Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Ce qui fait de l’entreprise une entité complexe à appréhender dans le cadre d’une reprise,
c’est qu’elle est une personne, morale, certes, mais bien vivante, en mouvement constant, et
qui construit chaque jour son histoire, par ses décisions, son rapport avec son
environnement, et par l’évolution de son patrimoine. De son côté, le bilan est une
photographie prise à l’instant précis de la dernière clôture d’exercice, il prend pour base les
flux financiers constatés, plus rarement il contient des valorisations consécutives à des
décisions de gestion.
Dans ces conditions il est presque inévitable que le bilan ne soit pas complètement
exhaustif, et son analyse doit forcément être accompagnée d’une recherche des
réajustements qui vont impacter la valorisation de la société, à la hausse ou à la baisse. Bien
sur, l’acquéreur bénéficie d’une part de l’obligation de renseignement du vendeur, et
obtiendra généralement une garantie de passif, mais, entre professionnels la première est
d’application limitée, et aucune des deux ne couvrira l’acquéreur contre sa propre
négligence.
Essayons de dresser une liste des éléments hors bilan susceptibles d’affecter à la baisse la
valeur d’une entreprise, tout en précisant que comme le bilan, cette liste ne peut pas non
plus être exhaustive. L’intérêt de notre propos ne peut être que d’orienter le lecteur dans les
bonnes pistes de réflexion, et c’est dans ce but qu’il me parait intéressant de classer ces
éléments hors bilan selon trois critères : Ceux qui tiennent à la vie de l’entreprise
indépendamment de la cession, ceux qui répondent à l’opération de cession, et ceux qui
seront principalement consécutifs au projet de l’acquéreur.
La recherche et la valorisation de ces engagements devra être abordée par l’acquéreur avec
naturel, sans arrière pensée de suspicion ni gène.
Les éléments hors bilan tenant à la vie de l’entreprise et susceptible d’en affaiblir la
valeur :
Les risques de redressement par les organismes fiscaux et sociaux. Il n’est pas
nécessaire de détailler, le sujet est le premier à être couvert par la garantie de passif, c’est le
premier à venir à l’esprit des parties à la reprise, le cédant est le premier à arborer ses
notifications de contrôles pour faire baisser la garantie. Mais le cout direct du redressement,
réglé par définition par le cédant n’est pas la seule conséquence d’un redressement : avez-
vous pensé aux couts futurs des retraitements du fait des injonctions posées par ces
administrations au cours d’un récent contrôle ? ( par exemple une soumission inattendue à
la TVA ou à un taux supérieur, dans le cadre de conditions négociées de vente avec une
importante durée restant à courir avant la renégociation).
Les engagements de départ à la retraite. Près des deux tiers des groupes comptabilisent
ces engagements sous forme de provision. Les 37% restants sont réticents à cette pratique
pour son impact négatif sur les capitaux propres. Et on connaît le poids important des
départs en retraite à venir.
Les obligations de mise aux normes de l’outil de production. Dans notre contexte
normatif, il faut surtout faire attention aux textes récents, non encore en application, mais
que « nul n’est censé ignorer », et dont le respect pourra s’avérer couteux (attention
notamment aux process employant des solvants, aux rejets dans l’atmosphère, …)
Les garanties accordées non couvertes par des assurances, par absence, inapropriation
ou rupture de garantie.
Les constructions devront amener l’acquéreur à se poser la question du maintien après la
cession de la légalité de la construction, des autorisations nécessaires à l’exploitation
(CDEC,…), et même peut être du droit à reconstruire en cas de sinistre (plan PRI,
dépassement de COS ou du PLD).
Les litiges en cours de formation ou non encore judiciairement avérés ne font pas
forcément l’objet d’une provision pour litiges.
Au cours de la reprise les parties vont se mettre d’accord sur des décisions qui vont
avoir des effets secondaires la valeur de l’entreprise :
Voilà pourquoi il convient d’étudier de plus près les propositions du cédant quant aux
éléments hors bilan qui feront grimper la valeur de l’entreprise.
Convenir entre parties d’une plus value latente sur des éléments d’actif doit
s’accompagner d’un retraitement pour tenir compte de l’impôt de plus value latent,
parce que le jour venu, l’acquéreur devra payer l’impôt relatif à la plus value du cédant. La
réévaluation de l’immobilier loué à l’exploitation doit aussi entrainer au compte de résultat un
retraitement sur le loyer.
Le retraitement des crédits baux et des locations financières visant à les inscrire (entre
les parties) à l’actif doit aussi amener l’acquéreur à regarder l’évolution correspondante des
ratios d’endettement. C’est même fréquemment ce qui aura conduit le cédant à recourir à
ces solutions de financement.
Les contrats réputés « intuitu personae », c'est-à-dire qui risquent d’être résiliés en cas
de cession doivent être identifiés et traités par les parties, on pourra y trouver des prêts, un
pacte d’actionnaires, divers contrats conclus dans le cadre d’un groupe, la plupart des
contrats de franchise, ou de distribution exclusive comportent une clause d’agrément du
cessionnaire. Certains contrats intuitu personae comportent des conditions de sorties
dissuasives.
Le coût de sortie des placements monétaires ne doit pas être négligé. Il comporte des
plus values latentes et le plus souvent une pénalité de sortie anticipée.