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MÉTHODE DE LA DISSERTATION

(PLAN DIALECTIQUE)

Le but de la dissertation est de dégager une problématique à partir de la question posée, et


de traiter cette problématique.

I – ANALYSE DU SUJET
Le but de l’analyse du sujet est de dégager la problématique.

Problématique = problème + enjeu

Problème = opposition de deux affirmations qui semblent, l’une et l’autre, être justifiées.
Enjeu = intérêt philosophique du problème (qu’est-ce que la résolution du problème apportera
à la philosophie ?).

Remarques : un problème est aussi appelé une « antinomie ». Ici, le problème est constitué par
deux réponses opposées et justifiées à la question posée.

# Comment procéder ?
Il faut montrer que le problème résulte de la nature des choses, c’est-à-dire des concepts en
jeu, de leur définition. Ce n’est pas un problème de circonstance, qui ne se poserait que « dans
certains cas », accidentellement, mais un problème qui se pose inévitablement, étant donnée la
nature des choses.
Repérer les termes et expressions ambigus ou polysémiques. Éliminer les sens qui ne posent
pas problème. Repérer ce qui est en question (pourquoi pose-t-on la question ?)

II – STRUCTURE GÉNÉRALE DU DEVOIR


- Les deux premières parties du développement présentent l’antinomie (chaque partie
développe une des deux thèses adverses).
- La troisième partie du développement présente la solution (argumentée) de l’antinomie.
- L’introduction résume le devoir en insistant sur la position du problème (c’est-à-dire les deux
premières parties) : on pose le problème, et on évoque, de façon très allusive, la solution.
- La conclusion résume le devoir en insistant sur la solution (la troisième partie).

III – L’INTRODUCTION
Le but de l’introduction est de poser la problématique en s’appropriant la question. Il
s'agit d'expliquer pourquoi la question se pose, or la question se pose parce qu'il y a un
problème. C'est donc en posant le problème que l'on introduit la question. L’introduction doit
ainsi montrer que la question se pose (s’impose), par la nature même des choses ; il ne suffit
donc pas de dire : « on peut se demander si » ; il faut montrer que l’on doit se le demander, que
la question est incontournable.
L’introduction doit être rédigée après l’établissement du plan détaillé du développement.

Plan d’introduction :

1) On commence par poser le problème, en indiquant brièvement les arguments qui seront
développés dans les deux premières parties. La position du problème est aussi l'entrée en
matière, et explique pourquoi la question se pose.
2) Puis on pose la question, mot pour mot, en se l’appropriant (il faut la poser, non la citer).
3) On indique l’enjeu, ce qui peut consister parfois à reformuler le sujet.
4) Enfin, on annonce la solution de manière allusive.

Exemple d'introduction pour le sujet : « Le doute est-il libérateur ? »

Si nous ne doutions jamais de nos croyances, nous ne pourrions nous délivrer de nos
préjugés, dont beaucoup sont pourtant erronés. Le doute est, par suite, le passage obligé pour
ouvrir nos esprits à des vérités jusqu’alors inconnues ou méconnues. Mais dans notre vie
quotidienne, nous n’apprécions guère d’être tiraillés par des doutes, car ceux-ci nous
empêchent souvent de prendre des décisions sereines. L’acte de douter paraît donc ambigu :
le doute est-il libérateur, ou est-il bien plutôt un frein à notre capacité de nous déterminer à
agir ? Sachant que toute réflexion philosophique se doit de débuter par le doute, la question
est ainsi de savoir jusqu’où celui-ci doit être cultivé. Ne peut-on trouver une forme de doute
qui permette de concilier l’ouverture de l’esprit avec sa détermination ?

IV – LE DÉVELOPPEMENT

Première partie : je soutiens une première réponse à la question posée.


Deuxième partie : je me fais des objections, qui s’opposent à ma première réponse.
Troisième partie : je m’accorde avec moi-même.

Ainsi, le développement comporte trois parties.


Chaque partie présente une unique argumentation pour défendre une thèse, qui est une
réponse à la question posée.
Chaque partie compte au moins trois paragraphes (« sous-parties »).
Chaque paragraphe est une étape de l’argumentation.
Les parties sont séparées par un saut de ligne. Les sous-parties sont délimitées par des alinéas,
avec des mots de liaison appropriés.
L’ensemble doit être équilibré (des parties de dimensions à peu près équivalentes).
Ne pas oublier les transitions entre les parties : on s’appuie sur ce qui précède pour annoncer,
par une question, ce qui va suivre.

Exemple de paragraphe (sous-partie) :

Le plaisir n'est que la suppression d'un déplaisir, de sorte que l'on ne peut éprouver
le premier qu'après avoir éprouvé le second. En effet, tout plaisir est la satisfaction d'un désir
puisque c'est précisément par le plaisir que se manifestent nos tendances, donc nos désirs.
Mais qu'est-ce, finalement que le désir, sinon un manque ? Car ce que nous désirons nous ne
le possédons pas, sinon nous cesserions de le désirer. Or, avoir un manque est déplaisant. Si
donc il faut combler un manque pour avoir un plaisir, il faut commencer par avoir un déplaisir
pour avoir un plaisir. C'est en ce sens que Platon souligne dans le Gorgias que « boire est
agréable quand on a soif » ; ce qui signifie que pour goûter pleinement le plaisir de boire, il
faut d'abord passer par le désagrément de la soif, et supprimer ce désagrément, en buvant.

Remarque 1 : ce paragraphe peut lui-même être développé en plusieurs paragraphes ; il suffit


de chercher à justifier certaines affirmations qu’il contient ; exemple : « c’est par le plaisir que
se manifestent nos tendances » ; « avoir un manque est déplaisant ».

Remarque2 : sur l'usage des exemples dans l’argumentation :


Le développement ne doit pas se transformer en une énumération d'exemples, ou de « cas ».
Dans un argument, la fonction d'un exemple se ramène généralement à l'une des suivantes :
● Le contre-exemple : un exemple qui contredit une proposition générale. Il importe de bien
user des contre-exemples. Ils peuvent être contestables ; pour réfuter « tous les A sont B », il
faut montrer un exemple de A qui n'est pas B. Or il est parfois contestable que l'on ait affaire à
un A. Exemple : « Tous les amis sont fidèles ». Contre-exemple : « Mon ami Pierre m'a trahi ». On
pourrait se demander : Pierre était-il vraiment un ami ? Remarque : l'existence de personnes
ayant perdu leurs jambes ne contredit pas le fait que l'espèce humaine est bipède ; elle ne
change rien au concept de l'être humain, qui intéresse principalement le philosophe.
● L’exemple-support : il sert de support à une analyse conceptuelle ou à une généralisation :
- cas d'une analyse conceptuelle : pour cerner un concept, on considère des instances, en les
faisant varier, pour déterminer les caractères communs.
- cas d'une généralisation : on procède sur un cas particulier, tout en admettant ou en montrant,
que l'on peut toujours procéder ainsi, dans tous les cas ; on est alors autorisé à généraliser ( ex
: l'analyse du morceau de cire).
● L’argument du cas le plus défavorable : on montre qu'une proposition générale est vraie
même dans le cas où elle avait le moins de chance d'être vraie.
● L’exemple illustratif : il ne prétend pas prouver une proposition générale, mais seulement en
faciliter la compréhension.

Pour la troisième partie :

La troisième partie peut prendre trois formes :

● Confirmation d’une des deux thèses, par la réfutation de l’autre.

● Rejet des deux thèses en présence, par la défense d’une troisième.

● Conciliation des deux thèses, qui montre que, contrairement aux apparences, elles n’étaient pas con

█ Première possibilité : défense d’une thèse contre l’autre


(Réfutation des objections)

Le plan du développement prend alors la forme suivante :


I – Thèse
II – Objections à la thèse
III – Réfutation des objections à la thèse

█ Deuxième possibilité : rejet des deux thèses (Renvoi dos-à-dos)


Lorsque deux thèses contraires ont été présentées comme des contradictoires, il suffit
de montrer qu'elles sont toutes deux fausses.
Exemple :
Thèse : L’euthanasie est moralement condamnable (il est interdit de tuer)
Antithèse : L’euthanasie est une obligation morale (nous avons le devoir d’abréger
l’agonie)
Renvoi dos-à-dos : L’euthanasie est moralement permise, mais non obligatoire

█ Troisième possibilité : la conciliation (Synthèse)

Elle peut prendre diverses formes :


- On peut montrer que les termes utilisés par les deux partis adverses sont ambigus, et que c'est
cette ambiguïté non reconnue qui permet de soutenir deux thèses qui ne sont qu'en apparence
contradictoires.

- La synthèse proprement dite : elle consiste à montrer qu'il existe une troisième thèse qui
renferme en elle les deux premières comme des parties (des sous-thèses) qui peuvent coexister.
Exemple pour le sujet : « Le philosophe est-il un homme de son temps ? »
Thèse : Le philosophe, comme tout homme, est inévitablement influencé par son temps
Antithèse : Les problèmes de la philosophie sont intemporels
Synthèse : Le philosophe est critique de son temps.

Rappels :

- Le propos doit être personnel, dans la forme comme sur le fond. Tout recours à un autre auteur
doit être signalé, et discuté.
- Le propos ne doit jamais être allusif : il faut développer les idées comme si on les présentait à
quelqu’un qui n’a pas de culture philosophique.
- Toute allusion à un auteur doit être bannie ; si l'on cite un auteur, on doit non seulement
indiquer sa thèse, mais aussi son argumentation.
- Il faut écarter toute attitude dogmatique
- Il faut écarter toute attitude relativiste.
- Une dissertation n'est ni un catalogue d'exemples, ni un catalogue de références. Chaque partie
soutient une thèse, mais il est inutile de faire un catalogue des auteurs qui soutiennent cette
thèse. Inutile aussi de multiplier les exemples qui la corroborent, ou même les arguments qui la
prouvent : le développement, étape par étape, d'un seul argument, bien choisi, suffit, et est
préférable.
- L'argumentation doit reposer sur les relations entre les concepts qui figurent dans le jugement
que l'on veut justifier.

V – LA CONCLUSION

Elle n’est qu’un résumé, et ne doit comporter aucune idée nouvelle. Après avoir rappelé la
solution du problème, il faut également revenir sur l’enjeu : indiquer ce que cette solution
apporte à la philosophie.

Maximes de la dissertation :
1. Argumenter.
2. Argumenter en se fondant sur l'analyse des concepts.

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