Vous êtes sur la page 1sur 19

INTRODUCTION

Le droit international du travail est l’ensemble des règles juridiques à caractère


international édictées pour réguler les rapports entre les partenaires du monde du
travail que sont les employeurs, les travailleurs des secteurs public et privé et
l’administration du travail.

Ce droit tire ses sources de :

 La Déclaration universelle des droits de l’Homme (Articles 18 à 24) ;

 Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels


(Articles 6 à 11) ;

 La Convention internationale des droits de l’enfant (Article 32) ;

 La Convention internationale sur la protection des droits de tous les

travailleurs migrants et des membres de leur famille, du 18 décembre 1990


(art.76)1 ;

 La Constitution et des Conventions et Recommandations de l’OIT. C’est

d’ailleurs cette institution qui a le mieux élaboré le droit international du travail


à travers les principes et droits au travail qu’elle a mis en place.

CHAPITRE I : GENERALITES SUR L’OIT

SECTION I : HISTORIQUE

L’OIT a été fondée en 1919 sous l’égide du Traité de Versailles, qui a mis fin à
la Première Guerre mondiale. La création de l’OIT s’inscrivait dans le droit fil
de la réflexion selon laquelle une paix universelle et durable ne peut être fondée
que sur la base de la justice sociale.

La Constitution de l’OIT a été élaborée entre janvier et avril 1919 par la


Commission de la législation internationale du travail. Celle-ci avait été créée
par la Conférence de la Paix, réunie d’abord à Paris, puis à Versailles. Cette
commission était composée de représentants de neuf pays (Belgique, Cuba,
Etats-Unis, France, Italie, Japon, Pologne, Royaume-Uni et Tchécoslovaquie).
Elle a donné naissance à une organisation tripartite, unique en son genre, dont

1
Convention non ratifiée par la Côte d’Ivoire.

1
les organes exécutifs sont composés de représentants des gouvernements, des
employeurs et des travailleurs.

La Constitution de l’OIT intégra les principes et valeurs alors promus par


l’Association internationale pour la protection légale des travailleurs, fondée en
1901 à Bâle. L’idée de créer une organisation internationale dédiée aux
questions du travail remonte en fait à la deuxième moitié du XIXe siècle. Elle
était alors défendue par deux industriels, le Gallois Robert Owen (1771-1853) et
le Français Daniel Legrand (1783-1859).

La création de l’OIT a constitué la réponse de la communauté internationale à


un certain nombre de préoccupations sur le plan sécuritaire, humanitaire,
politique et économique. Ainsi, selon les termes du préambule de la Constitution
de l’OIT, les Hautes Parties Contractantes étaient « mues par des sentiments de
justice et d'humanité, aussi bien que par le désir d'assurer une paix mondiale
durable…».

Les travailleurs étant fortement exploités dans les économies industrialisées de


l’époque, d’aucuns surent mesurer l’importance de la justice sociale pour assurer
la paix. Par ailleurs, face à l’interdépendance croissante des économies
nationales, les grandes nations commerciales comprirent qu’il était dans leur
intérêt de coopérer pour que les travailleurs aient partout les mêmes conditions
de travail et qu’elles puissent ainsi affronter la concurrence sur un pied d’égalité.
Toutes ces idées figurent dans le Préambule de la Constitution de l’OIT, qui
débute en affirmant :

 Attendu qu'une paix universelle et durable ne peut


être fondée que sur la base de la justice sociale ;
 Attendu qu'il existe des conditions de travail
impliquant pour un grand nombre de personnes l'injustice, la misère et les
privations, ce qui engendre un tel mécontentement que la paix et l'harmonie
universelles sont mises en danger, et attendu qu'il est urgent d'améliorer ces
conditions;
 Attendu que la non-adoption par une nation
quelconque d'un régime de travail réellement humain fait obstacle aux efforts
des autres nations désireuses d'améliorer le sort des travailleurs dans leurs
propres pays;

Le Préambule mentionne également un certain nombre d’actions destinées à


améliorer la situation des travailleurs, qui sont toujours d’actualité, notamment:

2
 la réglementation des heures de travail, y compris
la
fixation d'une durée maximum de la journée et de la semaine de travail;
 le recrutement de la main-d'oeuvre, la lutte contre
le
chômage, la garantie d'un salaire assurant des conditions d'existence
convenables;
 la protection des travailleurs contre les maladies
générales ou professionnelles et les accidents résultant du travail;
 la protection des enfants, des adolescents et des
femmes;
 les pensions de vieillesse et d'invalidité, la défense
des
intérêts des travailleurs occupés à l'étranger;
 l'affirmation du principe "à travail égal, salaire
égal";
 l'affirmation du principe de la liberté syndicale;
 l'organisation de l'enseignement professionnel et

technique et autres mesures analogues.

SECTION II : MISSIONS ET OBJECTIFS DE L’OIT

«La justice sociale est le meilleur moyen d’assurer une paix durable et
d’éliminer la pauvreté. Je crois en la capacité des gens à se fédérer pour
défendre leurs droits, à unir leurs forces et à faire entendre leur voix.»
Juan Somavia, Directeur général du BIT

Étant la seule institution multilatérale au monde dotée d’une structure tripartite,


l’OIT a pour vocation de fournir aux hommes et aux femmes de tous les pays,
riches ou pauvres, de meilleures possibilités d’obtenir un travail et un revenu
décents, la sécurité de l’emploi et de meilleures conditions de vie. Elle s’efforce
d’atteindre ces objectifs en promouvant les droits au travail, en encourageant la
création d’emplois décents, en améliorant la protection sociale et en renforçant
le dialogue social dans le domaine de l’emploi.

L’OIT est la tribune internationale pour tout ce qui a trait au monde du travail.
Un des principaux objectifs de l’OIT consiste à aider les gouvernements des
pays membres à mettre en place les institutions propres à garantir le

3
fonctionnement de la démocratie et à rendre compte de leurs actions aux
citoyens.

L’OIT élabore des normes internationales du travail sous la forme de


Conventions et de Recommandations qui fixent les conditions minimales des
droits fondamentaux au travail, notamment la liberté syndicale, le droit
d’organisation et de négociation collective, l’abolition du travail forcé, l’égalité
des chances et de traitement, et autres instruments régissant les multiples aspects
du monde du travail.

Les différents champs d’action de l’OIT s’articulent autour de quatre objectifs stratégiques.

Les quatre objectifs stratégiques de l’OIT:


 promouvoir et mettre en oeuvre les normes et les principes et droits
fondamentaux au travail ;
 accroître les possibilités pour les femmes et pour les hommes d’obtenir
un emploi et un revenu décents ;
 accroître l’étendue et l’efficacité de la protection sociale pour tous ;
 renforcer le tripartisme et le dialogue social.

CHAPITRE II : LES PRINCIPES ET DROITS FONDAMENTAUX AU


TRAVAIL

Ces principes et droits sont consacrés par la Constitution de l’Organisation


Internationale du Travail (OIT) et par ses huit (8) Conventions fondamentales au
travail que sont :

 La Convention n°29 sur le travail forcé, 19302;


 La Convention n°105 sur l’abolition du travail forcé, 19573;
 La Convention n°87 sur la liberté syndicale et la protection du droit
syndical, 19484 ;

2
Ratifiée par la Côte d’Ivoire le 21 novembre 1960.
3
Ratifiée le 05 mai 1961.
4
Ratifiée le 21 novembre 1960.

4
 La Convention n°98 sur le droit d’organisation et de négociation
collective, 19495;
 La Convention n°100 sur l’égalité de rémunération, 19516;
 La Convention n°111 concernant la discrimination en matière d’emploi et
de profession, 19587;
 La Convention n°138 sur l’âge minimum, 19738;
 La Convention n°182 sur les pires formes de travail des enfants, 19999.

« La déclaration de l’OIT relative aux principes et droits fondamentaux au


travail et son suivi », qui est un engagement des gouvernements, des
organisations d’employeurs et de travailleurs à respecter les valeurs universelles
fondatrices des droits et libertés au travail, adoptée par la Conférence
Internationale du Travail le 18 juin 1998 les a regroupés en quatre (4) catégories
de principes et droits au travail suivantes :

 L’élimination de la discrimination en matière d’emploi et de profession ;


 L’élimination de toute forme de travail forcé et obligatoire ;
 La liberté d’association et la reconnaissance effective du droit de
négociation collective ;
 L’abolition effective du travail des enfants.

SECTION I : ELIMINATION DE LA DISCRIMINATION EN MATIERE


D’EMPLOI ET DE PROFESSION

Elle est réglementée par les Conventions n°100 sur l’égalité de rémunération et
n°111 concernant la discrimination (emploi et profession).

L'article 1, paragraphe 1-a de la convention n°111 définit la discrimination


comme "toute distinction, exclusion ou préférence (fondée sur certains critères)
qui a pour effet de détruire ou d'altérer l'égalité de chances et de traitement en
matière d'emploi et de profession". Cette définition purement descriptive
contient trois éléments :

5
Ratifiée le 05 mai 1961.
6
Ratifiée le 05 mai 1961.
7
Ratifiée le 05 mai 1961.
8
Ratifiée le 07 février 2003.
9
Ratifiée le 07 février 2003.

5
-- un élément de fait (l'existence d'une distinction, d'une exclusion ou d'une
préférence dont il n'est pas précisé qu'elle provienne d'un acte ou d'une
omission) qui constitue la différence de traitement ;

-- un critère qui provoque la différence de traitement ;

-- le résultat objectif de cette différence de traitement (la destruction ou


l'altération de l'égalité de chances et de traitement).

Par cette ample définition, la C111 couvre l'ensemble des situations qui peuvent
affecter l'égalité de chances et de traitement dont elle doit assurer la promotion.

L’élimination de la discrimination dans l’emploi et la profession s’obtient en


assurant l’égalité dans l’accès, les conditions de travail et l’égalité de
rémunération entre l’homme et la femme.

Paragraphe I : L’égalité dans l’accès et les conditions de travail

L’égalité garantie par la convention concerne aussi bien l’accès à l’emploi que
les conditions de travail.

Ainsi aucune discrimination ne doit être faite aux personnes qui postulent à un
emploi, encore moins à celles qui exercent cet emploi.

Cependant, certaines distinctions ou préférences ne sont pas considérées comme


discriminatoires.

A. La notion de discrimination

Toutes les distinctions, exclusions ou préférences dans l'emploi et la profession


ne sont pas contraires à la convention n°111. Sont considérées comme illicites
celles qui sont fondées sur la race, la couleur, le sexe, la religion, l'opinion
politique, l'ascendance nationale et l'origine sociale.

La discrimination prohibée en l’espèce n’est pas seulement d’ordre juridique


c’est-à-dire fondée sur les normes nationales. Elle concerne également la
discrimination d’ordre pratique c’est-à-dire celle qui est faite dans les faits alors
même que la législation du pays est irréprochable.

La discrimination prohibée n’est pas nécessairement intentionnelle. La


discrimination non intentionnelle est toute autant interdite.

6
Aussi, la discrimination peut-elle revêtir une nature directe ou indirecte.

B. Les exceptions

Toutes les distinctions ne sont pas nécessairement discriminatoires. En effet, les


distinctions fondées sur des critères objectifs ne sont pas constitutives de
discrimination.

Ainsi les qualifications exigées par un emploi déterminé ne sont pas


discriminatoires.

C’est ce qui ressort des dispositions de l'article 1, paragraphe 2 de la convention


111, qui énoncent que les "distinctions, exclusions ou préférences fondées sur
les qualifications exigées pour un emploi déterminé ne sont pas considérées
comme des discriminations".

Les traitements préférentiels, visant á réparer un déséquilibre, ne sont pas


discriminatoires. C’est le cas des mesures prises en faveur des femmes, des
handicapés, des personnes âgées…

En Côte d’Ivoire, la loi n°98-594 du 10 novembre 1998 d’orientation en faveur


des personnes handicapées octroie le bénéfice de l’obligation d’emploi aux
travailleurs reconnus handicapés par la commission technique d’orientation et de
reclassement professionnels.

Paragraphe II : L’égalité de rémunération entre homme et femme

La lutte contre la discrimination dans l’emploi et la profession tend également à


assurer l’égalité de rémunération entre l’homme et la femme travailleurs pour un
travail d’égale valeur. C’est le sens de la Convention n°100 sur l’égalité de
rémunération.

En effet, l’on observe dans de nombreux Etats que le salaire de la femme est
souventes fois inferieur à celui de l’homme alors qu’ils exercent le même
travail.

Toutefois, certaines inégalités de salaires sont admises parce que fondées sur des
critères objectifs et non sur le sexe. C’est le cas des critères relatifs à
l’ancienneté, à l’éducation, aux qualifications, à l’expérience, à la productivité…

7
SECTION II : LIBERTE SYNDICALE ET DROIT DE NEGOCIATION
COLLECTIVE

Paragraphe I : La notion de liberté syndicale et de droit de négociation collective

A. La liberté syndicale

1. Le droit des travailleurs et des employeurs, sans distinction


d’aucune sorte, de constituer des organisations de leur choix et
de s’y affilier et le droit au libre fonctionnement de ces
organisations syndicales

a. Le droit des travailleurs et des employeurs, sans


distinction d’aucune sorte, de constituer des
organisations de leur choix et de s’y affilier

L'article 2 de la convention no 87 dispose que "les travailleurs et les employeurs,


sans distinction d'aucune sorte, ont le droit de constituer des organisations de
leur choix, ainsi que celui de s'affilier à ces organisations, ...". En retenant les
termes "sans distinction d'aucune sorte", la Conférence internationale du Travail
a souligné que le droit syndical doit être garanti sans distinction ou
discrimination d'aucune nature quant à la profession, au sexe, à la couleur, à la
race, aux croyances, à la nationalité et à l'opinion politique. Le droit syndical
doit donc être considéré comme le principe général dont la seule exception est
prévue à l'article 9 de la convention, qui permet aux Etats de déterminer dans
quelle mesure les garanties prévues par la convention s'appliqueront aux forces
armées et à la police.

b. Le droit au libre fonctionnement des organisations


syndicales

 Elaboration des statuts et règlements administratifs

 Election des représentants

 Destitution des dirigeants ou des organes exécutifs


syndicaux

 Gestion des organisations

 Inviolabilité des locaux, de la correspondance et des


communications

8
 Les activités et programmes d'action

2. Le droit de grève
Le droit de grève constitue certes un droit fondamental, mais non pas une fin en
soi. La grève traduit l'échec de la négociation collective des conditions de
travail.

Le droit de grève constitue une des modalités essentielles d’exercice de la liberté


syndicale. Il fait partie des activités des organisations syndicales au sens de
l’article 3.1 de la Convention n°87.

Même les travailleurs en période d’essai ne sauraient être privés de ce droit 10.

Cependant, le droit de grève, bien que fondamental, n’est pas un droit absolu ;
« non seulement il peut exceptionnellement faire l’objet d’une interdiction
générale », mais « il peut également être encadré par une réglementation qui
impose des modalités ou des restrictions » dans son exercice.

Ces limitations du droit de grève ne doivent concerner que les « fonctionnaires


qui exercent des fonctions d’autorité au nom de l’Etat »11 ou « les services
essentiels » c’est-à-dire « les services dont l’interruption mettrait en danger,
dans l’ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la
santé de la personne »12.

Les instruments de l'OIT constituent les sources primaires de droit en la matière.


Toutefois, le droit de grève est également reconnu par plusieurs autres
instruments internationaux et régionaux ainsi que par la législation et la pratique
nationales.

3. La dissolution et la suspension des organisations syndicales

L'article 4 de la convention n°87 dispose que les organisations de travailleurs et


d'employeurs ne sont pas sujettes à dissolution ou à suspension par voie
administrative. L'article 6 étend cette garantie aux fédérations et confédérations
de syndicats. Les mesures administratives de cet ordre constituent une des
formes les plus extrêmes d'ingérence des autorités publiques dans les activités
des organisations syndicales puisqu'elles mettent fin à l'exercice de leurs
activités.

10
Recueil CLS, 1985, paragr.389.
11
Etude d’ensemble CE, 1994, paragr.158.
12
Recueil CLS, paragr. 394 et 400 ; Etude d’ensemble, 1983, paragr. 214.

9
B. La notion de droit de négociation collective

La convention (no 98) sur le droit d'organisation et de négociation collective,


adoptée en 1949, aborde sous deux angles différents la liberté syndicale. Elle
tend premièrement à protéger l'exercice du droit syndical par les travailleurs face
aux employeurs ainsi qu'à protéger les organisations de travailleurs et les
organisations d'employeurs les unes à l'égard des autres (art. 1 à 3). En deuxième
lieu, pour assurer la promotion de la négociation collective, la convention met
l'accent sur l'autonomie des parties et le caractère volontaire des négociations
(art. 4).

1. Interdiction de tous actes de discrimination antisyndicale

L'article 1 de la convention no 98 dispose, en termes généraux, que "les


travailleurs doivent bénéficier d'une protection adéquate contre tous actes de
discrimination tendant à porter atteinte à la liberté syndicale en matière
d'emploi".

Cette protection est particulièrement nécessaire en ce qui concerne les dirigeants


et délégués syndicaux, étant donné que, pour pouvoir remplir leurs fonctions en
pleine indépendance, ceux-ci doivent avoir la garantie qu'ils ne subiront pas de
préjudice en raison du mandat syndical qu'ils détiennent.

La commission considère que la protection prévue par la convention couvre tant


la période d'embauche que celle de l'emploi, y compris le moment de la
cessation de la relation de travail.

 Licenciements économiques

 Procédures et sanctions

 Preuve

 Indemnisation

1. Interdiction de tous actes d’ingérence

Aux termes de l'article 2.1 de la convention, "les organisations de travailleurs et


d'employeurs doivent bénéficier d'une protection adéquate contre tous actes
d'ingérence des unes à l'égard des autres, soit directement, soit par leurs agents
ou membres, dans leur formation, leur fonctionnement et leur administration".
Le paragraphe 2 du même article décrit ensuite à titre d'exemple certains actes
particuliers d'ingérence "tendant à provoquer la création d'organisations de

10
travailleurs dominées par un employeur ou une organisation d'employeurs, ou à
soutenir des organisations de travailleurs pas des moyens financiers ou
autrement, dans le dessein de placer ces organisations sous le contrôle d'un
employeur ou d'une organisation d'employeurs". La convention complète ainsi
les droits syndicaux reconnus aux travailleurs individuels par la garantie du libre
exercice du droit syndical des organisations de travailleurs. Elle assure
également aux organisations d'employeurs la même protection qu'aux
organisations de travailleurs.

2. Promotion de procédures de négociations volontaires

L'article 4 de la convention no 98 dispose que "des mesures appropriées aux


conditions nationales doivent, si nécessaire, être prises pour encourager et
promouvoir le développement et l'utilisation les plus larges des procédures de
négociation volontaire de conventions collectives entre les employeurs et les
organisations d'employeurs, d'une part, et les organisations de travailleurs,
d'autre part, en vue de régler par ce moyen les conditions d'emploi". Cette
disposition comporte deux éléments essentiels : l'action des pouvoirs publics
afin de promouvoir la négociation collective, et le caractère volontaire de la
négociation qui implique l'autonomie des parties.

SECTION III : ELIMINATION DE TOUTE FORME DE TRAVAIL


FORCE OU OBLIGATOIRE

En principe, le travail forcé ou obligatoire est presque universellement proscrit.


Les deux conventions de l’OIT l’abolissant sont les conventions n°29 et 105.

Paragraphe I : La convention n°29 sur le travail forcé, 1930

A. Définition du travail forcé ou obligatoire

Aux termes de l’article 2, paragraphe 1 de la convention n°29 de l’OIT, le travail


forcé ou obligatoire désigne « Tout travail ou service exigé d’un individu sous la
menace d’une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s’est pas offert
de plein gré ». Cette définition énonce 3 aspects qu’il convient d’élucider.

B. Exclusion du champ d’application de la convention de certains travaux

Aux termes de la convention n°29, certaines formes de services obligatoires sont


exclues de la notion de travail forcé ou obligatoire. Il s’agit de :

11
 Tout travail ou service exigé en vertu des lois sur le
service

militaire obligatoire et affecté à des travaux d’un caractère purement militaire ;

 Tout travail ou service faisant partie des obligations


civiques

normales des citoyens d’un pays ;

 Tout travail ou service exigé d’un individu comme

conséquence d’une condamnation prononcée par une décision judiciaire, à la


condition que ce travail ou service soit exécuté sous la surveillance ou le
contrôle des autorités publiques et que ledit individu ne soit pas concédé ou mis
à la disposition de particuliers, compagnies ou personnes morales privées.

 Tout travail ou service exigé dans les cas de force


majeure,

c’est-à-dire dans les cas de guerre, de sinistres ou menace de sinistres tels


qu’incendies, inondations, famine, tremblement de terre, épidémies, épizooties
violentes, invasions d’animaux, d’insectes ou de parasites végétaux nuisibles, et
en général toutes circonstances mettant en danger ou risquant de mettre en
danger la vie ou les conditions normales d’existence de l’ensemble ou d’une
partie de la population ;

 Les menus travaux de village, c’est-à-dire les travaux

exécutés dans l’intérêt direct de la collectivité par les membres de celles-ci,


travaux qui de ce chef, peuvent être considérés comme des obligations civiques
normales incombant aux membres de la collectivité, à condition que la
population elle-même ou ses représentants directs aient le droit de se prononcer
sur le bien fondé de ces travaux.

Paragraphe II : La convention n°105 sur l’abolition du travail forcé, 1957

Selon l’article 1er, tout membre de l’OIT qui ratifie la présente convention
s’engage à supprimer le travail forcé ou obligatoire et à n’y recourir sous aucune
forme :

 En tant que mesure de coercition ou d’éducation politique

12
ou en tant que sanction à l’égard des personnes qui ont ou expriment certaines
opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l’ordre
politique, social ou économique établi ;

 En tant que méthode de mobilisation et d’utilisation de la

main d’œuvre à des fins de développement économique ;

 En tant que mesure de discipline du travail ;

 En tant que punition pour avoir participé à des grèves ;

 En tant que mesure de discrimination raciale, sociale,

nationale ou religieuse.

A. Portée de la Convention n°105 par rapport à la Convention n°29 et au


travail pénitentiaire obligatoire

La convention n°105 ne constitue pas une révision de la convention n°29, mais


elle est plutôt destinée à la compléter.

Si la Convention 29 prévoit l’abolition générale du travail obligatoire, sous


certaines exceptions, la Convention n°105 ne requiert l’abolition du travail forcé
que dans les 5 cas énumérés par l’article 1er.

La convention n°105 ne s’oppose pas à ce que du travail forcé ou obligatoire soit


exigé d’un délinquant de droit commun reconnu coupable bien qu’il soit astreint
au travail sous la menace d’une peine et contre son gré. Par contre, si une
personne est, de quelque manière que ce soit, astreinte au travail parce qu’elle a
ou exprime certaines opinions politiques ou parce qu’elle a manqué à la
discipline du travail ou participé à une grève, il y a travail forcé.

Selon les organes de contrôle de l’OIT, si dans le cas des délinquants de droit
commun, le travail pénitentiaire est destiné à la rééducation et à la réinsertion
sociale, ce même besoin n’existe pas quand il s’agit de personnes condamnées
pour leur opinion ou pour avoir pris part à une grève.

SECTION IV : ABOLITION EFFECTIVE DU TRAVAIL DES ENFANTS

Paragraphe I : Fixation d’un âge minimum d’admission à l’emploi ou au travail

13
Une des méthodes les plus efficaces pour s’assurer que les enfants ne
commencent pas à travailler trop jeunes est de déterminer l’âge légal auquel ils
sont susceptibles d’être employés ou autorisés à travailler.

Cet âge minimum ne devra pas être inférieur à l’âge auquel cesse la scolarité
obligatoire, c’est-a-dire á 15 ans. Pour les pays en développement, cet âge peut
être exceptionnellement fixé á 14 ans.

Pour les travaux dangereux, l’âge minimum ne doit pas être inférieur á 18 ans.
C’est seulement sous certaines conditions que les enfants de 16 ans peuvent les
faire.

Quant aux travaux légers, des enfants de 13 á 15 ans sont autorisés á les
exécuter, pour autant que ceux-ci ne portent pas préjudice à leur santé, leur
sécurité, leur assiduité scolaire ou à leur participation à des programmes de
formation professionnelle. Cependant, dans les pays en développement, les
enfants de 12 á 14 ans peuvent être autorisés á faire des travaux légers.

Paragraphe II : Interdiction et élimination des pires formes de travail des enfants

Alors que le travail des enfants prend de nombreuses formes différentes, la


priorité est donnée à l’élimination immédiate des pires formes de travail des
enfants, telles que définies par l’article 3 de la Convention nº 182 de l’OIT :

 Toutes les formes d'esclavage ou pratiques analogues, telles que la vente


et la traite des enfants, la servitude pour dettes et le servage ainsi que le
travail forcé ou obligatoire, y compris le recrutement forcé ou obligatoire
des enfants en vue de leur utilisation dans des conflits armés ;
 L'utilisation, le recrutement ou l'offre d'un enfant à des fins de
prostitution, de production de matériel pornographique ou de spectacles
pornographiques ;
 L'utilisation, le recrutement ou l'offre d'un enfant aux fins d'activités
illicites, notamment pour la production et le trafic de stupéfiants, tels que
les définissent les conventions internationales pertinentes ;
 Les travaux qui, par leur nature ou les conditions dans lesquelles ils
s'exercent, sont susceptibles de nuire à la santé, à la sécurité ou à la
moralité de l'enfant.
Le travail qui met en danger le développement physique, mental ou bien-être

14
moral de l'enfant, soit par sa nature ou par les conditions dans lesquelles il est
effectué, est dénommé « travail dangereux ».

Des orientations destinées aux gouvernements sur certaines activités


dangereuses du travail des enfants, qui devraient être interdites, sont données
dans la Recommandation nº190. Cette Recommandation, qui accompagne la
convention nº 182, concerne l'interdiction des pires formes de travail des enfants
et l'action immédiate en vue de leur élimination.

En déterminant les types de travail visés à l'article 3 d) de la Convention et leur


localisation, selon la Recommandation, il faudrait prendre en considération :

 Les travaux qui exposent les enfants à des sévices physiques,


psychologiques ou sexuels ;
 Les travaux qui s'effectuent sous terre, sous l'eau, à des hauteurs
dangereuses ou dans des espaces confinés ;
 Les travaux qui s'effectuent avec des machines, du matériel ou des outils
dangereux, ou qui impliquent de manipuler ou porter de lourdes charges ;
 Les travaux qui s'effectuent dans un milieu malsain pouvant, par exemple,
exposer des enfants à des substances, des agents ou des procédés
dangereux, ou à des conditions de température, de bruit ou de vibrations
préjudiciables à leur santé ;
 Les travaux qui s'effectuent dans des conditions particulièrement
difficiles, par exemple pendant de longues heures, ou la nuit, ou pour
lesquels l'enfant est retenu de manière injustifiée dans les locaux de
l'employeur.

Tous ces éléments doivent guider chaque Etat dans la détermination de la liste
des travaux dangereux qu’il s’oblige á faire périodiquement, au vu l’article 4 de
ladite Convention.

CHAPITRE III : MECANISMES DE CONTROLE DE L’APPLICATION


DES DROITS ET PRINCIPES DE L’OIT

15
Des mécanismes internationaux ont été élaborés dans le cadre de l’OIT à l’effet
de rendre plus efficace le contrôle de l’effectivité des conventions relatives aux
droits et principes au travail.

Ces mécanismes internationaux sont fondés sur les rapports des Etats membres
et sur les réclamations et plaintes dont ceux-ci peuvent faire l’objet.

SECTION I : Les Rapports des Etats membres


Selon l’article 22 de la Constitution de l’OIT, chacun des Etats membres
s’oblige à présenter au BIT un rapport annuel sur les mesures prises par lui pour
mettre en pratique les conventions auxquelles il a adhéré.

Le rapport annuel que l’Etat devra fournir au BIT, sera résumé par le Directeur
Général de cet organe permanent de l’OIT avant d’être présenté à la prochaine
session de la Conférence Générale des Représentants des Etats membres.

En pratique, c’est une commission d’experts indépendants composée d’une


vingtaine de personnalités qui examine le rapport avant sa soumission à la
Conférence Internationale du travail composée de délégués des gouvernants, des
employeurs et des travailleurs. L’Etat s’obligera à fournir copie de son rapport
aux organisations des employeurs et des travailleurs nationaux qui font partie de
cette Conférence et qui ont aussi le droit de fournir des informations. Si
l’obligation du dépôt du rapport n’incombe à l’Etat qu’à partir de l’entrée en
vigueur de la convention, il est tenu, dès la ratification, de prendre des mesures
immédiates et efficaces pour assurer le respect des droits et principes consacrés
par lesdites Conventions.

Toutefois, l’expérience des autres conventions internationales, hormis celles de


l’OIT, a bien montré que les rapports étatiques sont des moyens de contrôle dont
l’efficacité est considérablement limitée.

16
Aussi, l’OIT a-t-elle adjoint à ce mécanisme les procédures de réclamation et de
plaintes pour garantir l’effectivité de ses conventions.

SECTION II : Les procédures de réclamation et de plaintes


A. La procédure de Réclamation
La ratification des conventions fondamentales de l’OIT par un Etat donne le
droit à toute organisation professionnelle des travailleurs ou d’employeurs de cet
Etat de saisir le BIT si elle estime que les pouvoirs publics n’assurent pas de
manière satisfaisante le respect desdites conventions. Cette réclamation pourra
être transmise par le Conseil d’administration au gouvernement de l’Etat
violateur et celui-ci pourra être invité à faire la lumière sur sa mise en cause. Si
aucune mise au point n’est faite par les autorités gouvernementales dans un délai
raisonnable ou si la déclaration faite par elles ne satisfait pas le conseil
d’administration, ce dernier pourra rendre publique la réclamation reçue et le cas
échéant, la réponse du gouvernement.

L’originalité et l’intérêt de cette procédure est de permettre à une personne


privée de déclencher un mécanisme international de contrôle qui obligerait, si le
conseil d’administration l’estime utile, le gouvernement à s’expliquer et
exposant ce dernier à une explication de la réclamation et de la réponse fournie,
sur décision du conseil d’administration.

Parallèlement à la réclamation, il existe aussi une procédure de plainte.

B. La procédure de Plainte
Il s’agit du droit qu’a un quelconque Etat partie à l’OIT de saisir le BIT d’une
plainte contre un autre Etat partie qui, à son avis, n’assure pas suffisamment
l’exécution d’une convention de l’OIT. Le conseil d’administration peut, s’il
l’estime utile, et avant de saisir une commission d’enquête, se mettre en rapport
avec le gouvernement qui pourra être invité à se justifier. Si le conseil
d’administration ne juge pas nécessaire de communiquer la plainte au

17
gouvernement mis en cause ou si, cette communication ayant été faite, aucune
réponse satisfaisante n’a été donnée dans un délai raisonnable, le conseil
d’administration pourra former une commission d’enquête qui aura pour mission
d’examiner la question litigieuse et de faire un rapport. Dès cet instant, chaque
Etat partie intéressé ou non par la plainte s’oblige à mettre à la disposition de la
commission toutes informations utiles à l’instruction du litige. Au terme de son
instruction, la commission d’enquête rédige un rapport dans lequel elle fait des
recommandations sur les mesures à prendre pour donner satisfaction au
gouvernement plaignant et les délais dans lesquels celles-ci doivent prendre
effet. Il convient de préciser que ces recommandations peuvent comporter des
sanctions économiques contre l’Etat mise en cause. Le Directeur Général du BIT
est chargé de publier ce rapport non sans l’avoir communiqué au conseil
d’administration et aux Etats en conflit. Ceux-ci ont trois mois pour signifier au
Directeur Général s’ils acceptent ou non les recommandations contenues dans le
rapport de la commission et au cas où ils ne les acceptent pas, s’ils désirent
soumettre le différend à la Cour Internationale de Justice. Cette Cour a
compétence pour confirmer, amender ou annuler les recommandations de la
commission d’enquête. Et sa décision n’est susceptible d’aucun recours. Si le
gouvernement qui succombe ne se conforme pas aux recommandations de la
commission d’enquête ni à la décision de la cour, le conseil d’administration
peut recommander à la Conférence Générale des représentants des Etats
membres toutes mesures qu’il juge nécessaires pour assurer l’exécution desdites
recommandations. Cependant, le gouvernement convaincu de violation de la
convention peut, à tout moment, informer le conseil d’administration des
mesures prises pour se conformer soit aux recommandations de la commission
d’enquête soit à celles contenues dans la décision de la cour. Et il peut lui
demander de vérifier la sincérité de ses déclarations par une autre commission
d’enquête. S’il se révèle que ces mesures sont réelles, le conseil d’administration
recommandera que les sanctions prises soient rapportées.

18
En tout état de cause, cette procédure peut être également engagée par le conseil
d’administration soit d’office soit sur plainte d’un délégué à la conférence.

Comme on peut le constater, les mécanismes de contrôle institués par l’OIT


pour surveiller l’application de ses conventions sont d’une singularité sans
pareille et d’une efficacité sans précédent. Car pour l’application des
conventions ratifiées, depuis 1969, l’OIT a institué une procédure de contact
direct entre un représentant du Directeur Général du BIT et les gouvernements.
En effet à la demande ou avec l’accord du gouvernement intéressé, un
représentant du Directeur Général se rend dans le pays pour examiner la
situation litigieuse avec les représentants gouvernementaux. Il doit aussi prendre
contact avec les organisations d'employeurs et de travailleurs. Cette procédure
est étendue aujourd'hui, en raison des bons résultats obtenus, aux problèmes de
l'envoi des rapports périodiques dus et aux obstacles à la ratification d'une
convention de l’OIT.

19

Vous aimerez peut-être aussi