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THEORIE DU CONTENTIEUX DES AFFAIRES

INTRODUCTION
Chapitre I : La prévention du risque de contentieux.
Section I : L’anticipation du risque de contentieux.
Paragraphe I : La veille juridique.
Paragraphe II : La communication efficiente.
Section II : La sécurisation de la relation.
Paragraphe I : L’approche prospective dans la quête du partenaire.
Paragraphe II : L’engagement dans la relation d’affaires.

Chapitre II : La gestion du contentieux d’affaires.


Section I : Le règlement extrajudiciaire ou amiable.
Paragraphe I : Les mécanismes internes de règlement de conflits.
Paragraphe II : Les mécanismes externes de règlement des conflits.
Section II : Le règlement juridictionnel du contentieux des affaires.
Paragraphe I : Les juridictions étatiques.
Paragraphe II : Les juridictions privées ou arbitrales.

INTRODUCTION.
1
Parler du contentieux doit prendre nécessaire point de départ sur la définition du
terme.
En effet, dans le langage courant, ce mot renvoie à un litige, un différend ou une
querelle. Avec cette prégnance de conflit, le mot désigne par ailleurs la matière
opposée à celle dite gracieuse1.
En droit, il a une acception plus ou moins dédiée et renvoie au processus permettant
de se prononcer sur la recevabilité et le bien-fondé ou non des prétentions en
présence.
Le contentieux2 ne convoque pas un ensemble de corps de règles certain mais
l’ensemble des litiges s’élevant dans une relation. Il peut s’agir donc d’une affaire
civile, commerciale, sociale, fiscale, administrative, bancaire etc…. C’est en cela qu’il
se différencie, par exemple, de la procédure civile (droit judiciaire privé) ou de la
procédure pénale qui sont des ensembles de corps de règles de droit gouvernant
l’organisation et le fonctionnement de la justice dans leur domaine spécifique.
Et, c’est parce que le contentieux3 peut porter sur un litige pouvant trouver solution
hors du système judiciaire étatique que son domaine déborde les limites d’une
quelconque autre discipline juridique.
Quoiqu’il en soit, le conflit suppose le délitement d’une relation, le choc de
prétentions à l’intérieur de cette dernière. Et, à chaque fois que la situation se
présente, les parties sont souvent tentées de chercher une solution afin d’en apaiser
les ardeurs. Celle-ci peut être amiable ou judiciaire.
Elle est amiable, lorsque les parties conviennent librement de se faire confiance eux-
mêmes ou à l’intervention d’un tiers dans l’ébauche des voies de sorties de crise, sans
faire recours au juge. Ainsi, par des concessions réciproques, les parties au conflit
évitent l’aléa judiciaire et parviennent à un accord de leur propre chef ou du fait de
l’intervention du tiers.
Parfois par contre, cet accord peut résulter d’une transaction, c’est-à-dire, le paiement
d’une somme d’argent préalablement fixée par la loi ou les règlements soit à titre de
sanction pécuniaire, soit à titre de réparation librement convenue entre les parties.
Outre ces voies de règlement, les parties peuvent également soumettre leur litige à
un juge aux fins de résolution. On parle alors de règlement judiciaire.

1
Caractérise une procédure, lorsque, en l'absence d'un conflit d'intérêts, le tribunal est saisi d'une demande dont
la loi exige qu'une situation juridique soit soumise à son contrôle.

2
Les deux notions sont bel et bien liées, puisqu'on parle de contentieux pour désigner une action juridique
visant à faire trancher un litige par un juge. Partant de cette définition, tous les litiges ne donnent pas lieu à un
contentieux, mais un contentieux est toujours le résultat d'un litige.

3
Le contentieux des affaires regroupe l'ensemble des litiges relatifs au droit des affaires, notamment
recouvrements, actions en exécution contractuelle, conflits d'associés, d'actionnaires ou dirigeants, litiges post-
acquisition ou encore abus de majorité et de minorité.
2
Il est également possible de saisir un tribunal arbitral lorsque l’objet du litige est hors
du domaine des facultés indisponibles telles que l’ordre public, le statut personnel ou
les bonnes mœurs.
Quant à « affaires », il désigne, ici, l’ensemble des activités économiques ou de
manière plus spécifique une instance ou une procédure. Le contentieux des affaires
s’intéresse donc, de manière générale, au management des litiges s’élevant dans les
activités économiques.
Soucieuse de son épanouissement, l’entreprise veille à prévenir tous les risques de
troubles pouvant affecter négativement ses activités.

Et, lorsque le trouble se réalise malgré tout l’investissement fourni dans la


prévention, l’entreprise doit gérer au mieux ce contentieux afin d’en contenir les
effets pouvant atteindre son prestige ou son bon fonctionnement.

Pour ce faire, certaines entreprises mettent en place un service spécialisé aux fins
d’assister la Direction dans le traitement des questions juridiques que leur posent les
relations internes ou externes auxquelles elles doivent faire face.

Souvent désigné sous l’appellation de « service contentieux », ce service rédige les


projets de contrats, relance les débiteurs, suit les réclamations des clients et des
fournisseurs et les procédures que ces derniers peuvent avoir introduites contre elles
ou, que l'entreprise a engagées etc….

C’est donc autour de ces deux considérations que s’articulera essentiellement notre
réflexion. Il s’agira de voir, dans une première partie, la prévention du risque de
contentieux (chap. I) avant de faire de même, et dans une seconde partie, le règlement
du contentieux (chap. II).

Chapitre I : LA PREVENTION DU RISQUE DE CONTENTIEUX.

3
Elle repose sur le souci de l’entreprise de minimiser les risques juridiques de conflits
et s’articule autour d’une politique d’anticipation de difficultés dans la culture de la
relation d’affaires.

Qu’elles soient endogènes4 ou exogènes5 à la relation, l’entreprise doit être en mesure


de développer des outils et des moyens propres à contenir les causes de conflits dans
une proportion raisonnable et soutenable. L’idée ici est d’éviter le différent ou sa
transformation en contentieux (section I) par le choix et la culture d’une relation de
qualité (section II).

Section I : L’anticipation du risque de contentieux.

Dans le milieu des affaires, la connaissance des règles de jeu (usages, coutumes, lois et
règlements), la bonne foi et le respect des engagements pris participent grandement à
la consolidation de la relation et à la prévention du risque de son délitement.

Aussi, participe de la survie d’une relation d’affaires, l’ouverture d’un espace


d’échanges et de partage dynamique et capable de vaincre les incompréhensions ou
autres écarts de prétentions.

C’est pourquoi l’entreprise se doit de faire dans la veille juridique (paragraphe I),
mais aussi et surtout, dans la culture d’un dialogue sain et constructif (paragraphe II).

Paragraphe I : La veille juridique.

Elle appelle de la part de l’entreprise une certaine somme de compétences juridiques


propre à garantir une bonne appropriation de l’esprit et de la lettre des textes
encadrant son activité et ses relations.

En principe, un professionnel est censé avoir une certaine maitrise des dimensions
techniques, administratives et juridiques de son activité. Il ne peut pas et ne doit pas
plaider l’ignorance. Toutefois, l’attitude vertueuse et non transgressive de la loi reste
le fruit d’une quête permanente de connaissances de son esprit souvent versatile.

Pour parvenir à cette fin, l’entreprise doit mettre en œuvre des instruments d’études
et d’analyses adéquats et aptes à permettre une bonne appréhension de toutes les
situations juridiques encadrant la vie de la structure.

Cette tâche incombe généralement à un personnel qualifié (juriste) ou un service


dédié (service juridique) en interne. A défaut de cette option, l’entreprise peut

4
Relevant du fait d’une partie à la relation (inobservation d’une clause, violation d’une valeur sociétale protégée
au moyen d’une sanction pénale etc….).

5
Relevant d’un fait extérieur à la volonté des parties au conflit (l’imprévision, le cas fortuit ou force majeur
etc…).
4
s’attacher les services d’un cabinet d’avocat par le mécanisme de l’externalisation de
cette tâche.

Tous ces travaux offrent à l’entreprise de réelles opportunités d’appréhension des


spécificités d’un texte de loi, d’un règlement, d’un contrat ou d’une jurisprudence.
De même, ils permettent de jauger la qualité ou l’utilité d’une relation d’affaires.

Aussi, l’entreprise doit développer des mécanismes de contrôle et d’évaluation de


toutes les situations juridiques, les procédures, les actes établis ou conclus par elle en
vue de s’assurer de leur régularité ou de leur conformité, de l’intégrité et de la
sincérité des informations en jeu. On parle alors d’audit juridique.

Ce travail d’investigation permet d’apprécier l’efficacité des engagements de nature


juridique. Et, en tant que révélateur potentiel de risques de contentieux, il facilite
l’ébauche, par anticipation, de solutions adéquates.

Toutes ces opérations aident à prévenir le risque de contentieux. Toutefois, leur


efficacité dépend en partie de la qualité des canaux de circulation des enseignements
qu’elles permettent de collecter.

Paragraphe II : Une communication efficiente.

La minimisation du risque de contentieux nécessite de la part de l’entreprise tout un


investissement en vue de la mise en place d’une mécanique de collecte et de
traitement d’informations. Ce faisant et pour tirer le meilleur profit des résultats de
ce travail, l’entreprise se doit de développer des éléments de langage adaptés à ses
besoins d’épanouissement.

Il faut dire que la reine de la matière première de toute entreprise réside dans la
relation.
En effet, l’entreprise est incarnée par des personnes physiques et ne fonctionne que
sur la base d’une relation. C’est notamment le cas des sociétaires, salariés,
partenaires, clients et autres. La satisfaction de ses besoins sociaux et matériels est
intimement liée à l’existence d’une relation construite au moyen de la
communication.
Ainsi, pour réduire le risque de contentieux, l’entreprise se doit d’adapter son
discours à la nature de la relation avec toute la vigilance nécessitée par la culture
capitalisée en la matière. Le discours doit être empreint de dignité, de sincérité et
d’objectivité car, comme disait Goethe, « parler est un besoin, écouter est un art ».
Ce faisant, l’entreprise doit avoir une certaine finesse dans l’expression de ses
besoins, une profonde écoute dans la réception des offres afin de parvenir à la
conclusion d’une relation sérieuse. En affaires, disait Auguste DETOEUF, « mentir
n’est jamais nécessaire, rarement utile et toujours dangereux ».

5
Une bonne communication participe à assainir la relation et à renforcer la
coopération ou le partenariat. Elle permet de lever les équivoques et facilite la
mutualisation des prétentions des parties à la relation.

Section II : La sécurisation de la relation d’affaires.


Dans le monde des affaires, la relation est axiale et sa nature est fonction du besoin
de l’entreprise.
En effet, l’entreprise ne compte que sur les relations qu’elle noue, de manière
occasionnelle ou permanente, pour la réalisation de ses ambitions. Elles peuvent être
locales ou internationales et porter sur des partenaires physiques ou morales, de
droit privé ou public.
En principe, quelle que soit sa nature, la relation doit être le fruit d’une minutieuse et
préalable investigation (paragraphe I) et sa formalisation précautionneuse (paragraphe
II).

Paragraphe I : L’approche prospective dans la quête du partenaire.


La prévention du risque de contentieux commande l’entreprise à développer des
instruments propres à guider ses choix avec prudence sur le partenaire ou sur le
marché.
Ainsi, toutes les informations pouvant intéresser le potentiel candidat ou marché
doivent faire l’objet d’une minutieuse analyse afin de pouvoir adapter l’offre à la
demande en présence (principe, modalités, conditions et perspectives).
Cette démarche permet d’écarter toute offre suspicieuse ou de l’accepter avec toute la
précaution qui sied.
Par exemple, le candidat au casier judiciaire chargé d’actes transgressifs des règles
du domaine d’activités de l’entreprise présente un risque réel de contentieux. Il en est
de même d’un potentiel partenaire économique déficitaire avec le risque du défaut
de paiement, etc…. L’entreprise qui, malgré la saillance du risque, engage une
relation avec ce type de partenaire est seule responsable des conséquences qui en
résulteraient.
Bien que facultative, l’approche prospective a le mérite de protéger l’entreprise
contre d’éventuelles surprises et l’adage latin érigé en principe de droit selon lequel,
« nemo auditur propriam turpitudinem allegans », c’est-à-dire, « nul ne peut se prévaloir de
sa propre turpitude ».
Fautive dans certaines circonstances, l’entreprise peut avoir des difficultés pour
obtenir du juge la reconnaissance de la responsabilité de son cocontractant indélicat
ou défaillant et mettre en péril son investissement.

6
C’est notamment le cas du principe de l’inopposabilité à la masse des créanciers de
certaines opérations effectuées en période suspecte6. Il en est également de même
dans la politique de lutte contre le blanchiment des capitaux où la loi met à la charge
de certains professionnels (les banquiers ou gestionnaires de certaines institutions
financières) de procéder, dans certaines opérations, à des investigations sur le
partenaire et sur l’origine et la destination des fonds qu’il engage7.
C’est dire donc que l’obligation d’investigation sur le partenaire puise parfois sa
source dans la règle de droit et revêt alors les atours d’une injonction de connaître
son client (know your customer) qui donne l’acronyme « KYC ».
Traditionnellement, les écritures publiques des institutions judiciaires,
administratives, fiscales ou foncières constituaient une précieuse source
d’information pour l’entreprise. Aujourd’hui, les réseaux sociaux offrent de belles
opportunités de recherches.
Cependant, avec l’envie grandissante de protection des données à caractère
personnel du citoyen, la tâche se complique de plus en plus pour l’entreprise,
notamment, dans la constitution ou l’exploitation des bases de données.
En définitive, la démarche prospective ne doit pas être un mobil pour investir les
entrailles de l’entreprise de l’extorsion ou de la soustraction frauduleuse
d’informations. Son usage excessif ou illégal peut effectivement constituer une source
potentielle de risques de contentieux.

Quoiqu’il en soit, l’effectivité de la relation est le lit d’écoulement de toute affaire.

Paragraphe II : L’engagement dans la relation d’affaires.

Une relation d’affaires ne se distingue pas véritablement d’un contrat. Il s’agit


donc « d’accord de volontés générateur d’obligations8 ».

Bien que le monde des affaires soit le domaine de la célérité, il s’y développe
d’innombrables relations économiques ou sociales. Généralement, fondées sur des
engagements verbaux, dites relations sont de potentielles sources de conflits et
posent d’énormes difficultés dans l’administration de la preuve.

Pourtant, en droit sénégalais l’article 9 du code des obligations civiles et


commerciales (COCC), portant droit commun de la preuve, dispose que « celui qui
réclame l’exécution d’une obligation doit en prouver l’existence. Celui qui se prétend
libéré doit prouver que l’obligation est inexistante ou éteinte ».

6
Cf art. 5 et 65 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives et d’apurement du passif.

7
Loi n° 2005 – 554 relativement à la lutte contre le blanchiment des capitaux.

8
Art. 40 al. 1er C.O.C.C
7
Ainsi, le délitement d’une relation met à la charge des litigants l’obligation
d’administrer la preuve de leurs prétentions réciproques. Cela dit, l’entreprise se
doit, même en l’absence d’écrit, de se donner les moyens de caractériser la relation
afin de permettre l’imputation de la responsabilité en cas de litige.

Si l’administration de la preuve peut se faire par tout moyen 9dans des rapports
commerciaux, il en est autrement dans d’autres secteurs d’activités. Par exemple,
l’article L.37 du code du travail dispose que « le contrat d’engagement à l’essai est,
à peine de nullité, constaté par écrit…. ».

Aussi, même s’il est fait exception à cette règle, « toutes les fois qu'il n'a pas été
possible au créancier de se procurer ou de produire une preuve écrite de la convention 10 »,
l’article 14 du COCC dispose qu’« il doit être passé acte devant notaire ou signatures
privées de toute convention dont l’objet excède 200 Francs ».

C’est dire donc que la nécessité de se prémunir d’éléments probatoires aux fins de
la caractérisation d’une relation est vivement recommandée. Et, l’écrit se présente
ainsi comme un puissant instrument de prévention de litiges.

A propos, les usages ont développé, dans le cadre des rapports publics - privés, un
mémorandum d’entente communément appelé MOU (memorandum of
understanding) pour encadrer les pourparlers en vue d’une éventuelle
collaboration.

Quoiqu’il en soit, il ne faut jamais perdre de vue qu’il existe des situations dans
lesquelles l’écrit ne remplit pas seulement cette fonction probatoire. En effet, la loi
l’élève parfois au rang de condition de validité du contrat11.

Au demeurant, toute cette politique préventive n’interdit pas la survenance d’un


conflit qu’il s’agira de gérer.

Chapitre II : LA GESTION DU CONTENTIEUX D’AFFAIRES.

La gestion du contentieux d’affaires est la suite logique de la gestion du risque de


contentieux. Si malgré toutes les précautions prises, il s’élève un litige, l’entreprise
sera tenu d’engager tous les moyens propres à faciliter son dénouement heureux.

Le problème c’est que le monde des affaires est très dynamique et les situations
juridiques qui y naissent ne peuvent être que très fluctuantes. Et, en dépit des

9
Art. 5, Acte Uniforme portant droit commercial général.

10
Art. 15, COCC.

11
Art. 383, COCC.
8
efforts dans l’anticipation du risque de contentieux, le choc des prétentions finit
toujours par produire des étincelles qui, parfois, génèrent des conflits. Pour
solutionner ces conflits, seulement deux voies s’ouvrent aux litigants : celle du
règlement extrajudiciaire (section I) ou celle judiciaire (section II).

Section I : Le règlement extrajudiciaire ou amiable.


Il est dit extrajudiciaire ou amiable car il s’effectue hors du système judiciaire et de
manière amiable soit par la mise en œuvre d’instruments internes à la personne des
litigants (paragraphe I) soit, tout simplement, en convoquant des mécanismes qui leur
sont extérieurs (paragraphe II).

Paragraphe I : Les mécanismes internes de règlement amiable de conflits.


Comme annoncé plus haut, le litige est un aléa pour l’entreprise. Il peut affecter
négativement le prestige ou le patrimoine de l’entreprise. Ce faisant, celle-ci doit
l’intégrer dans toutes ses projections quotidiennes de sorte à en atténuer les
éventuelles conséquences.
Ainsi, l’entreprise doit s’organiser de manière à être en mesure de prendre en charge,
en tout temps et en tout lieu, tout litige s’élevant dans l’une quelconque de ses
relations.
Généralement, lorsque l’objet du litige le permet, des professionnels dédiés pris
individuellement ou collectivement au sein d’un organe attitré (service juridique,
service commercial, service du contentieux, service des ressources humaines etc…) font le
travail de raccommodage de la relation délitée afin d’éviter sa transformation en
contentieux pouvant nécessiter la mobilisation d’importants moyens ou la saisine
d’institutions habilitées (inspection du travail, tribunal arbitral ou tribunal judiciaire
etc….). On parle alors de négociation.
A cet effet, ils prennent leurs responsabilités et engagent d’initiative des négociations
en vue de promouvoir l’action participative dans l’ébauche de solutions soit par
transaction, soit par abandon unilatéral ou réciproque de toute prétention. L’idée, ici,
est de compter sur la propre capacité de résilience des litigants dans la recherche de
solution sans l’intervention d’un tiers.
Par exemple, la menace de grève de salariés mécontents peut faire l’objet de
négociation entre l’employeur et les représentations syndicales afin d’éviter
d’éventuels dysfonctionnements pouvant affecter l’image ou le patrimoine de
l’entreprise.
Il en est de même lorsque l’entreprise se trouve dans l’impossibilité de se libérer de
ses obligations vis-à-vis d’un partenaire (fournisseur, client), elle peut négocier en vue
d’obtenir une solution amiable (renonciation de toute poursuite, avenant à un contrat,
réparation amiable du préjudice etc….).
9
Ce mode de règlement de conflit, lorsqu’il ne résulte pas d’une clause contractuelle
certaine, relève de la volonté éclairée et librement exprimée des parties. En
conséquence, l’atteinte à l’intégrité de cette volonté est une cause de nullité des
engagements y afférents.

Paragraphe II : Les mécanismes externes de règlement amiable de conflits.


La mise en œuvre de mécanismes externes de résolution de conflits peut être
d’autorité ou faire suite à l’échec d’une tentative de règlement amiable. D’autorité,
lorsqu’elle s’impose aux parties par le truchement d’une clause contractuelle ou de la
volonté expresse des parties après la survenance du litige.
De même, les mécanismes externes de résolution de conflits peuvent être mis en
branle avant toute saisine de la justice ou au cours du procès. On parle alors de
mécanisme extrajudiciaire ou judiciaire.
En l’espèce, ces mécanismes consistent à faire appel à un tiers pour la résolution du
conflit et portent sur la conciliation et la médiation.
1. La conciliation.
La conciliation12 peut être définie comme un mode amiable ou conventionnel de
règlement des conflits par lequel des parties, avec ou sans l’aide d’un tiers qui a leur
confiance, dans le cadre ou en dehors de toute instance judiciaire, tentent de
rapprocher leurs points de vue respectifs afin de parvenir à une solution amiable du
différend qui les oppose.
Ici, le tiers n’est qu’un modérateur qui travaille à maintenir le cadre de négociation et
sa présence n’est pas forcément nécessaire. Elle peut résulter de la seule volonté des
parties à soustraire leur litige à l’empire du juge soit après sa naissance soit dès
l’entame de la relation par l’insertion d’une clause dédiée dans le contrat13.
La procédure de conciliation consensuelle ou ad hoc est libre de tout formalisme
contrairement à celle institutionnelle encadrée par certaines règles ou usages. La
procédure peut être gratuite ou générer des frais à la charge des parties.

12
La conciliation a cela de particulier qu’elle n’est pas une notion d’origine juridique et que sa connotation
juridique actuelle résulte du fait que la pratique judiciaire se l’est appropriée ; elle comporte une ambivalence
intrinsèque puisqu’elle désigne tout à la fois la procédure à suivre pour pouvoir mettre fin à un désaccord et
l’accord en résultant.

13
Cette catégorie de conciliation, très vaste, peut être encore scindée en deux sous-catégories, qui distinguent
selon que les modalités d'organisation de la procédure sont plus ou moins formelles : ainsi, la conciliation
consensuelle, ou ad hoc se distingue de la conciliation institutionnelle par son absence de formalisme. Le recours
à l’un ou l’autre de ces types de conciliation peut être décidé d’un commun accord par les parties, une fois le
litige né. Mais l’hypothèse la plus fréquente reste néanmoins la prévision anticipée, avant même qu’un litige ne
naisse, par l’insertion de clauses dites de conciliation dans les contrats régissant les rapports entre les parties.

10
La faiblesse de ce mode de règlement de conflit réside dans le fait qu’il repose
essentiellement sur la confiance que les parties ont du conciliateur. Ce faisant, les
risques de détournement de la procédure sont donc énormes.
Par ailleurs, avec l’idée de parvenir à résorber localement et au mieux les conflits véniels (en
matière pénale) hors du cadre formel juridique, le législateur a pensé utile de mettre en œuvre
une justice de proximité par l’institution des maisons de justice14.
La fin de la procédure de conciliation doit nécessairement être sanctionnée par un
écrit à valeur transactionnelle.

Au demeurant, la conciliation a le mérite d’offrir une chance de survie à la relation


car le temps des négociations peut servir d’espace d’expiation pour les litigants.
2. La médiation.
Aux termes des dispositions de l’article 1er de l’Acte uniforme à la médiation en date
23 novembre 2017, le terme « médiateur » désigne tout processus, quelle que soit son
appellation, dans lequel les parties demandent à un tiers de les aider à parvenir à un
règlement amiable d’un litige, d’un rapport conflictuel ou d’un désaccord (ci-après le
« différend ») découlant d’un rapport juridique, contractuel ou autre ou lié à un tel
rapport, impliquant des personnes physiques ou morales, y compris des entités
publiques ou des Etats.
La médiation peut être conventionnelle ou judiciaire 15. Cependant, elle « ne s’applique
pas aux cas dans lesquels un juge ou un arbitre, pendant une instance judiciaire ou arbitrale, tente de
faciliter un règlement amiable directement avec les parties 16 ». Elle peut être gratuite ou générer
des frais à la charge des parties.

En tout état de cause, le médiateur doit être indépendant et impartial et en faire une
déclaration écrite dés sa désignation. De même, il doit informer les parties de la survenance
de circonstances nouvelles susceptibles de soulever des doutes légitimes sur son impartialité
ou son indépendance.

Le médiateur doit respecter la volonté des parties, la confidentialité et l’efficacité du


processus de médiation. Il n’impose pas une solution aux parties mais peut faire des
propositions de règlement ou, au besoin, les inviter à désigner un expert.

La fin de la médiation est sanctionnée par un accord écrit susceptible d’une exécution forcée.
Pour ce faire, cet accord doit être déposé au rang des minutes d’un notaire avec
reconnaissance d’écritures et de signatures. Et c’est seulement après que cet officier
ministériel peut délivrer une grosse ou une copie exécutoire.

Il est également possible de saisir le juge d’une requête ou assignation aux fins
d’homologation ou d’exéquatur. Ce mécanisme permet d’inscrire cet accord dans le

14
Décret n°99 – 1124 du 17 novembre 1999 portant maisons de justice.

15
La médiation peut être mise en œuvre par les parties (médiation conventionnelle), sur demande ou invitation
d’une juridiction étatique (médiation judiciaire), d’un tribunal arbitral ou d’une entité publique compétente.
16
Art. 2 Acte uniforme sur la médiation.
11
répertoire des décisions rendues par ladite juridiction. Une fois les voies de recours épuisées,
cette décision reçoit force exécutoire.

Toutefois en matière pénale, le « Procureur de la République17 peut, préalablement à la


décision sur l’action publique, et avec l’accord des parties, soumettre l’affaire à la médiation
pénale s’il apparaît qu’une telle mesure est susceptible d’assurer la réparation du dommage
causé à la victime, mettre fin au trouble résultant de l’infraction, et contribuer au
reclassement de l’auteur ».

Comme dans les autres situations, l’accord des parties est sanctionné par un procès-
verbal dont la violation exposera son auteur aux conséquences de droit.

En définitive, l’échec de ces modes de règlement de conflits ouvre la voie aux


juridictions.

Section II : Le règlement juridictionnel du contentieux des affaires.


En principe, le pouvoir de juger appartient à l’Etat. Il génère les institutions habilitées
auxquelles il délègue le pouvoir de juger.
Toutefois, avec la crise que traverse la justice étatique eu égard à l’explosion de la
demande au cours de ces dernières décennies, l’absence de moyens adéquats, la
lenteur dans le traitement des affaires, la publicité des débats et l’anéantissement des
frontières par les multinationales, les acteurs du monde des affaires ont développé
un mécanisme de règlement des conflits à côté de la justice étatique.
Imaginée à l’image de leurs préoccupations, cette forme de justice privée est de plus
en plus domestiquée par les Etats pour son apport significatif dans le traitement de la
demande en justice.
C’est donc à ces deux types de justice qu’est déféré le règlement juridictionnel du
contentieux des affaires. Il s’agira de voir, d’une part, les juridictions étatiques
(paragraphe I) avant de faire de même et, d’autre part, les juridictions privées et
notamment arbitrales (paragraphe II).

Paragraphe I : Les juridictions étatiques.


Les juridictions étatiques sont des organes de l’Etat (pouvoir judiciaire) chargés, au
nom et pour le compte du peuple et par un raisonnement juridictionnel, de dire le
droit pour trancher les litiges. Les décisions rendues, une fois les voies de recours
épuisées, s’imposent aux parties.
Ce processus institutionnel de règlement de conflits obéit à un certain nombre de
principes dont l’égalité, le contradictoire, la gratuité, le double degré de juridiction
17
Al. 3 art. 32 CPP.
12
ou encore la publicité. Et, selon la nature du litige 18, il peut y avoir plusieurs
juridictions19 de droit commun ou d’exception.
Pour optimiser ses investissements dans la prise en charge du contentieux,
l’entreprise doit avoir une certaine maîtrise sur l’organisation et le fonctionnement de
ces juridictions. Il s’agit de savoir comment saisir une juridiction, qui doit le faire et
quand etc…?
Il faut dire que devant les juridictions étatiques le développement des prétentions est
rigoureusement encadré par des règles de procédure.
En effet, il résulte des dispositions de l’article 1 – 2 du code de procédure civile que
«tous ceux qui justifient d'un intérêt légitime peuvent, en prenant l'initiative d'une
demande, obtenir du juge une décision sur le fond de leur prétention, sous réserve des cas où
la loi subordonne le droit d'agir à des conditions spéciales ou attribue ce droit aux seules
personnes qu'elle qualifie pour élever une prétention ou pour défendre un intérêt déterminé ».
Au Sénégal, par exemple, « les personnes morales de droit privé, autres que les sociétés
nationales et les sociétés d’économie mixte, ne peuvent intervenir en justice, tant en demande
qu’en défense, que par un avocat inscrit au barreau 20».
Par ailleurs, il résulte des dispositions de l’alinéa 4 de l’article 54 – 6 du code de
procédure civile que « Dans tous les cas, le délai de la mise en état est de quatre mois. Il ne
peut être prorogé qu'en cas de cause grave et dûment justifié ». C’est dire donc que le délai
raisonnable pour rendre la justice en matière civile ou commerciale est cantonné.
Toutefois, il en est tout autre dans les autres matières où le temps de la justice est
presqu’insaisissable ou incompressible.
Quoiqu’il en soit, l’accroissement fulgurant de la demande a rendu la tâche difficile à
la justice, impactée qu’elle est, par le manque de moyens. Dans sa quête d’équilibre,
elle a développé des mécanismes consistant à retirer des litiges à la sphère judiciaire.
On parle alors de déjudiciarisation.
Pour le surplus et par des décisions susceptibles d’exécution forcée, au besoin par
l’assistance de la force publique, la justice s’évertue à trancher les litiges.

Malgré tout, ces techniques de gestion du contentieux n’ont pas permis de juguler la
demande et ses délais de traitement n’ont pas cessé de s’allonger, entravant
considérablement le libre écoulement des capitaux.
Face à cette situation, les acteurs du monde des affaires ont, de leur côté, développé
une justice privée inspirée des coutumes et usages du monde commercial.

18
Un litige peut être pénal, administratif, fiscal, social ou commercial.

19
Juridictions pénales, civiles, administratives, commerciales et sociales.

20
Al. 3, art. 4 de la loi 84 – 09 du 04 juin 1984 portant création de l’ordre des avocats.
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