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Joseph Ratzinger,
A. Force et droit
Quel est le devoir essentiel de la politique ? On dit : la gestion de la
polis et bien d’autres réponses qui ne disent rien du comment de
cette gestion. Mais quand on regarde de plus près, avec l’expérience
du Bénin, le devoir de la politique consiste à placer la force sous le
contrôle du droit, et à régler ainsi son usage sensé. Non pas le droit
du plus fort, mais la force du droit doit prévaloir. IL S’AGIT DONC DE
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nous l’a appris ironiquement, quand il dit : le plus fort n’est jamais
assez fort pour toujours être le maître s’il ne transforme sa force en
droit et l’obéissance en devoir. Il ne s’agit pas ici de définir l’essence
de la force, mais regarder les défis nés des nouvelles formes qu’a
prises aujourd’hui la force. Aujourd’hui, nous avons moins peur des
grandes guerres que du terrorisme au quotidien, et qui est à notre
porte, capable de frapper efficacement partout. Et nous le voyons
aussi dans la jeune histoire de notre démocratie, nous n’avons pas
besoin d’une grande guerre pour nous rendre la vie invivable. Les
forces anonymes de la terreur qui peuvent sévir partout sont assez
puissantes pour opprimer tous les hommes jusque dans leur vie
quotidienne ; surgit ainsi le spectre d’éléments criminels capables
d’accéder aux grands potentiels de destruction pour livrer nos pays
au chaos sans toucher à l’ordre politique. Ainsi la question du droit et
de l’éthos s’est déplacée du fait même : à quelles sources puise le
terrorisme ? le problème fondamental que l’on n’a pas assez
discerné, c’est que le terrorisme lui-même se donne des légitimations
morales. Il se présente comme la réponse des peuples impuissants et
opprimés à la superbe des puissants, comme la punition méritée de
leurs prétentions, de leur autocélébration et de leur barbarie qui
offense Dieu.
Quand le terrorisme se nourrit du fanatisme religieux, la religion est-
elle une force qui permet d’être heureux et d’être sauvé, ou n’est-ce
pas plutôt une force archaïque et dangereuse qui édifie de faux
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sentence est donnée ipso facto par les vaudous… dans le monde
indien, cela correspondrait à la notion de dharma, à la causalité
interne de l’être ; dans la tradition chinoise, c’est l’idée des ordres
célestes,
Conclusion
Je me résume : qui dit démocratie dit valeurs humaines. Les valeurs
humaines sont communiquées par la raison, le bon sens induisant
une bonne éducation en famille ou en société, et par la religion. Or, il
peut avoir des pathologies de la raison et de la religion qui mettent
gravement en difficulté la paix et le processus démocratique lui-
même.
1. Les pathologies des religions (toutes confondues) rendent
nécessaire de considérer la lumière divine de la raison comme
une sorte d’organe de contrôle que la religion doit accepter
comme un organe permanent de purification et de régulation –
une vue qui était du reste celle des Pères de l’Église.
2. Les pathologies de la raison existent aussi et l’humanité semble
en être moins consciente. Il existe une violence de la raison qui
n’est pas moins dangereuse, qui est même, en raison de son
efficience potentielle, plus menaçante encore : la bombe
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