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APPRENTISSAGE ORGANISATIONNEL ET CONTRÔLE DE GESTION :

UNE LECTURE POSSIBLE DE L'ABC/ABM ?

Lise Arena et Guy Solle

Association Francophone de Comptabilité | Comptabilité - Contrôle - Audit

2008/3 - Tome 14
pages 67 à 85

ISSN 1262-2788
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Pour citer cet article :


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Arena Lise et Solle Guy, « Apprentissage Organisationnel et Contrôle de Gestion : Une lecture possible de
l'ABC/ABM ? »,
Comptabilité - Contrôle - Audit, 2008/3 Tome 14, p. 67-85. DOI : 10.3917/cca.143.0067
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UNE LECTURE POSSIBLE DE L’ABC/ABM ? 67
reçu février 2008 / accepté octobre 2008

Apprentissage
Organisationnel
et Contrôle de Gestion :
Une lecture possible
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de l’ABC/ABM ?
Organisational Learning
and Management Control :
An alternative Interpretation
of the ABC/ ABM
Lise ARENA* et Guy SOLLE**

Résumé Abstract
Cet article consiste à utiliser la conception This article consists of using the Penrosian
« penrosienne » de l’apprentissage organisa- approach of organisational learning and know-
tionnel et de la connaissance pour ouvrir des ledge to pave the way for future research in the
pistes de recherche en contrôle organisation- fields of organizational control and management
nel et contrôle de gestion. L’idée principale control. The main idea of this contribution lies in
réside dans la compréhension des systèmes understanding management control systems more

* Attachée temporaire d’enseignement et de recherche, Université de Nice Sophia-Antipolis


** Professeur, Université Paul-Verlaine de Metz

COMPTABILITÉ – CONTRÔLE – AUDIT / Numéro thématique – Décembre 2008 (p. 67 à 86)


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de contrôle de gestion non comme des outils as cognitive and social technologies than as pure
objectifs mais davantage comme des techno- objective tools. From this standpoint, the main
logies de nature cognitive et sociale. Le pro- issue of developing more sophisticated methods of
blème de l’élaboration de méthodes plus per- management control is not only concerned with
fectionnées de contrôle de gestion ne relève mastering accounting techniques and tools, but
pas uniquement de techniciens maîtrisant les also with interactions between the different mem-
outils comptables, mais aussi d’une interaction bers of the firm. These interactions are themselves
avec les acteurs de l’entreprise directement directly affected by the appropriation and evolu-
concernés par les processus d’appropriation, tion processes of these methods. This approach
et d’évolution de ces méthodes. Cette appro- requires an effort from the firm members who
che requiert un effort d’autonomisation des have to learn how to become increasingly autono-
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acteurs de l’entreprise sans que celui-ci soit mous, without becoming incompatible with

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incompatible avec l’existence d’un processus entrepreneurial behaviour orientation within the
d’orientation entrepreneuriale des comporte- main managerial teams. As regard to account-
ments des équipes managériales. Au niveau des ing methods, this approach highlights the weak-
méthodes comptables, cette approche souligne nesses of traditional management accounting as
les insuffisances de la comptabilité de gestion a response to a Penrosian approach of the firm.
traditionnelle, pour répondre à une approche Hence, our contribution underlines the improve-
de l’entreprise fondée sur une orientation pen- ment, but also the limits of the ABC (Activity
rosienne. Dans ce contexte, notre contribution Based Costing) method and provides an explana-
souligne les avancées, mais aussi les limites de la tion of the ABM (Activity Based Management)
méthode ABC (Activity Based Costing) et pro- as a managerial approach. The ABM thus seems
pose une compréhension de l’ABM (Activity more likely to reflect the combination and coor-
Based Management) en sa qualité d’approche dination between the various activities of an orga-
managériale. L’ABM semble ainsi plus apte à nisation, with particular emphasis on processes
tenir compte des combinaisons et de la coor- management.
dination entre les différentes activités d’une
organisation, en mettant notamment l’accent
sur la gestion des processus.

MOTS CLÉS. APPROCHE PENROSIENNE – ABC/ KEYWORDS. PENROSIAN APPROACH – ABC/


ABM – CONNAISSANCE – COORDINATION ABM – KNOWLEDGE – COORDINATION

Correspondance : Lise ARENA Guy SOLLE


Université de Nice Sophia-Antipolis Université Paul-Verlaine Metz,
GREDEG, CNRS, UMR 6227 UFR ESM-IAE
250, rue Albert Einstein, Bat. 2 Laboratoire CEREFIGE
06560 SOPHIA-ANTIPOLIS VALBONNE 3, Place E. Branly
l-arena@gredeg.cnrs.fr 57070 METZ Technopole
gsol@orange.fr

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Introduction
L’objectif de notre contribution consiste à utiliser une conception « penrosienne » de l’apprentissage
organisationnel et de la connaissance pour ouvrir des pistes de recherche en contrôle organisationnel
et plus spécifiquement en contrôle de gestion. L’idée principale réside dans la compréhension des
systèmes de contrôle de gestion non comme des outils objectifs permettant d’améliorer la qualité des
informations relatives aux performances de chacune des activités ou des fonctions de l’entreprise,
mais comme des technologies de nature cognitive et sociale dont les agents doivent faire l’apprentis-
sage dans le cadre des relations qu’ils nouent au sein de l’organisation.
Si l’on admet ce point de vue, l’élaboration ou l’évolution de méthodes en contrôle de gestion ne
relève pas uniquement de l’activité de techniciens maîtrisant, par exemple, des outils comptables et
des systèmes d’information. Ces méthodes se trouvent façonnées par leur interaction avec les acteurs
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de l’entreprise directement concernés par les processus d’appropriation, d’interprétation et d’évolu-
tion de ces méthodes. Dès lors, cette élaboration requiert un effort d’autonomisation des acteurs de
l’entreprise sans que celui-ci soit incompatible avec l’existence d’un processus d’orientation entrepre-
neuriale des comportements des équipes managériales.
Notre contribution est constituée de deux sections composées de deux sous parties.
La première partie de notre travail porte sur la relation entre contrôle de gestion et organisation.
Dans un premier temps, nous rappellerons la conception « penrosienne » de l’organisation comme
lieu d’articulation de processus d’apprentissages individuels. Cette conception repose sur une appro-
che de la connaissance distincte de celle d’information et sur une interprétation particulière des
relations entre apprentissages individuels et apprentissage collectif. Elle débouche sur une vision spé-
cifique de la technologie entendue comme un ensemble de savoirs techniques et de savoir-faire fondés
sur des processus de nature cognitive.
Dans un second temps, nous assimilerons les systèmes de contrôle de gestion entendus au sens
large à des technologies au sens « penrosien » telles que nous venons de les définir. Ainsi, ces systè-
mes ne se réduisent pas à des ensembles d’outils objectifs, mais supposent d’être mis en relation avec
les dispositifs organisationnels qui régissent les relations entre acteurs au sein de l’entreprise. Cette
appréhension modifie évidemment de manière substantielle la vision traditionnelle du contrôle de
gestion fondée sur les notions de hiérarchie et d’agencement de type mécanique.
La deuxième partie de notre contribution consiste à appliquer l’approche retenue dans la première
partie au cas particulier de la méthode ABC (Activity Based Costing) en comptabilité de gestion et de
ses apports potentiels pour le pilotage des processus opérationnels.
Dans un premier temps, nous rappelons que malgré les progrès qu’elle a apportés, cette méthode,
en privilégiant les notions de calculs de coûts et d’indicateurs de contrôle, continue à se situer à
un niveau purement instrumental. Or, on sait que l’un des apports méthodologiques essentiels de
Penrose a été le dépassement du cadre du déterminisme technologique (cf. par exemple le débat entre
Penrose et Alchian à propos des analogies biologiques). Il s’agit donc ici, dans cette perspective, de
mettre en évidence les avancées mais aussi les limites de la méthode ABC.
Dans un deuxième temps, il s’agira de montrer comment il est possible de faire évoluer la nature et
l’utilisation de cette méthode, afin de la concevoir, non seulement comme un ensemble d’outils, mais

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aussi comme une pratique technologique liée à l’usage et comme support d’un pilotage des processus
opérationnels qui prendrait en compte les interactions entre les activités. C’est cette pratique l’on
pourrait qualifier d’ABM (Activity Based Management).

1. Contrôle de gestion et évolution


du concept d’organisation
Cette première partie constitue le cadre théorique de notre contribution. L’idée est de montrer que le
contrôle de gestion ne peut pas se réduire uniquement a une approche instrumentale composée d’un
ensemble d’outils objectifs, qui permettrait surtout de faire face a des décisions programmables, mais
doit constituer un système d’informations assimilé à une technologie particulière plus ou moins bien
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apprise et interprétée différemment par chaque acteur de l’entreprise.
Le contrôle de gestion correspond à l’articulation d’un système d’informations « au service de
la décision afin de permettre une intervention des agents avant, pendant et après l’action » (Teller,
1999). Ce dernier est un « […] système global d’information interne à l’entreprise, il permet la cen-
tralisation, la synthèse et l’interprétation de l’ensemble des données figurant la performance de cha-
cune des activités ou de chacune des fonctions de l’entreprise. Outre le fait qu’il doit contribuer à la
reconfiguration de l’entreprise, le contrôle de gestion remplit sa fonction d’interface entre le référen-
tiel interne et le marché » (Ibid.).
En d’autres termes, le contrôle de gestion participe à la modélisation des critères de performance
et s’adosse à la modélisation des dispositifs organisationnels. L’évolution constante de ces derniers
met en exergue la maintenance de critères de cohérence et de pertinence de l’instrumentation de
gestion au service des acteurs. Or, les techniques usuelles du contrôle se sont développées au départ
pour répondre à des besoins exprimés dans un contexte particulier1 caractérisé, au demeurant, par
la stabilité et la prédictibilité des activités productives. Favoriser une perspective instrumentale du
contrôle de gestion a permis d’adosser ses dispositifs de manière importante à la comptabilité des
coûts (devenue au fil du temps la comptabilité de gestion) et aux pratiques budgétaires.
Le contrôle, dans une vision normative, consiste à limiter les écarts entre le réel et le prééta-
bli. Or, les évolutions de la compréhension de la stratégie, de l’organisation et de sa performance
conduisent à des changements de représentation (Rouby, 2003). La perception de l’entreprise s’af-
firme désormais dans une approche en termes de transversalité ce qui conduit au renforcement d’un
paradoxe apparent : laisser plus d’autonomie aux acteurs tout en orientant leurs comportements.
Cette approche et cette perception de l’entreprise n’est pas nouvelle et s’inscrit dans une perspective
théorique dont nous pouvons trouver les racines dans la Théorie de la Croissance de la Firme publiée
par Édith Penrose en 1959.

1.1. Du contrôle imposé au contrôle partagé


R.N. Anthony, en 1965, présentait le contrôle de gestion comme le processus par lequel les managers
s’assurent que les ressources sont obtenues et utilisées avec efficacité et efficience dans l’accomplisse-
ment des objectifs de l’organisation. Quelques années plus tard, l’auteur le définit comme le processus

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par lequel les managers influencent d’autres membres de l’organisation pour mettre en œuvre les
stratégies de l’organisation (Anthony, 1988 ; Anthony et Govindarajan, 1997).
Cette évolution dans la compréhension du contrôle de gestion par Anthony reflète l’évolution des
structures organisationnelles et de l’analyse de l’entreprise dans le temps. Pourtant, presque trente ans
avant qu’Anthony n’expose sa deuxième perception du contrôle de gestion, Édith Penrose (1959) avait
anticipé cette compréhension de l’entreprise dans sa Théorie de la Croissance de la Firme. En effet, si la
contribution scientifique d’Édith Penrose est souvent associée au courant anglo-saxon de la resource-
based view2 – puisque l’auteur estime qu’« une firme est une collection de ressources » (Penrose,
1959 : 773), et que la croissance des organisations est notamment le résultat de l’accumulation de
ressources idiosyncrasiques de la firme – il serait erroné de réduire l’apport théorique de Penrose à une
approche purement centrée sur le concept de ressources.
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L’entreprise chez Penrose est, en effet, beaucoup plus complexe, décentralisée, participative et

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apprenante que dans la définition qui en est donnée par son interprétation usuelle. Toute la théorie
développée par Penrose repose sur ce qu’il nous semble justifié d’appeler une conception cognitive
de l’entreprise. L’opportunité productive devient la représentation que se fait chaque décideur de
toutes les possibilités productives que la firme est capable de voir et d’exploiter. Cette explication de
l’entreprise dépasse la vision mécaniste de l’entreprise qui suppose que les preneurs de décision possè-
dent tous des caractéristiques cognitives homogènes, sont interchangeables et prennent des décisions
clairement objectives.
Cette nouvelle conception de l’entreprise a directement amené la nature du contrôle à se modifier.
L’évolution du contrôle de gestion et le changement de représentation de l’entreprise depuis ces
dernières années sont notamment observés par F. Oriot (2000) qui décrit le contrôle de gestion
comme « descendu très bas » dans les organisations ces dernières années, atteignant les niveaux opé-
rationnels en raison d’un contexte économique défavorable. Le contrôle doit rapidement s’adapter à
cette nouvelle conception de l’entreprise et comme Penrose l’avait préconisé très justement aupara-
vant, le contrôle de gestion n’est alors plus l’apanage d’un expert « surveillant évaluateur » au service
d’une hiérarchie et « le pilotage apparaît comme une chaîne complexe de jugements individuels et
collectifs dont rien n’assure qu’elle ait un concepteur d’ensemble, un architecte individualisé qui tour-
nerait les manivelles » (Ecosip, 1996).
Comme le note F. Lacroux (1999), de nombreux outils ne modélisent souvent les utilisateurs
qu’au travers d’indicateurs physiques et visent à la découverte d’une performance objective. Ces outils
véhiculent le postulat de « vérité objective » et les modèles sont forgés sans implication du tissu orga-
nisationnel auquel ils se rapportent. Ces indicateurs de performance correspondent bien trop sou-
vent à l’évaluation du degré d’efficience de l’entreprise, qui ne parait pas suffisant pour mesurer sa
performance globale. Une performance particulière de l’entreprise qui a généralement trait à l’un des
services de l’organisation (ex : la rentabilité financière) ne permet pas de rendre compte de la perfor-
mance globale de l’organisation.
Ainsi, dans une perspective de conception d’un système de contrôle4 ou de son évolution, toute
analyse préalable pose l’interrogation d’une définition spécifique appropriée de ce concept polymorphe
qu’est la performance5 et de ces déterminants, dans un contexte organisationnel donné. La suite de
notre analyse aura notamment pour objectif de réfléchir a des indicateurs alternatifs de performance a
ceux les plus traditionnels et purement comptables encore utilises dans la plupart des entreprises.

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A. Burlaud (1988) considère le contrôle de gestion comme l’un des rouages essentiels de la régu-
lation interne et du pilotage. Il vise à mettre sous tension les ressources humaines de l’organisation
et à rendre cohérentes les activités des différents acteurs au sein de l’entreprise afin qu’elles concou-
rent à la réalisation de l’objectif commun. C’est un contrôle finalisé qui s’appuie sur un ensemble
de techniques et l’autorité qui le met en place doit avoir des objectifs qu’elle doit pouvoir et vouloir
communiquer ; c’est un langage qui porte la marque de l’histoire des mots et qui s’oppose à d’autres
formes de contrôle (Burlaud et Simon, 1997).
Cette vision particulière du contrôle de gestion met l’accent sur l’importance de représenta-
tions communes et partagées des objectifs par les acteurs de l’entreprise. Il convient à nouveau de
relier cette idée à l’approche penrosienne, qui accorde une place centrale aux représentations pro-
pres (contextualisées ou subjectives) des membres de l’organisation. Celle-ci l’exprime clairement :
« Si l’on souhaite analyser la croissance de la firme, il est bon de partir de l’analyse de la firme plutôt
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que de l’environnement, et d’étudier ensuite l’effet de certains types de conditions environnemen-
tales. Si nous parvenons à découvrir ce qui détermine les idées de l’entrepreneur à propos de ce que
la firme peut faire et ne pas faire, c’est-à-dire ce qui détermine la nature et la portée de l’opportunité
productive “subjective” de la firme, nous pouvons au moins savoir où regarder si nous voulons expli-
quer ou prévoir les actions de firmes particulières6. »
Penrose reconnaît donc que la croissance des firmes est rendue possible par l’existence d’une
image, représentation propre au manager ou représentation cognitive commune de la réalité com-
plexe adoptée par les membres de l’équipe managériale. Le concept d’image met également en avant
le fait même qu’à toute situation doit être conféré un sens7. L’image, propre à chaque individu, appa-
raît donc comme l’incarnation de la connaissance. Elle dépend du présent et de son interprétation par
l’acteur, de la situation, ainsi que des valeurs et des objectifs de l’individu. Le processus d’élaboration
de ces images est fondamental pour la compréhension des processus cognitifs, et par conséquent de
celle de l’activité productive.
Dans cette interprétation cognitive de la théorie penrosienne de l’organisation, le fameux « effet
Penrose » peut alors s’apprécier comme suit : le taux de croissance de la firme est en réalité limité
par la capacité cognitive des cadres des services managériaux. L’apprentissage cognitif est donc lar-
gement présent dans la théorie d’Édith Penrose. Si le concept est utilisé essentiellement à propos
de l’apprentissage des fonctions de la direction générale, il est aussi présent au travers de l’analyse
des processus internes à l’entreprise par lesquels se créent de nouveaux services productifs. La vision
penrosienne de croissance de l’entreprise est donc intimement dépendante de l’extension progressive
des services productifs, de la création de surplus et du potentiel cognitif de croissance, qui sont
déterminés par l’expérience.
Au niveau opérationnel, en suivant H. Bouquin (1993), le contrôle d’exécution relève de tâches
élémentaires répétitives et c’est leur répétitivité qui favorise leur modélisation et leur mise sous
contrôle ; en cela ces tâches apparaissent programmables. Garantir que le contrôle d’exécution
organise les tâches critiques pour la bonne mise en œuvre de la stratégie constitue une finalité du
contrôle de gestion.
Or, lorsqu’il devient nécessaire d’agir avec davantage de flexibilité face a des décisions non pro-
grammables, ou de réagir a des pressions inscrites sur du court terme, le contrôle d’exécution ne
peut pas toujours être perçu comme une série de tâches répétitives et routinières. Selon la vision

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penrosienne de l’entreprise, si l’organisation est perçue comme devant être apprenante, flexible, et
transversale ; son bon fonctionnement doit alors s’inscrire davantage dans une logique d’orientation
des comportements de personnes usant d’initiative et d’autonomie que dans une stratégie de contrôle
des délégations de tâches.

1.2. Notion de processus et orientation du comportement des acteurs


Nous pouvons donc assimiler les systèmes de contrôle de gestion entendus au sens large à des techno-
logies au sens penrosien telles que nous venons de les définir.
La nature de ce système et la manière dont il agence les données conditionnent donc la représen-
tation et l’évaluation des performances qui sont propres à chaque groupe d’agents au sein de l’orga-
nisation de la firme. Il y a là un rapport évident avec la conception de Penrose. Il faut interpréter le
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système d’informations qui prévaut à l’intérieur d’une firme donnée comme une technologie parti-
culière plus ou moins bien apprise et interprétée différemment par les différents cadres managériaux
de l’entreprise. Dans cette conception, l’usage du système et son apprentissage ne se distinguent pas
réellement. Or, on sait que chez Penrose, la croissance et les performances de la firme dépendent très
fortement de la qualité des services managériaux, de la convergence de leurs représentations et donc
ici de leurs conceptions du système d’informations propre au contrôle de gestion et de leurs interpré-
tations des performances telles qu’elles sont révélées par ce système.
Comme certains auteurs l’ont déjà noté, « les indicateurs non comptables permettent, davantage
que les indicateurs comptables, d’informer sur les comportements, de les influencer, de favoriser
l’autocontrôle ou encore d’anticiper des évolutions en termes de besoins en compétences8 ». Le recours
à des indicateurs tels que le degré de confiance, la communication interne, ou l’esprit d’équipe peut
fournir un exemple d’indicateurs non comptables des performances. L’utilisation de ce type d’indi-
cateurs met l’accent sur la facette la plus collective de la performance d’une organisation. L’obtention
d’une meilleure performance peut ici se traduire par des primes et des récompenses collectives, des
récompenses au mérite incitant à une meilleure coopération, l’importance des réunions improvisées,
l’émergence de nouveaux modes de conception tels que des plans d’innovation. Cet angle d’approche
de la performance fait référence à une structure organisationnelle non hiérarchisée. Cette mesure
particulière de la performance se situera donc davantage dans une logique d’efficacité, qui se réfère à
une finalité prenant en considération la notion d’apprentissage – qui présente une nature largement
plus subjective.
De la même manière, la conception d’un processus ne relève pas d’une simple agrégation d’activi-
tés et de compétences mais d’une logique d’agencement et de combinaison qui témoigne d’une réalité
complexe, liée notamment à l’accroissement des exigences des partenaires, et notamment des clients.
Ces nouveaux acteurs amplifiant le caractère complexe de l’environnement ont un rôle central dans
le developpement de l’entreprise et dans la formation d’un avantage concurrentiel. En effet, chez
Édith Penrose, les alliances stratégiques constituent une opportunité de combinaisons de ressources
nouvelles et donc sont susceptibles d’engendrer de meilleure performance organisationnelle.
Pourtant, l’histoire montre que la représentation comptable des coûts, source d’indicateurs de
mesure pour le contrôle, simplifie cette réalité en recourrant a des outils de type calculatoire et additif
qui traduisent une vision séquentielle des actions ou au mieux de leur coordination.

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Une alternative possible à cette méthode trop réductrice de la réalité peut se trouver dans le mana-
gement des processus, qui s’adosse à une reconnaissance simultanée de l’interdépendance d’acteurs
dotés d’initiatives, traitant alors des modalités de coopération entre ces acteurs. On retrouve, une fois
de plus, la vision penrosienne de l’entreprise qui considère que la croissance d’une entreprise est un
processus évolutionnaire et cumulatif d’apprentissage au sein duquel un degré de connaissance crois-
sant permettrait de créer de nouvelles options pour un développement économique futur, en élargis-
sant son opportunité productive. À partir de sa définition, Édith Penrose se heurte alors à la difficulté
de la coordination administrative entre toutes les composantes de l’équipe managériale. Afin de
mettre en application ces ressources, l’équipe managériale doit faire un effort de coordination, qui
peut être rendue possible grâce aux capacités cognitives de chacun. En réalité, ce que veut nous faire
comprendre l’auteur est que les membres de l’équipe managériale doivent partager des visions cogni-
tives communes de l’entreprise pour pouvoir coordonner leurs décisions. L’auteur fait ici référence au
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concept de connaissance collective et tacite, qui permet aux salariés de partager des représentations
de la réalité, sans pour autant les transmettre de manière explicite. Édith Penrose l’exprime ainsi :
« Or, il semble probable que cette “mentalité unique” puisse être obtenue à travers une forme appro-
priée d’organisation héritée du passé et mise en œuvre par les hommes, eux aussi hérités du passé, qui
partagent une tradition passée, qui ont l’habitude de l’organisation et de vivre l’un avec l’autre, et qui
forment en conséquence une entité qui travaille avec suffisamment de cohérence et d’efficacité dans
des domaines étendus pour rendre superflue la nécessité pour un individu quelconque de comprendre
et de diriger son travail dans le détail9. »
De fait, si le succès d’un processus repose sur l’action combinée de plusieurs agents, la recherche
de l’optimum global ne résulterait plus d’une somme d’optima locaux, certainement interdépendants
mais dont on ne comprend pas qu’il sont en interaction.
Il devient en effet possible de postuler, dans la réalisation de prestations de services par exemple,
que la connectivité des activités au sein d’un processus dépend aussi de l’action elle-même et de leur
conduite en temps réel. Le repérage des relations dans l’action témoignera assurément d’une dimen-
sion cognitive (comment les individus se comprennent-ils ?) et organisationnelle (quelle motivation,
quelle légitimité poussent les individus dans l’action collective ?) dans le pilotage des processus. En
suivant Édith Penrose (1959), ce ne sont jamais les ressources qui constituent les inputs du processus
productif mais seulement les services que ces moyens peuvent rendre et qui sont fonction de la façon
dont ils sont utilisés. Le glissement de la notion de facteur de production vers celle de ressource dans
les travaux d’Édith Penrose permet d’assurer une évolution de l’analyse d’un versant objectivé vers la
prise en compte de la dimension subjective des mécanismes de la croissance (Fazio, Quéré, 1999).
La notion de ressources au sens de Édith Penrose est donc beaucoup moins large que la même
notion telle qu’elle apparaît dans la théorie de la firme fondée sur les ressources, qui rappelons-le,
adopte une définition de la ressource qui réunit les caractéristiques physiques, financières, humaines
et organisationnelles des firmes. Chez Édith Penrose, la ressource est crée, construite, et inscrite dans
une logique d’action. L’auteur nous donne sa définition exacte de la ressource, à la page 25 de sa
Theory of the Growth of the Firm : « […] Les ressources consistent en un gisement de services poten-
tiels et peuvent, en majeure partie, être définis indépendamment de leur usage, tandis que les services
ne peuvent être définis de cette manière, le mot exact “service” impliquant une fonction, une activité.
Comme nous le verrons, c’est essentiellement dans cette distinction que se trouve la singularité de

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UNE LECTURE POSSIBLE DE L’ABC/ABM ? 75

chaque firme individuelle. » Aussi, selon Édith Penrose, la valeur d’une ressource est mesurée par
la valeur des services effectivement fournis par cette ressource. Comme nous l’indique l’auteur, ces
services sont fonction de leur usage, inscrit dans une logique d’action, qui va fonder la singularité de
chaque entreprise.
La conception penrosienne de l’organisation repose sur une approche de la connaissance distincte
de celle d’information et sur une interprétation particulière des relations entre apprentissages indi-
viduels et apprentissage collectif. L’idée est ainsi, que la capacité d’apprentissage des individus et des
organisations est rendue possible grâce à deux formes de connaissance : d’une part ; la connaissance
objective, qui peut être transmise sans difficulté et d’autre part ; l’expérience, qui ne peut s’acquérir
que par l’action. Édith Penrose ne rejette pas la notion d’information, mais l’interprète comme un
cas particulier de la connaissance : la connaissance objective et explicite. La connaissance au sens
large inclut aussi la connaissance tacite (ou expérience selon l’auteur) qu’elle soit locale ou générale.
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La conception penrosienne de l’articulation entre apprentissages individuels et apprentissage organi-
sationnel en découle. Ces deux formes d’apprentissage prennent place au sein d’organisations dans
lesquelles apparaît de la complexité organisationnelle, c’est-à-dire des interactions non totalement
programmables entre les acteurs. Dans cette optique, les technologies apparaissent non comme des
agencements d’informations, c’est-à-dire, pour Édith Penrose, de formes objectives de connaissance
technique, mais comme des processus de nature cognitive et sociale, c’est-à-dire fondées sur l’interac-
tion interindividuelle et interpersonnelle.
En ce sens, les membres de l’organisation en deviennent ses acteurs et les mécanismes d’appren-
tissages deviennent cruciaux dans le développement de l’organisation. Les agents n’apparaissent plus
simplement comptables de leurs résultats spécifiques, mais plutôt de leur contribution et de leur rôle
dans une action collective. Il s’agirait alors d’exercer une influence non plus sur des individus qui
consomment des ressources dans le cadre d’une action particulière, mais sur des individus qui déci-
dent tout ou partie de l’articulation de leurs actions avec celles des autres pour animer des processus
et atteindre les finalités de ces derniers.
En effet, la notion de processus renvoie à l’idée d’articulation des activités et de coopération des
individus et non à celle du cloisonnement des tâches et des fonctions. Édith Penrose ne fait pas direc-
tement référence au concept de processus mais elle adopte une approche en terme de flux qui revient
à proposer une vision de l’entreprise divisée en plusieurs activités, et non plus uniquement en services
cloisonnés entre eux, autorisant ainsi les arrangements et les échanges d’information et de connais-
sance entre les différentes activités de l’entreprise. L’auteur précise : « En ce qui nous concerne, un
aspect important de la définition de la firme, implique son rôle en tant qu’unité administrative
planificatrice et autonome, développant des activités inter reliées et coordonnées par les politiques
d’entreprise qui ont un effet sur la firme tout entière10. »
Aussi, pour Penrose, les ressources n’ont de valeur que dans la mesure où elles sont mobilisées dans
des activités modulaires, au service de la logique d’action et non pas dans des fonctions cloisonnées de
l’entreprise. Cette construction des ressources se réalise au travers du processus d’apprentissage de la
firme, qui est à la fois individuel et collectif. L’idée d’Édith Penrose est donc que la bonne utilisation
de ces ressources permet à la firme de développer de nouvelles opportunités productives et des com-
pétences propres à son histoire et à son apprentissage. Le processus qu’elle décrit implique donc une
dialogique entre les ressources et les compétences.

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76 UNE LECTURE POSSIBLE DE L’ABC/ABM ?

2. Coûts d’activités, pilotage des processus opérationnels :


quelle lecture possible ?
Comme c’est clairement le cas dans une problématique strictement économique d’allocation optimale
des ressources, les sciences de gestion s’intéressent aux coûts interprétés en leur qualité d’indica-
teurs d’efficience organisationnelle. C’est pourquoi la référence aux coûts constitue ici notre point
de départ : ces derniers alimentent le travail du contrôle à visée opérationnelle. « Un coût est un
ensemble de consommations rapportées à une finalité » (Bouquin, 1993 : 1911). La notion de finalité
doit être comprise ici dans un sens pluriel, justifiant ainsi la possible juxtaposition de techniques
complémentaires de structuration des charges.
Toutefois, dans une perspective plus large, « la comptabilité de gestion n’est pas une simple tech-
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nique de calcul qui s’applique aux objets, elle est fondamentalement un moyen d’orienter ou d’in-
fluencer les comportements des personnes » (Bouquin, 1993 : 29). La comptabilité de gestion (et
les différentes formes de calculs qu’elle peut recouvrir) peut donc aussi être caractérisée comme un
moyen d’animation du système d’information de gestion des organisations. Une relation « techniques
comptables-stratégie », intimement liée aux styles de management puisque ceux-ci sont au service de
la stratégie ou sont conditionnés par elle, se trouve ainsi mise en évidence. « Les systèmes d’infor-
mation de gestion construits au cours des décennies précédentes n’ont jamais porté sur des données
monétaires uniquement, et tout en évoluant sous l’effet des stratégies de l’entreprise ils ont aussi aidé
les stratégies à évoluer » (Bouquin, 1993 : 18).
De la même manière, H.T. Johnson (1990 : 8) remarque très justement que, « pour maîtriser le
couple coût-valeur dans l’économie mondiale, les dirigeants doivent gouverner les personnes et gérer
les activités ; ils doivent cesser de chercher à maîtriser les coûts en gérant la production ». Aussi, si
une bonne gestion des coûts dans le but d’atteindre un niveau satisfaisant d’efficience économique
représente un facteur nécessaire de croissance d’une organisation, il paraît, en revanche, insuffi-
sant de se concentrer uniquement sur la gestion de la phase productive. Comme nous l’indiquait
déjà Édith Penrose en 1959, l’un des facteurs clés de croissance de l’entreprise réside dans la bonne
entente et la bonne coopération des membres de l’équipe managériale, qui sont rendues possibles
par une bonne gestion des personnes et des activités. En d’autres termes, la question sous-jacente
de l’imputation des consommations aux produits qui a fortement attiré l’attention de nombreux
travaux de recherche en termes de techniques d’imputation des charges aux produits n’apparaît plus
comme dominante. La conception et l’articulation des activités12 constituent désormais les facteurs
principaux de la croissance des entreprises. La causalité des charges n’est pas portée par un objet de
production, mais par les actes de conception et d’ordonnancement des activités, dès lors que le facteur
de production majeur est le travail humain au sein d’un cadre organisationnel13.
En prenant une fois de plus appui sur les travaux d’Édith Penrose, le processus productif peut
alors se concevoir comme un processus de développement de services et de création de compétences.
Comme le notent G. Fazio et M. Quéré (1999), cette activité de coordination résulte d’un processus
décisionnel de type administratif qui se dessine en fonction de l’expérience acquise – composante
principale de la base de connaissance organisationnelle au sens penrosien. Dans cette perspective, il est
ainsi désormais possible de concevoir, que dans l’organisation devenue transversale et transfonction-
nelle, ces processus de coordination administrative, qui, selon Édith Penrose relient intrinsèquement

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UNE LECTURE POSSIBLE DE L’ABC/ABM ? 77

la notion de ressource à la capacité organisationnelle de la firme, peuvent provenir, à tout le moins


partiellement, des opérationnels eux-mêmes.
Les deux sous-sections qui suivent illustrent comment l’approche que nous avons retenue jusqu’alors
peut être étendue de manière à permettre la logique réelle de la méthode ABC (Activity Based Costing)
en comptabilité de gestion. Nous procéderons à une lecture évolutive de l’ABC pour poser in fine
la question d’une définition possible du pilotage de ces activités dans une lecture Penrosienne de
l’organisation.

2.1. L’ABC : un changement progressif


Malgré les avancées qu’elle a apportées, la méthode ABC, continue usuellement à se situer à un niveau
presqu’exclusivement instrumental. Nous tenterons, dans cette perspective, de mettre en évidence ses
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avancées mais aussi ses limites, en éclairant notre propos à la lumière de la perspective penrosienne.
Dans les années 1990, la méthode ABC a été présentée comme une « nouvelle » méthode de
structuration des charges (méthodes comptables de calcul de coûts). Elle a conduit à introduire de
nouveaux signaux, inducteurs de coûts et/ou de valeur « plus proches » de la réalité productive.
L’objectif de l’Activity Based Costing concerne l’information relative aux coûts nécessaires en termes
de décisions opérationnelles et stratégiques (Berliner et Brimson, 1986). Cette technique se présente
comme une réponse à l’arbitraire lié à l’allocation des charges indirectes opérée lors du calcul des
coûts complets de produits dans la méthode usuelle des centres d’analyse. Aux États-Unis, Johnson et
Kaplan (1987), formalisent la nécessité d’une évolution du contrôle de gestion et de ses outils. Il s’agit,
alors, de calculer des coûts de revient de production plus représentatifs de la réalité industrielle que ne
l’étaient les méthodes traditionnelles fondées sur les centres de frais (Cooper et Kaplan, 1991).
En France, M. Lebas et P. Mévellec (1999) ont pu noter que la recherche d’interprétation théo-
rique constitue le fondement d’une démarche qui vise à articuler les outils de gestion et la théorie
économique. La micro-économie et la gestion constituent deux disciplines historiquement construi-
tes sur un fondement épistémologique commun : une forme mécaniste de rationalité individuelle de
moins en moins compatible avec les caractéristiques profondes des phénomènes micro-économiques
réels (Lorino, 1989). L’auteur remet ici en cause, selon nous, à la fois l’entreprise-machine et la micro-
économie mécaniste puis il souligne que les difficultés rencontrées en gestion de l’entreprise ne pour-
ront être surmontées séparément de celles rencontrées en théorie micro-économique.
La méthode analytique ABC, souvent proposée comme un élément de réponse au développement
des activités de services, à la complexité et à la diversité, répond, selon P. Mévellec (1993) à l’ambition
de changer le fonctionnement de l’entreprise, tout en prévoyant un changement dans la façon de
gérer, en s’aidant en particulier d’une nouvelle approche des coûts. Or, la demande sociale pour un
changement des outils de contrôle de gestion industriel explose (Lebas et Mévellec, 1999).
L’ABC, par l’identification d’inducteurs de coûts, améliore la connaissance en termes de traçabi-
lité des coûts et conduit au renouvellement des hypothèses opératoires en amont des procédures de
mesure des coûts. Une activité représente un ensemble de tâches élémentaires réalisées par un indi-
vidu ou un groupe, en faisant appel à un savoir-faire spécifique (qui peut donc être collectif). Cette
idée d’un savoir-faire collectif est également très présente dans la vision penrosienne de l’entreprise.
Édith Penrose fait en effet largement référence au concept de connaissance tacite et collective qui

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78 UNE LECTURE POSSIBLE DE L’ABC/ABM ?

se transmet à travers le travail d’observation du nouvel arrivant qui apprend à partir du savoir-faire
des plus anciens. Avec le temps, le savoir-faire acquis par les nouveaux arrivants devient spécifique à
l’entreprise et complexifie sa nature même. Chaque organisation adopte ainsi un caractère de plus en
plus idiosyncrasique, devenant de plus en plus hétérogène. Les tâches élémentaires qui constituent
une activité au sens de la méthode de l’ABC sont homogènes du point de vue de leurs comporte-
ments de coût et de performance et permettent de fournir un output ou extrant servant à un client
interne ou externe à l’organisation et consomme un panier d’inputs ou d’intrants (travail, machines,
informations, etc.) (Lorino, 1991).
Ainsi, selon Lebas (1992), fondés sur une allocation d’activités requises pour mettre le bien ou
le service à disposition du client, « les coûts calculés par l’ABC reflètent de façon lisible, malgré des
conventions inévitables, ce que l’entreprise fait pour satisfaire le client ». La notion de processus
émerge de cette idée d’articulation d’activités au regard de la finalité poursuivie.
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En 1994, P.-L. Bescos et C. Mendoza montrent que la méthode de l’ABC prend en compte les
nouveaux besoins organisationnels et s’efforce d’apporter des éléments de réponse. Celle-ci s’intéresse
en effet à la détection des activités fondamentales puis à l’efficience de leur enchaînement et essaie de
rendre compte de l’importance croissante de la coordination (ce qui nous renvoie à la notion de pro-
cessus ; cf. infra). La comptabilité à base d’activités consacre alors une rupture dans la représentation
en révélant le décloisonnement de l’organisation sachant qu’une approche transfonctionnelle – au
sens Penrosien – s’opposerait ainsi à la logique traditionnelle de découpage de l’organisation par fonc-
tions. Cette dernière, selon P.-L. Bescos et C. Mendoza (1994), entrave la réussite de stratégie donnée,
favorise le développement de réflexes d’optimisation locale alors que l’évolution des modes d’organi-
sation conduit à une intégration croissante des différentes fonctions ou des différents services. Ici, il
s’agit de considérer deux à cinq activités principales (Ibid.), par exemple par ancien service. L’activité
ouvre la voie à une autre modélisation et leur articulation forme un processus qui véhicule une vision
horizontale de l’organisation et conduit à un aplatissement des structures par accroissement de la res-
ponsabilisation des individus. Cette vision de l’entreprise reflète bien l’idée penrosienne selon laquelle
la qualité de l’équipe managériale est essentielle à la croissance de l’entreprise. Aussi, savoir mettre en
place des systèmes de responsabilisation, de rémunération et de progression au sein de l’équipe mana-
gériale permet une croissance plus rapide et plus soutenable à long terme. Les dirigeants doivent donc
travailler ensemble de façon transversale sans barrière fonctionnelle ou de division pour permettre à
l’innovation de se développer.
Grâce à une nouvelle lisibilité des coûts, l’attention des décideurs sera réorientée des activités élé-
mentaires productives vers des activités porteuses d’attributs de valeur c’est-à-dire vers les causes qui
engendrent le développement de l’exploitation, maintiennent les avantages concurrentiels et consti-
tuent des facteurs de succès.
Toutefois, au-delà de l’instrumentation, notre propos cherche à resituer l’ABC dans le domaine
des usages. En effet, en termes de contrôle de gestion, la sphère de la pertinence des méthodes comp-
tables ne saurait se limiter à la précision ou à la pertinence des outils et des indicateurs. Ce point de
vue qui s’intègre à la vision penrosienne de l’entreprise, revient donc à s’intéresser à l’usage qui est fait
des instruments comptables dans le cadre du contrôle de gestion. Notre idée, consiste à avancer que
la méthode ABC, contribue à l’amélioration de la communication et des échanges interactifs entre
individus au sein notamment des processus opérationnels et ainsi au sein de l’entreprise. Cette façon

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UNE LECTURE POSSIBLE DE L’ABC/ABM ? 79

de voir les choses, s’accorde parfaitement avec la vision penrosienne de l’apprentissage organisation-
nel. En effet, l’apprentissage de la technologie comptable au sein des équipes managériales conduit à
l’amélioration des services managériaux et à une convergence accrue de la représentation des agents
au sein de l’entreprise, ce qui, selon Édith Penrose, constitue l’une de conditions essentielles de la
croissance des organisations.

2.2. Pilotage des processus, autonomie des acteurs


et coconstruction de sens
Selon Tarondeau (1998), des avantages durables se construisent sur un ensemble de compétences
individuelles et collectives concrétisées dans un processus d’action dont elles sont inséparables.
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Le terme processus sous-tend alors une approche en termes de marchés et met l’accent sur le besoin

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de coordination des activités lorsqu’il s’agit comme le dit M. Porter (1999) de métiers différents.
Il est intéressant de noter ici que, si la coordination de ces activités se situe souvent à un niveau intra-
entreprise, elle peut être également créatrice de valeur au niveau interentreprises. Les alliances straté-
giques constituent en effet un facteur central de croissance organisationnelle chez Édith Penrose, qui
estime que la coopération entre entreprises contribue fortement à la création de ressources. Dans cette
même perspective, l’ABC peut être alors perçue comme un outil qui permet de passer de la gestion
d’un portefeuille d’activités à la gestion d’un portefeuille de partenaires (Chanegrih et Godey 1999),
notamment lorsqu’il s’agit d’identifier de manière plus précise les critères de performances que porte
chaque relation. La performance de l’entreprise réside alors aussi dans les relations nouées aux espaces
de liberté, aux interstices des activités transversales. Ces espaces dévoilent cognition et variété au sens
penrosien car ils constituent des zones d’arbitrage où se rencontrent des agents de cultures et d’entités
différentes. L’interrogation sur la compréhension et le pilotage de ces activités se pose alors.
Ainsi P. Lorino (1995) a montré que la source de connaissances se trouve dans le processus, dans
les mécanismes de coordination et non dans les seules ressources. Cette remarque reflète parfaitement
notre interprétation particulière de la théorie penrosienne de l’entreprise. Édith Penrose fonde ainsi son
argumentation sur l’idée selon laquelle la recherche de compétitivité d’une organisation s’accompagne
nécessairement de l’exploitation de sa connaissance organisationnelle. Elle distingue donc la connais-
sance des autres facteurs de production, en la définissant comme l’un des facteurs stratégiques les plus
importants au sein du processus de croissance d’une firme. Aussi, selon nous, pour Édith Penrose, la
croissance de l’entreprise est davantage rendue possible par l’innovation et la collecte de connaissances
objectives et tacites que par l’accumulation de ressources en elle-même. La « Resource Based View »
ne s’intéressant qu’à la manière dont les ressources peuvent être acquises ou protégées contre la répli-
cation, a tendance à oublier que la mise en œuvre des ces ressources dans le processus de production
crée davantage de valeur que leur simple possession. C’est dans ce sens que la théorie d’Édith Penrose,
s’oppose à son interprétation donnée par la « Resource Based View » et doit être davantage perçue en
termes de « création de valeur » qu’en termes « d’appropriation et d’accumulation de valeur ».
Autrement dit, les qualités intrinsèques des ressources ne suffisent plus à assurer la performance
de l’organisation et l’on rejoint P. Mévellec qui admet que la technique porte en elle un mécanisme
d’apprentissage qu’il faudra accepter et cultiver (Mévellec, 1992). Progressivement la productivité
globale de l’entreprise résultera plus de la combinaison des ressources que de leur seule agrégation.

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80 UNE LECTURE POSSIBLE DE L’ABC/ABM ?

Ainsi mises en exergue, la dimension cognitive et l’action d’interprétation, introduisent de fait l’auto-
nomie des acteurs et la variété dans la contextualisation du mécanisme processuel afin d’assurer la
combinaison et l’accomplissement des activités.
La dynamique émergente dans les entreprises repose désormais sur l’obtention de la performance
par et dans le travail, conférant aux salariés une responsabilité qui ne se limite plus aux résultats
du processus mais aux conditions d’exercice (compréhension des situations à traiter) et au pilotage
(autonomie relative, arbitrages) (Yahiaoui, 1999). Cette idée permet ainsi de lutter contre le fameux
« effet Penrose », qui émerge des limites cognitives, du manque d’autonomie et de responsabilisation
des membres de l’entreprise et qui ralentit ainsi sa croissance.
De ce fait, le management d’un processus ou des processus ne reposerait plus sur une conception
simplement additive des activités, mais sur un assemblage et une compréhension où l’interaction,
inhérente aux situations de complexité, aux ajustements en temps réel, viendrait renforcer l’autono-
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mie et les compétences cognitives des agents opérationnels.
Si l’on admet une situation de complexité, d’instabilité et d’imprévisibilité dans des contextes
locaux, les individus agissent en prenant en compte les solutions qui s’offrent à eux au moment de
l’action et l’imprévisibilité se traduira par des solutions d’originalité ou à défaut, par l’utilisation de
solutions élaborées antérieurement – également qualifiées de routines organisationnelles – pour un
tout autre problème que celui à traiter dans l’instant. Si, en outre, l’incertitude et la réduction des
délais de production contraignent les situations de travail, le processus ouvrira alors la voie à une
présentation plus ambiguë dans laquelle la variété trouvera sa place.
Les critères de performance reposent alors aussi sur la capacité des acteurs à mobiliser leurs savoirs
dans l’action ; toute situation de travail ne se décline plus de manière précise, ex ante en termes opé-
rationnels et opératoires. Fiol et Lebas (1999) notent que la notion usuelle de poste de travail laisse
place à celle de nœud organisationnel, concept plus large, qui fait référence à la façon dont se nouent
et se dénouent les relations avec les composantes humaines, ou non, de l’environnement de travail.
Ce concept introduit des caractéristiques de la performance aujourd’hui recherchées dans la combi-
naison des ressources à travers la gestion des multiples usages du temps et surtout de ce qui se passe
« aux interstices » des activités (cf. figure 1).
Aussi, en accord avec l’approche penrosienne, toute situation de travail requiert des aptitudes
relationnelles propres, des capacités d’adaptation et un partage du sens commun, qui ne peut pro-
venir d’un seul espace de sens préétabli par les managers. L’adhésion des acteurs ne peut se réaliser
de manière programmée. Un accord sur le sens ne peut résulter que d’une coconstruction de ce sens
dans l’action et d’une véritable coopération entre tous les acteurs, ceux qui influencés par des logiques
métiers différentes travaillent les uns pour les autres et activent les processus, ceux qui œuvrent à des
niveaux hiérarchiques différents.
Ainsi, le contrôle de gestion devrait-il contribuer à la perception du fonctionnement global de
l’entreprise, c’est-à-dire à la façon dont les différentes logiques se lient entre elles, à la créativité qu’elles
font émerger aux interstices des activités et que l’on pourrait hâtivement assimiler à un désordre.
Comme le montre Lorino (1995 : 195), la cohérence et la pertinence de l’action collective exigent
que soient assurées deux fonctions, l’équilibre acceptable entre continuité et changement (fonction
appelée « équilibration »), l’équilibre acceptable entre initiative individuelle et règles collectives (fonc-
tion appelée « coordination »).

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Figure 1
Au sein du processus : partage d’informations ou partage de connaissances ?

Activité

Finalité du processus
Exemple : valeur client
Activité
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Activité

temps
Processus

L’ABM, Activity Based Management, pourrait alors être compris comme l’ensemble des dispo-
sitifs d’analyse et de pilotage des processus ayant pour fonction la gestion des processus d’action
(opérationnels), la gestion des interrelations et leur articulation avec les processus stratégiques.
En accord avec l’orientation de notre contribution, Cette méthode peut être associée à la définition d’un
management fondé sur les processus, qui, naturellement, prendrait appui sur des techniques compta-
bles de type ABC. Si l’organisation est un creuset de ressources à gérer afin de répondre à une ligne
stratégique, au-delà de l’agencement des ressources matérielles et de leur contribution à l’exploitation,
il est nécessaire de rechercher la cohésion des acteurs dans une action commune et une vision partagée
des objectifs. Une fois de plus, cette remarque s’inscrit dans une perspective de partage de connais-
sances, propre au processus cumulatif de croissance de l’entreprise décrit dans notre interprétation
penrosienne de l’entreprise. C’est à ce niveau là de coordination, de gestion des individus et de leurs
compétences qu’une doctrine de management dont la force se construit avec l’expérience et l’appren-
tissage, prendrait place. Il s’agit surtout de ne pas limiter le contrôle de gestion aux interrelations entre
objectifs, ressources et résultat (Bescos et al., 1993) mais d’accorder une priorité à la compréhension
sociale et globale de l’organisation.
Dans cette perspective, la méthode ABM constituerait une alternative possible aux méthodes
comptables traditionnelles, en accordant une place centrale aux processus organisationnels. Aussi,
une piste de recherche future serait de développer des méthodes relevant de cette approche ABM, en
les justifiant comme réponse au besoin d’intégration de l’intention stratégique, de la forme structu-
relle et de la culture de l’organisation, peut être même en amont de toute implantation de technique
de type ABC.

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82 UNE LECTURE POSSIBLE DE L’ABC/ABM ?

Conclusion
L’objectif principal de notre contribution a été de montrer dans quelle mesure. Il devient possible de
faire évoluer la nature et l’utilisation de la méthode ABC, afin de la concevoir, non seulement comme
un ensemble d’outils, mais aussi comme une pratique technologique liée à l’usage nous permettant
d’orienter la mission des contrôleurs de gestion ou des animateurs des systèmes de contrôle pour
reprendre un terme emprunté à M. Bollecker (2007 : 95) dont l’étude apporte un état de l’art sur
leurs compétences et leurs pouvoirs.
Pour illustrer notre objectif, nous avons souhaité réfléchir à la perception de l’entreprise qui
devient aujourd’hui de plus en plus dominante et dont beaucoup ont souligné le caractère paradoxal :
laisser plus d’autonomie aux acteurs tout en orientant leurs comportements. Nous avons notamment
souligné qu’il n’y a pas vraiment là paradoxe. Ici aussi, la qualité et la bonne entente de l’équipe
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managériale suppose, selon Édith Penrose, la mise en place de systèmes de responsabilisation, de
rémunération et de progression au sein de l’équipe managériale. Cette mise en place n’est pas contra-
dictoire – bien au contraire – avec la nécessité pour les dirigeants de travailler ensemble de façon
transversale sans barrière fonctionnelle ou de division pour permettre à l’innovation de se développer.
C’est pourquoi dans la réalité observée, on voit apparaître un contrôle de gestion de moins en moins
imposé et de plus en plus partagé, qui place le concept de base de connaissance organisationnelle au
centre de l’analyse.
Dans cette perspective, notre contribution a montré en quoi les méthodes comptables usuelles ne
sont plus adaptées à une « nouvelle » vision de l’entreprise, décrite par Édith Penrose en 1959. Même
si la méthode de l’ABC constitue une avancée méthodologique, elle reste trop souvent empreinte
d’une nature instrumentale pour comprendre l’importance des usages et des processus d’apprentis-
sage organisationnels. C’est pourquoi, notre contribution la distingue des méthodes de conduite du
contrôle, de pilotage des activités et des acteurs opérationnels, telle l’ABM. Ces méthodes auront
à tenir davantage compte des interactions entres acteurs et de la coordination entre activités trans-
versales au sein de l’organisation.

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Notes priate form of organization inherited from the


past and operated by people, also inherited from
1. Il est souvent fait référence au modèle taylorien the past, who share a common tradition, who
2. Approche par les ressources (en français) et déve- are accustomed to the organization and to each
loppée notamment par Rumelt (1972 ; 1981), other, and who thus form an entity which works
Barney (1989 ; 1996), Teece (1982) et Wernerfelt with sufficient consistency and efficiency in
(1984). broad areas to make unnecessary any one indivi-
3. « A firm is basically a collection of resources. » dual having to comprehend and direct its detailed
(Penrose, 1959 : 77). working. » (Penrose, 1959 : 18).
4. Ce qui est le cas dans certains services publics 10. « One important aspect of the definition of the firm
non-marchands ou la révision des procédures for our purposes, then, involves its role as an autono-
budgétaires et comptables précède la mise en mous administrative planning unit, the activities of
place de dispositifs de gestion ; l’analyse du tissu which are interrelated and are co-ordinated by poli-
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organisationnel est occulté et les réformes postu- cies which are framed in the light of their effect on
lent implicitement mais de manière déterministe the enterprise as a whole. » (Penrose, 1959 : 16).
que les outils de gestion induiront les comporte- 11. Nous empruntons volontairement quelques réfé-
ments attendus. rences datées ; la problématique n’est plus tout à
5. Le concept de performance véhicule des diffi- fait récente et nous souhaitons nous placer dans
cultés de définition car le mot est polysémique une lecture évolutive.
(Bourguignon, 1997). Il peut être compris comme 12. Le terme activité est ici pris au sens de tâche ou
une évaluation ex post des résultats obtenus groupe de tâches liées à la production ou à l’exer-
(Bouquin, 1998), comme une évaluation des pro- cice d’un métier (les exemples suivants étaient
cessus d’action (Bourguignon, 1995), orienté vers donnés par le P.C.G. : famille de produits, unité
le prospectif et apporter des jugements de valeur de produit, stade d’élaboration de produit) et non
ou encore être entendu comme l’action elle-même au sens où nous l’entendons par la suite, en réfé-
(Baird, 1986). Comme le note D. Bessire (1999 : rence au courant de l’Activity Based Costing. Ainsi
129) le terme performance tend à se substituer à P. Lorino (1991 : 49-63) énonce : « Une activité est
l’expression historique de « contrôle de gestion » un ensemble de tâches élémentaires réalisées par
et l’usage extensif du mot va de pair avec le flou un individu ou un groupe, et faisant appel à un
des définitions. savoir-faire spécifique. Ces tâches sont homogènes
6. « […] for an analysis of the growth of the firm, it du point de vue de leurs comportements de coût et
is appropriate to start from analysis of the firm, de performance et permettent de fournir un output
rather than the environment and then proceed to ou extrant servant à un client interne ou externe à
a discussion of the effect of certain types of envi- l’organisation et consomme un panier d’inputs ou
ronmental conditions. If we can discover what d’intrants (travail, machines, informations, etc.) ».
determines entrepreneurial ideas about what the 13. Celle-ci réside alors dans une logique d’ingénierie
firm can and cannot do, that is what determines organisationnelle, pour reprendre le terme utilisé
the nature and extent of the “subjective” produc- par M. Lebas, (1994 : 48), qui ne se limite pas à
tive opportunity of the firm, we can at least know une évolution de la structure de responsabilité et à
where to look if we want to explain or predict the la construction de budgets. Il y a en réalité mutation
actions of particular firms ». (Penrose, 1959 : 42). comportementale et managériale puisque l’analyse
7. Cf. notion de « sensemaking » chez K. Weick. sera centrée sur la valeur que les actions peuvent
(1995) apporter aux clients en termes de qualité et d’avan-
8. Luangsay-Catelin (2003). tages concurrentiels. Ceci, bien entendu, ne peut
9. « […] Now it seems likely that this “single- être absent d’une recherche permanente d’élimina-
mindedness” can be achieved through an appro- tion de gaspillages ou de dysfonctionnements.

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