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Résumé
Les auteurs explorent la dynamique des liens familiaux dans la situation de
séparation volontaire des hivernages polaires au long cours. Les enjeux person-
nels et familiaux présidant à cet éloignement sont nombreux et variés. Cependant,
quand l’approche du mythe familial s’avère possible, il devient clair que celui-ci
dicte – paradoxalement ? – bien des séparations ré-unissant les familles.
DOI: 10.3917/ctf.061.0269
270 Michel Wawrzyniak & Gérard Schmit
Introduction
Présentation de la recherche
Il est en effet essentiel, pour les institutions impliquées dans ces mis-
sions en environnements extrêmes ou inhabituels, de mieux connaître le de-
venir des personnels qui y séjournent ; ceci pour mieux préparer le retour
des équipes, mais aussi pour affiner les méthodes de sélection et les critères
d’aptitude psychologique requis pour des individus amenés à participer – ou
reparticiper – à d’autres missions du même type. Par-delà ces considérations
institutionnelles, il va de soi que la priorité est d’offrir aux hivernants de retour,
qui viennent de vivre une véritable Odyssée, un potentiel suivi psychologique.
Le corps initial des recherches portant sur les situations extrêmes avait déve-
loppé les notions de stress et de mécanismes de coping face aux conditions
extrêmes. Progressivement, à côté des théories portant sur les stratégies de
coping, sont venus s’ajouter les notions de soutien social ainsi que la théorie
de la résilience.
En tant que thérapeutes familiaux, dans notre travail clinique avec les
familles, nous voyons à l’œuvre la résilience familiale dans la diversité des
situations que nous rencontrons. Ce travail nous permet d’explorer les deux
dimensions de l’Identité et l’Appartenance de chaque situation clinique
d’enfant ou d’adolescent rencontrés dans le champ de la pédopsychiatrie.
Dans ce double aspect d’une même réalité, nous rencontrons en effet, à la
fois l’aspect concernant la spécificité du fonctionnement mental qui relève
de l’identité d’une part, et d’autre part, l’aspect concernant la place et les
fonctions de cet enfant ou de cet adolescent dans son milieu naturel, qui
relève, quant à lui, de son appartenance.
Sur la base de cette expérience systémique et thérapeutique des
familles, notre présente démarche de recherche avait modestement pour
objectif de “parler avec les hivernants polaires et leurs proches” à propos
de leur expérience polaire : comment cette expérience s’est-elle décidée,
comment s’est-elle mise en place, comment est-elle en train de commencer,
© De Boeck Supérieur | Téléchargé le 02/12/2022 sur www.cairn.info (IP: 196.74.204.188)
Nous nous sommes demandé si cette image était celle que désigne
le terme de mythe familial ? Il est vrai que presque à chaque fois, nous
avons eu des entretiens familiaux approfondis avec des familles que nous
rencontrions en dehors de notre cadre thérapeutique essentiellement destiné
à des souffrances personnelles ou familiales. En tant que systémiciens, pour
penser les deux dimensions de l’identité et l’appartenance évoquées plus
haut, à l’œuvre au sein de la famille, nous nous appuyons volontiers sur la
notion de mythe familial d’Antonio Ferreira (1963) qui le définit « comme
un ensemble de croyances bien intégrées les unes aux autres et partagées
par tous les membres d’une même famille. Cet ensemble de croyances
concerne chaque membre de la famille et les positions de chacun dans la vie
familiale. Elles ne sont remises en cause par personne malgré les évidentes
distorsions que souvent elles font subir à la réalité ».
Dans des publications antérieures, nous avons recouru dans l’analyse
des situations cliniques rapportées, au champ de forces qu’un mythe fami-
lial suscite dans les groupes familiaux, que ceux-ci soient simples ou com-
plexes. Que ce soit dans la lecture des séparations parentales et des recom-
positions familiales dans leurs rapports avec la dépression chez l’enfant, ou
encore dans l’exercice de la fonction parentale à l’adolescence.
Dans le contexte de notre recherche, notre réflexion a porté égale-
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partir à DDU. Après un Bac scientifique, il s’est engagé dans des études en
« Mesures physiques », par goût et avec détermination : c’est ce qu’il aime
faire. Il n’aspire pas à devenir ingénieur comme l’y encourage son frère
aîné, ingénieur en informatique. Il aime ce qu’il fait et ce qu’il s’apprête
à faire à DDU : il dit qu’il est content de savoir qu’il n’aura pas trop le
temps de faire d’autres choses que de remplir sa mission correctement et
d’aider les autres. Il n’aura pas le temps donc, pour répondre à l’une de nos
questions initiale, d’y « apprendre le japonais », comme se le proposent par
exemple d’autres hivernants durant leurs loisirs sur la base.
Jérémy est un jeune homme simple et entier.
Son père n’est pas surpris par la décision de son fils. Il sait que
Jérémy aime prendre des risques calculés : « Mesures physiques ». « À trois
ans, il s’est retrouvé sur un rocher alors qu’on l’avait perdu de vue. Il aime
le snowboard et autres sports grisants presque hors limites » dit-il, ajoutant
que son fils a toujours été un « casse-cou ! ». Jérémy confirme : « J’avais
un abonnement à l’année aux urgences de l’Hôpital local ».
Sur le génogramme une fois constitué, nous dressons les traits verts
qui disent les liens affectueux entre les membres de la famille, les pointillés
qui disent l’indifférence et les éventuels traits rouges qui souligneraient la
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Conclusion
Références
FERREIRA A. (1963) : Family Myth and Homeostasis. Arch. Gen. Psych, 9, 457-467.
FREUD S. (1929) : Malaise dans la culture. PUF (2004), collection « Quadrige »,
Paris.
MARRET M. (1954) : Sept hommes chez les pingouins, Julliard, Editions de
l’aube (1996), La Tour d’Aigues.
RIVOLIER J. (1984) : L’homme stressé. PUF, Paris.
RIVOLIER J. (1992) : Facteurs humains et situations extrêmes. Masson, Paris.
RIVOLIER J. (1997) : L’homme dans l’espace, PUF.
ROSNET E., WAWRZYNIAK M. & Le SCANFF, C. (2001) : Usefulness and
methodology of debriefing in polar wintering. Actes du colloque “Stress in
extreme environments”, ESA.
Eloignement géographique et travail de séparation psychique 281