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UNIVERSITE DE BORDEAUX

ECOLE DOCTORALE ENTREPRISE, ECONOMIE, SOCIETE (EES)

DOCTORAT ès SCIENCES de GESTION

Thèse présentée par

Radouane ABDOUNE

STRUCTURE FINANCIERE DES SOCIETES D’ASSURANCE


EN FRANCE : ENTRE DETERMINANTS TRADITIONNELS
ET REFERENTIELS PRUDENTIELS

Thèse dirigée par :

M. Pedro ARBULU

Soutenue publiquement le 08 décembre 2014

JURY :

M. Pedro ARBULU,
Maître de conférences HDR, Université de Bordeaux, directeur de thèse.

M. Pascal BARNETO,
Professeur des Universités, Université de Poitiers, rapporteur.

M. Pierre BATTEAU,
Professeur des Universités, Université Aix-Marseille, rapporteur.

M. Eric LAMARQUE,
Professeur des Universités, IAE de Paris, suffragant.
STRUCTURE FINANCIERE DES SOCIETES D’ASSURANCE EN
FRANCE : ENTRE DETERMINANTS TRADITIONNELS ET
REFERENTIELS PRUDENTIELS

Afin de maintenir la stabilité du secteur financier et le dynamisme des autres secteurs de


l’économie réelle, les sociétés d’assurance sont amenées à renforcer leur solidité
financière et leur solvabilité. Cependant, malgré l’importance de la question du niveau
des fonds propres dans la solvabilité des sociétés d’assurance et dans la stabilité globale
du secteur financier, elle n’a fait l’objet que de quelques rares tentatives d’analyse. Dans
ce contexte, l’objectif principal de notre thèse est d’analyser les déterminants de la
structure financière des sociétés d’assurance françaises et l’effet de l’intégration de la
régulation prudentielle dans la formation de leur niveau de fonds propres. A cette fin,
nous mobilisons les théories du compromis et du financement hiérarchique dans
l’élaboration de notre modèle théorique qui est ensuite testé empiriquement auprès d’un
échantillon de compagnies d’assurance françaises sur la période 2006-2012. Les
principaux résultats empiriques démontrent que la réglementation prudentielle influence
le niveau des fonds propres dans les compagnies d’assurance françaises.

Mots clés : société d’assurance – structure financière – niveau des fonds propres-
réglementation prudentielle

CAPITAL STRUCTURE OF FRENCH INSURANCE COMPANIES: FROM


TRADITIONAL DETERMINANTS TO PRUDENTIAL REGULATION

To maintain the stability of the financial sector and the dynamism in the other sectors of
the economy, the insurance companies have to improve their solvency and manage their
risks. Despite the importance of the issue of the level of capital in maintaining the overall
stability of the insurance companies sector, it has been the subject of a very few
researches. In this context, the main objective of our thesis is to analyze the determinants
of the financial structure of French insurance companies and the effect of the integration
of prudential regulation in the formation of their level of capital. To this end, we use TOT
and POT to develop our theoretical model that we then tested empirically in a sample of
French insurance companies in the period 2006-2012. Our main empirical result is that
prudential regulation affects the determinants of the level of capital in the French
insurance companies.

Key words: insurance companies - capital structure - capital - prudential regulation


REMERCIEMENTS

Il me semble vain de vouloir remercier toutes les personnes qui ont contribué, de près ou de
loin, à la réalisation de cette thèse.

La boucle commence avec l’instituteur du primaire qui m’a appris à lire et à écrire et s’en
suit une longue liste de dettes…

Je voudrais remercier chaleureusement, en premier lieu, M. Pedro ARBULU pour avoir


permis à cette aventure de se mettre en marche en acceptant de diriger cette thèse. Sa
disponibilité, ses encouragements, ses conseils et son soutien en toute circonstance m’ont
permis d’avancer avec confiance et de viser toujours le meilleur. Je sais avec conviction que
la fin de la thèse ne marquera pas la fin de notre collaboration

Je tiens à exprimer mes vifs remerciements aux professeurs Pierre BATTEAU et Éric
LAMARQUE d’avoir accepté de faire partie de mon jury de thèse en tant que rapporteurs.
C’est un réel honneur.

Mes remerciements s’adressent également au professeur Pascal BARNETO qui m’accorde le


privilège d’examiner ma thèse.

Je ne peux omettre de remercier l’IRGO et l’école doctorale qui n’ont jamais hésité à
m’apporter l’appui financier nécessaire pour le développement de mes activités de recherche.

3
Sommaire

INTRODUCTION GENERALE ................................................................................................................... 5


CHAPITRE INTRODUCTIF...................................................................................................................... 14
PARTIE I : LA STRUCTURE FINANCIERE DANS LE SECTEUR DE L’ASSURANCE ET LES DISPOSITIONS
REGLEMENTAIRES ............................................................................................................................... 34
CHAPITRE I : STRUCTURE DU MARCHE FRANCAIS DE L’ASSURANCE ET STRUCTURE DU CAPITAL . 36
SECTION I : LES PARTICULARITES JURIDIQUES, REGLEMENTAIRES ET ORGANISATIONNELLES ...... 37
SECTION II : LES THEORIES TRADITIONNELLES DE LA STRUCTURE FINANCIERE ............................. 81
CHAPITRE II : DU CADRE TRADITIONNEL DE LA STRUCTURE DU CAPITAL AU CADRE PRUDENTIEL
....................................................................................................................................................... 104
SECTION I : REVUE DE LITTERATURE DE LA STRUCTURE FINANCIERE DANS LE SECTEUR
FINANCIER ................................................................................................................................. 105
SECTION II : INTRODUCTION DU CADRE PRUDENTIEL REGLEMENTAIRE DANS LA
DETERMINATION DE LA STRUCTURE FINANCIERE .................................................................... 131
PARTIE II : MODELISATION DES DETERMINANTS DE LA STRUCTURE FINANCIERE DES SOCIETES
D’ASSURANCE FRANCAISES ET IMPACT DES FACTEURS REGLEMENTAIRES ..................................... 161
CHAPITRE III : LA DEMARCHE METHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE ........................................ 163
SECTION I : LE CADRE EPISTEMOLOGIQUE ET LA DEMARCHE METHODOLOGIQUE DE LA
RECHERCHE ............................................................................................................................... 164
SECTION II : SELECTION DE L’ECHANTILLON ET CARACTERISTIQUES DES SOCIETES D’ASSURANCE
ETUDIEES ................................................................................................................................... 185
CHAPITRE IV : ETUDE EMPIRIQUE DE LA STRUCTURE FINANCIERE DES SOCIETES D’ASSURANCE
FRANCAISES ................................................................................................................................... 206
SECTION I : ANALYSE EMPIRIQUE DES DETERMINANTS TRADITIONNELS DE LA STRUCTURE
FINANCIERE DES SOCIETES D’ASSURANCE ................................................................................ 207
SECTION II : IMPACT DE L’INTRODUCTION DU CADRE REGLEMETAIRE SUR LE NIVEAU DES
FONDS PROPRES DES SOCIETES D’ASSURANCE ........................................................................ 220
CONCLUSION GENERALE ................................................................................................................... 236
TABLES DES MATIERES ...................................................................................................................... 243
BIBLIOGRAPHIE .................................................................................................................................. 247
LISTE DES EQUATIONS ....................................................................................................................... 266
LISTES DES TABLEAUX........................................................................................................................ 267
LISTES DES FIGURES ........................................................................................................................... 268
ANNEXES............................................................................................................................................ 269

4
INTRODUCTION GENERALE

Au cours des dernières années, les sociétés d’assurance sont devenues des acteurs
incontounables de la sphère économique internationale.

Cette importance se justifie par la manne financière détenue par ces dernières (collecte
d’épargne et de cotisations), par leur rôle central dans la couverture des risques de tous les
agents économiques et par les investissements qu’elles réalisent, participant ainsi à
dynamiser l’économie mondiale. C’est pour ces raisons que les pouvoirs publics
s’intéressent de près à leur santé financière.

A l’instar des banques1, les sociétés d’assurance sont soumises au stress test. D’après les
résultats des stress test réalisés par l’Autorité de Contrôle Prudentiel (ACP) au cours du
premier semestre 2012 pour évaluer la stabilité du système financier français, les assureurs
vie sont faiblement atteints par le scénario défavorable grâce à leurs capacités importantes
d’absorption des pertes à travers la participation aux bénéfices. De même, les assureurs non
vie (dommages) ont été préservés des conséquences du scénario défavorable grâce à leurs
ratios de solvabilité initiaux très élevés. Ces conclusions permettent de justifier le bien fondé
de l’existence d’un dispositif réglementaire contraignant qui encadre l’activité de l’assurance
en France. Les résultats et les analyses des derniers stress test réalisés sur les compagnies
d’assurance par l’EIOPA2 en avril 2014, seront dévoilés fin Novembre 2014. Selon
Bernardino, président de l’EIOPA, ces tests ont pour finalité de mesurer la résilience du
secteur des assurances en cas de crise et d’en tirer des conclusions pertinentes en matière de
stabilité financière.

Depuis les travaux de Gurley & Shaw (1956) portant sur les intermédiaires financiers, les
sociétés d’assurance sont considérées comme des intermédiaires financiers vitaux dans une
économie, au même titre que les banques. En effet, en plus de leur rôle d’assurer les
personnes morales et physiques contre les risques auxquels elles sont exposées, les sociétés
d’assurance jouent un rôle important dans les mécanismes d’allocation de l’épargne et de
l’investissement.

1
25 grandes banques européennes ont échoué aux derniers Stress test dont les résultats ont été divulgués en
octobre 2014 par la BCE (Banque Centrale Européenne).
2
European Insurance and Occupational Pensions Authority

5
Mais qu’est-ce que l’assurance ?

Il s’agit d’une opération par laquelle une personne morale ou physique, exposée à un risque,
se prémunit contre ce dernier en le transférant vers une société d’assurance, moyennant le
versement d’une prime. Cette couverture du risque est assurée grâce à un contrat d’assurance
qui définit les termes et les conditions de transfert du risque. Pour Folus (1997), l’assurance
est l’ensemble des décisions, des techniques et des instruments qui permettent de gérer des
risques purs, c'est-à-dire des éventualités de perte : accident corporel, maladie, destruction
accidentelle d’un bien ou perte d’un emploi. L’assurance a vocation à organiser en mutualité
les groupes d’agents d’une économie exposés à la réalisation de tel ou tel risque pur afin de
réparer et de compenser les dommages.

A l’échelle européenne, les assureurs ont investi, par l'intermédiaire de l'épargne des assurés
notamment, plus de 8 500 milliards d'euros en 20133. Ce chiffre représente l'équivalent de
60 % du PIB de l'Union Européenne et fait des assureurs le premier investisseur
institutionnel européen. Selon les chiffres de la même année, les 5 100 sociétés
d'assurance opérant en Europe emploient directement près de 1 million de personnes.

Aussi, les entreprises du secteur de l'assurance européen collectent près de 35% des
cotisations versées par les assurés à l’échelle mondiale, ce qui les placent au premier rang
devant l'Amérique du Nord (30 %) et l'Asie (28 %). En 2013, les cotisations d'assurance ont
atteint à l’échelle européenne 1 119 milliards d'euros avec une progression de 2,7% par
rapport à 2012. Dans cette mouvance, la France fait partie des acteurs les plus importants du
marché européen à côté du Royaume-Uni et de l’Allemagne (tableau 1).

Selon le rapport annuel d’activité de l’exercice 2012 de la Fédération Française des Sociétés
d’Assurance, le marché de l’assurance français occupait le 4ème rang au niveau mondial
(FFSA, 2013).

3
Selon le portail de la Fédération Françaises des Sociétés d’Assurances (FFSA) consulté le 10/09/2014.
http://www.ffsa.fr/

6
Tableau 1. Les cotisations d’assurances par pays (en Mds d’Euros)

Royaume Uni
236,6 Turquie (TR) 8,2
(UK)

République
France (FR) 188,2 5,3
Tchèque (CZ)

Allemagne (DE) 187,1 Grèce (GR) 3,7

Italie (IT) 118,8 Liechtenstein (LI) 2,8

Pays-Bas (NL) 78,1 Hongrie (HU) 2,7

Espagne (ES) 55,2 Slovaquie (SK) 2,2

Suisse (CH) 47,9 Luxembourg (LU) 2,1

Suède (SE) 28,5 Slovénie (SI) 1,9

Belgique (BE) 27,8 Roumanie (RO) 1,8

Danemark (DK) 23,6 Croatie (HR) 1,2

Finlande (FI) 21,8 Bulgarie (BG) 0,9

Autriche (AT) 16,6 Chypre (CY) 0,8

Norvège (NO) 16 Estonie (EE) 0,3

Pologne (PL) 13,8 Islande (IS) 0,3

Portugal (PT) 13,1 Malte (MT) 0,3

Irlande (IE) 11,3 Lettonie (LV) 0,3

Source : "Key facts" - publié en août 2014 par Insurance Europe

Solide d’un savoir-faire reconnu au niveau mondial et d’une histoire très riche qui a débuté
dès la fin du 17ème siècle, l’assurance française a su se développer au niveau local et
international en mettant en place des mécanismes et des techniques qui ont permis à ses
entreprises de s’implanter dans le monde entier en tissant un réseau de distribution

7
parfaitement organisé. Son histoire (tableau 2) s’est inspirée des pratiques juridiques et
commerciales de plusieurs civilisations (Venard, 2013).

La mission de la société d’assurance ne se limite plus à une simple opération d’assurance,


bien au contraire, elle se développe de plus en plus dans le domaine de l’intermédiation
financière, en collectant l’épargne des agents économiques pour l’investir, la faire fructifier
ou la transformer en crédit.

Actuellement, la société d’assurance peut opérer dans différents domaines de la finance, elle
peut exercer des activités de gestion de portefeuilles d’actifs, de titres et d’instruments de
couverture et/ou des activités complémentaires (moyens financiers, gestion de compte de
tiers, gestion de fortune…). Elle peut également mettre au service de ses clients ses
expertises techniques et ses capacités commerciales.

Tableau 2. Les dates importantes de l’histoire du marché de l’assurance

Date Evénements
600av. j-c Introduction de l'assurance maritime par les Grecs
220 Première Assurance-vie dans l'empire Romain
1150 Premier droit maritime, Rôle d'Oléron
1234 Décrétale du pape Grégoire IX, interdisant l'intérêt et création de l' " assurance moderne "
1604 Premier fonds de pension public pour les mineurs
1670 Premier fonds de pension public pour les marins
1686 Première compagnie d'assurance non-vie
1717 Création du bureau des incendies (Mutuelle)
1788 Première compagnie d'assurance privée
1812 Création de la compagnie d'assurance des mineurs pour leurs retraites, les accidents et la santé
1861 Création de la première compagnie assurant les employés sur leur lieu de travail
1899 Nomination du premier contrôleur public
1905 Première loi protégeant les assurés et renforçant le contrôle des compagnies d'assurance
1930 Elaboration du code des assurances terrestres
1945 Création de la sécurité de l'assurance
1946 Nationalisation de l'assurance
1973 Première directive Européenne
1976 Réécriture du code des assurances
1993 Création de l'union Européenne
1994 Première privatisation d'assurance
2003 Financial Security Act
Source : Venard (2013)

8
L’une des spécificités du secteur de l’assurance est la grande diversité des formes juridiques
qui y coexistent. On observe sur ce marché des mutuelles, des sociétés par actions et des
formes organisationnelles particulières comme les Lloyd’s. Chaque forme organisationnelle
présente des avantages et des inconvénients et son existence résulte d’un compromis entre
les différents intervenants.

Les sociétés anonymes possèdent les attributs de toute entreprise de type capitaliste : les
actionnaires apportent les fonds propres, élisent un conseil d’administration chargé de
superviser les actions des dirigeants et se rémunèrent essentiellement sur les flux financiers
dégagés par l’exploitation de la société d’assurance.

A l’inverse, les mutuelles sont la propriété des clients (souscripteurs) de la société


d’assurance : les souscripteurs des contrats d’assurance fournissent le capital au travers des
primes qu’ils payent et participent aux résultats par le biais de ces mêmes primes.

Les sociétaires des mutuelles d’assurance, vues sous l’angle juridique comme des
associations, mandatent un représentant chargé d’assurer la gestion de l’entreprise, et ce, de
façon bénévole. Les cotisations payées sont nécessairement fixes, ce qui interdit à ces
mutuelles d’exercer dans la branche d’assurances vie et capitalisation. De l’autre côté, les
sociétés d’assurance mutuelle ont un statut de société civile et leurs sociétaires, comme ceux
des sociétés anonymes, élisent un conseil d’administration pour gérer l’entreprise.

L’activité d’assurance se caractérise par la diversité de ses branches d’activités.


Globalement, on distingue la branche vie et la branche non vie. Cette distinction résulte de
l’existence de deux types de risques assurés par les sociétés d’assurance, à savoir, les
dommages et la vie. Le législateur exige la séparation juridique (code des assurances) de ces
deux activités.

L’assurance vie est regroupée avec la branche capitalisation et elle se distingue de


l’assurance générale (dommages, habitation…) car l’engagement est pris sur la vie de
l’assuré.

L’activité de l’assurance se caractérise également par une inversion de son cycle


d’exploitation, dans la mesure où la prestation est facturée avant la réalisation probable du
service. En effet, il existe un décalage entre l’encaissement de la prime et le décaissement du
capital (ou indemnisation). Ce cycle d’exploitation est long car plusieurs années pourraient

9
s’écouler entre la perception de la prime et le versement de fonds aux assurés. Ce cycle peut
varier entre 1 an et 30 ans dans l’activité vie, contre seulement une à deux années pour
l’assurance dommages.

La multiplication des formes organisationnelles provoque une diversité de motivations dans


les décisions financières prises par les dirigeants pour rendre les sociétés d’assurance de plus
en plus performantes.

On constate donc que la complexité et la vitalité du secteur de l’assurance ont poussé les
autorités à mettre en place un système de contrôle prudentiel performant (solvency I et
Solvency II). Dans cette optique, la régulation prudentielle de l’industrie de l’assurance a été
construite sur la base des trois piliers suivants :

- la mise en place de la marge de solvabilité ;

- le contrôle et l’intégration des plafonnements des investissements (placements) des


sociétés d’assurance ;

- l’élaboration des règles de calcul des provisions techniques et le contrôle de leur


application.

Les turbulences des marchés financiers, liées à la récente crise financière provoquée par le
scandale des subprimes, reflètent l’instabilité et la sensibilité du secteur financier en général
et du secteur des assurances en particulier. Cette fragilité est due essentiellement aux
imbrications qui existent entre le secteur de l’assurance et le secteur bancaire.

Les activités financières pratiquées par les deux industries sont complémentaires dans la
mesure où l’activité bancaire doit s’appuyer sur l’activité de l’assurance lors de la
conception et la commercialisation de certains produits financiers très complexes (ex :
produits structurés). Cette complémentarité implique une rapidité de la propagation en cas de
crises majeures et provoque des conséquences graves pour le secteur financier en cas de
faillite d’une seule compagnie d’assurance (ex : AIG). Le transfert de ces problèmes vers les
autres secteurs de l’économie devient par conséquent inévitable. En effet, les sociétés
d’assurance s’associent aux banques dans l’élaboration des contrats de prêts en assurant les
banques contre le défaut de remboursement de leurs emprunteurs. Les principaux secteurs
bénéficiaires du financement bancaire restent l’industrie automobile et le secteur de
l’immobilier. Ils seront donc les premiers impactés par une crise dans le secteur de

10
l’assurance qui affecterait la capacité des clients à emprunter auprès des banques pour
financer l’acquisition des voitures et des logements. Afin de maintenir la stabilité du secteur
financier et le dynamisme des autres secteurs de l’économie réelle, les sociétés d’assurance
sont amenées à renforcer leur solidité financière et leur solvabilité. Les fonds propres vont
donc jouer un rôle crucial dans la limitation des effets indésirables d’une faillite et
l’instauration de la confiance dans le secteur des assurances en particulier et dans le secteur
financier en général. Ce rôle est garanti grâce à la capacité des fonds propres à garantir la
solvabilité des sociétés d’assurance et à atténuer les chocs subis par celles-ci pendant les
périodes de graves crises financières et économiques. Par ailleurs, d’un point de vue
théorique, un ratio de capital élevé permet aux sociétés d’assurance de disposer rapidement
de ressources financières externes et d’attirer davantage d’assurés (principale ressource
financière pour les sociétés d’assurance). De l’autre côté, d’un point de vue pratique, les
fonds propres constitués serviront de garantie afin de faire face aux pertes improbables liées
principalement à la conjoncture économique et constitueront une réserve qui permettra de
saisir et de financer les opportunités de croissance qui se présenteront en période de
prospérité économique. En revanche, il n’est pas souhaitable de détenir un niveau de fonds
propres supérieur aux besoins de la firme car les actionnaires ont tendance à inciter les
dirigeants à réduire le montant du capital détenu.

A l’instar des banques, dont l’existence est justifiée par leur capacité à offrir de la liquidité
aux différents agents économiques et la gestion des asymétries d’informations causées par
les financements accordés aux investisseurs (Bryant, 1980; Diamond & Dybvig, 2000,
2008), les sociétés d’assurance jouent un rôle primordial et indiscutable dans le
développement d’une économie. Leur présence se justifie par leur capacité à proposer des
garanties en assurant leurs clients, à offrir de la liquidité en dédommageant leurs assurés en
cas de sinistre (Bryant, 1987) et à gérer les asymétries d’informations liées à leurs
investissements.

D’un point de vue prudentiel et réglementaire, la possession de fonds propres suffisants par
les sociétés d’assurance est recommandée par les autorités prudentielles dans la mesure où
leur solvabilité en dépend fortement, ainsi que la stabilité, la solidité et le bon
fonctionnement de toute l’économie nationale, voire internationale. Dans cette optique, les

11
autorités prudentielles4 se sont basées sur la fonction de garantie des fonds propres pour
mettre en place le cadre réglementaire. Cette volonté est notamment justifiée par la stratégie
des sociétés d’assurance en termes de constitution de fonds propres. Cette stratégie
conditionne le degré de confiance entre elles et les agents avec qui elles entretiennent des
échanges. En effet, les sociétés d’assurance détenant un niveau de capital élevé bénéficient
de la confiance de leurs parties prenantes et notamment, celle des assurés qui ne disposent
pas de moyens tangibles pour les contrôler et qui manifestent leur préférence pour le degré
de liquidité. A contrario, les sociétés d’assurance qui détiennent un niveau de fonds propres
insuffisant sont exposées à un risque de manque de liquidité en situation de crise financière
ou de catastrophes naturelles. Aussi, l’efficience des sociétés d’assurance dépend fortement,
entre autres, de la pertinence du cadre règlementaire mis en place par les autorités
prudentielles et dont la raison d’être est la limitation de la prise de risque et des défaillances
des sociétés d’assurance.

En dépit de l’importance de la question du rôle du niveau des fonds propres dans la


solvabilité des sociétés d’assurance et dans la stabilité globale du secteur financier, elle a
généralement plus ou moins été négligée dans la plupart des travaux de recherches bien que
la constitution d’un niveau de fonds propres satisfaisant est recommandée par les autorités
prudentielles afin d’assurer la solvabilité des sociétés d’assurance, la solidité du secteur des
assurances et le bon fonctionnement de l’économie.

Alors que la plupart des recherches dédiées aux sociétés d’assurance s’intéressent à la
théorie du risque, à l’incertitude et à l’évaluation du risque, notre étude s’intéresse à leur
structure financière.

Structure de la thèse

Après un chapitre introductif qui aborde le rôle des sociétés d’assurance dans l’économie,
l’architecture de notre thèse s’articulera autour de nos axes de recherche et sera structurée en
deux grandes parties.

La première partie sera consacrée à la présentation des connaissances théoriques et des


études empiriques antérieures afin de dégager le cadre théorique et conceptuel de notre
recherche. Cette partie est formée de deux chapitres. Dans le premier chapitre, nous

4
Dont l’objectif principal est de limiter le risque systémique en s’attaquant aux asymétries d’informations et
aux interrelations qui pourraient exister entre les acteurs du secteur financier

12
présenterons les spécificités organisationnelles, financières et prudentielles du marché de
l’assurance français et la structure financière en exposant son importance et ses déterminants
dans le secteur financier. Dans une première section, nous aborderons les différentes
composantes du marché de l’assurance en France, les différentes dispositions réglementaires
et la dimension financière des fonds propres des sociétés d’assurance. Dans une seconde
section, on présentera le rôle des fonds propres comme assurance contre les risques auxquels
s’exposent les sociétés financières et on soulignera la place importante des fonds propres
dans la société d’assurance. Afin de mieux comprendre comment l’intégration du couple
rentabilité/risque se fait dans une société d’assurance, nous exposerons les points de vue des
chercheurs et des autorités prudentielles sur l’allocation des fonds propres.

Quant à la deuxième partie de notre thèse, elle sera consacrée à l’évaluation de la pertinence
de l’ensemble des propositions théoriques développées et avancées dans la première partie.
Dans un premier chapitre, nous expliciterons notre démarche méthodologique et la méthode
des données de panel comme stratégie de recherche (section I). Les méthodes utilisées pour
l’analyse et le traitement des données, les stratégies d’accès au terrain et les outils de collecte
des données seront développés dans la deuxième section (section II). Dans un second
chapitre, nous présenterons les résultats de l’analyse préliminaire des données collectées
dans la première section (section I). La deuxième section sera consacrée à la présentation des
résultats d’analyses automatiques des données à l’aide du logiciel de traitement
économétrique Eviews, ainsi que la discussion des résultats obtenus de l’analyse et la
confrontation de ceux-ci aux hypothèses formulées dans le cadre de notre recherche.

Les portées, les limites et les perspectives de recherche seront exposées lors de la conclusion
de notre thèse.

13
CHAPITRE INTRODUCTIF

1. Les assureurs comme investisseurs institutionnels

Le cycle d’exploitation inversé des sociétés d’assurance leur permet de recueillir à l’avance
les cotisations d’assurance pour couvrir de probables risques à venir. Les sommes ainsi
collectées seront placées pour faire face à leurs engagements vis-à-vis de leurs assurés, ce
qui attribue aux sociétés d’assurance la qualité d’investisseurs. Ainsi, la conservation, la
rentabilisation et l’allocation de ces sommes placées sur les marchés financiers seront les
principaux objectifs des sociétés d’assurance, ce qui leur permet de jouer un rôle vital dans le
financement de l’économie et un rôle d’intermédiation financière (Santomero & Babbel,
1997).

1.1. Les assureurs, générateur de la croissance économique

En investissant dans l’économie réelle, les assureurs encouragent le développement des


entreprises innovantes, dynamiques, compétitives et entreprenantes. L’adoption d’une telle
démarche permet aux assureurs de contribuer directement et indirectement à la croissance
économique car, en couvrant les entreprises contre les risques qu’elles pourraient subir ou
provoquer, l’assurance encourage les investissements, l’innovation et l’emploi. Les sociétés
d’assurance permettent aux ménages de se lancer dans des projets importants tels que l’achat
de biens immobiliers. En effet, les sociétés d’assurance contribuent à la croissance
économique en développant la gestion des risques pour les agents économiques de la nation.
La couverture des risques par les sociétés d’assurance se traduit par l’exigence aux
entreprises et aux particuliers d’un prix (prime d’assurance) qui reflète leur degré
d’exposition aux risques assurés. Par conséquent, cette évaluation des risques potentiels
permet aux agents économiques d’agir positivement afin de les réduire en mettant en place
des actions de prévention ou de réduction des aléas. Cette évaluation des profils de risques
permet à l’assurance de se positionner en tant que garant de la prévention et promoteur de
l’optimisation de l’utilisation des ressources.

En outre, les assureurs font diminuer les risques auxquels les entreprises et les ménages sont
exposés grâce à la mutualisation des risques qui met les aléas en commun. Cette démarche
permet de faire évoluer le profil de risques des agents économiques de conservateurs à
innovateurs. Ceci constitue un apport considérable pour l’économie, d’autant plus que les

14
entreprises non-assurées évitent de saisir de nouvelles opportunités et refusent d’investir
dans l’innovation.

Le secteur de l’assurance en France est très dynamique et emploie actuellement plus de


147 600 personnes (FFSA, 2013), auxquelles s’ajoutent les intermédiaires, les agents
généraux, les courtiers et les experts. Ces chiffres montrent que le secteur des assurances est
l’un des acteurs fondamentaux de l’économie française, ce qui justifie clairement
l’imposition d’un cadre réglementaire strict afin de protéger tous les acteurs du secteur ainsi
que ses différentes parties prenantes.

1.2. La réglementation prudentielle dans le secteur des assurances : un besoin


économique

Les spécificités de l’activité de l’assurance, sa complexité et le rôle important qu’elle occupe


dans une économie et l’inversion du cycle de production représentent autant d’éléments pour
justifier le besoin de réguler ce secteur sensible afin de prévenir les possibles abus contre les
assurés et les épargnants. Selon Peltzman (1976), plusieurs raisons, autres que la recherche
du profit économique, pourraient pousser l’industrie à envisager une régulation prudentielle.
Bien que la majeure partie des économistes supposent que la régulation pourrait réduire les
aléas spécifiques aux activités, tout en défendant le principe du laissez-faire économique,
pilier fondamental des économies modernes, ils estiment que les systèmes non régulés
tendent naturellement vers une répartition optimale des ressources exploitées.

En raison des rôles économiques et sociaux joués par les sociétés d’assurance, la régulation
prudentielle du secteur des assurances s’impose comme un élément fondamental dans la
stabilisation de ce système complexe et donne de la confiance à ses parties prenantes. La
satisfaction des assurés passe par une efficience économique des assureurs qui exige que les
services financiers fournis soient produits en étroite collaboration avec des régulateurs
externes conçus pour améliorer la confiance des assurés et coordonner les activités des
concurrents. Les régulations ont été instaurées par les pouvoirs publics afin de faire face aux
défaillances des marchés dues essentiellement à la concurrence imparfaite, aux asymétries
d’information, à la présence de biens publics sur le marché et aux externalités. Dans le
secteur des assurances, les politiques de régulation prudentielles pourraient être influencées
par quatre principaux acteurs, à savoir, les groupes industriels, les groupes de
consommateurs, les agences de contrôle (ou agences de régulation) et l’élite politique
(Benmelech & Moskowitz, 2010) et Meier (1988).

15
Au 19ème siècle, la principale raison derrière la mise en place de normes prudentielles dans le
secteur de l’assurance en Europe et aux Etats-Unis était la volonté des pouvoirs publics de
protéger les assurés contre les couvertures d’assurances fictives ou défectueuses. Cette
volonté a été renforcée par les travaux de recherche qui ont traité la question de la
réglementation dans le domaine de l’intermédiation financière. Dans ce registre, la théorie
de la régulation « capture theory » développée par Stigler (1971), expose la réglementation
(ou régulation) comme un élément qui pourrait refléter la demande des groupes d’intérêts,
politiquement efficaces et participer à un processus politique quelconque afin de servir leurs
intérêts privés. La mise en place de la réglementation prudentielle est également justifiée par
la volonté des pouvoirs publics de surveiller les intermédiaires financiers. Cette régulation
est articulée autour de la stabilité de l’ensemble du secteur des assurances, la protection des
déposants/assurés et des investisseurs, la lutte contre la concentration anormale de la
puissance économique et la promotion de la concurrence entre les assureurs (Bryant, 1987),
(Allen & Santomero, 1997), (Scholtens & van Wensveen, 2000) (Bottazzi, Da Rin, &
Hellmann, 2009).

En France, le décret-loi du 14 juin 1938 unifiant le contrôle de l'Etat sur les assureurs de
toute nature (décret d'application du 30 décembre 1938), constitue le point de départ de la
réglementation publique concernant les sociétés d'assurance (création du Comité
d'organisation des assurances et de l'Office des assurances privées).

La régulation prudentielle en assurance peut être divisée en deux groupes de normes : les
normes de solvabilité et les normes de régulation du marché. Les règles de solvabilité visent
à protéger le marché de l’assurance et ses parties prenantes contre le risque d’insolvabilité
des sociétés d’assurance. Les normes de régulation du marché vont s’intéresser plutôt à la
mise en place d’une concurrence loyale sur le marché de l’assurance, à l’ajustement
automatique de l’offre et de la demande et à la bonne circulation de l’information. Selon
Kimball (1965), les objectifs de la réglementation prudentielle en assurance pourraient être
classés en deux catégories : les objectifs internes et les objectifs externes. Les objectifs
internes se résument à la solvabilité liée aux fonds propres et à la régularité des opérations
d’assurance alors que les objectifs externes se limitent au protectionnisme économique qui
vise à protéger les compagnies d’assurance domiciliées sur le territoire national, à mutualiser
des risques et à accumuler de la richesse générée par les assureurs dans l’intérêt de
l’économie locale.

16
On constate donc que la raison fondamentale de la réglementation prudentielle dans le
secteur de l’assurance va au-delà des imperfections traditionnelles des marchés. La fonction
principale du contrôle prudentiel mis en place par le régulateur est de surveiller la solvabilité
des sociétés d’assurance, de bien tenir leurs affaires et de veiller à la conformité des contrats
commercialisés aux règles en vigueur. Néanmoins, dans une récente étude réalisée par le
cabinet d’audit PwC (2013), les sociétés d’assurance commencent à considérer la
réglementation (dans toutes ses formes) comme l’un des principaux risques (devant le risque
de placement) qui menacent leur existence. Une perception singulière de la réglementation
qui est sensée préserver la continuité de l’exploitation des sociétés d’assurance.

Tableau 3. Classification des risques des sociétés d’assurance

Insurance Banana Skins 2013


(le classement 2011 est indiqué entre parenthèses)
1 Réglementation (1)
2 Rentabilité des placements (4)
3 Environnement macroéconomique (3)
4 Pratiques commerciales (18)
5 Catastrophes naturelles (5)
6 Produits garantis (-)
7 Qualité de l’équipe de gestion des risques (15)
8 Qualité de l’équipe dirigeante (14)
9 Engagements à long terme (7)
10 Ingérence politique (11)
11 Canaux de distribution (9)
12 Hypothèses actuarielles (12)
13 Innovation (-)
14 Réputation (16)
15 Gestion du changement (-)
16 Disponibilité du capital (2)
17 Gouvernement d’entreprise (8)
18 Changement climatique (20)
19 Ressources humaines (6)
20 Développement de produits (24)
21 Média sociaux (-)
22 Criminalité (22)
23 Instruments financiers complexes (19)
24 Réassurance (21)
25 Back office (17)
26 Pollution (25)
27 Terrorisme (23)
Source : Innovation & Pwc (Jul 2013)

17
2. La notion du capital dans l’industrie de l’assurance

L’utilité du capital dans le secteur des assurances est principalement justifiée par des raisons
macroéconomiques. En raison des imbrications qui existent entre les banques et les sociétés
d’assurance, le secteur financier est très sensible aux défaillances individuelles de ces
composantes qui pourraient mettre en péril l’intégralité de la stabilité économique et
financière d’un pays, voire de toute une région du monde. Afin de rendre la gestion du
capital plus efficace, plusieurs notions sont utilisées par les dirigeants en fonction des
situations et des objectifs fixés.

Dans un premier niveau, on trouve les fonds propres qui sont plutôt utilisés dans une optique
microéconomique et dont la constitution de façon optimale permet d’améliorer l’efficacité, la
valeur et la rentabilité financière de la société d’assurance. Contrairement aux autres secteurs
d’activité, l’industrie de l’assurance contraint ses sociétés à constituer des fonds propres
économiques en fonction des classes de risques auxquelles elles sont exposées ou les métiers
qu’elles exercent.

Dans un second niveau, on trouve la notion de capital économique qui est destiné à inciter
les institutions financières à mesurer et prendre en considération l’ensemble des risques
(même ceux qui seraient considérés comme peu signifiants). La détermination du capital
économique est basée sur une procédure d’appréciation des probabilités de défaillance et sa
valorisation est obtenue grâce à la technique de la Value at Risk (VaR) qui, en fonction de la
rentabilité, permet d’obtenir un montant suffisant pour couvrir l’intégralité des risques de la
société d’assurance. D’où l’intérêt de s’intéresser en profondeur aux fonds propres
comptables comme bases de la solvabilité et la stabilité financière de société d’assurance.

2.1. La notion de fonds propres comptables

Pour Cano et al. (1997), les fonds propres constituent l’ensemble des ressources mises à la
disposition de l’entreprise par ses propriétaires sans limite dans le temps et permettant de
garantir les risques que peut supporter l’entreprise. Dans la continuité de cette définition,
Koulayom (1998) attribue à la notion de fonds propres deux aspects :

18
§ sans faire de confusion avec les dettes qui se différencient des fonds propres par la
possibilité d’amortissement et par l’impossibilité de servir de garantie, le premier
aspect attribue aux fonds propres une place importante dans le développement, la
rentabilité et la solvabilité des entreprises vis-à-vis des créanciers ;

§ le second aspect attribue aux fonds propres la notion de valeur résiduelle de


l’entreprise, composée de la valeur de ses immobilisations et déduction faite du
montant de ses obligations actuelles (dettes financières, dettes fournisseurs,…).

La nécessité des capitaux propres a été justifiée par un ensemble de chercheurs. Plusieurs
recherches considèrent les capitaux propres comme la pierre angulaire d’un édifice bâti afin
de garantir la solvabilité de l’entreprise. Ils représentent pour une firme et certaines parties
prenantes (prêteurs, actionnaires, clients, fournisseurs…), une garantie pour se prémunir
contre certains incidents. Les travaux issus de la littérature réalisée dans le cadre de la
théorie financière moderne, attribue aux fonds propres un rôle primordial dans le secteur
financier (Allen & Santomero, 1997; Berger, Herring, & Szego, 1995; Diamond & Rajan,
2000; Gaud & Jani, 2002; Gropp & Heider, 2010; Hovakimian, Opler, & Titman, 2001;
Narayanan, 1988; Schall, 1971; Titman & Wessels, 1988). La littérature sur le sujet montre
que les auteurs considèrent les fonds propres comme les apports des actionnaires qui
espèrent un dividende pour récompenser leurs engagements. Pour ce qui est des dirigeants,
ils cherchent à en posséder un niveau suffisamment élevé pour assurer le développement et
la croissance des institutions financières. Ainsi, les fonds propres constituent une base
financière indispensable pour respecter les exigences réglementaires en matière de capital et
se couvrir contre les risques non envisagés par la réglementation.

2.2. Le capital économique et son optimisation en assurance

Le concept de capital économique est une notion complètement différente de celles du


capital comptable et du capital réglementaire. Le capital réglementaire correspond au niveau
de fonds propres minimum que doivent constituer les sociétés financières afin de faire face
au risque systémique, alors que le capital économique est déterminé grâce aux modèles
internes mis en place au sein des institutions financières. Sa principale mission est le pilotage
et l’optimisation du rendement par rapport aux risques entrepris. Les sociétés d’assurance
sont soumises à de multiples pressions contradictoires émanant des différentes parties

19
prenantes (assurés, actionnaires, investisseurs obligataires, agences de notation, autorités
prudentielles…) lors de la mise en place d’un objectif de capital économique. Tout ceci a
lieu malgré les préconisations de la nouvelle réforme du système de contrôle prudentiel
européen des sociétés d’assurance, Solvency II, qui définissent clairement la formule
standard et le ratio de capital. Cependant, chaque société d’assurance élabore sa propre
norme lors de la définition et la fixation du capital économique, en fonction de
l’environnement dans lequel elle évolue et tout en respectant la norme réglementaire établie
par les autorités prudentielles.

La mise en place du capital économique est également destinée à répondre à des besoins de
gestion interne, dans la mesure où il est susceptible d’alimenter le processus de pilotage au
niveau agrégé de la société d’assurance et au niveau individuel des décisions
d’investissement (transactions, portefeuille, ligne d’activité…). Une gestion interne qui se
base sur le capital économique permet d’identifier, au sein d’une institution financière, les
transactions ou les lignes d’activités qui sont censées représenter une utilisation optimale du
capital disponible.

2.3. Objectifs du capital économique

Afin de satisfaire les actionnaires, les dirigeants auront pour principal objectif la
maximisation de la rentabilité du capital investi. La rentabilité dépend négativement du
volume du capital investi (la rentabilité est forte quand le capital émis est faible) et la
recherche constante de la rentabilité permet de mettre en place une allocation optimale du
capital. Cet objectif pourrait se révéler en contradiction avec ceux des autorités
prudentielles5 et des agences de notation6 dans la mesure où ces deux acteurs apprécient sans
limite l’existence d’un montant de capital élevé, d’une gestion interne de qualité, d’un profil
de risque adéquat et d’une diversification judicieuse. Le capital économique constitué doit
combiner la réalisation de plusieurs objectifs complémentaires, tout en préservant la
rentabilité de l’institution financière. Ces objectifs sont : l’évaluation de la rentabilité
corrigée du risque, la gestion de portefeuille et le pilotage stratégique des activités.

Le premier objectif concerne l’évaluation de la rentabilité de la société d’assurance corrigée


du risque et elle s’obtient en calculant le rendement au risque sur le capital appelé RAROC

5
Garants de la stabilité du secteur
6
Evaluateurs de la qualité des émissions obligataires et défenseurs des intérêts des investisseurs

20
(Risk Adjusted Return on Capital) ou bien en calculant la valeur économique ajoutée appelée
EVA (Economic Value Added ). Ces deux techniques (très utilisées dans le secteur financier)
permettent de mesurer le rendement d’une activité de portefeuille en ajustant le montant des
fonds propres engagés avec le niveau de risque encouru. Le niveau de capital économique
obtenu permet d’apprécier la rentabilité financière de chaque activité en rapportant les
bénéfices attendus aux fonds propres nécessaires pour couvrir celles-ci.

Le deuxième objectif découle du premier, car une fois le processus de détermination du


niveau de capital économique terminé et la rentabilité corrigée du risque calculée, la société
d’assurance peut donc procéder à une comparaison des performances réelles de chaque
activité et gérer ainsi son portefeuille d’activités de façon optimale. Dans cette logique, le
capital économique ainsi déterminé permet donc à la société d’assurance de réaliser un
arbitrage entre ses différentes activités afin d’optimiser l’utilisation des fonds propres et
piloter stratégiquement les activités. L’approche de fonds propres économiques encourage
souvent les dirigeants à réaliser de possibles limitations ou des cessations des activités les
moins rentables et qui demandent un niveau de fonds propres très élevé. Dans cette optique,
l’adoption d’une telle conception permet aux sociétés d’assurance d’avoir une vision
prudente et performante de la gestion des métiers des sociétés d’assurance, ce qui rend cette
pratique comme étant l’une des branches de leurs activités.

Le troisième objectif du capital économique consiste à mener un pilotage stratégique de la


politique financière de la société d’assurance, basée sur une allocation optimale des fonds
propres en fonction des différentes activités exercées et des produits proposés.

La nouvelle réforme du système de contrôle prudentiel européen des sociétés d’assurance,


appelée Solvency II, a été menée sur la base du modèle de contrôle prudentiel bancaire
appelé Bâle II. Cette réforme devait être finalisée en 2010, mais face aux critiques des
assureurs et les imperfections du modèle, elle est toujours en cours de réalisation, sa mise en
place définitive est prévue pour début 2016.

A l’instar du système de contrôle prudentiel bancaire, Solvency II est fondé sur trois piliers :

§ le premier pilier concerne l’encadrement des portefeuilles de placements et


l’ajustement des fonds propres des sociétés d’assurance avec leurs provisions
techniques. La mesure standard de la marge de solvabilité se perfectionne et évolue

21
vers celle du capital cible, qui prend en considération les risques liés aux actifs. Le
processus Solvency II prévoit également d’intégrer une autre analyse plus complète,
fondée sur les modèles internes de gestion actif - passif dans les sociétés
d’assurance ;
§ le deuxième pilier correspond toujours au contrôle sur place qui reprend les
dispositions actuelles relatives aux obligations d’information, de contrôle et de
vérification. La responsabilisation des sociétés d’assurance par la reconnaissance du
contrôle des risques et la surveillance de son bon fonctionnement en interne, occupe
une place plus importante de plus en plus importante ;
§ le troisième pilier de cette réforme est le plus original car il met l’accent sur la
discipline de marché (réassurance, marché des capitaux, transactions clients-
entreprises…). Il incite à promouvoir la transparence des comptes publiés par les
compagnies d’assurance, l’autorégulation du secteur, ainsi qu’une régulation par le
marché des capitaux.

Le projet Solvency II a souvent semblé être en position d’attente des règles comptables
élaborées par l’IASB : « le projet de l’IASB sur la comptabilité des assurances influera
clairement sur le projet solvabilité II » (Commission Européenne, 2003). Il s’agit plus d’une
interdépendance des deux projets que d’une vassalité des normes prudentielles de l’UE sur
les normes comptables de l’IASB. Cette interconnexion met en lumière l’importance de
l’utilisation prudentielle des chiffres comptables. Ce sont les normes comptables qui
définissent les engagements et les profits. Le régulateur en est un des lecteurs.

3. Originalité, intérêts et objectifs du sujet

Le secteur financier, et notamment le rôle des sociétés d’assurance dans les mécanismes
économiques, sont peu considérés jusqu’aux années soixante. En revanche, au cours de ces
dernières années, nous avons constaté une multiplication des études et travaux menés sur la
stabilité du secteur financier. Néanmoins, ces études se sont principalement intéressées au
secteur bancaire et se sont focalisés sur l’importance réglementaire des fonds propres et leur
rôle dans la couverture des risques bancaires et la stabilité du secteur bancaire. Ces études
sont justifiées par l’importance de la stabilité du système bancaire dans le bon
fonctionnement du système financier international. Cependant, malgré l’interaction et
l’imbrication qui existent entre le secteur bancaire et le secteur de l’assurance et le rôle que

22
joue le système de l’assurance dans le soutien des activités bancaires, peu d’études se sont
intéressées à l’étude de la structure financière des sociétés d’assurance et au rôle des fonds
propres dans la stabilisation de l’industrie de l’assurance. La plupart des travaux de
recherche réalisés par le passé se sont notamment penché sur la composition du portefeuille
d’actifs et l’allocation du capital des sociétés d’assurance. Le manque de travaux sur le sujet
a été constaté à travers une revue de la littérature où on relève que rares sont les thèses ou
articles qui abordent cette problématique en France. Par conséquent, notre travail de thèse
constituera une des premières tentatives qui fait le lien entre la structure financière des
sociétés d’assurance en général et le niveau des fonds propres en particulier, et la
réglementation prudentielle à laquelle est soumise l’activité de l’assurance en France.

3.1. Originalité de la recherche

L’originalité de notre travail de recherche se base sur plusieurs justifications :

- le peu d’études réalisées en France sur le thème des fonds propres dans le secteur de
l’assurance ;

- le rôle de plus en plus vital joué par les fonds propres dans le secteur financier les a
intronisés au centre des réflexions menées par les chercheurs et des préoccupations
des dirigeants et des projets de réformes lancés par les régulateurs ;

- le besoin de proposer aux dirigeants des sociétés d’assurance de nouveaux outils


d’appréciation de leur structure financière ;

- l’aide au régulateur à stabiliser le secteur de l’assurance qui joue un rôle important


dans l’économie du pays.

3.2. Les intérêts de la recherche

Selon Hitt, Boyd, & Li (2004), à travers la contribution des chercheurs en sciences de
gestion au développement de la discipline, deux principaux objectifs pourront être visés.
Dans un premier temps, les chercheurs contribueront à faire avancer les acquis théoriques
dans le domaine étudié, et dans un deuxième temps, leur rôle se limitera à fournir des
conseils opérationnels au dirigeant. Les intérêts de notre recherche seront d’ordres théorique
et pratique.

23
3.2.1. Les intérêts théoriques

Dans le cadre de notre étude, nous nous focaliserons principalement sur la mobilisation des
recherches théoriques et des résultats empiriques antérieurs réalisés sur le thème de la
structure financière et nous mettrons ainsi en évidence l’importance du niveau des fonds
propres et ses déterminants au sein des sociétés d’assurance. Plusieurs auteurs ont essayé
d’étudier l’influence des réglementations sur la gestion des risques et d’identifier leur impact
sur la performance de la société d’assurance, mais à notre connaissance, l’étude de
l’influence des fonds propres sur les options stratégiques de la société d’assurance n’a pas
été suffisamment abordée par les chercheurs en sciences de gestion.

En étudiant le secteur bancaire, Kane (1997) et Kahane (1977) expliquent l’imposition des
réglementations par l’existence de la théorie de l’intérêt public. L’intervention de l’autorité
pour la formulation d’un cadre réglementaire spécifique se ferait dans l’intérêt public. D’un
autre côté, d’autres auteurs expliquent l’origine des réglementations dans la théorie des
groupes d’intérêt. Les parties prenantes exerceraient une pression sur les agences de
régulation afin de maintenir leurs intérêts (Stigler (1971). Selon cette optique, les
réglementations sont le résultat de la pression exercée sur l’autorité par les différents groupes
d’intérêt.

D’autres auteurs, et ils sont nombreux, avancent que l’origine des réglementations bancaires
se trouve dans l’imperfection des marchés (Freixas & Rochet, 2008, 2013; McLean, 2001).
Le poids des fonds propres dans l’application des réglementations bancaires a incité les
chercheurs à étudier l’influence de ceux-ci sur la gestion des risques dans les établissements
bancaires et les compagnies d’assurance. Dahl & Shrieves (1990); Shrieves & Dahl (1992)
ont montré que la pression des réglementations des fonds propres pousse les banques à
accroitre leurs ratios de capital et à baisser leur portefeuille de risques.

Sur la base d’un échantillon de banques américaines, l’étude de Berger et al. (1995) souligne
l’existence d’une relation positive entre les réglementations de fonds propres et le
portefeuille de risque bancaire. Jackson (1999) constate l’amélioration du ratio de capital
pondéré par le risque dans la majorité des pays du G10, ce qui pourrait être dû à l’imposition
des réglementations des fonds propres. Selon Haubrich & Wachtel (1993), sous l’influence

24
des réglementations des fonds propres, les banques optent pour les investissements les moins
risqués.

Dans le secteur financier, de nombreux travaux ont montré que les réglementations des fonds
propres incitent les banques à augmenter leurs ratios des fonds propres (Aggarwal &
Jacques, 1998b; Aggarwal & Jaques, 2001; Jacques & Nigro, 1997; Kleff & Weber, 2008) et
d’autres ont examiné l’influence de l’imposition des réglementations sur la performance de
la banque. Pour Cooper & Ross (1991), le cours des actions a réagi négativement suite à
l’annonce des accords entre les pays industrialisés. Toutefois, ce résultat a été contesté par
des recherches similaires menées par la suite en Suisse, aux Pays-Bas et en Allemagne. Les
débats scientifiques autour de l’instauration d’un niveau de capital minimum dans le secteur
financier en général et dans le secteur de l’assurance en particulier restent animés en raison
du caractère réglementaire et institutionnel de cette question.

3.2.2. Les intérêts pratiques

Malgré l’importance de l’assurance dans la sphère économique, les recherches en sciences


de gestion se sont très peu intéressées à l’étude des caractéristiques financières des sociétés
d’assurance. Pour combler ce vide empirique, notre travail de recherche a pour ambition de
produire des connaissances avec des intérêts pratiques pour les dirigeants et les autorités de
tutelle du secteur de l’assurance.

Ø Intérêts pour le dirigeant

En analysant les effets et les spécificités de la mise en place d’une réglementation qui
encadre l’imposition et la mise en place d’un niveau de fonds propres, le dirigeant pourrait
apprécier l’impact d’un environnement réglementaire contraignant lors de l’élaboration de la
politique financière, le choix de la structure financière optimale et la mise en place d’une
stratégie financière.

Ø Intérêts pour les régulateurs

Notre recherche présente un intérêt certain pour les régulateurs. Il s’agit de l’influence
éventuelle des réglementations sur les sociétés d’assurance et les effets qu’elle peut induire

25
sur l’économie nationale. Le rôle des autorités de régulation est de vérifier la réalisation des
objectifs visés par les réglementations. Elles doivent aussi s’intéresser aux réactions des
établissements face aux exigences d’adéquation des fonds propres. Pour préserver la stabilité
et la sécurité du système financier international et assurer la mise à niveau de toutes les
sociétés d’assurance des pays membres, la Commission Européenne a élaboré en Mars 2002
son premier accord appelé Solvency I qui vient compléter les directives de 1973 (non-vie) et
de 1979 (vie).

Les directives Solvency I ont permis d’enrichir les directives précédentes en termes
d’augmentation des fonds propres, d’indexation sur l’inflation, d’augmentation de la marge
dans les branches de responsabilité, de modalités de calcul de la marge pour l’entreprise et
de reconnaissance accrue des pouvoirs des contrôleurs d’assurance (Van Hulle, 2005). Les
nombreuses critiques adressées à cet accord ont incité la Commission Européenne à le
réviser et à adopter une nouvelle version Solvency II. L’objectif de ce nouvel accord, dont le
projet a été lancé en 2001, est double. D’une part, il vise à corriger les faiblesses liées à la
gestion des risques, en insistant sur l’exigence de fonds propres au titre du risque
opérationnel. D’autre part, il met en avant la nécessité de la mise en place d’un contrôle
interne efficace.

4. Les objectifs de la recherche

Notre travail empirique aura pour objectif d’analyser le niveau de fonds propres des
compagnies d’assurance françaises.

Sur le plan théorique, pour construire nos hypothèses, nous présentons une revue de la
littérature étant donné que notre démarche est de type hypothético-déductif, que nous
développerons dans notre chapitre méthodologique. Dans cette première étape, nous
présentons les grands courants de pensée liés à la structure financière en soulignant leurs
avantages et limites. L’objectif sera de tester les déterminants de la structure financière des
sociétés d’assurances françaises. Ces déterminants sont issus des hypothèses des deux cadres
théoriques majeurs retenus dans ce travail, à savoir la théorie du compromis et celle du
financement hiérarchique.

Sur le plan pratique, l’objectif de notre travail de recherche est d’étudier la spécificité de la
détermination du niveau des fonds propres dans le secteur des assurances et l’impact de

26
l’environnement réglementaire sur la décision des sociétés d’assurance en la matière. Les
résultats pourraient permettre de déterminer les grands axes d’une réglementation future qui
soit adaptée, efficace et non contraignante. Enfin, même si l’étude approfondie de la relation
entre la réglementation (en matière d’imposition d’un ratio de capital minimum) et la prise
de risque des sociétés d’assurance n’est pas l’objectif principal de notre recherche, nous
tenterons de l’analyser puisque le risque est un des principaux déterminants des fonds
propres.

5. Construction et formulation de la question de recherche

A travers la revue de littérature réalisée sur les théories de la structure financière des
entreprises en général et des entreprises financières en particulier, notre questionnement de
recherche s’articule autour de l’identification des déterminants du niveau de fonds propres
dans l’industrie de l’assurance et les incidences de l’intégration d’un cadre réglementaire
dans le processus de choix du niveau optimal de fonds propres de la société d’assurance. La
question du niveau des fonds propres est naturellement liée à la problématique de la
solvabilité dans le secteur de l’assurance. Dans ce registre, le ratio de capital ou la marge de
solvabilité jouera intuitivement un rôle central dans le cadre du contrôle prudentiel.

En première approximation, la marge de solvabilité correspond au capital, réserves et plus-


values latentes. Elle permet d’identifier l’excédent de l’ensemble des ressources sur les
engagements de la compagnie afin de prévenir le risque de faillite (variation rapide de la
valeur des placements, sous-évaluation des provisions techniques, évolution brutale de la
sinistralité, etc.). La marge de solvabilité est composée de :

- la situation nette comptable (report à nouveau, résultat de l’exercice, réserves,


capital),

- la réserve de capitalisation,

- les quasi-fonds propres, c’est-à-dire les emprunts subordonnés, en particulier dans les
mutuelles,

- les plus-values latentes sur les actifs ou éléments de correction de la sous-estimation


des actifs ;

- les éléments incorporels (ex : fonds de commerce) qui viennent en déduction ;

27
- les sous-estimations éventuelles du passif qui viennent en déduction ;

- les sous-estimations éventuelles de l’actif qui viennent en déduction.

Figure 1. Les différents niveaux de stabilité

Source : Sandström (2010)

Chaque compagnie doit calculer et atteindre le plus petit des montants minima de marge de
solvabilité, qui sont des approvisionnements de sa prise de risque d’exploitation.

Pour une compagnie dommages :

- à partir du chiffre d’affaires brut de l’exercice : MS minimum 1 = 16% du CA ;

- à partir de la charge de sinistre brute de la moyenne des trois derniers exercices : MS


minimum 2 = 23% de la charge de sinistre brute moyenne ; en corrigeant les sinistres
du taux de conservation nette de la charge de sinistre, c’est-à-dire la charge que la
société ne cède pas aux réassureurs, si ce taux est supérieur à 50%.

Pour une compagnie vie :

28
- MS minimum 1 = 4% des provisions mathématiques nettes de réassurance, en
limitant le taux de rétention à 85% ;

- MS minimum 2 : = 3 pour mille des capitaux sous risques.

La marge de solvabilité a des limites liées à son caractère synthétique, elle doit être
compléter par une analyse plus dynamique et prospective ; en particulier en assurance-vie :

- la marge de solvabilité peut induire une fausse impression de sécurité lorsque les taux
sont bas (prise en compte des plus-values latentes, ambiguïté de la réserve de
capitalisation, faible marge entre taux d’actualisation du passif et taux du marché) ;

- le calcul de la marge de solvabilité peut devenir complexe en cas de hausse des taux
et très volatile dans le cas opposé ;

- le taux d’actualisation utilisé dans les comptes est parfois éloigné des taux de marché
ou de la performance de l’actif.

Ainsi, en 1998, la baisse des taux obligataires a permis de mettre en exergue les limites de la
marge de solvabilité. Une baisse importante des taux fragilise l’équilibre des compagnies
d’assurance engagées sur des rémunérations plus élevées que celles permises par le marché,
alors que leurs marges de solvabilité s’améliorent fortement grâce aux plus-values latentes
obligataires. La réévaluation des provisions mathématiques d’assurance vie (les augmenter
en cas de baisse des taux) permettrait d’éviter une telle situation.

6. Les principaux axes de la recherche

Plusieurs travaux de recherche se sont intéressés à l’étude de la structure financière des


entreprises. Néanmoins, le modèle de Modigliani & Miller (1958) est considéré comme
étant le premier travail de recherche structuré et le principal modèle théorique encadrant la
structure financière des firmes. Cependant, le pouvoir explicatif de ce modèle est atténué par
les limites de ses postulats et ses hypothèses de base qui le rendent peu adapté dans un
environnement économique marqué par la présence de multiples imperfections du marché
(asymétries d’information, coût des transactions…). Les différents travaux de recherche qui
se sont succédé ont permis d’aller au-delà de ces hypothèses limitatrices et d’adopter de
nouvelles hypothèses en meilleure adéquation avec la réalité des affaires. Ceci a permis
d’obtenir une meilleure compréhension de la structure financière et ses déterminants.

29
Notre travail de recherche s’inscrit dans le prolongement des travaux réalisés sur la structure
financière de la firme. Notre étude aura pour objectif de tester le pouvoir explicatif de la
théorie financière dans le secteur des assurances. A cette fin, nous exploiterons les théories
du compromis et du financement hiérarchique dans l’élaboration de notre modèle théorique
(axe 1).

Etant donné que la structure financière des sociétés d’assurance est encadrée par les
directives des autorités prudentielles, l’analyse de l’impact de la réglementation prudentielle
sur la structure financière des sociétés d’assurance constitue une thématique de recherche
prometteuse. Les modèles les plus testés empiriquement dans le secteur financier restent
ceux élaborés par Dahl & Shrieves (1990); Shrieves & Dahl (1992) et Rime (2001).

Par conséquent, l’objectif du deuxième volet de notre travail empirique sera de mesurer
l’impact de la réglementation prudentielle sur la structure financière des sociétés d’assurance
en appréciant le pouvoir explicatif de ces modèles (axe 2). Nous procéderons à un test
empirique d’une version modifiée de ces modèles sur un panel de sociétés d’assurance
françaises.

Niveau des fonds propres dans les sociétés d’assurance

Figure 2. Les axes de la recherche

Dans le cadre du volet empirique de notre travail de recherche, nous serons amené à observer
des faits mesurés grâce aux données secondaires collectées. Selon Girin (1986), les données

30
collectées par le chercheur dans le cadre de sa démarche de recherche sont « froides », c’est-
à-dire qu’elles constituent la matière première préexistante et dont l’élaboration n’est pas liée
à l’investigation en cours. Le chercheur est amené à interpréter des phénomènes évalués par
l’intermédiaire de données objectives (Huberman & Miles, 1991). Dans le cadre de notre
recherche, nous avons pour ambition d’examiner les liens entre la structure financière et ses
déterminants traditionnels tout en tenant compte de l’impact de la réglementation. La
réalisation de nos objectifs passe par l’exploitation de manière objective des faits, afin de
mettre en lumière les liens qui pourraient exister ente les concepts théoriques autour desquels
s’articulent notre cadre conceptuel, à savoir, la structure financière et le niveau des fonds
propres des sociétés d’assurance françaises. Notre choix méthodologique, qui sera justifié
dans notre chapitre méthodologique, s’inscrit dans le cadre d’une démarche hypothético-
déductive.

31
Notre travail de recherche est fondé sur des hypothèses conçues grâce à une exploration
théorique des connaissances déjà développées sur la problématique. Ceci permet d’obtenir
une définition du cadre théorique et du cadre opératoire pour tester les hypothèses établies
préalablement. Cette démarche ne correspond pas à une tentative de compréhension de la
réalité au sens de Thiétart (2003), mais plutôt à une démarche d’explication de la réalisation
des phénomènes observés. Notre recherche adopte un design épistémologique positiviste
basé sur une démarche hypothético-déductive qui se traduit par la méthode des tests
d’hypothèses. A cette fin, un échantillon de sociétés d’assurance françaises, ayant des
données complètes entre 2006 et 2012, a été constitué. Les données collectées forment un
panel cylindré qui nous permettra d’entreprendre le volet empirique de l’étude.

Pour ce qui est de la méthode statistique dont nous faisons usage, il s’agit de l’économétrie
des données de panel. Elle nous paraît être la plus adéquate car elle offre plus de précision
dans le calcul des coefficients et des relations entre les variables explicatives et la variable à
expliquer. Elle a l’avantage de prendre en considération l’hétérogénéité qui résulte aussi bien
de l’évolution des comportements dans le temps que des différences qui existent entre les
unités statistiques. Dans le cadre du premier volet de notre travail empirique, cette méthode
semble être la plus appropriée pour avoir des résultats probants. Pour ce qui est du deuxième
volet de notre travail empirique, où nous cherchons à mettre en évidence l’impact de la
réglementation des fonds propres à travers l’interdépendance entre la variation du risque et
celle du capital, nous ferons appel à l’estimation d’un modèle à équations simultanées (2
équations) réalisée par la méthode des Doubles Moindres Carrés. Cette dernière permet de
prendre en considération l’impact de l’existence d’une ou plusieurs variables endogènes.

32
CONCLUSION DU CHAPITRE INTRODUCTIF

Pour assurer la dynamique de l’économie entière, le bon fonctionnement du secteur des


assurances est primordial. La manne financière dont disposent les assureurs permet de
financer les investissements réalisés par l’Etat et par les entreprises, et les particuliers à
travers les investissements, la consommation et la création d’emploi. La solidité du secteur
des assurances est une priorité au niveau européen. C’est ainsi que les directives Solvency I
et Solvency II ont été mises en place afin de maintenir et d’assurer la stabilité du secteur
entier. La santé du secteur des assurances reste principalement fonction de la solidité
financière et de la solvabilité de chaque société d’assurance prise individuellement. Comme
le régulateur utilise le ratio de capital minimum comme le moyen de régulation privilégié,
les fonds propres jouent ainsi un rôle important à l’échelle macroéconomique. Ces fonds
propres permettent d’éponger les pertes imprévues en période crise ou de récession et
d’instaurer la confiance des déposants et des investisseurs (un niveau élevé de capital est
souhaitable puisqu’il instaure la confiance). Si le capital réglementaire est une réponse aux
préoccupations de solvabilité, le capital économique a pour but d’assurer l’efficacité de la
gestion des sociétés d’assurance en tenant compte de leur rentabilité et de leur profil de
risque. Les sociétés d’assurance cherchent à diminuer le montant des fonds propres pour
accroitre la rentabilité des actionnaires.

Averties sur les limites de cette différence, les autorités de régulation étudient les possibilités
de rapprochement entre les deux notions de capital. Elles préconisent une prise en
considération plus exhaustive des risques et une pondération plus adaptée des actifs avec un
recours progressif aux modèles internes développés par les sociétés d’assurance dans les
nouveaux dispositifs. Le niveau optimal des fonds propres serait le résultat d’un arbitrage
entre les exigences de solvabilité et les exigences d’efficacité de la société d’assurance.

En plus de ces deux déterminants importants, la théorie financière regorge en matière


d’enseignements sur le choix de la structure financière notamment deux cadres théoriques
complémentaires : Trade Off Theory (théorie du compromis) et la Pecking Order Theory (la
théorie du financement hiérarchique).

33
PARTIE I : LA STRUCTURE FINANCIERE DANS LE
SECTEUR DE L’ASSURANCE ET LES DISPOSITIONS
REGLEMENTAIRES

34
Les questionnements autour de la détermination du niveau de fonds propres dans le secteur
financier ont alimenté les débats entre chercheurs, praticiens, professionnels et régulateurs
depuis plusieurs décennies. Les fonds propres constituent un élément déterminant dans le
bon fonctionnement des institutions financières (sociétés d’assurance, banques…). Leur
détermination dépend de plusieurs paramètres propres à la société financière et à son
environnement (économique et réglementaire). Dans le secteur des assurances, cette
question est d’une très grande importance, étant donné le rôle que joue la fixation du niveau
de fonds propres dans l’ajustement du bilan des compagnies d’assurance. De plus, les
dirigeants doivent prendre en considération plusieurs facteurs endogènes et exogènes qui
peuvent influencer la détermination des fonds propres tels que l’environnement
réglementaire (autorités de contrôle prudentiel) et les pressions exercées par les autorités
prudentielles.

Ainsi, notre première partie précisera le contexte dans lequel les théories financières
privilégiant une approche par compromis et celles privilégiant une approche par hiérarchie
expliquent les choix de l’entreprise en matière de financement. Ces théories seront revisitées
à la lumière des particularités que représentent les sociétés d’assurance. L’asymétrie
d’information est alors un élément central dans la compréhension des mécanismes financiers
qui justifient l’existence d’un comportement propre à ce type d’entreprises. La vision
purement financière adoptée dans cette partie facilite la tâche puisque seules des
informations quantitatives disponibles via les états financiers des firmes sont nécessaires.

35
CHAPITRE I : STRUCTURE DU MARCHE FRANCAIS DE L’ASSURANCE ET
STRUCTURE DU CAPITAL

L’objectif de ce chapitre est de présenter les différentes caractéristiques et particularités du


marché de l’assurance en France. Dans un premier temps, nous présenterons les différentes
dispositions réglementaires et prudentielles qui encadrent l’activité de l’assurance et les
spécificités managériales et organisationnelles des sociétés d’assurance. Dans un deuxième
temps, nous nous intéresserons à l’étude des caractéristiques financières et comptables des
sociétés d’assurance.

Les sociétés d’assurance sont des entreprises très particulières, elles doivent répondre à un
arsenal d’exigences juridiques et financières qui leur est réservé. Leurs états financiers
doivent refléter non seulement les situations économiques et financières de l’entreprise, mais
aussi, des détails liés à leur solidité financière et leur solvabilité. Certaines particularités
comme le contrôle prudentiel, l’inversion du cycle d’exploitation, l’inversion de l’incertitude
et l’horizon éloigné de certains segments de l’activité de l’assurance font des sociétés
d’assurance des entreprises uniques. Elles sont soumises à un certain nombre de règles et de
réglementations. Ces règles sont destinées à protéger les agents économiques d’un pays, qui
font de plus en plus appel aux services des assureurs. Sans oublier les parties prenantes
(actionnaires, sociétaires, créanciers…), dont la survie dépend parfois même de la
compagnie d’assurance avec laquelle elles traitent.

Les réglementations constituent un ensemble de règles prudentielles qui visent à protéger les
souscripteurs. Selon les pays, les autorités peuvent recourir à des sanctions pouvant aller
jusqu’à la suspension des activités des dirigeants et le retrait d’agrément. Les
réglementations concernent la constitution de fonds propres suffisants, l’évaluation prudente
des provisions techniques, la liquidité suffisante des actifs, la connaissance parfaite des
engagements hors bilan et la tarification raisonnable des contrats. Ces réglementations
correspondent à des contraintes juridiques, financières et prudentielles qui encadrent et
limitent les marges de manœuvres assureurs.

36
SECTION I : LES PARTICULARITES JURIDIQUES, REGLEMENTAIRES ET
ORGANISATIONNELLES

Sous-section 1 : Les spécificités juridiques et réglementaires


Parmi ces règles, on trouve l’exigence de constituer une marge de solvabilité qui se traduit
par la constitution d’un montant de fonds propre minimum. Les autorités exigent aussi des
assureurs que les placements soient réglementés afin de diminuer les risques que peuvent
rencontrer les assureurs sur les marchés financiers et honorer ainsi leurs engagements envers
les souscripteurs.

1. Les exigences en termes de fonds propres

Les sociétés d’assurance sont tenues de disposer d’un niveau minimal de fonds propres qui
servira à protéger les assurés contre une éventuelle défaillance de l’assureur. Ils peuvent
également servir à amortir les chocs qui peuvent affecter le rapport sinistres sur primes.
Cette exigence minimale de fonds propres varie en fonction de la forme juridique et
organisationnelle et de la nature de l’activité de la société d’assurance (mutuelles Vs
assureurs par actions ; dommages Vs vie).

Tableau 4. Le montant de fonds propres qu’exige la loi pour chaque type de société d’assurance

Catégories exploitées

Forme juridique Vie, crédit, RC, Caution, Toute autre


Réassurance,
Catégorie
Opérations assimilées

Sociétés par actions (article R. 322-5) 800.000 Euros 480.000 Euros

Sociétés d’assurance mutuelles

(article R. 322-44) 400.000 Euros 240.000 Euros

Sociétés mutuelles d’assurance Fonds constitués sans minimum, exigence d’au moins 300
sociétaires.
(articles R. 322-99 et 101)

Tontines (vie) (article R. 322-158) 160.000 Euros Néant

Source : l’auteur

37
Le capital social (ou le fonds d’établissement dans le secteur mutualiste) constitue un
élément de la marge de solvabilité, alors qu’à sa constitution, son rôle était surtout de faire
face aux premiers frais d’établissement et de lancement. Le législateur a fixé les modalités
de versement de ce fonds tout en précisant que les apports en nature sont exclus lors de la
détermination du montant du capital social ou du fonds d’établissement. Ce dernier constitue
une garantie complémentaire qui s’ajoute aux actifs détenus en contrepartie des provisions
techniques.

Tableau 5. Modalités de versement du capital social

Sociétés par actions Minimum versé : 50% du capital souscrit (R 322-


6) contre 25% pour les sociétés de droit commun

Sociétés d’assurance mutuelles Intégralement versé à la constitution (R 322-47)

Sociétés mutuelles d’assurance Le fonds est constitué uniquement par les « droits
d’adhésion » des sociétaires

Source : l’auteur

L’ensemble de ces garanties est complété par la marge de solvabilité qui correspond à un
pourcentage des primes émises ou des sinistres pris en charge pour les assurances non-vie, et
à un pourcentage des provisions mathématiques pour l’assurance-vie. La marge de
solvabilité intègre le capital social pour les sociétés d’assurance ou fonds d’établissement
pour les mutuelles, les réserves constituées, les bénéfices reportés, les plus-values latentes
durables, les actions préférentielles et les emprunts subordonnés.

Toutes ces mesures destinées à renforcer la capacité de la société d’assurance à indemniser


ses assurés en cas de sinistre. Ce qui oblige les assureurs à constituer des provisions
techniques afin de faire face aux engagements envers les assurés (assurance-dommages) et
les épargnants (assurance-vie), et compléter ainsi la marge de solvabilité.

Les provisions techniques constituent la pierre angulaire du bilan d’une société d’assurance.
Le calcul et l’enregistrement des provisions mathématiques sont réglementés par le code des
assurances et le code de la mutualité. Ces provisions sont encadrées par l’article 331-1 du
code des assurances qui dispose que les provisions mathématiques constituées par les
sociétés d’assurance doivent être calculées dans le respect des conditions suivantes :

38
§ tenir compte de la partie des primes devant être versée par l’intéressé et qui est
représentative des frais d’acquisition du contrat, lorsque ces frais ont été portés en
charges déductibles par l’entreprise avant la fin de l’exercice à la clôture duquel la
provision est constituée ;

§ la provision mathématique ne peut être inférieure de plus de 5% à la provision qui


serait calculée sans tenir compte de la condition mentionnée dans la première
condition.7

Les provisions techniques sont également considérées comme des corrections comptables
apportées à l’inventaire, elles sont destinées à permettre le règlement intégral des
engagements pris envers les assurés et bénéficiaires de contrats. Elles sont liées à la
technique de l’assurance et elles résultent des évaluations et des estimations qui doivent être
réalisées avec la plus grande prudence (Simonet, 1998).

Les provisions techniques sont composées essentiellement des provisions suivantes :

§ provisions pour primes non acquises ;

§ provisions non-acquises ;

§ provisions d’assurance-vie ;

§ provisions pour participation aux bénéfices et ristournes ;

§ autres provisions techniques ;

o provision pour risque en cours ;

o provision pour vieillissement ;

o provisions pour égalisation ;

§ provisions relatives aux contrats d’assurance-vie lorsque le risque de placement est


supporté par le preneur d’assurance.

Cet ensemble de contraintes incite les sociétés d’assurance à être de plus en plus vigilants
quant à leur structure financière et leur solvabilité.

7
assurances, C. d. 2013. Dalloz..

39
Pour faire face aux défaillances de nombreuses sociétés d’assurance aux Etats-Unis, en
France, en Scandinavie et au Japon, des autorités de contrôle telle que la NAIC 8 (National
Association of Insurance Commissioners) aux Etats-Unis, ont mis en place des mécanismes
pour évaluer la solvabilité des assureurs. C’est ainsi que les méthodes de la RBC (Risk Based
Capital) ont vu le jour.

L’ensemble de ces méthodes permet d’associer à chaque catégorie de risque un montant


spécifique de fonds propres. Le Risk-Based Capital est donc le résultat de l’application d’un
coefficient de redressement à la somme des fonds propres spécifiques tout en tenant compte
de la corrélation qui puisse exister entre ces fonds.

Les sociétés d’assurance sont donc appelées à respecter à la lettre la législation les
concernant, car de leur survie dépendent beaucoup d’acteurs (souscripteurs, assurés,
actionnaires…). Outre le fait d’assurer les risques des souscripteurs, les sociétés d’assurance
sont tenues de verser des revenus aux souscripteurs dans le cas d’un contrat d’assurance-vie
ou de capitalisation, et pour répondre à cette exigence. Les sociétés d’assurance sont
amenées à investir les sommes placées afin de garantir une rémunération à leurs assurés et
épargnants. Ces investissements et placements sont réglementés par le législateur afin de
protéger les investisseurs individuels et les épargnants contre une prise de risque des sociétés
d’assurance sur les marchés financiers.

2. Investissements des sociétés d’assurance et placements financiers

Plusieurs études ont été menées sur les politiques d’investissement des sociétés d’assurance.
En faisant appel à l’hypothèse de discrétion managériale, Camino (2003); Camino, Martinez,
& Albarran (2001) ont démontré que les sociétés d’assurance par actions cherchent à
maximiser la richesse des investisseurs en attendant de dédommagement futur des assurés,
cette tendance se traduit par des investissements risqués (actifs risqués), car les créanciers
résiduels des sociétés d’assurance par actions poussent ces dernières à investir dans
portefeuilles d’actifs risqués. Et par une réduction du niveau des réserves et des provisions,
contrairement aux mutuelles qui préfèrent prendre moins de risque et maintenir leurs
réserves et leurs provisions à un niveau élevé.

8
National Association of Insurance Commissioners, organe chargé de contrôler les compagnies d’assurance
aux Etats-Unis.

40
Camino (2003) a également constaté que les stratégies d’investissement des sociétés
d’assurance par actions sont différentes de celles des mutuelles d’assurance. Ce résultat
s’explique principalement par le fait que les assurés des mutuelles d’assurance en détiennent
les actifs et les passifs, et qu’une augmentation de la valeur de leurs actifs engendrera une
diminution de la valeur de leur passif. Cette étude montre également que la politique
d’investissement est fonction de la forme organisationnelle de la société d’assurance.

L’étude de Lamm-Tennant & Starks (1993) a révélé que lors de la prise des décisions
d’investissement et de financement dans les mutuelles d’assurance la discrétion managériale
est limitée par les souscripteurs qui cherchent à protéger leur intérêt. Alors que, dans les
sociétés d’assurance par actions la discrétion managériale joue pleinement ce qui explique
les investissements risqués.

3. Les placements autorisés


Le législateur a fixé une liste exhaustive d’actifs et de biens mobiliers et immobiliers, que les
sociétés d’assurance peuvent acquérir afin d’honorer leurs engagements. Parmi ces actifs on
trouve9 :

§ les valeurs mobilières et titres assimilés : les obligations et autres valeurs émises ou
garanties par l’un des pays de l’OCDE, les titres émis par la caisse d’amortissement
de la dette sociale, les obligations émises ou garanties par un organisme international
à caractère public, les obligations, les parts de fonds communs de créance et les titres
participatifs ; les actions…

§ les actifs immobiliers ; il s’agit de droits réels immobiliers afférents à des immeubles
situés dans un pays de l’OCDE, les parts ou actions de sociétés à objet strictement
immobilier, les parts des sociétés civiles…

§ les prêts et dépôts : dans cette catégorie on trouve les prêts obtenus ou garantis par
les Etats membres de l’OCDE, les prêt hypothécaires aux personnes physiques et
morales, les autres prêts et créances représentatives de prêts consentis aux personnes
physiques et morales.

Les intérêts courus des placements énumérés ci-dessus sont assimilés auxdits placements.
Ces derniers doivent être dispersés et diversifiés, la réglementation oblige les assureurs à ne

9
Article R.332-1 et suivant du code des assurances 2013, édition Dalloz

41
pas investir plus de 5% de la contrepartie de leurs engagements dans le même actif. Ce seuil
est de 0,5% quand il s’agit des actions des entreprises cotées, et il est de 10% pour les
placements immobiliers.

En ce qui concerne les placements les plus pratiqués par les sociétés d’assurance, la
réglementation prudentielle impose des limitations dans la répartition des actifs. Le fait de ne
pas devoir constituer de provisions sur les moins-values latentes sur les obligations détenues
en direct favorise le recours à ce type de placement :

§ les actions : permettent d’obtenir un rendement élevé à long terme, et c’est une
forme de protection contre l’inflation. Par contre, elles sont affectées d’une forte
volatilité et présentent des risques comptables importants ;

§ les placements obligataires à long terme assurent généralement un rendement


important assorti généralement d’avantages comptables non négligeables (non
comptabilisation des moins-values latentes), mais plus ces obligations sont à long
terme, plus elles sont exposées aux risques de l’inflation ;

§ l’immobilier apporte un rendement assez régulier, c’est une forme de protection


contre l’inflation.

4. La congruence actif-passif
Une bonne gestion actif-passif doit faire en sorte que les actifs et les passifs soient
congruents sur leurs échéances voire même sur leur probabilité de défaut. Cette congruence
et encadrée par le code des assurances10.

4.1. Les seuils maximaux par catégorie d’actifs


Art R.332-3. Rapportée au montant total des engagements règlementés [….] la valeur au
bilan de chacune des catégories d’actifs énumérés ci-après ne peut excéder :

§ 65% pour l’ensemble des actions et 5% pour les actions non cotées ;

10
Art R 332-1.1° les engagements réglementés doivent à toute époque être représentés par des actifs
équivalents. 2° les engagements pris dans une monnaie doivent être couverts par des actifs congruents, c’est-à-
dire libellés ou réalisables dans cette monnaie

Art R 332-1-1. Par dérogation aux dispositions précédentes, les entreprises d’assurance peuvent, à concurrence
de 20% de leurs engagements, ne pas couvrir ceux-là par des actifs congruents.

42
§ 40% pour les actifs financiers ;

§ 10% pour les prêts.

Il n’y a donc aucune limitation à la détention d’obligations. D’autre part, les plafonds sont
très élevés, compte tenu des règles de la gestion d’actifs, on n’imagine pas un assureur
détenant plus de 65% d’actions ou plus de 40% d’actifs immobiliers. Au total, ces seuils ne
sont pas très contraignants.

Dans ce cadre, Camino (2003) a procédé à l’évaluation de la rentabilité des investissements


en portefeuille des sociétés d’assurance. Il propose des techniques pour obtenir
l’amélioration de ces rentabilités et conclut que la décision d’investir dépend essentiellement
de la rentabilité des investissements. Les managers vont évaluer la faisabilité et les profits
que peut générer l’investissement avant de prendre une décision définitive. La méthode des
cash flows futurs permet de conclure si un investissement est rentable ou non.

4.2. Les Free Cash Flows


Les Free cash flows permettent aux dirigeants d’élargir leurs champs d’activités en
augmentant la taille de l’entreprise, en investissant dans des projets ayant des valeurs
actuelles nettes (VAN) nulles ou négatives. L’objectif des dirigeants étant d’augmenter leurs
rémunérations. Ce comportement se situe à l’origine des conflits d’intérêt entre les dirigeants
et les propriétaires (Jensen, 1986). Le secteur de l’assurance-vie est un secteur relativement
particulier, car le rythme de croissance est peu élevé ce qui peut générer des excès de Free
Cash Flows (Wells & Cox, 1995). En supposant que la forme organisationnelle impacte le
comportement managérial en termes de détention de Free Cash Flows, la recherche réalisée
à démontré que les dirigeants des sociétés mutuelles d’assurance détiennent davantage de
Free Cash Flows que les dirigeants des sociétés d’assurance par actions. Wells & Cox
(1995) considèrent que les Free Cash Flows peuvent être utilisés à l’encontre de l’intérêt des
propriétaires de la société d’assurance, car ils seront gaspillés alors qu’ils auraient dû être
distribués sous-forme de dividendes aux actionnaires des sociétés d’assurance par actions,
par une diminution des primes d’assurance pour les souscripteurs des mutuelles, ou bien,
investis dans des projets rentables. Cette situation pourrait être source de conflits entre les
dirigeants et les propriétaires des sociétés d’assurance (souscripteurs et actionnaires).

Les conflits d’intérêts entre les dirigeants et actionnaires sont alors plus importants dans les
sociétés mutuelles que dans les sociétés d’assurance par actions. C’est pour cette raison que

43
les propriétaires sont obligés d’optimiser leurs efforts afin que les Cash Flows détenus
correspondent à leurs intérêts (Mayers & Smith Jr, 1981)

4.3. Le contrôle des sociétés d’assurance


Afin d’assurer le respect de la réglementation spécifique aux sociétés d’assurance et d’éviter
ainsi les défaillances qu’a connu un bon nombre d’assureurs au milieu des années 1980 aux
Etats-Unis et en Europe (l’assureur espagnol INEAS en 2010, le britanique Hill Insurance
Company en 2013 et le groupe islandais Island Capital Limited en 2014…). Les Etats
assurent le contrôle des sociétés d’assurance via des commissions et des autorités créées
spécialement à cet effet. Ce contrôle s’exerce dans l’intérêt des assurés, souscripteurs et
bénéficiaires de contrats d’assurance et de capitalisation. Le code des assurances et le code
de la mutualité déterminent les entreprises d’assurance concernées ainsi que les modalités du
contrôle par l’Etat.

Le contrôle des sociétés d’assurance revêt cinq caractéristiques (Couilbault & Eliashberg,
2007) :

§ préventif : il faut une autorisation pour pratiquer les opérations d’assurance ;

§ il s’effectue a posteriori : on examine les résultats réalisés grâce aux états


comptables que doivent fournir les sociétés d’assurance ;

§ administratif : il est exercé par des fonctionnaires relevant soit du Ministère de


l’économie et des finances, soit d’autorités indépendantes ;

§ permanent : il a lieu tout au long de l’existence de la société ;

§ actif : des clauses-types peuvent être imposées aux sociétés ; des tarifs peuvent être
fixés, ou encore des mesures financières préconisées.

En France, le contrôle des sociétés d’assurance est confié à l’autorité de contrôle prudentiel
(ACP), c’est une autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale, et chargée
de veiller au respect par les sociétés d’assurance des dispositions législatives et
réglementaires qui leur sont applicables, ainsi que des engagements contractuels qui les lient

44
aux assurés ou aux adhérents11. Cette autorité est née en 2008 de la fusion de l’autorité de
contrôle des assurances et des mutuelles (ACAM) et de la Commission bancaire.

Aujourd’hui, en France, il n’existe encore aucune garantie destinée à indemniser les


adhérents des sociétés d'assurance mises en liquidation, alors que plusieurs pays ont renforcé
leur législation afin de protéger les assurés et les épargnants contre de tels événements. Dans
ce registre, le fonds de garantie représente le mécanisme le plus accompli en matière de
protection des créanciers, mais aussi le plus contraignant pour les sociétés d'assurances.

Au Royaume-Uni, le Policyholders Protection Act adopté en 1975 a permis la constitution


d’un fonds contrôlé par l’Etat. Ce fonds est alimenté par une participation d'un maximum de
0,8 % des primes prélevées auprès de l'ensemble des assureurs agréés afin d'indemniser les
assurés victimes de la faillite d'un assureur.

Aux Etats-Unis, chaque Etat de l’union a mis en place un fonds de garantie visant à couvrir,
dans des limites statutairement définies, les obligations financières d'une société d’assurance
défaillante vis-à-vis de ses assurés, épargnants et tiers. Lorsqu'une société d’assurance exerce
ses activités dans un Etat de l’Union, elle devient assujettie au paiement de cotisations, dont
le montant est proportionnel, par ligne d'activité exercée par la société d’assurance et
couverte par le fonds de garantie, au montant des primes perçues sur une période de
référence statutairement définie, mais toujours plafonné à un certain pourcentage de celles-
ci.

La Belgique, quant à elle, ne s'est pas dotée d'une loi sur les faillites spécifiques aux sociétés
d'assurances. Les salariés, les assurés et les épargnants sont considérés comme des créanciers
privilégiés. La loi du 9 juillet 1975 qui organise le contrôle des assurances, prévoit la
constitution d'un fonds de garantie minimum qui correspond à un tiers de ce qui serait dû aux
assurés et les épargnants en cas de réalisation du risque

5. La politique fiscale des sociétés d’assurance


Le régime fiscal change en fonction de l’activité de la société d’assurance, à ce stade on
distingue deux types de sociétés d’assurance : les sociétés d’assurance générale et les
sociétés d’assurance-vie.

11
Article 310-12 du code des assurances 2013, édition Dalloz.

45
Tableau 6. CA réalisés par les assureurs dans les dix premières économies mondiales en 2012

Chiffre
d'affaires (En Vie Non-vie Total Part mondiale
Mds d'Euros)

Etats-Unis 537,570 667,107 1 204,677 26,20%

Japon 524,668 130,741 655,408 14,30%

Royaume-Uni 210,067 109,486 319,553 7, 0%

France 174,753 98,359 273,112 5,90%

Allemagne 113,869 131,292 245,162 5,30%

Chine 134,539 87,319 221,858 4,80%

Italie 105,089 55,426 160,514 3,50%

Corée du sud 79,161 51,223 130,383 2,80%

Canada 52,167 69,045 121,213 2,60%

Pays-Bas 31,210 79,722 110,931 2,40%

Source : FFSA (2013)

6. Les activités des sociétés d’assurance


Nous allons distinguer ici les différents types d’entreprises d’assurance en fonction de leurs
activités (vie-dommages).

6.1. Les sociétés d’assurance générale

Les activités des sociétés d’assurance générale présentent davantage un caractère


d’assurance pure que celles du secteur de l’assurance-vie, à cause, notamment, de la durée
des contrats proposés (très court terme : un an en général) et de l’objet des contrats
(assurance multirisques principalement).

Les activités des sociétés d’assurance générale se focalisent sur les assurances dommages et
accidents, elles concernent essentiellement les risques de perte financière liés à un accident,
un vol, les catastrophes naturelles telles que les tempêtes (ex : tempête de 1999 et les
dommages causés à l’activité sylvicole dans la région Aquitaine), les inondations, vents
violents et tremblements de terre.

46
Le code des assurances fournit une liste exhaustive des différents types d’assurance exercés
par les sociétés d’assurance générale12 :

§ assurance automobile ;

§ assurance des biens ;

§ marine, aviation et transport ;

§ rémunération des employés ;

§ crédit et caution.

Afin de pouvoir bénéficier de la couverture des sociétés d’assurance, les assurés sont tenus
de verser une prime à la société d’assurance pour se couvrir contre un risque. Cette prime
sera calculée en tenant compte des coûts attendus des sinistres, les frais de gestion et une
marge bénéficiaire qui pourrait varier en fonction de la perception du risque. Le degré du
risque peut lui aussi varier en fonction de plusieurs critères, comme la localisation du risque,
la catégorie de l’assuré ou une éventualité importante du risque.

Comme toutes les entreprises, les sociétés d’assurance générale ont des obligations fiscales à
respecter. En effet, elles ont l’obligation de déclarer deux types de revenus : les revenus des
souscriptions et les produits des placements. Le revenu de souscription constitue le revenu
net des assureurs hors produits et revenu des placements. Il vient s’imputer à l’utilisation des
provisions. Les gains réalisés au titre des placements (sur les primes ou sur le capital) font
partie intégrante de l’activité de l’assurance.

Les revenus de souscription peuvent varier car les primes sont faibles du fait de la
concurrence accrue dans le secteur des assurances qui incite les sociétés d’assurance à revoir
leurs tarifs à la baisse, les polices constituent une activité nouvelle pour laquelle les sociétés
d’assurance ne disposent pas d’expérience historique en matière de sinistralité, les sinistres
présentent une forte volatilité du fait de demandes d’indemnisation pour catastrophes
naturelles.

L’activité d’assurance est par nature caractérisée par l’acceptation et l’intermédiation des
risques. Ces derniers sont financés par des primes incluses dans le revenu de la société
d’assurance. Au regard des principes de concordance entre les éléments de l’actif et du passif

12
Article 332-12 du code des assurances, code des assurances 2013, édition Dalloz

47
de la société d’assurance, il est normal qu’une provision ou une réserve soit constituée.
D’autres réserves sont destinées à assurer une meilleure correspondance entre ressources
(revenus) et dépenses (indemnisations).

6.2. Les sociétés d’assurance-vie


Les sociétés d’assurance-vie proposent en général trois catégories de produits :

§ l’assurance non vie ;

§ l’assurance vie ordinaire ;

§ l’activité de rente.

L’assurance-vie apporte une couverture contre le risque de décès prématuré, de maladie et


d’incapacité. C’est une forme de couverture d’assurance vis-à-vis de la perte de revenu
potentiel provoquée par le décès prématuré ou l’incapacité. Les entreprises d’assurance-vie
proposent des produits financiers traditionnels comme les rentes temporaires assimilés à des
certificats de dépôts.

Les entreprises d’assurance-vie procèdent de la même façon que les sociétés d’assurance
générale, car elles opèrent en tant qu’intermédiaires en mutualisant les primes et les risques
collectés. Cependant, la détermination du résultat d’exploitation (bénéfice ou perte) peut
prendre plusieurs années, en raison du caractère à long terme de la plupart des contrats
d’assurance-vie, car il est quasi-impossible de déterminer ce résultat tant que les porteurs des
contrats d’assurance ne soient décédés et les indemnités versées. Les sociétés d’assurance
proposent également aux épargnants individuels des fonds d’investissement et des fonds de
retraite, auxquels elles appliquent leur savoir-faire en matière de calcul actuariel.

Les primes et les revenus d’investissement constituent les principales sources de revenu
imposable pour les sociétés d’assurance-vie, et au niveau des déductions, on trouve les
commissions, les frais administratifs et les indemnisations.

Les administrations fiscales des différents pays développés sont conscientes de la difficulté
d’imposition des sociétés d’assurance-vie, du fait du niveau des provisions constituées par
rapport au revenu. Certains pays comme l’Australie, l’Irlande, la Nouvelle-Zélande, la Suède
et le Royaume-Uni ont trouvé des solutions à ce problème en appliquant des formes
d’imposition principalement sur le revenu net des placements effectués par les sociétés
d’assurance-vie.

48
Sous-section 2 : Les formes juridiques et organisationnelles des sociétés d’assurance
Dans cette section, nous présenterons les caractéristiques des principales formes dormes
organisationnelles que nous pouvons rencontrer dans l’industrie de l’assurance. Nous
donnerons les particularités des différentes formes juridiques du secteur des assurances.
Nous présenterons également, les avantages et inconvénients de chaque forme
organisationnelle et nous finirons avec par l’étude des atouts de chaque forme
organisationnelle.

Dans le secteur des assurances, on peut distinguer trois formes organisationnelles : la forme
mutualiste, la société par actions et les Lloyd’s.

1. La forme mutualiste
Son origine remonte au XIXème siècle, et résulte du besoin des hommes de se rassembler
afin de s’assurer un bien-être et un financement (Hansmann, 1996). A l’origine de sa
constitution, on trouve des principes tels que l’entraide et la solidarité. C’est une forme
organisationnelle qui a pour but de fournir des services à ses adhérents.

1.1. Les mutuelles d’assurance


Les mutuelles sont considérées comme étant des institutions économiques, c’est-à-dire des
organisations économiques qui exploitent des ressources économiques afin de créer de la
richesse (Adams & Hossain, 1996;Belot, 2002; Cummins & Weiss, 1999). Ces mêmes
chercheurs mettent l’accent sur la particularité d’avoir des clients qui sont eux-mêmes
propriétaires de la société, et leur fonctionnement est fondé sur les bases suivantes :

§ offrir une prestation de service aux adhérents ou à la communauté plutôt que de


réaliser un profit : les mutuelles rendent un service à leurs adhérents et ne cherchent
pas à rémunérer le capital investi ;

§ un processus de décision démocratique : ce principe met en avant la qualité


d’adhérent, qui n’est pas fonction du capital détenu. Une limitation du nombre de
voix par membre « une personne - une voix » est de rigueur ;

§ la primauté des personnes et du travail dans la répartition des revenus : les mutuelles
appliquent une rémunération limitée du capital et répartissent les excédents entre les
membres sous forme de remises sur les primes d’assurance, mises en réserves

49
d’excédents pour le développement de la société, affectation de ces excédents à des
fins sociales.

1.2. Les sociétés d’assurance mutuelles


Le code des assurances définit les sociétés d’assurance mutuelles comme étant des sociétés
ayant un objet non commercial. Elles sont généralement constituées pour assurer les risques
contre lesquels leurs sociétaires cherchent à se couvrir, moyennant le paiement d’une
cotisation ou une prime fixe ou variable, elles garantissent à ces derniers le règlement
intégral des engagements qu’elles contractent. Cependant, les sociétés d’assurances
mutuelles effectuant des opérations sur la vie ou de capitalisation ne peuvent recevoir de
cotisations variables. Ces sociétés fonctionnent sans capital social, dans des conditions fixées
par décret du Conseil d’Etat. Les sociétés d’assurance mutuelles peuvent-être de deux
formes : les sociétés d’assurance mutuelles vie et les sociétés d’assurance mutuelles non-vie .

1.2.1. Les sociétés d’assurance mutuelles-vie


Elles trouvent leur origine dans les corporations médiévales, et elles proposaient à leurs
adhérents, une couverture en cas de maladie ou de décès. Dans son étude, Hansmann (1996)
considère que ce mécanisme a perduré après la dissolution des corporations, et ce, malgré
l’instabilité de ces mutuelles fondées essentiellement sur un régime de répartition13. Dès le
XVIIIème siècle, les mutuelles ont commencé à établir mathématiquement leurs taux de
primes14, grâce notamment au développement de l’actuariat.

Les mutuelles connaissent un succès incomparable dans le secteur vie, car un contrat
d’assurance-vie est à long terme et qui peut courir sur plusieurs dizaines d’années. L’assuré
ou le souscripteur d’une assurance-vie doit être convaincu que la société d’assurance a la
capacité d’honorer son engagement. Or, tout contrat d’assurance-vie est soumis aux aléas de
l’incertitude qui pourrait faire disparaître toutes les précautions prises par la société
d’assurance afin de conserver cette capacité : des taux de mortalité très différents des
prévisions, des revenus de placements inférieurs aux attentes…Ces incertitudes rendaient
difficile pour les premiers assureurs, de proposer des taux de primes assez bas pour être
attrayants, mais assez élevés pour garantir leur solvabilité.

13
La Wandsbeker Kraken und Totenlade allemande établie en 1677 et la British Amicable for Perpetual
Assuurance Office fondée en 1706.
14
The equitable (Royaume-Uni) en 1756 et Hamburgische Allegemeine Versorgungs Anstalt (1778)

50
Le mutualisme offre des garanties face aux incertitudes liées au métier de l’assurance. Les
mutuelles sont détenues par leurs assurés (souscripteurs ou sociétaires), ce qui rend quasi-
inexistants les comportements opportunistes des dirigeants, en maintenant les réserves à un
faible niveau ou en optant pour une politique de placement agressive (politique
d’investissement). En outre, les mutuelles ont la possibilité de facturer avec beaucoup de
liberté, des primes assez élevées pour améliorer leur solvabilité. Quand la sinistralité se
révèle moins importante que prévu, les mutuelles peuvent distribuer l’excèdent, en le
restituant à leurs sociétaires. Enfin, le fait que les assurés soient également sociétaires annule
le besoin d’une transaction commerciale et les coûts liés à cette opération. Ainsi, le
mutualisme permet de réduire les incertitudes liées aux contrats d’assurance à long terme.

Aux Etats-Unis, les premières mutuelles ouvertes au grand public apparues en 1843, ont
connu un succès plus important que les premiers assureurs-vie, constitués sous forme de
sociétés par actions (Spiller, 1972). Cette popularité a été due aux tarifs pratiqués par les
mutuelles et qui défiaient toute concurrence, sur lesquels les sociétés par actions n’ont pas pu
s’aligner. En outre, en matière d’assurance-vie, les sociétés par actions ne proposaient que
des contrats dont l’échéance était fixée entre un an et sept ans, alors que les mutuelles
proposaient des contrats qui courraient sur toute la durée de vie des assurés.

1.2.2. Les sociétés d’assurance mutuelles non-vie


Dans le secteur de l’assurance non-vie (dommages), où les contrats sont à court terme, les
mutuelles d’assurance disposent d’un avantage concurrentiel car elles connaissent
parfaitement les profils de risque de leurs assurés. Cet avantage est fondé sur le fait que la
majorité des mutuelles a été constituée par un groupe de personnes ou de professionnels pour
un territoire ou un secteur d’activité donné. En mettant leurs risques en commun, ces
personnes espéraient obtenir une couverture plus avantageuse que si elles faisaient appel à
un assureur traditionnel.

En Europe, c’est aux XVIème et XVIIème siècles, que les fermiers allemands étaient les
premiers à avoir constitué des associations d’assurance mutuelle 15 pour s’assurer contre les
risques d’incendie, de tempête et graves intempéries.

Aux Etats-Unis, c’est au début du XIXème siècle que divers groupes et industries régionales
(notamment l’industrie du textile) se sont organisés et formés les premières sociétés

15
L’association Süderauerdorf, fondée en 1537, et renommée Swiss-Re depuis 1999.

51
d’assurance mutuelles en 1843, afin de faire face aux injustices imposées par les sociétés par
actions qui proposaient des contrats d’assurance à des taux non-négociables.

Les sociétés d’assurance mutuelles non-vie ont l’avantage de mieux connaître et de mieux
évaluer les risques auxquels sont exposés les membres d’un corps de métier. Elles sont aussi
soumises à une espèce de pression morale de la part des adhérents, car un on considère qu’un
assuré est moins enclin à tromper ses paires qu’un lointain assureur. Enfin, dans le secteur de
l’assurance non-vie, les mutuelles accordent beaucoup d’importance à la prévention et aux
normes de sécurité, ce qui réduit l’importance, la gravité et la fréquence des sinistres.

Enfin, on trouve aussi un autre type de mutuelles d’assurance qui correspond aux mutuelles
d’assurance ou mutuelles associatives, qui ont considérées comme des formes particulières
de sociétés d’assurances mutuelles. Le législateur les qualifie aussi d’associations. La loi
n’exige aucun fonds d’établissement, en outre, le dirigeant est mandaté par les sociétaires et
il accomplit sa mission en tant que bénévole. Les cotisations sont toujours variables, ce qui
oblige ces sociétés à ne pas pratiquer l’assurance-vie. Les statuts doivent nécessairement
comporter une limitation géographique ou professionnelle.

2. Le Lloyd’s
Est considéré comme Lloyd’s toute association dont les membres sont des personnes
physiques ou morales (Names). Les Lloyd’s sont dotés de la personnalité morale et ils ont le
droit d’émettre des règlements qui s’imposeront à leurs membres. Elles sont financées par les
cotisations versées par leurs membres, l’association fournit à ses membres les moyens
matériels et humains dont ils ont besoin. Mais la corporation en tant que personne morale
n’émet pas de polices d’assurance, et ne prend pas d’engagements d’assurance.

Selon Roth & Charreaux (1997), le Lloyd’s se caractérise par:

- d’une part, ce n’est pas une société d’assurance mais une bourse ou un marché
d’assurance, où les risques sont placés, par l’intermédiaire de courtiers agréés par le
Lloyd’s, auprès des personnes physiques et morales regroupées dans des syndicats de
souscripteurs ;
- d’autre part, chacun des membres des syndicats assure les risques sous sa
responsabilité financière individuelle.

52
Le principe dominant est celui de la responsabilité financière personnelle de chaque membre,
car chaque souscripteur est considéré comme étant un assureur doté de pouvoirs
normalement dévolus à une société d’assurance.

3. Les sociétés par actions


Les sociétés d’assurance par actions (Axa, Generali…) est la forme organisationnelle la plus
répandue. Leur fonctionnement est défini par le code des assurances et le code des sociétés.
Elles ont des objectifs différents de ceux des mutuelles, à cause notamment, de leur structure
de propriété, et sont caractérisées par la présence de trois catégories d’agents : les
actionnaires, les dirigeants et les clients (assurés, adhérents et souscripteurs) (Adams &
Hossain, 1996; Spiller, 1972).

3.1. La propriété
Elle est exercée par les actionnaires qui détiennent un droit de propriété réel. Ils choisissent
leurs dirigeants, décident du sort du profit réalisé et sont libres de garder ou de vendre leurs
actions. La valeur de ce droit de propriété, matérialisé par des actions, est appréciée par la
performance de la société.

L’intérêt financier des actionnaires quant à l’efficacité des managers est proportionnel au
nombre d’actions qu’ils détiennent, par conséquent, cet intérêt est considéré comme étant
direct, puisque la valeur des actions dépend principalement des profits réalisés par la société.
Contrairement aux mutuelles, les assurés couverts par cette forme organisationnelle ne sont
que de simples clients.

3.2. La direction
Pour remplir cette mission, les dirigeants sont engagés par les actionnaires afin de réaliser
l’objet social de la société, à savoir, la proposition de services financiers aux clients. En cas
de non-satisfaction de l’efficacité des dirigeants, les actionnaires peuvent adopter une baisse
de leurs salaires voire une révocation pure et simple. Bien que la propriété soit détenue par
plusieurs actionnaires, la possibilité d’une concentration de la propriété par quelques
actionnaires peut inciter les dirigeants à rendre sa gestion plus efficace. Ainsi, les dirigeants
sont sous le contrôle direct des actionnaires qui sont toujours présents dans le conseil
d’administration et qui possèdent un droit de vote réel. Les sociétés par actions, ont la faculté
d’être souvent cotées en bourse, ce qui incite les dirigeants à toujours prendre en

53
considération la performance de la société sur les marchés boursiers (évolution du cours
boursier).

3.3. Les revenus résiduels


Chaque actionnaire, dispose d’un droit aux excédents de revenus réalisés par la société
d’assurance par actions. Les actionnaires vont donc s’assurer que la société minimise ses
coûts afin de réaliser un profit. En cas de résultat positif (gain), les actionnaires profiteront
d’une distribution de dividendes ou d’une augmentation des fonds propres
proportionnellement au nombre d’actions qu’ils détiennent. En cas de résultat négatif (perte),
une baisse des dividendes voire une baisse de la richesse de la société s’imposera.

4. Les différentes formes organisationnelles et performance


Selon Murphy (1985), il est plus approprié de définir la performance en termes de rendement
de l’actionnaire plutôt qu’en termes de profits comptables et il propose une autre mesure, qui
est la croissance des ventes de la firme. Il conclut que la forme organisationnelle peut
influencer positivement ou négativement la performance de l’organisation en question. Le
secteur des assurances est caractérisé par la diversité des formes organisationnelles des
compagnies qui le composent. Les sociétés mutuelles cherchent à satisfaire les attentes de
leurs souscripteurs, alors que les sociétés d’assurance par actions se fixent des objectifs
comme l’augmentation de la richesse et la satisfaction de leurs actionnaires au premier plan
de leurs préoccupations (Adams, 1995; Adams & Hossain, 1996; Mayers & Smith, 2000).

Dans ce cadre, Berle & Means (1932) ont initié les études sur les liens entre la performance
et la forme organisationnelle, ils ont mis en évidence les conséquences d’une séparation de la
fonction de propriété et la fonction de décision au sein des grandes entreprises managériales.

Dans le secteur des assurance, Mayers & Smith (2000) recensent les différentes formes
organisationnelles existantes ainsi que la distinction entre elles. Ils présentent les principaux
acteurs qui composent chaque forme organisationnelle.

54
Tableau 7. Les différentes formes organisationnelles dans le secteur des assurances

Souscription Propriété Décision

Forme mutuelle Sociétaire Dirigeant

Forme par actions Souscripteur Actionnaire Dirigeant

Forme Lloyd’s Souscripteur Names

Source : (Mayers & Smith, 2000)

Ils concluent que les relations contractuelles au sein des différentes organisations permettent
d’identifier deux sources principales de conflits potentiels :

- la relation assureur/assuré ;

- la relation dirigeant /actionnaire

5. Forme organisationnelle et efficience : les Sociétés par actions Vs. les Mutuelles
En procédant à un test d’efficience des sociétés d’assurance, Diacon (2001) considère
l’efficience comme étant la capacité d’un assureur à produire un niveau d’output tels que les
primes reçues par l’utilisation et d’inputs tels que l’administration, les employés et le capital
financier. Un assureur est dit techniquement efficient s’il n’y a pas de réduction de
l’utilisation des ressources non accompagnée d’une diminution équivalente d’outputs, tout
en maintenant la même technologie de production.

L’étude réalisée par Diacon (2001) a permis de comparer les performances de 431 sociétés
d’assurance généralistes dans six pays européens. Les résultats de son étude mettent en
évidence plusieurs particularités :

- sur l’ensemble de l’échantillon, les sociétés d’assurance britanniques possèdent un potentiel


important pour être plus performantes dans le futur ;

- les différences d’efficience s’expliquent en premier lieu par la taille, ensuite par la forme
organisationnelle et finalement par le risque encouru par la société d’assurance

- les mutuelles sont plus efficientes que les sociétés d’assurance par actions ;

- la relation entre la solvabilité et l’efficience varie selon les pays ;

- il n’existe pas un lien significatif entre l’efficience et le risque.

55
Dans le même registre, Cummins & Weiss (1999) ont démontré que les technologies de
production des outputs développées par les mutuelles sont plus performantes que celles
utilisées par les sociétés par actions.

L’existence de deux formes organisationnelles sur le marché de l’assurance a été justifiée


dans la littérature. Selon la théorie positive de l’agence et le principe de la sélection
naturelle, les entreprises les plus efficaces minimisent les coûts de production dont les coûts
d’agence constituent une importante partie. Cette tendance provoque l’apparition d’une lutte
pour la survie qui conduit à observer l’existence de plusieurs formes organisationnelles sur le
marché qui permettent de réduire les couts d’agence liés aux conflits d’intérêt entre parties
prenantes (Roth, 2002; Roth & Charreaux, 1997). Une organisation qui minimise ses coûts
d’agence est une organisation efficace.

Selon Mayers & Smith (2000); Mayers & Smith Jr (1981), les organisations peuvent
bénéficier de certains avantages lorsqu’elles opèrent dans des secteurs d’activités
spécifiques. Ces avantages sont la résultante de l’efficience grâce à laquelle chaque forme
organisationnelle contrôle les conflits d’agence qui peuvent apparaître entre propriétaires,
dirigeants et souscripteurs.

Dans son étude, Boose (1990) obtient les résultats suivants :

- les charges administratives des mutuelles sont nettement inférieures à celles des sociétés
d’assurance par actions, du fait que les actionnaires donnent beaucoup d’importance à la
surveillance des dirigeants ;

- une mutuelle permet de réduire les coûts générés par une relation d’assurance lorsque
l’asymétrie informationnelle ainsi que le risque d’un comportement opportuniste de la partie
contractante sont relativement importants ;

Pour résoudre ces problèmes organisationnels, Boose (1990) propose de recourir à une
surveillance mutuelle au lieu de confier la gestion d’une activité à un organisme privé.

Selon Roth & Charreaux (1997), une relation contractuelle génère des coûts d’agence ou de
transaction qui dépendent de l’incertitude comportementale et environnementale, des
divergences d’intérêts, de la fréquence des relations contractuelles, et enfin de la spécificité
des actifs mis en jeu. Toute forme organisationnelle est ainsi un arrangement de relations
contractuelles, et présente une fonction de coûts particulière.

56
Sous-section 3 : les spécificités financières et structure du bilan des sociétés d’assurance

Chaque entreprise, quel que soit son secteur d’activité et quel que soit sa forme
organisationnelle, dispose de spécificités financières qui le différencient des autres. Les
entreprises d’assurance ont des caractéristiques financières qui reflètent la nature de
l’activité ainsi que les risques spécifiques aux sociétés d’assurance

La principale différence entre les mutuelles et les sociétés par action est liée à leur structure
du capital. En effet, les capitaux propres d’une société d’assurance par actions sont
composés des actions émises par la société et possédées par les actionnaires, plus les
réserves. Alors que les mutuelles ne disposent pas de capitaux externes qui peuvent être
échangés sous forme d’actions. Leurs capitaux propres sont essentiellement composés des
réserves (profits accumulés). Selon Llewellyn & Holmes (1991), les deux formes de sociétés
peuvent émettre de la dette subordonnées malgré l’imposition de certaines limites légales.
Ils considèrent que cette dette ne doit pas dépasser les 50% du montant global des réserves
constituées et décrivent les mécanismes de financements possibles :

- une partie des excédents de revenus générés par les sociétés par actions est distribuée
sur les actionnaires sous forme de dividendes, alors que les mutuelles intègrent ces
revenus dans les réserves et ils leur permettront par la suite de procéder à
augmentation de leur capital,
- le coût du capital de sociétés par actions est un droit sur les revenus et il est
déterminé de façon exogène sur les marchés financiers,
- le capital est alors assimilé à une source de profit pour les mutuelles et une source de
chargement supplémentaire pour les sociétés par actions,
- les sociétés par actions peuvent opérer sur le marché secondaire, ce qui pourrait leur
permettre de trouver de nouvelles ressources financières car leurs titres sont
négociables.

1. Les cycles financier et d’exploitation


Les opérations d’assurance se caractérisent par une inversion du cycle de production.
Contrairement aux autres secteurs d’activité, la société d’assurance perçoit nécessairement sa
rémunération (la prime ou la cotisation) avant d’effectuer son hypothétique prestation en cas
de réalisation du sinistre. Habituellement, hors assurance, l’entreprise livre le produit

57
commercialisé ou assume la prestation avant que le prix ne lui soit acquitté. Cette inversion
du cycle d’exploitation génère des avantages de trésorerie. A contrario, elle présente une
sérieuse limite pour la société d’assurance du fait qu’au moment où la société d’assurance
fixe la cotisation, c'est-à-dire lorsqu’elle effectue la production du service d’assurance rendu,
elle ne connaît pas encore son coût réel. En pratique, le prix de vente de l’opération
d’assurance est connu et encaissé avant que le prix de revient de l’opération ne soit connu et
décaissé. L’inversion du cycle de production implique aussi la nécessité pour les sociétés
d’assurance de constituer des provisions suffisantes afin d’être en mesure de faire face à
leurs engagements.

Prime

Encaissement

Temps

Coûts de gestion du sinistre

Coûts d’acquisition

Sinistre

Décaissement

Source : l’auteur

58
Cette inversion du cycle d’exploitation combinée de l’incertitude qui entoure la réalisation
des risques assurés peut avoir quelques conséquences sur la comptabilité de la société
d’assurance.

Selon Simonet (1998), l’activité de l’assurance se caractérise par:

- une inversion du cycle de la production matérialisée par le fait que le prix de vente de
la prestation (la prime) est encaissé immédiatement alors que la prestation (le
règlement de l’indemnité) intervient ultérieurement ;
- un décalage possible entre la survenance du fait dommageable qui génère le paiement
de l’indemnité et le règlement effectif de cette indemnité.

Ce décalage est tout particulièrement observé chez les sociétés d’assurance générale, alors
que chez les compagnies d’assurance-vie ce décalage n’existe pratiquement pas, car les
opérations se dénouent à long terme. Les primes encaissées restent pendant longtemps à la
disposition de l’assureur avant d’être frappées d’un sinistre.

Ce double phénomène peut avoir plusieurs conséquences :

- toutes les sociétés d’assurance détiennent des capitaux qu’elles devront gérer, d’où
l’importance de l’actif immobilisé et du résultat financier ;

- en cas de difficulté, la société d’assurance ne sera alertée par aucun signal d’alarme pour
faire face à ses paiements et ce n’est qu’au stade final de la liquidation définitive que
cette situation apparaîtra. D’où le principe de couverture instauré par les organes de
tutelle (ACP en France, NAIC aux Etats-Unis...) ;

- les sociétés d’assurance ne connaissent pas leur prix de revient réel qu’à long terme d’où
la nécessité d’avoir pendant les premières années recours à des provisions pour sinistres
à payer qui, pour une large partie sont des évaluations voire des estimations statistiques ;

- les entreprises d’assurance doivent également se prémunir contre une sous-évaluation


possible des provisions constituées ;

- la non-concordance possible entre l’exercice de comptabilisation de la prime et celui de


la survenance du fait dommageable implique la mise en place à l’inventaire d’un compte
de répartition des produits dans le temps : la provision pour risque en cours pour
l’assurance non-vie et la provision mathématique en assurance-vie ;

59
- la non-concordance entre l’exercice de survenance du fait dommageable et celui du
règlement de l’indemnité nécessite pour les besoins de la comptabilité analytique
d’exploitation une double comptabilisation par année du règlement et par année de
survenance pour les assurances non-vie (ou IARD).

2. L’évaluation des sociétés d’assurance


Comme toutes les entreprises et les organisations, les sociétés d’assurance ont une valeur
économique quelque soient leurs formes organisationnelles.

Les déterminants de la valeur économique d’une société d’assurance sont divers et variés. Il
existe trois principales méthodes pour calculer la valeur d’une société d’assurance :

- La méthode de l’actif net réévalué ;

- La méthode de la valeur intrinsèque ;

- La méthode de l’aparaisal value.

Chaque méthode dispose de spécificités qui permettent de tenir compte d’un maximum des
déterminants pour calculer au mieux la valeur des sociétés d’assurance.

2.1. L’actif net réévalué (ANR)

Cette méthode exige le réajustement de l’actif net comptable afin de prendre en


considération tous les décalages qui puissent exister entre la valeur comptable des actifs et
des passifs et leur valeur de marché. Selon Fréry & Cordier (2003), il existe plusieurs
ajustements spécifiques à l’activité d’assurance qu’il convient d’apporter à l’actif net
comptable (ANC) :

- le traitement des actifs incorporels,

- les plus ou moins-values latentes,

- provisions mathématiques,

- provision pour adéquation actif/passif,

- frais d’acquisition différés,

- part de l’actif net comptable revenant aux actionnaires,

60
- redistribution des produits financiers aux assurés,

- On applique l’actif net réévalué aux sociétés d’assurance, car elles sont caractérisées
par :

- l’importance de leur patrimoine,

- leur actif est facile à réévaluer, car il est composé essentiellement de valeurs
financières (actions, obligations,…).

- Comme toute technique, la méthode de l’ANR présente des inconvénients, parmi


lesquels on peut citer :

- la capacité de générer des profits dans le futur n’est pas prise en compte,

- la vision du marché sur l’évaluation du secteur est négligée,

- les réajustements potentiels doivent être pris en compte avec prudence.

2.2. La valeur intrinsèque

La méthode de la valeur intrinsèque ou l’Embedded value est la technique la plus utilisée


pour déterminer la valeur économique d’une société d’assurance. C’est une notion financière
retenue depuis plusieurs années par les analystes anglo-saxons du secteur des assurances.
Elle consiste à actualiser les flux de résultat du portefeuille nets des flux de capital minimum
nécessaire, (Fréry & Cordier, 2003). Elle est souvent utilisée pour la valorisation de
portefeuilles de contrats d’assurance à long terme. Cette valeur est publiée par la quasi-
majorité des sociétés d’assurance anglo-saxonnes, ainsi que par certaines sociétés
françaises16.

Selon Zajdenweber (2006), la valeur intrinsèque est égale à la somme de l’actif net réévalué
et de la valeur des affaires en stock (Value of in-force business), diminuée du coût de portage
de la marge de solvabilité associée à ces contrats (CS). L’actif net réévalué est égal aux
fonds propres (FP) augmentés de la réserve de capitalisation (RC) et des plus-values latentes
nettes appartenant aux actionnaires (PV). La Vin est égale à la valeur actuelle des résultats
futurs sur les contrats en cours à la date d’évaluation.

16
Les principes de calcul ainsi que la méthodologie sont publiés dans les rapports annuels des sociétés
d’assurance.

61
EV= ANR + Vin – CS = FP + RC + PV + Vin – CS

La valeur intrinsèque présente les avantages suivants :

- une méthode d’évaluation absolue et non relative ;

- elle permet d’obtenir une valorisation de la stratégie de l’équipe dirigeante ;

- elle peut prendre en compte un cycle de pertes avant un retour à une rentabilité positive ;

- elle permet de prendre en compte les situations complexes.

La méthode de l’Embedded value présente certains inconvénients qu’il convient de citer :

- il existe une forte sensibilité des résultats au taux d’actualisation et à la valeur terminale ;

- on remarque aussi une forte dépendance aux prévisions.

Ces deux méthodes sont les plus utilisées, certains auteurs ainsi que les cabinets d’audit les
considèrent comme étant complémentaires. Cette complémentarité permet de se rapprocher
le plus possible de la valeur réelle des sociétés d’assurance.

2.3. L’apparaisal value

Cette méthode est la moins utilisée parmi les trois. Elle est différente des deux premières
méthodes car elle prend en compte la valeur générée par les contrats d’assurance en
portefeuille et les contrats qui seront vendus à l’avenir par le réseau de distribution. Il s’agit
d’une prise en compte de la valeur créée par les réseaux de distribution.

62
Tableau 8. Apparaisal Value

Périmètre de Méthode de Utilité pour


calcul (contrats calcul l’évaluation
Les concepts pris en compte)

Contrats en Valeur actuelle Détermination


portefeuille à la des flux de du portefeuille
date de résultat et de d’assurance à la
Embedded value l’évaluation. capital date de
minimum l’évaluation.
relatifs au
portefeuille
actuel.
Apparaisal
value Nouveaux Valeur actuelle Détermination
contrats qui des flux de de la valeur du
seront souscrits résultat et de potentiel
Goodwill dans le futur. capital commercial
minimum offert par la
relatifs aux société évaluée.
affaires
nouvelles qui
seront souscrites
dans le futur.

Source : « gestion et analyse financière », Axa et Belec PWC, securitas, 1994

3. Les risques auxquels sont confrontées les sociétés d’assurance


Les sociétés d’assurance sont confrontées à un bon nombre de risques qui peuvent avoir une
influence négative sur leurs résultats et menacer ainsi leurs survies. Certains risques, dont la
plupart spécifiques à l’opération d’assurance, peuvent engendrer la disparition pure et simple
de la société d’assurance. Dans le secteur financier, le risque est considéré comme étant une
variabilité future qui est prévisible et contre laquelle il est possible de s'assurer (Knight,

63
1921). Le risque se caractérise également par la répétition et le caractère réplicable des états
de la nature. Ces deux caractéristiques permettent d'allouer à chaque état de la nature
considéré des probabilités d'apparition objectives. Les probabilités permettent par la suite de
neutraliser ces risques (Kay, 1984). Dans ce cadre, les sociétés d’assurance mettent en place
plusieurs dispositifs internes afin de limiter leur exposition au risque tout en préservant des
niveaux de rentabilités convenables.

Les sociétés d’assurance sont généralement confrontées à trois types de risques : les risques
qu’on peut éliminer grâce aux techniques traditionnelles de gestion courante, les risques
qu’on peut transférer (grâce à la réassurance) et les risques qui peuvent être gérés au sein de
la firme.

Les recherches menées par Allen & Santomero (1997) ont permis de mettre la lumière sur
deux catégories de risque qui peuvent être placées dans le troisième type de risque. La
première catégorie inclut les risques financiers et actuariels difficilement identifiables, ce qui
complique leur gestion ou élimination par les techniques traditionnelles de gestion courante.
La seconde catégorie concerne les risques essentiels à l’existence de l’entreprise d’assurance.

Plusieurs recherches ont été menées afin de déterminer une liste complète des risques que
peut confronter une société d’assurance. Plusieurs catégories de risques ont été décelées : les
risques techniques, les risques de placement et les risques de réassurance.

3.1. Les risques techniques


Il s’agit des risques propres aux sociétés d’assurance. Ils sont concrétisés par la réalisation
d’événements générateurs de paiements aux assurés. Selon Piermay, Mathoulin & Cohen
(2002), les risques techniques sont liés à la fiabilité de l’estimation des flux correspondant
aux engagements pris. Cette séquence de flux conduit, d’une part à fixer les tarifs et les
chargements, d’autre part, à calculer les provisions. Les risques techniques se décomposent
en deux types de risques :

§ Le risque de sous-tarification

Le cycle de production inversé des sociétés d’assurance oblige ces dernières à fixer leurs
tarifs à l’avance, c'est-à-dire avant que l’entreprise connaisse le prix de revient de la
prestation. Il est alors possible que les prévisions de dépenses sur les sinistres soient
dépassées. Et, à cause du décalage qui existe entre le paiement de la prime par l’assuré et

64
l’exécution de la prestation par la société d’assurance, cette dernière peut se retrouver en
situation de faillite alors qu’elle ne connaît pas de difficultés financières majeures.

§ Le risque de sous-provisionnement

Pour faire face à ses engagements la société d’assurance constitue des provisions techniques.
Le risque de sous-provisionnement correspond aux erreurs que peut commettre la société
d’assurance lors de la constitution des provisions techniques suite à l’évaluation de ses
engagements envers ses assurés.

3.2. Les risques de placement

L’OCDE a établi une liste des différents risques de placement que peuvent rencontrer les
sociétés d’assurance (OCDE, 2003)17.

§ Le risque de dépréciation

A cause de la volatilité des marchés financiers et immobiliers, les actifs des sociétés
d’assurance peuvent connaître des dévaluations. Il pourrait s’agir d’une crise immobilière,
une baisse des cours de change (dans le cas où l’assureur détient des réserves en devises),
d’une hausse des taux d’intérêt, ou de la défaillance d’un débiteur.

§ Le risque de liquidité

Ce risque peut être lié à la capacité de la société d’assurance à honorer ses dettes lorsqu’elles
arrivent à échéance. Elle pourrait avoir des difficultés à convertir ses actifs. Ce problème est
dû est essentiellement que les sociétés d’assurance détiennent dans leurs portefeuilles des
actifs moins liquides que d’autres.

§ Le risque de taux

Une hausse des taux d’intérêt engendre une dépréciation de certains actifs financiers (les
actions). Cette baisse sera due essentiellement au fait que les investisseurs vont quitter le
marché des actions afin d’investir en des valeurs plus sures comme les obligations, comme
tenu de l’augmentation de leur taux de rémunération.
17
OCDE. 2003. Aspects fondamentaux des assurances Evaluation de la solvabilité des compagnies
d'assurance: OECD Publishing.

65
§ Le risque d’adéquation actif-passif

Les sociétés d’assurance sont tenues de couvrir les provisions techniques constituées par un
montant équivalent d’actifs. Suite aux fluctuations des marchés financiers, il faut réaliser des
ajustements afin de garder cet équilibre. Dans ce cas de figure, le risque résulte des
déséquilibres entre les variations du passif et les fluctuations de l’actif, ce qui pourrait
provoquer des pertes conséquentes pour les sociétés d’assurance.

3.3. Techniques de gestion des risques


Les sociétés d’assurance peuvent également avoir recours aux produis dérivés afin de
s’assurer contre les risques liés à l’activité de l’assurance. Dans ce cadre, les marchés
financiers peuvent contribuer à la couverture des risques majeurs. Les produits tîtrisés ont
ainsi été largement utilisés aux États-Unis, notamment dans l'assurance-vie. Le point de
départ sont les flux provenant de portefeuilles de contrats d'assurance, ils les démembrent et
les restructurent en tranches pour des besoins précis et revendent ces dérivés spécialisés
(Insurance Linked Securities) sur les marchés financiers.

Ainsi des dérivés sur paniers (basket derivatives) bien construits peuvent servir à s'assurer
contre les mouvements de certains facteurs expliquant le phénomène de risque joint. D'autres
produits échangés sont des dérivés écrits directement sur des occurrences de sinistres ou sur
la valeur des pertes qui leurs sont associées : les cat bonds avec déclencheurs indemnitaires
ou paramétriques en sont des exemples phares.

Historiquement, le principe de la titrisation avait été introduit sur des portefeuilles de crédits
(prêts) des banques dans le but de faciliter le refinancement et de contourner des règles
prudentielles de fixation des réserves. Cependant, la titrisation des portefeuilles de contrats
d'assurance ne poursuit pas en général le même type d'objectifs.

En assurance, une partie importante du financement provient du paiement des cotisations par
l'assuré, paiement dont on espère qu'il sera suffisant pour régler les sinistres. Par ailleurs, les
règles prudentielles ne sont pas assez stabilisées pour que la seconde motivation prévale.
Pour ce qui concerne les risques majeurs, la titrisation présente des avantages de divers
ordres : éliminer le risque de crédit qui peut apparaître dans les tranches catastrophes des
traités de réassurance, se protéger des chocs affectant la capacité ou le prix de la réassurance,

66
bénéficier d'une liquidité plus grande que dans les opérations de gré à gré, se couvrir contre
des risques difficilement assurables du fait de leur spécificité.

4. Les modèles d’estimation des risques


Il existe diverses méthodes d’estimation et d’évaluation des risques, à l’image de la diversité
des risques auxquels peuvent être confrontés les sociétés d’assurance. Cependant, au-delà de
cette variété des méthodes, l’objectif le même, à savoir d’estimer la probabilité de réalisation
des pertes et de mettre en place des mesures de prévention et de couverture (notamment en
matière de fonds propres). Selon les hypothèses de base formulées par l’institution
financière, l’utilisation de la VAR (Value at Risk) permet d’avoir une mesure globale.

4.1. La Value at Risk (VaR)


La value at Risk permet de synthétiser en un seul nombre le risque total d’un portefeuille
d’actifs financiers. Elle est aussi appeler appelée valeur à risque ou encore valeur en risque.
C’est la célèbre banque J.P Morgan qui a contribué à sa création avant qu’elle ne devienne,
par la suite, une mesure adoptée par les trésoriers des entreprises, les gérants de fonds ainsi
que les institutions financières. On retrouve également la mesure de la VaR dans le plan de
la régulation par le comité de Bâle pour le calcul du capital requis par les banques (Britten-
Jones & Schaefer, 1999).

L’objectif d’une mesure de VaR peut être synthétisé par l’affirmation suivante : « Nous
sommes certains qu’avec X pourcent de chances, nous ne perdrons pas plus de V Euros dans
les N prochains jours ». La variable V est la VaR du portefeuille et est fonction de deux
paramètres : L’horizon temporel (N jours) et le seuil de confiance (X%). Il s’agit en réalité
du niveau de perte sur N prochains jours que l’on est certain de ne pas dépasser avec une
probabilité de X%.

La VaR conditionnelle ou perte de queue, vient pour optimiser la notion de la VaR et pour
couvrir ses limites notamment en matière de non-exhaustivité de la prise de risque. Ainsi,
toute mesure du risque utilisée pour déterminer le capital requis est considérée comme le
montant de liquidités (ou de fonds propres) devant être ajouté à une position afin de rendre
son risque acceptable par un régulateur. L’amendement de la BIS 1996 exige la mise en
place des procédures de back testing, qui consistent à tester les performances des estimations
de la VaR sur données passées. Les sociétés d’assurance et les banques doivent utiliser les
variations observées et hypothétiques des gains et des pertes journaliers pour tester un

67
modèle de VaR à un jour au seuil de 99%. Si le nombre d’exceptions est inférieur à 5 sur les
250 derniers jours, alors le multiplicateur de la VaR vaut au mieux 3. Le niveau des fonds
propres de la banque doit vérifier cette condition. En revanche, au-delà de 5, le régulateur
dispose d’une marge discrétionnaire pour imposer des multiplicateurs supérieurs à 3. Cette
pénalité est effective si la source des exceptions provient d’une déficience du modèle VaR.

Cependant, s’il s’avère que les exceptions sont dues à un mauvais hasard, aucune règle n’est
prévue. L’utilisation des VaR a mis en évidence l’avance prise par les sociétés d’assurance et
les banques en matière de calcul de risque et d’allocation du capital. L’utilisation des
modèles internes des institutions financières pour le calcul des capitaux propres est toutefois
soumise à l’approbation explicite des autorités nationales de la régulation (BIS, 1996a). Il
s’agit d’un changement d’optique de la part des régulateurs qui abandonnent partiellement
leur vision institutionnalisée (ils n’imposent pas aux institutions financières les modèles à
utiliser) au profit de celle de l’entrepreneur.

Si les régulateurs sont favorables à l’application des modèles internes c’est parce qu’ils
espèrent plus de sensibilité des institutions financières par rapport aux risques qu’elles
assumaient, ce qui conduit à une meilleure allocation des capitaux.

Enfin, il y a aussi les stress test qui sont considérés comme des éléments importants des
modèles de VaR. Il consiste à envisager plusieurs scénarios de crise historiques ou
prévisionnels. Ces tests permettent d’évaluer la capacité de l’institution financière à faire
face à des pertes conséquentes inattendues.

4.2. L’allocation optimale du capital


Pour faire face à la complexité de leur métier, l’allocation du capital est au cœur de la
stratégie des sociétés d’assurance à forte intensité capitalistique (Fréry & Cordier, 2003). Les
contraintes qui pèsent sur cette allocation du capital sont établies par des acteurs extérieurs
(autorité de régulation, agences de notation, marchés financiers…) en fonction des critères
qui différent et changent par rapport aux objectifs fixés. Une allocation optimale et efficiente
du capital des sociétés d’assurance peut permettre à ces dernières de gérer au mieux les
ressources financières dont elles disposent et de bénéficier ainsi d’un coût du capital moins
élevé.

Ainsi, les sociétés d’assurance peuvent utiliser d’une maniéré efficiente leur capital en
introduisant des indicateurs de mesure de la performance et du résultat économique aux

68
différents niveaux de la prise de décision (Kielholz, 2000). L’auteur affirme que le montant
du capital doit être incorporé proportionnellement au niveau du risque, autrement dit, les
transactions les plus risquées nécessitent un montant de capital beaucoup plus élevé.

Dans ce cadre, les sociétés d’assurance peuvent inciter leurs dirigeants à maximiser le
résultat économique, et cela passe par la maximisation du nombre de contrats d’assurance et
par l’obtention de marges bénéficiaires suffisantes. Ils peuvent également procéder à une
minimisation du montant du capital investi dans leur entreprise et diminuer ainsi le coût du
capital.

Enfin, Kielholz (2000) suggère aux sociétés d’assurance d’entamer cette optimisation de
l’allocation du capital par l’évaluation du risque de leur portefeuille englobant les contrats
d’assurance et les actifs, et de procéder ensuite au choix d’un niveau de capital qui permet de
neutraliser le risque d’insolvabilité.

Afin de maximiser la richesse des actionnaires ou des souscripteurs, les sociétés d’assurance
sont obligées de rendre la structure de leurs bilans optimale et réduire ainsi les risques liés à
l’activité de l’assurance. Pour obtenir ce résultat, la société d’assurance doit savoir dans
quelle mesure le portefeuille global sera affecté si l’une de ses composantes vient à être
modifiée, en tenant compte de la corrélation qui existe entre les différents types d’actifs.
Ainsi, le risque global peut être réduit sans pour autant diminuer le rendement attendu.

Camino et al. (2001) constatent que certaines sociétés d’assurance disposent d’un excédent
de capital même après l’optimisation de l’allocation des actifs et les opérations de
réassurance. En l’absence de prévisions de croissance ou de rachats de sociétés, l’excédent
de capital peut être réduit en rétrocédant une partie du capital aux actionnaires. Cette
rétrocession peut prendre la forme de rachats d’actions aux actionnaires ou bien d’une
distribution supplémentaire de dividendes. Les chercheurs estiment que les sociétés
d’assurance qui remboursent l’excédent de capital envoient un signal fort au marché et aux
différentes parties prenantes, et montrent qu’elles maîtrisent leur niveau de risque propre et
qu’elles se soucient de leur performance ainsi que la création de valeur. Elles échappent
également aux pressions qui les poussent à effectuer des investissements non rentables qui
pourraient générer la réalisation de résultats catastrophiques. Par conséquent, les sociétés
d’assurance qui raisonnent de cette façon, augmentent leur valeur, et empêchent ainsi les
OPA.

69
Sous-section 4 : la structure du bilan des sociétés d’assurance

Le bilan d’une entreprise présente l’ensemble des emplois et des ressources qui lui
permettent d’assurer la continuité de son exploitation. Les emplois détenus peuvent être
permanents (actif immobilisé : immobilisations, participations…), temporaires (actif
circulant : créances, valeurs mobilières de placements, disponibilité) ou désigner le résultat
de l’activité (les pertes). Les ressources peuvent aussi être permanentes (capitaux propres),
temporaires (dettes) ou désigner le résultat de l’activité (les profits).

La comptabilité de l’entreprise est une transcription des réalités financières et permet de


classer les comptes par ordre de liquidité et d’exigibilité. Elle doit obéir à un ensemble de
textes juridiques, dont le but est d’harmoniser des informations différentes et de donner des
éléments de comparaison entre sociétés.

Dans ce registre, les données comptables, bien qu’elles ne reflètent pas parfaitement la
réalité, sont des références pour les investisseurs et pour les instances réglementaires. Ainsi,
Le Thanh (1995) a démontré que la publication des comptes sociaux et consolidés des
sociétés françaises a un impact relativement important sur la valeur boursière des entreprises
concernées. Il est donc nécessaire de définir les principes de valorisations comptables afin de
mieux connaitre les limites de ces informations.

1. Les spécificités du bilan des sociétés d’assurance


Compte tenu de la spécificité de l’activité de l’assurance, le bilan des sociétés d’assurance
présente des particularités liées à la nature de ses actifs (placements) et de la composition de
la structure de son passif (fonds propres, dettes, provisions techniques…). Malgré les
recherches qui ont été menées sur la composition des actifs des sociétés d’assurance,
notamment en matière de la composition des placements et les risques qui y sont liés, la
composition du passif et en particulier le niveau des fonds propres restent moins étudiés et
sont généralement considérés comme des éléments prédéterminés et sur lesquels la société
d’assurance n’a pas de pouvoir de décision. Le rôle central que jouent les institutions
financières dans les économies européennes a incité les autorités prudentielles depuis, le
début des années 1990, à multiplier les dispositifs de solvabilité (Bale I, Bale II, Solvency I
et Solvency II…) et à instaurer un ratio de capital réglementaire, ce qui a accentué les
intérêts théorique et pratique de ce sujet.

70
L’étude menée par Bichsel & Blum (2005) démontre que le ratio de capital moyen - mesuré
par le rapport entre le capital et le total des actifs - ne dépasse pas les 10% dans la majorité
des grandes institutions financières internationales. Ce ratio est de 11% pour les sociétés
d’assurance françaises qui composent notre échantillon. Dans le cas des grandes sociétés
d’assurance françaises ce ratio tombe jusqu’à 3%. En comparant le secteur financier avec
d’autres secteurs d’activités, le ratio des fonds propres des sociétés cotées en bourse peut
monter jusqu’à 60% (Nestlé 40% ou Novartis 60%) (Bichsel & Blum, 2005).

Au début du XXème siècle le ratio de capital des grandes institutions financières


internationales dépassait largement les 20 % , mais il était toujours inférieur à celui des
autres secteurs (Bichsel & Blum, 2005). En revanche, pour les institutions financières elles-
mêmes, un client est solvable quand son niveau de capital est considéré comme élevé. Par
exemple, pour accorder un prêt, les banques exigent de ses débiteurs un ratio de capital
minimum de 30%.

Par ailleurs, l’instauration d’un niveau minimum de fonds propres permet de réduire les
risques liés aux asymétries d’information et d’éviter ainsi les risques d’aléa moral et de
sélection adverse que rencontrent les institutions financières (Babbel & Santomero, 1999;
Berger et al., 1995).

On constate donc que le niveau des fonds propres moyen dans l’industrie de l’assurance est
plus bas que celui des autres secteurs d’activités et qu’il ne cesse de faiblir depuis le début
du XXème siècle. Ce constat n’implique forcément pas que le ratio des fonds propres dans le
secteur financier est trop faible, c’est-à-dire qu’il est inférieur au ratio optimal dans une
perspective d’intérêt général (Bichsel & Blum, 2004; Bichsel & Blum, 2005).

Compte tenu de la diversité organisationnelle dans le marché de l’assurance, il est difficile


de définir une structure financière type pour les sociétés d’assurance. Néanmoins, la
réglementation prudentielle à laquelle les sociétés d’assurance sont soumises fait en sorte
que les intérêts des assurés soient préservés. Parmi les particularités des sociétés d’assurance,
on trouve une structure du passif complétement différente des entreprises traditionnelles et
des banques. En effet, les fonds propres ne jouent pas un rôle central, car les provisions
techniques18 représentent en moyenne plus des deux tiers du passif des sociétés d’assurance.

18
Les provisions techniques mesurent au bilan les engagements pris par l’assureur lorsqu’il appose sa signature
en bas des contrats d’assurance, elles constituent la contre-valeur comptable de ses engagements contractuels,
elles représentent globalement la dette de l’assureur vis-à-vis de ses assurés.

71
Le montant des provisions techniques joue un rôle d’indicateur sur la santé financière des
sociétés d’assurance, car elles sont minorées si l’assureur est peu bénéficiaire et elles sont
maximisées si l’assureur est largement bénéficiaire (Petroni, 1992).

La structure financière des sociétés d’assurance est lisible à travers la structure de leurs
bilans qui repose sur une gestion Actif-Passif solide et qui doit tenir compte de plusieurs
parametres (Morel & Poiblanc, 2001).

Tableau 2 : La structure du bilan des sociétés d’assurance

Bilan à t = 0

Actif Passif

Actifs A0 Fonds Propres E0 = (1-a) A0

Provisions mathématiques I0 = a A0

Total A0 Total A0

Source : Morel & Poiblanc (2001)

En fonction de la valorisation des actifs, la société d’assurance se retrouve confrontée à l’une


des situations suivantes :

- A0 < I0 : la société d’assurance est en situation de faillite.

- A0 > I0 : la société d’assurance peut distribuer des bénéfices.

Ainsi, à l’instar des banques et des organismes de placement collectifs en valeurs mobilières
(OPCVM) les sociétés d’assurance doivent gérer leurs investissements financiers. Or, les
placements financiers sont exposés aux risques – qui ne sont pas de la même nature que les
risques assurés - de la conjoncture boursière et aux variations des taux d’intérêt.

72
Tableau 9. Le bilan type issu de l’échantillon étudié

ACTIF % PASSIF %

Actifs incorporels 0% Capitaux propres 3.6%

Placements (contrats en Euros) 85% Passif subordonné 0%

Placements UC 5% Provisions techniques 86%

Parts des cessionnaires 1.5% Provisions UC 5%

Créances 4% Provisions pour risques et charges 1%

Autres actifs 1% Dettes 4%

Comptes de régularisation 3.5% Comptes de régularisation 0.4%

Différence de conversion 0% Différence de conversion 0%

Total 100% Total 100%

Source : l’auteur

A la fin de chaque exercice comptable, les sociétés d’assurance doivent présenter les
comptes annuels de la société : le bilan, le compte de résultat et le tableau des engagements
donnés ou reçus. La communication de ces documents permet aux différentes parties
prenantes d’être informées sur la situation économique et financière de la société.

Le bilan d’une société d’assurance fait l’inventaire de son patrimoine et de ses dettes autour
de la structure suivante :

Tableau 10. Bilan en grandes masses d’une société d’assurance de dommages

Actif Passif

Placements 65-70 % Capitaux propres 10-15 %

Part des réassureurs dans les 10-15 % Provisions techniques 70-80 %


prov. tech
Passif d’exploitation 10 %
Actif d’exploitation 20 %

Total de l’actif 100 % Total du passif 100 %

Source : Folus (1997)

73
2. La structure de l’actif du bilan

La protection des assurés nécessite le respect des engagements la constitution de provisions


techniques suffisantes au passif du bilan. Il faut en outre qu’elles soient représentées par des
actifs équivalents en quantité et sélectionnés en qualité. Ce sont ces actifs réels, placements,
liquidités et créances, qui procurent à l’entreprise d’assurance les moyens de tenir ses
engagements envers ses assurés. Les créances d’une société d’assurance concernent
principalement ses partenaires économiques, réassureurs, cédants, assurés et intermédiaires.

L’actif du bilan d’une société d’assurance est composé des postes suivants :

- capital souscrit non appelé ou compte de liaison ;


- actifs incorporels ;
- placements ;
- placements couvrants des contrats en unité de compte ;
- part des réassureurs dans les provisions techniques ;
- créances ;
- autres actifs ;
- comptes de régularisation, actif ;
- différence de conversion, actif.

2.1. Les actifs incorporels

Il s’agit principalement des actifs immatériels, ce poste est composé de tous les logiciels
dont dispose la société d’assurance ainsi que les frais d’établissement. Le poids de ce poste
ne dépasse généralement pas les 2 % du total actif.

2.2. Les placements

La réglementation oblige les sociétés d’assurance à placer les fonds détenus (issus
principalement de l’épargne des assurés) conformément aux intérêts de la collectivité, ce qui
n’est pas forcément compatibles avec les exigences générales de sécurité. Ces placements
sont majoritairement dominés par les placements financiers.

74
L’OCDE (2002)19 insiste sur la nécessité d’une réglementation prudentielle des placements
des sociétés d’assurance et en précise le contenu. Cette réglementation a pour objectif
d’assurer le respect des impératifs de sécurité, de solvabilité et de la rentabilité des
investissements.

Pour ce faire, les sociétés d’assurance sont tenues de favoriser la diversification des
placements, la dispersion et la liquidité des portefeuilles d’investissements ainsi que la
congruence des échéances et des monnaies dans lesquelles sont libellés leurs avoirs et leurs
engagements. Dans ce cadre, la réglementation peut établir une liste d’actifs admis, dans
lesquels on ne peut investir au-delà d’un certain plafond, ainsi que des dispositions relatives
aux évaluations des investissements (OCDE, 2009)20.

Au Royaume-Uni, les autorités prudentielles imposent aux sociétés d’assurance-vie d’isoler


rigoureusement cette activité. Cette obligation a légalisé une pratique coutumière des
sociétés « mixtes »21 qui cantonnaient les actifs de l’assurance à des fins de clarté de gestion.

La législation Britannique impose aux sociétés d’assurance au titre du cantonnement :

- de tenir, pour le passif et l’actif des opérations d’assurance-vie, une comptabilité


séparée du reste de l’activité de l’entreprise ;
- de porter les recettes des opérations d’assurance-vie dans des comptes qui leur sont
propres, constituant un (ou plusieurs) fonds des assurés, et d’imputer sur ce fonds les
prestations et les frais correspondant aux contrats vie.

De cette façon la société d’assurance-vie est clairement identifiée avec son passif et son
actif. Les autres actifs et passifs, y compris ceux qui sont afférents aux affaires dommages
dans les entreprises mixtes, constituent ce que l’on appelle le fonds des actionnaires.

En Allemagne, l’actif du bilan des sociétés d’assurance est constitué par l’ensemble des
placements représentant les provisions techniques relatives à l’assurances-vie et maladie.
Ces placements font l’objet d’une gestion spéciale et chaque arbitrage devant être autorisé
préalablement par un fidéicommissaire.

19
OCDE. 2002. Le contrôle de la solvabilité des compagnies d'assurance: panorama des pays de l'OCDE:
OCDE.
20
OCDE. 2009. 20 principes directeurs : règle n° 13. Éditions OCDE.
21
Sociétés d’assurance qui pratiquent à la fois l’assurance-vie et l’assurance non-vie.

75
Les assurés ou les souscripteurs bénéficient d’un privilège général sur l’ensemble des actifs
d’une société d’assurance. Ce privilège se situe le plus souvent après les privilèges accordés
par la loi au personnel de la société, au trésor public, aux organismes sociaux, sécurité
sociale et les caisses de retraite.

Les autorités prudentielles allemandes considèrent le domaine des placements comme un


domaine clos où s’affrontent les partisans de règles prudentielles et les tenants d’une
conception souple faisant largement confiance à la sagesse des gestionnaires financiers
prudent person rule et à des critères qualitatifs.

Tableau 11. Placements des sociétés d'assurance Françaises à la fin 2012

Placements Mds d'Euros Part en %

Actions d’entreprises 316,2 17%

Obligations d’entreprises 706,8 38%

Obligations émises ou garanties par l’État 576,6 31%

Actifs immobiliers 74,4 4%

Actifs monétaires 130,2 7%

Autres 55,9 3%

Total général 1 860,1 100%

dont :

– Sociétés vie et mixtes 1 657,3 89%

– Sociétés dommages 202,8 11%

Source : FFSA (2013)

2.3. La classification des placements


Les sociétés d’assurance sont autorisées par les autorités prudentielles à investir dans
différents types de placements. Ces investissements réglementés se répartissent entre
l’immobilier de placement, les instruments financiers composés essentiellement d’actions de
sociétés, les obligations et les prêts.

76
2.3.1. Les actifs immobiliers
Ces actifs correspondent aux droits réels détenus par les sociétés d’assurance sur des biens
immobiliers situés sur le territoire de l’un des pays de l’OCDE, des parts ou des actions de
sociétés à objet strictement immobilier. Les actifs immobiliers de placement (à l’exclusion
des immeubles de placement adossés totalement ou partiellement à des passifs de contrats
dont le risque financier est supporté par l’assuré) sont comptabilisés au coût d’achat ou au
prix de revient. Cette valorisation prend en compte les travaux de construction et d’entretien
du bien immobilier. Les composantes des immeubles sont amorties sur la base de leur durée
de vie estimée, tout en tenant compte de la valeur résiduelle, si celle-ci peut être estimée de
façon juste et fiable.

2.3.2. Les actifs financiers

- Les actions
En outre des actions, les sociétés d’assurance peuvent détenir dans leurs portefeuilles des
parts de fonds communs de créances, des parts de fonds communs de placement, des titres
participatifs, des actions cotées de l’un des Etats membres de l’OCDE et les actions de
sociétés à capital variable. Ces valeurs figurent à l’actif du bilan des sociétés avec leur valeur
d’acquisition.

- Les obligations
Les sociétés d’assurance françaises participent considérablement au financement de la dette
publique française, cet engagement est matérialisé par l’acquisition d’actifs obligataires liés
aux emprunts émis par le trésor public. Ces actifs sont enregistrés au bilan avec leur prix
d’acquisition. La valeur de réalisation correspond au montant de la dernière cotation connue
en fin d’exercice comptable. En cas de décalage entre le prix d’achat d’un actif obligataire et
le prix de remboursement, la différence (plus-value latente ou moins-value latente) est
amortie sur la durée de vie résiduelle des titres.

- Les prêts
Les prêts sont obtenus ou garantis par les Etats membres de l’OCDE comme les prêts
hypothécaires et les dépôts. Ils incorporent aussi les prêts aux collectivités locales et les prêts
aux salariés. Ils sont évalués d’après les actes qui font foi, à leur prix de revient. La valeur de
réalisation est identique à la valeur bilan.

77
- Les créances déposées auprès des entreprises cédantes
Ces créances sont le résultat d’opérations de réassurance. Lorsque la société d’assurance
accepte de couvrir les risques d’une autre société d’assurance, elle inscrit au passif le
montant des provisions acceptées. En contrepartie de ces provisions, la société d’assurance
enregistre une créance vis-à-vis de la société qui lui a transféré ses engagements.

- La part des cessionnaires et rétrocessionnaires


Cette part représente la partie des provisions techniques et des engagements de la société
d’assurance qui a été réassurée. Cette partie change d’une société d’assurance à une autre en
fonction des politiques de réassurance adoptées par les dirigeants.

- Les créances
Les origines de ces créances sont différentes, et les plus importantes d’entre elles sont liées
directement au cœur du métier des sociétés d’assurance, à savoir l’activité de l’assurance.

- Les autres actifs


Ce poste regroupe l’ensemble des actifs corporels d’exploitation (matériels, machines,…),
les comptes bancaires courants et les actions propres.

3. La structure du passif du bilan


Le passif du bilan des sociétés d’assurance représente tous les engagements des assureurs
envers les assurés et les autres parties prenantes. La directive du 19 Décembre 1991 a défini
les principales rubriques du passif des sociétés d’assurance. Il s’articule autour des fonds
propres (représentation comptable des droits des actionnaires) et d’un passif exigible
composé pour l’essentiel de provisions techniques.

3.1. Les capitaux propres

Les capitaux propres représentent la part des ressources apportée par l’actionnaire. Ils
regroupent le capital social (toujours entièrement libéré dans les sociétés d’assurance), les
différentes primes (émission, fusion et d’apport), les réserves (statutaires et réglementées), et
le résultat en instance d’affectation le report à nouveau (RAN). Les capitaux propres
n’intègrent ni les subventions d’équipement ni les provisions réglementées.

L’élément capital souscrit, non appelé est inscrit en haut de l’actif du bilan parmi les
créances du capital appelé, non versé.

78
Tableau 12. Montant global des fonds propres de l’assurance en France (Mds d'Euros)

2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012

41,7 43,7 46,7 51,1 52,3 54,4 55

Source : FFSA (2013)

3.2. Le passif subordonné

Ce poste est représentatif des titres émis et des dettes de toute nature venant à un rang
inférieur à tous les autres créanciers. Il contient les droits attachés à des contrats représentés
ou non par des titres qui en cas de liquidation ou de faillite ne doivent être exercés qu’après
ceux des autres créanciers. Ces passifs subordonnés sont admis comme éléments de la marge
de solvabilité.

3.3. Les provisions techniques

Les provisions techniques constituent le troisième élément du « triptyque prudentiel », elles


représentent l’évaluation des engagements nets22 d’une société d’assurance vis-à-vis de ses
souscripteurs, soit généralement 70% à 80% du passif total et mesurent au bilan les
engagements pris par l’assureur lors de la validation d’un contrat d’assurance. Elles se
répartissent en provisions pour risques (fraction de la prime destinée à couvrir les sinistres
futurs pour la période allant de la date d’inventaire à la date d’échéance de la police) et
provisions pour sinistres (estimations des montants à verser à l’assuré au titre des sinistres
survenus mais non encore remboursés). Elles résultent d’estimations qui comportent une
marge d’erreur, d’où le caractère essentiel des règles prudentielles (marge de solvabilité).

Tableau 13. Le montant global des provisions techniques de l’assurance française (Mds d'Euros)

2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012

1113,9 1201,8 1208,2 1319,7 1420,7 1437,5 1485,1

Source : FFSA (2013)

22
L’engagement net de l’assureur envers l’assuré est égal à la différence des engagements de l’assureur et de
l’assuré. L’assureur s’engage à rembourser les sinistres sous certaines conditions, l’assuré s’engage à payer une
prime initiale.

79
L'essentiel du passif exigible d’une entreprise d’assurances est constitué de provisions
techniques représentant le montant estimatif des prestations (indemnitaires ou forfaitaires)
que l’assureur versera à ses assurés sinistrés (Zajdenweber, 2006) ; (Folus & Zajdenweber,
2008).

Les autres postes du passif d’une société d’assurance dont l’importance est moins
significative que les premiers postes présentés sont les suivants :

- Provisions techniques des contrats en unités de compte ;


- Les provisions pour risques et charges ;
- Les dettes pour dépôts en espèces reçus des cessionnaires ;
- Les dettes ;
- Les comptes de régularisation ;
- Les différences de conversion.

Pour Adams (1995), la structure du bilan des sociétés d’assurance est davantage fonction de
la taille des sociétés d’assurance que de leurs structures organisationnelles. Il estime que
l’association entre les composantes de l’actif et du passif d’une part et de la forme
organisationnelle d’autre part est non significative. Cette étude a été effectuée sur un marché
oligopolistique (pendant la période de l’étude, trois mutuelles détenaient 62 % des primes
totales du marché).

La structure des bilans des sociétés d’assurance-vie dépend essentiellement de la forme


organisationnelle, et que les sociétés d’assurance par actions investissent dans des actifs plus
risqués et maintiennent les réserves et les provisions à un niveau très bas, ce qui leur permet
d’investir un maximum d’argent sur les marchés financiers et de s’assurer ainsi de gains
futurs importants. Les mutuelles quant à elles, investissement dans des actifs beaucoup
moins risqués, et elles maintiennent les réserves et les provisions à un niveau très élevé, ce
qui les obligent à investir moins sur les marchés financiers et réaliser ainsi les gains moins
importants que les sociétés d’assurance par actions (Lamm-Tennant & Starks, 1993). Ils
expliquent ces résultats par le fait que les souscripteurs des mutuelles d’assurance cherchent
à se couvrir contre les risques.

80
SECTION II : LES THEORIES TRADITIONNELLES DE LA STRUCTURE
FINANCIERE
La théorie financière est riche des travaux théoriques et empiriques qui ne différencient pas
les sociétés financières (sociétés d’assurance, banques…) des autres entreprises. La structure
financière des entreprises, définie comme la combinaison des ressources externes (dettes
financières) et des ressources internes (fonds propres) a toujours alimenté les réflexions et
les débats entre praticiens, professionnels, chercheurs et régulateurs. L’objectif de ce
chapitre est de présenter une revue de littérature des théories de la structure financière.

Sous-section 1 : Le cadre théorique de la structure de capital

L’analyse des déterminants de la structure financière des sociétés d’assurance ne peut se


faire que dans le cadre de la théorie de la structure financière des firmes. La répartition des
ressources qui maximise la valeur des entreprises (fonds propres et dettes) est un thème qui
anime les débats entre les chercheurs. La plupart des études antérieures ont exclu de leurs
champs d’études les institutions financières et notamment les sociétés d’assurance.

1. Débuts de la théorie financière moderne


Le modèle de Modigliani & Miller (1958) est considéré comme la pierre angulaire des
recherches réalisées sur le thème de la structure financière des entreprises. Il s’agit d’un
modèle qui a été initié afin de mettre fin à une approche dite traditionnelle basée sur le
principe de l’effet de levier.

Le principal objectif de ce modèle est de déterminer les choix de financement des


entreprises. Dans un premier temps, un premier théorème démontre que le coût du capital est
indépendant de la structure financière de l’entreprise et de la répartition entre les fonds
propres et l’endettement, c’est-à-dire qu’un choix d’endettement aura un effet de levier qui
accroîtra la rentabilité des fonds propres grâce au transfert des risques vers les actionnaires.
Dans un deuxième temps, un second théorème établit que la valeur d’une entreprise est
indépendante des dividendes distribués, car la distribution des dividendes peut favoriser à
court terme une hausse des cours, mais elle rendra plus coûteuses dans l’avenir les
augmentations de capital.

81
Les travaux qui ont suivi ce modèle ont été fondés sur ses insuffisances basées sur
l’hypothèse de l’efficience des marchés (Fama, 1970) et le postulat fort de l’existence de
marchés parfaits. C’est dans ce contexte que la théorie financière moderne a vu naître la
théorie du compromis ou Trade-Off Theory (TOT) qui suppose qu’il existerait une structure
financière optimale qui maximise la valeur de l’entreprise en réalisant un arbitrage entre les
avantages et les inconvénients de la détention de ressources financières tels que
l’endettement (ressource externe) et les fonds propres (ressource interne).

Parallèlement à la Trade-Off Theory (TOT) , un autre champ de recherche a vu le jour depuis


les travaux de Jensen & Meckling (1976). Ainsi, la naissance de la théorie du financement
hiérarchique ou Pecking Order Theory (POT), développée par Myers & Majluf (1984), a vu
le jour et a permis d’expliquer de manière plus approfondie la structure de capital des
entreprises. Cependant, l’existence des asymétries d’informations et les coûts d’agence qui y
sont liés, pousse les dirigeants à établir une hiérarchisation des ressources financières. Par
conséquent, les ressources financières les moins exposées aux asymétries d’information sont,
ainsi, préférées aux ressources financières dont les coûts d’agence sont plus importants.
Cette formalisation du processus du choix des ressources financières résulte de l’incapacité
des dirigeants, dont la rationalité est limitée, à déterminer la structure financière optimale qui
maximiserait la valeur de l’entreprise.

Le constat est que aucune des théories précitées n’intègre les spécificités financières des
sociétés d’assurance en particulier et des sociétés financières (sociétés d’assurance,
banques…) en général.

Le recours à d’autres approches comme celle de l’allocation des fonds propres, les études
économétriques basées sur les équations simultanées ou les études empiriques qui prennent
en compte la réglementation prudentielle qui régit les fonds propres, permettent de mieux
appréhender les enjeux déterminant la structure financière de cette catégorie de sociétés.

La naissance effective de la théorie moderne sur la structure du capital des entreprises est le
fruit des travaux précurseurs de Modigliani & Miller (1958). En réponse à l’approche dite
traditionnelle qui peut être considérée comme un consensus théorique qui régnait à l’époque
plutôt qu’une approche scientifique, le modèle de ces auteurs est désigné comme la première
construction théorique répondant aux critères de la démarche scientifique.

82
L’engouement académique qui a suivi l’élaboration ce modèle de base et l’importance du
débat théorique qui dure jusqu’ à présent, montrent la valeur du modèle de Modigliani &
Miller (1958) qui prône la neutralité de l’impact de la structure financière de l’entreprise sur
sa valeur.

1.1. L’approche classique de la structure financière


La structure financière des entreprises en termes de la combinaison entre les fonds propres et
les dettes a connu le jour avec l’apparition de l’approche du bénéfice net dite aussi
l’approche traditionnelle. Le point de départ de cette approche est la comparaison réalisée
par les chercheurs entre les fonds propres et les dettes. Les capitaux propres, constitués
principalement des fonds apportés par les actionnaires et des résultats non distribués, sont
rémunérés d’une façon aléatoire qui dépend essentiellement des performances financières et
économiques réalisées par l’entreprise. Le versement d’un dividende ne se fait que dans le
cas où l’entreprise réalise des bénéfices. Son montant dépend de la politique de rémunération
des actionnaires adoptée par les dirigeants et qui peut changer d’une année à l’autre, en
fonction des orientations stratégiques fixées dans le cadre de la politique financière.

1.1.1 Le choix des modes de financement


Depuis les travaux initiés par Modigliani & Miller (1958, 1963), les modes de financement
des entreprises n’ont pas cessé d’alimenter la recherche académique autour de la structure
financière. La théorie financière a toujours cherché à mesurer les vertus et les inconvénients
de tous les modes de financement proposés aux entreprises. Par conséquent, un lien étroit a
été établi entre l’endettement et l’investissement dans un bon nombre de travaux.

Dans cette optique, Charreaux (1991) explique que les objectifs recherchés par Modigliani &
Miller (1958, 1963) étaient de :

– construire une théorie de l’incidence de la structure de financement sur la valeur de la


firme en situation d’incertitude ;

– montrer comment cette théorie pouvait être utilisée pour résoudre la question du coût
du capital et développer une théorie de l’investissement toujours en incertitude.

Ainsi, le cadre de raisonnement établi par Modigliani & Miller (1958, 1963), fondé sur
l’équilibre partiel et l’arbitrage, entraîne la séparation des décisions d’investissement et de
financement ; autrement dit, l’acceptation de l’investissement ne dépend pas de la façon dont

83
l’investissement est financé. Cette propriété, si elle est valide, simplifie significativement la
prise de la décision financière.

Narayanan (1988) a montré que les marchés de la dette et du capital ne peuvent évaluer les
firmes à leur juste valeur. Ainsi une firme non rentable peut être financée par erreur par ces
deux marchés. Il a également démontré qu’une firme rentable a intérêt à financer
l’investissement par dette plutôt que par une augmentation de capital pour signaler sa
véritable valeur, s’il est nécessaire de recourir à un financement externe. Par ailleurs, elle
évitera toute sous-évaluation possible des titres en utilisant au maximum ses ressources
internes (fonds propres).

1.1.2. Financement par l’endettement : entre création de la richesse et effet de levier


Dans le cadre des asymétries d’information,Modigliani & Miller (1958, 1963) ont démontré
que l’endettement, en l’absence d’imposition, n’agissait pas sur la valeur de l’entreprise
(1958) mais que cette neutralité disparaissait en présence de la fiscalité (1963).

En effet, Modigliani et Miller (1958) ont montré que la valeur d’une firme est indépendante
de son taux d’endettement. Ils ont fondé leur raisonnement sur la base des deux postulats
suivants :

§ la prise en compte des différentes classes des risques ;

§ les marchés sont parfaits.

Selon les deux auteurs, les Cash Flows futurs considérés comme le fruit des investissements,
déterminent la valeur de la firme. Dans le cas d’une entreprise qui ne fait pas appel recours
l’endettement, les actionnaires récupéreront la totalité des Cash Flows, et lorsque l’entreprise
est endettée, seule une partie sera versée aux actionnaires après remboursement des
créanciers. C’est alors le volume des Cash Flows qui détermine la valeur de la firme.

Après leurs travaux sur la neutralité de la structure financière, Modigliani & Miller (1963)
ont démontré que l’avantage fiscal provenant de la déductibilité des intérêts d’emprunts a
tendance à encourager les firmes à s’endetter davantage. Ils ont conclu que l’effet de levier
dû à l’endettement ne concerne pas toute l’entreprise mais uniquement les capitaux propres.
Cependant, cette progression de l’espérance de rendement des capitaux propres est souvent
accompagnée par augmentation du risque global de l’entreprise, ce qui représente une limite.

84
Dans le même registre, Charreaux & Martinet (1987) estiment que les recherches effectuées
permettent de mettre en évidence une relation entre la fiscalité et la structure de financement.
Cependant, cette relation résulte d’équilibres complexes entre le choix des investisseurs
disposant de statuts fiscaux très différents et des entreprises dont les situations sont diverses.
Par conséquent, l’avantage fiscal résultant de la détention de la dette, souvent considéré
comme évident, n’existe pas toujours lorsque tous les aspects du problème sont pris en
compte.

Nous constatons donc que l’approche traditionnelle de la structure financière est donc fondée
sur le principe de l’effet de levier. Dans ce cadre, l’entreprise est incitée à financer ses
projets par des ressources externes (endettement) tant que leur coût (taux d’intérêt) est
inférieur à la rentabilité des actifs acquis. L’endettement peut alors augmenter la richesse des
actionnaires sans pour autant qu’ils soient obligés d’apporter des capitaux supplémentaires,
et toute augmentation de la richesse des actionnaires entraîne par la suite une augmentation
de la valeur de l’entreprise. Le paiement régulier des intérêts de la dette est compensé par les
rendements des actifs acquis tout en dégageant un excèdent qui profite aux actionnaires.

Ce mécanisme n’est pas illimité, il existerait un point où la rentabilité des actifs devient
égale au taux d’intérêt (coût de la dette), car quand l’entreprise devient très endettée, voire
surendettée, les prêteurs peuvent exiger le paiement d’un taux d’intérêt plus élevé. A ce
stade, le choix de la structure financière de l’entreprise devient neutre dans la mesure où
l’endettement n’apporte rien aux actionnaires et les résultats réalisés serviront uniquement à
financer le coût de l’endettement.

Au-delà de ce point d’équilibre, le taux d’intérêt exigé par les bailleurs de fonds devient
alors plus important que la rentabilité économique. Dans ce cas de figure, on parle plutôt
d’un effet de massue qui génère une baisse la richesse des actionnaires suite à une
augmentation excessive de l’endettement.

Le mécanisme de l’effet de levier se décrit comme suit :

85
Par conséquent, la rentabilité financière d’une entreprise, mesurée habituellement par le
ROE (Return On Equity = Résultat net / Fonds propres) dépend de paramètres endogènes
tels que la rentabilité économique ( et le levier financier
er , et d’un
paramètre exogène tel que le taux d’imposition en vigueur :

Équation 1. L’effet de levier

+( ) (1 )

1.2. Apports et limites du modèle traditionnel


Cette approche de la rentabilité financière permet de mettre en évidence l’effet de levier à
travers la différence ( ). Plusieurs cas de figures peuvent se présenter :

: la rentabilité économique est supérieure au coût de l’endettement.


L’augmentation du levier financier (D/CP) a un impact positif sur la rentabilité financière de
l’entreprise ;

: la différence ( ) sera nulle et l’endettement n’aura pas d’effet


sur la rentabilité financière. Toute variation (augmentation ou baisse) de la rentabilité
économique est accompagnée d’une variation (augmentation ou baisse) du taux d’intérêt
exigé par les prêteurs. Par conséquent, le levier financier ne jouera plus son rôle dans la
formation de la rentabilité financière ;

86
: toute augmentation de l’endettement aura un impact négatif sur la
rentabilité financière. L’entreprise a tout intérêt à réduire son endettement car ce dernier
détruit la richesse de ses actionnaires et baisse ainsi sa valeur de l’entreprise. Il s’agit d’un
effet de massue.

Etant donné que le taux d’intérêt payé sur les dettes est généralement fixe, le choix du niveau
de levier financier par l’entreprise dépend principalement de sa rentabilité économique qui
peut changer d’une année à l’autre. L’effet de levier devient alors un vecteur d’orientation de
l’approche rationnelle en matière de la structure financière optimale. Cette approche présente
plusieurs limites en matière de l’abstraction faite du risque et de l’absence d’une assisse
scientifique bien établie.

Dans ce cadre, l’augmentation du niveau de la dette qui résulterait de l’existence de l’effet de


levier n’est pas absolue. Elle est accompagnée d’une augmentation du risque de faillite dans
la mesure où la totalité des risques des activités de l’entreprise sont concentrés sur des fonds
propres faibles. Dans le secteur des assurances et à partir d’un certain seuil, les sociétés
d’assurance n’acceptent plus d’assurer davantage de risques car elles estiment que la
solvabilité de l’entreprise est menacée.

La principale limite de l’approche traditionnelle concerne sa validation en se basant sur


l’observation des niveaux d’endettement des entreprises, alors que rien ne garantit une
augmentation du levier financier sans impacter la rentabilité économique et le taux d’intérêt
imposé par les banques. Ainsi, si le taux de rendement exigé par les actionnaires reste
inchangé et que la valeur de l’entreprise augmente en bénéficiant d’un effet de levier
favorable, à partir d’un certain seuil, il devient difficile de penser que les actionnaires,
restent indifférents face l’augmentation du niveau de la dette (Brealey, 2012).

Afin de limiter les inconvénients du cadre traditionnel de la structure financière, Modigliani


& Miller (1958) étaient les premiers chercheurs à concevoir un travail académique qui
modélise le processus du choix de la structure financière optimale. Malgré la conception de
leur modèle en se basant sur des postulats réducteurs de la réalité du marché, ce travail est
considéré comme la pierre angulaire d’une théorie financière bien structurée autour de la
question de la structure financière optimale.

Dans le cadre de ce modèle de base, Modigliani & Miller (1958) mettent en place le principe
de neutralité et démontrent que la structure financière est neutre et elle n’a aucun impact sur

87
la valeur de l’entreprise. Cette position évolue par la suite avec l’introduction de l’impact de
l’imposition sur les entreprises (Modigliani & Miller, 1963). L’endettement peut donc avoir
un effet positif sur la valeur de l’entreprise.

2. Evolution du cadre conceptuel de la structure financière

La pierre angulaire de la finance moderne reste les modèles établis par Modigliani et Miller
(1958) sur la structure financière de l’entreprise.

2.1. Le modèle de départ (1958) et neutralité de la structure financière


Les premiers travaux de Modigliani et Miller (1958) ont exclu l’intégration de l’imposition
fiscale dans le modèle de base. A la base de ce modèle, on trouve l’hypothèse forte des
marchés parfaits, selon laquelle les entreprises deviennent des unités qui s’adaptent aux
différents niveaux d’équilibre imposés par les lois du marché. Dans ce cadre, le pouvoir de
décision des dirigeants en matière de la structure financière n’a pas d’effet sur la valeur de
l’entreprise. Les auteurs ont, ainsi, formulé plusieurs hypothèses sur l’environnement de
l’entreprise :

Ces travaux n’excluent pas les institutions financières (sociétés d’assurance, banques…) de
leur échantillon et aboutissent à la neutralité du choix du mode de financement.

Ainsi, leur modèle se base sur plusieurs hypothèses :

- les marchés financiers sont parfaits,


- les agents économiques peuvent prêter ou emprunter à un taux fixe et sans limite,
- il n’existe pas de coûts de faillite,
- il n’existe que deux types de titres, les actions et les obligations,
- les effets de la fiscalité ne sont pas pris en compte,
- il n’y a pas de croissance, tous les flux sont constants,
- il n’y a pas d’asymétries d’informations entre les agents économiques,
- les dirigeants gèrent conformément à l’intérêt des actionnaires.

Malgré la simplicité de ce modèle, Miller (1995) a démontré que le théorème s’applique


dans le secteur financier, et notamment, aux banques, en assimilant les dépôts à la dette.

88
2.2. L’intégration de la politique fiscale (1963)
Pour Modigliani & Miller (1963), la valeur de l’entreprise est proportionnelle à son niveau
d’endettement en raison de la fiscalité spécifique à l’entreprise. L’entreprise est incitée à
s’endetter autant que possible pour maximiser l’avantage fiscal lié à l’effet de levier. La
structure financière n’est plus neutre, elle détermine directement la valeur de l’entreprise. les
auteurs estiment que si l’on considère la fiscalité sur l’entreprise, la valeur d’une entreprise
endettée est supérieure à celle d’une entreprise non endettée. Dans le prolongement de ces
travaux, Miller (1977) a démontré qu’il est également nécessaire de considérer la fiscalité
des investisseurs en tant que personnes physiques et il considère dans son modèle qu’il est
probable qu’il existe un montant d’endettement optimal au niveau général, mais la levée de
l’hypothèse de neutralité de la fiscalité personnelle conduit à réaffirmer la validité du
principe d’indifférence de la structure financière pour chaque entreprisse.

Sous-section 2 : L’évolution de la théorie de la structure financière


En se basant sur la question de l’impact de la structure financière sur la valeur de l’entreprise
(Modigliani & Miller, 1958), l’évolution du cadre théorique s’est principalement structurée
autour de l’étude de l’impact de l’introduction des imperfections du marché [exclues lors de
l’élaboration du modèle de base de Modigliani et Miller (1958)]. Par conséquent,
l’intégration de toutes ces imperfections remet en cause les conclusions de la théorie de la
neutralité de la structure financière. Cependant, la modification du cadre théorique (abandon
des hypothèses liées aux marchés parfaits) rend la relation théorique entre l’endettement et la
valeur de l’entreprise possible et permet d’aboutir à une structure financière optimale
(Modigliani & Miller, 1963).

1. Développement théorique de la structure du capital


Cette analyse ne se limitera pas à relater l’importance de la littérature théorique développée
au cours des trente dernières années au sujet des déterminants de la structure financière mais
de souligner la variété des approches conduisant à des hypothèses divergentes (Harris &
Raviv, 1991). En se basant sur la notion du niveau optimum d’endettement, on peut
identifier deux principaux courants théoriques : il s’agit de la théorie du financement par
compromis ou Trade-Off Theory (TOT) et la théorie du financement hiérarchique ou Pecking
Order Theory (POT).

En se basant sur le principe de neutralité selon lequel la structure financière de l’entreprise


est neutre et n’a aucun impact sur la valeur de l’entreprise (Modigliani & Miller, 1958), la

89
TOT suppose l’existence d’une structure financière optimale. Cette combinaison est obtenue
grâce à un arbitrage réalisé entre les avantages et inconvénients des deux principales sources
de financement (internes et externes).

L’évolution du cadre d’analyse s’enrichit considérablement grâce à la levée des hypothèses


du modèle de base défini par un raisonnement simple et pour des marchés financiers parfaits
(Modigliani & Miller, 1963). Ainsi, l’existence d’imperfections de marché telles que la
fiscalité, les coûts de faillite ou les coûts de mandat sont intégrées dans un cadre d’analyse
marqué par le caractère imparfait des informations échangées sur les marchés.

Ces imperfections contribuent considérablement à l’explication du choix entre les ressources


internes (fonds propres) et les ressources externes (dettes financières) en fonction des
principales caractéristiques de l’entreprise.

A contrario, la POT privilégie l’élaboration d’une règle comportementale qui se traduit par
l’existence d’une hiérarchisation des sources de financement basée sur l’hypothèse
d’asymétrie de l’information. Cette hiérarchisation peut également intégrer des éléments
managériaux dictés par l’objectif final poursuivi par les managers de l’entreprise.

1.1. La Trade-Off Theory (TOT) et intégration des imperfections du marché dans le


cadre théorique de la structure du capital
Le pouvoir explicatif du modèle de Modigliani et Miller (1958) n’est valide que dans le
cadre d’un contexte basé sur les hypothèses fondatrices émises par les deux chercheurs.
Ainsi, si le principe de la neutralité de la structure financière suppose un niveau
d’endettement très élevé, la TOT identifie les conditions sous lesquelles un endettement
moindre est préférable pour l’entreprise.

Ce courant de pensée s’est progressivement constitué autour la prise en compte des


imperfections des marchés tels que l’imposition et les coûts de défaillances, ainsi que
l’arbitrage entre les avantages et les inconvénients des différentes composantes de la
structure financière.

1.2. Prise en compte de la probabilité de faillite


Le modèle établi par Modigliani & Miller (1963) montre qu’en l’absence des imperfections
de marché, l’endettement peut permettre d’augmenter la valeur de l’entreprise grâce aux
économies réalisées en raison de la déductibilité fiscale des intérêts d’emprunts. Si l’on

90
adopte un raisonnement extrême, une structure financière optimale serait alors constituée des
dettes de manière exclusive. Cependant cette situation n’est pas préconisée pour les
entreprises étant donné que l’endettement augmente les risques de défaillance et les coûts de
faillite qui en découlent.

La valeur d’une entreprise endettée (VE) correspond à la valeur d’une entreprise non
endettée (NE) plus les économies liées à l’endettement (I) et moins les coûts de faillite
mesurés par la probabilité de défaillance de l’entreprise (F). Ici, l’endettement est aussi bien
une source d’avantages financiers que de coûts pour l’entreprise endettée.

VE = NE + I – F

La détermination de la structure optimale passe par l’arbitrage que fait l’entreprise entre les
avantages et les inconvénients de l’endettement. Elle compare les économies d’impôts liées à
l’endettement et les coûts de faillite qui en découlent. Tant que les économies d’impôts (I)
sont supérieures aux coûts de faillite (F), l’entreprise a tout intérêt à s’endetter dans la
mesure où le recours à l’endettement augmente sa valeur. Partant du principe que les coûts
de faillite augmentent avec le niveau d’endettement, l’entreprise va arrêter de s’endetter
quand ces derniers (F) deviendront supérieurs aux économies d’impôts. La structure
financière optimale correspond au niveau d’endettement où les économies d’impôts sont
équivalentes aux coûts de faillite. En deçà de ce niveau, les économies réalisées permettent
de compenser les coûts qui y sont liés, et qui sont plus importants que les économies
d’impôts.

L’augmentation de l’endettement accentue le risque de défaillance et diminue la valeur de


l’entreprise. Le recours à l’endettement devient très coûteux et difficile à obtenir dans la
mesure où les établissements de crédit limitent leur offre de crédits aux entreprises endettées.
Plus le niveau d’endettement de l’entreprise est élevé, plus les taux d’intérêt exigés par les
établissements de crédit augmentent.

Ainsi, on peut dire que, bien que le modèle de base de Modigliani & Miller (1958) soit fondé
sur des hypothèses qui simplifient la réalité et la complexité de la décision de capital des
entreprises, il a le mérite d’être le premier modèle structuré basé sur une démarche
scientifique rigoureuse mais aussi le point de départ de l’un des courants de recherche les
plus fertile dans la théorie financière tant aux niveaux théorique qu’empirique. Cependant, la
plupart des recherches qui ont succédé aux travaux de Modigliani et Miller ont essayé

91
d’introduire, de manière progressive, les imperfections des marchés, ignorés dans le modèle
de base, afin de le rendre plus réaliste et de mieux comprendre le comportement des
entreprises en termes de structure financière. Les coûts de faillite que l’entreprise supporte
quand son niveau d’endettement augmente sont les premières imperfections qui ont été
introduites. On assiste alors à la naissance de théories fondées sur l’arbitrage entre avantages
et inconvénients des ressources financières (Théories du compromis ou de l’arbitrage). Les
théories informationnelles (théorie de l’agence et théorie du signal) sont alors venues
approfondir et élargir encore plus ce cadre théorique basé sur l’arbitrage.

1.3. Prise en compte des théories de l’information et de la relation d’agence


Afin d’expliquer les différences de comportement des agents, notamment en matière de
choix de la structure financière, Jensen & Meckling (1976) ont élaboré la théorie de
l’agence. Ils proposent un cadre d’analyse, dit agent/principal, qui intègre quelques
imperfections du marché et leurs impacts sur la décision des intervenants dans la décision de
financement (dirigeants, actionnaires, créanciers…) tout en maintenant le marché comme
référentiel.

Ainsi, le cadre théorique proposé par la théorie de l’agence se distingue des travaux qui l’ont
précédé principalement par deux d’hypothèses :

- la divergence des intérêts des parties prenantes (actionnaires, dirigeants,


créanciers…). L’éventualité d’un comportement opportuniste rend la gestion d’une
relation d’agence coûteuse en raison des contrôles mis en place ;
- la rationalité limitée des agents liée principalement à l’existence de l’asymétrie
d’information et aux capacités cognitives limitées des agents ;
- l’asymétrie d’information naît principalement de la détention d’une information
privée par les dirigeants. Cette information est considérée comme imparfaite car elle
n’est pas connue de toutes les parties prenantes.

L’objectif principal de la théorie de l’agence est de déterminer le contrat optimal dans le


cadre d’une relation entre les partenaires. La relation d’agence existe quand un individu (le
principal) délègue à un autre individu (agent) la responsabilité d’agir en son nom pour
accomplir une tâche donnée car il n’a pas les compétences ou le temps nécessaires. Dans les
entreprises, la relation d’agence existe, notamment, entre les actionnaires et les dirigeants.
Les actionnaires (principal) délèguent aux dirigeants (agent) la responsabilité de gérer

92
l’entreprise et le pouvoir d’agir en leur nom. Les dirigeants agissent dans l’intérêt des
actionnaires en visant l’augmentation de la valeur de l’entreprise à travers l’augmentation
des richesses des apporteurs de fonds propres, autrement dit l’augmentation de la valeur
actionnariale. Toutefois, il peut exister des divergences d’intérêts, entre le principal et
l’agent, dans la mesure où certaines décisions financières prises par les dirigeants sont dans
leur intérêt propre et non pas celui des actionnaires. L’information privée détenue par les
dirigeants est, dans ces cas, utilisée par ces derniers pour s’enraciner et avoir plus de
pouvoir.

Ces comportements opportunistes des dirigeants peuvent être contournés par la mise en
place, par les actionnaires, d’un système de gouvernance qui permet de contrôler l’espace
discrétionnaire des dirigeants. Ces mécanismes de contrôle (ou d’incitations) induisent des
coûts appelés les coûts d’agence.

Ces coûts sont principalement constitués des :

- Coûts de surveillance des dirigeants par les actionnaires, notamment la mise en place
d’un conseil de surveillance ;
- Coûts liés à l’alignement des intérêts du principal et de l’agent. Ce sont
principalement les rémunérations complémentaires octroyées aux dirigeants et qui
sont indexées sur les performances financières.

1.4. Conséquences de l’intégration de la relation d’agence


Selon la théorie de l’agence, certaines décisions financières prises par les dirigeants
permettent de limiter les conflits d’intérêts des parties prenantes. Par exemple, le niveau
d’endettement optimal est celui qui permet de réduire les conflits d’intérêts entre les
actionnaires et les dirigeants sans remettre en cause la solvabilité de l’entreprise.

En effet, l’atout principal de l’endettement est qu’il peut être utilisé comme un moyen de
contrôle des dirigeants. Le remboursement régulier de l’emprunt et des intérêts conduit les
dirigeants à viser des niveaux de rentabilité assez élevés afin de couvrir le coût de la dette et
d’éviter les coûts d’une mauvaise gestion. En conséquence, pour préserver leur image, les
dirigeants agissent dans l’intérêt des actionnaires en augmentant les profits. Grâce à
l’endettement, la politique d’investissement des dirigeants est contrôlée par les actionnaires
mais la mise en place de ce mécanisme de contrôle par la structure financière induit des
coûts liés à l’accroissement des risques de l’entreprise, à la mise en place d’un système de

93
gouvernance et à la collecte d’informations nécessaires et utiles pour déterminer la nature et
le montant de l’endettement.

La structure financière optimale est, de manière globale, celle qui maximise la valeur de
l’entreprise en optant pour un arbitrage entre les avantages et les coûts d’agence qui sont liés
à l’une ou l’autre des ressources financières. A côté, comme dans la relation d’agence, la
théorie du signal (Ross, 1977) est basée sur l’existence d‘imperfections du marché qui sont
vérifiables sans engager des coûts supplémentaires. L’asymétrie d’information peut conduire
les dirigeants à publier des informations qui peuvent influencer la décision des autres parties
prenantes. Il s’agit principalement d’émettre un signal au marché à travers la communication
pour valoriser les cours boursiers. Ainsi, quand l’entreprise est performante, elle envoie des
signaux pour être distinguée des entreprises les moins performantes. Ces signaux peuvent
être de différents types (la distribution des dividendes, la structure du capital, ou encore la
politique d’investissement et de la prise de risque, etc.) et sont émis pour influencer la
décision des investisseurs. Par exemple, concernant la structure financière, quand
l’entreprise augmente son endettement, elle donne l’impression d’être une entreprise solide
avec des opportunités de croissance intéressantes. Ce signal, s’il est reçu par les acteurs de
marché, permet à l’entreprise de valoriser ses actions et, plus tard, de lever plus facilement
des capitaux.

2. La Pecking Order Theory (POT)


Si le recours à l’une ou à l’autre ressource financière n’est pas neutre sur la valeur de
l’entreprise, des travaux se sont penchés sur une autre approche de la structure de capital qui
ne se baserait pas uniquement sur la notion d’arbitrage telle qu’abordée dans les modèles dit
de compromis que nous avons présentés plus haut. Ainsi, les théories dites de financement
hiérarchique sont nés suite aux travaux de Myers (1977) fondés principalement sur
l’existence de l’asymétrie d’information et des coûts de transactions.

2.1. Les enseignements de la hiérarchisation des financements


Fondée sur la prise en compte des asymétries d’information et l’interaction des décisions de
financement et d’investissement et approche alternative à l’existence d’un optimum
d’endettement, la théorie du financement hiérarchique (Picking Order Theory) suppose
l’existence d’un ordre hiérarchique des sources de financement de l’investissement. Cet
ordre est établi en fonction de l’objectif exprimé par les dirigeants. Donaldson (1963) montre
que le dirigeant de l’entreprise et ses actionnaires n’ont pas les mêmes préférences en

94
matière de choix des sources de financement de l’investissement. Ainsi les dirigeants
préfèrent prioritairement financer les investissements par le recours à l’autofinancement,
puis à l’emprunt et enfin à l’augmentation de capital. A l’inverse, si les actionnaires peuvent
profiter d’un placement à un taux supérieur au coût de l’emprunt, ils choisiront une
hiérarchie privilégiant d’abord l’endettement puis l’autofinancement et enfin l’augmentation
de capital. Ces observations sont à la base du raisonnement selon lequel la structure
financière de l’entreprise n’est pas l’objet d’un arbitrage à la marge mais bien d’une
hiérarchie établie en fonction des préférences des dirigeants. Il faut cependant préciser
qu’elles ne seront reconnues comme théorie du financement hiérarchique qu’au début des
années quatre-vingt avec les travaux de Myers & Majluf (1984).

- Augmentation de la richesse de l’actionnaire

En 1984, Myers et Majluf ont proposé un modèle où le dirigeant agit uniquement dans
l’optique de la maximisation de la richesse des actionnaires ou propriétaires actuels. Ainsi, il
privilégie l’autofinancement pour éviter l’émission de nouveaux fonds propres qui, par
dilution, peut entrainer une réduction de la valeur des titres de propriété des actuels
actionnaires. Toutefois, quand un financement externe est inévitable, il est préférable d’avoir
recours à l’endettement financier plutôt qu’à une levée de fonds propres auprès de nouveaux
investisseurs afin ne pas léser les actuels actionnaires. En d’autres termes, la hiérarchie
optimale des sources de financement privilégie d’abord l’autofinancement, puis
l’endettement, et en dernier lieu, l’augmentation de capital.

- Réduction des coûts des contrats

Pour maximiser la valeur de l’entreprise, le dirigeant peut se retrouver contraint à minimiser


le coût des contrats implicites et explicites conclus entre l’entreprise et ses partenaires
(Cornell & Shapiro, 1987; Williamson, 1988). Le modèle de Cornell & Shapiro (1987)
étudie le lien entre le choix du mode de financement des investissements et la considération
des contrats implicites de l’entreprise. Ces auteurs montrent que le prix demandé par
l’entreprise pour établir des contrats implicites est relatif aux efforts déployés par celle-ci.

Ainsi, l’entreprise doit conserver des ressources financières accessibles pour honorer des
contrats implicites dont le prix élevé assurera l’objectif de maximisation de la valeur de
l’entreprise. Une structure financière liquide et/ou peu endettée apparait alors comme la

95
garantie du respect des engagements implicites de l’entreprise vis-à-vis de ses créanciers ou
de ses clients.

Williamson (1988) aboutit indirectement à une hiérarchie identique des financements en se


basant sur le caractère incomplet des contrats explicites. L’incomplétude des contrats
explicites se traduit par une incitation à la modification des comportements en raison de la
rationalité limitée et de l’opportunisme des agents économiques. Cela entraîne des coûts de
gouvernance qui résultent de l’adaptation des comportements après la signature des contrats.
En raison de l’incomplétude des contrats portant sur des actifs spécifiques, la priorité est
donnée à l’utilisation des sources de financement pouvant limiter le coût de ces
imperfections.

Dans ce sens, les fonds propres sont préférables dans le cas de financement
d’investissements spécifiques. Ils présentent une flexibilité supérieure à l’endettement car ils
ne sont pas contractuellement exigibles à une échéance fixe et permettent le contrôle de la
politique d’investissement du dirigeant s’il y a délégation de pouvoir.

2.2. Les travaux empiriques réalisés sur la structure du capital


La plupart des théories développées que nous avons abordées ont fait l’objet d’essais de
validations empiriques. Il en ressort que la structure de capital n’est pas neutre et a une
incidence significative sur les richesses des actionnaires (Hirigoyen, 1992).

Concernant la validation empirique de la théorie du compromis, Biais, Hillion & Malecot


(1994); Malecot (1992) montrent que la structure optimale du capital est la résultante d’un
arbitrage à la marge entre les avantages fiscaux de la dette et les éventuels coûts de faillite.
Ces coûts constituent près de 20% de la valeur des entreprises américaines et sont beaucoup
plus importants dans les entreprises françaises.

Contrairement à la théorie de la non-pertinence de la structure du capital, la théorie de


l’arbitrage prédit des ratios d’endettement modérés.

Etant donné que l’avantage fiscal est limité, un endettement excessif aggraverait les risques
liés à la défaillance. Par conséquent, l’âge de la firme, la nature des actifs et la profitabilité
sont d’importants déterminants de la structure optimale du capital (Titman & Wessels,
1988). Dans cette même perspective, Harris & Raviv (1991) et Jalilvand & Harris (1984)
démontrent que les décisions de financement impactent la valeur de la firme à travers la

96
fiscalité et les coûts de faillite ou d’agence. Ces auteurs soulignent qu’il existe un
échelonnement des émissions de titres conformément aux résultats de Taggart (1977) et
Marsh (1982) et concluent que le choix entre la dette et les fonds propres est fortement
influencé par l’historique des cours et la structure des taux d’intérêt à terme.

Quant à elle, la théorie de l’arbitrage prédit aussi un effet sectoriel. Comme le montre Kester
(1986) au Japon et aux Etats-Unis, les firmes les plus rentables d’un secteur empruntent
moins que les firmes les moins rentables. Par ailleurs, l’arbitrage entre les avantages et les
inconvénients des ressources financières passe également par le biais de la convergence vers
un ratio de capital cible. Selon Jalilvand & Harris (1984), la vitesse d’ajustement dépend de
la ressource financière. Ainsi, l’ajustement par des émissions d’actions se fait lentement et
de progressivement, d’abord par la rétention des bénéfices et ensuite par de nouvelles
émissions.

Vu que la baisse des dividendes est difficilement envisageable, le dirigeant recourt à des
augmentations de capital pour atteindre l’objectif de fonds propres. Claggett (1991) souligne
que la convergence de la structure de capital des firmes vers leur ratio moyen sectoriel est
significative au seuil de 5% pour presque toutes les années et pour tous les secteurs sauf
celui de l’industrie d’aluminium. Ces résultats sont comparables avec ceux de Bowen, Daley
& Huber Jr (1982) qui montrent que la convergence de la structure de capital des firmes vers
leur ratio moyen sectoriel sur cinq ans et sur dix ans est significative. Cependant,
l’ajustement de la structure financière vers sa valeur objectif semble tendre vers la baisse.
Seules les firmes ayant un ratio d’endettement au-dessus du ratio objectif convergent vers ce
dernier. Les travaux de Long & Malitz (1985) mettent l’accent sur l’importance de la
composition de l’actif dans la politique d’endettement (à condition que la société reste dans
la même classe de risque). Plus la firme aura des actifs intangibles et des opportunités de
croissance, plus son ratio d’endettement cible sera moindre.

Pour ce qui est des validations empiriques de la théorie du financement hiérarchique, Shyam-
Sunder & Myers (1999) et Frank & Goyal (2003) montrent que les prédictions de la théorie
du « Picking Order Theory » sont applicables aux entreprises américaines qui préfèrent avoir
recours aux ressources internes avant de recourir à l’emprunt puis à l’augmentation de
capital comme dernier choix. Molay (2005) aboutit aux mêmes conclusions sur un
échantillon d’entreprises françaises mais seule différence : ces dernières n’ont adopté que
récemment une stratégie de financement. Il faudrait toutefois souligner que les conclusions

97
Shyam-Sunder & Myers (1999) ont été critiquées par Chirinko & Singha (2000). Ces
derniers ont montré que leurs tests sont biaisés et peuvent, par conséquent, fausser les
résultats.

Malgré l’intérêt du principe de la hiérarchisation dans l’explication de la structure financière


des entreprises, l’inventaire des travaux empiriques met en exergue les difficultés qu’ont les
chercheurs à tester les modèles hiérarchiques, et à analyser l’effet précis de l’existence de
l’asymétrie d’information sur la structure de capital. Nous allons aborder par la suite les
déterminants de la structure financière qui émanent de la théorie du financement
hiérarchique (profitabilité, les opportunités de croissance et les actifs tangibles).

Concernant les validations empiriques de l’impact des théories informationnelles sur la


structure financière, elles montrent que les choix de financement permettent de minimiser les
coûts explicites des contrats. L’endettement est bien vu par les autres parties prenantes de
l’entreprise car ces dernières lient l’augmentation de la dette à une future augmentation des
richesses (Donaldson (1963); Donaldson & Stone (1984), Donaldson & Preston (1995).
L’endettement est alors un moyen de réduction des asymétries d’information qui peuvent
exister à différents niveaux et d’améliore de la réputation des dirigeants dans la mesure où il
donne un signal sur leur capacité à générer des bénéfices tout en supportant les charges
financières qui augmentent avec l’endettement.

Si les études empiriques sur la structure de capital des entreprises sont très riches, les
résultats sont parfois contradictoires et c’est pour cette raison qu’il nous semble important de
nous intéresser aux facteurs susceptibles de déterminer la structure de capital de l’entreprise.

2.3. Les déterminants traditionnels de la structure financière


Sur le plan théorique, le niveau de capitalisation d’une entreprise dépend de plusieurs
déterminants qui trouvent leur source principalement dans la théorie du compromis ou de la
théorie du financement hiérarchique. Ces déterminants sont classés en deux grandes
catégories : les facteurs internes qui dépendent de la gestion de l’entreprise et de ses
performances actuelles et futures et les facteurs externes qui matérialisent l’influence de
l’environnement de l’entreprise sur sa structure financière. Les études empiriques qui ont
testé ces facteurs diffèrent selon l’approche qu’elles adoptent et le cadre méthodologique et
les mesures des variables qui sont choisis. Ceci conduit à des résultats parfois hétérogènes

98
mais on relève toutefois des tendances sur les relations entre les déterminants testés et la
structure financière.

2.3.1. Les déterminants endogènes de la structure financière


Les principaux déterminants internes de la structure financière sont la profitabilité, le risque
et la taille. Théoriquement, le taux d’endettement baisse avec les deux premiers et augmente
avec le troisième.

- La croissance de l’entreprise (bilan) ou de l’activité (compte de résultat)

La relation entre la croissance et le taux d’endettement est souvent positive. En effet, les
opportunités de croissance futures permettent à l’entreprise d’investir et de ne pas supporter
les coûts de sous-investissement. Pour financer ce type d’investissement, l’endettement est
préférable puisqu’il permet aux dirigeants de réduire les asymétries d’informations entre eux
et les actionnaires (Jensen & Meckling (1976); Smith & Warner (1979a) ; Myers & Majluf
(1984) ; Green (1984).

L’endettement favorise la réduction des conflits d’intérêts car la croissance future va générer
des revenus qui permettront de rembourser les charges d’intérêts liées à l’augmentation de
l’endettement et de dégager un surplus pour les actionnaires.

Aussi, selon la théorie du signal initiée par Ross (1977), le taux d’endettement constitue un
signal qui est émis, par les dirigeants, aux marchés sur les opportunités de croissance futures.
Quand le signal est bien perçu par le marché, l’endettement augmente le cours boursier et
favorise la bonne réputation des dirigeants. Cependant, l’endettement peut également être lié
négativement aux opportunités de croissance (Harris & Raviv, 1988). Dans ce cas, les
entreprises préfèrent financer leurs investissements futurs par les capitaux propres pour
éviter de partager les richesses générées.

- La profitabilité de l’entreprise

Le recours à la profitabilité comme déterminant de la structure financière dans la grande


majorité des études empiriques montre l’importance théorique et empirique de ce facteur. De
manière générale, la profitabilité est mesurée par la rentabilité économique ou le résultat
d’exploitation en cas d’indisponibilité des données.

Dans la théorie du financement hiérarchique, la relation entre la profitabilité et le taux


d’endettement est supposée négative. Long & Malitz (1985) et Titman & Wessels (1988)

99
confirment empiriquement ce résultat sur des entreprises américaines. L’explication de ce
résultat réside dans le recours à l’autofinancement par les entreprises rentables, en utilisant
l’incorporation des bénéfices dans les réserves, pour éviter les coûts d’agence
supplémentaires liés à l’endettement (Baskin, 1989). En présence des fonds auto-générés, les
entreprises font le choix de garder leur indépendance vis-à-vis des banquiers. Elles peuvent
alors augmenter leur capacité future d’endettement pour financer des projets ultérieurs
nécessitant des fonds immédiats alors que l’autofinancement implique l’attente de la
distribution des résultats.

De l’autre côté, la théorie du compromis considère la relation entre la profitabilité et


l’endettement comme positive (Harris & Raviv, 1990). Cela peut être expliqué par le fait que
les entreprises rentables ont un accès plus facile à l’endettement et en tirent profit pour faire
jouer l’effet de levier tant que la rentabilité économique est supérieure au coût de
l’endettement.

- La taille de l’entreprise

L’effet de la taille sur l’endettement a largement été étudié d’un point de vue empirique. Les
résultats montrent que la relation entre la taille et l’endettement est positive (Chan, Chen, &
Hsieh, 1985), (Horowitz, Loughran, & Savin, 2000). Les banques accordent des crédits plus
facilement aux grandes entreprises car elles disposent de garanties réelles de remboursement.
Aussi, les grandes entreprises sont considérées comme moins risquées grâce à la
diversification de leurs actifs. De leur côté, les petites entreprises privilégient le financement
avec les capitaux propres en raison de la difficulté d’obtenir des crédits à taux raisonnables
mais aussi, pour garder leur indépendance dans la formulation des orientations stratégiques.

Paradoxalement, d’autres études empiriques ont conclu à une relation négative entre le taux
d’endettement et la taille. Il s’agit de Titman & Wessels (1988) ; Kester (1986), pour le cas
des États-Unis et Biais et al. (1994) dans le contexte français. Cette relation négative peut
être expliquée par le fait que les grandes entreprises ont des fonds auto-générés importants
qui diminuent leurs besoins en matière d’endettement. Par ailleurs, l’accès aux marchés
financiers permet aux grandes entreprises de disposer d’importantes ressources financières
(Rajan & Zingales, 1995).

100
2.3.2. Les déterminants exogènes de la structure financière

- L’impact sectoriel

Nombre de raisons suggèrent que les entreprises du même secteur d’activité devraient avoir
des taux d’endettement semblables ou comparables. Les entreprises d’un même secteur
d’activité sont confrontées aux mêmes contraintes, notamment en matière de concurrence, de
règlementation ou de risque et aux mêmes opportunités en matière d’investissements et
d’évolutions. Les entreprises qui conçoivent et fabriquent des machines spécifiques ont
recours à des actifs spécifiques plus que celles qui fabriquent des produits de grande
consommation, les premières sont plus endettées que les secondes (Aldersona & Betker,
1995; Titman, 1984).

On peut parler d’un ajustement vers le ratio moyen du secteur d’activité vers lequel
convergent les entreprises (Jalilvand & Harris, 1984). Ainsi, les entreprises qui ont des taux
d’endettement élevés par rapport à la moyenne du secteur, baissent leur endettement et / ou
augmentent leurs fonds propres pour s’approcher de la moyenne et évitent ainsi la sanction
du marché (cours boursier).

- Le profil de risque

Lorsque les coûts de faillite sont conséquents, la relation entre le risque et le niveau
d’endettement est négative. Les entreprises ayant un profil de risque élevé préfèrent éviter
l’endettement car ce dernier augmente leur risque global en y ajoutant le coût lié au risque de
faillite (Castanias (1983).

Le comportement des dirigeants en matière de fonds propres dépend de leur aversion au


risque et de la pression du marché en termes de solvabilité. Lorsque leur profil de risque
augmente, les dirigeants augmentent leurs fonds propres et leur rentabilité pour obtenir une
meilleure notation externe (Bradley, Jarrell, & Kim, 1984). Toutefois, il faut noter que
Titman & Wessels (1988) ont trouvé des résultats contradictoires avec ceux de Bradley et al.
(1984).

Selon Yang (1996), la relation entre le risque et le taux d’endettement diffère selon le niveau
d’endettement initial de l’entreprise. Cette relation est positive pour les entreprises
faiblement endettées qui disposent généralement d’un niveau de capitalisation assez élevé
pour garantir leur solvabilité malgré l’augmentation de leurs risques. Les coûts de faillite de

101
ces entreprises sont faibles dans la mesure où l’existence des fonds propres suffisants permet
d’absorber une grande partie des pertes improbables.

- Le contexte économique et réglementaire

On peut dire que deux systèmes économiques existent dans la majorité des pays : le système
anglo-saxon et le modèle franco-allemand. Le système anglo-saxon est fondé sur la finance
directe par le biais des marchés financiers. Le taux d’endettement faible s’explique par la
petite taille et la localisation régionale des banques. Quant au système franco-allemand, il est
basé sur l’existence de l’immatriculation financière à grande échelle. Les banques sont peu
nombreuses mais elles sont de grandes tailles et bénéficient d’une implantation très large de
leurs activités qui s’étale sur l’ensemble du territoire. On pourrait alors imaginer que les
entreprises ont un accès plus facile au crédit et qu’elles ont des taux d’endettement plus
élevés. Toutefois, dans les pays où les restrictions sur l’activité bancaire sont élevées, les
entreprises sont théoriquement moins endettées dans la mesure où l’offre de crédit est faible.
De plus, la politique économique de l’Etat vis-à-vis de certains secteurs d’activité ou de
certaines régions peut influencer le taux d’endettement des entreprises.

- Les facteurs institutionnels et culturels

La structure financière des entreprises peut différer d’un pays à un autre selon sa politique en
matière fiscale et selon des caractéristiques des « banques » qui y sont implantées. Ndoume
(2003) a souligné l’effet des facteurs institutionnels et culturels sur la structure financière des
entreprises. Dans le même ordre d’idées, Hofstede (1980) a proposé une méthodologie pour
étudier l’impact des facteurs culturels sur les décisions de management (notamment la
structure financière). Il souligne que l’identité culturelle d’un pays est défini à travers quatre
dimensions universelles : la distance hiérarchique, le contrôle de l’incertitude,
l’individualisme/ collectivisme et les valeurs masculines/féminines. Par exemple, dans les
cultures qui ne favorisent pas la prise de risque, on pourrait imaginer que le taux
d’endettement des entreprises est élevé dans la mesure où elles évitent de risquer leurs
propres fonds.

Les différences des taux d’endettement d’un pays à un autre peuvent aussi résulter des
différences entre les référentiels comptables. Les données comptables étant à la base de
beaucoup d’études portant sur la structure financière, les différences institutionnelles
peuvent jouer un rôle important.

102
Conclusion du premier chapitre

Dans la première section de ce chapitre nous avons développé l’ensemble des


caractéristiques et spécificités du secteur de l’assurance français. Il s’agit d’un secteur dont
les formes organisationnelles sont multiples et où les sociétés d’assurance exercent des
activités différentes (vie, dommages). Aussi, nous avons exposé les spécificités financières
des sociétés d’assurance et les dispositifs réglementaires qui encadrent l’activité de
l’assurance en France. Sans oublier la structure du bilan des sociétés d’assurance qui
constitue un élément fondamental dans l’optimisation de la stabilité du secteur de l’assurance
et du système financier. En effet, l’actif du bilan d’une société d’assurance est
essentiellement composé de placements, alors que le passif est composé à hauteur de 80% de
provisions techniques, ce qui laisse au fonds propres un rôle de variable d’ajustement qui
permet à la société d’assurance d’ajuster ses engagements vis-à-vis de ses assurés avec ses
placements. Ainsi les fonds propres jouent un rôle indispensable dans la solvabilité et la
stabilité financière de la société d’assurance. Dans la deuxième section de ce chapitre, nous
avons présenté les théories financières qui régissent le cadre théorique qui définit la structure
financière des sociétés financière. Les plupart des travaux de recherche réalisés dans le
secteur financier ont été développées dans le secteur bancaire, ce qui nous poussera à bâtir
notre cadre conceptuel en se basant sur les travaux réalisés dans le secteur financier.

103
CHAPITRE II : DU CADRE TRADITIONNEL DE LA STRUCTURE DU CAPITAL
AU CADRE PRUDENTIEL

La détermination de la structure financière optimale des sociétés financières se trouve au


centre des réflexions lors de l’élaboration et la mise en place des référentiels prudentiels
(Bâle I, Solvency I, Bâle II, Solvency II, Bâle III…) par les autorités de régulation du secteur.
L’objectif principal de ces cadres prudentiels est de prendre en considération des évolutions
du secteur et d’assurer la stabilité financière des sociétés financières, tout en leur accordant
une certaine souplesse pour préserver le business model de la société et sa rentabilité
financière, gage de son attractivité financière sur le marché.

A cette fin, contrairement aux précédents cadres réglementaires, les récentes réformes des
dispositifs réglementaires et prudentiels intègrent la modernité et sophistication du secteur
financier dans l’élaboration des nouveaux référentiels. Cette prise en compte de la modernité
technologique du secteur financier permettra d’accorder plus aux techniques actuarielles et
les modèles internes dans le suivi de la structure financière et la solvabilité des sociétés
d’assurance et les banques.

Dans un premier temps, nous présenterons une revue de littérature de la structure du capital
dans le secteur financier, et dans un deuxième temps, nous mettrons en évidences les
avancées technologiques dans le secteur financier et nous aborderons par la suite la
problématique de l’intégration de la réglementation dans la détermination du niveau optimal
du capital.

104
SECTION I : REVUE DE LITTERATURE DE LA STRUCTURE FINANCIERE
DANS LE SECTEUR FINANCIER
Dans le cadre de la théorie sur la structure financière moderne, la prise en compte des
imperfections du marché introduites dans le modèle de base de Modigliani & Miller (1958)
permet une meilleure compréhension des comportements de financement des sociétés
financières en général et les sociétés financières en particulier. C’est en remettant en
question les hypothèses contraignantes avancées par Modigliani & Miller (1958) que le
processus de détermination de la structure financière optimale de la société d’assurance peut
être réalisé.

Par conséquent, imperfections du marché et les externalités liées aux sociétés financières,
telles que la réassurance pour les sociétés d’assurance, assurance dépôt pour les banques et la
régulation prudentielle, peuvent contribuer au choix de leur structure optimale du capital.

Sous-section 1 : La théorie financière dans le secteur financier


Les travaux de recherche menés par Modigliani & Miller (1958) ne prennent pas en
considération la présence de l’intermédiation financière. Ils supposent que toutes les
opérations de financement se font de gré à gré et de façon directe entre les agents
économiques. C’est pour cette raison que le débat sur la validation du principe de la
neutralité dans les sociétés d’assurance n’est pas pertinent. Cependant, l’introduction des
externalités liées aux sociétés financières (asymétries d’informations, risque, les coûts de
transactions, coûts de faillite…), redonne un sens à l’existence de l’intermédiation financière
et nous permet d’avancer que les évolutions des hypothèses de la théorie financière moderne
sont susceptibles d’être appliquées à la société financière en général et à la société
d’assurance en particulier.

1. Les fonds propres comptables et pression du marché

En termes de fonds propres, la pression du marché correspond au niveau de fonds propres


(fonds propres / total bilan) qui permet aux sociétés d’assurance de maximiser leur valeur en
l’absence d’un cadre réglementaire. Dans le secteur financier, c’est le taux de capitalisation
cible vers lequel l’institution financière tend, à terme, sous les pressions du marché (Berger
et al., 1995; Cummins, Harrington, & Klein, 1995; Cummins & Sommer, 1996). Les
décalages entre les exigences du marché en matière de fonds propres des sociétés financières
et leur niveau réel constaté sont analysés par le marché. La valeur de la société financière
pourrait alors être impactée positivement ou négativement en fonction des avis envoyés par

105
la marche. Par conséquent, contrairement aux conclusions de Modigliani & Miller (1958), le
choix d’un niveau optimal de fonds propres peut se faire en fonction d’un ensemble de
facteurs (communs à toutes les entreprises ou spécifiques aux sociétés financières).

1.1. Processus de construction d’une structure financière optimale

La fiscalité et les coûts de faillite sont les premières imperfections intégrées au modèle de
base, fondé sur le principe de neutralité de la structure financière. Comme le souligne la
théorie de l’arbitrage, l’endettement augmente la valeur de l’entreprise grâce aux avantages
fiscaux (économies d’impôts) qui découlent de la déductibilité des intérêts d’emprunts,
contrairement aux dividendes. Cependant, il ne faut pas négliger le fait que le risque de
faillite de l’entreprise augmente avec le levier, ce qui limite les avantages de l’endettement et
augmente l’attractivité des fonds propres.

Même si le secteur financier (sociétés d’assurance, banques, fonds de pension…) possède


plusieurs spécificités, Berger et al. (1995) affirment que ce raisonnement reste applicable aux
institutions financières en absence de réglementation. Une fiscalité favorable à l’endettement
est un facteur déterminant important dans le choix du niveau de fonds propres de la société
financière. Le niveau d’endettement baisse alors avec l’augmentation de la fiscalité
appliquée. Le secteur des assurances possède des spécificités principalement quand il s’agit
de l’impact des coûts de faillite.

A titre d’exemple, une institution financière assume et gère l’augmentation du risque global
mieux qu’une entreprise industrielle. C’est grâce à leur expertise en matière de gestion des
risques que les banques et les sociétés d’assurance arrivent à mieux apprécier le niveau de
fonds propres capitalisation nécessaire sans que leur solvabilité ne soit détériorée. Cette
possibilité est facilitée par l’utilisation de modèles internes sophistiqués qui permettent une
meilleure allocation des fonds propres (Kaufman, 1994). Le marché ne sanctionne pas de la
même manière une institution financière endettée et une entreprise endettée, ce risque
explique en partie le taux d’endettement élevé des banques (Berger et al., 1995).

Une entreprise est considérée comme trop endettée et sa valeur de marché baisse, quand son
taux d’endettement va au-delà des deux tiers (voire moins). Elle est alors considérée comme
étant à risqués élevés et les coûts de faillite qui y sont liés deviennent important. Cependant,
on considère comme solvable toute institution financière avec 10 % de taux de capitalisation.
Sa valeur de marché est affectée positivement.

106
L’importance du taux d’endettement dans le secteur des assurances s’explique aussi par
l’existence des provisions techniques, autrement dit, les engagements des assureurs envers
leurs assurés. Les sociétés d’assurance collectent les primes d’assurances versées par les
assurés pour investir une partie et redistribuer l’autre partie aux emprunteurs. De ce point de
vue, les provisions techniques sont des « inputs » au cœur de l’activité de l’assurance.

Dans le secteur de l’intermédiation financière, l’attractivité en termes de collecte de dépôts


conditionne la capacité des banques à accorder des crédits et à réaliser des marges. La
capacité des sociétés d’assurance à assurer davantage de risques et réaliser des marges
dépend de leur compétitivité et leur possibilité de collecter davantage de primes et
augmenter le montant de leurs provisions techniques.

Les dépôts et les provisions techniques sont des ressources dans le sens où elles augmentent
le taux d’endettement de la banque et de la société d’assurance et ce sont des dettes
disponibles dans la mesure où le déposant peut retirer ses fonds quand il veut. Les risques
assurés peuvent alors se produire à n’importe quel moment. Sachant qu’ils sont
généralement non rémunérés, le principal avantage lié à la détention de provisions
techniques et de dépôts reste leur coût (frais de gestion) qui est largement inférieur à celui
des fonds propres. Cependant, ils augmentent l’exposition des banques et des sociétés
d’assurance aux problèmes liés aux ruées bancaires et la réalisation de tous les risques
assurés au même moment malgré l’existence de l’assurance dépôt et de la réassurance.

Les coûts de faillite peuvent aussi être la conséquence des difficultés économiques que
connaissent d’autres banques, d’autres sociétés d’assurance ou d’autres secteurs d’activité à
cause de la dégradation de la qualité des actifs détenus (Berger et al., 1995; Cowley &
Cummins, 2005; Cummins et al., 1995; Cummins & Sommer, 1996). Une augmentation des
coûts de faillite s’accompagne d’une baisse de la valeur de marché des fonds propres. Ces
mécanismes de contagion, entre les intermédiaires financiers au niveau international et entre
les intermédiaires financiers et l’économie réelle, donnent un pouvoir disciplinaire
supplémentaire au marché.

Dans le secteur bancaire par exemple, James (1991) souligne que les banques peuvent
perdre jusqu’à 30 % de leur valeur de marché suite aux coûts liés à la détention des actifs
(vente des actifs toxiques, dépenses juridiques et administratives, réputation…) et à hauteur
de 10 %, pour les actifs de mauvaise qualité. L’augmentation des coûts de faillite accroit les

107
exigences de marché en matière de niveau de capital. A côté, la pression des actionnaires
joue un rôle important dans la détermination du niveau des fonds propres bancaire puisqu’ils
exigent des dirigeants un niveau de rentabilité élevé en raison de l’augmentation de
l’endettement.

Ainsi, pour garantir la rentabilité des actionnaires, le comportement d’aléa moral peut
conduire les dirigeants à prendre des risques élevés (Claessens, Demirgüç-Kunt, & Huizinga,
2000; Demirguc-Kunt, Laeven, & Levine, 2003), d’où l’intérêt de disposer d’une Asset
Liabilities Management (ALM) qui rend le niveau des fonds propres fonction de la
composition des actifs, de l’aversion des dirigeants par rapport aux risques et de
l’environnement économique et réglementaire (Santomero & Watson, 1977).

1.2. Intégration des imperfections de marché

L’introduction des asymétries d’information est incontournable dans l’étude de la structure


de capital des sociétés d’assurance. Cette introduction est en rupture avec les hypothèses de
Modigliani & Miller (1958) où les marchés parfaits sont caractérisés par une information
complète. Les asymétries d’informations sont très présentes dans le secteur de
l’intermédiation financière, c’est pour cela que Meh & Moran (2004); Meh & Moran (2008)
ont proposé un modèle qui prend en considération l’existence de l’asymétrie d’information
sur deux plans.

En premier lieu, bien plus que les banques qui sont incapables d’éliminer le risque d’aléa
moral lié à la relation du crédit, les entrepreneurs disposent de plus d’informations sur la
qualité de leurs projets et sur les risques qui y sont liés. C’est ainsi que les banques
requièrent des entrepreneurs d’apporter sous forme de fonds propres une partie des montants
nécessaires à l’investissement.

En second lieu, seules à détenir l’information sur la qualité réelle de leurs actifs, les banques
ajustent leur niveau de fonds propres par rapport à leur prise de risques (fonds propres
économiques). C’est ainsi que les déposants sont sensibles à la solvabilité des banques et à
leur niveau de capitalisation. Cette solvabilité permet la réduction des conflits d’intérêts qui
existent entre les créanciers (principalement les déposants ou les assurés dans le cas d’une
compagnie d’assurance) et les dirigeants.

108
L’asymétrie d’information existe également dans la relation entre la banque et les marchés
financiers. La détermination de la demande des actions d’une banque est tributaire de
l’appréciation des futurs investisseurs. L’information imparfaite rend ces derniers sensibles
aux signaux émis par les dirigeants à travers les décisions financières qu’ils prennent
(politique d’investissement, structure financière, politique de dividendes, etc.). Cela
permettrait aux futurs investisseurs de dépasser l’opacité liée à la gestion de la banque étant
donné que les dirigeants sont les seuls à pouvoir apprécier les perspectives de la rentabilité
de la banque ainsi que sa solidité (Levine, 1989).

Dans le secteur bancaire, bien que les exigences des actionnaires augmentent pour ce qui est
du taux de rentabilité, le recours à l’endettement a un effet positif sur la valeur de l’action de
la banque puisqu’il émet un signal de l’existence de perspectives de croissance et de
rentabilité positives (Jensen, 1986; Leland & Pyle, 1977; Ross, 1977).

En effet, les banques endettées ont la confiance des déposants et des autres prêteurs, ce qui
impacte positivement la perception des investisseurs pour qui la capacité d’une banque à se
signaler par un levier financier important indique une bonne qualité de la gestion (Berger et
al., 1995). L’augmentation de l’endettement, et c’est une spécificité du secteur bancaire,
montre la capacité des dirigeants à attirer les déposants (première ressource de la banque).
L’attraction de ces derniers dépend principalement de la visibilité de la banque sur le marché
et la qualité de ses politiques de commercialisation et de fidélisation.

Toutefois, un taux d’endettement élevé peut avoir des conséquences négatives sur la valeur
de l’action de la banque quand la conjoncture économique est défavorable. Si elles sont très
endettées, les banques sont jugées par les investisseurs comme très risquées surtout si cela
s’accompagne par la faillite d’une grande banque. Ce type d’événement déclenche le doute
sur la solvabilité des institutions financières.

L’asymétrie d’information accentue les incertitudes et rend les exigences de marché plus
importantes en matière de fonds propres (Carey, 1995). L’augmentation du niveau de ces
derniers devrait permettre de réduire les coûts d’agence (entre les dirigeants et les créanciers
et entre les dirigeants et les actionnaires).

De plus, à l’instar du secteur bancaire, la spécificité du secteur des assurances réside dans
l’intervention de l’Etat et l’existence de la réassurance. Les asymétries d’information liées au
secteur des assurances sont influencées par les mesures réglementaires. Il semble y avoir une

109
relation négative entre le niveau de la régulation financière et le niveau des fonds propres
exigés par le marché (Kaufman, 1991). Or, cette intervention de l’Etat peut avoir des
conséquences en matière d’aléa moral lié au phénomène « Too big to fail ». Powell et
Sommer (2007) et Adiel (1996) montrent que l’existence d’un filet de sécurité matérialisé
notamment par la réassurance réduit les asymétries d’information entre les créanciers et les
dirigeants et réduit les exigences de marché en matière de fonds propres.

L’existence d’une réassurance incite les assurés à baisser la surveillance des dirigeants dans
la mesure où ils sont certains de récupérer leurs épargnes en cas d’insolvabilité de la société
d’assurance. Ainsi, ils n’exercent pas leur pouvoir lié au retrait massif de leurs épargnes
(assurance-vie) pour faire pression sur les dirigeants.

A côté de la réduction des asymétries d’informations, il faut souligner que toute


accroissement de l’endettement augmente parallèlement le risque de faillite et toute
augmentation des fonds propres engendre des coûts supplémentaires liés à l’émission
d’actions nouvelles et au taux de rentabilité exigé (Jensen & Meckling, 1976).

2. Optimisation de la structure financière : un moyen pour minimiser le coût du


capital

Le coût du capital, le risque, l’investissement et la rentabilité sont des notions intimement


liées. En effet, le coût du capital dépend de la nature et de l’importance du risque pris. Plus
l’investissement est risqué, plus l’exigence de rentabilité sera importante. En effet, les
apporteurs de fonds vont demander une rémunération plus importante en fonction du risque
pris (une prime de risque).

2.1. Estimation du coût du capital

Malgré le fait que le coût du capital représente 20 % du coût total d’une société d’assurance
non vie, les mesures traditionnelles de résultats compatibles n’intègrent pas le coût du capital
de la société d’assurance (Kielholz, 2000). Toutefois, il s’avère difficile d’estimer le coût du
capital à cause des risques spécifiques de chaque activité. Cette estimation a été facilitée par
la mise en place de plusieurs techniques telles que, le Risk-based capital et l’évolution des
méthodes de mesure du risque tel que Value-at-risk et Dynamic Financial Models (Kielholz,
2000). Les deux auteurs ont procédé à l’estimation du coût de capital de sociétés d’assurance

110
(une séparation entre les sociétés d’assurance vie et les sociétés d’assurance non vie a été
faite) sur une période de 20 ans (1978-1998) dans cinq pays européens : la France, la
Grande-Bretagne, l’Allemagne et la suisse, ainsi qu’aux États-Unis sur une période de 17 ans
(1981-1998).

Les résultats de l’étude montrent que :

- le coût du capital des sociétés d’assurance étudiées, a diminué sur la plupart des
marchés, cette baisse est essentiellement due à la stagnation des baisses des taux
d’intérêts nominaux dans la plupart des pays développés ;

- une augmentation du risque en Grande-Bretagne et en Suisse a été observée, alors


qu’une baisse a été constatée en France et en Allemagne. Aux Etats-Unis, cependant,
l’assurance non-vie apparaît moins risquée ;

- le changement de la nature du risque spécifique à l’assurance diffère selon les pays et


la branche d’activité. Ce résultat a été obtenu en utilisant la méthode du MEDAF. Ce
modèle repose sur des données de marché, ce qui permet de ne tenir compte que des
sociétés d’assurance cotées en bourse. Néanmoins, ce modèle présente la limite de ne
pas considérer le risque d’insolvabilité ou de défaillance ;

- l’utilisation de nouvelles méthodes de calcul et de simulation a rendu possible une


très bonne estimation du risque et l’utilisation efficiente des capitaux est devenue
plus facile à maîtriser ;

Le modèle du MEDAF surestime les primes d’assurance car il ne tient pas compte du risque
d’insolvabilité des sociétés d’assurance (Yueyun, Hamwi, & Hudson, 2003). Ils constatent
que la prime d’assurance ajustée est moins élevée quand la société d’assurance a une
probabilité d’être insolvable. Ils ont également incorporé dans le modèle le risque de non-
paiement, ce qui a provoqué une estimation moins importante du profit futur. Yueyun et al.
(2003) terminent leur étude en concluant que la valeur des passifs des sociétés d’assurance
devrait tenir compte du risque diversifiable.

2.2. L’obtention d’une structure financière optimale

Même si l’asymétrie d’information existant entre les dirigeants et les apporteurs de capitaux
externes apparaît être une des caractéristiques du cadre d’analyse posé par la théorie de

111
l’agence, l’élément central de l’analyse se situe dans la relation d’agence et dans les conflits
d’intérêt qui lui sont liés. La démarche utilisée reste par ailleurs très traditionnelle dans la
mesure où les décisions financières s’obtiennent par minimisation des coûts d’agence ; on
demeure dans un cadre d’analyse purement marginaliste. Pour maximiser la valeur de la
firme à un moment donné, en résolvant les conflits d’intérêt, il est nécessaire d’obtenir une
structure de financement optimale en tenant compte des avantages et des coûts de
l’endettement et des capitaux propres. L’optimisation de la structure de financement passe
par la réalisation d’un processus dont l’objectif sera de maximiser la valeur globale de la
firme. Autrement dit, l’optimum dans la structure de financement n’est pas recherché dans le
même objectif que celui de la théorie du compromis.

Pour atteindre cet objectif, une diminution des conflits et une réduction des coûts d’agence
en s’endettant de façon optimale. Sans oublier les contraintes liées aux coûts d’agence des
capitaux propres et de la dette auxquelles sera confrontée l’obtention de l’optimum de
financement.

Lors de la réalisation des compromis, les conflits entre prêteurs et actionnaires diminuent
avec le temps. Au fur et à mesure des périodes écoulées, les dirigeants ont intérêt à
sélectionner des projets sans risque ou à diminuer leur politique de sous-investissement (afin
d’éviter le conflit entre prêteurs et actionnaires) (Diamond, 1989). Ils évitent ainsi de perdre
auprès des prêteurs leur bonne réputation qui leur permet d’obtenir des taux d’intérêt
toujours plus faibles.

3. Les validations empiriques de la structure financière dans le secteur financier


La plupart des travaux théoriques portant sur la structure du capital ont essayé d’expliquer la
structure de capital dans le secteur financier en partant des spécificités financières et
organisationnelles des institutions financières. Les modèles que nous allons présenter ci-
dessous n’ont pas intégré l’impact de la réglementation en ce qui concerne l’imposition d’un
ratio minimum de capital.

3.1. Le cadre théorique de Diamond & Rajan (2000)


Diamond & Rajan (2000) proposent une théorie du capital bancaire avec un modèle où les
actifs et les passifs de la banque sont largement reliés. Ils distinguent au moins trois
domaines de la stratégie bancaire qui sont touchés par le niveau de capital : la santé

112
financière de la banque, sa capacité à se refinancer à moindre coût et sa capacité à exiger des
emprunteurs le remboursement des prêts qui peut aller jusqu’à la liquidation.

L’incertitude accentue la fragilité des dépôts, c’est pourquoi il est important d’avoir un
niveau de capitalisation suffisant. Plus le niveau du capital de la banque sera élevé, plus la
probabilité de faillite sera faible, cependant cela réduit la création de la liquidité. Dans le
cadre de la relation de crédit, le taux d’intérêt que la banque exige des emprunteurs influence
le niveau de capital détenu. La structure optimale du capital bancaire serait le résultat d’un
arbitrage entre les effets de l’offre de liquidité, les coûts liés à la faillite et la capacité de la
banque à exiger le remboursement des crédits.

Le modèle de Diamond & Rajan (2000) permet d’expliquer pourquoi la détention du capital
pourrait coûter plus cher, au sens de Myers & Majluf (1984) qui mettent en évidence
l’asymétrie d’information liée à l’augmentation du capital, mais il insiste également sur les
coûts liés à la réduction de l’offre de liquidité et à la composition des actifs bancaires.

Ce modèle permet aussi de comprendre plusieurs situations dans la gestion. A titre


d’exemple, il explique les raisons de la désintermédiation dans certains secteurs et leurs
recours à la finance directe en caractérisant les types de firmes qui bénéficient le plus de
financement de la banque.

3.2. Les hypothèses du modèle de Baltensperger (1973)

Ce modèle fait partie des travaux qui ont abordé les déterminants du comportement bancaire
en matière de capitalisation en l’absence de la réglementation.

En proposant un modèle simple de maximisation de la valeur de la banque, Baltensperger


(1973) a mis en lumière les facteurs susceptibles d’influencer le choix du niveau de
capitalisation dans le cadre de la théorie de la banque libre (Janson, 2002). La théorie de la
banque libre remet en cause le modèle de base de Modigliani & Miller (1958) en justifiant
l’existence du système bancaire par les imperfections du marché (asymétries
d’informations).

Baltensperger (1973) démontre qu’il n’est pas possible d’analyser les banques dans le même
cadre que les autres firmes, car une banque n’a pas d’existence possible dans un
environnement de concurrence pure et parfaite et par conséquent, les conclusions de

113
l’analyse de Modigliani & Miller (1958) ne peuvent s’appliquer. Il propose un modèle
simple de maximisation du profit à travers d’un mix optimal de capital et de dépôts, qui
détermine, dans le cadre d’un modèle de maximisation de profit, le niveau optimal
d’endettement de la firme bancaire. L’existence d’un tel optimum est propre à la firme
bancaire.

Par conséquent, il existe une structure optimale du passif bancaire et confirme la remise en
cause du théorème de Modigliani & Miller (1958), qui soutenaient la thèse selon laquelle la
structure financière de la firme n’a aucune incidence sur la valeur. Baltensperger (1973)
suppose implicitement que les déposants sont sensibles à la structure financière de leur
établissement. Cette attitude a été assez peu prise en considération dans les modèles de la
firme bancaire.

Par ailleurs, Baltensperger (1973) introduit dans son analyse un élément généralement absent
dans les modèles de la firme bancaire, à savoir les coûts de faillite. Cette variable devient
importante lorsque le risque de contagion est pris en considération. Puis, il démontre que
dans l’arbitrage dettes / capitaux propres, deux éléments sont étroitement liés : la demande
de services de liquidités offerts par les dépôts et les coûts anticipés d’insolvabilité. En effet,
Plus les coûts anticipés d’insolvabilité sont faibles plus la qualité des dépôts offerts est
élevée. Dans ces conditions, les déposants sont prêts à accepter un taux de rémunération
d’autant plus faible en contrepartie de la qualité des services de liquidité offerts.

L’institution financière naît de l’imperfection de l’information (Santomero, 1984) qui se


rencontre à deux niveaux :

- la relative illiquidité des actifs : fondamentalement, les banques de dépôts existent


parce que le marché financier n’a pas autant de compartiments que d’états de la
nature. Exploitant un avantage comparatif dans la gestion de l’information, la banque
est en mesure d’offrir profitablement ce service de liquidité à travers l’émission de
dépôts ;
- l’existence d’un conflit d’intérêt dans la relation préteur-emprunteur-agent peut
inciter l’emprunteur à dissimuler sa véritable situation pour minimiser le coût de son
financement.

114
3.3. Le cadre d’analyse du modèle de Baltensperger (1973)

Dans son modèle de maximisation du profit bancaire, Baltensperger (1973) suppose que
l’institution financière produit un seul instrument de dettes, à savoir, les dépôts. Il considère
que les réserves constituées ont un coût d’opportunité égal au rendement moyen des actifs
rémunérés. En effet, dans cette logique, les réserves constituent une immobilisation.

Les autres variables du modèle sont les suivants :

- l’actif de la firme est exogène ;


- la distribution des revenus de l’actif suit une distribution stochastique : Y
- le niveau et la structure d’actifs de la banque: A
- le revenu des actifs : Y ; La densité associée : g(y)
- le taux de rémunération des dettes bancaires D est : i
- la banque est une firme à responsabilité limitée.
- la faillite se produit dès lors que la firme enregistre pendant la période une perte
supérieure au montant des capitaux propres W.

Il considère qu’à l’équilibre, la valeur optimale des dettes D et la valeur de marché


correspondante de l’actif (A) et des capitaux propres (W) seront déterminés conjointement.

Dans un deuxième temps, Baltensperger (1973) introduit la notion d’assurance dépôt dans
son modèle de maximisation du profit de la firme bancaire. Par conséquent, la fonction
objectif de la banque devient : E(π) = Y° - tD – f(D) – S – ro (A-D)

- Y° : le revenu attendu de l’actif,


- tD : la rémunération anticipée des dépôts,
- f(D) : le coût de production des dépôts,
- S : les coûts anticipés directs et indirects d’insolvabilité,
- Ro (A-D) : le coût d’opportunité des réserves (A-D), la différence entre le montant
des actifs rémunérés et l’ensemble des dettes représentant les réserves détenues par la
banque. Le coût d’opportunité est représenté par le taux de rendement anticipé par les
investisseurs sur le marché des capitaux.

Dans ces conditions, le déposant n’exigera plus une prime de risque et un taux d’intérêt
nominal, car il sera indifférent au risque d’insolvabilité de sa banque, car lorsqu’un

115
organisme de dépôts rembourse sans limite, le déposant n’a aucun intérêt à évaluer la qualité
des contrats de dépôts proposés par la banque. Le déposant devient indifférent au risque
d’insolvabilité de la banque, il n’exigera plus de prime de risque et le taux d’intérêt nominal
(i) réclamé devient indépendant du volume des dépôts et identique au rendement anticipé (t).

L’exercice de la surveillance des activités bancaires et l’évaluation de la prime de risque


reviennent à l’organisme d’assurance. Une pratique qu’on pourrait assimiler au principe de
la réassurance dans le cadre de la société d’assurance.

Dans le cadre d’un contrat d’assurance standard, la prime de risque versée par la banque à
l’organisme d’assurance dépend de sa probabilité d’insolvabilité et donc de sa structure
financière. Cependant, les conditions de maximisation de profit restent en substance
inchangées à condition que la prime d’assurance exigée par l’organisme d’assurance soit
d’un montant identique à celle exigée par les déposants.

L’arbitrage entre les avantages et les coûts des ressources financières (Trade off) qui a été
développée dans le cadre de la théorie sur la structure financière se retrouve ainsi dans le
modèle de Baltensperger (1973).

4. Les travaux empiriques dans le secteur financier

Exclues des échantillons étudiés dans les très nombreux travaux empiriques consacrés à la
structure financière des entreprises, ce n’est qu’à partir des années quatre-vingts et quatre-
vingt-dix que des essais de validation empiriques incluant les banques et les sociétés
d’assurance voient le jour suite à l’imposition du ratio réglementaire aux banques à la fin des
années quatre-vingt (Bâle I) et aux assureurs à la fin des années quatre-vingt-dix (Solvency
I).

En tentant de savoir si les différentes combinaisons des ressources de financement des


banques ont des effets sur la valeur de celles-ci, les premiers travaux à s’intéresser au secteur
financier ont principalement été consacrés aux banques. Ils ont essayé de vérifier le pouvoir
explicatif du cadre théorique de la structure financière et ont abouti au résultat que la prise en
compte des externalités de marché permet de mieux comprendre la structure du capital des
institutions financières.

Aussi, l’observation du ratio de capital des banques a montré que ces dernières affichent
généralement un niveau de capitalisation supérieur au minimum réglementaire lorsqu’elles

116
sont régies par un cadre réglementaire dense. Cependant, au-delà de ce cadre, la structure de
capital des banques est aussi influencée par des déterminants spécifiques au secteur bancaire
(système d’assurance dépôt, discipline de marché, etc.). La liquidité d’une banque et sa
capacité à collecter des fonds dépendent de sa réputation financière.

4.1. La réserve de capital dans le secteur financier

L’objectif principal des dispositifs prudentiels Bâle I et Solvency I, Bâle II et solvency II était
de pousser les banques et les sociétés d’assurance à augmenter leur ratio de capital afin de
préserver la stabilité du système financier international.

Si les institutions financières détiennent généralement un ratio de capital supérieur aux


exigences réglementaires pour éviter les coûts d’une insuffisance des fonds propres qui
pourrait engendrer un durcissement des contrôles par les autorités de régulation et les
sanctions des marchés financiers.

Dans le secteur bancaire, des différences de compartiments et d’activités existent et


influencent la répartition du capital sur les activités (Angora, Distinguin, & Rugemintwari,
2009). En étudiant le ratio de capital non pondéré aux risques des principales banques des
pays développés, Brewer, Kaufman & Wall (2008) aboutissent au résultat que le niveau de
capitalisation dépend principalement du pays d’origine de la banque. Par exemple, sur la
période 1992-2005, alors que les banques américaines affichaient un ratio de capital de
8,40% , les banques allemandes avaient la plus faible moyenne avec un ratio de 3,01%. Pour
ce qui est du ratio de capital pondéré aux risques, sachant que le minimum réglementaire est
de 4% (Tier 1), les banques allemandes étaient toujours les moins capitalisées avec un ratio
moyen de 6,27% et les banques Suisses étaient les mieux capitalisées en affichant un ratio
moyen de 10,04% (Brewer et al., 2008). Ces résultats soulignent l’impact des facteurs
institutionnels sur le niveau de capitalisation des banques.

La détention par les banques d’un niveau de capital supérieur au minimum requis reflète
l’efficacité de l’imposition d’un ratio minimum de capital pour préserver la solvabilité des
banques internationales. Dans les années quatre-vingt-dix, suite à l’imposition de Bâle I, les
banques européennes ont augmenté leur niveau de capitalisation comme l’ont montré les
travaux d’Ediz et al. (1998) et de Rime (2001) et les travaux sur les banques américaines ont
abouti aux mêmes résultats (Aggarwal & Jacques, 1998a, b; Hancock & Wilcox, 1997;

117
Jacques & Nigro, 1997). A ce niveau, la réglementation a été efficace en Europe (Ediz et al.
(1998) ; Rime (2001) et pour les banques américaines (Jacques & Nigro (1997), Aggarwal
& Jacques (1998a, b) et Hancock & Wilcox (1997). A partir du début le début des années
quatre-vingt-dix, on note une tendance à la hausse des ratios des fonds propres des banques
du G10 ce qui a éveillé l’intérêt des chercheurs pour les raisons qui expliquent pourquoi les
banques détiennent un niveau de capital en excédent par rapport à l’exigence minimale de
Bâle I (8%) (Angora et al., 2009).

D’après (Angora et al., 2009), nombre d’études ont essayé de mettre en évidence les
déterminants de cet excédent de capital (Jokipii & Milne, 2008; Lindquist, 2004; Nier &
Baumann, 2006) et de comprendre comment les banques ajustent leur ratio de capital
(Berger, Klapper, Martinez Peria, & Zaidi, 2008; Flannery & Rangan, 2008; Wall &
Peterson, 1995). Les résultats permettent de mettre en exergue plusieurs facteurs notamment
internes (le coût des capitaux propres, la taille de la banque, la valeur de marché et la prise
de risque), liés à la pression réglementaire, à la concurrence, à la pression du marché et au
comportement cyclique du capital bancaire. Dietrich & Vollmer (2004) soulignent que
l’excédent du capital joue le rôle d’un outil stratégique pour la renégociation avec les
emprunteurs non pas comme une garantie contre les baisses exceptionnelles de rentabilité
des projets.

Dans la même perspective, Bernauer & Koubi (2006) démontrent, théoriquement et


empiriquement, que les banques les mieux capitalisées ont les coûts d’endettement les plus
faibles et que, par conséquent, l’augmentation du niveau du capital est utilisée comme un
moyen de concurrence par rapport aux autres banques.

La pression du marché peut être un élément explicatif de l’excédent de capital comme l’ont
montré Nier & Baumann (2006) en examinant comment la discipline de marché peut influer
sur la formation de l’excédent des fonds propres des banques. Ils soulignent l’idée que le
renforcement de la discipline de marché, par le biais des passifs non-assurés et l’obligation
de la divulgation de l’information, conduit à une plus grande capitalisation des banques
(Angora et al., 2009). Cette dernière peut être le simple reflet d’une période inhabituelle de
rentabilité (Flannery & Rangan, 2008). Gropp & Heider (2007, 2010) constatent que les
organisations bancaires les plus rentables ont tendance à avoir un ratio de capital supérieur
aux autres, ce qui est cohérent avec la théorie du financement hiérarchique. Si la levée de
nouveaux capitaux est coûteuse, l’accumulation du capital pourrait compter sur les fonds

118
générés en interne, les dirigeants de la banque peuvent ainsi augmenter leur capitalisation en
augmentant les réserves, autrement dit en payant moins de dividendes (Angora et al., 2009).
Il existerait donc une relation positive entre la profitabilité et le niveau des fonds propres
(Flannery & Rangan, 2008). Aussi une bonne partie de la littérature met l’accent sur le
comportement cyclique du capital, notamment que le cycle économique et l’excédent de
capital sont liés négativement (Ayuso, Perez, & Saurina, 2004; Jokipii & Milne, 2008;
Lindquist, 2004) Angora et al. (2009). Pour expliquer cette relation négative, Berger et al.
(1995) soutiennent que les banques détiennent un excédent de capital pour être en mesure
d’exploiter les possibilités d’investissement qui s’offrent à elles de manière inattendue.

4.2. Les facteurs issus de la théorie financière


Le risque, les coûts d’agence, la fiscalité, la rigueur de la réglementation nationale et le
niveau de capitalisation des banques sont les principaux facteurs étudiés. (Gropp & Heider,
2007) ont étudié les déterminants de la structure financière des banques (échantillon de
grande banque américaines et européennes) en utilisant la même méthodologie que celle
mobilisée dans les études empiriques portant sur les entreprises non financières. Les résultats
montrent que les déterminants de la structure financière des entreprises ont un pouvoir
explicatif dans les banques qui optimisent leur niveau de capitalisation de la même manière
malgré l’existence de la réglementation (effet marginal).

Le ratio de capital diminue avec la taille et les actifs tangibles et augmente avec les
opportunités de croissance, la profitabilité et la distribution des dividendes. En modélisant23
la structure du capital en tant que fonction de l’importance des caractéristiques de la
réglementation dans le pays d’origine, des variables spécifiques à la banque et des conditions
macroéconomiques et financières au niveau des pays, les travaux de Brewer et al. (2008)
indiquent que les ratios de fonds propres des banques sont sensiblement affectés, dans les
mêmes sens que les hypothèses, pour la plupart des variables spécifiques aux banques. Ces
dernières conservent un ratio de fonds propres plus haut quand il s’agit de pays dans lesquels
le secteur bancaire est relativement moins développé et dans les pays qui pratiquent des
mesures correctives rapides et strictes concernant les exigences de fonds propres et qui ont
des structures de gouvernance efficaces.

23
Le modèle est estimé avec des données annuelles sur la période 1992-2005, pour un panel des 78 plus
grandes banques privées dans le monde et dont le siège social est dans l’un des douze pays industrialisés.

119
L’influence des facteurs institutionnels passe principalement par la relation positive qui
existe entre le risque et le niveau des fonds propres, dans la mesure où le cadre institutionnel
a un impact sur la probabilité de défaut de la banque et sur son aversion au risque (Nier &
Baumann, 2006). Barth, Caprio Jr, & Levine (2004) ont élaboré un indice qui mesure la
sévérité de la réglementation nationale.

D’un autre côté, en partant des travaux de Wall & Peterson (1987), Barrios & Blanco (2003)
ont testé sur le marché espagnol, les deux modèles qu’ils ont élaborés pour expliquer le ratio
de capital des banques : le modèle dit « de marché » et le modèle « avec réglementation ».
Ces deux modèles soulignent comment les banques ajustent leur ratio de capital pour
atteindre le niveau de capitalisation visé. Les résultats montrent qu’entre 1985 et 1991, les
banques espagnoles ont ajusté leur ratio de capital et que la vitesse d’ajustement est plus
élevée selon le modèle de marché. Barrios & Blanco (2003) expliquent que ce résultat par
l’existence d’une période transitoire où le respect du capital minimum n’est pas immédiat.
La taille, le risque, les coûts des opérations et la liquidité sont les principaux déterminants
testés dans le cadre du modèle de marché. Le cadre empirique proposé par Barrios et Blanco
(2003) réside dans l’intégration de l’effet « temps » dans la régression qui permet de mettre
en exergue la relation positive (dont l’intensité augmente avec le temps) entre la variable
« dummeis », qui reflète les années, et le ratio de capital. L’intensification de la concurrence
entre les banques espagnole durant la période de l’étude explique l’accroissement de la
demande en matière de fonds propres.

L’étude de Barrios & Blanco (2003) conclut que le modèle « de marché » est plus efficace
dans l’explication du levier des fonds propres bancaires, ce qui explique la détention par les
banques d’un ratio de capital qui est, en général, supérieur au minimum réglementaire.
Contrairement aux résultats de Wall & Peterson (1995) sur les banques américaines et
d’Ediz et al. (1998) sur les banques britanniques, l’optimisation de la valeur de la banque
reste le premier critère de décision, alors que la pression réglementaire ne joue qu’un rôle
marginal.

De son côté, Yu (2000) a étudié la structure de capital des banques à Taiwan. Il conclut que
es grandes banques ont un ratio de capital moins élevé que les petites banques, ce qui
confirme l’hypothèse que les grandes banques baissent leur ratio de capital jusqu’au
minimum réglementaire, même si ce niveau de capital pourrait être inférieur au niveau

120
optimal. Plus la banque est profitable, plus elle tend vers un niveau de capitalisation élevé.
Ceci souligne que les banques se financent principalement par les cash flows.

Les résultats soulignent une relation significativement positive entre le ratio de capital et la
liquidité pour les petites banques et, à contrario, significativement négative pour les grandes
banques (Yu, 2000). La liquidité est utilisée comme substitut au capital bancaire dans les
grandes banques.

D’autres auteurs ont étudié la relation entre la structure de capital de la banque et le risque
non-diversifiable. Cette relation s’avère positive dans la mesure où le capital bancaire
constitue une protection dans le cas où ce risque a lieu. Dewatripont & Tirole (1994a, b) ont
démontré qu’aussi longtemps que le risque non diversifiable n’est pas réalisé, les banques
sont incitées à la réduction de leur capitalisation jusqu’à n’être financées que par des dettes.
Deux études ont tenté de surmonter les limites de cette approche : celle de Rajan et Winton
(1995) et celle de Dowd (1996). Rajan & Winton (1995) montrent que les petites banques
mieux capitalisées peuvent réaliser une allocation des fonds propres plus efficace que les
grandes banques qui sont généralement mieux diversifiées et Dowd (1996) conclut que les
intermédiaires financiers utilisent à la fois les dettes et les fonds propres en cas de présence
du risque non diversifiable. Cependant, il faut souligner que cette conclusion de Dowd
(1996) repose sur l’hypothèse que les coûts de surveillance supportés par les actionnaires
bancaires varient en fonction de nombre.

Toutefois, les travaux empiriques que nous avons exposés sont à manier avec prudence. La
plupart sont issus d’études qui utilisent la valeur comptable des fonds propres au lieu de la
valeur de marché car les valeurs de marché ne sont souvent pas disponibles, surtout pour les
banques et les sociétés d’assurance qui disposent de titres non négociés. Ainsi, pour les
mêmes raisons, nous avons décidé de calculer le niveau de fonds propres de notre
échantillon sur la base des données comptables disponibles dans les rapports annuels publiés
et les bases de données financières.

Sous-section 2 : Hypothèses de recherche issues de la théorie financière dans le secteur


des assurances

Dans les sections précédentes, la structure de capital des sociétés financières a


principalement été abordée dans le cadre du secteur bancaire. A l’instar de ces travaux, nos

121
hypothèses de recherche appliquées, elles, au secteur des assurances sont issues du cadre
théorique global de la structure financière. Depuis le modèle fondateur de Modigliani &
Miller (1958), la variété des approches propose une multiplicité de déterminants ce qui
justifie le foisonnement des travaux sur le financement des entreprises. Les perspectives de
croissance, l’information privée détenue en possession des dirigeants ainsi que le risque
financier ou d’exploitation sont, entre autres, des éléments explicatifs des choix de
financement. Les modifications de ces choix ont un impact sur la valeur de la firme et sur la
richesse des actionnaires. En dépit du fait que les travaux aboutissent parfois à des résultats
divergents, ils soulignent tous l’importance de la structure financière. Dans notre travail de
thèse, nous voulons analyser empiriquement le pouvoir explicatif (et complémentaire) de la
théorie du compromis et de la théorie du financement hiérarchique

1. Nos hypothèses issues de la théorie du financement hiérarchique (POT)

Contrairement à la TOT, la théorie du financement hiérarchique (POT), développée


initialement par Myers (1984) et Myers & Majluf (1984), ne s’appuie pas sur une
optimisation du ratio d’endettement. Le ratio d’endettement n’apparaît plus comme un ratio
cible optimal mais comme la conséquence des décisions financières hiérarchisées passées
(Molay, 2005).

La théorie hiérarchique des sources de financement est basée sur deux principales
hypothèses :

- l’existence d’une interaction entre les choix d’investissement et les choix de financement ;

- la transmission d’une information privée au marché selon la nature du financement.

Contrairement au modèle de Modigliani & Miller (1958), le marché n’est pas parfait car
l’information est asymétrique et qu’elle engendre des coûts. L’hypothèse d’un financement
hiérarchisé proposée par Myers (1984) et la Pecking Order Theory développée par Myers &
Majluf (1984) constituent un modèle d’équilibre de prise de décision financière où, dans un
contexte d’asymétrie d’information, pour financer un investissement, l’autofinancement est
préférable à la dette, qui est préférable à une émission de fonds propres. Dans un contexte où
les entreprises sont obligées de recourir à un financement externe, la dette est toujours
préférable à l’augmentation de capital. Cette hiérarchie se justifie par la crainte qu’ont
dirigeants des sociétés sous-évaluées qu’une nouvelle émission d’actions dilue les actions

122
qui ont déjà été émises. Nous pouvons ainsi, formuler trois hypothèses relatives aux
déterminants des fonds propres :

- La croissance de l’entreprise :

Toujours dans une logique de financement hiérarchique, la croissance des entreprises les
pousse à exercer une forte demande sur les fonds générés en interne puis à faire appel à des
fonds externes pour celles qui visent un niveau de croissance élevé. Les dirigeants de ces
entreprises vont alors recourir d’abord à la dette à court terme puis à la dette à long terme
(plus sécurisée).

Les entreprises ayant une plus forte opportunité de croissance, observée par le ratio valeur de
marché des fonds propres sur leur valeur comptable (Market to book ou MTB), auront une
capacité d’endettement importante comme le souligne Myers (1977).

La croissance, mesurée par la variation du chiffre d’affaires (le montant des cotisations
émises par la société d’assurance) d’une année sur l’autre, permet de capturer l’effet de la
dynamique de croissance de la société d’assurance sur le niveau des fonds propres.

Hypothèse 1 (H1) : Les sociétés d’assurance avec fortes opportunités de croissance


favorisent l’endettement par rapport aux fonds propres. Nous supposons l’existence d’une
relation négative (-) entre la croissance et le niveau des fonds propres des sociétés
d’assurance.

- La profitabilité :

Si l’on se réfère aux travaux de Myers & Majluf (1984), l’émettre de titres non risqués ou la
constitution d’une réserve d’autofinancement par rétention de bénéfices est préférable au
recours au marché. A l’opposé des théories de l’arbitrage, le financement hiérarchique
suppose une forte relation négative entre la profitabilité et l’endettement dans la mesure où
l’augmentation de la capacité d’autofinancement permet de moins faire appel aux emprunts.
Les travaux empiriques de Harris & Raviv (1991) ; Rajan & Zingales (1995) ; Booth & al.
(2001) ont confirmé cette relation.

123
Dans une étude qu’il a menée dans le secteur bancaire, Yu (2000) a conclu à une relation
positive entre la profitabilité et le ratio de capital. Par conséquent, on pourrait supposer que
les cash flows générés devraient permettre aux sociétés d’assurance d’augmenter leur ratio
de capital.

Hypothèse 2 (H2) :
Les sociétés d’assurance les plus profitables préfèrent l’autofinancement plutôt que la dette.
Par conséquent, la profitabilité influence positivement (+) le niveau des fonds propres
des sociétés d’assurance.

- La tangibilité de l’actif du bilan :

Selon la plupart des études empiriques, la relation entre la tangibilité24 et l’endettement est
positive. Ces résultats sont cohérents avec les prédictions de la théorie du compromis : les
actifs corporels sont des garanties pour le remboursement de la dette (réduction des coûts de
faillite), ce qui offre à l’entreprise une capacité d’endettement plus grande. Parallèlement, la
relation positive entre l’actif tangible et le levier est également en phase avec la théorie du
financement hiérarchique. En effet, du fait que les actifs tangibles gardent leur valeur malgré
la liquidation de l’entreprise, ils sont un moyen de garantie pour les créanciers et permettent
la réduction des asymétries d’information. La valeur résiduelle de l’entreprise reste
importante (Harris & Raviv, 1990).

Hypothèse (H3) :
Les garanties corporelles dont dispose la société d’assurance lui permettent de réduire le
niveau du capital requis. Dans ce cadre, la relation est négative (-) entre les actifs
tangibles et le niveau de fonds propres.

2. Nos hypothèses issues de la théorie du compromis (TOT)

La thèse soutenue par la théorie du compromis ou encore de l’arbitrage (TOT) est que le
ratio optimal d’endettement d’une firme est déterminé par le compromis entre les avantages
et les désavantages de l’emprunt (Myers, 1984).

24
La tangibilité des actifs est le plus souvent mesurée par le ratio d’actifs immobilisés sur l’actif total.

124
Nous l’avons abordé précédemment, si la théorie de la neutralité de la structure de capital
suggère un niveau d’endettement très important, la théorie du compromis, quant à elle,
identifie les conditions sous lesquelles il est préférable que l’endettement soit moindre. Cette
dernière s’est progressivement construite, d’abord, par l’intégration de la fiscalité, ensuite
par la prise en considération des coûts de faillite, des coûts d’agence et de transactions et
puis par l’arbitrage entre ces déterminants. Mesurer les avantages et des inconvénients des
différentes sources de financement montre que l’impact de la structure de capital n’est pas
neutre sur la valeur de la firme (société d’assurance ou autre) et que les firmes procèdent à
un arbitrage afin d’optimiser leur passif. Nombreuses sont les études empiriques qui ont
essayé de confronter ces théories à la réalité et à l’image de la diversité des approches, des
échantillons et des méthodes statistiques utilisées, les résultats obtenus sont eux aussi
divergents (Titman & Wessels (1988) ; Rajan & Zingales (1995)). Dans les sociétés
d’assurance, pour traiter la problématique de la structure de capital, une remise en cause du
modèle de la neutralité de Modigliani & Miller (1958) s’impose dans la mesure où
l’existence-même de ces sociétés s’explique par l’existence des imperfections de marché. En
tenant compte des avantages et des inconvénients de l’une ou de l’autre source de
financement, le choix s’opère entre provisions techniques et fonds propres.

Si on note l’exclusion des sociétés d’assurance des différents travaux empiriques qui ont
essayé de valider les théories du compromis sur les firmes, cette exclusion est généralement
justifiée par la spécificité de leur bilan, l’existence des provisions techniques et la
réglementation des fonds propres. Ces éléments ont une influence significative sur les choix
des sociétés d’assurance.

A ce niveau de notre travail de thèse, nous allons reprendre les hypothèses issues de la
théorie de la structure financière de la firme, avec comme objectif la mise en évidence du
pouvoir explicatif de cette théorie dans le secteur des assurances. On fera abstraction des
externalités liées à la nature de l’activité de l’assurance et qui seront intégrées dans le cadre
type d’hypothèses.

Parmi les déterminants de la structure de capital des firmes issus des théories de l’arbitrage,
on retrouve les facteurs applicables au secteur bancaire et dont la mesure ne pose pas de
difficultés particulières.

125
- La taille :

La taille a un rôle important dans la détermination de la structure de capital d’une entreprise.


La relation entre la taille et le niveau des fonds propres des sociétés d’assurance est supposée
négative comme le laisse entendre nombre d’arguments. Les chercheurs soulignent que les
grandes entreprises sont moins sensibles à la faillite parce qu’elles ont tendance à être plus
diversifiées que les petites (Ang, Chua, & McConnell, 1982; Smith & Warner, 1979a; Smith
& Warner, 1979b). Les grandes entreprises devraient avoir recours plus de dettes que les
petites entreprises si l’on se réfère aux modèles d’arbitrage. D’après les travaux de
Berryman (1983) et Everett & Watson (1998), les prêts aux PME sont plus risqués car il
existe une forte corrélation négative entre la taille de l’entreprise et la probabilité de
l’insolvabilité. On pourrait également expliquer cela, du moins en partie, par la méfiance
des bailleurs de fonds à l’égard des petites entreprises bien que celles-ci présentent des
compétences et des opportunité de développement intéressantes Hall (1995).

De leur côté, Marsh (1982) ; Titman & Wessels (1988) soulignent l’existence d’une relation
négative la taille de l’entreprise et le taux d’endettement. Marsh (1982) avance l’idée que les
petites entreprises ont tendance à recourir fortement aux emprunts pour répondre à leurs
besoins de financement étant donné que leur accès aux capitaux est limité. Dans leurs
travaux, Titman & Wessels (1988) soulignent qu’étant confrontées à un coût plus élevé par
unité d’émission, les entreprises de petite taille comptent moins sur l’augmentation de capital
et l’émission de nouvelles actions.

A part ces quelques travaux, la majorité des chercheurs soutiennent que la relation entre la
taille et l’endettement est positive (Booth & al., 2001; Frank & Goyal, 2003; Rajan &
Zingales, 1995). On pourrait en déduire que le niveau des fonds propres des sociétés
d’assurance serait négativement lié à leur taille.

Hypothèse 4 (H4) :
Les sociétés d’assurance d’une taille importante ont besoin d’un faible niveau de fonds
propres, étant donné l’abondance des sources de financement. On peut donc supposer qu’il
existe une relation négative (-) entre taille de la société d’assurance et son niveau des
fonds propres.

126
- Le risque :

Le risque est mesuré par la variabilité des bénéfices chez Titman & Wessels (1988) et par la
volatilité des rentabilités chez Bradley et al. (1984). Pour réduire le risque de la firme et les
probabilités d’être sanctionnés par le marché, les dirigeants doivent développer des projets
viables et rentables. L’investissement est positivement lié à la dette qui, elle, décroit avec le
risque. Dans le secteur bancaire et financier, Shrieves & Dahl (1992) ; Jacques & Nigro
(1997) ; Aggarwal & Jaques (2001) ; Bichsel & Blum (2004) se sont penchés sur la question
de la relation entre le risque et le niveau de capitalisation et les résultats obtenues par les
différents auteurs s’avèrent divergents selon la mesure choisie pour le risque et la prise en
compte ou non de la réglementation prudentielle.

Hypothèse 5 (H5) :
Globalement, les variations des résultats entraînent une augmentation du coût des fonds
propres. Nous supposons donc l’existence d’une relation positive (+) entre la volatilité des
résultats et le niveau des fonds propres des sociétés d’assurance.

- Le coût de la dette :

Dans le secteur des assurances, la dette est principalement constituée des provisions
techniques et des emprunts auprès des autres établissements de crédit. Le taux d’intérêt payé
représente la valeur des coûts directs de l’endettement supportés par les sociétés d’assurance,
sachant qu’une grande partie de la dette est constituée des provisions techniques. Malgré
l’existence des charges de gestion additionnelles, ces provisions sont considérées comme la
ressource financière la moins chère en termes de taux d’intérêt effectif. Les sociétés
d’assurance sont ainsi encouragées à détenir moins de capital dans la mesure où
l’endettement reste moins cher. Il faut toutefois préciser que dans la pratique, il existe des
limitations à l’endettement (suivi du ratio de solvabilité, augmentation de la classe de risque,
etc.) et que, de manière générale, les sociétés d’assurance ne souhaitent pas se signaler au
marché par un ratio d’endettement très différent du ratio moyen du secteur. On pourrait donc
supposer une relation positive entre le coût de la dette et le niveau des fonds propres dans les
sociétés d’assurance.

127
Hypothèse 6 (H6) :
Le coût faible de la dette dans le secteur des assurances, essentiellement constituée
des engagements envers les assurés, entraîne la diminution du ratio de capital. On suppose
l’existence d’une relation positive (+) entre le coût de la dette et le niveau des fonds
propres des sociétés d’assurance.

- La liquidité :

Grâce à la liquidité, les sociétés d’assurance peuvent faire face aux dépenses à court terme et
aux éventuelles indemnisations des assurés ou aux retraits. La liquidité permet la prise en
compte de l’interaction entre l’actif et le passif des sociétés d’assurance. La théorie suggère
qu’avec des ratios de fonds propres élevés, les sociétés d’assurance peuvent fonctionner
efficacement avec moins de liquidités car le capital limite la fragilité financière et couvre le
risque de multiplication des éventuels sinistres à dédommager et/ou des retraits des
épargnants (Diamond & Dybvig (2000); Diamond & Rajan (2000). A ce niveau, on peut
parler de substituabilité des fonds propres et des actifs liquides. On suppose donc une
relation négative entre le degré de liquidité de la société d’assurance et le niveau de ses fonds
propres.

Plus elle est liquide, plus la société d’assurance dispose de fonds pour couvrir ses besoins
financiers futurs éventuels. Grâce à leur modèle, Diamond & Dybvig (2000, 2008);
Diamond & Rajan (2000) ont montré que le montant optimal des fonds propres des sociétés
d’assurance est celui permettant d’optimiser l’arbitrage entre leur création de liquidité, leurs
coûts de la faillite et leur capacité de paiement en faveur des assurés.

Hypothèse 7 (H7) :
Une société d’assurance liquide a besoin de moins de fonds propres qu’une société
d’assurance peu liquide. Dans ce cadre, la relation entre le degré de liquidité et le niveau
des fonds propres des sociétés d’assurance est négative (-).

- Le coût des fonds propres :

Si l’on raisonne selon une logique d’arbitrage, la firme qui a un niveau de profitabilité élevé
serait davantage tentée de recourir à l’endettement plutôt qu’aux fonds propres. Ce choix
trouve son sens dans la déductibilité des intérêts des emprunts qui améliore la rentabilité des

128
fonds propres (Ooi, 1999) et dans la facilité d’accès au crédit (la rentabilité passée peut être
utilisée comme une garantie de la rentabilité future).

Si la relation entre la structure du capital et la rentabilité est d’un poids notable chez toutes
les entreprises, le secteur des assurances est particulièrement sensible aux changements du
levier financier car le niveau des capitaux propres est faible par rapport au total des actifs.
Cette sensibilité fait que la structure du capital des sociétés d’assurance est très réglementée.
Dans ces sociétés, le choix d’un faible niveau de capitaux est surtout justifié par le faible
coût des provisions techniques qui sont assimilables à des dettes. Les sociétés d’assurance
ont alors intérêt à minimiser le montant des capitaux propres investis afin de maximiser le
rendement de leurs capitaux propres. Le fait d’opter pour des provisions techniques peut
également être justifié par l’existence du système de réassurance qui incite les assurés à ne
pas surveiller les sociétés d’assurance. Cette attitude accorde aux dirigeants une marge de
manœuvre plus grande, jusqu’à profiter de l’aléa moral.

Hypothèse 8 (H8) :
Les sociétés d’assurance rentables souhaitent profiter de l’effet de levier résultant de
l’endettement et des engagements vis-à-vis des assurés. Nous supposons donc que le coût
des fonds propres influence négativement (-) le niveau des fonds propres.

Force est de constater qu’en dépit de la richesse des travaux s’intéressant à la structure de
capital des firmes, les entreprises du secteur financier restent le plus souvent exclues des
échantillons étudiés.

La principale raison réside dans la spécificité comptable des entreprises financières (sociétés
d’assurance, banques, fonds de pension, etc.) où la gestion du bilan se limite à la gestion des
risques et l’allocation des fonds propres nécessaire à la couverture de ces risques (asset
liabilities management) (Gründl & Schmeiser, 2007; Myers & Read Jr, 2001).

Pour les compagnies d’assurance, le débat sur la structure de leur capital date en grande
partie des travaux de la fin des années quatre-vingt-dix suite à l’instauration du ratio de
solvabilité. Ces travaux ont tenté de vérifier l’applicabilité de la théorie financière aux
sociétés d’assurance et concluent que les déterminants de la structure de capital émanent de
deux principales théories : la théorie du compromis et la théorie du financement
hiérarchique. Des travaux ont également mis en évidence l’importance des facteurs

129
spécifiques aux sociétés d’assurance tels que la liquidité, la réassurance et la réglementation
du capital. Ainsi, en l’absence de la réglementation, le niveau des fonds propres des sociétés
d’assurance est influencé principalement par la liquidité de la société d’assurance, sa
profitabilité, son risque…

La revue de littérature que nous avons effectuée nous a permis de construire nos hypothèses
de recherche. Ces dernières nous permettront de vérifier empiriquement le pouvoir explicatif
de la théorie financière de la structure de capital dans le secteur des assurances.

130
SECTION II : INTRODUCTION DU CADRE PRUDENTIEL REGLEMENTAIRE
DANS LA DETERMINATION DE LA STRUCTURE FINANCIERE

Dans le secteur des assurances, chaque poste du bilan est soumis à une réglementation
spécifique :

Figure 4. Périmètre de la réglementation prudentielle dans le secteur des assurances

Source : l’auteur

Sous-section 1 : L’impact des exigences de fonds propres


La réglementation des sociétés d’assurances se justifie par le même courant de pensée qui a
permis d’expliquer l’existence de l’intermédiation financière.

Les imperfections de marché (coûts de transactions, information privative) offrent aux


sociétés d’assurance et aux banques la possibilité de bénéficier, sous certaines conditions,

131
d’avantages comparatifs par rapport aux marchés dans le financement des projets par la
collecte des primes d’assurance et des dépôts (offre de liquidité).

Si l’existence d’un système de réassurance permet de réduire la méfiance des assurés (du fait
du financement des actifs illiquides par des ressources liquides) et de les mettre en
confiance, il peut aussi occasionner un comportement d’aléa moral étant donné que ce
système pousse les assurés à réduire la surveillance des sociétés d’assurance. Ce genre de
risque a imposé la réglementation du secteur des assurances.

Les travaux ayant porté sur la réglementation dans le domaine de l’intermédiation financière
ont eu pour axe principal la définition d’une réglementation optimale qui assure la solidité du
système financier (banque/assurance) sans constituer une contrainte à l’efficacité des
institutions financières. Les autorités ont alors opté pour une réglementation de la structure
financière de la société d’assurance en imposant, notamment, un coefficient de capitalisation
minimum. La directive Solvency I a instauré un capital minimum en 1999.

1. Mise en place de la marge de solvabilité et ses composantes

Afin de limiter les investissements dans les actifs à un fort risque de défaut ou de très faible
liquidité, les pays de l’OCDE ont approuvé une liste d’investissements que les sociétés
d’assurance peuvent réaliser. Dans ce sens, des plafonds ont été fixés pour certaines
catégories d’investissement afin de maintenir un minimum de diversification. On retrouve
ces plafonds dans l’article R332.3 du code des assurances.

Le deuxième poste concerne la marge de solvabilité. Définie dans l’article R334.1 du code
des assurances, elle permet de déterminer si une société d’assurance peut continuer à assurer
financièrement l’ensemble de ses activités. Pour une société d’assurance-vie par exemple,
elle est calculée en additionnant le capital social versé, la moitié de la fraction non versée du
capital, toutes les réserves, les bénéfices reportés, sur justification 50 % des bénéfices futurs
(bénéfice de l’année multiplié par un facteur représentant la durée résiduelle moyenne des
contrats en portefeuille) et les plus-values latentes (article R334.11 ). Selon les normes
européennes, les sociétés d’assurance-vie et de capitalisation et mixtes sont obligées de
constituer une marge de solvabilité minimale de 4% des provisions mathématiques pour les
contrats établis en Euro et de 1% pour les contrats en unité de compte. Ce minimum est de
16 % des cotisations annuelles ou de 23 % du montant moyen des sinistres des trois derniers
exercices (si celui-ci est plus élevé pour les sociétés d’assurance de dommages). En se

132
reportant aux données de la FFSA, la marge de solvabilité moyenne du marché français est
en hausse pour représenter 10,8% des provisions mathématiques (vie) et 109,2% (non-vie)
pour l’année 2013. Ceci équivaut à près de 6,8 fois la marge réglementaire pour les sociétés
d’assurance dommages et 3,1 fois la marge minimale réglementaire pour les sociétés
d’assurance-vie.

Afin de garantir le respect de ces exigences, la commission de contrôle des assurances


exerce une surveillance permanente orientée vers un contrôle de proximité, personnalisé et
proche des entreprises, en validant par exemple la valeur des UC (article R334.2 du code des
assurances). Dans le cas où la dégradation de la santé financière de la société d’assurance
met en danger les assurés, la commission de contrôle des assurances dispose d’une liste de
sanctions à appliquer. En effet, la loi n° 98-546 du 02/07/1998 définit la rédaction et la
communication aux commissaires aux comptes d’un rapport de solvabilité à la clôture de
chaque exercice qui est. Ce « rapport expose les conditions dans lesquelles l’entreprise
garantit, par la constitution de provisions techniques suffisantes dont les modalités de calcul
et les hypothèses retenues sont explicitées et justifiées, les engagements qu’elle prend à
l’égard des assurés, rappelle les orientations définies en matière de placements, présente et
analyse les résultats obtenus et indique si la marge de solvabilité est constituée
conformément à la réglementation applicable ».

Le troisième poste de cette réglementation spécifique aux sociétés d’assurance concerne le


montant des fonds propres ou capitaux propres Il doit être égal au sixième du montant
réglementaire de la marge (article R334.15 du code des assurances). Les fonds propres des
sociétés d’assurance françaises dépassent les 100,4 Mds d’Euros en 2013, soit 3,7% des
provisions mathématiques pour les sociétés d’assurance-vie et 59,7% des cotisations pour les
sociétés d’assurance dommages (FFSA, 2014).

Le dernier poste de cette réglementation concerne le montant des actifs admis en


représentation. Ce montant doit excéder celui des engagements enregistrés au passif de
l’assureur (article R332.1). Même si le code des assurances ne définit pas les actifs qui ne
sont pas admis en représentation, il faut comprendre que ce sont par défaut les placements
qui ne sont pas visés dans l’article R332 et infra, à savoir, les placements immobiliers cotés
ou localisés dans un Etat non-membre de l’OCDE, les obligations et parts de fonds communs
de créances non cotées, les prêts sans garanties des Etats membres de l’OCDE et les prêts
consentis à des personnes morales ou physiques non domiciliées dans un Etat de l’OCDE.

133
2. Le cadre réglementaire de la structure du capital

La question de la régulation du secteur des assurances a suscité de vifs débats et les points de
vue sur le sujet ne peuvent faire l’objet d’un consensus car les intérêts des dirigeants, des
autorités de régulation et des assurés sont loin d’être convergents. Cependant, une chose est
sure, une régulation excessive qui prohiberait toute prise de risque de la part des sociétés
d’assurance les déposséderait de leur légitimité.

En d’autres termes, le rôle de la réglementation n’est pas d’interdire aux sociétés d’assurance
de prendre des risques mais de les inciter à avoir une santé financière suffisamment solide
pour y faire face, notamment en ayant un niveau de capitalisation suffisant selon leur profil
de risque.

Pour compléter la liste des risques auxquels les sociétés d’assurance sont exposés (voir
chapitre I), nous aborderons les risques liés au secteur financier et à sa spécificité.

2.1. Les risques dans le secteur financier

La régulation du système des assurances a pour objectif la solvabilité de chaque société


d’assurance afin de réduire la probabilité du risque systémique. Ce cadre permet de lutter
contre les politiques de couverture ou de prêts hasardeuses qui les poussent les institutions
financières et le secteur vers des situations de crise.

De manière générale, on peut définir le risque comme la probabilité de perte sur un actif
donné dans un horizon de temps donné et avec une marge d’erreur donnée.

Dans le secteur des assurances, on peut distinguer trois types de risques liés à l’activité: le
risque de taux d’intérêt, le risque de marché et le risque opérationnel. Face à la réalisation
d’un ou de plusieurs types de risques, l’incapacité de la société d’assurance à couvrir les
pertes induit des risques d’insolvabilité et de liquidité.

- Le risque de marché

Les années quatre-vingt ont connu le développement de nouveaux instruments financiers qui
ont profondément influencé et modifié l’activité de l’assurance. Confrontées à un nombre
croissant de concurrents et donc à la diminution de la marge d’intermédiation, les sociétés
d’assurance se retrouvent devant l’impératif de se tourner vers les produits à plus-value

134
importante. Ces produits permettent de faire face aux différents risques mais ne ils
n’apparaissent pas au niveau du bilan.

Le risque de marché peut être défini comme le risque de perte ou de changement défavorable
de la situation financière en résultat (directement ou indirectement) de fluctuations affectant
la valeur du marché des actifs, des passifs et des instruments financiers.

- Le risque de taux d’intérêt

Il dérive de la « variation non anticipée des taux d’intérêt », et de fait des prix de marché des
actifs et des passifs lorsqu’ils sont échangés, Tarazi (1996) ;Madiès (2006). Ce risque a un
impact en termes de liquidité pour la société d’assurance, mais aussi en termes de risque de
crédit. C’est notamment ce risque qui est à l’origine des difficultés des caisses d’épargne
Américaines. En effet, la déréglementation des marchés hypothécaires américains poussée la
montée des taux a provoqué une véritable perte nette de ressources pour les Savings & Loan
Associations.

Il est à noter, par ailleurs, que dans le secteur bancaire, le lien qui existe entre risque de taux
d’intérêt et risque de crédit, au centre duquel la variation de la valeur de marché du collatéral
est primordiale. Le risque de taux d’intérêt a un impact sur la solvabilité de l’emprunteur, et
plus particulièrement sur ce qui pourra être récupéré par la banque en cas de faillite du
débiteur, via la valeur du collatéral. En effet, la mise en place du collatéral est essentielle lors
de l’évaluation ex-ante du risque de crédit. Or, qui dit montée des taux, dit diminution de la
valeur du collatéral (s’il s’agit de titres), et donc augmentation du risque de crédit. La
variation de la valeur du collatéral, suite à des variations de prix d’actifs, est en partie au
centre de la dernière crise bancaire Américaine : La crise de l’immobilier a ainsi multiplié
les créances douteuses (non remboursement des prêts aux promoteurs immobiliers) auprès
des établissements de crédit, alors que dans le même temps, la chute des prix des actifs
immobiliers a entraîné la baisse de la valeur du collatéral. En outre, si les taux d’intérêt
augmentent, il devient plus couteux pour la banque de se financer, alors même que les prêts,
accordés avant cette montée des taux, le sont en général à taux fixe. On trouve ici les coûts
de remplacement propres à l’analyse du risque d’illiquidité.

135
- Le risque opérationnel

Le risque opérationnel est associé au « risque de pertes directes ou indirectes d’une


adéquation ou d’une défaillance attribuable à des procédures, personnes, systèmes internes
ou à des événements extérieurs » (BIS, 2001a, p.24). Il existe d’autres types de risques
comme le risque technique et le risque de fraude (la première cause des faillites dans le
secteur des assurances).

136
- Risque d’insolvabilité et d’illiquidité

La frontière entre l’insolvabilité et l’illiquidité nécessite quelques précisions. Une société


d’assurance est considérée comme insolvable si la valeur de ses actifs est inférieure à celle
de ses passifs, en d’autres termes, sa valeur nette est négative. En revanche, elle est
considérée comme illiquide lorsqu’elle ne peut pas rembourser ses créanciers dans les délais
convenus car ses actifs sont illiquides comparativement à ses dettes (essentiellement
exigibles à vue) et qu’en période de tensions (demande de retraits massifs dans le cadre des
assurances vies ou d’indemnisations en cas de sinistres de grande ampleur), elle ne peut pas
récupérer la totalité de la valeur de ses actifs. On voit ainsi que la limite entre les deux
concepts est très ténue, et que l’information joue un rôle central. D’autre part, les chocs de
liquidité étant l’une des principales sources de risque systématique et de crises financières,
les sociétés d’assurance ont toujours été tentées de trouver de nouvelles méthodes de gestion
de l’illiquidité. Ainsi, un choc d’illiquidité affectant un établissement financier peut se
propager à d’autres sociétés d’assurance ou firmes bancaires sans pour autant que celles-ci
aient été affectées par le choc initial : Parce qu’elles sont supposées moins robustes (moins
solvables), elles sont obligées de vendre rapidement leurs actifs à des prix cassés (fire sales),
du fait de la crainte des créditeurs.

Dans le secteur bancaire, les modèles de ruées bancaires tentent de donner une première
explication, (Diamond & Dybvig, 1983) et ses prolongements. Cependant, celle-ci n’en
demeure pas moins incomplète. La banque, par son activité de transformation, est en
situation d’illiquidité potentielle permanente. Elle cherche toutes les solutions qui s’offrent à
elle. L’une d’elles consiste à transformer des prêts illiquides en titres cessibles. Mais le
marché secondaire de ce type de titres n’est pas assez profond pour rendre minimum les
coûts de transformation et permettre de fournir la liquidité nécessaire, par ce qu’il se heurte à
un problème majeur, à savoir qu’un prêt est conclu entre un emprunteur et différents
investisseurs potentiels. Cependant, les banques, en augmentant leurs passifs, transforment
plus vite la gestion du risque d’illiquidité en risque de solvabilité, puisque leur levier
d’endettement augmente sans que la liquidité des actifs ne varie.

137
2.2. L’évaluation des risques

- Evaluation par les modèles internes

La volatilité des notations externes et leur impact procyclique sur le capital des institutions
financière ont poussé la communauté scientifique, le régulateur et les institutions financières
à porter une réflexion sur l’intérêt que pourraient avoir des modèles spécifiques à chaque
institution financière, selon son profil de risque. A partir de là, plusieurs travaux de
recherche se sont intéressés aux modèles internes de notation.

L’atout principal des modèles internes est qu’ils prennent en considération des informations
propres aux clients de l’institution financière, c’est à dire non accessibles à des acteurs
externes (agences de notation). La précision qu’offrent les modèles internes permet de
réduire la différence entre le capital réglementaire et le capital économique (Karacadag &
Taylor, 2000). Cependant, d’après une étude effectuée par la réserve fédérale et une enquête
de la BRI sur les systèmes de notation interne, il s’avère que ces derniers suscitent de
sérieuses interrogations sur leur utilisation dans la détermination du capital réglementaire
(BRI, 2000; Treacy & Carey, 1998).

Dans le secteur bancaire, il existe plusieurs types de modèles de notations internes qui
diffèrent selon les banques (Karacadag & Taylor (2000). Une étude sur 100 petites,
moyennes et grandes banques américaines conclut que les systèmes de contrôle interne des
petites et moyennes banques ont les mêmes caractéristiques que ceux des grandes banques à
sauf qu’ils sont moins sophistiqués (English & Nelson, 1998). Il en ressort aussi que les
modèles utilisés par les petites et moyennes banques intègrent des éléments de la notation
externe de l’emprunteur. Cela suppose qu’il existerait une corrélation entre la notation
interne et externe. Enfin, l’étude d’English & Nelson (1998) souligne le caractère
procyclique de la notation interne dû à son horizon temporel limité.

Ainsi, en périodes de crises, les banques rendent leur système de notation des crédits plus
sévères, ce qui pourrait éliminer quelques emprunteurs solvables qui n’ont pas la possibilité
de payer un taux d’intérêt élevé et attirer des emprunteurs risqués qui acceptent un taux
d’intérêt élevé. A contrario, en période de croissance, les banques accordent plus facilement
des crédits ce qui augmenterait leurs risques futurs.

138
- Evaluation par les agents de notation et autorités prudentielles

Les agences de notation envoient aux investisseurs un signal sur la qualité de l’émission. Ce
signal, qui prend la forme de notation, conditionne le coût de financement pour les
entreprises émettrices. Les agences de notation se basent sur plusieurs critères pour valoriser
le risque de la société. Si elle souhaite être notée, un entreprise présente un dossier avec les
statuts, les éléments comptables et légaux des cinq derniers exercices, les éléments
comptables prévisionnels et toute indication sur la nature de l’opération financière notée
Karyotis (1995, 1997). L’agence adopte alors une approche stratégique de la situation de
l’entreprise (risque du secteur, position sur le marché, efficacité technique, efficacité
commercial) et cela change selon la nature du titre émis, son terme et le secteur d’activité.

L’agence de notation analyse, de manière régulière, les informations financières et


comptables des entreprises afin de réviser, si nécessaire, qui la note qui leur a été attribuée.
Dans le cas d’une compagnie d’assurance, la notation du risque s’appréciera par la sensibilité
au cycle de l’assurance, la diversification de l’activité et la solidité des actifs financiers. Pour
ce qui est du risque, il est analysé par type d’activité (assurance-vie, IARD, assurance
collective…).

Sous-section 2 : La mise en place d’un niveau réglementaire de fonds propres

Nous l’avons souligné dans le chapitre introductif, les autorités de régulation ont été
amenées à proposer des solutions pour limiter les possibilités de réalisation du risque
systémique et ses coûts potentiels. Nous allons maintenant aborder les formes possibles de la
réglementation prudentielle et son cadre général.

1. Les déterminants du niveau de fonds propres exigé par la régulation

Il est tentant de considérer que la meilleure manière d’éviter les problèmes liés à la fragilité
du bilan de la société d’assurance (illiquidité) et aux comportements opportunistes qui en
résultent des asymétries d’information (aléa moral par exemple), serait de scinder la société
d’assurance en plusieurs unités (gestion des sinistres, activités de marché…). Cependant,
dans la pratique, la mise en place d’une telle décomposition rencontre des limites notamment
en matière de la capacité des marchés à financer l’économie réelle. Pour éviter toute
contraction des financements qu’apportent les sociétés d’assurance à l’économie réelle et son

139
impact sur l’économie entière, la réglementation peut prendre aussi la forme de ratios
« normatifs » de capitalisation. L’objectif étant d’imposer aux sociétés d’assurance de
détenir un niveau convenable des fonds propres.

1.1. Encadrement et limitation des activités financières

Bien que l’idée de la séparation des activités des intermédiaires soit née aux Etats-Unis dans
les années 1930 suite à la crise de 1929, elle a été principalement étudiée à la fin des années
1980.

En allant jusqu’au bout de ce raisonnement, les institutions financières prendraient alors la


forme d’un holding qui gère un ensemble d’entités spécialisées et indépendantes : l’octroi du
crédit se ferait par une entité qui se finance exclusivement par les fonds propres et la collecte
des dépôts serait assurée par une autre unité qui fait des placements liquides. L’intérêt de
cette distinction éviterait aux déposants de supporter les risques pris par les dirigeants suite à
la pression des actionnaires.

Pour les banques qui financent leur activité avec les octrois de prêts à long terme, elles
n’auraient pas le droit de collecter des dépôts et se financeraient principalement par la
collecte des fonds sur les marchés financiers et par l’endettement non garanti par un
organisme public.

Parallèlement, les banques qui collectent les dépôts seraient obligées de constituer leurs
actifs exclusivement de titres parfaitement liquides non exposés aux risques de défaut et
couverts contre le risque du taux d’intérêt.

1.2. Les ratios des fonds propres

Si imposer aux sociétés d’assurance un financement par fonds propres uniquement


permettrait de limiter leur prise de risque et les protéger contre les retraits ou les
dédommagements massifs, cette solution nie les fondements mêmes de ce type d’institutions
financières. Il serait donc plus adapté de ne leur imposer qu’un financement partiel par les
fonds propres mesuré par un ratio.

Il existe deux options possibles : le ratio d’endettement appelé Gearing Limit Ratio (GLR) et
le ratio dit de « solvabilité » (ou de « couverture des risques »).

140
Le Gearing Limit Ratio (limite inférieure des fonds propres ou limite supérieure
d’endettement) compare les fonds propres au total de l’actif (Bichsel et Blum (2005)). Les
travaux de Estrella et al. (2000) ; Thomson (1991) montrent qu’il existe une relation positive
entre le taux d’endettement ou « Gearing Limit Ratio » et la possibilité de faillite de la
banque, avec, toutefois, une ambiguïté de la relation. Si ce ratio a l’avantage de la simplicité
liée à son calcul, il a l’inconvénient de mettre sur un même plan des activités ayant des
niveaux de risques hétérogènes.

Le ratio dit de « solvabilité » ou de « couverture des risques » vient répondre aux faiblesses
du « Gearing limit ratio ». Il rapporte les fonds propres de la banque à l’ensemble des actifs
pondérés par un coefficient. Dans le cadre réglementaire, on parle de normes de fonds
propres pondérés en fonction des risques ou « Risk-Weighted Capital Requirements »
(RWCR). L’objectif principal est d’inciter les institutions financières à corréler positivement
leur prise réelle de risque et leur niveau de capitalisation en évitant ainsi les possibilités
d’arbitrage permises par le GLR. Toutefois, les méthodes d’évaluation des risques sont
variées et elles peuvent changer d’une banque à une autre selon la taille et le degré de
sophistication de modèles internes mis en place.

Théoriquement, pour pousser les banques à augmenter leur capitalisation, l’imposition d’un
ratio de capital pondéré aux risques pris par l’institution financière serait une mesure plus
adéquate et plus adaptée qu’une simple limitation du niveau d’endettement indépendamment
du risque. Précisons toutefois que cette mesure peut être détournée par les institutions
financières grâce à la pratique de l’arbitrage réglementaire.

1.3. Le suivi du niveau de la liquidité

L’une des principales préoccupations des autorités de surveillance et des dirigeants reste le
suivi de près de la liquidité car des problèmes à ce niveau peuvent se transformer en
problèmes d’insolvabilité, même lorsque l’institution présente une bonne santé financière.

Ainsi, le régulateur a le choix entre deux types de mesures :

- le ratio : actifs liquides/actif total. Cette mesure ne prend en considération que les actifs,
c’est-à-dire qu’elle ne dépend pas de l’exigibilité du passif.

141
- le ratio : Actif liquides/passifs liquides. Ici, la liquidité des actifs est liée à l’exigibilité du
passif.

Les autorités de régulation ont fait le choix d’imposer ce deuxième ratio aux institutions
financières. Ces dernières doivent donc détenir un ratio au minimum égal à 1, sachant que
les actifs liquides sont pondérés selon leur degré de liquidité (0, 20, 30 ou 100%).
Cependant, Venard (2001) démontre que l’imposition d’un tel ratio aux banques pose
quelques problèmes pratiques.

D’une part, il est basé sur la définition juridique des actifs bancaires liquides alors que la
réalité économique de ces actifs peut être différente de leur évaluation juridique. D’autre
part, le niveau d’imposition est difficile à déterminer car un ratio très élevé peut influencer
négativement la rentabilité des banques alors qu’un ratio très faible pourrait rendre la
réglementation inefficace.

Généralement, il n’existe donc pas de normes de transformation globale mais l’obligation de


fournir aux autorités des éléments de mesure détaillés (échéancier du bilan) ou synthétiques
(ratios), Freixas et Rochet (2008).

Les informations détenues par les autorités sur la liquidité des institutions financières leur
permet d’anticiper les problèmes de liquidité qui peuvent survenir, d’apprécier les
échéanciers à l’avance (besoins ou les excédents des établissements) et de déterminer leurs
besoins et envisager des interventions à l’échelle individuelle d’une seule institution ou
collective en injectant de la liquidité.

2. Impact de la réglementation prudentielle et intégration de la normalisation


comptable

L’objectif principal de la réglementation en matière des fonds propres est de maintenir la


stabilité du système financier et de garantir la solvabilité des sociétés d’assurance sans
limiter leur efficacité et leur rentabilité. On note, depuis l’imposition du ratio de fonds
propres réglementaires, une augmentation du capital réglementaire des sociétés d’assurance.
Toutefois, il est difficile de distinguer l’influence de la réglementation de celle de la
discipline de marché ou de la conjoncture économique.

Lothar (2005) estime que l’adoption des normes IFRS est un grand défi pour les sociétés
d’assurance. En normes IAS-IFRS, la valeur du passif est fixée à partir de la valeur du passif

142
de rachat du contrat, c'est-à-dire l’épargne cumulée par l’assuré à la date de l’inventaire. Le
maintien de cette valeur rend donc le passif des sociétés d’assurance-vie insensible aux
variations de taux d’intérêt. Si les taux augmentaient, la dette de la société d’assurance vis-à-
vis de ses créanciers resterait invariable. Les actifs, notamment obligataires, détenus pour
couvrir les engagements sont évalués en valeur de marché. Suite à une hausse du taux
d’intérêt, de fortes moins-values latentes seront constatées et provoqueraient la faillite des
sociétés d’assurance vie. On constate don que le lien actif-passif est mal reconnu par les
normes IAS. Depuis l’adoption des normes IAS-IFRS, une amélioration de la qualité de
l’information et de la communication financières, et notamment de l’aspect gestion actif-
passif, (Tosetti, Paris, Paslky, & Le Vallois, 2003). Désormais, les bilans des sociétés
d’assurance et notamment les engagements sont évalués en « fair value »25.
Cette méthode présente l’avantage de mettre en évidence les véritables ajustements de l’actif
et du passif et donc d’accentuer les différences entre les gestionnaires selon le degré de
risque qu’ils acceptent de prendre. Les ajustements doivent être poursuivis jusqu’à
l’obtention de la « Full fair value », qui intègre le lien entre l’actif et le passif, et qui prend
en compte les cash flows prévisionnels.

25
La fair value ou la juste valeur représente le prix auquel deux parties professionnelles compétentes et
informées accepteraient d’échanger le portefeuille d’engagements à l’instant (Palsky, 2003).

143
Sous-section 3 : La mise en place d’un ratio de fonds propres et ses impacts sur la
structure financière des sociétés d’assurance

Les capitaux propres sont par définition différents des autres sources de financement
auxquelles l’entreprise pourrait faire appel. Ils permettent d’atteindre les objectifs de
croissance de la firme tout en garantissant le changement de dimension de l’entreprise.
Ainsi, Colasse (1982) remarque qu’une augmentation du niveau des fonds propres appelle à
se poser quelques questions :

- offre-t-elle à l’entreprise de nouveaux moyens d’actions, réels ou monétaires ?

- modifie-t-elle dans l’immédiat son équilibre financier ?

Par ailleurs, Harris & Raviv (1990) ont montré que si l’augmentation de capital est la seule
source de financement à la disposition des dirigeants, il existera alors un équilibre révélateur,
car une entreprise performante renoncera à investir, une autre entreprise disposant d’un
projet de qualité inférieure adoptera la politique contraire. Par conséquent, étant donné qu’il
en résulterait un manque à gagner pour l’entreprise performante, elle pourrait dans ce cas,
préférer opter pour un autre mode de financement plutôt que de renoncer à l’investissement.

Les sociétés d’assurance peuvent considérer l’imposition d’un ratio minimum de capital
comme une contrainte à leur efficacité. De ce fait, toute augmentation de capital, pour être
conforme à la réglementation, serait accompagnée d’une recomposition des actifs et donc un
changement du profil de risque pour assurer une rentabilité financière suffisante aux
actionnaires.

1. Objectifs du capital économique

Afin de satisfaire les actionnaires, les dirigeants auront pour principal objectif la
maximisation de la rentabilité du capital investi. En effet, la rentabilité dépend négativement
du volume du capital investi (la rentabilité est forte quand le capital émis est faible), et la
recherche constante de rentabilité permet de mettre en place une allocation optimale du
capital. Cet objectif pourrait se révéler en contradiction avec ceux des autorités prudentielles
et des agences de notation, dans la mesure où les deux acteurs apprécient l’existence d’un
montant de capital élevé, d’une gestion interne de qualité, d’un profil de risque adéquat et

144
d’une diversification judicieuse. Par conséquent, le capital économique constitué doit
combiner la réalisation de plusieurs objectifs complémentaires, tout en préservant la
rentabilité de l’institution financière : l’évaluation de la rentabilité corrigée du risque, la
gestion de portefeuille et le pilotage stratégique des activités.

- Le premier objectif concerne l’évaluation de la rentabilité de la société d’assurance


corrigée du risque qui s’obtient en calculant le rendement au risque sur le capital
appelé RAROC (Risk Adjusted Return on Capital) ou bien en calculant la valeur
économique ajoutée appelée EVA (Economic Value Added ). Ces deux techniques
(très utilisées dans le secteur financier) permettent de mesurer le rendement d’une
activité du portefeuille en ajustant le montant des fonds propres engagés avec le
niveau de risque encouru. Le niveau de capital économique obtenu permet
d’apprécier la rentabilité financière de chaque activité en rapportant les bénéfices
attendus aux fonds propres nécessaires pour couvrir celles-ci ;

- le deuxième objectif découle du premier, car une fois le processus de détermination


du niveau de capital économique terminé et la rentabilité corrigée du risque calculée,
la société d’assurance peut donc procéder à une comparaison des performances
réelles de chaque activité et gérer ainsi son portefeuille d’activités de façon optimale.
Dans cette logique, le capital économique ainsi déterminé permet donc à la société
d’assurance de réaliser un arbitrage entre ses différentes activités afin d’optimiser
l’utilisation des fonds propres et piloter stratégiquement les activités. Par conséquent,
l’approche dite de fonds propres économiques encourage souvent les dirigeants à
réaliser de possibles limitations ou des cessations des activités les moins rentables et
qui demandent un niveau de fonds propres très élevé. (même si parfois fort
rémunératrices). Dans cette optique, l’adoption d’une telle vision permet aux sociétés
d’assurance d’avoir une vision prudente et performante de la gestion des métiers des
sociétés d’assurance, ce qui rend cette pratique comme étant l’une des branches de
leurs activités ;

- le troisième objectif du capital économique consiste à mener un pilotage stratégique


de la politique financière de la société d’assurance, basée sur une allocation optimale
des fonds propres en fonction des différentes activités exercées et des produits
proposés.

145
2. Les techniques d’appréciation du capital économique

Plusieurs instruments sont utilisés pour gérer les fonds propres économiques.

Le ROE (Return On Equity) : considéré comme étant l’un des principaux indicateurs
financiers, ce ratio est habituellement utilisé pour mesurer la rentabilité financière d’une
entreprise. Cet indicateur est mesuré en faisant le rapport entre le résultat net et les capitaux
propres apportés par les actionnaires. Il a pour objectif d’apprécier la capacité d’une

entreprise à générer des profits :

La plupart des recherches antérieures ont utilisé la rentabilité financière mesurée par :

ROE 1 = , comme variable dépendante dans l’analyse des


déterminants de la structure financière de l’entreprise.

Cependant la mesure comptable des fonds propres est un indicateur insuffisant du risque.
Pour l’améliorer, il est possible de remplacer les fonds propres par une mesure du Capital
Economique affecté à une unité d’activité en particulier. Ainsi, l’utilisation de l’indicateur
ROC (Return on Capital) apporte une première évaluation de l’arbitrage
« Rendement/Risque » par unités de production :

ROC = ROE 2 =

La méthode RAROC est née aux Etats-Unis au sein de la Bankers Trust dans les années
1970 et a été ensuite diffusée dans le secteur bancaire en France. Elle est présentée comme
« un arsenal supplémentaire pour les responsables afin d’améliorer la gestion du couple
rentabilité/risque des activités bancaires ». La robustesse de la structure de la méthode
RAROC permet un déploiement contrôlé des fonctions sous-jacentes à tout instrument de
gestion. RAROC découle directement du calcul du ROE et est défini comme :

RAROC =

On peut calculer le RAROC pour les fonds propres comptables ou le capital économique. On

peut donc avoir : =

146
et = .

L’analyse RAROC est à l’origine de la répartition du capital entre les différentes unités de
production, c’est donc un instrument adéquat pour la gestion « top-down » de la politique
financière en assurance.

Il y a aussi la Valeur Economique Ajoutée (EVA) qui est le troisième instrument de la


gestion des « fonds propres ». Elle est est définie comme suit :

EVA = Espérance de rendement du portefeuille – Coût du capital

L’espérance de rendement du portefeuille est corrigée par le coût du capital qui est constitué
de deux paramètres : le taux du coût du capital multiplié par la quantité de capital. Ce
deuxième élément peut être représenté par les fonds propres comptables ou le Capital
Economique. Nous avons donc :

= Espérance de rendement – coût des fonds propres

= Espérance de rendement – coût du capital économique

La méthode RAROC (et EVA) constitue un outil de la Gestion Actif-Passif pour gérer le
risque. Elle porte sur un segment de clientèle, un secteur d’activité, une agence ou une
division et est utilisée par les cellules de management du risque. L’approche repose sur les
apports de la théorie moderne du portefeuille de Markowitz (1952) appliquée au bilan
bancaire.

3. Fonds propres et gestion des risques

Les travaux théoriques et empiriques qui ont analysé la réglementation ont longtemps ignoré
les spécificités des institutions financières (Couppey & Madiès (1997).

Nous allons donc nous intéresser à l’influence de la mise en place d’une réglementation des
fonds propres sur le risque de crédit. Nous présenterons la théorie des contrats incomplets et
la théorie des contrats incitatifs. Les apports de ces modèles seront complétés par des
évidences empiriques sur le comportement des sociétés d’assurance vis-à-vis du risque.

147
3.1. La réglementation optimale des fonds propres
L’approche par la théorie du portefeuille (Kim & Santomero, 1988) montrent les effets
pervers liés à l’imposition d’un niveau de capital identique pour toutes les banques et
suggèrent donc de lier le capital requis au risque des actifs. Des coefficients de fonds propres
sont calculés et précisés ensuite par Rochet (1992, 2004). Quant à l’approche des incitations
(Giammarino, Giammarino, Lewis, & Lewis, 1988), elle prend en compte explicitement
l’objectif du régulateur et déduit une architecture optimale en matière de la régulation, liant
prime d’assurance et ratios de solvabilité.

- Prise en compte des asymétries d’information

L’hypothèse selon laquelle les dirigeants agiraient dans l’intérêt d’un actionnariat homogène
et restreint qui contrôle efficacement leurs actions est la principale limite de l’approche du
choix du portefeuille. D’ailleurs, quand on observe l’actionnariat des plus grandes sociétés
d’assurance internationales, on note que le capital est généralement détenu par plusieurs
petits actionnaires et que les dirigeants ne détiennent qu’une petite partie du capital. Il
faudrait donc étudier le ratio de capital réglementaire en prenant en considération les
asymétries d’information qui peuvent exister entre les différentes parties prenantes
(dirigeants, actionnaires, assurés…).

L’imposition d’un ratio de capital pondéré aux risques permet la réduction des asymétries
d’information existant entre les actionnaires et les régulateurs. Dans le secteur financier, en
présence de la réglementation, un niveau de capital inférieur aux exigences réglementaires
pourrait conduire les dirigeants à réduire leur prise de risque et diminuer ainsi la pression des
actionnaires et les retraits d’agréments (Dewatripont & Tirole, 1994b). Dans ce cadre, la
théorie de l’agence permet de mieux comprendre l’impact de la réglementation prudentielle
dans la mesure où elle intègre les conflits d’intérêt dans son schéma général.

Quand les dirigeants réalisent de bonnes performances, ils sont moins contrôlés par les
actionnaires, ce qui les incite à prendre plus de risques pour s’enraciner car ils sont les seuls
capables d’évaluer convenablement les risques de la société d’assurance: « Une image
flatteuse du résultat (…) (et) sa (le gestionnaire) décision de réallocation du portefeuille
s’écarte donc d’une maximisation pure et simple de son potentiel » (Dewatripont & Tirole,
1994b). Afin de limiter ces comportements opportunistes des dirigeants, l’introduction d’un
ratio minimum de capital pondéré aux risques semble une réponse adaptée.

148
Il faut toutefois préciser que les sociétés d’assurance ont la spécificité de détenir une
ressource financière importante protégée des asymétries d’informations. Ce sont les
provisions techniques. Ces dernières permettent aux sociétés d’assurance d’être en mesure de
faire face aux éventuels dédommagements (non-vie) ou retraits (assurance-vie) des assurés.
Les assurés sont mal informés et ne sont pas incités à surveiller les sociétés d’assurance étant
donné l’existence des provisions techniques et de la réassurance.

Dans leurs travaux sur le secteur bancaire, Dewatripont & Tirole (1993) soulignent que la
prise de décision des actionnaires est conditionnée par l’intensité des efforts déployés par les
dirigeants pour fournir une information sur leurs résultats actuels et futurs. Ainsi, ils
proposent de construire un ratio de solvabilité basé sur les résultats des sociétés financières.
Enfin, l’analyse de Dewatripont & Tirole (1993, 1994a) a la spécificité de proposer un
modèle où les actionnaires aiment la prise de risque synonyme de rendements important et
où l’existence d’un aléa moral contraint le régulateur à définir une structure de surveillance.

- Intégration des incitations des agents

Selon les relations d’agence qui lient les actionnaires détenteurs du capital (insiders) et les
actionnaires potentiels ou nouveaux (outsiders) et les relations qui existent entre les
dirigeants (qui agissent pour l’intérêt des insiders) et les régulateurs, on assiste à une variété
de comportements chez les dirigeants des institutions financières vis-à-vis de la prise de
risque et du niveau des fonds propres.

Dans le secteur bancaire, une étude de Besanko & Kanatas (1996) permet d’aboutir à la
conclusion que les insiders préfèrent que la banque fonctionne avec un minimum de fonds
propres pour qu’ils puissent maximisent leur rentabilité.

De son étude, Rochet (1992) part de l’hypothèse que les dirigeants agissent dans l’intérêt des
insiders et se focalise sur l’asymétrie d’information qui existe entre les dirigeants et le
régulateur. Il conclut que les dirigeants disposent d’informations privées auxquelles le
régulateur n’a pas accès de par son incapacité à évaluer efficacement la qualité des projets
financés par la banque (problème de sélection adverse) et les efforts des gestionnaires en
termes de suivi et de contrôle des projets après l’octroi du crédit (problème d’aléa moral). Il
s’avère que plus ces efforts sont importants plus le niveau de capitalisation de la banque est

149
faible et plus les exigences et les pressions réglementaires sont fortes, plus les dirigeants
vont investir dans des actifs de qualité Rochet (1992).

On peut donc dire qu’une réglementation optimale devrait prendre en considération la qualité
des actifs mesurée par un rating ou un audit. Toujours dans la recherche des mesures
optimales et limiter les problèmes qui découlent de l’asymétrie d’information entre
gestionnaires et régulateur, Giammarino et al. (1988) propose d’imposer à la fois une prime
d’assurance indexée aux risques des actifs et un ratio minimum de capital.

A l’issue de ce que nous venons d’exposer, on voit bien que la relation entre l’imposition
d’un ratio de capital et la prise de risque reste empreinte d’ambigüité. Pour les acteurs du
secteur de l’intermédiation financière, l’imposition reste synonyme de contrainte et d’entrave
à leur efficacité. C’est dans cette optique que, tout en agissant dans l’intérêt des actionnaires,
les dirigeants des institutions financières effectuent tout de même des arbitrages afin de
dissimuler leur prise de risque réelle sur les actifs.

Afin d’inciter les banques à améliorant leurs efforts en matière de sélection et de suivi des
projets, Milne (2002); Milne & Whalley (1998, 2001) proposent un cadre réglementaire
réactif. Ils entendent par là, un cadre réglementaire qui n’appliquerait des sanctions que pour
les banques ayant des actifs de mauvaise qualité. Cette proposition est venue en réponse aux
limites de la réglementation existante.

D’autres auteurs vont plus loin en imaginant des mesures où les banques choisiraient leur
niveau de capital et seraient sanctionnées si elles ne le respectent pas (Kupiec & O'Brien
(1995a, b), Prescott (1997). L’intérêt de cette approche est de permettre la prise en
considération des risques du marché dans l’élaboration des modèles internes en tenant
compte.

3.2. Les travaux et validations empiriques


L’étude de la relation entre l’imposition d’un ratio minimum de capital et la prise de risque
dans les sociétés d’assurance a fait l’objet de rares travaux théoriques dont les conclusions ne
sont pas toujours concordantes.

D’après la réglementation de capital, le niveau des fonds propres d’une société d’assurance
doit être en cohérence avec le degré de risque de l’ensemble de ses actifs. Ainsi, pour une
compagnie d’assurance, un levier faible et des fonds propres élevés (toute chose égale par

150
ailleurs) permettent de compenser la détention d’actifs risqués. Toutefois, les asymétries
d’information incitent les sociétés d’assurance à modifier leur profil de risque afin de
détourner la réglementation et améliorer leur rentabilité. Plusieurs travaux empiriques ont
étudié la relation positive entre l’imposition d’un ratio minimum de capital et la prise de
risque dans le secteur bancaire (Dahl & Shrieves (1990); Shrieves & Dahl (1992).

Sous-section 4 : La modernisation du secteur financier

Dans un souci d’ajustement au développement que connait le secteur en termes de métiers,


des activités et d’ouverture, on assiste depuis quelques années à une évolution du profil de
risque et des pratiques dans le secteur des assurances. Solvency I a lancé un débat, toujours
d’actualité, sur classes de risques prises en considération et des pondérations.

L’innovation dans les pratiques devient un enjeu stratégique car c’est ce qui va permettre aux
compagnies d’assurance de faire face à la réduction des marges induite par l’intensification
de la concurrence. Elles s’orientent alors vers des produits et processus qui permettent
d’obtenir un niveau de rentabilité plus élevé, accompagné d’une réduction des coûts.

En partant du cadre théorique détaillé dans ce chapitre, nous allons compléter nos hypothèses
en nous intéressant particulièrement à l’impact de l’introduction de la réglementation
prudentielle sur le niveau des fonds propres des sociétés d’assurance.

1. La sophistication financière dans le secteur des assurances


Dans le secteur financier, la relation entre le recours à l’innovation financière et la
réglementation prudentielle de capital a été largement abordée dans la littérature. Dans les
sociétés d’assurance, la recherche de plus d’efficacité les incite à mettre en place de
nouveaux produits financiers pour contourner la réglementation et à dissimuler la prise de
risque réelle (De Lagarde, 2010).

1.1. Les objets de la sophistication financière


Quand on parle de sophistication dans le secteur des assurances, on fait principalement
référence aux innovations qui touchent les produits ou les processus (Johne & Davies, 2000;
Kopcke, 1995; Njegomir & Rihter, 2013; Perraud, 2002).

Pour ce qui est de l’innovation produits, elle englobe les nouveaux actifs ou les nouveaux
services proposés aux particuliers, professionnels et entreprises. L’objectif est de se
démarquer de la concurrence en acquérant un avantage concurrentiel (Ben-Horim & Silber,

151
1977; Silber, 1983). La fonction recherche de développement joue un rôle important dans le
processus d’innovation à travers les améliorations apportées aux produits (montant,
rendement…) en réponse aux attentes et exigences croissantes des assurés. En ce qui
concerne les processus, l’outil informatique et de l’internet ont contribué à proposer à la
clientèle des produits plus sophistiqués et plus pratiques.

L’amélioration des modèles internes permet aux assureurs d’évaluer efficacement la


probabilité de perte sur un actif, dans un horizon de temps donné et avec une tolérance de
perte donnée. Dans les sociétés d’assurance, l’innovation permettrait de réduire l’effort
fourni par les assureurs dans le cadre de la sélection et du suivi des actifs et d’atteindre des
niveaux d’efficacité élevés grâce à des produits innovants adaptés aux besoins en
changement continuel du cadre institutionnel, des métiers de l’intermédiation financière et
des marchés financiers.

1.2. Cadre prudentiel et innovation financière dans le secteur des assurances

S’il existe beaucoup de pratiques et d’innovations (financières) dans le secteur financier, cela
peut être expliqué par les normes réglementaires contraignantes (Kane, 1989, 1995) qui
semblent entraver l’efficacité des banques et des assurances qui réagissent en développant de
nouveaux produits et/ou processus. L’innovation est donc une tentative de contournement du
poids de la réglementation. En se basant sur la notion de dialectique de la réglementation,
Kan souligne l’aspect dynamique qu’elle revêt dans le secteur bancaire. Selon cette
approche, toute imposition de réglementation déclenche une réponse de la part des
institutions financières à travers les innovations financières, puis ces dernières provoquent
une nouvelle réglementation et ainsi de suite.

Approche dominante dans la théorie de l’innovation financière, l’approche élaborée par Ben-
Horim & Silber (1977); Silber (1983) va dans le même sens en avançant que les institutions
bancaires innovent financièrement pour échapper aux obstacles posés par la réglementation.
Dans ses travaux, Lancaster (1966) constate aussi qu’une partie des produits innovants sont
là pour exploiter les lacunes de la réglementation et dissimuler le véritable risque des
opérations bancaires. Cependant, Siber (1983) précise que ce comportement peut aussi être
motivé par des préoccupations stratégiques ou techniques.

152
Il est donc difficile pour les régulateurs d’évaluer la vraie motivation derrière la création
d’un nouveau produit financier, surtout quand cela nécessite des moyens et des compétences
spécifiques. Le processus dérégulation/régulation devient alors tributaire de cette évaluation,
sachant que les assureurs et banquiers sont en avance techniquement par rapport aux
autorités de régulation.

Ainsi, avant de d’imposer des normes de régulation sur les nouveaux produits, les
régulateurs s’accordent le temps de réflexion nécessaire pour ne pas provoquer une
instabilité des marchés financiers à travers leurs décisions. Par exemple, la titrisation n’a été
réglementée que récemment dans le cadre des accords de Bâle pour les banques et Solvency I
pour les assureurs alors qu’elle est apparue à la fin des années quatre-vingt.

En somme, en plus de considérer l’innovation financière comme une réponse aux coûts de la
réglementation, la théorie de la contrainte la représente également comme un moyen de
réduction des risques à travers l’amélioration des conditions économiques des opérations
financières. L’objectif visé est l’augmentation de la rentabilité des actifs avec, en parallèle, le
maintien d’un niveau de risque viable et le respect la réglementation (Silber, 1983).

Bien qu’étant l’approche dominante dans la théorie de l’innovation financière, la théorie de


la contrainte a fait l’objet de plusieurs critiques. Ces dernières concernent principalement sa
définition de l’innovation financière, sa négligence de la dimension stratégique dans cette
démarche et sa conception de l’efficacité de la réaction du régulateur.

Concernant la définition, comme le soulignent Muldur & Sassenou (1993), on assiste à une
variété des définitions d’un pays à l’autre et donc une innovation financière dans un pays
peut être considérée comme une simple diversification dans un autre.

Ensuite, dans un environnement marqué par une intensification de la concurrence, les


fondements-mêmes de la théorie de la contrainte sous-estiment, voire écartent le rôle
stratégique que peut jouer une innovation financière dans la création d’avantages compétitifs
pour une institution financière.

La troisième limite que l’on peut citer ici concerne la réaction du régulateur. Suite à la mise
en place de nouveaux produits ou processus financiers, la réaction du régulateur est supposée
être immédiate et efficace afin de contraindre les banques à abandonner ou à réduire
l’utilisation de ces produits. Dans la réalité, la réaction du régulateur n’est pas aussi rapide. Il

153
doit prendre le temps de comprendre les projets, objets de l’innovation, afin de pouvoir
mesurer leur potentiel effet négatif sur la stabilité de l’institution financière.

La mise en place d’une réglementation obligatoire aux institutions financières suit un long
processus avant d’être effective. Les discussions et de consultations entre expert du domaine
(chercheurs, assureurs, banquiers, financiers…) qui la précèdent peuvent durer des années.
De plus, une fois mise en place, la réaction des intermédiaires financiers n’est pas non plus
automatique. Tant que les coûts de la réglementation ne dépassent pas les rendements de ces
nouveaux produits, les institutions financières pourraient continuer à les vendre.

2. Nos hypothèses de recherche sur l’impact de la réglementation


En partant du cadre théorique présenté dans ce chapitre, on peut clairement dire que la
réglementation prudentielle a un impact sur le niveau des fonds propres des sociétés
d’assurance. Il faut toutefois préciser que cet impact n’est pas le même pour toutes les
sociétés d’assurance car cela dépend de la nature et du degré de sévérité du cadre
réglementaire auquel elles sont soumises. Ces éléments peuvent varier selon le degré
d’intégration dans les normes nationales et les directives internationales.

Afin d’éviter les coûts liés au non-respect de la réglementation, les sociétés d’assurance
augmentent leur niveau de capital des sociétés d’assurance. C’est qui permet d’expliquer
pourquoi les sociétés d’assurance ont un niveau de capital supérieur au minimum requis.

2.1. Intégration d’un niveau de fonds propres minimum

L’analyse de la relation qui lie le risque et le niveau des fonds propres permet d’étudier
l’impact de l’imposition d’un ratio minimum de capital sur le comportement des sociétés
d’assurance. Les normes réglementaires incitent les sociétés d’assurance à augmenter leur
niveau de capitalisation quand la composition des actifs augmente les risques.

Dans le secteur bancaire, la relation entre le risque et le niveau de capital a été modélisée par
Dahl & Shrieves (1990); Shrieves & Dahl (1992) et Rime (2001). Pour ces auteurs,
l’absence d’une relation statistique significative entre le risque et le niveau de capital reflète
l’absence d’une influence réglementaire sur le comportement des institutions financières en
matière de capitalisation. Cependant, quand cette relation est positive, c’est le signal d’une
réglementation prudentielle efficace et quand elle est négative, cela souligne les effets

154
pervers de l’imposition de la norme. Dans ce dernier cas, les institutions financières
augmentent leur niveau de risques plus qu’elles n’augmentent leur niveau de capitalisation
car pour elles, les sanctions éventuelles liées au non-respect du ratio réglementaire sont
perçues comme moins importantes que les bénéfices qui pourraient être générés.

Nous pouvons donc formuler l’hypothèse suivante :

Hypothèse 9 : L’imposition d’un ratio de capital par les autorités prudentielles entraine une
relation négative entre les variations du niveau réglementaire des fonds propres et les
variations du risque de portefeuille des sociétés d’assurance françaises.

Il est, toutefois, important de préciser que pour les sociétés d’assurance ayant un très haut
niveau de capitalisation, la réglementation n’a plus un impact important. La gestion de la
capitalisation est indépendante de la prise de risque dans ces sociétés et elles ont une marge
de sécurité.

2.2. Impact du cadre réglementaire

Dans un souci de contrôle, de discipline et de limitation des difficultés des institutions


financières, la réglementation prudentielle à sa disposition d’autres mesures que le ratio
minimum de capital. On peut citer à titre d’exemple des mesures complémentaires en termes
de contraintes à l’entrée, restrictions des activités, restrictions de la propriété, les
caractéristiques de la réassurance…ces normes réglementaires peuvent influencer, de
manière directe ou indirecte, le capital des institutions financières.

En analysant le cadre réglementaire dans différents pays dans le monde, Barth, Caprio, &
Levine (2001, 2002); Campbell, Goldberg, & Rai (2003) montrent qu’un environnement
réglementaire strict poussent les sociétés financières (sociétés d’assurance, banques, fonds de
pension…) à augmenter leur niveau de capital mais que leurs performances sont moins
importantes..

En intégrant au modèle de Shrieves & Dahl (1992) des variables qui reflètent
l’environnement des assureurs issues de la base de données de Barth et al. (2001), nous

155
allons essayer d’identifier l’effet du cadre réglementaire global sur le ratio de capital des
sociétés d’assurance en soumettant notre hypothèse H10 au test empirique.

Hypothèse 10 (H10) : la pression réglementaire exercée par les autorités prudentielles


entraîne l’augmentation du niveau de fonds propres des sociétés d’assurance françaises.

156
157
Conclusion du deuxième chapitre

L’existence des risques est inhérente à la nature-même des activités financières. Ainsi s’il est
caractérisé par des risques trop importants, le secteur financier peut entrainer avec lui
l’économie entière. Pour préserver la stabilité économique, la réglementation prudentielle a
proposé des outils permettant de contrôler le secteur de l’intermédiation financière :
l’imposition d’un ratio de capital minimum, la réassurance, les normes IAS/IFRS.

Le raisonnement du régulateur repose sur l’idée que la stabilité du secteur financier passe
d’abord des institutions solvables individuellement. C’est ainsi que le ratio minimum de
fonds propres a été imposé suite aux travaux du comité de Bâle. Ce comité a choisi une
réglementation en matière des fonds propres basée sur un ratio pondéré aux risques. Cette
approche a fait l’objet de plusieurs critiques en raison de sa non-exhaustivité concernant les
risques pris en compte et de ses taux de production considérés comme simplistes.

Partant de là, le régulateur a également mis en place les systèmes de réassurance et


d’assurance-dépôt afin d’éviter les ruées bancaires et les retraits massifs de l’épargne de long
terme.

Pour ce qui est des travaux théoriques et empiriques sur la question de l’efficacité de la
réglementation prudentielle de capital, on remarque que les conclusions sont parfois
contradictoires. En se basant sur le modèle de Shrieves & Dahl (1992), ces travaux se sont
intéressés à la relation entre le risque et le ratio de capital et on peut en retenir que :

- Une relation entre le risque et le ratio de capital signifie que la réglementation du capital est
efficace. Elle a incité les institutions financières à augmenter leur capital en cas
d’augmentation de leurs risques.

- Une relation non significative entre le risque et le ratio de capital traduit sens l’absence
d’un impact réglementaire sur le ratio de capital.

- Une relation négative entre le risque et le ratio de capital est difficile à interpréter. Elle peut
être le résultat de la volonté des institutions financières à augmenter rapidement leur ratio de
capital réglementaire (en augmentant le capital et en baissant le risque d’une manière
simultanée) ou de l’effet pervers de la réglementation qui pousserait ces institutions à
augmenter leur profil de risque sans augmentation du capital.

158
En réponse à l’imposition d’un ratio minimum de capital, perçue comme une entrave à leur
efficacité, les institutions financières ont recours à des innovations financières.

Sur la base de l’ensemble des fondements théoriques et des évidences empiriques mobilisés,
nous avons pu formuler l’ensemble de nos hypothèses de recherche.

159
Conclusion de la première partie

De par la vulnérabilité des sociétés d’assurances, les autorités réglementent leur niveau de
capitalisation pour préserver la stabilité de ce secteur. D’un point de vue réglementaire, une
capitalisation élevée est préférable car elle assurerait la solvabilité de la société d’assurance.
D’un autre côté, les actionnaires recherche à maximiser la rentabilité du capital et préfèrent
détenir un niveau de capital faible. Ainsi, il semblerait que c’est cet arbitrage entre la
solvabilité et la rentabilité de la société d’assurance qui permettrait de fixer un niveau
optimal des fonds propres.

Cette première partie de notre thèse a été consacrée à une revue de la littérature des travaux
qui ont analysé la structure de capital de la firme et l’impact de la réglementation
prudentielle.

Depuis le modèle fondateur de Modigliani & Miller (1958), la question de la structure du


capital de la firme a connu plusieurs développements, notamment à travers la théorie de
l’arbitrage et la théorie du financement hiérarchique. On note toutefois que les sociétés
d’assurance sont peu abordées et que les quelques travaux qui se sont intéressés à leur
structure de capital ont commencé après l’adoption de la directive Solvency I. Ces travaux
laissent entendre que le niveau optimal des fonds propres est le résultat d’un arbitrage entre
les avantages et les inconvénients des sources de financement.

En plus de la structure du capital, notre première partie a également traité de l’impact de la


réglementation prudentielle sur le niveau de capitalisation des institutions financières et sur
leur prise de risque. Si la pression réglementaire incite les sociétés d’assurance à augmenter
leur ratio de capital pour ne pas avoir à supporter les coûts de non-conformité, celles-ci
peuvent contourner les normes à travers des pratiques d’innovation financière qui
dissimulent leur vraie prise de risque.

A l’issue de notre revue de la littérature, nous avons pu formuler nos hypothèses de


recherche autour de deux axes : le premier axe porte sur les déterminants traditionnels de la
structure financière des sociétés d’assurance et le deuxième axe traite de l’impact de
l’imposition d’un cadre réglementaire sur la détermination du niveau de fonds propres des
sociétés d’assurance. Dans la seconde partie de notre thèse, nous allons chercher à valider
empiriquement sur un échantillon de sociétés d’assurance françaises les hypothèses qui
découlent de ces deux axes principaux.

160
PARTIE II : MODELISATION DES DETERMINANTS DE LA
STRUCTURE FINANCIERE DES SOCIETES D’ASSURANCE
FRANCAISES ET IMPACT DES FACTEURS REGLEMENTAIRES

161
Tout au long de la première partie de notre recherche, nous avons pris le soin de présenter la
notion de la structure financière et les théories explicatives de l’introduction de la
réglementation prudentielle dans le secteur financier. Notre démarche nous amène à tester
deux modèles économétriques pour identifier les déterminants de la structure financière dans
le secteur de l’assurance en France et les impacts de l’introduction d’un cadre réglementaire
prudentiel sur le niveau du capital.

Dans cette deuxième partie, nous aborderons les points suivants :

- Présenter la technique des données de panel et les méthodes statistiques utilisées dans
le traitement de notre question de recherche ;
- Proposer les variables (issues de la littérature) capables de mesurer chacun des
déterminants de la structure du capital dans le secteur des assurances en France ;
- Exposer le modèle qui intègre la contrainte réglementaire dans la détermination du
niveau de capitalisation des sociétés d’assurance ;
- Tester les hypothèses de recherche énoncées et présenter les résultats obtenus.

La réalisation des objectifs de notre travail de recherche nécessite, dans un premier temps, la
présentation de la méthodologie de recherche utilisée, et dans un deuxième temps,
l’exposition et la discussion des résultats des études empiriques sur les déterminants de la
structure financière et l’impact de l’intégration de la réglementation prudentielle dans la
détermination du niveau de capital dans le secteur de l’assurance en France.

162
CHAPITRE III : LA DEMARCHE METHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE

La première partie de notre travail doctoral a permis l’identification des déterminants


susceptibles de contribuer à l’explication la structure financière dans le secteur financier. Ce
chapitre aura pour ambition d’exposer la méthodologie de recherche choisie afin de tester la
validité des hypothèses enfoncées.

Gavard-Perret, Gotteland, Haon, & Jolibert (2008, 2012) définissent la méthodologie de


recherche en sciences de gestion comme étant l’étude de l’ensemble des méthodes qui
permettent de créer de nouvelles connaissances, dont la valeur pourrait être évaluée de deux
façons distinctes : le pragmatique et l’épistémique. La première vision attribue une valeur à
la connaissance nouvelle si elle est validée pour la pratique managériale, alors que la
deuxième vision considère la connaissance comme étant de bonne qualité au moment où elle
devient indispensable pour l’amélioration de la connaissance en sciences de gestion.

Dans un premier temps, nous allons procéder à la présentation et à la définition des


différentes variables mesurant les déterminants retenus lors de la formulation de nos
hypothèses de recherche, et dans un deuxième temps, nous procéderons à la sélection de
l’échantillon sur lequel nous vérifierons la validité de nos hypothèses de recherche.

Ainsi, ce chapitre se divise en deux sections :

La première section sera consacrée à la définition et la mesure des variables choisies,


La deuxième section exposera les techniques de collecte des données et leur traitement
statistique.

163
SECTION I: LE CADRE EPISTEMOLOGIQUE ET LA DEMARCHE
METHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE

L’épistémologie est une branche de la philosophie qui s’intéresse à l’étude des théories de la
connaissance. Elle a vu le jour au début du XXème siècle pour combler les insuffisances
conceptuelles et méthodologiques de certaines disciplines scientifiques. Afin de clarifier
notre positionnement épistémologique, les travaux de Gavard-Perret et al. (2012) nous ont
servi de base pour définir les notions fondamentales du cadre épistémologique de notre
travail de recherche.

Sous-section 1 : Justification des choix épistémologiques


L’épistémologie étudie la constitution de la connaissance en s’intéressant aux
questionnements suivants :

- Qu’est-ce que la connaissance ?


- Comment est-elle élaborée ou constituée ?
- Quelle est sa validité ou sa valeur ?

Dans le cadre d’une démarche scientifique, le chercheur doit aller au-delà de la simple
vérification que la conception des connaissances soit pertinente et valide par rapport à l’objet
de la recherche. A cette fin, il devient nécessaire pour le chercheur de se questionner sur le
concept de la connaissance, mais également sur les postulats sur lesquels sa conception de la
connaissance repose. Plus communément, il ne doit pas simplement réfléchir à la pertinence
de la méthodologie. Par conséquent, son questionnement épistémologique devient donc une
partie intégrante de la recherche.

1. Le choix du paradigme

Le chercheur en sciences de gestion peut alors donner une ou plusieurs représentations du


phénomène qu’il tente d’expliquer, en fonction du paradigme dans lequel il a choisi de
construire sa recherche. Dans ce cadre, un paradigme désigne un ensemble d’idées partagées
par les composantes d’une communauté scientifique. Par ailleurs, les positionnements
épistémologiques détermineront également l’ensemble des théories et des critères de validité
des résultats qu’il utilisera. Par conséquent, un même phénomène peut donner lieu à
plusieurs explications et représentations différentes et cohérentes.

164
Lors de sa conception de la connaissance, le chercheur doit intégrer dans cette phase les
questionnements épistémologique adéquats. Ils doivent contenir une réflexion profonde sur
la méthodologie utilisée qui permettra de mener à bien le travail de recherche. Cette phase du
processus de recherche devient alors nécessaire dans la clarification de la conception de la
connaissance sur laquelle le travail de recherche reposera.

Dans cette perspective, cette clarification permet donc au chercheur d’arrêter les objectifs de
son travail de recherche, ainsi que les techniques et méthodes qui seront mobilisées dans le
cadre du travail empirique. Par conséquent, le chercheur doit s’inspirer des différents
courants de pensée pour mener à bien sa propre construction de la conception de la
connaissance nouvelle.

Généralement, les courants de pensée correspondent aux paradigmes épistémologiques


auxquels ils doivent faire référence. Ainsi, en sciences de gestion, les chercheurs peuvent
faire appel à plusieurs paradigmes épistémologiques, dont les principaux sont : le paradigme
positiviste, le paradigme de la sociologie compréhensive, le paradigme fonctionnaliste et le
paradigme constructiviste. Les paradigmes les plus adoptés en sciences de gestion sont au
nombre de deux : le paradigme positiviste et le paradigme constructiviste.

1.1 Le paradigme positiviste


Les adeptes du paradigme positiviste fondent ce courant de pensée sur le postulat de la
validité de la science.

1.1.1 Les hypothèses du paradigme positiviste


Le paradigme positiviste est basé sur trois principales hypothèses :

- la première hypothèse suppose l’existence d’un objectif concret dans le projet de


recherche, que le chercheur puisse disposer des moyens nécessaires pour l’étudier, et
de pouvoir l’analyser de façon scientifique et très objective. La vérité pourrait alors
être obtenue par une observation précise par le chercheur du sujet qu’il étudie ;

- la deuxième hypothèse suppose que le phénomène observé est conduit par des lois
invariables. Cette hypothèse est dite de détermination naturelle dans ce cadre, l’étude
empirique dirigée par le chercheur dans un courant positiviste permet d’analyser, de
comprendre et d’interpréter des relations de causalité entre les variables étudiées ;

165
- la troisième hypothèse, appelée épistémologie objective dualiste, indique que le
chercheur se doit d’adopter la posture d’un observateur extérieur aux phénomènes
étudiés dans la mesure où les deux parties sont différentes. A cette fin, le chercheur
doit donc pouvoir se positionner en tant qu’observateur extérieur au phénomène. Il
est appelé ainsi à faire preuve de neutralité et d’objectivité, et il doit écarter toutes les
influences qui pourraient biaiser les conclusions de sa recherche. A travers cette
hypothèse, on retrouve également la notion d’indépendance entre l’objet étudié et le
chercheur, ce qui signifie qu’il n’existe aucun lien de causalité entre les deux parties.

1.1.2. Les principes du paradigme positiviste


En complément de ces hypothèses, il existe deux autres principes méthodologiques utilisés
dans le cadre de ces deux paradigmes (positiviste et constructiviste) :
- le premier principe est celui de la décomposition analytique (ou principe cartésien de
division) qui suppose la possibilité de décomposer en parties identifiables l’objet
observé ;

- le second principe est appelé le principe de la raison suffisante, et il suppose que tous
les phénomènes sont explicables et possèdent tous une cause déterminante. C’est un
principe qui intègre le raisonnement syllogistique. C’est à dire un raisonnement qui
possède deux propositions. Le syllogisme suppose ainsi que si les propositions sont
véridiques alors cela implique la véracité de la conclusion. En sciences de gestion, ce
dernier principe méthodologique peut poser quelques problèmes dans la mesure où, il
est souvent compliqué de déterminer dans l’ordre exact les causalités d’un
phénomène ou d’un objet.

Nous constatons donc que lorsqu’un phénomène se produit, il est très difficile de déterminer
avec certitude la relation causale la plus cohérente et adéquate. Pour combler ces limites, le
paradigme positiviste s’est transformé en courant post-positiviste, qui suppose que la réalité
ne peut pas être totalement expliquée. C’est à partir de ce constat que le principal rôle du
chercheur sera d’approcher au plus près la réalité qu’il va tenter de décrire et d’expliquer. Il
doit tout mettre en œuvre afin de maîtriser tous les outils, techniques et les moyens dont il
dispose. Dans cette configuration, les chercheurs post-positivistes auront pour mission plus à
réfuter les hypothèses formulées qu’à les vérifier, alors que les chercheurs positivistes
choisiront la confrontation de celles-ci avec des tests statistiques.

166
Quant à la collecte de données, les chercheurs post-positivistes s’orientent facilement vers
d’autres moyens de collecte de données. Le principal avantage de ce courant de pensée est sa
capacité à modérer les règles fixées par les fondateurs du courant positiviste afin de pouvoir
décrire, expliquer, analyser et interpréter les phénomènes et les faits les plus difficiles à
comprendre.

1.2 Le paradigme constructiviste


Le paradigme épistémologique constructiviste est souvent présenté dans la littérature sous la
forme de deux conceptions. La première conception est issue d’un courant provenant de des
disciplines des sciences de l’éducation, alors que la seconde conception est davantage issue
d’un courant interdisciplinaire.

1.2.1. Les principes du paradigme constructiviste


La première conception suppose que le constructivisme intègre trois types de
questionnements : méthodologique, ontologique et épistémologique. Elle considère
également qu’il n’existe pas une seule et unique réponse à ces questionnements et que le
paradigme constructiviste forme l’ensemble des réponses possibles à ces questions. Ce
courant repose sur trois hypothèses reliées aux trois questionnements cités précédemment.

A l’instar du paradigme positiviste, la première hypothèse suppose l’existence de plusieurs


réels qui ne sont pas encadrés par des lois causales ou naturelles. La seconde hypothèse, dite
hypothèse d’épistémologie moniste subjective, considère que le phénomène observé et son
observateur représentent un seul ensemble et sont donc inséparables. Cette hypothèse
considère donc que la vérité est une chose qui permet de trouver un consensus et génère une
quantité importante d’informations.

Finalement, la troisième et dernière hypothèse, avance qu’il existe une co-construction des
connaissances entre l’observateur et l’objet observé. Nous constatons donc qu’il y a des
interactions possibles entre ces deux parties, composées de critiques et d’analyses permettant
d’aboutir à un ouvrage commun.

La deuxième conception du constructivisme est rassemblée sous le nom du constructivisme


radical. Ce courant de pensée est qualifié de radical en raison de son refus de se prononcer
sur l’existence ou la non-existence d’un réel. Les fondateurs de ce courant de pensée
supposent qu’aucun individu n’a la capacité, ni le droit de déterminer ou de certifier
l’existence ou non d’un réel. Dans ce cas, cette existence n’est pas revendiquée, mais la

167
connaissance de l’existence de ce réel l’est. Les adeptes de ce courant réfutent donc toute
affirmation ontologique sur ce qui est connu. L’ontologie représente l’étude du réel c’est-à-
dire de tout ce qui est. Ainsi toute affirmation sur l’existence même d’un fait est réfutée ici.

1.2.2. Les hypothèses du paradigme constructiviste


Le courant de pensée constructiviste est formé à partir de trois hypothèses : La première
hypothèse suppose l’existence d’un objet réel, mais elle ne se prononce pas sur la réalité de
son existence ou non. La deuxième hypothèse est proche de la première vision
épistémologique constructiviste, elle pose le postulat selon lequel, il existe une « non-
séparabilité » entre le fait que le chercheur observe et le chercheur lui-même. Par
conséquent, la connaissance nouvelle est construite ici par des représentations qui sont
conçues à partir de l’expérience des hommes.

A partir de cette dernière conception découle la dernière hypothèse qui suppose que le
construit n’est pas forcément le résultat d’une co-construction entre l’observateur et l’objet
observé. Le résultat, à savoir la connaissance nouvelle qui a été construite, peut modifier
celle formulée au préalable.

En outre, la connaissance nouvelle conçue peut facilement évoluer si le contexte étudié


change. Enfin, ce courant de pensée est ouvert à l’utilisation de plusieurs méthodes sous
réserve qu’elles respectent la rigueur et la transparence exigées par lors de la réalisation d’un
travail épistémique. Par conséquent, ce paradigme épistémologique s’ouvre davantage sur
une méthodologie plus large que le précédent, dans la mesure où, aucune des hypothèses
formulées ci-dessus ne limite la nature du réel observé.

2. Le positionnement épistémologique

La présentation que nous venons de réaliser des paradigmes positiviste et constructiviste


montre que leur spécification constitue une étape importante pour le chercheur. Cette
définition est primordiale car elle détermine l’orientation de notre travail de recherche. En
effet, le choix des paradigmes a des conséquences sur la validité et la légitimité des résultats
obtenus. A ce titre, il devient opportun de définir la notion de validité dans chacun des
paradigmes énoncés.

Le chercheur qui adopte la posture d’un observateur positiviste devra contrôler la réalisation
de deux types de validité. Il s’agit de la validité interne et de la validité externe.

168
Généralement, ces deux types de validités énoncent à la fois la qualité et la valeur des
connaissances nouvelles que le chercheur présente dans son travail.

Le premier type de validité pousse le chercheur à s’assurer que l’ensemble des outils et des
moyens de mesure dont il dispose permettent de mesurer le phénomène qu’il souhaite
observé. Ainsi que les liens de causalité qui existent entre l’objet observé et les variables
explicatives. Autrement dit, le chercheur est tenu de démontrer l’existence d’un lien de
causalité entre ses résultats et la réalité observée, tout en évitant l’introduction de biais
comportementaux susceptibles de fausser les résultats et les interprétations.

Dans le cadre de l’étude d’une relation de causalité entre deux variables, la validité interne
qui exige la maîtrise des outils et des moyens d’analyse permet au chercheur-observateur
d’avoir la certitude que cette relation existe. Les biais qui pourraient se produire dans ce
cadre sont plutôt d’ordre méthodologique, et sont souvent liés au manque de maîtrise lors de
la collecte de données, à la sélection de l’échantillon à observer ou encore aux confusions
liées à l’analyse des données.

En revanche, la validité externe suppose la possibilité d’étendre les résultats du travail de


recherche au reste d’une population. Cela implique la qualité de l’échantillon sélectionné. Ce
dernier, doit être assez représentatif de la population étudiée afin que tous ses individus
soient décrits. Cette validité est intimement liée avec la notion de fiabilité. Cette notion de
qualité suppose que le chercheur doit s’assurer que la technique utilisée et les outils
employés soient précis, ce qui permet d’obtenir des résultats stables.

Par ailleurs, le courant constructiviste part du postulat selon lequel les connaissances
élaborées par le chercheur mutent en fonction de l’expérience des individus. Le chercheur
doit s’assurer en permanence que sa méthodologie est en totale adéquation avec l’objet et le
processus de la recherche. Dans cette logique, l’observateur est tenu d’adopter une rigueur
technique et méthodologique afin d’expliquer clairement le travail réalisé et le processus
suivi. Par conséquent, on parlera ici de légitimation plutôt que de validité (comme c’est le
cas dans le cadre du paradigme positiviste) qui s’obtient en effectuant ce qu’on appelle des
critiques épistémologiques internes.

Les critiques en question supposent la formulation des hypothèses de recherche préalables du


paradigme épistémologique auquel appartiennent les connaissances nouvelles. Ensuite, elles
intègrent une explication de la construction de l’argumentation, de la méthodologie et des

169
techniques utilisées par le chercheur dans le cadre de travail de recherche. Et enfin, elles
intègrent une justification sur les logiques de déduction (les inférences) faites au cours de la
recherche et sur les connaissances et outils mobilisés pour effectuer ces conclusions.

3. Le processus de recherche

Le volet épistémologique d’un travail de recherche est une partie primordiale que le chercher
ne peut négliger. Elle permet au chercheur de mettre en évidence la manière dont les
connaissances nouvelles sont élaborées et regroupe l’intégralité des questionnements
permettant de construire le projet et l’objet de recherche.

Le paradigme choisi par le chercheur va permettre la détermination et la formulation des


hypothèses et le design de sa recherche. Par design ou canevas de recherche on entend
l’élaboration du plan. Après le choix du paradigme, le chercheur doit établir le plan et l’objet
de sa recherche. Ce choix permet également de définir la question de recherche qui constitue
le questionnement principal qui oriente toutes les étapes de la recherche. Le traitement de
cette question dépendra de la posture et l’approche choisies par le chercheur.

Dans cette optique, le chercheur élabore sa question de recherche en fonction de trois


approches différentes : l’approche déductive ou hypothético-déductive, l’approche inductive
et l’approche abductive.

La démarche déductive ou hypothético-déductive est un moyen de démonstration qui


consiste à tester des théories à partir de plusieurs hypothèses. Elle correspond donc à un
raisonnement qui permet d’établir le passage entre l’implicite et l’explicite. La déduction est
donc le raisonnement qui forme la démarche hypothético-déductive. Elle implique la
formulation d’une ou de plusieurs hypothèses que le chercheur devra par la suite confronter à
la réalité du terrain.

L’induction permet de construire de nouvelles connaissances à partir des résultats obtenus et


des situations empiriques analysées. C’est une généralisation qui s’appuie sur une
démonstration qui part d’un cadre particulier pour définir un cadre général, ce qui va
permettre au chercheur une généralisation de l’ensemble de ses résultats.

Dans le cadre d’une démarche abductive, le canevas de recherche est soumis aux évolutions
des connaissances en raison des aller/retour réalisés par le chercheur entre les théories
mobilisées et le travail empirique réalisé. Cela permet au chercheur d’affiner les techniques

170
et la démarche méthodologique mobilisées. Pour Koenig (1993), « l’abduction est
l’opération qui, n’appartenant pas à la logique, permet d’échapper à la perception
chaotique que l’on a du monde réel par un essai de conjecture sur les relations
qu’entretiennent effectivement les choses ».

Après l’adoption d’une approche, la spécification de l’objet de recherche devient alors une
étape primordiale dans la réalisation d’un travail doctoral. Il s’agit de la pierre angulaire d’un
travail de recherche, qui précède la construction du processus de recherche qui décrit
l’ensemble des phases et des stratégies de la recherche. La formulation d’un tel processus se
base sur trois étapes : l’élaboration, la mise en œuvre, l’analyse et l’évaluation.

La phase d’élaboration correspond à la construction de la problématique (ou encore de


l’objet de recherche). Dans le cadre d’une approche hypothético-déductive, cette étape se
traduit par le choix de l’objet de recherche, la réalisation de la revue de littérature, la
construction du cadre théorique et la formulation des hypothèses à tester. La seconde phase
incite le chercheur à élaborer son plan de recherche, à relier les concepts clés, à construire
l’échantillon à étudier et collecter et codifier les données nécessaires à la réalisation de la
recherche.

Enfin, la troisième étape, quant à elle, consiste à évaluer les données collectées et interpréter
les résultats obtenus. Tous les résultats obtenus par le chercheur doivent être soumis à des
tests de validité ou de légitimité en fonction des paradigmes épistémologiques retenus.

L’objet de recherche appelé communément problématique de recherche peut alors être


clairement défini et figer définitivement le projet de recherche. Ainsi, plusieurs
questionnements peuvent être posés concernant les objets théoriques, la méthodologie de
recherche, les objets empiriques et les événements. Le chercheur doit alors formuler un objet
de recherche précis et concis qui devrait éviter les divergences d’interprétations.

Dans le cadre d’une posture positiviste, par exemple, le chercheur doit respecter les étapes de
la démarche positiviste qui comporte neuf étapes :

ü déterminer l’objet de recherche : exprimer le choix d’un objet de recherche concis ;


ü réaliser une revue de littérature : exposer tous les travaux de recherche antérieurs
réalisés sur l’objet de recherche ;

171
ü construire le cadre théorique : cette étape découle de la précédente. Ainsi, un cadre
théorique sera déduit de la revue de littérature réalisée par le chercheur ;
ü formulation des hypothèses : formuler des hypothèses à travers le cadre théorique
établi par le chercheur. La formulation de nouvelles hypothèses est possible suite à
la réalisation d’une étude exploratoire, étude qui devrait précéder une étude
quantitative ;
ü opérationnaliser les concepts : transformer les hypothèses issues de la théorie en
hypothèses empiriques. Cette opérationnalisation se réalise grâce à la mise en place
de variables qui reflètent l’ensemble des concepts que le chercheur veut mesurer et
tester ;
ü mettre au point le design de recherche : le chercheur doit établir le plan de la
recherche qui va orienter toute sa démarche. L’évolution de ce plan dépend de des
conditions de réalisation de l’étude ;
ü établir l’échantillon : l’échantillon sera établi grâce à la collecte des données
nécessaires pour réaliser la recherche. Le chercheur peut alors collecter deux types de
données : les données primaires et les données secondaires. Si les données primaires
sont directement collectées auprès de population étudiée, les données secondaires
sont préexistantes et peuvent être récupérées dans les bases de données ;
ü formuler les hypothèses et les tests empiriques : le chercheur doit réaliser un certain
nombre de tests statistiques permettant de rendre les résultats généralisables. Dans le
cadre d’une démarche hypothético-déductive, il existe deux sortes de validité : la
validité externe et la validité interne ;
ü interpréter et conclure : les conclusions avancées peuvent être d’ordre théorique ou
pratique. Le chercheur est ainsi appelé à confronter les résultats de son étude à la
théorie. Cette dernière étape est importante puisqu’elle peut suggérer de nouvelles
pistes pour des projets de recherche futurs.

172
Figure 5. La démarche hypothético-déductive

Question de recherche

Processus de déduction et/ou d’induction

Adoption ou construction d’une théorie et de


plusieurs hypothèses

Tests empiriques et analyse des données

LA THEORIE ET LA OU LES HYPOTHESES CONCORDENT OU


NE CONCORDENT PAS AVEC LES FAITS

Deux possibilités :

a) Si la théorie et la ou les hypothèses sont validées par le test empirique, aucune autre
action n’est nécessaire car la réponse à la question de recherche est vérifiée.
b) Si la théorie et la ou les hypothèses ne sont pas validées par le test empirique, la
théorie est rejetée ou amendée.

Source : Dépelteau (2010)

Ainsi, pour traiter de façon optimale notre objet de recherche, et au regard de la présentation
des différents paradigmes épistémologiques et des démarches méthodologiques, nous avons
opté pour la démarche méthodologique suivante :

173
Le choix du paradigme : compte tenu de la particularité du marché de l’assurance français
qui est régi par une réglementation, des textes de lois et des théories, nous estimons qu’une
démarche de recherche positiviste est plus appropriée pour étudier ce contexte. L’adoption
de cette posture par le chercheur lui permet d’interroger des faits afin d’en découvrir la
structure sous-jacente (Allard-Poesi & Maréchal, 1999),

Le choix de la démarche : dans le cadre de notre recherche, nous avons opté pour une
approche déductive. Le mode de raisonnement déductif s’inscrit dans une logique de
démonstration. Cette approche met en évidence la logique qui est à la base de la démarche
hypothético-déductive et qui consiste à formuler et tester une ou plusieurs hypothèses et à les
confronter à la réalité théorique (GRAWITZ, 1996),

L’analyse quantitative : nous avons réalisé une étude quantitative qui porte sur les
déterminants de la structure financière et les conséquences de l’intégration de la
réglementation prudentielle sur la structure financière des sociétés d’assurance françaises. Le
choix d’une telle démarche méthodologique est bien évidemment lié aux données
disponibles. Nous avons également opté pour cette démarche parce que la plupart des études
réalisées a utilisé une méthode quantitative portant sur une analyse économétrique en
données de panel.

Sous-section 2 : La méthodologie de la recherche


Dans le cadre de notre démarche de recherche, qui s’inscrit dans un cadre théorique
purement financier, nous nous engageons à confronter les hypothèses énoncées dans la
première partie à la réalité du terrain. La réalisation de cet objectif passe par l’exploitation
d’informations financières et quantitatives disponibles (sur toute la période de l’étude) sur
certaines bases de données financières (Infinancials, Orbis…) et dans les rapports financiers
publiés chaque année par les individus de notre échantillon, composé intégralement de
sociétés d’assurance françaises.

L’adoption d’une approche quantitative est nécessaire pour analyser les déterminants
susceptibles d’impacter la structure financière. Nous envisageons d’utiliser la méthode
quantitative de données de panel pour traiter l’ensemble des données collectées.

174
1. Les méthodes statistiques employées

Le choix de la méthode utilisée prend en considération les objectifs du travail de recherche.


Il se fait normalement en prenant en compte les spécificités de recueil des données et des
mesures nécessaires. Rappelons qu’il s’agit dans notre recherche de mettre la lumière sur les
déterminants de la structure financière des sociétés d’assurance françaises et l’impact de la
prise en compte de la contrainte budgétaire et réglementaire dans la détermination de leur
niveau de fonds propres.

Pour se faire l’analyse des données collectées se fait en deux temps :

Une première analyse descriptive des caractéristiques générales de l’ensemble des sociétés
d’assurance de notre échantillon. Elle se décline en deux principales étapes. La première
étape consiste à réaliser une analyse univariée de chacune des variables, alors que la
deuxième étape consistera à réaliser une analyse bivariée pour chercher les liens qui existent
entre le niveau des fonds propres et les déterminants de la structure financière des sociétés
d’assurance françaises ;

Une deuxième analyse de validation des hypothèses de recherche par l’intermédiaire des
tests multivariés. A cette fin, nous réaliserons une régression multiple sur toute la période de
l’étude (la méthode des données de panel).

2. L’analyse des données collectées


La technique d’analyse est basée sur la présentation de l’ensemble des variables
indépendantes et dépendantes. Cette présentation sera complétée par une introduction des
régressions linéaires qui permettent de vérifier que chaque variable indépendante pourrait
être à l’origine des variations de la variable dépendante. Cette description des données
permet de réaliser une première lecture des résultats obtenus. Puis, elle servira par la suite de
locomotive pour l’analyse explicative approfondie qui nous permettra de confirmer ou non
les hypothèses mises en place.

2.1. La méthode statistique des données de panel


Le traitement de données par l’intermédiaire de la méthode quantitative des données de
panel présente plusieurs avantages, grâce notamment à la possibilité de prendre en compte la
dimension temporelle et transversale des données collectées. Ce qui devrait normalement
contribuer à l’amélioration de la qualité des estimations obtenues par rapport aux techniques

175
de modélisation simple telle que la méthode des moindres carrées ordinaires et la technique
des séries temporelles (Brooks, 2014; Hsiao, 1986). Généralement, le recours à cette
méthode est dicté par le traitement d’un très grand nombre de données. Néanmoins,
l’utilisation de ce type de modélisation peut avoir certaines limites.

Etant donné que la qualité du traitement et de l’analyse des données collectées dépend
essentiellement de la technique utilisée, le choix de la méthode devient alors aussi important
que le choix du cadre et de la posture épistémologiques à adopter tout au long de notre
démarche scientifique.

2.1.1. L’utilisation des méthodes quantitatives

Les méthodes quantitatives se basent principalement sur des traitements statistiques et


économétriques qui permettent de faire le lien entre la théorie et la réalité du terrain.
Wooldridge (2012) met en avant l’importance des méthodes quantitatives souvent sollicitées
par les chercheurs (sciences dures et sciences sociales) qui adoptent une posture hypothético-
déductive dans le cadre de leur démarche de recherche. Il estime que ces méthodes
permettent au chercheur de trier, traiter et analyser un nombre important de données
quantitatives. Les résultats obtenus seront présentés sous forme de grandeurs (moyenne,
écart-type, coefficients de corrélation…) pour permettre au chercheur de tirer des
conclusions concernant les relations entre les variables qu’il a formulées à partir de la revue
de littérature afin de tester hypothèses énoncées.

Dans le cadre de notre recherche, nous allons entamer le processus de validation de nos
hypothèses par la définition de l’objet de notre travail de recherche ou la population étudiée
(les sociétés d’assurance françaises), puis nous préciserons les composantes et les
caractéristiques de l’échantillon choisi (les sociétés d’assurances françaises).

Les principaux objectifs de notre recherche restent la mise évidence de la description des
phénomènes étudiés, l’exposition des tendances et l’explication des relations entre les
variables choisies. Nous réaliserons par la suite l’analyse des données collectées grâce aux
tableaux, graphiques et les régressions qui seront générés par le logiciel de traitement des
données (EVIEWS dans notre cas). Notre analyse sera d’autant plus riche compte tenu de la
quantité des données traitées, ce qui permettra de prendre en compte plusieurs aspects de
notre problématique de recherche.

176
L’étape la plus importante de notre démarche quantitative sera la confrontation de nos
hypothèses énoncées, à l’issue de notre revue de littérature, aux résultats des corrélations et
des régressions générées par le logiciel de traitement des données. A l’issue de cette étape,
notre objectif sera de vérifier si les relations issues de la littérature sont statistiquement
significatives. A cette fin, l’outil statistique permet d’apprécier les paramètres du modèle,
grâce notamment, aux traitements réalisés sur les données collectées et qui permettent de
repérer, à une probabilité donnée et selon les degrés de signification choisis, l’évolution des
variables dépendantes par rapport aux variables indépendantes, tout en précisant les sens des
relations et des évolutions.

2.1.2. Les données de panel : combinaison des dimensions temporelle et transversale

Appelées aussi données croisées, les données de panel sont caractérisées par une double
dimension (temporelle et transversale) et reprennent les valeurs des variables étudiées pour
un ensemble d’individus sur une période donnée. Par conséquent, étant donné que les
données collectées sont issues d’un échantillon de sociétés d’assurance françaises étudiées
sur la période 2006-2013, la méthode des régressions sera celle de l’économétrie des
données de panel.

Selon Brooks (2014); Hsiao (1986) la méthode des données de panel consiste à former un
ensemble de données contenant des informations précises concernant les différents
phénomènes observés sur la période de l’étude, et qui permet de prendre en considération
deux types d’hétérogénéité :

- le premier point concerne l’hétérogénéité temporelle qui consiste à étudier les évolutions
des variations de chaque unité statistique dans le temps. A ce stade de l’analyse, nous devons
nous intéresser aux changements du comportement de chaque individu de l’échantillon
(société d’assurance française) pendant toute la durée de l’étude ;

- le deuxième point met en avant l’hétérogénéité individuelle qui prend en considération


l’ensemble des les variations qui existent entre les individus de notre échantillon composé
de sociétés d’assurance françaises, et qui ne varient pas dans le temps. On s’intéresse ainsi
aux changements des comportements des unités statistiques (sociétés d’assurance françaises)
pendant une année.

177
Par conséquent, la prise en compte de ces deux phénomènes statistiques permet d’améliorer
le pouvoir explicatif du modèle testé dans la mesure où la partie inexpliquée est limitée, et de
réduire les erreurs qui peuvent résulter des effets de l’une ou de l’autre variation (Hsiao,
1986; Wooldridge, 2012).

Notre échantillon sera composé de « N » individus (sociétés d’assurance françaises) observés


pendant une période de « T » années (sept années). Le choix de cette structure de données
augmente le nombre de données traitées et améliore ainsi, la pertinence de notre démarche
de recherche. Par conséquent, la disponibilité des données, l’importance de la taille de
l’échantillon et l’augmentation du nombre des observations rendent l’utilisation de la
technique des données de panel pertinente.

2.1.3. Apports et limites de la méthode des données de panel

Depuis les premiers travaux académiques traitant de la méthodologie des données de panel et
menés par Balestra & Nerlove (1966), les recherches réalisées grâce à la technique
statistique des données de panel dans un cadre méthodologique ou empirique n’ont cessé de
se multiplier ces trente dernières années (Brooks, 2014; Hsiao & Wang, 2006). Cette
multiplication est justifiée par les avantages que présentent cette technique économétrique
par rapport aux autres techniques, et notamment, la méthode des coupes transversales et celle
des séries temporelles. En effet, la technique des coupes transversales étudient les variations
interindividuelles des unités statistiques qui composent l’échantillon étudié, alors que la
méthode statistique des séries temporelles prend uniquement en considération les sources de
variations dans le temps (Hsiao, Mountain, & Illman, 1995; Wooldridge, 2012).

Ainsi, la technique des données de panel permet de limiter l’impact de plusieurs types de
colinéarités :

- le premier type concerne la colinéarité entre les variables observées et la partie non
observée du modèle, sa limitation permet d’obtenir des estimateurs d’une meilleure
qualité (Brooks, 2014) ;

- le deuxième type de colinéarité se produit généralement entre les variables du modèle


dans le cadre des traitements de données via la méthode des séries temporelles

178
(Brooks, 2014; Wooldridge, 2012). Cette colinéarité est due essentiellement à
l’intégration de la variable temps dans l’analyse de l’évolution des variables qui
composent le modèle établi ;

- le dernier type de colinéarité concerne les relations entre les variables du modèle et
les variables oubliées lors de la réalisation de la recherche. Il est globalement admis
que les données de panel permettent de limiter l’impact des variables exclues
accidentellement. Le fait que la technique des données de panel permette de traiter
les données collectées sur la double dimension temporelle et transversale entraîne
généralement des limitations des effets des variables omises, manquantes, non
observées ou tout simplement exclues (Brooks, 2014). Le même auteur estime que
cette technique permet de prendre en compte les hétérogénéités non-observables des
erreurs en modélisant directement celles-ci. Ce qui permet de considérer les effets
fixes individuels ou les effets aléatoires.

Finalement, en prenant en considération l’évolution des biais comportementaux dans le


temps, l’utilisation de la technique des données de panel permet une meilleure
compréhension de la complexité du comportement des individus (Baumard & Ibert, 1998).

Par ailleurs, dans le cadre d’un travail de recherche, la technique des données de panel peut
avoir certains inconvénients, qui ne remettent pas pour autant, en question ses apports. La
principale limitation est due au caractère individuel des données traitées et la longueur de la
période de l’étude qui pourraient réduire la profondeur des réflexions et les apports des
régressions réalisées (Brooks, 2014; Hsiao, 1986; Hsiao & Wang, 2006).

Nous pouvons également être confrontés à un problème de cylindrage de l’échantillon étudié


dans la mesure où chaque individu est observé sur toute la période de l’étude. Dans le cadre
de notre recherche, ce phénomène statistique peut conduire à l’exclusion des sociétés
d’assurance françaises qui disparaissent pour cause de cessation d’activité, qui fusionnent
avec d’autre entités et celles qui se constituent ou voient le jour pendant la période de
l’étude. Ce qui nous poussera à limiter notre analyse aux unités statistiques complètes et
réduire ainsi la taille de notre échantillon.

Finalement, malgré les limites constatées de cette technique, et étant donné que les sociétés
d’assurance étudiées exercent toutes dans le même pays (France), l’utilisation des données

179
de panel reste à notre sens, la méthode la plus aboutie pour expliquer le niveau des fonds
propres des sociétés d’assurance françaises par un ensemble de variables explicatives.

Ainsi, il nous sera possible de contrôler les évolutions individuelles et de prendre en


considération les différences qui pourraient exister entre les sociétés d’assurance en matière
de la structure financière.

2.2. La modélisation par la technique de l’économétrie de données de panel


Les données collectées possèdent une double dimension : la première dimension concerne
les sociétés d’assurance de l’échantillon (indice i) et la deuxième dimension concerne le
temps ou la période de l’étude (indice t).

i représente chaque individu de l’échantillon, avec i = 1,…..,N

t représente chaque période, avec t = 1,…..,T

2.2.1. Le modèle de base

Dans le cadre d’une économétrie basée sur des données de panel, le choix de spécification le
plus pratiqué consiste à choisir un modèle à erreurs composées :

Équation 2 : yit = xit b + αit + uit

i = 1,……N (N représente le nombre d’individus)

t = 1,……T (T représente le nombre de périodes)

avec uit = ai + εit, où ai et εit sont les perturbations aléatoires non corrélées, d’espérances nulles.
Et αit est la constante.

Le choix de ce modèle suppose l’adoption d’une homogénéité des comportements des


individus observés. Par conséquent, un paramètre « b » servira de facteur commun à tous les
individus « i » et à toutes les périodes « t ». En se basant sur un tel modèle, les résultats
obtenus sur les données de panel pourraient expliquer les estimations en montrant comment
les disparités interindividuelles se retrouvent dans un facteur commun, facilement
comparable avec les résultats.

Par ailleurs, la prise en compte de caractéristiques individuelles est réalisée ici au niveau du
résidu uit qui comprend un terme ai : dans les variables omises (supposées indépendantes de

180
xit) apparaît une variable représentant l’individu. Dans le cadre du modèle à erreurs
composées on suppose :

Équation 3 : E (Uit, Ui’t’) = δii’, σ2a + δii’, δtt’, σ2ε

Où σ2a et σ2ε sont les variances respectives de ai et εit

Et où δii’ est tel que : δii’ =

Dans ce cadre, Brooks (2014) estime que les données individuelles-temporelles permettent
de disposer, à partir du même corps de données, d’estimations en coupe et en série. En
revanche, cette double dimension provoque une augmentation significative du nombre
d’observations, ce qui favorise l’existence d’observations manquantes (échantillon non-
cylindré) soit sur les individus, soit sur les périodes. En outre, l’utilisation de données de
panel pourrait renforcer l’existence d’observations aberrantes, ce qui pourrait avoir un
impact négatif sur la qualité des estimateurs.

Par conséquent, deux types d’estimateurs sont possibles dans ces deux catégories
d’estimation : l’estimateur interindividuel between et l’estimateur intra-individuel within
(Hsiao, 1986; Hsiao & Wang, 2006).

- l’estimateur between résulte de l’application de la méthode des moindres carrées ordinaires


(MCO) au modèle, réalisée sur des variables transformées yi qui nous renseignent sur les
niveaux moyens auxquels se situent les individus. La régression interindividuelle between
s’apparente ainsi à une estimation en coupe sous la forme suivante :

Équation 4 : Yi = xi.b + ui

Où yi = est la moyenne individuelle de yit pour l’individu i

- l’estimateur within résulte de l’application des MCO à l’équation (3), dont la régression
réalisée ressemble plutôt à une estimation en série. Elle est basée sur les variations
observées pendant toute la période de l’étude autour des niveaux moyens :

Équation 5 : (yit - yi) = (xit - xi) b + (uit - ui)

181
Les deux équations précédentes (3) et (4) résultent alors d’une projection du modèle de
départ (1) sur des espaces orthogonaux :

- la première projection transforme le vecteur (yit) des observations totales des y en un


seul vecteur (yi) représentant des moyennes individuelles ;

- la deuxième projection transforme le vecteur (yit), en vecteur (yit - yi) représentant des
écarts par rapport aux moyennes individuelles.

Globalement, la variance between est due aux écarts de niveaux moyens entre les individus
correspond surtout aux différences permanentes et la variance within, est liée aux
fluctuations autour des niveaux moyens (Brooks, 2014).

2.2.2. Spécification et choix de l’estimateur

En plus des estimateurs between et within, il pourrait exister d’autres estimateurs comme
les différences longues et les différences premières, qui rendraient les estimations de
l’équation (1) plus complexes. Selon Mundlak (1978) l’option pour une méthode
d’estimation dépend des hypothèses formulées par le chercheur concernant la nature de
l’hétérogénéité existante et l’éventualité de corrélation entre la variable explicative x i et
l’effet spécifique individuel ai.

Par ailleurs, dès que le chercheur procède au choix du modèle à tester, il doit réaliser une
vérification des hypothèses d’homoscédasticité et de corrélation. Si elles ne sont pas
vérifiables, les estimations par la méthode des Moindres Carrés Ordinaires (MCO) ne sont
plus valables. Dans ce cas de figure, l’utilisation de méthodes de correction telle que la
méthode des Moindres Carrés Généralisés (MCG) est vivement recommandée.

2.2.3. La méthode des Moindres Carrés Ordinaires (MCO)

Cette méthode est utilisée lorsqu’on suppose une absence d’hétérogénéité des données
collectées pour procéder à l’estimation des paramètres de l’équation (1). Cela signifie que

182
l’observateur se base sur la stabilité du comportement des individus dans le temps. Dans ce
type de modèle, il existe une seule et unique estimation des coefficients pour tous les
individus de l’échantillon choisi.

Si cette méthode d’estimation du modèle a l’avantage d’être simple d’utilisation ; la


robustesse de la méthode des MCO génère d’importantes difficultés pour appréhender, dans
leur dimension totale (individuelle et dynamique), les phénomènes étudiés. Aucune
hétérogénéité n’est prise en compte.

En supposant l’existence des hétérogénéités localisées dans la constante a it,, Leur prise en
compte se fait grâce aux constantes, tout en faisant l’hypothèse que les coefficients de
comportements ne varient ni dans temps ni individuellement.

Enfin, l’hypothèse que l’effet des hétérogénéités est pris en compte dans le terme aléatoire
uit, nous permet d’utiliser un modèle à erreurs composées dont l’estimation se fait par la
méthode des Moindres Carrés Généralisés (MCG). Par conséquent, avant de choisir la
méthode d’estimation de notre modèle, on a été amené, en utilisant le logiciel Eviews, à
réaliser des tests de spécification du modèle (notamment le test d’Haussman). Les résultats
de ces tests nous permettront de choisir, selon la structure des données et leur abondance,
l’estimateur le plus adapté.

2.2.4. Le test de Hausman

Le test de spécification de Hausman permet de choisir le modèle le plus adapté aux données
collectées. C’est un test d’absence de corrélation entre les effets spécifiques et les variables
explicatives. L’idée étant de comparer la performance des deux estimateurs (estimateur du
modèle à effets fixes et estimateur du modèle à effets aléatoires) dans deux hypothèses
différentes. Ainsi, dans l’hypothèse nulle (absence de corrélation), on privilégie le modèle à
effets aléatoires et dans l’hypothèse alternative, le modèle à effets fixes.

Le test de Hausman est distribué selon la loi Chi 2 à l (nombre de variables explicatives)
degré de liberté.

183
- Le modèle à effets fixes

Le modèle est dit à effets fixes si les constantes diffèrent selon l’individu (effet fixe) et selon
le temps (effet temporel). L’estimation de l’équation (1) considéré comme à effets fixes se
fait grâce à l’estimateur within (effet individuel) et à l’estimateur between (effet temporel)
que nous avons présentés auparavant.

Ce modèle s’écrit sous la forme suivante :

De ce fait, l’hétérogénéité individuelle est spécifiée sous la forme d’une constante spécifique
à chaque individu.

- Le modèle à effets aléatoires

Ce modèle pourrait s’écrire sous la forme suivante :

De ce fait, l’hétérogénéité individuelle est incluse dans le résidu de la régression. Ce dernier


est donc constitué de deux composantes : la composante aléatoire standard qui est l’effet
résiduel représentant l’influence des autres variables omises, variant selon les individus et
variant dans le temps et, la composante aléatoire qui capture l’effet individuel rendant
compte de l’influence sur des variables non prises en compte, si elles sont stables dans le
temps.

184
SECTION II : SELECTION DE L’ECHANTILLON ET CARACTERISTIQUES DES
SOCIETES D’ASSURANCE ETUDIEES

Les démarches de sélection et de détermination de l’échantillon sont des phases très


essentielles, dans la mesure où le travail de recherche est basé sur un échantillon
représentatif de la population étudiée. Dans cette section, nous allons procéder à la
justification du choix de la sélection de l’échantillon et des données.

Sous-section 1 : sélection de l’échantillon étudié et collecte des données


Dans la cadre de notre recherche, la collecte de données se fait à partir de bases de données
qui regroupent les données financières des sociétés d’assurance qui composent notre
échantillon. Nous nous sommes servi de bases de données financières (InFinancial et Orbis),
ainsi que les rapports annuels publiés par les sociétés d’assurance concernées.

Tableau 14. Les sociétés d’assurance de l’échantillon étudié

PERIODE DE
COMPAGNIES L'ETUDE TYPE

ALLIANZ 2006-2012 Généraliste – Vie

APRIL 2006-2012 Non vie

AVIVA 2006-2012 Généraliste – Vie

AXA 2006-2012 Généraliste – Vie

CARDIF 2006-2012 Assurance mixte

CNP 2006-2012 Généraliste

EULER HERMES 2006-2012 Assurance-crédit

GENERALI 2006-2012 Généraliste Vie

GROUPAMA 2006-2012 Généraliste vie

MAIF 2006-2012 Généraliste

SCOR 2006-2012 Généraliste- réassurance vie

Source : l’auteur

185
Notre recherche porte sur l’étude de la structure financière des sociétés d’assurance
françaises entre 2006 et 2012. Les données utilisées sont disponibles dans les bases de
données financières et les rapports annuels publiés par les sociétés d’assurance. Les
méthodes de sélection d’un échantillon peuvent être regroupées sous quatre catégories
(Charreire & Durieux, 2003; Thiétart, 2003) :

- la première catégorie concerne les méthodes probabilistes qui permettent d’utiliser


les règles d’inférence statistique ;

- la deuxième catégorie regroupe les méthodes de sélection par choix raisonné qui
permettent de sélectionner de manière précise les éléments de l’échantillon et qui
reposent principalement sur le jugement ;

- la troisième catégorie est celle des quotas et qui peut être comparée à une méthode
probabiliste ;

- la quatrième catégorie correspond à la méthode des échantillons de convenance qui


limite les inférences statistiques en fonction des opportunités du chercheur.

Afin de réaliser l’analyse des données financières (données secondaires) des sociétés
d’assurance étudiées, nous allons procéder à la formulation des hypothèses de recherche
issues de notre revue de littérature.

1. Formulation des hypothèses de la recherche

Notre revue de littérature nous a amené à définir dix hypothèses autour de deux grands axes.
Le premier axe est composé d’hypothèses issues de la théorie du compromis (TOT) et de la
théorie du financement hiérarchique (POT) et le deuxième axe est formé d’hypothèses
relatives à l’impact du cadre réglementaire sur la structure financière des sociétés
d’assurance.

186
Niveau des fonds propres dans les sociétés d’assurance

Figure 6. Les axes de la recherche

1.1. Les hypothèses relatives à la hiérarchisation des sources de financement (POT)

D’après les enseignements de la POT, les entreprises hiérarchisent leurs sources de


financement comme suit : autofinancement, endettement et augmentation du capital

En appliquant ce raisonnement aux sociétés d’assurance, on peut formuler les hypothèses


suivantes :

- La croissance et le niveau des fonds propres

Hypothèse 1 (H1) :
Les sociétés d’assurance avec fortes opportunités de croissance favorisent l’endettement par
rapport aux fonds propres. Nous supposons l’existence d’une relation négative (-) entre la
croissance et le niveau des fonds propres des sociétés d’assurance.

- La profitabilité et le niveau des fonds propres

Hypothèse 2 (H2) :
Les sociétés d’assurance les plus profitables préfèrent l’autofinancement plutôt que la dette.
Par conséquent, la profitabilité influence positivement (+) le niveau des fonds propres
des sociétés d’assurance.

187
- La tangibilité et le niveau des fonds propres

Hypothèse (H3) :
Les garanties corporelles dont dispose la société d’assurance lui permettent de réduire le
niveau du capital requis. Dans ce cadre, la relation est négative (-) entre les actifs
tangibles et le niveau de fonds propres.

Figure 7. Niveau des fonds propres et hiérarchisation des sources de financement

1.2. Les hypothèses relatives à la neutralité de la structure financière (TOT)

Pour mesurer la pertinence du principe de la neutralité de la structure financière des sociétés


d’assurance, nous avons formulé un ensemble d’hypothèses :

- La taille et le niveau des fonds propres

Hypothèse 4 (H4) :
Les sociétés d’assurance d’une taille importante ont besoin d’un faible niveau de fonds
propres, étant donné l’abondance des sources de financement. On peut donc supposer qu’il
existe une relation négative (-) entre taille de la société d’assurance et son niveau des
fonds propres.

188
- La volatilité des résultats et le niveau de fonds propres

Hypothèse 5 (H5) :
Globalement, les variations des résultats entraînent une augmentation du coût des fonds
propres. Nous supposons donc l’existence d’une relation positive (+) entre la volatilité des
résultats et le niveau des fonds propres des sociétés d’assurance.

- Le coût de l’endettement et le niveau des fonds propres

Hypothèse 6 (H6) :
Le coût faible de la dette dans le secteur des assurances, essentiellement constituée
des engagements envers les assurés, entraîne la diminution du ratio de capital. On suppose
l’existence d’une relation positive (+) entre le coût de la dette et le niveau des fonds
propres des sociétés d’assurance.

- La liquidité et le niveau des fonds propre

Hypothèse 7 (H7) :
Une société d’assurance liquide a besoin de moins de fonds propres qu’une société
d’assurance peu liquide. Dans ce cadre, la relation entre le degré de liquidité et le niveau
des fonds propres des sociétés d’assurance est négative (-).

- Le coût des fonds propres et le niveau des fonds propres

Hypothèse 8 (H8) :
Les sociétés d’assurance rentables souhaitent profiter de l’effet de levier résultant de
l’endettement et des engagements vis-à-vis des assurés. Nous supposons donc que le coût
des fonds propres influence négativement (-) le niveau des fonds propres.

189
Figure 8. Niveau des fonds propres et arbitrage entre les sources de financement

2. Les relations attendues entre les facteurs et le niveau du capital

Les relations entre le niveau de capitalisation et les facteurs qui déterminent la structure
financière sont présentées dans le tableau suivant. Ces déterminants sont largement étudiés
dans le cadre des entreprises en général. Peu de travaux de recherche les ont testés sur un
échantillon constitué exclusivement de sociétés d’assurance.

190
Tableau 15. Les relations attendues entre les variables dépendantes et les variables explicatives

Les déterminants L'impact Les résultats empiriques

POT

Yang (1996), Homaifer, Ziet & Benkato (1994), Rajan & Zingales
Croissance : GROW (-) (1995), Titman & Wessels (1988), Antoniou, Guney, & Paudyal
(2002, 2008)

Titman & Wessels (1988), Baskin (1989), Friend & Hasbrouck


(1988), Kesler (1986), (Titman & Wessels, 1988), (Rajan &
Profitabilité : PROF (+) Zingales, 1995), (Booth & al., 2001), (Antoniou, Guney, &
Paudyal, 2002), (Cassar & Holmes, 2003), D'Mello & Farhat
(2008)

Tangibilité de l’actif :
(-) Bavless & Diltz (1994), Titman & Wessels (1998), Marsh (1982)
TANG

TOT

Yang (1996), Homaifer, Ziet & Benkato (1994), Bavless & Diltz
La taille : SIZE (-)
(1994),

Yang (1996), Chaplinsky & Niehaus (1990), Titman & Wessels


La volatilité : RISK (+)
(1998)

Coût de la dette : DC (+) Biais, Hillion & Malécot (1994), Titman & Wessels (1988)

Mazur, 2007; Najjar & Petrov, 2011; Valla, Saes-Escorbiac, &


Liquidité : LIQ (-)
Tiesset, 2006; Yu, 2000 ; Diamond & Rajan (2000)

Source: l’auteur

3. Les hypothèses relatives à l’impact de la réglementation sur la structure financière


de sociétés d’assurance

A l’instar des autres entreprises financières, les sociétés d’assurance, en évoluant dans un
environnement économique encadré par une réglementation prudentielle, chercheraient à
détenir un niveau de fonds propres supérieur aux exigences réglementaires :

191
- Variation du capital réglementaire et variation du risque de portefeuille

Hypothèse 9 (H9) :

L’imposition d’un ratio de capital par les autorités prudentielles entraine une relation
négative entre les variations du niveau réglementaire des fonds propres et les variations du
risque de portefeuille des sociétés d’assurance françaises.

- Pression réglementaire et niveau des fonds propres

Hypothèse 10 (H10) : la pression réglementaire exercée par les autorités prudentielles


entraîne l’augmentation du niveau de fonds propres des sociétés d’assurance françaises.

Figure 9. Niveau des fonds propres et exigences réglementaires

Sous-section 2 : La mesure des différentes variables


Le modèle que nous estimons aura pour objectif d’étudier les déterminants de la structure
financière des sociétés d’assurance françaises. On peut le formuler comme suit :

yit : la variable dépendante (i = individus observés ; t = périodes étudiées)

xit : les variables explicatives du modèle (i = individus observés ; t = périodes étudiées)

Les déterminants traditionnels de la structure financière des entreprises ont fait l’objet de
plusieurs prédictions théoriques sur la nature et le sens de leurs impacts. Ils sont

192
généralement liés aux spécificités des entreprises : la taille, la tangibilité de l’actif, la
rentabilité, la profitabilité, le risque, le coût de la dette.

Afin de pouvoir comparer nos résultats, nous avons choisi de mesurer les variables
explicatives de notre modèle avec des mesures qui ont déjà été utilisées dans le cadre des
travaux de recherche antérieurs. En raison de la non-disponibilité de données de marché pour
l’ensemble des sociétés d’assurance de notre échantillon, nous avons opté pour l’exploitation
des données comptables pour mesurer les variables de notre modèle.

1. Les variables dépendantes

Dans la plupart des recherches académiques réalisées sur le thème de la structure financière
des entreprises, les chercheurs ont choisi le taux d’endettement comme variable dépendante,
mesuré habituellement par le ratio Dettes financières / Total actif. La variable dépendante
change quand les recherches s’intéressent aux sociétés financières (banques ou sociétés
d’assurance), la structure du capital sera alors évaluée par deux types de mesures
philosophiquement différentes. Il s’agit du ratio divisant les fonds propres par le total des
actifs ou du ratio de capital pondéré aux risques (Berger et al., 1995).

Cependant, quand le modèle testé intègre la mesure du risque dans les variables explicatives,
le chercheur doit éviter de déterminer le niveau de fonds propres en utilisant un ratio pondéré
aux risques afin d’éliminer les colinéarités qui peuvent biaiser les résultats obtenus.

Par conséquent, étant donné que les mesures du risque font partie des variables explicatives
dans le cadre de notre travail de recherche, nous avons choisi de mesurer notre variable à
expliquer (NFP) par le ratio Fonds propres / Total actif. Cette mesure nous permettra
d’apprécier le niveau de capital des sociétés d’assurance françaises tout en tenant compte de
la spécificité de l’actif de la société d’assurance.

Afin d’intégrer la contrainte réglementaire dans notre modèle, nous avons opté pour
l’utilisation de la marge de solvabilité (telle qu’elle a été définie dans le référentiel prudentiel
Solvency (équivalent des fonds propres Tier 1 dans le secteur bancaire). Cette marge de
solvabilité minimum (MS) varie en fonction de la nature de l’activité de la société
d’assurance (dommages ou vie).

Etant donné que notre échantillon est composé de sociétés d’assurance exerçant des activités
d’assurance dommages ou vie, nous utiliserons les deux mesures proposées par le référentiel

193
prudentiel en fonction de la nature de l’activité d’assurance exercée par la société
d’assurance.

Ainsi, pour une société dommages, deux mesures de la sont possible :

- A partir du chiffre d’affaires brut de l’exercice : MSMinimim1 = 16% du CA ;

- A partir de la charge de sinistre brute de la moyenne des trois derniers exercices : MS


minimum 2 = 23% de la charge de sinistre brute moyenne ; en corrigeant les sinistres du taux
de conservation nette de la charge de sinistre, c’est-à-dire la charge que la société ne cède
pas aux réassureurs, si ce taux est supérieur à 50%.

Dans un souci de simplification, nous avons retenu la première mesure pour apprécier la
MSminimum1 :

Pour mesurer la MS d’une société d’assurance vie, le régulateur propose deux mesures :

- MS minimum 1 = 4% des provisions mathématiques nettes de réassurance, en limitant le


taux de rétention à 85% ;

- MS minimum 2 : = 3 pour mille des capitaux sous risques.

Etant donné la difficulté d’identifier le montant des capitaux propres sous risques, nous
avons retenu la première mesure proposée par le régulateur pour mesurer la MSminimum :

Ainsi, les deux variables dépendantes (niveau de fonds propres) de notre modèle seront :

194
Figure 10. Le niveau des fonds propres de l’échantillon

Pour mesurer le niveau de fonds propres (NFP), Titman (1984); Titman & Wessels (1988)
estiment que les fonds propres peuvent être mesurés en se basant sur des données comptables
(valeur comptable) ou bien sur des données de marché. Dans le cadre de notre recherche,
nous utiliserons des données comptables en raison de la non-disponibilité de données de
marché pour toutes les sociétés d’assurance françaises qui composent notre échantillon
(panel cylindré).

195
Figure 11. Le montant moyen des fonds propres de l’échantillon

2. Les variables explicatives du modèle

Pour mesurer les variables explicatives de notre modèle, nous utiliserons les mesures qui ont
été utilisées dans les recherches consacrées à l’étude de la structure financière des entreprises
au sens large (études ayant intégré des entreprises financières). Ce choix méthodologique
nous permettra de confronter les résultats obtenus à l’issue de notre traitement statistique de
données avec les résultats des recherches citées dans notre revue de littérature.

2.1. La croissance (GROW)

Mesurer la croissance d’une société d’assurance revient à évaluer sa capacité à être attractive
et dynamique sur un marché de l’assurance très concurrentiel. Cassar & Holmes (2003)
estiment que cette attractivité influence la composition du bilan de l’entreprise et proposent
de mesurer cette variable en estimant l’évolution de son l’activité. Dans le cadre de notre
recherche, nous utiliserons la variation de l’actif total comme mesure de la croissance des
sociétés d’assurance de notre échantillon. D’autres auteurs tels que Rajan & Zingales (1995)
observent également une relation négative entre les opportunités de croissance et
l’endettement. Il en va de même pour Antoniou et al. (2002); Antoniou, Guney, & Paudyal
(2008) qui, sous la coupole de la TOT, expliquent que le coût de la détresse financière

196
augmente avec la croissance prévue forçant les gestionnaires à réduire la dette dans leur
structure financière.

Figure 12. La croissance moyenne de l’échantillon

2.2. La profitabilité (PRO)

La référence en matière d’analyse théorique de la relation existant entre la profitabilité et la


structure financière est incontestablement l’analyse de Myers (1984) dans le cadre de la
POT. Les entreprises qui ont une bonne rentabilité, et qui de ce fait peuvent mettre en
réserve tout ou partie de leurs profits, préféreront utiliser ce type de capitaux dont le coût est
relativement plus intéressant que le recours à des ressources externes pour se financer. Cela
suppose qu’il existe une relation négative entre ces deux variables. Cette prédiction est
confirmée par de nombreux travaux empiriques notamment, (Titman & Wessels, 1988),
(Rajan & Zingales, 1995), (Booth & al., 2001), (Antoniou et al., 2002), (Cassar & Holmes,
2003) et plus récemment D'Mello & Farhat (2008), qui capturent la rentabilité par le
bénéfice d'exploitation avant amortissement et constatent que le ratio d’endettement est
négativement lié à la rentabilité. Pour mesurer la profitabilité des entreprises d’assurance de
notre échantillon, nous avons choisi la rentabilité des actifs (Return On Assets – ROA).

197
Figure 13. La profitabilité moyenne de l’échantillon

2.3. La taille de la société d’assurance (SIZE)

Les études sur les déterminants de l’endettement ne parviennent pas à une conclusion claire
sur le rôle de la taille (Godbillon-Camus & Weill, 2001). À ce propos, la TOT prédit une
relation positive entre la taille et l’endettement, dans la mesure où les grandes firmes ont un
risque de faillite moins élevé et donc des coûts de faillite relativement faibles (Deesomsak,
Paudyal, & Pescetto, 2004). Pour mesurer cette variable, nous avons retenu le logarithme
naturel du total actif de la société d’assurance (Titman & Wessels (1988), (Rajan & Zingales,
1995), (Ozkan, 2001).

2.4. La volatilité (RISK)

Du point de vue de la TOT, un risque accru (la volatilité des profits), augmente la probabilité
de détresse financière. Cela entraînera une restriction des financements bancaires dans la
mesure où les établissement de crédit, en tant que bailleurs de fonds, sont soumis aux
problèmes de sélection adverse et de risque moral, seront plus réticents pour accorder des
prêts à l’entreprise (Kremp & Stoss, 2001). Mazur (2007) clarifie en disant que les

198
entreprises ayant une grande volatilité des cash-flows, donc un risque élevé, ont une plus
grande probabilité de faillite. En plus, dit-il, un risque de défaillance potentiel lié à la
volatilité élevée des revenus cause chez les gestionnaires averses au risque l'évitement de
niveaux d'endettement excessifs.

Du côté de la POT, la volatilité des résultats peut amener les firmes à constituer une réserve
d’actifs facilement mobilisables afin de ne pas avoir à souffrir du problème de sous-
investissement dans le futur (Gaud & Jani, 2002). Autrement dit, les entreprises à forte
volatilité des résultats essayent d'accumuler des liquidités au cours des bons exercices pour
éviter de sous-investir plus tard (Mazur, 2007). Il s’ensuit que la volatilité du résultat devrait
également être négativement associée à l’endettement.

En somme, les théories de l’agence et l’asymétrie d’information préconisent une relation


négative entre le risque et le financement par les fonds propres (Harris & Raviv, 1990; Ross,
1977), alors que la POT suppose une relation positive entre le niveau de fonds propres et le
risque.

Compte tenu du contexte de cette recherche et de l’activité des individus observés (sociétés
d’assurance), nous retenons une relation positive entre le niveau de fonds propres et le
risque.

199
Figure 14. L’évolution de la volatilité moyenne des résultats

2.5. La tangibilité (TANG) :

Les actifs tangibles correspondent à tous les actifs corporels dont dispose l’entreprise et dont
la valeur de revente est significative. La détention de ce type d’actifs par l’entreprise est très
appréciée par les créanciers qui estiment que ces actifs pourraient servir de garantie en cas de
défaillance de l’entreprise (Harris & Raviv, 1991; Titman & Wessels, 1988). Généralement,
les actifs tangibles représentent les immobilisations corporelles et les stocks que détiennent
les entreprises. Dans le secteur des assurances, les actifs tangibles correspondent
exclusivement aux immobilisations corporelles, étant donné que les sociétés d’assurance ne
détiennent pas de stocks (produits finis, marchandises…). Cette variable sera mesurée par le
rapport entre le montant net des actifs tangibles et le total actif (Immobilisation corporelles /
Total actif) (Cassar & Holmes, 2003).

200
Figure 15. Tangibilité moyenne de l’échantillon

2.6. La liquidité (LIQ)

La liquidité d’une société d’assurance s’apprécie principalement par l’intermédiaire de ratios


calculés en se basant sur les éléments à court terme de leurs bilans. Dans la littérature
relative aux entreprises financières, la liquidité peut être mesurée de deux façons :

- La première mesure de la liquidité d’une entreprise d’assurance est obtenue grâce au


ratio qui fait le lien entre l’actif et le passif. Elle se mesure en faisant le rapport entre
les actifs liquides et les passifs exigibles ;
- La seconde mesure de la liquidité est obtenue en faisant le rapport entre les actifs
liquides et le total des actifs. Cette dernière mesure présente l’avantage d’être
indépendante de la composition des actifs.

Dans le cadre de notre recherche, nous avons choisi d’utiliser la seconde mesure de la
liquidité, dans la mesure où notre objectif est d’avoir une appréciation globale de la liquidité
(Mazur, 2007; Najjar & Petrov, 2011; Valla, Saes-Escorbiac, & Tiesset, 2006; Yu, 2000).

201
Figure 16. La liquidité moyenne de l’échantillon

2.7. Le coût du financement (DC)

Le coût de l’endettement correspond généralement au taux d’intérêt supporté par l’entreprise


d’assurance lors de ses opérations de financement. Pour mesurer cette variable, nous avons
retenu le taux d’intérêt global obtenu en divisant le montant global des intérêts par le
montant global de la dette.

202
Figure 17. Le coût moyen du financement

2.8. Le coût des fonds propres (CFP)

Nous avons opté pour une mesure de cette variable par la rentabilité financière de la société
d’assurance mesurée par le ROE (Return On Equity). Elle s’obtient en divisant le résultat
net comptable par les capitaux propres. Ce ratio met en relation le résultat net avec la valeur
comptable des fonds propres de la période. Cet indicateur montre donc le rendement du
capital des actionnaires. Moins il y a de capital, plus le rendement est élevé, si le résultat
reste constant. L’objectif de l’entreprise doit être d’atteindre un rendement supérieur au taux
d’intérêt du marché, augmenté d’une prime de risque sectorielle. Cet indicateur présente
l’avantage d’être largement appliqué dans la pratique, car il permet d’aider les dirigeants à
prendre des décisions d’investissement et facilite les comparaisons intersectorielles.

203
Figure 18. Le coût moyen des fonds propres

204
Conclusion du troisième chapitre

A l’issue du premier volet de la deuxième partie de notre travail de recherche consacré au


développement de la méthodologie de la recherche, nous avons pu arrêter la posture
épistémologique et méthodologique de notre travail doctoral. Ainsi, nous avons exposé les
méthodes techniques et statistiques que nous utiliserons dans le cadre du volet empirique de
notre recherche. Ce travail méthodologique nous a également permis de formuler les
hypothèses de recherche concernant les déterminants de la structure financière des sociétés
d’assurance françaises. Une exposition des sens des relations attendues entre les variables
dépendantes et les variables indépendantes et des prédictions des théories mobilisées lors de
l’élaboration du cadre théorique. Puis, une présentation de chacune des variables étudiées et
de leurs mesures a de concrétiser les hypothèses de recherche et les transformer ainsi en
indicateurs concrets et quantifiables.

La collecte des données secondaires, nécessaires à la réalisation de notre recherche, a été


réalisée grâce à la consultation des bases de données financières spécialisées (Infinancials,
Orbis…) et la lecture des rapports annuels des sociétés d’assurance composant notre
échantillon, sur la période 2006-2012. Les données collectées seront traitées par
l’intermédiaire de la méthodologie des données de panel, une méthode économétrique très
complète et qui génère des résultats très riche en informations et en enseignements. Cette
technique de traitement des données est un procédé qui permet de combiner deux dimensions
(temporelle et individuelle), ce qui permet de multiplier le nombre d’observations. Cette
méthode économétrique reste la plus fiable et la plus adéquate pour traiter des données
secondaires collectées dans le cadre de notre recherche. En effet, elle permet de prendre en
compte les hétérogénéités individuelles ou temporelles, qui pourraient biaiser les résultats
obtenus si ces dernières s’avèrent corrélées avec les variables explicatives. Les traitements
de données et l’analyse des résultats seront effectués et présentés dans le chapitre suivant.

205
CHAPITRE IV : ETUDE EMPIRIQUE DE LA STRUCTURE FINANCIERE DES
SOCIETES D’ASSURANCE FRANCAISES

Tout au long du chapitre précédent nous avons procédé à la présentation des variables
dépendantes et indépendantes de notre recherche. Toutes ces variables ont été choisies afin,
d’une part, analyser les déterminants du niveau de fonds propres dans le secteur de
l’assurance, et d’autre part, tester les hypothèses formulées à l’issue de la présentation de la
revue de la littérature.

Dans ce chapitre nous allons exposer et discuter les résultats obtenus à la suite des tests
empiriques réalisés sur notre échantillon composés exclusivement de sociétés d’assurance
françaises. Nous dégagerons ensuite les implications des résultats obtenus pour la théorie
financière dans le secteur des assurances. Il s’agit d’une étape importante dans le processus
de création des connaissances nouvelles, nécessaires pour expliquer de façon plus large, les
apports de notre recherche pour la théorie financière.

La méthode économétrique choisie permet de prendre en considération l’hétérogénéité


individuelle de l’ensemble des données. De ce fait, un ensemble de tests statistiques a été
mené afin de déterminer le modèle économétrique le plus adéquat pour analyser notre
échantillon. Ces statistiques nous ont montré que l’on pouvait, d’une part admettre
l’hétérogénéité individuelle via les tests de Fisher ; et d’autre part refuser l’estimateur GLS
(moindre carrés généralisés) du modèle à effet aléatoire (via le test d’Hausman).

Ainsi, notre travail empirique s’organise en deux temps. Le premier volet de notre analyse
empirique a pour objectif d’identifier les déterminants traditionnels de la structure financière
des sociétés d’assurance. Le second volet de notre analyse est consacré à la prise en compte
de la règlementation prudentielle dans la détermination du niveau de fonds propres dans le
secteur de l’assurance.

206
SECTION I : ANALYSE EMPIRIQUE DES DETERMINANTS TRADITIONNELS
DE LA STRUCTURE FINANCIERE DES SOCIETES D’ASSURANCE
Avant de procéder à la réalisation des tests économétriques et la présentation des résultats
obtenus, il nous semble indispensable de présenter les modèles économétriques à tester et les
régressions à réaliser. Il s’agit d’identifier les déterminants traditionnels de la structure
financière susceptibles d’expliquer l’évolution du niveau de fonds propres des sociétés
d’assurance françaises. Dans un premier temps, nous procéderons à l’analyse d’un premier
modèle dont la variable dépendante est le niveau de fonds propres comptables (NFP), et dans
un deuxième temps, nous analyserons un deuxième modèle qui intègre les fonds propres
réglementaires comme variable dépendante (NFPrég).

Sous-section 1 : analyse des différentes relations et résultats de l’étude


Dans le cadre de notre démarche empirique quantitative, nous avons opté pour le logiciel de
traitement statistique EWIEWS pour réaliser tous les tests statistiques et les différentes
régressions. Les tableaux 15 et 16 reprennent l’intégralité des résultats des régressions que
nous avons réalisées sur les différentes variables mesurées grâce aux données comptables et
financières des sociétés d’assurance françaises qui composent notre échantillon.

Les variables choisies expliquent d’une façon ou d’une autre la détermination du niveau de
capital dans le secteur de l’assurance en France. La quasi-totalité des variables retenues
suivent les sens des relations avec le niveau des fonds propres, établis lors de la formulation
des hypothèses de recherche. L’intégralité des matrices générées lors du traitement de nos
données seront intégrées en annexes.

Les modèles estimés ont pour objectif de mettre en évidence les déterminants – issus de la
théorie financière – qui peuvent expliquer le choix du niveau de fonds propres dans le
secteur de l’assurance.

1. Le modèle économétrique basé sur les fonds propres comptables

Le premier modèle testé tend à expliquer le niveau de fonds propres (comptables) des
sociétés d’assurance françaises par l’intermédiaire des déterminants traditionnels de la
structure financière. A travers ce modèle, nous mettrons en relation la variable dépendante
NFP (niveau de fonds propres comptables) et l’ensemble des variables explicatives qui

207
mesurent les déterminants traditionnels de la structure financière. Ainsi, le modèle à tester
s’écrit comme suit :

Équation 6. Modèle économétrique des déterminants traditionnels de la structure financière

Le test statistique d’Hausman que nous avons réalisé sur les données de notre échantillon
nous ont démontré l’existence d’une hétérogénéité individuelle et ont rejeté l’hypothèse
d’indépendance entre l’hétérogénéité individuelle non observée et les variables explicatives.

Par conséquent, nous avons utilisé un modèle à effet individuel fixe que nous avons testé par
la méthode des moindres carrés ordinaires, dans un premier temps, pour déterminer les
coefficients estimés α0, α1, α2, α3, α4, α5, α6, α7, α8 où α0 représente la constante et α1, α2, α3, α4,
α5, α6, α7, α8 sont les coefficients rattachés aux variables explicatives.

Tableau 16. Résultats des régressions sur la variable niveau de fonds propres

Variable Coefficient Std. Error t-Statistic Prob.

C 0.121859** 0.054170 2.249546 0.0283

CFP 0.013072 0.010214 1.279770 0.2057

DC 0.032184** 0.012536 2.567345 0.0128

GROW -0.002477*** 0.000905 -2.738400 0.0082

LIQ -0.001525 0.011845 -0.128720 0.8980

PRO 0.604624*** 0.145468 4.156412 0.0001

RISK -0.000948* 0.000479 -1.977758 0.0527

SIZE -0.001444 0.005128 -0.281674 0.7792

TANG -0.105377*** 0.025738 -4.094236 0.0001

*** significatif à 1%, ** significatif à 5%, * significatif à 10%

ajusté 0.992259

0.989857

208
Nous allons exposer dans un premier temps les résultats pour l’ensemble de notre
échantillon, à savoir nos 77 observations (11 sociétés d’assurance observées entre 2006 et
2012).

Les résultats seront comparés, dans la seconde sous-section, aux conclusions faites dans la
littérature. Ces derniers figurent dans le tableau 15. Le modèle est très significatif puisque
le R2 est de 0,98. Ce coefficient très élevé pourrait être expliqué par le nombre
d’observations traitées. Comme nous l’avons souligné plus haut, ce coefficient de
détermination est représentatif des données de panel. En effet, les données de panel sont
caractérisées par de nombreuses observations, notamment dans la dimension transversale
qui présentent de nombreuses disparités interindividuelles. De plus, nos données ont été
récoltées pour la majorité, dans des documents comptables qui comportent de nombreuses
erreurs d’observation.

2. Le modèle économétrique basé sur les fonds propres réglementaires

Dans ce modèle on se sert du niveau de fonds propres réglementaire mesurés par la marge de
solvabilité minimum (MSMin) pour expliquer l’impact de la réglementation sur la structure
financière des sociétés d’assurance françaises :

Équation 7. Modèle économétrique des déterminants des fonds propres règlementaires

209
Tableau 17. Résultats des régressions sur la variable niveau de fonds propres
réglementaire

Variable Coefficient Std. Error t-Statistic Prob.

C 11.98384*** 2.810431 4.264057 0.0001

CFP -0.410245*** 0.119220 -3.441079 0.0011

DC -0.559362** 0.270393 -2.068699 0.0430

GROW -0.105148*** 0.028354 -3.708430 0.0005

LIQ -0.549623* 0.278905 -1.970643 0.0535

PRO 0.011201 0.630558 0.017763 0.9859

RISK 0.003244** 0.001598 2.030029 0.0469

SIZE -1.046346*** 0.253107 -4.134004 0.0001

TANG -1.795904** 0.854563 -2.101547 0.0399

*** significatif à 1%, ** significatif à 5%, * significatif à 10%

0.974405

0.966462

Sous-section 2 : analyse des résultats obtenus


A partir des tableaux 15 et 16, nous allons procéder à l’analyse des régressions réalisées,
nous allons confronter les résultats obtenus avec les prédictions des hypothèses de recherche
formulées dans le chapitre précédent.

1. La croissance :

La croissance de la société d’assurance (GROW) mesurée par le taux de croissance de l’actif


total (Davis, Fama, & French, 2000; Kremp & Stoss, 2001), affiche une relation négative et
significative avec le niveau de fonds propres (NFP). Malgré les conclusions de Harris &
Raviv (1991) qui avancent que les entreprises peuvent connaître une forte croissance de leurs
actifs (plus-values) en ayant de faibles opportunités de croissance et un fort taux
d’endettement. Ce résultat obtenu montre que les entreprises tiennent compte de la

210
croissance annuelle du niveau global leur actif dans la détermination de leur structure
financière.

Les opportunités de croissance futures des entreprises fournissent une indication solide sur la
valeur ajoutée et les profits qui seront générés. Ce qui conduit un accroissement de leur
besoin de financement. Ce fort besoin de financement ne pouvant pas être comblé par les
ressources internes (fonds propres), les entreprises font alors appel aux sources de
financement externes (endettement) (Myers et Majluf, 1984). A cette fin, et compte tenu des
asymétries d’information qui touchent le marché, l’endettement sera privilégié car ce mode
de financement est imperméable à la divulgation d’information sur le marché. En revanche,
les entreprises procèdent à une augmentation du niveau de fonds propres ultérieurement en
incorporant les réserves constituées et des bénéfices réalisés grâce notamment aux
opportunités de croissance saisies durant le cycle d’exploitation.

Nous pouvons compléter cette explication par celle de Pandey (2001), qui en se basant sur
les justifications de la TOT et la POT, affirme qu’en période de croissance les entreprises ont
besoin de fonds importants, ce qui développe chez elles une tendance à s’endetter afin de
maintenir leur niveau d’endettement cible. Ces conclusions sont également conformes avec
l’hypothèse du risque de liquidité proposée par Deesomsak et al. (2004); Deesomsak,
Paudyal, & Pescetto (2009), et qui justifie la relation négative par la volonté des entreprises
de réduire le risque de l’inefficacité des opportunités de croissance en contractant des dettes
à long terme, ce qui permettra de conserver les revenus supplémentaires générés et
d’augmenter ultérieurement le montant des réserves constituées. En somme, afin de tirer
avantage des effets positifs d’une situation économique favorable, les sociétés d’assurance
cherchent à augmenter leur niveau d’endettement en captant de nouvelles primes
(assurance/épargne) auprès de nouveaux clients (assurés/épargnants).

En adoptant la vision du patrimoine de l’entreprise qui correspond à la somme des actifs et


des opportunités de croissance (Hovakimian et al., 2001; Myers, 1977, 1984; Myers &
Majluf, 1984), notre test de l’hypothèse aurait dû tenir compte de la variation du poids relatif
de ces deux composantes du patrimoine de la société d’assurance. Par conséquent, la
structure financière serait alors déterminée par la croissance globale de l’entreprise. Ainsi,
les opérations de croissance interne seront financées par les ressources externes
(endettement, alors que les opérations de croissance externe seront plutôt financées par les
ressources internes (fonds propres).

211
Finalement, les résultats obtenus nous donnent une idée précise sur le lien entre la croissance
patrimoniale et la structure financière des sociétés d’assurance françaises. Nos résultats
confirment les résultats empiriques obtenus par Godbillon-Camus & Weill (2001) et Kremp
& Stöss (2001).

Ce résultat valide l’hypothèse H1 qui reste conforme aux prédictions de la POT. On peut
donc affirmer que les sociétés d’assurance déterminent leur niveau de fonds propres en
prenant en considération les opportunités de croissance futures.

En intégrant la réglementation à travers le niveau de fonds propres réglementaires (NFP rég),


cette relation reste négative et statistiquement très significative.

2. La profitabilité :

Les résultats des tests de l’hypothèse H2 concernant la relation entre le niveau des fonds
propres (NFP) des sociétés d’assurance françaises et la profitabilité (PROF), indiquent que
cette relation est significativement positive. Ces résultats s’expliquent par le fait que les
sociétés d’assurance profitables ont tendance à augmenter leurs réserves ce qui leur permet
d’améliorer leur niveau des fonds propres (NFP).

Ce comportement financier développe chez les sociétés d’assurance une capacité importante
de financement par les ressources financières internes (autofinancement). Les fondements
théoriques de cette hypothèse trouvent leurs origines dans les recherches réalisées par Myers
(1984) et Myers & Majluf (1984), qui dans le cadre de la POT, affirment que les entreprises
les plus rentables peuvent mettre en réserve toute ou partie de ces bénéfices, ce qui les
encouragent à utiliser ce type de fonds dont le coût est relativement plus avantageux que les
ressources externes pour se financer. Ces résultats sont conformes avec ceux obtenus par
Long & Malitz (1985) ; Wessels & Titman (1988) et Barton et al. (1989).

Les résultats obtenus permettent également d’expliquer le très faible taux d’endettement des
sociétés d’assurance. Ainsi, malgré le fait que la profitabilité soit un vecteur facilitateur de
l’obtention de financements externes à moindre coût pour financer de nouveaux projets, les
sociétés d’assurance préfèrent profiter de la richesse accumulée grâce à l’augmentation des
réserves constituées.

Malgré la position générale de la TOT qui soutient une relation positive entre la profitabilité
et la structure financière, des développements issus de la même théorie expliquent davantage

212
la relation négative entre la profitabilité et la Structure financière. Faulkender, Flannery,
Hankins, & Smith (2008); Hovakimian & Li (2008); Hovakimian et al. (2001) ont montré
que les entreprises disposant d’un ratio d'endettement cible (TOT), peuvent observer un lien
négatif entre le niveau d’endettement et la rentabilité réalisée, étant donné les coûts générés
par les ajustements de la structure financière. Dans le prolongement de ce raisonnement, une
entreprise rentable peut financer son cycle d’exploitation en disposant d’un endettement
faible ou élevé (Flannery & Rangan, 2006). Ainsi, une relation négative entre la profitabilité
et la structure financière pourrait être expliquée par une volonté accrue de l’entreprise à
conserver un niveau d’endettement élevé tant que sa capacité d’endettement le permet, et ce,
malgré une faible rentabilité.

Le cadre théorique de la TOT suppose l’existence d’une relation positive entre la rentabilité
et l’endettement. Une entreprise très rentable dispose d’une forte probabilité de rembourser
ses dettes et s’endettera davantage afin de tirer profit du mécanisme de l’effet de levier, qui
lui permettra de déduire les intérêts de son résultat fiscal (Jensen, 1986). Ce comportement
développe le sentiment de confiance des créanciers vis-à-vis de l’entreprise qui lui
accorderont plus facilement des crédits (Petersen & Rajan, 1997; Rajan & Zingales, 1995).

Nous constatons donc que la relation entre la profitabilité et la structure financière de


l’entreprise fait l’objet de conclusions contradictoires en fonction du cadre théorique utilisé
(TOT ou POT). Cette incertitude théorique laisse le champ libre aux concluions des
chercheurs. Afin de limiter les risques de cette incertitude théorique, Gonzalez & González
(2008) réalisent une comparaison internationale de la structure financière des entreprises et
suggèrent la prise en compte de nouvelles variables comme l’environnement réglementaire
et institutionnel dans l’élaboration de nouveaux cadres conceptuels et théoriques. Ils
reprennent certaines propositions de la TOT liées à l’endettement et concluent que la
protection des droits de propriété par exemple – assurée par la règlementation et
l’institutionnalisme – accentue le lien positif entre la profitabilité et l’endettement. Ainsi, les
environnements réglementaires et institutionnels stricts permettent de limiter les problèmes
engendrés par les asymétries d’information lors des échanges réalisés avec les différentes
parties prenantes, ce qui permet aux entreprises de réduire les coûts d’agence liés à
l’endettement et bénéficier ainsi d’un accès plus simple aux ressources de financement
externe (Gonzalez & Gonzalez, 2008).

213
Ainsi, une prise en compte de l’impact de l’environnement réglementaire et institutionnel
dans l’analyse du comportement de financement des entreprises, pourrait contribuer à limiter
l’incertitude théorique qu’entoure la relation existante entre la rentabilité et la structure
financière de l’entreprise.

Ainsi, pour ce qui est de l’influence de la profitabilité sur la structure financière des
entreprises, les résultats sont conformes aux prescriptions de la POT et rejoignent ainsi ceux
de Titman & Wessels (1988), Zingales (1995), Booth et al. (2001), Antoniou et al. (2002,
2008), Cassar & Holmes (2003), D’Mello & Farhat (2008) et Chang et al. (2009).

Ce résultat est confirmé par la relation négative entre le NFPrég et le CFP (coût des fonds
propres mesuré par la rentabilité financière – ROE -) dans le cadre du modèle réglementaire.

3. La tangibilité :

La tangibilité de l’actif (TANG) ou degré de tangibilité de l’actif, considérée comme une


garantie pour les créanciers de l’entreprise, est négativement liée au niveau de fonds propres
(NFP). Ces résultats corroborent l’hypothèse H3 qui prédisait que la garantie fournie par la
tangibilité de l’actif de la société d’assurance est négativement corrélée avec le niveau des
fonds propres.

La tangibilité de l’entreprise représente une sécurité et fournit une garantie aux prêteurs en
cas de détresse financière, elle est appréciée grâce au rapport entre le montant net global des
immobilisations corporelles et le total actif (Pandey, 2001).

La significativité négative de la relation entre le niveau de fonds propres et la tangibilité,


suppose que la tangibilité semble être un élément déterminant dans la prise des décisions
financières des sociétés d’assurance françaises. Ce résultat peut s’expliquer par l’importance
des actifs tangibles (actifs immobiliers) détenus par les sociétés d’assurance ou par le fait
que ces dernières font rarement appel au financement extérieur.

Cette relation négative significative entre la structure financière et la tangibilité suppose que
la variation (baisse/hausse) de la tangibilité est un facteur qui joue en faveur d’une politique
d’augmentation du financement par les ressources externes (endettement) des sociétés qui
composent notre échantillon. Les résultats obtenus sont en adéquation avec les résultats
obtenus par un bon nombre de chercheurs, notamment, Frank & Goyal (2003); Gonzalez &
González (2008); Rajan & Zingales (1995).

214
La justification commune de cette relation tangibilité-structure financière, issue de la TOT et
de la POT, suppose que la structure des actifs corporels agit comme une garantie et fournit la
sécurité aux prêteurs en cas de détresse financière (Pandey, 2001). La POT estime alors
qu’une entreprise avec un niveau important d’actifs est probablement plus sûre aux yeux des
prêteurs ; ce qui rend plus facile l’accès de cette entreprise au marché de l’emprunt.

Cependant, malgré les prédictions théoriques des cadres théoriques de la POT et de la TOT,
les résultats obtenus par Godbillon-Camus & Weill (2001) aboutissent à une relation
positive entre le niveau de fonds propres et la tangibilité. Les chercheurs expliquent les
résultats obtenus en faisant référence à des arguments issus des cadres théoriques de la TOT
et de la POT. Ils justifient cette relation positive en se basant sur l’argument "des contraintes
de la structure financière des entreprises". Ainsi, afin d’assurer la solvabilité de l’entreprise,
l’actif immobilisé doit être financé par les fonds propres et les dettes à long terme.

En revanche, si l’actif immobilisé de l’entreprise n’est pas intégralement financé par les
capitaux permanents (fonds propres et les dettes à long terme), et par symétrie des postes du
bilan, l’actif disponible serait inférieur au passif exigible ; ce qui dégraderait
considérablement la solvabilité de l’entreprise.

Les résultats obtenus nous permettent de valider l’hypothèse H3.

On utilisant le niveau de fonds propres réglementaires (NFPrég) comme variable


réglementaire, la relation entre la tangibilité et le niveau de fonds propres reste négative et
statistiquement significative.

Malgré la validation empirique de cette relation, sa portée pratique reste très limitée, étant
donné le niveau très faible des actifs tangibles dans le bilan d’une société d’assurance.

4. La taille :

Selon les résultats obtenus, le niveau des fonds propres (NFP) et la taille (SIZE)
entretiennent une relation négative, mais non significative. En utilisant le niveau de fonds
propres réglementaire (NFPrég) comme variable dépendante, cette relation reste négative
mais très significative. Nous pouvons donc valider stricto sensu les prédictions de
l’hypothèse H4. Ce résultat suppose que la taille (SIZE) de la société d’assurance joue un
rôle déterminant au niveau de l’attractivité commerciale, car elle permet de convaincre plus

215
facilement de nouveaux clients (assurés ou épargnants) de la rejoindre, ce qui augmenterait
de façon significative sa principale ressource financière, à savoir les primes acquises.

Ainsi, nous constatons que la taille de la société d’assurance facilite son financement sur les
marchés financiers, en faisant appel notamment à l’émission des emprunts obligataires et
sans passer par la case augmentation du capital (fonds propres). Cette pratique s’est
largement répandue dans le secteur de l’intermédiation financière ces dernières années grâce
notamment au développement des marchés financiers et des notations financières.

Cette relation négative entre le niveau de fonds propres et la taille de la société d’assurance
peut également être expliquée par l’émergence de la notion du too big to fail dans le secteur
financier. Ce phénomène se matérialise par la volonté accrue des pouvoirs publics de limiter
les effets du risque systémique qui peut anéantir tout le système financier à cause des
imbrications qui existent entre ses composantes (assureurs et banques) et le phénomène de
contagion, en injectant de la liquidité et les préservant ainsi d’une faillite certaine (Adrian &
Shin, 2008; Kaufman, 1994; Khan & Batteau, 2012). Ce cas de figure s’est produit
récemment lors de la récente crise financière où les autorités financières ont alimenté
plusieurs banques en difficultés (société générale, crédit agricole, BNP Paribas), ainsi que les
autorités américaines qui ont sauvé le géant de l’assurance AIG d’une faillite certaine.

En outre, l’existence des asymétries d’information et les comportements opportunistes


adoptés par les sociétés d’assurance, pousse ces dernières à maximiser la rentabilité des
actionnaires en réduisant au maximum leur niveau de fonds propres. Les sociétés financières
en général et les sociétés d’assurance en particulier, réalisent cet arbitrage en faisant
abstraction de la réglementation en vigueur, la rendant ainsi peu efficace. Cet arbitrage
financier fait accentuer les risques existants et aggrave les problèmes d’insolvabilité.

Dans le cadre théorique de la TOT, le faible risque de faillite des grandes entreprises réduit
les coûts liés à la faillite et augmente leur capacité d'endettement (Deesomsak et al., 2004;
Wiwattanakantang, 1999). Cette possibilité est réduite au minimum pour les petites
entreprises en raison de la faible consistance de leur actif du bilan qui devrait normalement
servir de garantie (Godbillon-Camus & Weill, 2001).

Les résultats de la POT suggèrent l’existence d’une relation négative entre la taille et la
structure financière des entreprises. Ce cadre théorique suppose que les coûts liés aux
asymétries d’information entre les dirigeants des grandes entreprises et le marché sont très

216
faibles, ce qui les rend peu sensibles aux réactions du marché lors de la transmission
d’informations concernant les prises de décisions financières vitales. Par conséquent, Rajan
& Zingales (1995) proposent aux grandes entreprises d’utiliser des techniques de
financement plus sensibles aux informations analysées par le marché. Ces entreprises ont
alors la possibilité d’émettre des actions ou des emprunts obligataires – très sensibles aux
notations externes - pour financer leurs projets d’expansion.

5. La volatilité :

La relation entre la volatilité des résultats et le niveau des propres est négativement
significative. Ce résultat s’explique par la volonté des entreprises à faire appel à
l’endettement afin de faire face à la volatilité des résultats et l’augmentation du coût des
fonds propres. Ce constat est conforme aux résultats obtenus par Kremp & Stoss (2001) ;
Godbillon-Camus & Weil (2001) et Antoniou et al. (2008). Cependant, le résultat obtenu est
contraire aux prédictions de la TOT et de la POT qui supposent une relation positive entre le
niveau de fonds propres et la volatilité des résultats.

L’explication du résultat obtenu trouve ses racines dans les caractéristiques du secteur
financier où sociétés d’assurance et banques considèrent les fonds propres comme étant une
ressource financière qui permet de couvrir les pertes improbables subies par l’établissement
financier (Morel & Poiblanc, 2001). Dans ce cadre, la volatilité des résultats est considérée
comme étant un indicateur qui renseigne l’investisseur sur le profil actuel du risque et sur les
performances financières futures de l’entreprise. Ce qui rend les augmentations de capital
attractives sur le marché et permet donc à la société d’assurance d’attirer des investisseurs
qui cherchent des rendements importants.

La TOT explique ce résultat en expliquant qu’un risque accru (la volatilité des résultats),
augmente le risque de détresse financière qui peut engendrer une restriction des crédits
bancaires dans la mesure où les banques, en tant que bailleurs de fonds et soumises aux
problèmes de sélection adverse et de risque moral seront plus réticentes pour accorder des
prêts (Kremp & Stöss, 2001). De même, un risque de faillite potentielle liée à la volatilité
élevée des résultats provoque chez les managers averses au risque, l'évitement de niveaux
d'endettement excessifs (Mazur, 2007).

La POT explique la relation positive entre la volatilité et la structure financière vient du fait
que cette fluctuation des résultats peut pousser les entreprises à constituer une réserve

217
d’actifs liquides afin d’éviter le problème de sous-investissement dans le futur (Gaud & Jani,
2002). Autrement dit, les entreprises à forte volatilité des résultats essayent d'accumuler des
liquidités au cours des bons exercices pour éviter de sous-investir plus tard (Mazur, 2007).

L’explication de cette relation peut se trouver du côté des théories de l’agence et de


l’asymétrie d’information qui supposent une relation négative entre le financement par les
fonds propres et le risque (Harris & Raviv, 1990; Ross, 1977). Selon ces théories, les
entreprises ayant un profil de risque élevé peuvent adopter une stratégie de surinvestissement
que les créanciers auront du mal à décrypter en raison de l’existence des asymétries
d’information entre prêteurs et emprunteurs et la volonté de réduire les coûts d’agence. Les
créanciers peuvent également être incités ou obligés de poursuivre le financement des
grandes entreprises risquées afin d’éviter les coûts d’une faillite certaine.

Le test d’hypothèse H5, selon lequel la volatilité des résultats (RISK) est positivement
corrélée avec le niveau de fonds propres, n’a pas permis de valider cette hypothèse dans le
cadre des fonds propres comptables.

En utilisant les fonds propres réglementaires (NFPrég) comme variable dépendante, on


obtient une relation positive et statistiquement significative entre le niveau de fonds propres
et le risque. Ce résultat corrobore les prédictions de la POT qui supposent une relation
positive entre le risque et le niveau de propres. L’explication de ce résultat peut se trouver
dans le cadre réglementaire qui impose la constitution d’un niveau de fonds propres
minimum qui élimine les risques liés à un endettement excessif. Dans ce cas les fonds
propres réglementaires joueront le rôle d’une garantie et un signal positif envoyé aux
créanciers.

Le tableau ci-dessous reprend l’intégralité des tests d’hypothèses. On constate qu’en utilisant
le niveau de fonds propres réglementaire comme variable dépendante, 6 hypothèses sur 8
sont validées.

218
Tableau 18. Résultats des tests empiriques et validations des hypothèses

VARIABLE DEPENDANTE

HYPOTHESES DE LA RECHERCHE
Niveau de fonds Niveau de fonds
propres propres
comptables réglementaires

H1 : relation négative entre la croissance et le Validée Validée


niveau des fonds propres.

H2 : relation positive entre la profitabilité et le Validée Non validée


niveau des fonds propres. (+)

H3 : relation négative entre les actifs tangibles Validée Validée


et le niveau des fonds propres.

H4 : relation négative entre la taille et le Non validée Validée


niveau des fonds propres (-)

H5 : relation positive entre le risque et le Non validée Validée


niveau des fonds propres. (-)

H6 : relation positive entre le coût de la dette Validée Non validée


et le niveau des fonds propres. (-)

H7 : relation négative entre le degré de Non validée Validée


liquidité et le niveau des fonds propres. (-)

H8 : relation négative entre le coût des fonds Non Validée (+) Validée
propres et le niveau de fonds propres.

219
SECTION II : IMPACT DE L’INTRODUCTION DU CADRE REGLEMETAIRE
SUR LE NIVEAU DES FONDS PROPRES DES SOCIETES D’ASSURANCE

L’analyse des déterminants de la structure financière des sociétés d’assurance françaises


dans un cadre purement comptable et financier nous a permis de confronter nos hypothèses
de recherche formulées à l’issue de la revue de littérature à la réalité du terrain. Ainsi,
l’objectif principal était d’identifier les facteurs qui contribuent à la formation d’un niveau
de fonds propres optimal pour la société d’assurance. Nous nous sommes basé sur des
données comptables et financières purement endogènes et propres à chacune des sociétés
d’assurance étudiées pour expliquer le choix d’un niveau de propres, qui contribue
grandement à l’ajustement des bilans et à consolider la solvabilité des sociétés d’assurance.
Cette analyse a été complétée par l’intégration des fonds propres réglementaires pour
apprécier l’impact des déterminants traditionnels de la structure financière sur un niveau de
fonds propres fixé par la réglementation.

Il serait alors intéressant d’intégrer le cadre réglementaire et des variables exogènes pour
expliquer davantage les facteurs qui pourraient contribuer à la formation du niveau de fonds
propres dans les sociétés d’assurance.

Sous-section 1 : Les cadres méthodologique et empirique de la recherche


La plupart des travaux de recherche intégrant le cadre réglementaire dans la détermination et
l’optimisation du niveau de capital dans le secteur financier ont été réalisés dans le secteur
bancaire. Nous allons nous baser sur ces travaux précurseurs pour apprécier le poids du
cadre réglementaire dans la détermination du niveau de fonds propres dans le secteur de
l’assurance en France.

1. Construction économétrique et modélisation

Afin d’intégrer l’impact de la réglementation prudentielle dans la modélisation des


déterminants du niveau des fonds propres dans le secteur des assurances en France, il nous
paraît essentiel de mettre l’accent sur les caractéristiques méthodologiques de notre étude
complémentaire. Pour atteindre cet objectif, nous nous baserons sur les modèles
d’optimisation de Shrieves & Dahl (1992) et Rime (2001), ainsi que les travaux de
recherche réalisés par Barth et al. (2001, 2002); Barth, Caprio, & Levine (2012); Campbell et
al. (2003), qui, en intégrant dans leurs modèles respectifs des variables réglementaires,

220
mettent l’accent sur la relation causale qui existe entre le niveau de capital et le risque lié au
portefeuille.

1.1 Construction du modèle initial


Dans le secteur financier, le principal rôle de la réglementation prudentiel est de fixer un
niveau minimal de fonds propres qui doit assurer la solvabilité des sociétés financières en
absorbant les chocs dus aux fluctuations des marchés. Ainsi, afin de limiter les difficultés
financières dues à une situation financière où les fonds propres ne sont pas suffisamment
constitués, les dirigeants sont alors incités à augmenter le niveau des fonds propres quand le
risque global augmente (relation démontrée dans le cadre du premier volet de ce travail
empirique et suit les prédictions de la POT). Cette relation est inversée du point de vue de
l’actionnaire, qui estime que toute augmentation du niveau des fonds propres est
naturellement accompagnée d’une augmentation du risque (augmentation de l’activité). Ce
raisonnement est la conséquence du comportement des actionnaires, qui, en cherchant à
maximiser la rentabilité des fonds propres, le niveau du risque et le niveau du capital
varieront dans le même sens (relation positive).

La relation entre le risque et le niveau des fonds propres mise en évidence dans le cadre de la
théorie de la structure financière (TOT et POT) a été modélisée par Shrieves & Dahl (1992)
en utilisant un système à deux équations simultanées. Nous nous baserons sur ce même
modèle afin de tester la relation entre le risque et le niveau des fonds propres dans le secteur
de l’assurance. notre choix pour ce modèle se justifie par son exploitation par plusieurs
chercheurs pour réaliser des modélisations de la relation risque/niveau de fonds propres dans
différentes branches du secteur financier (Aggarwal & Jacques, 1998a, b; Gropp & Heider,
2010; Heid, Porath, & Stolz, 2004; Jacques & Nigro, 1997; Rime, 2001), se sont basés sur ce
même modèle afin de modéliser cette relation.

1.2 Les hypothèses du modèle de Shrieves & Dahl (1992)


Tous les modèles et théories qui ont analysé la problématique du lien entre le niveau des
fonds propres et le risque ont conclu que ces deux variables sont très significativement
corrélées (Berger et al., 1995; Rime, 2001). Les variations de ces deux variables observées
dans le modèle élaboré par Shrieves & Dahl (1992) sont dues principalement aux facteurs
externes et aux ajustements discrétionnaires dans le secteur financier. Notre référence au
modèle de Shrieves & Dahl (1992) est inspirée de l’application faite de ce modèle aux

221
banques suisses par Rime (2000). Ce modèle de base présente la relation entre le capital et le
risque comme suit :

(1)

(2)

Ainsi, nous allons considérer que les deux variables et désignent


respectivement les niveaux de variations observées du capital et du risque de la société
d’assurance j à l’instant t. Dans le cadre de cette relation, les variations discrétionnaires du

capital et du risque sont mesurées par les variables et où l’utilisation


d’un cadre d’ajustement partiel se justifie par les grandes difficultés que rencontrent les
sociétés d’assurance pour atteindre sans délai le niveau souhaité de capital ou de risque
( ; ). Ainsi, les fluctuations discrétionnaires du capital et du risque sont
proportionnelles à la différence entre les niveaux (capital et risque) désirés et les niveaux
observés l’année précédente (t-1).

(3)

(4)

En remplaçant les équations (3) et (4) dans les équations (1) et (2), les variations observées
du capital et du risque peuvent être modélisées comme suit :

(5)

(6)

Afin d’intégrer l’impact de la réglementation dans notre modèle, les travaux de Barth et al.
(2001, 2002) et Campbell et al. (2003), réalisés sur un échantillon de banques et de sociétés
d’assurance, proposent de mesurer la variable réglementaire par des variables exogènes telles
que la restriction réglementaire des activités financières par le régulateur. Nous proposons de
compléter la mesure de la réglementation par l’intégration d’une variable qui mesure la
pression réglementaire sur les sociétés d’assurance disposant un niveau de fonds propres
inférieur aux exigences réglementaires.

222
A l’instar du niveau désiré du capital, le niveau désiré du risque peut dépendre aussi d’un
ensemble de facteurs. Les déterminants les plus testés dans la littérature sont : la taille, les
provisions (provisions nouvelles), le niveau de fonds propres et les variables réglementaires.

Etant donné que la théorie financière suppose l’existence d’une relation positive entre le
capital et le risque, les sociétés d’assurance sont incitées à augmenter le niveau de leurs
fonds propres suite à une augmentation du risque. Cette tendance s’explique par la pression
réglementaire qui les oblige à préserver leur solvabilité à un niveau acceptable par les
autorités.

1.3 Estimation du modèle testé

Nous avons choisi d’opter pour la méthode des Doubles Moindres Carrés pour estimer notre
modèle à deux équations simultanées

- Variables expliquées

a. CAPj,t : Capitaux propres / Total actifs


b. RISKj,t : Placements / Actifs

- Variables explicatives spécifiques à la société financière

En considérant le profil de risque des sociétés d’assurance et leur niveau de fonds propres
comme étant des choix interdépendants, Rime (2001) propose l’intégration de la variable
dans le modèle du capital et la variable dans le modèle du risque.

Le niveau des provisions techniques constituées par la société d’assurance et désigné par la
variable PROVIS est intégré dans le modèle à estimer afin de permettre la prise en
considération du degré de prudence de la société d’assurance par rapport à son profil de
risque. Rime (2001); Shrieves & Dahl (1992) ont démontré que les provisions techniques
représentent un indicateur déterminant d’une relation positive entre le risque et le montant
des fonds propres. On peut donc s’attendre à l’existence d’une relation négative entre le
montant des provisions techniques et le risque global de la société d’assurance.

223
2. Description de la relation entre le risque et le capital et intégration des variables
réglementaires
Etant donné que notre travail empirique sur l’impact de variables réglementaires dans la
détermination du niveau de fonds propres porte sur les sociétés d’assurance françaises, les
variables mesurant l’effet réglementaire du pays ne seront pas incluses dans notre modèle
pour tenir compte des facteurs qui ne sont pas reflétés par les variables spécifiques à la
société d’assurance, tels que les différences nationales dans la prise et l’aversion au risque.
En effet, il existe des différences entre les pays au niveau de l’intégration des directives
Solvency dans les lois nationales.

Les variables règlementaires permettent d’introduire dans le modèle estimé l’impact de la


pression réglementaire sur le niveau du capital et du risque des sociétés d’assurance
françaises. Nous avons choisi d’intégrer la pression réglementaire par l’intermédiaire de la
variable PRESS, mesurée par une variable fictive qui prend la valeur de l’unité si le niveau
des fonds propres de la société d’assurance est est au-dessus du minimum réglementaire.

Néanmoins, la définition au-dessus de la pression réglementaire a deux défauts. Tout


d’abord, l’écart-type des ratios d’adéquation des fonds propres des sociétés d’assurance peut-
être élevé parce que elles sont obligées d’accroitre leur ratio d’adéquation des fonds propres
afin de satisfaire le niveau minimum des exigences ce qui peut conduire à une mauvaise
classification des sociétés d’assurance. Puis, une deuxième lacune de la variable PRESS est
que le comportement des sociétés d’assurance dont le capital est en-dessous du minimum
réglementaire est susceptible d’être influencé par des facteurs autres que la pression de la
réglementation prudentielle, notamment la pression du marché, la nature de la concurrence
dans le secteur des assurances, et le rôle joué par les investisseurs privés ou les agences de
notation.

Dans le même registre, Barth et al. (2001); Barth et al. (2004) ont proposé d’autres variables
réglementaires qui pourraient tenir compte de l’impact de l’environnement réglementaire.
Nous avons retenu la variable RESTRI qui mesure les permissions données par les autorités
prudentielles en matière de la diversification des activités (placements financiers, assurance,
banque…). Plus l’indice est élevé, plus les restrictions sont importantes.

224
Sous-section 2 : Analyse des régressions sur la relation entre la réglementation et le
niveau de capital : discussions des résultats
Dans cette sous-section, nous présenterons les résultats obtenus et les différentes régressions
réalisées dans le cadre du deuxième volet empirique de notre travail de recherche. Cette
présentation sera suivie par les analyses des tendances et des relations entre les différentes
variables des deux modèles proposés pour apprécier l’impact de la réglementation sur la
structure financière des sociétés d’assurance françaises.

1. Analyse des différentes régressions

Notre démarche a pour objectif de mettre la lumière sur l’incidence de l’intégration de la


réglementation prudentielle des fonds propres sur la structure financière des sociétés
d’assurance françaises. A cette fin, nous procéderons à la mise en relation de deux modèles
économétriques qui se basent sur les variations du capital et les fluctuations du risque global
des sociétés d’assurance françaises qui composent notre échantillon.

1.1 La relation globale entre les modifications de capital et du risque de placement

Etant donné que la réglementation prudentielle pourrait jouer un rôle important dans
l’incitation des sociétés d’assurance à augmenter leur niveau de fonds propres afin de
pouvoir faire face à l’augmentation des risques liés à la diversification de la composition de
leurs actifs, l’appréciation de l’impact de l’introduction d’un ratio minimum de capital sur la
structure financière des sociétés d’assurance est habituellement réalisée grâce à l’étude de la
relation existante entre le risque et le ratio de capital (Dahl & Shrieves, 1990; Rime, 2001;
Shrieves & Dahl, 1992).

1.2 Rappel des hypothèses


Pour tester l’impact de la réglementation prudentielle (notamment en termes de la
constitution de fonds propres suffisants) sur la structure financière des sociétés d’assurance
françaises, nous nous focaliserons sur le développement et l’analyse du deuxième axe de
recherche de notre travail de doctoral.

Nous matérialisons le volet réglementaire de notre recherche par la formulation des


propositions suivantes :

225
Hypothèse 9 : l’imposition d’un ratio de capital par les autorités prudentielles entraine une
relation négative entre les variations du niveau réglementaire des fonds propres et les
variations du risque de portefeuille des sociétés d’assurance françaises ;

Hypothèse 10 : la pression réglementaire exercée par les autorités prudentielles entraîne


l’augmentation du niveau de fonds propres des sociétés d’assurance françaises.

1.2.1 Le modèle estimé


Afin de tester les hypothèses énoncées dans le cadre de l’étude de l’impact de la
réglementation prudentielle sur le niveau des fonds propres des sociétés d’assurance, nous
avons allons estimer le modèle statistique à deux équations simultanées suivant :

1.2.2 Résultats obtenus et analyse des différentes régressions

L’étude des effets de l’instauration d’une réglementation prudentielle des fonds propres sur
la structure financière des sociétés d’assurance françaises est réalisée à travers la mise en
relation des variations du capital et du risque de portefeuille. Cette relation est analysée
grâce l’utilisation d’un modèle économétrique à équations simultanées. Ces équations
permettent d’intégrer chacune des variables dépendantes dans l’analyse des autres variables
dépendantes. Ce système à deux équations simultanées a été estimé sur le logiciel
économétrique Eviews et en utilisant la méthode des Doubles Moindres Carrés (DMC).

Les résultats de l’impact de de la réglementation et du niveau de fonds propres sur la relation


entre le risque de portefeuille et le ratio de capital sont présentés ci-dessous.

226
Tableau 19. Résultat du modèle à deux équations simultanées

∆CAPjj,t ∆RISKj,t

Variable Coefficient Prob. Coefficient Prob.

C 0.807803 0.6922 66.75162 0.0000

∆RISKj,t -2.292429*** 0.0010

∆CAPj,t -0.005732*** 0.0001

CAPj,t-1 -2.038894** 0.0189

RISKj,t-1 -0.026132*** 0.0000

CAPj,t -0.958248 0.6580

RISKj,t -0.003996 0.3830

LIQ -0.003957 0.5238

ROAj,t 18.06198* 0.0760 -10.74314* 0.0678

SIZEj,t -0.042688 0.8287 -6.376371*** 0.0000

PROj,t 19.80929*** 0.0011

PROVISj,t -0.105146 0.1820 0.003863** 0.0251

PRESSj,t-1 0.096817** 0.0022 -0.101383** 0.0489

RESTRIj,t-1 0.052693** 0.0028 -0.000252* 0.0572

*** significatif à 1%

** significatif à 5%
*significatif à 10%

R2 Ajusté 0.347244 0.958642

R2 Ajusté (robust) 0.297253 0.951643

227
1.3. Analyse de la relation globale entre les variables dépendantes du modèle : ∆ CAP
et ∆ RISK

Tableau 20. Relation entre les variables dépendantes du modèle

∆CAPj,t ∆RISKj,t

Variable Coefficient Prob. Coefficient Prob.

∆RISKj,t -2.292429 0.0010

∆CAPj,t -0.005732 0.0001

L’analyse de cette relation nous permet de constater l’existence d’une relation négative et
statistiquement significative entre la variable dépendante ∆ CAP et la variable explicative ∆
RISK (variable dépendante dans la deuxième équation du modèle). La relation obtenue
s’explique par la tendance des sociétés d’assurance à augmenter leur niveau de capital afin le
baisser le risque de portefeuille et préparer ainsi le lancement de nouveaux engagements
dans des placements plus risqués et plus rentables.

Dans ce cadre, l’utilisation des modèles internes conçus par la société d’assurance
permettent la constitution de fonds propres suffisants dans la perspective d’acquérir des
actifs risqués très gourmands en capitaux propres. Cette décision est dictée par les
dispositions réglementaires des autorités prudentielles, qui exigent des sociétés d’assurance
de combiner la mise en place de provisions techniques avec la constitution de fonds propres
suffisants pour couvrir l’intégralité des placements risqués.

Ce raisonnement est en adéquation avec les dispositions de la directive Solvency II qui


imposent aux sociétés d’assurance de constituer un montant de fonds propres pour couvrir la
détention de chaque classe d’actifs. Ce dispositif vient renforcer le cadre réglementaire
Solvency I qui exige des sociétés d’assurance de respecter des plafonds d’exposition à
certains actifs (ex : 65% d’actions).

La mise en place de la directive Solvency II permettra ainsi aux sociétés d’assurance


d’investir davantage dans des actifs risqués tout en renforçant leur solvabilité. A cette fin, la
règle transitoire encadrant les placements en actions permet aux sociétés d’assurance de

228
réduire la charge en fonds propres de 39% à 22% la première année d’application de la
directive Solvency II. Ce niveau de fonds propres repassera à 39% pendant les sept années
qui suivent la mise en application de la nouvelle directive (Courmont & De Froges, 2014)26
27
.

Ce résultat, conforme aux résultats obtenus par Shrieves & Dahl (1992), est confirmé par la
relation positive et significative entre le montant des provisions techniques – imposé par la
réglementation prudentielle – qui couvre l’intégralité des engagements de la société
d’assurance vis-à-vis de ses assurés et mesuré par la variable PROVIS et la variable ∆ RISK

Dans le cadre de la relation inverse entre les variables ∆ CAP et ∆ RISK, et où la variable ∆
RISK est la variable dépendante et la variable ∆ CAP devient une variable explicative, on
obtient une relation statistique négative et significative entre les deux variables. Cette
relation confirme le premier résultat obtenu.

ð
Le résultat obtenu nous permet de valider l’hypothèse de recherche H9

1.4. Analyse des relations entre les variables dépendantes et les variables explicatives
non réglementaires

- Relation entre le ROA et ∆CAP , ∆RISK

Tableau 21. Relation ROA/ ∆ CAPj,t , ∆ RISKj,t

∆CAPj,t ∆RISKj,t

Variable Coefficient Prob. Coefficient Prob.

ROAj,t 18.06198 0.0760 -10.74314 0.0678

Dans un premier temps, la relation entre le rendement des actifs (ROA) à des sociétés
d’assurance françaises et la variable ∆ CAP est positive et statistiquement significative. Cette

26
Directeur de la direction des risques techniques ; Directeur général délégué AG2R La Mondiale

229
relation justifie l’augmentation du ratio de capital par l’augmentation du rendement des
actifs détenus par la société d’assurance et qui génèrent des revenus supplémentaires qui
seront mis en réserve ou distribués. Ce qui donne la possibilité à la société d’assurance
d’augmenter le niveau de ses fonds propres en incorporant les réserves.

Dans un deuxième temps, la relation entre le ROA et la variable ∆ RISK est positive et
statistiquement significative. Cette relation peut s’expliquer par la volatilité des rendements
des actifs détenus par la société d’assurance qui pourrait augmenter le risque total du
portefeuille. Et compte tenu de l’existence d’une relation négative entre les variables ∆ RISK
et ∆ CAP, la société d’assurance procédera à une augmentation de son niveau de fonds
propres qui limitera le risque de portefeuille.

- Relation entre la variable SIZE et la variable ∆ RISK

Tableau 22. Relation SIZE/∆ RISK

∆CAPj,t ∆RISKj,t

Variable Coefficient Prob. Coefficient Prob.

SIZEj,t -0.042688 0.8287 -6.376371 0.0000

La taille de la société d’assurance mesurée par la variable SIZE est négativement liée avec le
niveau de capitalisation (relation non significative) et négativement liée avec le niveau de
risque (relation très significative). Cette relation confirme la tendance des sociétés
d’assurance de grande taille à diminuer leur niveau de fonds propres au maximum. Ces
sociétés d’assurance sont très attractives sur le marché et ont davantage de facilités à capter
de nouvelles affaires (dépôt ou épargne pour les sociétés-vie et polices d’assurance pour les
sociétés dommages). L’existence de la réassurance et l’absence d’une pression réglementaire
contraignante (effet taille) incitent ces sociétés à profiter pleinement du levier financier et
augmenter ainsi leur niveau d’endettement.

230
En revanche, la relation statistique négative et très significative entre la taille et le risque
montre que les sociétés d’assurance de grande taille sont moins risquées en raison de la
détention de modèles internes très développés et de la diversification de leurs activités et de
leurs placements.

- La relation entre la liquidité (LIQj,t) et la variation du capital (∆CAP) :

Tableau 23. Relation LIQ/ ∆CAP

∆CAPj,t

Variable Coefficient Prob.

LIQ -0.003957 0.5238

Conformément aux résultats obtenus par Diamond & Rajan (2001), la liquidité est liée
négativement au niveau de fonds propres de la société d’assurance. Cette relation n’est pas
significative et confirme la complexité d’analyse de l’effet de la liquidité des actifs détenus
par la société d’assurance sur son niveau de fonds propres.

2. Analyse des relations entre les variables dépendantes et les variables explicatives
réglementaires
Cette analyse a pour objectif de mettre en évidence l’impact des variables réglementaires
dans la détermination de la structure financière des sociétés d’assurance françaises. La
réglementation prudentielle des fonds propres est efficace dans la mesure où elle oblige les
sociétés d’assurance à relever le montant des fonds propres quand leur niveau de risque
global augmente. Ce résultat est similaire aux résultats obtenus par Ediz et al. (1998) dans le
secteur bancaire américain.

Les résultats de l’analyse des relations économétriques liant le ratio de capital, le risque
global et les variables réglementaires sont présentés dans la table suivante :

231
Tableau 24. Résultats des relations ∆CAP, ∆RISK et les variables réglementaires

∆CAPj,t ∆RISKj,t

Variable Coefficient Prob. Coefficient Prob.

PRESSj,t-1 0.096817*** 0.0022 -0.101383** 0.0489

RESTRIj,t-1 0.052693*** 0.0028 -0.000252* 0.0572

*** significatif à 1%, ** significatif à 5%, * significatif à 10%

- ∆ CAP

Dans le cadre de cette relation, nous constatons une relation positive et significative entre le
niveau de capital et les variables réglementaires RESTRI et PRESS, ce qui confirme l’impact
de la réglementation dans la détermination du niveau de capital de la société d’assurance.

La variable explicative RESTRI qui mesure le degré de diversification des activités de la


société d’assurance (placements, banque…) est liée positivement et significativement avec le
niveau de fonds propres constitué par la société d’assurance. Cette relation met en avant
l’implication des autorités prudentielles (Autorité du contrôle prudentiel en France) dans le
contrôle de la solvabilité des sociétés d’assurance.

Dans le cadre d’une diversification massive de leurs activités, les autorités de régulation
poussent les sociétés d’assurance à augmenter leur niveau de fonds propres afin de tenir
compte des risques engendrés par cet élargissement de leur portefeuille d’activités.

L’encadrement de la diversification des activités des sociétés d’assurance pallierait ainsi aux
faiblesses du ratio de capital qui ne prend en considération que les risques liés aux activités
d’investissement et de marché (placements). Ainsi, quand le niveau de cette restriction est
élevé, les sociétés d’assurance ne peuvent pas lancer de nouvelles activités sans s’exposer à
de nouvelles sanctions imposées par les autorités prudentielles.

Cette restriction réglementaire se justifie par la volonté des autorités prudentielles de limiter
le risque de faillite de la compagnie d’assurance et éviter ainsi la déstabilisation du secteur
de l’assurance à cause du phénomène de contagion.

232
En somme, la relation positive entre le ratio de capital et la restriction des activités de la
société d’assurance par les autorités prudentielles est d’une grande importance dans
l’explication du comportement financier des grandes compagnies d’assurance françaises.
Cette relation pourrait être expliquée la libéralisation massive et l’ouverture du secteur de
l’assurance en France, ce qui a provoqué une limitation considérablement du caractère
disciplinaire du capital réglementaire. De surcroit, en raison des asymétries d’information, de
l’accroissement des activités d’investissements et le développement des techniques
actuarielles liées à leurs activités de marché, les assureurs français deviennent de plus en
plus sensibles aux fluctuations des marchés financiers, ce qui pourrait aboutir à des situations
de détresse financière.

On peut donc valider l’hypothèse H10 compte tenu de la relation positive entre la variable
réglementaire et le niveau de fonds propres.

- ∆ RISK :

Les résultats obtenus dans le cadre de cette relation montrent l’existence d’une relation
négative et significative entre le risque global de la société d’assurance et les variables
réglementaires RESTRI et PRESS, ce qui nous permet de constater que l’application de
dispositions réglementaires aux sociétés d’assurance réduit leur niveau de risque.

Cette relation est confirmé la présence d’une relation positive et significative entre la
variable ∆ RISK et la variable réglementaire PROVIS qui mesure le montant des provisions
techniques nouvelles constituées par la société d’assurance et qui donne une indication sur le
profil de risque de la société d’assurance

La relation entre la restriction et le risque est négativement significative. On constate donc


que la réglementation prudentielle (restriction) joue pleinement son rôle en contribuant à
limiter le niveau de risque de la société d’assurance. Cette relation signifie que
l’accentuation de la réglementation prudentielle oblige les sociétés d’assurance à augmenter
leur niveau de fonds propres et diminuer le niveau de risque (Barth et al., 2001).

233
3. Vers une règlementation efficace

En se basant sur l’analyse descriptive, on remarque deux situations marquantes :

- Dans le secteur des assurances, le niveau de capital est très faible par rapport au total
actif,
- Le ratio de capital réglementaire est supérieur au ratio minimum exigé par les
autorités prudentielles dans la majorité des sociétés d’assurance qui composent notre
échantillon.

D’un point de vue réglementaire, on peut conclure que les sociétés d’assurance françaises
sont solvables. Alors que du point de vue de la théorie financière et des modèles traditionnels
de la structure financière, ces sociétés sont sous capitalisées. Ce décalage s’explique par les
éléments pris en compte dans le calcul du ratio de capital. Dans le cadre de la réglementaire,
on prend en considération uniquement les placements inscrits à l’actif de la société
d’assurance, alors que dans le cadre de la structure financière, on prend en considération tout
le total actif.

Les analyses réalisées nous permettent de conclure qu’en l’absence d’une réglementation
prudentielle qui encadre l’activité financière en général et l’activité de l’assurance en
particulier, l’exploitation du pouvoir explicatif du cadre théorique de la structure financière
permet d’analyser les déterminants de la structure financière des sociétés d’assurance.

Cependant, quel que soit la nature de la réglementation prudentielle en vigueur, elle ne doit
pas négliger d’encourager les investissements et les placements des institutions financières,
tout en préservant leur solvabilité. Selon Montalvo (2014)28, les autorités prudentielles ont
pour principal objectif de protéger les consommateurs (assurés, souscripteurs, épargnants…),
mais elles doivent aussi participer à la construction d’un secteur de l’assurance qui préserve
les intérêts des assurés (assurance dommages), protège les épargnants (assurance-vie),
garantit la stabilité du système financier et participe au financement de l’économie.

La plupart des travaux de recherche réalisés dans le cadre de la thématique de la


réglementation des fonds propres dans le secteur financier ont mis en évidence l’inefficacité
de la mise en place d’une réglementation prudentielle construite sur le principe de la mise en
place d’un ratio de capital pondéré aux risques auxquels s’expose la société financière
28
Directeur exécutif, Autorité Européenne des Assurances et des Pensions Professionnelles (EIOPA)

234
(Bichsel & Blum, 2004; Kim & Santomero, 1988; Rime, 2001). L’imposition d’un tel ratio
provoquerait l’adoption de comportements opportunistes par les assureurs, et les pousserait à
modifier la composition de l’actif de leurs bilans (composés principalement d’actifs
financiers) sans forcément encadrer la prise de risque. D’où l’intérêt d’instaurer une
réglementation optimale du capital qui empêchera les assureurs de contourner les règles
prudentielles mises en place par les autorités de régulation. Une réglementation qui
pousserait les assureurs maintenir un ratio de capital supérieur au minimum réglementaire
afin d’éviter tous les coûts liés à la réglementation.

Ainsi, la gestion actif-passif (Asset Liabilities Managemenet – ALM) pratiquée par les
sociétés d’assurance françaises sera impactée par le passage de la directive Solvency I à la
directive Solvency II en raison de la suppression des limites par classes d’actifs, ce qui va
simplifier la détention de prêts et d’actifs obligataires de toutes natures (émis par entreprises
cotées ou non cotées, notées ou non notées).

Enfin, la régulation doit être neutre et ne peut constituer une incitation artificielle qui
pousserait les sociétés d’assurance à pratiquer des arbitrages entre les différentes classes
d’actifs (ex : arbitrage entre les obligations d’Etat et les obligations d’entreprises).

235
CONCLUSION GENERALE

Tout au long de notre travail de recherche, nous avons mis en évidence le rôle joué par les
sociétés d’assurance qui sont devenues des acteurs incontournables et indispensables au bon
fonctionnement des économies modernes. Leur existence est justifiée dans la théorie de
l’intermédiation financière par la présence des asymétries d’information (Gurley & Shaw,
1956; Gurley & Shaw, 1958). Leur positionnement au service de l’économie s’est accentué
suite aux contraintes imposées aux banques pour financer les agents économiques, ce qui
rend ce terrain de recherche propice à la production de connaissances nouvelles. La
réalisation de notre travail doctoral nous a amené à mobiliser un ensemble de théories et de
techniques en phase avec nos objectifs de recherche.

Comme à l’issue de toute démarche de création de connaissances nouvelles, nous allons


présenter les principaux apports de cette thèse et soulignerons ses limites pour enfin proposer
des perspectives de recherche.

Le principal objectif de notre travail doctoral était de contribuer à l’analyse des déterminants
de la structure financière des sociétés d’assurance françaises et du rôle de l’intégration de la
régulation prudentielle dans la formation de leur niveau de fonds propres. Notre recherche se
situe dans le prolongement des études antérieures réalisées dans le cadre de l’analyse de la
structure financière des entreprises en général et des institutions financières (sociétés
d’assurance, banques, fonds de pension…) en particulier.

L’originalité de notre travail de recherche réside dans notre volonté de s’intéresser au secteur
de l’assurance dans un contexte franco-français. Il s’agit d’une industrie qui fait partie
intégrante de l’activité de l’intermédiation financière, et dont le choix est justifié par sa
participation vitale dans le financement de l’économie française (en 2013, le financement
global des entreprises par les assureurs français a atteint les 1125 Mds d’Euros)29.

Le premier volet de la première partie de cette recherche a été consacré à l’étude des
spécificités du marché de l’assurance français. Tout d’abord, nous avons présenté les
différentes dispositions réglementaires qui encadrent l’exercice de l’activité de l’assurance
sur le marché français, les différentes formes organisationnelles existantes et les spécificités
du bilan des compagnies d’assurance. Puis, après avoir défini les notions de la structure

29
FFSA. 2013. Rapport annuel.

236
financière et de la réglementation prudentielle en vigueur, nous avons abordé les
déterminants traditionnels de la structure financière des entreprises et présenté le cadre
théorique mobilisé. En effet, avant d’apporter notre contribution, il était nécessaire de
présenter les principaux travaux théoriques et empiriques réalisés sur cette problématique et
surtout susceptibles d’expliquer les facteurs qui influencent la détermination du niveau des
fonds propres dans le secteur des assurances en France.

Dans le deuxième volet de la première partie, un exposé a été fait du débat autour de la
structure financière et son évolution depuis les travaux précurseurs de Modigliani et Miller
(1958). Cette revue de littérature a été complétée par une présentation des différents travaux
réalisés sur la régulation des intermédiaires financiers.

Les recherches antérieures sur la structure financière font référence aux cadres conceptuels
fondateurs de la théorie financière moderne et établis par Modigliani et Miller (1958, 1963),
à la théorie du compromis (Trade-Off Theory - TOT) et à la théorie de financement
hiérarchique (Pecking Order Theory - POT). Les déterminants traditionnels de la structure
financière issus de ces théories offrent une base explicative importante pour la détermination
du niveau des fonds propres des sociétés d’assurance françaises.

Ces recherches combinées aux études menées par Shrieves & Dahl (1992) ; Rime (2001) et
Barth et al. (2001) sur l’impact du cadre réglementaire dans le choix de la structure
financière, nous offrent un corpus théorique solide pour analyser le rôle joué par la
réglementation prudentielle dans la détermination du niveau optimal des fonds propres.

La deuxième partie de notre travail de recherche a été consacrée à la réalisation d’un travail
de validation empirique. Tout d’abord, une présentation de la méthodologie de recherche
adoptée et une description des variables choisies ont été réalisées. Ensuite, nous avons
procédé à l’analyse des différentes régressions et relations entre les différentes variables
dépendantes et indépendantes.

Les analyses réalisées sur notre échantillon nous ont permis de valider un ensemble
d’hypothèses. Concernant les tests liés aux déterminants traditionnels de la structure
financière, plusieurs indicateurs comme la croissance, la profitabilité, la tangibilité et le cout
de la dette sont significativement liés au niveau de fonds propres, dans un cadre non
réglementaire. En prenant le niveau de fonds propres réglementaires comme variable
dépendante, des indicateurs comme la croissance, la tangibilité, la taille, la volatilité, la

237
liquidité et le coût des fonds propres sont significativement corrélés avec le niveau de fonds
propres, ce qui nous pousse à dire que les prédictions des théories de la structure financière
sont plus vérifiables dans un cadre réglementaire.

Le deuxième volet de notre travail empirique nous a permis de valider les hypothèses liées à
l’intégration d’un cadre réglementaire dans la détermination du niveau de fonds propres dans
le secteur de l’assurance en France. Les résultats obtenus nous prouvé qu’un environnement
réglementaire strict pousse les sociétés d’assurance à constituer un niveau de fonds propres
supérieur aux exigences réglementaires afin d’éviter les coûts d’un ajustement du niveau de
fonds propres.

Les apports de la recherche

Les principaux apports de notre travail de recherche sont d’ordres théorique, méthodologique
et pratique.

Sur le plan théorique, ce travail de recherche peut être accueilli comme une contribution au
débat académique existant sur les déterminants traditionnels de la structure financière des
sociétés financières et les intermédiaires financiers. La plupart des travaux de recherche
réalisés sur la thématique de la structure financière ont été consacrés aux firmes et les
institutions financières ont été systématiquement exclues. Le principal apport théorique de
notre thèse réside dans notre assimilation des sociétés d’assurance aux firmes avec la
tentative de tester les hypothèses qui émanent des théories de la structure financière, sur un
échantillon de sociétés issues du secteur des assurances français. Nos résultats montrent que
ces théories sont applicables aux sociétés d’assurance malgré l’existence d’une spécificité
liée à la particularité de l’activité de l’assurance, à la spécificité des actifs détenus, à la
structure du bilan et à l’encadrement de cette activité par une réglementation prudentielle en
nette évolution.

Les apports d’ordre méthodologique de notre recherche concernent les modèles proposés
dans le cadre du volet empirique de notre travail de recherche qui n’ont jamais été testés sur
un échantillon de sociétés d’assurance. L’utilisation de la technique statistique de
l’économétrie des données de panel pour traiter les données colletées constitue l’autre apport
méthodologique de notre travail. Cette technique nous a permis de disposer d’un nombre
important d’observations, d’intégrer les dimensions temporelle et individuelle dans la
réalisation des analyses et de prendre en compte l’hétérogénéité non observable entre les

238
sociétés d’assurance qui composent notre échantillon. La technique économétrique des
données de panel permet également de réduire le biais d’estimation des coefficients. Cela
nous a permis d’analyser la structure financière des sociétés d’assurance françaises pendant
une période de sept années (2006-2012). Dans le deuxième volet de notre travail empirique,
nous avons utilisé la méthode statistique des doubles moindres carrés qui nous a permis
d’observer l’endogénéité qui peut exister entre les variables dépendantes et l’une des
variables indépendantes. Cette méthode nous a également permis de prendre en
considération l’interrelation qui existe entre la variation du capital et la variation du risque.

Sur le plan pratique, notre recherche permet de contribuer au débat autour du rôle central que
jouent les fonds propres dans le secteur des assurances et sur les facteurs qui incitent les
sociétés d’assurance à chercher à contourner la réglementation prudentielle du capital et les
solutions possibles pour les éviter.

On assiste, depuis quelques années, à l’émergence de la flexisécurité (Lagarde, 2010) à


travers « la combinaison d’une plus grande souplesse accordée aux organismes d’assurance
dans la modélisation de leur profil de risque et d’un renforcement des autorités de contrôle
et de surveillance. ».

Figure 19. Paradigme de la société de risque appliqué au secteur financier

Plus de pouvoirs
Modernité attribués aux
financière : haut régulateurs pour
degré de contrôler les risques
sophistication des
produits

Emergence de la
seconde modernité
Crise de la modernité financière pour
financière due à Flexisécurité sauver le capitalisme
l’inefficience des financier de ses
dispositifs de propres turpitudes
régulation

Plus de flexibilité
accordée aux entreprises
dans la modélisation de
leurs risques

Source : De Lagarde (2010)

239
Les autorités prudentielles tentent d’apporter des réponses à ce phénomène dans la nouvelle
directive Solvency II :

- la surveillance et le contrôle des sociétés d’assurance ; taille, activités, gouvernance ;


- l’élargissement de la liste des risques pris en charge dans le calcul du ratio
réglementaire.

La directive Solvency II semble dynamiser la modernisation du secteur des assurances.

La mise en place de plusieurs seuils explicites pour classer les sociétés d’assurance en
fonction de leur ratio de capital permettrait d’établir de manière plus structurée les
conditions d’une intervention graduée du superviseur en cas de difficultés et réduirait les
prises de risques excessives des sociétés d’assurance en défaillance.

Les autorités réglementaires pourraient aussi accorder plus d’attention au ratio du capital non
pondéré du risque et éventuellement réfléchir à la mise en place d’une exigence minimale sur
ce ratio. Cela pourrait de rendre plus sûrs les grands groupes d’assurance qui ont un niveau
de capital relativement faible au regard de leur taille et dont la défaillance peut entrainer le
système financier dans son ensemble.

Les limites et perspectives de la recherche

La principale limite de notre travail de recherche se situe au niveau de l’élaboration du cadre


théorique de notre recherche. A l’instar des recherches antérieures réalisées dans le cadre de
la problématique de la structure financière des entreprises, nous avons adopté une posture
hypothético-déductive qui exige du chercheur de se fonder sur la revue de littérature dans
l’élaboration du modèle théorique. Cependant, les études réalisées sur ce thème dans le
secteur des assurances sont quasi-inexistantes, ce qui nous a poussé à construire notre
réflexion sur la base des travaux de recherches réalisés dans secteur bancaire et financier
pour établir notre modèle théorique. De même, en raison de l’absence d’études similaires
réalisées dans d’autres pays européens, on ne peut procéder à une comparaison de nos
résultats avec d’autres résultats. Une telle comparaison permettrait d’intégrer les cadres
nationaux dans l’analyse des niveaux de fonds propres dans le secteur de l’assurance. Cette
absence ne nous permet pas de peaufiner nos analyses et avoir ainsi une vision européenne
ou communautaire de l’application des dispositions réglementaires Solvency I et Solvency II.

240
L’autre limite réside dans le nombre limité d’observations traitées dans le cadre de notre
recherche. Cette limite s’explique par l’utilisation de la technique de données de panel qui
exige du chercheur de travailler sur des panels cylindrés, c’est-à-dire, sélectionner un
échantillon dont les informations recherchées sont disponibles pour toutes les sociétés
d’assurance étudiées et sur toute la période de l’étude (2006-2012).

Pour ce qui est des perspectives de notre travail de recherche, on propose l’introduction de la
technique statistique des données de panel pour analyser le comportement des sociétés
d’assurance françaises en matière du choix du niveau optimal de fonds propres. Ce type de
données permet d’améliorer la robustesse des résultats obtenus. De plus, l’analyse porte sur
la période 2006 à 2012, marquée par le passage d’une crise financière – causée par la crise
des Subprimes - qui a secoué le secteur financier et qui a provoqué la faillite de quelques
acteurs du secteur. Des faillites causées par l’imbrication qui existe entre les différents
acteurs du secteur financier et le phénomène de contagion. Ainsi, le prolongement de la
période de notre recherche au-delà de 2012 permettra d’accompagner la finalisation de la
mise en place du nouveau cadre réglementaire Solvency II, qui entrera en vigueur début
2016, et d’envisager plus sereinement les conséquences de l’introduction des nouvelles
normes réglementaires sur le secteur des assurances en France. Ce prolongement permettra
aussi d’offrir une comparaison permettant d’améliorer la connaissance de l’impact des
normes réglementaires sur les déterminants de la structure financière des sociétés
d’assurance françaises.

L’utilisation de cette même technique sur un échantillon européen permettra de traiter un


nombre important de données qui nous donnera la possibilité de réaliser une analyse
temporelle et transversale plus riche et plus robuste.

Toujours dans l’optique d’un prolongement de notre travail, il serait intéressant d’intégrer les
aspects macroéconomiques de la réglementation prudentielle (annexe) dans l’analyse de la
formation du niveau de fonds propres des sociétés d’assurance à l’échelle européenne. Les
résultats pourraient permettre de voir si la réglementation macro-prudentielle de chaque pays
influence la structure financière de ses compagnies d’assurance et d’en tirer les
enseignements nécessaires pour le régulateur.

Intégrer la forme organisationnelle dans le processus de détermination du niveau des fonds


propres (mutuelles, sociétés par actions).

241
Dans le secteur bancaire, force est de constater que la crise de 2008 est intervenue dans un
environnement très régulé et que les banques mises au banc des accusés étaient parmi les
références en termes de contrôle interne et de maîtrise du risque opérationnel (Jimenez &
Merlier, 2004; Power, 2005). Ceci soulève un ensemble d’interrogation sur l’efficacité du
système de régulation en place.

Aujourd’hui, la question n’est plus de savoir s’il faudrait oui ou non pas renforcer la
régulation du secteur financier mais plutôt de déterminer de quels systèmes de régulation
l’économie mondiale a besoin dans le contexte actuel.

242
TABLES DES MATIERES

INTRODUCTION GENERALE ................................................................................................................... 5


CHAPITRE INTRODUCTIF...................................................................................................................... 14
PARTIE I : LA STRUCTURE FINANCIERE DANS LE SECTEUR DE L’ASSURANCE ET LES DISPOSITIONS
REGLEMENTAIRES ............................................................................................................................... 34
CHAPITRE I : STRUCTURE DU MARCHE FRANCAIS DE L’ASSURANCE ET STRUCTURE DU CAPITAL ..... 36
SECTION I : LES PARTICULARITES JURIDIQUES, REGLEMENTAIRES ET ORGANISATIONNELLES .......... 37
Sous-section 1: Les spécificités juridiques et réglementaires ............................................................. 37
1. Les exigences en termes de fonds propres .................................................................................... 37
2. Investissements des sociétés d’assurance et placements financiers ............................................ 40
3.Les placements autorisés ................................................................................................................. 41
4.La congruence actif-passif ................................................................................................................ 42
5. La politique fiscale des sociétés d’assurance .................................................................................. 45
6. Les sociétés d’assurance générale .................................................................................................. 46
Sous-section 2 : Les formes juridiques et organisationnelles des sociétés d’assurance..................... 49
1. La forme mutualiste……………………………………………………………………………………………….…………………..49
2. Le Loyd's……………………………………………………………………………………………………………….…………………….52
3. Les sociétés par actions……………………………………………………………………………….……………………………..53
4. Les différentes formes organisationnelles et performance…………………………………………………………54
5. Forme organisationnelle et efficience…………………………………………………………………………………………55

Sous-section 3 : les spécificités financières et structure du bilan des sociétés d’assurance .............. 57
1. Les cycles financier et d’exploitation ............................................................................................. 57
2. L’évaluation des sociétés d’assurance ........................................................................................... 60
3. Les risques auxquels sont confrontés les sociétés d'assurance………………………………………..………….63

4. Les modèles d'estimation des risques ……………………………………………………………………………….…….…67

Sous-section 4 : la structure du bilan des sociétés d’assurance ......................................................... 70


1. Les spécificités du bilan des sociétés d'assurance……………………………………..………………………………..70

2. La structure de l’actif du bilan........................................................................................................ 74


3. La structure du passif du bilan ....................................................................................................... 78
SECTION II : LES THEORIES TRADITIONNELLES DE LA STRUCTURE FINANCIERE ................................. 81
Sous-section 1 : Le cadre théorique de la structure de capital ........................................................... 81
1. Débuts de la théorie financière moderne ...................................................................................... 81

243
2. Evolution du cadre conceptuel de la structure financière ............................................................. 88
Sous-section 2 : L’évolution de la théorie de la structure financière.................................................. 89
1. Développement théorique de la structure du capital.................................................................... 89
2. La Pecking Order Theory (POT) ...................................................................................................... 94
CHAPITRE II : DU CADRE TRADITIONNEL DE LA STRUCTURE DU CAPITAL AU CADRE PRUDENTIEL.. 104
SECTION I : REVUE DE LITTERATURE DE LA STRUCTURE FINANCIERE DANS LE SECTEUR FINANCIER
........................................................................................................................................................... 105
Sous-section 1 : La théorie financière dans le secteur financier ....................................................... 105
1. Les fonds propres comptables et pression du marché…………………………………………………………...…106

2. Optimisation de la structure financière : un moyen de minimiser le coût du capital…………………111

3. Les validations empiriques de la structure financière dans le secteur financier ......................... 112
4. Les travaux empiriques dans le secteur financier……………………………………………………………………..117

Sous-section 2 : Hypothèses de recherche issues de la théorie financière dans le secteur des


assurances……………………………………………………………………………………………………………………………………121
1. Nos hypothèses issues de la théorie du financement hiérarchique (POT)………………………..……….123

2. Nos hypothèses issues de la théorie du compromis (TOT)…………………………………….………………….125

SECTION II : INTRODUCTION DU CADRE PRUDENTIEL REGLEMENTAIRE DANS LA DETERMINATION DE


LA STRUCTURE FINANCIERE .............................................................................................................. 131
Sous-section 1 : L’impact des exigences de fonds propres ............................................................... 131
1. Mise en place de la marge de solvabilité et ses composantes………………………………………….……….133

2. Le cadre réglementaire de la structure du capital…………………………………………………………..…………135


Sous-section 2 : La mise en place d’un niveau réglementaire de fonds propres .............................. 139
1. Les déterminants du niveau de fonds propres exigé par la régulation……………………………………..140

2. Impact de la réglementation prudentielle……………………………………………………………………………..….143

Sous-section 3 : La mise en place d’un ratio de fonds propres et ses impacts sur la structure
financière des sociétés d’assurance .................................................................................................. 144
1. Objectifs du capital économique……………………………………………………………………………………….……..145
2. Les techniques d'appréciation du capital économique………………………………………………………………147

3. Fonds propres et gestion des risques………………………………………………………………………………..………148

Sous-section 4: La modernisation du secteur financier………………………………………………………….……..152

1. La sophistication financière dans le secteur des assurances ....................................................... 151


2. Nos hypothèses de recherche sur l’impact de la réglementation ............................................... 154

244
PARTIE II : MODELISATION DES DETERMINANTS DE LA STRUCTURE FINANCIERE DES SOCIETES
D’ASSURANCE FRANCAISES ET IMPACT DES FACTEURS REGLEMENTAIRES ..................................... 161
CHAPITRE III : LA DEMARCHE METHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE ............................................ 163
SECTION I : LE CADRE EPISTEMOLOGIQUE ET LA DEMARCHE METHODOLOGIQUE DE LA RECHERCHE
........................................................................................................................................................... 164
Sous-section 1 : Justification des choix épistémologiques ................................................................ 164
1. Le choix du paradigme………………………………………………………………………………………………….…………..165

2. Le positionnement épistémologique………………………………………………………………………….……………..169

3. Le processus de la recherche……………………………………………………………………………………….……………171

Sous-section 2 : La méthodologie de la recherche ........................................................................... 174


1. Les méthodes employées………………………………………………………………………………………………….………175

2. L’analyse des données collectées ................................................................................................ 175


SECTION II : SELECTION DE L’ECHANTILLON ET CARACTERISTIQUES DES SOCIETES D’ASSURANCE
ETUDIEES ........................................................................................................................................... 185
Sous-section 1 : sélection de l’échantillon étudié et collecte des données ...................................... 185
1. Formulation des hypothèses de recherche…………………………………………………………………..…………..187

2. Les relations attendues entre les facteurs et le niveau du capital .............................................. 190
3. Les hypothèses relatives à l'impact de la réglementation sur la structure financières de sociétés
d'assurance………………………………………………………………………………………………………………………….……….192

Sous-section 2 : La mesure des différentes variables ....................................................................... 192


1. Les variables dépendantes…………………………………………………………………………………………………..……194

2. Les variables explicatives du modèle……………………………………………………………………………….……….197

CHAPITRE IV : ETUDE EMPIRIQUE DE LA STRUCTURE FINANCIERE DES SOCIETES D’ASSURANCE


FRANCAISES ....................................................................................................................................... 206
SECTION I : ANALYSE EMPIRIQUE DES DETERMINANTS TRADITIONNELS DE LA STRUCTURE
FINANCIERE DES SOCIETES D’ASSURANCE ........................................................................................ 207
Sous-section 1 : analyse des différentes relations et résultats de l’étude........................................ 207
1. Le modèle économétrique basé sur les fonds propres comptables ............................................ 207
2. Le modèle économétrique basé sur les fonds propres réglementaires ...................................... 209
Sous-section 2 : analyse des résultats obtenus ................................................................................. 210
1. La croissance………………………………………………………………………………………………………………………….…211

2. La profitabilité…………………………………………………………………………………………………………………………..212

3. La tangibilité …………………………………………………………………………………………………………………………….215

245
4. La taille…………………………………………………………………………………………………………………………………….216

5. La volatilité………………………………………………………………………………………………………………………………218

SECTION II : IMPACT DE L’INTRODUCTION DU CADRE REGLEMETAIRE SUR LE NIVEAU DES FONDS


PROPRES DES SOCIETES D’ASSURANCE ............................................................................................. 220
Sous-section 1 : Les cadres méthodologique et empirique de la recherche .................................... 220
1. Construction économétrique et modélisation………………………………………………..…………………………221
2. Description de la relation entre le risque et le capital et intégration des variables
réglementaires…………………………………………………………………………………………………..…………………………225

Sous-section 2 : Analyse des régressions sur la relation entre la réglementation et le niveau de


capital : discussions des résultats...................................................................................................... 225
1. Analyse des différentes régressions……………………………………………………………….………………………..226
2. Analyse des relations entre les variables dépendantes et les variables explicatives
réglementaires……….. ........................................................................................................................ 231
3. Vers une règlementation efficace ................................................................................................ 234
CONCLUSION GENERALE ................................................................................................................... 236
TABLES DES MATIERES ...................................................................................................................... 243
BIBLIOGRAPHIE .................................................................................................................................. 247
LISTE DES EQUATIONS ....................................................................................................................... 266
LISTES DES TABLEAUX........................................................................................................................ 267
LISTES DES FIGURES ........................................................................................................................... 268
ANNEXES............................................................................................................................................ 269

246
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265
LISTE DES EQUATIONS

Équation 1. L’effet de levier ................................................................................................................ 86


Équation 2 : yit = xit b + αit + uit ................................................................................................................ 180
Équation 3 : E (Uit, Ui’t’) = δii’, σ2a + δii’, δtt’, σ2ε ................................................................................... 181
Équation 4 : Yi = xi.b + ui..................................................................................................................... 181
Équation 5 : (yit - yi) = (xit - xi) b + (uit - ui) ........................................................................................... 181
Équation 6. Modèle économétrique des déterminants traditionnels de la structure financière ..... 208
Équation 7. Modèle économétrique des déterminants des fonds propres règlementaires ............ 209

266
LISTES DES TABLEAUX

Tableau 1. Les cotisations d’assurances par pays (en Mds d’Euros) ..................................................... 7
Tableau 2. Les dates importantes de l’histoire du marché de l’assurance ........................................... 8
Tableau 3. Classification des risques des sociétés d’assurance .......................................................... 17
Tableau 4. Le montant de fonds propres qu’exige la loi pour chaque type de société d’assurance .. 37
Tableau 5. Modalités de versement du capital social ......................................................................... 38
Tableau 6. CA réalisés par les assureurs dans les dix premières économies mondiales en 2012...... 46
Tableau 7. Les différentes formes organisationnelles dans le secteur des assurances ...................... 55
Tableau 8. Apparaisal Value ................................................................................................................ 63
Tableau 9. Le bilan type issu de l’échantillon étudié .......................................................................... 73
Tableau 10. Bilan en grandes masses d’une société d’assurance de dommages ............................... 73
Tableau 11. Placements des sociétés d'assurance Françaises à la fin 2012 ....................................... 76
Tableau 12. Montant global des fonds propres de l’assurance en France (Mds d'Euros) .................. 79
Tableau 13. Le montant global des provisions techniques de l’assurance française (Mds d'Euros) .. 79
Tableau 14. Les sociétés d’assurance de l’échantillon étudié........................................................... 185
Tableau 15. Les relations attendues entre les variables dépendantes et les variables explicatives 191
Tableau 16. Résultats des régressions sur la variable niveau de fonds propres .............................. 208
Tableau 17. Résultats des régressions sur la variable niveau de fonds propres réglementaire ...... 210
Tableau 18. Résultats des tests empiriques et validations des hypothèses ..................................... 219
Tableau 19. Résultat du modèle à deux équations simultanées....................................................... 227
Tableau 20. Relation entre les variables dépendantes du modèle ................................................... 228
Tableau 21. Relation ROA/ ∆ CAPj,t , ∆ RISKj,t .................................................................................. 229
Tableau 22. Relation SIZE/∆ RISK ...................................................................................................... 230
Tableau 23. Relation LIQ/ ∆CAP ........................................................................................................ 231
Tableau 24. Résultats des relations ∆CAP, ∆RISK et les variables réglementaires.......................... 232

267
LISTES DES FIGURES

Figure 1. Les différents niveaux de stabilité ........................................................................................ 28


Figure 2. Les axes de la recherche ....................................................................................................... 30
Figure 3. Chronologie des flux dans une opération d’assurance ........................................................ 57
Figure 4. Périmètre de la réglementation prudentielle dans le secteur des assurances .................. 131
Figure 5. La démarche hypothético-déductive ................................................................................. 173
Figure 6. Les axes de la recherche ..................................................................................................... 187
Figure 7. Niveau des fonds propres et hiérarchisation des sources de financement .......................... 188
Figure 8. Niveau des fonds propres et arbitrage entre les sources de financement ........................ 190
Figure 9. Niveau des fonds propres et exigences réglementaires .................................................... 192
Figure 10. Le niveau des fonds propres de l’échantillon ................................................................... 195
Figure 11. Le montant moyen des fonds propres de l’échantillon ................................................... 196
Figure 12. La croissance moyenne de l’échantillon........................................................................... 197
Figure 13. La profitabilité moyenne de l’échantillon ........................................................................ 198
Figure 14. L’évolution de la volatilité moyenne des résultats........................................................... 200
Figure 15. Tangibilité moyenne de l’échantillon ............................................................................... 201
Figure 16. La liquidité moyenne de l’échantillon .............................................................................. 202
Figure 17. Le coût moyen du financement........................................................................................ 203
Figure 18. Le coût moyen des fonds propres .................................................................................... 204
Figure 19. Paradigme de la société de risque appliqué au secteur financier.................................... 239

268
ANNEXES

269
Annexe 1

La collecte nette de l’assurance et de l’épargne réglementée en France (en Mds d’euros)

Source : FFSA (2013)

270
Annexe 2 :

Evolution de la solvabilité et de la rentabilité des sociétés vie, capitalisation et mixtes


d’assurance en France (2002-2012)

Source : FFSA (2013)

271
Annexe 3 :

Evolution de la solvabilité et de la rentabilité des sociétés dommages en France (2002-


2012)

Source : FFSA, Banque de France, Caisse des Dépôts (2013)

272
Annexe 4 :

Présentation comparée des perspectives macroprudentielle et microprudentielle

PERSPECTIVE PERSPECTIVE
MACROPRUDENTIELLE MICROPRUDENTIELLE

Objectif immédiat Limiter la crise financière Limiter les difficultés


systématique individuelles des
institutions

Objectif final Eviter les coûts en termes Protéger le consommateur


de PIB (investisseur/déposant)

Caractérisation du Considéré comme étant Considéré comme étant


risque dépendant du indépendant du
comportement collectif comportement des
(« endogènes ») individus (« exogènes »)

Corrélations entre les


institutions et
Importantes Sans objet
expositions communes

Calibrage des contrôles En termes de risque En termes de risques


prudentiels système : du haut vers le propres à chaque
bas (top-down) institution : du bas vers le
haut (bottom-up)

Source : Borio (2003, 2009)

273
Annexe 5.

Résultat du test d’Hausman sur les paramètres du modèle à effets fixes

Test Summary Chi-Sq. Statistic Chi-Sq. d.f. Prob.


Cross-section random 52.149678 8 0.0000

Variable Fixed Random Var(Diff.) Prob.


DC 0.036116 -0.032485 0.002287 0.1514
GROW -0.003428 -0.009654 0.000002 0.0000
LIQ -0.033751 -0.082111 0.001837 0.2591
PRO 0.411361 0.543577 0.009112 0.1660
RISK -0.000662 0.000023 0.000000 0.0000
SIZE -0.007725 -0.084785 0.000303 0.0000
TANG -0.293208 -0.546274 0.021778 0.0864
CFP 0.013183 -0.005172 0.000020 0.0000

Test d’Hausman :

Test H0 : la différence entre les coefficients des effets fixes et aléatoires n’est pas systématique

Chi2(8) = 52.149678

Prob >Chi2 = 0.0000

274
Annexe 6

La matrice des corrélations

NFP DC PRO LIQ RISK SIZE TANG GROW CFP


NFP 1.000000 -0.279923 0.706544 -0.075009 0.209422 -0.804021 -0.064842 -0.049966 0.269879
DC -0.279923 1.000000 -0.264851 -0.056540 0.032829 0.182977 0.056668 -0.050509 0.098643
PRO 0.706544 -0.264851 1.000000 -0.205191 0.140740 -0.518459 -0.100718 0.178527 0.529359
LIQ -0.075009 -0.056540 -0.205191 1.000000 -0.042269 -0.169814 -0.229893 -0.084587 -0.239797
RISK 0.209422 0.032829 0.140740 -0.042269 1.000000 -0.142292 0.041447 0.019097 0.390024
SIZE -0.804021 0.182977 -0.518459 -0.169814 -0.142292 1.000000 -0.055666 0.012360 -0.221636
TANG -0.064842 0.056668 -0.100718 -0.229893 0.041447 -0.055666 1.000000 -0.060454 0.100138
GROW -0.049966 -0.050509 0.178527 -0.084587 0.019097 0.012360 -0.060454 1.000000 0.088663
CFP 0.269879 0.098643 0.529359 -0.239797 0.390024 -0.221636 0.100138 0.088663 1.000000

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