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ESSFAR

Cours De Finance
Internationale 2 :

La Titrisation

M.Bate-eya Agbor/Expert Financier

Année Universitaire 2020-21


1
SOMMAIRE
Glossaire----------------------------page 3
Introduction--------------------------page 5

Première partie : -------------------page 9


La Titrisation Principes et base-------page 9

Définition--------page 9

Financement grâce à la titrisation des créances----page 9

Quels sont les avantages d'utiliser la titrisation-----page 9

Quel est la différence entre l'affacturage et la titrisation---page 10

Quel est la différence entre l'affacturage et la titrisation----page 11

CHAPITRE 2 : Titrisation et La crise financière 2007-2008—page 12

Subprime-------------------------------------------------page 12
Pourquoi les subprimes sont-ils à l'origine d'une crise financière? ----page 14

Comment la crise des subprimes a-t-elle pu s'étendre à l'économie réelle dans


le monde entier? -----page 14

CHAPITRE 3 : Les Agences de Notations Financières---page 19

Les Agences de Notations : Description -----------page 25

Deuxième Partie : -----------------page 28


Les opérations de Titrisation et les techniques de gestion de risque
qu’elles autorisent. ----------page 28

Troisième Partie--------------page 46
Les Dérivés de Crédits------------page 46

2
Glossaire
Opération financière structurée: toute opération financière faisant appel à une
entité ad hoc (par exemple, financement de projet, titrisation, crédit-bail
complexe ou mécanisme de transfert de risque structuré). Le point commun à
tous les types d'opération financière structurée est que l'opération est conçue de
façon à modifier ou à redistribuer le risque de la sûreté1 entre différentes
catégories d'investisseurs moyennant une structure.

Titre: instrument financier représentant une position de participation dans une


entreprise cotée en bourse (action), un rapport de créancier avec un organisme
gouvernemental ou une entreprise (obligation) ou des droits de participation
signifiés par une option.

Risque de crédit: risque de perte du principal (somme investie ou prêtée au


départ) ou perte de rémunération financière découlant de l'incapacité de
l'emprunteur à rembourser un prêt ou à honorer une obligation contractuelle.

Produit dérivé: contrat dans lequel les obligations de paiement des parties sont
dérivées d'un autre ensemble d'actifs ou de créances, lequel ne reflète pas
nécessairement des actifs ou créances réels, mais consiste en un montant
notionnel .

Dérivé de crédit: produit dérivé dans le cadre duquel l'obligation qu'a une partie
de payer n'existe qu'en cas d'événement de crédit (généralement un défaut de
paiement) sur un autre contrat, parfois notionnel.

Contrat d'échange sur risque de crédit (Credit Default Swap – CDS): dérivé
de crédit dans le cadre duquel l'une des parties verse régulièrement une prime à
l'autre, en échange de quoi elle a la garantie que l'autre partie lui compensera ses
pertes en cas de défaut de paiement sur une obligation.

Valeur nominale: valeur rattachée à un titre ou à un autre type d'instrument


financier. La valeur nominale d'une obligation désigne le montant à rembourser.

Créance garantie: créance couverte par certains actifs de l'emprunteur (par


exemple, hypothèque garantie par une maison, prêt pour l'achat d'un véhicule
garanti par le véhicule). Un emprunteur en difficulté financière doit vendre ces
actifs pour rembourser le prêteur.

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Titrisation «synthétique»: opération n'impliquant aucun transfert légal de titre,
mais uniquement la vente du risque de crédit lié aux actifs par le biais de dérivés
de crédit tels que des contrats d'échange sur risque de crédit3 . Les actifs sous-
jacents restent inscrits au bilan de l'initiateur. Titrisation avec «cession parfaite»:
opération impliquant le transfert légal effectif des actifs à l'émetteur des titres
(entité de titrisation); ainsi, l'entité de titrisation obtient le droit de percevoir les
flux de liquidités générés par les actifs (y compris ceux découlant d'une vente
ultérieure des actifs). Les actifs sous-jacents sont dès lors effacés du bilan de
l'initiateur.

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Introduction

La crise qui a démarré en 2007 a mis en lumière les produits de titrisation dont
les valorisations se sont effondrées mettant en difficulté les institutions détenant
ce type d’actifs. Depuis les années 80, le phénomène de désintermédiation s’est
notamment traduit par le fait que le système bancaire n’a plus été le seul à
supporter les risques consécutifs à l’octroi de crédit aux agents économiques. La
titrisation a permis, par exemple, de transférer ce risque aux investisseurs non
bancaires en sortant du bilan des banques des encours de crédits et plus
généralement d’actifs de nature diverse. Ainsi, la titrisation vise à : - accroître
les opportunités de financement et l’effet de levier financier (rapport entre les
actifs et les apports des actionnaires) en rendant liquides certains actifs détenus
par les banques ; - alléger l’exigence de fonds propres résultant de l’application
des règles fixées par le régulateur ; - optimiser la gestion du risque. Il devient en
effet aisé de piloter le profil de risques de l’établissement en cédant ou d
acquérant des risques selon la stratégie souhaitée par l’établissement et de
parvenir à la diversification souhaitée. En France, la titrisation a été introduite
par la loi du 23 décembre 1988 relative aux cessions de créances. Le véhicule
ad-hoc, appelé Fonds commun de créances (FCC), reçoit des créances et son
financement est assuré par l’émission de titres souscrits par des investisseurs.
Initialement, les actifs susceptibles d’être transférés étaient limités aux crédits
sains d’une durée supérieure à deux ans. Par la suite, les évolutions
réglementaires ont contribué à élargir les champs de la titrisation : pas de durée
minimale pour les créances, possibilité de renouveler les opérations sans créer
une nouvelle entité (FCC rechargeable), acquisition de tout type de créance,
titrisation par tout type d’entité économique (États, entreprises). Alors que
l’allègement de la charge en fonds propres et la maximisation du retour sur
investissement ont été les objectifs initiaux, la titrisation a également rendu
possible une spécialisation des tâches en séparant les opérations relatives à la
conception et la distribution du crédit de celles ayant trait au financement et à la
gestion du crédit. La titrisation permet également d’abaisser le coût global des
financements pour les agents non financiers. Dans cette optique, les banques
n’exercent plus forcément l’ensemble des opérations associées à l’octroi de
crédit (octroi, mise en place, recouvrement) et l’aspect primordial peut consister
à constituer des portefeuilles de créances ayant vocation ensuite à être cédés
(passage d’un modèle originate to hold (OTH) à un modèle originate to

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distribute (OTD)). L’analyse du risque change alors de nature puisque la banque
n’a pas à se soucier réellement de la solvabilité de l’emprunteur dont les
difficultés éventuelles de remboursement seront assumées ultérieurement par un
tiers. A cet égard, la crise des subprimes est la première grande crise de la
titrisation et a mis en lumière l’ampleur de la dissémination opérée dans
l’ensemble du système financier. Pour l’ensemble du système financier, la
diminution de

2. l’exigence en fonds propres accroît l’effet de levier et le transfert des risques


sur le secteur non financier. 2. Les modes de gestion Initialement conçu comme
un instrument de transfert de risques pour des motifs divers (liquidité, besoin de
fonds propres, gestion des risques), les produits de titrisation sont devenus des
actifs extrêmement recherchés par les opérateurs de trading des banques et des
gestionnaires de fonds. Les banques ont également pris des engagements
importants en tant que sponsor de conduits de titrisation destinés à porter des
actifs cédés par des tiers (entreprises industrielles et commerciales notamment)
Les titrisations pour compte propre L’objectif est de déconsolider les risques
inscrit au bilan, soit classiquement sous la forme de cession de créances à un
véhicule ad-hoc, soit synthétiquement en recourant à des instruments de crédit,
prenant la forme de titres ou de dérivés de crédit. Dans les titrisations classiques,
l’établissement cédant ne détient plus aucun droit sur les actifs détenus par le
véhicule de titrisation, de même qu il ne doit pas disposer de pouvoirs de
contrôle et de décision sur ce véhicule. De la même façon, les détenteurs des
titres émis par le véhicule sont protégés contre toute faillite de l’établissement
cédant. Le véhicule de titrisation émet des parts représentatives présentant
différentes tranches de risques. Pour leur part, les titrisations synthétiques
conduisent à maintenir au bilan de l’établissement originateur les portefeuilles
d’actifs. Le transfert de risque s’opère par l’intermédiaire de protections
contractées avec des tiers Les titrisations pour compte de tiers Les
établissements de crédit peuvent, dans le cadre de leur activité, mettre en œuvre
des programmes de titrisation pour le compte de clients, qu ils soient
établissements de crédit ou sociétés commerciales. Les établissements peuvent
ainsi intervenir en tant qu arrangeurs de montages de titrisations classiques
portant sur des crédits automobiles ou à la consommation, ainsi que des prêts
immobiliers. La fonction d arrangeur consiste à assurer l’ensemble du montage
c'est-àdire créer un véhicule de titrisation pour le cédant (établissement financier
ou entreprise commerciale), structurer le passif du véhicule sous forme de parts
de rang différencié, et placer ces dernières auprès d’investisseurs. En principe,

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l’arrangeur ne supporte pas de risque de crédit, sauf pendant la période de
détention des parts avant leur placement sur le marché, ou lorsqu il participe au
mécanisme de rehaussement de crédit du véhicule de titrisation. Les
établissements financiers peuvent aussi intervenir en tant que sponsor de
conduits de titrisation. Ces véhicules créés par les sponsors émettent des billets
de trésorerie à très court terme (ABCP- Asset Back Commercial Paper-) et
acquièrent des actifs comme, par exemple, des créances commerciales ou des
parts seniors d autres véhicules de titrisation. Le processus de titrisation fait
généralement l’objet d’une industrialisation via l’acquisition d’actifs variés
auprès de cédants multiples, souvent sociétés commerciales, ayant des volumes

3. relativement faibles d’actifs à titriser (quelques centaines de MEUR) sachant


que les premières pertes restent généralement à leur charge. Des décalages de
maturité surviennent fréquemment au niveau du conduit puisque la titrisation a
pour fonction d’effectuer une transformation des échéances, des actifs à
échéance lointaine étant financés par l’émission de titres à court terme. C’est
pourquoi, pour prévenir l’assèchement du marché des ABCP, l’établissement
sponsor apporte des lignes de liquidité afin de garantir le refinancement à tout
moment du conduit. Par ailleurs, les établissements sponsors peuvent apporter
des garanties au conduit, afin que sa dette (ABCP) bénéficie de la meilleure
notation. Afin d’éviter la consolidation des conduits, les établissements peuvent
enfin recourir à des assureurs monoline ou à d’autres établissements financiers
afin de partager les premières pertes éventuelles La détention de portefeuilles
d’actifs titrisés Les banques peuvent être également exposées à des opérations
de titrisation, par détention directe de parts ou d’autres instruments, visant des
objectifs de trading ou d’investissement. Dans le premier cas, les positions de
titrisation n’ont pas vocation à être conservées durablement ; elles sont parfois
détenues dans le cadre d’activités de market making, consistant à assurer à la
clientèle de l’établissement un marché secondaire. Elles peuvent être également
acquises dans l’optique de revente à court terme, après avoir bénéficié d’une
évolution favorable du prix des parts détenues. Les établissements peuvent
également acquérir des parts de titrisation, classiques ou synthétiques, dans un
objectif de détention à plus long terme, afin de bénéficier du rendement des
actifs. 3. La titrisation recourt à des techniques d’ingénierie financière 1. La
titrisation est une opération financière qui consiste à transformer des actifs
bancaires (prêts immobiliers, prêts à la consommation, créances sur les
entreprises) en titres ; le but est de rendre liquide des actifs précédemment
illiquides. En général, la banque à l’origine des prêts les cède à un véhicule

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spécifique (special purpose vehicule) qui finance cette acquisition en émettant
des titres sur les marchés. Les investisseurs qui achètent ces titres perçoivent en
contrepartie les revenus (intérêts et remboursement du principal) issus des prêts.
Les revenus tirés du portefeuille d’actifs de référence permettent de rémunérer
les émissions ; le remboursement final des émissions dépendra de la capacité des
débiteurs finaux à honorer leurs engagements. Tous les actifs financiers
deviennent titrisables dès lors que sont créés des pools de risques auxquels les
investisseurs souhaitent souscrire. La titrisation passe par les étapes suivantes :
Le pooling : l’assemblage par une institution financière d’un portefeuille
composé de créances bancaires et/ou d’instruments financiers négociables
(obligations, autres titres de créances ) et/ou de dérivés de crédit. 1 Source :
Banque de France, Documents et débats, La crise financière (Février 2009).

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Première partie :

CHAPITRE 1 : La Titrisation : Principes et Bases

1) La Titrisation : Définition
Technique financière permettant à des établissements financiers de transformer
les créances qu'ils détiennent sur des entreprises ou des particuliers en titres
négociables.

Ces titres financiers négociables sont proposés à des investisseurs. Ils


correspondent au montant des factures visées. La structure cède ses créances
commerciales à un fonds spécialisé contre le financement de ces dernières.

Ce fonds de facturation se refinance en émettant des actions sur les marchés


financiers auprès d’organisme qui souhaite investir. Par cette manoeuvre,
l’activité va accroître ses lignes de financement, notamment sur le court terme,
sans changer sa relation vis-à-vis de sa banque.

L'intérêt pour ces établissements financiers est de transférer aux acheteurs de ces
titres le risque de non remboursement de cette créance. Les acheteurs de ces
titres percoivent en contre-partie un taux d'intérêt lié au niveau de risque de ces
titres.

La crise des subprimes (créances hypothècaires américaines qui ont été titrisées)
est liée à l'incapacité des créanciers de rembourser leur dette.

2) Financement grâce à la titrisation des créances


Dans le cadre d’une reprise ou création, l’entreprise manque de lignes
financières, la titrisation permettra d'augmenter les lignes de financement, en
se joignant aux lignes bancaires déjà en place.

Les factures pour être financées doivent être fermes ou intermédiaires (situations
de travaux).

Une grande organisation peut convertir ses créances en espèces en une seule fois
en titrisant les facturations. Cela signifie que les factures individuelles sont

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regroupées dans un nouveau titre, qui est ensuite vendu comme un instrument
d'investissement. Une titrisation peut se traduire par un taux d'intérêt
extrêmement bas pour l'entité émettrice, puisque les titres sont garantis par une
forme liquide de garantie.

3) Quels sont les avantages d'utiliser la titrisation ?


Cela permet à l'entreprise de diversifier ses sources financières et d'accéder
directement au marché financier de manière sûre sans engagement pour
financer des montants importants. Par ailleurs, elle offre un moyen d'alléger le
bilan en transformant votre portefeuille clients en une valeur sur laquelle vous
pouvez vous appuyer pour votre développement.

La titrisation améliore aussi la déconsolidation comptable en augmentant la


liquidité du bilan.

Autre avantage, cela permet d'effectuer une opération de financement en toute


discrétion, car les débiteurs ne sont pas informés de la cession des factures.

Pour terminer, vous conservez la maîtrise de vos relations avec vos clients
grâce à une meilleure gestion du risque financier.

La titrisation se prête bien aux ralentissements cycliques du secteur des


entreprises et au resserrement des liquidités des banques. Le financement engagé
garanti fourni contre des créances à court terme permet aux entreprises d'avoir
un accès continu à la liquidité même lorsqu'elles subissent des pertes et que les
banques ne sont plus disposées ou capables de prêter de l'argent par d'autres
moyens.

Prenons un exemple simplifié du fonctionnement de la titrisation, imaginez une


entreprise ayant 100 000 euros de factures impayées. Cette société pourrait
attendre des jours, des semaines ou des mois pour que ses acheteurs paient, mais
elle a besoin de liquidités dès maintenant. Elle crée donc des titres à court terme
garantis par les flux de trésorerie de ces créances et vend ces obligations à des
investisseurs pour 96 000 euros. La structure reçoit cet argent d'avance. Lorsque
ses clients finissent par payer, l'argent ne va pas à l'entreprise, mais aux
établissements financiers. La différence entre ce que les investisseurs paient
pour les titres et l'argent qu'ils finissent par percevoir est leur retour sur
investissement.

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4) Quel est la différence entre l'affacturage et la
titrisation ?
Avec l'affacturage, l'activité cède ses facturations à un tiers l'affactureur. Celui-
ci paye jusqu'à 90 % du montant des créances et se charge ensuite d'effectuer le
recouvrement des factures en assumant ainsi le risque de non-paiement.

Avec la titrisation, la société reçoit la totalité de l'argent dû par ses clients, même
si ces derniers ne paient pas. En effet, les factures d'une entreprise peuvent être
transformées en actions à court terme qui sont ensuite vendus à des investisseurs
pour un prix inférieur à leur valeur nominale afin de permettre un retour sur
investissement. L'entreprise reçoit immédiatement son argent, et lorsque les
clients finissent par payer, les établissements financiers récupèrent leur propre
argent. Si, parmi les dettes en cours, une partie n'est pas recouvrée, ce sont les
investisseurs qui assument ce risque, et non la société qui a émis les titres. La
titrisation est donc mieux adaptée aux grandes entreprises qui traitent des
montants importants de créances.

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CHAPITRE 2 : Titrisation et La crise financière
2007-2008
1) Subprime
Le terme subprime vient des États-Unis, il désigne un prêt immobilier bancaire
dit à risque. Par opposition aux prêts classiques, dits prime,Les subprimes
sont des crédits qui étaient proposés à des ménages modestes ayant de faibles
revenus. Ces crédits à taux élevé pour l’emprunteur et à fort rendement pour le
prêteur sont apparus dans les années 2000. On les appelle également crédits
hypothécaires. En effet, si l’emprunteur ne pouvait pas payer sa dette, le prêteur
récupérait sa mise avec la vente de la maison. Le système des subprimes reposait
sur une hausse continue et rapide du prix de l’immobilier.

Ce système de crédit avait un taux d’intérêt variable basé la plus part du temps
sur l’indice de référence de la Banque Centrale Américaine ou sur le taux
Libor (indice sur lequel se basent les banques pour se prêter entre elles). On
parle de taux variable, car en règle générale, les premières années, le taux était
relativement faible et fixe avant de devenir variable pour le reste du
remboursement.

Le taux variable est l’inconvénient majeur des subprimes, car si le taux directeur
de la banque augmente, les mensualités des prêts s’envolent, ce qui met les
foyers modestes en défaut de paiement. De plus, si jamais le cours de
l’immobilier s’effondre, l’émetteur n’a plus aucun moyen de retrouver
l’intégralité de la somme prêtée.

Après les attentats terroristes du 11 septembre, la Banque centrale


américaine a mené une politique de l’« argent bon marché » En juin 2003,
le taux d’intérêt directeur a baissé à un niveau record pour l’époque de 1,0
%.Le boom des subprimes à prit fin en 2007 lorsque le taux directeur de la
Banque Centrale Américaine a augmenté : il est passé cette année-là de 1 à
5 %. Cette brusque augmentation a donné lieu à la crise des subprimes. En
effet, les familles endettées qui devaient rembourser en premier les taux
d’intérêt de leur emprunt ont vu leurs mensualités augmenter, entraînant
ainsi un défaut de paiement et une saisie des biens immobiliers.

Fin 2006, le marché immobilier a cessé de monter (c’était la base de la


rentabilité des subprimes), ce qui a créé une bulle immobilière. La
multiplication des biens mis sur le marché à la suite des nombreuses saisies a
entraîné une forte baisse des prix, d’où la crise des subprimes. Cette crise, née
aux États-Unis, s’est ensuite propagée à l’ensemble de l’économie mondiale, car

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beaucoup de banques n’avaient pas assez de réserves pour faire face à leurs
pertes, ce qui a donné lieu à une crise financière internationale.

Au début des années 2000, les investisseurs sont friands des titres financiers
générés en assemblant ces crédits hypothécaires - ce qu'on appelle la
titrisation. Dans un contexte de taux très bas et de liquidités abondantes, ils
recherchent des placements qui présentent un rendement plus élevé. L'offre et la
demande concordent pour favoriser l'essor des subprimes: ils représentent 13%
des prêts immobiliers en 2007 contre 2,4% en 1998.

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2) Pourquoi les subprimes sont-ils à l'origine d'une crise
financière?
L'endettement des ménages américains atteint ses limites après quelques années.
Les prix de l'immobilier plafonnent avant de s'effondrer: au milieu de l'année
2006, ils connaissent leur chute la plus forte depuis plus d'un siècle.
Parallèlement, les taux directeurs remontent, si bien que tous les facteurs qui
concouraient au succès des subprimes se sont retournés pour favoriser leur
chute. Nombre de ménages ne peuvent plus honorer des mensualités qui
devaient augmenter avec le temps, d'autant plus fortement dans certains cas que
les taux en étaient variables. Les biens immobiliers d'une partie des ménages
insolvables sont saisis, ce qui entretient la chute des prix immobiliers. Un cercle
infernal.

Les banques pâtissent de leur côté de la dévalorisation des actifs adossés à ces
prêts immobiliers. A partir de l'été 2007, elles passent chaque trimestre dans
leurs comptes des dépréciations d'actifs. Surtout, la dissémination des subprimes
via la titrisation a suscité un climat de défiance. Puisque personne ne sait
exactement qui détient quoi, les banques cessent d'avoir confiance entre elles et
de se prêter. C'est la crise de liquidités. Au total, le FMI estime que la crise des
subprimes aura coûté aux banques quelques 2200 milliards de dollars.

3) Comment la crise des subprimes a-t-elle pu s'étendre


à l'économie réelle dans le monde entier?
La majorité des pays ont été affectés par la crise de 2008. Pourtant, seuls des
ménages américains avaient contracté des prêts immobiliers douteux, octroyés
par des établissements bancaires principalement américains. Comment cette
seule allumette a-t-elle pu enflammer le monde entier? Les subprimes n'étaient
pas détenus que par des établissements financiers américains. Les banques
européennes avaient elle aussi investi dans ces placements juteux. BNP Paribas
annonce par exemple en août qu'elle gèle trois fonds composés de titres adossés
aux subprimes, pour deux milliards d'euros. Le montant n'est pas colossal, mais
là encore, la confiance est entamée. Pour restaurer leurs ratios de solvabilité, les
banques restreignent l'accès au crédit, ce qui se répercute sur l'économie réelle:
les ménages doivent réduire leur consommation et les entreprises ont plus de
difficultés à investir. L'interdépendance des économies via le commerce mondial
fait le reste.

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Fannie Mae et Freddie Mac

Fannie Mae (Federal National Mortgage Association) est une agence fédérale
qui a été fondée en 1938. Freddie Mac (Federal Home Loan Mortgage
Corporation) a, elle, été crée en 1970. Ces deux agences fédérales ont un statut
hybride qui les range dans la catégorie des entreprises soutenues par l’État
fédéral (Government Sponsored Enterprises – GSEs). Mais de GSEs, elles n’en
ont pas moins été privatisées, en 1968 pour Fannie Mae et en 1989 pour Freddie
Mac.

Bethany McLean et Oliver Ryan, 2005, « The Fall of Fannie Mae », Fortune,
24 janvier, p. 122-140.

La mission de ces deux entités, telle que la définit la législation, est


d’encourager l’accès à la propriété des Américains moyens. Et leur action a
consisté à acheter des prêts hypothécaires aux banques. Puisque celles-ci ne
pouvaient guère étendre leurs activités d’un État fédéré à l’autre depuis
l’adoption du Mc Fadden Act en 1927, le rachat des prêts hypothécaires par
Fannie Mae et Freddie Mac leur permettaient de libérer une partie de leur capital
et leur donnaient la possibilité d’accorder un nombre plus important de prêts.
D’une part, les banques se trouvaient ainsi libérées du risque de crédit et, d’autre
part, l’objectif politique recherché qui était de favoriser l’accès à la propriété
était fermement soutenu. Cette mission de service public était assortie d’une
série d’avantages clairement identifiés dans les statuts de Fannie Mae et Freddie
Mac et qui leur ménageaient une place à part parmi les institutions financières.
On notera également que l’hybridité même de leurs statuts a longtemps renforcé
la confiance que leur accordaient les marchés financiers car la qualité de leur
signature semblait tout à fait irréprochable. Le risque de faillite semblait dès lors
tout simplement exclu car l’État fédéral leur apporterait un « soutien indéfectible
et implicite1 » en cas de difficulté et ne les laisserait pas manquer à leurs
engagements financiers.

Congressional Budget Office, 1996, « Assessing the Public Costs and Benefits
of Fannie Mae and Fred (...)

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Les garanties fédérales implicites évoquées ici s’expliquent par les clauses
explicites de la loi ainsi que les conditions politiques qui ont donné naissance à
ces deux établissements. On trouve, entre autres, les dispositions suivantes
concernant les titres émis par Fannie Mae et Freddie Mac : le secrétaire au
Trésor doit en approuver l’émission, la Réserve fédérale est leur autorité de
tutelle en matière fiscale, elles sont exemptées de l’enregistrement des titres
auprès de la SEC, et les titres sont apparentés à des titres du gouvernement selon
les critères du Security and Exchange Act de 19342. C’est grâce à ce statut
hybride et protégé qu’elles peuvent lever des capitaux sur les marchés financiers
à un taux très bas et sans risque, ce qui leur permet de faire des économies
réelles et de bénéficier de fait d’un transfert de privilège de signature réservé
aux seules agences gouvernementales.

Fannie Mae et Freddie Mac ont donc, pour des raisons politiques (système
bancaire compartimenté) et financières (protection contre le risque de crédit),
acquis une position dominante sur le marché des prêts hypothécaires. Elles
n’accordent pas de prêts directement mais leur intervention est double. Elles ont
d’abord un rôle d’intermédiaire qui doit permettre de garantir le remboursement
des prêts qu’elles achètent auprès des banques. Elles reçoivent en retour une
commission en paiement de cette garantie. Ces prêts hypothécaires sont ensuite
à leur tour revendus à des investisseurs, sur les marchés de capitaux, sous forme
de prêts titrisés. La titrisation donne naissance dans ce cas à des MBS (Mortgage
Backed Securities) c’est-à-dire des titres adossés à des prêts hypothécaires ce
qui leur permet de se protéger contre le risque de crédit.

Il s’établit un double flux corrélé. Au revenu des commissions engrangées


suite au rachat des prêts aux banques s’ajoutent les revenus générés par la
vente des MBS sur les marchés. De ces revenus sont déduits le coût des
risques potentiels liés au non-remboursement éventuel des prêts
hypothécaires que Fannie Mae et Freddie Mac garantissent, et à la chute
des cours des MBS sur les marchés qui feraient augmenter l’écart de taux
(credit spread). Le schéma ci-dessous permet de situer Fannie Mae et
Freddie Mac dans le circuit financier

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Graphique 4. Flux de financement sur le marché hypothécaire

A eux deux , Fannie Mae et de Freddie Mac détenaient ou garantissaient


environ 60 % de l'ensemble des prêts immobiliers sur le marché américain.
En septembre 2008, pour leur éviter une faillite qui aurait eu des effets
incalculables sur l'économie américaine, voire mondiale, le Trésor les avait
nationalisés.

4)Quelles conséquences encore aujourd'hui de la crise des


subprimes?
Avec la crise des dettes souveraines en 2011, l'épicentre de la crise se déplace en
Europe. Pour ranimer leurs économies moribondes et sauver leurs banques, les
États injectent en effet massivement des liquidités, et pour ce faire, s'endettent.
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Entre 2007 et 2014, la dette publique mondiale croît au rythme de 9,7% par an,
contre 5,8% avant la crise, selon le cabinet McKinsey. C'est 25.000 milliards
d'euros de dettes supplémentaires! En Europe, des inquiétudes naissent autour de
la solvabilité de certains pays de la zone euro, situés en périphérie. Si l'action de
la BCE a permis, depuis 2012, de calmer l'inquiétude des marchés, le taux
d'endettement de la France, de l'Espagne, de l'Italie ou encore du Royaume-Uni
demeure encore aujourd'hui très élevé, et constitue une source d'inquiétudes.

Les banques, elles, se sont en revanche plutôt désendettées. Echaudés par la


crise des subprimes, les États ont en effet durci les règles de la finance mondiale.
Les ratios de fonds propres exigés au sein des banques ont été renforcés, de
même que les moyens alloués aux autorités de supervision. Un autre objectif de
ces nouvelles règles, dites de Bâle 3, est de faire maigrir les banques “too big to
fail” («trop grosses pour faire faillite»), que les États ont été contraints de sauver
durant la crise. «La solution, pour faire simple, est de rendre les banques d'autant
moins rentables qu'elles sont grandes», expliquait récemment Charles Wyplosz,
professeur d'économie internationale à l'Institut de hautes études internationales
et du développement (IHEID) à Genève, dans une tribune au Figaro . La
transformation des mastodontes de la finance en établissement «small and
beautiful» est encore loin d'être achevée, mais elle est en marche.

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CHAPITRE 3 : Les Agences de Notations
Financières

1) Qui sont les agences de notation ?

Les agences de notation (en anglais CRA, Credit Rating Agency) sont des
entreprises privées dont l'activité principale consiste à évaluer la capacité des
émetteurs de dette à faire face à leurs engagements financiers. Contrairement à
ce que le terme « agence » peut faire penser, il s'agit bien d'organismes privés à
but lucratif et non d'organismes réglementaires ou gouvernementaux.

Les principales agences présentes sur le marché sont Moody's, Standard &
Poor's et Fitch Ratings. Ces trois agences détiennent à elles seules environ
85% du marché. Il n'y a pour ainsi dire pas de compétition sur ce marché car les
barrières à l'entrée sont très élevées.

Le « business model » des agences de notation repose essentiellement sur une


rémunération versée par les entités notées, des activités de conseil, ainsi que la
diffusion de données relatives à la notation.

2) Qu'est-ce que la notation ?


La notation (rating) donne une opinion sur la capacité d'un émetteur à remplir
ses obligations vis-à-vis de ses créanciers, ou d'un titre à générer les paiements
de capital et d'intérêts conformément à l'échéancier prévu. Les entités notées
sont donc potentiellement tous les agents financiers ou non financiers émetteurs
de dette : états, organismes publics ou semi-publics, établissements
financiers, entreprises non financières. La notation peut également porter non
sur un émetteur en général, mais sur un titre (obligation, MTN, TCN, ABS et
MBS, etc.) en particulier. La notation des opérations de titrisation a connu une
expansion considérable avant la crise financière de 2008-2009.

Différentes échelles de notation existent suivant les agences, les entités notées et
la période considérée (long terme ou court terme). A titre d'exemple, voici
l'échelle de notation utilisée par Fitch Ratings pour la notation long terme des
émetteurs, que nous nous sommes permis de traduire en Français.

19
Notation Description

La notation 'AAA' correspond à la plus faible possibilité de risque


de défaut. Elle n'est attribuée que dans le cas d'une capacité
AAA exceptionnellement élevée à respecter les engagements financiers.
Qualité de crédit la Il est hautement improbable que cette capacité soit affectée
meilleure négativement par des événements prévisibles.

La notation 'AA' correspond à une possibilité de très faible risque


de défaut. Elle dénote une capacité très élevée à respecter les
AA
engagements financiers. Cette capacité n'est pas significativement
Qualité de crédit très
vulnérable à des événements prévisibles.
élevée

La notation 'A' correspond à une possibilité de risque de crédit


faible. La capacité à respecter les engagements financiers est jugée
forte. Cette capacité peut néanmoins être plus vulnérable à des
A conditions commerciales ou économiques défavorables que dans le
Qualité de crédit élevée cas de notations plus élevées.

La notation 'BBB' indique que les possibilités de défaut de crédit


sont actuellement basses. La capacité à respecter les engagements
financiers est considérée comme satisfaisante mais des conditions
BBB
commerciales ou économiques défavorables sont davantage
Bonne qualité de crédit
susceptibles de porter atteinte à cette capacité.

La notation 'BB' indique une vulnérabilité élevée au risque de


défaut, notamment en cas d'évolutions défavorables des conditions
commerciales ou économiques. Cependant, des marges de
BB
manœuvre commerciales ou financières existent et permettent de
Spéculatif
soutenir le service des engagements financiers.

La notation 'B' indique que le risque de défaut concret est présent,


B
mais une étroite marge de sécurité subsiste. Les engagements
Hautement spéculatif
financiers sont actuellement tenus; cependant, la capacité durable

20
de paiement est vulnérable à une dégradation de l'environnement
commercial ou économique.

CCC
Risque de crédit Le défaut de paiement est une possibilité réelle.
substantiel

CC
Risque de crédit très
Un défaut de paiement de quelque nature apparaît probable.
élevé

C
Niveau Le défaut de paiement est imminent ou inévitable, ou l'émetteur est
exceptionnellement en suspension de paiement (standstill).
élevé de risque de crédit

L'émetteur a connu un défaut de paiement persistant sur une


RD obligation, un prêt ou toute autre dette financière concrète, mais
Défaut de paiement n'est pas entré en dépôt de bilan, sous administration judiciaire ou
restreint (Restricted sous toute autre procédure officielle de liquidation, et n'a par
Default) ailleurs pas cessé ses activités.

L'émetteur est en dépôt de bilan, sous administration judiciaire ou


D
une autre procédure officielle de liquidation, ou a par ailleurs cessé
Défaut de paiement
ses activités.

3) Ce que ne dit pas la notation

Les agences insistent beaucoup sur le fait que le rating représente une opinion,
et non une quelconque forme de garantie ou d'engagement de leur part, ce qui au
regard de la loi américaine les met à l'abri de poursuites de la part des
investisseurs. Par ailleurs le rating permet une évaluation relative des différents
émetteurs, mais ne constitue pas une évaluation de la probabilité de défaut
absolue d'un émetteur. Cette remarque a d'ailleurs une certaine pertinence si l'on
considère que, dans l'absolu, des conditions économiques adverses peuvent être
susceptibles de fragiliser l'ensemble des agents sans nécessairement modifier
leur positionnement relatif.

21
Le rating constitue une évaluation du risque de crédit à l'exclusion de tout autre
risque. Il ne donne aucune indication sur la rentabilité potentielle d'un
investissement, ni sur la volatilité des titres émis. Le rating ne dit rien non plus
sur la liquidité d'un titre, c'est-à-dire la possibilité de trouver un prix et une
contrepartie de marché pour acheter ou vendre ce titre. Cet aspect s'est fait
cruellement sentir lors de la dernière crise financière quand de nombreux
investisseurs se sont trouvés dans l'impossibilité de liquider leurs positions sur
des titres pourtant notés « triple A ».

Le rating ne donne pas d'indication sur la probabilité de défaut d'un émetteur, ni


sur la perte potentielle en cas de défaut. Il ne donne pas non plus d'avis sur la
qualité d'un émetteur en tant que contrepartie, autre que le risque de crédit qu'il
représente.

4) Le processus de notation
La notation est généralement établie à la demande de l'émetteur, mais elle peut
aussi être déclenchée par l'agence de rating elle-même.

Un comité de notation formé d'analystes, directeurs et analystes junior est formé.


Ce comité recueille les données disponibles, publiques ou non, sur l'émetteur et
sur son marché. Une fois le rating établi, l'agence continue de suivre l'émetteur,
et peut être amenée à le réviser périodiquement.

La notation des produits structurés tels que les ABS ou MBS suit un processus
différent. En effet, le produit est construit (« structuré », comme son nom
l'indique) par le sponsor, qui est toujours à l'origine de la demande de notation,
en vue d'obtenir un certain rating. Le processus de rating devient alors itératif,
l'agence conseillant le structureur, celui-ci soumet une proposition, si l'objectif
de rating n'est pas atteint il revoit sa copie… ou va voir une autre agence. On
voit alors nettement à quel conflit d'intérêts les agences sont confrontées, et il
n'est pas surprenant que certaines aient cédé à une certaine complaisance vis-à-
vis de leurs clients qui sont, rappelons-le, ceux-là même qu'elles sont censées
noter, et qui ne les paieront que si le rating est finalement publié.

Plus objectivement, la notation des produits structurés repose d'une part sur une
évaluation du pool de collatéral sur lequel le produit est adossé (des « stress
test », simulant des scénarios de perte en cas de défaut sont mis en œuvre), et
d'autre part sur la structure du capital (tranches) proposée. L'objectif est de
déterminer quel montant de rehaussement de crédit (voir la page sur la
titrisation) est nécessaire pour chaque tranche en vue d'obtenir la note souhaitée.

Comme dans le cadre de la notation des émetteurs, l'agence continue de


surveiller le titre noté après avoir publié son rating initial, en particulier le
22
comportement du pool de collatéral face aux conditions économiques, et peut
être amenée à revoir le rating.

L'information et les modèles ayant servi à établir le rating des produits structurés
sont rarement rendus publics, au contraire de ce qui se passe dans le cadre des
obligations émises par les entreprises, qui sont tenues de rendre publiques un
certain nombre de données (bilan, compte de résultat) les concernant.

5) Le rôle des agences de notation dans le système


financier
Les agences de notation sont des acteurs incontournables des marchés. En effet
les notations sont abondamment utilisées dans le cadre réglementaire d'une part,
et aussi dans les stratégies de nombreux investisseurs.

Au niveau réglementaire, l'approche dite « standard » d'application du ratio de


solvabilité repose complètement sur les ratings des agences de crédit.

Pour être éligibles aux opérations de refinancement des banques centrales, les
titres doivent avoir un rating minimum.

De même, les objectifs de gestion de nombreux investisseurs s'appuient sur les


ratings : un OPCVM peut par exemple avoir dans ses objectifs de détenir 80%
d'actifs émis par des émetteurs notés au minimum « BBB ». Les indicateurs de
suivi du risque de crédit dans les banques de financement et d'investissement
s'appuient également sur les ratings.

Enfin, les ratings conditionnent la prime de risque qu'un émetteur qui veut se
financer sur les marchés va devoir payer. Cette prime de risque détermine de
combien le taux qu'il va devoir servir aux investisseurs doit être supérieur au
taux des émetteurs notés « triple A » pour que ses titres soient souscrits.

6) Les agences de notation et la crise financière


Les agences de notation sont accusées d'avoir participé au déclenchement de la
crise financière de 2007-2009 pour deux raisons. Tout d'abord elles ont eu
tendance à noter bien trop complaisamment des titres qui finalement se sont
avérés « toxiques », en dépit (ou à cause ?) des montages financiers sophistiqués
sur lesquels ils reposaient. Quand les conditions du marché immobilier ont
commencé à se dégrader aux Etats-Unis, elles ont réagi en abaissant brutalement

23
le rating de nombreuses émissions (« downgrading »), contribuant à la spirale
baissière dans laquelle était entraîné le marché.

Auparavant, les agences avaient déjà suscité les critiques lors de faillites
retentissantes qu'elles avaient été totalement incapables d'anticiper : Parmalat,
Enron, Worldcom, etc. Par la suite, elles ont de nouveau été pointées du doigt
lors de la crise de la dette grecque.

7) La réglementation des agences de notation

Aux Etats-Unis les agences de notation sont surveillées par la SEC (voir
"autorités de tutelle"), qui accorde le statut de NRSRO, Nationally Recognized
Statistical Rating Organisation.

L'Union européenne s'est également dotée de sa propre réglementation,


applicable à partir d'avril 2010. Ce règlement prévoit une procédure
d'enregistrement des agences auprès du CESR (Committee of European
Securities Regulators), devenu l'ESMA, l'obligation d'une plus grande
transparence sur les méthodes utilisées, la façon dont les conflits d'intérêt sont
gérés, etc. Enfin la réglementation prévoit la création d'une base de données
historiques, qui devrait permettre de suivre les performances des ratings dans le
temps.

L'IOSCO (International Organization of Securities Commissions) publie un code


de conduite auquel les agences tendent à se conformer.

Quant aux investisseurs, il leur est en principe recommandé de ne pas faire une
confiance aveugle aux ratings des agences, mais en même temps, tant que les
autorités de tutelle continueront d'utiliser massivement ces mêmes ratings dans
la réglementation, on voit mal comment on pourrait s'en passer

24
8) Les Agences de Notations : Description

a) Standard and Poor’s et Sa Notation

Standard & Poor's (S&P) est une filiale de McGraw-Hill qui publie des analyses
financières sur des actions et des obligations. C'est une des trois principales
sociétés de notation financière, avec des concurrents comme Moody's, Fitch
Ratings et Dagong. Ses origines remontent aux activités de son fondateur Henry
Poor en 1860.

S&P utilise une échelle de notation, allant de AAA à D. L’échelle de notation se


compose de 23 crans (notch) et est divisée en deux catégories : la catégorie dite
"investment grade" et la catégorie dite spéculative.

La notation la plus basse de la catégorie investment grade est BBB- (équivalent


de Baa3 chez Moody's).

La notation la plus élevée de la catégorie spéculative est BB+ (équivalent à Ba1


chez Moody's).

Catégorie "investment grade":

AAA – valeurs de tout premier ordre (« gilt edged »)

AA+, AA, AA- – haut de la fourchette (« high-grade »)

A+, A, A- – notation intermédiaire (« upper-medium grade »)

BBB+, BBB, BBB- – bas de la fourchette (« medium grade »). Peut comporter
certaines caractéristiques spéculatives.

Catégorie spéculative (voir aussi: Junk bond)

BB+, BB, BB- – éléments dits spéculatifs

B+, B, B- – absence de caractéristiques d’investissement souhaitables

CCC+, CCC, CCC- – obligations de très mauvaise qualité

CC – hautement spéculatives

25
C, SD et D – notations les plus basses. Perspectives extrêmement faibles
d’atteindre un niveau propice à l’investissement.

b) Moodys et Sa Notation

Moody's, officiellement Moody's Corporation, est le holding de Moody's


Analytics, un fournisseur de solutions de gestion des risques, et Moody's
Investors Service, société active dans l'analyse financière d'entreprises
commerciales ou d'organes gouvernementaux. Moody's est également connu
pour ses notations financières standardisées des grandes entreprises en fonction
du risque et de la valeur de l'investissement. Ses principaux concurrents sont
Standard & Poor's (S&P), Fitch Ratings et Dagong. Moody's a été fondée en
1909 par John Moody, journaliste financier reconverti, qui crée la notation .

Moody's a créé les symboles de son échelle de notation, les fameux « triple A to
C ».

L’échelle de notation, qui va d’un maximum de Aaa à un minimum de C, se


compose de 21 crans (notch) et de deux catégories : la catégorie dite "investment
grade" et la catégorie dite spéculative. La notation la plus basse de la catégorie
investment grade est Baa3 (équivalent de BBB- chez S&P's).

La notation la plus élevée de la catégorie spéculative est Ba1 (équivalent à BB+


chez S&P's).

Catégorie "investment grade":

Aaa – valeurs de tout premier ordre (« gilt edged »)

Aa1, Aa2, Aa3 – haut de la fourchette (« high-grade »)

A1, A2, A3 – notation intermédiaire (« upper-medium grade »)

Baa1, Baa2, Baa3 – bas de la fourchette (« medium grade »). Peut comporter
certaines caractéristiques spéculatives.

Catégorie spéculative (voir aussi: Junk bond)

Ba1, Ba2, Ba3 – éléments dits spéculatifs

B1, B2, B3 – absence de caractéristiques d’investissement souhaitables


26
Caa1, Caa2, Caa3 – obligations de très mauvaise qualité

Ca – hautement spéculatives

C – notation la plus basse. Perspectives extrêmement faibles d’atteindre un


niveau propice à l’investissement.

c) Fitch ratings
Fitch Ratings Ltd. est une agence de notation financière internationale. Ses
principaux concurrents sont Standard & Poor's (S&P), Moody's et Dagong.

La société a été fondée par John Knowles Fitch le 24 décembre 1913 à New
York sous le nom Fitch Publishing Company. Elle a fusionné avec la société
IBCA Limited, basée à Londres, en décembre 1997, passant ainsi sous le
contrôle du holding français Fimalac dont le principal actionnaire est le Français
Marc Ladreit de Lacharrière. En 2000, elle a acquis les sociétés Duff & Phelps
Credit Rating Co. (basée à Chicago) et Thomson BankWatch. Depuis le 12
décembre 2014, elle est détenue à 80% par le groupe Hearst.

Fitch Ratings utilise un classement très proche de celui de S&P.

27
Deuxième Partie

CHAPITRE 1 : Les Opérations de Titrisation et les


Techniques de Gestion de Risque qu’elles Autorisent.
La titrisation est un montage financier qui consiste à émettre des titres adossés à
un panier d'actifs, le plus souvent des créances. Les actifs sous-jacents sont pour
ainsi dire « transformés » en titres, d'où l'expression « titrisation » (securitization
en anglais). Les revenus versés au détenteur du titre sont issus des produits des
actifs sous-jacents, d'où le terme générique ABS, Asset-Backed Securities.

Remarque : en fait, quelque part, un titre est toujours adossé à un actif… Mais
pas aussi directement que dans le cas de la titrisation :

1. Le lien le plus direct existe dans le cas des parts de fonds (OPCVM en
France) : la part de SICAV ou de FCP est représentative des
investissements en actions et obligations effectués par le gérant du fonds
et sa valeur varie en relation directe avec la valorisation boursière des
titres en question.
2. Dans le cas des actions et des obligations, le titre en lui-même, qui
constitue un actif pour l'investisseur, est représentatif d'une part du passif
de l'émetteur : du capital dans le cas de l'action, un emprunt à long terme
dans le cas de l'obligation. Cependant ce passif a pour vocation à financer
des investissements, et c'est bien la confiance que l'investisseur a dans la
capacité de l'émetteur à faire fructifier son investissement (donc créer des
actifs) qui l'a poussé à acquérir le titre en question.

Cependant, dans le cas des actions et des obligations, la capacité de l'émetteur à


rembourser in fine le titre émis est sujette à toutes sortes d'aléas qui ne
dépendent pas que de ses qualités de gestionnaire ou d'entrepreneur. Dans le cas
d'un titre issu d'une opération de titrisation, c'est différent : le titre étant adossé à
un panier d'actifs préexistants au montage, la capacité de l'émetteur à honorer les
paiements prévus ne dépend pas de ses qualités propres mais seulement de la
qualité des créances sous-jacentes. L'actif est généralement déjà créé, et
d'ailleurs dans le cas de la titrisation on parle de refinancement, et non de
financement tout court. Toutefois certaines titrisations s'appuient également sur
des créances futures

28
Section 1 : les Produits et caractéristiques de la titrisation

1) Les actifs sous-jacents


Créances

L'avantage d'une opération de titrisation est de permettre au détenteur des


créances sous-jacentes de refinancer celles-ci. On va donc trouver des actifs
typiquement illiquides, par exemple des créances sur des particuliers,
impossibles à céder directement car chacune est spécifique et nécessite un
traitement administratif. On va trouver aussi des créances de petits montants,
comme des crédits à la consommation, dont chacune individuellement génère de
faibles revenus (à l'échelle d'un investisseur institutionnel en tous cas !) mais qui
mises toutes ensemble constituent un panier global d'une valeur suffisante. Un
des premiers usages de la titrisation est donc de créer un actif négociable, et
donc un marché, à partir d'actifs qui ne le sont pas.

On va donc titriser les actifs suivants :

 Créances hypothécaires sur des particuliers ; c'est dans cette catégorie


qu'on trouve les fameux « subprimes », prêts immobiliers accordés à des
particuliers à la solvabilité douteuse.
 Créances hypothécaires sur des entreprises
 Crédits bancaires aux entreprises
 Créances commerciales
 Prêts étudiants (principalement aux Etats-Unis)
 Encours de cartes de crédit : dans ce cas, le titre émis va typiquement être
d'une maturité plus longue que les créances sous-jacentes ; le portefeuille
d'actifs va devoir être « rechargé » à plusieurs reprises afin de garantir les
flux promis. Les créances titrisées ne sont donc pas (toutes) encore nées
au moment du montage. On parle de titrisation de flux futurs.
 Prêts automobiles
 Etc.

2) Autres actifs non liquides


A priori n'importe quel actif susceptible de produire des flux financiers peut être
titrisé. L'utilisation de ce type de montage reste toutefois assez confidentielle.
Comme exemples on citera :

 Activités de leasing
 Royalties

29
 Revenus publicitaires
 Actifs du secteur public

3) Instruments financiers négociables


Le panier d'actifs sous-jacents peut également être constitué d'instruments
financiers négociables. A noter que l'on s'éloigne de l'avantage initial de la
titrisation qui était de rendre liquides des actifs qui ne l'étaient pas…

 Obligations
 ABS : on parle alors de titrisation de titrisations ou titrisation au carré
(ABS square)
 Parts de fonds en particulier de hedge funds

4) Terminologie
La terminologie liée aux ABS est assez foisonnante. Il se peut d'ailleurs qu'étant
donné le tarissement actuel des opérations de titrisation, certains de ces termes
tombent rapidement dans l'oubli…

Tout d'abord le terme ABS lui-même est porteur d'une certaine ambiguïté : par
commodité, il est utilisé pour désigner l'ensemble des titres issus des titrisations,
puisque après tout c'est bien ce que le nom veut dire. Mais c'est un faux ami
(comme les TCN) : en fait on devrait apparemment utiliser le terme d'ABS pour
tout ce qui n'est pas rattaché aux créances hypothécaires, ce qui donne 2
catégories (entre parenthèses la nature des actifs sous-jacents) pour les titres à
moyen-long terme, auxquelles s'ajoute une 3ème catégorie, celle des titres à
court terme:

 MBS : Mortgage Backed Securities, titrisation de créances


hypothécaires, dont :
o RMBS : Residential Mortgage Backed Securities (crédits
hypothécaires aux ménages)
o CMBS : Commercial Mortgage Backed Securities (crédits
hypothécaires aux entreprises)

 ABS : titrisation de tout autre type d'actifs.


o CBO : Collateralized Bond Obligation (obligations)
o CLO : Collateralized Loan Obligation (prêts bancaires)
o CDO : Collateralized Debt Obligation (actifs divers, généralement
non hypothécaires) ; la particularité des CDO est d'être structurés
en « tranches » de niveau de risques croissant.

30
 ABCP : Asset-Backed Commercial Paper : titres à court terme
garantis par des créances commerciales

5) Mortgage Backed Securities(un titre adossé à des créances


hypothécaires)

Un titre adossé à des créances hypothécaires est un type de valeur


mobilière adossée à des actifs (asset-backed security). Sa valeur de revente est
garantie à la fois par un ensemble de portions d'hypothèques et par les intérêts
payés sur ces hypothèques. Les paiements sont habituellement versés
mensuellement pendant la durée de vie des actifs qui servent de garantie.
Cependant, tous les titres garantis par une hypothèque ne sont pas
nécessairement des MBS. Les obligations sur résidences (mortgage revenue
bonds), garanties par les hypothèques qu'elles financent, ne sont pas des MBS
mais des RMBS (Residential Mortgage-backed security).

6) CDO : Collateralized Debt Obligation: UN PRODUIT DÉRIVÉ


DE CRÉDIT

Un CDO (Collateralized debt obligation) est un type particulier d’ABS (Asset


Backed Security ou, en français, titres adossés à des actifs), composé de
multiples tranches, émise chacune par des entités spécialisées et adossées à des
crédits et/ou obligations.

Un CDO correspond donc à une opération de titrisation en vue de transformer


certaines dettes (obligations, prêts, créances, autres titres adossés à des actifs,
voire même d’autres CDOs) en produits financiers. Ainsi, les actifs et leurs
revenus sont titrisés au sein d’un seul et unique produit.

CDO : un système de tranches pour faciliter la revente

La valeur et le rendement d’un CDO repose sur le portefeuille d’actifs à


rendements fixes qui le compose. L’atout principal d’un CDO est son découpage
en tranches qui peuvent être revendues, par tranche justement, à des
investisseurs.

Chaque tranche d’un CDO présente son propre degré de risque. Les tranches
dites « seniors » sont considérées comme les plus sûres. Le paiement des intérêts
et le remboursement du principal se font dans l’ordre de séniorité. Les tranches

31
junior offre un coupon plus élevé (et un taux d’intérêt) pour rémunérer un risque
de crédit plus élevé.

Si l’argent collecté par un CDO ne suffit pas à payer tous ses investisseurs, alors
ceux dans les tranches inférieures sont les premiers à encourir des pertes.

Les objectifs des CDO

Les CDO sont des produits de finance structurés issus de montages complexes,
visant à répondre à différents besoins, tels que :

- réduire les coûts de refinancement ;


- exploiter des opportunités d’arbitrage ;
- se défaire du risque de crédit.

Les différentes formes de CDO

Les CLOs (« Collateralized Loan Obligations ») sont des formes de CDOs


faisant référence à des prêts commerciaux. Les CBOs (« Collateralized Bond
Obligations ») sont des formes de CDO faisant eux référence à des obligations.
On trouve désormais des CDO (CDO carré ou square) qui sont des CDO de
CDO. Il existe même des CDO qui sont des CDO de CDO².

CDO : origine et création

Les premiers CDOs sont apparus sur les marchés financiers à la fin des années
80, créés par Drexel Burnham Lambert Inc. Ils se sont largement développés
durant les années 90 jusqu’à atteindre en 2006 près de $500 milliards de dollars.

CDO : des actifs à l’origine de la propagation de la crise des subprimes

Les CDOs, et plus généralement la titrisation de prêts pourris ou junk bonds


mais aussi les notations très discutables de ces actifs ont été largement critiqués

32
ces dernières années, accusés d’avoir contribué à la propagation de la crise des
subprimes.

7) Collateralized Loan Obligation (prêts bancaires)


Les collateralized loan obligation (CLO) représentent des titres de dettes qui
sont émis par le SPV (Special purpose vehicle), un véhicule de titrisation. Grâce
aux CLO, les banques revendent, pour leur refinancement, des dettes qu'elles
détiennent sur leurs clients. Les personnes qui investissent en achetant des CLO
bénéficient d'une rémunération qui est proportionnelle au risque lié aux dettes
attachées à ces CLO. L'émission des CLO fonctionne de la manière suivante :
les établissements bancaires vendent des prêts immobiliers à leurs clients. Une
institution de crédit rachète ces créances et revend les prêts à un véhicule de
titrisation qui les transforme en CLO. Les titres sont ensuite regroupés selon leur
risque (absence de remboursement par l'emprunteur) dans la catégorie senior,
mezzanine ou equity. Chaque catégorie est ensuite revendue par le SPV.

Différence entre CLO et CDO


Les collateralised debt obligations (CDO) sont une variante des collateralized
loan obligations. La grande différence est qu'ils sont gagés sur des titres
financiers de diverse nature et pas seulement sur des prêts immobiliers. Par
exemple sur des obligation d'entreprises ou encore des prêts étudiants. Comme
les CLO, les CDO sont sont découpés en différentes catégories selon les
techniques de la titrisation

33
8) Collateralized Bond Obligation (CBO)
Un Collateralized Bond Obligation (CBO) est un produit dérivé de crédit faisant
référence à un portefeuille d’obligations.

Il s’agit de dettes émises par un organisme de titrisation, qui achète et détient


des obligations émises par des entreprises ou des banques.

La vente d’un CBO s’effectue en plusieurs tranches (senior, mezzanine, equity),


plus ou moins exposées aux défauts et délivrant un rendement proportionnel au
risque qu’elles présentent.

9) Mécanisme des Collateralized Bond Obligation et


titrisation
Les CBO sont des instruments de transfert de risques. Ils permettent aux
investisseurs institutionnels (banques, etc.) de se refinancer en cédant un
portefeuille d’obligations a priori peu liquide.

En pratique, la construction d’un CBO se déroule en 3 étapes :

 la construction d’un portefeuille de référence composé d’obligations de


nature hétérogène ou d’une qualité de rating différente par une banque,
une compagnie d’assurance, etc. ;
 la déconnexion entre le risque de crédit du portefeuille et l’initiateur du
montage à travers la création d’un fonds commun de créances (FCC). Il
s’agit d’une entité juridique distincte et indépendante de l'entreprise
cédante. Elle est chargée de l’émission des CBO. Le produit de l'émission
de ces titres est affecté à l'achat du portefeuille d’obligations du cédant.
Les flux financiers provenant des obligations cédées sont affectés au
remboursement des créances émis par le FCC et à la rémunération des
investisseurs ;

34
 le découpage en plusieurs tranches de l’émission qui présentent des
niveaux de risque et de rendement symétriques. Ce « tranching »
correspond également aux risques de pertes susceptibles d’affecter le
portefeuille sous-jacent. La tranche equity est la plus exposée aux pertes
dans l’éventualité d’un ou plusieurs défauts au sein du portefeuille, la
tranche senior n’étant affectée que si les pertes n’ont pas été absorbées par
les deux autres tranches.

Section 2 : Mise en place d'une titrisation


1) montage d’une titrisation
Le montage d'une titrisation est une opération complexe mettant en jeu plusieurs
acteurs. Le chéma ci-dessous, extrait du site du FMI, illustre le mécanisme de
base de transfert des créances et de création des titres :

L'entité initialement détentrice des créances (l'originateur) commence par vendre


celles-ci à une entité juridique spécialement créée pour protéger les investisseurs
finaux du risque face à l'émetteur des créances, le SPV (Special Purpose
Vehicle), aussi appelé « conduit ». Selon les cas, le SPV revend ensuite le pool
de créances à un « trust » qui émet les titres (le trust est en fait utilisé pour
plusieurs opérations de titrisation et chapeaute donc plusieurs SPV), soit émet

35
directement les titres. En France le SPV correspond au FCC, Fonds Commun de
Créances.

Le SPV est plus une enveloppe juridique qu'un élément réellement actif dans
l'opération. Le rôle déterminant est joué par l'arrangeur, généralement une
banque, qui va mettre en place l'opération, évaluer le pool de créances et la
façon dont celui-ci sera alimenté, les caractéristiques des titres à émettre, la
structuration éventuelle du fonds.

La structuration a pour objectif de modeler les caractéristiques des titres en


fonction des besoins des investisseurs finaux : au lieu de se contenter de leur
reverser les revenus générés par les créances, on va définir à l'avance les règles
d'amortissement du titre.

Certains ABS sont dits « rechargeables » c'est-à-dire que le pool de créances


peut être réalimenté en cours de vie du titre. Cela permet de refinancer par des
obligations à long terme des créances (comme les encours de carte de crédit) à
court terme.

Enfin l'arrangeur joue un rôle important dans le placement des titres auprès des
investisseurs finaux (la distribution). Bien souvent les titres ne sont pas émis sur
un marché négociable mais placés de gré à gré auprès de quelques investisseurs.

L'ensemble : originateur – SPV – arrangeur consitue le modèle « originate to


distribute » qui a connu un succès flamboyant au cours des dernières années.

Il y a une distinction importante à faire entre les montages « classiques » de


titrisation, où les créances sont effectivement cédées au SPV (« true sale »), et
les titrisations dites « synthétiques », où l'originateur reste propriétaire des
créances mais n'en cède que les risques au SPV, via un dérivé de crédit. Cette

36
opération ne rapporte pas de liquidité au cédant mais lui permet d'externaliser les
riques liés à la détention des actifs titrisés.

2) Caractéristiques des titres émis


Tous les ABS sont des titres de nature « obligataire » donc représentatifs d'une
créance, à durée de vie limitée et distribuant des revenus calculés suivant des
règles connues à l'avance (mais pas nécessairement garantis pour autant !). Au-
delà de cela, toutes sortes de profils de calcul des coupons et des
remboursements sont possibles.

L'unique source de revenu du SPV, qu'il va pouvoir redistribuer aux


investisseurs, réside dans les revenus générés par les créances sous-jacentes :
ceux-ci sont de 2 natures, des paiements d'intérêt d'une part, des
remboursements de capital d'autre part. On va donc assez naturellement affecter
les collectes en intérêts au paiement des intérêts sur les titres émis, et les
collectes en capital au remboursement des titres.

De part la nature des actifs sous-jacents, qui vont typiquement être tôt ou tard
remboursés à des échéances échelonnées (un des problèmes que doit résoudre
l'arrangeur est d'ailleurs de faire face aux remboursements anticipés des
créances), les titres émis peuvent être amortissables, c'est-à-dire que le nominal
décroit au fil de la vie du titre. Le rapport entre le nominal actuel et le nominal à
l'émission est appelé le « pool factor ».

Mais certains ABS sont remboursés en une fois à la fin de la vie du titre («
Bullet amortization »).

Une des caractéristiques des ABS est ainsi que bien souvent la date effective du
ou des remboursements n'est pas connue précisément lors de l'émission du titre.

37
3) Les techniques de rehaussement de crédit
Jusqu'à un passé récent, les ABS bénéficiaient d'une bonne réputation sur les
marchés et étaient censés constituer des placements plus rentables que les
placements obligataires, avec un profil de risque identique. Pourtant il existe une
probabilité de défaut sur le pool de créances sous-jacentes. Plusieurs techniques
dites de « rehaussement de crédit » permettent d'aboutir à ce résultat.

Excess spread : le taux d'intérêt servi sur les titres émis est inférieur au taux
d'intérêt moyen perçu sur les créances sous-jacentes.

Sur collatéralisation : la valorisation globale des créances sous-jacentes est


supérieure au nominal total des titres émis.

Subordination : les titres émis ne sont pas tous identiques mais répartis en
tranches successives. Le remboursement de chaque tranche est subordonné
(conditionné) à celui de la tranche immédiatement supérieure. La tranche
supérieure, dite « senior » bénéficie donc d'une priorité sur la tranche
intermédiaire, « mezzanine », etc. En contrepartie, le taux d'intérêt est croissant :
moins le remboursement est garanti, plus le taux d'intérêt servi est élevé. La
tranche la plus basse, dite « equity », n'est généralement pas distribuée aux
investisseurs et est conservée par l'originateur.

Dépôt de garantie : un dépôt de garantie est constitué par le cédant auprès du


SPV.

Garantie par un tiers : des compagnies d'assurance, sites « monoline » se sont


spécialisées dans la garantie des structures de titrisation.

38
4) Produits dérivés (dérivés de crédit): l'utilisation des
produits dérivés, en particulier des dérivés de crédit, permet aussi
de couvrir le risque du pool de collatéral

On obtient ainsi un "produit structuré", mis en au point de telle sorte que la


tranche supérieure obtienne la meilleure note possible ("AAA" ou "Investment
grade") de la part des agences de notation, la ou les tranches médianes une note
intermédiaire ("BBB" dans notre exemple ci-dessous) et la tranche inférieure
sera non notée ou notée comme "Speculative". Il est à noter que si l'opération se
passe bien la tranche "Equity" pourra en fait générer de confortables revenus,
mais aucun et même ne pas être remboursée en cas de défaillances successives
sur le pool de collatéral.

Graphique 1

Le schéma ci-dessous tente de restituer visuellement la mise en oeuvre des


techniques de subordination (tranches), de sur collatéralisation (excess
collateral) et de taux (excess spread).

39
5) La titrisation a aidé à se défaire des risques de
défaillance
Si auparavant les banques conservaient les crédits qu’elles accordaient,
aujourd’hui elles externalisent, regroupent et revendent les risques et les
créances. Ainsi, elles se séparent du risque de défaillance correspondant. La
titrisation a joué un rôle essentiel à cet égard. Transformées en titres, les
créances et droits de propriété sont devenus négociables. Une multitude de
produits financiers ont vu le jour en particulier ces dernières années. Ces
produits et les crédits sur lesquels ils se fondent ont souvent été vendus à des
sociétés ad hoc, des sociétés de portage. L’intérêt de ces sociétés est de séparer
le risque de crédit du risque de contrepartie. Vers fin 2006, les titrisations
atteignaient un volume de 6 500 milliards de dollars. Vers fin 2007, 67 % de
toutes les créances hypothécaires étaient titrisées. Un quart d’entre elles
concernaient des crédits à risque

6) Les crédits ont été regroupés et classés en


fonction de leur degré de solvabilité
Le produit financier dont on a le plus parlé en lien avec la crise financière sont
les « collateralized debt obligations » ou CDO. Les CDO sont un produit
structuré constitué d’un portefeuille de titres à taux fixe. Ce portefeuille est
divisé en plusieurs tranches de rangs différents. Chaque tranche présente un
profil différent en termes de risque et de rendement. Lorsqu’un titre perd de la
valeur, c’est la dernière tranche qui subit en premier lieu cette perte. Celle-ci est
répartie entre tous les investisseurs de cette tranche8 . Les tranches qui
présentent le risque le plus faible possèdent des caractéristiques proches de
celles des obligations. Au moment de l’émission, les échéances et les coupons
sont fixes. Les investisseurs d’une tranche sont protégés par une ou plusieurs
tranches de rang inférieur ainsi que par d’autres mécanismes et disposent ainsi
d’une meilleure notation que la notation moyenne pour tous les titres du
portefeuille de référence

Si auparavant les banques se contentaient d’octroyer des crédits,


aujourd’hui elles regroupent et revendent les risques et les créances.

40
Graphique 2 : Titrisation des crédits hypothécaires

7) La construction de portefeuilles de CDO s’est


complexifiée
Au départ, les portefeuilles contenaient des obligations et des crédits bancaires.
La formation de la bulle immobilière aux États-Unis s’explique en partie par
l’intégration de créances hypothécaires. Des portefeuilles d’hypothèques
titrisées (CDO de titres adossés à des créances hypothécaires9 ) ont vu le jour.
Le principe du regroupement a également été étendu aux dettes hypothécaires
(CDO de titres adossés à des actifs). Enfin, les « collateralized debt obligations »
ont été divisés en tranches et réassemblés. Ainsi, des CDO de CDO ont vu le
jour.

41
Chapitre 2 : Les acteurs d'une opération de
titrisation
Le schéma ci-dessous décrit les différents acteurs intervenant dans une opération
de titrisation avec leurs attributions respectives. Ce schéma est reproduit avec
l'aimable autorisation de son auteur, M. François Leroux. Le document complet :
« La titrisation – Note pédagogique » est accessible à partir de la rubrique «
Ailleurs sur le Web », plus bas dans cet article.

42
1) Avantages de la titrisation
Pour le cédant

Pour l'originateur, le principal intérêt de la titrisation est de lui permette d'alléger


son bilan (d'aucuns diront « se débarasser ») des créances cédées , ce qui d'une
part diminue d'autant ses obligations de capital réglementaire au sens Bâle II, et
d'autre part lui permet de faire rentrer des liquidités supplémentaires (qui
pourront servir à distribuer de nouveaux crédits).

Pour l'investisseur

Les ABS constituent une occasion d'investir sur des classes d'actifs qui ne sont
pas accessibles sur les marchés, avec un profil rendement/risque a priori
séduisant.

« ABS have become a well-established asset class within the fixed income
markets, offering high credit quality and attractive risk-adjusted yields compared
to other spread product. Despite some of the risks associated with ABS such as
prepayment or extension risk, the signifi cant credit enhancement and structural
support inherent in most transactions make ABS a quality fi xed income
investment choice for the institutional portfolio. » (“A primer on Asset-Backed
Securities” – Dwight asset management company)

« Les ABS constituent un moyen de diversifier un portefeuille dans des produits


peu risqués qui offrent par construction une exposition sur un portefeuille
diversifié. »

« Comme les actifs du sous-jacent sont diversifiés, clairement identifiés et nantis


au profit des porteurs, les agences de notation estiment qu'en cas de défaut (ce
qui reste théorique), le taux de récupération pour les porteurs est très élevé. »

(“Asset-Backed Securities – guide pratique pour les investisseurs” – Société


Générale)

Pour le marché

La titrisation permet en principe une meilleure répartition des crisques sur le


marché, ceux-ci n'étant plus concentrés entre les mains des organismes de crédit.

43
2) Inconvénients de la titrisation
Avec la crise des subprimes et la crise de confiance qui s'en est suivie, le marché
de la titrisation est en nette perte de vitesse et sur certains segments, en
particulier les produits les plus complexes, complètement stoppé. Du côté des
investisseurs, les ABS représentaient un véritable eldorado, ils sont maintenant
dans la catégorie des actifs réputés « toxiques ». Que s'est-il passé ? Ce n'est pas
vraiment la vocation de fimarkets de se livrer à des analyses économiques mais
voici tout de même quelques éléments, que le lecteur complètera utilement avec
les articles cités en référence.

3) Asymétrie d'information
En fait, la complexité des montages constitue un inconvénient car elle est
génératrice de ce qu'on appelle une « assymétrie d'information » : en clair,
l'émetteur des titres en sait beaucoup plus long sur ce qu'il est réellement en train
de vendre que l'acheteur, c'est-à-dire l'investisseur. Tant que les titres émis se
comportent effectivement comme annoncé dans la brochure, tout va bien et
personne ne se pose de questions. Mais dès que des problèmes apparaissent sur
certaines émissions, comme il faut une vraie expertise pour être capable
d'évaluer un programme de titrisation, la suspicion s'étend à lensemble de la
catégorie de produits et plus personne n'en veut. Ce mécanisme a été
originellement décrit par Akerlof à propos du marché de voitures d'occasion
(« The market for Lemons »). Les agences de notation, qui ont largement
attribué des notes « triple A », ont largement été montrées du doigt dans ce
contexte, mais il s'agit avant tout d'une perte de confiance qui s'étend à tout une
classe d'actifs au point d'en devenir assez irrationnelle.

44
4) Aléa moral
D'autre part, la titrisation comme on l'a vu offre aux banques une opportunité
d'alléger leurs bilans et donc de remplir plus facilement leurs obligations
réglementaires, opportunité dans laquelle elles se sont engouffrées. Dans le
même temps, elles se sont détournées de leur métier de base dont la juste
appréciation des risques de crédit constitue la pierre angulaire. L'offre de crédit
étant de plus en plus facile, les organismes de crédit sont devenus moins
regardant sur la qualité des emprunteurs finaux. C'est ce qu'on appelle « l'aléa
moral ». Quittant leur rôle de financement de l'économie les banques se sont
orientées (pas complètement heureusement) vers un rôle de purs intermédiaires
dans une économie qui serait devenue complètement « marchéisée », schéma qui
atteint aujourd'hui ses limites.

45
Troisième Partie :

CHAPITRE 1 : Les Dérivés de Crédit

Définition
Un dérivé de crédit est un produit dérivé dont le sous-jacent est un actif de type
crédit, c'est-à-dire une créance ou un titre représentatif d'une créance
(obligation). Le but du dérivé de crédit est de transférer les risques (et tout ou
partie des revenus !) relatifs au crédit, sans transférer l'actif lui-même.

Un dérivé de crédit permet à un "originateur" ou acheteur de protection de


transférer le risque lié à un actif de type crédit (dont il est ou non le détenteur) à
une ou plusieurs contreparties, les vendeurs de protection.

1) Dérivés de crédit : mécanisme

Les dérivés sont comparables aux maillons d’une chaîne qui permettent de
transmettre le risque d’un agent économique à l’autre.

Grâce à un contrat passé entre deux contreparties, les dérivés permettent de


transférer tout ou partie du risque de crédit portant sur un tiers désigné sous le
vocable « d’entité de référence ».

Le principe de fonctionnement des dérivés est le suivant :

 Une contrepartie vend un risque de crédit portant sur une créance


déterminée, dite « créance sous-jacente ».

 Contre le versement régulier d’intérêts ou d’une prime, l’acheteur du


risque crédit (l’autre contrepartie), dédommagera le vendeur si un
événement de crédit survient sur l’actif sous-jacent à cette créance.

46
Avec ce système, le vendeur cède le risque de crédit portant sur une
créance, mais en garde la propriété juridique. Il peut donc l’inscrire au
bilan. Cette capacité à transférer de manière « synthétique » une créance,
en dissociant le risque de crédit et de la créance elle-même, apporte une
souplesse accrue dans la gestion de risque tant à l’acheteur de protection
(celui qui vend le risque) qu’au vendeur de protection (celui qui l’achète).

2) Utilisation

L'utilisation des dérivés de crédit permet aux banques de diversifier leurs


portefeuilles de crédit sans toutefois sortir de leur créneau de clientèle habituel.
Ainsi deux banques, l'une spécialisée dans le crédit au secteur agricole, l'autre
dans le crédit à l'industrie, peuvent acheter chacune une part des revenus liés au
portefeuille de l'autre. Chacune diversifie ainsi les risques encourus, en
bénéficiant de plus de l'expertise de sa contrepartie dans son domaine de
compétences.

Plus généralement les dérivés de crédit permettent de se couvrir contre le risque


de défaut des contreparties. Il existait jusqu'à présent des méthodes de contrôle
et de gestion du risque de contrepartie. Les dérivés de crédit offrent l'opportunité
de réduire réellement le risque.

Les dérivés de crédit ne sont pas utilisés que par les prêteurs. Les emprunteurs
(émetteurs d'obligations par exemple) sont également amenés à s'en servir pour
se couvrir contre d'éventuelles fluctuations des conditions de marché qui
pourraient amener une dégradation de leurs conditions de financement.

47
CHAPITRE 2 : Principaux Dérivés de Crédit

1) Credit swaps
Les swaps de crédit consistent à s'échanger les revenus issus de 2 créances ou
portefeuilles de créances. Ce type de contrat de gré à gré est souvent mis en
place grâce à un intermédiaire qui perçoit une commission pour l'opération. Par
rapport aux opérations de titrisation, ce type de contrat a l'avantage que les
crédits restent enregistrés dans les livres de la banque : la confidentialité est
respectée.

Il existe des contrats plus standardisés qui consistent à échanger, par exemple,
les revenus générés par des obligations contre les revenus générés par un titre
d'Etat. La variation de la différence entre ces 2 rendements mesure précisément
l'évolution de la qualité de l'émetteur des obligations.

2) Total return swap :

Un dérivé de crédit sur transfert de rendement (Total Return Swap ou Swap de


performance) est un contrat financier par lequel un investisseur reçoit tous les
flux financiers inhérents à un actif ou indice de référence sans acheter ou
posséder cet actif ou indice. L'opération est communément intitulée « contrat
d'échange sur rendement global ». ce type de contrat consiste à échanger la
totalité des revenus générés par un portefeuille de crédits contre un revenu fixe
prédéterminé, indexé par exemple sur un taux de référence du marché.

Les paiements sont réalisés par l’autre partie au contrat, le plus souvent
détentrice des titres, appelée ici acheteur de protection (Total Return Payer).
Par opposition, l’autre partie au contrat assume le risque de performance des
flux financiers objets de l’opération. Cette partie est le vendeur de protection
(Total Return Receiver).

Contrairement à un swap d’actif, qui vise à se protéger contre le risque de crédit


de produits à taux fixe, le Total Return Swap expose le Total Return Receiver à
48
tous les risques frappant un actif: Risque de crédit, risque de marché, risque de
taux, etc.

Le Total Return Payer est quant à lui uniquement exposé au risque de crédit
auquel est sujet le Total Return Receiver.

3) Illustration
Prenons un swap de performance de maturité 10 ans. Son actif de référence est
un titre obligataire de maturité 30 ans, au taux nominal de 3% et dont la valeur
d’émission est 100.

Le Total Return Payer assumera les flux financiers du sous-jacent (Coupons de


3%) jusqu’à l’échéance du swap. Si le titre est valorisé à 105, le Total Return
Payer versera cette plus-value au Total Return Receiver.

En contrepartie, le Total Return Payer reçoit le taux variable Libor plus une
marge, par exemple vingt-cinq points de base.

4) Variantes
De nombreuses variantes de TRS coexistent et s’articulent autour de plusieurs
paramètres: Nature du sous-jacent, nature des flux, date de règlement, etc.

Les flux sont en principe symétriques: Le Total Return Payer reçoit le taux
variable Libor augmenté du spread, quand le Total Return Receiver reçoit les
flux financiers du sous-jacent ainsi que les plus ou moins-values de ce-dernier.

Toutefois, une variante du TRS permet de différer le paiement des flux


financiers dûs par le Total Return Receiver jusqu’à la maturité du contrat. Il
s’agit d’un bullet swap: Le notionnel du contrat reste alors constant pendant
toute la durée du contrat, augmentant ainsi l’attractivité du swap en tant que
stratégie de hedging à fort effet de levier.

49
5) L'utilité pour le Total Return Payer

Du côté des Total Return Payer: la technique permet à une institution non-
bancaire, telle qu’une assurance, de participer à une opération de financement en
assumant le risque de crédit et les flux financiers futurs d’un actif.

Pour une banque, le Total Return Swap permet de réduire son exposition à un
secteur ou un titre particulier, libérer du capital et mieux gérer ses lignes de
crédit. La banque peut aussi craindre une dépréciation prochaine de ses titres de
créances et, en raison notamment de taux d’escompte défavorables, choisir de
les maintenir à son bilan et recourir à un TRS.

La technique peut aussi être utilisée par deux banques dont les coûts de
financement sont largement déséquilibrés. Dans ce cas, il peut être intéressant
pour la banque A, plus favorisée sur le marché monétaire et obligataire car
mieux ratée, d’acquérir les créances elle-même puis de rentrer dans un contrat
avec une banque B, dont les conditions de financement sont moins favorables.

6) L'utilité pour le Total Return Receiver

Du côté des Total Return Receiver: le TRS permet permet à l’investisseur de


détenir un actif de manière synthétique. Dans la mesure où il n’y a pas transfert
de propriété, la plupart des règles de notification sur la détention de titres de
capital ne s'appliquent pas, sauf exceptions2.

La technique permet aussi au Total Return Receiver de bénéficier d’un


important effet de levier puisqu’il peut investir immédiatement sans financer sa
position, bien qu’il soit possible de prévoir la mise en place d’un collatéral pour
limiter le risque de contrepartie supporté par le Total Return Payer.

50
7) Credit options
L'exemple le plus simple d'options de crédit est l'option sur obligations. Un
investisseur qui détient des obligations et veut se couvrir contre la diminution de
leur valeur peut acheter des put sur ces obligations. (rappel : un put ou option de
vente donne le droit de vendre l'actif sous-jacent au prix d'exercice). Il s'agit là
en définitive d'une option sur titres "classique".

Un émetteur d'obligations peut aussi se couvrir contre une augmentation des


taux en utilisant des options. On appelle "prime de risque" la différence entre le
taux que le marché exige d'un émetteur ou d'une catégorie d'émetteur et le taux
des emprunts d'Etat, réputés sans risque. La prime de risque est liée à la qualité
de l'émetteur, elle-même mesurée par la notation qui lui est attribuée. Il existe
des options indexées sur cette prime de risque. Considérons par exemple une
entreprise notée "Baa" qui s'apprête à émettre des obligations dans un délai d'un
mois et souhaite déterminer à l'avance ses conditions d'accès au marché. L'achat
d'un call sur la prime de risque moyenne des émetteurs notés Baa permet à
l'émetteur potentiel de recevoir, en cas d'augmentation de cette prime au-delà du
seuil, la différence entre les intérêts qu'il va effectivement devoir payer et ceux
qu'il souhaite payer sur son emprunt. (NB ce type d'option suppose en cas
d'exercice la livraison non pas de l'actif sous-jacent, mais d'une somme de cash
de même valeur).

8) Credit default swap (CDS)

Ici le vendeur de protection s'engage, contre le versement d'une prime, à


dédommager l'originateur en cas d'événements négatifs sur son portefeuille :
défaut de paiement ou simplement dégradation de la qualité de ses débiteurs.
Contrairement à ce que semble indiquer le terme, le produit s'apparente donc
davantage à une option qu'à un swap.

En cas de défaut de paiement sur un nombre prédéterminé de titres détenus en


portefeuille, le détenteur du contrat reçoit un dédommagement de la part du
vendeur de protection. Ce type de contrat correspond au besoin d'un investisseur

51
qui accepte d'assumer des pertes limitées (si un ou 2 titres font défaut, il ne
reçoit rien) mais veut se couvrir contre les grosses pertes.

9) Crise grecque et Crédit default swaps

 Dans le cas de la dette grecque, les acteurs privés qui ont acheté des
obligations auprès de l’État grec (banques, assurances, fonds de pension,
fonds d’investissement…) ont pu acheter auprès d’assureurs des CDS
pour se couvrir au cas où l’État grec ne rembourserait pas ces obligations.

C’est un produit dérivé, cela signifie qu’il est défini par rapport à un produit de
référence. C’est un dérivé de crédit, cela signifie que le produit de référence est
un crédit.

 Dans le cas de la dette grecque, le produit de référence est l’obligation de


l’État grec.

Les CDS se déclenchent à condition qu’il y ait ce qu’on appelle un événement


de crédit, c’est-à-dire le non remboursement de tout ou partie du crédit sur
lequel porte le contrat, en l’occurrence la dette publique grecque.

 Dans le cas de la dette grecque, l’événement de crédit a été déclaré


vendredi 9 mars 2012, quand le gouvernement grec a imposé aux
créanciers privés détenteurs de dette publique grecque, une restructuration
par un échange d’obligations avec 53,5 % de perte. La grande majorité de
ces créanciers privés ont accepté « volontairement » cette perte, d’autres
ont été forcés par le recours aux « clauses d’actions collectives ».

Aussi, les CDS sont des instruments de spéculation, ils peuvent être achetés
sans avoir aucun actif à protéger. On parle alors de « CDS à nu ».

 Dans le cas de la dette grecque, certains acteurs privés ont acheté des CDS
sans avoir au préalable acheté des obligations de l’État grec. Ils ne se
couvrent donc pas contre un risque de non-remboursement, mais
spéculent sur le fait que le gouvernement grec ne remboursera pas ses
obligations.

52
Les CDS à nu seront interdits à partir de novembre 2012 dans la zone euro.

10) Les CDS, comment ça marche ?

La prime

L’acheteur de CDS verse périodiquement une prime à l’assureur en paiement


de ceux-ci.

53
La prime est appelée « spread ». C’est la valeur du CDS qui varie sur les
marchés financiers en fonction de l’offre et de la demande. Plus la situation de
l’État grec se dégrade, plus la valeur de ce spread augmente.

Les CDS sont donc un indicateur de la perception du risque de non-


remboursement par les marchés.

Le déclenchement des CDS

Comme tout contrat d’assurance, le versement de l’indemnité dépend de la


survenue d’un événement précisé dans le contrat d’assurance.

 Si aucun événement de crédit n’intervient, l’acheteur de CDS aura payé la


prime pour rien.

 Si l’événement de crédit est déclaré, cela « déclenche » le dénouement des


CDS. Dans ce cas, il faut déterminer la valeur des obligations pour
calculer le montant de l’indemnisation.

11) Credit linked notes


L'originateur peut également émettre des titres, les credit linked notes, pour se
couvrir contre le risque de crédit. L'investisseur qui achète les titres subira un
délai ou une diminution des remboursements en cas de survenue d'événements
spécifiés dans les caractéristiques du titre.

Les credit linked notes sont en fait des obligations classiques combinées à une
option de crédit. L'obligation elle-même donne le droit à l'investisseur de
recevoir des intérêts réguliers et un remboursement du capital en fin de vie.
L'option de crédit donne le droit à l'émetteur de diminuer les paiements liés à
l'obligation en cas de survenue si une variable de marché prédéfinie, ayant une
influence sur sa propre exposition au risque de crédit varie de façon
significative. En contrepartie le prix à l'émission est moins élevé, ce qui permet
d'attirer quand même les investisseurs.

L’acheteur de CLN est soumis à deux risques de crédit :

 celui attaché à la banque émettant le titre de créance ;

54
 celui attaché au crédit.

En contrepartie, il obtient un rendement supérieur à celui d’un produit


conventionnel sous forme de coupons fixes, variables ou indexés.

Mécanisme des CLN

La plupart des CLN sont émis par des banques cherchant à se couvrir contre le
risque de défaillance d’une « entité de référence » (par exemple, une entreprise)
sur laquelle elles détiennent une dette, c'est-à-dire une créance ou un titre
représentatif d'une créance (obligation).

Les CLN permettent de transférer ce risque de crédit, un peu comme un bâton de


relais, en le passant par un fonds commun de créances (SPV).

Les CLN s’apparentent à des obligations classiques combinées à une option de


crédit (Credit default swap – CDS) :

 l'aspect obligation donne le droit à l'investisseur de recevoir des intérêts


réguliers et le remboursement du capital en fin de vie du CLN ;

 l'option crédit donne à l'émetteur le droit de minorer les paiements liés à


l'obligation si une variable de marché fixée à l'émission bouge de façon
significative.

À noter : en l’absence d’événement de crédit sur le ou les entités de référence,


l'investisseur encaisse tous les coupons, et se voit remboursé à l’échéance du
CLN. Si l'entité de référence connaît un événement de crédit, le CLN est
remboursé prématurément et le versement du coupon s'arrête

Ce mécanisme à double détente, obligation + crédit, n'est possible que parce que
le CLN recourt à un Credit default swap (CDS) dans son montage.

à savoir que : les CDS s'apparentent à une assurance-crédit. L'acheteur du CDS


– celui qui recherche une protection - verse une commission annuelle à un
vendeur. En contrepartie de cette commission, le vendeur – celui qui endosse le
risque - s'engage à compenser les pertes de l'actif de référence en cas de
survenance d'un événement (faillite, défaut de paiement d’un coupon,
restructuration de la dette, etc.).

Intérêt des CLN pour un investisseur

55
Les CLN sont recherchés, car ils permettent de doper le rendement et de
diversifier la partie obligataire d'un portefeuille.

Il s’agit d’un investissement dynamique.

On distingue plusieurs types de CLN.

Floored CLN

Si aucun aléa de crédit n’intervient sur l’entité de référence, l’investisseur reçoit


un coupon équivalent au taux 3 mois Euribor + un spread fixé à l’avance. Si un
aléa de crédit survient, aucun coupon ultérieur n’est payé.

À noter : un « spread » est une marge positive ou négative par rapport à un prix
de référence, en l'occurrence l'Euribor. Le spread du CDS est destiné à
rémunérer le risque de crédit pris par les investisseurs sur l’entité de référence.

CLN linéaire sur panier

Ici, c’est un panier d’entités qui est pris en compte et non pas une unité seule. Le
Fonds paie un coupon équivalent au taux 3 mois Euribor + un spread fixé à
l’avance sur le notionnel. Pour chaque défaillance constatée, le montant de base
(notionnel) comme le montant du coupon se réduisent.

First-to-Default (FTD)

Si aucun événement de crédit ne se produit sur le panier d’entités, le Fonds paie


un coupon équivalent au taux 3 mois Euribor + un spread fixé à l’avance. Si un
événement de crédit survient à une seule des entités du panier, plus aucun
coupon n’est payé. L’investisseur perd un montant équivalent au taux non
recouvrable sur le notionnel.

Afin de savoir si une entité de référence a fait défaut, les acteurs du marché en
réfèrent au Comité de détermination de l’ISDA – Association internationale des
swaps et dérivés. Le taux de recouvrement est alors déterminé par les enchères
menées sous l’égide de l’ISDA

Pour résumer, les CLN soumettent l’investisseur à une double exposition


crédit : celle de l’émetteur du CLN et celle de la référence (unité) sous-jacente.
En cas d’événement de crédit, le CLN fait l’objet d’un remboursement anticipé,
parfois à un prix inférieur à celui de départ. Dans cette hypothèse, le paiement
du coupon cesse également

56
12) Présentation du marché des dérivés de crédit
et des données de l’étude

Un marché des dérivés de crédit dominé par les CDS

Le marché des dérivés de crédit est un marché en forte croissance. D’après les
enquêtes de l’agence de notation Fitch, le montant notionnel total de dérivés de
crédit est passé de 3 trillions de dollars en 2003 à 12 trillions de dollars en 2005
et, les contrats de CDS représentent près de la moitié de ce montant.

Ce marché est dominé par les contrats de courte durée, plus de 80% des contrats
ont une maturité inférieure ou égale à cinq ans. Or, un instrument de couverture
perd en efficacité lorsque sa maturité est inférieure à celle du prêt sous jacent.
Les banques sont majoritaires sur le marché, à la fois comme acheteuse de
protection que comme vendeuse, mais sont globalement acheteuses nettes de
protection (pour un montant de 268 milliards de dollars en 2005). Cependant,
certaines banques britanniques et suisses sont devenues des vendeuses nettes de
protection. Elles utilisent davantage les dérivés de crédit comme instruments
financiers de diversification de leurs sources de revenus que comme instrument
de couverture de leur portefeuille d’actifs. Les principaux vendeurs nets de
protection sont les sociétés d’assurance et de réassurance, les fonds de pension
et les hedge funds avec 20 à 30% de l’activité du marché en 2005. Le risque de
crédit est ainsi transféré des grandes banques internationales vers des sociétés
d’assurance, des fonds, mais également vers des banques régionales, allemandes
notamment. Ces banques régionales se tournent vers ce marché afin de
diversifier par régions et par secteurs d’activité leur portefeuille et utilisent les
dérivés de crédit comme des instruments générateurs de revenus
supplémentaires. Au final, le risque de crédit est aujourd’hui transféré vers des
établissements financiers qui ont des capacités moindres à gérer ce risque et à
faire face aux pertes en cas d’événement de crédit. Le marché des dérivés de
crédit est très concentré. En 2005, quinze établissements réalisaient à eux seuls
près de 86% des volumes totaux5. Or, une concentration élevée tend à
augmenter le risque de contrepartie. Les entités de référence des dérivés de
crédit ne sont pas nombreuses.

57
En 2005, 62% d’entres elles sont des entreprises (General Motors,
DaimlerChrysler, Ford Motor, France Telecom arrivent de loin en tête de la
liste), 18% des établissements financiers (Deutsche Bank Goldman Sachs, JP
Morgan) et 4% des Etats (Brésil, Italie, Russie). Le marché des dérivés de crédit
concerne de plus en plus les entités les moins bien notées et donc en principe les
plus risquées6. Entre 2003 et 2005, la part des entités notées au moins « A » est
passée d’environs 60% à 33% tandis que la part des « speculative grade » (un
rating inférieur à BBB) passe de moins de 20% à 37%

58
CONCLUSION

En permettant de créer des instruments liquides et peu risqués à partir de


créances illiquides et de risque élevé, la titrisation a permis aux banques, aux
institutions financières et à certaines entreprises de se financer à des conditions
très favorables. De ce fait, elle a considérablement amélioré les conditions de
financement de l’immobilier résidentiel puis commercial. En donnant aux
banques la possibilité de céder leurs créances, la titrisation leur a permis, non
seulement de se financer, mais également de gérer le risque de crédit associé à
ces créances. Au terme de cette présentation, il n’est pas inutile de faire un bilan.
1. Les premiers financements structurés sont apparus durant la décennie 1970.
Ils ne présentaient aucun risque. Elaborés par des agences hypothécaires
(government sponsored agencies), ils étaient d’autant moins risqués qu’ils
bénéficiaient de facto de la garantie de l’Etat fédéral américain. Les techniques
associées à ces titrisations étaient simples et transparentes. Elles sont toujours
utilisées et consistent à sortir des actifs (en l’occurrence des créances
hypothécaires) du bilan des institutions qui initient la titrisation et à les vendre à
des véhicules de titrisation qui en financent l’achat par l’émission d’obligations
qui sont adossées 42 à ces actifs (RMBS). Dans les années qui ont suivi (à partir
du début du XXIe siècle) les RMBS adossés à des crédits subprime sont devenus
beaucoup plus risqués. Le risque ne tenait pas à la technique, mais à la
potentielle dévalorisation des actifs sur lesquels les émissions titrisées étaient
adossées. Bien évidemment ces RMBS ne bénéficiaient pas des garanties des
agences hypothécaires qui étaient réservées aux émissions adossées à des crédits
de bonne qualité (prime). 2. Dans un deuxième temps furent élaborés (selon le
même principe) des titrisations adossées à des crédits destinés à financer
l’immobilier commercial ou l’immobilier d’entreprise. Ces montages (il s’agit
de CMBS) présentent plus de risque, car ils ne bénéficient pas de la garantie des
agences hypothécaires. Parallèlement aux CMBS, furent mises en place des
titrisations (ABS) adossées à des crédits destinés à financer l’achat de voitures
automobiles, des crédits à la consommation, des encours de cartes de crédit, etc..
3. La valorisation de ces financements structurés ne pose pas de réels problèmes
ou, si elle en pose, ils ne sont pas insurmontables. L’opération de titrisation est,
en effet, adossée à des titres homogènes ayant les mêmes comportements pour
lesquels les analystes disposent de bases de données fiables, précises et de
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longue durée permettant aux structureurs de déterminer avec précision les taux
de défaillance et les fréquences des remboursements anticipés spécifiques à ces
titres ou à ces créances. 4. Les opérations de titrisation auraient pu en rester à ce
niveau, mais tel ne fut pas le cas. Assez rapidement sont apparus des CBO et des
CLO. Les premiers étaient des titrisations exigeant du structureur qu’il se
procure au préalable, sur le marché des capitaux, des titres obligataires (junk
bonds ou high yield bonds) présentant un risque réel sur lesquels allaient être
adossées des émissions titrisées beaucoup moins risquées et répondant mieux
aux besoins des investisseurs. Les CLO reposent sur le même principe, à ceci
près que les actifs sousjacents sont des prêts accordés à des entreprises par les
banques et les institutions financières. 5. Une étape dans la complexité a été
franchie quand les structureurs ont élaboré des CDO adossés à des RMBS, à des
CMBS ou à des ABS. Ces titrisations de deuxième niveau conduisent à adosser
des émissions titrisées sur des actifs déjà titrisés. Ces opérations sont
évidemment plus risquées que les RMBS ou les ABS adossés à des actifs de très
bonne qualité. Elles furent accusées d’être opaques. Elles l’étaient pour ceux qui
n’étaient pas curieux, car il suffisait de demander au structureur quels étaient les
sous-jacents (et l’on ne voit pas 43 comment celui-ci aurait pu refuser de
répondre) pour connaître ou, à tout le moins, appréhender les risques associés à
ces montages. Si les investisseurs ont été victimes de cette opacité, c’est qu’ils
n’ont pas été très curieux. Bien évidemment, contrairement à la valorisation des
RMBS ou des ABS qui s’appuyait sur de longues séries de défauts relatifs à des
titres homogènes, celle des CDO était beaucoup plus délicate. Plus
s’intensifiaient l’hétérogénéité des actifs sous-jacents et leur concentration sur
quelques signatures, plus les CDO étaient difficiles à valoriser et gagnaient en
dangerosité (et en rentabilité pour les investisseurs et les structureurs, ne
l’oublions pas). 6. L’étape supplémentaire, celle des CDO synthétiques, a accru
l’abstraction des financements structurés. Au lieu d’apporter à un véhicule de
titrisation des actifs négociés sur des marchés au comptant (créances
hypothécaires, prêts aux entreprises, obligations échangées sur le marché des
capitaux), les structureurs ont proposé aux institutions financières de conserver
dans leurs bilans les actifs qu’ils auraient apportés à un véhicule de titrisation
dans le cadre d’une opération plus traditionnelle, et à acheter des CDS à des
opérateurs prêts à acquérir du risque de crédit, sans s’embarrasser de la gestion
au jour le jour des actifs financiers. Des montages plus élaborés ont également
été utilisés. Ils font intervenir un véhicule de titrisation émettant des titres pour
un montant représentant 10 à 15 % de l’endettement qui aurait été nécessaire à

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un CDO non synthétique. La gestion administrative de ces CDO est simplifiée,
mais leur valorisation, on le comprend de manière intuitive, est plus délicate, car
elle doit prendre en compte celle des CDS dont les primes connaissent une
grande volatilité. Lorsqu’ils sont adossés à des RMBS, à des CMBS ou à des
ABS, ce qui est fréquent, les CDO synthétiques sont des montages financiers
dans lesquels s’empilent deux niveaux de titrisation et une strate de produits
dérivés représentés par des CDS, des instruments dont la valorisation influencée
par les normes comptables internationales peut induire de très importantes
moins-values comptables. 7. Un quatrième niveau de complexité allait être
atteint avec le montage des CDO carrés. Conceptuellement, l’opération est
simple. Elle consiste à émettre des tranches de CDO adossées à des tranches de
CDO déjà émises (dont le montage peut intégrer des CDS) lesquelles peuvent
être adossées à des RMBS (ou des CMBS ou des ABS), eux-mêmes adossés à
des crédits hypothécaires, à des prêts aux entreprises, à des crédits à la
consommation ou à des encours de cartes de crédit. Ces montages étaient
ingénieux, mais très difficiles à valoriser 44 et d’une quasi-totale illiquidité. Ils
pouvaient se développer et prospérer en période d’euphorie financière, mais à la
moindre incertitude, à la moindre détérioration de la valeur des actifs de base
(une hausse du taux de défaillance des emprunteurs de crédits subprime),
l’instabilité intrinsèque de ces produits ne pouvait qu’ébranler leur valeur…, et
celle-ci atteignait des dizaines de milliards de dollars. 8. Sachant que les
rehausseurs de crédit opérant avec des effets de levier supérieurs à 100 avaient
garanti près de 1 000 milliards de dollars de financements structurés dont
plusieurs dizaines de milliards de CDO d’ABS ou de CDO carrés, on comprend
que l’économie bancaire et financière internationale vivait sur un volcan. De très
nombreuses banques américaines et européennes, certaines banques asiatiques,
plusieurs des plus importantes compagnies d’assurance avaient en effet investi
des sommes importantes dans les CDO et structuré de nombreuses opérations
dont elles avaient conservé les tranches equity et certaines tranches mezzanine.
Entre juillet 2007 et avril 2008, les difficultés associées aux sous-jacents n’ont
concerné que les crédits subprime, mais il faut bien comprendre que toute
augmentation du risque de défaut relatif aux actifs sur lesquels sont adossées des
émissions titrisées (on pense aux crédits Alt-A et aux crédits aux entreprises)
aurait un potentiel de destruction bien supérieur à celui qui fut induit par
l’accroissement du taux de défaut associé aux crédits subprime. Une récession
économique réduisant significativement les revenus des particuliers et les
résultats d’exploitation des entreprises pourrait avoir de ce point de vue des

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conséquences dramatiques. 9. La crise du subprime a révélé l’extrême sensibilité
des financements structurés à la valeur de leurs sous-jacents. Ceci ne doit pas
surprendre, car ces instruments sont des produits dérivés. Leur valeur dépend
(dérive, pourrait-on dire) du prix d’un autre actif (en l’occurrence des crédits
subprime) négocié sur un marché au comptant. Si les premiers RMBS des
années 1970 étaient des dérivés peu risqués, la progressive complexification des
produits structurés (on est passé des RMBS aux CBO/CLO/CDO, des CDO
cash-flow aux CDO synthétiques à base de CDS, des CDO de première
génération aux CDO d’ABS, puis aux CDO carrés, etc., l’évolution ne s’étant
pas arrêtée à ce stade) a introduit des effets de levier à l’intérieur même des
produits qui en ont fait, comme on l’a vu au deuxième semestre 2007 et au
premier semestre 2008, de véritables « bombes à retardement de destruction
massive ». Elaborer des CDO carrés adossés à des CDS, par 45 ailleurs garantis
par des rehausseurs de crédit, impose de ne pas confier ces instruments à des
mains innocentes ou incompétentes.

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