Vous êtes sur la page 1sur 5

Les transports maritimes au service de l'économie et de l'exportation (L... https://www.monde-diplomatique.

fr/1959/01/A/22899

> �anvier ����, page �

L� ������ �� �������� �������� : �� ������������, ��� ������������

Les transports maritimes au


service de l’économie et de
l’exportation

L
� France est par vocation et par tradition un pays maritime.

Mais cette continuité n’a pas été sans subir de rudes atteintes, dont la dernière en date est
la guerre de 1939-1945, qui a coûté à l’industrie des transports maritimes près des deux
tiers de son tonnage. Cependant une action tout aussitôt menée de concert avec les
pouvoirs publics rétablit dès 1950 le niveau de tonnage de 1939, et aujourd’hui la flotte
atteint 4 200 000 tonneaux. La courbe retraçant cet effort d’équipement pour l’ensemble du tonnage
et pour chacune des catégories de navires parle d’elle-même.

A l’heure actuelle, tandis que les navires à passagers ne représentent plus — à la date du 1er octobre
1958 — que 16 % de la flotte, les pétroliers en représentent 38 % et les cargos 46 %. En 1939 la
composition était très différente, puisqu’on comptait un tonnage de navires à passagers à peine
inférieur à celui des cargos et près de quatre fois supérieur à celui des pétroliers : le développement
spectaculaire des navires-citernes, à la fois en tonnage global et en tonnage unitaire, et la diminution
du tonnage paquebots — après une remontée jusqu’à 875 000 tonneaux en 1954 (contre 1 170 000 en
1939) — sont dans le domaine de la structure de la flotte les deux faits marquants de ces dernières
années. Le premier correspond à l’augmentation de la consommation nationale en hydrocarbures et
aux besoins de tonnage créés par le développement des importations et des exportations, et le second
à la concurrence croissante de l’avion aggravée par la réduction progressive de certains courants de
voyageurs et d’émigrants.

Du point de vue du mode de propulsion, la flotte ne comprend plus que 15 unités chauffant au
charbon — exclusivement des cargos — en regard de 255 chauffant au mazout et de 509 propulsées
par moteur diesel.

Parallèlement à l’effort de reconstitution et de développement du tonnage, le souci de l’adaptation


aussi précise et rentable que possible des navires à leur trafic a amené les armateurs français à faire
un effort particulier de rajeunissement et de modernisation. La flotte française a maintenant en
moyenne moins de dix ans d’âge, ce qui en fait l’une des plus jeunes du monde. Au 1er octobre dernier
elle comprenait, sur 779 navires, 439 unités de moins de dix ans, dont 206 de moins de cinq ans. Elle
a suivi les tendances par lesquelles s’est manifestée depuis la guerre la modernisation de la flotte
mondiale : tendance à l’augmentation de la jauge unitaire des navires ; tendance à l’augmentation des
vitesses, qui l’une et l’autre signifient amélioration du rendement. Les navires français sont désormais
équipés de tous les perfectionnements dans lesquels se matérialise le progrès de la technique, qu’il
s’agisse du profil des coques, de la mécanisation poussée des panneaux de cales et des moyens de

1 sur 5 26/02/2021 à 13:35


Les transports maritimes au service de l'économie et de l'exportation (L... https://www.monde-diplomatique.fr/1959/01/A/22899

levage, qui a permis une réduction sensible des séjours dans les ports, ou du confort des
aménagements réservés à l’équipage, notamment à bord des pétroliers.

Non moins remarquable est la diversité des types de navires que le pavillon français met à la
disposition de sa clientèle. La flotte de navires à passagers comprend aussi bien des unités de petit et
moyen tonnage affectées à la croisière ou placées sur de courtes distances (par exemple sur les services
de la Corse et de l’Afrique du Nord) que des gros liners desservant l’Atlantique nord et l’Atlantique sud
ou le Moyen-Orient, en passant pas les « car ferry » affectés à la desserte de l’Angleterre et les
« mixtes » desservant l’Amérique du Sud et Madagascar. Il n’est qu’un domaine dans lequel soient
comparables ces unités, celui du confort et de la régularité des services qu’elles offrent aux passagers.

La flotte de navires-citernes, en dehors des 120 pétroliers au long cours qui en constituent l’essentiel,
comporte aussi une trentaine de caboteurs souvent utilisés pour la redistribution ou la réexportation
des produits finis au départ des raffineries métropolitaines.

La flotte de cargos frappe davantage encore du point de vue de la diversité. Il ne s’agit pas ici d’un fait
de hasard, mais d’une conséquence de l’extrême variété des trafics auxquels le pavillon — c’est une des
caractéristiques importantes de son activité — doit faire face. L’armement français offre aux chargeurs
de marchandises toute une gamme d’unités spécialisées, du caboteur de 500 tonneaux pour le
transport de ciment jusqu’aux gros porteurs de charbons et de minerais d’une vingtaine de milliers de
tonnes de port en lourd en passant par les navires-citernes à vins et à huiles, les transporteurs de gaz,
les cargos « tramps » pour le transport des céréales en vrac, et naturellement toute une série de cargos
classiques de marchandises diverses remarquablement équipés, transportant tout, du cageot d’agrumes
aux colis lourds. Une mention particulière s’impose, en outre, de la flotte bananière, composée d’une
trentaine de cargos fruitiers rapides dotés d’installations bénéficiant des plus récentes innovations de
la technique frigorifique : répartie entre la desserte des Antilles et celle des pays producteurs de la
côte occidentale d’Afrique, elle est une des toutes premières du monde.

En 1957 et 1958 sont intervenus dans chaque catégorie de navires des mouvements de tonnage qui
méritent d’être signalés, car ils sont significatifs des données commerciales qui président à
l’exploitation de la flotte française.

Dans la catégorie des navires à passagers n’a été enregistrée depuis le 1er janvier 1958 qu’une entrée
en service : celle du Compiègne, paquebot « car ferry » de 3 500 tonneaux destiné au service sur
l’Angleterre. L’année 1957 avait été marquée, au contraire, par de nombreuses modifications :
7 navires à passagers avaient dû être éliminés, dont 2 reconvertis en cargos. En contrepartie avaient
été incorporés le Jean-Mermoz, pour la desserte des lignes de la côte occidentale d’Afrique, et le Ville-
de-Bordeaux, qui a relevé le Maroc sur la ligne Bordeaux-Casablanca. Enfin, tout récemment, est
intervenu un événement qui ne laissera pas insensibles les usagers de la ligne Le Havre–New-York. La
décision est maintenant prise de livrer à la démolition l’lle-de-France. Ainsi s’achèvera« l’Atlantique »,
comme l’ont baptisé dernièrement les journalistes par allusion aux opérations de sauvetage qu’il a eu
l’occasion d’effectuer à plusieurs reprises au cours de ces dernières années dans l’Atlantique nord. Le
tonnage qu’il représente (44 000 tonneaux) trouvera sa compensation, et au delà, dans les
60 000 tonneaux du France, dont l’entrée en service est prévue pour 1961. D’une longueur avoisinant
310 mètres, le France pourra transporter mille cinq cents passagers en classe touriste et cinq cents en
première classe. Les 160 000 CV de son appareil moteur lui assureront une vitesse en service de
31 noeuds.

Dans la catégorie des cargos les livraisons récentes ont porté sur des caboteurs de faible tonnage, dont
une dizaine ont été incorporés depuis le début de 1958. Elles ont porté également sur une demi-
douzaine de cargos de marchandises diverses de 5 000 à 7 000 tonneaux de jauge brute, ainsi que sur

2 sur 5 26/02/2021 à 13:35


Les transports maritimes au service de l'économie et de l'exportation (L... https://www.monde-diplomatique.fr/1959/01/A/22899

trois cargos plus particulièrement destinés au long cours : le Yang-Tsé, dernier d’une série de navires
de 7 000 tonneaux, destiné aux lignes de l’Afrique du Sud-Madagascar et d’Extrême-Orient, le
Magellan, de 8 700 tonneaux, destiné aux lignes du Sud-Pacifique, et le Ville-de-Majunga, unité très
perfectionnée de 7 100 tonneaux appelée à desservir les lignes de Madagascar et de la Réunion. Dans
le domaine des transporteurs de vrac, on a procédé en octobre dernier au lancement du Jean-
Schneider, gros porteur de 19 000 tonnes de port en lourd, capable de transporter 14 600 tonnes de
charbons ou 17 500 tonnes de minerais à une vitesse de 14 noeuds. Enfin deux bananiers livrés en
mars et en juin derniers compléteront l’équipement des lignes des Antilles.

L’expansion de tonnage la plus importante s’enregistre dans la catégorie des pétroliers. Depuis le
début de 1958 les incorporations l’ont emporté sur les éliminations, à concurrence de douze unités
représentant plus de 200 000 tonneaux de jauge brute contre neuf unités totalisant 120 000 tonneaux
pour toute l’année 1957. Huit navires d’un tonnage oscillant autour de 20 000 tonneaux de jauge
brute — soit 30 000 tonnes de port en lourd -sont entrés en service. Au mois de juin a été livré le
Varagh de 34 000 tonnes, puis en novembre l’Isselia qui, avec ses 40 800 tonnes, s’inscrit au deuxième
rang de la flotte pétrolière française, entre l’Esmeralda (43 000 t. p. 1.) et l’Esso-France (37 000 t. p.
1.). Ces tonnages seront eux-mêmes largement dépassés par certains des navires-citernes actuellement
en construction ou en commande, dont plusieurs atteindront 73 000 tonnes.

Tous ces mouvements de tonnage s’inscrivent dans le cadre général constitué par la balance des
incorporations (achat de navires neufs et d’occasion) et des éliminations (démolitions, ventes, pertes
par sinistre). Celle-ci s’était soldée en 1957 par un gain net de tonnage de 150 000 tonneaux.
L’augmentation de tonnage pour l’année 1958 sera vraisemblablement supérieure, car pour les trois
premiers trimestres de l’exercice on enregistrait déjà une progression de 270 000 tonneaux. Ainsi
l’évolution d’ensemble du tonnage français depuis le début de 1957 tranche sur la relative stabilité qui
avait caractérisé l’année 1956.

Ce développement traduit la mise en œuvre du nouveau programme de constructions amorcé il y a


deux ans, dans le cadre du troisième plan de modernisation et d’équipement, qui devrait porter la
flotte française à plus de 5 000 000 de tonneaux en 1962. Réserve faite de quelques annulations de
commandes, l’armement n’a pas, jusqu’à ce jour, remis en cause cet important programme.
L’échelonnement des livraisons devrait se présenter de la façon qui suit — pour autant qu’on puisse
préjuger l’avenir dans la conjoncture mondiale menaçante que connaissent actuellement les transports
maritimes.

Le trafic assuré par les navires français n’a pas sensiblement modifié, depuis la guerre, son orientation
géographique. On a cependant assisté ces dernières années à l’amenuisement de certains courants,
notamment sur l’Extrême-Orient, parallèle à l’émancipation de territoires que leur économie liait
naguère étroitement à la France, en même temps qu’à la création de plusieurs services : ligne de
cargos « autour du monde », ligne sur les grands lacs américains au départ de la côte occidentale
d’Afrique, ligne sur la Baltique.

Les navires de charge sont affectés dans leur majorité à des lignes régulières de marchandises
diverses, même si l’intérêt porté par les armateurs aux transports de pétrole et de marchandises
pondéreuses n’a cessé de se préciser. La carte de ces lignes régulières s’inscrit dans une aire d’activité
pratiquement ininterrompue d’est en ouest, dont les limites extrêmes sont au nord Vancouver, sur la
côte pacifique du Canada, les grands lacs américains, les ports d’Europe du Nord jusqu’à Léningrad,
et, en Asie, Takubar et Yokohama ; au sud Bahia-Blanca, Le Cap, les Kerguélen, Melbourne et
Papeete. Les zones de plus forte densité sont : la Manche et la Méditerranée, la côte occidentale
d’Afrique, l’Amérique centrale et les côtes est de l’Amérique du Nord et de l’Amérique du Sud, le
Proche-Orient et l’Extrême-Orient, la côte orientale d’Afrique et Madagascar. Sur l’Algérie on compte

3 sur 5 26/02/2021 à 13:35


Les transports maritimes au service de l'économie et de l'exportation (L... https://www.monde-diplomatique.fr/1959/01/A/22899

au départ de Marseille jusqu’à quarante-quatre appareillages par semaine.

Le trafic pétrolier, qui représente aujourd’hui la moitié du commerce extérieur par mer de la France,
et auquel le pavillon en 1958 aura vraisemblablement participé à raison de quelque 70 %, était avant
guerre essentiellement orienté sur l’Amérique. Il intéresse à l’heure actuelle surtout le Proche-Orient
et le golfe Persique, en attendant que les 20 millions de tonnes annuels de pétrole saharien prévus
pour 1962 ramènent vers l’ouest son centre de gravité.

Le développement des importations de pétrole, dont la totalité se fait par mer, est d’ailleurs, en même
temps que l’extension des importations de charbons américains enregistrée en 1956 et 1957 et celle
des échanges avec la zone franc, à l’origine de l’importance croissante prise par les marchandises
transportées par voie maritime dans le commerce extérieur de la France. Cette évolution a entraîné —
par un réflexe normal de la part de tout pays maritime — une extension parallèle de l’activité du
pavillon national, qui a participé à raison de près de 50 % au transport des quelque 68 millions de
tonnes de marchandises embarquées et débarquées dans les ports français en 1957. Pour le premier
semestre de 1958, cette participation est montée à 55,5 %.

La flotte française a aussi acheminé, en 1957, près de 7 millions de tonnes au titre de « transports
tiers », c’est-à-dire effectués entre ports de la zone franc en dehors du cadre métropolitain, entre ports
de cette zone et ports étrangers et entre ports étrangers.

Quant au trafic des passagers, il a, de 1950 à 1956, progressé de 40 % sous tous les pavillons, et de
85 % sous pavillon français, malgré la concurrence de l’avion, malgré aussi le handicap que vaut à la
flotte française de navires à passagers, par rapport à ses concurrents, un coût élevé d’exploitation : on
peut voir là l’effet de l’amélioration des coefficients de remplissage qui ont compensé la diminution du
tonnage. Si le nombre des passagers semble s’être stabilisé depuis lors, il s’est encore établi en 1957 à
2 231 000, sur les 4 027 000 voyageurs embarqués ou débarqués au total dans les ports français.

Ces résultats attestent le dynamisme de la marine marchande française. Mais un autre trait la
caractérise encore : son adaptation aux données changeantes de l’économie. C’est ainsi que la
diminution progressive du volume des transports sur l’Extrême-Orient depuis 1954 a donné lieu à de
judicieuses reconversions de trafic. En revanche la chute des importations de charbons américains en
1958 a posé aux compagnies de navigation spécialisées de sérieux problèmes, du moins pour la part de
leur tonnage qui était affectée à ces courants transatlantiques. La diversité de l’outillage de la flotte de
transports pondéreux lui permet, cependant, de faire face à de tels à-coups sur ses trafics
traditionnels : charbons russes et polonais et des ports de la mer Noire, pondéreux divers en
provenance ou à destination de la côte occidentale d’Afrique et d’Afrique du Nord fournissent les bases
d’un report d’activité.

La flotte française doit certainement à cette souplesse en même temps qu’à son dynamisme d’avoir
jusqu’ici évité, en l’état de la crise des frets qui sévit depuis deux ans dans le monde, des désarmement
d’unités trop importants. C’est aussi que ses navires, principalement axés sur des lignes régulières ou
affrétés à long terme, restent encore dans leur majorité hors d’atteintes trop brutales du marché des
affrètements.

De sérieuses difficultés ne s’en présent pas moins aux armateurs français, celles avant tout que leur
valent un coût d’exploitation élevé en même temps que les aléas dont peut se trouver menacée la
poursuite de leur programme d’équipement et de modernisation. L’intérêt qui s’attache à la solution
de ces problèmes est à la mesure de l’importance de l’industrie des transports maritimes dans la vie
nationale.

La marine marchande française donne du travail à 40 000 officiers et marins, auxquels s’ajoutent une

4 sur 5 26/02/2021 à 13:35


Les transports maritimes au service de l'économie et de l'exportation (L... https://www.monde-diplomatique.fr/1959/01/A/22899

dizaine de milliers d’agents sédentaires. Au surplus elle ouvre des débouchés à l’activité d’un certain
nombre de grandes industries, au premier rang desquelles la construction navale et la manutention
portuaire. C’est d’elle, pour une grande part, que dépendent la prospérité des ports et le
développement de leur arrière-pays.

Sans préjudice de son importance du point de vue de la satisfaction des besoins de l’économie du pays
comme des nécessités de la défense nationale, notre industrie des transports maritimes présente, au
surplus, cette caractéristique de constituer l’un des rouages essentiels des échanges extérieurs de la
France. « La marchandise suit le pavillon », en conséquence de quoi le navire ouvre aux produits
nationaux la voie des marchés étrangers. Mais il y a plus, en ce sens que la marine marchande est elle-
même une industrie exportatrice–exportatrice de services : à ce titre elle a rapporté au Trésor en 1956
23 milliards de francs en devises étrangères.

Enfin notre flotte de commerce demeure le support des liaisons avec les territoires qui, outre-mer,
restent associés à la France, liaisons largement ouvertes à la concurrence internationale mais
auxquelles le pavillon réserve les deux tiers du tonnage français de lignes régulières. Entre les pays qui
constitueront la Communauté française le navire de commerce devra, demain plus que jamais, jouer
son rôle traditionnel de trait d’union.

Une partie de ce programme de construction a déjà été livrée en 1958. D’autre part, on ne perdra pas de vue qu’un fraction
du programme est appelée à compenser les radiations de navires par vente, démolition ou sinistres pouvant intervenir
d’ici à 1962.

Mot clés: Mer Travail Commerce Économie Transports France

5 sur 5 26/02/2021 à 13:35

Vous aimerez peut-être aussi