décroit régulièrement en France la mortalité faible liée à cette maladie augmentent avec l’âge
(incidence de 8,5 cas pour 100 000 habitants en 2006). La mala- d’acquisition de l’infection. La France ne s’est pas prononcé
die devient rare dans la plupart des régions mais l’incidence reste en faveur de la vaccination généralisée des enfants par crainte
élevée en Île-de-France (incidence de 17,3 cas pour 100 000 d’un déplacement de la maladie vers des tranches d’âge plus
habitants en 2006) et en Guyane (incidence de 27,3 cas pour élevé, avec comme conséquence une aggravation de la morbi-
100 000 habitants en 2006). Le facteur de risque majeur est dité, voire de la mortalité. Il faudrait en effet une couverture
la naissance dans un pays de forte endémie tuberculeuse, vaccinale supérieure à 90 % ou 95 % pour éviter un tel scénario.
ou lorsqu’un des deux parents est né dans un tel pays. Les Or on sait qu’il est difficile d’obtenir des couvertures vaccinales
populations immigrées sont donc actuellement particulièrement élevées pour des maladies bénignes. Des incertitudes existaient
touchées par la tuberculose. Les personnes sans domicile fixe par ailleurs sur le rôle de la circulation naturelle du virus vari-
sont également très touchées par la maladie. La vaccination par le celleux dans la population sur l’entretien d’une bonne immunité
BCG est efficace à environ 80 % pour protéger les enfants contre des personnes âgées contre le virus varicelle-zona, permettant
les formes graves de tuberculose extrapulmonaire, comme les de prévenir la survenue du zona [26]. Les États-Unis ont été le
méningites et les miliaires. En revanche, cette vaccination ne premier pays à recommander une vaccination généralisée des
protège qu’à environ 50 % contre la tuberculose pulmonaire enfants contre la varicelle. Après une phase de « lune de miel »
commune qui est la forme contagieuse de la maladie. C’est avec baisse importante de la maladie chez les enfants vacci-
pourquoi, on ne peut contrôler l’épidémie de tuberculose uni- nés, le déplacement de la varicelle vers des tranches d’âge plus
quement avec le BCG [23]. L’élimination de la maladie nécessite élevées est en train de se produire avec survenue de cas plus
le dépistage des sujets immigrés en provenance de pays de forte sévères [27,28]. De plus, l’incidence du zona a presque doublé
endémie, le diagnostic rapide des cas contagieux pour isolement aux États-Unis depuis la généralisation de la vaccination varicel-
et traitement et un dépistage systématique dans l’entourage des leuse [29]. C’est pourquoi, en France la vaccination varicelleuse
cas contagieux. La tuberculose ne peut être vaincue que par universelle est déconseillée. Cette vaccination est recommandée
une augmentation considérable des prescriptions de traitements chez certaines personnes à risque ou dans l’entourage adulte d’un
antituberculeux préventifs chez les enfants en contact étroit malade [30]. En effet, l’injection rapide de vaccin, en moins de
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trois jours après le contage, peut permettre d’éviter la mala- [9] Ministère de la Santé. Rapport du comité technique des vaccinations, Haut
die chez un adulte non immunisé ou au moins de l’atténuer. La conseil de la santé publique, commission spécialisée sécurité sanitaire,
vaccination varicelleuse est recommandée chez les soignants, relatif à la vaccination contre la grippe saisonnière de l’enfant et de la
femme enceinte. 17 janvier 2008. www.hcsp.fr.
surtout dans les services à risque (immunodéprimés, gynéco- [10] Ministère de la Santé. Avis du Conseil Supérieur d’Hygiène Publique
obstétrique, néonatalogie, infectiologie, néphrologie), ainsi que de France, section maladies transmissibles, relatif à la prophylaxie chez
pour le personnel en contact avec la petite enfance (crèches, col- les personnes à risque lors d’une épidémie de grippe dans une col-
lectivités d’enfants). La recommandation concerne aussi toute lectivité, en période de circulation du virus grippal. 16 janvier 2004.
personne au contact d’un immunodéprimé, et les futurs trans- www.hcsp.fr.
[11] Ministère de la Santé. Avis du Conseil Supérieur d’Hygiène Publique
plantés dans les six mois qui précèdent une greffe d’organe de France, section maladies transmissibles, relatif à la vaccination anti-
solide. En 2007, la recommandation s’est étendue à l’ensemble grippale pour les voyageurs. 14 mai 2004. www.hcsp.fr.
des adolescents n’ayant pas fait la varicelle pendant l’enfance, [12] Jordan R, Connock M, Albon E, Fry-Smith A, Olowokure B, Hawker J, et
ainsi qu’aux femmes dans la même situation désireuses d’avoir al. Universal vaccination of children against influenza: are there benefits
un enfant [31]. Cela permettra d’éviter des survenues de varicelle to the community ? A systematic review of evidence. Vaccine 2006;24:
1047–62.
chez l’adulte et d’éviter les rares complications materno-fœtales [13] Reichert TA, Sugaya N, Fedson DS, Glezen WP, Simonsen L, Tashiro
lorsqu’une femme développe la maladie pendant la grossesse. M. The Japanese experience with vaccinating school children against
influenza. N Engl J Med 2001;344:889–96.
3. Conclusion [14] Ministère de la Santé. Avis du Haut Conseil de la Santé Publique, Com-
mission spécialisée Sécurité sanitaire, relatif à la vaccination contre la
grippe saisonnière de l’enfant et de la femme enceinte. 1 février 2008.
Une meilleure utilisation des vaccins avec un respect des www.hcsp.fr.
innovations dans les recommandations vaccinales pourrait [15] Englund JA. Maternal immunization with inactivated influenza vaccine:
permettre de réduire l’incidence de certaines infections respira- rationale and experience. Vaccine 2003;21:3460–4.
toires, avec dans certains cas, un impact sur la morbidité, voire [16] Ministère de la Santé. Avis du Conseil Supérieur d’Hygiène Publique de
France, Section maladies transmissibles, relatif à la mise en œuvre de la
la mortalité. Cela nécessite une amélioration de la communica- protection individuelle contre la grippe des professionnels visés à l’article
tion afin de mieux diffuser l’information aux professionnels de L 3111-4 du Code de la santé publique par une obligation vaccinale. 19
santé ainsi qu’à la population générale. Le bon usage des vaccins mai 2006. www.hcsp.fr.
doit être complémentaire du bon usage des antibiotiques dans la [17] Ministère de la Santé. Avis du Conseil Supérieur d’Hygiène Publique de
prise en charge des infections respiratoires hautes ou basses. France, Section maladies transmissibles, relatif à l’intérêt de la vaccina-
tion anti-pneumococcique lors d’une pandémie grippale. 19 mai 2006.
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