Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Introduction
« Être libre, est-ce faire tout ce que voulons ?»
A cette question, Jean-Jacques ROUSSEAU répondrait a priori par la négative. Dans le Contrat social
publié en 1762, il affirme en effet : « L’impulsion du seul appétit est esclavage et l’obéissance à la loi
qu’on s’est prescrite est liberté ». Il rejette l’idée que la satisfaction des envies puisse avoir un
quelconque lien avec la liberté et considère au contraire les lois sociales comme des conditions
nécessaires à son véritable exercice.
Analyser les termes clefs du sujet
Pourtant, la liberté est définie selon l’opinion commune comme une absence de contraintes,
d’obéissance ou de soumission à autrui et un plein épanouissement des désirs. Elle se traduit par
une puissance d’agir et de penser accompagnée d’un sentiment d’indépendance. L’expression
« Faire tout ce que l’on veut », peut toutefois être synonyme de « faire tout ce qui nous passe par la
tête », « faire tout et n’importe quoi » ou « faire ce que l’on a décidé et choisi ». Le sujet nous invite
donc à interpréter le sens du lien existant entre liberté et volonté.
Formuler le problème
La liberté peut être définie comme absolue et reposer sur la poursuite arbitraire de tous les
désirs d’un individu. Cependant, si nous faisions chacun tout ce que nous voulions, pourrions-nous
cependant tout nous permettre ? Ne risquerait-on pas aussi de perdre tout contrôle et de devenir
« esclaves » de nos envies ? Par ailleurs, certains de nos désirs ne seraient-ils pas en concurrence
avec ceux des autres, entrant en conflit avec la morale ou les lois sociales ? Une telle représentation
de la liberté ne serait-elle pas une impasse conduisant rapidement à la violence et à l’anarchie ?
Ainsi, définir la liberté comme sans limites semble a priori une évidence mais en même temps, ce
n’est pas réellement compatible avec la vie en société.
Annonce du PLAN : Afin d’examiner ces différentes questions, nous analyserons dans une première
partie dans quelle mesure l’opinion commune peut penser qu’être libre c’est faire tout ce que nous
voulons. Nous verrons ensuite, dans une deuxième partie, si une telle représentation de la liberté
est possible et même souhaitable individuellement et collectivement. Enfin, dans une troisième
partie, nous nous demanderons si, loin de correspondre à la possibilité de satisfaire toutes nos
envies, la véritable liberté ne serait pas, au contraire, de comprendre et d’accepter volontairement les
déterminations, voire les limites à la fois individuelles et collectives dans lesquelles elle s’exerce ?
La liberté supposerait alors la capacité de faire ou de ne pas faire quelque chose que je choisis
rationnellement en tenant compte des contraintes morales et sociales que je rencontre.
Être libre c’est a priori faire Mais une liberté sans limites Être libre, c’est choisir de
tout ce que nous voulons, n’est ni possible, ni souhaitable faire ce que l’on veut …
suivre nos toutes envies vraiment
AEI 3: Illustration
Argument : Par exemple, comme le rappelle KANT, si
En société : l’autonomie politique représente un tyran me menace physiquement pour
une forme de liberté à travers l’obéissance à que je dénonce une personne
des lois que l’on s’est données collectivement injustement condamnée afin qu’elle soit
et volontairement. mise à mort, je ne peux décider de ne pas
Explication : le faire même si je dois le payer de ma
En effet, les lois politiques sont une condition vie.
nécessaire de la liberté individuelle et
collective. Contrairement à l’affirmation d’une
liberté égoïste et égocentrique prônée par
Calliclès, l’homme n’est pas libre tout seul. On
dit souvent que « la liberté des uns s’arrête là
où commence celle des autres ». Il serait plus
juste de dire que ma liberté commence avec
celle des autres. La véritable liberté réside
davantage dans le pouvoir que l’on a sur soi-
même que dans le pouvoir que l’on a sur les
autres.
Illustration :
C’est ce qu’affirme ROUSSEAU. Le citoyen est
libre s’il obéit aux lois c’est-à-dire à la volonté
générale qui exprime la somme des volontés
particulières dont la sienne. Il ne se soumet
pas à la volonté d’un autre homme. Il se
gouverne selon les lois auxquelles définies par
lui et auxquelles il s’est lui-même
volontairement soumis. Il lui est donc possible
à la fois d’être libre et d’obéir :
« Un peuple libre obéit, mais il ne sert pas ; il a
des chefs mais non pas des maîtres ; il obéit
aux lois mais il n’obéit qu’aux lois et c’est par
la force des lois qu’il n’obéit pas aux
hommes. » Jean-Jacques Rousseau, Huitième
lettre, 1754
4) Rédiger la conclusion
Rappel : La conclusion de la dissertation fait écho à l’introduction : en
répondant au sujet de départ.
Pour cela, il faut reformuler le problème et récapituler la progression
logique des réponses proposées. La conclusion peut aussi souligner
les enjeux importants de la réponse donnée au sujet.
(Nous étions partis de) la définition de la liberté comme capacité à accomplir tous nos désirs et envies
personnelles sans entrave doit être dépassée. C’est le premier sens que nous avions donné à
l’expression « faire tout ce que nous voulons ». Mais (nous avons montré que) confondre la liberté
avec la licence renverse celle-ci en son contraire et nous rend esclaves de désirs que nous
poursuivons à l’infini. De plus, (nous avons questionné) notre sentiment d’agir librement résulte bien
souvent de l’ignorance des causes qui nous déterminent : « faire tout ce que nous voulons » n’est
alors plus qu’une illusion. Afin de sortir de cette impasse, il a été nécessaire de s’acheminer vers une
autre définition de la liberté comme conditionnée par certaines limites morales ou sociales voulues
par la raison. Il faut en effet admettre qu’en réalité, une volonté n’est libre que lorsqu’elle est
autonome, c’est-à-dire lorsqu’elle obéit aux lois qu’elle s’est à elle-même prescrite par l’usage de sa
raison. Qu’il s’agisse de la loi morale qui guide ses devoirs ou des lois sociales qui encadrent sa liberté
en même temps qu’elles la garantissent. Être libre, ce n’est donc pas suivre des impulsions égoïstes et
erratiques mais c’est au contraire assumer avec nos semblables les exigences d’une liberté
réciproque. La liberté humaine, loin d’être l’exercice d’une toute-puissance puérile ou d’un vouloir
arbitraire et capricieux, implique une maîtrise de soi permettant d’assumer en toute conscience la
responsabilité de ses choix envers soi-même comme vis-à-vis d’autrui.