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DROIT DU FINANCEMENT

Titre II : Les modes de financements

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TABLE DES MATIERES TITRE II

Titre II/ Les modes de financements .......................................................................................... 1

Chapitre I/ Les modes de financements traditionnels ............................................................. 4

Section 1 : Le financement du cycle d’investissement ....................................................... 4

Para 1 : Besoins de financement du cycle d’investissement ........................................... 4

Para 2 : Moyens de financement du cycle d’investissement ........................................... 5

A- Le financement des investissements par fonds propres ........................................... 5

B- Le financement des investissements par ressources étrangères ............................... 8

Section II/ Le financement du cycle d’exploitation .............................................................. 14

Para 1 : Les besoins de financement du cycle d’exploitation........................................ 14

A- Le Besoin en Fonds de Roulement ........................................................................ 14

B- La trésorerie ........................................................................................................... 16

Para 2 : Les moyens de financement du cycle d’exploitation ....................................... 16

A- Le crédit consenti par les fournisseurs ................................................................... 16

B- Mobilisation de créances ........................................................................................ 17

Section III / Les limites du financement de l’entreprise ................................................... 24

Para 1 : Les contraintes liées à la situation financière de l’entreprise ........................... 24

A- La liquidité ............................................................................................................. 24

B- La rentabilité, la solvabilité.................................................................................... 24

C- Les contraintes classiques ...................................................................................... 24

Para 2 : Les autres contraintes non financières ............................................................. 26

A- Les contraintes juridiques ...................................................................................... 26

B- Les contraintes économiques ................................................................................. 26

Chapitre 2 : La finance islamique ......................................................................................... 30

Section 1 : Présentation de la finance islamique ............................................................... 30

Para 1 : Une apparition récente ..................................................................................... 30

Para 2 : L'essor de la finance islamique ........................................................................ 31

2
Para 3 : L'originalité du système financier islamique ................................................... 32

Section 2 : la finance islamique dans les banques de financement et d’investissement ... 33

Para 1 : L’approche de la finance islamique ................................................................. 33

A- L'impact de la déréglementation ............................................................................ 33

B- Le respect de règles de conformité ........................................................................ 34

Para 2 : Les produits de la finance islamique ................................................................ 35

A- Les notions de risque ............................................................................................. 35

B- Les instruments financiers ..................................................................................... 37

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A côté des modes de financements traditionnels (chapitre I) se développe la finance islamique
qui présente des particularités qu’il convient d’analyser (chapitre II).

Chapitre I/ Les modes de financements traditionnels


On distingue deux modes de financement : le financement du cycle d’investissement (section
1) et le financement du cycle d’exploitation (section 2). L’étude de ces différents modes de
financements nous conduira à voir en dernier lieu leurs limites (section 3).

Section 1 : Le financement du cycle d’investissement


Le cycle d’investissement concerne l’acquisition et l’utilisation des immobilisations nécessaires
à l’activité de l’entreprise (machines, moyens de transports, matériel informatique) qui
constituent ses outils de travail. Ce cycle est long (plusieurs années). Il démarre dès la
constitution de l’entreprise.

Voyons les besoins (§ 1) puis les moyens de financements de l’investissement (§ 2).

Para 1 : Besoins de financement du cycle d’investissement


A sa création, l’entreprise doit se procurer un ensemble de biens destinés à rester dans la firme
pour plusieurs années. Il en va de même chaque année, l’entreprise devant réaliser des
investissements de nature variée correspondant à des objectifs multiples en vue d’assurer sa
survie (par le renouvellement et l’adaptation de ses matériels) et son développement (par
l’accroissement de ses installations).

-Investissements corporels (terrains, locaux, équipements, installations)

Ils répondent à des objectifs variés :

- création d’une capacité de production compte tenu de la demande prévue lors de la constitution
de l’entreprise,

- maintien de la capacité par le renouvellement des immobilisations au terme de la durée de vie


: investissement de remplacement,

- accroissement de la capacité pour assurer le développement : investissement de capacité,

- orientation vers de nouvelles activités : investissement de modernisation,

- réalisation de gain de productivité afin de réduire les coûts, accroître les marges, la
compétitivité : investissement de productivité.

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-Investissements incorporels

Les investissements incorporels sont complémentaires des investissements matériels qu'ils


précèdent, accompagnent ou suivent.

Ainsi les investissements de recherche précèdent les investissements matériels lorsqu'ils


aboutissent à améliorer, adapter ou imaginer des procédés et matériels nouveaux.

Les investissements en formation accompagnent les investissements matériels dont ils


permettent l'usage efficace par l'adaptation des qualifications des utilisateurs.

Les investissements en logiciels se poursuivent au-delà de l'acquisition des matériels


informatiques et, de même, les investissements dans l'action commerciale se poursuivent après
la mise en fabrication du produit.

-Investissements financiers

Les investissements financiers sont les acquisitions de titres de participation, de titres


immobilisés qui donnent le droit de propriété ou de créances.

Ils tendent à se développer dans les grandes entreprises (ex. holding mixte) qui ont
simultanément des activités d'exploitation industrielles et commerciales, et des activités de
gestion et de contrôle de ses filiales et participations ou la société mère qui abandonne à des
filiales toutes ses activités d'exploitation et devient une société de portefeuille ou holding pure.
Les immobilisations financières constituent alors l'essentiel de son bilan.

Ses revenus sont constitués de produits financiers et ne proviennent plus de ses ventes.

En résumé les investissements corporels, incorporels et financiers sont complémentaires. Ils


représentent les moyens de mise en œuvre de la stratégie de l'entreprise dont ils constituent les
éléments du développement futur.

Para 2 : Moyens de financement du cycle d’investissement


L’entreprise peut financer ses investissements par ses propres ressources (fonds propres) (A)
ou par des ressources extérieures (ressources étrangères) (B).

A- Le financement des investissements par fonds propres


Il existe trois moyens de financement par fonds propres.

1- L’autofinancement

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C’est la forme préférée de financement des entreprises, en effet, c’est la plus facile à mettre en
œuvre car il n’y a pas à obtenir l’accord des personnes extérieures à l’entreprise et qu’elle
n’entraîne pas de frais. Toutes les entreprises l’utilisent y compris les plus grandes.

L’autofinancement est le financement des investissements par les moyens propres de


l’entreprise, c’est la ressource qui provient de l’activité de l’entreprise et conservée par elle.
L’autofinancement est le résultat de la somme des dotations aux amortissements (les dépenses
nécessaires au renouvellement des équipements), des réserves (provisions et bénéfices non
distribués), des plus-values, des capitaux propres, des exercices antérieurs et de l’épargne. Il
correspond à l’accroissement des actifs nets réels de l’entreprise durant une période déterminée.

L’autofinancement a pour avantage d’assurer à l’entreprise son indépendance. Cette solution


présente pour l'entreprise l'avantage de la rendre indépendante des tiers, mais elle a pour
inconvénient majeur de limiter l'entreprise dans ses possibilités d'investissement. En effet, Il
faut préciser que le recours à l’autofinancement a un coût et comporte tout de même certains
risques. Avant de pouvoir se permettre de s’autofinancer, l’entreprise doit disposer de moyens
suffisants, qui l’autorisent à investir dans de nouveaux projets. Il est aussi important de savoir
que ces projets peuvent se révéler infructueux, et donc générer de grosses pertes pour
l‘entreprise et ses actionnaires. L'utilisation de ces réserves, principalement destinées à
rémunérer les actionnaires, doit donc s'effectuer de façon vigilante et organisée.

Autofinancement=caf-dividendes. Ressource interne disponible après rémunération des


associés.

Enfin, il convient de retenir que l'autofinancement peut revêtir deux formes :

- D'une part l'autofinancement brut, qui correspond à « l'ensemble des ressources


d'origine interne dont dispose l'entreprise après avoir réalisé toutes les opérations de
gestion relatives à l'exercice y compris l'affectation des résultats ».

Il comprend à son tour, les ressources durables (dites encore fonds d'amortissement) qui
pourront être réinvesties, et les provisions.

- D'autre part, l'autofinancement net ; celui-ci « est l'ensemble des bénéfices conservés
par l'entreprise (sous formes des réserves, reports à nouveau) afin d'augmenter ses
ressources propres ».

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Il constitue et fournit à l'entreprise un moyen nouveau de financement. Bref, un
autofinancement d'expansion pouvant permettre à l'entreprise de se maintenir et s'épanouir.

2- L’augmentation de capital

Cette technique de financement est prévue en droit de l’OHADA par les articles 360 et suivants
de l’AUSCGIE. Selon l’article 360 dudit Acte uniforme « Par dérogation aux dispositions de
l'article 358 du présent Acte uniforme, la décision d'augmenter le capital par incorporation de
bénéfices ou de réserves est prise par les associés représentant au moins la moitié des parts
sociales »

Ce mode de financement est plus rare car il est plus difficile de trouver de nouveaux apporteurs
de fonds que de puiser dans ses propres ressources (capital risque : pour des PME en forte
croissance grâce à des innovations technologiques).

Elle permet de financer le développement de l’entreprise (investissements nouveaux) ou en cas


de perte, rétablir une situation financière saine (émission de titres, introduction en bourse),
capital risque (organisme financier).

3- Les cessions d’éléments d’actifs

La notion de cession d’actifs est une notion économique et financière, à la différence de la


notion de cession de biens. La cession d’actifs suppose de céder les éléments qui permettent à
l'entreprise de réaliser son chiffre d'affaires. Une cession d’actifs dans leur intégralité
correspond à une cession d’entreprise.

Les actifs sont un élément de la génération de revenus par l'entreprise, alors que les biens sont
un élément du patrimoine qui est le gage des créanciers de la société. Les actifs de l'entreprise
relèvent de l'information financière des marchés alors que les biens relèvent de l'information
sur le patrimoine à l'intention des créanciers.

Les actifs d’une société sont des actifs immobilisés ou des actifs circulants.

Les cessions des éléments d’actifs peuvent dès lors résulter d’un renouvellement normal des
immobilisations, de la nécessite d’utiliser ce procédé pour obtenir des capitaux, ou de la mise

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en œuvre d’une stratégie de recentrage (cessions des participations ou filiales marginales par
rapport aux métiers dominants qu’elle exerce)1.

B- Le financement des investissements par ressources étrangères


Les fonds propres sont le plus souvent, insuffisants pour financer la totalité des
investissements. L’entreprise doit donc recourir à des sources de financement externes. C'est
pourquoi, le recours aux concours bancaires est la solution la plus couramment utilisée, car elle
est bien souvent la seule possible (ou presque) pour la quasi-totalité des petites et
moyennes entreprises. Cependant, il faut reconnaître que ce mode de financement présente des
inconvénients pour l'entreprise qu'elle rend tributaire des aléas de la distribution du
crédit (montant, coût, délais, etc.) et de la politique arrêtée par son banquier (choix des risques,
garanties, etc.).

Parmi les solutions proposées par les banques, il existe le crédit classique à moyen ou
long terme ou le crédit-bail. Le crédit inter-entreprises auxquels font recours ces dernières
déroge aux solutions classiques.

1- Les emprunts à long ou moyen terme

Le recours à ce mode de financement augmente son endettement et réduit sa capacité


d’emprunt. Les 2 types sont les emprunts obligataires et les emprunts indivis.

a- Les crédits à moyen terme

D'une durée de 2 à 7 ans, les crédits à moyen terme destinés à financer les investissements, sont
accordés soit par une banque seule, soit par une banque en concours avec un
établissement spécialisé (Oseo par exemple).
Il doit exister une liaison entre la durée du financement et la durée de vie du bien financé. Il
faut éviter, dans tous les cas, que la durée du financement soit plus longue que la durée
d'utilisation du bien que le crédit à moyen terme finance. Celui-ci s'applique donc à des
investissements de durée moyenne tels que véhicules et machines, et de façon plus générale, à
la plupart des biens d'équipement et moyens de production de l'entreprise.
La durée du prêt doit cependant tenir compte des possibilités financières de l'entreprise ; celle-
ci, en effet, pendant cette période, doit pouvoir non seulement assurer le remboursement

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Le régime des plus-values et des moins-values professionnelles s'applique lorsqu'un élément faisant partie de
l'actif immobilisé de l'entreprise fait l'objet d'une cession ou est affecté par un événement ayant pour résultat sa
sortie de l'actif. V. à cet effet l’AU sur le droit comptable et art. 8 CGI du Sénégal.
du crédit, mais encore le paiement des intérêts.
Un financement par un crédit à moyen terme ne doit pas normalement couvrir la totalité de
l'investissement ; il est logique que l'entreprise qui désire s'équiper fasse un effort
d'autofinancement. Le pourcentage du programme d'investissement financé par un crédit à
moyen terme est compris en général entre 50 % et 75 % du montant TTC de l'investissement,
mais pour les investissements modestes (véhicules de tourisme, équipements informatiques),
les banques acceptent souvent de financer l'investissement à 100 %.

L'octroi d'un crédit à moyen terme fait, de la part du banquier, l'objet d'une étude poussée car
le risque provient de la durée et de l'importance du prêt. Il faut étudier les incidences sur
le marché de la mise en place de cet équipement et prévoir la situation financière de l'entreprise,
compte tenu de son nouvel outil de production et aussi compte tenu de ses charges nouvelles.
Ceci nécessite de dresser un plan prévisionnel de financement qui mettra en parallèle l'ensemble
des charges et ressources de l'emprunteur, afin de dégager les possibilités futures de
l'entreprise à faire face à ses dettes et de là assurer un bon dénouement de l'opération de crédit.
L'analyse d'une demande de crédit à moyen terme repose principalement sur l'étude de
différents éléments :

 la situation économique ;

 la situation financière , et, plus particulièrement rentabilité de l'entreprise avant


l'opération et après l'opération, pendant et après l'opération en s'appuyant sur
deux ratios incontournables : la capacité d'endettement et la capacité de
remboursement ;

 les garanties offertes (personnelles ou/et réelles choisies en fonction des biens financés
et de la situation de l'emprunteur).

b- Les crédits à long terme

D'une durée de 7 à 20 ans, les crédits à long terme pour l'investissement sont distribués par les
banques et les sociétés financières. Pour ce type de financement, les banques ne jouent, la
plupart du temps, qu'un rôle de relais avec toutefois, dans certains cas, une participation en
risque avec l'établissement prêteur.
Les institutions financières spécialisées assurent le financement de ces crédits sur ressources
provenant principalement d'emprunts obligataires.

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2- Le crédit - bail

Contrat de location où la société de crédit-bail reste propriétaire du matériel jusqu’à la fin du


contrat pour une valeur résiduelle. Contrairement à l’emprunt, le crédit ne demande pas
d’apport personnel. C’est un procédé rapide et simple.

Le crédit-bail, appelé aussi souvent leasing, est une technique de financement d’une
immobilisation par laquelle une banque ou une société financière acquiert un bien meuble ou
immeuble pour le louer à une entreprise, cette dernière ayant la possibilité de racheter le bien
loué pour une valeur résiduelle généralement faible en fin de contrat.

 Ce n’est pas une vente à tempérament, car l’utilisateur n’est pas propriétaire du bien
financé.

 Ce n’est pas une simple location, car le locataire dispose d’une faculté de rachat2.

 Ce n’est pas une location-vente3, car le locataire n’est pas obligé d’acquérir le bien
loué après un certain délai4.

L’article 2 de la loi 2012-02 du 03 janvier 2012 définit le crédit-bail comme « toute opération
de location de biens meubles ou immeubles, corporels ou incorporels à usage professionnel,
spécialement acquis en vue de cette location par des entreprises qui en demeurent propriétaire,
lorsque cette opération, quelle que soit sa dénomination, prévoit à terme à terme la faculté pour
le locataire d’acquérir tout ou partie des biens loués, moyennant un prix convenu tenant compte,
au moins pour partie, des versements effectués à titre de loyers ». Cette définition est inspirée
de la loi 2008-26 du 28 juillet 2008 portant règlementation bancaire5.

2
L’option d’achat est un des éléments constitutifs du crédit-bail, expressément définis par le législateur (art.5-a de
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la loi n°2012-02 précitée). L’option d’achat est alors essentielle pour la qualification de crédit-bail. Elle est
également l’un des trois aboutissements que peut connaitre celui-ci à son terme. Les deux autres sont la restitution
du bien et le renouvellement du contrat.
3
Bien que la location-vente et le crédit-bail soient tous deux assortis d’une promesse d’acquisition (vente/achat),
celle-ci est en revanche synallagmatique dans le 1er cas et unilatérale dans le second. Le preneur, lorsqu’il s’agit
de la location-vente, promet d’acquérir tandis que, dans le cas du crédit-bail, il bénéficie juste de la faculté
d’acquérir. Ensuite et relativement l’acquisition effective du bien, le preneur, quand il décide de lever l’option
d’achat, doit verser en sus des loyers une valeur résiduelle fixée dans le contrat. Par contre, dans le cas de la
location-vente, le preneur verse durant toute la durée du contrat, un montant appelé redevance et comprenant à la
fois le loyer et la marge du prix de vente. Ainsi, la vente ne sera conclue dans ce cas qu’après le dernier versement
du terme.
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Art. 5, L. 2012-02 du 3 janv. 2012 sur le crédit-bail
5
Selon l’art. 8 de cette loi les opérations pouvant être qualifiées de crédit-bail sont :
Outre les conditions communes de formation du contrat, le crédit-bail est soumis à des
conditions spéciales.
En effet, le crédit-bail peut être conclu entre personnes morales ou entre une personne morale
et une personne physique. Le crédit bailleur ne doit être qu’une banque, un établissement
financier du crédit-bail ou de location avec option d’achat ou tout autre établissement financier
à caractère bancaire ou système financier décentralisé ayant obtenu l’autorisation requise6. Le
crédit preneur quant à lui peut être une entreprise, une société ou une personne physique.
En outre, le crédit bailleur demeure propriétaire du bien pendant la durée du contrat sous réserve
de la levée de l’option d’achat par le crédit preneur (cf. art.3 al.1 de ladite loi). Celui-ci est
donc locataire durant le contrat sous cette même réserve.
Par ailleurs, l’article 7 al.2 de la loi n°2012-02 du 03 janvier 2012 sur le crédit-bail au Sénégal
dispose que : les biens qui ne sont pas en libre circulation en vertu de la législation en
vigueur ne peuvent pas faire l’objet d’un contrat de crédit-bail. Le bien objet du crédit-bail doit
être licite.
En ce qui concerne la forme du crédit-bail, la loi ci-dessus exige en son article 11 qu’il soit
matérialisé par un écrit.
S’agissant de son objet, le crédit-bail peut porter sur tout type de biens : meubles, immeubles,
corporels ou incorporels.
Les biens meubles sont ceux qui sont susceptibles d’être déplacés. Ils en existent trois catégories
que sont les biens meubles par nature (ceux disposant d’une mobilité propre ou empruntée.
Exemple : véhicules, habits…), les biens meubles par anticipation (immeubles par nature mais
destinés à être détachés du fond. Exemple : récoltes vendues sur pied, vente de matériaux qui
proviendront d’un immeuble à démolir) et les biens meubles par détermination de la loi (ceux
incorporel que le législateur classe arbitrairement dans les meubles. Exemple : droits réels, parts
sociales, droit d’auteur, actions…).

- Des opérations de location de biens d’équipement ou de matériel ou d’outillage qui, quelle que soit leur 11
qualification, donnent au locataire la possibilité d’acquérir, à une date convenue avec le propriétaire, tout ou partie
des biens loués, moyennant un prix arrêté d’accord parties et prenant en compte les paiements effectués à titre de
loyers ;

- Et des opérations, quelle que soit leur qualification, par lesquelles une entreprise finance, pour son compte,
l’achat et/ou la construction de biens immobiliers à usage professionnel, afin de les donner en location à des
personnes à la demande desquelles elle a agi et qui pourront en devenir propriétaires de tout ou partie, au plus tard
à l’expiration du bail.
6 cf. art.6 al.3 de la loi n°2012-02 précitée
Les biens immeubles sont déterminés par leur fixité dans l’espace. Il en existe deux catégories
que sont les immeubles par nature (le sol et tout ce qui y adhère. Exemple : terrain, bâtiment…)
et les immeubles par destination (des meubles par nature affectés à l’exploitation d’un
immeuble ou scellés à celui-ci. Exemple : chaises et tables d’un restaurant, portes et fenêtres
d’une maison…).
Les biens meubles et immeubles susceptibles de faire objet d’un crédit-bail peuvent être
corporels (c’est-à-dire ayant une existence physique) ou incorporels.
Le bien objet du crédit-bail, qu’il soit meuble ou immeuble, doit avoir été acheté ou réalisé en
vue de la location et destiné à être utilisé dans les activités professionnelles, commerciales,
industrielles, agricoles, de pêche ou de service ou tout autre activité économique7
Il en résulte que deux éléments caractérisent le bien objet du crédit-bail. L’un est intentionnel et
se rapporte à la destination du bien acheté ou réalisé : la location. Ainsi, se voient être écartées
la revente (acte de commerce) et la donation (acte civil). L’autre est matériel et se rapporte à
l’utilisation dudit bien : usage professionnel c’est-à-dire dans le cadre de l’entreprise (crédit-
preneur) et pour son exploitation.

Mécanisme du crédit-bail

 L’entreprise choisit son équipement.

 Le fournisseur est réglé par la société de crédit-bail.

 La durée du contrat doit correspondre à la vie économique du bien loué.

 A la fin du contrat, le locataire peut acquérir le bien loué, le restituer ou dans certains
cas renouveler le contrat sur de nouvelles bases.

Caractéristiques du crédit-bail

Le contrat de crédit-bail est un contrat :

- solennel : c'est-à-dire que le contrat nécessite une forme particuliers (acte sous seing privé)

- synallagmatique : c'est-à-dire un contrat bilatéral dans lequel le crédit bailleur s'engage à


délivrer le bien objet de crédit-bail et le preneur s'engage à payer le loyer pendant la durée de
location.

7 cf. art.7 al.1 de la loi n°2012-02 12


- à titre onéreux : vu l'existence d'une prestation (bien) et d'une contre prestation (loyer).

- commutatif : puisque l'avantage réciproque des contractant est connu dès la conclusion du
contrat.

- de gré à gré : le contrat n'est valable que s'il y'a consentement des parties contractantes.

- successif : puisque l'exécution du contrat de crédit-bail s'échelonne dans le temps.

La rédaction d'un écrit est donc nécessaire à sa validité et il crée des obligations réciproques a
la charge de chacune des parties8.

Les éléments constitutifs d'un contrat de crédit-bail sont :

· un contrat de vente entre le fournisseur du bien et la société de financement par crédit-bail qui
acheté le bien choisi par le preneur.

· Un contrat de location entre la société de crédit-bail (crédit bailleur) et le preneur (locataire)

· Une promesse de vente entre la société de crédit-bail et le preneur.

Un contrat de crédit-bail comprend en principe les clauses suivantes :

· Le crédit bailleur reste le propriétaire, du point de vue juridique de l'actif.

· Le preneur est tenu de verser un ou plusieurs loyers à la signature du contrat. Le preneur entre
en possession de matériel. Les paiements restant sont normalement effectuées à intervalles
réguliers.

· La société de leasing a la possibilité d'intégrer ou non une valeur résiduelle dans le calcul des
loyers

· Au terme de la période de location, le preneur a l'option d'acheter le matériel, de renouveler


le bail, ou de restituer l'équipement au crédit bailleur9.

Avantages du crédit-bail

 Le crédit-bail est d’une grande souplesse d’utilisation.

8
Art. 3, L. 2012-02 du 3 janv. 2012 sur le crédit-bail 13
9
Art. 3, L. 2012-02 du 3 janv. 2012 sur le crédit-bail
 Il n’exige aucun autofinancement.

 L’utilisateur étant locataire du bien financé n’a pas à fournir de garantie réelle.

 Il n’y a pas d’immobilisation au bilan puisqu’il s’agit de location.

 Les loyers sont passés en frais généraux à condition que la durée de location corresponde
à la vie économique du bien loué.

Inconvénients du crédit-bail

 Il s’agit d’une technique de financement d’un coût élevé, surtout pour les petits
investissements.

 Ce type de financement est réservé aux biens standards.

 Les biens financés ne peuvent être donnés en garantie.

 Le locataire en rachetant le bien, même pour une valeur résiduelle faible, doit l’amortir
à l’issue du contrat. Par ailleurs, la mise en œuvre des clauses de sortie prévues en cas
de rupture anticipée du contrat peut avoir des conséquences financières assez lourdes
pour le crédit-preneur. Il en est de même en cas de non-paiement des loyers.

A l’aspect du financement de l’investissement vient s’ajouter l’aspect du financement de


l’exploitation.

Section II/ Le financement du cycle d’exploitation


Indépendamment des investissements que nous venons d’étudier, l’exploitation engendre des
besoins (§ 2) qui nécessitent des moyens financiers (§ 2).

Para 1 : Les besoins de financement du cycle d’exploitation


L’importance des besoins issus de l’exploitation dépend essentiellement de la durée du cycle
de fabrication, de la gestion des stocks, de la politique de crédit consenti aux clients et des délais
de paiement obtenus des fournisseurs. Nous étudierons le besoin en fonds de roulement (A)
avant de nous intéresser à la trésorerie de l’entreprise (B)

A- Le Besoin en Fonds de Roulement


Le Besoin en Fonds de Roulement finance les besoins liés au cycle d’exploitation. Il est issu
des décalages provenant des opérations d’exploitation.

14
Le fonds de roulement mesure les ressources dont l’entreprise dispose à moyen et long terme
(hors chiffre d’affaires) pour financer son exploitation courante. Il est aussi appelé FRNG pour
Fonds de roulement Net Global.

Plus concrètement, le fonds de roulement représente la somme dont dispose l’entreprise pour
payer ses fournisseurs, ses employés et l’ensemble de ses charges de fonctionnement, en
attendant d’être rémunérée par ses clients.

Le fonds de roulement est une notion comptable. Sa vocation est d’expliquer de manière
chiffrée l’utilisation de l’argent de l’entreprise (tout du moins une partie de cet argent).

En langage de gestionnaire, le fonds de roulement représente la différence entre les ressources


à long terme de l’entreprise (capitaux permanents) et son actif immobilisé.

Si le fonds de roulement d’une entreprise représente l’argent disponible pour couvrir ses
charges courantes d’exploitation, le besoin en fonds de roulement représente la somme dont
elle a besoin pour payer ses charges courantes, en attendant d’être rémunérée par ses clients.
En effet, il y a souvent un décalage entre les dépenses et les entrées d’argent au sein d’une
entreprise.

Par exemple : un boulanger qui produit des baguettes de pain doit consommer de la farine, de
l’eau, du sel avant même qu’elles ne soient vendues !

Le besoin en fonds de roulement correspond aux liquidités dont l’entreprise doit disposer pour
continuer à produire, avant ses encaissements clients.

Le besoin en fonds de roulement se calcule comme suit :

BFR = Stocks + Créances - Dettes (non financières)

Les trois notions : fonds de roulement, besoin en fonds de roulement et trésorerie sont
intimement liées. Ces notions expliquent l'utilisation de la trésorerie de l'entreprise dans le cadre
de ses dépenses courantes. La relation avec la trésorerie est la suivante :

Trésorerie = FR - BFR

L'argent qui se retrouve en caisse, au sein de l’entreprise correspond : aux excédents des
capitaux propres (le FR) ainsi qu'aux excédents engendrés par les activités d'exploitation de
l'entreprise (le BFR).

15
B- La trésorerie
La trésorerie d'une entreprise est définie comme étant l’ensemble des liquidités disponibles en
caisse ou en banque. Elle est calculée sur la base du solde de la caisse, des comptes bancaires
et chèques postaux. La gestion de la trésorerie s'articule autour de la gestion de deux grands
axes : les liquidités et les risques financiers.

La gestion des liquidités englobe toutes les activités relatives aux rentrées d’argent, la capacité
de paiement de l’entreprise, la rentabilité des fonds engagés et la réduction des risques qui y
sont liés. Elle permet d’optimiser leur exploitation, en anticipant les risques qui peuvent en
découler, notamment au niveau des taux d’intérêt.

La gestion des risques financiers implique la classification de ces derniers selon deux types,
systématique et non systématique. Le premier est lié aux fluctuations globales du marché, alors
que le second concerne un groupe d’actions précis dans un secteur particulier, notamment celui
de l’entreprise.

Ainsi, l’exploitation engendre des besoins temporaires de trésorerie. Faire face aux échéances
des règlements exige des liquidités qui ne sont pas toujours disponibles. En cas d’insuffisance,
l’entreprise doit s’en procurer à l’extérieur et des ajustements de court terme sont nécessaires.

Para 2 : Les moyens de financement du cycle d’exploitation


Le financement du cycle d’exploitation peut être assuré par la mobilisation des créances de
l’entreprise (A) ou le recours à des crédits inter-entreprises (B).

A- Le crédit consenti par les fournisseurs


Il s’agit de l’octroi de délais de paiement. Les délais de règlement accordés par les fournisseurs
constituent une forme de crédit inter-entreprises qui permet le financement des stocks
immobilisés et d’une partie des délais de paiement accordés aux clients.

Le crédit interentreprises est le crédit financier que les entreprises s'accordent entre elles dans
le cadre de leurs relations commerciales d'achats et de ventes. Il naît du décalage entre la
livraison des biens ou la délivrance des prestations par le fournisseur, en général concomitantes
avec leur facturation, et leur paiement par le client. Il trouve son fondement dans la nécessité
où se trouve chaque entreprise de développer son chiffre d'affaires en accordant du crédit à ses
clients, c'est-à-dire en permettant à ceux-ci de ne payer qu'à terme la livraison des biens ou des
services qu'elle leur vend.

16
Par logique économique, le législateur a encore apporté un assouplissement au monopôle
bancaire en faveur des entrepreneurs des secteurs non financiers. C’est ainsi que les
interdictions définies à l’article 13 de la Loi bancaire ne font pas obstacle à ce qu’une
entreprise, quelle que soit sa nature, puisse notamment dans l’exercice de son activité
professionnelle consentir à ses cocontractants des délais ou avances de paiement. De telles
opérations de crédit résulteraient du rapport de forces qui existe entre clients et fournisseurs,
les clients voulant maximiser le crédit gratuit accordé par leurs fournisseurs10.

B- Mobilisation de créances
Pour se procurer des liquidités l’entreprise qui a accordé des délais de paiements peut mobiliser
ses créances sans attendre leur échéance.

1- Escompte d’effets de commerce :

L'escompte est une opération qui consiste pour une banque à racheter à une entreprise les effets
de commerce (billets à ordre et traites) dont elle est porteuse (bénéficiaire final) avant
l'échéance et ce moyennant le paiement d' agios, le cédant (le bénéficiaire du crédit) restant
garant du paiement.

L'escompte fait donc intervenir trois parties : l'entreprise bénéficiaire de l'escompte, appelée
le cédant , le débiteur de l'effet, appelé le cédé et le banquier qui est, lui, le cessionnaire .

L'escompte permet donc à une entreprise d'assurer la liquidité d'une partie de ses créances et
son coût est, en principe, moins élevé que le découvert.

Le porteur d’un effet de commerce peut se servir de celui-ci pour se procurer de l’argent sans
attendre l’échéance, pour cela il va négocier l’effet à la banque pour recevoir la valeur nominale
de l’effet diminué du montant de l’agio :

Agio = Escompte + Commissions + TVA

Escompte = Valeur nominale * Taux * N/36000

Donc l’escompte de l’effet de commerce veut dire tout simplement le fait négocier avec la
banque pour se procuré de la trésorerie avant l’arrivée de son échéance.

10
V. à cet effet, Loi française n° 2008-776 du 4 août 2008 dite de Modernisation de l’Économie ou LME. 17
Exemple :

15/09/2016 le fournisseur Bernard escompte une traite de 6000 Euro échéant le 30/10/2016.

Le 20/09/2016 Bernard reçoit de sa banque un avis d’escompte dont les éléments sont les
suivants :

Solution

Donc :

00*12*40/36 000 = 80

L’escompte d’effets de commerce est ainsi un crédit à court terme. Son sera différent selon les
banques, la nature et le montant du besoin, la négociation entreprise...

Il se composera :

 des frais de dossier pour l’ouverture de la ligne ;


 du taux d’intérêt : souvent inférieur au taux appliqué aux autorisations de découvert et
relais sur subventions.
 des commissions diverses : commission d’escompte, frais de bordereau…

S’agissant des garanties, deux cas de figure existent :

18
 La technique de l’escompte porte en elle-même la garantie. La banque est propriétaire
des créances correspondantes aux effets escomptés et bénéficie à ce titre de droits
(solidarité des signatures et inopposabilité des exceptions).
 Une garantie complémentaire peut être demandée par la banque.

La banque peut pratiquer une retenue par prélèvement sur les avances accordées à l'entreprise
(généralement 5 à 20 % des créances) et plafonnée en fonction de la ligne d’escompte accordée.

Ces sommes sont bloquées sur un compte spécial au nom de l’entreprise et constituent une
garantie complémentaire pour la banque en cas d’impayés.

2- Loi DAILLY :

Pour faire face à la concurrence, les entreprises doivent souvent accorder des délais de
paiement à leurs clients ; elles doivent aussi parfois subir des retards dans les règlements ou
assurer leurs approvisionnements en matières premières.

Une entreprise peut donc avoir à faire face à des difficultés de trésorerie en raison de la lenteur
des règlements des ventes. Pour résoudre ses besoins de trésorerie, l'entreprise va se retourner
vers son banquier qui pourra lui proposer un financement au titre de la Loi DAILLY.

a- Caractéristiques essentielles

Cette technique de crédit permet à une entreprise quels que soient sa forme (entreprise
personnelle, société, profession libérale, agriculteur) et son secteur d'activité (industrie,
commerce ou services) de mobiliser la partie de son poste "clients" qui n'est pas représentée par
des effets de commerce.

Cette technique de financement permet donc à une entreprise de bénéficier de crédit en


contrepartie de la production de factures (ou autre document) représentatives de créances sur
ses clients ou de créances sur une collectivité publique (État, région, département, commune).

Il est donc possible de mobiliser une créance sur un client, sur une subvention obtenue mais
non versée, sur un crédit de TVA, sur une indemnité d'assurance due mais non réglée, etc.

b- Modalités de fonctionnement
- Principes

19
La mobilisation "Dailly" met en relation un établissement de crédit, un emprunteur et un
débiteur de la créance.

La cession ou le nantissement d'une créance ne peut être consenti qu'au profit


d'un établissement de crédit : banque ou société financière.

L'emprunteur doit être une entreprise (société, association, commerçant, artisan, profession
nel libéral, agriculteur, etc.).

Le débiteur de la créance cédée ou nantie doit être une entreprise ou une collectivité
publique (État, région, département ou commune) ; il est impossible de mobilier
des créances sur des particuliers (ex. un avocat ne peut utiliser cette technique s'il travaille avec
des particuliers).
En cas d'impayés, le cédant, bénéficiaire du crédit est solidaire du débiteur cédé.

- Modalités de mobilisation

Le banquier signe avec son client une convention cadre dans laquelle seront définies les
conditions de mobilisation, d'utilisation et de recouvrement des créances.

La cession s'opère par la remise à l'établissement de crédit d'un bordereau reprenant les
caractéristiques des créances cédées.

Pour prévenir les risques d'impayés, le banquier peut :

 notifier la cession au débiteur : la notification interdit au débiteur de la créance de


régler sa dette en d'autres mains que l'établissement de crédit bénéficiaire de la cession
ou du nantissement,

 demander au cédé de s'engager à le payer (acceptation) ; après acceptation, le cédé ne


peut plus invoquer d'éventuels litiges avec son fournisseur.

- Formes du crédit

Le crédit accordé peut être effectué de deux manières :

 sous forme d'escompte : le compte de l'emprunteur est crédité du montant des factures
ou des créances déduction faite des agios,

20
 sous forme d’avance en compte : l'emprunteur bénéficie d'une autorisation
de découvert garantie par les créances cédées. L'avance est souvent matérialisée par
l'ouverture d'un deuxième compte pour faciliter le suivi.

La cession peut parfois garantir d'autres crédits (crédits par signature par exemple).

- Les avantages et les inconvénients du système

 Avantages : les entreprises bénéficient d'une facilité plus grande de mobilisation de


leurs créances, car celle-ci est possible dès la facturation.

 Inconvénients : contrairement à l'escompte classique, ce n'est pas un moyen de


recouvrement et le bénéficiaire du crédit doit continuer à suivre le recouvrement de
ses créances.

3- L’affacturage

Les entreprises sont souvent obligées d'accorder à leurs clients des délais de paiement.

Pour financer ce décalage, elles peuvent avoir recours à l'affacturage. L'affacturage est
un contrat par lequel un établissement de crédit spécialisé, appelé factor , achète ferme
les créances détenues par un fournisseur, appelé vendeur, sur ses clients, appelés acheteurs
ou bénéficiaires de services et ce moyennant rémunération.

L'opération consiste donc pour le fournisseur à céder au factor ses factures en échange de quoi
ce dernier lui consentira une avance sous déduction des intérêts et commissions.

Le vendeur accorde généralement au factor l'exclusivité de l'affacturage de toutes ses créances.

Le factor se charge de l'encaissement des créances .

En contrepartie, le factor avance au vendeur le montant des créances cédées moyennant le


paiement de commissions.

En cas d'impayés, le risque est assuré par le factor qui ne peut se retourner contre le vendeur.

L'affacturage est assuré par une trentaine d'établissements spécialisés ; parmi eux, les cinq
premiers détiennent 81 % de parts de marché. Toutes les filiales des grandes banques ont
des sociétés d'affacturage.

21
Le fournisseur doit obtenir l'approbation du factor pour chacun de ses clients avec généralement
un plafond par client.

Le factor offre donc trois services :

 financement du poste client (avance d'un pourcentage de la créance : généralement 80


%) : ce service n'est pas utilisée, si l'entreprise n'a pas besoin d'avance en trésorerie,
mais souhaite seulement garantir le recouvrement de ses créances ;

 gestion du recouvrement des créances (c'est le factor qui se charge de récupérer le


montant des factures),

 garantie de paiement de ces dernières (en cas d'impayé, le risque est à la charge du
factor).

La tendance à l'affacturage à la carte a poussé certains factors à proposer des contrats dans
lequel le factor n'impose pas la remise totale du chiffre d'affaires (l'entreprise peut demander un
financement seulement sur une partie de ce chiffre d'affaires).

C- Les crédits de trésorerie

C’est une avance d’argent consentie par la banque pour financer des déficits de trésorerie. Ils
sont destinés à faire face aux difficultés temporaires de trésorerie : découvert bancaire, facilité
de caisse, crédits relais, crédit de campagne. Les crédits à court terme ont pour objet une aide
de trésorerie à l’entreprise pour un délai qui n’excède pas deux ans. Certains de ces crédits
fonctionnent essentiellement sur le mécanisme du prêt et reposent sur la solvabilité du crédité
c’est-à-dire la confiance qui l’inspire.

Ces prêts à court terme se présentent sous des modalités techniques très variées, mais sont
soumis pour l’essentiel aux règles générales du prêt classique. Ainsi lorsqu’il y a une avance de
fonds, le client a une obligation de restitution. Le prêt peut être à durée déterminée ou
indéterminée mais contrairement au prêt classique, le banquier peut surveiller l’utilisation des
fonds. On distingue les diverses formes suivantes :
Le crédit de courrier
C’est une aide financière de très courte durée de 24 à 48 h accordée à l’entreprise par le banquier
et qui lui permet d’effectuer un règlement avant une rentrée de fonds imminente.
Les facilités de caisse

22
Ce sont des concours bancaires d’une durée plus longue que le crédit de courrier en général de
quelques jours que les entreprises utilisent pour assurer les échéances de fin de mois. Elles
peuvent se répéter à condition que leur apurement se fasse rapidement et régulièrement. Elles
permettent de pallier au décalage entre une dépense et une recette en principe assurée.
Le découvert
C’est un crédit d’une durée plus longue que la facilité de caisse de l’ordre de quelques mois et
parfois un an. Il permet à l’entreprise de faire face à une insuffisance momentanée de fonds de
roulement. Il présente l’avantage d’une extrême souplesse d’utilisation. L’entreprise dispose
d’un concours financier exactement adapté à ses besoins ; en principe proportionnel à
l’utilisation. Il est en général un crédit revolving c’est-à-dire que chaque fois que le client a
réglé le solde débiteur, il peut de nouveau utiliser le découvert automatiquement.
On peut ajouter à ces prêts le crédit de relais qui est un découvert particulier et les crédits de
campagne qui sont des découverts accordés pour faire face à une insuffisance de trésorerie
résultant d’une activité saisonnière.
Nous savons que l’entreprise pour faire face à ses besoins de financement dispose de multiples
sources de financement néanmoins l’entreprise voit son champ de possibilités limité par des
contraintes qu’elle doit respecter pour pouvoir enfin choisir le mode de financement le plus
adéquat.

Nous verrons donc les contraintes à respecter puis les critères de choix du mode de financement.

23
Section III / Les limites du financement de l’entreprise
L’entreprise gère ses activités avec pour objectif d’assurer son équilibre financier, contrainte
permanente et impérative. Le financement de l’entreprise est limité selon la situation financière
de l’entreprise (§ 1) et selon d’autres contraintes (§ 2).

Para 1 : Les contraintes liées à la situation financière de l’entreprise


Parmi les diverses conceptions du financement de l’entreprise, la conception classique est celle
qui comporte le plus de contraintes (C). Les contraintes liées à la liquidité (A) ou la rentabilité
(B) ne sont pas également sans conséquences sur le choix des sources de financement.

A- La liquidité
L’entreprise est liquide quand les ressources dégagées par ses opérations courantes lui
fournissent les disponibilités suffisantes pour faire face à ses échéances à court terme. Avec le
capital, la trésorerie est le deuxième aspect de la dimension financière de l’entreprise. C’est une
contrainte dans le sens où si l’entreprise se retrouve en situation d’incapacité de payer à
l’échéance (en état de cessation de paiement), elle risque le dépôt du bilan.

B- La rentabilité, la solvabilité
La rentabilité (résultat/moyens) est la capacité de l’entreprise à rémunérer des fonds durables
mis à sa disposition, la principale contrainte étant la confiance des partenaires (prêteurs,
actionnaires, clients, fournisseur). En effet, si la confiance baisse le niveau d’engagement s’en
ressent et l’entreprise peut alors être conduite à déposer le bilan.

La solvabilité est la capacité de l’entreprise à faire face à ses engagements à leur échéance.
L’entreprise est contrainte à rester solvable à contrario son image se dégradera et de plus
certains partenaires (banques, fournisseurs) risquent de refuser de poursuivre leurs relations.
Cela peut conduire à réduire son activité ou pire à déposer le bilan.

C- Les contraintes classiques


1- La règle de l’équilibre financier

La règle de l’"équilibre financier" exige que les capitaux utilisés par l’entreprise pour acquérir
des biens (immobilisation, stock, crédit clients) restent à la disposition de l’entreprise pendant
une durée qui correspond à la durée de vie ou d’utilisation du bien acquis.

Un certain équilibre doit s’établir dans le temps, entre le temps de mise à disposition des
capitaux et leur temps d’utilisation.

24
Les emplois stables doivent être financés par des ressources durables (il est apprécié à partir du
bilan fonctionnel) le fonds de roulement net global est la marge de sécurité qui permet de
financer les besoins en liquidités nécessaires à la vie de l’entreprise.

Le calcul de l’équilibre financier sert à évaluer le patrimoine de l’entreprise et à donner des


valeurs chiffrées des dividendes, qui seront perçus par les actionnaires. Celui-ci est mesuré
par l’actif net.
Par actif net, on entend :

 Les capitaux propres ou la différence entre les actifs et les dettes externes.
 Du point de vue de l’analyse financière, il constitue une garantie de la solvabilité de
l’entreprise vis-à-vis de ses créanciers.
 D’un point de vue liquidatif, il constitue un indicateur de la capacité de l’entreprise à
faire face à l’ensemble de ses dettes à partir des ressources dégagées par la vente des
actifs et le recouvrement des créances. Un actif net positif est le signe de la bonne santé
de l’entreprise. Alors que, un signe négatif est synonyme de pertes et d’un risque
potentiel de faillite pour l’entreprise.
 La valeur patrimoniale de l’entreprise.

D’un point de vue financier, il constitue une garantie exigée par les banques pour l’octroi d’un
prêt.

D’un point de vue comptable, il constitue un indicateur de la marge de sécurité offerte par une
entreprise en cas d’accident conjoncturel.

2- La règle de l’autonomie financière

La règle de l’autonomie financière permet d'évaluer le degré d'indépendance de l'entreprise vis-


à-vis de ses prêteurs. En effet, une entreprise risque de devenir dépendante de ses prêteurs si
elle est trop endettée.

Elle permet également d'apprécier la capacité d'endettement. En général, un établissement


financier exigera que ce ratio soit supérieur à 1 avant de prêter à l'entreprise. En effet, pour faire
appel aux emprunts bancaires, l’entreprise ne doit pas avoir des dettes financières déjà trop
importantes. De plus la dette financière ne doit pas représenter plus de 3 ou 4 fois le caf.

3- La règle du minimum d’autofinancement

25
L’entreprise doit autofinancer une partie (en général 30%) des investissements pour lesquels
elle sollicite des crédits. Ce minimum d’autofinancement est souvent demandé par les banques,
notamment au moment de la création de l’entreprise.

Para 2 : Les autres contraintes non financières


Certaines sont juridiques (A), d’autres sont économiques (B).

A- Les contraintes juridiques


Le statut juridique : par exemple seules les entreprises publiques ont accès aux titres
participatifs, seules les sociétés de capitaux peuvent émettre des obligations, des actions…

Par ailleurs, le contenu des règles et des lois assurant la protection des apporteurs de capitaux
était largement déterminé par l’appartenance à une grande catégorie de systèmes juridiques.
Ainsi, le système de common law, selon eux plus flexible (parce que fondé sur la jurisprudence)
et plus attentif au respect des engagements privés, offrirait une meilleure protection aux
investisseurs (actionnaires ou créditeurs). Tandis qu’à l’opposé le système de french civil law,
qu’ils considèrent plus rigide (parce que fondé sur une loi codifiée) et plus soucieux de faire
prévaloir l’intérêt public, serait moins favorable aux apporteurs de capitaux privés. Or,
l’appartenance à l’un ou à l’autre de ces systèmes peut être considérée, comme exogène dans
la mesure où elle a été le plus souvent (c’est-à-dire pour une grande majorité de pays) imposée
de l’extérieur, principalement par les mouvements de colonisation.
La protection des investisseurs influençait très significativement le développement financier.
En particulier, il mettait en évidence qu’une meilleure protection des actionnaires augmentait
la capitalisation boursière rapportée au PIB. Dans le même esprit, certains auteurs ont montré
que les droits des créditeurs (notamment en situation de faillite), tels qu’ils sont inscrits dans la
loi mais aussi tels qu’ils sont appliqués, influencent la taille des marchés du crédit. Ces résultats
tendraient à prouver que le développement financier d’une économie peut s’expliquer par les
règles et les lois qui régissent les contrats financiers, ce qui renvoie à l’« origine » de son
système juridique11.
B- Les contraintes économiques
1- La taille de l’entreprise

11
Les législateurs UEMOA et OHADA ont en vue cette approche dans la mise en œuvre des règles uniformes afin 26
de garantir la sécurité des opérations financières au sein des espaces communautaires.
Les grandes entreprises ont, évidemment, un éventail de choix beaucoup plus grand que les
petites, lesquelles par exemple ne peuvent faire appel public à l’épargne. Aux termes de l’article
81 de l’AUSCGIE les entreprises de petite taille ne peuvent pas faire d’appel public à l’épargne
car selon ce texte « Sont réputées faire publiquement appel à l'épargne :

- les sociétés dont les titres sont inscrits à la bourse des valeurs d'un Etat partie, à dater de
l'inscription de ces titres ;

- les sociétés qui, pour offrir au public d'un Etat partie des titres, quels qu'ils soient, ont recours
soit à des établissements de crédit ou agents de change, soit à des procédés de publicité
quelconque, soit au démarchage.

Il y a également appel public à l'épargne, dès lors qu'il y a diffusion des titres au-delà d'un cercle
de cent (100) personnes. Pour l'appréciation de ce chiffre, chaque société ou organisme de
placement collectif en valeurs mobilières constitue une entité unique ».

Ainsi, la taille de l’entreprise peut constituer un handicap pour l’accès au financement des
capitaux étrangers. A ce titre, les petites et moyennes entreprises ne pourront pas avoir accès à
certains capitaux du marché financier.

Ce qui, en plus de certaines contraintes juridiques, pourraient attenter à l’expression de leurs


besoins d’investissement, compte non tenu de l’état du marché financier.

2- L’état du marché financier

D’une manière générale, si le marché financier est déprimé, il ne favorise pas les émissions de
titres et les entreprises doivent trouver des financements de substitution.

Rappelons que l’entreprise est d’autant plus vulnérable qu’elle est soumise à une forte
dépendance ou à une forte concurrence notamment quand les marchés financiers connaissent
eux-mêmes des difficultés ce qui va produire des répercussions sur l’entreprise, qui se traduira
pour elle en difficultés pouvant être par ex, la faillite. Autre cause de difficultés, quand
l’entreprise se trouve dans la situation où elle accède difficilement aux systèmes de
financement.

Au terme de cette discussion, nous rappelons que pour se financer, quelle que soit sa forme,
son importance, une entreprise a à sa disposition plusieurs moyens de financement.

27
Reste pour elle, à savoir, quel investissement réaliser (choisir le plus rentable selon plusieurs
critères : actualisation, délai de récupération) et comment le financer (en comparant les coûts
respectifs, recherchant l’efficacité économique et la sécurité). C’est ce que nous avons vu en
deuxième partie, en exposant un ensemble de contraintes. Il s’agira de faire appel à l’analyse
financière (le tableau de financement, bilan fonctionnel, liquidité, solvabilité, la trésorerie nette,
budget de trésorerie). Le but étant de limiter les risques.

Bien sûr que la décision d’investissement est une décision risquée mais elle est indispensable.
Selon un auteur, «ne pas investir, c’est la mort lente, mal investir, c’est la mort rapide»12. De
même pour limiter les effets pervers du financement, il est nécessaire que l’entreprise ait recours
à l’analyse stratégique qui permet principalement d’anticiper et de prévoir la défaillance de
l’entreprise.

12
O. Geliner, Morale de l’entreprise et destin de la Nation, Plon, 1965. 28
29
Chapitre 2 : La finance islamique
Depuis la crise dite des subprimes, force est de constater que la physionomie de la finance
mondiale a évolué. L'équilibre financier – jusque-là porté par une liquidité mondiale abondante
qui permit, par les excédents des uns (pays émergents et produits pétroliers), de financer les
déficits des autres (surtout les États-Unis) – rouage d'une machine déjà fragile, s'effritait au
regard de cette crise bancaire et financière et dont l'impact sur l'économie réelle est indéniable.
En effet, les financements classiques ne pourront, à eux seuls, assumer une dynamique de
croissance au niveau mondial en assurant les flux d'épargne et d'investissements nécessaires.
Dans ce contexte, le nouvel équilibre financier à définir ne pouvait faire l'impasse sur une
nécessaire modification du business model des banques13.

Si la finance islamique est une idée neuve en Europe – sa pratique contemporaine étant
incontestablement un produit de la mondialisation

La véritable raison d'être d'un système financier, qu'il soit « conventionnel » ou « islamique »,
est de mobiliser les ressources financières et de définir leur allocation entre différents projets
d'investissement. Néanmoins, il apparaît clairement qu'entre les principes de l'ordre moral
islamique – où le profit ne représente pas le principal critère de décision – et ceux de la finance
conventionnelle (par souci pédagogique, nous utilisons ce terme, dans notre étude, pour
désigner les investisseurs et les pratiques bancaires « classiques », par opposition aux
investisseurs et aux finances islamiques) – axés sur une optimisation du couple
rendement/risque – des divergences subsistent14.

Section 1 : Présentation de la finance islamique


La finance islamique est apparue récemment (§ 1) mais elle a connu un essor fulgurant (§ 2)
compte tenu de son originalité (§ 3).

Para 1 : Une apparition récente


Si la finance islamique trouve ses fondements dans des principes et interdictions, vieux de
quatorze siècles, son apparition est récente et remonte au début des années soixante-dix. Les
premières institutions financières islamiques datent des années soixante avec la constitution en

13
V. E. Jouini et O. Pastré, Enjeux et opportunités du développement de la finance islamique pour la place de 30
Paris. Dix propositions pour collecter 100 milliards d'euros, rapport pour Paris-Europlace, déc. 2008, p. 5 ; cf.,
aussi, O. Rochdahou, La réception de la finance islamique en France, Banque 2013, no 759, p. 71 ; J. Maazouz,
Finance islamique en France : entre résistance idéologique et défaut méthodologique, Banque 2013, no 759, p. 72.
14
B. du Marais, La contribution des grandes religions et éthiques à la résolution de la crise financière, Banque
2013, no 759, p. 74.
1963 des caisses rurales MitGammar en Égypte, et en Malaisie avec la création des Caisses
d'épargne des pèlerins (Pilgrim's Management Fund -Tabung Hadjji). Ces premières banques
ont été créées sur le modèle des caisses d'épargne allemandes et visaient à favoriser la
bancarisation des populations rurales dans un entour régional. Toutefois, l'expérience fut courte,
MitGammar étant dissoute en 1967 par Nasser. Un auteur explique cet échec : « Les débuts très
prometteurs de cette expérience ont probablement été la cause de l'échec final, car ses réussites
initiales portaient ombrage aux structures classiques d'encadrement du monde rural »15

Para 2 : L'essor de la finance islamique


La finance islamique, telle qu'elle se pratique aujourd'hui, prend son véritable essor en 1975
concomitamment à ce que l'on a appelé la montée du panarabisme, au boom pétrolier, mais
aussi à l'afflux des pétrodollars après la guerre du Kippour. Ce mouvement a été accompagné
par la création de diverses organisations islamiques, telles que l'Organisation de la conférence
islamique (OCI) en 1970, qui permit la mise en place de la Banque islamique du développement
(BID). Établie en 1973 à Djedda, cette institution financière intergouvernementale proposait
des services respectant les principes de la charia et avait pour objectif de participer au
développement régional à l'instar des premières institutions. Les actionnaires principaux de
cette institution bancaire de développement furent l'Arabie saoudite (25,95 %), la Libye (16,15
%) et le Koweït (12,92 %).

En 1975, la Dubaï Islamic Bank (DIB), première banque islamique d'initiative privée, a fait son
apparition dans les Émirats arabes unis. Puis, la finance islamique a connu un développement
constant situé dans la zone turcophone, le sous-continent indien et le Sud-est asiatique et, plus
précisément, dans les trois zones culturelles de l'islam : le Maghreb, l'Afrique subsaharienne et
le Moyen-Orient arabo-persique. On notera à ce propos que le Pakistan décida l'islamisation
complète de son secteur bancaire en 1979, rejoint en 1983 par le Soudan et l'Iran. Est créée en
1977 l'Association internationale des banques islamiques (AIBI). Elle a pour vocation de «
renforcer les liens entre les banques islamiques membres et coordonner leurs activités, de
réaffirmer leur caractère islamique pour la réalisation de leurs intérêts communs et la
consolidation de leurs objectifs, en particulier l'établissement d'un système de relations au sein
de la communauté islamique ; de fournir une assistance technique aux pays désireux d'établir

15
H. Algabid, Les banques islamiques, Economica, 1990, p. 229. 31
des banques islamiques et de former leur personnel ; de publier des recherches sur les principes
de l'économie islamique »16

Para 3 : L'originalité du système financier islamique


À l'instar du système financier dit classique, la finance islamique vise à la mobilisation de
ressources financières et à leur allocation à différents projets d'investissement. Toutefois, la
finance islamique puise son originalité dans l'observance de principes et d'interdictions prenant
eux-mêmes leurs sources dans des textes religieux fondamentaux datant de plusieurs siècles :
le Coran, la sounna. Ces prescriptions peuvent être présentées comme suit : l'interdiction du
prêt à intérêt (riba), le partage des pertes et des profits, l'interdiction de la spéculation (gharar)
et des jeux de hasard (qimar ou maysir), le paiement d'un impôt religieux (zakât), la supervision
de la banque islamique par un conseil religieux (sharia board) et le caractère éthique (halal)
des actifs, objets des investissements, avec, comme conséquence, l'interdiction d'investir dans
des secteurs illicites (haram).

Comme nous le verrons, le Coran n'interdit pas la rémunération de l'argent prêté, il prohibe
seulement le caractère fixe et prédéterminé du taux d'intérêt.

C'est pourquoi les opérations de financement ne peuvent comporter une rémunération fixée ex
ante. Seule la rentabilité de l'actif financé peut rémunérer l'argent placé.

Sur quoi se fondent les transactions financières ?

Les transactions financières doivent se fonder sur un actif tangible, l'asset backing, afin de
permettre le partage des pertes et des profits (PPP) que celui-ci génère. Le principe des 3P est
défini comme « un mécanisme financier qui lie le capital financier à l'industrie et au commerce
sans utiliser un intérêt »17. L'institution financière islamique va ainsi confier ses fonds à un
entrepreneur, et les bénéfices seront partagés selon une clé de répartition déterminée ex ante.

Par ailleurs, la loi coranique n'autorise pas la spéculation et l'aléa (gharar). Le gharar est la
vente d'actifs « dont l'existence et les caractéristiques ne sont pas certaines, étant donné le risque
qui accompagne cette probabilité et qui soumet la validité de la transaction à des conjectures

16 32
M. Galloux, Finance islamique et pouvoir politique, PUF, coll. Islamiques, 1997.
17
R. Khan Shahrukh, A Economic Analysis of a PLS Model for the Financial Sector, dans Pakistan Journal of
Applied Economics, vol. III, no 2, 1984.
»18 Le qimar et le maysir représentent toutes formes de contrat aléatoire, telles que la
spéculation, l'assurance traditionnelle et les produits dérivés.

Troisième pilier de l'islam, la zakât. Elle a plusieurs sens : à la fois purification (taharah),
croissance (namâ), bénédiction (barakah) et appréciation (madh) ; elle est un impôt religieux
servant d'instrument de redistribution et de justice sociale. C'est une proportion fixe collectée
dans le surplus de la richesse des musulmans et dans leurs revenus. Le taux d'imposition diffère
en fonction de la nature du bien imposable.

À côté des conseils d'administration classiques, les banques islamiques sont dotées de sharia
board, conseils de surveillance religieux et indépendants dont la mission est de garantir que les
produits financiers ne contreviennent pas aux principes coraniques. Ces comités se composent
d'économistes à la fois spécialistes en finance, en droit et en théologie. L'objet des
investissements doit porter sur des placements éthiques (halal). Sont ainsi prohibés les secteurs
portant notamment sur les discothèques, les casinos, l'élevage de porcs, l'armement ou la
pornographie. En outre, le ratio d'endettement de la société ne doit pas, communément, dépasser
33 %.

Section 2 : la finance islamique dans les banques de financement et d’investissement


La finance islamique se distingue du financement traditionnel non seulement par son approche
(§ 2) mais aussi par les instruments qu’elle propose dans le marché financier (§ 2).

Para 1 : L’approche de la finance islamique


Il convient de voir l’impact de la déréglementation opérée par finance islamique (A) avant de
voir ses règles de conformité.

A- L'impact de la déréglementation
À l'instar de la finance conventionnelle, la finance islamique a profité de la règle dite des 3D
(désintermédiation, déréglementation, décloisonnement). Comme l'indique un auteur, « la
désintermédiation bancaire a transformé les métiers de la finance et a favorisé les fusions entre
les secteurs de la banque et de l'assurance, recréant, "les conditions du monde de banquiers sans
banques" qui prévalaient durant l'âge d'or de l'islam », selon l'expression d'Ibrahim Warde19. Le

18 33
I. Karich, Le système financier islamique. De la religion à la banque, larcier, coll. Cahiers financiers, 2002, p.
44.
19
V. I. Chapellière, Éthique et finance en Islam, Koutoubia, Paris, 2009, p. 45.
contexte de libéralisation économique et de globalisation financière a donné une nouvelle
impulsion à la finance islamique.

Grâce au phénomène de déréglementation, de nouveaux produits financiers ont vu le jour, tels


ceux islamiques dénommés : soukouk. Selon le lexique Vernimmem le soukouk est un produit
obligataire islamique qui est à la finance islamique ce que les Asset Backet Securities (ABS)
sont à la finance conventionnelle. Il a une échéance fixée d'avance et est adossé à un actif
permettant de rémunérer le placement en contournant le principe de l'intérêt. Les soukouk sont
structurés de telle sorte que leurs détenteurs courent un risque de crédit et reçoivent une part de
profit et non un intérêt fixe et connu à l'avance comme dans un ABS. Les produits sous-jacents
des soukouk peuvent être représentés par des contrats tels l'ijara, la moucharaka ou
la moudaraba. En s'appuyant sur une enquête20 du Financial Times, Ibrahim Warde montre que
les soukouk peuvent être ordonnés de telle manière que l'on sépare le « principal » de l'
« intérêt » : « La finance islamique a su profiter de ce contexte de "déréglementation" pour
transformer ses pratiques et proposer une offre de produits diversifiés (…) et dans de nombreux
pays musulmans, les institutions islamiques sont les plus dynamiques et les plus innovantes »21.
La libéralisation des marchés financiers a permis en outre le développement d'importants
groupes tels qu'Al Baraka, Faysal Finans ou DMI : « Le "décloisonnement" des marchés a
favorisé l'essor d'une finance islamique mondialisée »22.

B- Le respect de règles de conformité


Tout d'abord, l'objet de l'activité de l'entreprise ne doit pas être contraire aux valeurs de l'islam.
En ce sens, les activités relatives à la production ou à la commercialisation de produits
alcoolisés, ou à base de porc, de nourriture non halal, de tabac, ainsi que celles qui concernent
des services financiers conventionnels (titres susceptibles de produire des intérêts ; produits
dérivés ; assurance conventionnelle), l'industrie des jeux de hasard, de la pornographie ne sont
pas éligibles à un financement islamique23.

À ces critères qualitatifs s'ajoutent d'autres exigences quant à la conformité de l'entreprise aux
normes et principes de la charia :

20
R. Khalaf, Dynamism is held back by state control, Financial Times, 11 avr. 2000. 34
21
I. Chapellière, op. cit., p. 261.
22
I. Chapellière, op. cit., p. 263.
23
Étude complète sur le sujet par Salim Chebli A., L'investissement sharia compliant et les entreprises françaises,
dans J.-P. Laramée [dir.], La finance islamique à la française. Un moteur pour l'économie. Une alternative éthique,
Secure Finance, 2008, p. 173-180).
 — l'entreprise ne doit pas être endettée de manière excessive (sur la base d'une pratique
de marché et d'une fatwa contemporaine émise par le sharia board du Dow Jones (Dow
Jones Islamic Market Filters), il est admis que le ratio dettes/fonds propres d'une société
ne peut excéder 33 %24;

 — l'actif de l'entreprise ne doit pas être constitué essentiellement de créances clients et


de trésorerie ;

 — l'intérêt généré par les placements de trésorerie ou par les ventes à crédit ne doit
représenter qu'une fraction infime des revenus de l'entreprise ;

 — les revenus illégaux doivent être reversés à un organisme communautaire de


bienfaisance.

Une fois la prise de participation opérée, certaines obligations devront être respectées :

 — chaque investisseur devra recevoir un traitement égalitaire, notamment en termes de


dividendes, de retour sur investissement, de prix de souscription, de remboursement du
prix de rachat et de droit de vote ;

 — en cas de cession des titres ou de liquidation de l'entreprise, il n'est pas possible de


privilégier une catégorie d'actionnaires (par exemple, les détenteurs d'actions de
préférence).

Para 2 : Les produits de la finance islamique


Nous verrons d’abord la notion de risque en finance islamique (A) avant d’aborder les différents
instruments qu’elle propose (B).

A- Les notions de risque


Dans les institutions financières islamiques, le risque financier de contrepartie ou solvabilité est
neutralisé grâce à la structure des contrats financiers tels, par exemple, le contrat
de mourabaha ou celui de moucharaka. La mourabaha est un contrat de vente par lequel un
établissement de crédit acquiert un actif auprès d'un fournisseur à la demande du client (donneur
d'ordre) en vue de le lui revendre, moyennant une marge bénéficiaire convenue d'avance. En
l'espèce, l'établissement financier est propriétaire des actifs et le reste jusqu'au paiement. Si le
débiteur n'honore pas ses engagements, la banque pourra céder les actifs à un tiers. Le contrat
de moudaraba se définit quant à lui comme « un contrat entre une institution financière et une

24
Herbert Smith, Guide de la finance islamique, 2009, p. 23 ; cf., aussi, http://www.djindexes.com. 35
entreprise, l'une agissant comme bailleur de fonds "commanditaire" et l'autre agissant comme
manager "commandité" , pour investir dans une activité ou une classe d'actif prédéterminée qui
octroie à chacun une part du résultat déterminée lors de l'investissement ». Dans ce type de
contrat, le risque est d'une part amoindri par les comptes de partage des profits et des pertes, et
d'autre part mutualisé par un système de double moudaraba permettant de faire supporter les
pertes éventuelles par les deux commandités : le client qui investit ses fonds à la banque sur un
compte de participation, et la banque qui investit les fonds des épargnants25

Le risque de taux pourrait être lui aussi évité : « Le risque de prix peut se décomposer en un
risque de variation des taux d'intérêt et de variation des taux de change. Le premier, qui pourrait
résulter de crédit à taux fixe financé à l'aide de dépôts à taux variable par exemple, n'existe pas
dans les banques islamiques, en l'absence supposée de taux d'intérêt fixé à l'avance. Le second
est supporté de la même façon que dans les banques conventionnelles, qui se garantissent de la
dépréciation et des dévaluations monétaires par le recours massif aux comptes libellés en
devises stables » (Chapellière I., op. cit., p. 241).

Corrélativement, il est intéressant de noter que la crise des subprimes aurait été moins violente
ou même inexistante dans un contexte financier islamique26

Comme nous l'avons vu brièvement, à titre liminaire, la finance islamique repose sur des
principes et interdictions spécifiques, étudiés en détails infra. D'aucuns estiment que ces
prescriptions n'auraient pas permis une telle dérive (La finance islamique n'aurait toutefois pas
permis à des millions de ménages américains d'accéder au marché de l'immobilier comme le
précise Anouar Hassoune, Vice-président, responsable du crédit et de la coordination
internationale pour la finance islamique au sein du cabinet Moody's, OummaTV.tv, émission
« l'Autre débat », 4 juin 2009). Pourquoi ?

Tout d'abord, le système de partage des profits et des pertes oblige l'établissement financier à
sélectionner des projets viables et, dès lors, à s'assurer de la solvabilité du débiteur et de sa
capacité de remboursement.

25
I. Chapellière, Éthique et finance en Islam, Koutoubia, Paris, 2009, p. 239. 36
26
Sur le sujet, cf. I. Warde, After the meltdown : new perspectives on islamic finance, Ninth Harvard University
Forum on Islamic Finance Harvard Law School- March 27-28, 2010 ; Professeur associé à la Fletcher School of
Law and Diplomacy [Medford, Massachusetts]. Auteur de Islamic Finance in the Global Economy, 2nd Ed.,
Edinburgh University Press 2010 ; cf., aussi, A. Harzi, Les banques islamiques plus résilientes que les banques
conventionnelles ?, Banque 2013, no 759, p. 76.
Ensuite, dans les opérations de moudaraba, la banque (rab-al-mal) en tant que bailleur de fonds
apporte l'ensemble des capitaux financiers, nécessaires au projet, à l'entrepreneur (moudarib)
qui propose, en contrepartie, son savoir-faire. La banque en tant que partie au projet redouble
d'intérêt quant à sa bonne gestion.

En outre, tout crédit doit être fondé sur un actif réel ce qui exclut les opérations de titrisation,
la vente de dette étant interdite par le Coran. Autrement dit, les banques qui ont accordé des
prêts, ne peuvent pas transférer le risque de crédit sous-jacent à des investisseurs tiers. Les
banques islamiques doivent supporter le risque attaché au prêt qu'elles accordent.

Enfin, la charia n'autorise pas les systèmes de vente à découvert, les opérations de couverture
par swap, les futuressont considérées comme gharar. On ne peut vendre un bien dont on n'est
pas propriétaire au moment de la vente.

B- Les instruments financiers


1- Le private equity

Le private equity ou capital investissement définit l'investissement dans des entreprises qui ne
sont pas cotées en Bourse27 : il s'agit d'un procédé de financement qui a trait aux capitaux
privés investis en equity (haut de bilan, fonds propres ou quasi-fonds propres). Les opérateurs
de private equity prennent des participations au capital de sociétés non cotées pour financer leur
démarrage, développement, redressement ou transmission.

2- Le financement en fonds propres

Le financement en fonds propres (de type moucharaka, moudaraba) est le plus conforme à
l'esprit du Coran et au droit musulman des affaires. Une des techniques de financement les plus
usitées par les banques islamiques est la moudaraba, contrat par lequel une banque islamique
avance la totalité du capital lors d'une association, alors que le client apporte ses compétences
commerciales en matière de gestion.

Il existe en outre une seconde structure contractuelle de financement permettant à une banque
islamique de prendre une participation au capital d'une société afin notamment de
l'accompagner dans son développement. La moucharaka définie par la directive de la banque
Al-Maghrib comme étant « tout contrat ayant pour objet la prise de participation par un
établissement de crédit, dans le capital d'une société existante ou en création en vue de réaliser

27
B. Jacquillat, Les 100 mots de la finance, Que sais-je ?, Paris, PUF, 2006, p. 71. 37
un profit » semble adaptée aux opérations de capital investissement. Les deux parties devront
toutefois participer aux pertes à hauteur de leur participation et aux profits selon un prorata
déterminé ex ante.

Il existe deux modèles de moucharaka, le premier, dénommé moucharaka tabita (fixe), oblige
la banque et son client à rester partenaires dans la société, jusqu'à l'expiration du contrat. Le
second, dit moucharaka moutanakissa (dégressive), permettra à l'établissement de crédit de se
désengager de cette société au fur et à mesure de son développement. Ces deux contrats ont fait
l'objet d'une analyse détaillée supra.

3- Les opérations de capital investissement

Les opérations de capital investissement peuvent être réalisées par achat de titres existants
auprès d'anciens actionnaires, par souscription de titres nouvellement émis lors d'une
augmentation de capital, et/ou par versement de fonds en compte courant d'associé rémunéré.

Ces financements en fonds propres ou quasi-fonds propres d'entreprises en création ou de


création récente présentent un certain nombre de risques pour les investisseurs islamiques. C'est
pourquoi ces derniers exigent – selon la règle que plus un investissement est risqué, plus la
rentabilité espérée doit être élevée – une rentabilité supérieure à celle qu'ils pourraient obtenir
à travers un placement sans risque (caisse d'épargne, bons du trésor, etc.).

À l'instar du système dit conventionnel, les institutions financières islamiques vont sélectionner
les entreprises désireuses d'ouvrir leur capital, en fonction de différents critères qui intéressent
la présentation de l'entreprise, le marché et la concurrence, les informations financières, la
stratégie et le business plan, etc. Ces études de faisabilité vont permettre aux investisseurs
potentiels de s'assurer de la viabilité financière du projet d'investissement. En l'espèce, ces
critères de sélection étant analogues à ceux qui président en financement conventionnel, il n'est
pas nécessaire de les reprendre. En revanche, pour faire entrer un investisseur islamique dans
leur capital, les entreprises doivent respecter un certain nombre de règles de conformité qu'il
convient de présenter

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