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un homme solitaire, usé par les ans et la maladie, enfermé dans sa surdité,

s’éloigne des fastes de la cour espagnole et se mure dans sa maison de campagne ...
Les trésors du Prado
Peintures noires …
une femme d'âge mûr ou « Manola » en deuil repose son coude sur un monticule de terre sur lequel se trouve
une grille entourant généralement les tombes

la femme est Leocadia Zorrilla y Galarza, maîtresse de Goya avec qui elle vécut à la Quinta del Sordo

l'expression du visage triste et nostalgique a été interprétée comme une allusion au repos final de Goya
… une tombe

Goya y Lucientes, Francisco de


A Manola: Leocadia Zorilla
Une manola: Léocadie Zorrilla
1820 – 1823
Museo del Prado, Madrid
on ne sait pas exactement ce qui est représenté dans cette peinture ...

une série de personnages grotesques qui pourraient être des religieuses et des sorcières, vont en procession
à un endroit indéterminé

intitulé "Le Saint-Office" sur la base d'un personnage dans le coin inférieur droit, portant l'habit de Inquisition

Goya y Lucientes, Francisco de


Pilgrimage to the Fountain of San Isidro or The Holy Office
Procession à la source Saint-Isidore ou le Saint-Office
1820 - 1823
Museo del Prado, Madrid
sans doute l'œuvre énigmatique de Goya ...

Asmodée, représenté ici en démon feminin, transporte dans les airs don Cleophas, les deux pouvant s'introduire
dans l'intimité des personnes et contempler leurs vices
Cleophas indique sur la colline un village qui va être détruit

au pied de la montagne s’étend une plaine sombre avec des scènes de combats et deux soldats en uniformes
français visent un groupe de résistants

Goya y Lucientes, Francisco de


Asmodea or Fantastic Vision
Vision fantastique ou Asmodée
1820 - 1823
Museo del Prado, Madrid
déesses du destin, les Parques
Atropos, déesse de l'inexorabilité (« l'Implacable ») porte des ciseaux pour couper le fil
Clotho, porte une fileuse pour tisser le destin (que Goya substitue par un nouveau né — probablement une allégorie
de la vie)
Lachésis, « la Réparatrice », qui regarde au travers d'une loupe et symbolise le temps : c'est elle qui mesurait la
longueur du fil

ces trois figures féminines suspendues en l'air sont accompagnées d'une quatrième, qui semble masculine, les
mains dans le dos — probablement attachées
les Parques seraient ainsi en train de décider du destin de ce personnage, dont les mains attachées l'empêchent de
s'opposer au destin qu'elles décident pour lui

… tous les quatre sont affreusement moches !

Goya y Lucientes, Francisco de


Atropos or The Fates
Les Moires Átropos ou Les Parques
1820 – 1823
Museo del Prado, Madrid
deux paysans font une lutte fratricide, enfoncés dans la terre jusqu'aux genoux (une autre théorie indique que
le bas des jambes a été effacé) ...

l’interprétation traditionnelle: deux villageois luttant à coups de bâton dans un paysage désolé

l’interprétation en Espagne: une lutte fratricide entre espagnols

l’interprétation par les intellectuels espagnols: une représentation de la mort comme une anticipation de la
guerre civile

Goya y Lucientes, Francisco de


Duel with Cudgels, or Fight to the Death with Clubs
Duel au gourdin ou la Rixe
1820 - 1823
Museo del Prado, Madrid
vieilles personnes vêtues en moines ...

celle du premier plan a une grande barbe, tranquille et digne, son expression est un peu triste mais sereine

l’autre personnage, le visage est cadavérique, monstrueux voire animalier, semble crier dans l’oreille
...
peut-être une allusion à la surdité de Goya
peut-être un démon qui souffle à l'oreille des visions noires

Goya y Lucientes, Francisco de


Two Old Men
Deux vieux
1820 - 1823
Museo del Prado, Madrid
la procession vers l’ermitage Saint Isidore de Madrid …

chapeaux haut-de-forme, voiles de sœurs


et
un groupe de personnages de nuit, visiblement ivres et chantants avec des visages inquiétants

Goya y Lucientes, Francisco de


The Pilgrimage to San Isidro
La Procession à l'ermitage Saint-Isidore
1820 - 1823
Museo del Prado, Madrid
une atmosphère cauchemardesque de rituel satanique ou de cérémonie rituelle …

personnages grotesques, leurs visages sont caricaturaux au point d'avoir des traits animaliers

la chèvre, qui représente le diable, a sa gueule ouverte pour indiquer à la jeune qu'elle est nommée sorcière

les autres personnages observent le bouc et semblent écouter ses paroles

Goya y Lucientes, Francisco de


Witches' Sabbath, or the Great He-Goat
Le Sabbat des sorcières ou le Grand Bouc
1820 - 1823
Museo del Prado, Madrid
deux personnes âgées, on ne sait pas si ce sont des hommes ou des femmes

celui de gauche avec un foulard blanc grimace, probablement à cause du manque de dents

l’autre, ses yeux sont creux et noirs, sa tête cadavérique fait penser à un crâne

Goya y Lucientes, Francisco de


Two Old Men eating or Two Old Ones Eating Soup
Deux vieillards mangeant de la soupe
1820 - 1823
Museo del Prado, Madrid
chair blanche, sang rouge du cadavre ...

Saturne en train de dévorer l'un de ses fils


la bouche grande ouverte, les yeux exorbités
la région autour de l'aine est floue et sombre (à l'origine Saturne avait été représenté avec un pénis en érection)

interprétations sur la signification :


relations et conflits entre père et fils, rivalisant pour l’amour de la mère-épouse;
une allégorie de la situation en Espagne à l'époque, où la patrie consommerait ses propres enfants dans les guerres
et révolutions

du point de vue de la psychanalyse :


l’acte de manger son fils a été vu comme une figuration de l’impuissance sexuelle ...
un vieil homme (Goya) de plus de soixante-dix ans par rapport à son amant (Leocadia Zorrilla) beaucoup plus jeune,
et avec qui il a cohabité

Goya y Lucientes, Francisco de


Saturn. Saturn Devouring His Son
Saturne. Saturne dévorant un de ses fils ou Saturne dévorant son enfant
1820 – 1823
Museo del Prado, Madrid
inspiré du mythe de Judith de Béthulie

une torche illuminant le visage de Judith et laisse dans la pénombre le visage de sa servante représentée dans une
attitude de prière

de manière significative le général est laissé hors champ (on distingue le sac où sera placée la tête d'Holopherne)

il peut s'agir d'une œuvre comme allusion de Goya à son amante (au contrôle de Leocadia Zorrilla-Weiss sur le vieux,
malade et sexuellement impuissant Goya); ou plus généralement du pouvoir castrateur de la femme sur l'homme

Goya y Lucientes, Francisco de


Judith and Holofernes
Judith et Holopherne
1820 - 1823
Museo del Prado, Madrid
trois personnages ...

l’interprétation habituelle est, que celui qui ressemble à un homme, se masturbe devant des femmes curieuses
et moqueuses

Femmes riant est parfois vu comme un pendant féminin à Hommes lisant

dans son livre "Goya à l'ombre des lumières", Tzvetan Todorov nomme ce tableau "La masturbation", lui
opposant "La Lecture« ; le premier pouvant signifier l'abrutissement du peuple, le second l'activité recommandé
par les "éclairés"

Goya y Lucientes, Francisco de


Two Women and a Man or Women Laughing
Femmes riant ou Deux femmes et un homme
1820 - 1823
Museo del Prado, Madrid
six hommes se blottissent autour de la lecture d'une page imprimée ...

parfois vu comme un pendant masculin à Femmes riant ...

Femmes riant montre deux sorcières se moquant d'un homme en se masturbant, et dans Hommes lisent
le débat incessant des politiciens est peut-être, aux yeux de Goya, aussi stérile que le plaisir solitaire dont
les femmes se moquent ...

Goya y Lucientes, Francisco de


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Hommes lisant
1820 - 1823
Museo del Prado, Madrid
un petit chien noir presque perdu dans l'immensité du reste de l'image ...

tableau merveilleux, lumineux contrairement aux autres peintures noires murales de la Quinta del Sordo

… et le plus énigmatique

Goya y Lucientes, Francisco de


The Drowning Dog
Le Chien
1820 - 1823
Museo del Prado, Madrid
un chien, humanisé, infantilisé, affiche toute la fragilité de l’enfant seul face à une réalité terrifiante

contre laquelle sa seule défense est le rêve, la fuite à travers les ténèbres grâce à l’humour exhibé

dans cet univers grotesque né de l’image d’un enfant-génie, Goya …


Les trésors du Prado, Peintures
noires ...

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Music Lux Aeterna (Requiem for


a Dream) Clint Mansell

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À partir de 1819 jusqu’en 1823, Francisco de Goya réalisa un travail d’ampleur, exécutant directement sur les
murs de sa ferme des fresques d’une tristesse inégalée dans l’Histoire de l’art : les Peintures Noires - Pinturas
Negras, en espagnol.

Au nombre de quatorze, ces fresques renferment encore dans leurs aplats violents de pigments des secrets
obscurs, angoissants, mais qui en disent pourtant long sur l’état d’esprit de Goya à cette époque.

Ces œuvres ont en commun leurs teintes terreuses, brutes, salies.


Les contours se font imprécis, les horizons inatteignables et les cieux chargés de nuages de mauvais augures.
Hommes et femmes sont dépourvus de visages, et lorsque leurs faces sont visibles, elles dévoilent des traits
ravagés par l’angoisse, ou gravés par le burin du dur labeur d’une vie misérable.

Ces œuvres où perce le désespoir sous chaque coup de pinceau ont toutes été réalisées entre 1819 et 1823, via
la technique de l’huile dite « al secco », c’est-à-dire directement appliquée sur le plâtre d’une paroi non-
préparée. Francisco de Goya n’a plus que quelques années à vivre. Probablement le savait-il, sentait-il la mort
sourdre à travers ses membres endoloris, sa surdité complète, ses acouphènes obsédants.

Alors il fit ce qu’il savait faire de mieux : peindre ...

et ne prit même pas la peine de donner un titre à ses fresques.


Elles ont été nommées a posteriori. Cataloguées en 1828, elles furent ensuite transférées sur toile entre 1874 et
1878, avant la destruction de la maison de Goya. Aujourd’hui, elles sont visibles au sein du Musée du Prado, à
Madrid.

Ces œuvres uniques sont l’objet d’intenses débats entre historiens de l’art. Il est en effet difficile de définir dans
quelles pièces et dans quel ordre les peintures se trouvaient disposées au sein de la « Quinta del sordo » (« La
maison de campagne du sourd »).

Il demeure néanmoins une certitude : les thématiques de la vieillesse et de la mort sont très présentes, une
indication précieuse sur l’état d’esprit du peintre qui s’était retiré dans cette maison de campagne.

Affaibli par la maladie, peut-être a-t-il ressenti le besoin d’exprimer par la peinture ses angoisses profondes face
à l’avancée inexorable de la mort …

... l’œuvre Le Chien évoque un sentiment de solitude indicible


probablement la « quinzième » peinture noire,
postérieurement perdue, et qui est conservée
dans la collection Stanley Moss de New York

Goya y Lucientes, Francisco de


Heads in a landscape
Têtes dans un paysage
Cabezas en un paisaje
1820 - 1823
Collection Stanley Moss, New York

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