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dossier spécial :
fusions-acquisitions
DOSSIER Entretien
Paris, capitale mondiale La défense de la Propriété Intellectuelle,
de l’arbitrage un sujet citoyen !
Interview de Gilles Mauduit, arbitre Entretien avec Christian Peugeot, Directeur central du
international et Président d’honneur de l’AFJE Marketing Peugeot SA, Président de l’UNIFAB
éditorial
L
a compétence, encore et toujours !
Parmi les disciplines qui illustrent le rôle-clé joué par les juristes d’aujourd’hui,
celle des fusions-acquisitions arrive en bonne place. Souvent qualifiée de noble –
mais loin d’être la seule dans ce cas – cette matière est le domaine d’élection de bon
nombre de grands cabinets d’avocats.
Dans ce domaine comme dans les autres disciplines du Droit des affaires, le juriste
d’entreprise a, lui aussi, sa place à tenir. Ce qui est ici attendu de lui, c’est une véritable
multi-compétence ainsi qu’une capacité à gérer la complexité au sein d’une équipe
pluridisciplinaire. Qu’il s’agisse de Droit des sociétés, de Droit boursier, de Droit
des contrats, de règlementation économique ou encore de Droit social, les fusions-
acquisitions se situent au confluent de la plupart des disciplines juridiques. Depuis
les due diligences jusqu’à la conclusion de l’accord, en passant par la formalisation
souvent délicate des garanties de passif, le juriste d’entreprise doit savoir naviguer
au milieu d’un océan de paramètres parfois abscons. Il est au cœur du dossier. Bien
comprendre, synthétiser, discerner l’essentiel, tels sont les défis auxquels le confrontent
les opérations complexes.
Les très intéressants témoignages fournis pas nos collègues qui ont contribué à ce
numéro font foi de la nécessité pour les juristes d’entreprise d’acquérir la maîtrise de
concepts que leur formation juridique ne leur a pas toujours enseigné, en particulier
dans les domaines de la finance, du marketing et du management. Les écoles et
universités ont bien compris cette demande de multi-compétences et de leadership.
Bon nombre d’entre elles intègrent désormais dans leur cursus des formations 1
extra-juridiques. Mais, au-delà, c’est un véritable leadership qu’on attend du juriste
d’entreprise. Dès lors en effet que lui revient la mission de présider à la formalisation de
l’accord, c’est bien souvent de sa capacité à asseoir son autorité que dépend le succès
de l’opération. Les chefs d’entreprise l’ont bien compris : il n’est plus rare, aujourd’hui,
que le juriste se voie confier le rôle de coordination des opérations, voire même des
pouvoirs de direction sur les autres services concernés par la transaction.
Il est fréquent que les litiges liés aux affaires de fusion-acquisition se trouvent portés
devant des arbitres. Ainsi la combinaison, dans ce numéro, des thèmes de l’arbitrage et
des fusions-acquisitions n’est-elle pas neutre. Le témoignage de Gilles Mauduit, arbitre
réputé et Président d’honneur de notre association, montre s’il en est besoin à quel
point l’expérience d’un juriste d’entreprise peut être source d’opportunités.
Avec ce sixième numéro de Juriste d’Entreprise Magazine, nous en revenons toujours
au même thème : la compétence. C’est à nos compétences que nous devons notre
position dans l’entreprise. C’est en raison de ces compétences, et non par l’effet d’un
statut professionnel réglementé, que notre métier existe aujourd’hui, et continue de se
développer.
Sachons faire reconnaître et propager cette vérité.
Jean-Charles Savouré
Président de l’AFJE
p. 1 éDITORIAL
Par Jean-Charles Savouré
P. 4 ENTRETIEN
La défense de la Propriété Intellectuelle, un sujet citoyen !
Entretien avec Christian Peugeot
p. 6 Dossier : fusion-acquisition
p. 7 Le juriste d’entreprise au cœur des opérations stratégiques
Par Jean-Yves Trochon
p. 12 “We have a deal!”
Par Edouard Silvério
p. 14 Les opérations d’acquisitions cessions
N° 6 – Juin 2010 Par Jean-Marc Loncle
p. 16 Métier : expert en fusions acquisitions
2ème Année
Par Neil Curtis
Publication trimestrielle p. 17 Pacman à Paname
Numéro tiré à 5 000 exemplaires Par Alain-Marc Irissou, Président d’honneur de l’AFJE
p. 19 10 questions au Professeur Bertrel
Editeur : Par Luc Athlan, Vice-président de l’AFJE
Association Française des Juristes
d’Entreprise p. 23 Paris, Capitale mondiale de l’arbitrage
Association Loi 1901 Entretien avec Gilles Mauduit
9, rue du Faubourg Poissonnière
75009 Paris P. 28 Point de vue
tél. : 01 42 61 53 59 Quand la délégation de pouvoirs ne suffit pas à exonérer le dirigeant...
fax : 01 42 61 01 61 Par Brigitte Brom
www.afje.org Le développement durable, un engagement stratégique auquel participe la filière
Directeur de la publication : juridique 3
Jean-Charles Savouré Entretien avec Sandra Lagumina
La défense de la Propriété
Intellectuelle, un sujet citoyen !
Entretien avec Christian Peugeot, Directeur central du Marketing Peugeot
SA, Président de l’UNIFAB (UNIon des FABricants)
Qu’attendez-vous d’un juriste en termes çon est tout à fait réelle et l’engagement pris au
d’esprit, d’approche, de créativité ? conseil d’administration de l’Unifab depuis 1997
témoigne de l’importance de ce sujet. La lutte
Comme dans tous les services, la qualité d’un ser- contre la contrefaçon n’est plus l’affaire d’une
vice juridique se mesure au potentiel des hommes industrie mais de l’économie toute entière, plus
et des femmes qui le composent. L’application celle d’un pays, mais celle du monde.
d’un texte, la référence à une directive comme
simple justification, l’interprétation littérale d’un Que comptez-vous faire dans le cadre de
jugement ne sont plus suffisants. Il s’agit désor- votre mandat de président de l’Union des
mais d’identifier les risques, d’avoir une percep- Fabricants ?
tion prospective des dossiers et d’analyser les
évolutions législatives. Il faut aussi savoir s’adap- Je compte poursuivre l’excellent travail de mobi-
ter aux besoins de l’entreprise qui peuvent être lisation déjà entrepris depuis quelques années au
extrêmement différents en fonction de sa taille, sein de l’Unifab tout en proposant de nouvelles
ses marchés, ses objectifs… pistes à explorer. Elles concerneront par exem-
ple le renouvellement partiel du conseil d’admi-
Quelle est l’importance de la lutte contre la nistration que nous allons étoffer et diversifier,
piraterie pour vous ? l’implication d’entreprises jusque là timides sur
le sujet de la lutte contre la faux mais également
La lutte contre le faux est aujourd’hui une néces- une présence renforcée auprès des institution-
sité non seulement pour l’entreprise mais éga- nels nationaux et européens et une politique de
lement pour les consommateurs et les États. Il communication diversifiée.
ne s’agit plus de protéger des marques et des
marges mais de penser à la santé et à la sécurité Pourquoi est-il important pour un
du consommateur, au développement durable, ayant-droit de se battre auprès de vous 5
à l’emploi, et d’empêcher l’accroissement des à l’Union des Fabricants ?
réseaux criminels qui ont trouvé en cette activité
illicite de nouvelles ressources financières. C’est Tout d’abord parce que l’Unifab est une associa-
la raison pour laquelle la mobilisation contre le tion en perpétuelle évolution qui permet à chacun
faux doit être l’affaire de tous. de ses adhérents de s’exprimer et de voir ses
problématiques mises à l’ordre du jour, l’expé-
Pourquoi êtes vous engagé auprès de rience des uns servant souvent aux autres. Mais
l’Union des Fabricants ? surtout car l’Unifab dispose d’un réseau important
en France et à l’étranger qu’elle met à disposition
La défense de la propriété intellectuelle est un de ses membres. Ainsi une entreprise adhérente
sujet citoyen important et il est essentiel que des à l’Unifab est toujours accompagnée et soutenue
industriels issus de tous les secteurs d’activité dans ses démarches afin d’obtenir satisfaction et
se mobilisent contre le faux. Au sein de PSA la dispose ainsi d’une écoute plus attentive. Enfin, je
conscience des enjeux de la lutte anti-contrefa- ne vous apprends rien, l’union fait la force et une
association a toujours besoin de pouvoir s’appuyer
sur des membres nombreux, représentatifs et
l’UNIFAB en quelques dates régulièrement renouvelés afin d’être la plus solide
et influente possible. C’est une réalité que nous
1872 : date de création constatons tous les jours alors que nous repré-
1877 : reconnue d’utilité publique sentons les intérêts de nos adhérents auprès des
1891 : participation à l’arrangement de Madrid instances publiques comme des médias.
1951 : création du musée de la Contrefaçon
■ Philippe Coen, administrateur de l’AFJE.
1968 : Convention de Paris
1998 : création du Forum européen de la propriété intellectuelle Site internet :
1999 : création de la Journée Mondiale anti-contrefaçon www.unifab.com
2005 : signature de la charte contre le faux avec les mairies de France
Coordonnées :
2009 : signature de la charte Brochand Sirinelli sur le commerce 16 rue Faisanderie 75116
électronique. Tél : 01.56.26.14.00
dossier spécial :
fusions-acquisitions
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poser les compromis acceptables pour permettre dans un contexte multi-culturel : à quel moment
à la négociation de se poursuivre. peut-on considérer que le consentement sur la
chose et sur le prix » a été obtenu, alors même que
Il doit aussi être échéant capable de recommander les accords ont atteint un degré de sophistication
la rupture des négociations si leur cours conduit tel qu’il est souvent difficile de faire le départ entre
à une impasse au vu des exigences du parte- des conditions essentielles pour matérialiser un
naire putatif. tel accord et ce qui devrait s’apparenter à des
modalités de mise en oeuvre d’un tel accord ?
La période du « signing » au « closing » C’est pourquoi, ici encore, il est essentiel que le
juriste d’entreprise contrôle le processus de la
Cette période est déterminante, car il s’agit de négociation afin de s’assurer que l’entreprise ne se
concrétiser l’accord des Parties. voit pas engagée « à son corps défendant »…
les statuts et l’accord d’actionnaires ou encore la les, on peut citer par exemple la production de
notification aux autorités de concurrence, dans garanties bancaires ou lettres de confort sécu-
une forme plus ou moins finalisée. risant le paiement de l’acquisition par l’acqué-
reur, les clauses d’ajustement du prix, le trans-
La levée des conditions suspensives pour faire fert effectif des actifs au travers d’un schéma de
aboutir la transaction est souvent un exercice dif- réorganisation préalable convenu, l’obtention
ficile, loin d’une « promenade de santé ». C’est en de « rulings » fiscaux ou d’accords politiques et
particulier le cas de l’obtention des approbations administratifs à la réalisation de l’opération ou
requises des autorités de concurrence. L’expé- encore la passation de contrats industriels ou
rience montre en effet que des opérations qui a commerciaux destinés à viabiliser l’entité résul-
priori ne devraient pas poser de difficultés particu- tant du rapprochement.
lières au regard des règles de concurrence peu-
vent rencontrer en fait des difficultés inattendues, De même, les parties prennent souvent soin de
notamment devant certaines juridictions où les prévoir une clause dite « MAC », « Material Adverse
standards en matière de droit des concentrations Change », pour permettre la renégociation ou la
n’ont pas été totalement harmonisés avec ceux rupture en cas de survenance d’un événement
utilisés en droit européen ou américain. extrême et inattendu avant la réalisation du clo-
sing. Cette clause a parfois été mise en œuvre et
Il arrive souvent en effet que les autorités de largement débattue lors des opérations conclues
concurrence conditionnent leur approbation de avant le déclenchement de la crise économique
l’opération à l’obtention d’engagements de ces- et financière à l’automne 2008.
sion ou à la souscription d’engagements dits
comportementaux par les parties, susceptibles On sait que les conditions suspensives doivent
de remettre en cause les fondamentaux de l’ac- être définies de manière objective, sans permettre
cord des parties. à une partie d’arguer de manière potestative de 11
sa non-réalisation pour tenter de sortir du contrat
C’est pourquoi il apparaît de plus en plus impor- avant le Closing. Ainsi, l’accord des conseils
tant que les juristes et avocats spécialisés en d’administration des parties ne saurait être utilisé
droit de la concurrence soient impliqués très en comme un levier de remise en cause de l’opé-
amont dans la négociation, car la structure des ration après la signature de l’accord « binding »,
accords, voire sa faisabilité, repose très largement sauf si l’évolution des circonstances ou la non-
sur l’analyse en amont des difficultés suscepti- réalisation des conditions suspensives avant la
bles d’être rencontrées lors de la notification des date contractuelle convenue le justifie.
accords. A cet égard, il est donc essentiel pour un
juriste d’entreprise impliqué dans des opération Or, il arrive souvent que la définition du contenu
de rapprochement de bien maîtriser les règles des conditions suspensives et l’évolution du
de droit de la concurrence et de concentration, contexte économique entre le « Signing » et le
compte tenu de l’importance déterminante pris « Closing », notamment en cas de détérioration de
par celui-ci au fil des années. la situation économique d’une des entreprises,
ne génère une demande de renégociation voire
Comme autres conditions suspensives essentiel- un contentieux en cas de rupture.
ses compétences professionnelles, sa principale Quand de plus, on a identifié le conseil fiscal, les
qualité personnelle est d’être un « deal maker », auditeurs et autres experts en M&A, ona l’équipe
un créatif doté d’une capacité de persuasion et nécessaire pour entamer une bonne négociation,
d’adhésion. Les discussions n’ayant pas voca- et enchainer les nuits blanches.
tion à durer, il sait mobiliser et apporter tout le
support nécessaire pour clore les négociations La réussite de ces opérations repose également
au plus vite. Un bon deal est aussi une question sur la capacité à créer un climat de confiance
de timing. avec la partie adverse. Cela permet ainsi de pas-
ser les mêmes messages à la Direction Générale
L’implication du juriste dans le processus de l’opé- de chaque partie en cas de blocage.
ration doit être immédiate. Le partage des doutes
et des choix avec la Direction Générale permet Ces opérations sont d’abord un travail d’équipe,
d’être en phase avec la stratégie de négociation. avec un maillage serré et cohérent, dans lequel
L’organisation des « data room », des « due diligen- chacun porte le succès de tous.
ces » et la négociation des «reps and warranties »
ne sont pas de simples exercices techniques et Alors, après avoir relu « l’Art de la guerre » de Sun
mineurs. Ils doivent être anticipés en conformité Tsu, on peut entamer la partie la plus excitante ;
avec la stratégie de négociation. la négociation – avec des postures choisies, des
parades et des esquives, des coups de gueule,
Le juriste est le garant primaire naturel de la qua- des interruptions de séance, des coups de théâ-
lité de la négociation, de son éthique, toujours à tre… jusqu’au sésame « We have a deal ».
l’aune de la bonne foi et des principes régissant
le consentement ■ Edouard Silvério
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« Cher ami, nous sommes bien d’accord sur un non ajustable (« locked box mechanism ») ; « debt
prix de 100 M d’euros, mais à la condition que le free cash free basis » (toute la dette financière
« deal » soit signé d’ici une semaine. J’ai demandé doit être entièrement remboursée par la cible au
à nos avocats de préparer les accords ». plus tard au closing) ; ajustement du besoin en
fonds de roulement normatif « earn out », etc….
Phrase entendue il y a une vingtaine d’années L’étendue des garanties du vendeur est égale-
14 entre deux dirigeants de groupes internationaux, ment très modulable (périmètre garanti, seuils de
signifiant que seul le prix est à considérer, le déclenchement unitaires et cumulés, franchises,
contenu du contrat d’acquisition relevant plus plafonds, limites, exclusions). Ceci illustre bien
de la tâche du scribe que de celle du « dealma- qu’aucune opération d’acquisition ou de ces-
ker ». Assurément une telle phrase ne serait plus sion ne ressemble aux précédentes. Ajoutons
prononcée aujourd’hui : les opérations d’acqui- qu’une acquisition de la totalité des titres n’aura
sitions / cessions sont devenues très diverses, à l’évidence pas la même approche aux plans
complexes et s’étalent en général sur plusieurs juridique, financier ou comptable, que lorsqu’il
mois. Elles ne sont plus la seule affaire du Direc- s’agira de l’entrée d’un partenaire minoritaire au
teur Général, mais sont prises en main par des capital de la cible.
équipes pluridisciplinaires, quant bien même le
dernier mot revient à celui-ci. Ces opérations requièrent quelques années de
pratique pour y évoluer aisément, d’autant qu’el-
Le déroulement des opérations d’acquisitions les se complexifient avec le temps (ne serait-ce
ou de cessions d’entreprises (phase préliminaire, que dans la mesure où les intervenants à l’opé-
due diligence, négociation du contrat d’acquisi- ration sont de plus en plus qualifiés) et parce que
tion, signature et closing) est, paradoxalement, la pratique est largement dominée par l’approche
assez standardisé, quelle que soit la taille de anglo-saxonne, même pour des opérations pure-
l’opération, alors même qu’elles sont par essence ment nationales. Même si on peut le déplorer, il
protéiformes. Elles peuvent ainsi mettre en pré- n’est pas rare de recevoir des projets de docu-
sence des acheteur(s) et vendeur(s) de diffé- mentation contractuelle en langue anglaise ou
rentes nationalités, et une cible d’une troisième soumis à un droit étranger pour une cible située
nationalité (internationalisant par là l’opération, dans l’Hexagone et pour laquelle acheteur et
avec les conséquences que l’on sait quant à vendeur sont français.
l’application de différentes règles d’ordre public,
du droit applicable ou de la clause de règlement Cette pratique est également devenue pluridisci-
des litiges par exemple). Les titres ou les actifs plinaire. Un juriste d’entreprise ou un avocat doit
(« share deal » vs « asset deal »), faisant l’objet de être pleinement intégré dans une équipe projet
l’acquisition peuvent être de natures très variées. aux côtés d’autres experts : financiers évidem-
Les modalités de calcul du prix et l’ajustement ment, comptables bien sûr, mais également en
de celui-ci sont également très divers : prix fixe matière de ressources humaines (problématique
Les fusions-acquisitions m’ont permis de vivre de premier cimentier de la région. Désormais, plus de
près certains des grands mouvements industriels la moitié des profits de Lafarge sont attribuables
et économiques de ces vingt dernières années, aux pays émergents. Les fusions-acquisitions dans
dont deux exemples ci-après. les pays émergents posent des défis particuliers
pour les entreprises : dans des environnements
L’industrie européenne, Les restructurations économiques, juridiques et politiques complexes
du secteur aérospatial des années 1990 et instables, où l’absence totale de réglementation
côtoie parfois la sur-réglementation. Le rôle et l’avis
J’ai démarré ma carrière en France dans le groupe du juriste d’entreprise est par conséquent souvent
Lagardère, qui avait su nouer des joint ventures inter- crucial dans l’appréciation des risques et la décision
nationaux dans les années 90 avec de grands grou- ou non d’investir, puis dans le suivi de l’investis-
pes dans ses différents métiers (espace, défense, sement, notamment pour démêler les divers pro-
télécommunications, transport, automobile…).Les blèmes qui risquent de survenir. Le juriste est de
16 juristes du groupe étaient, avec les stratèges et les plus en plus sollicité pour représenter le Groupe
financiers, associés très étroitement aux opérations dans les organes de décision de ces nouvelles
les plus confidentielles et stratégiques du Groupe, filiales, aux côtés des partenaires publics ou privés
de leur conception à leur mise en œuvre. Précurseur locaux, grâce notamment aux liens de confiance
dans le montage de partenariats complexes dans établis lors des longues séances de négociations
les secteurs de la haute technologie, Lagardère a préalables! Présente depuis plusieurs années dans
été un des pivots de la restructuration aérospatiale les grands pays émergents ( par ex les BRICS),
européenne, étape essentielle afin de permettre à Lafarge est aussi pionnière dans l’investissement
l’Europe industrielle de concurrencer les Etats-Unis, vers la « dernière grande frontière » , soit les pays
qui avait restructuré son industrie aérospatiale autour sous-développés ( par exemple, ceux du der-
de quelques champions (dont Boeing et Lockheed nier tiers de l’indice de développement humain
Martin) quelques années auparavant . En tant que du PNUD), et il est très satisfaisant de monter et
juriste, cela a été une période fascinante, haletante, de réussir des opérations d’investissement dans
au confluent du droit et de la politique, avec moult un secteur si stratégique pour ces pays, et ainsi
projets, contre-projets, manœuvres et rebondis- participer de manière très concrète à leur futur
sements, jusqu’à la création d’Aérospatiale-Matra, développement. Il faut également souligner l’am-
puis de EADS en 2000. bition grandissante et la compétence des acteurs
des pays émergents, ainsi qu’un phénomène de
Les Pays Emergents, convergence dans la rédaction et la négociation
Croissance et Développement des opérations de fusion-acquisition ; en 2009,
dans le cadre d’un programme de désinvestisse-
Après une dizaine d’années dans le secteur aéros- ments, Lafarge a cédé sa participation majoritaire
patial, j’ai rejoint le groupe Lafarge en 2004. Leader dans une entreprise côtée au Chili à un groupe
mondial dans les matériaux de construction, pré- péruvien. L’opération a été bouclée et annoncée
sente dans plus de 80 pays, Lafarge a une stratégie aux marchés au bout d’une semaine de négocia-
de développement dans les pays émergents, afin tions ininterrompue, grâce notamment au profes-
d’accompagner la croissance à long terme de ces sionalisme et à la détermination de l’investisseur
pays, avec des besoins énormes dans le logement péruvien, qui n’avait rien à envier aux meilleurs des
et les infrastructures. En 2007, Lafarge a fait l’ac- places new-yorkaises ou européennes.
quisition la plus importante à ce jour dans le Moyen
Orient ( €8.8 Milliards), en rachetant Orascom, le ■ Neil Curtis
Pacman à Paname
Par Alain-Marc Irissou, ancien Directeur Juridique de Total
et Président d’honneur de l’AFJE
Avec la bulle Internet les concentrations se mul- Au printemps 1998, le baron Albert Frère, princi-
tiplient dans tous les secteurs. Dans l’industrie pal actionnaire de la compagnie belge Petrofina,
pétrolière on assiste à des fusions géantes comme propose à Thierry Desmarest, PDG de TOTAL,
BP-AMOCO en 1998 et la plus grosse de tous d’acquérir son bloc de contrôle. Pour TOTAL c’est
les temps, EXXON-MOBIL en 1999. Dans ce une aubaine, mais le baron négocie également
domaine la France dispose de deux champions avec Philippe Jaffré, Président d’ELF. Petrofina,
nationaux. D’une part il y a TOTAL descendante est un mets de choix pour les deux compagnies.
de la Compagnie Française des Pétroles, entre- Il faut faire vite.
prise privée née du traité de Versailles, qui a bâti
son empire en Irak dans l’entre-deux guerres. Profitant des hésitations de Philippe Jaffré, à
D’autre part il y a ELF Aquitaine créée par l’Etat l’automne TOTAL enlève prestement l’affaire sans
dans les années 50, comme instrument de la trop barguigner. L’acquisition est faite par échange
politique pétrolière nationale, après la découverte d’actions. Albert Frère avec 8 % du capital de
du gisement de gaz de Lacq, puis de pétrole et TOTAL en devient le principal actionnaire indivi-
de gaz en Algérie. duel. TOTAL pour sa part acquiert 40 % du capital
de Petrofina et s’engage à racheter les actions
Jusqu’à la fin des années 90, ELF et TOTAL n’ont des minoritaires après obtention du feu vert de
cessé d’étendre leurs domaines pétroliers qui, de la Commission européenne. Toutes les formalités
manière complémentaire, couvrent ensemble les seront achevées début juillet 1999.
principales zones productrices du monde : Moyen
Orient, Mer du Nord, Afrique, Amérique du Nord Le rapport de force avec ELF s’en trouve modi-
et Amérique Latine, Extrême Orient. Elles intègrent fié : le nouveau groupe, désormais dénommé
aussi toute la chaine pétrolière et gazière : explora- TOTALFINA bondit au 6ème rang des pétroliers.
tion-production, raffinage, distribution, pétrochimie Or le marché n’accueille pas bien cette opéra-
et chimie, là encore avec des complémentarités tion. Dans l’hiver 98/99 le cours de l’action perd
tant sur le plan industriel que géographique. 40 %. Chez TOTAL on n’en mène pas large et l’on
Doté d’un comité scientifique composé d’ex- Quels sont les derniers colloques que avez
perts de haut niveau en droit des sociétés ensei- organisés et comment les consulter ?
gnant dans de grandes institutions d’enseigne-
ment supérieur, l’Institut Européen des Fusions Les derniers colloques que nous avons orga-
Acquisitions est à Paris un pôle d’excellence en nisés, en partenariat avec ESCP Europe et le
matière de Fusions Acquisitions sans équivalent Centre de Recherche en Droit Financier de l’Uni-
en Europe. Il a pour objet la promotion de la versité de Paris I Panthéon Sorbonne, portaient
recherche, de la formation et de l’information sur sur les thèmes suivants : « Pactes et opérations
les aspects juridiques des Fusions Acquisitions. de M&A » ; « Les opérations de rapprochement
Sa vocation est aussi d’être une sorte de « think dans le domaine de l’énergie » ; « Les garanties
tank » destiné à faire des études et des propo- lors de l’acquisition de contrôle d’une société »
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Paris, Capitale mondiale de l’arbitrage
Gilles Mauduit
Pourquoi les entreprises recourent-elles de au contraire, le faire trancher, que ce soit par le
plus en plus à l’arbitrage ? glaive de la justice étatique, ou celui de la justice
arbitrale, dont le métal et le tranchant sont d’es-
Face à un conflit juridique, c’est-à-dire en pré- sence conventionnelle.
sence d’un nœud qui obstrue la fluidité de ses
opérations, une entreprise n’a que deux solutions : Or, pour toute une série de raisons, les parties
soit tenter de dénouer ce nœud, soit se résoudre n’arrivent pas toujours, de façon directe ou indi-
à le faire trancher. Le dénouer par la transaction recte, à dénouer elles-mêmes leurs conflits et,
ou en ayant recours à des techniques de tran- s’agissant de le faire trancher, la justice arbitrale
saction assistée (médiation, mini-trial, etc.), ou, présente pour les entreprises de nombreux avan-
tages par rapport à la justice étatique.
connus. Si, malheureusement, cette justice est que celui-ci ait été d’avance choisi par les parties
plus chère, elle offre en revanche une confidentia- dans la clause d’arbitrage, soit que le tribunal
lité en principe absolue, une plus grande rapidité arbitral le détermine ultérieurement lui-même en
et une plus grande garantie de professionnalisme fonction de règles appropriées. Dans le second
dans la mesure où les parties sont à même de cas, le litige sera tranché par référence aux règles
choisir leurs propres juges en fonction de leur d’équité. Dans les deux cas cet arbitrage doit
notoriété et de leurs secteurs de compétence. être motivé.
Elle permet aussiune plus grande contractuali-
sation de l’administration de la preuve et de la La troisième distinction oppose les arbitrages
conduite du procès. Et si, comme on vient de institutionnels et les arbitrages ad hoc, distinction
le dire, son coût est plus élevé, encore celui-ci dont le choix appartient également aux parties.
est-il prévisible puisque son quantum dépend
soit de barèmes officiels soit d’un accord passé Un arbitrage institutionnel est un arbitrage que
entre les parties et le tribunal arbitral. Il faut en les parties choisissent de soumettre – avec les
outre souligner que les parties ne sont nullement garanties qui en découlent -, aux règles préétablies
étrangères à l’inflation des coûts dont elle se de telle ou telle institution d’arbitrage, en incor-
plaignent parfois puisque des statistiques CCI porant l’applicabilité de celles-ci dans le champ
ont établi que sur un arbitrage revenant à 100 de leur consensus. C’est le cas des règlements
aux parties, 2 % seulement représentent les frais de toutes les institutions bien connues que sont,
de l’institution, 16 %, les honoraires des arbi- au plan international, la CCI ou ICC (Chambre
tres (dont 2 % de débours) et 82 % le coût des de Commerce Internationale ou International
conseils, des experts et des frais internes. Chamber of Commerce), la LCIA (London Court
International Arbitration), la Cour d’arbitrage de
A quels types de procédure d’arbitrage les Stockholm, la Chambre de Milan ou, au plan
24 entreprises peuvent-elles faire appel ? interne, l’AFA (Association Française d’Arbitrage)
le CMAP (Centre de Médiation et d’Arbitrage de
Il faut rappeler trois distinctions fondamentales. Paris), pour la France, ou bien l’AAA (American
Arbitration Association) pour les Etats-Unis. Il faut
La première oppose les arbitrages internes et les d’ailleurs préciser que ces dernières institutions,
arbitrages internationaux, distinction dont les par- dont la vocation originelle était essentiellement
ties ne sont pas maîtresses puisqu’elle dépend de d’ordre interne cherchent également désormais
la mise en cause ou non d’intérêts du commerce à se développer de plus en plus dans le domaine
international. En Droit français, l’arbitrage interne de l’arbitrage international. Précisons à cet égard
est régi par les articles 1442 à 1491 du Code de que sur les 80 dernières sentences rendues sous
procédure civile, l’arbitrage international par les l’égide du CMAP, 1/3 vise des arbitrages inter-
articles 1492 à 1507. nationaux.
La seconde oppose les arbitrages en Droit et Toutes ces distinctions sont bien entendues sus-
les arbitrages en équité (ou en amiable compo- ceptibles de se recouper. C’est ainsi qu’on peut
sition). Le choix ici appartient aux parties. Dans être en présence d’un arbitrage interne AFA en
le premier cas, le litige sera tranché selon l’ap- équité, ou d’un arbitrage international ad hoc en
plication d’un droit substantiel donné (par ex : droit néerlandais.
Droit anglais, français, suisse, chinois, etc.), soit
Pourquoi Paris est-elle devenue la capitale Précisons également que l’arbitrage CCI fait auto-
mondiale de l’arbitrage ? rité devant les juridictions françaises comme a eu
l’occasion de le rappeler la Cour de cassation
La vocation de Paris à ce titre tient à plusieurs dans un arrêt de principe du 6 juillet 2000.
raisons.
La seconde raison est que le droit français et
La première est le fait que Paris, outre qu’elle est les juridictions françaises sont, contrairement à
déjà le siège de nombreuses institutions d’ar- d’autre droits plus frileux, résolument favorables
bitrages spécialisées dans tel ou tel domaine au recours à l’arbitrage comme mode de règle-
professionnel, ainsi que le siège d’institutions à ment juridictionnel des conflits commerciaux.
caractère général déjà mentionnées (AFA, CMAP), C’est là une tendance lourde et constante de la
à la chance insigne d’être le siège mondial de la tradition française.
Cour d’Arbitrage de la CCI depuis sa création,
en 1923. Or, depuis lors, cette institution a connu La troisième raison peut-être est que de nom-
plus de 16.000 dossiers impliquant des parties breux juristes internationaux francophones et
et des arbitres ressortissants de 180 pays diffé- bilingues (français, mais aussi suisses, belges et
rents. En 2008, il y eut 685 nouvelles affaires por- autres) se sont révélés particulièrement talentueux
tées devant la Cour d’Arbitrage de la CCI. Paris dans la mise au point progressive d’un droit pro-
fut retenu comme lieu de l’arbitrage dans 85 de cessuel et d’administration de la preuve original
ces affaires (soit environ 12,5 %), et 81 arbitres et efficace dans les arbitrages internationaux,
de nationalité française furent désignées pour empruntant tant à la common law qu’à la civil
en connaître. law. Comme si, grâce à eux, Paris se révélait un
25
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« Toute contestation survenant à l’occasion de la présente convention et de ses annexes sera résolue par arbitrage conformément au règlement de
la CHAMBRE ARBITRALE INTERNATIONALE DE PARIS que les parties déclarent accepter ».
www.arbitrage.org
lieu particulièrement créatif de solutions originales, arbitrages internes et internationaux, menés, selon
syncrétiques et adaptées sur la ligne de fracture le cas, en français ou en anglais, qu’il s’agisse
des deux systèmes tectoniques que sont ceux d’arbitrages ad hoc ou d’arbitrages institutionnels,
du Droit anglo-saxon et du droit continental. On en équité ou en droit. C’est ainsi que j’ai connu
cherche ainsi résolument à emprunter leurs best des délibérés consensuels, d’autres plus conflic-
practices à chacun des deux systèmes. Qu’on tuels et qu’il m’est arrivé, indépendamment du
pense par exemple à tous ces arbitrages où les Droit français, de statuer en Droit belge, suisse,
règles retenues pour l’administration de la preuve anglais, grec ou libanais…
s’inspirent pour l’essentiel de la civil law en ce
qui concerne la preuve écrite (avec cette consé- Mais il est vrai que j’eus souvent l’occasion, quand
quence qu’il n’y aura pas ou peu de discovery) , j’étais président de l’AFJE, de souligner dans tel
et de la common law pour la preuve orale (avec ou tel forum, l’intérêt et l’utilité qu’il y avait, pour
cette conséquence qu’il sera possible de prépa- les juristes d’entreprise, à investir davantage le
rer les témoins et de faire appel aux subtilités de domaine de l’arbitrage et celui, pour les entrepri-
la cross-examination). ses, d’avoir recours à des juristes d’entreprises
comme arbitres. Car tous les métiers du Droit
Ancien Président de l’AFJE,comment et peuvent apporter leur contribution propre au
pourquoi avez-vous choisi de devenir processus de l’arbitrage. Ainsi, pour conclure
arbitre ? en caricaturant volontairement un peu les cho-
ses, l’on peut observer que si la fée du Droit se
Mon intérêt pour l’arbitrage est bien antérieur à penche volontiers sur le berceau des profes-
l’honneur qui me fut donné d’être Président de seurs de faculté, celle de la Motivation sur celui
l’AFJE, et il n’a pas, en réalité, de relation directe des magistrats, celle du Contradictoire sur celui
avec lui. Cet intérêt, né dès la Faculté, avait déjà des avocats, le juriste d’entreprise a pour lui de
26 trouvé à s’exercer lorsque j’eus des fonctions de bien connaître l’Entreprise elle-même, ses dures
Direction Juridique et qu’à ce titre, j’étais respon- réalités, ses contraintes et ses aléas, et la façon
sable en interne du pilotage de très gros arbitra- dont le fait juridique y fait souvent, selon les cas,
ges internes ou internationaux. flétrir ou prospérer le fruit économique.
Mon intérêt pour cette matière fut donc assez ■ Propos recueillis par Juliette Loir
tôt connu et dès le début des années 1990, j’ai
eu la chance de commencer à me voir désigné
comme arbitre, soit par les parties, soit par les
institutions elles-mêmes.
ture de la délégation et dans l’exercice des mis- sécurité au travail, une compétence juridique est
sions du salarié choisi par lui (II). indispensable, cf. Cass. crim., 25 sept. 2007, no
06-85.945).
Compétence et autorité du délégataire
En l’espèce, c’est plutôt la jeunesse du déléga-
La règle est inchangée depuis les arrêts de 1993 : taire (21 ans seulement) et son inexpérience (la
le délégataire doit être pourvu de la compétence, délégation a été signée moins d’un an après son
de l’autorité et des moyens nécessaires à la mise arrivée dans l’entreprise) qui ont motivé la décision
en œuvre de la délégation, sans quoi celle-ci ne des juges du fond. Autrement dit, inutile de véri-
saurait exonérer le chef d’entreprise de sa res- fier si le délégataire disposait des compétences
ponsabilité pénale. requises dès lors qu’il n’exerce pas ses fonctions
depuis un temps suffisant. À partir de cette déci-
Compétence du délégataire sion, toute la difficulté pour le praticien sera de
déterminer à partir de quand un salarié peut être
Le délégataire doit en premier lieu disposer des jugé suffisamment âgé et expérimenté. Dans le
connaissances techniques nécessaires à l’ac- doute, on ne pourra que conseiller aux dirigeants
complissement de sa mission. Un tel bagage de choisir comme délégataire le salarié le plus
peut d’ailleurs résulter de sa formation initiale, « ancien », tout en lui assurant une formation suf-
ou encore d’une formation dispensée ultérieu- fisante afin que l’ensemble des conditions soient
rement à l’initiative de l’employeur. En second remplies. Sans perdre de vue que la question de
lieu, la jurisprudence exige du bénéficiaire de la l’inexpérience du délégataire est également liée à
délégation qu’il maîtrise le droit applicable à son une seconde condition essentielle, celle de son
domaine d’activité (en matière d’hygiène et de autorité dans l’entreprise.
29
Autorité du délégataire peu importe que le salarié ait bénéficié par la suite
d’une formation, ou acquis l’expérience requise.
L’autorité du délégataire est une condition essen- À noter d’ailleurs que l’attitude du chef d’entre-
tielle, qui comprend l’exercice d’un pouvoir de prise au moment du choix (et même ensuite) est
commandement et l’octroi des compétences également prise en compte par le juge pénal pour
disciplinaires qui y sont attachées. Mais peut-on apprécier l’effectivité de la délégation. Ainsi, une
considérer qu’un simple chef de chantier dis- attitude de dénigrement des capacités du salarié
pose d’une autorité suffisante ? Ici encore, la est incompatible avec la confiance qui aurait dû
jurisprudence se détermine au cas par cas, sous-tendre l’acte de délégation (cf. Cass. crim.,
en fonction de l’organisation de l’entreprise. 17 févr. 2004, no 03-81.687). Enfin, l’éventualité
En l’espèce, la question n’a pas été discutée, d’une faute de gestion n’est pas à écarter (cf.
même si au départ, le délégataire occupait un Cass. com., 7 juill. 1992, no 90-19.323, et Lamy
poste de simple chef d’équipe et aurait donc sociétés commerciales 2009, no 678).
pu être soulevée.
Après conclusion des délégations :
En revanche, le juge pénal a sans aucun doute l’autonomie du délégataire
retenu une conception plus subjective, ou plus
morale, de l’autorité. On imagine mal en effet Les juridictions pénales sont particulièrement
comment un jeune homme de 21 ans aurait l’as- attentives au rôle conservé par le dirigeant après
cendant suffisant sur une équipe d’ouvriers, dont signature des délégations. En effet, le déléga-
certains devaient être nécessairement plus âgés taire doit disposer d’une autonomie suffisante,
que lui et plus expérimentés, pour leur inspirer sans quoi il n’apparaîtrait que comme un simple
l’obéissance nécessaire au respect des normes bouc émissaire dont la désignation ne servirait
de sécurité applicables sur le chantier... On ne qu’à faire endosser à un tiers la responsabilité
30 peut donc qu’approuver l’appréciation du tribunal effective du chef d’entreprise. La jurisprudence
et de la cour d’appel dans cette affaire, qui relève est particulièrement fournie et toujours constante
avant tout du bon sens, et s’inscrit dans le sens sur ce point (cf., par exemple, pour une infrac-
d’une jurisprudence constante (cf. Cass. crim., tion de travail dissimulé, et alors que le dirigeant
26 mars 2008, no 07-84.730, pour un déléga- s’immisçait régulièrement dans la gestion du per-
taire employé de l’entreprise depuis quelques sonnel de l’entreprise, Cass. crim., 9 oct. 2007,
jours seulement). no 06-89.028).
Rôle du chef d’entreprise délégant L’espèce ici rapportée pouvait sembler assez
proche de ce cas : lors du contrôle de l’inspec-
Le dirigeant est non seulement à l’origine du choix tion du travail, il avait été souligné que le chef
du délégataire, mais il conserve son autorité sur d’entreprise était présent sur le chantier. De là à
ce dernier dont il est l’employeur. en déduire qu’il avait conservé une partie de ses
pouvoirs de direction dans la construction du
Avant la conclusion de la délégation : centre commercial, il n’y avait qu’un pas à fran-
le choix du délégataire chir... Pourtant, curieusement, les juges du fond
n’ont pas cherché à étayer ce raisonnement, qui
Le second enseignement de l’arrêt rapporté est aurait pu aller de pair avec le constat de l’inex-
relatif à la question du moment où les qualités périence du salarié.
du délégataire doivent s’apprécier. La réponse
est sans équivoque : le délégataire doit être suf- L’arrêt du 8 décembre 2009 le confirme : seuls
fisamment compétent et son autorité suffisam- les dirigeants avertis sur les conditions de validité
ment reconnue lorsque le chef d’entreprise prend d’une délégation et suffisamment diligents dans
sa décision de déléguer une partie de ses mis- le choix du délégataire et dans l’exercice ultérieur
sions à ce dernier. En l’espèce, l’inexpérience de leurs missions pourront ainsi échapper à leur
du délégataire au jour de la signature de l’acte a responsabilité pénale.
été jugée rédhibitoire par le juge correctionnel. La
signature de la délégation suppose en tout état ■ Brigitte Brom
de cause que ce dernier ait vérifié les compéten-
ces du délégataire avant de prendre sa décision
puisque c’est une condition de son effectivité. Et
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Point de vue
Le développement durable,
un engagement stratégique
auquel participe la filière
juridique
Entretien avec Sandra Lagumina, Directeur Juridique
Corporate GDF Suez
Sandra Lagumina
De par la nature de ses activités liées aux de production est l’un des plus propres d’Eu-
métiers de l’énergie, GDF SUEZ est au cœur rope. Par ailleurs, tout nouveau site fait l’objet de
des enjeux environnementaux et est engagé mesures des impacts sur l’environnement de sa
dans une démarche développement durable conception jusqu’à son arrêt définitif voire bien
depuis ses débuts…
au-delà comme on le constate avec les ancien- les textes du Grenelle. Nous participons également
nes usines à gaz par exemple. à la réflexion sur l’évolution de ces textes. Enfin,
certains des contentieux ayant trait à ces matiè-
Quel est le rôle du service juridique res demeurent gérés directement par la Direction
dans l’action du Groupe en faveur de la Juridique centrale à la fois pour des raisons histo-
protection de l’environnement ? riques et parce que ces contentieux nécessitent 33
souvent un suivi sur plusieurs années.
Bien évidemment, nous devons tout d’abord
interpréter, expliquer aux collaborateurs et faire En matière d’environnement, quel sont les
respecter les textes réglementaires d’une grande contentieux que vous gérez ?
complexité : au niveau européen, les directives
environnementales (IPPC, sur l’eau, l’air ambiant et Le principal risque en matière de gaz naturel a
la responsabilité environnementale), le règlement trait au risque d’explosion et aux dramatiques
REACH, mais aussi des directives sectorielles ou conséquences sanctionnées au pénal. Notre
spécifiques comme SEVESO et sur le plan natio- priorité est la protection des personnes. Nous
nal, les règles de notre code de l’environnement et sommes en revanche moins concernés en raison
des caractéristiques de la molécule de gaz par
les dommages de pollutions au sens environne-
Parcours mental du terme. En revanche, nous sommes très
attentifs aux atteintes au voisinage de nos sites
Après une première expérience comme auditeur et maître de requêtes au
industriels : pollution sonore ou visuelle par exem-
Conseil d’Etat, Sandra Lagumina devient conseiller technique et juridique
ple. Sur le sujet particulier de la dépollution, notre
du Président de l’Assemblée nationale. Elle est ensuite de chargée du droit
démarche a été très volontariste dans la remise en
de la concurrence et de la commande publique au cabinet du ministre de
état des anciennes usines à gaz pour lesquelles
l’économie et de finances. De 2002 à 2005, elle est sous-directeur à la
nous avions passé une convention avec l’Etat.
Direction des affaires juridiques du Ministère de l’économie, des finances
Notre responsabilité administrative demeure en
et de l’industrie. Elle intègre en 2005 le Groupe Gaz de France en tant
tant qu’ancien exploitant pendant 30 ans après
que Directeur Adjoint de la Direction de la Stratégie et devient Directeur
la cessation d’activité et quoi qu’il en soit, nous
Juridique du Groupe Gaz de France en février 2007. Depuis juillet 2008,
assumons notre responsabilité en tant que pro-
elle est directeur juridique corporate du Groupe GDF SUEZ.
priétaire initial des sites. Nous devons donc être
Formation : organisés de manière à gérer le long-terme ces
• Ecole Nationale d’Administration (ENA) dossiers et c’est la raison pour laquelle nous
• DESS de droit du marché commun avons décidé de conserver cette compétence
• DESS de droit public de contentieux au même titre que nous avions
gardé les contentieux liés à l’amiante.
• Institut d’études politiques de Paris (IEP)
Pr Jérôme Duval-Hamel
Par ailleurs, lors du lancement de ce Master 2, Elle offre un double diplôme complet, en un an:
nous avions noué des partenariats avec une quin- une formation complète de Droit des affaires et de
Le Prix AFJE
Point de vue d’un des membres du jury : Luc Athlan,
Responsable Juridique France Telecom-Orange
et Vice-Président de l’AFJE
37
Un bon Juriste d’Entreprise n’est pas
uniquement un homme de dossier mais doit
être capable d’animer une équipe.
Concernant le Prix AFJE ; il s’agit de valoriser le Beaucoup d’étudiants en droit, à tort ou à raison,
diplôme DJCE et plus particulièrement un étu- privilégient le métier d’avocat. Un des nombreux
diant qui posséderait potentiellement les quali- enjeux pour l’AFJE est d’être présente dans les
tés que l’on est en droit d’attendre d’un Juriste Grandes Écoles, les Universités notamment dans
d’Entreprise : l’ouverture au monde, l’esprit d’ini- les DJCE, comme avec le Prix AFJE et permet-
tiative et l’envie. Il s’agit pour le jury d’obtenir tre ainsi aux étudiants de privilégier le métier de
la parfaite adéquation entre la personnalité du Juriste d’Entreprise.
candidat et sa formation.
Prix AFJE : une montée en puissance !
Vincent Briand
38
Quelle est la place du droit dans votre vie ? J’ai ensuite intégré l’Université de Paris Il, Pan-
théon-Assas en master 1 et j’ai présenté ma
Il a une place très importante. Dès le début de candidature au master 2 juriste d’affaires-DJCE.
mes études, je me suis enthousiasmée pour cette Je me suis orientée vers le droit des affaires. Au
matière. Le droit permet de rendre intelligible départ, j’étais attirée par le droit du travail. Mais
énormément de choses dans le fonctionnement cette matière est trop factuelle. J’ai un esprit 39
et l’organisation de notre société. Au-delà des carré, logique, et je redoute les matières où il
matières juridiques, j’ai étudié l’histoire et les existe aussi peu de certitudes.
sciences politiques. Ces enseignements sont
nécessaires même aux non juristes, ne serait-ce N’est-ce pas un parcours un peu banal pour
que pour comprendre nos institutions, l’évolution prétendre à un tel prix ?
liée à l’Union Européenne et les débats économi-
ques et sociaux de notre époque. Mais la place Peut être. Je ne suis pas partie étudier à l’étranger,
du droit dans ma vie reste limitée à mes études. j’ai suivi mon cursus sans aucune vague. Mais
Je suis curieuse, et m’intéresse au monde qui j’espère compenser par ma personnalité. Je suis
m’entoure. Je ne me suis jamais enfermée dans curieuse et ouverte d’esprit. Je pense qu’un bor
une passion particulière. Je suis plutôt touche juriste doit être un bon technicien du droit mais
à tout et j’aime découvrir ce qui m’est inconnu. pas seulement. Je crois que les carrières ne se
J’ai pratiqué le théâtre pendant neuf ans, j’ai bâtissent pas que sur les compétences, mais
assisté à de nombreux spectacles. Pourtant j’ai aussi la personnalité et les valeurs humaines.
tout autant de plaisir à assister à un bon match
de football. Vous êtes sortie major de votre promotion,
vous êtes arrivée deuxième du concours
Décrivez-nous votre parcours. Francis Lefebvre, tout cela ne vous a pas
donné la grosse tête ?
J’ai effectué des études scientifiques au lycée,
j’ai eu le bac S avec mention très bien. J’ai hésité Ces distinctions ont été très agréables, mais
entre des études scientifiques et des études juri- malheureusement ne font pas tout. J’ai peut
diques. J’aimais beaucoup la rigueur et la logique être réussi en milieu universitaire car j’ai travaillé,
scientifique : un raisonnement de mathématique appris mes cours, mais je vais devoir faire mes
est concis, clair et sans une grande casuistique preuves dans le milieu professionnel. Je pense
comme on peut retrouver en droit. Mais l’idée de que seul Ie travail pourra m’aider et non ces belle
faire des sciences toute ma vie ne m’attirait pas récompenses.
du tout. Ce qui m’a initialement séduite dans le
droit est la culture qu’il apporte. Il permet de mieux ■ Interview extraite de la Gazette du DJCE,
comprendre et appréhender les débats sociaux. février 2010.
en partenariat avec :
Jean-David Sichel
Le groupe TBWA France est une ETI (Entreprise crise par exemple) : plan média, achat d’espace,
de Taille Intermédiaire) qui compte une vingtaine achat de droits auprès des comédiens, des musi-
d’agences à Paris et en régions. ciens (maisons de disques/éditeurs), recherche
d’un réalisateur, dépôt d’une marque ou d’une
L’exercice de la fonction juridique dans le cadre baseline, tournage, post-production, validation
d’une entreprise de communication implique à des campagnes auprès de l’ARPP, tout cela va
mon sens plusieurs caractéristiques : grande très vite et l’équipe juridique ainsi que nos avocats
réactivité et rapidité d’exécution, diversité des spécialisés en droit de la communication doivent
missions et nécessité de sensibilisation. réagir très rapidement tout en s’assurant que les
droits de propriété intellectuelle de tous les inter-
Réactivité et rapidité d’abord. venants sont respectées et dûment « clearés » et
que la campagne ne posera aucune difficulté eu
La communication publicitaire est un domaine égard aux contraintes de plus en plus nombreuses
dans lequel la relation avec le client s’inscrit certes qui sont imposées sur ce type de création (lutte
dans la durée mais dont les opérations peuvent se contre l’obésité, respect de la diversité, loi Evin,
succéder très rapidement en fonction des néces- susceptibilités communautaires, argumentaires
sités marketing/évènementielles ou parfois en rai- écologiques, mentions obligatoires…)
son d’évènements extérieurs (communication de
En dehors même du seul aspect métier, les struc- photographe, designer, comédien), sans quoi la
tures des agences de publicité sont changeantes : contrefaçon est inévitable.
suivant les exigences des clients et les contrain-
tes du groupe, des agences peuvent être créées Dès lors, les questions suivantes sont fréquem-
pour être plus tard fusionnées pour regrouper ment posées et rappelées : « Avez-vous bien
certaines activités connexes. Acquisition et ces- vérifié que l’œuvre créée n’est pas approchante
sions de fonds de commerce également. Activité d’une œuvre préexistante ? Avez-vous obtenu
corporate soutenue et en évolution permanente de l’annonceur ou du diffuseur le plan média en
donc. Tout comme les questions immobilières France et à l’étranger de façon à déterminer les
qui en découlent. droits dus aux ayant-droit ? Vous êtes-vous fait
garantir par nos fournisseurs sur ces sujets ?
Diversité ensuite. Avez-vous bien identifié dans votre documentation
les prestations qui sont régies par la loi Sapin sur
TBWA est un groupe de communication intégré, l’achat d’espace et les imprimés publicitaires ?
ce qui signifie que les prestations de publicité Avez-vous pensé aux assurances RC liés au type
« classique » (TV, internet, radio) y côtoient l’évè- de communication envisagé ? ».
nementiel, le production de contenus (exemple :
les magazines TGV ou Aéroports de Paris), le C’est la contrepartie indispensable à la « vélo-
merchandising (objets publicitaires), la produc- cité » du métier. Les juristes doivent s’adapter au
tion audiovisuelle, les « marketing services », la rythme soutenu des campagnes mais ne peuvent
communication corporate et médicale. En une laisser l’agence prendre le risque de diffuser une
journée, le Directeur Juridique est donc confronté campagne dont le contenu n’a pas été préala-
à la fois à des problématiques d’assurance de blement validé juridiquement. Ce « principe de
tournage, de bail commercial, d’édition musicale, précaution » est d’ailleurs régulièrement rappelé
de contrat de prestations informatiques pour la par la Direction Générale. A cet égard, On peut 41
création d’une boutique d’objets publicitaires en dire que le réflexe juridique est très bien ancré
ligne, de contrats avec des médecins pour l’ani- chez TBWA et ce, depuis longtemps: la culture
mation d’un symposium. juridique y est donc ancienne et solide, que l’ap-
partenance à un groupe américain (Omnicom) n’a
Sensibilisation enfin. fait que renforcer.
Les équipes commerciales et créatives doivent Mon passé en cabinet d’avocat et l’expérience de
être régulièrement sensibilisées au risque juridique. la création d’entreprise m’ont bien préparé à ce
Les juristes, via les annonceurs et les directeurs type d’exercice du métier de juriste d’entreprise,
commerciaux de l’agence, doivent par exemple, l’étape de création ayant été en quelque sorte un
se tenir en permanence au courant du plan media « sas » entre le cabinet d’avocat et l’exercice dans
de chaque campagne (territoire, media, durée) afin un groupe. Chez TBWA, la fonction juridique existe
qu’aucune diffusion n’ait lieu sans l’autorisation depuis plus d’une quinzaine d’années tout en étant
préalable de chacun des ayant-droits (musicien, jeune dans sa composition. Avec mon équipe nous
sommes très mobilisés pour défendre les intérêts
du groupe dans différents domaines (pour le cor-
Parcours porate, pour les droits images, pour les droits liés
à la musique). Nous nous réunissons pour un brie-
• ESSEC 1992 fing hebdomadaire en plus du traitement quotidien
• Maîtrise de Droit (Paris II) des dossiers. Présence également indispensable
• DEA Droit des Affaires (Paris II) d’un cabinet d’avocat partenaire pour les aspects
spécialisés du droit de la communication et pour
• CAPA 1994
le droit social, en liaison avec la DRH.
Exercice
• De 1995 à 2000 : avocat chez Moquet Borde (Paul Hastings) puis Gide ■ Jean-David Sichel
Loyrette Nouel
• De 2000 à 2004 : cofondateur d’une SSII liée à ORACLE Rubrique suivie par Christophe Roquilly,
• Depuis 2005 : Directeur Juridique de TBWA France professeur à EDHEC Business School
et Rémy Sainte Fare Garnot, administrateur
• 2008 : administrateur et vice-président de l’AFJE de l’AFJE.
42
Les Editions Lamy lancent une nouvelle Autant de questions nouvelles, à la croisée de
collection d’ouvrages, Lamy Axe Droit. différents domaines juridiques, auxquelles les
Quels en sont les fondements clés ? professionnels du droit sont confrontés, avec
la nécessité de rapidement bien les maîtriser
Les besoins d’information des professionnels pour apporter les solutions concrètes et fiables
du droit sont constamment renouvelés par les attendues.
évolutions de la vie économique et sociale.
Le monde change à très vive allure, et, avec Autant d’opportunités aussi à saisir pour enrichir
lui, les problématiques juridiques : droit de la palette de leurs compétences et développer
l’Internet et téléchargement illégal, droit des leur activité.
créations immatérielles, droit des séniors, droit
des énergies renouvelables, responsabilité A ce besoin d’information sur des thématiques
environnementale des entreprises, droit des émergentes, innovantes et fortement liées à
arts visuels, révolution dans le monde des l’actualité, doit correspondre une démarche
institutions sans but lucratif avec les fonds de éditoriale ambitieuse.
dotation, situation de l’étudiant en entreprise,
emprise croissante du droit communautaire, Dans le prolongement de nos publications quo-
évolutions constantes de la cellule familiale, de tidiennement utilisées par les professionnels,
sa création à sa séparation, son patrimoine, cette nouvelle collection Lamy Axe droit, par
le statut de l’enfant, les problématiques de la le choix exigeant des titres publiés, une forte
souffrance au travail, … réactivité aux besoins nouveaux générés par
Depuis 2007, la lutte contre les contrefaçons, Nous lancerons cette année près de 5 nouveau-
qui touche de nombreux secteurs tels que les tés par mois, soit 45 titres d’ici la fin de l’an-
nouvelles technologies, le luxe, la santé, les née 2010. Nos premiers titres, lancés en mars,
meubles d’intérieur, est devenue une priorité concernent : « La lutte contre le téléchargement
pour les pouvoirs publics s’agissant tant des illégal » sous la signature d’Agnes Granchet et
œuvres matérielles qu’immatérielles. Les inves- d’Emmanuel Derieux, « Le droit des créations
tissements des entreprises mais également les immatérielles » signé par Hubert Bitan, « Famille
créations artistiques originales se voient confé- et patrimoine », recueil de contributions publiées
rer une protection accrue, notamment en droit dans la revue Droit & Patrimoine, « Evolution du
français. droit social », sous la plume de Jacques Barthé-
lémy ou encore « Le contentieux de la circulation
Les développements juridiques mais également routière » précité, par Rémy Josseaume et Jean-
techniques que consacre l’auteur à la lutte contre Baptiste Le Dall. Ont suivi en avril5 nouveaux 43
la contrefaçon des biens immatériels permettent ouvrages consacrés aux Fonds de dotation, à
d’appréhender au mieux les problématiques l’Étudiant en entreprise, au Droit des énergies
contemporaines notamment liées à la breveta- renouvelables, à l’Année du droit social 2009, aux
bilité des logiciels, au peer to peer, au statut de déontologies des professionnels du droit…
l’adresse IP ou encore à la responsabilité des
différents intervenants sur le Web 2.0. Notre collection, présente dans un large réseau
de libraires, traditionnels et en ligne, et parfaite-
Au plan juridique, les questions s’agissant de la ment référencée dans Googlebooks, est relayée
protection par le droit d’auteur (pour les auteurs par un site Internet dédié, http://librairie-droit.
de logiciels et de bases de données), et par le lamy.fr et par notre blog (Lamyblog.fr). Notre
droit sui generis (pour les producteurs de bases réseau est aussi pleinement engagé auprès des
de données), sont mises à jour et minutieusement étudiants et des professeurs dans les universi-
développées. Au plan technique, il est envisagé tés juridiques.
une approche accessible des mesures expertales
nécessaires dans le domaine de la contrefaçon ; Professionnels et futurs professionnels pourront
ce qui est d’autant plus appréciable que les ainsi facilement accéder à cette collection et aux
réponses se trouvent à la croisée des chemins nouveautés permanentes que nous leur propo-
entre juridique et technique. serons. Nous serons particulièrement attentifs
aux retours des praticiens et aux propositions
qu’ils pourront nous adresser pour développer
une collection parfaitement en phase avec leurs
attentes.
Livres
Droits de propriété intellectuelle dans un monde
globalisé
Ouvrage coordonné par Viviane de Beaufort, Vuibert, octobre 2009, 233 pages.
Rare ouvrage collectif peine tant à vous tomber des mains. Cet ouvrage mené rondement
par la co-directrice du Centre Européen de Droit et d’Economie de l’ESSEC accueille plé-
thore de contributions palpitantes pour qui développe le moindre intérêt pour le Droit de la
propriété intellectuelle. On y retrouve la plume de membres éminents du Conseil de l’AFJE
dont Luc Athlan et Jean-David Sichel, aux côtés d’autres signatures telles que Guy Cani-
vet, Patrick Rey ou Guiseppe di Martino. L’innovation, Hadopi, la problématique des États
trop peu conscients de la valeur de leurs actifs immatériels, la copie libre, l’actualité de la
contrefaçon sont autant de sujets qui donnent à réfléchir et trop peu d’ouvrages se penchent sur une telle prise de
recul dans le domaine, tous les jours, évolutif, du Droit de la propriété intellectuelle.Si notre page Culture, comportait
un système d’étoiles, celui-ci mériterait le maximum tant le soin intellectuel surnage à chaque chapitre de ce livre qui
a été préfacé par Christine Lagarde.
■ Philippe Coen
44
Exposition
Crime et châtiment au Musée d’Orsay
Du 16 mars au 27 juin 2010.
« La guillotine transformée en objet de musée ! On ne peut pas
rêver un symbole plus éclatant de l’abolition de la peine de mort »
a déclaré Robert Badinter à l’AFP. Le ton est donné !
L’exposition explore le regard fasciné des artistes sur le crime et
questionne la réalité troublante de l’homme criminel et de la so-
ciété punitive. Du premier crime originel, celui de Caïn, en passant
par l’introduction de la guillotine à la Révolution Française jusqu’à
la Seconde Guerre mondiale : 457 dessins, tableaux, sculptures
de Goya, Guéricault, Delacroix, Moreau, Munch, Dix, Picasso,
Magritte… Mais aussi des têtes coupées et des crânes phrénolo-
giques. Bref, ce sont plus de deux siècles d’histoire de l’art mais
aussi d’histoires d’hommes !
Intérieur (Le Viol) d’Edgar Degas
Au programme de cette exposition, au travers de vos déambu-
lations dans le musée, vous retrouverez les thématiques de la guillotine, du crime romantique, de l’homme et de la
femme criminels, de l’institution pénitentiaire et des derniers jours du condamné à mort, mais aussi l’évolution des
institutions judiciaires françaises depuis 1791, année marquée par des débats violents à l’Assemblée Constituante
à propos de la peine de mort, jusqu’à son effective abolition en 1981. Ce sont également deux siècles d’affaires
qui ont nourri la chronique judiciaire, bouleversé la société et intrigué les artistes, particulièrement les peintres et les
écrivains.
Cette exposition est réservée à un public averti car certaines des œuvres présentées pourraient heurter les âmes
sensibles. 45
■ Gaëlle Toufette
Cinéma
Coffret Blu-Ray Jim Jarmusch
3 Blu-Ray : Ghost dog + Dead man + Broken flowers.
Un coffret de 3 films réalisés par l’inclassable cinéaste à la fois introspectif, méditatif et léger :
Jim Jarmusch. Commençant sa carrière avec Stranger Than Paradise (1984) et Down by Law
(1985), Jim Jarmusch est devenu un réalisateur fétiche pour toute une génération. La pratique
de son art le rapproche de la première vague du cinéma indépendant new-yorkais du début
des années 60 et de la Nouvelle Vague dont il s’inspire, version jean Eustache : esthétique
minimaliste, noir et blanc et acteurs peu connus.
Héritier à la fois de la Nouvelle Vague française, du cinéma tchèque des années 60 et de Wim
Wenders, qui l’a soutenu, Jarmusch a su toucher une sensibilité contemporaine faite de désœuvrement, d’humour,
de vagabondage et de dérision. Dans Down by Law, il a même su intégrer à son univers l’acteur comique italien Ro-
berto Benigni. Ses films contemplatifs établissent un pont entre la sensibilité américaine et la culture européenne. En
1989, il signa Mystery Train, troisième volet d’une trilogie sur l’Amérique contemporaine où l’on retrouve son goût des
dérives désenchantées, musicales et humoristiques, puis Coffee and Cigarettes, Night on Earth (1991) et en 1995,
Dead Man, un étrange western initiatique présent dans le coffret nouvellement édité. Après un documentaire consa-
cré au musicien Neil Young (Year of the Horse, 1997), il revient à un ton détaché et lent qu’il applique à un film d’ac-
tion, Ghost Dog, la voie du samouraï (1999) puis Broken Flowers (2006) avec Bill Murray en Don Juan d’aujourd’hui,
Sharon Stone, Jessica Lange, Tilda Swinton, Julie Delpy et Chloë Sevigny.
Le cinéma de Jim Jarmusch joue beaucoup sur l’absence avec des héros qui ne sont pas tout à fait là. Il y a à chaque
fois une quête du père à la recherche du fils improbable. Et surtout il joue sur l’incertitude de l’existence qui sonne
comme un parfum de vérité surtout dans l’œil du juriste qui jugule au jour le jour l’incertitude des entreprises comme
Jarmusch observe avec enthousiasme l’incertitude humaine à travers l’œil de sa caméra.
■ Philippe Coen
Communiqué AFJE :
Projet de rapprochement des professions
de juristes d’entreprise-avocats
L’AFJE, association professionnelle regroupant sans aucune justification la suppression immédiate
4 000 juristes d’entreprise, dont 650 directeurs de la passerelle, disposition en vigueur depuis près
juridiques, est partie prenante dans les travaux de vingt ans.
liés au projet de rapprochement des professions
juridiques envisagé suite au rapport Darrois. Elle L’AFJE rappelle que le CAPA ne confère pas à
consulte régulièrement ses adhérents via un groupe ce jour et dans l’attente de sa réforme une com-
de travail dédié et des réunions d’information spé- pétence particulièrement adaptée à la pratique
cialement consacrées à ce projet. concrète du droit dans les entreprises
L’AFJE travaille de concert avec les autres associa- Ladite motion déclare en outre que « l’avocat fran-
tions de juristes ainsi qu’avec le Conseil National çais est un garant de la sécurité juridique des opé-
des Barreaux et les organisations patronales pour rations économiques dont le rôle, à l’instar de ses
explorer les voies proposées pour la création éven- confrères européens, doit pouvoir constituer une
tuelle d’un statut d’avocat en entreprise. Elle reste véritable valeur ajoutée pour les entreprises compte
vigilante dans ces discussions de façon à ce que, tenu des exigences actuelles en matière sociale,
dans l’éventualité où ce projet aboutirait, le statut d’éthique et de bonne conduite des affaires »,
d’avocat en entreprise constitue bien un progrès semblant ainsi méconnaître ou négliger le rôle que
pour les entreprises qui les emploient, renforce leur jouent déjà les juristes d’entreprise en la matière, 47
compétitivité notamment internationale et la place rôle pourtant parfaitement avéré et reconnu.
qu’occupe le droit au sein des entreprises, tout en
permettant aux professionnels du droit que sont les L’AFJE regrette très vivement le manque d’esprit
juristes d’entreprise d’accéder à ce nouveau statut constructif dont cette motion fait preuve, motion
dans des conditions acceptables pour cette pro- qui, curieusement, après avoir exclu toute forme de
fession dont la compétence est aujourd’hui incon- fusion entre les professions d’avocat et de juriste
testablement établie dans les entreprises. d’entreprise, envisage ensuite et de la manière la
plus unilatérale et contestable qui soit, un statut
Dans ce contexte, l’AFJE a toutefois pris acte du d’avocat en entreprise niant la profession de juriste
vote de la Conférence des Bâtonniers intervenu le d’entreprise et l’intérêt des entreprises elles-mê-
30 avril 2010 et de son résultat opposé à la création mes, pour ne se préoccuper que de l’introduc-
du statut d’avocat en entreprise (près de 86 % de tion des seuls avocats au sein de cette nouvelle
votes contre). Ellenote qu’un vote est prévu les 11 profession.
ou 12 septembre prochain sur ce projet au sein
du Conseil National des Barreaux. L’AFJE ne peut que contester la forme et le fond
d’une telle prise de position et ne soutiendra pas
L’AFJE a aussi pris connaissance de la motion une réforme qui s’inscrirait dans une telle logi-
votée par la FNUJA le 15 mai dernier et a constaté que d’exclusion et d’absence de prise en compte
que celle-ci, après avoir rappelé « son opposition à des intérêts et réalités de l’entreprise.
toute forme de fusion entre les professions d’avo-
cats et de juriste d’entreprise », « exige qu’à titre L’AFJE espère que la positionde la FNUJA ne reflète
préalable, le CAPA devienne la seule voie d’ac- pas l’esprit de l’ensemble de la profession d’avo-
cès à la profession d’avocat pour les juristes cat et souhaite que celle-ci se montre plus ouverte
d’entreprise, ce qui implique la suppression de aux implications de ce projet pour les entreprises,
la passerelle prévue à l’article 98-3 du décret pour la modernisation du Barreau et pour la prati-
de 91, et ce, sans mesure transitoire ». L’AFJE que du droit des affaires en France.
constate que cette déclaration, au-delà de son
opposition à toute forme de fusion des professions, Contact presse :
se montre particulièrement hostile vis-à-vis de la Anne-Laure Paulet, Secrétaire Général
profession des juristes d’entreprise en demandant annelaure.paulet@afje.org
Gaëlle Touffette
50
Diplômée du Master 2 en « Création Multimédia et Direction de projet » de l’Université
de Nice, Gaëlle Touffette a rejoint les rangs de l’AFJE en février 2010. L’occasion pour
l’association de renforcer ses équipes et contribuer ainsi au développement de ses outils
de communication, du site internet en passant par le magazine des juristes d’entreprises
(JEM) jusqu’à l’annuaire. Itinéraire d’une intégration réussie.
Comment passe t-on des bancs de prises. Pour tout vous dire, à mon arrivée, j’ai été
l’Université de Nice à l’AFJE ? étonnée par le très grand nombre de femmes
exerçant la profession de juriste d’entreprise.
Lorsque j’ai obtenu mon diplôme en 2007, je me Une agréable surprise à l’heure où la parité est
suis rapidement rendue compte que le bassin au centre des préoccupations sociales.
méditerranéen offrait beaucoup moins d’oppor-
tunités que la région parisienne dans le domaine En tant que nouvelle collaboratrice, quels
de la communication. C’est donc naturellement sont vos principaux chantiers pour 2010 ?
que j’ai quitté ma côté d’azur d’adoption pour
rejoindre la capitale fin 2009. L’actualisation et la mise à jour du site internet,
la charge du secrétariat de rédaction du JEM et
Vous avez rejoint l’équipe de l’AFJE début la qualification du fichier adhérent nécessaire à
2010. Le monde des juristes d’entreprise la réalisation de l’annuaire.
vous était-il familier ?
Aux côtés d’Anne-Laure Paulet, je suis également
Pas vraiment. En réalité, l’image des métiers du chargée d’organiser et de préparer les petits
droit qui prédomine est encore celle de l’avocat déjeuners débat ou encore les Ateliers de l’AFJE
en plaidoirie. Les juristes, quant à eux, se révè- et ce, main dans la main avec Jill Jacq.
lent beaucoup plus discrets. Une discrétion qui
pas justifiée compte tenu de l’ampleur que prend ■ Propos recueillis par Juliette Loir
aujourd’hui la fonction juridique au sein des entre-
Française
L’annuaire AFJE s’impose aujourd’hui comme l’outil indispensable du réseau de
o cia ti o n
Ass ise près de 4000 juristes d’entreprise tous adhérents de votre association.
Ju riste s dʼEntrepr
des Photographie du réseau à un instant T, il nécessite de chacun d’entre vous
quelques minutes de votre temps pour mettre à jour votre espace personnel
sur le site : www.afje.org.
Nous remercions le groupe Wolters Kluwer pour cette troisième édition et les
annonceurs qui soutiennent notre publication et nous font confiance.
uropéenne
ciationE eprise
de l’Asso es d’Entr
Membre des Jurist
51
COTISATION 2010
Avez-vous pensé à régulariser votre cotisation 2010 ?
Pour bénéficier de l’ensemble des services mis à votre disposition par l’AFJE, pour continuer
à faire partie du réseau de l’organisation professionnelle la plus représentative du métier de
juriste d’entreprise, nous vous invitons à nous retourner le coupon ci-joint.
Je, soussigné (nom, prénom, mail)..................................................................................................................................... , souhaite renouveler mon adhésion en qualité de :
Juriste Junior Île de France (- de 3 ans d’expérience) : 100 euros Juriste en recherche d’emploi : 35 euros
Juriste Junior Région (- de 3 ans d’expérience) : 70 euros Membre bienfaiteur : à partir de 265 euros